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Techniques séparatives à membranes

Considérations théoriques
par Alain MAUREL
Ingénieur ENSIGC (École Nationale Supérieure d’Ingénieurs de Génie Chimique
de Toulouse)
Licencié ès Sciences
Ingénieur au Centre d’Études Nucléaires de Cadarache

1. Présentation générale............................................................................. J 2 790 - 2


1.1 Définitions .................................................................................................... — 2
1.2 Osmose inverse ........................................................................................... — 2
1.3 Nanofiltration ............................................................................................... — 2
1.4 Ultrafiltration................................................................................................ — 3
1.5 Microfiltration tangentielle ......................................................................... — 3
1.6 Écoulement tangentiel. Taux de conversion ............................................. — 3
1.7 Définition de la sélectivité........................................................................... — 3
2. Pression osmotique................................................................................. — 4
2.1 Définitions .................................................................................................... — 4
2.2 Cas général. Loi de Van’t Hoff..................................................................... — 4
2.3 Pression osmotique des jus de fruits......................................................... — 5
2.4 Pression osmotique des électrolytes ......................................................... — 6
2.5 Pression osmotique et abaissement de la température de congélation. — 6
2.6 Pression osmotique des polymères........................................................... — 6
2.7 Importance de la pression osmotique dans les différentes techniques
séparatives à membranes........................................................................... — 6
3. Mécanismes de transfert ....................................................................... — 7
3.1 Mécanisme de type diffusionnel ................................................................ — 7
3.2 Mécanisme du type capillaire..................................................................... — 10
3.3 Modèle de transfert de type phénoménologique ou « boîte noire » ...... — 12
4. Phénomène de polarisation .................................................................. — 12
4.1 Nature du phénomène ................................................................................ — 12
4.2 Modélisation de la polarisation : théorie du film ...................................... — 13
4.3 Coefficient K de transfert de matière ......................................................... — 14
4.4 Modèle du gel en ultrafiltration.................................................................. — 14
4.5 Mesures de la polarisation de concentration ............................................ — 16
5. Phénomènes du colmatage ................................................................... — 17
5.1 Définition du colmatage.............................................................................. — 17
5.2 Mécanismes du colmatage ......................................................................... — 17
6. Performances et sélectivité .................................................................. — 18
6.1 Densité de flux volumique ou débit spécifique......................................... — 18
6.2 Sélectivité ..................................................................................................... — 18
6.3 Influence de la température........................................................................ — 19
6 - 1993

7. Conclusion. Comparaison avec les techniques concurrentes .... — 20


Notations et symboles .................................................................................... — 22
Références bibliographiques ......................................................................... — 23
J 2 790

smose inverse, nanofiltration, ultrafiltration, microfiltration tangentielle


O peuvent être définies comme des procédés de séparation en phase
liquide par perméation à travers des membranes permsélectives sous l’action
d’un gradient de pression.

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1. Présentation générale 1.3 Nanofiltration

1.1 Définitions Nanofiltration est le terme utilisé pour désigner une nouvelle
technique séparative à membranes se situant entre l’osmose inverse
Rappelons qu’une membrane permsélective est une barrière qui et l’ultrafiltration. Elle permet la séparation de composants ayant une
permet certains transferts de matière entre deux milieux qu’elle taille en solution voisine de celle du nanomètre (soit 10 Å) d’où son
sépare et qui en interdit d’autres ou, de façon moins restrictive, qui nom.
en favorise certains par rapport à d’autres. Les sels ionisés monovalents et les composés organiques non
On peut, dans une première approche, considérer ces procédés ionisés de masse molaire inférieure à environ 300 g /mol ne sont
comme des procédés de filtration en milieu liquide qui utilisent pas retenus par ce type de membrane. Les sels ionisés multiva-
des membranes dont les diamètres de pores diminuent progressi- lents (calcium, magnésium, aluminium, sulfates...) et les composés
vement quand on passe de la microfiltration à l’ultrafiltration puis organiques non ionisés de masse molaire supérieure à environ
à la nanofiltration et enfin à l’osmose inverse (figure 1). 300 g/mol sont, par contre, fortement retenus.
Il faut toutefois noter que, dans le cas de l’osmose inverse, la
membrane utilisée n’est pas une membrane microporeuse mais Remarque : dans le cas des macromolécules, l’unité de masse
une membrane dense sans porosité apparente et dont la sélectivité molaire que l’on utilise est le dalton : 1 Da = 1 g/mol.
résulte d’un mécanisme de solubilisation-diffusion.
Les mécanismes de transfert sont intermédiaires entre ceux de
l’osmose inverse et ceux de l’ultrafiltration.
1.2 Osmose inverse Les applications possibles sont nombreuses :
— déminéralisation sélective (adoucissement des eaux) ;
— concentration de composés organiques de faible masse
L’osmose inverse utilise des membranes denses qui laissent
molaire (antibiotiques).
passer le solvant (eau dans la plupart des cas) et arrêtent tous les
sels. Cette technique est utilisée :
— pour la déminéralisation des eaux (dessalement de l’eau de
mer et des eaux saumâtres, production d’eau ultrapure) ;
— pour la concentration de solutions (concentration de jus de
fruits par exemple) ;
(article Osmose inverse et ultrafiltration. Technologie et applica-
tions [J 2 796] dans ce traité).

Figure 1 – Situation des techniques


de séparation par membranes
en fonction de la taille des particules retenues

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1.4 Ultrafiltration

Cette technique utilise des membranes microporeuses dont les


diamètres de pores sont compris entre 1 et 100 nm. De telles mem-
branes laissent passer les petites molécules (eau, sels) et arrêtent
les molécules de masse molaire élevée (polymères, protéines, col-
loïdes). Les applications (article Osmose inverse et ultrafiltration.
Technologie et applications [J 2 796]) sont multiples :
— concentration de solutions macromoléculaires (protéines, poly-
saccharides, polymères variés) ;
— élimination de macrosolutés présents dans les effluents ou
dans l’eau à usage domestique, industriel (électronique) ou médical.

1.5 Microfiltration tangentielle

La microfiltration tangentielle peut être définie comme un procédé


de séparation solide-liquide qui met en œuvre des membranes dont
les diamètres de pores sont compris entre 0,1 et 10 µm. Ce procédé
permet donc la rétention des particules en suspension, des bactéries
et indirectement des colloïdes et de certains ions après fixation de
ces derniers sur des plus grosses particules obtenues par Figure 2 – Comparaison entre filtration classique (ou frontale)
complexation, précipitation ou floculation. et filtration tangentielle
Bien que, du point de vue théorique, la différence entre ultra-
filtration et microfiltration tangentielle soit très nette (l’ultrafiltration
fonctionnant en phase liquide homogène et la microfiltration ayant Le flux valorisé est, selon le cas, le perméat (déminéralisation des
pour objectif une séparation solide-liquide), du point de vue eaux) ou le concentrat (extraction des protéines du lactosérum ;
technologique, les deux techniques peuvent se recouper. Ainsi, pour concentration de jus de fruits...).
minimiser les phénomènes de colmatage et éviter que des particules
solides pénètrent dans les pores des membranes, on a souvent L’objectif de l’écoulement tangentiel est d’éviter, autant que faire
intérêt à utiliser des membranes d’ultrafiltration pour effectuer une se peut, l’accumulation continue sur la membrane des espèces
opération de microfiltration. Inversement, une membrane de micro- (particules, molécules, ions) retenues par cette dernière. Le rapport
filtration peut devenir une membrane d’ultrafiltration (1 à 100 nm) entre le débit de circulation de la solution à filtrer et le débit de
ou même d’osmose inverse (< 1 nm) par suite de la formation en perméat peut être compris entre 100 et 500 dans le cas d’un tube
cours de fonctionnement d’une couche de gel à porosité très fine d’ultrafiltration standard de 6 mm de diamètre intérieur et
(membrane dynamique). de 1 200 mm de longueur (tubes Carbosep ® de Tech-Sep par
exemple).

1.6 Écoulement tangentiel. 1.7 Définition de la sélectivité


Taux de conversion
La sélectivité d’une membrane est en général définie par le taux
de rejet (appelé aussi taux de rétention) de l’espèce (sel, macromo-
Les techniques séparatives à membranes sont des procédés lécule, particule) que la membrane est censée retenir :
physiques de séparation qui utilisent les propriétés de tamisage
moléculaire d’une membrane poreuse balayée par le liquide C0 – Cp Cp
contenant les constituants à séparer. TR = --------------------- = 1 – -------- (2)
C0 C0
Lors d’une filtration classique, la suspension à traiter est amenée
perpendiculairement au média filtrant : une accumulation de avec C 0 concentration de l’espèce à retenir dans la solution,
matières se produit formant une couche qui diminue la porosité et, C p concentration de la même espèce dans le perméat.
par là même, le débit de filtration (figure 2).
Dans le cas des techniques à membranes, l’écoulement du fluide ■ Dans le cas de l’osmose inverse, le soluté de référence est souvent
à filtrer est continu et tangentiel comme cela est explicité sur la le chlorure de sodium (NaCl), compte tenu du fait que la déminéra-
figure 2 ; la solution à traiter (débit Q 0 ) se divise au niveau de la lisation des eaux est l’application la plus importante. On trouve ainsi
membrane en deux parties de concentrations différentes : couramment des membranes d’osmose inverse qui ont été dévelop-
pées soit pour le dessalement de l’eau de mer et qui ont un taux de
— une partie qui passe à travers la membrane ou perméat rejet au chlorure de sodium de 99 % environ, soit pour le dessale-
(débit Q p ) ; ment des eaux saumâtres et qui ont un taux de rejet au NaCl de 96 %
— une partie qui ne passe pas à travers la membrane, appelée et cela dans des conditions opératoires déterminées (pression, tem-
concentrat ou rétentat (débit Q c ), et qui contient les molécules ou pérature, taux de conversion...).
particules retenues par la membrane.
La fraction de débit du liquide qui traverse la membrane est ■ Dans le cas de l’ultrafiltration, l’efficacité de la membrane est en
appelée taux de conversion de l’opération de séparation : général caractérisée par le seuil de coupure (cut-off en anglais), qui
peut être défini comme étant la masse molaire M (g /mol)
Qp correspondant à une rétention pratiquement totale (90 % le plus
Y = ---------- (1) souvent) d’une macromolécule déterminée (figure 3). Cette notion
Q0
est spécifique à l’ultrafiltration ; elle n’a pas de sens en osmose

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Figure 3 – Caractérisation de la sélectivité


d’une membrane d’ultrafiltration

inverse dans la mesure où des entités chimiques de même taille


peuvent avoir, dans les mêmes conditions opératoires, des taux de
rejet très différents. Elle n’a pas non plus de sens en microfiltration
malgré une certaine analogie sur le plan des mécanismes, les
espèces retenues (micro-organismes, boues) ne pouvant être défi-
nies ni par une masse molaire ni par une taille en dehors d’un dia-
mètre apparent ou équivalent.
■ Dans le cas de la microfiltration tangentielle, et compte tenu de
la remarque ci-dessus, la sélectivité de la membrane est en général
caractérisée par son diamètre de pore (0,45 µm par exemple).

2. Pression osmotique Figure 4 – Principe de l’osmose inverse

2.1 Définitions
avec µ 01 (J · mol –1) potentiel chimique de l’eau dans la solution
Rappelons que l’on appelle osmose le transfert de solvant (eau, diluée,
dans la plupart des cas) à travers une membrane sous l’action d’un R constante molaire des gaz (R = 8,314
gradient de concentration. J · mol –1 · K –1 ),
Considérons un système à deux compartiments séparés par une T (K) température thermodynamique,
membrane permsélective et contenant deux solutions de
concentrations différentes (figure 4). Le phénomène d’osmose va se a1 activité du solvant (eau) qui décroît quand la
traduire par un flux d’eau dirigé de la solution diluée vers la solution concentration en soluté augmente,
concentrée. Si l’on essaie d’empêcher ce flux d’eau en appliquant P (Pa) pression qui s’exerce sur la solution,
une pression sur la solution concentrée, la quantité d’eau transférée V1 (m3 /mol) volume molaire du solvant.
par osmose va diminuer. Il arrivera un moment où la pression
appliquée sera telle que le flux d’eau s’annulera. Si, pour simplifier, À l’équilibre, le potentiel chimique de l’eau dans la solution
nous supposons que la solution diluée est de l’eau pure, cette diluée est le même que dans la solution concentrée :
pression d’équilibre est appelée pression osmotique. µ 1 = µ 01
Une augmentation de la pression au-delà de la pression osmotique
soit RT ln a1 + Π V1 = 0
va se traduire par un flux d’eau dirigé en sens inverse du flux osmo-
tique, c’est-à-dire de la solution concentrée vers la solution diluée : d’où l’expression de la pression osmotique :
c’est le phénomène d’osmose inverse.
Π = – (RT/V1 ) ln a1 (3)
Cette relation a été obtenue en supposant que le solvant est
2.2 Cas général. Loi de Van’t Hoff incompressible.
L’activité peut être déterminée à partir des mesures de pressions
Nota : le lecteur pourra se reporter à la référence bibliographique [1]. partielles (loi de Raoult) :
Dans la mesure où il y a transfert d’eau de la solution diluée vers
la solution concentrée, il faut admettre que le potentiel chimique a 1 = p 1 ⁄ p*1 (4)
de l’eau est plus grand dans la solution diluée que dans la solution
concentrée. Le potentiel chimique µ 1 de l’eau dans la solution avec p1 pression de vapeur de la solution,
concentrée est donnée par la relation : p*1 pression de vapeur du solvant pur,
µ 1 = µ 01 + RT ln a 1 + (P – 1) V1 RT
d’où Π = ---------- ln (p*1 /p 1) (5)
V1

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Cette équation permet de calculer la pression osmotique d’une 2.3 Pression osmotique des jus de fruits
solution avec une bonne précision. Ainsi peut-on voir dans le
tableau 1 que, pour une solution de saccharose, l’écart avec les L’osmose inverse est de plus en plus utilisée pour la concentration
valeurs expérimentales ne dépasse pas 3 % même à 20 MPa. (0) de jus de fruits car, fonctionnant à température ambiante, elle
préserve les qualités organoleptiques du produit. Toutefois, la
concentration est limitée par la pression osmotique qui peut
Tableau 1 – Pression osmotique (en 10 5 Pa ou bar) atteindre des valeurs élevées. Les principaux constituants qui
de solutions aqueuses de saccharose à 30 oC contribuent à la pression osmotique des jus de fruits sont les sucres
(hexoses et les disaccharides) ainsi que les acides organiques.
 En première approximation on peut estimer la pression osmoti-
que des jus de fruits par la relation empirique de Thijssen (1970)
Molalité Calculée [2] :
Calculée
(mol/ kg de solvant) par la loi Valeurs
par la loi
des pressions expéri- Π = 133,75 C B /(100 – C B ) (11)
de Van’t Hoff
partielles mentales avec Π pression osmotique en 105
Pa ou bar,
équation (10)
équation (5)
C B (%) teneur en masse de matière sèche (ou degré Brix).
0,991 20,6 27,1 27,6
1,646 30,7 47,9 48,1 Le degré Brix utilisé dans l’industrie agroalimentaire repré-
2,366 39,5 73,5 73,4 sente la teneur en sucre et, dans le cas d’un jus sucré, peut être
3,263 48,4 109,0 107,3 assimilé à la teneur en matière sèche.
4,108 54,9 145,2 145,9
5,332 62,3 201,6 207,0
La figure 5 ainsi que le tableau 2 donnent quelques valeurs
D’après [1]. expérimentales comparées aux valeurs calculées par la relation
précédente. (0)

Dans le cas de solutions diluées, l’activité du solvant a1 peut être


assimilée à sa fraction molaire Z1 , d’où : Tableau 2 – Pression osmotique de divers jus de fruits
RT RT
Π ≈ – ---------- ln Z 1 = – ---------- ln (1 – Z 2 ) (6) Pression osmotique
V1 V1
Teneur en (en bar ou 105 Pa)
où Z 2 est la fraction molaire du soluté. matière sèche
(% en masse expéri- calculée
La solution étant diluée, on peut écrire : ou degré Brix) mentale relation
(11)
ln (1 – Z 2 ) ≈– Z 2
1 2
+ ----- Z 2 + ...
2  (7)
Jus de betterave à
sucre .......................... 20 34,5 33,4
Si l’on néglige les puissances égale ou supérieures à 2, on
Jus de tomate ........... 33 69,0 65,9
obtient :
Jus de citron.............. 10 14,8 14,8
RT RT N 2 Jus de citron.............. 34 69,0 68,9
Π ≈ ---------- Z 2 ≈ ---------- --------- (8)
V1 V1 N1 Jus de citron.............. 45 103,5 109,4
Jus de canne à sucre 44 69,0 105,1
N 2 et N1 représentant respectivement le nombre de moles de
D’après [3].
soluté et de solvant.
Le terme N1 V1 qui représente le volume du solvant peut être
assimilé au volume de la solution V. La concentration molaire C du
soluté s’exprime par la formule :
C = N 2 /V (9)
On déduit de la relation (8) :
Π = CRT (10)
Cette loi est connue sous le nom de la loi de Van’t Hoff [1] et
peut être comparée à la loi des gaz parfaits.
Il est important de noter que cette loi n’est valable que pour des
solutions diluées, c’est-à-dire pour de faibles pressions osmotiques.
Application numérique
Calcul de la pression osmotique à 17 oC d’une solution aqueuse
contenant 1,75 kg de saccharose (C12H22O11) pour 150 dm3 de solu-
tion.
Masse molaire du saccharose : 0,342 kg/mol, d’où :
1,75 : 0,342
C = -------------------------------- = 34,11 mol/m 3 Figure 5 – Variation de la pression osmotique de solutions
0,150
de jus de fruits en fonction de la teneur en matière sèche
Π = CRT = 34,11 × 8,314 × 290 = 0,82 · 105 Pa

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2.4 Pression osmotique des électrolytes


Le raisonnement fait jusqu’à présent a ignoré les caractéristiques
de soluté et, en particulier, a implicitement supposé qu’il n’y avait
qu’une seule espèce. En réalité, si le soluté est dissocié en i ions
de nature différente, la pression osmotique sera i fois plus élevée :

Π ≈ iCRT
(12)
loi de Van′t Hoff
En fait, le facteur multiplicatif est compris entre 1 et i ; il tend
vers i lorsque la concentration tend vers zéro. Ce phénomène peut
s’expliquer par le fait que le potentiel chimique des ions est réduit
par des interactions électrostatiques (théorie de Debye-Hückel). La
figure 6 donne les pressions osmotiques de différentes solutions.

2.5 Pression osmotique et abaissement


de la température de congélation
La pression osmotique étant une propriété qui mesure l’activité
du solvant en solution, elle peut être reliée thermodynamiquement
à d’autres propriétés qui dépendent aussi de l’activité du solvant,
par exemple l’abaissement de la température de congélation (θ ).
On démontre [4] que l’on a :
θ ∆H f T
Π = -------------------------- (13)
T c T *c V 1

avec θ = T *c – T c ,
T *c ( K ) température de congélation du solvant pur, Figure 6 – Pressions osmotiques en fonction de la concentration
molaire en soluté, à 20 oC [relation (12)]
Tc (K) température de congélation de la solution,
∆ H f (J · mol –1 ) enthalpie de fusion du solvant,
V1 (m3 · mol –1 ) volume molaire du solvant.
2.7 Importance de la pression osmotique
Application numérique : calcul de la pression osmotique de l’eau dans les différentes techniques
de mer à 25 oC
T = 298 K séparatives à membranes
θ = T *c – T c = 273 – 271,1 = 1,9 K
∆ H f = 6 009,9 J · mol –1 = 6 009,9 · m3 · Pa · mol –1 La pression osmotique joue un rôle important en osmose
V 1 = 18 · 10–6 m3 · mol –1 inverse et en nanofiltration, plus faible en ultrafiltration alors
qu’elle n’intervient pas en microfiltration.
1,9 × 6 009,9 × 298
Π = -------------------------------------------------------------- ≈ 25 ⋅ 10 5 Pa
271,1 × 273 × 18 ⋅ 10 –6 Exemple
Pour situer les ordres de grandeur, calculons les pressions osmoti-
ques à 25 oC de solutions aqueuses contenant respectivement :
• 3 % (en masse) de NaCl (de masse moléculaire M = 58,45) ;
2.6 Pression osmotique des polymères • 3 % (en masse) d’albumine (M = 65 000) ;
• 30 kg/m3 de particules solides d’environ 1 ng (10 –9 g) ;
Dans le cas des polymères en solution, la loi de Van’t Hoff doit • NaCl :
être modifiée. Pour des solutions diluées (jusqu’à quelques
pour-cent en masse de soluté), la pression osmotique peut être 30 ⋅ 10 3
Π = 2 × ---------------------- × 8,314 × 298,2 = 2,54 ⋅ 10 6 Pa = 25,4 bar
déterminée [5] par la relation : 58,45
Π = CRT [1 + Γ2C + Γ3C 2 + ...] (14) • Albumine :
Les paramètres Γ2 , Γ3 ... sont appelés second coefficient du viriel 30 ⋅ 10 3
(en mol –1 · m3 ), troisième coefficient du viriel, et ainsi de suite, Π = ---------------------- × 8,314 × 298,2 = 1,14 ⋅ 10 3 Pa = 0,01 bar
65 000
avec C en mol · m–3 .
Il est possible, en faisant une certaine approximation, d’exprimer • Suspension :
le troisième coefficient du viriel en fonction du second, d’où :
30 ⋅ 10 12
Π = -----------------------------
- × 8,314 × 298,2 = 1,23 ⋅ 10 –7 Pa ≈ 1,23 ⋅ 10 –12 bar
Γ2 2 6,02 ⋅ 10 23

Π = CRT 1 + -------- C
2  (15)

D’une manière générale, les pressions osmotiques des solutions


de polymères sont faibles comme l’indique la figure 7.

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3.1.1 Flux de solvant et de soluté

Le flux Ji (kg · m–2 · s–1 ) de chaque espèce i est déterminé [4] par
une relation de la forme :

Di C i ∂ µ i
 
Di Ci
J i = – --------------- grad µ i = – ---------------- ----------- grad C i + V i grad P (16)
RT RT ∂ Ci

avec Di (m 2 · s–1 ) coefficient de diffusion du constituant i


dans la membrane,
C i (kg · m–3 ) sa concentration moyenne dans la mem-
brane,
µ i (J · mol –1) son potentiel chimique,
Vi (m3 · mol –1) son volume molaire partiel,
P (Pa) pression appliquée.
Le surlignage sur D i et C i correspond à la valeur du paramètre
dans la membrane (par opposition à la valeur du même paramètre
dans la solution).
Nous nous placerons, pour simplifier, dans le cas d’un seul
soluté.
Donnons l’indice 1 au solvant (eau, par exemple) et l’indice 2 au
soluté.
L’équation précédente peut être intégrée en supposant que la dif-
férence de concentration en eau à travers la membrane est faible :

D1 C 1 V 1
J 1 = – ---------------------------- ( ∆ P – ∆ Π ) (17)
RT z
avec z (m) épaisseur effective de la membrane,
∆ P (Pa) différence de pression de part et d’autre de la mem-
brane,
∆ Π (Pa) différence de pression osmotique de part et d’autre
Figure 7 – Pressions osmotiques de différents polymères en solution de la membrane.
Les principales hypothèses faites pour obtenir l’équation précé-
dente sont que le coefficient de diffusion est indépendant de la
concentration et que le propriétés de la membrane sont indépen-
3. Mécanismes de transfert dantes de la pression. Nous verrons que ces hypothèses ne sont pas
rigoureuses.
Plusieurs théories ont été avancées pour décrire les transferts de Dans le cas de membranes très sélectives, le terme Vi grad P de
matière à travers les membranes semi-perméables et expliquer le l’équation (16) est négligeable devant le terme (∂ µ i / ∂ Ci ) grad C i et
mécanisme de la sélectivité des membranes. Nous donnons l’on obtient pour le flux de soluté :
ci-après seulement les modèles les plus connus :
— le modèle de type « solubilisation-diffusion » qui s’applique D2 D2H
J 2 = – ----------- ∆ C 2 = – ---------------- ∆ C 2 (18)
relativement bien aux membranes d’osmose inverse ; z z
— le modèle basé sur la notion de « capillaires » qui, en fonction
de leurs dimensions, arrêtent ou laissent passer certaines molécules avec J 2 (kg · m–2 · s–1 ) flux de soluté à travers la membrane,
ou particules ; ce modèle s’applique relativement bien aux mem- D 2 (m2 · s–1) coefficient de diffusion du soluté dans la
branes de microfiltration et, avec certaines réserves, aux membranes membrane,
d’ultrafiltration ; ∆ C 2 (kg · m–3 ) différence de concentration du soluté
— le modèle de type phénoménologique ou « boîte noire » de dans la membrane,
Kedem et Katchalsky [6], qui est très général et s’applique aussi
bien à l’osmose inverse qui à l’ultrafiltration. ∆C 2 (kg · m–3 ) différence de concentration du soluté dans
la solution, de part et d’autre de la mem-
Notons que ces modèles ont pour but d’expliquer d’une manière brane,
relativement simple des mécanismes de transfert qui sont en général
très complexes. H = ∆ C 2 ⁄ ∆C 2 coefficient de distribution du soluté entre
la solution et la membrane.
Si aucune des propriétés de la membrane ne dépend de la pres-
3.1 Mécanisme de type diffusionnel sion ou de la concentration des solutions, le terme
– D 1 C1 V 1 / RT z peut être considéré comme une constante de la
Ce modèle consiste à considérer que les transferts de solvant et membrane, que nous appellerons A ; de même le terme – D 2 H / z
de soluté se font par solubilisation-diffusion : toutes les espèces peut être considéré comme une constante relative au transfert de
moléculaires (soluté et solvant) se dissolvent dans la membrane et soluté, que nous appellerons B .
diffusent à l’intérieur de celle-ci comme dans un solide ou un
liquide sous l’action d’un gradient de concentration et de pression.
C’est notamment le cas de l’osmose inverse.

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Ces constantes caractérisent les transferts par unité de surface 3.1.2 Influence de la pression sur le taux de rejet
de membrane :
•A: perméabilité de la membrane au solvant C 0 (kg · m–3 ) étant la concentration du soluté dans la solution qui
(en kg · s–1 · Pa–1 · m–2) ; arrive sur la membrane et C p (kg · m–3 ) la concentration du soluté
• B : perméabilité de la membrane au soluté (en m · s–1). dans le perméat qui a traversé la membrane, l’équation (18) peut
Quand on parle de perméabilité sans autre précision, il s’agit s’écrire :
toujours de la perméabilité au solvant A . HD2
Les relations précédentes peuvent alors s’écrire : J 2 = – ---------------- ( C 0 – C p ) (21)
z
J1 = A (∆ P – ∆ Π ) (19) Rappelons que le taux de rejet d’une membrane est défini par la
J2 = B ∆C 2 (20) fraction de soluté présent dans la solution qui est retenue par la
membrane :
C0 – Cp Cp
Remarque importante TR = --------------------- = 1 – -------- (22)
C0 C0
Compte tenu que le solvant est, dans la plupart des cas, de
l’eau, on a donc : Pour des membranes hautement sélectives, c’est-à-dire où l’on a
A (kg · s–1 · Pa–1 · m–2 ) = A (L · s–1 · Pa–1 · m–2) C p C 0 , les équations précédentes peuvent être combinées pour
déterminer le taux de rejet de la membrane TR.
En pratique, la perméabilité A au solvant est souvent donnée en
m · s–1 · bar –1 ou en L · h–1 · m –2 · bar –1 (le plus couramment).
Autre conséquence : J1 a la même valeur en kg · m–2 · s–1 ou
en L · m–2 · s–1 [équation (23)].

Les membranes actuelles ont une perméabilité au solvant


comprise entre :
1,5 · 10–7 m · s–1 · bar –1 (acétate de cellulose)
et 3,5 · 10–7 m · s–1 · bar –1 (membranes composites)
(tableau 3 et figure 8).
La perméabilité au soluté (B ) se situe entre 10 –8 et 10 –6 m · s –1
(ordre de grandeur).
Application numérique
Calcul de la perméabilité au solvant d’une membrane en acétate de
cellulose avec les données ci-après :

D1 C 1 ≈ 0,25 · 10 –7 kg · m–1 · s–1


V1 = 18 · 10 –6 m3 · mol –1
R = 8,314 J · mol –1 · K –1
T = 298 K
z = 0,2 × 10 –6 m
A = D 1 C 1 V 1 /(RT z ) = 0,9 · 10 –9 kg · s –1 · Pa–1 · m –2
= 0,32 L · h–1 · m–2 · bar –1 Figure 8 – Membranes d’osmose inverse : ordre de grandeur
des perméabilités A au solvant et B au soluté
Si la pression efficace ∆P – ∆ Π est de 40 bar, le débit à travers la
membrane sera de 12,8 L · h –1 · m–2 .

(0)

Tableau 3 – Valeurs des perméabilités A au solvant et B au soluté de différentes membranes


d’osmose inverse
TR J1 A B
Type de membrane Références (1) Fournisseur Conditions
(%) (L · h–1 · m–2 ) (m · s–1 · bar –1) (L · h –1 · m–2 · bar –1) (m · s–1)

Polyamide aromatique Fibres creuses B 10 Du Pont 98,5 1,67 56 bar ; 3,5 % NaCl ; 35 oC 1,66 · 10 –8 0,060 7,05 · 10 –9
Polyamide aromatique Fibres creuses B 9 Du Pont 95 2,08 28 bar ; 0,15% NaCl ; 35 oC 2,16 · 10 –8 0,078 3,08 · 10 –8
Acétate de cellulose Module plan DDS Filtration < 99 16,7 40 bar ; 0,1 % NaCl ; 30 oC 1,44 · 10 –7 0,52 4,68 · 10 –7
Acétate de cellulose Module spirale Envirogenics 98 41,7 42 bar ; 0,2 % NaCl ; 25 oC 2,86 · 10 –7 1,03 2,36 · 10 –7
Composite FT 30
Module spirale Filmtec 99,3 34 56 bar ; 3,5 % NaCl ; 25 oC 3,31 · 10 –7 1,19 3,34 · 10 –7
Composite NTR 7197
Module spirale Nitto 93 34,4 56 bar ; 3,5 % NaCl ; 25 oC 3,58 · 10 –7 1,29 4,74 · 10 –7
(1) Se reporter à l’article Osmose inverse et ultrafiltration. Technologie et applications [J 2 796] et sa fiche documentaire [Doc. J 2 798].

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Le principe de conservation de masse nous permet d’écrire :


Flux de sel = Flux de solvant × concentration
J2 = J1 Cp (23)
avec J 2 en kg · m–2 · s–1 et J1 en m · s–1 ,
A (∆ P – ∆ Π )
d’où TR = ------------------------------------------------- (24)
A (∆ P – ∆ Π ) + B
avec A en m · s–1 · Pa–1 et B en m · s–1 .
Comme on le voit par les équations (19) et (20), pour une mem-
brane ayant un mécanisme de transfert de type diffusionnel, le flux
de solvant est directement proportionnel à la pression efficace
(∆ P – ∆ Π ) tandis que le flux de soluté en est indépendant. Cela
conduit à l’équation (24) et au résultat assez surprenant que le taux
de rejet d’une membrane augmente lorsque la pression efficace aug-
mente et tend vers 1 lorsque la pression efficace tend vers l’infini.
En fait, l’expérience montre que cela n’est pas tout à fait exact.
En effet, il y a en général couplage des flux de solvant et de soluté,
ce qui veut dire que, lorsque la pression augmente, le transfert de
soluté augmente aussi, comme le montre la figure 9.
Il en résulte que le taux de rejet ne tend pas vers 1 aux pressions
élevées, mais plutôt vers une valeur asymptotique inférieure à
l’unité (figure 10).

3.1.3 Influence de la pression sur le flux de solvant

La relation (17) indique que le flux de solvant varie linéairement


en fonction de la pression efficace. En fait, ce n’est pas absolument
vrai à cause de deux phénomènes :
— aux pressions élevées, le compactage de la membrane, qui se
traduit par une diminution de la perméabilité A comme le montre
la figure 9 ;
— le phénomène de polarisation, étudié dans le paragraphe 4.

3.1.4 Sélectivité des membranes d’osmose inverse

La sélectivité d’une membrane d’osmose inverse dépend essen-


tiellement de sa nature chimique. En effet, seules les substances
solubles dans la membrane sont susceptibles de la traverser.
En premier lieu, la membrane doit avoir une grande affinité pour
le solvant et, en particulier, être très hydrophile si l’on veut extraire
l’eau d’une solution. Selon la théorie de Gibbs sur les phénomènes
d’adsorption (article Adsorption [J 2 730] dans ce traité), il va se Figure 9 – Membranes d’osmose inverse : influence de la pression
former à la surface de la membrane un film constitué par le sur les coefficients de perméabilités A et B (d’après [4])
composé le plus fortement adsorbé. Dans le cas d’une membrane
d’osmose inverse très hydrophile, il y a formation d’un film d’eau
dont l’épaisseur est de l’ordre de 0,2 à 0,5 nm (figure 11). Ce film ■ Sélectivité entre composés ioniques et composés non ioniques
est d’autant plus épais que la membrane est plus hydrophile ; son
L’eau étant un solvant très polaire solvate beaucoup plus forte-
épaisseur est nulle avec un matériau hydrophobe comme le
ment les ions que les molécules : le coefficient de partage, donc le
Téflon , ce qui implique qu’on ne pourra pas utiliser ce matériau en
transfert, est plus important avec ces dernières. Cela est bien véri-
osmose inverse.
fié expérimentalement dans les cas ci-après.
En ce qui concerne les solutés, la sélectivité va dépendre de ● Pour un acide faible, le taux de rejet est élevé lorsque le pH est
deux paramètres : supérieur au pK ; il est relativement faible lorsque le pH est inférieur
— le coefficient de distribution H , appelé aussi coefficient de au pK .
partage du soluté entre la membrane et la solution amont ; ● Pour une base faible, au contraire, le taux de rejet est élevé à
— le coefficient de diffusion D 2 du soluté dans la membrane ; pH < pK et faible pour pH > pK .
celui-ci est d’autant plus faible que la taille des molécules de soluté
● Pour une protéine, la rétention est fiable pour une valeur du pH
est grande.
voisine du point isoélectrique. Par contre, à une valeur du pH
En général, le coefficient de partage H est le facteur prépondé- éloignée du point isoélectrique, les protéines sont retenues.
rant qui détermine la sélectivité de la membrane.

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Tableau 4 – Énergie d’hydratation de différents ions

M E hyd M E hyd
Cation (g · mol–1) (kJ · mol–1) Anion (g · mol–1) (kJ · mol–1)

Cs+ 133 286 l– 127 274


Rb+ 85,5 337 Br – 80 303

K+ 39 363 NO 3 62 310
Na+ 23 454 Cl – 35,5 325
Li+ 7 636 F– 19 449
––
Ca ++ 40 1 615 SO 4 96 1 047

D’après [3].

Ainsi, dans le traitement des eaux, les ions bivalents sont


beaucoup mieux rejetés que les ions monovalents d’où la possibi-
lité d’utiliser l’osmose en adoucissement.
En conclusion, la sélectivité d’une membrane d’osmose inverse
Figure 10 – Variation du taux de rejet pour un composé donné (ion, molécule, complexe) est d’autant
en fonction de la pression efficace pour les mécanismes plus importante que ce composé est fortement solvaté, c’est-à-dire
diffusionnels (osmose inverse) que son énergie d’hydratation est élevée.

3.2 Mécanisme du type capillaire


Cette théorie, la plus ancienne et la plus simple, consiste à
considérer les membranes comme un milieu poreux constitué d’une
multitude de capillaires ; dans ce cas, sélectivité et perméabilité
peuvent être déterminées à partir du diamètre de pore, du nombre
de pores et de leur courbe de distribution. C’est le cas de l’ultrafil-
tration et de la microfiltration.

3.2.1 Flux de solvant


Le flux de solvant à travers une telle membrane peut être déter-
miné par la loi de Poiseuille :

π d 4 N ∆P
J 1 = -------------------- ---------- (25)
128 µ z
avec J1 (m3 · s–1 · m–2 ) débit-volume de solvant par unité de sur-
face de membrane,
d (m) diamètre de pore,
Figure 11 – Importance et influence du film d’eau à l’interface
membrane-solution sur les différentes techniques à membranes : µ (Pa · s) viscosité dynamique du solvant,
modèle de transfert de Sourirajan (d’après [20]) ∆P (Pa) différence de pression,
z (m) épaisseur effective de la membrane,
N (m –2 ) nombre de pores par unité de surface de
● La complexation d’un ion Cu 2+ par de l’EDTA augmente son
membrane
transfert d’un facteur 200 alors que sa taille a considérablement
augmenté. Le nombre de pores par unité de surface peut être relié à la poro-
sité par la relation :
● Les alcools ont des propriétés solvatantes assez voisines de
celles de l’eau et passent à travers les membranes courantes. Les N = 4 ε /π d 2 τ (26)
taux de rejet augmentent avec la masse moléculaire de l’alcool. avec ε porosité de la membrane (égale au rapport du volume total
des pores de la membrane à son volume apparent),
■ Sélectivité entre différents ions
τ facteur de tortuosité (égal au rapport de la longueur
Les petits ions ayant un caractère ionique plus marqué que les
moyenne d’un pore à l’épaisseur de la membrane)
gros, ils sont les plus fortement solvatés. Il en est de même pour
les ions multivalents par rapport aux ions monovalents, comme le εd 2 ∆ P
d’où J 1 = ----------------- ---------- (27)
montre le tableau 4. Il en résulte que : 32 µ τ z
— pour des ions de même valence, le taux de rejet diminue si
leur masse molaire augmente ;
— pour des ions de valence différente, le taux de rejet croît avec
la valence des ions.
(0)

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Application numérique On peut considérer que la sélectivité des membranes micro-


poreuses, notamment celles d’ultrafiltration et de microfiltration,
■ Soit une membrane d’ultrafiltration dont les caractéristiques sont : résulte d’un « effet tamis », c’est-à-dire d’une discrimination en fonc-
d = 100 Å = 10 –8 m tion de la taille de l’espèce à retenir. Les molécules ou particules plus
N = 1011 pores/cm 2 = 1015 pores/m2 petites que les pores ne sont pas retenues : leur taux de rétention
τ = 5 et z = 2 µm = 2 · 10 –6 m est nul.
Les dimensions de différentes particules, molécules ou ions,
et filtrant de l’eau sous une pression de 1 bar sont données dans le tableau 5. (0)
d’où ∆P = 10 5 Pa
et µ = 10 –3 Pa · s Tableau 5 – Dimensions de différentes particules,
πd2τ 10 15 × 3,14 × 10 –16 × 5 molécules ou ions
ε = N ----------------- = ------------------------------------------------------------
4
≈ 39,25 %
4
ε d 2 ∆P 0,392 5 × 10 –16 × 10 5 Masse molaire M Dimensions
J 1 = ----------------- ------- = -------------------------------------------------------------
- Espèces
32 µ τ z (g · mol –1) (nm)
32 × 10 –3 × 5 × 2 × 10 –6

≈ 1,22 × 10 –5 m 3 ⋅ s –1 ⋅ m –2 ≈ 44 L ⋅ h –1 ⋅ m –2 Eau ......................................... 18 0,2


Ions minéraux ....................... 10 à 100 0,2 à 0,4
■ Soit une membrane de microfiltration dont les caractéristiques Molécules organiques .......... 30 à 500 0,2 à 0,8
sont : Antibiotiques courants ......... 300 à 1 000 0,6 à 1,2
Enzymes ................................ 10 4 à 105 2à5
d = 1 000 Å = 10 –7 m Protéines et polysaccharides 10 4 à 106 2 à 10
N = 10 9 pores /cm2 = 1013 pores/m2 Virus....................................... ......................... 30 à 300
τ =5 Colloïdes................................ ......................... 100 à 1 000
ε = 39,25 % Émulsions d’huile ................. ......................... 100 à 10 000
z = 2 µm = 2 · 10 –6 m Bactéries ................................ ......................... 300 à 10 000
∆P = 1 bar = 105 Pa Levures et champignons...... ......................... 103 à 10 000
µ = 10 –3 Pa · s Solides en suspension ......... ......................... 104 à 100 000
Le calcul donne :
D’après [9].
J1 = 1,22 · 10 –3 m3 · s–1 · m–2 = 4 392 L · h–1 · m–2

On peut aussi, en première approximation, utiliser la relation sui-


3.2.2 Sélectivité des membranes microporeuses : vante qui donne le diamètre de Stokes d S (en nm) de l’espèce à
cas de l’ultrafiltration retenir en fonction de sa masse molaire (en g /mol) (figure 13),
d’après [8] :
Une membrane d’ultrafiltration est caractérisée, du point de vue d S = 0,076 M 0,4 (28)
sélectivité, par la courbe de rétention TR = f (M ) (figure 12). La
position et l’allure de la courbe de rétention dépendent des carac- À l’effet tamis s’ajoute un effet d’exclusion stérique traduisant
téristiques de la membrane telles que l’homogénéité de la répartition l’impossibilité pour une molécule d’approcher la paroi d’un pore
des diamètres de pore ainsi que de variables externes telles que la de la membrane à une distance inférieure à son rayon (d S /2).
vitesse de circulation et la pression de fonctionnement. Sur la La relation de Ferry [15] rend compte de cet effet :
figure 12, la membrane 1 retient toutes les molécules ayant une
masse molaire supérieure à 15 000 et laisse passer toutes les molé- TR = [1 – (1 – Φ 2 )] 2 (29)
cules ayant une masse molaire inférieure à 4 000. Pour la avec Φ = d S /d,
membrane 2 ces valeurs sont respectivement de 900 et 100 000. La
d diamètre de pore.
membrane 1 permet donc une séparation beaucoup plus précise que
la membrane 2.

Figure 13 – Variation du diamètre de Stokes d’une molécule


Figure 12 – Variation du taux de rejet, en fonction de la masse en fonction de la masse molaire (d’après [8])
molaire du soluté, par deux membranes différentes

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Ainsi, pour une molécule et une membrane de rapport Φ = 0,7, Dans le cas des techniques à membranes, il y a seulement deux
le taux de rétention est de 83 %. flux (solvant et soluté) et deux gradients de transfert (pression et
Il est important de noter que, d’après la relation (28), pour des concentration).
molécules 1 et 2 dont le rapport des masses molaires M1 /M 2 serait La relation précédente peut être simplifiée en supposant que les
par exemple de 10, le rapport des diamètres de Stokes d S1 /d S2 coefficients croisés sont égaux :
serait de 2,5. On comprend dès lors les difficultés rencontrées lors-
que l’on souhaite fractionner un mélange de deux composés ayant L ij = L ji pour i ≠ j
(31)
un rapport de masses molaires très inférieur à 10. (relation de réciprocité d′Onsager)
Kedem et Katchalsky [6] ont appliqué les relations précédentes
3.2.3 Influence de la pression sur la sélectivité aux transferts à travers les membranes et ont obtenu les résultats
des membranes d’ultrafiltration suivants :
J 1 = L p (∆ P – σ ∆ Π ) (32)
Puisque la sélectivité est déterminée uniquement par les dimen- J 2 = ω ∆ Π + (1 – σ ) C 2 J 1 (33)
sions moléculaires du soluté et les dimensions de pore de la mem-
J1 et J 2 (en m · s–1 ) sont les débits de solvant et de soluté à tra-
brane, le taux de rejet devrait être indépendant de la pression
vers la membrane.
appliquée, ce qui caractérise les membranes du type capillaire et
les différencie des membranes du type diffusionnel. L p et σ sont les coefficients phénoménologiques L ij de la
relation (30), avec :
Toutefois, certaines membranes du type capillaire ont des taux de
rejet qui diminuent lorsque la pression appliquée augmente • L p (m · s–1 · Pa–1) perméabilité au solvant ;
(figure 14) ce qui peut s’expliquer par une déformation élastique de • ω (m · s–1 ) perméabilité au soluté ;
la membrane avec augmentation du rayon de pore, ou bien pour • σ coefficient de réflexion (ou de Staverman).
une déformation des molécules de soluté qui peuvent alors passer Le coefficient σ prend en compte l’effet de la pression sur le
à travers des pores plus petits. transfert de soluté :
σ = 1 si TR = 1 et σ = 0 si TR = 0
Si σ = 1, il n’y a pas d’interaction entre le flux de solvant et le flux
3.3 Modèle de transfert de type de soluté (cas de membrane très sélective) et le modèle de Kedem-
phénoménologique ou « boîte noire » Katchalsky ci-avant est identique au modèle de solubilisation-diffu-
sion (§ 3.1) :

Ce modèle [6] établit des relations phénoménologiques linéaires J 1 = L p ( ∆ P – ∆ Π ) ≡ A (∆ P – ∆ Π )


entre les flux Ji et les gradients de transfert associés Fi , ou non J2 = ω ∆ Π ≡ B ∆ C2
associés Fj , par l’intermédiaire de coefficients phénoméno-
logiques L ij (théorie d’Onsager) :

J i = L ii F i + ∑ L ij Fj
i≠j
(30) 4. Phénomène de polarisation
Le flux Ji d’une espèce n’est pas uniquement relié à sa force 4.1 Nature du phénomène
associée Fi mais résulte de toutes les forces impliquées dans le
processus global : on est en présence de transferts couplés.
Les membranes utilisées ayant la propriété d’effectuer des sépa-
rations à l’échelle moléculaire ou particulaire, il va y avoir accumu-
lation progressive des espèces (molécules ou particules) arrêtées à
la surface de la membrane. C’est le phénomène de polarisation de
concentration (figure 15).
Si l’on appelle C m la concentration du soluté arrêté de la
membrane et C 0 la concentration moyenne du soluté dans la solu-
tion, le facteur de polarisation est défini par la relation :
γ = C m /C 0 (34)
La polarisation est un phénomène réversible qui disparaît si le
gradient de transfert est annulé.
Les conséquences du phénomène de polarisation sont données
ci-après.
■ Diminution du flux de perméat
Une augmentation de la concentration près de la membrane va
se traduire par une augmentation de la pression osmotique Π de
la solution et une diminution de la pression efficace (∆ P – ∆ Π ). Le
flux de perméat étant directement proportionnel à la pression effi-
cace va donc diminuer. Cet effet est surtout sensible en osmose
Figure 14 – Variation du taux de rejet d’une membrane de type inverse où les pressions osmotiques jouent un rôle important.
capillaire en fonction de la pression appliquée (figure 7 et d’après [21]) On peut avoir aussi une diminution du flux à cause de la résistance
supplémentaire à la filtration provenant des dépôts résultant d’une
augmentation de la concentration.

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Figure 15 – Polarisation en filtration tangentielle

■ Variation de la sélectivité
Une augmentation de la concentration près de la membrane
peut se traduire soit par une augmentation de la concentration
dans le perméat, soit par une diminution lorsqu’il y a dépôt et que
celui-ci joue le rôle d’une deuxième membrane.
■ Colmatage dû à des précipitations ou des formations de gel
Des phénomènes secondaires peuvent se produire lorsque la
concentration C m atteint certaines valeurs.
● Dans le cas de l’osmose inverse, on peut atteindre la limite de Figure 16 – Modélisation de la polarisation : théorie du film
solubilité des sels et avoir formation de tartre (CaSO4 , CaCO3 par
exemple) lors de la déminéralisation des eaux salines.
● Dans le cas de l’ultrafiltration, la concentration en macromolé- avec x distance par rapport à la membrane,
cules à la surface de la membrane peut atteindre la concentration de C (x ) (kg /m3 ) concentration du soluté dans la couche limite
gel Cg à partir de laquelle le soluté est sous forme quasi solide. à la cote x,
D 2 (m 2 /s) coefficient de diffusion du soluté à l’interface
membrane-solution.
4.2 Modélisation de la polarisation : La théorie du film suppose qu’il existe une couche limite de
théorie du film polarisation d’épaisseur δ située près de la membrane.
L’intégration de l’équation précédente permet de déterminer en
La concentration d’une espèce au voisinage de la membrane va régime permanent le flux de perméat :
augmenter jusqu’à ce qu’un équilibre s’établisse entre le flux
transféré à travers la membrane sous l’action du gradient de pression J1 [C (x ) – C p ] = D 2 (dC /dx )

 
et le flux qui diffuse en sens inverse sous l’action du gradient de δ Cp
concentration de la couche limite vers la solution. dC
soit J1 dx = D 2 ------------------ (36)
En régime stationnaire, le bilan matière relatif à l’espèce rete- 0 Cm C – Cp
nue, dans la portion de couche limite comprise entre la membrane
Les conditions aux limites sont :
et la cote x (figure 16) nous permet d’écrire :
C = C m pour x = 0 et C = C 0 pour x = δ
densité de flux densité de flux densité de flux massique
– + C 0 , C p , C m désignent les concentrations de soluté respective-
massique convectif massique diffusionnel transféré à travers la membrane
ment dans la solution, dans le perméat et au niveau de la mem-
brane.
dC
J 1 C (x ) – D 2 ---------- = J 1 C p (35) D2 Cm – Cp Cm – Cp
dx
d’où J 1 = -------- ln ----------------------- = K ln ----------------------- (37)
δ C0 – Cp C0 – Cp

K = D 2 / δ est le coefficient de transfert de matière du soluté.

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4.3 Coefficient K de transfert de matière Tableau 6 – Coefficient de transfert de matière K


D 2 Sh
Pour une espèce donnée, le coefficient de transfert de matière K K = -----------------
dépend des propriétés physico-chimiques de la solution (viscosité, dh
coefficient de diffusion...) et des conditions hydrodynamiques du
système. Auteurs 1 2 3 Conditions
Les analogies entre transfert de matière et transfert de chaleur,
bien connues en génie chimique, rendent possible le calcul du coef-
ficient de transfert de matière (articles Transfert de matière. Métho- Régime turbulent : Sh = α 1 (Re) α2 (Sc ) α3
dologie [J 1 070], Opérations compartimentées idéales [J 1 072],
Cinétique du transfert de matière entre deux phases [J 1 075] et Chilton et Colburn ..... 0,023 0,80 0,33
Application des modèles cinétiques aux opérations de transfert de Harriot et Hamilton.... 0,009 6 0,913 0,346.. Sc > 1 000
matière [J 1 077] dans ce traité). Levich ......................... 0,015 0,88 0,33.... Sc > 10
■ Cas d’un écoulement turbulent Dworak et Wendt ....... 0,011 0,9 0,33.... Re > 3 000
Sherwood et coll........ 0,023 0,33 0,33
Le coefficient de transfert de matière K a été relié empirique- Calderbank et Young. 0,082 0,69 0,33
ment aux différents paramètres hydrodynamiques du système :
dh α2
Kd h
-------------- = Sh = α 1 (Re ) α2 (Sc ) α3
D2
(38)
Régime laminaire :

Sh = α 1 Re ---------
L  (Sc ) α3

Bird et coll .................. 1,86 0,33 0,33


Kdh
avec Sh nombre de Sherwood = -------------- , Grober et coll ............. 0,664 0,50 0,33  100 < Re
D2 Porter .......................... 1,62 0,33 0,33....
 Sc d-----h- < 5 000
d h Uρ
Re nombre de Reynolds = ------------------- ,
Blatt et coll .................
Probstein et coll .........
1,18
1,31
0,33
0,33
0,33
0,33
 L
µ
D’après [12].
Sc nombre de Schmidt = µ /ρ D 2 ,
d h (m) diamètre hydraulique,
■ Conclusions
U (m /s) vitesse du fluide,
La figure 17 donne les ordres de grandeur du coefficient de
ρ (kg /m 3 ) sa masse volumique, transfert en fonction du nombre de Reynolds.
µ (Pa · s) sa viscosité dynamique. En comparant les expressions de K en régime turbulent et en
α 1 , α 2 , α 3 sont des coefficients déterminés expérimentalement. régime laminaire, on constate que, dans les deux cas, le coefficient
Ces relations montrent que le coefficient de transfert de matière de transfert de matière augmente en même temps que le nombre
(et par là même le flux) peut être amélioré en augmentant la vitesse de Reynolds. Toutefois, la loi de variation est modifiée quand on
de passage du fluide U (expression de Re) et, pour un débit donné, passe du régime laminaire au régime turbulent :
en diminuant le diamètre hydraulique. — régime laminaire : lg K = Cte + 0,33 lg Re ;
Le nombre de Sherwood est une mesure du transfert de matière — régime turbulent : lg K = Cte + 0,80 lg Re .
convectif par opposition au transfert de masse diffusif ou molécu-
laire.
En première approximation, on peut utiliser [11], en régime 4.4 Modèle du gel en ultrafiltration
turbulent (Re > 4 000), la relation de Chilton et Colburn :
Kdh En ultrafiltration, la concentration C m de macromolécules près
-------------- = Sh = 0,023 (Re ) 0,80 (Sc ) 0,33 (39) de la membrane peut atteindre la concentration de gel C g . Si l’on
D2
suppose que la concentration de l’espèce dans le perméat est
■ Cas d’un écoulement laminaire nulle, l’équation (37) devient :
Dans ce cas, le coefficient de transfert de matière du soluté peut Cg
être déterminé si l’on suppose que le profil parabolique de vitesse J lim = K ln -------- (42)
est établi dès l’entrée dans le système membranaire et que le profil C0
de concentration évolue le long de la membrane [4] :
Cette relation, appelée modèle du gel, on peut tirer les conclusions
Kdh dh α2 suivantes qui, rappelons-le, ne sont valables que lorsque le flux
D2 
-------------- = Sh = α 1 Re ---------
L  (Sc )
α3
(40) limite est atteint :
• J lim est indépendant des caractéristiques de la membrane ;
où L représente le chemin parcouru par le liquide à l’intérieur du • J lim est indépendant de la pression ;
module. • J lim est inversement proportionnel au logarithme de la teneur
massique de soluté dans la solution (figure 18) ;
Les valeurs expérimentales de α 1 , α 2 , et α 3 sont données dans • J lim tend vers zéro pour une concentration qui est supposée
le tableau 6. être la concentration de gel ;
En première approche, on peut utiliser la relation : • J lim étant directement proportionnel au coefficient de transfert
de matière K , il peut être modifié en augmentant la turbulence
Kdh dh 0,33


-------------- = Sh = 1,86 Re ---------
D2 L  (Sc ) 0,33 (41)
donc la vitesse tangentielle de liquide (figure 19, courbes IV et V).

(0)

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Figure 17 – Variation du coefficient


de transfert de matière
en fonction du nombre de Reynolds

Figure 18 – Variation du débit volumique de solvant


en ultrafiltration, en fonction de la teneur massique de soluté
(d’après [17])

Figure 19 – Variation du débit volumique de solvant


en ultrafiltration, en fonction de la pression efficace
et de la turbulence (d’après [18])

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Le tableau 7 donne des valeurs expérimentales des concentrations Si l’on appelle TR réel le taux de rejet réel et TR obs le taux de rejet
de gel C g de différents produits. (0) observé, on peut écrire :
Cp Cp
TR réel = 1 – -------- et TR obs = 1 – ------
Tableau 7 – Valeurs expérimentales des concentrations Cm C0
de gel C g de différents produits
D’autre part, l’équation (37) peut se mettre sous la forme :
Solution Cg Cm – Cp
--------------------- = exp ( J 1 / K ) (43)
C0 – Cp
Albumine bovine de sérum................. 20 à 30 % de protéines
Albumine humaine de sérum ............. 24 à 28 % de protéines d’où la relation :
Blanc d’œuf .......................................... 40 % de protéines

  = ln  -------------------------
-  + (J
Gélatine................................................. 20 à 30 % de protéines 1 – TR obs 1 – TR réel
Lait écrémé ........................................... 20 à 30 % de protéines ln ------------------------- 1 /K ) (44)
TR obs TR réel
Lait entier (3,5 % matières grasses) ... 9 à 11 % de protéines
Lactosérum........................................... 20 à 30 % de protéines En régime turbulent, ce qui est souvent le cas, l’équation précé-
Liqueur noire kraft (effluent papetier) 30 à 34 % de lignine dente devient :
Copolymère styrène/butadiène.......... 70 % de matière sèche

  = ln  -------------------------
-  + Cte --------------
1 – TR obs 1 – TR réel J1
D’après [13]. ln ------------------------- 0,80
(45)
TR obs TR réel U

Application numérique 1 – TR obs


Ultrafiltration du lait à 50 oC Si l’on porte sur un graphe (figure 20) ln ------------------------- en fonction
TR obs
Les données du calcul sont les suivantes : de J1 / U 0,80 , on obtient une ligne droite qui coupe l’axe des ordon-
µ = 0,8 · 10–3 Pa · s
1 – TR réel
ρ = 1 030 kg · m– 3 nées à ln -------------------------- .
D 2 = 7 · 10 –11 m 2 · s–1 TR réel
C 0 = 3,1 % en masse La valeur de TR réel étant ainsi déterminée, le facteur de polari-
C g = 22 % en masse sation peut alors être calculé au moyen de la relation :
Le tableau ci-dessous présente les valeurs obtenues par le calcul
dans le cas d’un module à fibres creuses et dans le cas d’un module 1 – TR obs
γ = --------------------------
- (46)
tubulaire (article Osmose inverse et ultrafiltration. Technologie et appli- 1 – TR réel
cations [J 2 796]).
(0)

Fibres Module
creuses tubulaire

Caractéris- Diamètre d h................. (m) 0,11 · 10–2 1,25 · 10–2


tiques de Longueur L .................. (m) 0,635 2,40
l’installation Vitesse U.............. (m · s–1) 1 2

Perte de charge (10 5 Pa)... 0,9 2


Nombre de Reynolds........ 1 416 32 188
Calcul des Nombre de Schmidt ......... 1,11 · 104 1,11 · 104
paramètres Nombre de Sherwood...... 54,08 2 002
de K ................ (m3 · m–2 · s–1 ) 3,44 · 10–6 1,12 · 10–5
fonctionne- K ................... (L · h–1 · m–2) 12,39 40,37
ment J = K ln C g (m3 · m–2 · s–1 ) 6,74 · 10–6 2,19 · 10–5
J = K ln C g ... (L · h–1 · m–2) 24,3 78,7

4.5 Mesures de la polarisation


de concentration
Une détermination expérimentale du facteur de polarisation γ
(§ 4.1), peut être obtenue à partir de la théorie du film.

Figure 20 – Détermination expérimentale du facteur de polarisation


(d’après [19])

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5. Phénomènes du colmatage 5.2 Mécanismes du colmatage

5.1 Définition du colmatage Le colmatage d’une membrane peut résulter soit de l’obstruction
des pores à l’intérieur même de la membrane (colmatage en pro-
Le colmatage peut être défini comme l’ensemble des phénomènes fondeur), soit de phénomènes d’adsorption, soit enfin d’un dépôt
qui interviennent dans la modification des propriétés filtrantes d’une de matière par convection.
membrane, excepté la compaction et la modification chimique. Il ■ Colmatage en profondeur par obstruction des pores
s’agit de phénomènes physiques, chimiques, biologiques, se pro-
duisant à l’interface membrane-solution ou dans le volume poreux, Le colmatage en profondeur se rencontre principalement en ultra-
dont la conséquence est une obstruction des pores entraînant à la filtration et en microfiltration lorsque les courbes de répartition
fois des variations de perméabilité et de sélectivité. (courbes de Gauss) des diamètres de pores de la membrane et des
diamètres des particules à retenir sont voisines ou se chevauchent
En l’absence de colmatage, pour une solution dépourvue de soluté (figure 22).
susceptible d’être retenu par la membrane, le débit volumique de
perméat J (en m 3 · s–1 · m–2) peut se mettre sous la forme : ■ Phénomènes d’adsorption
Nota : pour plus de détails, se reporter à l’article Adsorption [J 2 730] dans ce traité.
∆P – ∆Π
J = ------------------------ (47) L’adsorption est essentiellement un phénomène de surface ; elle
µ Rm joue donc un rôle important dans le mécanisme du colmatage des
membranes d’ultrafiltration ou de microfiltration qui, par nature,
avec µ (Pa · s) viscosité dynamique du perméat,
sont microporeuses.
R m (m –1 ) résistance hydraulique de la membrane.
L’adsorption membranaire peut être déterminée à l’aide des iso-
Lorsque la membrane se colmate, une résistance supplémen- thermes d’adsorption obtenues en régime statique, sans perméation
taire R s s’ajoute à la résistance de la membrane R m : de paroi. Ces isothermes suivent, en général, la loi de Freundlich :
∆P – ∆Π x /m = Cte C 1/n ou lg (x /m) = lg Cte + (1/n) lg C (50)
J = ---------------------------------- (48)
µ (R m + R s )
avec x quantité adsorbée,
Le terme R s inclut les résistances dues à l’adsorption R a , au m quantité d’adsorbant,
dépôt irréversible ou réversible R d , à la couche limite de polarisa- C concentration du soluté.
tion R lim :
R s = R a + R d + R lim (49) (1/n ) a habituellement une valeur comprise entre 0,2 et 0,7.

Une mesure de perméabilité à une eau de référence permet de


déterminer la résistance hydraulique de la membrane (R m). Cette
mesure a été normalisée par l’AFNOR (norme NF X 45-101 de juillet
1990).
Les effets du colmatage et de la polarisation sur le flux de per-
méation à travers une membrane sont schématisés sur la figure 21.

Figure 21 – Effets de la polarisation et du colmatage


sur le flux de perméat et ultrafiltration (d’après [16])

Figure 22 – Courbes de répartition de la taille des pores


membranaires et de la taille des particules circulantes
et risque de colmatage

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■ Dépôt de matière par convection La contrainte critique d’érosion est une fonction complexe de mul-
Le flux de matière apportée à la paroi de la membrane par tiples paramètres : paramètres propres à la suspension et dépendant
convection doit être éliminé en permanence par la contrainte de de la physico-chimie du milieu, ainsi que paramètres opératoires tels
cisaillement à la paroi τ w , c’est-à-dire par la force exercée par le que la pression appliquée.
fluide en écoulement tangentiel sur un élément de surface de la Ce modèle permet de calculer un flux massique maximal admis-
membrane. sible sur une membrane, pour une suspension et des conditions opé-
Dans le cas de la microfiltration, un modèle dit de dépôt-érosion ratoires données :
(figure 23) a été développé par H. Barnier [14]. Ce modèle, inspiré (J C 0)max = ρ (τ w – τ c ) 3/2 (52)
d’études effectuées sur les dépôts de sédiments dans les rivières, Cette relation, qui détermine les conditions d’absence de dépôt,
établit un bilan entre l’apport de matière en surface résultant de la est à la base d’un mode opératoire original, à flux massique contrôlé.
convection et l’entraînement de matière résultant de l’érosion :
dépôt = apport – érosion
de
ρ D --------- = J 1 C 0 – β ( τ w – τ c ) 3/ 2
dt
(51) 6. Performances et sélectivité
avec t (s) durée de la microfiltration, 6.1 Densité de flux volumique
e (m) épaisseur du dépôt, ou débit spécifique
ρ D (kg/m3 ) masse volumique du dépôt,
J 1 (m3 · s–1 · m–2 ) densité de flux volumique, Pour une sélectivité donnée, le débit volumique par unité de sur-
face (ou densité de flux volumique) doit être le plus élevé possible
C 0 (kg/m3 ) concentration moyenne de la solution,
de manière à minimiser la surface de filtration à mettre en œuvre
β constante propre à la suspension, et, par là même, l’investissement.
τ w (Pa) contrainte de cisaillement à la paroi, Le débit volumique s’exprime le plus souvent en L · h –1 · m –2 . La
τ c (Pa) contrainte critique d’érosion. conversion en unités SI (m 3 · m –2 · s –1 ou m · s –1 ) ainsi qu’en
d’autres unités est donnée dans le tableau 8.
Du point de vue pratique, les débits spécifiques augmentent
lorsque l’on passe de l’osmose inverse à la microfiltration bien que
les gradients de transfert diminuent à cause des phénomènes de
polarisation. Le tableau 9 donne les ordres de grandeur des per-
méabilités, des gradients de transfert ainsi que des débits spécifiques
pour les différents procédés.

6.2 Sélectivité

D’une manière générale, la sélectivité des techniques à


membranes n’est pas parfaite, sauf dans certains cas en microfil-
tration et en ultrafiltration, et cela pour plusieurs raisons :
— dans le cas des membranes denses, le mécanisme de trans-
fert étant de type « solubilisation-diffusion », on constate presque
toujours une diffusion de l’espèce retenue ;
— dans le cas des membranes microporeuses, le mécanisme de
transfert étant de type capillaire, on peut imaginer un taux de rejet
égal à l’unité, dans la mesure où la dimension de la particule ou de
Figure 23 – Colmatage d’une membrane de microfiltration la molécule est très grande par rapport au diamètre des pores de
par dépôt convectif de particules : modèle de dépôt-érosion la membrane. Il faut toutefois tenir compte d’une déformation pos-
(d’après [14]) sible des molécules ou des particules ainsi que d’une éventuelle
hétérogénéité des diamètres de pores de la membrane.
(0)

Tableau 8 – Facteurs de conversion des unités de débit volumique spécifique


m3 · m–2 · s–1 cm3 · cm–2 · h–1 gal · ft –2 · j –1 (1) L · m–2 · h–1 L · m–2 · j –1
m3 · m–2 · s –1 1 3,6 · 105 2,1 · 10 6 3,6 · 10 6 8,6 · 10 7
cm3 · cm–2 · h–1 2,8 · 10 –6 1 5,9 10 240
gal · ft –2 · j –1 (1) 4,7 · 10 –7 1,7 · 10 –1 1 1,7 41
L · m–2 · h–1 2,8 · 10 –7 0,1 0,59 1 24
L · m–2 · j –1 1,2 · 10 –8 4,2 · 10 –3 2,5 · 10 –2 4,2 · 10 –2 1
(1) 1 gal = 3,785 × 10 –3 m3 (gallon américain).

(0)

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Tableau 9 – Ordre de grandeur de la densité


de flux volumique (ou débit volumique spécifique)
des différentes techniques à membranes

Pression Pression Débit volumique


Perméabilité spécifique
appliquée efficace
A
P P –  J = A ( P –  )
(en 105 Pa (en 105 Pa
(L · h–1 · m–2 · bar–1) (L · h–1 · m–2 )
ou bar) ou bar)

Osmose inverse 0,5 à 1,5 30 à 80 20 à 40 10 à 60


Nanofiltration .... 2,5 à 5 10 à 40 20 50 à 100
Ultrafiltration ..... 50 à 100 1à5 1à5 50 à 500
Microfiltration ... 300 à 1 500 0,5 à 1,0 0,5 à 1,0 150 à 1 500

■ Pour une membrane donnée, la sélectivité peut toutefois être


améliorée, en particulier dans le cas d’ultrafiltration, comme le
montre la figure 24. On peut ainsi fixer un ion métallique sur une
macromolécule (ultrafiltration-complexation). On peut aussi adsor-
ber un composé organique (tensioactif, pesticide, phénol) sur un
adsorbant minéral ou organominéral tel que les charbons actifs pul- Figure 24 – Différentes voies d’amélioration de la sélectivité
vérulents, les oxydes ou hydroxydes métalliques (ultrafiltra- des membranes : ultrafiltration (UF) assistée
tion-adsorption). Ces deux possibilités (ultrafiltration-complexation
et ultrafiltration-adsorption) connues sous le nom d’ultrafiltration
assistée permettent d’effectuer des rétentions ioniques ou molécu-
laires avec des membranes ayant des diamètres de pores élevés (et
donc des débits élevés) et qui, sans cet artifice, auraient une mau-
vaise sélectivité.
■ Des groupements fonctionnels peuvent aussi être greffés sur la
membrane de manière à lui conférer une affinité particulière pour
une espèce donnée (ultrafiltration d’affinité). À titre d’exemple
(figure 25), un polymère hydrophile fonctionnalisé peut être greffé
sur une membrane d’ultrafiltration. La présence de sites ammonium
quaternaire , de signe opposé à la charge globale d’une protéine, per-
met en fonction du pH d’améliorer le taux de rétention de la protéine.
On peut ainsi envisager la séparation α-lactalbumine /β-lactoglobu-
line.

6.3 Influence de la température


Lorsque la température augmente, le débit de perméat à travers
une membrane d’osmose inverse, d’ultrafiltration ou de microfiltra-
tion augmente d’environ 3 % par degré Celsius, ce qui correspond
approximativement à une augmentation inversement proportion-
nelle à celle de la viscosité du solvant.
■ Dans le cas d’un mécanisme de type diffusionnel, le flux du
solvant est directement proportionnel au coefficient de diffusion (D 1 )
du solvant dans la membrane :

D1 C 1 V1
J 1 = ------------------ -------- ( ∆P – ∆ Π ) (53)
RT z
Or le coefficient de diffusion D1 est inversement proportionnel à
la viscosité µ du solvant, suivant la relation de Stokes-Einstein : Figure 25 – Ultrafiltration d’affinité

kT
D 1 = ----------------------- (54)
3 π µ dS ■ Il en est de même dans le cas d’un mécanisme de transfert de type
capillaire où le flux de solvant est déterminé par la loi de Poiseuille.
avec k constante de Boltzmann (k = 1,38 × 10 –23 J/K).
Donc, quel que soit le type de membrane, on a :
Il en résulte que le flux de solvant est inversement proportionnel
à la viscosité : J 1 proportionnel à 1/µ (56)

 
k C1 V1 1
J 1 = ---------------------- ----- ( ∆P – ∆ Π ) (55)
3 π dS z µ

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Or la viscosité d’un liquide en fonction de la température est


donnée par la relation : 7. Conclusion. Comparaison
E0
µ = µ 0 exp --------- (57)
avec les techniques
RT
concurrentes
avec µ 0 viscosité à l’état de référence.
E 0 est l’énergie d’activation du liquide à la température de réfé- Le tableau 11 résume les principales caractéristiques des diffé-
rence (25 oC), égale pour l’eau à 15 675 J · mol –1 [10]. rentes techniques séparatives à membranes.
La variation de la viscosité de l’eau en fonction de la température Dans la plupart des cas, les techniques à membranes se trouvent
peut donc être calculée par la résolution de la relation : en concurrence, pour une application donnée, avec des procédés
plus conventionnels. Il nous a donc semblé intéressant de résumer,
∆ E0 ∆ E0

dT  RT RT 2 
--------- = – µ 0 exp ------------ ------------
- (58) en conclusion, leurs avantages ainsi que leurs inconvénients.
■ Avantages des techniques à membranes
soit : ● Elles opèrent à température ambiante en général, d’où

dµ ∆ E0 l’absence de dénaturation des molécules fragiles telles que les


--------- = – µ -----------2- (59) protéines et le respect des qualités organoleptiques grâce à l’absence
dT RT de choc thermique. On peut citer comme exemple la concentration
En général, les perméabilités des membranes sont données à de jus de tomate par osmose inverse ou la débactérisation du lait par
20 oC. Si l’on veut connaître la perméabilité à t (oC) ou T (K ), microfiltration tangentielle.
l’équation (57) permet d’écrire dans le cas de l’eau : ● La séparation est fondée sur des critères physiques (diamètres
de pores) et ne fait pas intervenir de réactifs chimiques comme
E0 E0
 
extractant (solvants, acides, bases...), réactifs qui sont, en général,
A t /A 20 = µ 20 / µ t = exp ---------------------- – --------- une source importante de pollution. Ainsi, dans le cas de la déminé-
R × 293 RT
ralisation de l’eau, l’osmose inverse présente un avantage par

 
1 885 rapport à l’échange d’ions qui produit des quantités importantes
d’où A t /A 20 = exp 6,435 – ---------------- (60) d’effluents.
T
● Elles ne font pas intervenir de changement de phase ; il n’y a
Le tableau 10 montre que cette relation suit les valeurs expéri- donc pas d’enthalpie à fournir, ce qui permet, par rapport à l’évapo-
mentales de la viscosité à moins de 3 % près. (0) ration, d’être plus économe en énergie. À titre d’exemple, l’osmose
inverse connaît un développement important dans le domaine du
dessalement de l’eau de mer, en particulier parce que la
Tableau 10 – Influence de la température consommation d’énergie associée au procédé est très faible.
sur la perméabilité d’une membrane ● Les procédés peuvent fonctionner en continu et sont simples et
faciles à automatiser, du moins en principe. Ainsi, contrairement à
At /A 20 la filtration frontale ou à l’échange d’ions, qui sont des procédés
Tempéra- Viscosité séquentiels (avec des phases de fixation et d’élution pour l’échange
Calculé Calculé Écart d’ions), la circulation tangentielle du liquide à traiter permet d’éviter
ture de l’eau à partir des par la l’accumulation progressive de dépôts. Cet avantage doit toutefois
viscosités relation être pondéré par la nécessité de procéder à des nettoyages pério-
( oC) (mPa · s)  20 ⁄  t (60) (%) diques des membranes.

17 1,083 0,923 0,935 + 1,3 ■ Inconvénients des techniques à membranes


20 1,000 1,000 1,000 0 ● Colmatage des membranes, qui se traduit, en général, par une
27 0,854 1,171 1,161 – 0,8 baisse de la perméabilité et une modification de la sélectivité qui
28,2 0,836 1,196 1,191 – 0,4 n’est pas toujours souhaitable.
30,2 0,801 1,248 1,241 – 0,6 ● Sélectivité imparfaite des membranes : elle n’est jamais égale à
32 0,768 1,302 1,287 – 1,15 100 % sauf peut-être en microfiltration. De plus, en ultrafiltration
34 0,737 1,357 1,340 – 1,2 industrielle, la séparation ne se fait dans de bonnes conditions que
35,5 0,715 1,398 1,381 – 1,2 pour des molécules ayant un rapport de masses moléculaires supé-
37,5 0,686 1,458 1,436 – 1,5 rieur ou égal à 10.
40 0,656 1,524 1,507 – 1,1 ● Durée de vie des membranes limitée, soit par perte de résis-
42 0,631 1,585 1,566 – 1,2 tance mécanique, soit par suite d’une mauvaise tenue aux réactifs
43 0,621 1,610 1,596 – 0,9 utilisés pour le nettoyage.
45,5 0,593 1,686 1,673 – 0,8 ● Nécessité de faire circuler le liquide à filtrer tangentiellement à
49 0,559 1,789 1,784 – 0,2 la membrane à des vitesses relativement élevées (2 à 5 m · s–1 ), ce
53 0,523 1,912 1,917 + 0,3 qui implique des pompes de grande taille et de consommations
57,5 0,487 2,053 2,074 +1 d’énergie élevées (cas, par exemple, de la microfiltration
62,5 0,452 2,212 2,258 +2 tangentielle).
63,5 0,440 2,273 2,296 +1
■ De la théorie à la pratique
69,5 0,408 2,451 2,532 + 3,3
Les membranes doivent réaliser des séparations dans des
milieux de composition complexe dans lesquels interviennent une
multitude de phénomènes (figure 26).

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Il est alors très difficile de modéliser le système de manière — essais pilotes sur un appareil de taille significative, permettant
fiable. On doit donc très souvent avoir recours à des expérimenta- l’optimisation des paramètres de fonctionnement industriel (condi-
tions pratiques : tions opératoires, adaptation éventuelle du procédé, etc.). (0)
— essais de faisabilité sur des équipements de laboratoire, per-
mettant le choix de la membrane ;

Tableau 11 – Comparaison des différentes techniques séparatives à membranes


Osmose inverse Nanofiltration Ultrafiltration Microfiltration

Diamètre des pores


(nm) < 0,5 (1) ≈1 1 à 100 10 2 à 10 4

Petites molécules
Espèces retenues Sels (M b 300 g/mol) Macromolécules, colloïdes Particules, colloïdes

Solubilisation - diffusion
Mécanisme de transfert Solubilisation - diffusion + capillaire Capillaire Capillaire

Rôle de la pression Importante


osmotique (3) Moyenne Faible Négligeable

Pression appliquée
30 à 80 10 à 40 2 à 10 0,2 à 2
(en 105 Pa ou bar)
Débits volumiques
spécifiques (2) 10 à 60 50 à 100 50 à 500 150 à 1 500
(L · h–1 · m–1 )
Évaporation Précipitation chimique
Procédés concurrents Électrodialyse Échange d’ions Chromatographie sur gel Centrifugation
Échange d’ions Chromatographie Dialyse Filtration sur diatomées

(1) Notion assez théorique puisque le mécanisme de transfert est de type diffusionnel.
(2) Les valeurs données n’ont rien d’absolu.
(3) Π = 25 bar pour l’eau de mer.

Figure 26 – Interactions membrane-solution


susceptibles de colmater les membranes
et perturbant la modélisation du système

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Notations et Symboles Notations et Symboles

Symbole Unité Définition Symbole Unité Définition

a1 ................................ Activité du solvant J2 kg · m–2 · s–1 Flux massique de soluté à travers


ou m · s–1 la membrane ou densité de flux
A kg · m–2 · s–1 · Pa–1 Perméabilité de la membrane au volumique de soluté
ou en m · s–1 · Pa–1 solvant
................................ Rapport des perméabilités à t (oC) J lim kg · m–2 · s–1 Flux limite
At /A20
et à 20 oC K m · s–1 Coefficient de transfert de matière
C mol/m3 Concentration molaire en soluté M g/mol Masse molaire
B m · s–1 Perméabilité de la membrane au N m–2 Nombre de pores par unité de
soluté surface de membrane
C1 kg · m–3 Concentration moyenne du N1 ................................ Nombre de moles de solvant
solvant dans la membrane
N2 ................................ Nombre de moles de soluté
C 2m kg · m–3 Concentration moyenne du soluté
dans la membrane P Pa Pression appliquée
C 2s kg · m–3 Concentration du soluté dans la Peff Pa Pression efficace (P eff = ∆P – ∆Π )
solution p1 Pa Pression de vapeur de la solution
CB % en masse Teneur en matière sèche ou degré p* Pa Pression de vapeur du solvant pur
1
Brix
Q0 m3 · s–1 Débit volumique d’alimentation
Cg kg · m–3 Concentration de gel
Qp m3 · s–1 Débit volumique de perméat
Ci kg · m–3 Concentration du constituant i Qc m3 · s–1 Débit volumique de concentrat
dans la membrane
∆P Pa Différence de pression de part et
C0 kg · m–3 Concentration de l’espèce à d’autre de la membrane
retenir (soluté) dans la solution
R J · mol –1 · K–1 Constante molaire des gaz = 8,314
Cm kg · m–3 Concentration en soluté au niveau
de la membrane Ra m–1 Résistance hydraulique due à
l’adsorption
Cp kg · m–3 Concentration de l’espèce à
retenir (soluté) dans le perméat Rd m–1 Résistance hydraulique due aux
dépôts
C mol · m–3 Concentration molaire du soluté
R lim m–1 Résistance hydraulique due à la
d m Diamètre de pore de la membrane couche limite de polarisation
dh m Diamètre hydraulique Rm m–1 Résistance hydraulique de la
dS nm Diamètre de Stokes membrane
D2 m2 · s–1 Coefficient de diffusion du soluté Re ................................ Nombre de Reynolds

D1 m2 · s–1 Coefficient de diffusion du solvant Sc ................................ Nombre de Schmidt


dans la membrane Sh ............................... Nombre de Sherwood
D2 m2 · s–1 Coefficient de diffusion du soluté T K Température thermodynamique
dans la membrane Tc K Température de congélation de la
Di m2 · s–1 Coefficient de diffusion du solution
constituant i dans la membrane T *c K Température de congélation du
e m Épaisseur de dépôt sur une mem- solvant pur
brane TR ................................ Taux de rétention
H ................................ Coefficient de distribution du TR obs ................................ Taux de rétention observé
soluté entre solution et mem-
brane ( H = = ∆ C 2 / ∆C 2 ) TR réel ................................ Taux de rétention réel

∆H f J · mol –1 Enthalpie de fusion du solvant U m · s–1 Vitesse moyenne du fluide


J m3 · s–1 · m–2 Débit volumique de perméat V m3 Volume de la solution
J1 Flux massique de solvant à V1 m3 · mol –1 Volume molaire partiel du solvant
kg · m–2 · s–1
ou m · s–1 travers la membrane ou densité Vi m3 · mol –1 Volume molaire partiel du
de flux volumique de solvant constituant i

Nous avons utilisé le système international d’unités SI mais aussi des Nous avons utilisé le système international d’unités SI mais aussi des
unités hors système encore employées couramment dans la profession, unités hors système encore employées couramment dans la profession,
telles que L · h–1 · m–2 pour les débits spécifiques des membranes. telles que L · h–1 · m–2 pour les débits spécifiques des membranes.
Indice 1 : solvant. Indice 1 : solvant.
Indice 2 : soluté. Indice 2 : soluté.
Surlignage : valeur du paramètre dans la membrane. Surlignage : valeur du paramètre dans la membrane.

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________________________________________________________________________________________________ TECHNIQUES SÉPARATIVES À MEMBRANES

Notations et Symboles Notations et Symboles

Symbole Unité Définition Symbole Unité Définition

Y ................................ Taux de conversion µ Pa · s Viscosité dynamique


z m Épaisseur effective de la
µ1 J · mol –1 Potentiel chimique de l’eau
membrane µi J · mol –1 Potentiel chimique du constituanti
Z1 ................................ Fraction molaire du solvant Π Pa Pression osmotique
Z2 ................................ Fraction molaire du soluté ρD kg · m–3 Masse volumique du dépôt
α1 , α2 ................................ Coefficients expérimentaux (nom- σ ................................ Coefficient de réflexion (ou de
et α 3 bre de Sherwood) Staverman)
β ................................ Constante dans le modèle de τ ................................ Facteur de tortuosité
dépôt-érosion τc Pa Contrainte critique d’érosion
γ ................................ Facteur de polarisation τw Pa Contrainte de cisaillement à la
Γ2 mol –1 · m3 Second coefficient du viriel paroi
δ m Épaisseur de la couche de polari- ω m · s–1 Perméabilité au soluté
sation
ε ................................ Porosité de la membrane Φ ................................ Rapport entre le diamètre d’une
molécule et le diamètre des pores
θ K Abaissement du point de
congélation Nous avons utilisé le système international d’unités SI mais aussi des
unités hors système encore employées couramment dans la profession,
Nous avons utilisé le système international d’unités SI mais aussi des telles que L · h–1 · m–2 pour les débits spécifiques des membranes.
unités hors système encore employées couramment dans la profession, Indice 1 : solvant.
telles que L · h–1 · m–2 pour les débits spécifiques des membranes.
Indice 2 : soluté.
Indice 1 : solvant.
Surlignage : valeur du paramètre dans la membrane.
Indice 2 : soluté.
Surlignage : valeur du paramètre dans la membrane.

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