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J'ai fait des études d'Histoire... Et ça se lit...

La Geste Héroïque Mais Néanmoins Véridique de Joseph de Ponchu, Chevalier Croisé Et Sa


Descendance.

Un bruit.
Un bruit de fureur et de combat fait rage dans la plaine. Joseph de Ponchu, chevalier croisé de basse
noblesse, parti en croisade pour trouver honneur, gloire et richesses est actuellement couvert de merde
et de boue sous les murs d’Antioche. Que de chemin parcouru pour venir ici, aux côtés de Bohémond
le Valeureux, le Sanguinaire, par trois fois Sauveurs des Chrétiens. Il en a souffert et son calvaire
pourtant ne fait que commencer.
Voici conté sous vos yeux esbaudis la geste héroïque mais néanmoins véridique de ce chevalier aux
armes rouillées mais au cœur vaillant.
Il parti d’un beau matin d’avril 1095 pour rejoindre avec quelques 15.000 autres pèlerins, menés par
Pierre l’Ermite et Gautier Sans-Avoir rejoindre Cologne où les forces d’Adhémar de Monteil, évêque
de Puy-en-Velay et désigné par le pape Urbain II pour prendre la tête de la croisade se cantonnent. Le
jeune Joseph laisse derrière lui une ferme fortifiée, quelques serfs et paysans ainsi que sa femme et ses
deux fils, trop jeunes pour l’accompagner. Armé de l’héritage paternel, un vieux cheval, une armure
de plate incomplète et une vieille épée émoussée, il espère gagner les faveurs divines pour l’après mais
surtout les faveurs pécuniaires pour le pendant. Gloire et richesse attendent ceux qui iront délivrer le
tombeau du Christ à Jérusalem et venger les exactions des Turcs infidèles sur les pauvres pèlerins
chrétiens en 1071. De plus, la prise de Nicée en 1078 et la création d’un royaume seldjoukide aux
portes de Constantinople sont des raisons bien suffisantes pour porter la guerre, noble sport de nobles
gens d’armes, en ces terres lointaines.
Il est donc de la partie. Les succès s’enchaînent plus ou moins bien, c’est selon disent certains ; c’est la
faute aux agneaux qui étaient daubés du cul disent les autres mais voilà qu’en quelques temps les
croisés, ainsi nommé car ils portent la croix du christ sur les vêtements, prennent la ville d’Antioche et
s’installent en Syrie. Ils vont de victoires en victoires, ponctionnant toujours plus sur le dos des
populations locales trop effrayées pour leur résister. Ils bénéficient aussi de la dissension qui existe
entre les émirs et les sultans musulmans et se payent sur les populations locales. Viol, pillage,
cannibalisme lorsque la viande se fait rare sont monnaies courantes et le paradis gagnés ainsi sera très
certainement un bonheur éternel.

Voici, repris dans une chanson bretonne les aventures de Joseph et ses compagnons :

Por christ et saincte terre, ai quitté manoir landes et fougères,


à l'épaule rouge croix, Va l'ost des croisés.
De Rennes en Bords de Loire, ainçois de poigner les infidels,
pieux manants, preux chevaliers, Va l'ost des croisés.
riches barons si que posvres hères, Grever antioche, nicée de mesme,
Va l'ost des croisés. Béthléem et Dorylée,
emprés sanglanter Jérusalem,
De Lyon, Tolose ou Plouharnel, Va l'ost des croisés.
tant et tant avons marché,
norris plus de panais que d'oisels, Torteures, viols et cholères,
Va l'ost de croisés. d'arabie qu'ai-je gaigné?
De Rome autresi que de Vienne, Ventre maigre, rancure et chimaire
mal hyver ou bel aesté, Va 'ost des croisés.
fust souvent sans pâques mon quaresme, Princes soiffés de guerre,
Va l'ost des croisés. d'argent et d'or fameillés,
paradis vous changez en enfer,
Flories et rouges enseignes, Va l'ost des croisés.
à cavale si qu'à pied,
aloiiés de toutes les bretaignes, Viste in est dicts être infidels
Va l'ost des croisés. quand fidel à d'autre foys,
De champaignes en déserts, et l'on faist por dieu force champels,
trois ans à guerre mener, Va l'ost des croisés.
por Jésus ou por fuyr la misère, Mau choix fis de guerpir Bretaigne
Va l'ost des croisés. par des prestres malignié:
Bon eur est aux chaumois de goulenn,
Constantinople, à la noël, Va l'ost des croisés.
nous fist lige de son roy,

C’est le chroniqueur franc Raoul de Caen qui nous rapporte fidèlement les exactions des chevaliers du
Christ, ces héros de la Chrétienté toute entière :
A Maara, les nôtres faisaient bouillir des païens adultes dans des marmites, ils fixaient les enfants sur
les broches et les dévoraient grillés.
Ainsi va de la vie et la poursuite du rêve. Bien sûr les défections sont nombreuses mais Joseph tient
bon et reste avec Godeffroy de Bouillon, son suzerain. Ils prennent Damas en décembre 1097 et Alep
en février 1098. Puis ils se dirigent doucement mais sûrement vers Jérusalem qu’ils atteindront en
janvier 1099.
Le siège se fait dru. Il se fait long. Mais au final, la prise de la ville, le 15 juillet de la même année,
sera la clef de la réussite. Joseph est heureux, il est riche et peut rentrer chez lui profiter de sa
famille… Il instruit alors ses fils mais bientôt l’heure de repartir est sur lui. Il verra cette fois-ci son
aîné partir quérir gloire et fortune en Terre Sainte dès 1147. En effet, les rois ayant perçu tout le
potentiel commercial des conquêtes de l’Orient décident de s’en mêler et lèvent leurs armées. C’est
Louis VII qui le premier se croisera pour partir en guerre. Mais ce n’est pas très glorieux. Les
mésententes avec les troupes germaniques de Conrad II font que les croisés sont désorganisés, perdus
et vaincus. Ils prennent quelques villes, obtiennent quelques victoire mais Joseph II de Ponchu, fils du
premier revient dépité. Heureusement, son grand âge est l’excuse parfaite mais il a bien juré que les
croisades pour lui, c’est fini. Il se tourne alors vers sa famille et élève dans la plus pure tradition
militaire et paysanne ses deux fils.
Pourtant, là-bas, tout n’est pas rose et un chef de guerre charismatique semble émaner des troupes
musulmanes. Il fédère, il conspire et il conquiert. Saladin, car tel est le nom de cet infidèle aux idéaux
chrétiens, prend même la ville de Jérusalem en 1187. La guerre sainte qu’il a proclamée est une
victoire écrasante. Dès lors, le pape Grégoire VII décrète une nouvelle croisade et désire mener les
croisés d’Occident vers la guerre pour une meilleure paix.
Les rois se croisent, puis partent sur les navires italiens, bien content eux d’avoir des retours
commerciaux si florissants. Les croisades c’est l’occasion pour Gênes, Venise et Naples de faire
commerce et s’enrichir. Surtout Venise qui supportent depuis le début les chevaliers chrétiens et qui
récupèrent un tiers des villes prisent. Les fils de Joseph sont prêts. Joseph III et son frère Wilhem ont
tout le barda : l’épée de grand-père, celle qui a vu Jérusalem, un cheval de guerre offert par leur mère
et une armure de plate complète cette fois-ci, merci papa.
Ils partent donc rejoindre les forces alliées en Normandie, habitude qui perdurera longtemps. Puis se
dirigent vers la Méditerranée pour embarquer à bord des navires italiens. La prise de Chypre offre aux
croisés une base de replis et une place forte proche des conflits. Les Occidentaux de Terre Sainte ne
sont pas en reste et les sièges de Damas, Acre et Jérusalem commencent. C’est principalement à Acre
où Guy de Lusignan, roi de Jérusalem a commencé le siège en août 1188 qui est le point focal de
toutes les attentions. Une fois Acre prise, un nouveau royaume voit le jour et une tête de pont est
établie. Bien que les troupes françaises soient reparties, c’est les troupes anglaises, menées par Richard
Cœur-De-Lion qui délivrent l’Orient. Il mourra pourtant d’une flèche en plein cœur, comme le
personnage tragique qu’il est. Les fils Ponchu, riches encore et chanceux de n’avoir pas succombés,
rentrent donc au pays. Mathilde, leur mère, les attends bien sagement bien que leur père soit partis aux
cieux rejoindre ses pères et les pères de ceux-ci. Les croisades c’est fini, disent-ils et ils ont rapporté
des bonbons car les fleurs sont périssables.
Pourtant, en 1202, Innocent III, pape de son prénom décide qu’il est temps de laisser un souvenir
impérissable dans les pages de l’Histoire et à son tour appelle à la bonne volonté d’aller se faire tuer et
lance une quatrième croisade. Les frères Ponchu sont fatigués et leurs fils ne sont pas encore en âge.
Ils passent donc. Bien leur en pris car cette croisade ne verra jamais la Terre Sainte. Honteusement
détournée par des vils vénitiens qui désirent plus que tout régler une vieille dette d’avec Byzance, elle
verra les croisés piller la Nouvelle Rome et repartir avec le butin. Des chrétiens tuent d’autres
chrétiens mais à leur décharge, ceux-là étaient orthodoxes. Un moment de honte pour cet épisode
navrant.
S’en suit quatre autres croisades, chacune ayant pour but d’apporter un peu plus de gloire et de
richesse à ses déclencheurs mais sur le plan éthique et morale n’apportent pas grand-chose. Le pieux
Louis IX en sera même de sa poche pour aller voir le tombeau de Jérusalem et financera la septième
croisade. Le fils du second frère Ponchu sera de la partie, voulant lui aussi admirer la Terre Sainte que
croisèrent ses ancêtres. Revenu blessé, il instruira ses fils en leur disant bien que les croisades, pour
lui, c’est fini.
Que retenir de ces quelques lignes ? Quels furent les destins des hommes de la famille Ponchu ? Pas
grand-chose. Même si les occidentaux rapportèrent quelques nouveautés de leurs visites en Terres
Saintes, rien d’extraordinaire ne se produisit. Ces croisades contribuèrent à éloigner les Chrétiens des
Musulmans mais aussi, surtout, les Catholiques des Orthodoxes. La prise de Constantinople, les
trahisons répétées des croisées envers les byzantins et les exactions barbares et sanguinaires
contribuèrent à enliser encore plus les terres européennes et à développer un sentiment de méfiance et
de haine de la part des peuplades soumises.
Les croisades n'ont pas favorisé la connaissance réciproque des deux civilisations. Des contacts plus
enrichissants se sont noués en Espagne, en Sicile et à Constantinople après 1204. Comme toute
propagande, celle des croisades est plutôt négative. Les musulmans sont accusés à cette occasion
d'idolâtrie, d'immoralité et même de louer et justifier la violence, alors que les chrétiens eux-mêmes
faisaient l'apologie de la guerre pour rassembler et recruter des chevaliers sous la bannière du Christ.
Les croisades ont été l'occasion pour les chrétiens occidentaux d'être confrontés à une masse de non-
chrétiens. Les disputations religieuses sont rares. Les conversions religieuses vers le christianisme se
sont rarement faites sous la contrainte. Le missionnaire Ricoldo loue même l'hospitalité des
musulmans.
Finalement, leur effet politique essentiel, et reconnu par tous, aura été de retarder de près de deux
siècles la prise de Constantinople par les Turcs. Ce délai sera mis à profit par les principaux États
européens pour se former et se consolider, confinant la poussée ottomane sur la rive sud de la
Méditerranée.
Joseph-Marie Ponchu, descendant du chevalier, historien amateur.

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