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Pr Hela JAÏDANE Cours d’Immunologie générale 2 ème année

UNIVERSITE DE MONASTIR
*** *** ***
FACULTE DE PHARMACIE DE MONASTIR
*** *** ***
Département de Biologie Clinique B

IMMUNOLOGIE GENERALE
L’immunité innée
Le Complexe Majeur d’Histocompatibilité
L’immunité anti-infectieuse
La tolérance immunitaire
Introduction à l’immunopathologie
Introduction à l’immunothérapie

Cours destiné aux étudiants


de 2ème année Pharmacie

Elaboré par Pr H. JAÏDANE (MC)

Année universitaire 2022/2023

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Pr Hela JAÏDANE Cours d’Immunologie générale 2 ème année

SOMMAIRE

Liste des abréviations 5

Liste des tableaux 6

Liste des figures 7

L’immunité innée 9
1) Introduction 10
2) Composantes et mécanismes effecteurs de l’immunité innée 10
2.1) Défenses des barrières 11
2.1.1) Barrières mécaniques 11
2.1.2) Barrières chimiques 11
2.1.3) Barrières microbiologiques 12
2.2) Effecteurs cellulaires 12
2.2.1) Les polynucléaires 13
2.2.2) Les phagocytes mononucléés 13
2.2.3) Les mastocytes 14
2.2.4) Les cellules lymphoïdes 14
2.2.5) Les récepteurs des cellules de l’immunité innée 14
2.3) Effecteurs moléculaires 15
2.3.1) Le système du complément 16
2.3.2) Les cytokines 16
2.3.3) Les anticorps naturels 17
2.3.4) Les enzymes et peptides antimicrobiens 17
2.3.5) Les autres médiateurs solubles 17
3) La phagocytose 18
4) La réaction inflammatoire 19
4.1) Composantes de la réaction inflammatoire 19
4.2) Mécanismes de la réaction inflammatoire 19
4.3) Manifestations de la réaction inflammatoire 20
4.4) Evolutions possibles de l’inflammation aiguë 21
5) Conclusion 21
6) Messages pédagogiques à retenir 21

Le complexe majeur d’histocompatibilité 23


1) Introduction 24
2) Le complexe génique HLA 24
2.1) La région HLA de classe I 25
2.1) La région HLA de classe II 25
2.3) La région HLA de classe III 25
3) Propriétés des gènes HLA 25
3.1) Polymorphisme génétique multi-allélique 25
3.2) Transmission « en bloc » 26
3.3) Codominance 27
3.4) Déséquilibre de liaison 27
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3.5) Nomenclature 27
4) Les molécules HLA 27
4.1) Structure des molécules HLA 28
4.1.1) Structure des molécules HLA de classe I 28
4.1.2) Structure des molécules HLA de classe II 28
4.2) Site de fixation du peptide antigénique 29
4.3) Expression cellulaire des molécules HLA 30
4.3.1) Expression des molécules HLA de classe I 30
4.3.2) Expression des molécules HLA de classe II 30
4.4) Fonctions des molécules HLA 30
4.4.1) Présentation des antigènes aux lymphocytes T 30
4.4.2) Contrôle de l’inhibition des cellules NK 31
5) Formation des complexes CMH-peptide 32
5.1) Voie des molécules de classe I ou voie endogène 33
5.2) Voie des molécules de classe II ou voie exogène 33
5.3) Cas particuliers 34
6) Reconnaissance des molécules HLA à la surface de la cellule par les 35
lymphocytes T
7) Applications du système HLA 36
7.1) HLA et populations 36
7.2) HLA et maladies 36
7.3) HLA et greffe 37
8) Conclusion 37
9) Messages pédagogiques à retenir 37

L’immunité anti-infectieuse 39
1) Introduction 40
2) L’immunité antibactérienne 40
2.1) Réponse antibactérienne innée 41
2.1) Réponse antibactérienne adaptative 41
2.3) Stratégies d’échappement des bactéries à la réponse immune 42
3) L’immunité antivirale 42
3.1) Réponse antivirale innée 42
3.2) Réponse antivirale adaptative 43
3.3) Stratégies d’échappement des virus à la réponse immune 44
4) L’immunité antiparasitaire 45
4.1) Réponse antiparasitaire innée 45
4.2) Réponse antiparasitaire adaptative 45
4.3) Stratégies d’échappement des parasites à la réponse immune 45
5) L’immunité antifongique 46
5.1) Réponse antifongique innée 46
5.2) Réponse antifongique adaptative 46
5.3) Stratégies d’échappement des champignons à la réponse immune 46
6) Conclusion 47
7) Messages pédagogiques à retenir 47

La tolérance immunitaire 48
1) Introduction 49
2) Les différents types de tolérance immunitaire 49
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3) Les facteurs intervenant dans la tolérance immunitaire 49
3.1) Facteurs liés à l’antigène 50
3.2) Facteurs liés à l’hôte 50
4) Les mécanismes d’établissement de la tolérance immunitaire 50
4.1) Tolérance centrale 50
4.2) Tolérance périphérique 51
5) Conclusion 54
6) Messages pédagogiques à retenir 54

Introduction à l’immunopathologie 56
1) Introduction 57
2) Les réactions d’hypersensibilité 57
2.1) Classification de Gell et Coombs 57
2.2) Hypersensibilité allergique de type 1 58
3) Les maladies auto-immunes 58
3.1) Généralités 58
3.2) Classification 59
3.3) Rôle des auto-anticorps 60
4) Les syndromes lymphoprolifératifs 61
4.1) Généralités 61
4.2) Classification 61
4.3) Diagnostic 62
5) Les déficits immunitaires 63
5.1) Les déficits immunitaires primitifs 63
5.2) Les déficits immunitaires acquis 63
6) Conclusion 64
7) Messages pédagogiques à retenir 64

Introduction à l’immunothérapie 65
1) Introduction 66
2) Les immunothérapies immunosuppressives 66
2.1) Principes de l’immunosuppression 66
2.2) Modalités de l’immunosuppression spécifique 67
2.2.1) Les anticorps monoclonaux 67
2.2.2) Les immunotoxines 68
2.2.3) Les cytokines immunosuppressives 69
2.2.4) Les lymphocytes T régulateurs 69
2.2.5) La déviation immunitaire 70
3) Les immunothérapies immunostimulatrices 70
3.1) Principe de l’immunostimulation 70
3.2) Modalités de l’immunostimulation 71
3.2.1) La sérothérapie 71
3.2.2) La thérapie cellulaire adoptive 71
3.2.3) La vaccination / Immunisation thérapeutique 72
3.2.4) Potentialisation de l’activation lymphocytaire 73
3.2.5) Blocage de l’immunosuppression 73
4) Conclusion 74
5) Messages pédagogiques à retenir 74

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LISTE DES ABREVIATIONS

BCR : « B cell receptor »


CD : Cluster de différenciation
CLIP : peptide de Li associé au CMH
CLR : « C-type lectin receptor »
CMH : complexe majeur d’histocompatibilité
CPA : cellule présentatrice d’antigènes
CRP : « C-reactive protein »
CXCL : « (C-X-C motif) ligand »
DAMP : « Danger–Associated Molecular Patterns »
HDL : « High density lipoprotein »
HLA : « Human Leukocyte Antigen »
HSIA : hypersensibilité immunitaire allergique
IFN : interféron
IL : Interleukine
ILC : « Innate Lymphoid Cells »
KAR : « Killer Activating Receptors »
KIR : « Killer Inhibitory Receptors »
LB : lymphocyte B
LDL : « Low density lipoprotein »
LT : lymphocyte T
MAI : maladie auto-immune
MAMP : « Microbe–Associated Molecular Patterns »
MBP : « Mannan Binding Protein »
NK : « Natural Killer »
NLR : « NOD-like Receptors »
PAMP : « Pathogen–Associated Molecular Patterns »
PNN : Polynucléaire neutrophile
PRR : « Pattern Recognition Receptors »
RE : réticulum endoplasmique
RLR : « RIG-like Receptors »
SLP : syndrome lymphoprolifératif
SNC : système nerveux central
TCR : « T cell receptor »
TGF : « Tumor growth factor »
TLR : « Toll-like Recceptors »
TNF : « Tumor necrosis factor »

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LISTE DES TABLEAUX

Introduction à l’immunopathologie
Tableau I : Classification des maladies auto-immunes selon les tissus affectés
Tableau II : Classification des maladies auto-immunes selon les mécanismes
pathogéniques
Tableau III : Les auto-anticorps comme marqueurs diagnostiques des MAI
Tableau IV : Quelques exemples de déficits immunitaires primitifs

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LISTE DES FIGURES

L’immunité innée
Figure 1 : Principaux effecteurs de l’immunité innée
Figure 2 : Effecteurs de la barrière cutanéo-muqueuse
Figure 3 : Localisation et rôle des principales cellules de l’immunité innée
Figure 4 : Les « Pattern Recognition Receptors » (PRR)
Figure 5 : Rôle du complément dans l’immunité innée
Figure 6 : Rôle et cibles des cytokines pro-inflammatoires
Figure 7 : Récepteurs de la phagocytose avec ou sans opsonisation
Figure 8 : Etapes de la phagocytose
Figure 9 : Les différentes étapes de la réaction inflammatoire
Figure 10 : Cascade d’évènements menant au recrutement des leucocytes

Le complexe majeur d’histocompatibilité


Figure 1 : Organisation générale de la région HLA
Figure 2 : Organisation détaillée de la région HLA classe II
Figure 3 : Polymorphisme allélique et polygénie du système HLA
Figure 4 : Transmission en bloc des haplotypes HLA des parents aux descendants
Figure 5 : Expression codominante des allèles parentaux
Figure 6 : Représentation schématique d’une molécule HLA de classe I (a) et de
son interaction avec un lymphocyte TCD8+ (b)
Figure 7 : Représentation schématique d’une molécule HLA de classe II (a) et de
son interaction avec un lymphocyte TCD4+ (b)
Figure 8 : Représentation schématique du site de fixation du peptide antigénique
au niveau des molécules HLA de classe I et de classe II
Figure 9 : Interactions entre molécules HLA et lymphocytes T en conditions
physiologiques et pathologiques
Figure 10 : Maintien de l’inhibition des cellules NK via l’expression normale de
molécules HLA de classe I
Figure 11 : Apprêtement de l’antigène, formation du complexe CMH-peptide et
présentation à la surface de la cellule
Figure 12 : Présentation des peptides endogènes par les molécules HLA classe I
Figure 13 : Présentation des peptides exogènes par les molécules HLA classe II
Figure 14 : Représentation schématique de l’interaction d’un superantigène avec,
d’une part, une molécule de CMH de classe II à la surface d’une cellule
présentatrice d’antigène et, d’autre part, la partie Vβ du TCR d’un lymphocyte
TCD4+
Figure 15 : Représentation schématique de l’interaction CMH-peptide-TCR

L’immunité anti-infectieuse
Figure 1 : Réponse immunitaire contre les bactéries à multiplication extracellulaire
(a) et intracellulaire (b)
Figure 2 : Récapitulatif des divers acteurs de la réponse antivirale innée
Figure 3 : Mode d’action de l’IFNα
Figure 4 : Réponse antivirale adaptative
Figure 5 : Différents modes d’action des anticorps dans la réponse antivirale
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Pr Hela JAÏDANE Cours d’Immunologie générale 2 ème année
Figure 6 : Polarisation Th1 / Th17 lors de la réponse antifongique adaptative

La tolérance immunitaire
Figure 1 : Réponse immune versus tolérance immune
Figure 2 : Principaux mécanismes d’établissement de la tolérance centrale
Figure 3 : Mécanismes d’établissement de la tolérance centrale des LT
Figure 4 : Mécanismes d’établissement de la tolérance centrale des LB
Figure 5 : Principaux mécanismes d’établissement de la tolérance périphérique
Figure 6 : Mécanismes d’établissement de la tolérance périphérique des LT
Figure 7 : Différents mécanismes d’induction de l’anergie des LT auto-réactifs
Figure 8 : Mécanismes d’établissement de la tolérance périphérique des LB
Figure 9 : Les différents types de LTreg
Figure 10 : Différents modes d’action des LTreg dans la tolérance périphérique des
auto-antigènes

Introduction à l’immunopathologie
Figure 1 : Classification des HSIA selon Gell et Coombs
Figure 2 : Etapes et mécanismes de la réaction d'hypersensibilité allergique de
type 1
Figure 3 : Destruction de la gaine de myéline par les LTc au cours de la sclérose en
plaques
Figure 4 : Observation microscopique de coupes de pancréas montrant un îlot de
Langerhans entouré de tissu du pancréas exocrine (coloration
hématoxyline/éosine). Figure 5 : Observation microscopique de différents types
d’auto-Acs mis en évidence par immunofluorescence
Figure 6 : Trois grands prototypes de SLP
Figure 7 : Principales approches diagnostiques de la monoclonalité

Introduction à l’immunothérapie
Figure 1 : Utilité des thérapies immunosuppressives
Figure 2 : Mode d'action génomique des glucocorticoïdes
Figure 3 : Mécanismes d'action des immunosuppresseurs bloquant la réponse
lymphocytaire T
Figure 4 : Mécanismes d’action des anticorps thérapeutiques
Figure 5 : Mécanismes d’action du Rituximab
Figure 6 : Mécanismes d’action de la chimioimmunothérapie
Figure 7 : Immunothérapie de désensibilisation à un allergène
Figure 8 : Utilité des thérapies immunostimulatrices
Figure 9 : Principe de la sérothérapie
Figure 10 : Comparaison de la protection conférée par un sérum à celle résultant d’une
vaccination
Figure 11 : Principe de l’immunothérapie cellulaire
Figure 12 : Structure du récepteur des cellules CAR-T
Figure 13 : Immunostimulation par blocage des inhibiteurs CTLA-4 et PD-1
Figure 14 : Blocage de l’activité immunosuppressive des LT reg par un anticorps dirigé
contre la protéine GARP nécessaire à la production de TGFβ
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L’immunité innée

OBJECTIFS
1. Définir l’immunité innée et énumérer ses caractéristiques
2. Décrire les composantes et les mécanismes effecteurs de l’immunité innée
(défenses des barrières, effecteurs cellulaires et effecteurs moléculaires)
3. Décrire la phagocytose
4. Décrire la réaction inflammatoire en expliquant son rôle, ses composants, son
mécanisme et ses manifestations

PLAN
1) Introduction
2) Composantes et mécanismes effecteurs de l’immunité innée
2.1) Défenses des barrières
2.1.1) Barrières mécaniques
2.1.2) Barrières chimiques
2.1.3) Barrières microbiologiques
2.2) Effecteurs cellulaires
2.2.1) Les polynucléaires
2.2.2) Les phagocytes mononucléés
2.2.3) Les mastocytes
2.2.4) Les cellules lymphoïdes
2.2.5) Les récepteurs des cellules de l’immunité innée
2.3) Effecteurs moléculaires
2.3.1) Le système du complément
2.3.2) Les cytokines
2.3.3) Les anticorps naturels
2.3.4) Les enzymes et peptides antimicrobiens
2.3.5) Les autres médiateurs solubles
3) La phagocytose
4) La réaction inflammatoire
4.1) Composantes de la réaction inflammatoire
4.2) Mécanismes de la réaction inflammatoire
4.3) Manifestations de la réaction inflammatoire
4.4) Evolutions possibles de l’inflammation aiguë
5) Conclusion
6) Messages pédagogiques à retenir

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1) Introduction
La réponse immunitaire à une quelconque agression (invasion microbienne,
traumatisme, lésion tissulaire, brûlure physique ou chimique, tumeur, …) se déroule en
deux grandes phases successives :
- la réponse innée : elle se met en place très rapidement (dans les 4h suivant
l’exposition à l’agent déclencheur) au lieu de l’agression. Egalement qualifiée
de naturelle, elle ne nécessite pas d’apprentissage puisqu’elle met en jeu des
effecteurs moléculaires et cellulaires non spécifiques d’antigène, et ne garde
donc pas de mémoire de ce dernier. Certains des effecteurs de l’immunité
innée sont constitutifs (défenses des barrières) et constituent la toute première
ligne de défense qui intervient de manière immédiate, alors que d’autres sont
rapidement inductibles (réaction inflammatoire) et constituent une deuxième
ligne de défense.
- la réponse adaptative : elle se met en place plus tardivement (au-delà de 96h),
dans le cas où l’agent déclencheur n’a pas pu être neutralisé par la réponse
innée. Egalement qualifiée d’acquise, elle met en jeu des effecteurs spécifiques
d’antigène qui développent une mémoire immunologique de celui-ci.
Dans le présent chapitre, après une brève présentation des acteurs cellulaires et
moléculaires qui vont intervenir, nous décrirons en détail les étapes et mécanismes de
la réponse immunitaire innée, de la détection d'une menace à la résolution de
l'inflammation.

2) Composantes et mécanismes effecteurs de l’immunité innée


L’immunité innée utilise les fonctions d’exclusion du revêtement cutanéo-
muqueux et met en jeu des signaux d’activation (cytokines) entre des ensembles de
molécules plasmatiques (complément, interféron, …) et des cellules (polynucléaires
neutrophiles (PNN), macrophages, cellules dendritiques, …) (Figure 1). Cette immunité
conduit notamment à la réaction inflammatoire. Elle permet une réponse rapide et
efficace sur un grand nombre de pathogènes. De plus, elle joue un rôle majeur dans la
mise en place des réponses immunitaires adaptatives et des processus de réparation
tissulaire/cicatrisation.

Figure 1 : Principaux effecteurs de l’immunité innée

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2.1) Défenses des barrières
Le revêtement cutanéo-muqueux représente la première ligne de défense contre
les agressions externes. En effet, la peau et les muqueuses des différentes portes
d’entrée de l’organisme constituent des barrières de différentes natures s’opposant à
l‘entrée des pathogènes (Figure 2). Il existe d’ailleurs un tissu lymphoïde associé à
chaque muqueuse.

Figure 2 : Effecteurs de la barrière cutanéo-muqueuse

2.1.1) Barrières mécaniques


Les cellules épithéliales de la peau et des muqueuses sont liées entre elles par des
jonctions serrées s’opposant au franchissement de l’épithélium en question. Par
ailleurs, les cellules épithéliales des muqueuses sécrètent du mucus qui sert de
barrière protectrice entre elles et les pathogènes. Certaines cellules sont également
dotées de cils vibratiles qui s’opposent à la progression de ces envahisseurs dans les
muqueuses et tentent de les expulser. Les flux d’air et de liquide au niveau des
muqueuses, ainsi que le péristaltisme intestinal jouent ce même rôle.
2.1.2) Barrières chimiques
Les cellules épithéliales de la peau et des muqueuses sécrètent différentes
substances chimiques visant à neutraliser les pathogènes :
- des acides gras au niveau de la peau
- des enzymes et peptides antimicrobiens pouvant être produits par de
nombreuses cellules telles que celles des glandes sous-muqueuses, des
épithéliums, les PNN et les macrophages. A titre d’exemple, nous pouvons citer :
- le lysozyme au niveau de la salive, de la sueur, des larmes et des sécrétions
nasales (250-500 µg/ml). C’est une enzyme de 14 kDa dirigée contre la paroi
des bactéries GRAM+. Indépendamment de son activité enzymatique, il agit
également sur les bactéries GRAM- via l’activation des autolysines
bactériennes, l’agrégation des bactéries et le blocage de l’adhérence
bactérienne.
- la lactoferrine au niveau du mucus, des larmes, de l’urine et de la salive. C’est
une protéine chélatrice du fer présent dans le milieu. En plus de l’induction de

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la lyse bactérienne, elle possède aussi une activité antivirale en inhibant
l’entrée des virus.
- les défensines α et β au niveau de la peau, de l’intestin et du tractus
respiratoire. Ce sont des peptides de 29 à 34 acides aminés, à caractère
amphiphile (groupe hydrophobe et groupe hydrophile) qui s’intercalent dans
la paroi bactérienne. Elles sont actives sur les bactéries aussi bien GRAM+ que
GRAM- mais aussi sur les champignons et les virus.
- les protéines A et D du surfactant au niveau des poumons
- les cryptidines au niveau de l’intestin
- la pepsine au niveau de l’intestin
- le pH acide de l’estomac
2.1.3) Barrières microbiologiques
La peau et les muqueuses sont colonisées par une multitude de microorganismes
(essentiellement des bactéries mais aussi des virus et des champignons) non
pathogènes qu’on appelle flore normale ou microbiote. Cette flore aide à contrer les
pathogènes en entrant en compétition avec eux pour les nutriments et pour
l’attachement à l’épithélium, et aussi en produisant des substances antimicrobiennes
pour les neutraliser.
2.2) Effecteurs cellulaires
Lorsque les barrières sont compromises, toute une armada de cellules est
rapidement mobilisée pour contrer l’agresseur. La majorité des cellules de l'immunité
innée sont d'origine myéloïde. Il s'agit des polynucléaires ou granulocytes et des
phagocytes mononucléés (monocytes, macrophages et cellules dendritiques) (Figure
3). Il existe également des cellules d'origine lymphoïde comme les cellules « Natural
Killer » (NK), les « Innate Lymphoid Cells" (ILC) ou les cellules dendritiques
plasmacytoïdes.

Figure 3 : Localisation et rôle des principales cellules de l’immunité innée

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2.2.1) Les polynucléaires
Parmi les polynucléaires (ou granulocytes), les PNN, globules blancs les plus
abondants dans le sang, sont les premières cellules recrutées lors de l'introduction
d'un agent pathogène dans l'organisme. Ils sont l’un des pivots de l'immunité innée en
constituant un puissant système de défense contre les agents pathogènes,
principalement les bactéries et les champignons, mais aussi contre des cellules ou des
molécules endogènes altérées. Les activités microbicides et cytotoxiques des PNN
dépendent de mécanismes très intriqués comprenant la libération d'enzymes
protéolytiques, la production rapide de formes réactives de l'oxygène, la phagocytose
et la nétose (libération de fibres ou trappes extracellulaires composées d’ADN et de protéines
pour piéger les microorganismes pathogènes).
Les polynucléaires éosinophiles, impliqués à une moindre mesure, sont
essentiellement des cellules pro-inflammatoires qui peuvent libérer leurs granulations
spécifiques cytotoxiques à bas bruit ou en réponse à un stimulant. Ils sont recrutés sur
les lieux de l'inflammation en particulier par l'éotaxine-1 (CCL11) et l'IL-5. Ils jouent un
rôle important dans la réponse contre les parasites et ce, en se fixant dessus et en
déversant le contenu enzymatique de leurs granules qui permet de les fragmenter.
Les polynucléaires basophiles peuvent aussi être recrutés du sang vers les tissus
dans certaines conditions pathologiques comme les allergies et les parasitoses où,
malgré leur très faible nombre, ils jouent un rôle central en conjonction avec les
mastocytes tissulaires. En effet, leurs inclusions cytoplasmiques contiennent de
nombreuses molécules dont l’histamine et l’héparine.qui augmentent la perméabilité
vasculaire. Ils interviennent également dans le recrutement par chimiotactisme des
éosinophiles.
2.2.2) Les phagocytes mononucléés
Les monocytes, comme les PNN, sont des cellules sanguines circulantes qui seront
recrutées au site d'infection où ils pourront reconnaître et phagocyter les agents
pathogènes. Dans les tissus, les monocytes recrutés se différencient en macrophages
avec une durée de vie beaucoup plus longue que les PNN. Ces macrophages peuvent
également se différencier en cellules spécialisées résidant dans le tissu conjonctif de
nombreux organes (cellules de Kupffer pour le foie, microglie pour le SNC,
macrophages alvéolaires pour les poumons). Les macrophages font partie des «
cellules sentinelles » tissulaires et expriment des centaines de molécules leur
permettant de scruter leur environnement, l'état des tissus adjacents (normal,
apoptotique, altéré, nécrotique…), les métabolites (oxygène, glucose, pH…), les
lipoprotéines (LDL, HDL…), les immunoglobulines, les molécules du complément, les
cytokines (via le récepteur à l’IFN-γ) et les microorganismes infectieux. La principale
fonction des monocytes et macrophages est la phagocytose et la sécrétion de
cytokines qui peuvent activer ou diminuer l'inflammation selon le sous-type et l'état
d'activation de la cellule. Ils participent également par leur fonction de « nettoyage »
des débris et des cellules mortes aux mécanismes de résolution de l'inflammation et à

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Pr Hela JAÏDANE Cours d’Immunologie générale 2 ème année
l'homéostasie tissulaire. En conditions inflammatoires les monocytes peuvent
également se différencier en cellules dendritiques.
Les cellules dendritiques sont un autre type de « cellules sentinelles » des tissus
qui constituent un pont essentiel entre l'immunité innée et l'immunité adaptative (ce
sont les principales cellules présentatrices d’antigènes (CPA) aux lymphocytes T (LT)).
Elles produisent de très nombreuses cytokines de la réponse inflammatoire.
2.2.3) Les mastocytes
Les mastocytes sont des cellules exclusivement tissulaires très riches en
granulations. Ils terminent leur maturation dans les tissus où ils peuvent se multiplier
et séjourner plusieurs mois. Ils sont particulièrement nombreux dans la peau et les
muqueuses. Ils ont la particularité de pouvoir très rapidement libérer, par
dégranulation, de grandes quantités de médiateurs inflammatoires (en particulier
l'histamine) en réponse à de nombreux stimulants. Ils ont un rôle crucial dans le
déclenchement, l'entretien, et la régulation des réponses immunitaires innées, mais
participent également à la réponse immunitaire adaptative. Ils sont au centre des
mécanismes de l'hypersensibilité immédiate et des réponses antiparasitaires.
2.2.4) Les cellules lymphoïdes
Les lymphocytes Natural Killer (NK) reconnaissent les cellules infectées (en
particulier par les virus) ou les cellules modifiées (par exemple les cellules tumorales).
Ces lymphocytes font partie de l'immunité innée car ils n'expriment pas de récepteur à
l'antigène comme le TCR ou le BCR. Ils expriment cependant des récepteurs activateurs
ou inhibiteurs qui leur sont propres et libèrent des cytokines comme l'IFNγ ou des
protéines cytotoxiques contenues dans leurs granulations. Les lymphocytes NKT sont
aussi capables de tuer les cellules infectées et les cellules tumorales.
Les cellules lymphoïdes innées (ILC), de découverte récente, ont des propriétés de
sécrétion cytokinique proches des LT, mais n'expriment pas de récepteur de type TCR.
Elles sont réparties en trois groupes selon les cytokines produites, les ILC1, ILC2 et
ILC3. Leur rôle est probablement précoce et important lors des réponses tissulaires.
Enfin, n’oublions pas le rôle des LTγδ qui interviennent surtout au niveau des
muqueuses, et celui des lymphocytes B (LB) CD5+ (B1) responsables de la production
des anticorps naturels.
2.2.5) Les récepteurs des cellules de l’immunité innée
Les cellules phagocytaires (et les autres cellules susceptibles d’entrer en contact
avec des microorganismes, telles que les cellules épithéliales et endothéliales)
reconnaissent leur cible grâce à des récepteurs de reconnaissance de motifs, les
« Pattern Recognition Receptors » (PRR). Ce sont des récepteurs qui reconnaissent,
des motifs moléculaires conservés au cours de l'évolution des micro-organismes
(PAMP « Pathogen–Associated Molecular Patterns » ou MAMP « Microbe–Associated
Molecular Patterns »), ou des motifs moléculaires de cellules cancéreuses,
endommagées ou nécrotiques en dehors de toute infection. (DAMP « Danger–
Associated Molecular Patterns ».

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On distingue différents types de PRR selon leur structure, leur localisation
cellulaire, la cible qu’ils reconnaissent, et le résultat de leur interaction (Figure 4). Les
plus connus sont les :
- TLR « Toll-like Recceptors » au niveau de la membrane plasmique et de
l’endosome. Ils reconnaissent différents produits microbiens Leur interaction
avec leur cible génère un signal d’activation des cellules via une cascade de
signalisation.
- NLR « NOD-like Receptors » et RLR « RIG-like Receptors » au niveau du
cytoplasme. Ils reconnaissent respectivement des produits bactériens et viraux.
- CLR « C-type lectin receptor » au niveau de la membrane plasmique. Ils
reconnaissant le mannose des bactéries et champignons. Ils activent la
phagocytose.
- Récepteur FMLP (f-Met-Leu-Phe) qui reconnait les peptides N-formylés de
plusieurs bactéries. Son interaction avec sa cible génère un signal de
chimiotactisme.

Figure 4 : Les « Pattern Recognition Receptors » (PRR)

L’engagement des PRR avec leurs ligands active la cellule concernée et contribue
ainsi à de multiples mécanismes aboutissant à la production de cytokines
inflammatoires, à l'amplification de la réponse inflammatoire, à la stimulation de la
phagocytose, à la régulation de la migration, à l'apoptose, ainsi qu’à la maturation des
CPA.
2.3) Effecteurs moléculaires
De très nombreux médiateurs circulants issus des cellules immunitaires et des
cellules tissulaires environnantes participent à l'initiation, la pérennisation puis la
régulation de la réponse inflammatoire et de l'immunité innée. Les principaux sont les
suivants.

15
Pr Hela JAÏDANE Cours d’Immunologie générale 2 ème année
2.3.1) Le système du complément
C'est un ensemble de protéines majoritairement circulantes qui représentent
environ 5 % de l'ensemble des protéines plasmatiques. Le système du complément
peut être activé par trois voies d'activation complémentaires convergeant vers la
formation d'un complexe d'attaque membranaire responsable de la lyse des micro-
organismes infectieux ou des cellules infectées. De plus, de nombreux produits de
clivage des protéines du complément sont actifs dans l'immunité innée (l'opsonine
C3b, les anaphylatoxines C3a et C5a, …) (Figure 5).

Figure 5 : Rôle du complément dans l’immunité innée

2.3.2) Les cytokines


Au cours de la réponse innée, toutes les cellules immunitaires ainsi que les cellules
épithéliales et endothéliales peuvent produire des cytokines. En effet, les cytokines
jouent aussi un rôle fondamental dans l’activation des différents effecteurs de
l’immunité innée et la mise en place de la réaction inflammatoire. On distingue
principalement :
- les cytokines pro-inflammatoires comme le TNF, l'IL-1, l'IL-6, l'IL-12, les IFNα, β
et γ, l'IL-15 ;
- les cytokines chimio-attractantes (chimiokines) comme CXCL8 (IL-8) ;
- les cytokines régulatrices de l'inflammation comme l'IL- 10 ou le TGFβ.
Les cibles de ces cytokines de l'immunité innée sont multiples (Figure 6):
- la moelle osseuse : TNF, IL-1 et IL-6 induisent la production de leucocytes
- les cellules de l'immunité innée elles-mêmes (auto-entretien et régulation de
l'inflammation) : TNF et IL-1 activent les leucocytes et stimulent leur production
d’IL-1, IL-6 et chimiokines
- les cellules endothéliales vasculaires : activation de la coagulation,
augmentation de l’expression des molécules d’adhésion (par TNF et IL-1) ainsi
que la perméabilité (par TNF) et la production d’IL-1 et de chimiokines
- le foie : IL-1 et IL-6 activent la synthèse des protéines de la phase aiguë de
l’inflammation (protéines plasmatiques de concentration élevée en cas
d’inflammation et pouvant ainsi servir de marqueur de diagnostic, exp : la CRP
« C-reactive protein »)
- l'hypothalamus : induction de la fièvre TNF, IL-1 et IL-6

16
Pr Hela JAÏDANE Cours d’Immunologie générale 2 ème année

Figure 6 : Rôle et cibles des cytokines pro-inflammatoires

Parmi les cytokines pro-inflammatoires, les interférons sont connus pour leur
potentiel antiviral. Les interférons de type 1 (α et β) sont produits par les cellules
infectées et agissent en interférant avec la réplication virale, en augmentant
l’expression des molécules de CMH de classe I et donc la présentation d’antigènes aux
LTc, et en activant les cellules NK.
2.3.3) Les anticorps naturels
Les anticorps naturels sont différents des anticorps de la réponse adaptative. En
effet, ce sont des anticorps d’isotype IgM qui reconnaissent un large spectre d’agents
pathogènes. Ils sont produits par les LB1 CD5+. Ils neutralisent directement l’agent
pathogène via la formation de complexes immuns qui seront éliminés dans la rate. Ceci
prévient la dissémination de l’infection et stimule la réponse immune. Ces mêmes
anticorps peuvent aussi neutraliser le pathogène de manière indirecte suite à
l’activation du complément.
2.3.4) Les enzymes et peptides antimicrobiens
Les polynucléaires et les mastocytes peuvent libérer rapidement, par exocytose
granulaire, des protéines aux propriétés antimicrobiennes et inflammatoires. Ces
protéines peuvent être directement antimicrobiennes (protéases,
myéloperoxidase...), agir indirectement en séquestrant des nutriments essentiels aux
microbes (lactoferrine) et participer à la réponse inflammatoire en dégradant la
matrice extra-cellulaire (élastase, métalloprotéases).
2.3.5) Les autres médiateurs solubles
Les médiateurs lipidiques de l'inflammation sont produits de novo à partir des
phospholipides des membranes cellulaires par les cellules de l'immunité innée en
réponse à leur activation. Ils comprennent en particulier des leucotriènes, des
prostaglandines, et le Platelet Activating Factor (PAF).
Leurs effets sont très divers et s'exercent sur un grand nombre de types
cellulaires. Ils contribuent entre autres à l'activation de l'endothélium, au recrutement
des cellules (chimiotactisme) et à la nociception.
17
Pr Hela JAÏDANE Cours d’Immunologie générale 2 ème année
L'histamine est libérée lors de la dégranulation des mastocytes et des
polynucléaires basophiles. Elle provoque entre autres une vasodilatation et une
augmentation de la perméabilité capillaire facilitant le recrutement de cellules
circulantes.
La substance P est un neuropeptide produit entre autres par les mastocytes et un
des médiateurs responsables du signal de douleur.

3) La phagocytose
La phagocytose est le processus par lequel certaines cellules, les phagocytes (PNN,
monocytes, macrophages et cellules dendritiques), peuvent ingérer et digérer des
particules solides (agents pathogènes, cellules apoptotiques, particules exogènes
inertes) d’échelle micrométrique.
C’est un phénomène induit qui peut se faire de deux manières différentes, suivant
la résistance de la bactérie considérée (Figure 7):
- sans opsonisation, on est alors face à une interaction directe entre le récepteur
et l’antigène. La reconnaissance se fait grâce aux PRR membranaires.
- avec opsonisation, l’interaction nécessite une molécule intermédiaire qui joue
le rôle d’adaptateur, on les appelle des opsonines. Les opsonines sont souvent
associées aux anticorps, mais on compte également les composants du
complément, les protéines MBP « Mannan Binding Protein », et la protéine CRP
« C-Reactive Protein ».

Figure 7 : Récepteurs de la phagocytose avec ou sans opsonisation

La phagocytose se réalise en différentes étapes (Figure 8) :


1) L’opsonisation (non obligatoire) correspond à l’attachement des opsonines
tout autour de la bactérie.
2) Le chimiotactisme permet d’attirer les macrophages vers la bactérie
opsonisée, et ceci grâce aux chimiokines.
3) La phase d’adhérence correspond à la reconnaissance spécifique des
opsonines présentes à la surface de la bactérie par des récepteurs de la
membrane plasmique des macrophages. Cette phase déclenche la
phagocytose proprement dite.
4) La phase rhéologique correspond à la formation de prolongements
cytoplasmiques que l’on appelle des pseudopodes enveloppant entièrement
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Pr Hela JAÏDANE Cours d’Immunologie générale 2 ème année
la bactérie. Il y a ainsi formation d’une vacuole dans laquelle se trouve la
bactérie ; on appelle cette vacuole le phagosome.
5) La phase de destruction correspond à la digestion de la bactérie par fusion du
phagosome avec des lysosomes, formant ainsi le phagolysosome. La digestion
sera réalisée par différents mécanismes : acidification, hydrolysation par des
enzymes hydrolytiques (lysozyme, protéase), production de dérivés toxiques
de l’oxygène (ions superoxyde), production de dérivés nitrés.

Figure 8 : Etapes de la phagocytose

4) La réaction inflammatoire
La réaction inflammatoire constitue le mode de réponse de l’organisme face à une
agression infectieuse, immunologique, tumorale ou traumatique.
L’inflammation agit à différents niveaux pour contrer une infection. D’abord, elle
renforce la ligne de front formée par les macrophages et mastocytes en ramenant les
molécules effectrices et les phagocytes au site de l’infection. Ensuite, le caillot qui se
forme constitue une barrière physique pour stopper l’extension de l’infection. Enfin,
elle induit le processus de réparation des tissus endommagés.
La réaction inflammatoire peut être aiguë (qq minutes à qq jours) ou chronique
(qq semaines à qq années). D’autre part, elle peut être adaptée et donc protectrice,
comme elle peut être inadaptée ou mal contrôlée et donc agressive entraînant une
situation pathologique.
4.1) Composantes de la réaction inflammatoire
Une multitude de constituants contribue à la réaction inflammatoire :
- les cellules: mastocytes, macrophages, fibroblastes, …
- la matrice : fibres de collagène, protéoglycanes
- les vaisseaux sanguins : via lesquels vont être ramenés les autres constituants
cellulaires (basophiles, éosinophiles, PNN, monocytes, lymphocytes, plaquettes,
…)
- les médiateurs solubles : protéines du complément, de la cascade de la
coagulation (système des kinines), cytokines pro-inflammatoires, médiateurs
lipidiques, …
4.2) Mécanismes de la réponse inflammatoire
La réaction inflammatoire est déclenchée par une lésion tissulaire ou une invasion
microbienne. Elle se déroule en trois étapes (Figure 9):
19
Pr Hela JAÏDANE Cours d’Immunologie générale 2 ème année
1. Phase d’initiation ou phase vasculaire durant laquelle se fait l’activation des
effecteurs primaires : Les cellules résidentes (mastocytes et macrophages) du
tissu concerné étant alertées, elles vont sécréter des substances (histamine,
TNFα…) qui vont activer les cellules endothéliales (expression de molécules
d'adhérence), entraînant vasodilatation et augmentation de la perméabilité
capillaire, facilitant le recrutement (par chimiotactisme) des effecteurs
cellulaires vers le tissu concerné (diapédèse) (Figure 10).
2. Phase d’amplification ou phase cellulaire durant laquelle il y a mobilisation
d’effecteurs secondaires : Les cellules (PNN, monocytes, cellules dendritiques,
…) recrutées sur le site vont exercer leurs différentes fonctions (phagocytose,
dégranulation, …) visant à se débarrasser de l’agresseur.
3. Phase de résolution ou de réparation durant laquelle il y a restauration de
l’intégrité du tissu agressé

Figure 9 : Les différentes étapes de la réaction inflammatoire

Figure 10 : Cascade d’évènements menant au recrutement des leucocytes

4.3) Manifestations de l’inflammation


L’inflammation se manifeste par des signes cliniques locaux, et d’autres généraux.

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Pr Hela JAÏDANE Cours d’Immunologie générale 2 ème année
Les signes cliniques les plus connus sont les signes locaux. Ils sont qualifiés de
cardinaux. Il s’agit de la fameuse tétrade établie par Aulus Comelius Celsus depuis le
1er siècle : rougeur « rubor », chaleur « calor », tuméfaction ou gonflement « tumor »
et douleur « dolor ». Un 5ème signe a été rajouté plus tard par Rudolph Virchow, la
perte de fonction « functio laesa ».
Quant aux signes cliniques généraux, ils peuvent se résumer en : fièvre, asthénie
et amaigrissement.
4.4) Evolutions possibles de l’inflammation aiguë
L’inflammation aiguë peut évoluer de différentes manières selon que l’agent
étiologique soit éliminé ou non, et selon que le tissu soit nécrosé ou pas :
- Résolution : L’agent étiologique est éliminé sans laisser de nécrose tissulaire.
- Abcès : L’agent étiologique persiste et le tissu est nécrosé.
- Cicatrisation : L’agent étiologique est éliminé mais le tissu est nécrosé.
- Chronicité : L’agent étiologique persiste sans que le tissu soit nécrosé.

5) Conclusion
Dès que les barrières cutanéo-muqueuses sont corrompues par un agresseur
étranger, celui-ci est reconnu grâce à ses PAMPs par les PRRs des cellules résidentes.
L’interaction PAMPs ↔ PRRs va activer une cascade de signalisations moléculaires qui
va aboutir à la production de cytokines qui vont entraîner la mise en place d’une
réaction inflammatoire au site de l’infection. Il y aura ainsi vasodilatation et
recrutement des autres effecteurs de l’immunité qui vont exercer leurs différentes
fonctions (phagocytose, dégranulation, etc…) en vue de contrer l’agresseur. Les CPA
pourront plus tardivement initier une réponse adaptative si elle s’avère nécessaire.

6) Messages pédagogiques à retenir


 L’immunité innée est une réponse qui se met en place très rapidement suite à une
quelconque agression. Elle est naturelle, non spécifique et dépourvue de mémoire.
 Elle permet une réponse rapide et efficace sur un grand nombre de pathogènes.
 Elle joue un rôle majeur dans la mise en place des réponses immunitaires
adaptatives et des processus de réparation tissulaire/cicatrisation.
 Certains des effecteurs de l’immunité innée sont constitutifs (défenses des
barrières) et constituent la toute première ligne de défense qui intervient de
manière immédiate, alors que d’autres sont rapidement inductibles (réaction
inflammatoire) et constituent une deuxième ligne de défense.
 Le revêtement cutanéo-muqueux constitue des barrières mécaniques, chimiques et
microbiologiques s’opposant à l’entrée des pathogènes.
 La majorité des cellules de l'immunité innée sont d'origine myéloïde. Il s'agit des
polynucléaires ou granulocytes et des phagocytes mononucléés (monocytes,
macrophages et cellules dendritiques).
 Les cellules de l’immunité innée reconnaissent l’agression grâce à des récepteurs
non spécifiques (PRR) de motifs conservés (PAMP).

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Pr Hela JAÏDANE Cours d’Immunologie générale 2 ème année
 L’engagement des PRR avec leurs ligands active la cellule concernée et contribue
ainsi à de multiples mécanismes aboutissant à la production de cytokines
inflammatoires, à l'amplification de la réponse inflammatoire, à la stimulation de la
phagocytose, à la régulation de la migration, à l'apoptose, ainsi qu’à la maturation
des CPA.
 La phagocytose est le processus par lequel certaines cellules (PNN, monocytes,
macrophages et cellules dendritiques) peuvent ingérer et digérer des particules
solides (agents pathogènes, cellules apoptotiques, particules exogènes inertes)
d’échelle micrométrique. Elle peut se faire avec ou sans opsonisation.
 L’inflammation agit à différents niveaux pour contrer une infection. D’abord, elle
renforce la ligne de front formée par les macrophages et mastocytes en ramenant
les molécules effectrices et les phagocytes au site de l’infection. Ensuite, le caillot
qui se forme constitue une barrière physique pour stopper l’extension de
l’infection. Enfin, elle induit le processus de réparation des tissus endommagés.
 Rougeur, chaleur, gonflement et douleur sont les signes cardinaux de
l’inflammation.

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Pr Hela JAÏDANE Cours d’Immunologie générale 2 ème année

Le complexe majeur d’histocompatibilité

OBJECTIFS
1. Définir le CMH / HLA
2. Décrire l’organisation génomique du CMH
3. Enumérer les propriétés du CMH
4. Décrire les molécules HLA
5. Expliquer les fonctions du système HLA
6. Enumérer les applications du système HLA

PLAN
1) Introduction
2) Le complexe génique HLA
2.1) La région HLA de classe I
2.1) La région HLA de classe II
2.3) La région HLA de classe III
3) Propriétés des gènes HLA
3.1) Polymorphisme génétique multi-allélique
3.2) Transmission « en bloc »
3.3) Codominance
3.4) Déséquilibre de liaison
3.5) Nomenclature
4) Les molécules HLA
4.1) Structure des molécules HLA
4.1.1) Structure des molécules HLA de classe I
4.1.2) Structure des molécules HLA de classe II
4.2) Site de fixation du peptide antigénique
4.3) Expression cellulaire des molécules HLA
4.3.1) Expression des molécules HLA de classe I
4.3.2) Expression des molécules HLA de classe II
4.4) Fonctions des molécules HLA
4.4.1) Présentation des antigènes aux lymphocytes T
4.4.2) Contrôle de l’inhibition des cellules NK
5) Formation des complexes CMH-peptide
5.1) Voie des molécules de classe I ou voie endogène
5.2) Voie des molécules de classe II ou voie exogène
5.3) Cas particuliers
6) Reconnaissance des molécules HLA à la surface de la cellule par les
lymphocytes T
7) Applications du système HLA
7.1) HLA et populations
7.2) HLA et maladies
7.3) HLA et greffe
8) Conclusion
9) Messages pédagogiques à retenir

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Pr Hela JAÏDANE Cours d’Immunologie générale 2 ème année
1) Introduction
Pour être reconnues par les LT, les protéines antigéniques, doivent au préalable
être rendues accessibles, c'est-à-dire « présentées » sous forme de courts peptides, au
récepteur pour l'antigène présent à la surface du LT (TCR). Cette fonction de
présentation de peptide antigénique est la mission essentielle des molécules du
Complexe Majeur d'Histocompatibilité (CMH).
Le CMH est un ensemble de gènes codant des molécules (glycoprotéines)
présentes à la surface des cellules nucléées de l’organisme, caractéristiques de chaque
individu. Le système HLA « Human Leukocyte Antigen » correspond au CMH humain.
Le polymorphisme génétique des molécules du CMH en fait le déterminant
principal de l'histocompatibilité, c'est-à-dire l'acceptation ou le rejet des greffes entre
donneur et receveur. Cette propriété est à l'origine de sa découverte par Jean Dausset
et de sa dénomination. Ainsi, le CMH humain est dénommé HLA « Human Leukocyte
Antigen » car la première molécule d'histocompatibilité identifiée avait été repérée
par son caractère d'antigène de groupe leucocytaire, absent des hématies.
Ce polymorphisme conduit, par ailleurs, à une extrême variabilité interindividuelle
de la capacité à présenter un peptide donné et donc à induire la réponse de LT
spécifiques. En pathologie, des différences de susceptibilité à de nombreuses maladies
et à des infections microbiennes sont conditionnées par la présence ou l'absence de
certaines variantes (allèles) de molécules du CMH chez le sujet.

2) Le complexe génique HLA


Les gènes HLA sont localisés sur le bras court du chromosome 6 (6p21.3). Ils
s’étendent sur environ 4000kb, soit 1/1000 du génome humain et contient plus de 200
gènes. Le complexe est subdivisé en trois régions qui contiennent des gènes dits HLA
« classiques » codant pour les molécules qui assurent la fonction de présentation de
l'antigène et qui exercent un rôle majeur dans l'histocompatibilité, et de nombreux
autres gènes dits « non classiques » avec ou sans fonction immunologique (Figure 1).

Figure 1 : Organisation générale de la région HLA

24
Pr Hela JAÏDANE Cours d’Immunologie générale 2 ème année
2.1) La région HLA de Classe I
Elle est située du côté du télomère et s’étend sur environ 1600kb (Figure 1). Elle
comprend essentiellement :
- 3 gènes HLA classiques : HLA-A, HLA-B et HLA-C
- des gènes non classiques : HLA-E, HLA-F, HLA-G
On dénombre actuellement une vingtaine de gènes codant pour la chaîne lourde α
des molécules de classe I.
2.2) La région HLA de Classe II
.Elle est située du côté du centromère et s’étend sur environ 900kb. Elle comprend
essentiellement une trentaine de gènes (Figures 1 et 2):
- 3 paires de gènes classiques codant pour les chaînes α et β des molécules HLA de
classe II :
- DPA et DPB codant les molécules HLA-DP
- DQA et DQB codant les molécules HLA-DQ
- DRA et DRB codant les molécules HLA-DR
- les gènes DMA et DMB codant pour un hétérodimère αβ semblable à une
molécule de classe II et qui intervient dans la présentation du peptide
antigénique par ces molécules
- les gènes TAP1 et TAP2 codant pour une protéine transporteuse de peptide
Le polymorphisme du HLA de classe II concerne surtout les gènes codant les
chaînes β.

Figure 2 : Organisation détaillée de la région HLA classe II

2.3) La région HLA de Classe III


.Elle s’étale sur 1100 kb entre les régions I et II (Figure 1). Elle contient de
nombreux gènes codant pour des protéines impliquées dans la réponse immune, mais
sans fonction de présentation. On y retrouve notamment des gènes codant pour des
protéines du système du complément (C2, C4, facteur B), pour le TNF et pour les
lymphotoxines.

3) Propriétés des gènes HLA


3.1) Polymorphisme génétique multi-allélique
Il existe un très grand nombre d'allèles pour chacun des différents gènes HLA
classiques (plusieurs milliers pour la plupart d'entre eux). Ce sont donc les gènes les
plus polymorphes du génome humain (Figure 3).
Sur chaque chromosome, le nombre de combinaisons alléliques possibles est très
élevé. Une combinaison détermine un haplotype.

25
Pr Hela JAÏDANE Cours d’Immunologie générale 2 ème année
A l’échelle de la protéine correspondante, chaque allèle code pour une protéine
caractérisée par des variations de séquence peptidique portant sur un petit nombre
d'acides aminés, par comparaison aux protéines codées par d'autres allèles. On parle
d’allotypes HLA.

Figure 3 : Polymorphisme allélique et polygénie du système HLA

3.2) Transmission « en bloc »


L’étroite liaison des gènes HLA fait qu’ils se transmettent en bloc, c’est-à-dire
que l'ensemble des gènes HLA de l'un des chromosomes 6 paternels et de l'un des
chromosomes 6 maternels est donc transmis sous forme d'haplotype aux enfants,
selon les lois de Mendel (Figure 4).
Ainsi, chaque individu est hétérozygote pour la plupart de ses gènes HLA de
classe I et de classe II, et n'exprime pour chaque locus qu'un (si homozygote) ou deux
(si hétérozygote) allèles parmi tous les allèles présents dans la population générale.
Cette caractéristique rend chaque individu quasiment unique.
D’autre part, au sein d'une famille, la probabilité d'une identité HLA entre frères
ou sœurs est ainsi d'une chance sur quatre.

Figure 4 : Transmission en bloc des haplotypes HLA des parents aux descendants
26
Pr Hela JAÏDANE Cours d’Immunologie générale 2 ème année
3.3) Codominance
Les haplotypes provenant de chacun des deux chromosomes parentaux sont
représentés de manière équivalente. Ainsi, les produits de deux allèles parentaux
différents sont tous les deux exprimés à la surface de la cellule (Figure 5).

Figure 5 : Expression codominante des allèles parentaux

3.4) Déséquilibre de liaison


La transmission en bloc fait aussi que certains allèles de gènes HLA différents sont
plus fréquemment retrouvés ensemble, au sein d’un haplotype, que ne le voudrait le
hasard. Par exemple, dans la population caucasienne HLA-A1 est très souvent associé à
HLA-B8 et HLA-DR17.
3.5) Nomenclature
La nomenclature des gènes HLA classiques est très précise et harmonisée au
niveau international.
Les techniques initiales de typage HLA par sérologie ont permis d'identifier des
familles d'allotypes désignées par le nom du gène et un numéro (par exemple HLA-A1,
HLA-B27, HLA-DR3…).
La nomenclature actuelle d'avril 2010 inclut le nom du gène, suivi des numéros de
la famille allélique (2 premiers chiffres, aussi appelé 1er champ ou field en anglais) et
de l'allèle (2 ou 3 chiffres pour le moment, 2e champ) dans cette famille, séparés par «
* » et « : ». Exemple : HLA-A*02:101, HLA-DR B1*13:01.

4) Les molécules HLA


Les molécules HLA sont des glycoprotéines de membrane. Les produits des gènes
de classe I ou de classe II ont la même structure générale. Ce sont des hétérodimères
transmembranaires constitués de l’association non covalente de deux chaînes.
La partie extracellulaire de l'hétérodimère expose deux domaines proximaux
(proches de la membrane cellulaire, côté COOH) conformés selon le modèle « domaine
immunoglobulinique », et deux domaines distaux (côté NH2) de structure originale
comportant chacun une plage de feuillets β-plissés surmontée d'une hélice α.

27
Pr Hela JAÏDANE Cours d’Immunologie générale 2 ème année
4.1) Structure des molécules HLA
4.1.1) Structure des molécules HLA de classe I
Les molécules HLA de classe I sont composées d'une chaîne α associée à la β2
microglobuline (Figure 6).
La chaîne α est ancrée dans la membrane et possède trois domaines
extracellulaires (α1, α2 et α3), une région transmembranaire et une région
cytoplasmique. Les domaines α1 et α2 (du côté NH2) sont très polymorphes et
constituent le site de fixation du peptide antigénique. Le domaine proximal α3 (du côté
COOH) est non polymorphe et contient le site de liaison du co-récepteur CD8 des
LTCD8+.
La β2-microglobuline est une protéine invariante, codée par un gène qui
n'appartient pas au complexe génique HLA, mais plutôt au chromosome 15. Elle
s’apparie de manière non covalente à la chaîne α au niveau du domaine proximal α3.

Figure 6: Représentation schématique d’une molécule HLA de classe I (a)


et de son interaction avec un LTCD8+ (b)

4.1.1) Structure des molécules HLA de classe II


Les molécules HLA de classe II sont composées d'une chaîne α et d'une chaîne β
(Figure 7). Ces chaînes sont ancrées dans la membrane et comportant chacune deux
domaines extracellulaires (α1 et α2 pour la chaîne α, et β1 et β2 pour la chaîne β), une
région transmembranaire et une région cytoplasmique. Les domaines distaux α1 et β1
(du côté NH2) sont très polymorphes et constituent le site de fixation du peptide
antigénique. Les domaines proximaux α2 et β2 (du côté COOH) sont non polymorphes.
Le domaine β2 contient le site de liaison du co-récepteur CD4 des LTCD4+.

28
Pr Hela JAÏDANE Cours d’Immunologie générale 2 ème année

Figure 7: Représentation schématique d’une molécule HLA de classe II (a)


et de son interaction avec un LTCD4+ (b)

4.2) Site de fixation du peptide antigénique


L'appariement des deux domaines distaux de la molécule HLA délimite un sillon
médian dans lequel peut s'enchâsser un peptide : la « poche à peptide ». Cette fixation
s'opère selon le modèle « clé-serrure », ce qui exige une complémentarité suffisante
entre la forme et les caractéristiques physico-chimiques du sillon et celles du peptide.
Le sillon a pour vocation de contenir un peptide dont 2 à 4 acides aminés doivent
se nicher dans des « poches d'ancrage » situées en son fond, ce qui n'est possible que
si ces acides aminés d'ancrage ont des caractéristiques physico-chimiques adéquates.
Le peptide est retenu dans sa position par des liaisons non covalentes réparties sur
toute la longueur du sillon, ce qui stabilise aussi la molécule HLA. L'enchâssement du
peptide est en effet une nécessité pour que la molécule HLA parvienne à la surface de
la cellule.
Pour les molécules de classe I, les domaines distaux α1 et α2 délimitent le sillon de
présentation des peptides. Les extrémités des hélices α de ces domaines sont
rapprochées, ce qui ferme le sillon. Le peptide enchâssé est donc de petite taille, en
moyenne 9 acides aminés, car ses deux extrémités sont bloquées dans le sillon.
Pour les molécules de classe II, l'appariement des domaines distaux α1 et β1
délimite le sillon de présentation. Les extrémités de leurs hélices α sont moins
rapprochées que dans le cas de la classe I et le sillon de présentation est ici ouvert. Le
peptide peut déborder et donc être plus long, entre 12 et 25 acides aminés. Sa partie
médiane doit quand même satisfaire à des contraintes d'ancrage, comme pour le CMH
de classe I.

29
Pr Hela JAÏDANE Cours d’Immunologie générale 2 ème année

Figure 8 : Représentation schématique du site de fixation du peptide antigénique au niveau


des molécules HLA de classe I et de classe II

4.3) Expression cellulaire des molécules HLA


L'expression des gènes du CMH classique dépend de leur classe, du type cellulaire,
et est influencée par des cytokines pro-inflammatoires.
4.3.1) Expression des molécules HLA de classe I
Pratiquement toutes les cellules nucléées expriment des molécules CMH de classe
I, mais leur densité varie selon le type cellulaire :
- forte densité (105 molécules/cellule) sur les lymphocytes (B et T), les
monocytes/macrophages, les PNN et les cellules dendritiques
- densité intermédiaire (104 molécules/cellule) sur les cellules épithéliales et
endothéliales
- densité faible, voire nulle sur les hématies, les cellules du pancréas, des glandes
salivaires, les hépatocytes, les neurones, la cornée, le placenta.
La densité d'expression peut augmenter dans un contexte inflammatoire sous
l'action de cytokines telles que l’interféron.
4.3.2) Expression des molécules HLA de classe II
L'expression des molécules CMH de classe II est limitée, à l'état de repos, aux
cellules présentatrices d'antigènes (CPA) dites « professionnelles »: cellules
dendritiques, monocytes/macrophages, LB et cellules épithéliales thymiques.
L'activation de ces cellules augmente la densité d'expression des molécules CMH II à
leur surface.
Chez l'homme, les LT quiescents n'expriment pas les molécules CMH de classe II,
mais l'activation de ces cellules induit cette expression.
Les cellules épithéliales et endothéliales n'expriment pas les molécules CMH de
classe II à l'état basal, mais peuvent les exprimer dans un contexte inflammatoire.
4.4) Fonctions des molécules HLA
4.4.1) Présentation des antigènes aux lymphocytes T
Contrairement aux LB dont le récepteur BCR (mais aussi les immunoglobulines
sécrétées par les plasmocytes) sont capables de reconnaître les antigènes sous leur
30
Pr Hela JAÏDANE Cours d’Immunologie générale 2 ème année
forme native, les LT en sont incapables. Leur TCR ne reconnaît les antigènes qu’une
fois apprêtés, c’est-à-dire fragmentés en petits peptides présentés par une molécule
de CMH à la surface d’une CPA.
Les molécules CMH de classe I présentent les peptides antigéniques aux LTCD8+,
tandis que les molécules de classe II les présentent aux LTCD4+. On parle de restriction à
la classe I ou à la classe II de la reconnaissance dans le contexte du CMH.
L'expression ubiquitaire des molécules CMH de classe I permet ainsi aux
mécanismes effecteurs de l'immunité dépendant des LTCD8+ de s'exercer vis-à-vis de la
quasi-totalité des cellules nucléées. Quant aux LTCD4+, ils interagissent essentiellement
avec les CPA « professionnelles ».
Les complexes HLA-peptide à la surface de la cellule sont constamment renouvelés
reflétant ainsi en temps réel ce qui se passe dans la cellule ou, en d’autres termes, son
état de santé. Dans les conditions physiologiques, ne sont présentés que des peptides
issus de protéines normales du soi. L’apparition d’un peptide anormal témoigne d’une
situation pathologique (infection, altération, …) et entraîne l’activation des LT
spécifiques (Figure 9).

Figure 9 : Interactions entre molécules HLA et LT


en conditions physiologiques et pathologiques
4.4.2) Contrôle de l’inhibition des cellules NK
Certaines molécules de CMH de classe I déterminent, par la qualité de leur
expression qui est contrôlée par les récepteurs KIR « Killer Inhibitory Receptors » des
cellules NK, l’état d’inhibition ou d’activation de ces cellules (Figure 10).
En effet, en cas d’expression normale des molécules HLA de classe I, celles-ci vont
interagir avec les récepteurs KIR et maintenir les cellules NK dans un état d’inhibition.
A l’inverse, en cas d’expression anormale ou absence de « soi », il n’y aura pas
d’interaction possible avec les KIR, ce qui va débloquer le signal d’activation généré par
l’interaction des récepteurs KAR « Killer Activating Receptors » avec leurs ligands, et
ainsi entraîner l’activation de la cellule NK.

31
Pr Hela JAÏDANE Cours d’Immunologie générale 2 ème année

Figure 10 : Maintien de l’inhibition des cellules NK via l’expression normale


de molécules HLA de classe I

5) Formation des complexes CMH-peptide


L'expression des molécules du CMH à la surface des cellules nécessite
l'enchâssement préalable d'un peptide. Ainsi, il n'y a pratiquement pas de molécules
CMH « vides » à la surface des cellules.
L'apprêtement ou « processing » des antigènes correspond à l'ensemble des
étapes préalables à l'enchâssement d'un peptide dans la poche à peptide.
L'approvisionnement des molécules du CMH en peptides tire parti des processus
normaux du catabolisme cellulaire, différents selon qu'il s'agisse de protéines
endogènes (synthétisées par la cellule elle-même) ou exogènes (antigènes
membranaires ou issus du milieu extracellulaire). Ces processus sont complétés par
l'intervention de molécules spécialisées (enzymes, transporteurs protéiques) (Figure
11).

Figure 11 : Apprêtement de l’antigène, formation du complexe CMH-peptide et présentation


à la surface de la cellule

32
Pr Hela JAÏDANE Cours d’Immunologie générale 2 ème année
L'origine des peptides présentés dépend de la classe du CMH, avec des
particularités notables dans le cas des cellules dendritiques.
5.1) Voie des molécules de classe I ou voie endogène
Les molécules de CMH de classe I présentent des peptides issus de protéines
synthétisées dans le cytosol. Il peut aussi bien s’agir de protéines du soi (normales,
défectueuses ou modifiées) que de protéines virales.
La cellule traite de la même façon les protéines codées par son propre génome et
les protéines qui peuvent être présentes dans le cytosol après transformation maligne
ou parce qu'elles sont codées par un génome viral (Figure 12).
Ainsi, les protéines cytosoliques sont dégradées dans le protéasome (grand
complexe protéasique en forme de tunnel cylindrique) et en ressortent sous forme de
peptides. Ceux-ci sont ensuite transportés activement, par translocation, du cytosol
vers le réticulum endoplasmique (RE) par les transporteurs TAP1 et TAP2 (TAP :
« Transporter associated with Antigen Processing » situés sur la membrane de celui-ci
(RE).
D’un autre côté, les molécules CMH de classe I nouvellement synthétisées sont
retenues dans le RE (là où se fait leur repliement et assemblage selon la voie classique
de la synthèse protéique) jusqu’à ce qu’elles fixent un peptide.
La fixation d’un peptide à la molécule de CMH de classe I au niveau du RE, entraîne
sa stabilisation et le transfert du complexe à la surface (membrane plasmique) pour
présenter le peptide en question aux LTCD8+.

Figure 12 : Présentation des peptides endogènes par les molécules HLA classe I

5.2) Voie des molécules de classe II ou voie exogène


Les molécules de CMH de classe Ii présentent des peptides issus de protéines
exogènes (synthétisées hors de la cellule et internalisées). C’est le cas, par exemple,
des pathogènes se multipliant dans les vésicules intracellulaires du macrophage
(Mycobactéries, Leishmanies,…) et des pathogènes extracellulaires et protéines captés
par phagocytose ou endocytose. Les peptides sont générés dans ce que l’on appelle le
compartiment vésiculaire (vésicules d’endocytose acidifiées ou phagolysosomes).
Comme les molécules CMH de classe I, les molécules CMH de classe II
néosynthétisées se trouvent au niveau du RE, sauf qu’elles ne sont pas libres mais
protégées et stabilisées par une chaîne peptidique invariante Li. En fait, Li obstrue le
33
Pr Hela JAÏDANE Cours d’Immunologie générale 2 ème année
sillon d’enchâssement, ce qui empêche la capture d'un peptide ramené du cytosol vers
le RE.
Le complexe [CMH de classe II + Li] est transporté vers la surface cellulaire dans
des vésicules intracellulaires acides (endosome) dans lesquelles Li est progressivement
rognée par des protéases acides, n’épargnant qu’un morceau, CLIP : peptide de Li
associé au CMH.
La fusion de la vésicule de transport avec le phagolysososme contenant les
peptides exogènes entraîne la dégradation de CLIP qui libère le sillon. La molécule
CMH de classe II peut ainsi être chargée par un peptide exogène grâce à la
contribution d’une molécule HLA-DM. Etant stabilisée, la molécule CMH de classe II
peut ainsi regagner la membrane plasmique pour présenter le peptide aux LTCD4+
(Figure 13).

Figure 13 : Présentation des peptides exogènes par les molécules HLA classe II

5.3) Cas particuliers


Il existe plusieurs cas particuliers de la présentation antigénique qui diffèrent des
voies endogène et exogène conventionnelles que nous venons de décrire.
En effet, grâce à un phénomène appelé « présentation croisée », les cellules
dendritiques stimulées ont la capacité de récupérer des antigènes exogènes (antigènes
de micro-organismes, antigènes tumoraux) et de les présenter au sein de leurs
molécules HLA de classe I. Ce processus permet la mise en œuvre de réponses T CD8+
anti-infectieuses ou anti-tumorales.
D’autre part, certaines antigènes qualifiés de superantigènes (exp : certaines
toxines bactériennes et certains antigènes viraux) sont capables d’être « présentés »
directement (sans apprêtement) via la formation d’un pontage entre une molécule
CMH de classe II et divers LT (Figure 14). En effet, l’interaction est forcée
indépendamment de la spécificité du LT pour le peptide antigénique qui lui est
présenté par la molécule de CMH. Ceci entraîne l’activation polyclonale de LT,
générant ainsi une inflammation importante.

34
Pr Hela JAÏDANE Cours d’Immunologie générale 2 ème année

Figure 14 : Représentation schématique de l’interaction d’un superantigène avec, d’une part,


une molécule de CMH de classe II à la surface d’une CPA et, d’autre part,
la partie Vβ du TCR d’un LTCD4+
Enfin, il faut savoir que les antigènes de nature lipidique sont présentés par les
molécules CD1, glycoprotéines apparentées aux molécules de CMH de classe I.

6) Reconnaissance des molécules HLA à la surface de la cellule par les


lymphocytes T
À l'étape de reconnaissance de l'antigène, les LT examinent la surface de la cellule
présentatrice. Si les molécules HLA présentent un peptide reconnu par le LT, celui-ci
est activé. Dans le cas contraire, le LT s'éloigne et reste quiescent jusqu’à ce qu’il
trouve sa cible.
Au niveau moléculaire, il se forme un complexe ternaire dans lequel le peptide
antigénique est « en sandwich » entre la molécule HLA et le TCRαβ (Figure 15). Le
peptide est fixé dans le sillon de la molécule HLA grâce à 2 acides aminés d’ancrage (ce
qui permet à une même molécule HLA de présenter de nombreux peptides différents,
à condition qu’ils aient les mêmes points d’ancrage). Le paratope du TCRαβ est en
contact avec :
- d'une part, les acides aminés de la partie centrale du peptide, accessibles entre
les berges du sillon
- d'autre part, plusieurs acides aminés des hélices α qui bordent le sillon de la
molécule HLA classique.
Le TCRαβ reconnaît ainsi un « ligand composite » dans lequel environ un tiers des
acides aminés (2 à 4) sont ceux du peptide antigénique, et deux tiers sont des acides
aminés des deux hélices α du CMH.

Figure 15 : Représentation schématique de l’interaction CMH-peptide-TCR


35
Pr Hela JAÏDANE Cours d’Immunologie générale 2 ème année
Le processus d'activation du LT est initié par l'interaction du TCRαβ avec son
peptide antigénique enchâssé dans la molécule CMH, et nécessite l'implication du co-
récepteur CD4 ou CD8 qui interagit avec le domaine proximal β2 de la molécule HLA de
classe II ou α3 de la molécule HLA de classe I, respectivement (Figures 6 et 7).
Compte tenu des contraintes d’ancrage dans le sillon, les peptides issus d’un
antigène ne pourront pas tous être présentés par les molécules HLA d’un individu
quelconque.
En effet, l’haplotype d’un individu, et par conséquent la conformation des niches à
peptides de ses molécules HLA, définit le répertoire des peptides capables de
s’enchâsser dans ses molécules de CMH. Une même protéine sera donc reconnue
différemment par les LT de deux individus distincts, puisque le plus souvent ce ne
seront pas les mêmes peptides de celle-ci qui seront présentés par le CMH. Le
polymorphisme des allèles HLA explique donc des spécificités de réponses T
différentes entre les individus. Il existe ainsi des sujets bons ou mauvais répondeurs
en fonction du type, de la quantité et du pouvoir immunogène des peptides présentés.
À l'extrême, certains individus s'avèrent incapables de répondre efficacement à un
antigène donné, avec des conséquences sur l'immunité anti-infectieuse et l'efficacité
de certains vaccins.
Par ailleurs, une protéine antigénique donnée ne comporte généralement qu'un
très petit nombre de peptides aptes à être présentés efficacement au LT spécifique
d’un individu quelconque ; on parle d’épitope(s) dominant(s). Les autres fragments
peptidiques dits sous-dominants ou privés n'interviennent généralement pas ou peu
dans la réponse immune. Ils sont moins bien enchâssables ou plus fragiles quand la
protéine est fragmentée, ils sont moins présents à la surface des cellules et sont donc
moins aptes à stimuler les lymphocytes correspondants. Enfin, la majorité des
fragments peptidiques issus de l'antigène reste invisible pour les LT ; on parle de
peptides cryptiques.

7) Applications du système HLA


7.1) HLA et populations
Des études du polymorphisme HLA menées sur de nombreuses populations ont
révélé de grandes variations dans les fréquences de certains antigènes HLA dans les
différents groupes ethniques.
Une population donnée peut ainsi être définie par la fréquence de certains allèles
HLA, tout comme un individu donné est défini par son haplotype HLA. Ceci peut-être
utile pour retracer l’histoire d’une population (origine, migration, …).
7.2) HLA et maladies
Certains allèles ont été associés à l’émergence de nombreuses pathologies,
essentiellement auto-immunes (exp : HLA-DR3 et DR4 et diabète de type 1) ou
inflammatoires chroniques (exp : HLA-B27 et spondylarthrite ankylosante). On parle
d’allèles prédisposants ou de susceptibilité à ces maladies. C’est-à-dire que le risque
relatif (RR) de développer une maladie en la présence d’un allèle suspecté (fréquence

36
Pr Hela JAÏDANE Cours d’Immunologie générale 2 ème année
de l’allèle chez les malades / fréquence de l’allèle chez les individus sains de la même
population) est supérieur à 1 (exp : RR=90 pour HLA-B27 et spondylarthrite
ankylosante).
Il existe aussi des allèles protecteurs (RR<1) (exp : HLA-DR2 et diabète de type 1).
7.3) HLA et greffe
En transplantation, l'absence d'identité HLA entre donneur et receveur induit
l'apparition de LT dirigés contre le donneur, qui reconnaissent notamment l'association
HLA du non soi et peptides du donneur comme étrangers, la restriction au soi de la
reconnaissance n'étant pas parfaite. L’étude de l’histocompatibilité avant une greffe
est donc indispensable afin de limiter les risques de rejet du greffon ; c’est ce que l’on
appelle le typage HLA qui doit être effectué aussi bien pour le donneur que pour le
receveur.
Le typage HLA peut se faire aussi bien par des techniques sérologiques de
phénotypage (basées sur l’utilisation d’anticorps anti-molécules HLA de spécificité
connue), que par des techniques de biologie moléculaire de génotypage (basées sur
l’utilisation de sondes d’ADN spécifiques de différents allèles HLA).

8) Conclusion
Les LT étant incapables de reconnaître les antigènes dans leur état natif, ceux-ci
doivent préalablement être apprêtés par des CPA puis présentés à leur surface par des
molécules de CMH. En fonction de l’origine intra- ou extracellulaire du peptide
antigénique, celui-ci sera présenté soit par la voie endogène via une molécule CMH de
classe I aux LTCD8+, soit par la voie exogène via une molécule CMH de classe II aux
LTCD4+. L’extrême polymorphisme génétique du CMH en fait le principal déterminant
de l’histocompatibilité et des variations inter-individuelles dans la réponse T à un
antigène donné.

9) Messages pédagogiques à retenir


 Pour être reconnues par le TCR des LT, les protéines antigéniques doivent au
préalable être apprêtées en courts peptides par des CPA puis présentées à leur
surface par des molécules du CMH.
 Les molécules de CMH présentes à la surface des cellules nucléées de l’organisme,
sont caractéristiques de chaque individu.
 Le système HLA correspond au CMH humain.
 Le complexe génique HLA (6p21.3) contient plus de 200 gènes et est subdivisé en
trois régions (classes II, III et I, du centromère au télomère) qui contiennent des
gènes dits « classiques » codant pour les molécules présentatrices d'antigène, et
d’autres gènes dits « non classiques » avec ou sans fonction immunologique.
 Il existe un très grand nombre d'allèles pour chacun des multiples gènes HLA
classiques. Ce sont les gènes les plus polymorphes du génome humain. Une
combinaison allélique détermine un haplotype.
 Le polymorphisme génétique des molécules du CMH en fait le déterminant principal
de l'histocompatibilité et conduit, par ailleurs, à une extrême variabilité
37
Pr Hela JAÏDANE Cours d’Immunologie générale 2 ème année
interindividuelle de la capacité à présenter un peptide donné et donc à induire la
réponse de LT spécifiques.
 Les gènes HLA se transmettent « en bloc » : Chaque individu hérite un haplotype
paternel et un haplotype maternel. Ceux-ci s’expriment de manière codominante.
 Les molécules HLA de classe I et II sont des hétérodimères transmembranaires
constitués de l’association non covalente de deux chaînes. La partie extracellulaire
de l'hétérodimère expose deux domaines proximaux immunoglobuliniques, et deux
domaines distaux très polymorphes comportant chacun une plage de feuillets β-
plissés surmontée d'une hélice α.
 Les molécules HLA de classe I sont composées d'une chaîne α (constituée de trois
domaines extracellulaires α1, α2 et α3) associée à la β2 microglobuline (protéine
invariante, codée par un gène du chromosome 15). Les domaines distaux α1 et α2
constituent le site de fixation du peptide antigénique. Le domaine proximal α3 (au
niveau duquel s’apparie la β2 microglobuline) est non polymorphe et contient le
site de liaison du co-récepteur CD8 des LTCD8+.
 Les molécules HLA de classe II sont composées d'une chaîne α et d'une chaîne β. Les
domaines distaux α1 et β1 sont très polymorphes et constituent le site de fixation
du peptide antigénique. Les domaines proximaux α2 et β2 sont non polymorphes.
Le domaine β2 contient le site de liaison du co-récepteur CD4 des LTCD4+.
 Le site de fixation du peptide est un sillon délimité par l’appariement des deux
domaines distaux de la molécule HLA. 2 à 4 acides aminés du peptide doivent se
nicher dans une poche d’ancrage au fond du sillon. L'enchâssement du peptide est
une nécessité pour que la molécule HLA parvienne à la surface de la cellule.
 Pour les molécules de classe I, le sillon est fermé et le peptide enchâssé est donc de
petite taille (en moyenne 9 acides aminés). Pour les molécules de classe II, le sillon
étant ouvert, le peptide peut déborder et donc être plus long (entre 12 et 25 acides
aminés).
 Les molécules HLA de classe I sont exprimées par presque toutes les cellules
nucléées, alors que celles de classe II ne sont, au repos, exprimées que par les CPA
professionnelles.
 Les molécules CMH de classe I présentent les peptides antigéniques endogènes aux
LTCD8+, tandis que les molécules de classe II présentent les peptides antigéniques
exogènes aux LTCD4+.
 Les peptides endogènes sont issus de la dégradation des protéines cytosoliques
(exp : antigènes viraux ou tumoraux) par le protéasome. Ils sont transportés par
TAP1 et 2 jusqu’au RE où ils se fixent sur une molécule CMH de classe I, puis
l’ensemble est exporté à la surface de la cellule.
 Les peptides exogènes sont issus de protéines exogènes synthétisées hors de la
cellule et internalisées via des vésicules d’endocytose acidifiées ou phagolysosomes.
La fusion de ces vésicules avec celles ramenant le complexe CMH de classe II-CLIP
du RE vers la surface de la cellule, entraîne la dégradation de CLIP puis
l’enchâssement du peptide grâce à la contribution d’une molécule HLA-DM, puis le
complexe est exporté à la surface de la cellule.
 Le TCRαβ reconnaît un « ligand composite » dans lequel environ un tiers des acides
aminés (2 à 4) sont ceux du peptide antigénique, et deux tiers sont des acides
aminés des deux hélices α du CMH.
38
Pr Hela JAÏDANE Cours d’Immunologie générale 2 ème année

L’immunité anti-infectieuse

OBJECTIF
1. Expliquer les différents mécanismes effecteurs de l’immunité
antibactérienne, antivirale, antiparasitaire et antifongique

PLAN
1) Introduction
2) L’immunité antibactérienne
2.1) Réponse antibactérienne innée
2.1) Réponse antibactérienne adaptative
2.3) Stratégies d’échappement des bactéries à la réponse immune
3) L’immunité antivirale
3.1) Réponse antivirale innée
3.2) Réponse antivirale adaptative
3.3) Stratégies d’échappement des virus à la réponse immune
4) L’immunité antiparasitaire
4.1) Réponse antiparasitaire innée
4.2) Réponse antiparasitaire adaptative
4.3) Stratégies d’échappement des parasites à la réponse immune
5) L’immunité antifongique
5.1) Réponse antifongique innée
5.2) Réponse antifongique adaptative
5.3) Stratégies d’échappement des champignons à la réponse immune

39
Pr Hela JAÏDANE Cours d’Immunologie générale 2 ème année
1) Introduction
Les microorganismes sont les êtres vivants les plus diversifiés. Ils diffèrent
essentiellement par leur structure Eucaryote (champignons et parasites), Procaryote
(bactéries) ou Acaryote (virus). Un grand nombre d’entre eux est qualifié de pathogène
car responsable d’infections, c’est-à-dire de l’invasion d’un organisme vivant.
Les pathogènes pénètrent habituellement dans l'organisme hôte par les tractus
respiratoire, digestif, génito-urinaire ou à l'occasion d'une lésion de la barrière
cutanée. Les épithéliums sont les premières barrières physiques qui protègent
l'organisme contre les pathogènes. Peuvent s'y associer la flore digestive normale ou le
mucus qui enrobe les micro-organismes. Des barrières physiologiques peuvent
également participer à cette protection telles que le pH du suc gastrique ou des
protéines solubles (lysozyme, défensines…).
Les réponses immunes mises en place après infection vont bien sûr être
différentes et adaptées à la nature du pathogène, et en particulier à son caractère
intracellulaire ou extracellulaire. De plus, la réponse immunitaire mise en jeu va être
adaptée au niveau d'agression, à savoir le nombre et la virulence des pathogènes. En
cas de faible agression, seules les défenses naturelles sont mises en place. Dans le cas
contraire, des défenses adaptatives adaptées au pathogène extracellulaire ou
intracellulaire entrent en jeu.
Les agents infectieux sont reconnus grâce à des motifs conservés appelés PAMPS «
pathogens associated molecular patterns », également appelés MAMPS « microbial
associated molecular patterns » ou DAMPS « danger associated molecular pattern ».
Les PAMPs sont reconnus par des récepteurs des cellules immunitaires de l’hôte
appelés PRR « Pattern recognition receptor ».
Les réponses immunitaires innées sont les premières à se mettre en place, quel
que soit le pathogène impliqué. En l'absence d'éradication du pathogène, ces réponses
sont suivies par la mise en place d'une réponse immunitaire adaptative avec
l'activation des LT et des LB spécifiques, réponse essentielle à la mise en place des
cellules T et B mémoires.
L'immunité anti-infectieuse est cruciale comme en témoigne la fréquence des
infections chez les patients présentant un déficit immunitaire, qu'il concerne
l'immunité innée ou l'immunité adaptative humorale ou cellulaire spécifique du
pathogène.

2) L’immunité antibactérienne
La réponse immunitaire antibactérienne varie considérablement avec le pouvoir
invasif de la bactérie en question, c’est-à-dire selon que la bactérie soit à multiplication
extra- ou intracellulaire (Figure 1). La structure de la paroi peut aussi influencer la
réponse immune puisque les bactéries GRAM+, GRAM- et les mycobactéries sont
reconnues par des TLRs différents et présentent une sensibilité différente vis-à-vis du
lysozyme (efficace contre les GRAM+) et du complément (efficace contre les GRAM-).
La présence de capsule perturbe les fonctions des phagocytes et du complément. La

40
Pr Hela JAÏDANE Cours d’Immunologie générale 2 ème année
production d’enzymes et/ou de toxines (facteurs de virulence) interfère aussi avec la
réponse immune.
a

Figure 1 : Réponse immunitaire contre les bactéries à multiplication extracellulaire (a)


et intracellulaire (b)
2.1) Réponse antibactérienne innée
La réponse antibactérienne innée fait intervenir divers acteurs :
- Les cellules phagocytaires: La phagocytose se fait essentiellement par les PNN pour
les bactéries extracellulaires et par les macrophages pour les bactéries
intracellulaires.
- Le complément (en association avec les anticorps) peut lyser les bactéries GRAM-
extracellulaires.
- Les NK activés produisent de l’IFNγ et activent ainsi les macrophages.
- Les LTγδ détruisent les bactéries intracellulaires par leur activité cytotoxique.
2.2) Réponse antibactérienne adaptative
La réponse antibactérienne adaptative varie selon le pouvoir invasif de la bactérie
et son aptitude à produire des toxines.
- Pour les bactéries productrices de toxines (exp : Corynebacterium diphteriae,…),
la réponse est essentiellement humorale faisant intervenir des anticorps
neutralisants les toxines
- Pour les bactéries extracellulaires (xp : streptocoques, staphylocoques, …), la
réponse humorale domine largement la réponse cellulaire. Les anticorps

41
Pr Hela JAÏDANE Cours d’Immunologie générale 2 ème année
sollicités empêchent l’adhérence bactérienne, bloquent la prolifération des
bactéries, activent le complément, facilitent la phagocytose, et neutralisent les
toxines et enzymes bactériennes.
- Pour les bactéries intracellulaires (exp : Mycobactéries, Listeria, Salmonella, …),
c’est plutôt la réponse cellulaire qui domine largement la réponse humorale. Les
principaux acteurs cellulaires sont les macrophages activés par les LTCD4+ (IFNγ) et
les LTCD8+ cytotoxiques.
2.3) Stratégies d’échappement des bactéries à la réponse immune
Les bactéries savent échapper à la réponse immune par diverses stratégies. Dans
ce cours, nous allons nous limiter à quelques exemples de mécanismes de résistance à
la phagocytose:
- Présence de capsule (Streptococcus pneumonia) ou de sucres Neisseria
gonorrhoea) qui empêchent la fixation des bactéries aux phagocytes
- Sécrétion d’enzymes qui empêchent le déroulement normal de la phagocytose
(Mycobacterium tuberculosis, Listeria monocytogenes)
- Paroi très résistante constituée par exp de glycolipides phénoliques
(Mycobacterium tuberculosis)

3) L’immunité antivirale
Les virus sont des entités physicochimiques acellulaires en interaction obligatoire
avec une cellule vivante (parasites intracellulaires obligatoires) dont ils utilisent la
machinerie protéique et métabolique nécessaire pour se répliquer. Leur élimination
implique donc essentiellement des effecteurs capables de détruire les cellules
infectées, tels que les lymphocytes NK et Tc.
3.1) Réponse antivirale innée
Les virus sont reconnus par différents PRR. Les différentes structures de leurs
acides nucléiques sont reconnues par divers TLR de l’endosome (TLR3, 7, 8 et 9) ainsi
que par les RLR. Leurs protéines sont reconnues par des TLR membranaires (TLR2 et 4).
Comme illustré par la Figure 2, la réponse antivirale innée implique divers acteurs,
essentiellement:
- une vingtaine de cytokines d’implication plus ou moins importante,
essentiellement les interférons (IFN) et surtout l’IFNα
- les cellules sentinelles (cellules dendritiques et macrophages) responsables de la
production de cytokines (surtout l’IFN), de l’apprêtement et de la présentation
de l’antigène, et de l’activation des cellules spécifiques
- les cellules NK responsables de la production d’IFNγ et de la lyse des cellules
infectées suite à leur activation
- le complément qui, en association avec les anticorps naturels, permet la lyse des
cellules infectées et des virus enveloppés

42
Pr Hela JAÏDANE Cours d’Immunologie générale 2 ème année

Figure 2 : Récapitulatif des divers acteurs de la réponse antivirale innée


L’IFNα est sans doute le plus important puisqu’il protège les cellules saines d’une
éventuelle infection en y induisant un état antiviral suite à une cascade de signalisation
déclenchée par la fixation de l’IFN à son récepteur membranaire et se terminant au
niveau du noyau par l’activation de l’expression de gènes responsables de la
dégradation des ARNm viraux (Figure 3).

Figure 3 : Mode d’action de l’IFNα


3.2) Réponse antivirale adaptative
Les virus étant des parasites intracellulaires obligatoires, la réponse adaptative va
être dominée par la réponse à médiation cellulaire. Ainsi, nous retrouverons
essentiellement (Figure 4):
- les LTCD4+ jouant le rôle de chef d’orchestre en stimulant la différenciation des
LTCD8+ en LTc et celle des LB en plasmocytes sécréteurs d’anticorps spécifiques,
et produisant des cytokines telles que l’IFNγ (LTh1)
- les LTCD8+ responsables de la lyse des cellules infectées et de la production de
cytokines telles que l’IFNγ
- les anticorps sécrétés par les plasmocytes issus de la différenciation des LB
spécifiques.
43
Pr Hela JAÏDANE Cours d’Immunologie générale 2 ème année

Figure 4 : Réponse antivirale adaptative

Les anticorps spécifiques du virus permettent de neutraliser le pouvoir infectieux


des particules virales libres en bloquant leur fixation aux récepteurs de nouvelles
cellules à infecter. Toutefois, elle intervient aussi dans la destruction des cellules
infectées (Figure 5). En effet, les anticorps se fixent aux antigènes viraux à la surface
des cellules infectées et facilitent leur lyse par le complément, par les cellules NK
(ADCC), ou encore leur phagocytose (opsonisation).

Figure 5 : Différents modes d’action des anticorps dans la réponse antivirale

3.3) Stratégies d’échappement des virus à la réponse immune


Diverses stratégies sont employées par les virus pour contrer la réponse immune.
Il est important de noter que ces stratégies dépendent essentiellement de la nature du
génome viral, ADN ou ARN.
C’est ainsi que les virus à ARN sont surtout connus pour adopter des stratégies de
camouflage telles que :
- la latence virale, c’est à-dire la persistance du virus à l’état de génome non
réplicatiif intégré dans l'ADN cellulaire ou provirus (Exp : VIH mais aussi virus à
ADN comme les Herpesviridae)
- la mutation des cibles des effecteurs de l’immunité, c’est-à-dire des antigènes afin
qu’ils ne soient plus reconnaissables par les LT et les anticorps spécifiques. En
effet, les virus à ARN sont très connus pour leur instabilité génétique due au fait
que leur ARN polymérase ARN-dépendante est dépourvue d’activité correctrice
« proof reading » et qu’ils peuvent ainsi facilement cumuler les mutations. Les
phénomènes de recombinaison sont aussi assez fréquents chez les virus à ARN,
44
Pr Hela JAÏDANE Cours d’Immunologie générale 2 ème année
sans oublier les phénomènes de réassortiment (mélange de segments
génomiques de virus différents) chez les virus à ARN segmenté (exp : Virus de la
grippe).
En revanche, les virus à ADN utilisent surtout des stratégies de sabotage telles
que :
- l’infection des cellules immunitaires (exp : EBV qui infecte les LB, mais aussi des
virus à ARN comme le VIH qui infecte les LTCD4+ et les macrophages, ainsi que le
HTLV-1 qui infecte les LT
- la production de « leurres » c’est-à-dire d’analogues structuraux et fonctionnels
de protéines cellulaires, tels que des virokines, virorécepteurs, antagonistes de
l’IFN, … (exp : EBV, HHV-8)
- l’inhibition de l’expression des molécules de CMH classe I et, par conséquent, de
la lyse par les LTc (exp : Herpesviridae)
- le blocage de l’apoptose (exp : la plupart des virus oncogènes)

4) L’immunité antiparasitaire
Les parasites sont définis comme des êtres vivants qui, pendant une partie ou la
totalité de leur existence, vivent aux dépens d’autres organismes appelés hôtes. Ils
peuvent être unicellulaires (Protozoaires) ou pluricellulaires sous forme de vers
(Helminthes : nématodes, trématodes, cestodes..).
4.1) Réponse antiparasitaire innée
L’immunité antiparasitaire innée implique toutes sortes de mécanismes
effecteurs, mais essentiellement la phagocytose et la lyse par le complément pour
contrer les Protozoaires (et aussi les NK pour les formes intracellulaires), et l’hyper-
éosinophilie et les mastocytes pour contrer les Helminthes (les polynucléaires
éosinophiles et les mastocytes se dégranulent et déversent leur contenu cytotoxique
sur le parasite pour le tuer).
4.2) Réponse antiparasitaire adaptative
L’immunité antiparasitaire adaptative varie selon que le parasite soit uni- ou
pluricellulaire.
Dans le cas d’une infection par un Protozoaire, sera mobilisée une réponse
cellulaire (Th1) si le parasite est intracellulaire, et une réponse humorale (anticorps) si
le parasite est extracellulaire.
Dans le cas d’une infection par un Helminthe, sera sollicitée une réponse Th2 avec
dominance des anticorps d’isotype IgE qui viendront opsoniser les parasites pour les
éosinophiles par l’intermédiaire du FcεR.
4.3) Stratégies d’échappement des parasites à la réponse immune
Les parasites savent aussi déjouer le système immunitaire, et ce, de différentes
manières :
- les variations antigéniques leur permettant d’échapper aux LT et anticorps
spécifiques (exp : Plasmodium)
- l’inhibition du phagolysosome (exp : Leishmania, Toxoplasma)

45
Pr Hela JAÏDANE Cours d’Immunologie générale 2 ème année
- l’immunosuppression (exp : Plasmodium)

5) L’immunité antifongique
5.1) Réponse antifongique innée
Les PNN, les monocytes, les macrophages et les cellules dendritiques expriment un
panel de PRRs qui peuvent reconnaître l’agent pathogène fongique envahissant et
déclencher la réponse immunitaire. Parmi les PAMPs fongiques, citons: β-glycanes,
chitine, mannanes (O-linked et N-linked), zymozan et acides nucléiques.
Parmi les constituants de la paroi, les glycanes et polymannanes activent les
cellules épithéliales, endothéliales, dendritiques, macrophages et PNN. Le zymosane,
quant à lui, active la voie alterne du complément.
Dès la fixation des PAMPs fongiques aux PRRs correspondants, une cascade
d’événements en aval, tels que la libération de cytokines et de chimiokines, la
phagocytose et le métabolisme oxydatif, mènent finalement à la mort du champignon.
5.2) Réponse antifongique adaptative
La libération de cytokines induit une RI adaptative de type Th1 et/ou Th17 (Figure
6) :
- IL-1β, IL-6 et IL-23 favorisent la différenciation des Th17 qui, en produisant de l’IL-
17A, activent les PNN et les défensines et entraînent l’inflammation
- L’IL-12 induit la production d’IFN-γ par les cellules Th1 permettant l’activation des
phagocytes et entraînant aussi l’inflammation

Figure 6 : Polarisation Th1 / Th17 lors de la réponse antifongique adaptative

Les LTreg agissent comme une réponse homéostatique dirigée par l’hôte pour
garder l’inflammation sous contrôle.
5.3) Stratégies d’échappement des champignons à la réponse immune
Les champignons utilisent de multiples stratégies pour déjouer le système
immunitaire, entre autres:
- l’épaississement de la paroi qui leur confère une résistance aux complexes
d’attaque membranaire formés par l’activation du complément

46
Pr Hela JAÏDANE Cours d’Immunologie générale 2 ème année
- la production d’enzymes (catalase, superoxyde dismutase, …) capables de contrer
les ROS (dérivés réactifs de l’oxygène) produits par les cellules de l’immunité
innée
- la production de toxines aux effets immunosuppresseurs

6) Conclusion
Lorsqu’un agent infectieux arrive à franchir les barrières cutanéo-muqueuses, ses
PAMPs sont détectées par des PRRs au niveau des cellules de l’immunité innée. Cette
interaction va permettre la mise en place d’une réponse innée impliquant des acteurs
différents en fonction de la nature du microorganisme (bactérie, virus, parasite uni- ou
pluricellulaire, champignon) et de son pouvoir invasif (multiplication extra- ou
intracellulaire). Si le pathogène n’est pas éliminé, une réponse adaptative spécifique
est mise en place. Celle-ci est majoritairement humorale en cas de microorganisme
extracellulaire et majoritairement cellulaire en cas de microorganisme intracellulaire.
Les microorganismes ont toutefois appris à déjouer le système immunitaire via
différentes stratégies.

7) Messages pédagogiques à retenir


 La réponse immune à une infection est adaptées à la nature du pathogène, sa
structure et surtout son caractère intra- ou extracellulaire.
 Les agents infectieux sont reconnus grâce à leurs PAMPs par les PRRs des cellules
immunitaires de l’hôte.
 La réponse contre les bactéries extracellulaires fait surtout intervenir les PNN et les
anticorps neutralisants, tandis que celle dirigée contre les bactéries intracellulaires
fait surtout intervenir les macrophages, les NK et les LTc.
 Le système immunitaire tente de neutraliser les toxines bactériennes par la
production d’anticorps spécifiques.
 Le lysozyme est efficace contre les bactéries GRAM+ alors que le complément est
beaucoup plus efficace contre les GRAM-.
 La réponse antivirale innée implique essentiellement l’IFNα et les NK, tandis que la
réponse adaptative implique essentiellement les LTc mais aussi les anticorps.
 L’immunité antiparasitaire innée implique essentiellement la phagocytose et la lyse
par le complément pour contrer les Protozoaires, et l’hyper-éosinophilie et les
mastocytes pour contrer les Helminthes.
 L’immunité antiparasitaire adaptative implique essentiellement une réponse de
type Th1 dans le cas de Protozoaires intracellulaires, et de type Th2 dans le cas de
Protozoaires extracellulaires ou d’Helminthes (IgE).
 La réponse antifongique est déterminée par le type de PAMP constituant la paroi et
de son interaction avec le PRR correspondant. Les cytokines libérées entraînent la
mise en place d’une RI adaptative inflammatoire de type Th1 et/ou Th17.
 Les agents infectieux savent déjouer la RI par différentes stratégies.

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Pr Hela JAÏDANE Cours d’Immunologie générale 2 ème année

La tolérance immunitaire

OBJECTIFS
1. Définir la tolérance immunitaire
2. Expliquer les différents types de tolérance immunitaire
3. Enoncer les facteurs intervenant dans la tolérance immunitaire
4. Expliquer les mécanismes d’établissement de la tolérance immunitaire

PLAN
1) Introduction
2) Les différents types de tolérance immunitaire
3) Les facteurs intervenant dans la tolérance immunitaire
3.1) Facteurs liés à l’antigène
3.2) Facteurs liés à l’hôte
4) Les mécanismes d’établissement de la tolérance immunitaire
4.1) Tolérance centrale
4.2) Tolérance périphérique

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Pr Hela JAÏDANE Cours d’Immunologie générale 2 ème année
1) Introduction
Le système immunitaire a pour principale fonction et propriété, la discrimination
du soi et du non-soi. Ceci lui permet la tolérance au soi, l’élimination des pathogènes
et le rejet des greffes allogéniques.
Nous pouvons donc nous demander : Pourquoi une mère ne rejette pas son fœtus
? Pourquoi ne développe-t-on pas de réaction contre les antigènes alimentaires ?
Pourquoi n’y a-t-il pas de réaction contre la flore commensale ? Pour répondre à ces
questions, il faut d’abord mieux comprendre la notion de tolérance immunitaire.
La tolérance immunitaire est la capacité du système immunitaire de l'organisme à
supporter la présence d'antigènes sans manifester de réaction de défense spécifique
(Figure 1). Son établissement nécessite un contact préalable avec l’antigène en
question, qualifié de tolérogène. Il s’agit donc d’un état physiologique acquis (induit).
Elle peut toucher les LB ou les LT ou les deux en même temps. Toutefois, la tolérance
des LT est plus facile à induire et est plus durable que celle des LB.

Figure 1 : Réponse immune versus tolérance immune

2) Les différents types de tolérance immunitaire


Selon l’antigène tolérogène mis en cause, on distingue 2 types de tolérance:
- La tolérance naturelle du soi: Elle est orientée contre les auto-antigènes du soi et
mise en place durant les périodes fœtales et néonatales. Sa rupture entraîne le
développement de maladies auto-immunes.
- La tolérance induite du non soi: Elle peut être induite naturellement (exp:
infection chronique) ou artificiellement (immunothérapie).

3) Les facteurs intervenant dans la tolérance immunitaire


L’induction de la tolérance immunitaire est tributaire de deux principaux types de
facteurs:

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Pr Hela JAÏDANE Cours d’Immunologie générale 2 ème année
3.1) Facteurs liés à l’antigène
Différents facteurs liés à l’antigène sont impliqués dans l’induction ou non de sa
tolérance :
- La nature de l’antigène: En effet, il existe deux types d’antigènes vis-à-vis desquels
le système immunitaire va réagir différemment :
- des antigènes immunogènes: Substances particulaires de PM élevé (exp: celules,
bactéries, polymères, …)
- des antigènes tolérogènes: Substances solubles de faible PM (exp: protéines
sériques non polymériques, polysaccharides, lipopolysaccharides,…)
- La dose de l’antigène: En combinaison avec sa thymo-dépendance ou non, la dose
de l’antigène oriente la réponse du système immunitaire :
Forte dose d’Ag thymo-indépendant → Tolérance
Forte ou faible dose d’Ag thymo-dépendant → Tolérance
Dose faible ou intermédiaire d’Ag thymo-indépendant → Réponse immune
Dose intermédiaire d’Ag thymo-dépendant → Réponse immune
- La voie d’administration de l’antigène: Il est plus facile d’induire la tolérance
immunitaire suite à l’administration de l’antigène par voie intraveineuse, orale ou
nasale, que par voie intrapéritonéale, que par voie sous-cutanée ou
intradermique.
- La persistance de l’antigène : Celle-ci est nécessaire au maintien de la tolérance
immunitaire.
3.2) Facteurs liés à l’hôte
L’âge du sujet qui reflète le niveau de maturité de son système immunitaire influe
grandement. En effet, il est beaucoup plus facile d’induire la tolérance chez les fœtus
(système immunitaire immature) que chez les enfants que chez les adultes (système
immunitaire mature).

4) Les mécanismes d’établissement de la tolérance immunitaire


Il faut savoir qu’il existe deux niveaux de tolérance : la tolérance centrale, puis la
tolérance périphérique.
4.1) Tolérance centrale
C’est l’étape déterminante de l’ontogénie lymphocytaire dans les organes
lymphoïdes primaires (Figure 2). A son issue, ne seront normalement libérés en
périphérie que des lymphocytes matures incapables de reconnaître le soi.
L’établissement de la tolérance centrale des LT s’opère au niveau du thymus, plus
précisément, au niveau de la médulla (Figure 3). En fait, les cellules épithéliales de la
médulla thymique (mTEC) expriment des auto-antigènes du soi représentants des
différents tissus, et les présentent aux thymocytes immatures CD4+CD8+ (doubles
positifs) à éduquer. Parmi ces thymocytes, ceux qui reconnaissent ces auto-antigènes
avec une forte affinité seront délétés par apoptose. C’est ce que l’on appelle la
sélection négative des thymocytes auto-réactifs. Certains thymocytes auto-réactifs
seront tout de même épargnés et convertis en LTreg.

50
Pr Hela JAÏDANE Cours d’Immunologie générale 2 ème année

Figure 2 : Principaux mécanismes d’établissement de la tolérance centrale

Figure 3 : Mécanismes d’établissement de la tolérance centrale des LT

L’établissement de la tolérance centrale des LB s’opère quant à elle au niveau de


la moelle osseuse (Figure 4). Les cellules stromales présentent les auto-antigènes aux
lymphocytes Pré-B. En cas de forte reconnaissance, les cellules auto-réactives
subissent soit la délétion (mort), soit la correction de leur récepteur afin qu’il ne puisse
plus reconnaitre l’auto-antigène.

Figure 4 : Mécanismes d’établissement de la tolérance centrale des LB

4.2) Tolérance périphérique


Il arrive parfois que les mécanismes de tolérance centrale soient insuffisants et
que des lymphocytes auto-réactifs se retrouvent en périphérie. La tolérance

51
Pr Hela JAÏDANE Cours d’Immunologie générale 2 ème année
périphérique apporte des mécanismes supplémentaires assurant leur contrôle dans les
divers tissus, essentiellement les organes lymphoïdes secondaires (Figure 5).

Figure 5 : Principaux mécanismes d’établissement de la tolérance périphérique

L’établissement de la tolérance périphérique des LT auto-réactifs s’opère par


différents mécanismes qui sont : l’anergie (absence de réponse), la suppression
(blocage de l’activation via des LTreg) et la délétion (apoptose) (Figure 6).

Figure 6 : Mécanismes d’établissement de la tolérance périphérique des LT

L’induction de l’anergie des LT auto-réactifs s’opère elle-même via divers


mécanismes (Figure 7) : l’absence de signalisation (pas de co-stimulation), ou la liaison
à des récepteurs inhibiteurs.
Quant à la tolérance périphérique des LB, elle s’établit via la révision de leurs
récepteurs (Figure 8). En effet, suite à la reconnaissance d’un auto-antigène au niveau
du centre germinatif, le LB auto-réactif subit un réarrangement au niveau du locus de
la chaîne lourde de son récepteur de telle sorte qu’il ne puisse plus reconnaître cet
auto-antigène.

52
Pr Hela JAÏDANE Cours d’Immunologie générale 2 ème année

Figure 7 : Différents mécanismes d’induction de l’anergie des LT auto-réactifs

Figure 8 : Mécanismes d’établissement de la tolérance périphérique des LB

Enfin, nous ne pouvons parler de tolérance périphérique sans parler de de LTreg. Il


faut d’abord savoir qu’il existe différents types de LTreg (Figure 9) :
- Les LTreg naturels ou nTreg : générés au niveau de la médulla thymique lors de la
sélection négative (voir paragraphe 4.1). Ils représentent 5 à 10% des LTCD4+ et
expriment fortement CD25 mais aussi Foxp3 (LT CD4+ CD25hi Foxp3+).
- Les LTreg induits ou iTreg : induits en périphérie suite à la reconnaissance d’un auto-
antigène présenté par une cellule dendritique qualifiée de tolérogène produisant
du TGF-β et de l’IL-10. Il existe deux types d’iTreg :
- les Tr1 : Ce sont des LT CD4+ producteurs d’IL-10.
- les Th3 : Ce sont des LT CD4+ ou CD8+ producteurs de TGF-β.

Figure 9 : Les différents types de LTreg

53
Pr Hela JAÏDANE Cours d’Immunologie générale 2 ème année
Les LTreg emploient divers modes d’action pour assurer la tolérance périphérique
aux auto-antigènes (Figure 10).
- Les nTreg agissent directement sur les LT auto-réactifs en bloquant leur activation
via le ligand inhibiteur CTLA-4 et en diminuant leur prolifération.
- Les iTreg agissent indirectement via la production des cytokines anti-
inflammatoires IL-10 et TGF-β, qui agissent sur les CPA en diminuant l’expression
des molécules du CMH et de co-stimulation ainsi que la production de cytokines
inflammatoires. Ceci a pour conséquence la diminution de l’activation, de la
prolifération et de la production cytokinique des LT auto-réactifs.

Figure 10 : Différents modes d’action des LTreg dans la tolérance périphérique


des auto-antigènes

5) Conclusion
La tolérance immunitaire est la capacité du système immunitaire à supporter la
présence d'antigènes sans manifester de réaction de défense spécifique. La tolérance
au soi est une propriété fondamentale du système immunitaire. Elle s’opère au niveau
central lors de l’ontogenèse des LB et LT dans les organes lymphoïdes primaires, puis
en périphérie afin de se débarrasser, d’inhiber ou de détourner les clones auto-réactifs
circulants ayant échappé au contrôle central.

6) Messages pédagogiques à retenir


 La tolérance immunitaire est la capacité du système immunitaire à supporter la
présence d'antigènes sans manifester de réaction de défense spécifique.
 Elle s’établit naturellement pour les antigènes du soi et peut être induite contre le
non soi.
 L’induction de la tolérance immunitaire est tributaire de plusieurs facteurs liés à
l’antigène (nature, dose, voie d’administration, persistance) et à l’hôte (âge).

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Pr Hela JAÏDANE Cours d’Immunologie générale 2 ème année
 Il existe deux niveaux d’établissement de la tolérance au soi : la tolérance centrale
dans les organes lymphoïdes primaires et la tolérance périphérique des clones auto-
réactifs circulants.
 La tolérance centrale des LT s’établit au niveau de la médulla thymique par la
sélection négative des thymocytes reconnaissant fortement les auto-antigènes
exprimés par les mTEC. Certains de ces thymocytes auto-réactifs seront convertis en
LTreg.
 La tolérance centrale des LB s’opère au niveau de la moelle osseuse par la délétion
des lymphocytes Pré-B reconnaissant fortement les auto-antigènes exprimés par les
cellules stromales. Certaines de ces cellules auto-réactives subiront plutôt une
correction de leur récepteur.
 L’établissement de la tolérance périphérique des LT auto-réactifs s’opère par
différents mécanismes: l’anergie (absence de co-stimulation ou liaison à des
récepteurs inhibiteurs), la suppression (blocage de l’activation via des LTreg) et la
délétion.
 La tolérance périphérique des LB s’établit via la révision de leurs récepteurs.
 Les LTreg jouent un rôle important dans la tolérance périphérique. Les nTreg sont
ceux générés au niveau du thymus et agissent via l’expression du ligand inhibiteur
CTLA-4, tandis que les iTreg sont induits en périphérie et agissent via la production
de cytokines anti-inflammatoires IL-10 (Tr1) et TGF-β (Th3).

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Pr Hela JAÏDANE Cours d’Immunologie générale 2 ème année

Introduction à l’immunopathologie

OBJECTIFS
1. Définir l’immunopathologie
2. Enumérer et décrire les principales maladies résultant d’un
dysfonctionnement du système immunitaire, à savoir:
- Les réactions d’hypersensibilité
- Les maladies auto-immunes
- Les syndromes lymphoprolifératifs
- Les déficits immunitaires

PLAN
1) Introduction
2) Les réactions d’hypersensibilité
2.1) Classification de Gell et Coombs
2.2) Hypersensibilité allergique de type 1
3) Les maladies auto-immunes
3.1) Généralités
3.2) Classification
3.3) Rôle des auto-anticorps
4) Les syndromes lymphoprolifératifs
4.1) Généralités
4.2) Classification
4.3) Diagnostic
5) Les déficits immunitaires
5.1) Les déficits immunitaires primitifs
5.2) Les déficits immunitaires acquis

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Pr Hela JAÏDANE Cours d’Immunologie générale 2 ème année
1) Introduction
L’immunopathologie est une discipline de la biologie médicale s’intéressant aux
maladies touchant le système immunitaire ou ayant pour cause un dysfonctionnement
immunitaire.
La dérégulation du système immunitaire peut être caractérisée par un excès de
fonctionnement du système immunitaire (hypersensibilité, auto-immunité,
lymphoprolifération) ou par un défaut de fonctionnement du système immunitaire
(déficit immunitaire).

2) Les réactions d’hypersensibilité


L'hypersensibilité est une réponse immunitaire excessive et indésirable vis-à-vis
d'un antigène.
L'Hypersensibilité immunologique allergique (HSIA) ou allergie repose sur un
mécanisme immunologique dépendant des récepteurs de l'immunité adaptative (BCR
ou TCR).
2.1) Classification de Gell et Coombs
Selon Gell et Coombs, il existe quatre types de HSIA se distinguant par le délai de
leur apparition ainsi que par leurs effecteurs (Figure 1) :
- HSIA de type I: immédiate et anaphylactique (IgE)
- HSIA de type II: cytotoxique (IgG)
- HSIA de type III: semi-retardée (complexes immuns)
- HSIA de type IV: retardée (Th1 et macrophages)

Figure 1 : Classification des HSIA selon Gell et Coombs

57
Pr Hela JAÏDANE Cours d’Immunologie générale 2 ème année
2.2) Hypersensibilité allergique de type 1
La HSIA de type 1 est une réaction immune et inflammatoire rapide (immédiate) et
excessive de sujets génétiquement prédisposés (atopiques), à des antigènes courants
normalement inoffensifs (allergènes), même si présentés en faible quantité.
Les allergènes sont des nano- ou micro-particules naturelles (pollen, aliments,
phanères, poussière,…) ou chimiques (polluants atmosphériques, cosmétiques,
pesticides, …).
Elle se caractérise par la production d’IgE spécifiques de fortes spécificité et
affinité, ce qui en fait des anticorps très actifs même en faibles quantités, d’où la
réponse excessive.
Elle se déroule en deux étapes successives (Figure 2):
- 1) Phase de sensibilisation (asymptomatique):
Lors d’une 1ère exposition à l’allergène, celui-ci est pris en charge par les cellules
dendritiques qui activent des LT spécifiques. Il en résulte une réponse Th2
excessive caractérisée par la différenciation des LB en plasmocytes sécréteurs
d’IgE. Ces IgE se fixent à leurs récepteurs FcεR à la surface des mastocytes.
- 2) Phase de déclenchement ou effectrice:
Lors d’une nouvelle exposition à l’allergène, ce dernier se lie aux IgE
préalablement produites et fixées aux mastocytes, ce qui entraîne la
dégranulation immédiate des mastocytes. La réaction excessive des vaisseaux et
des muscles lisses est responsable des symptômes de l'allergie.

Figure 2 : Etapes et mécanismes de la réaction d'hypersensibilité allergique de type 1

3) Les maladies auto-immunes


3.1) Généralités
Une rupture de la tolérance au soi engendre un déséquilibre de la balance en
faveur de l’auto-immunité. Par définition, une maladie auto-immune (MAI) est un
désordre dans lequel le dommage tissulaire est causé par une réaction immunitaire

58
Pr Hela JAÏDANE Cours d’Immunologie générale 2 ème année
adaptative (auto-anticorps et clones de LT auto-réactifs) de l’hôte contre ses propres
tissus.
Les MAI ont une prévalence de 5 à 7% et sont plus fréquentes chez le sexe
féminin. Ce sont des maladies multifactorielles puisqu’elles impliquent nécessairement
une prédisposition génétique (certains allèles du CMH et d’autres gènes), des
déclencheurs environnementaux (produits chimiques, tabac, UV, infections…) et un
dérèglement immunologique (lymphocytes auto-réactifs, auto-antigènes altérés ou
présentés anormalement…).
3.2) Classification
Les MAI peuvent être classées de deux manières différentes :
- selon les tissus affectés (Tableau 1): c’est ainsi qu’on distingue des MAI
spécifiques d’organes et d’autres dites systémiques ou non spécifiques
d’organes.
Tableau I : Classification des maladies auto-immunes selon les tissus affectés

- selon les effecteurs ou les mécanismes pathogéniques (Tableau 2) : C’est ainsi


qu’on distingue entre MAI médiées par des auto-anticorps et celles médiées par
des LTc auto-réactifs (Figures 3 et 4).
Tableau II : Classification des maladies auto-immunes selon les mécanismes
pathogéniques

59
Pr Hela JAÏDANE Cours d’Immunologie générale 2 ème année

Figure 3 : Destruction de la gaine de myéline par les LTc au cours de la sclérose en plaques

Figure 4 : Observation microscopique de coupes de pancréas montrant un îlot de Langerhans


entouré de tissu du pancréas exocrine (coloration hématoxyline/éosine).
(a) Pancréas sain; (b) Pancréas d’un patient atteint de diabète de type 1 montrant un infiltrat
lymphocytaire au niveau de l’îlot de Langerhans;

3.3) Rôle des auto-anticorps


Les auto-anticorps impliqués dans les MAI sont qualifiés d’auto-anticorps
pathogènes. Ce sont des IgG qui, contrairement aux anticorps naturels physiologiques,
sont hautement spécifiques et présentes à des concentrations sériques élevées.
Comme illustré par la Figure 3, les auto-anticorps peuvent être:
- spécifiques d’organes: dirigés contre des auto-antigènes propres au tissu
concerné (exp: thyroglobuline, insuline, …)
- non spécifiques d’organes: dirigés contre des auto-antigènes communs à
n’importe quel type de cellule (exp: noyau, cytoplasme, mitochondrie, …)

Figure 5 : Observation microscopique de différents types d’auto-anticorps mis en évidence


par immunofluorescence
Les auto-anticorps agissent via divers mécanismes pathogéniques: ADCC,
complexes immuns, activation du complément, blocage ou activation de récepteurs, …

60
Pr Hela JAÏDANE Cours d’Immunologie générale 2 ème année
Ils peuvent être utilisés comme marqueurs diagnostiques des maladies auto-immunes
(Tableau 3).
Tableau III : Les auto-anticorps comme marqueurs diagnostiques des MAI

4) Les syndromes lymphoprolifératifs


4.1) Généralités
Les syndromes lymphoprolifératifs (SLP) sont des hémopathies malignes du tissu
lymphoïde. Plus précisément, il s’agit de proliférations monoclonales, au sein du tissu
lymphoïde, de cellules lymphoïdes de phénotypes B (>80%) ou T. Les cellules
tumorales sont bloquées à un stade de leur différenciation et gardent les propriétés de
ce stade, aussi bien dans leur localisation que dans leur fonction.
4.2) Classification
Il existe différents critères de classification des SLP :
- La nature de la cellule: B ou T
- La durée: aiguë ou chronique
- Le stade de différenciation :
- Cellules immatures (aiguës et graves)
- Cellules matures (le plus souvent chroniques et moins sévères)
- La localisation (Figure 6):
- Naissance dans un organe lymphoïde secondaire et aptitude à s’étendre à
n’importe quelle partie du système lymphatique: Lymphomes
- Atteinte des sites de lymphopoïèse et passage plus ou moins important dans la
circulation: Leucémies
- Limitée à la moelle osseuse: Myélomes touchant les plasmocytes

61
Pr Hela JAÏDANE Cours d’Immunologie générale 2 ème année

Figure 6 : Trois grands prototypes de SLP

4.3) Diagnostic
La monoclonalité des cellules tumorales peut être explorée par
différentes approches, et ce, à différents niveaux (Figure 7) :
- au niveau cellulaire : la restriction isotypique peut être mise en
évidence par cytométrie en flux ou par immunohistochimie
- au niveau génétique : la monoclonalité génétique est mise en
évidence par des techniques de biologie moléculaire (PCR)
- au niveau protéique : la monoclonalité des anticorps est mise en
évidence par électrophorèse des protides ± immunofixation ±
dosage des chaînes légères libres

Figure 7 : Principales approches diagnostiques de la monoclonalité


62
Pr Hela JAÏDANE Cours d’Immunologie générale 2 ème année

5) Les déficits immunitaires


Un déficit immunitaire se traduit par un affaiblissement des défenses de
l'organisme à contrer les attaques infectieuses (infections plus fréquentes et plus
sévères que la normale) et tumorales
Les déficits immunitaires peuvent toucher les différents éléments du système
immunitaire, c’est-à-dire aussi bien les effecteurs de l’immunité innée que ceux de
l’immunité adaptative
Ils peuvent être primitifs (origine génétique) ou acquis (consécutifs à de
nombreuses pathologies).
5.1) Les déficits immunitaires primitifs
Ils sont aussi appelés primaires ou congénitaux puisque dus à des
dysfonctionnements héréditaires ou génétiques du système immunitaire.
Ils sont relativement rares (touchent environ 1 personne sur 5000) et sont souvent
diagnostiqués durant l’enfance (généralement très sévères), mais aussi à l’âge adulte
(généralement moins sévères).
Ils regroupent plus de 200 maladies dont les plus connues sont listées dans le
Tableau 4.
Tableau IV : Quelques exemples de déficits immunitaires primitifs

5.2) Les déficits immunitaires acquis


Ils sont aussi appelés secondaires. Ils sont plus fréquents et surviennent à tout
âge. Ils consistent en un dysfonctionnement du système immunitaire résultant de:
- une pathologie : infection par le VIH, paludisme, diabète de type 2, malnutrition
sévère, leucémie, autres cancers,…
- un traitement : chimiothérapie, radiothérapie ou prise de médicaments
immunosuppresseurs dans le cadre de greffe d’organe ou de traitement de
pathologies auto-immunes, …

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Pr Hela JAÏDANE Cours d’Immunologie générale 2 ème année
6) Conclusion
Certaines pathologies se manifestent par, ou sont la conséquence d’un
dysfonctionnement du système immunitaire. Hypersensibilité, auto-immunité, et
lymphoprolifération sont les manifestations d’un excès de fonctionnement du système
immunitaire, alors que le déficit immunitaire témoigne d’un défaut de son
fonctionnement.

7) Messages pédagogiques à retenir


 La dérégulation du système immunitaire peut être caractérisée par un excès de
fonctionnement du système immunitaire (hypersensibilité, auto-immunité,
lymphoprolifération) ou par un défaut de fonctionnement du système immunitaire
(déficit immunitaire).
 Selon Gell et Coombs, il existe quatre types d'hypersensibilité immunologique
allergique (HSIA), ou allergie, se distinguant par le délai de leur apparition ainsi que
par leurs effecteurs.
 La HSIA de type I est immédiate. Une 1 ère rencontre avec l’allergène constitue la
phase de sensibilisation au cours de laquelle il y a production d’IgE et leur fixation à
la surface des mastocytes. Une réexposition constitue la phase de déclenchement
ou effectrice au cours de laquelle la fixation de l’allergène sur les IgE entraînant la
dégranulation des mastocytes.
 Une maladie auto-immune (MAI) est un désordre dans lequel le dommage tissulaire
est causé par une réaction immunitaire adaptative (auto-anticorps et clones de LT
auto-réactifs) de l’hôte contre ses propres tissus.
 Les MAI peuvent être classées selon les tissus affectés ou selon les effecteurs
pathogéniques.
 Les syndromes lymphoprolifératifs (SLP) sont des hémopathies malignes
(proliférations monoclonales) du tissu lymphoïde. Ils peuvent être aigus ou
chroniques, toucher les LB ou LT, matures ou immatures. Selon leur localisation, on
distingue des lymphomes, leucémies et myélomes.
 Les déficits immunitaires peuvent toucher les différents éléments du système
immunitaire et peuvent être primitifs (origine génétique) ou acquis (consécutifs à
de nombreuses pathologies).

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Pr Hela JAÏDANE Cours d’Immunologie générale 2 ème année

Introduction à l’immunothérapie

OBJECTIFS
1. Définir l’immunothérapie
2. Décrire les méthodes d’immunothérapie immunosuppressive
3. Décrire les méthodes d’immunothérapie immunostimulatrice

PLAN
1) Introduction
2) Les immunothérapies immunosuppressives
2.1) Principes de l’immunosuppression
2.2) Modalités de l’immunosuppression spécifique
2.2.1) Les anticorps monoclonaux
2.2.2) Les immunotoxines
2.2.3) Les cytokines immunosuppressives
2.2.4) Les lymphocytes T régulateurs
2.2.5) La déviation immunitaire
3) Les immunothérapies immunostimulatrices
3.1) Principe de l’immunostimulation
3.2) Modalités de l’immunostimulation
3.2.1) La sérothérapie
3.2.2) La thérapie cellulaire adoptive
3.2.3) La vaccination / Immunisation thérapeutique
3.2.4) Potentialisation de l’activation lymphocytaire
3.2.5) Blocage de l’immunosuppression
4) Conclusion
5) Messages pédagogiques à retenir

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Pr Hela JAÏDANE Cours d’Immunologie générale 2 ème année
1) Introduction
L’immunothérapie est une approche révolutionnaire au centre de toutes les
biothérapies (tissulaire, cellulaire, génique, moléculaire…). Au sens strict, elle
correspond au développement d’outils biologiques visant une cible bien précise de la
réponse immunitaire. Au sens large, elle correspond au développement d’outils
immunologiques à visée thérapeutique.
L’immunothérapie repose sur deux principales approches :
- L’immunothérapie adoptive: Elle consiste en la substitution du système
immunitaire par transfert d’immunité issue d’un donneur via l’injection
d’effecteurs (cellules, molécules).
- L’immunothérapie active: Elle consiste en une intervention sur le système
immunitaire, afin de le stimuler ou de l’inhiber, par l’injection de molécules et
cellules régulatrices.
Différents types d’outils sont au service de l’immunothérapie : les cellules du
système immunitaire, les cellules souches précurseurs des cellules immunitaires, les
antigènes, les anticorps, les cytokines…
L’immunothérapie a deux usages opposés :
- L’immunosuppression: c’est-à-dire la modulation d’une réponse immune
excessive et donc délétère (exp: allergie, auto-immunité, rejet de greffe, …).
- L’immunostimulation: c’est-à-dire l’activation du système immunitaire en cas de
réponse inefficace (exp: en cas de cancer, infection chronique, …).

2) Les immunothérapies immunosuppressives


Les immunothérapies immunosuppressives sont utilisées pour inhiber une
réponse immune excessive et donc délétère (exp: allergie, rejet de greffe, auto-
immunité,, …) (Figure 1).

Figure 1 : Utilité des thérapies immunosuppressives


Elles sont aussi utilisées pour éliminer les lymphocytes proliférant de manière
anormale (SLP).
2.1) Principes de l’immunosuppression
L’immunosuppression repose sur diverses stratégies :
- Blocage des réponses immunitaires et/ou limitation des mécanismes
inflammatoires (exp des corticostéroïdes qui agissent en réprimant l’expression
des gènes pro-inflammatoires, Figure 2).

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Pr Hela JAÏDANE Cours d’Immunologie générale 2 ème année

Figure 2 : Mode d'action génomique des glucocorticoïdes


GC: glucocorticoïde ; GCR: «glucocorticoïde receptor» ; GRE: «glucocorticoïde response element»

- Blocage de la stimulation antigénique lymphocytaire, c’est-à-dire des


interactions moléculaires et/ou de la transduction du signal (Figure 3)
- Inhibition de l’activation lymphocytaire et/ou de l’expansion clonale par des
molécules cytostatiques et/ou un système de destruction spécifique et
conditionnel (Figure 3)

Figure 3 : Mécanismes d'action des immunosuppresseurs bloquant la réponse


lymphocytaire T
- Arrêt ou déviation des fonctions effectrices par suppression cellulaire et/ou
déviation immunitaire
2.2.1) Les anticorps monoclonaux
Les anticorps monoclonaux à visée thérapeutique (immunosuppression) opèrent
selon divers mécanismes d’action : neutralisation, antagonisme, et cytolyse (Figure 4).

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Pr Hela JAÏDANE Cours d’Immunologie générale 2 ème année

Figure 4 : Mécanismes d’action des anticorps thérapeutiques


En effet, ils peuvent être utilisés pour l’élimination des cellules
immunocompétentes. Citons à titre d’exemples:
- l’anti-CD3 entraînant la déplétion des LT comme traitement immunosuppresseur
du rejet de greffe
- l’anti-CD20 (Rituximab) entraînant la déplétion des LB (Figure 5)

Figure 5 : Mécanismes d’action du Rituximab


(molécule utilisée dans le traitement du lymphome B et de plusieurs maladies auto-immunes)

Mais ils sont essentiellement utilisés pour bloquer les interactions moléculaires :
- Blocage des molécules de co-stimulation (signal 2):
- Anti-CD28
- Protéines de fusion CTLA-4-Ig (Abatacept puis Belatacept)
- Blocage des autres signaux activateurs (signal 3):
- Anti-CD25 (Daclizumab)
- Anti-cytokines inflammatoires (Infliximab = anti-TNF)
*Les cytokines peuvent aussi être bloquées par des récepteurs solubles
- Blocage de la migration des cellules pro-inflammatoires : anti-molécules
d’adhésion (Natalizumab = anti-intégrines)
2.2.2) Les immunotoxines
Les immunotoxines sont des molécules hybrides constituées d’un anticorps et
d’une toxine protéique (surtout utilisées dans le traitement des SLP).

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Les anticorps sont généralement conjugués à des molécules de chimiothérapie. On
parle ainsi de chimioimmunothérapie. Le mode d’action de ces molécules est le suivant
(Figure 6) :
1. Internalisation de l’anticorps conjugué après liaison au récepteur cellulaire
2. Dissociation intralysosomale de l’anticorps et de la toxine
3. Diffusion intranucléaire de la chimiothérapie
4. Liaison de la toxine à sa cible
5. Mort par apoptose

Figure 6 : Mécanismes d’action de la chimioimmunothérapie

Il existe aussi des anticorps conjugués à des radioisotopes. On parle ainsi de


radioimmunothérapie (exp: radioisotopes conjugués à l’anti-CD20).
2.2.3) Les cytokines immunosuppressives
Ce sont des protéines recombinantes aux pouvoirs anti-inflammatoires:
- L’IL-10 recombinante a été utilisée dans le traitement de la polyarthrite
rhumatoïde sans démontrer toutefois une efficacité clinique suffisante.
- Le TGF-β
2.2.4) Les lymphocytes T régulateurs
Le principe de cette stratégie est de changer le ratio T effecteurs / T régulateurs.
Les LTreg peuvent être générés par induction ou par amplification des Treg naturels. Ils
sont utilisés dans les protocoles de transplantation d’organes (LTreg et de MO du
donneur), ainsi que dans le traitement de maladies auto-immunes à cellules T.
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2.2.5) La déviation immunitaire
Au cours d’une immunothérapie anti-allergénique, on vise à modifier la réponse
immune à différents niveaux (Figure 7). Durant la phase précoce, on cherche à
diminuer la capacité de dégranulation des basophiles et des mastocytes. Durant la
phase tardive, l’induction de LTreg et de LBreg spécifiques de l’allergène va, via la
production d’IL-10 et de TGF-β, entraîner :
- la diminution du nombre de mastocytes
- la suppression de la réponse Th2 et l’induction d’une réponse Th1 spécifique
- l’induction d’IgG et d’IgA spécifiques
- la diminution de la prolifération des lymphocytes spécifiques

Différents niveaux
d’action via la
production d’IL-10
et TGF-β

Figure 7 : Immunothérapie de désensibilisation à un allergène

3) Les immunothérapies immunostimulatrices


Les immunothérapies immunostimulatrices sont utilisées pour activer le système
immunitaire en cas de réponse inefficace (exp: infection chronique, cancer, …) (Figure
8).

Figure 8 : Utilité des thérapies immunostimulatrices

3.1) Principe de l’immunostimulation


L’immunostimelation repose sur l’activation ou le déblocage de la réponse
immunitaire via diverses stratégies adoptives (Sérothérapie ; Thérapie cellulaire) ou
actives (Vaccination; Immunisation thérapeutique ; Potentialisation de l’activation

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lymphocytaire ; Blocage de l’immunosuppression ; Stimulation de l’hématopoïèse, de
la lymphopoïèse).
3.2) Modalités de l’immunosuppression
3.2.1) La sérothérapie
Elle consiste en l’administration d’un sérum immun d’origine humaine ou animale,
en cas d’urgence, pour aider à contrer un agent infectieux (Figure 9).

Figure 9 : Principe de la sérothérapie


L’avantage de la sérothérapie est qu’elle confère une protection immédiate. Ses
limites sont qu’elle ne confère qu’une protection de courte durée (qq semaines, Figure
10), que son coût est élevé et que sa sécurité est contestée.

Figure 10 : Comparaison de la protection conférée par un sérum à celle résultant d’une


vaccination
3.2.2) La thérapie cellulaire adoptive
Il s’agit du transfert de cellules effectrices (LT, NK, CD, …). Le processus se déroule
en plusieurs étapes (Figure 11):
1. Prélèvement du patient lui-même ou d’un donneur
2. Modification des cellules ou activation in vitro
3. Réinjection au patient
Citons quelques exemples :
- Transfert de TIL « Tumor-infiltrating Lymphocytes »
- Transfert de LT spécifiques d’antigènes tumoraux
- CTL
- CTL exprimant un TCR transgénique
- CTL exprimant un CAR « Chimeric Antigen Receptor »
- Transfert de LT anti-EBV

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Figure 11 : Principe de l’immunothérapie cellulaire

Les cellules CAR-T expriment un récepteur appelé CAR « Chimeric Antigen


Receptor ». Les CAR sont constitués des parties variables d'un anticorps liées ensemble
par une séquence de liaison (linker), pour former la région variable à chaîne simple
(scFv), associées aux domaines de transduction du signal du TCR (Figure 12).
Les cellules CAR-T utilisent la spécificité d'un anticorps et les voies de signalisation
intracellulaire d'un complexe TCR.

Figure 12 : Structure du récepteur des cellules CAR-T

3.2.3) La vaccination / Immunisation thérapeutique


La vaccination et/ou immunisation thérapeutique a pour objectifs de déclencher
une réponse effectrice primaire spécifique d’antigène et de générer une mémoire
immunologique.
Elle peut se faire par l’injection d’antigènes ou par levée de la tolérance par
injection d’adjuvants seuls (exp: BCG, …).
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3.2.4) Potentialisation de l’activation lymphocytaire
Elle consiste en l’introduction de molécules immunostimulatrices des différents
signaux d’activation lymphocytaire:
- Signal 1: introduction d’allomolécules afin de déclencher une réponse
allogénique
- Signal 2: Introduction de molécules de co-stimulation, par exemple: Transfection
des cellules tumorales par les gènes des molécules de co-stimulation B7 afin que
ces cellules tumorales se comportent comme cellules présentatrices d’antigènes
- Signal 3: Introduction de cytokines (exp: IL-2, IFN, …) afin de :
- favoriser l’activation lymphocytaire initiale
- amplifier de la phase effectrice de la RIMC et de la RIMH
- permettre le switch des Ig
- maintenir la mémoire immunologique
3.2.5) Blocage de l’immunosuppression
L’état d’immunosuppression peut être inhibé par différentes modalités, par
exemple :
- Blocage des molécules inhibitrices CTLA-4 et PD-1 (Figure 13)
- Elimination des LTreg
- Blocage de l’activité immunosuppressive des LTreg (Figure 14)

Figure 13 : Immunostimulation par blocage des inhibiteurs CTLA-4 et PD-1

Figure 14 : Blocage de l’activité immunosuppressive des LT reg par un anticorps dirigé contre la
protéine GARP nécessaire à la production de TGFβ
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Pr Hela JAÏDANE Cours d’Immunologie générale 2 ème année

4) Conclusion
Avec toutes ses applications, la grande diversité des outils disponibles et des cibles
potentielles, l’immunothérapie occupe une place privilégiée au sein des thérapies du
futur.

5) Messages pédagogiques à retenir


 L’immunothérapie correspond au développement d’outils biologiques visant une
cible immunologique et d’outils immunologiques à visée thérapeutique.
 L’immunothérapie peut être adoptive ou bien active.
 L’immunothérapie peut être immunosuppressive ou bien immunostimulatrice.
 Les immunothérapies immunosuppressives sont utilisées pour inhiber une réponse
immune excessive et donc délétère (exp: allergie, rejet de greffe, auto-immunité).
Elles sont essentiellement basées sur l’utilisation d’anticorps, de cytokines
immunosuppressives ou de LTreg.
 Les immunothérapies immunostimulatrices sont utilisées pour activer le système
immunitaire en cas de réponse inefficace (exp: infection chronique, cancer, …). Elles
reposent sur l’activation ou le déblocage de la réponse immunitaire via diverses
stratégies adoptives (Sérothérapie ; Thérapie cellulaire) ou actives (Vaccination;
Immunisation thérapeutique ; Potentialisation de l’activation lymphocytaire ;
Blocage de l’immunosuppression ; Stimulation de l’hématopoïèse, de la
lymphopoïèse).

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