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Revue internationale de

botanique appliquée et
d'agriculture tropicale

Les Eucalyptus dans le Gharb (Maroc occidental)


H. Ménager

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Ménager H. Les Eucalyptus dans le Gharb (Maroc occidental). In: Revue internationale de botanique appliquée et d'agriculture
tropicale, 32ᵉ année, bulletin n°357-358, Juillet-août 1952. pp. 309-355;

doi : https://doi.org/10.3406/jatba.1952.6513

https://www.persee.fr/doc/jatba_0370-5412_1952_num_32_357_6513

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Revue Internationale de Botanique Appliquée
& D'AGRICULTURE TROPICALE
Revue mensuelle
Organe de documentation scientifique pour l'Agriculture et les recherches forestières
pour les pays tropicaux et subtropicaux

32e Année JUILLET-AOUT 1952 n° 357-358

ÉTUDES & DOSSIERS

Les Eucalyptus dans le Gharb (Maroc occidental). (*>'


Par H. MÉNAGER
Président de l'Association Forestière du Gharb.
DE'
A LA MEMOIRE
EDMOND GILLET, MAURICE REY ET
GEORGES CARLE QUI,
AYANT ENCOURAGE LES PLANTATIONS,
N'ONT PU ASSISTER A LEUR PLEIN DEVELOPPEMENT

INTRODUCTION

J'avais surtout, jusqu'à présent, prêché par l'action et


l'exemple. C'est M. le ProF Auguste Chevalier qui, après avoir visité
les plantations et collections du Maroc au cours de l'hiver
dernier, en compagnie de notre ami commun M. E. Miège, m'a fait
l'honneur de me demander d'écrire pour la « Revue
Internationale de Botanique Appliquée », qu'il a fondée et qu'il dirige
avec tant d'autorité, une étude sur les principaux Eucalyptus
auxquels je me suis intéressé. Je l'en remercie, car cela m'a permis
de « faire le point » et de réfléchir aux tâches de l'avenir.
En ce qui concerne le passé, je me souviens avec une
reconnaissance émue que ce furent deux professeurs de l'Ecole Coloniale
d'Agriculture de Tunis qui m'inculquèrent de 1912 à 1914 : l'un,
le regretté M. Guillochon, professeur d'Horticulture et directeur
du Jardin d'Essiais, l'amour de l'Arbre; l'autre, M. Bœuf, alors
professeur de Botanique Appliquée et directeur du Service Botanique
de Tunisie, le goût de l'observation et de l'acclimatation et la
sélection des plantes cultivées.
(1) Cette étude a été imprimée sur papier d'Eucalyptus rostrata
du Maroc fabriqué aux Papeteries de Condat : Usine Progill à Condat-
sur-Dordogne.
Rev. de Bot. Appl. 22
— 310 —

Je n'ai pas oublié également que M. E. Miège, ex-directeur du


Centre de Recherches Agronomiques au Maroc, a toujours suivi
avec intérêt mes essais et plantations, bien modestes au regard de
l'importance de son œuvre expérimentale.
La recherche a un côté mystique et poétique. Dans un pays
nouveau, il ne faut cependant jamais perdre de vue que, pour être
féconde, elle doit aboutir à des résultats pratiques. Tout ce qui
n'est pas probant doit être provisoirement laissé de côté, sinon
la responsabilité du chercheur serait très grande et ses efforts
seraient vains. Qui s'intéresserait d'ailleurs à une poussière
d'espèces! Une production attire l'attention et force les débouchés
autant par sa masse que par ses qualités. Un choix restreint, une
standardisation très poussée, rendent possible 1'iapplication de
techniques bien appropriées aux espèces choisies.
Nous ne présenterons donc dans cette étude que 21 Eucalyptus
parmi les 125 espèces qui existent à ce jour dans nos quatre
champs d'essais. Parmi ces 21 espèces, nous indiquerons celles qui
méritent plus particulièrement de retenir l'attention. D'autres
espèces, récemment introduites, peuvent être intéressantes. Rien
n'indique, jusqu'à présent, qu'elles soient appelées à remplacer les
premières. Leur étude sera entreprise dès que les résultats acquis
le permettront.

I. PEUT-ON AIMER L'EUCALYPTUS?

L'aspect glauque de la plupart des espèces, lorsqu'il n'est pas


accompagné de couleurs formant contraste, est monotone et triste
s'il s'étend à toute une forêt. Aussi, à la fin de notre Mission de
plusieurs mois dans les forêts australiennes, M. Métro,
Conservateur des Eaux et Forêts du Maroc, me fit cadeau à Sydney d'un livre
avec la dédicace ci-après :
« En souvenir de notre premier voyage d'études dans ces
maudits Eucalyptus ».
De son côté, un Forestier de Tasmanie nous disait, en nous
montrant de vastes espaces où on ne voyait que des arbres verts
d'Europe et d'Amérique : « Voyez comme la race Anglaise est tenace :
en cent ans elle a réussi à donner à cette région un aspect
européen et à éliminer l'Eucalyptus. » II est vrai qu'il s'agissait de
terres de culture riches où se trouvaient de nombreux vergers de
Pommiers.
Dans une conférence à l'Institut des Hautes Etudes Marocaines
à Rabat, en mars dernier, M. le iProfr Auguste Chevalier
déplorait que l'on ait défloré avec VEucalyptus certains paysages du S
où le Palmier serait mieux à sa place.
Cependant, ce genre renferme également de jolies espèces à
feuilles vertes, brillantes, pendantes, plissées, ondulées, etc.
Certaines produisent à profusion de magnifiques fleurs à couleurs
variées, allant de crème à rose du rouge plus ou moins vif ou foncé.
Mieux que d'autres espèces communes d'Eucalyptus plantées
jusqu'à ce jour, elles trouveraient place dans les jardins ou sur le
bord des routes du centre et du Nord du Maroc, dont elles pour-
— 311 —

raient, avec des espèces appartenant à d'autres genres, varier et


compléter l'agrément.
On apprécie surtout l'Eucalyptus pour le rôle utile qu'il peut
remplir dans une région pauvre et malsaine, en y améliorant
définitivement les conditions de la vie d'une manière plus rapide
qu'aucun autre arbre, à notre connaissance, ne saurait le faire.
D'autre part, les grandes sources de bois du monde se raréfient
parce que leur exploitation va beaucoup plus vite que leur
renouvellement. C'est le cas du Quebracho en Argentine pour
l'exploitation du tanin qui ne peut donner lieu à de nouvelles coupes avant
100 ans. Aux Etats-Unis, le plus grand arbre du globe, le Sequoia,
n'atteint que quelques mètres de hauteur en 10 ans. Les Forêts
de Suède, Norvège et Finlande ne peuvent être exploitées avant
50 ans ou davantage. Les Eucalyptus rostrata et E. gomphocephala
au Maroc sont coupés à 10 ans et donnent à ce moment de 50 à 150 t
de bois à l'hectare. Ils repoussent aussitôt très vigoureusement,
peuvent produire quelques tonnes de bois d'élagage à 5 ans et être
coupés de nouveau à blanc étoc 10 ans après la première coupe.
On les exploite donc en fait, partiellement ou entièrement, tous
les 5 ans.

II. DESCRIPTION DE 21 ESPECES D'EUCALYPTUS


Les espèces qui sont étudiées ci-après (1) sont cultivées surtout
pour la valeur de leurs productions et pour la rapidité de leur
développement dans des terrains peu favorables aux autres cultures.
Le « port » est celui d'un arbre isolé, poussant librement. La
« hauteur » est celle d'un arbre adulte, poussant dans des
conditions moyennes ou bonnes. Le « diamètre est celui d'un arbre
adulte, moyennement ou bien développé, à 1 m 30 du sol, hauteur
à laquelle les bûcherons australiens coupent souvent les arbres de
grand diamètre. La « densité » et la « couleur » sont également
celles d'un arbre adulte. Le bois de taillis abattu à dix ans est
beaucoup moins dense et contient une grosse proportion d'aubier de
couleur claire. Le « cœur » du bois est alors réduit à sa plus simple
expression et commence à peine à se colorer.
Les observations ont été entièrement faites ou vérifiées sur des
arbres cultivés dans nos plantations et collections.
Nous avons constaté, au Brésil, dans les herbiers de Navarro
de Andrade, dont l'un lui a été offert par le célèbre eucalyptologue
australien Maiden, dans les herbiers de Blakely à l'Ecole Fédérale
Forestière Australienne de Canberra et dans les herbiers du
Laboratoire d'Agronomie Tropicale à Paris, que les feuilles, les
inflorescences, les fleurs et les capsules, en se desséchant, perdent la
couleur naturelle, le lustre ou l'odeur qui les caractérisent et
permettent parfois de distinguer une espèce de l'autre.
Comment vérifier également, dans un herbier, où les divers
éléments sont fixés d'une manière rigide et définitive, l'inclinaison
des rameaux et des feuilles qui différencient certaines espèces des
autres?
(1) Sauf indications spéciales mentionnées dans le corps de la légende,
toutes les figures sont réduites de moitié.
— 312 —

II est donc nécessaire d'examiner d'abord les rameaux, les


feuilles, les inflorescences, les fleurs et les capsules dans la nature,
sur l'arbre même, où ces organes ont d'ailleurs des formes
beaucoup plus variées que celles très limitées que l'on peut enfermer
dans un herbier.

1. E. AMPLIFOLIA Naudin (1891).


Nom australien. — Cabbage Gum (en tête de chou). La tête d'un
arbre adulte isolé a la forme d'un immense chou.
Hauteur. — De 15 à 30 m.
Port. — Très étalé. Tronc droit.
Diamètre. — De 0 m 40 à 0 m 80.
Eeorce. — Lisse, blanc grisâtre, se détachant par plaques.
Couleur du bois. — Rouge.
Densité au m3. — Vraisemblablement analogue à celle du bois de
l'Eucalyptus tereticornis, auquel il ressemble beaucoup.
Feuilles de jeunesse. — Opposées, ovales ou ovalo-lancéolées, de
8 à 15 cm de longueur et de 6 à 12 cm de largeur, avec pétiole rond
de 2 à 3 cm de longueur. Nervure centrale rose à la base ainsi que
les bords du limbe. Nervures latérales claires, très apparentes, bords
du limbe légèrement dentés ou roses.
Feuilles définitives. — Alternées, lancéolées ou falciformes,
épaisses, lisses, vert foncé à la face supérieure, vert clair à la face
inférieure, lobes à peu près égaux. Longueur de 12 à 20 cm, largeur
de 2 cm 5 à 4 cm. Pétiole arrondi de 2 à 3 cm 5 de couleur claire
ou rose. Nervure médiane apparente de couleur claire rosée.
Nervures latérales relativement espacées, reliées sur les bords du limbe
par une nervure irrégulière.
Inflorescences. — Ombelles axillaires sur pédoncule rond de 1 à
2 cm 5 avec 7 à 14 fleurs sur pédoncule de 3 à 5 mm et pédicelle
de 1 mm 5 à 2 mm.
Epoque de la floraison. — Mai-juillet.
Couleur de la fleur. — Blanche.
Forme de l'opercule. — Conique, acuminé, parfois légèrement
recourbé, 7 à 10 mm de longueur, 2 à 3 fois plus long que le calice.
Forme de la capsule. — Ovoïde, courte, 3 à 5 mm de hauteur, 5 à
7 mm de largeur. Elle est surmontée d'un anneau incliné de 2 à
3 mm de largeur, enserrant 4 valves externes.
Graines. — Grosseur moyenne.
Observations particulières. — L'E. amplifolia a beaucoup de
ressemblance avec YE. tereticornis (couleur du bois, parfois feuilles de
jeunesse ou capsules).

2. E. ASTRINGENS Maiden (1924).


Nom australien. — Brown mallee. Mallee à bois brun foncé. Bien
que YEucalyptus astringens puisse atteindre de grandes dimensions
dans les bons terrains, il est petit dans les terrains secs et rangé
à ce titre dans la catégorie des Eucalyptus mallee (nain) qui
peuplent certaines zones semi-désertiques de l'Australie de l'Ouest.
Ménager H. : Eucalyptus amplifolia. Pl. XII.

E. amplifolia Naudin. — 1. Forme de jeunesse. — 2. Fleurs avant


épanouissement. — 3. Rameau fructifère. — 4. Fruit (X 2,5).
— 314 —

. Hauteur. — 9 à 20 m en Australie de l'W. Au Maroc, en bons


terrains, il peut atteindre jusqu'à 25 m.
Port. — Erigé. Tronc droit.
Diamètre. — Jusqu'à 75 cm. Le tronc est souvent aplati d'un
côté.
Ecorce. — Lisse, brun grisâtre.
Couleur du bois. — Brun clair.
Densité au m\ — 950 kg en moyenne.
Feuilles de jeunesse. — Opposées, pétiolées, ovalo-lancéolées, de
8 à 11 mm, glauques.
Feuilles définitives. — Alternées, lancéolées ou légèrement falci-
formes, épaisses, coriaces, couleur vert pâle, lobes légèrement
inégaux. Nervure centrale de couleur claire, proéminente. Nervures
latérales assez rapprochées. Longueur de la feuille 6 à 16 cm,
largeur 1 cm 5 à 3 cm 5. Pétiole rond ou légèrement aplati, de
couleur rose plus ou moins clair de 1 cm 1/4 à 2 cm de longueur.
Inflorescences. — Ombelles axillaires sur pédoncules aplatis de
10 à 17 cm de longueur. 3 à 6 boutons. Calices cylindriques avec
pédicelle aplati de 2 à 3 mm.
Epoque de la floraison. — Mars à mai, septembre à novembre.
Couleur de la fleur. — Blanc verdâtre.
Forme de l'opercule. — Cylindroïque, arrondi à l'extrémité, de
6 à 9 cm de hauteur.
Forme de la capsule. — Hémisphérique ou ovoïde ou légèrement
campanulée, de 6 à 9 mm de hauteur, 7 à 9 mm de largeur. Valves
externes. (
Graines. — Grosseur moyenne.
Observations particulières. — E. astringens ne paraît pas revêtir
de formes très différentes entre elles.

3. E. BICOSTATA Maiden, Blakeley et Simmond.


Nom australien. — Eurabbie et Blue Gum. Nous ne connaissons
pas l'origine d'« Eurabbie». Quant à Gum c'est le nom générique
anglais des Eucalyptus, blue vient de la couleur des feuilles de
jeunesse qui est de la glauque bleuâtre, c'est aussi le nom de YE. glo-
bulus.
Hauteur. — Jusqu'à 30 m.
Port. — Etalé, divariqué. Tronc assez droit.
Diamètre. — Peut atteindre ou dépasser 1 m.
Ecorce. — Lisse, sauf à la base où elle tend à persister davantage
que dans les globulus. Dans le reste du tronc et dans les grosses
branches elle se lève en longues lanières rousses et pendantes.
L'écorce jeune est gris glauque.
Couleur du bois. — Blanc jaunâtre à blanc bleuâtre.
Densité au m3. — 890 kg en moyenne.
Feuilles de jeunesse. — Opposées, ovalo-lancéolées, plus larges
à la base que celle de YE. globulus, de même couleur glauque et
aspect général que ces dernières.
Feuilles définitives. — Alternées, falciformes, épaisses, lisses,
vert foncé, à lobes égaux ou inégaux à la base, de 11 à 35 cm de
Ménager H. : Eucalyptus camaldulensis. Pl. XIII.

E. camaldulensis Dehn. — 1. Forme de jeunesse. — 2, 2\ Rameaux


florifères présentant des fleurs non épanouies. — 3. Rameau fructifère.
_ 316 —

longueur, 1 cm 5 à 4 cm de largeur, sur pétiole aplati de 2 cm 5 à


4 cm 5 de longueur, coloré de rose rougeâtre. Nervure centrale
proéminente, très apparente, claire ou rose rougeâtre à la base,
nervures latérales relativement espacées avec nervure parallèle au
bord du limbe bien marquée.
Inflorescences. — Boutons sessiles, de 1 à 3 turbines, anguleux,
verruqueux comme ceux de YE. globulus.
Epoque de la floraison. — Janvier à avril.
Couleur de la fleur. — Blanche.
Forme de l'opercule. — Aplati, large, apiculé au centre, également
verruqueux, comme ceux de YE. globulus.
Forme de la capsule. — Très grosse, anguleuse et verruqueuse,
semblable à celle de YE. globulus.
Graines. — Très grosses, ressemblant à des graines de Poireau.
Observations particulières. — Cet Eucalyptus est considéré
comme une variété de montagne de YE. globulus. En France, nous
avons essayé le bicostata dans les Landes où il s'est montré plus
résistant au froid que le globulus. Au Maroc, il résiste au froid et à
la neige à 1 200 m d'alt. (Azrou) . Il s'adapte également à la plaine
littorale du Gharb où il semble réussir mieux que YE. globulus.
C'est donc une variété plastique.

4. E. BOTRYOIDES Smith (1797).

Nom australien. — Bangalay ou Bastard Mahogany. Bangalay doit


être un nom indigène. Bastard Mahogany est employé dans le sens
de faux Acajou par suite de la couleur acajou du bois (acajou =
mahogany) .
Hauteur. — De 25 à 45 m selon les terrains.
Port. — Pyramidal. Tronc droit. Branches pendantes. Bel arbre.
Diamètre. — De 0 m 70 à 1 m.
Ecorce. — Persistante, rugueuse, irrégulièrement sillonnée, brune.
Couleur du bois. — Acajou (rouge clair).
Densité au m3. — 790 à 940 kg.
Feuilles de jeunesse. — Opposées, ovalo-lancéolées, à pétiole
court, ondulantes, de 5 à 8 cm de longueur et 3 à 4 cm de largeur,
couleur vert foncé.
Feuilles définitives. — Alternées, ovalo-lancéolées ou lancéolées,
épaisses, lisses et luisantes, vert foncé à la face supérieure, vert
clair à la face inférieure, de 10 à 15 cm de longueur, 2 à 5 cm de
largeur. Pétiole aplati de 2 cm 5 à 5 cm de longueur, de couleur
claire ou rosée. Nervure médiane apparente, vert clair, nervures
latérales assez rapprochées, peu apparentes.
Inflorescences. — Ombelles axillaires avec pédoncule aplati de
7 à 10 cm de long et 4 à 10 boutons sessiles, légèrement anguleux
ou côtelés. ! J
Epoque de la floraison. — Septembre-janvier.
Couleur de la fleur. — Blanche.
Forme de l'opercule. — Hémisphérique, obtus, beaucoup moins
haut que le calice.
— 317 —

Forme de la capsule. — Forme cylindrique cintrée (baril) de 7


à 9 mm de hauteur et de largeur avec valves encloses ou légèrement
externes.
Graines. — Fines.
Observations particulières. — A cause de son beau port YE. bo-
tryoides a été confondu longtemps avec YE. saligna dont il diffère
pourtant par ses inflorescences, son bois et sa résistance plus
grande à l'humidité.

5. E. CAMALDULENSIS Dehn (rostrala Schlecht).


Nom australien. — Murray Red Gum ou River Red Gum.
Eucalyptus à bois rouge de la vallée du fleuve Murray ou bien de la
rivière.
Hauteur. — De 30 à 50 m.
Port. — Etalé, divariqué. Tronc plus ou moins droit chez les
arbres isolés, droit en plantations serrées.
Diamètre. — De 1 m à 1 m 50.
Ecorce. — Jeune : blanchâtre; vieille : gris brunâtre, se
détachant par plaques, ce qui donne un aspect particulier à l'arbre.
Couleur du bois. — De rouge sombre à rouge clair (selon veines
différenciées).
Densité au m3. — De 720 à 970. Moyenne du bois adulte 890 kg.
Feuilles de jeunesse. — Légèrement ou franchement alternées,
pétiolées, légèrement glauques sur les deux faces, lancéolées,
relativement étroites, de 6 à 9 cm de longueur sur 2 cm 5 à 4 cm de
largeur.
Feuilles définitives. — Alternées, lancéolées ou falciformes, vert
glauque de 12 à 22 cm de longueur et de 1 à 2 cm 5 de largeur, avec
pétiole anguleux de 1 cm 5 à 2 cm de longueur. Nervure médiane
proéminente sur les deux faces, de couleur claire ou rose à la base,
nervures latérales très rapprochées.
Inflorescences. — En ombelles axillaires sur pédoncule mince rie
1 à 1 cm 5 de longueur, 8 à 10 boutons ovoïdes avec pédicelle de
4 à 6 mm.
Epoques de floraison. — Avril à juillet. Septembre à novembre.
Couleur de la fleur. — Blanche.
Forme de l'opercule. — Conique et rostre, un peu plus long que
le calice.
Forme de la capsule. — Hémisphérique ou en forme de tasse, de
5 à 8 mm de hauteur et 5 à 6 mm de largeur avec valves externes.
Graines. — Très fines.
Observations particulières. — UE. rostrata a de nombreuses
formes en Australie : acuminata, Blakely 1934; brevirostris, Blakeiy
1934; obtusa, Blakely 1934; pendula, Blakely et Jacob 1934; subei-
nerea, Blakely 1934.
Au Maroc nous avons également remarqué de très nombreuses
formes différant de la forme type par l'aspect de l'arbre et des
feuilles, etc., la coloration des rameaux et des fruits, la dimension
de ceux-ci. Nous essayons de fixer par sélection les plus
vigoureuses.
— 318 —

6. E. CITRIODORA Hook. (1848).


Nom australien. — Lemon Scented. A parfum de citronnelle, en
raison de l'odeur de ses feuilles qui contiennent une huile
essentielle riche en citroneJlal.
Hauteur. — De 35 à 48 m.
Port. — Divariqué, élégant, très ornemental. Tronc droit, dégagé
de branches jusqu'à une bonne hauteur.
Diamètre. — De 0 m 70 à 1 m 20.
Ecorce. — Lisse, blanchâtre ce qui donne à l'arbre un aspect
particulier.
Couleur du bois. — Jaunâtre moucheté or, très joli.
Densité au m3. — De 770 à 1 140, moyenne 1 000 kg.
Feuilles de jeunesse. — Opposées, ovoïdes ou lancéolées, vert
clair, rugueuses par suite de la présence de poils glandulaires
nombreux qui donnent un aspect particulier à cette variété. Les glandes
contiennent une huile essentielle très parfumée (citronnellal) . Les
feuilles ont une longueur de 6 à 12 cm et une largeur de 3 à 6 cm.
Pétiole rond inséré dans la feuille, 8 à 15 mm.
Feuilles définitives. — Alternées, longuement lancéolées ou falci-
formes, glabres et lisses, vert clair sur les deux faces de 15 à 23 cm
de longueur et de 2 cm 5 à 5 cm de largeur. Lobes égaux. Elles sont
pendantes de sorte que la rosée qui s'y dépose coule et tombe sous
forme de petite pluie sur le sol, qui arrive ainsi à s'imprégner
d'humidité. Nervure médiane proéminente de couleur claire.
Nervures latérales assez rapprochées, peu apparentes. La nervure qui
les relie sur le bord du limbe se confond à l'œil nu avec celui-ci.
Pétiole cannelé de 1 cm 5 à 2 cm. L'odeur est la même que celle
des feuilles de jeunesse.
Inflorescences. — En grappes composées avec pédoncules courts,
ombelles de 3 à 5 fleurs, pédoncule arrondi de 5 à 7 mm de
longueur. Boutons ovoïdes avec pédicelle.
Epoque de floraison. — Mai-juillet et septembre-novembre.
Couleur de la fleur. — Blanche.
Forme de l'opercule. — Hémisphérique, court.
Forme de la capsule. — Ovale ou globulaire, avec bords
comprimés, 6 à 8 mm de hauteur, 5 à 7 mm d'ouverture du disque.
Valves incluses.
Graines. — Grosses.
Observations particulières. — UE. citriodora a le même aspect
extérieur et le même bois que VE. maculata. Dans la forêt
australienne on ne les distingue pas l'un de l'autre, avant l'abatage. Seule,
l'odeur différente des feuilles permet de les reconnaître, le
citriodora contenant du citronellal et le maculata du pinène et du cinéol.

7. E. CLADOCALYX (corynocalyx) F. V. Mueller (1852).


Nom australien. — Sugar Gum. Eucalyptus sucré, sans doute en
raison de la saveur douce de ses feuilles qui contiennent peu d'huile
essentielle. Il ne produit aucune exsudation sucrée (mélitose), mais
ses fleurs sont riches en nectar.
Ménager H. : Eucalyptus cladocalyx. Pl. XIV.

E. cladocalyx F. v. Mueller. — 1. Forme de jeunesse. — 2. Rameau


adulte sessile. — 2\ Le même, florifère. — 3. Fruits.
— 320 —

Hauteur. — 25 à 40 m selon les terrains.


Port. — Symétriquement étalé, donnant beaucoup d'ombrage.
Tronc droit, élancé.
Diamètre. — De 50 cm à 1 m 50 mais à développement
relativement lent.
Ecorce. — Lisse, blanc grisâtre. Elle se renouvelle chaque année,
mais elle persiste parfois plus longtemps à la base du tronc.
Couleur du bois. — Claire sans être blanche.
Densité au m3. — 1 000 à 1 100 kg.
Feuilles de jeunesse. — Opposées ou légèrement alternées, pé-
tiolées, orbiculaires ou elliptiques, vert clair, de 5 à 6 cm 5 de
longueur et de largeur.
Feuilles définitives. — Alternées, vert sombre et lustrées à
l'extérieur, vert clair et lustrées à la face inférieure, lancéolées ou
légèrement falcif ormes, de 8 à 14 cm de longueur et de 2 à 3 cm de
largeur, lobes égaux ou inégaux. Pétiole mince, rond, de 2 à 2 cm 5
de longueur. Nervure médiane mince, apparente, de couleur 'claire
légèrement verdâtre. Nervures latérales peu apparentes, reliées
entre elles sur les bords du limbe par une nervure également peu
apparente.
Inflorescences. — Ombelle axillaire à 5 ou 6 boutons fusiformes.
Pédoncules cylindriques de 10 à 15 mm de hauteur. Pédicelles de
2 à 3 mm.
Epoque de la floraison. — Avril-juillet.
Couleur de la fleur. — Blanche.
Forme de l'opercule. — Court, cupulaire, légèrement acuminé,
dépassant les bords du calice.
Forme de la capsule. — Urcéolée, côtelée, comprimée au sommet,
de 10 à 12 mm de hauteur et 7 à 9 mm de largeur. Disque étroit,
oblique avec valves assez profondément encloses.
Graines. — Grosseur moyenne.
Observations particulières. — Ch. Naudin avait conseillé
d'utiliser les feuilles comme fourrage en raison de leur saveur douce,
mais Anderson a signalé qu'elles contiennent de l'acide cyanhy-
drique et qu'elles ont causé des empoisonnements dans les
troupeaux.

8. E. D1VERSICOLOR (ou colossea) F. V. Mueller (1863).


Nom australien. — Karri. Nom d'origine indigène.
Hauteur. — De 45 à 80 m.
Port. — Majestueux, à branches horizontales ou retombantes.
Tronc haut et droit.
Diamètre. — De 0 m 50 à 1 m de 25 à 50 ans, selon la richesse
du sol, de 25 à 50 ans. Ensuite il peut atteindre de 1 à 2 m 50.
Ecorce. — Blanc jaunâtre, lisse, portant des taches plus ou moins
foncées.
Couleur du bois. — Rouge cerise.
Densité au m3. — 700 à 900 kg.
Feuilles de jeunesse. — Opposées, ovées ou lancéolées, de couleur
vert pâle, 5 à 8 cm de longueur, 3 à 5 cm de largeur, à pétiole court.
— 321 —

Feuilles définitives. — Alternées, lancéolées, rarement falci-


formes, de couleur vert foncé à la face extérieure, vert clair à la
face inférieure. Lobes égaux ou inégaux. Longueur 10 à 14 cm,
largeur 2 à 4 cm. Pétiole légèrement anguleux, de 2 à 2 cm 5, de
couleur claire ou légèrement rose. Nervure médiane apparente,
proéminente, claire verdâtre. Nervures latérales très rapprochées, peu
apparentes, reliées par une nervure peu apparente qui se confond à
l'œil nu avec les bords du limbe.
Inflorescences? — Ombelles axillaires avec pédoncule cylindrique
ou aplati de 15 à 30 mm de hauteur, 3 à 8 boutons à pédicelles
courts.
Epoque de la floraison. — Mai-juillet.
Couleur de la fleur. — Blanche.
Forme de l'opercule. — Hémisphérique ou obtus ou très
légèrement rostre, plus court que le calice, débordant légèrement celui-ci.
Forme de la capsule. — Ovoïde, tronquée, 7 mm de hauteur,
bords comprimés, disque de 3 cm 5 à 5 cm de diamètre, valves
encloses.
Graines. — Grosseur moyenne.
Observations particulières. — Nous pensons que c'est par erreur
que certains Auteurs ont signalé qu'on avait trouvé des arbres de
90 à 130 m de cette espèce, notamment en Tasmanie où il n'existe
pas à l'état spontané. On a dû le confondre avec YE. regnans.
UE. diversicolor n'existe que dans une bande côtière de l'Australie
de l'W (Western Australia).

9. E. GLOBULUS La Billardière (1799).


Nom australien. — Blue-Gum. « Gum », nom générique anglais
des Eucalyptus. Blue, en raison de la couleur glauque bleuâtre des
feuilles.
Hauteur. — Jusqu'à 45 m.
Port. — Divariqué. Tronc assez droit poussant parfois en spirale.
Diamètre. — De 0 m 80 à 1 m 50.
Ecorce. — Lisse, blanc bleuâtre. La vieille écorce se détache en
grandes lanières qui pendent le long du tronc et des branches
principales, ce qui donne un aspect particulier à l'espèce.
Couleur du bois. — Pâle ou légèrement foncé.
Densité au m3. — De 750 à 950, moyenne 890 kg.
Feuilles de jeunesse. — Opposées, très glauques, sessiles, ovales
ou légèrement lancéolées, 7 à 16 cm de longueur, 4 à 9 cm de
largeur. Très odorantes (cinéol et pinène).
Feuilles définitives. — Alternées, vert foncé, luisantes, lancéolées
ou falciformes, 10 à 25 cm de longueur, 2 cm 5 à 5 cm de largeur.
Pétiole couleur jaune clair, cannelé, de 2 à 5 cm de longueur.
Nervure médiane bien apparente de couleur claire ou rose à la base.
Nervures latérales irrégulières, assez espacées, apparentes, reliées
entre elles sur les bords du limbe par une nervure apparente,
irrégulière.
Inflorescences. — Axillaires subsessiles avec 1 à 3 boutons, gros
et verruqueux.
— 322 —

Epoque de la floraison. — Janvier-avril et septembre-octobre.


Couleur de la fleur. — Blanche.
Forme de l'operculé. — Déprimé, proéminent au centre, verru-
queux, en forme de chapeau.
Forme de la capsule. — Globuleuse, côtelée, 1 cm 8 à 2 cm 5 de
hauteur et de diamètre, avec disque formant rainure à la base avec
le calice, portant 4 fortes valves ou, exceptionnellement jusqu'à 6,
s'ouvrant horizontalement ou sans se relever d'une façon notable.
Graines. — Très grosses, ressemblant à celle du Poireau.
Observations particulières. — Cet Eucalyptus, originaire de Tas-
manie, a beaucoup de ressemblance avec YE. bicostata que l'on
trouve dans les montagnes de Tasmanie et de New-South-Wales
(Nouvelles Galles du Sud).

10. E. GOMPHOCEPHALA D. Cand. (1828).

Nom australien. — Tuart. Nom d'origine indigène.


Hauteur. — De 25 à 40 m.
Port. — Touffu, donnant beaucoup d'ombre. Tronc droit.
Diamètre. — De 50 à 80 cm à 25 ans. Peut atteindre ensuite de
1 à 2 m.
Ecorce. — Grise, persistante, fibreuse.
Couleur du bois. — Blanc jaunâtre ou foncé.
Densité au m3. — 1 000 kg en moyenne.
Feuilles de jeunesse. — Opposées ou légèrement alternées,
largement lancéolées, pétiolées, vert clair, plus ou moins ondulées, de
5 à 8 cm de longueur et de 3 à 6 cm de largeur. Pétiole mince, de
1 à 1 cm 5 de longueur.
Feuilles définitives. — Alternées, lancéolées, acuminées, couleur
verte, plus claire à la face inférieure. Lobes égaux ou inégaux.
Longueur 10 à 19 cm, largeur 2 à 6 cm. Pétiole cylindrique ou
légèrement cannelé de couleur jaune clair, 2 à 3 cm de longueur.
Nervure médiane peu proéminente, jaune verdâtre. Nervures latérales
assez rapprochées, peu visibles. Nervure qui les relie près des
bords du limbe irrégulière, peu apparente.
Inflorescences. — Ombelles axillaires avec pédoncule large,
aplati, de 2 à 2 cm 5, 3 à 7 boutons sessiles.
Epoque de la floraison. — Mars-avril et septembre-octobre.
Couleur de la fleur. — Blanche.
Forme de l'opercule. — Globulaire, arrondi, débordant le calice.
Forme de la capsule. — Campanulée, grosse, rugueuse, de 1 cm 5
à 2 cm avec disque de 1 cm 3 à 2 cm, enserrant 4 valves à peine
externes.
Graines. — Grosses.
Observations particulières. — L'E. gomphocephala semble un
des plus fixés du genre, bien que l'on remarque de légères
différences dans la forme des fruits, l'époque de floraison et la
coloration des rameaux. Il a donné naissance à un hybride avec YE. cor-
nuta (gompho-cornuta) que l'on trouve dans les mêmes peuplements
en Australie occidentale (Western Australia).
Ménager H. : Eucalyptus gomphocephala.

E. gomphocephala DC. — 1. Forme de jeunesse. — 2. Rameau à feuilles


adultes et fleurs en boutons. — 3. Rameau fructifère et florifère. —
4. Fruits.
— 324

11. E. KIRTONIANA F. V. Mueller (1879).

Nom australien. — Bastard Mahogany. Faux Acajou, en raison


de la couleur acajou de son bois (comme YE. botryoides).
Hauteur. — Jusqu'à 30 m.
Port. — Plus érigé que YE. robusta. Tronc droit.
Diamètre. — De 0 m 70 à 1 m.
Ecorce. — Fibreuse ou s'écaillant partiellement, brune.
Couleur du bois. — Rouge.
Densité au m8. — 940 kg en moyenne.
Feuilles de jeunesse. — Opposées, ovées ou largement lancéolées,
pétiolées, 8 à 12 cm de longueur, 5 à 7 cm de largeur.
Feuilles définitives. — Alternées, lancéolées, falquées, acuminées,
lisses, luisantes, vert foncé à la face supérieure, un peu plus claires
sur la face inférieure. 10 à 18 cm de longueur, 2 à 5 cm de largeur.
Pétiole clair lavé de rose, cylindrique de 3 à 4 cm de longueur.
Nervure médiane très apparente, de couleur claire ou rose à la base.
Nervures latérales apparentes, largement espacées, nervure qui les
relie sur les bords du limbe, apparente et irrégulière.
Inflorescences. — Ombelles axillaires. Pédoncule gros, aplati de
3 cm environ. Boutons avec pédicelle aplati de 5 à 6 mm, groupés
par 5 à 10.
Epoque dé la floraison. — Avril à juillet.
Couleur de la fleur. — Blanche.
Forme de l'opercule. — Conique, gros, peu rostre, longueur 9 à
12 mm.
Forme de la capsule. — Campanulée, hauteur et largeur 8 à
10 mm avec valves parfois encloses et parfois légèrement externes.
Graines. — Grosses.
Observations particulières. — UE. kirtoniana était confondu
autrefois avec YE. resinifera auquel il ressemble, sauf dans la forme
du calice, qui est conique au lieu d'être hémisphérique et la
capsule qui est plus campanulée dans kirtoniana que dans le resinifera.
11 n'y a guère, en somme plus de différence entre les deux variétés
qu'entre les sous-variétés de YE. rostrata et le type même du ros-
trata.

12. E. LEUCOXYLON F. V. Mueller (1855).


Nom australien. — White or Smooth. Barked Ironbark. White or
Smooth-barked, en raison de son écorce jaune qui est lisse et
blanche, mais quand elle est vieille, l'écorce devient foncée (couleur de
fer = iron).
Hauteur. — Jusqu'à 30 m.
Port. — Erigé. Tronc penché ou tordu dans le jeune âge, en
raison d'un enracinement défectueux, mais se redressant ensuite.
L'arbre adulte est très droit.
Diamètre. — De 60 cm à 1 m 50.
Ecorce. — Lisse, blanchâtre.
Couleur du bois. — Blanc jaunâtre de couleur uniforme.
— 325 —

Densité au m3. — 980 kg en moyenne.


Feuilles de jeunesse. — Opposées, sessiles, cordiformes ou ovalo-
lancéolées, longueur 6 à 10 cm, largeur 4 à 7 cm, couleur vert clair
ou légèrement glauque.
Feuilles définitives. — Alternées, lancéolées ou falciformes, vert
clair ou légèrement bleutées, lobes égaux ou inégaux, longueur 11 à
18 cm, largeur 1 cm 5 à 3 cm 5. Pétiole plus ou moins aplati ou
cylindrique, longueur 1 cm 8 à 2 cm, de couleur claire ou rose.
Nervure médiane apparente, de couleur claire ou rose à la base.
Nervures latérales espacées, très irrégulières, très apparentes,
reliées sur les bords du limbe par une nervure irrégulière.
Inflorescences. — Ombelles axillaires avec pédoncule
cylindrique de 1 cm 5 à 2 cm, 3 à 5 boutons avec pédicelle de 1 cm 5
à 3 cm 5.
Epoque de la floraison. — Janvier-mars.
Couleur de la fleur. — Crème, quelquefois rose. Elle est alors très
ornementale.
Forme de l'opercule. — Conique ou acuminé.
Forme de la capsule. — Globuleuse ou ovoïde, de 7 à 12 mm de
hauteur et de largeur. Valves très profondément encloses.
Graines. — Moyennes.
Observations particulières. — Cette espèce fut autrefois
confondue avec YE. sideroxylon, duquel elle diffère par la forme
différente de ses feuilles et surtout, par la couleur de son écorce qui est
blanche alors que celle du sideroxylon est noire par suite des
exsudations de kino (tanin) qui la recouvrent et s'oxydent au contact de
l'air. Les deux espèces se trouvent toutefois dans les mêmes terrains
en Australie et souvent dans les mêmes peuplements.
13. E. MACARTHURI Deane et Maiden (1899).
Nom australien. — Camden Woollybutt. On peut trouver aux
feuilles étroites, entremêlées, touffues et pendantes de cet
Eucalyptus un aspect laineux (Wooly), mais nous ignorons pourquoi on
l'a appelé Camden.
Hauteur. — Jusqu'à 25 m.
Port. — Pyramidal, branches horizontales à rameaux pendants,
très ornemental. Tronc assez droit.
Diamètre. — De 0 m 50 à 1 m.
Ecorce. — L'écorce du tronc est rude, persistante, quelquefois
comme soufflée. L'écorce des branches est lisse.
Couleur du bois. — Pâle.
Densité au m3. — Inconnue. Le bois d'E. macarlhuri étant
considéré en Australie comme de pauvre qualité, cet arbre n'est planté
ou exploité que pour la distillation de ses feuilles et de son écorce.
Feuilles de jeunesse. — Opposées, sessiles, quelquefois orbicu-
laires, le plus souvent ovalo-lancéolées, couleur vert clair à rose
rougeâtre, de 1 cm à 5 cm de longueur et de 1 à 4 cm de largeur.
Les feuilles restent longtemps opposées et sessiles dans les branches
inférieures de l'arbre (3 à 5 ans), mais elles deviennent de plus en
plus étroites et acuminées.
Rev. de Bot. Appl. 23
— 326 —

Feuilles définitives. — Alternées, étroites, effilées, lancéolées ou


falciformes, acurainées, lisses, vert foncé sur les deux faces, de 7
à 16 cm de longueur et 1 cm 5 à 2 cm 5 de largeur. Lobes égaux ou
inégaux. Pétiole mince, légèrement aplati ou cannelé de 1 cm 5 à
1 cm 8 de longueur, de couleur claire ou rose. Nervure médiane
apparente, de couleur claire, souvent rose à la base. Nervures
latérales peu apparentes, irrégulières. Nervure qui les relie sur les
bords du limbe peu apparente, irrégulière.
Inflorescence. — Ombelles axillaires, pédoncule de 6 à 11 *mm,
2 à 7 boutons sur pédicelle court.
Epoque de la floraison. — Janvier-mars.
Couleur de la fleur. — Blanche.
Forme de l'opercule. — Conique, modérément rostre, à peu près
aussi haut que le calice.
Forme de la capsule. — Forme hémisphérique ou de tasse. 4 à
6 mm de hauteur et de largeur, avec valves externes.
Graines. — Petites.
Observations particulières. — L'écorce de cette espèce est la seule
(connue à ce jour) qui contienne la même huile essentielle (eus-
démol et géraniol) que les feuilles et qui peut être distillée en
même temps que celles-ci.

14. E. MACULATA Hook. (1844).

Nom australien. — Spotted Gum '= Eucalyptus moucheté, en


raison du joli aspect « moucheté x de son bois.
Hauteur. — De 35 à 45 m.
Port. — Divariqué, élégant, ornemental. Tronc droit, dégagé de
branches jusqu'à une bonne hauteur.
Diamètre. — De 0 m 70 à 1 m 20.
Ecorce. — Lisse, blanchâtre, ce qui donne à l'arbre un aspect
particulier (comme YE. citriodora) .
Couleur du bois. — Jaunâtre ou gris clair ou plus foncé, selon le
climat ou le terrain (Anderson). Il ressemble au bois de YE. citrio-
dora.
Densité au m1, - 1 000 kg.
Feuilles de jeunesse. — Opposées, ovoïdes ou lancéolées, lisses,
vert foncé à la face supérieure, vert clair à la face inférieure,
longueur 4 à 10 cm, largeur 2 à 6 cm. Pétiole de 6 à 15 mm de couleur
claire ou rose. Nervure médiane fine, apparente, de couleur claire
ou rose, nervures latérales espacées, irrégulières, apparentes. La
nervure qui les relie se confond avec les bords du limbe.
Feuilles définitives. — Alternées, lancéolées ou falciformes,
effilées à l'extrémité supérieure, lisses, vert clair sur les deux faces,
de 12 à 20 cm de longueur et 1 cm 5 à 5 cm de largeur. Lobes égaux
généralement. Pétiole cannelé de couleur claire ou rose, de 1 à
2 cm 5 de longueur. Nervure médiane bien apparente, de couleur
claire ou rose, parfois sur toute sa longueur. Nervures latérales très
serrées, apparentes. La nervure qui les relie se confond avec les
bords du limbe.
— 327 —

Inflorescences. — En panicules ou grappes avec pédoncules


courts (5 à 6 mm), ramifications portant 2 à 5 boutons sur pédicelle
de 4 à 6 mm.
Epoque de la floraison. — Mai-juillet. Nous n'avons pas eu
l'occasion de l'observer plus tard, nos arbres étant encore jeunes (4 ans).
Couleur de la fleur. — Blanche.
Forme de l'opercule. — Hémisphérique, rostre, moins long que
le calice (3 à 4 mm).
Forme de la capsule. — Ovoïde, tronquée, avec bords comprimés,
de 9 à 18 mm de hauteur et de 4 à 6 mm de largeur avec valves
profondément incluses.
Graines. — Grosses.
Observations particulières. — Nous avons signalé que l'odeur des
feuilles permet de distinguer YE. citriodora de YE. maculata. Ils
diffèrent également dans leurs feuilles de jeunesse qui sont :
citriodora : rugueuses avec poils glandulaires et pétiole inséré dans
la feuille; maculata: lisses, avec pétiole rejoignant normalement
la base de la feuille.

15. E. MAIDENI F. V. Mueller (1890).

Nom australien. — Maiden's Gum. Maiden peut se traduire par


jeune ou nouveau, c'est aussi le nom d'un grand botaniste eucalyp-
tologue australien.
Hauteur. — Jusqu'à 45 m.
Port. — Pyramidal, à branches formant un angle de 30 à 35° avec
le tronc, mais s'infléchissant ensuite. Tronc droit et haut sans
branches.
Diamètre. — De 0 m 70 à 1 m 20.
Ecorce. — Blanche, lisse.
Couleur du bois. — Claire.
Densité au m3. — De 900 à 1 000 kg, 960 en moyenne.
Feuilles de jeunesse. •— Opposées, sessiles, un peu moins glauques
que celles de YE. globulus, généralement ovalo-lancéolées,
quelquefois ovées, de 3 cm 5 à 15 cm de longueur et de 2 à 10 cm de
largeur. Nervure médiane proéminente, de couleur claire ou lavée de
rose à la base. Nervures latérales très espacées, apparentes avec
nervure qui les relie sur les bords du limbe peu apparente et
irrégulière.
Feuilles définitives. — Alternées, pendantes, étroites, falciformes,
à lobes égaux ou inégaux, lisses, vertes, épaisses. Pétiole moyen,
cannelé, clair ou rose, de 1 cm 5 à 3 cm de longueur. Nervure
médiane apparente, vert clair ou rose à la base. Nervures latérales
assez rapprochées et régulières, avec nervure assez régulière les
reliant sur les bords du limbe.
Inflorescences. — Ombelles axillaires, pédoncule aplati de 1 cm 5
à 2 cm, 3 à 7 boutons glauques, sessiles ou courtement pédicellés.
Epoque de la floraison. — Mai è juillet.
Couleur de la fleur. — Blanche.
Forme de l'opercule. — Conique, modérément rostre de 4 à 5 mm
de hauteur (un peu plus court que le calice).
— 328 —

Forme de la capsule. — Turbinée ou en forme de tasse, 6 à 9 mm


de hauteur et de largeur, avec bord annelé et valves externes.
Graines. — Moyennes.
Observations particulières. — VE. maideni, qui ressemble aux
E. globulus et bicostata par la forme et la couleur de ses feuilles de
jeunesse, s'en distingue par la forme moins évasée, l'absence de
côtes et verrues et les dimensions beaucoup plus petites de ses
capsules.

16. E. OCCIDENTALIS Endl. Huegel (1837).

Nom australien. — Swamp or Flat-topped yate. Ces noms


expriment parfaitement à la fois la situation préférée de cet arbre en
terrain humide ou marécageux (swamp) et la forme de sa tête unie
et plate.
Hauteur. — Jusqu'à 24 m.
Port. — Très étalé, comme un parasol. Tronc généralement court.
Diamètre. — 50 cm à 1 m.
Ecoree. — Persistante, d'aspect blanc grisâtre, entrelacée, à fibres
peu solides. Branches lisses.
Couleur du bois. — Blanc foncé.
Densité au m3. — Bois lourd dont la densité ne semble pas avoir
été reconnue en Australie en raison du peu d'importance des
peuplements.
Feuilles de jeunesse. — Opposées, ovalo-orbiculaires ou
lancéolées. Lobes irréguliers à la base. Couleur vert glauque, longueur
de 2 cm 5 à 11 cm, largeur de 1 cm '5 à 5 cm. Pétiole cylindrique
de 10 à 15 mm, vert jaunâtre ou rosé. Nervure médiane apparente,
vert clair ou rosée. Nervures latérales peu apparentes, assez
irrégulièrement serrées. Nervure les reliant sur le bord du limbe
irrégulière, peu apparente.
Feuilles définitives. — Alternées, très épaisses, lisses, à lobes
égaux ou inégaux, couleur vert foncé, lancéolées ou falciformes, se
terminant en pointe plus ou moins effilée. Pétiole de grosseur
moyenne, cannelé de 1 cm 3 à 2 cm, de couleur verte ou rosée.
Nervure médiane apparente, vert clair ou rosée à la base. Nervures
latérales, assez serrées, peu apparentes, reliées sur les bords du
limbe par une nervure presque régulière.
Inflorescences. — En ombelles axillaires avec pédoncule aplati
de 18 à 25 mm de longueur, 4 à 7 boutons avec courts pédicelles
aplatis.
Epoque de la floraison. — Mai-juillet et septembre-novembre.
Couleur de la fleur. — Blanc jaunâtre.
Forme de l'opercule. — Oblong, conique, évasé à la base, aussi
long que le calice.
Forme de la capsule. — Le plus souvent campanulée de 10 à
14 mm de hauteur et 7 à 9 mm de largeur, avec valves à peine
externes ou s'ouvrant au niveau du disque.
Graines. — Moyennes.
Observations particulières. — L'E. occidentalis a donné naissance
à une sous-variété : E. occidentalis oranensis Trabut. Nos arbres en
— 329 —

proviennent mais ils sont retournés pour la plupart au type décrit


ci-dessus, qui est la forme australienne normale. Il a aussi donné
naissance à une sous-variété marocaine plus grande et plus érigée,
que nous avons nommée, E. occidentalis variété macrocarpa, en
raison de la grosseur remarquable de ses capsules. En semant des
graines de cette sous-variété, qui n'est pas encore complètement
fixée, nous avons obtenu des formes nouvelles qui font l'objet
d'observations en cours.

17. E. ROBUSTA (multi flora) Smith.

Nom australien. — Swamp Mahogany « Acajou des terrains


humides », exprimant ainsi à la fois la couleur de son bois et ses
terrains préférés.
Hauteur. — De 20 à 35 m.
Port. — Frondaison large, ample, très ornementale.
Diamètre. - — De 80 cm à 1 m.
Ecoree. — Persistante, sillonnée, brun rougeâtre sur le tronc, lisse
sur les rameaux.
Couleur du bois. — Rouge.
Densité au m3. — De 630 à 750 kg.
Feuilles de jeunesse. — Opposées, épaisses, lisses, luisantes, larges,
•ovales, lancéolées, à pointe longue, mesurant 10 à 18 cm de longueur
et 4 à 8 cm de largeur, couleur verte. Pétiole cannelé de 1 cm 5 à
2 cm de longueur. Nervure médiane apparente, proéminente, de
couleur claire ou rosée. Nervures latérales apparentes, assez
régulières. Nervure, les reliant sur les bords du limbe, irrégulière,
apparente.
Feuilles définitives. — Alternées, ovalo-lancéolées, épaisses, vert
sombre, luisantes, de 13 à 25 cm de longueur et de 2 cm 8 à 6 cm 5
de largeur, couleur ficus, très ornementales, à lobes généralement 2^
égaux, quelquefois inégaux. Pétiole cannelé, long, longueur a
3 cm, de couleur claire ou rosée. Nervure médiane très apparente,
proéminente à la face inférieure, de couleur claire ou rosée à la
base. Nervures latérales assez régulières, serrées, apparentes.
Nervure, les reliant sur les bords du limbe, irrégulière, apparente.
Inflorescences. — Ombelle axillaire sur pédoncule large, aplati,
de 20 à 30 mm de longueur, avec 3 à 10 boutons pyriformes sur
pédicelle.
Epoque de la floraison. — De mai à septembre.
Couleur de la fleur. — Crème.
Forme de l'opercule. — Hémisphérique, long, se terminant en
cône, peu acuminé, débordant légèrement sur le calice, de 5 à 8 mm
de hauteur.
Forme de la capsule. — Cylindroïde ou ovalo-tronquée ou
légèrement urnigéré de 8 à 12 mm de hauteur et 7 à 10 mm de diamètre.
Valves profondément encloses.
Graines. — Grosses.
Observations particulières. — Le robusta est un des arbres les
plus ornehae&taux du genre Eucalyptus. Le kirtoniana, qui offre
— 330 —

beaucoup de points de ressemblance avec lui (feuilles,


inflorescences, capsules), en diffère par son port plus érigé.

18. E. SALIGNA Smith (1797) (E. grandis Maiden).


Nom australien. — Blue Gum Sydney, ainsi nommé pour le
différencier des autres Blue Gum, dont les feuilles de jeunesse ont
des reflets bleu blanchâtre alors que les reflets des feuilles de
jeunesse de VE. saligna sont bleu verdâtre.
Hauteur. — Jusqu'à 45 m.
Port. — Pyramidal, très ornemental et majestueux. Tronc très
droit.
Diamètre. — 80 cm à 1 m 30.
Ecorce. — Lisse, blanc bleuâtre.
Couleur du bois. — Rouge clair (rose).
Densité au m3. — De 650 à 1 000 kg, moyenne 830.
Feuilles de jeunesse. — Opposées ou légèrement alternées,
étroites ou ovalo-lancéolées, vert clair ou vert foncé, lavé de rose, selon
exposition, minces, ondulantes, ce qui donne un aspect très
ornemental aux jeunes arbres, de 5 à 9 cm de longueur, 1 à 3 cm de
largeur. Pétiole court de 1 cm environ, cannelé, de couleur rose.
Nervure médiane apparente, verte ou rose sur toute la longueur
ou sur une partie. Nervures latérales espacées, irrégulières, peu
apparentes. Nervure les reliant sur les bords du limbe irrégulière,
peu apparente.
Feuilles définitives. — Alternées, lancéolées, acuminées, couleur
vert foncé à la face supérieure, vert clair à la face inférieure. Lobes
égaux, longueur de 10 à 18 cm, largeur de 1 cm 5 à 4 cm. Pétiole
mince, cannelé, de couleur claire ou rosée, de 1 cm 5 à 2 cm 5.
Nervure médiane de couleur claire ou rosée, apparente. Nervures
latérales peu apparentes, assez serrées, irrégulières. Nervure qui
les relie sur les bords du limbe peu apparente, irrégulière.
Inflorescences. — Ombelles axillaires. Pédoncule de 10 à 15 mm.
3 à 9 boutons sessiles ou brièvement pédicellés.
Epoque de la floraison. — Mai-juillet et septembre-octobre.
Couleur de la fleur. — Blanche.
Forme de l'opercule. — Conique ou hémisphérique avec rostre
court.
Forme de la capsule. — Campanulée, tronquée, de 5 à 8 mm de
hauteur et 4 à 6 mm de largeur, valves externes.
Graines. — Petites.
Observations particulières. — L'E. saligna est un des plus beaux
arbres du genre Eucalyptus.

19. E. SIDEROXYLON (A. Cun.) et Benth. (1866).

Nom australien. — Ironbark. Ecorce couleur de fer, ce qui est


tout à fait la caractéristique de cet arbre dès qu'il a atteint l'âge
adulte.
Ménager H. : Eucalyptus tereticornis (f. jeunesse). Pl. XVI.

E. tereticornis Smith (ou umbellata Gaertn). — 1, 1'. Formes de


jeunesse. — 2. Fleurs avant épanouissement. — 3. Rameau florifère. —
4. Fruits.
— 332 —

Hauteur. — De 20 à 30 m.
Port. — Pyramidal ou érigé. Tronc droit ou légèrement tordu.
Diamètre. — De 30 à 80 cm.
Ecorce. — L'écorce vieille est liégeuse, épaisse, à sillons
irréguliers, traversée et parsemée de plus ou moins abondantes
exsudations, de résine kino riche en tanin, lequel en s'oxydant à l'air
devient noir, ce qui donne un aspect particulier au tronc.
Couleur du bois. — Sombre à noirâtre avec jolies veines plus
claires.
Densité au m3. — 1 070 kg en moyenne.
Feuilles de jeunesse. — Légèrement alternées (caractère distinc-
tif), fines, lancéolées mais à sommet peu acuminé, couleur vert
glauque sur les deux faces, de 5 à 8 cm de longueur et 1 à 2 cm de
largeur. Pétiole fin, court, de 5 à 7 mm de longueur, de couleur
claire ou rosée. Nervure médiane claire ou rosée, fine, apparente.
Nervures latérales serrées, irrégulières, apparentes. Nervure, les
reliant sur les bords du limbe, irrégulière, apparente.
Feuilles définitives. — Alternées, avec plusieurs formes sous-
variétales plus ou moins fines, lancéolées ou arquées, à lobes égaux
ou inégaux, couleur vert-glauque sur les deux faces, de 7 à 16 cm
de longueur et de 12 à 32 mm de largeur. Pétiole fin, cylindrique,
de couleur claire ou rosée. Nervures latérales serrées, irrégulières,
apparentes. Nervure, qui les relie sur les bords du limbe, apparente,
irrégulière.
Inflorescences. — Ombelle axillaire sur pédoncule cylindrique
de 10 à 20 mm de longueur. 3 à 7 boutons sur pédicelles de 5 a
10 mm.
Epoque de la floraison. — Janvier-février et septembre-décembre.
Couleur de la fleur. — De crème à rosée ou rouge plus ou moins
foncé, très ornemental.
Forme de l'opercule. — Conique, acuminé, moins long et moins
large que le calice.
Forme de la capsule. — De globulaire à pyriforme ou légèrement
urnigérée, plus ou moins grosse. Il existe en Australie une variété
macrocarpa (gros fruits). Hauteur de 8 à 12 mm, largeur de 4 à
8 mm, valves profondément encloses.
Graines. — Grosseur moyenne.
Observations particulières. — L'E. sideroxylon en Australie et
dans nos plantations constitue une véritable population à formes
diverses. En Australie, on distingue les formes « grey life » (feuilles
grises), « pale life », et « pallens » variété macrocarpa. Nous avons
vu que les fleurs diffèrent aussi dans leur couleur. La forme des
frondaisons change également, les rameaux étant plus ou moins
pleureurs. Une sélection s'impose.

20. E. TERETICORNIS Smith, ou umbellata Gaertn.

Nom australien. — Forest Red Gum, se traduisant par Eucalyptus


à bois rouge de la forêt, ce qui le distingue du rostrata de la rivière
(Gum Red River).
Ménager H. : Eucalyptus tereticornis (f. calice court). Pl. XVII.

E. tereticornis Smith (ou umbellata Gaertn.), forme à calice court Kau-


diat. — 1. Rameau florifère. — 1'. Feuille adulte isolée. — 2. Rameau
florifère présentant des fleurs non épanouies. — 3. Rameau fructifère. —
4. Fruit (X 2,5).
— 334 —

Hauteur. — Jusqu'à 40 m de hauteur.


Port. — Pyramidal avec tronc droit.
Diamètre. — 80 cm à 1 m.
Ecorce. — Se levant par plaques, de sorte que l'on voit des zones
blanchâtres, lisses et d'autres foncées, plus rugueuses.
Couleur du bois. — Rouge.
Densité au m3. — 890 kg en moyenne.
Feuilles de jeunesse. — Opposées, ovales, elliptiques ou
lancéolées, de 6 à 16 cm de longueur et de 4 à 7 cm de largeur, couleur
vert clair. Pétiole cannelé, de couleur claire ou rosée, de 10 à 15 mm
de longueur. Nervure médiane très apparente, proéminente à la
face inférieure, couleur claire ou rosée à la base. Nervures
latérales, apparentes, irrégulières. Nervure, les reliant sur les bords du
limbe, irrégulière, apparente.
Feuilles définitives. — Alternées, étroites, lancéolées, vertes et
lustrées sur les deux faces, de 9 à 22 cm de longueur et 12 à 25 mm
de largeur. Pétiole cannelé, de couleur claire ou rosée, mince, de
20 à 35 mm de longueur. Nervure médiane très apparente,
proéminente à la face inférieure, couleur claire ou rosée à la base.
Nervures latérales fines, serrées, irrégulières, apparentes. Nervure, les
reliant sur les bords du limbe, apparente, irrégulière.
Inflorescences. — Ombelles axillaires. Pédoncule cylindrique de
5 à 12 mm de longueur. 5 à 12 boutons coniques ou en forme de
tasse, pédicellés.
Epoque de la floraison. — Mai-juillet et septembre-novembre.
Couleur de la fleur. — Blanche.
Forme de l'opercule. — Long (3 ou 4 fois plus que le calice),
conique, arrondi ou peu acuminé au sommet, en forme de corne
arrondie, ce qui donne le nom à l'espèce (tereticornis) .
Forme de la capsule. — Hémisphérique ou turbinée (formes
multiples) avec ou sans anneau incliné en tronc de cône. Hauteur 6 à
9 mm, largeur 8 à 10 mm avec valves plus ou moins externes.
Graines. — Grosseur moyenne.
Observations particulières. — L'E. tereticornis a de nombreuses
formes, les unes à feuilles de jeunesse très larges comme Vampli-
folia, d'autres à capsules plus ou moins longues et grosses. Nous en
avons sélectionné une qui semble assez homogène et stable.

21. E. VIMINALIS La Billardière (1806).

Nom australien. — Ribbon Gum, Manna Gum. Ribbon se


traduisant en industrie du bois par lisse, donne bien la caractéristique du
bois de VE. viminalis. Par contre, cet Eucalyptus (Gum) ne secrète
pas de suc, mais ses feuilles constituent une véritable « manne »
pour le gentil « Koala » qui en fait sa nourriture exclusive et vit
en famille dans les E. viminalis.
Hauteur. — De 25 à 45 m.
Port. — Etalé à la base, mais tendant vers la forme pyramidale.
Rameaux pleureurs, ce qui caractérise l'espèce (viminalis).
Diamètre. — De 1 m à 1 m 50.
— 335 —

Ecorce. — Caduque, claire et iisse dans les individus de grande


hauteur, persistante à la base dans les arbres trapus, se levant par
lamelles sur les branches.
Couleur du bois. — Jaune pâle.
Densité au m3. — De 750 à 930, moyenne 890 kg. F. V. Mueller
lui donnait une densité de 685 kg. Nous pensons qu'il s'agissait de
VE. dolrympleana qui a été distingué en 1920 du viminalis par
Maiden et qui est plus léger.
Feuilles de jeunesse. — Opposées, sessiles ou brièvement pétio-
lées, vert pâle, petites et étroites, de 4 à 10 cm de longueur et de
8 à 15 mm de largeur. Dans cette espèce, les branches basses
peuvent conserver des feuilles opposées pendant de nombreuses
années. Nervure médiane apparente, fine, de couleur claire ou
légèrement rosée à la base. Nervures latérales apparentes, serrées,
irrégulières. Nervure les reliant sur le bord du limbe peu apparente,
irrégulière.
Feuilles définitives. — Alternées, vert pâle sur les deux faces,
étroites, lancéolées ou arquées, acuminées, longueur 10 à 18 cm,
largeur 13 à 20 mm. Pétiole rond, jaunâtre, de 8 à 15 mm de
longueur. Nervure médiane fine, de couleur claire. Nervures latérales
fines, serrées, apparentes. Nervure les reliant sur les bords du
limbe, fine, peu apparente.
Inflorescences. — Ombelle à 3 boutons sessiles d'après Blakely,
3 à 7 d'après Navarro de Andrade. Dans nos collections les
ombelles ont le plus souvent 3 boutons, mais on en trouve parfois
jusqu'à 5. Pédoncule cylindrique de 3 à 6 mm de longueur.
Epoque de la floraison. — Janvier-mars et septembre-novembre.
Couleur de la fleur. — Blanche.
Forme de l'opercule. — Hémisphérique ou conique, court, pointu,
généralement plus long que le calice.
Forme de la capsule. — Globulaire, un peu évasée, de 5 à 6 mm
de hauteur et 7 à 8 mm de largeur, avec disque proéminent ou
convexe ou déprimé et valves externes.
Graines. — Fines.
Observations particulières. — UE. viminalis a été confondu
longtemps avec YE. dalrympleana qui en est une forme de
montagne. C'est ce qui explique que F. V. Mueller donnait à son bois
une densité de 685 kg au mètre cube qui est celle du bois d'E.
dalrympleana. C'est Maiden qui, en 1920, a distingué ce dernier du
viminalis.

III. INCLINAISON ET POSITION DES NERVURES


DES FEUILLES DEFINITIVES
L'angle formé par les nervures latérales avec la nervure médiane
des feuilles est très variable pour chaque espèce. Anderson, dans
« The trees of New South Wales » a noté les angles ci-après. D'autre
part, j'ai vérifié par 3 mesures si, en prenant les angles toujours
sur des feuilles définitives (adultes ou de vieillesse selon les
Auteurs), au milieu de la feuille, on n'obtiendrait pas une plus grande
égalité dans l'inclinaison des angles.Voici les résultats comparatifs :
336 —

Conclusions comparées
Espèce Angles Angles Angles
ANDERSON vérifiés ANDERSON vérifiés
amplifolia 20 à 60° 34°, 44°, 46° aigu à obtus
aigu à droit
astringens — 43°, 44°, 44° droit
bicostata 30 à 45° 24°, 32°, 39° aigu à droit
aigu
botryoides 40 à 60° 52°, 59°, 58° droit à obtus
obtus
camaldulensis .... 30 à 60° 37°, 42°, 49° aigu à obtus
aigu à droit
citriodora — 36°, 48°, 56° aigu à obtus
cladocalyx — 36°, 41°, 43° aigu à droit
diversicolor — 48°, 51°, 59° droit à obtus
globulus — 25°, 32°, 36° aigu
gomphocephala ... — 30° 38°, 49° aigu à droit
kirtoniana 35 à 55° 53°, 56°, 59° aigu à obtus obtus
leucoxylon 20 à 40° 28°, 35°, 44° aigu à droit aigu à droii
macarthuri 20 à 40° 36°, 39°, 43° aigu à droit aigu à droit
maculata 45 à 60° 48°, 53°, 62° droit à obtus droit à obtus
maideni 20 à 40° 42°, 49°, 56° aigu à droit droit à obtus
occidentalis — 34°, 35°, 39° aigu
robusta 40 à 60° 56°, 58°, 66° droit à obtus obtus
saligna 40 à 60° 56°, 57°, 68° droit à obtus obtus
sideroxylon —- 29°, 31°, 32° aigu
tereticcrnis 15 à 40° 40°, 47°, 58° aigu à droit droit à obtus
viminalis 30 à 50° 29°, 37°, 38° aigu à droit aigu
On voit que, si les différences sont moins grandes, la tendance
des inclinaisons est à peu près la même. Par exemple :
amplifolia est peu aigu et souvent droit ou obtus;
bicostata ne dépasse pas l'angle droit;
botryoides n'est pas aigu et tend à être obtus;
camaldulensis n'est jamais très aigu, ni très obtus et plutôt droit;
kirtoniana, jamais très aigu, est plutôt droit ou obtus;
leucoxylon est toujours aigu à droit, etc..
Ces indications peuvent donc être d'une certaine utilité pour
différencier les espèces.

IV. DETERMINATION DES EUCALYPTUS


PAR LEUR ASPECT EXTERIEUR
Cette détermination est facile pour certaines espèces qui ont
une ou plusieurs caractéristiques particulières, comme nous l'avons
vu dans leur description. Pour d'autres, cela est beaucoup plus
difficile et un examen plus approfondi est nécessaire. Il faudrait
sans doute tenir compte de la forme des anthères, examiner le
parenchyme des feuilles, employer le microscope pour reconnaître
l'organisation interne des cellules. Ce sont là des travaux de
laboratoire auxquels je n'ai pu me livrer jusqu'à présent. Ils ne
pourraient d'ailleurs servir pour reconnaître les arbres dans la nature.
Ce qui complique cette reconnaissance c'est que, dans les
plantations du Gharb, les arbres sont serrés et perdent leur forme
naturelle. C'est ainsi que j'ai constaté que l'inclinaison des branches
par rapport au tronc peut changer selon que l'arbre est isolé ou
en peuplement. Telle espèce au port étalé devient pyramidale en
cherchant la lumière. Telle autre perd l'éclat de ses feuilles à
l'ombre. Il est donc nécessaire, pour reconnaître les Eucalyptus par leur
aspect extérieur, de choisir des sujets isolés ou se trouvant sur le
bord des plantations.
— 337 —

V. POLYMORPHISME
SELECTION NATURELLE ET SELECTION ARTIFICIELLE

C'est un fait patent que la plupart des espèces d'Eucalyptus sont


très polymorphes. Avec M. Métro, je l'ai constaté dans les forêts
naturelles d'Australie. Parmi les espèces que nous avons cultivées,
les E. rostrata, sideroxylon et tereiicornis ont de nombreuses
formes qui modifient d'autant plus leur aspect extérieur qu'elles n'ont
pas toutes la même vigueur et que le caractère que l'on a
considéré comme la caractéristique même de la variété se trouve parfois
modifié.
M. Chabrolin, qui avait succédé à M. Bœuf à la Direction du
Service Botanique de Tunisie, a écrit en 1942 dans son Introduction
à la brochure de M. Guillochon : « Arbres et Arbustes cultivés en
Tunisie » :
« Les groupes végétaux homogènes, les lignées pures restent
« stables : hors le cas d'hybridation ou de mélange; ils ne s'accli-
<r matent ni ne dégénèrent; mais les lignées pures sont très rares,
« ce sont des créations artificielles qui n'existent que par l'homme
« et pour l'homme.
« Les groupes végétaux naturels, sont ce que la génétique appelle
« des populations, c'est-à-dire des mélanges de formes voisines,
« mais non identiques, qui se reproduisent le plus souvent par
« fé'con dation croisée entre elles.
« Pour le génétiste, une forêt australienne d'Eucalyptus rostrata,
« par exemple, est comparable à la population humaine d'une
« grande région industrielle, où, si nombreux qu'ils soient, les in-
« dividus ont pourtant chacun leur identité, où hors le cas des
« jumeaux vrais, provenant d'une même fécondation, aucun n'a de
« véritable sosie.
« Quelques graines de l'un quelconque de ces Eucalyptus trans-
« portées en Europe, sont l'équivalent génétique exact de quelques
« couples humains de la population ci-dessus emigrant dans un
« pays neuf. Ces derniers formeront une colonie humaine où il
« y aura encore des bruns et des blonds, des grands et des petits,
« des malins et des timides, des robustes et des chétifs. Les plantes
« d'Eucalyptus dans le jardin d'essais qui les aura reçues donneront
« un massif d'E. rostrata qui, pour se maintenir, nécessitera peut-
« être des soins spéciaux. Leurs descendants seront plus ou moins
« vigoureux, plus ou moins sensibles au froid, à la sécheresse, au cal-
« caire. Les moins adaptés périront d'eux-mêmes ou seront éli-
« minés par un jardinier soigneux. Ainsi, peu à peu, par le jeu
« de cette double sélection naturelle et artificielle, la population
« renfermera de moins en moins d'individus mal adaptés aux con-
« ditions du nouveau milieu : elle s'acclimatera... »
La sélection naturelle s'est parfois produite dans nos plantations
marocaines. J'ai fait aussi la sélection artificielle et obtenu des
types botaniquement plus uniformes, et plus régulièrement
vigoureux, mais il reste encore beaucoup à faire à cet égard. Il n'est pas
exclu que la sélection permette un jour de planter en grande
surface dans un but industriel (cellulose-tanin, etc.) des types plus
— 338 —

vigoureux et plus rustiques et à qualités plus adéquates que les


anciens. Leur exploitation pourra sans doute se faire selon une
révolution plus rapide que celle que nous appliquons actuellement
(10 3ns).

VI. HYBRIDATION
Les espèces d'Eucalyptus ne fleurissent pas toutes en même
temps. Certains croisements naturels sont donc impossibles. Baker
et Smith ont écrit dans leur « Etude sur les Eucalyptus »„ 1920 :
« L'hybridation naturelle dans l'Eucalyptus représente peut-être
une explication plausible pour rétablissement de certaines espèces
qui présentent des affinités des deux côtés. Les organes de
reproduction chez l'Eucalyptus sont cependant protégés par un
opercule et, dans plusieurs cas, des grains de pollen ont été trouvés
adhérents au stigmate avant la chute de cet opercule... »
F. von Mueller ne considérait pas l'hybridation comme
impossible mais il a écrit qu'elle ne « semblait pas expliquer l'origine de
toutes les formes égarées dans une espèce où l'opercule protège
contre le croisement » (on pourrait dire tout aussi bien que le
bouton protège la fleur avant son épanouissement. Il est visible,
lorsque l'opercule tombe, que les étamines ne s'étalent pas
instantanément et que le pollen ne semble pas tout à fait parvenu à son
point de maturité).
Plus tard, le Dr Trabut a reconnu, dénommé et décrit plusieurs
hybrides d'Eucalyptus en Algérie.
En 1937, le Profr de Botanique R. G. Brett, de l'Université de
Hobart a, dans une étude sur les Espèces d'Eucalyptus en Tasma-
nie, indiqué les affinités de chacune d'elles pour une ou plusieurs
autres espèces et les hybrides qui en résultent. Nous l'avons vu en
1948. Il nous a montré au Mont Wellington près de Hobart et dans
ses herbiers de multiples formes de divers Eucalyptus, qu'il
considère comme des hybrides à parents bien déterminés.
En 1949, M. Crane, directeur du Département Forestier de
Hobart, m'a envoyé des graines des cinq hybrides reconnus par
M. Martin du C.S.I.R. (Service des Recherches Industrielles,
Agricoles et Forestières de Tasmanie) :
E. salicifolia X coccifera, du Mont Arrowsmith, altitude 900 m.
E. coccifera X salifolia, de King William Sadle altitude 750 m.
E. pauciflora X coccifera, de Miena, Great Lake, altitude 1 000 m.
E. pauciflora X salifolia, de Derwent Bridge, altitude 720 m.
E. salicifolia X gigantea, de Trial Harbour Read, altitude 240 m.
Seul le dernier, provenant de deux grandes espèces vivant à une
faible altitude, a bien réussi dans ma Collection marocaine. Dans
celle des Landes de Gascogne les trois premiers ont fait preuve
d'une grande résistance au froid et sont vigoureux. Deux d'entre
eux n'ont pas montré jusqu'à présent de grandes variations dans
leur forme, mais ils n'ont pas encore fructifié.
Enfin, en France même, le Prof Chevalier a déterminé à
Cherbourg un hybride d'Eucalyptus qu'il a nommé E. favieri, en
l'honneur de M. Favier, président de la Société des Sciences Naturelles
de Cherbourg, qui possède un certain nombre d'espèces
d'Eucalyptus vivant en plein air dans son parc de la Fauconnerie.
— 339 —

ïl ne semble pas douteux aujourd'hui que beaucoup d'espèces


d'Eucalyptus s'hybrident entre elles naturellement ou à l'aide des
abeilles qui peuvent aller butiner jusqu'à une distance de 4 km.
Or, certaines espèces, notamment YE. rostrata, peuvent se
bouturer. On devrait donc tenter le bouturage des hybrides
intéressants. Le greffage pourrait également être essayé, mais au moment
du recépage, c'est le sujet qui repousserait, en raison de la
tendance marquée de beaucoup d'Eucalyptus à émettre des rejets très
vigoureux partant du collet ou même au-dessous de celui-ci.
L'hybridation artificielle et la sélection au cours de
reproductions successives, selon les lais de Mendel, est une œuvre de longue
haleine mais, précisément pour cette raison, elle devrait êtrte
entreprise dès à présent au Maroc. Afin d'obtenir des sujets à fleurs
plus accessibles, on pourrait les naniser par là greffe, ainsi que
je l'ai vu en 1947 à la Station de Génétique de la Compagnie des
Chemins de Fer de l'Etat de Saint-Paul à Rio-Claro, car le créateur
de cette station, Navarro de Andrade, croyait lui aussi à
l'hybridation des Eucalyptus.
Allier, par exemple, la rusticité et la plasticité de YE. rostrata
à la rapidité remarquable de développement de YE. saligna.
Diminuer ou augmenter par le croisement de deux espèces la
coloration du bois et la teneur en tanin, désirable ou indésirable pour
l'industrie de la cellulose et du tannage des cuirs. Augmenter la
résistance au froid ou à la sécheresse d'une espèce donnée en la
croisant avec une autre. Ce sont là, avec beaucoup d'autres sans
doute, des résultats qui pourraient être obtenus par l'hybridation
et la sélection artificielles.
Il arrive fréquemment que les hybrides soient plus vigoureux
que les plantes-mères, ce qui est le cas de plusieurs hybrides de
Pins obtenus depuis quelques années aux Etats-Unis et des hybrides
d'Eucalyptus de Tasmanie que j'ai plantés en France (Domaine de
Devinas, Carcans, Gironde).
Toutes les personnalités françaises ou étrangères qui ont visité
nos deux collections de 1948 à Sidi-Yahia-du-Gharb ont été
frappées par l'homogénéité, le développement et la vigueur
remarquables des 15 espèces d'Eucalyptus qu'elles contiennent. Or les
graines proviennent de la station de Génétique de Rio-Claro où,
dans les arbres plantés par Navarro de Andrade, elles sont cueillies
sur les formes les plus vigoureuses de chaque espèce et
soigneusement examinées au point de vue pureté.
Dans les collections issues de graines récoltées « au petit
bonheur », sans doute sur les arbres les moins hauts, où elles sont plus
faciles à cueillir, on constate souvent, au contraire, que les formes
sont diverses et de vigueur inégale dans chaque espèce.
Il en. est de même dans nos plantations, où les anciennes,
obtenues avec des graines non sélectionnées, sont loin d'être aussi
homogènes et vigoureuses que celles que nous avons faites depuis
avec des graines provenant d'arbres sévèrement sélectionnés, que
l'on abat au besoin si les inflorescences sont trop difficiles à
atteindre.
La voie restera toujours ouverte à de nouveaux
perfectionnements.
340

VII. Terrain, Altitude et Pluviométrie


convenant au Maroc aux Eucalyptus décrits
Faculté de rejeter après la coupe.
Terrains Altitude Pluviométrie
Espèce préférés mètres en mm Observations
Optima Mioimi
ampli folia . silico-ferrugineux Oà 750 1000 400 possibilité d'extension cul-
silico-argileux turale réduite à terres
argilo-siliceux relativement profondes et
fraîches. Rejette vigoureusement
après la coupe.
astringens silico-argilo-ferru- sensible à toute diminution
gineux 0 à 1 000 1000 400 de la qualité du sol. Ne
latéritiques rejette que partiellement après
la coupe.
silico-argileux 0àl200 1000 400 semble plus plastique que
argilo-siliceux l'Eucalyptus globulus et
ferrugineux paraît s'adapter aussi bien à la
basaltiques plaine qu'à la montagne.
Rejette après la coupe.
Observation à vérifier et
compléter.
botryoides ... . silico-argileux ou aime les terrains humides,
argilo-siliceux Oà 500 1200 500 craint la sécheresse,
humides supporte le calcaire, résiste
supportent les calcaires dans les sols faiblement
chlorurés. Rejette
vigoureusement après la coupe.
camaldulensis. . siliceux 0 à 1 300 1000 200 remarquablement plastique,
(rostrata) silico-argileux résistant bien à la sécheresse
ferrugineux et à l'humidité. Devient
argileux chlorotiqiie en terrains
calcaires. Rejette très
vigoureusement après la coupe.
silico-ferrugineux 0 à 500 1000 400 craint la gelée en pépinière
silico-argileux ou en jeune plantation, y
résiste bien ensuite.
Rustique à l'âge adulte. Rejette
vigoureusement après la
coupe.
cladocalyx siliceux Oà 600 1000 200 très plastique et peu
(carynocalyx) silico-argileux- exigeant pour le choix du
calcaires terrain. Résistant à la
schisteux sécheresse. Rejette très
ardoisiers vigoureusement après la coupe.
diversicolor silico-argileux Oà 500 1200 400 exige des terres profondes
(colossea) argilo-siliceux fraîches et saines, avec une
argileux certaine proportion d'argile.
Rejette vigoureusement a-
près la coupe.
globulus siliceux d'origine craint le calcaire, l'humidité
granitique Oà 750 1000 400 stagnante et les sols à élêV-
silico-argileux - ments trop fins
profonds ou (asphyxiants). Rejette
sols alluvionnaires vigoureusement après la coupe.
gomphocephala siliceux 0 à 1 000 1 000 300 arbre plastique et rustique,
argilo-siliceux craignant toutefois
argilo-calcaires l'humidité stagnante. Rejette
vigoureusement après la
coupe.
— 341

Terrains Altitude Pluviométrie


Espèce préférés mètres en mm Observations
Optlw Nlsiai
kirtoniana siliceux Oà 500 1 200 400 aime l'humidité et se plaît
silico-argileux dans les bas-fonds, résiste
argilo-siliceux dans les sols faiblement
humides chlorurés. Rejette
vigoureusement après la coupe.
leucoxylon .... siliceux 0 à 1 000 1000 400 se plaît dans les mêmes
silico-argileux sols que le sideroxylon,
argilo-siliceux mais est probablement
ferrugineux moins rustique. Rejette
modérément calcaires vigoureusement après la
coupe.
macarthuri . . . siliceux 0 à 500 1 000 400 aime les terres profondes et
silico-argileux saines. Rejette très
argilo-siliceux vigoureusement après la coupe.
ferrugineux
maculata siliceux 0 à 500 1 000 400 vit avec l'Eucalyptus citrio-
silico-argileux dora et a la même rusticité.
argilo-siliceux Faculté de rejeter pas
argileux encore observée.
ferrugineux
maideni siliceux 0 à 1 000 1 000 400 aime les terres profondes,
silico-argileux fraîches, bien drainées.
argilo-siliceux Rejette après la coupe.
ferrugineux Observation à vérifier et
compléter.
occidentalis . . . siliceux 0 à 500 1 000 200 aime les terres humides,
silico-argileux résiste dans les sols
ferrugineux faiblement chlorurés. Rejette
latéritiques vigoureusement après la coupe.
robusta siliceux 0 à 500 1 200 400 craint le calcaire et les
silico-argileux terrains secs. Aime l'humidité
argilo-siliceux et se plaît dans les bas-
humides fonds, résiste dans les sols
faiblement chlorurés. Rejette
vigoureusement après la
coupe.
saligna siliceux sur sous- exige des terres profondes
sols 0 à 500 1 200 500 et fraîches, bien drainées.
silico-argileux Rejette très vigoureusement
argilo-siliceux après la coupe si
sols d'alluvions l'espacement et la lumière reçue
sont suffisants.
sideroxylon . . siliceux sur sous- arbre rustique, résistant
sols 0 à 750 800 200 bien à la sécheresse et s'a-
silico-argileux daptant au besoin à des
argilo-siliceux sols très pauvres. Rejette
ferrugineux très vigoureusement après
calcaires ou non la coupe.
calcaires
tereticornis . . siliceux sur sous- aime les terrains frais, hu-
(umbellata) sols Oà 500 1 000 500 mides et profonds. Rejette
silico-argileux vigoureusement après la
.

argilo-siliceux coupe.
silico-argileux
viminalis siliceux 0 à 1 200 1 000 500 craint la sécheresse, aime
silico-argileux les terres profondes,
argileux fraîches et saines. Rejette après
gréseux la coupe. Observation à
granitiques -vérifier et compléter.
basaltiques
Rev. de Bot. Appl. 24
— 342 —

VIII. HUILES ESSENTIELLES


DANS VINGT ET UNE VARIETES DECRITES

Proportion
% de Principal
Eucalyptus feuilles composant Usage Observations
amplifolia 0,90 cinéol, pinène et non exploité feuilles
aromadendral
astringens 0,95 — non exploité feuilles
bicostata 0,92 cinéol et pinène médicinal feuilles, peut-être
exploité comme le glo.
bulus
botryoides 0,11 pinène non exploité feuilles
camaldulensis .... 0,27 cinéol, pinène et non exploité feuilles
aromadendral
citriodora 0,60 à 1 citronellal parfumerie feuilles, très exploité en
Australie
cladocalyx 0,10 pinène et cinéol non exploité feuilles
diversicolor ....... 0,80 pinène médicinal feuilles
globulus 0,92 cinéol et pinène médicinal feuilles, très exploité au
Portugal et en Es-
> pagne
gomphocephala . . . 0,03 phellandrène et non exploité feuilles
piperitone
kirtoniana 0,26 pinène non exploité feuilles
leucoxylon 2 à 2,5 pinène et cinéol médicinal feuilles
macarthuri 0,21 eusdémol et ge- parfumerie feuilles et écorces très
raniol exploité en Australie
maculata 0,23 pinène et cinéol parfumerie feuilles, peu exploité
médicinal
maideni 1 pinène et cinéol médicinal feuilles, peu exploité
occidentalis 0,95 cinéol, pinène et pas exploité feuilles
aromadendral
robusta 0,16 pinène pas exploité feuilles
saligna 0,12 pinène pas exploité feuilles
sideroxylon 0,60 pinène et cinéol médicinal feuilles, très exploité en
Australie
tereticornis 0,50 cinéol, pinène et médicinal feuilles, peu ou pas
aromadendral exploité
viminalis 0,55 pinène et cinéol médicinal feuilles, peu ou pas
.exploité

Certains Eucalyptus sont exploités spécialement pour les huiles


essentielles qu'ils contiennent. C'est le cas du macarthuri, où on en
trouve à la fois dans l'écorce et les feuilles. Cet arbre est même
planté pour la distillation de son essence en Australie. D'autres,
comme le citriodora et le sideroxylon, sont exploités en Australie
comme sous-produits. Lorsqu'on abat les arbres pour leur bois on
distille les feuilles et rameaux.
On pourrait les planter très serrés et les couper tous les deux ans
pour la production exclusive de l'huile essentielle. Il ne faut
toutefois pas perdre de vue que le marché mondial de ces huiles est
* — 343 —

actuellement trop restreint pour permettre sans danger une grande


extension de ces plantations. Sa capacité d'absorption se chiffre
par quelques centaines de tonnes seulement et l'Australie, qui en
produit annuellement un peu plus de- 1 000 t, consomme : 180 t
d'huiles essentielles industrielles ou de parfumerie et 45 t d'huiles
essentielles médicinales. Elle exporte : 360 t d'huiles industrielles
et de parfumerie et 450 t d'huiles essentielles médicinales.
Une exploitation abusive de feuilles d'E. globuius en Espagne
fit baisser les cours de l'essence de cet arbre à un tel point que la
distillation cessa d'être rémunératrice. Les Russes au Caucase et
les Belges au Congo ont fait déjà des plantations d'Eucalyptus
spécialisées pour la production des huiles essentielles. Certes, si l'une
des essences d'Eucalyptus pouvait, par fractionnement chimique,
donner un produit de grande consommation comme le menthol
par exemple, les débouchés seraient considérablement accrus. En
attendant, nous conseillons la prudence aux planteurs.

IX. PROPRIETES MELLIFERES DES FLEURS


DES EUCALYPTUS DECRITS
Espèce Date de floraison Qualités
amplifolia ..... mai à juillet Production incertaine, couleur
foncée.
astringens ...... mai à juillet, septembre à Très fréquenté par les abeilles à
novembre une période où il n'y a pas
d'autres fleurs.
bicostata janvier à avril Peu observées.
botryoides septembre à janvier Miel de haute qualité mais de
faible rendement.
camaldulensis . . avril à juillet, septembre à Clair, ambré, fluide,
novembre aromatique.
citriodora mai à juillet, septembre à Clair, parfumé, de très bonne
novembre qualité.
cladocalyx avril à juillet Jaune pâle, dense, aromatique.
diversicolor mai à juillet Très riche en nectar, peu
observées.
globulus janvier à avrils, septembre à Peu observées.
octobre
gomphocephala. . mars à avril, septembre à Crème clair, de grain très fin,
octobre de première qualité.
^kirtoniana avril à juillet Pas observées, probablement
comme le robusta.
leucoxglon janvier à mars Paille clair, dense, fine et
parfaite qualité.
macarthuri janvier à mars Non citées, mais fleurs petites.
maculata mai à juillet Non observées.
maideni mai à juillet Pas observées.
occidentalis .... mai à juillet, septembre à ^ro- Comme Yastringens.
vembre
robusta . janvier à février, septembre à
octobre Grand
dont les
s'enivrer.
producteur
abeilles vont
de jusqu'à
nectar
saligna mai à juillet, septembre à Ambre brillant, épais, abondant.
octobre
sideroxylon janvier à février, septembre à Clair, abondant, fine qualité.
décembre
tereticornis mai à juillet, septembre à Production
foncée. incertaine, couleur
novembre
viminalis janvier à mars, septembre à Ambre
douceurclair,
particulière.
fluide, avec une
novembre
— 344 —

On voit que, sauf pendant le mois d'août, encore n'est-ce pas certain,
il existe toujours des fleurs d'Eucalyptus dans lés espèces les plus
cultivées : camaldulensis, citriodora, cladocalyx, gomphocephala et
sideroxylon. La floraison des plantes annuelles se trouve donc à la
fois devancée et prolongée par la floraison des Eucalyptus. Des
stocks inépuisables de nectar et de pollen sont ainsi rais à la
disposition des abeilles à des époques où, autrefois, elles vivaient sur
leurs réserves. Il en est résulté un accroissement considérable de
la production du miel. Celle-ci est encore loin d'atteindre toutes
ses possibilités car les planteurs qui ont installé des ruchers sont
encore rares et les Eucalyptus s'étendent chaque année sur des
milliers d'hectares nouveaux.

X. ORIGINE DES PLANTATIONS D'EUCALYPTUS

En débarquant à Casablanca comme soldat en 1911, j'ai vu des


E. rostrata déjà grands. Quelques années après, les frères Blin,
horticulteurs, en plantèrent à Bouskoura (Chaouia) . Ils contribuèrent
de 1914 à 1918, avec les autres pépiniéristes casablancais les Bonin,
les Noyant, à répandre cet arbre au bord de quelques routes et des
gares de chemin de fer à voie étroite, au fur et à mesure qu'on les
construisait. Les postes du Service Forestier et de l'horticulture en
plantèrent aussi avec d'autres essences dans les premiers jardins
créés.
J'avais constaté en Algérie et en Tunisie, de 1910 à 1914, la
parfaite réussite de E. globulus, rostrata et gomphocephala et leur
vigueur extraordinaire.
Sauf chez M. Chiris à Boufarik, ils n'avaient pas encore été
plantés en grande surface. Il donnaient cependant avant la guerre
de 1914 un aspect particulier à certaines villes, routes ou fermes
de l'Afrique du Nord.
Des hommes tels que MM. Cordier et R. de Noter, il y a 75 ans
ou davantage, avaient constitué en Algérie des collections
d'Eucalyptus importantes. Celle de M. Cordier existe encore près de
Maison-Carrée. Plus tard le regretté savant Dr Trabut, directeur
du Service Botanique d'Algérie, qui fut l'ami du grand eucalypto-
logue brésilien Navarro de Andrade, s'intéressa beaucoup aux
Eucalyptus, donna son nom à l'un d'eux (E. trabuti) et en baptisa
plusieurs autres : (E. algeriensis, E. ocridentalis var. oranensis) .
A l'instar du grand botaniste Ch. Naudin, en ce qui concerne le
Midi de la France, le DT Trabut préconisa avec insistance la
plantation des Eucalyptus en Afrique du Nord. Au cours d'une
conversation que j'ai eue avec lui à Alger aussitôt après la guerre de
1914-1918, il m'en parla avec enthousiasme. C'est d'ailleurs lui qui
conseilla à M. Maurice Bouvier de planter les Eucalyptus rostrata
et algeriensis au Maroc, idée qui fut mise en application par celui-
ci à Sidi-Yahia du Gharb dès 1921-1922.
Le premier projet de plantation d'Eucalyptus fut établi en 1914
par M. Mares, Inspecteur Général de l'Agriculture en Tunisie et
administrateur de la Société Algéro-Marocaine dont le premier
directeur- fondateur fut mon ami Emile Biarnay, qui devait lui-
— 345 —

même vers 1922 ou 1923 devenir planteur d'Eucalyptus rostrata


dans les sables de Kcébia. M. Mares voulait me faire planter pour
cette Société 40 ha d'Eucalyptus rostrata dans une propriété bordée
par la rive gauche du Sébou, à proximité de l'Ile Sainte-Marie. La
mobilisation empêcha la réalisation de ce projet qui ne fut pas
repris après la guerre, la propriété ayant été vendue.
Ce n'est qu'en 1916, dans un terrain loué à Port-Lyautey, que
je commençai, par l'intermédiaire de mon premier collaborateur,
M. Bordier, vieux jardinier français, mes premiers semis
d'Eucalyptus à Port-Lyautey (avec plusieurs autres essences). Ils
comprenaient les 9 espèces suivantes : E. amplifolia, colossea (diversi-
color), gomphocephala, maculata, rostrata, stuartiana, trabuti, vimi-
nalis et cornuta. Cinq d'entre elles existent encore aujourd'hui
dans le terrain d'origine, que j'ai acheté en 1919. En 1918, je
commençai à répandre diverses espèces d'Eucalyptus, mais surtout le
rostrata, sur le bord des routes de la région et dans des rues de
Port-Lyautey, concurremment avec le Robinier pseudo-acacia, le
Mûrier, le Frêne commun, le Platane, le Lilas des Indes, le Sophora
du Japon, le Faux-poivrier, etc. Ce furent là mes premiers champs
d'application, grâce à l'obligeance des Autorités régionales, des
ingénieurs des Travaux Publics et Municipaux et de M. Maître-
Devalon, directeur des Travaux Publics, qui voulait m'encourager.
En 1917-1918, les circonstances m'amenèrent à m'intéresser à la
région, alors bien déshéritée, de Sidi-Yahia-du-Gharb, dont on ne
pouvait alors tirer parti — combien faiblement — que par
l'élevage. La proximité de la forêt de Chêne-liège de la Mamora, la
constatation que le sous-sol silico-argileux-ferrugineux était plus
riche que le sable constitué par des apports éôliens trop
récemment fixés pour être riches en humus, ou dégradés par les pluies,
la présence enfin d'une nappe phréatique peu profonde (2 à 5 m),
m'amenèrent à penser que l'arbre, qui atteindrait avec ses racines
ce sous-sol et cette eau inaccessibles aux plantes annuelles, était
destiné à transformer cette plaine désertique en un immense jardin
verdoyant. Il me sembla susceptible de rompre la monotonie du
paysage, d'arrêter les vents de sable, d'assainir les bas-fonds
(marigots) qui entretenaient par millions d'individus le terrible
anophèle propagateur de l'hématozoaire du paludisme, les mollusques
transmetteurs de la douve du bétail et de modifier enfin les
conditions de la vie dans le milieu, en les améliorant d'une façon
radicale.
C'est dans ces buts que, à partir de 1918, j'étendis mon
expérimentation forestière à de nombreuses espèces ou variétés
nouvelles. Je fus fortement encouragé dans cette voie par le rapport
d'une mission australienne à qui Lyautey avait fait appel en 1917-
1918. Il y était affirmé que le Maroc pourrait devenir un grand
pays d'élevage de bovins et d'ovins si l'on y constituait des
boisements appropriés à la construction de paddocks et d'abris pour le
bétail.
Je m'aperçus vite que les essences à feuilles caduques
laisseraient pousser l'herbe pendant l'hiver et obligeraient ainsi à un
entretien prolongé et coûteux, car il ne pouvait être question, dans
une région où la moyenne des précipitations ne dépasse pas
— 346 —

500 mm par an, de laisser concurrencer les jeunes arbres par les
mauvaises herbes. Je fus amené rapidement à constater que, parmi
les espèces à feuilles persistantes essayées, plusieurs
Acacias-Mimosas et Eucalyptus et le Grevillea robusta arrivaient à éliminer
seules les plantes adventives pourvu que l'on pratiquât des labours
de défrichement avant la plantation et des binages d'entretien pen-
dans 2 ou 3 ans.
Quelques années plus tard* je m'aperçus de la présence du tanin
dans les écorces et d'une source abondante de cellulose dans le
bois d'un certain nombre d'espèces essayées. J'eus alors recours à
des laboratoires officiels ou privés.
Dans cette recherche, qui a été commencée en 1924 et a porté
sur des centaines d'échantillons prélevés dans mes propres
plantations d'abord ou dans celles de la Société des Etablissement
Ménager ensuite, j'ai eu recours aux organisations suivantes :
Pour le tanin : Laboratoire Officiel de Chimie Agricole de
Casablanca (1924); Laboratoire Progil à Lyon-Vayse (1925 et depuis);
Laboratoire des Tanins Rey à Couze (1925 et depuis); Laboratoire
Charles Monnet à Paris (1927 et depuis); Ecole de Tannerie et
Institut de Recherches pour le Cuir à Lyon sous la Direction de
M. le Profr Chambard (1946 et depuis).
Pour la cellulose : Ecole de Papeterie de Grenoble, sous la
Direction des Prof" Vidal et Aribert (1928-1931); Institut du Pin de
Bordeaux, sous la Direction du Prof1" Dupont (aujourd'hui
directeur de l'Ecole Normale Supérieure (1928-1931) ; Laboratoire Progil
à Lyon-Vayse (depuis 1949).
Pour l'huile essentielle : Laboratoire de l'Ecole Normale
Supérieure, Paris (1949).
D'autre part, ce sont incontestablement des capitaux en majorité
français qui ont permis le développement des plantations. Pour
créer des débouchés il faut, en effet, une certaine surface. Or les
essais furent commencés avec plus de foi que de moyens financiers,
sans le secours de l'Etat.
C'est pourquoi les premiers Planteurs fondèrent les Sociétés de
plantation suivantes :
M. Bouvier, la Société des Plantations de Lalla Ito, avec le
groupe financier Mirabeau de Paris comme principal actionnaire;
M. Giraud et le Général Laboria, la Société du domaine des Dou-
aghers, avec les Etablissements Gondolo de Nantes (Extraits
tannants), comme principal bailleur de fonds; cette Société devait
vendre par la suite son domaine à la Société forestière de Kcébia;
M. Jean de Lombardon, la Société forestière de Kcébia, avec
MM. Desbenoit, tanneurs à Roanne et plusieurs de leurs amis;
MM. Rageot, la S.A.R.A., avec la Société des Matières tannantes de
Paris et, plus tard, les Tanins Rey de Paris; M. le Banquier Prou-
vost de Paris, la Société Africana, avec la Banque de Bruxelles
comme co-actionnaire; M, Georges Carle, la Société « Les Agrumes
Marocaines », avec M. Deneck, industriel à Arras; M. Charles
Monnet, chimiste et industriel à Paris, la Société chérifienne des Bois
et Tanins Coloniaux, avec d'autres Industriels fabricants d'extraits
tannants et la Banque Worms; je fis appel moi-même dès 1924, aux
Etablissement Gillet de Lyon, aux Tanins Rey de Paris et à mon
regretté ami Georges Carle.
— 347 —

Plus tard, des particuliers joignirent leurs efforts à ceux des


Sociétés de Plantation (sauf M. Biarnay qui fut un des premiers
planteurs) .
En 1938 commencèrent les premières plantations du Service des
Collectivités. Le Service des Eaux et Forêts en prit ensuite la
charge et commença lui-même un grand programme de plantations
dans les terres forestières Domaniales.
Enfin, en 1949, fut créé le Fonds Forestier Marocain auquel les
Particuliers et les Collectivités peuvent faire appel, soit sous forme
de subvention, soit sous forme de prêt à long terme.

XL METHODE DE PLANTATION
Après avoir étudié comparativement différents systèmes, la mise
au point de la méthode de plantation nous a demandé 5 années, de
1918 à 1923. Elle consiste à planter avec leur substratum de terreau,
sur terrain soigneusement défriché et labouré, des arbres élevés en
pots pendant 6 mois à 1 an. Les écartements varient selon les
terrains et les planteurs entre 2 X 2, 3 X 3, 4 X 2 et 4 X 4 m. La
plantation est entretenue par des binages au cover-crop, afin de
détruire la végétation adventice qui absorberait l'humidité et les
éléments nutritifs du soi au détriment de l'arbre. Ensuite, celui-ci,
ayant pris possession du sol, assure lui-même cette elimination.
Les Planteurs qui se sont écartés de cette méthode au début, ont
dû finalement l'adopter, soit parce qu'ils n'avaient pas réussi leurs
plantations, soit parce que celles-ci, remplacées plusieurs fois, leur
revenaient trop cher.
Appliquée d'emblée par plusieurs Sociétés de Plantation de 1923
à 1925, notre méthode n'a été consacrée officiellement qu'en 1926
par une Commission qui comprenait : Le Secrétaire de Son
Eminence le Grand Vizir, deux Caïds de notre région, MM. Malet,
directeur de l'Agriculture, Boudy, directeur des Eaux et Forêts,
T3ey-Rozet, chef du Service de l'Arboriculture Fruitière,
Commandant Noël, Chef du Service des Collectivités. Jusque-là,
l'Administration n'avait pas eu confiance dans la rentabilité des plantations
cultivées. Devant les résultats obtenus, ces préventions furent
levées et il fut décidé qu'un lotissement nouveau serait créé par
location à long terme de terres collectives avec obligation pour
les attributaires d'en planter les 2/3 en Eucalyptus ou en Mimosas.
Depuis, les Collectivités et les Eaux et Forêts ont entrepris un
grand programme de plantation d'Eucalyptus en appliquant la
méthode qui a assuré la réussite des plantations particulières.

XII. CHOIX DES ESPECES


Nous avons vu, dans le tableau précédent, que quatre d'entre
elles sont particulièrement rustiques et s'adaptent à différents sols.
Ce sont les E. camaldulensis (rostrata), cladocalyx, gomphocephcda
et sideroxylon. Une cinquième, VE. citriodora, sensible au froid en
pépinière et pendant la première année de plantation, fait preuve
— 348 —

ensuite d'une grande rusticité. Il en est probablement de même du


maculata qui a la même origine écologique et avec lequel on le
confond souvent. Une septième, YE. leucoxylon, essayée depuis
moins longtemps que les 5 premières, semble aussi montrer une
rusticité satisfaisante. UE. viminalis, plus sensible à la sécheresse
et plus exigeant en humidité que les espèces précédentes, s'adapte
par contre à de nombreux sols pourvu qu'ils soient frais et bien
drainés.
Les E. botryoides, kirtoniana et robusta redoutent la sécheresse
mais sont des arbres précieux pour les bas-fonds même si ceux-ci
sont légèrement salés.
Trois autres espèces : les E. bicostata, maideni et saligna attirent
fortement notre attention depuis 1948 par leur vigueur
exceptionnelle pendant les premières années de plantation. Ils se plaisent,
comme YE. viminalis, dans les terrains profonds, frais et bien
drainés. Ils n'ont pas la rusticité des quatre premières espèces.
Nous cherchons à définir dans quelles conditions de sol, d'écar-
lement et de soins d'entretien ils peuvent prospérer. Le saligna
surtout, avec son tronc très droit, la rapidité de son développement
et sa faculté remarquable de rejeter après la coupe, nous semble
susceptible de donner lieu à des coupes plus rapprochées dans le
temps que celles que nous pratiquons avec YE. rostrata (camaldu-
lensis). Les deux autres ont un bois moins coloré que ce dernier,
ce qui peut avoir une importance très grande au point de vue de la
cellulose.
• UE. diversicolor est très exigeant au point de vue de la qualité
et de l'humidité du sol. Il ne peut prospérer que dans des
situations choisies, rares dans les terrains du Gharb dont nous
disposons. Par contre, nous l'avons essayé dans des terres silico-argi-
leuses, ferrugineuses et profondes au S de Rabat. Sur le bord de la
route de Rabat à Marchand; à la hauteur des Souissis, il en existe
plusieurs beaux exemplaires, aussi développés que les E. rostrata
voisins.
UE. globulus, qui a bien réussi en certaines situations au
Portugal et en Espagne, a donné des déboires dans les sables à
éléments trop fins du Gharb, où il est sujet à l'apoplexie en période
de chaleur extrême, par l'évaporation brusque due à la grande
masse de ses larges feuilles. Il réussit cependant bien dans les
terres d'alluvions profondes, plus humifères et contenant
davantage d'argile que les sables d'origine éolienne des plaines du Gharb
et des collines du littoral.
Le macarthuri est encore jeune dans nos collections (3 ans 1/2),
mais il en existe un bel exemplaire de 21 ans dans la collection
du Jardin d'essais à Rabat. Son bois, qui n'est pas considéré comme
un bois d'oeuvre en Australie, mérite d'être examiné au point de
vue de la cellulose car il est de couleur claire. L'arbre se développe
assez rapidement et rejette très vigoureusement après la coupe. Enfin,
l'écorce contenant une huile essentielle appréciée, les poteaux
pourraient être livrés écorcés.
Les E. amplifolia et tereticornis manquent de résistance dans les
années sèches. Leur bois fait d'ailleurs double emploi avec celui de
YE. rostrata, qui a sensiblement le même grain et la même couleur.
— 349 —

Les E. occidentalis et astringens, auxquels nous avions pensé


pour la production du tanin, se sont montrés trop difficiles sur le
choix du terrain. L'astringens, au surplus, rejette dans une
proportion trop faible pour qu'on puisse le considérer comme une essence
douée de pérennité.
Parmi toutes les espèces énumérées, YE. rostrata est celui qui a
donné lieu aux plus importantes plantations jusqu'à présent (7/10e
des superficies). Cela est dû à sa rusticité remarquable et à sa
grande puissance de renouvellement après l'abatage. A partir de
30 ans il peut donner un excellent bois d'oeuvre. On l'emploie au
boisement des galeries dans certaines mines marocaines. Une
puissante industrie pour la cellulose à rayonne va l'utiliser bientôt
à Sidi-Yahia du Gharb même. De larges essais de fabrication de
papier ont réussi avec cette essence, qui a cependant
l'inconvénient, comme YE. gomphocephala, de contenir un peu de tanin
dans le bois, ce qui oblige à lessiver la pâte.
L'E. gomphocephala est aussi un arbre très adapté aux terrains
du Gharb. On le plante de plus en plus, car il donne de bonne
heure un bois de service de bonne qualité. Il peut également être
employé à la fabrication de la cellulose.
L'E. sideroxylon est celui qui, après 23 années de recherches
sur les Eucalyptus à tanin, a été reconnu dans mes collections
pour la première fois en 1946 comme étant le plus intéressant.
Depuis, son écorce a été soumise à de nombreuses analyses à
l'Institut de Recherches pour les Cuirs à Lyon. L'éminent
directeur de cet Institut, le Prof Chambard, est venu sur place pour
voir notre E. sideroxylon. Le Ministère de la Production
Industrielle a accordé une subvention à l'Institut précité pour l'étude
du tanin de cet arbre et la mise au point de son emploi. Plusieurs
communications et rapports favorables ont été faits par le Prof*
Chambard. Les Forestiers privés ont déjà planté 400 ha en cette
essence. M. Grimaldi d'Esdra, directeur des Eaux et Forêts, nous
écrivait de son côté dernièrement que son Service allait également
faire une place à cet arbre dans les plantations de l'Etat ou des
Collectivités (214 ha au 30 avril 1952).
L'E. sideroxylon semble appelé à se substituer en partie aux
Acacia decurrens ou mollissima que nous avions choisis au début
pour la production du tanin, mais qui ne rejettent pas après la
coupe, sont d'un développement plus lent et produisent moins
de tanin (de 0 t 2 à 0 t 6 annuellement par hectare pour l'Acacia
et de 1 t à 1 t 1/2 pour YE. sideroxylon, la teneur en tanin étant
sensiblement la même).
L'E. cladocalyx, qui n'est encore planté ici que sur une faible
superficie, mérite mieux car il est rustique, produit de magnifiques
perches et donne beaucoup d'ombrage. Il se développe toutefois
moins vite au début que YE. rostrata.
L'E. citriodora, qui a un bois d'œuvre magnifique et peut
produire en abondance le « citronellal » par la distillation de ses
feuilles, couvre une surface d'environ 50 ha. Il va faire l'objet de
plantations spécialisées dans la production des huiles essentielles
(région de Rabat).
— 350

XIII. L'EUCALYPTUS ET LA CONSERVATION DU SOL

Avant les plantations de Mimosas à tanin et d'Eucalyptus le sol,


exclusivement sableux, était composé d'apports éoliens récents ou
anciens. Ces derniers, fortement lavés par les pluies n'étaient guère
plus riches que les premiers. Aucune culture annuelle n'y était
possible sans une forte fumure. L'analyse chimique du sol ne
révélait que des traces d'acide phosphorique, d'azote, de potasse,
de calcaire et d'humus. L'acidité était révélée par l'absence
presque totale de légumineuses et la présence à peu près généralisée
de la petite Oseille. A 40 cm ou davantage, dans le sous-sol silico-
argileux-ferrugineux, on retrouvait une partie des éléments
entraînés par les pluies. Jamais cependant nous n'avons constaté de
formation d'alios, l'argile et l'humus ayant fait défaut pour
amalgamer et solidifier alentour des grains de sable les éléments
entraînés en profondeur par l'eau. On y trouvait tout au plus
sporadiquement des nodules et conglomérats gréseux-ferrugineux. Ce
sous-sol est perméable aux racines des arbres, autant du moins
que le permet la nappe phréatique qui en limite le développement.
Si les plantes annuelles, qui protègent mal le sol contre le
lessivage par les pluies, et qui ne peuvent atteindre le sous-sol plus
riche et plus frais, ne favorisent guère la formation et la rétention
de l'humus à la surface, les arbres, par contre, protègent
pleinement le sol, atteignent le sous-sol par leurs racines, utilisent les
réserves nutritives et l'eau qu'il recèle et, par leurs détritus de
feuilles, de rameaux et de branches mortes, provoquent la
formation lente mais progressive d'une couche d'humus.
Il en résulte que plusieurs coupes à blanc étoc ont pu être faites
en 25 années sans affaiblissement apparent de la vigueur des rejets
d'Eucalyptus.
Dans les espèces à couvert épais, telles que YE. gomphocephala,
aucune végétation adventice ne réapparaît.
Dans les espèces à feuillage plus léger, comme YE. rostrata,
certaines plantes apparemment détruites par les façons culturales
des premières années, peuvent réapparaître, surtout là où un ou
plusieurs arbres manquent. Elles ne sont cependant jamais en assez
grand nombre pour qu'on puisse parler d'association biologique.
Là où, avant l'Eucalyptus, Y Acacia decurrens a été cultivé, on le
voit réapparaître peu à peu, par semis subspontanés en sous-bois
ou sur le bord des parèelles, ce qui donne de plus en plus à celles-
ci un aspect australien. Nous voyons dans ces faits la meilleure
preuve que le sol ne s'est ni appauvri, ni dégradé.
Néanmoins, nous nous proposons de faire analyser très
prochainement les sols et sous-sols des parcelles plantées, de divers
âges et de comparer les résultats obtenus avec ceux des parcelles
témoins qui n'ont jamais été plantées et portent encore leur flore
naturelle.
Si un appauvrissement était alors constaté, nous pourrions sans
doute recourir aux amendements organiques, aux engrais
chimiques pour rétablir l'équilibre, comme on l'a fait pour Y Acacia
decurrens en Afrique du Sud et pour les Pins de Monterey (ra-
diata), loblolly (taeda) et maritime en Australie.
— 351 —

II n'a été question dans notre étude que du rôle de l'Eucalyptus


dans les sols de la plaine du Gharb, où l'érosion est nulle. En
terrain mamelonné, sur les pentes plus ou moins abruptes des
collines ou falaises bordant les rivières, ou sur les berges même
de celles-ci, l'Eucalyptus peut contribuer puissamment et
rapidement à arrêter l'érosion des terres. Le Service de la Défense des
Sols du Maroc, sous l'active impulsion de M. Chalot, conservateur
des Eaux et Forêts, a d'ailleurs adopté l'Eucalyptus pour cet usage,
concurremment avec d'autres espèces.
On nous a objecté que l'Eucalyptus pouvait assécher la nappe
phréatique, et, par suite, concentrer vers la surface les sels
jusqu'alors dilués dans un sol ou un sous-sol plus ou moins imbibé
d'eau.
Il ne faut pas, certes, le planter sans discernement dans tous les
sols et dans toutes les régions. S'il existe une nappe phréatique
abondante, dont le degré de salinité est plus grand que celui qui
peut être supporté par l'Eucalyptus, celui-ci donne des signes de
dépérissement lorsqu'il atteint cette nappe et finit par mourir. Si
la dose n'est pas trop forte, il peut se faire, comme nous l'avons vu
sur 100 ha à Kcébia que, là où YE. rostrata n'avait pas résisté,
d'autres espèces prospèrent (kirtoniana, robusta et bolryoides),
mais nous n'avons jamais constaté une remontée ou une
concentration du sel par les Eucalyptus. Elle se produirait si la nappe
elle-même remontait; or, elle baisse au contraire. S'il y avait
ascension du sel, ce ne pourrait être que dans les tissus de la plante.
Dans ce cas, il y aurait aussi consommation, donc élimination de
sel.
S'il s'agit de nappes superficielles qui se concentraient autrefois
dans les bas-fonds pendant la saison pluvieuse et dont la faible
salure s'augmentait progressivement par evaporation, au point de
rendre stérile le sol après assèchement, l'abaissement général du
plan d'eau par la Forêt a opéré un véritable drainage en
profondeur, ce qui a permis aux pluies d'entraîner les chlorures vers des
couches plus importantes et moins superficielles, où ils se sont
dilués. Les plantes spontanées annuelles n'ont pas tardé à
apparaître. Il arrive même que des bouquets d'E. rostrata et même
d'Acacia decurrens, s'y développent à leur tour, par semis naturels,
apportant ainsi la preuve définitive de la disparition du sel.
Nous conclurons qu'il n'y a lieu de craindre ni dégradation, ni
stérilisation du milieu par l'Eucalyptus. S'il se produit, à la longue,
un certain épuisement du sol en éléments nutritifs, ce qui n'est
pas encore prouvé, on se souviendra alors qu'il ne s'agit pas
d'une « Forêt spontanée », mais d'une « Culture Intensive » et
que, comme pour toutes les cultures, il convient de maintenir le
bon état biologique et la productivité du sol par des amendements
appropriés.

CONCLUSIONS
En dehors des E. rostrata, cladocalyx, gomphocephala et side-
roxylon, il ne serait pas prudent, dans l'état actuel de nos essais
— lesquels portent sur 125 espèces d'Eucalyptus réparties en 30 ha
— 352 —

de collections — de conseiller la plantation en grande surface


d'aucune des autres espèces.
Il y a lieu toutefois d'accorder une place aux E. botryoides,
kirtoniana et robusta dans les bas-fonds humides ou marécageux,
où les autres Eucalyptus ne réussiraient pas.
Par la sélection des formes naturelles dans les espèces choisies,
on obtiendra des plantations plus homogènes et à cycle
d'exploitation plus court.
Dans le même but, il sera bon de vérifier si l'irrigation et
l'application d'engrais à ces Eucalyptus seraient rentables.
Dans un ou deux ans, la mise au point de la culture de plusieurs
autres espèces récemment essayées sera probablement bien
avancée. Nous pourrons peut-être, grâce à elles, améliorer encore le
rendement annuel en matière ligneuse.
Actuellement, ce rendement, pour les espèces choisies, varie
entre 4 et 15 t de bois selon les terrains, avec une moyenne de
7 à 8 t à l'hectare.
Cette élude sera suivie plus tard d'un exposé sur la méthode de
plantation adoptée et d'un compte rendu des analyses de tanin,
essais de tannage et des expériences de fabrication de cellulose
et de papier. Ces essais, commencés en 1924 et poursuivis
jusqu'en 1952, ont porté sur des centaines d'échantillons et ont
contribué puissamment à éclairer notre route.
Nous devons signaler que, depuis 1945, de nombreuses
expériences ont été faites en collaboration avec M. Métro, Conservateur
des Eaux et Forêts, Chef de la Station de Recherches forestières à
Rabat.
De plus, M. Métro a pris dernièrement l'heureuse initiative de
faire dérouler, en vue de la production du contre-plaqué, les bois
de plusieurs espèces d'Eucalyptus. Il a obtenu d'excellents
résultats avec les E. globulus viminalis et rostrata.
Nous nous plaisons aussi à reconnaître l'esprit d'équipe qui
règne à l'intérieur même du Service des Eeaux et Forêts, sous la
direction bienveillante et éclairée de M. l'Inspecteur Général Gri-
maldi d'Esdra. Grâce à cela et à un dynamisme que beaucoup
de Services forestiers dans le Monde pourraient envier au Maroc,
un vaste programme de plantations d'Eucalyptus, commencé en
1938 dans les terres collectives des Ouled Rou Rhama à Sidi-Yahia
du Gharb, se développe en d'autres terres collectives de notre
région et dans les clairières de la forêt de la Mamora. Cette belle
œuvre administrative est venue à son heure pour permettre
l'établissement à Sidi-Yahia du Gharb d'une industrie de la Cellulose
que les plantations particulières n'eussent pas réussi à alimenter
de sitôt, étant donné les besoins en bois auxquels elles avaient
déjà à faire face.
Grâce à la collaboration féconde et aux efforts parallèles du
Service des Eaux et Forêts et des Particuliers, le programme des
Plantations dans les années qui vont suivre, atteindra 5 000 ha par
an de sorte que dans dix ans, la Forêt d'Eucalyptus du Gharb et de
Rabat, constituera une des principales richesses du Maroc.
Plantations forestières
aux environs immédiats ou dans un périmètre d
alentour de Sidi-Yahia du Gharb au 30
PLANTEURS Calmaldu- EUCALYPTUS-HECTARES

lensis
(rostrata) et Gompho- Sidero- Citri- Cla
algeriensis cephala xylon robusta odora- cal
Par les Eaux et Forêts
dans le Gharb
Plantations Domaniales 2 351 1899 105 114 — —
Plantations en terres collectives. 843 694 109 — - - —
Totaux 3 194 2 593 214 114 — —
Par les Membres de
VAssociation Forestière du Gharb (1)
Sté des Ets Ménager 2 000 110 200 100 50 2
(Sté et H. Ménager)
Société Africana 1 440 — 12 — — —
Sté des Plantations de Lalla Ito. 950 — — — — —
Sté Forest, de Kcéebia 100 154 75 — —
Société Sara 100 390 50 — — —
Sté Chérif. des Bois et Tanins... 350 50 65 — — —
Sté Les Agrumes Marocaines. ... 87 — — — — —
M. Reynès 227 — 3 — — —
Totaux 5 254 704 405 100 50 2
Par divers Particuliers
dans le Gharb
(chiffres approximatifs) 950 50 — — — —
Plantations totales du Gharb... 9 398 3 347 619 214 50 2
Plantations de la région de Rabat (1)
Domaniales 100 344 20 — — —
Collectives 12 22 — — — —
Sylvagrum (Ménager) 60 25 10 — — —
Sté Gazelle 60 50 — — ■-- —
Divers ...» 52 69 1 — — —
Totaux...... 284 510 31 — • — —
(1) II est à prévoir que les plantations dans cette région se développeront con
s'y trouve des milliers d'hectares favorables à l'Eucalyptus.
— 354 —

Au moment où cette Etude allait paraître, M. Ménager, de passage


en France, nous fait part des premiers résultats qu'il a déjà obtenus
en Gironde, nous croyons utile d'en donner connaissance à nos
lecteurs :
J'estime qu'il est encore trop tôt pour publier un compte rendu
de mes essais dans la Gironde, qui ont porté sur 170 espèces
forestières, depuis novembre 1948 (après mon retour d'Australie).
Néanmoins j'indique ci-après les résultats provisoires des cinq arbres
les plus vigoureux dans les espèces d'Eucalyptus et Conifères qui
ont résisté jusqu'à présent aux trois facteurs d'élimination : froid,
vent, humidité (1).

Espèce Croissance Espèce Croissance Espèce Croissance


Eucalyptus annuelle Pinus annuelle autres Conifères annuelle

Coccifera X Pinus insfignis 1 m Sequoia sempervtrens 0,70


Salici folia 1,72 — maritima 0,735 Juniperus virginiana 0,60
Sàlicifolia X — caribœa 0,628
Coccifera 1,68 — taeda 0,365 Cupressus lambertiana 0,60
Viminalis 1,60 — arizoïtica 0,56
Rostrata 1,50 Laricto des Cé-
Gunnii n° 1 1,47 vennes Larix europea 0,46
Moyenne 1,59 0,58

II est important de constater que ce sont deux hybrides de


Coccifera (petite espèce) qui tiennent la tête de cette liste. Le Coccifera
leur a conféré sa rusticité et le Sàlicifolia sa vigueur.
On peut conclure provisoirement que l'Eucalyptus pousse trois
fois plus vite que les Conifères pendant les premières années et
que le Pinus insignis pousse une fois et demie plus vite que le Pin
maritime. On voit les conséquences que cela pourrait avoir pour la
production de la cellulose. Mais sur 67 espèces d'Eucalyptus
essayées, 37 ont déjà été éliminées par les intempéries (froid, vent,
humidité). Parmi celles qui restent, très peu sont résistantes aux
trois facteurs à la fois. Une gelée anormale pourrait détruire la
plupart des espèces qui ont résisté jusqu'à ce jour. On ne pourra
conclure que dans trois ou quatre ans.

Principaux ouvrages consultés.


Navarro de Andrade. — Manual do Plantador de Eucalyptos. Sao-Paulo,
Brésil, 1911.
Noter R. de. — Les Eucalyptus. Paris, 1912.
Baker R. T. et Smith H. C. — Etude sur les Huiles essentielles des
Eucalyptus. Sydney, 1920.
Metcaff Woobridge. — La culture des Eucalyptus dans les plantations
californiennes (traduction sans date).
Kessel S. L. et Gardner C. A. — Key to the Eucalypts of Western
Australia. Perth (Western Australia), 1924.
Swain E. H. F. — The forest conditions of Queensland. Brisbane, 1928.
Ewart Alfred J. — Flora of Victoria. Melbourne, 1930.
Blakely F. E. — A key to the Eucalypts. Australie, 1934.
Green H. J. — The honey flora of Victoria. Melbourne, 1935.
(1) II est important de constater que ce sont deux hybrides de coccifera
(petite espèce) qui tiennent la tête de cette liste. Le coccifera leur a
conféré sa» rusticité et le sàlicifolia sa vigueur.
— 355 —

Brett R. G. — A survey of Eucalyptus species in Tasmania. Hobart,


1938.
Navarro de Andrade Edmundo. — O Eucalypto. Sao-Paulp, Brésil, 1939.
Beuzeville W. A. W. de. — The climatological basis of forestry. New-
South-Wales, Sydney, 1943.
Anderson R. H. — The trees of New-South-Wales. Sydney, 1947.
Boas I. H. — The Commercial Timbers of Australia. Their properties
and Uses. Melbourne, 1947.
Pourtet Jean. — Itinéraire forestier en Amérique du Nord. Nancy, 1949.
Métro A. — L'Ecologie de l'Eucalyptus. Son application au Maroc.
Rabat, 1949.
Ménager H. — Voyages d'études forestières et agricoles dans
l'Hémisphère S. Argentine et Brésil 1947, Australie et Tasmanie 1948. Bordeaux,
1950.
Chevalier Aug. — Travaux français sur le genre Eucalyptus. R. B. A.,
mars-avril 1952, p. 105-112.

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