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botanique appliquée et
d'agriculture tropicale
Ménager H. Les Eucalyptus dans le Gharb (Maroc occidental). In: Revue internationale de botanique appliquée et d'agriculture
tropicale, 32ᵉ année, bulletin n°357-358, Juillet-août 1952. pp. 309-355;
doi : https://doi.org/10.3406/jatba.1952.6513
https://www.persee.fr/doc/jatba_0370-5412_1952_num_32_357_6513
INTRODUCTION
Hauteur. — De 20 à 30 m.
Port. — Pyramidal ou érigé. Tronc droit ou légèrement tordu.
Diamètre. — De 30 à 80 cm.
Ecorce. — L'écorce vieille est liégeuse, épaisse, à sillons
irréguliers, traversée et parsemée de plus ou moins abondantes
exsudations, de résine kino riche en tanin, lequel en s'oxydant à l'air
devient noir, ce qui donne un aspect particulier au tronc.
Couleur du bois. — Sombre à noirâtre avec jolies veines plus
claires.
Densité au m3. — 1 070 kg en moyenne.
Feuilles de jeunesse. — Légèrement alternées (caractère distinc-
tif), fines, lancéolées mais à sommet peu acuminé, couleur vert
glauque sur les deux faces, de 5 à 8 cm de longueur et 1 à 2 cm de
largeur. Pétiole fin, court, de 5 à 7 mm de longueur, de couleur
claire ou rosée. Nervure médiane claire ou rosée, fine, apparente.
Nervures latérales serrées, irrégulières, apparentes. Nervure, les
reliant sur les bords du limbe, irrégulière, apparente.
Feuilles définitives. — Alternées, avec plusieurs formes sous-
variétales plus ou moins fines, lancéolées ou arquées, à lobes égaux
ou inégaux, couleur vert-glauque sur les deux faces, de 7 à 16 cm
de longueur et de 12 à 32 mm de largeur. Pétiole fin, cylindrique,
de couleur claire ou rosée. Nervures latérales serrées, irrégulières,
apparentes. Nervure, qui les relie sur les bords du limbe, apparente,
irrégulière.
Inflorescences. — Ombelle axillaire sur pédoncule cylindrique
de 10 à 20 mm de longueur. 3 à 7 boutons sur pédicelles de 5 a
10 mm.
Epoque de la floraison. — Janvier-février et septembre-décembre.
Couleur de la fleur. — De crème à rosée ou rouge plus ou moins
foncé, très ornemental.
Forme de l'opercule. — Conique, acuminé, moins long et moins
large que le calice.
Forme de la capsule. — De globulaire à pyriforme ou légèrement
urnigérée, plus ou moins grosse. Il existe en Australie une variété
macrocarpa (gros fruits). Hauteur de 8 à 12 mm, largeur de 4 à
8 mm, valves profondément encloses.
Graines. — Grosseur moyenne.
Observations particulières. — L'E. sideroxylon en Australie et
dans nos plantations constitue une véritable population à formes
diverses. En Australie, on distingue les formes « grey life » (feuilles
grises), « pale life », et « pallens » variété macrocarpa. Nous avons
vu que les fleurs diffèrent aussi dans leur couleur. La forme des
frondaisons change également, les rameaux étant plus ou moins
pleureurs. Une sélection s'impose.
Conclusions comparées
Espèce Angles Angles Angles
ANDERSON vérifiés ANDERSON vérifiés
amplifolia 20 à 60° 34°, 44°, 46° aigu à obtus
aigu à droit
astringens — 43°, 44°, 44° droit
bicostata 30 à 45° 24°, 32°, 39° aigu à droit
aigu
botryoides 40 à 60° 52°, 59°, 58° droit à obtus
obtus
camaldulensis .... 30 à 60° 37°, 42°, 49° aigu à obtus
aigu à droit
citriodora — 36°, 48°, 56° aigu à obtus
cladocalyx — 36°, 41°, 43° aigu à droit
diversicolor — 48°, 51°, 59° droit à obtus
globulus — 25°, 32°, 36° aigu
gomphocephala ... — 30° 38°, 49° aigu à droit
kirtoniana 35 à 55° 53°, 56°, 59° aigu à obtus obtus
leucoxylon 20 à 40° 28°, 35°, 44° aigu à droit aigu à droii
macarthuri 20 à 40° 36°, 39°, 43° aigu à droit aigu à droit
maculata 45 à 60° 48°, 53°, 62° droit à obtus droit à obtus
maideni 20 à 40° 42°, 49°, 56° aigu à droit droit à obtus
occidentalis — 34°, 35°, 39° aigu
robusta 40 à 60° 56°, 58°, 66° droit à obtus obtus
saligna 40 à 60° 56°, 57°, 68° droit à obtus obtus
sideroxylon —- 29°, 31°, 32° aigu
tereticcrnis 15 à 40° 40°, 47°, 58° aigu à droit droit à obtus
viminalis 30 à 50° 29°, 37°, 38° aigu à droit aigu
On voit que, si les différences sont moins grandes, la tendance
des inclinaisons est à peu près la même. Par exemple :
amplifolia est peu aigu et souvent droit ou obtus;
bicostata ne dépasse pas l'angle droit;
botryoides n'est pas aigu et tend à être obtus;
camaldulensis n'est jamais très aigu, ni très obtus et plutôt droit;
kirtoniana, jamais très aigu, est plutôt droit ou obtus;
leucoxylon est toujours aigu à droit, etc..
Ces indications peuvent donc être d'une certaine utilité pour
différencier les espèces.
V. POLYMORPHISME
SELECTION NATURELLE ET SELECTION ARTIFICIELLE
VI. HYBRIDATION
Les espèces d'Eucalyptus ne fleurissent pas toutes en même
temps. Certains croisements naturels sont donc impossibles. Baker
et Smith ont écrit dans leur « Etude sur les Eucalyptus »„ 1920 :
« L'hybridation naturelle dans l'Eucalyptus représente peut-être
une explication plausible pour rétablissement de certaines espèces
qui présentent des affinités des deux côtés. Les organes de
reproduction chez l'Eucalyptus sont cependant protégés par un
opercule et, dans plusieurs cas, des grains de pollen ont été trouvés
adhérents au stigmate avant la chute de cet opercule... »
F. von Mueller ne considérait pas l'hybridation comme
impossible mais il a écrit qu'elle ne « semblait pas expliquer l'origine de
toutes les formes égarées dans une espèce où l'opercule protège
contre le croisement » (on pourrait dire tout aussi bien que le
bouton protège la fleur avant son épanouissement. Il est visible,
lorsque l'opercule tombe, que les étamines ne s'étalent pas
instantanément et que le pollen ne semble pas tout à fait parvenu à son
point de maturité).
Plus tard, le Dr Trabut a reconnu, dénommé et décrit plusieurs
hybrides d'Eucalyptus en Algérie.
En 1937, le Profr de Botanique R. G. Brett, de l'Université de
Hobart a, dans une étude sur les Espèces d'Eucalyptus en Tasma-
nie, indiqué les affinités de chacune d'elles pour une ou plusieurs
autres espèces et les hybrides qui en résultent. Nous l'avons vu en
1948. Il nous a montré au Mont Wellington près de Hobart et dans
ses herbiers de multiples formes de divers Eucalyptus, qu'il
considère comme des hybrides à parents bien déterminés.
En 1949, M. Crane, directeur du Département Forestier de
Hobart, m'a envoyé des graines des cinq hybrides reconnus par
M. Martin du C.S.I.R. (Service des Recherches Industrielles,
Agricoles et Forestières de Tasmanie) :
E. salicifolia X coccifera, du Mont Arrowsmith, altitude 900 m.
E. coccifera X salifolia, de King William Sadle altitude 750 m.
E. pauciflora X coccifera, de Miena, Great Lake, altitude 1 000 m.
E. pauciflora X salifolia, de Derwent Bridge, altitude 720 m.
E. salicifolia X gigantea, de Trial Harbour Read, altitude 240 m.
Seul le dernier, provenant de deux grandes espèces vivant à une
faible altitude, a bien réussi dans ma Collection marocaine. Dans
celle des Landes de Gascogne les trois premiers ont fait preuve
d'une grande résistance au froid et sont vigoureux. Deux d'entre
eux n'ont pas montré jusqu'à présent de grandes variations dans
leur forme, mais ils n'ont pas encore fructifié.
Enfin, en France même, le Prof Chevalier a déterminé à
Cherbourg un hybride d'Eucalyptus qu'il a nommé E. favieri, en
l'honneur de M. Favier, président de la Société des Sciences Naturelles
de Cherbourg, qui possède un certain nombre d'espèces
d'Eucalyptus vivant en plein air dans son parc de la Fauconnerie.
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argilo-siliceux coupe.
silico-argileux
viminalis siliceux 0 à 1 200 1 000 500 craint la sécheresse, aime
silico-argileux les terres profondes,
argileux fraîches et saines. Rejette après
gréseux la coupe. Observation à
granitiques -vérifier et compléter.
basaltiques
Rev. de Bot. Appl. 24
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Proportion
% de Principal
Eucalyptus feuilles composant Usage Observations
amplifolia 0,90 cinéol, pinène et non exploité feuilles
aromadendral
astringens 0,95 — non exploité feuilles
bicostata 0,92 cinéol et pinène médicinal feuilles, peut-être
exploité comme le glo.
bulus
botryoides 0,11 pinène non exploité feuilles
camaldulensis .... 0,27 cinéol, pinène et non exploité feuilles
aromadendral
citriodora 0,60 à 1 citronellal parfumerie feuilles, très exploité en
Australie
cladocalyx 0,10 pinène et cinéol non exploité feuilles
diversicolor ....... 0,80 pinène médicinal feuilles
globulus 0,92 cinéol et pinène médicinal feuilles, très exploité au
Portugal et en Es-
> pagne
gomphocephala . . . 0,03 phellandrène et non exploité feuilles
piperitone
kirtoniana 0,26 pinène non exploité feuilles
leucoxylon 2 à 2,5 pinène et cinéol médicinal feuilles
macarthuri 0,21 eusdémol et ge- parfumerie feuilles et écorces très
raniol exploité en Australie
maculata 0,23 pinène et cinéol parfumerie feuilles, peu exploité
médicinal
maideni 1 pinène et cinéol médicinal feuilles, peu exploité
occidentalis 0,95 cinéol, pinène et pas exploité feuilles
aromadendral
robusta 0,16 pinène pas exploité feuilles
saligna 0,12 pinène pas exploité feuilles
sideroxylon 0,60 pinène et cinéol médicinal feuilles, très exploité en
Australie
tereticornis 0,50 cinéol, pinène et médicinal feuilles, peu ou pas
aromadendral exploité
viminalis 0,55 pinène et cinéol médicinal feuilles, peu ou pas
.exploité
On voit que, sauf pendant le mois d'août, encore n'est-ce pas certain,
il existe toujours des fleurs d'Eucalyptus dans lés espèces les plus
cultivées : camaldulensis, citriodora, cladocalyx, gomphocephala et
sideroxylon. La floraison des plantes annuelles se trouve donc à la
fois devancée et prolongée par la floraison des Eucalyptus. Des
stocks inépuisables de nectar et de pollen sont ainsi rais à la
disposition des abeilles à des époques où, autrefois, elles vivaient sur
leurs réserves. Il en est résulté un accroissement considérable de
la production du miel. Celle-ci est encore loin d'atteindre toutes
ses possibilités car les planteurs qui ont installé des ruchers sont
encore rares et les Eucalyptus s'étendent chaque année sur des
milliers d'hectares nouveaux.
500 mm par an, de laisser concurrencer les jeunes arbres par les
mauvaises herbes. Je fus amené rapidement à constater que, parmi
les espèces à feuilles persistantes essayées, plusieurs
Acacias-Mimosas et Eucalyptus et le Grevillea robusta arrivaient à éliminer
seules les plantes adventives pourvu que l'on pratiquât des labours
de défrichement avant la plantation et des binages d'entretien pen-
dans 2 ou 3 ans.
Quelques années plus tard* je m'aperçus de la présence du tanin
dans les écorces et d'une source abondante de cellulose dans le
bois d'un certain nombre d'espèces essayées. J'eus alors recours à
des laboratoires officiels ou privés.
Dans cette recherche, qui a été commencée en 1924 et a porté
sur des centaines d'échantillons prélevés dans mes propres
plantations d'abord ou dans celles de la Société des Etablissement
Ménager ensuite, j'ai eu recours aux organisations suivantes :
Pour le tanin : Laboratoire Officiel de Chimie Agricole de
Casablanca (1924); Laboratoire Progil à Lyon-Vayse (1925 et depuis);
Laboratoire des Tanins Rey à Couze (1925 et depuis); Laboratoire
Charles Monnet à Paris (1927 et depuis); Ecole de Tannerie et
Institut de Recherches pour le Cuir à Lyon sous la Direction de
M. le Profr Chambard (1946 et depuis).
Pour la cellulose : Ecole de Papeterie de Grenoble, sous la
Direction des Prof" Vidal et Aribert (1928-1931); Institut du Pin de
Bordeaux, sous la Direction du Prof1" Dupont (aujourd'hui
directeur de l'Ecole Normale Supérieure (1928-1931) ; Laboratoire Progil
à Lyon-Vayse (depuis 1949).
Pour l'huile essentielle : Laboratoire de l'Ecole Normale
Supérieure, Paris (1949).
D'autre part, ce sont incontestablement des capitaux en majorité
français qui ont permis le développement des plantations. Pour
créer des débouchés il faut, en effet, une certaine surface. Or les
essais furent commencés avec plus de foi que de moyens financiers,
sans le secours de l'Etat.
C'est pourquoi les premiers Planteurs fondèrent les Sociétés de
plantation suivantes :
M. Bouvier, la Société des Plantations de Lalla Ito, avec le
groupe financier Mirabeau de Paris comme principal actionnaire;
M. Giraud et le Général Laboria, la Société du domaine des Dou-
aghers, avec les Etablissements Gondolo de Nantes (Extraits
tannants), comme principal bailleur de fonds; cette Société devait
vendre par la suite son domaine à la Société forestière de Kcébia;
M. Jean de Lombardon, la Société forestière de Kcébia, avec
MM. Desbenoit, tanneurs à Roanne et plusieurs de leurs amis;
MM. Rageot, la S.A.R.A., avec la Société des Matières tannantes de
Paris et, plus tard, les Tanins Rey de Paris; M. le Banquier Prou-
vost de Paris, la Société Africana, avec la Banque de Bruxelles
comme co-actionnaire; M, Georges Carle, la Société « Les Agrumes
Marocaines », avec M. Deneck, industriel à Arras; M. Charles
Monnet, chimiste et industriel à Paris, la Société chérifienne des Bois
et Tanins Coloniaux, avec d'autres Industriels fabricants d'extraits
tannants et la Banque Worms; je fis appel moi-même dès 1924, aux
Etablissement Gillet de Lyon, aux Tanins Rey de Paris et à mon
regretté ami Georges Carle.
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XL METHODE DE PLANTATION
Après avoir étudié comparativement différents systèmes, la mise
au point de la méthode de plantation nous a demandé 5 années, de
1918 à 1923. Elle consiste à planter avec leur substratum de terreau,
sur terrain soigneusement défriché et labouré, des arbres élevés en
pots pendant 6 mois à 1 an. Les écartements varient selon les
terrains et les planteurs entre 2 X 2, 3 X 3, 4 X 2 et 4 X 4 m. La
plantation est entretenue par des binages au cover-crop, afin de
détruire la végétation adventice qui absorberait l'humidité et les
éléments nutritifs du soi au détriment de l'arbre. Ensuite, celui-ci,
ayant pris possession du sol, assure lui-même cette elimination.
Les Planteurs qui se sont écartés de cette méthode au début, ont
dû finalement l'adopter, soit parce qu'ils n'avaient pas réussi leurs
plantations, soit parce que celles-ci, remplacées plusieurs fois, leur
revenaient trop cher.
Appliquée d'emblée par plusieurs Sociétés de Plantation de 1923
à 1925, notre méthode n'a été consacrée officiellement qu'en 1926
par une Commission qui comprenait : Le Secrétaire de Son
Eminence le Grand Vizir, deux Caïds de notre région, MM. Malet,
directeur de l'Agriculture, Boudy, directeur des Eaux et Forêts,
T3ey-Rozet, chef du Service de l'Arboriculture Fruitière,
Commandant Noël, Chef du Service des Collectivités. Jusque-là,
l'Administration n'avait pas eu confiance dans la rentabilité des plantations
cultivées. Devant les résultats obtenus, ces préventions furent
levées et il fut décidé qu'un lotissement nouveau serait créé par
location à long terme de terres collectives avec obligation pour
les attributaires d'en planter les 2/3 en Eucalyptus ou en Mimosas.
Depuis, les Collectivités et les Eaux et Forêts ont entrepris un
grand programme de plantation d'Eucalyptus en appliquant la
méthode qui a assuré la réussite des plantations particulières.
CONCLUSIONS
En dehors des E. rostrata, cladocalyx, gomphocephala et side-
roxylon, il ne serait pas prudent, dans l'état actuel de nos essais
— lesquels portent sur 125 espèces d'Eucalyptus réparties en 30 ha
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