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I.

Traitement des détenus


1. Ensemble de règles minima pour le traitement des détenus*

OBSERVATIONS PRÉLIMINAIRES

1. Les règles suivantes n’ont pas pour objet de décrire en détail un système
pénitentiaire modèle. Elles ne visent qu’à établir, en s’inspirant des
conceptions généralement admises de nos jours et des éléments essentiels des
systèmes contemporains les plus adéquats, les principes et les règles d’une
bonne organisation pénitentiaire et de la pratique du traitement des détenus.

2. Il est évident que toutes les règles ne peuvent pas être appliquées en tout
lieu et en tout temps, étant donné la grande variété de conditions juridiques,
sociales, économiques et géographiques que l’on rencontre dans le monde.
Elles devraient cependant servir à stimuler l’effort constant visant à leur
application, en ayant à l’esprit le fait qu’elles représentent, dans leur
ensemble, les conditions minima qui sont admises par les Nations Unies.

3. D’autre part, ces règles se rapportent à des domaines dans lesquels la


pensée est en évolution constante. Elles ne tendent pas à exclure la possibilité
d’expériences et de pratiques, pourvu que celles-ci soient en accord avec les
principes et les objectifs qui se dégagent du texte de l’Ensemble de règles.
Dans cet esprit, l’administration pénitentiaire centrale sera toujours fondée à
autoriser des exceptions aux règles.

4. 1) La première partie de l’Ensemble de règles traite des règles


concernant l’administration générale des établissements pénitentiaires et est
applicable à toutes les catégories de détenus, criminels ou civils, prévenus ou
condamnés, y compris les détenus, faisait l’objet d’une mesure de sûreté ou
d’une mesure rééducative ordonnée par le juge.

2) La deuxième partie contient des règles qui ne sont applicables


qu’aux catégories de détenus visés par chaque section. Toutefois, les règles de

____________
*Premier Congrès des Nations Unies pour la prévention du crime et le traitement des délinquants,
Genève, 22 août-3 septembre 1955: rapport établi par le Secrétariat (publication des Nations Unies,
numéro de vente: 1956.IV.4), annexe I.A; amendé par le Conseil économique et social dans sa résolution
2076 (LXII) (ajout de la section E, intitulée “Personnes arrêtées ou incarcérées sans avoir été inculpées”).

3
4 Recueil des règles et normes de l’Organisation des Nations Unies en matière de prévention du crime et de justice pénale

la section A, applicables aux détenus condamnés, seront également applicables


aux catégories de détenus visés dans les sections B, C et D, pourvu qu’elles ne
soient pas contradictoires avec les règles qui les régissent et à condition
qu’elles soient profitables à ces détenus.

5. 1) Ces règles n’ont pas pour dessein de déterminer l’organisation des


établissements pour jeunes délinquants (établissements Borstal, instituts de
rééducation, etc.). Cependant, d’une façon générale, la première partie de
l’Ensemble de règles peut être considérée comme applicable également à ces
établissements.

2) La catégorie des jeunes détenus doit comprendre en tout cas les


mineurs qui relèvent des juridictions pour enfants. En règle générale, ces
jeunes délinquants ne devraient pas être condamnés à des peines de prison.

PREMIÈRE PARTIE
RÈGLES D’APPLICATION GÉNÉRALE

Principe fondamental

6. 1) Les règles qui suivent doivent être appliquées impartialement. Il ne


doit pas être fait de différence de traitement basée sur un préjugé, notamment
de race, de couleur, de sexe, de langue, de religion, d’opinion politique ou de
toute autre opinion, d’origine nationale ou sociale, de fortune, de naissance ou
de toute autre situation.

2) Par contre, il importe de respecter les croyances religieuses et les


préceptes moraux du groupe auquel le détenu appartient.

Registre

7. 1) Dans tout endroit où des personnes sont détenues, il faut tenir à jour
un registre relié et coté indiquant pour chaque détenu:
a) Son identité;
b) Les motifs de sa détention et l’autorité compétente qui l’a décidée;
c) Le jour et l’heure de l’admission et de la sortie.

2) Aucune personne ne peut être admise dans un établissement sans un


titre de détention valable, dont les détails auront été consignés auparavant
dans le registre.
Première partie, chapitre premier. Traitement des détenus 5

Séparation des catégories

8. Les différentes catégories de détenus doivent être placées dans des


établissements ou quartiers d’établissements distincts, en tenant compte de
leur sexe, de leur âge, de leurs antécédents, des motifs de leur détention et des
exigences de leur traitement. C’est ainsi que:

a) Les hommes et les femmes doivent être détenus dans la mesure du


possible dans des établissements différents; dans un établissement recevant à
la fois des hommes et des femmes, l’ensemble des locaux destinés aux
femmes doit être entièrement séparé;

b) Les détenus en prévention doivent être séparés des condamnés;

c) Les personnes emprisonnées pour dettes ou condamnées à une autre


forme d’emprisonnement civil doivent être séparées des détenus pour
infraction pénale;

d) Les jeunes détenus doivent être séparés des adultes.

Locaux de détention

9. 1) Les cellules ou chambres destinées à l’isolement nocturne ne


doivent être occupées que par un seul détenu. Si pour des raisons spéciales,
telles qu’un encombrement temporaire, il devient nécessaire pour
l’administration pénitentiaire centrale de faire des exceptions à cette règle, on
devra éviter de loger deux détenus par cellule ou chambre individuelle.

2) Lorsqu’on recourt à des dortoirs, ceux-ci doivent être occupés par


des détenus soigneusement sélectionnés et reconnus aptes à être logés dans ces
conditions. La nuit, ils seront soumis à une surveillance régulière, adaptée au
type d’établissement considéré.

10. Les locaux de détention et, en particulier, ceux qui sont destinés au
logement des détenus pendant la nuit, doivent répondre aux exigences de
l’hygiène, compte tenu du climat, notamment en ce qui concerne le cubage
d’air, la surface minimum, l’éclairage, le chauffage et la ventilation.

11. Dans tout local où les détenus doivent vivre ou travailler,

a) Les fenêtres doivent être suffisamment grandes pour que le détenu


puisse lire et travailler à la lumière naturelle; l’agencement de ces fenêtres
doit permettre l’entrée d’air frais, et ceci qu’il y ait ou non une ventilation
artificielle;
6 Recueil des règles et normes de l’Organisation des Nations Unies en matière de prévention du crime et de justice pénale

b) La lumière artificielle doit être suffisante pour permettre au détenu


de lire ou de travailler sans altérer sa vue.

12. Les installations sanitaires doivent permettre au détenu de satisfaire aux


besoins naturels au moment voulu, d’une manière propre et décente.

13. Les installations de bain et de douche doivent être suffisantes pour que
chaque détenu puisse être mis à même et tenu de les utiliser, à une température
adaptée au climat et aussi fréquemment que l’exige l’hygiène générale selon la
saison et la région géographique, mais au moins une fois par semaine sous un
climat tempéré.

14. Tous les locaux fréquentés régulièrement par les détenus doivent être
maintenus en parfait état d’entretien et de propreté.

Hygiène personnelle

15. On doit exiger des détenus la propreté personnelle; à cet effet, ils doivent
disposer d’eau et des articles de toilette nécessaires à leur santé et à leur
propreté.

16. Afin de permettre aux détenus de se présenter de façon convenable et de


conserver le respect d’eux-mêmes, des facilités doivent être prévues pour le
bon entretien de la chevelure et de la barbe; les hommes doivent pouvoir se
raser régulièrement.

Vêtements et literie

17. 1) Tout détenu qui n’est pas autorisé à porter ses vêtements personnels
doit recevoir un trousseau qui soit approprié au climat et suffisant pour le
maintenir en bonne santé. Ces vêtements ne doivent en aucune manière être
dégradants ou humiliants.

2) Tous les vêtements doivent être propres et maintenus en bon état.


Les sous-vêtements doivent être changés et lavés aussi fréquemment qu’il est
nécessaire pour le maintien de l’hygiène.

3) Dans des circonstances exceptionnelles, quand le détenu s’éloigne


de l’établissement à des fins autorisées, il doit lui être permis de porter ses
vêtements personnels ou des vêtements n’attirant pas l’attention.

18. Lorsque les détenus sont autorisés à porter leurs vêtements personnels,
des dispositions doivent être prises au moment de l’admission à
l’établissement pour assurer que ceux-ci soient propres et utilisables.
Première partie, chapitre premier. Traitement des détenus 7

19. Chaque détenu doit disposer, en conformité des usages locaux ou


nationaux, d’un lit individuel et d’une literie individuelle suffisante,
entretenue convenablement et renouvelée de façon à en assurer la propreté.

Alimentation

20. 1) Tout détenu doit recevoir de l’administration aux heures usuelles


une alimentation de bonne qualité, bien préparée et servie, ayant une valeur
nutritive suffisant au maintien de sa santé et de ses forces.

2) Chaque détenu doit avoir la possibilité de se pourvoir d’eau potable


lorsqu’il en a besoin.

Exercice physique

21. 1) Chaque détenu qui n’est pas occupé à un travail en plein air doit
avoir, si le temps le permet, une heure au moins par jour d’exercice physique
approprié en plein air.

2) Les jeunes détenus et les autres détenus dont l’âge et la condition


physique le permettent doivent recevoir pendant la période réservée à
l’exercice une éducation physique et récréative. À cet effet, le terrain, les
installations et l’équipement devraient être mis à leur disposition.

Services médicaux

22. 1) Chaque établissement pénitentiaire doit disposer au moins des


services d’un médecin qualifié, qui devrait avoir des connaissances en
psychiatrie. Les services médicaux devraient être organisés en relation étroite
avec l’administration générale du service de santé de la communauté ou de la
nation. Ils doivent comprendre un service psychiatrique pour le diagnostic et,
s’il y a lieu, le traitement des cas d’anomalie mentale.

2) Pour les malades qui ont besoin de soins spéciaux, il faut prévoir le
transfert vers des établissements pénitentiaires spécialisés ou vers des
hôpitaux civils. Lorsque le traitement hospitalier est organisé dans
l’établissement, celui-ci doit être pourvu d’un matériel, d’un outillage et des
produits pharmaceutiques permettant de donner les soins et le traitement
convenables aux détenus malades, et le personnel doit avoir une formation
professionnelle suffisante.

3) Tout détenu doit pouvoir bénéficier des soins d’un dentiste qualifié.
8 Recueil des règles et normes de l’Organisation des Nations Unies en matière de prévention du crime et de justice pénale

23. 1) Dans les établissements pour femmes, il doit y avoir les installations
spéciales nécessaires pour le traitement des femmes enceintes, relevant de
couches et convalescentes. Dans toute la mesure du possible, des dispositions
doivent être prises pour que l’accouchement ait lieu dans un hôpital civil. Si
l’enfant est né en prison, il importe que l’acte de naissance n’en fasse pas
mention.

2) Lorsqu’il est permis aux mères détenues de conserver leurs


nourrissons, des dispositions doivent être prises pour organiser une crèche,
dotée d’un personnel qualifié, où les nourrissons seront placés durant les
moments où ils ne sont pas laissés aux soins de leurs mères.

24. Le médecin doit examiner chaque détenu aussitôt que possible après son
admission et aussi souvent que cela est nécessaire ultérieurement,
particulièrement en vue de déceler l’existence possible d’une maladie
physique ou mentale, et de prendre toutes les mesures nécessaires; d’assurer la
séparation des détenus suspects d’être atteints de maladies infectieuses ou
contagieuses; de relever les déficiences physiques ou mentales qui pourraient
être un obstacle au reclassement et de déterminer la capacité physique de
travail de chaque détenu.

25. 1) Le médecin est chargé de surveiller la santé physique et mentale des


détenus. Il devrait voir chaque jour tous les détenus malades, tous ceux qui se
plaignent d’être malades, et tous ceux sur lesquels son attention est
particulièrement attirée.

2) Le médecin doit présenter un rapport au directeur chaque fois qu’il


estime que la santé physique ou mentale d’un détenu a été ou sera affectée par
la prolongation ou par une modalité quelconque de la détention.

26. 1) Le médecin doit faire des inspections régulières et conseiller le


directeur en ce qui concerne:
a) La quantité, la qualité, la préparation et la distribution des aliments;
b) L’hygiène et la propreté de l’établissement et des détenus;
c) Les installations sanitaires, le chauffage, l’éclairage et la ventilation
de l’établissement;
d) La qualité et la propreté des vêtements et de la literie des détenus;
e) L’observation des règles concernant l’éducation physique et
sportive, lorsque celle-ci est organisée par un personnel non spécialisé.

2) Le directeur doit prendre en considération les rapports et conseils du


médecin visés aux règles 25, paragraphe 2, et 26 et, en cas d’accord, prendre
immédiatement les mesures voulues pour que ses recommandations soient
Première partie, chapitre premier. Traitement des détenus 9

suivies; en cas de désaccord ou si la matière n’est pas de sa compétence, il


transmettra immédiatement le rapport médical et ses propres commentaires à
l’autorité supérieure.

Discipline et punitions

27. L’ordre et la discipline doivent être maintenus avec fermeté, mais sans
apporter plus de restrictions qu’il n’est nécessaire pour le maintien de la
sécurité et d’une vie communautaire bien organisée.

28. 1) Aucun détenu ne pourra remplir dans les services de l’établissement


un emploi comportant un pouvoir disciplinaire.

2) Cette règle ne saurait toutefois faire obstacle au bon fonctionnement


des systèmes à base de self-government. Ces systèmes impliquent en effet que
certaines activités ou responsabilités d’ordre social, éducatif ou sportif soient
confiées, sous contrôle, à des détenus groupés en vue de leur traitement.

29. Les points suivants doivent toujours être déterminés soit par la loi, soit
par un règlement de l’autorité administrative compétente:
a) La conduite qui constitue une infraction disciplinaire;
b) Le genre et la durée des sanctions disciplinaires qui peuvent être
infligées;
c) L’autorité compétente pour prononcer ces sanctions.

30. 1) Aucun détenu ne peut être puni que conformément aux dispositions
d’une telle loi ou d’un tel règlement, et jamais deux fois pour la même
infraction.

2) Aucun détenu ne peut être puni sans être informé de l’infraction


qu’on lui reproche et sans qu’il ait eu l’occasion de présenter sa défense.
L’autorité compétente doit procéder à un examen complet du cas.

3) Dans la mesure où cela est nécessaire et réalisable, il faut permettre


au détenu de présenter sa défense par l’intermédiaire d’un interprète.

31. Les peines corporelles, la mise au cachot obscur ainsi que toute sanction
cruelle, inhumaine ou dégradante doivent être complètement défendues
comme sanctions disciplinaires.

32. 1) Les peines de l’isolement et de la réduction de nourriture ne peuvent


jamais être infligées sans que le médecin ait examiné le détenu et certifié par
écrit que celui-ci est capable de les supporter.
10 Recueil des règles et normes de l’Organisation des Nations Unies en matière de prévention du crime et de justice pénale

2) Il en est de même pour toutes autres mesures punitives qui


risqueraient d’altérer la santé physique ou mentale des détenus. En tout cas, de
telles mesures ne devront jamais être contraires au principe posé par la règle
31, ni s’en écarter.

3) Le médecin doit visiter tous les jours les détenus qui subissent de
telles sanctions disciplinaires et doit faire rapport au directeur s’il estime
nécessaire de terminer ou modifier la sanction pour des raisons de santé
physique ou mentale.

Moyens de contrainte

33. Les instruments de contrainte tels que menottes, chaînes, fers et


camisoles de force ne doivent jamais être appliqués en tant que sanctions. Les
chaînes et les fers ne doivent pas non plus être utilisés en tant que moyens de
contrainte. Les autres instruments de contrainte ne peuvent être utilisés que
dans les cas suivants:
a) Par mesure de précaution contre une évasion pendant un
transfèrement, pourvu qu’ils soient enlevés dès que le détenu comparaît
devant une autorité judiciaire ou administrative;
b) Pour des raisons médicales sur indication du médecin;
c) Sur ordre du directeur, si les autres moyens de maîtriser un détenu
ont échoué, afin de l’empêcher de porter préjudice à lui-même ou à autrui ou
de causer des dégâts; dans ce cas, le directeur doit consulter d’urgence le
médecin et faire rapport à l’autorité administrative supérieure.

34. Le modèle et le mode d’emploi des instruments de contrainte doivent être


déterminés par l’administration pénitentiaire centrale. Leur application ne doit
pas être prolongée au-delà du temps strictement nécessaire.

Information et droit de plainte des détenus

35. 1) Lors de son admission, chaque détenu doit recevoir des informations
écrites au sujet du régime des détenus de sa catégorie, des règles disciplinaires
de l’établissement, des moyens autorisés pour obtenir des renseignements et
formuler des plaintes, et de tous autres points qui peuvent être nécessaires
pour lui permettre de connaître ses droits et ses obligations et de s’adapter à la
vie de l’établissement.

2) Si le détenu est illettré, ces informations doivent lui être fournies


oralement.
Première partie, chapitre premier. Traitement des détenus 11

36. 1) Tout détenu doit avoir chaque jour ouvrable l’occasion de présenter
des requêtes et des plaintes au directeur de l’établissement ou au fonctionnaire
autorisé à le représenter.

2) Des requêtes ou plaintes pourront être présentées à l’inspecteur des


prisons au cours d’une inspection. Le détenu pourra s’entretenir avec
l’inspecteur ou tout autre fonctionnaire chargé d’inspecter hors la présence du
directeur ou des autres membres du personnel de l’établissement.

3) Tout détenu doit être autorisé à adresser, sans censure quant au fond
mais en due forme, une requête ou plainte à l’administration pénitentiaire
centrale, à l’autorité judiciaire ou à d’autres autorités compétentes, par la voie
prescrite.

4) À moins qu’une requête ou plainte soit de toute évidence téméraire


ou dénuée de fondement, elle doit être examinée sans retard et une réponse
donnée au détenu en temps utile.

Contact avec le monde extérieur

37. Les détenus doivent être autorisés, sous la surveillance nécessaire, à


communiquer avec leur famille et ceux de leurs amis auxquels on peut faire
confiance, à intervalles réguliers tant par correspondance qu’en recevant des
visites.

38. 1) Des facilités raisonnables pour communiquer avec leurs


représentants diplomatiques et consulaires doivent être accordées aux détenus
ressortissants d’un pays étranger.

2) En ce qui concerne les détenus ressortissants des États qui n’ont pas
de représentants diplomatiques ou consulaires dans le pays ainsi que les
réfugiés et les apatrides, les mêmes facilités doivent leur être accordées de
s’adresser au représentant diplomatique de l’État qui est chargé de leurs
intérêts ou à toute autorité nationale ou internationale qui a pour tâche de les
protéger.

39. Les détenus doivent être tenus régulièrement au courant des événements
les plus importants, soit par la lecture de journaux quotidiens, de périodiques
ou de publications pénitentiaires spéciales, soit par des émissions
radiophoniques, des conférences ou tout autre moyen analogue, autorisés ou
contrôlés par l’administration.
12 Recueil des règles et normes de l’Organisation des Nations Unies en matière de prévention du crime et de justice pénale

Bibliothèque

40. Chaque établissement doit avoir une bibliothèque à l’usage de toutes les
catégories de détenus et suffisamment pourvue de livres instructifs et
récréatifs. Les détenus doivent être encouragés à l’utiliser le plus possible.

Religion

41. 1) Si l’établissement contient un nombre suffisant de détenus


appartenant à la même religion, un représentant qualifié de cette religion doit
être nommé ou agréé. Lorsque le nombre de détenus le justifie et que les
circonstances le permettent, l’arrangement devrait être prévu à plein temps.

2) Le représentant qualifié, nommé et agréé selon le paragraphe 1, doit


être autorisé à organiser périodiquement des services religieux et à faire,
chaque fois qu’il est indiqué, des visites pastorales en particulier aux détenus
de sa religion.

3) Le droit d’entrer en contact avec un représentant qualifié d’une


religion ne doit jamais être refusé à aucun détenu. Par contre, si un détenu
s’oppose à la visite d’un représentant d’une religion, il faut pleinement
respecter son attitude.

42. Chaque détenu doit être autorisé, dans la mesure du possible, à satisfaire
aux exigences de sa vie religieuse, en participant aux services organisés dans
l’établissement et en ayant en sa possession des livres d’édification et
d’instruction religieuse de sa confession.

Dépôt des objets appartenant aux détenus

43. 1) Lorsque le règlement n’autorise pas le détenu à conserver en sa


possession l’argent, les objets de valeur, vêtements et autres effets qui lui
appartiennent, ceux-ci doivent être placés en lieu sûr, lors de son admission à
l’établissement. Un inventaire de ces objets doit être dressé et il doit être signé
par le détenu. Des mesures doivent être prises pour conserver ces objets en
bon état.

2) Ces objets et l’argent doivent lui être rendus à sa libération, à


l’exception de l’argent qu’il a été autorisé à dépenser, des objets qu’il a pu
envoyer à l’extérieur ou des vêtements qui ont dû être détruits par raison
d’hygiène. Le détenu doit donner décharge des objets et de l’argent qui lui ont
été restitués.
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3) Les valeurs ou objets envoyés de l’extérieur au détenu sont soumis


aux mêmes règles.

4) Si le détenu est porteur de médicaments ou de stupéfiants au


moment de son admission, le médecin décidera de l’usage à en faire.

Notification de décès, maladie, transfèrement, etc.

44. 1) En cas de décès ou de maladie grave, d’accident grave ou de


placement du détenu dans un établissement pour malades mentaux, le
directeur doit en informer immédiatement le conjoint si le détenu est marié, ou
le parent le plus proche et en tout cas toute autre personne que le détenu a
demandé d’informer.

2) Un détenu doit être informé immédiatement du décès ou de la


maladie grave d’un proche parent. En cas de maladie dangereuse d’une telle
personne, lorsque les circonstances le permettent, le détenu devrait être
autorisé à se rendre à son chevet, soit sous escorte, soit librement.

3) Tout détenu aura le droit d’informer immédiatement sa famille de sa


détention ou de son transfèrement à un autre établissement.

Transfèrement des détenus

45. 1) Lorsque les détenus sont amenés à l’établissement ou en sont


extraits, ils doivent être exposés aussi peu que possible à la vue du public, et
des dispositions doivent être prises pour les protéger des insultes, de la
curiosité du public et de toute espèce de publicité.

2) Le transport des détenus dans de mauvaises conditions d’aération ou


de lumière, ou par tout moyen leur imposant une souffrance physique, doit
être interdit.

3) Le transport des détenus doit se faire aux frais de l’administration et


sur un pied d’égalité pour tous.

Personnel pénitentiaire

46. 1) L’administration pénitentiaire doit choisir avec soin le personnel de


tout grade, car c’est de son intégrité, de son humanité, de son aptitude
personnelle et de ses capacités professionnelles que dépend une bonne gestion
des établissements pénitentiaires.
14 Recueil des règles et normes de l’Organisation des Nations Unies en matière de prévention du crime et de justice pénale

2) L’administration pénitentiaire doit s’efforcer constamment d’éveiller


et de maintenir dans l’esprit du personnel et de l’opinion publique la
conviction que cette mission est un service social d’une grande importance; à
cet effet, tous les moyens appropriés pour éclairer le public devraient être
utilisés.

3) Afin que les buts précités puissent être réalisés, les membres du
personnel doivent être employés à plein temps en qualité de fonctionnaires
pénitentiaires de profession, ils doivent posséder le statut des agents de l’État
et être assurés en conséquence d’une sécurité d’emploi ne dépendant que de
leur bonne conduite, de l’efficacité de leur travail et de leur aptitude physique.
La rémunération doit être suffisante pour qu’on puisse recruter et maintenir en
service des hommes et des femmes capables; les avantages de la carrière et les
conditions de service doivent être déterminés en tenant compte de la nature
pénible du travail.

47. 1) Le personnel doit être d’un niveau intellectuel suffisant.

2) Il doit suivre, avant d’entrer en service, un cours de formation


générale et spéciale et satisfaire à des épreuves d’ordre théorique et pratique.

3) Après son entrée en service et au cours de sa carrière, le personnel


devra maintenir et améliorer ses connaissances et sa capacité professionnelle
en suivant des cours de perfectionnement qui seront organisés périodiquement.

48. Tous les membres du personnel doivent en toute circonstance se conduire


et accomplir leur tâche de telle manière que leur exemple ait une bonne
influence sur les détenus et suscite leur respect.

49. 1) On doit adjoindre au personnel, dans toute la mesure du possible, un


nombre suffisant de spécialistes tels que psychiatres, psychologues,
travailleurs sociaux, instituteurs, instructeurs techniques.

2) Les services des travailleurs sociaux, des instituteurs et des


instructeurs techniques doivent être assurés d’une façon permanente, mais
sans exclure les services des auxiliaires à temps partiel ou bénévoles.

50. 1) Le directeur d’un établissement doit être suffisamment qualifié pour


sa tâche par son caractère, ses capacités administratives, une formation
appropriée et son expérience dans ce domaine.

2) Il doit consacrer tout son temps à sa fonction officielle; celle-ci ne


peut être accessoire.

3) Il doit habiter l’établissement ou à proximité immédiate de celui-ci.


Première partie, chapitre premier. Traitement des détenus 15

4) Lorsque deux ou plusieurs établissements sont sous l’autorité d’un


seul directeur, celui-ci doit les visiter chacun à de fréquents intervalles.
Chacun de ces établissements doit avoir à sa tête un fonctionnaire résident
responsable.

51. 1) Le directeur, son adjoint et la majorité des autres membres du


personnel de l’établissement doivent parler la langue de la plupart des détenus,
ou une langue comprise par la plupart de ceux-ci.

2) On doit recourir aux services d’un interprète chaque fois que cela est
nécessaire.

52. 1) Dans les établissements suffisamment grands pour exiger le service


d’un ou de plusieurs médecins consacrant tout leur temps à cette tâche, un de
ceux-ci au moins doit habiter l’établissement ou à proximité immédiate de
celui-ci.

2) Dans les autres établissements, le médecin doit faire des visites


chaque jour et habiter suffisamment près pour être à même d’intervenir sans
délai dans les cas d’urgence.

53. 1) Dans un établissement mixte, la section des femmes doit être placée
sous la direction d’un fonctionnaire féminin responsable qui doit avoir la
garde de toutes les clefs de cette section de l’établissement.

2) Aucun fonctionnaire du sexe masculin ne doit pénétrer dans la


section des femmes sans être accompagné d’un membre féminin du personnel.

3) Seuls des fonctionnaires féminins doivent assurer la surveillance des


femmes détenues. Ceci n’exclut pas cependant que, pour des raisons
professionnelles, des fonctionnaires du sexe masculin, notamment des
médecins et des instituteurs, exercent leurs fonctions dans les établissements
ou sections réservés aux femmes.

54. 1) Les fonctionnaires des établissements ne doivent, dans leurs rapports


avec les détenus, utiliser la force qu’en cas de légitime défense, de tentative
d’évasion ou de résistance par la force ou par l’inertie physique à un ordre
fondé sur la loi ou les règlements. Les fonctionnaires qui recourent à la force
doivent en limiter l’emploi au strict nécessaire et faire immédiatement rapport
de l’incident au directeur de l’établissement.

2) Les membres du personnel pénitentiaire doivent subir un


entraînement physique spécial qui leur permette de maîtriser les détenus
violents.
16 Recueil des règles et normes de l’Organisation des Nations Unies en matière de prévention du crime et de justice pénale

3) Sauf circonstances spéciales, les agents qui assurent un service les


mettant en contact direct avec les détenus ne doivent pas être armés. Par
ailleurs on ne doit jamais confier une arme à un membre du personnel sans
que celui-ci ait été entraîné à son maniement.

Inspection

55. Des inspecteurs qualifiés et expérimentés, nommés par une autorité


compétente, devront procéder à l’inspection régulière des établissements et
services pénitentiaires. Ils veilleront en particulier à ce que ces établissements
soient administrés conformément aux lois et règlements en vigueur et dans le
but d’atteindre les objectifs des services pénitentiaires et correctionnels.

DEUXIÈME PARTIE
RÈGLES APPLICABLES À DES CATÉGORIES SPÉCIALES
A. Détenus condamnés

Principes directeurs

56. Les principes directeurs qui suivent ont pour but de définir l’esprit dans
lequel les systèmes pénitentiaires doivent être administrés et les objectifs
auxquels ils doivent tendre, conformément à la déclaration faite dans
l’observation préliminaire 1 du présent texte.

57. L’emprisonnement et les autres mesures qui ont pour effet de retrancher
un délinquant du monde extérieur sont afflictives par le fait même qu’elles
dépouillent l’individu du droit de disposer de sa personne en le privant de sa
liberté. Sous réserve des mesures de ségrégation justifiées ou du maintien de
la discipline, le système pénitentiaire ne doit donc pas aggraver les
souffrances inhérentes à une telle situation.

58. Le but et la justification des peines et mesures privatives de liberté sont


en définitive de protéger la société contre le crime. Un tel but ne sera atteint
que si la période de privation de liberté est mise à profit pour obtenir, dans
toute la mesure du possible, que le délinquant, une fois libéré, soit non
seulement désireux, mais aussi capable de vivre en respectant la loi et de
subvenir à ses besoins.

59. À cette fin, le régime pénitentiaire doit faire appel à tous les moyens
curatifs, éducatifs, moraux et spirituels et autres et à toutes les formes
d’assistance dont il peut disposer, en cherchant à les appliquer conformément
aux besoins du traitement individuel des délinquants.
Première partie, chapitre premier. Traitement des détenus 17

60. 1) Le régime de l’établissement doit chercher à réduire les différences


qui peuvent exister entre la vie en prison et la vie libre dans la mesure où ces
différences tendent à établir le sens de la responsabilité du détenu ou le
respect de la dignité de sa personne.

2) Avant la fin de l’exécution d’une peine ou mesure, il est désirable


que les mesures nécessaires soient prises pour assurer au détenu un retour
progressif à la vie dans la société. Ce but pourra être atteint, selon les cas, par
un régime préparatoire à la libération, organisé dans l’établissement même ou
dans un autre établissement approprié, ou par une libération à l’épreuve sous
un contrôle qui ne doit pas être confié à la police, mais qui comportera une
assistance sociale efficace.

61. Le traitement ne doit pas mettre l’accent sur l’exclusion des détenus de la
société, mais au contraire sur le fait qu’ils continuent à en faire partie. À cette
fin, il faut recourir, dans la mesure du possible, à la coopération d’organismes
de la communauté pour aider le personnel de l’établissement dans sa tâche de
reclassement des détenus. Des assistants sociaux collaborant avec chaque
établissement doivent avoir pour mission de maintenir et d’améliorer les
relations du détenu avec sa famille et avec les organismes sociaux qui peuvent
lui être utiles. Des démarches doivent être faites en vue de sauvegarder, dans
toute la mesure compatible avec la loi et la peine à subir, les droits relatifs aux
intérêts civils, le bénéfice des droits de la sécurité sociale et d’autres
avantages sociaux des détenus.

62. Les services médicaux de l’établissement s’efforceront de découvrir et


devront traiter toutes déficiences ou maladies physiques ou mentales qui
pourraient être un obstacle au reclassement d’un détenu. Tout traitement
médical, chirurgical et psychiatrique jugé nécessaire doit être appliqué à cette
fin.

63. 1) La réalisation de ces principes exige l’individualisation du


traitement et, à cette fin, un système souple de classification des détenus en
groupes; il est donc désirable que ces groupes soient placés dans des
établissements distincts où chaque groupe puisse recevoir le traitement
nécessaire.

2) Ces établissements ne doivent pas présenter la même sécurité pour


chaque groupe. Il est désirable de prévoir des degrés de sécurité selon les
besoins des différents groupes. Les établissements ouverts, par le fait même
qu’ils ne prévoient pas de mesures de sécurité physique contre les évasions
mais s’en remettent à cet égard à l’autodiscipline des détenus, fournissent à
des détenus soigneusement choisis les conditions les plus favorables à leur
reclassement.
18 Recueil des règles et normes de l’Organisation des Nations Unies en matière de prévention du crime et de justice pénale

3) Il est désirable que, dans les établissements fermés,


l’individualisation du traitement ne soit pas gênée par le nombre trop élevé
des détenus. Dans certains pays, on estime que la population de tels
établissements ne devrait pas dépasser 500. Dans les établissements ouverts, la
population doit être aussi réduite que possible.

4) Par contre, il est peu désirable de maintenir des établissements qui


soient trop petits pour qu’on puisse y organiser un régime convenable.

64. Le devoir de la société ne cesse pas à la libération d’un détenu. Il faudrait


donc disposer d’organismes gouvernementaux ou privés capables d’apporter
au détenu libéré une aide postpénitentiaire efficace, tendant à diminuer les
préjugés à son égard et lui permettant de se reclasser dans la communauté.

Traitement

65. Le traitement des individus condamnés à une peine ou mesure privative


de liberté doit avoir pour but, autant que la durée de la condamnation le
permet, de créer en eux la volonté et les aptitudes qui les mettent à même,
après leur libération, de vivre en respectant la loi et de subvenir à leurs
besoins. Ce traitement doit être de nature à encourager le respect d’eux-
mêmes et à développer leur sens de la responsabilité.

66. 1) À cet effet, il faut recourir notamment aux soins religieux dans les
pays où cela est possible, à l’instruction, à l’orientation et à la formation
professionnelles, aux méthodes de l’assistance sociale individuelle, au conseil
relatif à l’emploi, au développement physique et à l’éducation du caractère
moral, en conformité des besoins individuels de chaque détenu. Il convient de
tenir compte du passé social et criminel du condamné, de ses capacités et
aptitudes physiques et mentales, de ses dispositions personnelles, de la durée
de la condamnation et de ses perspectives de reclassement.

2) Pour chaque détenu condamné à une peine ou mesure d’une certaine


durée, le directeur de l’établissement doit recevoir, aussitôt que possible après
l’admission de celui-ci, des rapports complets sur les divers aspects
mentionnés au paragraphe précédent. Ces rapports doivent toujours
comprendre celui d’un médecin, si possible spécialisé en psychiatrie, sur la
condition physique et mentale du détenu.

3) Les rapports et autres pièces pertinentes seront placés dans un


dossier individuel. Ce dossier sera tenu à jour et classé de telle sorte qu’il
puisse être consulté par le personnel responsable, chaque fois que le besoin
s’en fera sentir.
Première partie, chapitre premier. Traitement des détenus 19

Classification et individualisation

67. Les buts de la classification doivent être:


a) D’écarter les détenus qui, en raison de leur passé criminel ou de
leurs mauvaises dispositions, exerceraient une influence fâcheuse sur leurs
codétenus;
b) De répartir les détenus en groupes afin de faciliter leur traitement en
vue de leur réadaptation sociale.

68. Il faut disposer, dans la mesure du possible, d’établissements séparés ou


de quartiers distincts d’un établissement pour le traitement des différents
groupes de détenus.

69. Dès que possible après l’admission et après une étude de la personnalité
de chaque détenu condamné à une peine ou mesure d’une certaine durée, un
programme de traitement doit être préparé pour lui, à la lumière des données
dont on dispose sur ses besoins individuels, ses capacités et son état d’esprit.

Privilèges

70. Il faut instituer dans chaque établissement un système de privilèges


adapté aux différents groupes de détenus et aux différentes méthodes de
traitement, afin d’encourager la bonne conduite, de développer le sens de la
responsabilité et de stimuler l’intérêt et la coopération des détenus à leur
traitement.

Travail

71. 1) Le travail pénitentiaire ne doit pas avoir un caractère afflictif.

2) Tous les détenus condamnés sont soumis à l’obligation du travail,


compte tenu de leur aptitude physique et mentale telle qu’elle sera déterminée
par le médecin.

3) Il faut fournir aux détenus un travail productif suffisant pour les


occuper pendant la durée normale d’une journée de travail.

4) Ce travail doit être, dans la mesure du possible, de nature à


maintenir ou à augmenter leur capacité de gagner honnêtement leur vie après
la libération.

5) Il faut donner une formation professionnelle utile aux détenus qui


sont à même d’en profiter et particulièrement aux jeunes.
20 Recueil des règles et normes de l’Organisation des Nations Unies en matière de prévention du crime et de justice pénale

6) Dans les limites compatibles avec une sélection professionnelle


rationnelle et avec les exigences de l’administration et de la discipline
pénitentiaire, les détenus doivent pouvoir choisir le genre de travail qu’ils
désirent accomplir.

72. 1) L’organisation et les méthodes de travail pénitentiaire doivent se


rapprocher autant que possible de celles qui régissent un travail analogue hors
de l’établissement, afin de préparer les détenus aux conditions normales du
travail libre.

2) Cependant, l’intérêt des détenus et de leur formation professionnelle


ne doit pas être subordonné au désir de réaliser un bénéfice au moyen du
travail pénitentiaire.

73. 1) Les industries et fermes pénitentiaires doivent de préférence être


dirigées par l’administration et non par des entrepreneurs privés.

2) Lorsque les détenus sont utilisés pour des travaux qui ne sont pas
contrôlés par l’administration, ils doivent toujours être placés sous la
surveillance du personnel pénitentiaire. À moins que le travail soit accompli
pour d’autres départements de l’État, les personnes auxquelles ce travail est
fourni doivent payer à l’administration le salaire normal exigible pour ce
travail, en tenant compte toutefois du rendement des détenus.

74. 1) Les précautions prescrites pour protéger la sécurité et la santé des


travailleurs libres doivent également être prises dans les établissements
pénitentiaires.

2) Des dispositions doivent être prises pour indemniser les détenus


pour les accidents du travail et les maladies professionnelles, à des conditions
égales à celles que la loi accorde aux travailleurs libres.

75. 1) Le nombre maximum d’heures de travail des détenus par jour et par
semaine doit être fixé par la loi ou par un règlement administratif, compte tenu
des règlements ou usages locaux suivis en ce qui concerne l’emploi des
travailleurs libres.

2) Les heures ainsi fixées doivent laisser un jour de repos par semaine
et suffisamment de temps pour l’instruction et les autres activités prévues pour
le traitement et la réadaptation des détenus.

76. 1) Le travail des détenus doit être rémunéré d’une façon équitable.
Première partie, chapitre premier. Traitement des détenus 21

2) Le règlement doit permettre aux détenus d’utiliser au moins une


partie de leur rémunération pour acheter des objets autorisés qui sont destinés
à leur usage personnel et d’en envoyer une autre partie à leur famille.

3) Le règlement devrait prévoir également qu’une partie de la


rémunération soit réservée par l’administration afin de constituer un pécule
qui sera remis au détenu au moment de sa libération.

Instruction et loisirs

77. 1) Des dispositions doivent être prises pour développer l’instruction de


tous les détenus capables d’en profiter, y compris l’instruction religieuse dans
les pays où cela est possible. L’instruction des analphabètes et des jeunes
détenus doit être obligatoire, et l’administration devra y veiller attentivement.

2) Dans la mesure du possible, l’instruction des détenus doit être


coordonnée avec le système de l’instruction publique afin que ceux-ci puissent
poursuivre leur formation sans difficulté après la libération.

78. Pour le bien-être physique et mental des détenus, des activités récréatives
et culturelles doivent être organisées dans tous les établissements.

Relations sociales, aide postpénitentiaire

79. Une attention particulière doit être apportée au maintien et à


l’amélioration des relations entre le détenu et sa famille, lorsque celles-ci sont
désirables dans l’intérêt des deux parties.

80. Il faut tenir compte, dès le début de la condamnation, de l’avenir du


détenu après sa libération. Celui-ci doit être encouragé à maintenir ou à établir
des relations avec des personnes ou des organismes de l’extérieur qui puissent
favoriser les intérêts de sa famille ainsi que sa propre réadaptation sociale.

81. 1) Les services et organismes, officiels ou non, qui aident les détenus
libérés à retrouver leur place dans la société doivent, dans la mesure du
possible, procurer aux détenus libérés les documents et pièces d’identité
nécessaires, leur assurer un logement, du travail, des vêtements convenables et
appropriés au climat et à la saison, ainsi que les moyens nécessaires pour
arriver à destination et pour subsister pendant la période qui suit
immédiatement la libération.

2) Les représentants agréés de ces organismes doivent avoir accès à


l’établissement et auprès des détenus. Leur avis sur les projets de reclassement
d’un détenu doit être demandé dès le début de la condamnation.
22 Recueil des règles et normes de l’Organisation des Nations Unies en matière de prévention du crime et de justice pénale

3) Il est désirable que l’activité de ces organismes soit autant que


possible centralisée ou coordonnée, afin qu’on puisse assurer la meilleure
utilisation de leurs efforts.

B. Détenus aliénés et anormaux mentaux

82. 1) Les aliénés ne doivent pas être détenus dans les prisons, et des
dispositions doivent être prises pour les transférer aussitôt que possible dans
des établissements pour malades mentaux.

2) Les détenus atteints d’autres affections ou anormalités mentales


doivent être observés et traités dans des institutions spécialisées, placées sous
une direction médicale.

3) Pendant la durée de leur séjour en prison, ces personnes doivent être


placées sous la surveillance spéciale d’un médecin.

4) Le service médical ou psychiatrique des établissements


pénitentiaires doit assurer le traitement psychiatrique de tous les autres
détenus qui ont besoin d’un tel traitement.

83. Il est désirable que les dispositions soient prises d’accord avec les
organismes compétents, pour que le traitement psychiatrique soit continué si
nécessaire après la libération et qu’une assistance sociale postpénitentiaire à
caractère psychiatrique soit assurée.

C. Personnes arrêtées ou en détention préventive

84. 1) Tout individu arrêté ou incarcéré en raison d’une infraction à la loi


pénale et qui se trouve détenu soit dans des locaux de police soit dans une
maison d’arrêt, mais n’a pas encore été jugé, est qualifié de “prévenu” dans
les dispositions qui suivent.

2) Le prévenu jouit d’une présomption d’innocence et doit être traité en


conséquence.

3) Sans préjudice des dispositions légales relatives à la protection de la


liberté individuelle ou fixant la procédure à suivre à l’égard des prévenus, ces
derniers bénéficieront d’un régime spécial dont les règles ci-après se bornent à
fixer les points essentiels.

85. 1) Les prévenus doivent être séparés des détenus condamnés.


Première partie, chapitre premier. Traitement des détenus 23

2) Les jeunes prévenus doivent être séparés des adultes. En principe, ils
doivent être détenus dans des établissements distincts.

86. Les prévenus doivent être logés dans des chambres individuelles, sous
réserve d’usages locaux différents eu égard au climat.

87. Dans les limites compatibles avec le bon ordre de l’établissement, les
prévenus peuvent, s’ils le désirent, se nourrir à leurs frais en se procurant leur
nourriture de l’extérieur par l’intermédiaire de l’administration, de leur
famille ou de leurs amis. Sinon, l’administration doit pourvoir à leur
alimentation.

88. 1) Un prévenu doit être autorisé à porter ses vêtements personnels si


ceux-ci sont propres et convenables.

2) S’il porte l’uniforme de l’établissement, celui-ci doit être différent


de l’uniforme des condamnés.

89. La possibilité doit toujours être donnée au prévenu de travailler, mais il


ne peut y être obligé. S’il travaille, il doit être rémunéré.

90. Tout prévenu doit être autorisé à se procurer, à ses frais ou aux frais de
tiers, des livres, des journaux, le matériel nécessaire pour écrire, ainsi que
d’autres moyens d’occupation, dans les limites compatibles avec l’intérêt de
l’administration de la justice et avec la sécurité et le bon ordre de
l’établissement.

91. Un prévenu doit être autorisé à recevoir la visite et les soins de son
propre médecin ou dentiste si sa demande est raisonnablement fondée et s’il
est capable d’en assurer la dépense.

92. Un prévenu doit immédiatement pouvoir informer sa famille de sa


détention et se voir attribuer toutes les facilités raisonnables pour pouvoir
communiquer avec celle-ci et ses amis et recevoir des visites de ces
personnes, sous la seule réserve des restrictions et de la surveillance qui sont
nécessaires dans l’intérêt de l’administration de la justice, de la sécurité et du
bon ordre de l’établissement.

93. Un prévenu doit être autorisé à demander la désignation d’un avocat


d’office, lorsque cette assistance est prévue, et à recevoir des visites de son
avocat en vue de sa défense. Il doit pouvoir préparer et remettre à celui-ci des
instructions confidentielles. À cet effet, on doit lui donner, s’il le désire, du
matériel pour écrire. Les entrevues entre le prévenu et son avocat peuvent être
à portée de la vue, mais ne peuvent pas être à la portée d’ouïe d’un
fonctionnaire de la police ou de l’établissement.
24 Recueil des règles et normes de l’Organisation des Nations Unies en matière de prévention du crime et de justice pénale

D. Condamnés pour dettes et à la prison civile

94. Dans les pays où la législation prévoit l’emprisonnement pour dettes ou


d’autres formes d’emprisonnement prononcées par décision judiciaire à la
suite d’une procédure non pénale, ces détenus ne doivent pas être soumis à
plus de restrictions ni être traités avec plus de sévérité qu’il n’est nécessaire
pour assurer la sécurité et pour maintenir l’ordre. Leur traitement ne doit pas
être moins favorable que celui des prévenus, sous réserve toutefois de
l’obligation éventuelle de travailler.

E. Personnes arrêtées ou incarcérées sans avoir été inculpées

95. Sans préjudice des dispositions de l’article 9 du Pacte international relatif


aux droits civils et politiques, les personnes arrêtées ou incarcérées sans avoir
été inculpées jouissent de la protection garantie par la première partie et par la
section C de la deuxième partie. Les dispositions pertinentes de la section A de
la deuxième partie sont également applicables lorsque leur application peut
être profitable à cette catégorie spéciale de détenus, pourvu qu’il ne soit pris
aucune mesure impliquant que des mesures de rééducation ou de réadaptation
puissent être applicables en quoi que ce soit à des personnes qui ne sont
convaincues d’aucune infraction.

2. Dispositions visant à assurer l’application effective de


l’Ensemble de règles minima pour le traitement des détenus*

Disposition 1

Tous les États qui, pour la protection de toutes les personnes soumises à
toute forme de détention ou d’emprisonnement, appliquent des normes
inférieures à celles que contient l’Ensemble de règles minima pour le
traitement des détenus adopteront lesdites règles.

Commentaire
Dans sa résolution 2858 (XXVI) du 20 décembre 1971, l’Assemblée
générale a appelé l’attention des États membres sur l’Ensemble de règles
minima et leur a recommandé d’appliquer effectivement ces règles dans
l’administration des établissements pénitentiaires correctionnels et d’envisager
favorablement de les incorporer à leur législation nationale. Comme il se peut
que certains États appliquent des normes plus avancées que les règles minima,
ces États ne sont pas tenus d’adopter celles-ci. Lorsque les États estiment
____________
*Résolution 1984/47 du Conseil économique et social, annexe.
Première partie, chapitre premier. Traitement des détenus 25

qu’elles doivent être harmonisées avec leur régime juridique et adaptées à leur
culture, l’accent est mis sur le fond plutôt que sur la lettre des règles.

Disposition 2

Après avoir, le cas échéant, adapté l’Ensemble de règles minima en vue


de le rendre conforme à leur législation et à leur culture, mais sans écarter de
l’esprit et sans trahir les objectifs des règles, les pays l’incorporent dans leur
législation nationale et leurs autres règlements.

Commentaire
Cette disposition souligne la nécessité d’incorporer les règles dans la
législation nationale et les autres règlements, ce qui recouvre certains aspects
de la disposition l.

Disposition 3

L’Ensemble de règles minima sera porté à la connaissance de toutes les


personnes concernées, en particulier les responsables de l’application des lois
et le personnel des établissements correctionnels, afin d’en assurer
l’application et la mise en œuvre au sein de l’appareil de la justice pénale.
Commentaire
Cette disposition souligne que les règles. ainsi que les statuts et
règlements nationaux qui régissent l’application de celles-ci, doivent être
portés à la connaissance de toutes les personnes chargées de les mettre en
œuvre, en particulier les responsables de l’application des lois et le personnel
des établissements correctionnels. L’application effective de règles peut
impliquer pour l’administration centrale responsable des questions
correctionnelles la nécessité d’organiser des cours de formation. La diffusion
des dispositions est étudiée dans les dispositions 7 à 9.

Disposition 4

L’Ensemble de règles minima tel qu’il aura été incorporé dans la


législation et dans les autres règlements nationaux sera également porté à la
connaissance de tous les détenus et de toutes les personnes privées de leur
liberté, à leur entrée dans un établissement pénitentiaire et pendant leur
détention, sous une forme compréhensible pour les intéressés.

Commentaire
Pour atteindre l’objectif visé par l’Ensemble de règles minima, il faut que
les règles, ainsi que les statuts et règlements nationaux prévus pour leur
26 Recueil des règles et normes de l’Organisation des Nations Unies en matière de prévention du crime et de justice pénale

application, soient portées à la connaissance des détenus et de toutes les


personnes privées de leur liberté (règle 95), afin de faire prendre mieux
conscience du fait qu’elles représentent les conditions minimales jugées
acceptables par l’Organisation des Nations Unies. Cette disposition complète
donc les mesures prévues dans le cadre de la disposition 3.

Une disposition analogue, spécifiant que les règles minima doivent être
portées à la connaissance des personnes pour la protection desquelles elles ont
été élaborées, figure déjà dans les quatre Conventions de Genève du 12 août
19491, qui stipulent toutes, à l’article 47 pour la première, à l’article 48 pour
la deuxième, à l’article 127 pour la troisième et à l’article 144 pour la
quatrième, que:

“Les Hautes Parties contractantes s’engagent à diffuser le plus largement


possible, en temps de paix et en temps de guerre, le texte de la présente
Convention dans leurs pays respectifs, et notamment à en incorporer
l’étude dans les programmes d’instruction militaire et, si possible, civile,
de telle manière que les principes en soient connus de l’ensemble de la
population, notamment des forces armées combattantes, du personnel
sanitaire et des aumôniers.”

Disposition 5

Les États informeront tous les cinq ans le Secrétaire général de


l’Organisation des Nations Unies de la manière dont l’Ensemble de règles
minima est appliqué et des progrès réalisés dans ce domaine, ainsi que des
éventuels facteurs et difficultés qui font obstacle à sa mise en œuvre en
répondant au questionnaire du Secrétaire général. Ce questionnaire, dont le
calendrier sera spécifié, devrait être sélectif et se limiter à des questions
spécifiques de façon à permettre un examen et une étude approfondie des
problèmes retenus. Sur la base des rapports des gouvernements et d’autres
informations pertinentes disponibles au sein du système des Nations Unies, le
Secrétaire général établira périodiquement des rapports indépendants sur les
progrès réalisés dans l’application de l’Ensemble de règles minima. Le
Secrétaire général pourra également inviter les institutions spécialisées ainsi
que les organisations intergouvernementales et non gouvernementales dotées
du statut consultatif auprès du Conseil économique et social concernées à
collaborer à l’établissement de ces rapports. Le Secrétaire général soumettra
lesdits rapports au Comité pour la prévention du crime et la lutte contre la
délinquance pour examen ou suite à donner, selon le cas.

____________
1
Nations Unies, Recueil des Traités, vol. 75, nos 970 à 973.
Première partie, chapitre premier. Traitement des détenus 27

Commentaire
On se souviendra que le Conseil économique et social, dans sa résolution
663 C (XXIV) du 31 juillet 1957, a recommandé aux gouvernements de
communiquer tous les cinq ans au Secrétaire général des renseignements sur
les progrès réalisés dans l’application de l’Ensemble de règles minima et a
autorisé le Secrétaire général à prendre les dispositions voulues pour assurer,
s’il y a lieu, la publication des renseignements ainsi reçus et à demander, le
cas échéant, des renseignements supplémentaires. Demander la coopération
des institutions spécialisées et des organisations intergouvernementales et non
gouvernementales concernées est une pratique bien établie dans l’Organisation
des Nations Unies. Pour établir ces rapports indépendants sur les progrès
réalisés dans l’application de l’Ensemble de règles minima, le Secrétaire
général tiendra compte, notamment des informations dont disposent les
organes chargés des questions relatives aux droits de l’homme au sein de
l’Organisation des Nations Unies, en particulier la Commission des droits de
l’homme, la Sous-Commission de la lutte contre les mesures discriminatoires
et de la protection des minorités, le Comité des droits de l’homme créé en
vertu du Pacte international relatif aux droits civils et politiques et le Comité
pour l’élimination de la discrimination raciale. Les mesures d’application qui
seront prévues au titre de la future convention contre la torture pourraient
également être prises en considération, de même que toute information qui
pourrait être recueillie à propos de l’ensemble de principes relatifs à la
protection des prisonniers et des détenus que prépare actuellement
l’Assemblée générale.

Disposition 6

Dans le cadre des renseignements dont il est question dans la


disposition 5 ci-dessus, les États sont priés de fournir au Secrétaire général:
a) Le texte ou le résumé de toutes les lois, de tous les règlements et de
toutes les mesures administratives ayant trait à l’application de l’Ensemble de
règles minima aux détenus ainsi que dans les établissements et les
programmes de détention;
b) Des données et une documentation descriptive concernant les
programmes de traitement, le personnel et le nombre de personnes soumises à
une détention, sous quelque forme que ce soit, et, si elles existent, des
statistiques;
c) Toute autre information pertinente sur l’application des règles, ainsi
que des renseignements sur les éventuelles difficultés qu’entraîne leur
application.
28 Recueil des règles et normes de l’Organisation des Nations Unies en matière de prévention du crime et de justice pénale

Commentaire
Cette disposition découle à la fois de la résolution 663 C (XXIV) du Conseil
économique et social et des recommandations des congrès des Nations Unies
pour la prévention du crime et le traitement des délinquants. Même si les
éléments d’information spécifiquement suggérés dans la disposition 6 ne sont
pas disponibles, on devrait pouvoir rassembler des informations de ce type
pour aider les États Membres à surmonter leurs difficultés en procédant à des
échanges de vues. En outre, cette demande d’informations s’inspire du
système de rapports périodiques sur les droits de l’homme instauré par le
Conseil économique et social dans sa résolution 624 B (XXII) du 1er août
1956.

Disposition 7

Le Secrétaire général diffusera dans le plus grand nombre de langues


possible, l’Ensemble de règles minima et les présentes dispositions relatives à
leur application et les fera distribuer à tous les États et à toutes les
organisations intergouvernementales et non gouvernementales intéressées, afin
que les règles et les présentes dispositions relatives à leur application aient
une diffusion aussi large que possible.

Commentaire
La nécessité d’assurer la diffusion la plus large possible de l’Ensemble de
règles minima est évidente. Une coopération étroite avec toutes les
organisations intergouvernementales et non gouvernementales concernées est
importante afin de permettre une meilleure diffusion et une meilleure
application des règles minima. Le Secrétariat devrait donc rester en relations
étroites avec ces organisations et leur fournir les renseignements et données
pertinents. Il devrait encourager également ces organisations à diffuser des
renseignements sur l’Ensemble de règles minima et sur les dispositions
relatives à leur application.

Disposition 8

Le Secrétaire général diffusera ses rapports sur l’application de


l’Ensemble de règles minima, y compris les résumés analytiques de ses
enquêtes périodiques, les rapports du Comité pour la prévention du crime et la
lutte contre la délinquance, les rapports établis pour les congrès des Nations
Unies pour la prévention du crime et le traitement des délinquants, ainsi que
les rapports de ces congrès, les communications scientifiques et toute autre
documentation qui semblerait nécessaire de temps à autre afin de promouvoir
l’application de l’Ensemble de règles minima.
Première partie, chapitre premier. Traitement des détenus 29

Commentaire
Cette disposition correspond à la pratique actuelle qui consiste à diffuser
ce genre de rapports au titre de la documentation des organismes intéressés
des Nations Unies, sous forme de publications des Nations Unies ou sous
forme d’articles dans l’Annuaire des droits de l’homme, la Revue
internationale de politique criminelle, le Bulletin d’information sur la
prévention du crime et la justice criminelle et toute autre publication
pertinente.

Disposition 9

Le Secrétaire général veillera à ce que le texte de l’Ensemble de règles


minima soit mentionné et utilisé le plus souvent possible dans les programmes
pertinents de l’Organisation des Nations Unies, y compris les activités de
coopération technique.

Commentaire
Il faut faire en sorte que tous les organismes des Nations Unies
mentionnent les règles et les dispositions relatives à leur application ou y
fassent référence, non seulement pour en assurer une large diffusion et mieux
les faire connaître aux institutions spécialisées, aux organisations
gouvernementales, intergouvernementales et non gouvernementales et au
public en général, mais aussi pour que soit connue de tous la volonté
manifestée par le Conseil économique et social et l’Assemblée générale de
faire appliquer ces règles et dispositions.

La mesure dans laquelle les règles ont un effet pratique sur les
administrations correctionnelles dépend beaucoup de la façon dont elles sont
intégrées dans les pratiques législative et administrative localement en
vigueur. II faut qu’elles soient connues et comprises dans le monde entier par
le plus grand nombre possible de professionnels et de non-professionnels.
C’est pourquoi elles doivent faire l’objet d’une propagande intensive, sous
toutes les formes, y compris de fréquentes mentions et l’organisation de
campagnes d’information à l’intention du public.

Disposition 10

Dans le cadre de ses programmes d’assistance technique et de


développement, l’Organisation des Nations Unies:
a) Aidera les gouvernements qui le demanderont à établir et à renforcer
des systèmes correctionnels diversifiés et humains;
30 Recueil des règles et normes de l’Organisation des Nations Unies en matière de prévention du crime et de justice pénale

b) Fournira aux gouvernements qui en feront la demande les services


d’experts et de conseillers régionaux et interrégionaux pour la prévention du
crime et la justice pénale;
c) Encouragera l’organisation de séminaires nationaux et régionaux et
d’autres réunions aux niveaux professionnel et non professionnel en vue de
favoriser la diffusion de l’Ensemble de règles minima et des présentes
dispositions visant à assurer leur application;
d) Fournira un appui fonctionnel plus important aux instituts de
recherche et de formation régionaux s’occupant de prévention du crime et de
justice pénale et travaillant en association avec l’Organisation des Nations
Unies.

Les instituts régionaux de recherche et de formation des Nations Unies


s’occupant de prévention du crime et de justice pénale, en collaboration avec
les instituts nationaux, mettront au point des programmes et du matériel de
formation, fondés sur l’Ensemble de règles minima et les présentes
dispositions relatives à leur application, pouvant être utilisés pour des
programmes d’enseignement sur la justice pénale à tous les niveaux ainsi que
pour des cours spécialisés sur les droits de l’homme et autres sujets connexes.

Commentaire
Le but de cette disposition est de faire en sorte que les programmes
d’assistance technique de l’Organisation des Nations Unies et les activités de
formation des instituts régionaux contribuent indirectement à faire appliquer
l’Ensemble de règles minima et les dispositions relatives à leur application.
Outre les cours de formation ordinaires à l’intention du personnel des
établissements correctionnels, les manuels de formation, etc., des dispositions
devraient être arrêtées, en particulier au niveau de la formulation des
politiques et de la prise de décisions, pour que des avis d’experts soient
fournis sur les questions soumises par les États Membres, et notamment pour
qu’un fichier de services d’experts soit mis à la disposition des États
intéressés. Ce système de fichier de services d’experts semble
particulièrement nécessaire pour que soit observé l’esprit de l’Ensemble de
règles minima compte tenu de la structure socioéconomique des pays qui
demandent ce type d’assistance.

Disposition 11

Le Comité pour la prévention du crime et la lutte contre la délinquance:


a) Reverra de temps à autre l’Ensemble de règles minima en vue
d’élaborer de nouvelles règles, normes et procédures applicables au traitement
des personnes privées de leur liberté;
Première partie, chapitre premier. Traitement des détenus 31

b) Suivra les conditions d’application des présentes dispositions, par le


moyen, en particulier, du système de rapports périodiques prévu par la
disposition 5 ci-dessus.

Commentaire

Comme la plupart des renseignements rassemblés au cours des enquêtes


périodiques et des missions d’assistance technique seront portés à la
connaissance du Comité pour la prévention du crime et la lutte contre la
délinquance, la mesure dans laquelle les règles amélioreront les pratiques
correctionnelles dépendra de ce comité dont les recommandations,
accompagnées des dispositions relatives à l’application des règles,
détermineront la façon dont les règles seront appliquées dans l’avenir. Il faut
donc que le Comité définisse clairement les points faibles de l’application des
règles ou les raisons de leur inapplication, notamment en prenant contact avec
le pouvoir judiciaire et le Ministère de la justice des pays intéressés, afin de
suggérer les moyens d’y remédier.

Disposition 12

Le Comité pour la prévention du crime et la lutte contre la délinquance


assistera, selon les cas, l’Assemblée générale, le Conseil économique et social
et les autres organismes des Nations Unies s’occupant des droits de l’homme,
en formulant des recommandations à propos des rapports des commissions
d’enquêtes spéciales, en ce qui concerne des questions ayant trait à
l’application de l’Ensemble de règles minima.

Commentaire
Étant donné que le Comité pour la prévention du crime et la lutte contre
la délinquance est l’organisme chargé de suivre l’application de l’Ensemble de
règles minima, il devra également assister les organismes susmentionnés.

Disposition 13

Aucune disposition des présentes modalités d’application de l’Ensemble


de règles minima ne sera interprétée comme interdisant le recours à toute autre
mesure ou moyen qu’autorise le droit international ou que prévoient d’autres
organes ou institutions des Nations Unies pour réprimer les violations des
droits de l’homme, comme la procédure relative aux violations flagrantes,
constantes et systématiques des droits de l’homme prévue par la résolution
1503 (XLVIII) du Conseil économique et social, en date du 27 mai 1970, la
procédure de communication prévue par le Protocole facultatif se rapportant
32 Recueil des règles et normes de l’Organisation des Nations Unies en matière de prévention du crime et de justice pénale

au Pacte international relatif aux droits civils et politiques2 et la procédure de


communication prévue par la Convention internationale sur l’élimination de
toutes les formes de discrimination raciale3.

Commentaire
Puisque l’Ensemble de règles minima ne porte que partiellement sur les
questions relevant spécifiquement des droits de l’homme, les présentes
dispositions n’interdisent aucun recours permettant d’obtenir réparation pour
toute violation de ces droits, conformément aux règles et normes
internationales ou régionales existantes.

_________
2
Résolution 2200 A (XXI) de l’Assemblée générale, annexe.
3
Résolution 2106 A (XX) de l’Assemblée générale, annexe.

3. Ensemble de principes pour la protection de toutes les personnes


soumises à une forme quelconque de détention ou d’emprisonnement*

Portée de l’Ensemble de principes

Les présents principes s’appliquent à la protection de toutes les personnes


soumises à une forme quelconque de détention ou d’emprisonnement.

Emploi des termes

Aux fins de l’Ensemble de principes:


a) Le terme “arrestation” s’entend de l’acte qui consiste à appréhender
une personne du chef d’une prétendue infraction ou par le fait d’une autorité
quelconque;
b) Le terme “personne détenue” s’entend de toute personne privée de la
liberté individuelle sauf à la suite d’une condamnation pour infraction;
c) Le terme “personne emprisonnée” s’entend de toute personne privée
de la liberté individuelle à la suite d’une condamnation pour infraction;
d) Le terme “détention” s’entend de la condition des personnes
détenues telle qu’elle est définie ci-dessus;
e) Le terme “emprisonnement” s’entend de la condition des personnes
emprisonnées telle qu’elle est définie ci-dessus;

____________
*Résolution 43/173 de l’Assemblée générale, annexe.
Première partie, chapitre premier. Traitement des détenus 33

f) L’expression “une autorité judiciaire ou autre” s’entend d’une


autorité judiciaire ou autre habilitée par la loi et dont le statut et la durée du
mandat offrent les garanties les plus solides possibles de compétence,
d’impartialité et d’indépendance.

Principe premier

Toute personne soumise à une forme quelconque de détention ou


d’emprisonnement est traitée avec humanité et avec le respect de la dignité
inhérente à la personne humaine.

Principe 2

Les mesures d’arrestation, de détention ou d’emprisonnement ne sont


appliquées qu’en stricte conformité avec les dispositions de la loi et par les
autorités compétentes ou les personnes habilitées à cet effet.

Principe 3

Si une personne est soumise à une forme quelconque de détention ou


d’emprisonnement, il ne peut être admis à son égard aucune restriction ou
dérogation aux droits de l’homme reconnus ou en vigueur dans un État en
application de lois, de conventions, de règlements ou de coutumes, sous
prétexte que le présent Ensemble de principes ne les reconnaît pas ou les
reconnaît à un moindre degré.

Principe 4

Toute forme de détention ou d’emprisonnement et toute mesure mettant


en cause les droits individuels d’une personne soumise à une forme
quelconque de détention ou d’emprisonnement doivent être décidées soit par
une autorité judiciaire ou autre, soit sous son contrôle effectif.

Principe 5

1. Les présents principes s’appliquent à toutes les personnes se trouvant sur


le territoire d’un État donné, sans distinction aucune, qu’elle soit fondée sur la
race, la couleur, le sexe, la langue, la religion ou les croyances religieuses, les
opinions politiques ou autres, l’origine nationale, ethnique ou sociale, la
fortune, la naissance ou sur tout autre critère.

2. Les mesures appliquées conformément à la loi et destinées exclusivement


à protéger les droits et la condition particulière des femmes, surtout des
34 Recueil des règles et normes de l’Organisation des Nations Unies en matière de prévention du crime et de justice pénale

femmes enceintes et des mères d’enfants en bas âge, des enfants, des
adolescents et des personnes âgées, malades ou handicapées ne sont pas
réputées être des mesures discriminatoires. La nécessité de ces mesures et leur
application pourront toujours faire l’objet d’un examen par une autorité
judiciaire ou autre.

Principe 6

Aucune personne soumise à une forme quelconque de détention ou


d’emprisonnement ne sera soumise à la torture ni à des peines ou traitements
cruels, inhumains ou dégradants*. Aucune circonstance quelle qu’elle soit ne
peut être invoquée pour justifier la torture ou toute autre peine ou traitement
cruel, inhumain ou dégradant.

Principe 7

1. Les États devraient édicter des lois interdisant tous actes qui violeraient
les droits et devoirs énoncés dans les présents principes, prévoir des sanctions
appropriées contre les auteurs de ces actes et enquêter impartialement en cas
de plainte.

2. Les fonctionnaires qui ont des raisons de croire qu’une violation du


présent Ensemble de principes s’est produite ou est sur le point de se produire
signalent le cas à leurs supérieurs et, au besoin, aux autres autorités ou
instances de contrôle ou de recours compétentes.

3. Toute autre personne qui a lieu de croire qu’une violation du présent


Ensemble de principes s’est produite ou est sur le point de se produire a le
droit de signaler le cas aux supérieurs des fonctionnaires en cause ainsi qu’aux
autres autorités ou instances de contrôle ou de recours compétentes.

Principe 8

Les personnes détenues sont soumises à un régime approprié à leur


condition de personnes non condamnées. Elles sont donc, chaque fois que
possible, séparées des personnes emprisonnées.

____________
*L’expression “peine ou traitement cruel, inhumain ou dégradant” doit être interprétée de façon à
assurer une protection aussi large que possible contre tous sévices, qu’ils aient un caractère physique ou
mental, y compris le fait de soumettre une personne détenue ou emprisonnée à des conditions qui la
privent temporairement ou en permanence de l’usage de l’un quelconque de ses sens, tels que la vue ou
l’ouïe, ou de la conscience du lieu où elle se trouve et du passage du temps.
Première partie, chapitre premier. Traitement des détenus 35

Principe 9

Les autorités qui arrêtent une personne, la maintiennent en détention ou


instruisent l’affaire doivent exercer strictement les pouvoirs qui leur sont
conférés par la loi, et l’exercice de ces pouvoirs doit pouvoir faire l’objet d’un
recours devant une autorité judiciaire ou autre.

Principe 10

Toute personne arrêtée sera informée des raisons de cette mesure au


moment de son arrestation et sera avisée sans délai de toute accusation portée
contre elle.

Principe 11

1. Une personne ne sera pas maintenue en détention sans avoir la possibilité


effective de se faire entendre sans délai par une autorité judiciaire ou autre.
Une personne détenue a le droit d’assurer sa propre défense ou d’être assistée
d’un conseil conformément à la loi.

2. La personne détenue et, le cas échéant, son conseil reçoivent sans délai et
intégralement communication de l’ordre de détention ainsi que des raisons
l’ayant motivé.

3. Une autorité judiciaire ou autre sera habilitée à contrôler, selon qu’il


conviendra, le maintien de la détention.

Principe 12

1. Seront dûment consignés:


a) Les motifs de l’arrestation;
b) L’heure de l’arrestation, l’heure à laquelle la personne arrêtée a été
conduite dans un lieu de détention et celle de sa première comparution devant
une autorité judiciaire ou autre;
c) L’identité des responsables de l’application des lois concernés;
d) Des indications précises quant au lieu de détention.

2. Ces renseignements seront communiqués à la personne détenue ou, le cas


échéant, à son conseil, dans les formes prescrites par la loi.
36 Recueil des règles et normes de l’Organisation des Nations Unies en matière de prévention du crime et de justice pénale

Principe 13

Toute personne se verra fournir, au moment de l’arrestation et au début


de la détention ou de l’emprisonnement ou peu après, par les autorités
responsables de l’arrestation, de la détention ou de l’emprisonnement, selon le
cas, des renseignements et des explications au sujet de ses droits ainsi que de
la manière dont elle peut les faire valoir.

Principe 14

Toute personne qui ne comprend ou ne parle pas suffisamment bien la


langue utilisée par les autorités responsables de son arrestation, de sa
détention ou de son emprisonnement a le droit de recevoir sans délai, dans une
langue qu’elle comprend, les renseignements visés dans le principe 10, le
paragraphe 2 du principe 11, le paragraphe 1 du principe 12 et le principe 13
et de bénéficier de l’assistance, gratuite si besoin est, d’un interprète dans le
cadre de la procédure judiciaire qui fait suite à son arrestation.

Principe 15

Nonobstant les exceptions prévues au paragraphe 4 du principe 16 et au


paragraphe 3 du principe 18, la communication de la personne détenue ou
emprisonnée avec le monde extérieur, en particulier avec sa famille ou son
conseil, ne peut être refusée pendant plus de quelques jours.

Principe 16

1. Dans les plus brefs délais après l’arrestation et après chaque transfert
d’un lieu de détention ou d’emprisonnement à un autre, la personne détenue
ou emprisonnée pourra aviser ou requérir l’autorité compétente d’aviser les
membres de sa famille ou, s’il y a lieu, d’autres personnes de son choix, de
son arrestation, de sa détention ou de son emprisonnement, ou de son transfert
et du lieu où elle est détenue.

2. S’il s’agit d’une personne étrangère, elle sera aussi informée sans délai
de son droit de communiquer par des moyens appropriés avec un poste
consulaire ou la mission diplomatique de l’État dont elle a la nationalité ou
qui est autrement habilité à recevoir cette communication conformément au
droit international, ou avec le représentant de l’organisation internationale
compétente si cette personne est réfugiée ou est, d’autre façon, sous la
protection d’une organisation intergouvernementale.

3. Dans le cas d’un adolescent ou d’une personne incapable de comprendre


quels sont ses droits, l’autorité compétente devra, de sa propre initiative,
Première partie, chapitre premier. Traitement des détenus 37

procéder à la notification visée dans le présent principe. Elle veillera


spécialement à aviser les parents ou tuteurs.

4. La notification visée dans le présent principe sera faite ou autorisée sans


délai. L’autorité compétente pourra néanmoins différer une notification
pendant une période raisonnable si des besoins exceptionnels de l’enquête
l’exigent.

Principe 17

1. Toute personne détenue pourra bénéficier de l’assistance d’un avocat.


L’autorité compétente l’informera de ce droit promptement après son
arrestation et lui fournira des facilités raisonnables pour l’exercer.

2. Si une personne détenue n’a pas choisi d’avocat, elle aura le droit de s’en
voir désigner un par une autorité judiciaire ou autre dans tous les cas où
l’intérêt de la justice l’exige, et ce sans frais si elle n’a pas les moyens de le
rémunérer.

Principe 18

1. Toute personne détenue ou emprisonnée doit être autorisée à


communiquer avec son avocat et à le consulter.

2. Toute personne détenue ou emprisonnée doit disposer du temps et des


facilités nécessaires pour s’entretenir avec son avocat.

3. Le droit de la personne détenue ou emprisonnée de recevoir la visite de


son avocat, de le consulter et de communiquer avec lui sans délai ni censure et
en toute confidence ne peut faire l’objet d’aucune suspension ni restriction en
dehors de circonstances exceptionnelles, qui seront spécifiées par la loi ou les
règlements pris conformément à la loi, dans lesquelles une autorité judiciaire
ou autre l’estimera indispensable pour assurer la sécurité et maintenir l’ordre.

4. Les entretiens entre la personne détenue ou emprisonnée et son avocat


peuvent se dérouler à portée de la vue, mais non à portée de l’ouïe, d’un
responsable de l’application des lois.

5. Les communications entre une personne détenue ou emprisonnée et son


avocat, mentionnées dans le présent principe, ne peuvent être retenues comme
preuves contre la personne détenue ou emprisonnée, sauf si elles se rapportent
à une infraction continue ou envisagée.
38 Recueil des règles et normes de l’Organisation des Nations Unies en matière de prévention du crime et de justice pénale

Principe 19

Toute personne détenue ou emprisonnée a le droit de recevoir des visites,


en particulier de membres de sa famille, et de correspondre, en particulier
avec eux, et elle doit disposer de possibilités adéquates de communiquer avec
le monde extérieur, sous réserve des conditions et restrictions raisonnables que
peuvent spécifier la loi ou les règlements pris conformément à la loi.

Principe 20

Si une personne détenue ou emprisonnée en fait la demande, elle sera


placée, si possible, dans un lieu de détention ou d’emprisonnement
raisonnablement proche de son lieu de résidence habituel.

Principe 21

1. Il est interdit d’abuser de la situation d’une personne détenue ou


emprisonnée pour la contraindre à avouer, à s’incriminer de quelque autre
façon ou à témoigner contre toute autre personne.

2. Aucune personne détenue ne sera soumise, pendant son interrogatoire, à


des actes de violence, des menaces ou des méthodes d’interrogatoire de nature
à compromettre sa capacité de décision ou son discernement.

Principe 22

Aucune personne détenue ou emprisonnée ne pourra, même si elle y


consent, faire l’objet d’expériences médicales ou scientifiques de nature à
nuire à sa santé.

Principe 23

1. La durée de tout interrogatoire auquel sera soumise une personne détenue


ou emprisonnée et des intervalles entre les interrogatoires ainsi que le nom des
agents qui y auront procédé et de toute autre personne y ayant assisté seront
consignés et authentifiés dans les formes prescrites par la loi.

2. La personne détenue ou emprisonnée ou son conseil, lorsque la loi le


prévoit, auront accès aux renseignements visés au paragraphe 1 du présent
principe.
Première partie, chapitre premier. Traitement des détenus 39

Principe 24

Toute personne détenue ou emprisonnée se verra offrir un examen


médical approprié dans un délai aussi bref que possible après son entrée dans
le lieu de détention ou d’emprisonnement; par la suite, elle bénéficiera de
soins et traitements médicaux chaque fois que le besoin s’en fera sentir. Ces
soins et traitements seront gratuits.

Principe 25

Toute personne détenue ou emprisonnée ou son conseil a, sous la seule


réserve des conditions raisonnablement nécessaires pour assurer la sécurité et
le maintien de l’ordre dans le lieu de détention ou d’emprisonnement, le droit
de demander à une autorité judiciaire ou autre un deuxième examen médical
ou une deuxième opinion médicale.

Principe 26

Le fait qu’une personne détenue ou emprisonnée a subi un examen


médical, le nom du médecin et les résultats de l’examen seront dûment
consignés. L’accès à ces renseignements sera assuré, et ce conformément aux
règles pertinentes du droit interne.

Principe 27

Le non-respect des présents principes dans l’obtention de preuves sera


pris en compte pour déterminer si des preuves produites contre une personne
détenue ou emprisonnée sont admissibles.

Principe 28

Toute personne détenue ou emprisonnée a le droit d’obtenir, dans les


limites des ressources disponibles, si elles proviennent de sources publiques,
une quantité raisonnable de matériel éducatif, culturel et d’information, sous
réserve des conditions raisonnablement nécessaires pour assurer la sécurité et
le maintien de l’ordre dans le lieu de détention ou d’emprisonnement.

Principe 29

1. Afin d’assurer le strict respect des lois et règlements pertinents, les lieux
de détention doivent être inspectés régulièrement par des personnes qualifiées
et expérimentées, nommées par une autorité compétente distincte de l’autorité
directement chargée de l’administration du lieu de détention ou
d’emprisonnement et responsables devant elle.
40 Recueil des règles et normes de l’Organisation des Nations Unies en matière de prévention du crime et de justice pénale

2. Toute personne détenue ou emprisonnée a le droit de communiquer


librement et en toute confidence avec les personnes qui inspectent les lieux de
détention ou d’emprisonnement conformément au paragraphe 1 du présent
principe, sous réserve des conditions raisonnablement nécessaires pour assurer
la sécurité et le maintien de l’ordre dans lesdits lieux.

Principe 30

1. Les types de comportement qui constituent, de la part d’une personne


détenue ou emprisonnée, des infractions disciplinaires durant la détention ou
l’emprisonnement, le genre et la durée des sanctions disciplinaires qui peuvent
être appliquées et les autorités compétentes pour imposer ces sanctions
doivent être spécifiés par la loi ou les règlements pris conformément à la loi et
être dûment publiés.

2. Toute personne détenue ou emprisonnée a le droit d’être entendue avant


que des mesures d’ordre disciplinaire soient prises à son égard. Elle a le droit
d’intenter un recours contre ces mesures devant l’autorité supérieure.

Principe 31

Les autorités compétentes s’efforceront de fournir, si besoin est,


conformément au droit interne, une assistance aux membres à charge,
notamment aux membres mineurs, de la famille des personnes détenues ou
emprisonnées et elles se soucieront en particulier d’assurer, dans de bonnes
conditions, la garde des enfants laissés sans surveillance.

Principe 32

1. La personne détenue ou son conseil aura le droit d’introduire à tout


moment un recours, conformément au droit interne, devant une autorité
judiciaire ou autre afin de contester la légalité de la mesure de détention et
d’obtenir sa mise en liberté sans délai, si cette mesure est irrégulière.

2. La procédure mentionnée au paragraphe 1 du présent principe doit être


simple et rapide et elle doit être gratuite pour les personnes détenues
impécunieuses. L’autorité responsable de la détention doit présenter sans
retard déraisonnable la personne détenue devant l’autorité saisie du recours.

Principe 33

1. Toute personne détenue ou emprisonnée, ou son conseil, a le droit de


présenter une requête ou une plainte au sujet de la façon dont elle est traitée,
en particulier dans le cas de tortures ou d’autres traitements cruels, inhumains
Première partie, chapitre premier. Traitement des détenus 41

ou dégradants, aux autorités chargées de l’administration du lieu de détention


et aux autorités supérieures, et, si nécessaire, aux autorités de contrôle ou de
recours compétentes.

2. Lorsque ni la personne détenue ou emprisonnée ni son conseil n’a la


possibilité d’exercer les droits visés au paragraphe 1 du présent principe, un
membre de la famille de la personne détenue ou emprisonnée ou toute autre
personne qui connaît l’affaire peut exercer ces droits.

3. Le caractère confidentiel de la requête ou de la plainte est maintenu si le


demandeur le requiert.

4. Toute requête ou plainte doit être examinée sans retard et une réponse
doit être donnée sans retard injustifié. En cas de rejet de la requête ou de la
plainte ou en cas de retard excessif, le demandeur est autorisé à saisir une
autorité judiciaire ou autre. Ni la personne détenue ou emprisonnée ni aucun
demandeur aux termes du paragraphe 1 du présent principe ne doit subir de
préjudice pour avoir présenté une requête ou une plainte.

Principe 34

Si une personne détenue ou emprisonnée vient à décéder ou à disparaître


pendant la période de sa détention ou de son emprisonnement, une autorité
judiciaire ou autre ordonnera une enquête sur les causes du décès ou de la
disparition, soit de sa propre initiative, soit à la requête d’un membre de la
famille de cette personne ou de toute personne qui a connaissance de l’affaire.
Si les circonstances le justifient, une enquête sera conduite dans les mêmes
conditions de procédure lorsque le décès ou la disparition survient peu après la
fin de la période de détention ou d’emprisonnement. Les résultats ou le
rapport d’enquête seront rendus disponibles si la demande en est faite, à moins
qu’une telle décision ne compromette une instruction criminelle en cours.

Principe 35

1. Les préjudices subis à la suite d’actes ou d’omissions commis par un


agent de la fonction publique en violation des droits énoncés dans les présents
principes seront indemnisés conformément aux règles applicables en vertu du
droit interne.

2. Les renseignements devant être consignés en vertu des présents principes


devront être accessibles conformément aux procédures prévues par le droit
interne aux fins des demandes d’indemnisation présentées en vertu du présent
principe.
42 Recueil des règles et normes de l’Organisation des Nations Unies en matière de prévention du crime et de justice pénale

Principe 36

1. Toute personne détenue soupçonnée ou inculpée d’une infraction pénale


est présumée innocente et doit être traitée en conséquence jusqu’à ce que sa
culpabilité ait été légalement établie au cours d’un procès public pour lequel
elle aura reçu toutes les garanties nécessaires à sa défense.

2. Toute personne ainsi soupçonnée ou inculpée ne peut être arrêtée ou


détenue en attendant l’ouverture de l’instruction et du procès que pour les
besoins de l’administration de la justice, pour les motifs, sous les conditions et
conformément aux procédures prévues par la loi. Sont interdites les
contraintes imposées à une telle personne qui ne seraient pas strictement
nécessaires soit aux fins de la détention, soit pour empêcher qu’il ne soit fait
obstacle au déroulement de l’instruction ou à l’administration de la justice,
soit pour assurer la sécurité et le maintien de l’ordre dans le lieu de détention.

Principe 37

Toute personne détenue du chef d’une infraction pénale est, après son
arrestation, traduite dans les meilleurs délais devant une autorité judiciaire ou
autre, prévue par la loi. Cette autorité statue sans retard sur la légalité et la
nécessité de la détention. Nul ne peut être maintenu en détention en attendant
l’ouverture de l’instruction ou du procès si ce n’est sur l’ordre écrit de ladite
autorité. Toute personne détenue, lorsqu’elle est traduite devant cette autorité,
a le droit de faire une déclaration concernant la façon dont elle a été traitée
alors qu’elle était en état d’arrestation.

Principe 38

Toute personne détenue du chef d’une infraction pénale devra être jugée
dans un délai raisonnable ou mise en liberté en attendant l’ouverture du
procès.

Principe 39

Sauf dans des cas particuliers prévus par la loi, une personne détenue du
chef d’une infraction pénale est en droit, à moins qu’une autorité judiciaire ou
autre n’en décide autrement dans l’intérêt de l’administration de la justice,
d’être mise en liberté en attendant l’ouverture du procès, sous réserve des
conditions qui peuvent être imposées conformément à la loi. Ladite autorité
maintient à l’étude la question de la nécessité de la détention.
Première partie, chapitre premier. Traitement des détenus 43

Clause générale

Aucune disposition du présent Ensemble de principes ne sera interprétée


comme constituant une restriction ou une dérogation à l’un quelconque des
droits énoncés dans le Pacte international relatif aux droits civils et
politiques1.
_________
1
Voir résolution 2200 A (XXI) de l’Assemblée générale, annexe.

4. Principes fondamentaux relatifs au traitement des détenus*

1. Tous les détenus sont traités avec le respect dû à la dignité et à la valeur


inhérentes à l’être humain.

2. Il ne sera fait aucune distinction fondée sur des raisons de race, de


couleur, de sexe, de langue, de religion, d’opinion politique ou autre, d’origine
nationale ou sociale, de richesse, de naissance ou de situation.

3. Il est toutefois souhaitable de respecter les convictions religieuses et


préceptes culturels du groupe auquel appartiennent les détenus, dans tous les
cas où les conditions locales l’exigent.

4. Les prisons s’acquittent de leurs responsabilités en ce qui concerne la


garde des détenus et la protection de la société contre la criminalité,
conformément aux autres objectifs sociaux d’un État et aux responsabilités
fondamentales qui lui incombent pour promouvoir le bien-être et
l’épanouissement de tous les membres de la société.

5. Sauf pour ce qui est des limitations qui sont évidemment rendues
nécessaires par leur incarcération, tous les détenus doivent continuer à jouir
des droits de l’homme et des libertés fondamentales énoncés dans la
Déclaration universelle des droits de l’homme1 et, lorsque l’État concerné y
est partie, le Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et
culturels2, le Pacte international relatif aux droits civils et politiques et le
Protocole facultatif qui l’accompagne3, ainsi que de tous les autres droits
énoncés dans d’autres pactes des Nations Unies.

____________
*Résolution 45/11 de l’Assemblée générale, annexe.
1
Résolution 217 A (III) de l’Assemblée générale.
2
Résolution 2200 A (XXI) de l’Assemblée, annexe.
3
Ibid.
44 Recueil des règles et normes de l’Organisation des Nations Unies en matière de prévention du crime et de justice pénale

6. Tous les détenus ont le droit de participer à des activités culturelles et de


bénéficier d’un enseignement visant au plein épanouissement de la
personnalité humaine.

7. Des efforts tendant à l’abolition du régime cellulaire ou à la restriction du


recours à cette peine doivent être entrepris et encouragés.

8. Il faut réunir les conditions qui permettent aux détenus de prendre un


emploi utile et rémunéré, lequel facilitera leur réintégration sur le marché du
travail du pays et leur permettra de contribuer à subvenir à leurs propres
besoins financiers et à ceux de leur famille.

9. Les détenus ont accès aux services de santé existant dans le pays, sans
discrimination aucune du fait de leur statut juridique.

10. Avec la participation et l’aide de la collectivité et des institutions sociales


et en tenant dûment compte des intérêts des victimes, il faut instaurer un
climat favorable à la réinsertion de l’ancien détenu dans la société dans les
meilleures conditions possibles.

11. Les Principes ci-dessus sont appliqués de manière impartiale.

5. Déclaration de Kampala sur les conditions de détention


dans les prisons en Afrique*

Conditions de détention dans les prisons

Considérant que, dans de nombreux pays d’Afrique, le niveau de la


surpopulation carcérale a atteint des proportions inhumaines, qu’on y souffre
d’un manque d’hygiène, d’une nourriture insuffisante ou médiocre, d’un accès
difficile aux soins médicaux, d’une absence d’activités physiques ou
d’éducation, ainsi que de l’incapacité de maintenir les liens familiaux,

Gardant à l’esprit que toute personne privée de liberté a droit à la dignité


de la personne humaine,

Gardant également à l’esprit que les normes universelles des droits de


l’homme condamnent absolument toute forme de torture,

Gardant en outre à l’esprit que certains groupes de détenus, notamment


les mineurs, les femmes, les personnes âgées et les personnes atteintes de
____________
*Résolution 1997/36 du Conseil économique et social, annexe.
Première partie, chapitre premier. Traitement des détenus 45

maladies physiques et mentales sont spécialement vulnérables et exigent une


attention particulière,

Sachant que les mineurs doivent être séparés des détenus adultes et qu’ils
doivent bénéficier d’un traitement correspondant à leur âge,

Rappelant l’importance d’un traitement adéquat pour les femmes


détenues et la nécessité de tenir compte de leurs besoins spécifiques,

Les participants au Séminaire international sur les conditions de


détention dans les prisons en Afrique1, qui s’est tenu à Kampala du 19 au 21
septembre 1996, recommandent:

1. Que les droits de l’homme des détenus soient respectés en toutes


circonstances et que les organismes non gouvernementaux assument un rôle
particulier à cet égard;

2. Que les prisonniers conservent tous les droits qui ne leurs sont pas
expressément supprimés du fait de leur détention;

3. Que l’on assure aux prisonniers des conditions de vie compatibles


avec la dignité de la personne humaine;

4. Que les conditions de détention des prisonniers et le régime


pénitentiaire n’augmentent pas la souffrance déjà causée par la privation de
liberté;

5. Que les effets préjudiciables de l’incarcération soient réduits au


minimum de façon que les détenus ne perdent pas le respect de soi et le sens
de leur responsabilité personnelle;

6. Que les détenus aient la possibilité de conserver et de développer les


liens avec leur famille et le monde extérieur;

7. Que les prisonniers aient la possibilité d’accéder à l’éducation et à


une formation qui leur facilitent leur réinsertion dans la société après leur
libération;

8. Qu’une attention particulière soit accordée aux détenus vulnérables


et que les organisations non gouvernementales soient soutenues dans leurs
activités dans ce domaine;
____________
1
Le séminaire a été organisé conjointement par Prison Reform International et la Commission
africaine des droits de l’homme et des peuples, en partenariat avec Foundation for Human Rights
Initiative et le Gouvernement ougandais par l’intermédiaire du Département des Prisons, et avec la
participation du Comité international de la Croix-Rouge et de l’Observatoire international des prisons.
46 Recueil des règles et normes de l’Organisation des Nations Unies en matière de prévention du crime et de justice pénale

9. Que toutes les normes des Nations Unies et de la Charte africaine


des droits de l’homme et des peuples2 sur le traitement des détenus soient
introduites dans la législation nationale en vue de protéger les droits
fondamentaux des détenus;

10. Que l’Organisation de l’unité africaine et ses États membres


prennent les mesures nécessaires pour assurer que les prisonniers soient
détenus dans les conditions minimales de sécurité nécessaires pour garantir la
sécurité publique.

Détenus en détention provisoire

Considérant que, dans la plupart des prisons africaines, une proportion


importante de détenus attendent leur jugement, parfois pendant plusieurs
années,

Considérant également que, pour cette raison, les procédures et les


mesures adoptées par la police, le parquet et les autorités judiciaires peuvent
avoir une influence significative sur la surpopulation dans les prisons,

Les participants au Séminaire international sur les conditions de


détention dans les prisons en Afrique, qui s’est tenu à Kampala du 19 au
21 septembre 1996, recommandent:

1. Que la police, le parquet et les autorités judiciaires soient conscients


des problèmes causés par la surpopulation carcérale et s’associent à
l’administration pénitentiaire dans la recherche de solutions afin de la réduire;

2. Que les autorités chargées de l’instruction et des procédures


judiciaires veillent à ce que les prisonniers soient gardés en détention
provisoire le moins longtemps possible, en évitant, par exemple, que les
tribunaux multiplient les renvois en détention provisoire;

3. Qu’il y ait un système de contrôle périodique du temps passé par les


détenus en détention provisoire.

Personnel pénitentiaire

Considérant que toute amélioration des conditions de détention dans les


prisons exige que le travail du personnel pénitentiaire soit valorisé et que ses
compétences soient d’un niveau suffisant,

____________
2
Nations Unies, Recueil des Traités, vol. 1520, n° 26363.
Première partie, chapitre premier. Traitement des détenus 47

Gardant à l’esprit que cela n’est possible que si le personnel reçoit une
formation appropriée,

Les participants au Séminaire international sur les conditions de


détention dans les prisons en Afrique, qui s’est tenu à Kampala du 19 au
21 septembre 1996, recommandent:

1. Que le personnel pénitentiaire bénéficie d’une structure de carrière


particulière;

2. Que tout le personnel pénitentiaire soit rattaché à un même ministère


et qu’il y ait une structure hiérarchique bien définie entre l’administration
pénitentiaire centrale et le personnel des prisons;

3. Que l’État accorde au personnel pénitentiaire des ressources


matérielles et financières suffisantes pour exécuter ses tâches de façon
satisfaisante;

4. Que chaque pays établisse un programme de formation appropriée


pour le personnel pénitentiaire auquel l’Institut régional africain pour la
prévention du crime et le traitement des délinquants devrait être invité à
contribuer;

5. Qu’une institution nationale ou sous-régionale soit chargée de la


réalisation de ce programme de formation;

6. Que l’administration pénitentiaire soit directement impliquée dans le


recrutement du personnel des prisons.

Peines de substitution à l’emprisonnement

Notant que, dans un effort pour réduire la surpopulation carcérale,


quelques pays ont tenté de trouver une solution par la voie de l’amnistie, de la
grâce ou par la construction de prisons nouvelles,

Considérant que la surpopulation engendre toutes sortes de problèmes, y


compris des difficultés pour un personnel surmené,

Prenant en compte l’efficacité limitée de l’incarcération, en particulier


pour les détenus purgeant de courtes peines, ainsi que le coût de
l’emprisonnement pour l’ensemble de la société,

Considérant l’intérêt croissant des pays africains pour des mesures non
privatives de liberté, particulièrement en tenant compte des principes des
droits de l’homme,
48 Recueil des règles et normes de l’Organisation des Nations Unies en matière de prévention du crime et de justice pénale

Considérant que les travaux d’intérêt général et les autres mesures non
privatives de liberté sont des peines de substitution à l’incarcération
novatrices et que les développements actuellement en cours en Afrique sont
prometteurs à cet égard,

Considérant aussi que la réparation du dommage causé est un élément


important des peines non privatives de liberté,

Considérant en outre que des mesures législatives peuvent être prises


pour que le travail d’intérêt général et les autres mesures non privatives de
liberté soient imposés comme prime de substitution à l’emprisonnement,

Les participants au Séminaire international sur les conditions de


détention dans les prisons en Afrique, qui s’est tenu à Kampala du 19 au
21 septembre 1996, recommandent:

1. Que les délits mineurs soient réglés selon les pratiques coutumières,
pour autant que ces procédures soient conformes aux principes des droits de
l’homme et que les intéressés y consentent;

2. Que, chaque fois que cela est possible, les délits mineurs soient
réglés par la médiation et qu’une solution soit élaborée entre les parties
intéressées sans avoir recours au système de justice pénale;

3. Que le principe de la réparation par le travail ou de la compensation


financière soit appliqué en tenant compte de la capacité financière du
délinquant ou de ses parents;

4. Que le travail effectué par le délinquant constitue si possible une


compensation pour la victime;

5. Que le travail d’intérêt général et les autres mesures non privatives


de liberté soient, autant que possible, préférés à l’incarcération;

6. Que l’on étudie la possibilité d’adapter les modèles de mesures non


privatives de liberté qui ont donné de bons résultats en Afrique et de les
appliquer dans des pays où elles ne le sont pas encore;

7. Que l’opinion publique soit informée sur les objectifs de ces peines
de substitution à l’emprisonnement et sur leur mode de fonctionnement.

La Commission africaine des droits de l’homme et des peuples

Considérant que la Commission africaine des droits de l’homme et des


peuples a le mandat d’assurer la promotion et la protection des droits de
l’homme et des peuples en Afrique,
Première partie, chapitre premier. Traitement des détenus 49

Considérant également que la Commission a manifesté à plusieurs


occasions sa préoccupation au sujet des mauvaises conditions de détention en
Afrique et qu’elle a déjà adopté des résolutions et des décisions particulières
sur cette question,

Les participants au Séminaire international sur les conditions de


détention dans les prisons en Afrique, qui s’est tenu à Kampala du 19 au
21 septembre 1996, recommandent que la Commission africaine des droits de
l’homme et des peuples:

1. Continue à accorder la priorité à l’amélioration des conditions de


détention dans les prisons dans toute l’Afrique;

2. Nomme, dans les meilleurs délais, un rapporteur spécial sur les


prisons en Afrique;

3. Sensibilise les États Membres aux recommandations contenues dans


la présente Déclaration et fasse mieux connaître les normes et règles des
Nations Unies et de l’Afrique relatives à l’incarcération;

4. Coopère avec des organisations non gouvernementales et autres


institutions qualifiées afin que les recommandations contenues dans la
présente Déclaration soient appliquées dans tous les États Membres.

6. Traitement des étrangers dans les procédures pénales*

Le Conseil économique et social,

S’inspirant de la Déclaration universelle des droits de l’homme, adoptée


et proclamée par l’Assemblée générale dans sa résolution 217 A (III) du
10 décembre 1948,

Ayant présents à l’esprit les instruments juridiques internationaux


pertinents dans le domaine des droits de l’homme,

Ayant aussi à l’esprit l’Ensemble de règles minima pour le traitement des


détenus, adopté par le premier Congrès des Nations Unies pour la prévention
du crime et le traitement des délinquants tenu à Genève du 22 août au
3 septembre 19551 et approuvé par le Conseil économique et social dans sa
résolution 663 C (XXIV) du 31 juillet 1957, ainsi que les dispositions visant à
____________
*Résolution 1998/22 du Conseil économique et social.
1
Publication des Nations Unies, numéro de vente: F.1956.IV.4, annexe I, sect. A.
50 Recueil des règles et normes de l’Organisation des Nations Unies en matière de prévention du crime et de justice pénale

assurer l’application effective de l’Ensemble de règles minima qu’il a


approuvées dans sa résolution 1984/47 du 25 mai 1984 et dont le texte est
reproduit dans l’annexe de ladite résolution,

Rappelant la résolution 49/159 de l’Assemblée générale en date du


23 décembre 1994, dans laquelle cette instance approuvait la Déclaration
politique de Naples et le Plan mondial d’action contre la criminalité
transnationale organisée, adoptés par la Conférence ministérielle mondiale sur
la criminalité transnationale organisée, tenue à Naples (Italie), du 21 au 23
novembre 19942,

Conscient de la nécessité de respecter la dignité humaine et les droits


reconnus des personnes faisant l’objet d’une procédure pénale, telle
qu’énoncée dans les pactes internationaux relatifs aux droits de l’homme3,

Demande instamment aux États Membres qui ne l’ont pas encore fait:
a) De s’assurer avec soin que les étrangers faisant l’objet de poursuites
pénales se voient garantir les droits universellement reconnus en ce qui
concerne les poursuites pénales, à tous les stades de la procédure;
b) De veiller à ce que les personnes se trouvant dans un État ne soient
pas passibles de sanctions privatives de liberté plus graves ni soumises à des
conditions d’incarcération inférieures au seul motif qu’elles ne sont pas
ressortissantes de cet État;
c) De prendre les dispositions nécessaires pour faire en sorte que les
étrangers faisant l’objet d’une procédure pénale, dont la langue maternelle
n’est pas celle de l’État qui conduit la procédure à leur encontre et qui n’en
comprennent donc pas la nature, bénéficient, tout au long de la procédure et
dans la mesure du possible, des services d’un interprète qualifié dans leur
langue maternelle;
d) Dans tous les cas autorisés par le droit ou la coutume internes, de
faire bénéficier les étrangers ainsi que leurs propres ressortissants, sous
réserve qu’ils remplissent les conditions requises, des sanctions pénales ou
administratives de substitution prévues par la législation de l’État conduisant
la procédure;
e) D’intensifier les efforts pour mettre en œuvre les instruments
internationaux applicables tels que la Convention de Vienne sur les relations
consulaires4, qui porte notamment sur la notification aux autorités consulaires
de la détention d’un ressortissant de leur pays.

____________
2
A/49/748, annexe, chap. I, sect. A.
3
Résolution 2200 A (XXI) de l’Assemblée générale, annexe.
4
Nations Unies, Recueil des Traités, vol. 596, n° 8638.
Première partie, chapitre premier. Traitement des détenus 51

7. Déclaration d’Arusha sur la bonne pratique en matière


pénitentiaire*
Consciente du fait que l’administration des prisons est un service de
caractère social et qu’il importe de tenir le public informé du fonctionnement
des services pénitentiaires,

Consciente également qu’il faut promouvoir la transparence et la


responsabilité dans l’administration des prisons et des détenus en Afrique,

Rappelant la Déclaration de Kampala sur les conditions de détention dans


les prisons en Afrique1, qui définit des orientations en vue de la réforme du
système pénitentiaire en Afrique,

Prenant note de la Déclaration de Kadoma sur le travail d’intérêt


collectif2, par laquelle il est recommandé de recourir plus largement aux
peines non privatives de liberté pour les délits mineurs,

Prenant note également des dispositions de la Charte africaine des droits


de l’homme et des peuples de 19813, du Pacte international relatif aux droits
civils et politiques4, du Pacte international relatif aux droits économiques,
sociaux et culturels4, de la Convention contre la torture et autres peines ou
traitements cruels, inhumains ou dégradants5, qui proclament le droit à la vie,
à une prompte administration de la justice et à la dignité de la personne,

Tenant présents à l’esprit l’Ensemble de règles minima pour le traitement


des détenus6, les Principes fondamentaux relatifs au traitement des détenus7,
l’Ensemble de règles minima des Nations Unies concernant l’administration
de la justice pour mineurs (les Règles de Beijing)8, l’Ensemble de principes
pour la protection de toutes les personnes soumises à une forme quelconque de
détention ou d’emprisonnement9 et le Code de conduite pour les responsables
de l’application des lois10,

____________
*Résolution 1999/27 du Conseil économique et social, annexe.
1
Résolution 1997/36 du Conseil économique et social, annexe.
2
Résolution 1998/23, annexe I.
3
Nations Unies, Recueil des Traités, vol. 1520, n° 26363.
4
Résolution 2200 A (XXI) de l’Assemblée générale, annexe.
5
Résolution 39/46 de l’Assemblée, annexe.
6
Voir Premier Congrès des Nations Unies pour la prévention du crime et le traitement des
délinquants, Genève, 22 août-3 septembre 1955: rapport établi par le Secrétariat (publication des
Nations Unies, numéro de vente: 1956.IV.4), annexe I, sect. A.
7
Résolution 45/111 de l’Assemblée générale, annexe.
8
Résolution 40/33 de l’Assemblée générale, annexe.
9
Résolution 43/173 de l’Assemblée générale, annexe.
10
Résolution 34/169 de l’Assemblée générale, annexe.
52 Recueil des règles et normes de l’Organisation des Nations Unies en matière de prévention du crime et de justice pénale

Tenant également présent à l’esprit que le personnel pénitentiaire qui


observe les normes nationales et internationales de protection des détenus
mérite respect et coopération de la part de l’administration pénitentiaire dont
il dépend et de la collectivité dans son ensemble,

Notant que, dans la plupart des prisons africaines, les conditions sont loin
de satisfaire à ces normes nationales et internationales minimales,

Les participants à la quatrième Conférence des chefs des administrations


pénitentiaires d’Afrique centrale, orientale et australe, tenue à Arusha du 23
au 27 février 1999, sont convenus des principes suivants:

a) Promouvoir et mettre en œuvre de bonnes pratiques en matière


pénitentiaire, conformément aux normes internationales mentionnées ci-avant
et, si cela n’a pas déjà été fait, rendre la législation nationale conforme à ces
normes;

b) Améliorer les pratiques d’administration dans chaque prison comme


dans l’ensemble du système pénitentiaire, dans un souci de transparence et
d’efficacité;

c) Perfectionner les qualifications professionnelles du personnel


pénitentiaire, ses conditions de travail et ses conditions de vie;

d) Respecter et protéger les droits et la dignité des détenus et garantir


le respect des normes nationales et internationales;

e) Organiser des stages de formation à l’intention du personnel


pénitentiaire qui incorporent d’une manière significative et pertinente les
normes relatives aux droits de l’homme, perfectionner les compétences du
personnel pénitentiaire et, à cette fin, créer un conseil de la formation, sous
l’autorité de la Conférence des chefs des administrations pénitentiaires
d’Afrique centrale, orientale et australe;

f) Mettre en place un dispositif regroupant toutes les composantes du


système de justice pénale, qui coordonne les activités et apporte son concours
pour résoudre les problèmes courants;

g) Inviter les composantes de la société civile à intervenir dans les


prisons, en concertation avec les services pénitentiaires, dans le but
d’améliorer les conditions d’incarcération et les conditions de fonctionnement
des prisons;

h) Engager les pouvoirs publics et les organisations nationales et


internationales à soutenir sans réserve la présente déclaration.

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