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Nous remercions le Conseil des arts du Canada de l’aide accordée à notre programme de publication.
Nous remercions le gouvernement du Québec de son soutien par l’entremise du Programme de
crédits d’impôt pour l’édition de livres (gestion SODEC) et la SODEC pour son soutien financier.
Remerciements
Les Anciens racontent cette histoire aux jeunes pour les préparer à affronter
les transformations souvent longues et douloureuses qu’ils ne manqueront
pas de vivre au cours de leur vie. De tout temps, l’humain, comme l’aigle,
comme toute espèce vivante, est un jour amené à se dépouiller des attributs
qui ont jadis fait sa force avant de retrouver une nouvelle vitalité et de
poursuivre son évolution. Aujourd’hui, une telle mue apparaît vitale à la
survie des sociétés humaines: soit elles acceptent de se défaire des schémas
anciens devenus obsolètes et laissent émerger des modèles plus respectueux
de l’humain et de la nature; soit…
Introduction
Accompagner les personnes et les groupes dans la
Transition
Parce que nous savons qu’«un autre monde est possible», parce que nous
contribuons à le construire autour de nous, nous proposons aux lecteurs
francophones de s’approprier les clés de la permaculture humaine (chapitre
1). Par un processus de design (chapitre 2), nous invitons chacun.e à se
poser les bonnes questions et à trouver les réponses appropriées à sa
situation particulière, loin des recettes toutes faites. Ce livre invite le lecteur
à se réconcilier avec la nature – dont nous dépendons totalement puisque
nous en faisons partie intégrante –, à (re)découvrir ses liens vitaux avec
l’eau, le sol et la forêt (chapitre 3) et à «permacultiver» son alimentation,
pour la rendre cohérente avec les enjeux d’aujourd’hui (chapitre 4).
Ce livre propose à tout.e citoyen.ne éclairé.e les outils nécessaires à la
transition. Chacun.e les adaptera à son rythme et à sa convenance, là où il se
trouve – dans sa famille, son quartier, son association, à l’école, en
entreprise… Fort.e de la compréhension des enjeux globaux liés à ses
gestes de la vie quotidienne, inspiré.e par des pionniers et des exemples de
solutions alternatives réussies, chacun.e pourra réaliser le design de sa vie
quotidienne, réorganiser ses activités de façon durable et harmonieuse, de
façon à créer des écosystèmes viables et fertiles autour de soi, en toute
conscience et en toute liberté. Chacun.e aura probablement à dépasser
d’inévitables «résistances au changement». La levée de ces résistances sera
facilitée lorsqu’on aura vu que d’autres ont franchi le pas et se portent au
mieux!
Au permaculteur enthousiaste qui découvre de nouvelles perspectives et
qui serait tenté d’assommer ses proches par de fastidieuses exhortations,
rappelons que notre seul pouvoir se limite à nous transformer nous-même.
Inutile de chercher à changer les autres! C’est notre exemple qui leur
donnera – ou non – le désir de s’engager à leur tour dans un processus de
changement. Un tel choix est strictement personnel… et extrêmement
contagieux!
Demain
Nous saluons au passage le formidable succès du film Demain de Cyril Dion et
Mélanie Laurent, projeté dans une trentaine de pays; un million de spectateurs rien
qu’en France, César du meilleur documentaire 2016. Nous ne pouvions espérer
meilleur préambule à ce manuel! Celles et ceux qui ont vibré en voyant Demain
trouveront dans ce livre les moyens concrets de construire autour d’eux ce nouveau
monde auquel ils aspirent. Tous pourront engager leur propre métamorphose.
Quel impact avez-vous sur la planète?
NOUS VOUS PROPOSONS ICI QUELQUES TESTS ludiques à effectuer pour évaluer
l’impact de vos activités personnelles ou collectives sur la planète.
L’objectif est de prendre conscience de cet impact pour tenter de le limiter,
bien sûr.
Le bilan carbone
L’empreinte écologique
QUÉBEC:
www.mddelcc.gouv.qc.ca/jeunesse/jeux/questionnaires/Empreinte/Ques
tionnaire.htm
FRANCE: www.cite-
sciences.fr/archives/francais/ala_cite/expo/tempo/planete/portail/labo/e
mpreinte.html
SUISSE: www.wwf.ch/fr/agir/vivre_mieux/calculateur_d_empreinte/
Ce livre tout entier poursuit cet objectif! Les résultats aux tests de bilan
carbone et d’empreinte écologique sont souvent surprenants – et stimulants.
En mettant en évidence les postes les plus lourds, écologiquement parlant,
dans nos modes de vie, ces tests nous encouragent à chercher comment
améliorer les résultats.
Nous vous suggérons de faire ces deux tests une première fois avant de
lire ce livre. Puis une seconde fois quelques mois plus tard, lorsque vous
aurez amorcé votre transition, intégré quelques principes de sobriété
énergétique et de mutualisation de vos ressources. La progression sera
étonnante!
* Les logiciels spécialisés sont beaucoup plus adaptés que le format papier pour faire rapidement de
tels calculs.
** Vous trouverez en ligne des calculateurs adaptés à la région du monde où vous vivez.
1 Des clés
pour aborder la permaculture humaine
Définitions et fondements de la permaculture
classique
Je tiens pour impossible de connaître les parties sans connaître le tout,
non plus que de connaître le tout sans connaître particulièrement les
parties.
La permaculture n’a rien inventé! De tout temps, bien avant que le mot
«permaculture» existe, les Peuples Premiers prenaient «soin de l’homme et
de l’environnement en générant l’abondance dans un esprit de partage»!
Depuis des décennies, un peu partout dans le monde, des personnes ou des
groupes éclairés entretiennent la flamme, redonnent vie et crédit à des
pratiques ancestrales qui avaient disparu, étouffées sous les feux de l’ère
industrielle, en les enrichissant de l’apport des plus récentes découvertes
scientifiques. Ces démarches qui intègrent, dans une vision à long terme, le
respect de l’être humain et de l’environnement convergent vers le même
but que la permaculture. Selon leur domaine d’application, elles se
nomment agroécologie, agroforesterie, biodynamie, biomimétisme,
sociocratie, économies alternatives, alliances citoyennes, architecture
vernaculaire, bioélectronique, cercle de paroles…
L’éthique de la permaculture
Veiller à ce que chaque personne, dès son enfance, ait les conditions pour
vivre, grandir, évoluer en conscience, épanouir son être dans toutes ses
dimensions et réaliser ce pour quoi elle est née. Veiller à ce que chaque
individu ait accès à l’abondance inhérente au principe de vie. Organiser le
travail de façon à ce que l’être humain ait à peiner le moins possible pour
produire les biens dont il a besoin.
Observer et interagir
Favoriser la biodiversité
Le livre que vous avez entre les mains apporte des clés pour mener à bien
les premières étapes du processus de transformation. D’autres apparaîtront
au fil des expériences et des besoins.
DEVENIR PERMACULTEUR
Quel que soit le domaine dans lequel on les applique, les principes de la
permaculture augmentent l’efficacité des systèmes. Ils génèrent une
dynamique et une abondance des richesses disponibles, y compris
humaines. Grâce à la stimulation de l’hémisphère droit de notre cerveau,
siège de la créativité et de l’intuition, l’action juste surgira spontanément,
inspirée par notre nature profonde, elle-même intimement reliée au tout.
Nous présentons ici plusieurs facettes de cette discipline, sans prétendre
aucunement à l’exhaustivité. Ce livre a pour ambition de faire découvrir
une démarche riche et créative. Chacun.e pourra ensuite l’approfondir selon
ses priorités et ses goûts.
Principe de permaculture n° 1
Observer et interagir
Si nous acceptons l’idée que notre planète est vivante, on comprend que
chaque élément de son «corps», chaque personne, a un rôle spécifique à
jouer. Reste à trouver lequel et à le mettre en œuvre. La complexité des
relations entre les éléments naturels permet au système de rester en
équilibre et en bonne santé. Les éléments non intégrés ou inutiles
disparaissent. Comme le rappelle le philosophe franco-britannique Edward
Teddy Goldsmith, fondateur de la revue The Ecologist4: «Pour que
l’écosphère conserve sa stabilité, tous les êtres vivants qui la composent
doivent obéir à une véritable hiérarchie de lois qui, à elles toutes, forment
les lois de la nature.» Seul problème, l’humanité moderne perturbe, par son
mode de vie, cet ordre: «C’est l’incapacité de l’homme contemporain à
respecter les contraintes protégeant l’intégrité et la stabilité des divers
systèmes sociaux et écologiques qui déclenche leur déstabilisation et leur
désagrégation.» Certes, reconnaît Goldsmith, «on peut enfreindre les lois
gaïennes, mais il faut en payer le prix». Et cela peut même se solder par la
mort du système…
Si vous avez le sentiment confus d’un manque de sens dans votre vie, une
insatisfaction récurrente, si vous avez l’impression de courir et de ne jamais
arriver à destination, vous êtes mûr.e pour le changement. Pas question de
franchir le pas en réponse à quelque influence extérieure. Le signal viendra
(s’il vient!) de l’intérieur, du ras-le-bol face à votre situation actuelle. Petit
à petit, vous allez apprendre à déprogrammer vos habitudes, vos évidences,
vos comportements dysfonctionnels par rapport à la nature. Vous allez avoir
envie de simplifier ce qui peut l’être, par étapes, pour laisser place à un
équilibre dynamique et serein. «Celui qui a compris l’immense simplicité
des choses, celui qui a entendu la note unique sous le bruit universel, celui-
là possède le monde», affirmait le paléontologue, théologien et philosophe
Teilhard de Chardin. Encourageant!
La nature, un modèle à imiter
«LA NATURE, ÇA MARCHE – ce n’est pas comme l’économie!» On peut
dire que Jean-Marie Pelt, le célèbre botaniste, avait le sens de la formule.
Dans la nature, aucune entité n’est isolée du tout, nous rappelait-il lors de
notre rencontre à Metz. Tout est en relation avec tout. C’est le principe
d’associativité: des éléments simples s’associent jusqu’à former des entités
complexes qui présentent de nouvelles propriétés. Teilhard de Chardin dit
très bien que la complexité de la matière génère la vie, puis la complexité
de la vie génère la conscience, puis l’esprit. Mais justement, avec sa
conscience et sa capacité de liberté, l’homme – l’être le plus évolué de
l’univers – n’applique pas automatiquement le principe d’associativité.
L’homme moderne ne veut plus être soumis aux lois universelles. Il se voit
comme l’exploitant, l’exploiteur du monde, et non plus comme le jardinier.
Il idolâtre plus la technologie que l’écologie. Les contemporains, et surtout
les jeunes, connaissent le monde à travers l’écran de leur ordinateur. On a
perdu le sens de l’intuition: le cerveau droit est en punition dans le système
binaire informatique. La pensée moderne a par exemple du mal à admettre
que le tout est plus que la somme des parties. Il y a rupture d’équilibre entre
le micro et le macro. La vocation de l’Institut européen d’écologie (NDLR:
institut que Jean-Marie Pelt a fondé à Metz) est justement de réintroduire
l’homme dans le vaste système de la nature. La nature peut inspirer
utilement les modèles d’organisation sociale et économique de notre monde
moderne.
Principe de permaculture n° 7
Concevoir le design global
avant d’en venir aux détails
1-5-2
Sa démarche part du principe que, quel que soit le défi auquel l’humain doit
faire face, au moins une autre espèce sur la planète a eu à affronter une
situation similaire. Au moins une espèce a mis en place, au fil de
l’évolution, des stratégies efficaces et durables, sans polluer, sans
consommer plus d’énergie qu’elle n’en dispose, sans émettre de gaz à effet
de serre. L’être humain a tout intérêt à s’inspirer de ces solutions qui ont
fait leurs preuves pour créer des organisations, des produits ou des services
performants et pérennes. Et, plus généralement, pour apprendre à vivre lui
aussi «avec grâce», durablement et en bonne intelligence avec les autres
espèces vivantes. Le Biomimicry 3.8 Institute6, créé aux États-Unis par
Janine Benyus et son équipe, forme des jeunes, des étudiant.es et des
professionnel.les à cette approche. Il met également en ligne gratuitement
une base de données pour faciliter et mutualiser les inventions inspirées de
la nature: www.asknature.org. Le site est alimenté par les recherches
d’ingénieurs, de chercheurs, de techniciens et d’architectes qui travaillent
dans le sens du biomimétisme et de l’écoconception.
Dans la nature, il n’y a pas de hiérarchie entre les espèces: c’est notre
vision anthropocentrique qui introduit une notion de hiérarchie. C’est nous
qui avons couronné le lion comme roi des animaux de la jungle. Bien sûr,
chaque espèce a un rôle défini, spécifique. Le rôle d’un charognard n’est
pas celui d’un insectivore ni d’un pollinisateur. Dans une ruche, le rôle
d’une ouvrière est différent de celui d’une reine, mais sa valeur n’est pas
moindre. L’écureuil s’abrite dans le noisetier qui le nourrit, puis il enterre
ses surplus de noisettes ici et là, dont il oublie une partie. C’est ainsi qu’à
son insu il se fait planteur d’arbres! Qui est le plus important? L’arbre dans
son rôle d’habitat et de producteur de nourriture ou l’écureuil qui assure la
postérité de l’arbre en plantant ses semences? Tous font partie d’un
ensemble complexe de fonctions qui permettent au monde de se perpétuer.
Il en va de même dans le règne végétal. La fonction du chêne n’est pas
«supérieure» à celle du roseau. L’humble mousse qui recouvre le sol de la
forêt, comme bien d’autres formes de vie, visibles ou invisibles à l’œil
humain, est aussi utile que les grands arbres.
1-5-3
Une même réalité peut apparaître sous des aspect divers. Tous sont justes et
complémentaires.
Parfois, l’être humain passe à côté de belles occasions. Imaginons que les
premiers Européens à avoir posé le pied en Amérique, plutôt que de
chercher à détruire la richesse des peuples autochtones, eussent accueilli
leur différence. Ils auraient contribué à la création d’un véritable Nouveau
Monde, fruit des expériences des deux cultures, bien plus riche que la
somme des deux: une civilisation à la fois respectueuse de la nature et
dynamique sur le plan technologique.
Chez les insectes sociaux comme les abeilles, les fourmis et les termites,
des groupes d’individus ont des fonctions complémentaires, utiles à leur
espèce tout entière. Chez l’abeille, par exemple, il y a les bourdons
reproducteurs, la reine pondeuse, les ouvrières qui occupent
successivement les rôles de soldates, de ventileuses, d’infirmières, etc. Leur
morphologie, voire leurs organes sont adaptés à ces fonctions particulières
dans la ruche, la fourmilière ou la termitière.
L’humanité dans son ensemble ne déroge pas à la règle: elle a bien un rôle
collectif à jouer dans le grand écosystème de la Terre, rôle que l’on pourrait
résumer en disant qu’il est de contribuer à l’évolution du monde en créant
de nouveaux écosystèmes.
Parmi les aspects qui différencient l’humanité des autres espèces animales,
un point nous intéresse particulièrement dans ce chapitre: en plus de son
rôle en tant qu’espèce, chaque personne humaine est dotée d’une identité
particulière qui a besoin de s’exprimer, de s’épanouir au fil du temps. Cette
identité personnelle n’est pas révélée d’emblée. Sa recherche amène (en
principe) chacun.e à tracer son propre chemin pour trouver sa place et
occuper sa niche personnelle. Cette recherche est laissée à l’initiative et à
l’appréciation de chacun. Elle relève de la liberté individuelle, attribut
exclusif de l’espèce humaine: liberté de choisir entre le meilleur et le pire
ou de ne rien choisir du tout. Cette exception dans le règne du vivant
complique singulièrement la tâche de l’humain. «Je te propose de choisir
entre la vie et la mort, entre la bénédiction et la malédiction. Choisis donc
la vie, pour que vous viviez, toi et ta descendance», exhorte Moïse
(Deutéronome 30,19). L’humanité a donc le pouvoir de choisir de cocréer
le monde… ou de le détruire.
Alors que le rôle des animaux et des plantes est inscrit dans leur
programme génétique, l’humain doit découvrir le sien. Dès le plus jeune
âge, certains enfants se révèlent hyper-sociaux, attentifs aux autres.
D’autres bâtissent des cathédrales avec des pièces de Lego. Les ingénieux
ont toujours des outils à portée de la main pour inventer quelque chose.
Certains naissent avec des facilités intellectuelles, capables de mémoriser
au-delà de la moyenne ou de tenir des raisonnements déconcertants.
D’autres ont des aptitudes scientifiques ou artistiques, une attirance pour le
commerce. On pourrait imaginer des systèmes éducatifs conçus pour aider
les enfants à prendre conscience de leurs dispositions naturelles et à
découvrir leur niche dès le plus jeune âge. Ce n’est pas le cas le plus
courant. Pour trouver son identité particulière et l’accomplir, chacun.e va
au contraire devoir s’extraire du moule dans lequel l’éducation l’a formaté.
1-6-2
– Pourquoi poses-tu cette question? On est bien ici, sur ce gros rocher, à
l’abri de la houle. Nous avons de la nourriture à profusion, tu es en sécurité
au milieu de toute la famille! Que demander de plus?
La petite anémone comprit qu’il valait mieux ne plus poser ce genre de
question qui la rendait étrange aux yeux des siens. Mais sa soif d’aventure
était insatiable. Elle remarqua un détail: quand la lame venait se fracasser
contre le récif, des millions de petites bulles d’air se formaient autour d’elle
et remontaient en dansant vers la surface. Elle se dit que si elle en attrapait
suffisamment, elle aussi pourrait remonter à la surface et enfin aller voir ce
qui se passait de l’autre côté du récif.
Là, l’eau était calme et paisible, chaude et cristalline, d’un bleu turquoise
comme elle n’en avait jamais vu. Sur le fond de sable fin, des anémones
blanches chevauchaient d’énormes coquillages, des poissons clowns
tachetés d’orangé nettoyaient joyeusement les tentacules de ses congénères.
Enfin la vie avait des couleurs et prenait sens.
Deux hémisphères du cerveau valent mieux
qu’un
1-7-1
Petit test: Caressez votre bras en y mettant toute votre attention, mais en
pensant en même temps à ce que vous ferez demain. Vous allez voir qu’il
est difficile de sentir et de penser en même temps! Soit vous ressentez le
contact sur votre peau, soit vous pensez à demain. Pour occuper utilement
la partie gauche du cerveau, on peut lui demander de percevoir la pression
de notre talon sur le sol, la chaleur sur la peau, les sons qui nous
parviennent – sans chercher à les identifier. Cet acte volontaire vous installe
dans le moment présent (cerveau droit) et vous rend perméable à ce qui
vous entoure.
1-7-2
Dans la vie de tous les jours, prenez l’habitude de vous connecter avec ce
que vous trouvez beau dans la nature: goûter le silence, la qualité de l’air, la
chaleur du soleil sur votre peau (attention aux rayons UV!), prendre des
bains de lune ou observer les étoiles, marcher pieds nus sous la pluie, sentir
l’eau ruisseler sur votre visage, toucher l’écorce des arbres, jardiner les
mains nues, écouter le vent dans les arbres, se baigner dans un lac ou une
rivière sans trop de vêtements sur le corps… Si vous vivez en ville, allez
visiter une exposition de peinture, promenez-vous dans un parc, assistez à
un concert, goûtez la beauté des regards, rencontrez des personnes sages et
sereines, pratiquez le yoga, le taï-chi. Prenez le temps d’apprécier la saveur
des aliments.
Avec la pratique, vous allez progresser. Petit à petit, vous pourrez laisser
«infuser» les images et les sensations plus longtemps avant de passer au
stade de l’analyse. Dans un travail en équipe, avant de vous positionner,
faites la même chose, soyez à l’écoute de vos sensations vis-à-vis des
autres personnes ou du projet. Expansion? Contraction? Alors vous pouvez
réfléchir à la suite à donner. Ce temps de pause est indispensable pour saisir
et comprendre (dans le sens étymologique du terme, «prendre avec»)
l’ensemble des éléments et concevoir un design viable.
La marche du Japa
Cet exercice peut se faire n’importe où, même en ville. Il aide à retrouver la
sérénité, la présence à soi-même et aux autres lorsqu’une pensée devient
envahissante ou que la dispersion menace. Marchez d’un pas rythmé,
regardez droit devant vous dans une vision périphérique en respirant par le
nez et portez votre attention sur votre talon gauche. Chaque fois que celui-
ci touche le sol, prononcez dans votre tête un mot d’une syllabe de votre
choix à connotation positive. Par exemple, «beau», «vaste», «bon» ou une
note de musique que vous aimez, «ré». Ou alternez les mots «ici» et
«maintenant». Changez de mot si l’effet s’estompe!
1-7-3
Le trespasso
Cet exercice est excellent pour apprendre à rester dans l’hémisphère droit
du cerveau, au-delà des émotions que vous pouvez ressentir. Il se pratique
de préférence à deux ou seul face à un miroir. Asseyez-vous face à l’autre
personne, suffisamment proche d’elle pour fixer son œil gauche. Dans un
premier temps, fermez les yeux, respirez calmement par le nez et gardez
votre attention sur l’air qui entre et sort de vos poumons. Dès que vous êtes
prêt.e, entrouvrez les yeux, regardez l’œil gauche de votre partenaire.
Réciproquement, votre partenaire regarde votre œil gauche. Si vous
pratiquez seul devant un miroir, regardez votre œil droit dans le reflet du
miroir. Essayez de trouver le calme, sans tension, sans penser à rien.
Observez simplement ce que vous ressentez, sans vous échapper du
moment présent. Laissez passer les tentatives de votre hémisphère gauche
de vous détourner de l’exercice. Si un bavardage mental s’installe, ou une
gêne, une tension provoquée par la proximité de l’autre, évacuez la
sensation dans une expiration profonde. Faites cet exercice pendant trois à
quatre minutes et répétez-le quelques fois. Vous serez surpris.e de constater
qu’il devient rapidement facile. Vous pourrez alors, à loisir, choisir de vous
installer dans cet état d’ouverture, quelles que soient les circonstances.
De son expérience originale (un chercheur dans le rôle du patient), elle tire
une sagesse qu’elle transmet largement depuis: la méditation, la création
artistique, la prière stimulent l’hémisphère droit du cerveau et permettent
d’atteindre un sentiment de paix, d’harmonie, de communion avec
l’univers. Équilibrer l’activité des deux hémisphères évite de se laisser
mener par le seul hémisphère gauche, siège du raisonnement rationnel, qui
nous incline au doute, à la peur, à la colère.
• François Joliat, Henri Laborit: pour quoi vous dire, Paris, L’Harmattan,
2000.
– Dicton populaire
INTÉRÊTS PARTICULIERS OU COLLECTIFS? IL FAUT CHOISIR
L’HUMAIN EST UN ÊTRE DE RELATIONS. Il est par nature lié aux autres. Le bébé
naît totalement dépendant de ses parents. Il lui faudra de longues années
pour accéder à l’autonomie. Dans les sociétés traditionnelles, une fois
adultes, les humains s’entraident spontanément pour construire leurs
habitations, pourvoir à leurs besoins alimentaires, élever les enfants, se
protéger contre les prédateurs… Une solidarité qui a presque disparu dans
nos sociétés du chacun.e pour soi et qui rend la survie de chacun.e
beaucoup plus précaire et angoissante.
La plupart du temps, lorsqu’une personne éprouve le besoin de
retrouver le contact avec sa propre nature, elle cherche à se rapprocher d’un
groupe avec lequel elle pressent qu’elle pourra à la fois exprimer sa
singularité et recevoir du soutien. De même que chaque personne doit
découvrir sa niche pour trouver son équilibre et son épanouissement, tout
groupe doit prendre conscience de sa raison d’être ensemble (la niche du
groupe) pour atteindre ses objectifs de façon efficace et pérenne.
Pour qu’un groupe fonctionne bien, il est important que chaque individu
ait une idée claire de son propre rôle dans l’équipe et connaisse celui des
autres. La position de chacun.e doit être acceptée et reconnue par
l’ensemble des membres de l’équipe. Chaque personne peut alors apprécier
et respecter les forces des autres (pour les mettre au profit du projet) et
accepter leurs faiblesses pour les compenser. Un climat de confiance et une
bonne qualité de communication dans le groupe sont donc déterminants
pour permettre ce subtil équilibre.
Dans le monde vivant, le pouvoir est focalisé sur un objectif unique: la
survie de l’espèce. Seuls les plus forts gagnent et se reproduisent. Les luttes
qui se jouent entre congénères ont pour principale fonction la sélection
génétique et la pérennité de l’espèce. Les fourmis n’ont pas d’opinion
personnelle ou d’intérêt individuel à défendre face au groupe…
Dans les sociétés modernes, les
humains poursuivent bien d’autres
objectifs que la survie de l’espèce, au
point que les contemporains semblent
parfois oublier cet objectif premier!
Même si le dicton populaire enseigne
que «l’union fait la force», la
tendance est de défendre des intérêts particuliers (personnels, familiaux,
d’entreprise, de parti, de groupe de pression, de nation, etc.). Aujourd’hui,
l’urgence collective est bien de dépasser nos réflexes de défense et de
compétition, de renforcer le sens du bien commun en créant des réseaux, en
recherchant des complémentarités, en protégeant le droit à la différence, en
portant une attention particulière aux plus faibles.
Principe de permaculture n° 11
Repérer et valoriser
les effets bordures
Voici quelques pistes pour «permacultiver» vos équipes de façon ludique. Elles
peuvent être utilisées en stage, en famille, au travail, dans le quartier, le village.
Elles permettent de construire des équipes homogènes et enthousiastes. En
quelques jours, voire quelques heures, des personnes d’horizons divers
nouent des liens de confiance. Le nous prend le pas sur les je et le groupe y
puise une force étonnante.
À qui, à quoi va servir le projet visé par le groupe? «Il n’y a pas de
vent favorable à celui qui ne sait pas où il va», dit Sénèque. C’est vrai
aux niveaux personnel et collectif. Une vision claire de l’objectif est
déterminante pour faire converger les efforts vers le même but et
stimuler la créativité. L’objectif doit aussi mobiliser et entretenir la
flamme du groupe. Si l’enthousiasme des équipes est fort, il n’y a plus
de place (ou moins de place) pour les conflits stériles entre les
personnes.
12-01Formuler
12-01Formuler
12-01Formuler
JEU Confiance!
Huit à dix personnes forment un cercle serré. Une personne se met au milieu,
les bras croisés sur la poitrine, les yeux fermés et les pieds joints. À tour de
rôle, chaque membre du cercle la pousse, en douceur, vers d’autres bras qui la
reçoivent. Une fois la confiance établie, on passe au suivant.
12-01Formuler
JEU Félicitations!
Choisir un refrain sur le thème de la congratulation du style «C’est à ton tour de
te laisser parler d’amour» de Gilles Vigneault. À chanter à chaque occasion
spéciale: un anniversaire, un dossier bouclé, une bonne idée, une rencontre
fructueuse, une personne qui arrête de fumer, qui arrive à l’heure…
12-01Formuler
12-01Formuler
12-01Formuler
Les résultats n’en seront que plus riches. En début de séance, établir
l’ordre du jour et préciser l’heure de clôture. En fin de réunion,
rappeler les décisions prises et noter les points non traités à inscrire à
l’ordre du jour de la réunion suivante.
JEU La banque du temps
Se munir d’un jeu de 52 cartes. Chacun.e reçoit en début de réunion quelques
cartes dont la valeur correspond au temps de parole autorisé. On veille à
l’équité entre les participants et participantes. Les négociations sont autorisées.
Ce jeu invite à cibler ses interventions.
12-01Formuler
12-01Formuler
Chaque jour, chaque action offre des occasions de se réjouir
collectivement. Une façon de valoriser le rôle de chacun.e, de prendre
conscience de l’efficacité du groupe, d’entretenir et de renforcer la
confiance collective quant à l’issue du projet.
12-01Formuler
JEU Mime
Chaque personne écrit un mot, n’importe lequel, sur un petit papier. On réunit
les papiers dans une corbeille. À tour de rôle, chacun.e en tire un et doit mimer
ce qui est écrit, sans dire un mot. Les autres ont une minute pour deviner le
mot.
tableau
Depuis 25 ans, plus de 700 projets ont vu le jour en appliquant cette méthode.
Rob Hopkins l’a utilisée avec succès pour lancer le mouvement des Villes en
Transition et rédiger son Manuel de transition10
2 Le design
mode d’emploi
Définition du design en permaculture
LE MOT DESIGN – ANGLICISME DÉSORMAIS accepté dans la langue
française – évoque un ensemble de pratiques destinées à concevoir, à
planifier, à aménager, à structurer un espace, un projet, un groupe, des
relations ou des organisations pour les rendre féconds, abondants et
durables. L’objectif d’un design est d’organiser des interactions bénéfiques
et harmonieuses entre le plus grand nombre d’éléments, incluant les
personnes, chacune étant un élément à part entière du design. Chaque
élément a plusieurs fonctions, ce qui lui permet d’exprimer son plein
potentiel, et chaque fonction peut être assumée par plusieurs éléments, ce
qui rend le système dynamique et pérenne.
Le grand écosystème qu’est notre planète est conçu de telle façon qu’il
fonctionne sans intervention humaine. Il évolue par lui-même en s’adaptant
aux variations de situations. De même, une fois en place, notre design
tendra à s’adapter aux changements qui apparaîtront. Un écosystème créé
par l’humain, dont le fonctionnement dépendrait totalement d’interventions
extérieures, ou qui ne saurait pas s’adapter aux changements serait voué à
disparaître.
UN PROCESSUS ÉVOLUTIF
CLÉ DU SUCCÈS: Prendre son temps, ne pas griller d’étapes! Il est plus
facile de modifier un plan que de revenir sur des actions déjà engagées.
script5
OBSERVATION
BORDURES
RESSOURCES
ÉVALUATION
+ NICHE
+ RÊVES ET REMUE-MÉNINGES
DESIGN
INSTALLATION
MAINTENANCE
MÉTHODOLOGIE
Principe de permaculture n° 1
Observer et interagir
Après s’être assurée d’avoir bien respecté les principes de base définis
par le père de la permaculture puis validé les pistes retenues lors du remue-
méninges, l’équipe vérifie que le projet envisagé constituera un écosystème
viable et pérenne:
L’ÊTRE HUMAIN, COMME TOUT CE QUI VIT et respire, dépend d’un ensemble
complexe d’éléments naturels. Sur certains d’entre eux, il n’a aucune prise:
la rotation de la Terre autour du Soleil, la gravité, le cycle des saisons… Sur
d’autres, il peut avoir, par ses activités, un impact neutre ou négatif. Il peut
aussi avoir un impact positif s’il choisit de restaurer les milieux qu’il a
détruits ou déséquilibrés par des activités désordonnées.
CHIFFRES-CHOCS
Nous choisissons ici de mettre en évidence le lien vital qui unit l’être
humain à l’eau, au sol et à la forêt. Depuis un siècle, l’activité humaine a un
impact majeur sur ces trois éléments, avec des conséquences en chaînes
imprévisibles, notamment sur le climat et sur la biodiversité. La plupart des
ressources, malgré les atteintes qu’elles subissent, auront tôt ou tard la
capacité de se régénérer. Mais l’être humain? Jusqu’où saura-t-il faire face
aux désordres qu’il entraîne? Jusqu’où pourra-t-il survivre dans un
environnement qui serait devenu totalement hostile? Quand prendra-t-il
conscience que négliger ou détruire son milieu équivaut à s’autodétruire?
Ne cédons pas au pessimisme ni au découragement: l’humanité a une marge
de manœuvre pour redresser la barre et choisir d’adopter, en connaissance
de cause, des comportements plus vertueux, en harmonie avec les lois de la
nature. C’est le rôle d’un design permaculturel.
Principe de permaculture n° 4
Appliquer l’autorégulation
et accepter les réactions
Services de régulation: les océans, les rivières, les sols, les forêts
stockent, acheminent, filtrent, purifient, restituent de gigantesques
réserves de biodiversité et d’eau douce, porteuses de quantités de
nutriments et de micro-organismes… sans que personne n’ait à
intervenir! Leur capacité de résilience leur permet par exemple de
réguler les maladies et de jouer un rôle de tampon sur le plan
climatique.
Principe de permaculture n° 10
Utiliser, valoriser et
favoriser la biodiversité
La biodiversi… quoi?
Le mot biodiversité recouvre l’ensemble des formes de vie sur Terre, des plus petites
aux plus grandes, l’ensemble des interactions complexes qu’elles entretiennent, leurs
fonctions et leurs modes de vie. Cette diversité biologique résulte d’une évolution
façonnée au fil de milliards d’années. La communauté du vivant, dont l’humanité fait
intégralement partie et dont nous dépendons totalement, a une origine commune: un
même ADN qui se différencie. Il existe donc des relations de parenté entre toutes les
espèces. Découvrons dans ce chapitre nos liens de parenté avec le monde végétal et
animal!
POUR EN SAVOIR PLUS: «Biodiversité: que recouvre ce mot», Saga science,
Centre national de la recherche scientifique (CNRS),
www.cnrs.fr/cw/dossiers/dosbiodiv/index.php?pid= decouv_chapA.
L’eau, c’est la vie!
C’EST DANS L’EAU QUE LA VIE EST APPARUE sur la planète Terre. C’est dans
l’eau salée du liquide amniotique que commence la vie humaine. Le corps
humain, constitué en grande partie d’eau (en moyenne 70% de son poids),
porte dans ses cellules l’empreinte de l’origine marine de la vie.
L’eau douce est vitale à toutes les espèces animales et végétales
terrestres, pour s’hydrater et respirer. Bien avant de mourir de faim, la
plupart des animaux ou des végétaux privés d’eau meurent de soif en
quelques jours. Tous nos organes ont besoin d’eau, y compris la peau et les
poumons à qui l’humidité de l’air est nécessaire. Même les espèces qui sont
adaptées au désert ou qui hibernent dépendent de l’eau.
La fonction de l’eau dans l’écosystème Terre est de maintenir en vie
toutes les espèces. Rien de moins! Les océans jouent un rôle primordial de
tampon thermique pour réguler les climats, car l’eau stocke la chaleur du
soleil et sa température varie beaucoup moins vite que celle de la Terre. Les
océans fonctionnent également comme un puits de carbone, leurs couches
supérieures recyclant chaque année environ 100 milliards de tonnes de
carbone, soit 60 fois plus qu’il ne s’en trouve dans l’atmosphère.
Le caractère vital de l’eau est inscrit dans la plupart des cultures
humaines et des traditions spirituelles. Combien de récits, de rituels autour
de l’eau liés à la fécondité, à la naissance, à la purification, voire à la mort?
D’où vient l’eau? «L’eau nous vient des étoiles!» résume joliment le
biologiste Pierre Mollo. «Au commencement (il y a 15 milliards d’années),
il y eut le Big Bang. L’univers est concentré en un point minuscule, à des
températures inimaginables (milliards de milliards de degrés). Puis, il y a
cinq milliards d’années, le monde est minéral, baignant dans le CO2 . La vie
est venue du ciel lorsque des comètes et des météorites de glace ont fondu
en frôlant la Terre, apportant eau douce et bactéries anaérobiques (vivant
sans oxygène). Un beau jour, à la faveur d’éruptions volcaniques libérant
des sels minéraux des entrailles de la Terre, une bactérie (cyanobactérie) a
commencé à produire de l’oxygène par photosynthèse. Les bactéries se sont
multipliées tout en absorbant le CO2 et toutes sortes de particules toxiques.
Petit à petit, elles se sont sédimentées, formant des reliefs et des continents.
Depuis lors, le vent chargé du sable des déserts (silice) nourrit les océans et
permet le développement des diatomées (phytoplancton) dans l’eau. Ce
plancton végétal produit de l’oxygène et nourrit à son tour le plancton
animal.» C’est ainsi que l’eau donna naissance à la vie, à la chaîne de vie
marine, laquelle donna ensuite naissance à la chaîne de vie terrestre.
Principe de permaculture n° 5
Utiliser et valoriser les ressources
et les services renouvelables
La quantité d’eau douce disponible sur Terre est limitée et constante depuis
les origines. «L’eau que l’on boit a déjà été bue plusieurs fois», aime à dire
le paysagiste Gilles Clément dans ses conférences. «Peut-être même par un
dinosaure», suggère un internaute!
C’est toujours la même eau qui circule et qui alimente sans cesse les
rivières, les glaciers, les nappes phréatiques, les sols… sans oublier nos
robinets. On estime que 1 000 kilomètres cubes d’eau s’évaporent chaque
jour des océans sous l’effet du soleil. Elle devient gazeuse et se transforme
en nuages qui finissent par retomber sous forme de pluie ou de neige. Puis,
31% des précipitations s’évaporent à nouveau, 16% ruissellent et rejoignent
les cours d’eau, 23% s’infiltrent et alimentent les nappes phréatiques, les
rivières et les gouffres souterrains. Une partie de l’eau retombée au sol
alimente les plantes via leurs racines. Une partie de cette eau est restituée
sous forme gazeuse (vapeur d’eau) par la transpiration des feuilles. Le
volume total d’eau en circulation sur la planète est toujours le même. Avec
des temps variables de séjour dans les différents «réservoirs» (de huit jours
dans l’atmosphère à plusieurs milliers d’années dans les glaciers). L’eau
douce qui retourne à la mer emporte avec elle des matières organiques
terrestres et perpétue le développement du plancton, donc de l’oxygène et
de toute la chaîne de la vie marine.
L’eau est donc une ressource rare et précieuse. D’autant plus que son
volume, constant, doit être partagé entre un nombre croissant d’humains et
d’activités. Avec des écarts de 1 à 10 000, les réserves d’eau douce sont très
inégalement réparties sur Terre. Et inégalement sollicitées. L’hémisphère
Nord dispose de plus de réserves et en consomme énormément.
L’hémisphère Sud dispose de moins de réserves et en consomme beaucoup
moins, malgré une plus forte pression démographique. Ainsi, la menace de
«stress hydrique» pèse de façon très inégale sur les différentes régions du
monde.
eau douce dont plus des deux tiers sont gelés (glaces et glaciers) et le reste
est liquide. Dans le tiers liquide, les trois quarts sont des eaux souterraines
3%
inaccessibles à l’humain (pour l’instant). Ne reste accessible à l’humain que le
quart du tiers liquide, soit moins de 1% de l’eau douce existant sur Terre.
Neuf pays se partagent 60% des réserves mondiales d’eau douce: le Brésil, la
Russie, les États-Unis, le Canada, la Chine, l’Indonésie, l’Inde, la Colombie et le
Pérou.
Principe de permaculture n° 2
Capter et stocker l’énergie
Du fait de la proximité des peuples avec l’eau, les rivières, les fleuves, les
lacs, la mer sont à la fois la ressource et le réceptacle de toutes les activités
humaines. Les Anciens savaient utiliser l’eau sans la polluer et la gaspiller.
Aujourd’hui, le manque de conscience de notre appartenance à la nature
ainsi que la densité de population aux abords de l’eau rendent la situation
critique. Si l’eau douce reste certes une ressource renouvelable (par le cycle
de l’évaporation et des précipitations), elle est désormais menacée. En effet,
les activités domestiques et surtout agricoles et industrielles dans les pays
riches génèrent des pollutions terrestres et ensuite aquatiques (par
ruissellement). Ces dégradations déstabilisent les milieux naturels terrestres
et marins, mettant en péril la santé et la vie de nombre d’espèces, y compris
l’humain. Cette chaîne de pollution des eaux est désormais assez bien
connue des autorités et du public. Cette situation nécessite une mobilisation
générale.
Principe de permaculture n° 6
Éviter la production
de déchets
Afrique subsaharienne 10 à 20
CHIFFRES-CHOCS
Accès à l’eau potable dans le monde (ONU)
Un humain sur trois n’a pas accès à l’eau potable et vit dans une
situation dite de «stress hydrique» (lorsque les ressources sont
inférieures aux besoins).
SOURCE: «Les usages de l’eau: les usages domestiques», Centre d’information sur l’eau,
www.cieau.com/les-ressources-en-eau/en-france/les-usages-domestiques.
traquer les fuites sur le réseau d’eau potable (15 à 20% de l’eau
distribuée);
Principe de permaculture n° 9
Préférer des solutions
modestes et lentes
Des pionniers de l’eau
RENÉ QUINTON (1866-1925) – «Notre organisme est un
gigantesque aquarium marin dans lequel baignent des
milliards de cellules.»
Selon ce biologiste et médecin français, le plasma
dans lequel baignent les cellules des mammifères (dont
nous sommes) est identique au liquide marin originel
(dilution mise à part). Les maladies apparaissent lorsque l’équilibre entre certains de
ces éléments est rompu. Il suffit, selon lui, d’absorber de l’eau de mer purifiée et
isotonique, aux concentrations physiologiques, pour rétablir l’équilibre et aider
l’organisme à reprendre le dessus sur la maladie ou la fatigue. Le procédé «Plasma
Quinton», très pratiqué du vivant du chercheur, y compris en milieu hospitalier, a
ensuite été délaissé au profit de remèdes plus «modernes». Il est aujourd’hui utilisé
en naturopathie.
NOUS NAISSONS SUR LE SOL, nous marchons sur le sol, nous tirons
notre nourriture du sol, nous y construisons nos habitations, nos routes,
nous y développons toutes nos activités et nous avons peu conscience de la
vie qui y grouille: sept millions d’invertébrés vivent sous la semelle d’un
seul randonneur! La plupart des Peuples Premiers vénèrent le sol comme
source de toute fertilité. Les Andins font aujourd’hui encore des offrandes à
la Pachamama, la terre-mère nourricière.
La nature du sol et la vie qui règne dans son épaisseur occupent peu de
place dans la conscience collective des sociétés modernes. On oublie que
sous nos pieds, invisibles à l’œil nu, se jouent des équilibres subtils, vitaux
pour tous les cycles de la vie terrestre et marine, et donc pour notre survie.
En effet, la plus grande partie de la biodiversité terrestre vit dans le sol et
non sur le sol. Dans un mètre carré de sol en bonne santé vivent dans un
équilibre fragile jusqu’à 260 millions d’espèces animales et le double
d’espèces végétales, chacune ayant des fonctions particulières dans
l’ensemble de l’écosystème. Chaque gramme de sol contient jusqu’à
100 000 espèces bactériennes nécessaires aux équilibres vitaux des
organismes terrestres!
Bref, les sols sont un capital inestimable pour la vie sur Terre. Un capital
fragile car il suffit de peu de temps, de peu d’actions désordonnées pour les
rendre stériles.
3-3-1
Le cycle de la matière
Dans tous les cas, il faut du temps, beaucoup de temps pour qu’un sol se
forme: des siècles ou des milliers d’années selon les circonstances (on
compte en moyenne 100 ans pour créer 1 centimètre de sol). Tellement de
temps, en fait, que le sol est considéré comme une ressource non
renouvelable. En milieu tempéré, l’épaisseur des sols (au-dessus de la
roche-mère) varie de 0 à 2 mètres. Elle peut atteindre 10 mètres en zones
tropicales. On considère qu’un bon sol agricole est constitué de 45% de
matière minérale, 25% d’eau, 25% d’air et de 5% de matière organique.
3-3-2
3-3-3
3-3-4
Tout ce qui vit – les plantes, les animaux, les humains – meurt,
inéluctablement. La vie microbienne du sol digère et transforme tous les
résidus végétaux, animaux, minéraux en matières assimilables qui vont à
leur tour nourrir le monde végétal. Les sols jouent en quelque sorte le rôle
de tube digestif de la biosphère. De la présence de matière organique sur le
sol et de la capacité des micro-organismes à la transformer dépendent
directement la qualité et la fertilité du sol… et la santé des végétaux qui y
poussent (de même que la santé du corps humain dépend largement de la
vitalité de sa flore intestinale).
À l’état naturel, les sols ne restent pas nus (sauf dans les déserts). Si l’être
humain ne s’en mêle pas, un sol sauvage mis à nu accidentellement
(incendie, inondation, irruption volcanique) ne le restera pas longtemps.
Une conspiration d’éléments contribuera à le recouvrir: sous l’action du
vent et des oiseaux, des plantes pionnières s’installent, ingratement
nommées mauvaises herbes. Des semences enfouies dans la terre sortent de
leur dormance et germent. Ainsi le couvert végétal se reforme, les forêts
repoussent, produisent une biomasse dont la décomposition créera de
nouveau de l’humus. Et la vie végétale et animale reprendra son cours.
Le permaculteur veille donc à recouvrir son sol d’un mulch. Tous les
matériaux organiques font de bons paillages: feuilles mortes, bois raméal
fragmenté (BRF), branches coupées, copeaux de bois, résidus de tontes de
gazon, journaux, cartons, tapis ou tissus de fibres naturelles, laine de
mouton… Par leur présence, ces matériaux vont activer la vie souterraine,
laquelle va à son tour activer leur décomposition, laquelle va créer de
l’humus et relancer les cycles de la vie. Même une bâche en plastique peut
protéger le sol des intempéries, de l’érosion, et stimuler l’activité des
micro-organismes de la terre.
tableau2
3-3-5
L’eau et l’oxygène sont des éléments vitaux pour les plantes, pour les
micro-organismes et pour les animaux qui vivent dans le sol. L’eau et
l’oxygène doivent pouvoir circuler en profondeur dans la terre pour
alimenter toutes les strates de vie. Par les galeries que creusent les vers de
terre, les taupes, les renards, par le brassage de terre que produisent les
fourmis, les cloportes, les araignées, les mille-pattes, la faune maintient le
sol aéré et l’eau peut y pénétrer. Une fois le sol couvert (principe n° 1), le
permaculteur veille à ce que cette respiration puisse se faire: il dessinera
des chemins sur son terrain pour éviter de tasser le sol n’importe où par ses
piétinements. Il évitera tout spécialement de marcher ou de s’appuyer sur
les zones cultivées pour ne pas refermer les espaces créés par la faune.
Ainsi la terre gardera sa souplesse et sa fertilité, et laissera pénétrer l’eau et
l’air nécessaires à la vie de ses habitants.
Pourquoi diable l’être humain a-t-il pris l’habitude de retourner le sol? Bien
sûr, l’objectif initial est d’oxygéner la terre. L’humain laboure pour
décompacter le sol. Mais pourquoi le sol est-il compacté? Parce que
l’humain y a passé la charrue. En effet, exposée aux lessivages de la pluie,
aux assauts du soleil et du vent, la terre retournée se dessèche et
s’appauvrit. Le passage du soc compacte la terre sur quelques centimètres,
créant une semelle de labour, une couche dure que l’air, l’eau et les racines
des plantes auront du mal à pénétrer. Ce compactage entraîne une perte de
rendement de 10 à 30%. Le labourage crée donc un cercle vicieux: de la
destruction de toutes ces espèces résulte une baisse de fertilité et de vitalité
des plantes qui ne peuvent plus jouer leurs rôles symbiotiques. Elles
deviennent alors vulnérables aux maladies et montrent des signes de
faiblesse qui attirent les ravageurs. C’est un double gâchis: le travail fourni
est contre-productif et la fertilité du sol se trouve réduite. Aucun produit
miracle ne pourra compenser durablement cette perte de vitalité.
Les végétaux sont des êtres vivants, sociaux, capables d’«émotions», qui
«préfèrent» vivre en compagnie d’autres espèces plutôt qu’en monoculture.
Dans la nature, la biodiversité s’installe et se perpétue spontanément; les
plantes se côtoient dans une diversité interactive. Ce brassage est un atout
pour l’équilibre végétal et, par extension, pour la vie du sol. Sur nos
immenses parcelles plantées en lignes droites où règne la monoculture
(production de l’hémisphère gauche de notre cerveau), il n’existe plus de
zones d’échange, ces zones riches où se renforcent les richesses de
plusieurs milieux. La monoculture provoque un appauvrissement minéral
(tous les végétaux utilisent les mêmes nutriments) et génétique (pas de
croisement). Les plantes ainsi fragilisées attirent les mêmes virus, les
mêmes maladies, les mêmes prédateurs qui captent les mêmes signaux de
faiblesse des végétaux à de grandes distances et viennent s’en repaître. À
l’instar des grands prédateurs, ils choisissent les individus faibles, plus
faciles à attaquer. Plus ces ravageurs trouvent des plantes affaiblies à
manger, plus ils se reproduisent, pérennisant ainsi leur espèce (les limaces,
par exemple).
Bref, plus nous cultivons en monoculture, plus les sols s’affaiblissent, plus
les cultures qui y poussent sont fragiles et plus elles attirent virus,
ravageurs, maladies, alouette! Pour briser ce cercle vicieux, le permaculteur
favorisera les interactions entre les plantes en associant les cultures.
Appuyons-nous également sur l’allélopathie, cet ensemble d’interactions
biochimiques par lesquelles une plante émet des substances qui la protègent
des prédateurs ou des maladies. Ou sur la symbiose entre des plantes et des
champignons du sol: ces derniers peuvent transférer à la racine des plantes
les substances dont elles ont besoin mais qu’elles ne savent pas capter
seules. En échange, les plantes vont donner au champignon de la matière
végétale fabriquée par photosynthèse. La productivité peut ainsi augmenter
de façon considérable.
3-3-6
Dans la nature, à leur mort, les végétaux et les animaux restent là où ils
sont tombés et se transforment en humus, sans intervention humaine.
Imitons ce processus et laissons mourir sur place la partie des végétaux que
nous n’utilisons pas! Selon les cas: feuilles, tiges, racines, paille et même
«mauvaises» herbes de nos jardins avant qu’elles ne montent en graine.
Cette biomasse servira de paillis naturel qui nourrira les micro-organismes,
les protégera des variations de température. Elle contribuera à créer de
l’humus et à augmenter la fertilité naturelle de la terre.
Savez-vous qu’un sol en bonne santé contient une tonne de vers de terre par
hectare, soit 3 millions d’individus (ou 300 individus par mètre cube)? Un
hectare compte alors 15 kilomètres de galeries et une quantité incalculable
de turricules, ces déjections riches en humus et sels minéraux que l’on
retrouve entortillées sur la terre. Ce laboureur ne fait qu’oxygéner et
enrichir la terre, sans la perturber! Il travaille tous les jours, gratuitement.
Pas besoin de pétrole! Donnez-lui de bonnes conditions d’habitat et de
nourriture (de la matière organique), et sa générosité vous surprendra.
Aucun risque d’être débordé par une prolifération de vers de terre:
lorsqu’ils atteignent le seuil maximum d’individus, les vers cessent de se
reproduire.
choc-noir
CHIFFRES-CHOCS
Des sols sous haute pression
Depuis le XIXe siècle, 60% du carbone stocké dans les sols et dans la
végétation a disparu sous l’effet du défrichage au profit de
l’agriculture intensive et de l’urbanisation, selon la FAO et l’ONU.
Variantes:
Dès les années 1950, Yeomans recommande aux agriculteurs des régions
arides de recueillir et de stocker l’eau de pluie et de ruissellement sur leur
terrain, selon les courbes de niveau. Son système de «lignes-clés» (keylines,
en anglais) permet de «recréer en deux ou trois ans des sols qui auraient
mis un siècle à se développer naturellement». Il invente une charrue qui
porte son nom, aujourd’hui utilisée dans de nombreux pays. L’engin, conçu
pour de grandes surfaces, aère le sol sans le retourner ni le compacter. «Si
les nations prenaient pour objectif le bon état des sols, les autres problèmes
se résoudraient d’eux-mêmes», affirmait ce visionnaire.
Dans les années 1980, Lydia et Claude Bourguignon affirment que «90% de
l’activité microbiologique des sols en Europe a été détruite par l’agriculture
intensive». Ensemble, ils fondent en 1989 le Laboratoire d’analyse
microbiologique des sols (LAMS) et contribuent à faire connaître le sol en
tant qu’écosystème complexe et fragile. Ils prônent le retour aux haies et à
une agriculture agro-sylvo-pastorale pour restaurer les sols.
POUR EN SAVOIR PLUS: Claude et Lydia Bourguignon, Le sol, la terre
et les champs. Pour retrouver une agriculture saine, Paris, Sang de la Terre,
2015.
La forêt, trait d’union entre ciel et terre
3-4-1
La forêt joue également un rôle social important par le contact qu’elle offre
avec la nature: promenades, jeux, détente, sport, créativité, apprentissages,
voyages, contemplation qui éveille notre conscience… Toutes activités
nécessaires à l’équilibre physique, psychique et spirituel des humains. Les
«bains de forêt» sont de plus en plus recherchés par les citadins. Sans
oublier leur rôle de sanctuaire, vital pour les rares populations humaines qui
y vivent depuis toujours en harmonie, tirant de la forêt, et sans la détruire,
tout ce dont elles ont besoin. Ces populations indigènes sont sans doute les
seules vraies garantes de la préservation des forêts.
3-4-2
En choisissant des plantes qui nous donnent des fruits et des légumes, nous
créons un «jardin-forêt» comestible et autogéré! Plus la diversité végétale
est grande dans ces strates, plus variés sont les habitats pour la faune et plus
grande est la vitalité du sol. Ce milieu captera l’eau et favorisera un
microclimat propice aux régimes de pluie.
l’Indonésie.
À eux trois, ces sites regroupent les deux tiers des forêts primaires de la
planète.
3-4-2
La quantité de carbone sur Terre est constante, mais le carbone connaît des
transformations qui en font un puissant agent de recyclage. La disponibilité
de carbone est déterminante dans le développement des êtres vivants, car
cet élément est à la base des cellules organiques. Tous les aliments produits
par l’agriculture et consommés par l’humain (glucides, lipides, protéines)
sont issus des chaînes carbonées. Par photosynthèse, les végétaux captent
une partie du CO2 atmosphérique et l’utilisent pour créer de la biomasse.
Cette biomasse stocke le CO2 et le conserve, même une fois retourné au
sol. C’est ce qu’on appelle le «puits de carbone».
Le déséquilibre des flux de carbone entre ces divers réservoirs entraîne des
conséquences sur l’ensemble des cycles de vie.
choc-noir
CHIFFRES-CHOCS
Abattre de grandes forêts primaires pour planter des cultures rapides à haut
rendement économique, telle est la principale cause de la déforestation des
plus importants massifs forestiers au monde. Cette destruction est le fait de
puissants groupes industriels qui privilégient leurs profits immédiats à une
gestion durable des forêts et qui, parfois, font fi des réglementations
internationales. Cet abattage permet notamment de produire du soja destiné
au bétail ou des agrocarburants (palmiers à huile, canne à sucre), ou de
faire du profit sur les bois précieux. La pression démographique et le
développement économique des pays les plus boisés ainsi que
l’augmentation de la demande des pays occidentaux en produits exotiques
et en bois de chauffage aggravent la situation.
À voir
choc-noir
CHIFFRES-CHOCS
Ce que nous pouvons faire pour protéger la forêt si nous sommes une
association, un réseau, une municipalité:
3-4-4
Pendant 30 ans, sur son petit terrain de 500 mètres carrés au Pays de Galles,
Robert Hart a montré que le rôle de l’humain dans le jardin se limite à
entretenir les conditions pour «libérer la fertilité» contenue naturellement
dans le sol, en laissant les racines et les vers de terre construire leurs
réseaux de circulation d’énergie. Ainsi entretenu, le sol ne souffre plus des
aléas climatiques (excès de chaleur ou d’humidité). Pour faire pousser des
plantes héliophiles (ayant besoin de soleil), il suffit de ménager une
clairière en abattant occasionnellement un ou deux grands arbres. Par ses
expérimentations personnelles, Robert Hart a prouvé qu’une telle forêt
miniature (avec ses sept strates) peut arriver à maturité en quatre ans en
zone tempérée.
Planter des petits fruits et des groseilliers entre les arbres ou sur les
bordures.
Installer des plantes herbacées et des légumes pérennes17.
Contenir les plantes qui empiètent sur les autres. Un travail quasi
quotidien à la belle saison pendant les premières années!
Des générations de permaculteurs ont suivi ces conseils (en les adaptant,
bien entendu, à la diversité des situations) pour obtenir une production
maximale avec un travail minimal!
EXEMPLE INSPIRANT
Botaniste japonais, spécialiste de la restauration des forêts sur des sols très
dégradés, il a planté 40 millions d’arbres au Japon et ailleurs avec la
méthode de génie écologique qui porte aujourd’hui son nom. Il choisit ses
arbres parmi des essences pionnières et secondaires autochtones,
complémentaires dans leurs fonctions, porteuses de mycorhizes, plantées
serrées pour recréer des couverts forestiers. Il y associe une grande
diversité d’essences d’accompagnement (40 à 60 types de plantes, voire
davantage en zone tropicale) pour les «soutenir». La concurrence entre les
végétaux renforce ceux qui survivront. Miyawaki fait souvent planter les
arbres par des enfants pour favoriser une plantation aléatoire, comme dans
la nature.
FRANCIS HALLÉ (né en 1938): «Fréquenter des arbres remet l’homme à
sa juste place.»
Après avoir couvert, en tant que photographe, tous les désastres causés par
les humains (génocides, exodes, famines), Sebastião Salgado a entrepris,
avec son épouse Lélia, de replanter la forêt Atlantique qui existait jadis
dans son Nordeste brésilien natal, une région désertifiée à la suite de
l’abattage effréné des forêts. Après quelques tentatives, le couple a réussi à
planter, avec l’aide d’enfants des écoles, 2,5 millions d’arbres de 300
espèces différentes sur la ferme familiale de 750 hectares. En 15 ans, l’eau,
la vie, les animaux sauvages sont revenus. Le terrain est devenu parc
national. Éducation à l’environnement, programmes d’insertion de
personnes en difficulté, production de semences et recherches complètent et
diffusent la démarche. Un exemple inspirant pour garder (ou reprendre)
espoir. Un modèle pour tous les lieux sinistrés de la planète.
PARMI LES BESOINS HUMAINS, celui de manger et boire est à la fois le plus
immédiat, le plus impératif et le plus «affectif». Nos habitudes alimentaires,
héritées de l’enfance, façonnent notre identité individuelle et marquent
notre appartenance culturelle. Il est donc particulièrement dérangeant de les
voir remises en question. Pourtant, ne nous en déplaise, les modes
alimentaires actuels dans les pays industrialisés sont appelés à évoluer: ils
ne sont ni généralisables ni durables. Ils engendrent une vulnérabilité
sociale et économique intenable à long terme; ils reposent sur une
dangereuse dépendance envers le pétrole et entretiennent des inégalités
criantes entre les différentes régions du monde, incompatibles avec le
principe de souveraineté alimentaire et de justice sociale. Nos habitudes
alimentaires sont source de pollutions multiples et portent atteinte à la
biodiversité; elles épuisent les ressources naturelles, occasionnent
d’énormes gaspillages et des problèmes de santé majeurs. Bref, il est temps
de changer nos modèles!
Nombre de ressources alimentaires nutritives, économiques,
écologiques et délicieuses sont méconnues, sous-utilisées ou sous-estimées.
Certaines souffrent d’une image négative. Au permaculteur et au citoyen.ne
de bonne volonté que vous êtes, nous livrons ici un ensemble d’éléments
pour nourrir… votre conscience et votre créativité. Et nous vous proposons
une dégustation qui va – nous l’espérons – vous donner le goût d’élargir
votre palette gustative et de tester de nouvelles formes de nourriture. Il est
sûr que vous allez découvrir là des sources insoupçonnées de plaisir et de
santé!
Les Nations unies ont reconnu dès 1948 le droit à l’alimentation dans la
Déclaration universelle des droits de l’homme. Cinquante ans plus tard, le
droit international précise: «Se nourrir dans la dignité, produire soi-même
son alimentation ou l’acheter» est un «droit de l’homme». Produire ses
aliments suppose d’avoir accès à la terre, aux semences, à l’eau. Acheter sa
nourriture suppose qu’elle soit «disponible, accessible et adéquate», c’est-à-
dire «culturellement acceptable», précise le droit international. Qu’en est-il
de ce droit élémentaire au XXIe siècle, alors que près d’un milliard de
personnes survivent en étant sous-alimentées et qu’un autre milliard
souffrent d’obésité et autres pathologies liées à une alimentation
déséquilibrée? Dans les pays riches, un nombre croissant de citoyens
dépendent de l’aide alimentaire. Qu’en sera-t-il du droit à l’alimentation en
2050, alors que nous serons neuf milliards d’humains, dont plus des deux
tiers habiteront en ville, et que déjà plusieurs indicateurs sont passés au
rouge: recul constant des surfaces agricoles du fait de l’étalement des villes
et d’un bétonnage effréné; développement des cultures destinées au bétail et
aux agrocarburants; sols usés par 60 ans de traitements chimiques intensifs;
stocks de poissons qui s’effondrent du fait de la surpêche?
Tous les États membres d’organisations internationales s’accordent à
reconnaître que ce n’est pas tant le manque de nourriture disponible sur la
planète qui pose problème, mais surtout le fait qu’un nombre croissant de
personnes ne peuvent y accéder faute de moyens financiers. C’est donc le
système d’échanges qui est inapte à répondre aux besoins humains.
4-1-1
La nourriture est nécessaire à la vie et les êtres vivants sont en compétition pour obtenir leur part.
Principe de permaculture n° 3
Obtenir une récolte
Principe de permaculture n° 12
Réagir aux changements de façon créative
L’être humain, comme tout être vivant, doit nécessairement manger pour
vivre. Assurer notre subsistance occupe une part importante de notre
activité quotidienne (comme chez les animaux). Cette priorité alimentaire
conditionne l’autre impératif de toute espèce: se reproduire. Sans nourriture
suffisante et saine, pas de fécondité, pas de pérennité de l’espèce.
S’alimenter avec une nourriture de qualité est une priorité absolue.
Tout ce qui est vivant mange ce qui est vivant (ou qui l’a été) pour
assurer sa survie. C’est ainsi que fonctionne la chaîne alimentaire, du plus
petit organisme au plus gros. L’oiseau gobe des insectes et bénéficie des
débris végétaux que ceux-ci ont mangés. Le lion chasse une gazelle et
profite des vertus de l’herbe qu’elle a broutée. Le charognard, comme les
micro-organismes du sol, se nourrit des cadavres. L’énergie de vie se
transmet ainsi, à travers la mort, pour créer du vivant. Cette loi ne connaît
pas d’exception. À nous d’affiner notre observation et de développer notre
conscience: comme tout être vivant, notre énergie vitale vient de notre
alimentation et des forces que nous recevons de la nature. Le blé, la pomme
ou le poisson portent la vie. Leur vitalité nourrit en profondeur le corps et
l’esprit de celui qui l’absorbe, bien au-delà des éléments strictement
nutritifs. Nous avons autant besoin de ces subtils signaux de vie que des
calories qui nourrissent notre organisme.
À sa mort, un humain nourrit les bactéries et autres micro-organismes
du sol. Ces derniers transforment le cadavre en matières assimilables par
d’autres formes de vie, comme des arbres ou d’autres végétaux. Le grand
cycle de la vie et de la mort engendre la vie. Acceptons humblement d’y
participer! Et rappelons-nous que cette nature merveilleusement conçue ne
nous a pas encore tout révélé. Notre connaissance de la vie est encore
limitée. Soyons attentifs, curieux, ouverts et laissons-nous surprendre!
L’hémisphère droit de notre cerveau nous y aidera.
Grâce aux poils de ses fanons, la baleine filtre les énormes quantités
d’eau de mer qu’elle engloutit pour ne retenir que le minuscule
plancton, base de sa nourriture.
Une lionne qui chasse consomme une énorme quantité de calories pour
attraper sa proie et la mettre à mort. Une fois la satiété atteinte, le
fauve peut rester une semaine sans manger: son régime carnée,
hautement énergétique, lui permet de manger irrégulièrement et de
prendre le temps de digérer.
Seuls les saumons les plus vigoureux réussissent toutes les étapes de la
dure remontée de la rivière depuis l’océan pour pondre leurs œufs et se
reproduire.
La mante religieuse dévore son mâle reproducteur après
l’accouplement, évitant ainsi tout risque de consanguinité avec sa
progéniture à venir.
Jane Goodall a longuement étudié les chimpanzés. Dans son livre Nous
sommes ce que nous mangeons19, la primatologue britannique relève des
similitudes entre ces hominidés et l’humain. Comme les chimpanzés,
l’humain est omnivore. L’anatomie des uns et des autres leur permet aussi
bien de cueillir des fruits dans les arbres que de casser des noix, déterrer des
racines, fabriquer des outils pour attraper des insectes, chasser ou pêcher.
Leur métabolisme ne leur impose pas de stocker des réserves importantes
de graisse. Le nomadisme des chimpanzés fait qu’ils disposent d’une
nourriture fraîche et variée tout au long de l’année. Quatre heures de travail
par jour leur suffisent pour répondre à leurs besoins en nourriture. Le reste
du temps est utilisé à jouir des relations sociales. Des pistes pour
l’organisation sociale des humains20!
Mais revenons aux origines… À la différence des animaux qui migrent, qui
hibernent ou qui stockent de la graisse pour l’hiver, à la différence des
plantes qui entrent en dormance, l’Homo sapiens ne dispose d’aucun
mécanisme physiologique pour faire face aux variations saisonnières ou
pour stocker son énergie. Il doit manger chaque jour une nourriture variée.
Il est omnivore de par sa constitution. Ses membres inférieurs lui
permettent de se déplacer vers les aliments disponibles selon les saisons. Au
début de son histoire, l’humain est nomade. Son «intelligence de groupe»
lui permet de développer des stratégies complexes pour trouver sa
nourriture, la cueillir, la glaner, la chasser ou la pêcher. Avec le temps,
l’humain invente des outils et apprend à domestiquer des bêtes pour faciliter
sa quête. Avec l’invention du tour à potier, l’humain stocke et cuit des
aliments dans des récipients. Puis l’invention de la roue, 3 500 ans avant J.-
C., en Mésopotamie (l’actuel Irak), révolutionne sa vie quotidienne: le
travail du sol devient plus facile, l’agriculture se développe et produit des
céréales que l’on peut stocker. L’humain n’a plus besoin de se déplacer pour
chercher sa nourriture. Il devient sédentaire. Avec l’invention quasi
concomitante de l’écriture, l’humain quitte la préhistoire et entre dans
l’histoire!
4-1-2
choc-noir CHIFFRES-CHOCS
Pertes et gaspillages
57% des calories produites dans le monde n’arrivent jamais dans une
assiette**.
À ce gaspillage, il faut ajouter les terres, l’eau, les engrais, l’énergie, le travail,
le temps nécessaires à la production de ces calories.
Produire 1 kilo de blé requiert 1,3 mètre cube d’eau et 1,5 mètre carré de
terrain***.
* Olivier de Schutter, rapporteur spécial des Nations unies sur le droit à l’alimentation, Le
droit à l’alimentation, facteur de changement, 10 mars 2014,
www.srfood.org/images/stories/pdf/officialreports/20140310_finalreport_fr.pdf.
Un être humain peut vivre longtemps sans manger mais ne peut survivre
que quelques jours sans absorber d’eau. Boire, c’est s’hydrater pour
maintenir la teneur en eau constitutive de l’organisme: en moyenne 45 litres
pour un adulte de 70 kilos, soit 65% de son poids! Les organes vitaux – le
cerveau, le cœur, les reins, les poumons, le foie, le pancréas – ainsi que le
sang, les muscles et la peau contiennent entre 70 et 80% d’eau. Une partie
de l’eau de l’organisme est éliminée par les excrétions – urine,
transpiration, selles – et par l’expiration. Il convient de compenser ces
pertes aussi régulièrement que possible. C’est pourquoi il est recommandé
d’absorber environ deux litres et demi d’eau par jour (un volume qui varie
bien sûr en fonction de l’âge, de l’activité, de la température, etc.).
L’équivalent d’un litre d’eau peut venir des aliments et un litre et demi des
boissons23. Attention: les boissons diurétiques (thé, café, alcool) accélèrent
l’élimination, donc la déshydratation. La sensation de soif est le signe que
l’organisme manque d’eau. Il faut donc boire avant d’avoir soif! Notre
rythme de vie nous fait souvent négliger cet impératif. Avoir une réserve
près de soi facilite le geste. Nos cellules assimilent plus facilement une eau
à une température proche de celle du corps, soit entre 30° et 40° C.
Boire, c’est aussi répondre au besoin de l’organisme en sels minéraux et
en oligo-éléments, des substances minérales captées par l’eau sauvage au
contact des roches souterraines et nécessaires à la régulation des fonctions
vitales de l’organisme humain: fluorure, chlorure, phosphate, calcium,
magnésium, potassium, sodium, fer, cuivre, manganèse, zinc, sélénium,
silicium. Les sels minéraux représentent de 4 à 5% du poids de notre corps.
Les oligo-éléments, tout aussi essentiels, ne doivent être présents dans le
corps qu’en très faibles quantités24. Magnifique et vitale dépendance de
l’être humain vis-à-vis de l’eau jaillie des entrailles de la Terre pour réguler
ses fonctions internes les plus subtiles, comme le démontre le professeur
Louis-Claude Vincent. Oui, nous sommes UN avec la Terre, UN avec
l’univers!
LE MARCHÉ DE L’EAU EN
FRANCE
L’eau en bouteille
L’eau du robinet
BOIRE EN CONSCIENCE
Selon les travaux de Masaru Emoto, le fait de
prendre activement soin de l’eau que nous buvons
imprime un message de vie dans la «mémoire» de
l’eau, message qui se transmet à nos cellules et
renforce notre corps et notre esprit de façon
bénéfique. Idem si nous formulons une intention
positive avant de boire de l’eau, affirme ce
chercheur. On imagine volontiers en effet que
boire en conscience – comme manger, parler ou
travailler en conscience – favorise l’équilibre
physiologique et psychologique.
EXEMPLE INSPIRANT
Boire l’eau du ciel
Devenir «eautarcique» grâce à l’eau de pluie! C’est ce
que propose le chercheur belge JOSEPH ORSZAGH sur
son site d’information Eautarcie:
www.eautarcie.org/index-fr.html. Ce site présente,
gratuitement, un ensemble de dispositifs écologiques peu coûteux pour «une
valorisation intégrale de l’eau de pluie» dans la maison ainsi que des réponses
écologiques aux questions d’assainissement, de gestion des eaux grises, de toilettes
sèches, et aux politiques de l’eau. Le tout est assorti d’une réflexion philosophique
enrichie par 20 ans d’expérimentations et de recherches universitaires sur la gestion
durable de l’eau.
Le site invite à quitter l’automatisme du «tout à la poubelle» et son pendant du «tout à
l’égout» qui ont un coût écologique et collectif élevé. Les solutions de potabilisation
de l’eau de pluie proposées par Eautarcie permettent de boire une eau de grande
qualité qui n’a subi aucun traitement chimique.
Selon Joseph Orszagh, la notion d’eau «potable» est avant tout juridique: elle doit
satisfaire à une cinquantaine de paramètres physicochimiques et microbiologiques.
De telles normes bactériologiques rendent la désinfection chimique incontournable,
notamment par l’adjonction de chlore. Le chercheur lui préfère la notion d’eau
biocompatible, qui relève de la bioélectronique de Louis-Claude Vincent et qui se
passe de toute désinfection chimique.
Joseph Orszagh invite les citoyennes et citoyens à potabiliser leur eau de pluie avec
le procédé Pluvalor, mais ne cherchez pas un tel équipement dans le commerce: il
n’en existe pas! À chacun.e de le réaliser… Le procédé Pluvalor est un montage que
chacun.e peut adapter chez soi sur le réseau de plomberie existant. Tous les détails
se trouvent sur le site d’Eautarcie. L’essentiel du coût est lié à la citerne.
Joseph Orszagh estime que l’objectif pour la santé (et l’autonomie) est de produire un
minimum de cinq litres d’eau potable par jour et par personne: soit l’eau de boisson et
de cuisson des aliments. La formule la plus simple et la plus économique consiste à
recueillir l’eau de toiture dans une cuve enterrée en béton ou en briques
(récupérées). Le béton neutralise l’acidité naturelle de l’eau de pluie et la charge
légèrement en sels minéraux (50 milligrammes/litre). Ce dispositif reconstitue
artificiellement les conditions d’une cavité rocheuse dans laquelle l’eau se conserve
très bien, à l’abri de la lumière et des variations de température. Pour les petits
budgets ou des petites quantités, l’eau sera tout simplement extraite de la citerne
avec un seau fixé au bout d’une corde! Pour une réserve d’eau plus conséquente, la
citerne possède un compartiment de décantation (20% du volume total) et un
compartiment de stockage (80%). Le volume de stockage dépend de la surface du
toit collecteur.
Les besoins en filtration de l’eau de pluie dépendent du climat de votre région; prévoir
un filtre à osmose inverse avec un préfiltre de 5 microns pour retenir les sédiments,
une membrane et du charbon actif pour retenir les bactéries et les pollutions
chimiques. «C’est la seule technique qui corrige la composition chimique et
électrochimique de l’eau pour un prix abordable», affirme le chercheur Joseph
Orszagh.
En Belgique, plus de 750 000 personnes utilisent depuis des années l’eau de pluie
pour leur hygiène personnelle. Parmi elles, plus de 100 000 personnes l’utilisent aussi
comme eau de boisson. Pour le plus grand bien de leur santé et de leur porte-
monnaie!
FILTRER TOUTE EAU SAUVAGE
Pour n’importe quelle eau sauvage (source, lac, rivière, nappe phréatique), la filtration
bactériologique peut être effectuée par microfiltration céramique, par simple gravité.
On obtient ainsi une eau de boisson de bonne qualité. Ce dispositif très simple, qui
fonctionne sans électricité et sans consommables compliqués, retient les bactéries et
autres agents pathogènes tout en laissant passer les oligo-éléments nécessaires à la
santé (magnésium, calcium, etc.). On pourra y associer une filtration des substances
chimiques en remplissant la bougie céramique d’une dose de charbon actif. Ce
dispositif retiendra le chlore, le mauvais goût et les résidus de pesticides, y compris,
bien sûr, dans l’eau du robinet. Voici un exemple de filtre vendu tout fait: http://filtre-a-
eau-ecologique-par-gravite.blogspot.com.
Par précaution, le site Eautarcie déconseille fortement l’usage des lampes UV,
technique biocide, c’est-à-dire qui détruit la vie: l’observation de plantes arrosées
avec de l’eau traitée aux UV laisse craindre des effets négatifs sur la santé humaine.
D’autant que la microfiltration céramique ou les filtres à osmose inverse suffisent
largement à garantir une eau potable de haute qualité.
Se nourrir grâce aux végétaux
Sept mille espèces de plantes ont été cultivées ou consommées comme aliments tout au long de
l’histoire de l’humanité, aime à rappeler José Graziano da Silva, directeur général de la FAO.
Aujourd’hui, quatre cultures seulement – le riz, le maïs, le blé et la pomme de terre – constituent
la base alimentaire de l’écrasante majorité des humains, ce qui représente une perte inestimable
de la biodiversité génétique et culturelle. Ne permettons pas que la richesse de l’identité et des
traditions alimentaires disparaisse, ni la sagesse de nos ancêtres. Si nous perdons ces ressources
uniques et irremplaçables, il nous sera bien plus difficile de nous adapter au changement
climatique et d’assurer une alimentation saine et diversifiée pour tous. Notre dépendance à
l’égard d’un petit nombre de cultures a des conséquences négatives à la fois sur les écosystèmes
et sur notre santé28.
Les semences, c’est la vie. Elles contiennent une identité génétique depuis
des millénaires et assurent la continuité des espèces – celle de la plante elle-
même et celle des espèces qui s’en nourrissent, comme les humains. Les
historiens estiment que, depuis la naissance de l’agriculture, il y a environ
10 000 ans, les humains ont sélectionné les semences les plus productives
des plantes les plus délicieuses pour assurer leur alimentation. Plus tard, les
échanges commerciaux entre l’Europe et l’Orient et les Grandes
Découvertes ont fait circuler les semences à l’échelle planétaire,
contribuant, par leur croisement, à enrichir le patrimoine végétal des
différentes régions du monde.
EXEMPLE INSPIRANT
Un jardin-forêt pédagogique en
pleine ville
Le JARDIN DES FRATERNITÉS OUVRIÈRES à
Mouscron, en Belgique, est un jardin d’Éden qui produit
en abondance de la nourriture et qui diffuse
généreusement ses précieux enseignements. On vient souvent de loin pour
rencontrer GILBERT CARDON et visiter son fabuleux jardin. Il faut le voir pour le
croire: 2 000 variétés d’arbres et 5 000 variétés de plantes comestibles ou
médicinales prospèrent sur 1 800 mètres carrés, en pleine ville! Cela fait 40 ans
qu’avec Josine, son épouse, Gilbert cultive son jardin et, surtout, diffuse son
approche permaculturelle auprès de tous ceux qui le souhaitent. Une vision qui lui est
naturelle, comme innée, qu’il s’est forgée par l’observation «et un peu par paresse»,
dit-il, avant même que le concept de permaculture soit défini. Lorsqu’il avait 30 ans,
Gilbert ne connaissait rien au jardinage, assure-t-il. Et la crise du textile a frappé.
Comme beaucoup d’autres, il a dû se mettre à produire de la nourriture pour sa
famille. Proche des mouvements d’éducation populaire, le jeune autodidacte
découvre le jardinage bio et les ouvrages de Claude Aubert. De fil en aiguille, Gilbert
découvre la permaculture et les pionniers australiens. Il est séduit et passe aussitôt à
la pratique.
Au fil des années, la vocation de son jardin évolue et devient surtout
pédagogique. «Je voulais prouver que l’abondance est à portée de main, pourvu
qu’on laisse faire la nature», raconte Gilbert. La visite donne le vertige: 800 variétés
de tomates, 400 variétés de pommiers, 160 variétés de poiriers, 80 variétés de vignes
et d’agrumes, 70 variétés de pruniers, 60 variétés de cerisiers, 50 variétés de
framboises, 35 variétés de figuiers et de ronces fruitières, des centaines de variétés
de fleurs. Un cerisier pleureur voisine avec un citronnier des haies, un poivrier, une
allée de ronces, de dahlias comestibles, de mûriers qui croulent sous des dizaines de
kilos de fruits. Sans une once de produits chimiques, bien sûr. «Le secret, c’est le
sol!» résume Gilbert. Un sol hyper-riche, qui reçoit en direct, depuis plus de 30 ans,
les pelures de fruits et de légumes de la famille, les tontes, les tailles. Un sol qui n’est
jamais retourné pour ne pas perturber les micro-organismes, qui regorge de vers de
terre (trois kilos par mètre carré!) et qui est exceptionnellement riche en humus
(12%). Grâce à sa couverture organique, il n’est nul besoin de l’arroser, même en
période de canicule, précise notre guide. L’eau s’infiltre dans les nombreuses galeries
creusées par les vers et est stockée comme dans une éponge. «Nous sommes
toujours un peu en avance sur les livres, plaisante Gilbert. Nous travaillons de moins
en moins et produisons de plus en plus! On ne peut même plus ramasser tout ce que
produit le jardin. Chacun.e se sert et il en reste beaucoup, pour les oiseaux et pour la
terre.»
Tous les semis démarrent dans des pots (la végétation est trop dense pour
envisager des semis en plein sol); une variété différente par pot, identifiée par des
étiquettes bien lisibles. Et ils sont entreposés sous des abris plus ou moins étanches
ou le long des allées. Au Jardin des Fraternités ouvrières, on ne fait pas dans le high-
tech. On se félicite d’avoir récupéré une bâche pour faire telle serre, une tôle comme
coupe-vent, des grilles d’égout pour paver une allée. «Ici, on coopère avec la nature.
C’est elle qui fait le travail. On lui crée juste les conditions favorables, explique le
maître jardinier. Le plant est arrosé par la coupelle du pot pour ne pas lui faire subir
de choc thermique. Quand les plants sont suffisamment grands, on repique les plus
beaux en pot, puis en terre, sans arrosage, insiste le maître. L’humus apporte
l’humidité nécessaire. Et le stress du repiquage fortifie la plante. On peut ainsi gagner
trois semaines de culture. Pendant ce temps, le terrain est disponible pour d’autres
plantes. Les choux se repiquent à racines nues, les carottes à quatre à cinq par pot et
les navets, avec la motte. Les courges arrivent avant les adventices. Le terreau sert
deux fois.» Il connaît son affaire sur le bout des doigts, Gilbert! Il faut s’accrocher
pour le suivre. «Ici, pas besoin de tuteurs pour les haricots. Ils grimpent aux arbres,
tout seuls!»
Dans le jardin de Gilbert, les seuls engrais utilisés sont les herbes sauvages.
«Tout ce qui a été vivant se corrompt et retourne à la terre, rappelle Gilbert. Les
éléments nourriciers restent actifs dans les plantes mortes. Grâce au purin végétal,
les propriétés des plantes s’équilibrent et s’harmonisent pour fortifier les semis et
soigner le jardin, naturellement et gratuitement!»
Compter 100 à 200 grammes de plantes fraîches pour 10 litres d’eau. Laisser
fermenter deux ou trois jours en remuant de temps en temps. Laisser reposer deux à
trois semaines. Diluer avant d’arroser: une part de purin pour cinq parts d’eau. On
peut ajouter une poignée d’algues pour atténuer l’odeur qui se dégage.
De même, la prévention contre les attaques de nuisibles ou de maladies est
assurée par la biodiversité, «comme en Bolivie où on cultive en association des
centaines de pommes de terre différentes. Les parasites ne s’y retrouvent plus dans
une telle diversité de couleurs et d’odeurs. Les uns deviennent la nourriture des
autres, un champignon est mangé par un autre champignon. Le terrain est “vacciné”.
Tout se régule naturellement», assure Gilbert.
Une mare alimentée par les eaux de pluie attire insectes, batraciens, hérissons.
Des caches sont aménagées pour ces animaux qui jouent un précieux rôle
d’auxiliaires. Dans les arbres fruitiers, des petits pots suspendus la tête en bas et
bourrés de chiffons offrent le gîte et le couvert aux perce-oreille. Ces derniers sont
ainsi à pied d’œuvre pour se régaler des larves ou œufs d’insectes qui auraient prévu
de s’installer dans les fruits. Ici et là, des tas de pierres ou de branchages servent de
nid aux butineurs qui pollinisent le potager.
Seules les limaces restent un défi, bien qu’en régression au fil du temps.
L’équipe de Gilbert a tout essayé et préconise finalement le «stationnement à
limaces», à base de son de seigle, qui attire les gourmandes. Il suffit alors de
ramasser les gêneuses et de les offrir aux poules. Infatigable, Gilbert poursuit son
enseignement devant un auditoire médusé. «Un arbre affaibli produit davantage et
plus vite qu’un arbre fort», assure-t-il. Et de recommander «la taille Lorette» (du nom
de son inventeur, Louis Lorette, vers 1900): une taille d’été – de mi-juin à mi-
septembre – qui présente selon lui tous les avantages. «Les fruits sont déjà formés;
on voit ce qu’on fait. Cette taille maintient l’arbre plus petit et permet d’associer à son
pied la culture de différents légumes ou petits fruitiers qui entretiennent l’humidité.
Comme elle se pratique à la période où les nuisibles (pucerons, chenilles) se
développent sur les bourgeons apicaux, elle permet de les repousser: la taille modifie
la composition de la sève qui, du coup, ne convient plus aux nuisibles: ils meurent de
faim ou vont voir ailleurs. Pour limiter la propagation des champignons, les branches
malades sont laissées au pied. Elles «vaccinent» l’arbre de façon homéopathique. La
nature ne brûle pas les branches tombées au sol», s’exclame Gilbert. «Faisons de
même! En été, les plaies occasionnées par la taille cicatrisent naturellement grâce
aux températures plus élevées. La taille Lorette est facile, elle s’apprend en deux ou
trois heures. Elle évite totalement le recours aux produits chimiques, même bio. Les
solutions les plus simples, populaires, accessibles à tous sont toujours les
meilleures!» résume le pédagogue.
Résultat de toutes ces pratiques: la végétation est tellement dense qu’elle crée
un microclimat. En hiver, la température au sol est de 3° à 4° C supérieure à celle de
l’air, phénomène appréciable dans un pays plutôt frais.
Un peu plus loin, aménagée autour d’un ancien lavoir alimenté par l’eau de pluie,
une serre californienne offre aux plants de tomates, de poivrons, d’aubergines et de
melons un abri chaud et ensoleillé plusieurs semaines avant l’heure. Derrière la vitre
face au sud, des tuyaux d’eau peints en noir captent la chaleur du soleil et la stockent
dans l’eau du lavoir, régulant ainsi les variations de température extérieure. Des
poissons rouges vivent dans le bassin et se nourrissent des larves de moustique.
L’été, des arbustes à feuilles caduques plantés à l’extérieur limitent les surchauffes.
À plus petite échelle, chacun.e peut aussi produire chez soi, même en
appartement, quelques herbes aromatiques, des champignons, des tomates
et des graines germées. Cela demande peu de place, peu d’investissement,
peu de travail, juste un peu de liberté d’esprit pour mettre les cultures en
route. Ces mini-cultures apporteront un complément intéressant d’aliments
nutritifs et beaucoup de plaisir, y compris pour les enfants qui adorent faire
pousser des végétaux. Des pionniers ont ouvert la voie…
simple stockage dans un endroit sec et bien zventilé pour les fruits à
coques, pour certaines variétés de pommes de terre et de pommes
(attention aux rongeurs);
enfouissement dans le sable (carottes);
Animations pédagogiques
La ferme s’est également donné une mission pédagogique. Elle s’est associée en
2011 à City Growers, un programme éducatif sans but lucratif, pour faire découvrir
aux enfants et aux jeunes adultes le site et les activités agricoles qui s’y tiennent. La
ferme propose des excursions et des ateliers sur les thèmes du vivant, de la nutrition
et du développement durable. Plus de 10 000 jeunes ont été ainsi accueillis à
Brooklyn Grange Farm.
Formations professionnelles
La ferme attribue chaque année une centaine de certificats aux adultes qui ont suivi
sa formation professionnelle d’agriculteur urbain. Elle souhaite ainsi assurer la relève
pour l’approvisionnement des villes et l’expansion du modèle des fermes urbaines.
Elle s’est récemment liée au Refugee and Immigrant Fund, dans Queens, pour offrir
des emplois aux réfugiés d’Afrique, d’Asie et d’Amérique centrale. En échange, ces
derniers apportent leurs traditions culturelles et agricoles, augmentant ainsi la
diversité au sein de la ferme.
EXEMPLE INSPIRANT
La culture sur fenêtres!
La société fait face à des défis nouveaux et colossaux,
comme la gestion de l’énergie et l’approvisionnement des
villes en nourriture. Le projet WINDOWFARMS («fermes
de fenêtre») vise à relever ces défis grâce à une
communauté créative et innovante. Créé en 2009 par Britta Riley et Rebecca Bray, le
projet Windowfarms fait pousser des plantes en hydroponie dans l’un des endroits les
plus inattendus pour de l’agriculture: les appartements urbains. Les deux principaux
objectifs sont de permettre aux citadins de produire une partie de leur alimentation
chez eux toute l’année et d’innover ensemble, grâce au web, dans le but de faire
évoluer les villes vers une consommation durable.
Le frigo du désert
CONSOMMATION: zéro énergie fossile. Le fabriquer est simple comme bonjour: deux pots
de terre cuite (type pots de fleurs) de tailles différentes. Colmater les trous du fond avec des
bouchons de liège. Mouiller les pots, puis emboîter l’un dans l’autre en remplissant
l’interstice de sable mouillé. Poser le tout sur une coupelle remplie d’eau pour maintenir
l’humidité des pots et du sable. Mettre sa plaque de beurre ou ses yaourts à l’intérieur et
recouvrir le tout d’un épais linge mouillé. La différence de température entre l’intérieur et
l’extérieur produit de la condensation qui génère du froid à l’intérieur. C’est pourquoi plus il
fait chaud dehors, plus il fera froid dedans!
4-3-2
Comment ça marche?
Privés d’oxygène (milieu anaérobique) et légèrement salés, les légumes et les
agrumes, plutôt que de se dégrader sous l’action de certaines bactéries qu’ils
hébergent, développent seulement des ferments lactiques qui se nourrissent de
glucides. Ces ferments lactiques inhibent le développement des autres bactéries.
Lorsque le milieu atteint un pH assez acide (autour de 4), la fermentation lactique se
stabilise et l’aliment peut se conserver des mois. Il reste cru et vivant. Les aliments
lactofermentés peuvent être considérés comme des compléments alimentaires,
riches en vitamines et stimulants pour le système digestif. Ils renforcent le système
immunitaire. Il ne faut pas en abuser puisqu’ils sont salés. On peut en ajouter une
cuillerée à soupe dans une salade ou un plat de féculents.
Comment faire?
Laver, râper ou émincer des légumes bio en très petits morceaux. Y associer
les légumes, les épices et les aromates qui vous chantent et ajouter du gros sel
(30 grammes par litre).
Remplir les bocaux avec les légumes en les tassant au maximum pour chasser
l’air et remplir d’eau tiède.
Poser une planche de bois sur les pots bien remplis et laisser à température
ambiante (entre 15 et 25 °C), à l’abri de la lumière pour démarrer la
fermentation.
Après deux ou trois jours, bien refermer les couvercles et conserver au frais
(cave, cellier) pendant un mois avant de déguster.
EXEMPLE INSPIRANT
Hélène, interprète des plantes sauvages
HÉLÈNE vit à l’orée d’un bois. Elle a fait le choix d’une vie simple, proche de la
nature. La jeune femme aime marcher pieds nus, libérée des chaussures, «pour
goûter la richesse des sensations avec les végétaux, sentir la température du sol et
éviter d’écraser qui que ce soit». Nous l’avons suivie
dans l’un des parcours découverte des plantes sauvages
qu’elle organise avec l’association LE VAL’HEUREUX,
dans les Côtes-d’Armor, en France.
Bien sûr, Hélène nous met en garde: «Ne récoltez que les plantes que vous
reconnaissez de façon certaine. Si vous avez un doute, vous laissez! La seule façon
d’éviter les plantes toxiques, c’est d’apprendre auprès des connaisseurs. Cette
transmission directe est nécessaire. Les livres ne suffisent pas. Et, bien sûr, prélevez
seulement ce que vous êtes sûrs d’utiliser. Cueillez, n’arrachez rien, de façon à
préserver la ressource.»
Tout ce qu’elle sait, Hélène l’a appris en aiguisant son sens de l’observation, dans les
livres, en suivant des cours d’herboristerie, mais surtout en écoutant des aînés avec
qui elle a fait de nombreuses sorties botaniques. C’est ainsi qu’elle a approché «les
plantes indicatrices de sol» avec le botaniste Gérard Ducerf, découvert le langage
des fleurs aux côtés de Marc Grollimund, passionné de jardins-mandala, suivi
l’herboriste Thierry Thévenin sur le chemin des herbes de vie, à la «Fête des
Simples», et appris à faire confiance avec «les bonnes herbes» de l’ethnobotaniste
Pierre Lieutagh. «Il est rassurant d’être en lien avec les plantes sauvages, de savoir
qu’elles peuvent nous nourrir, nous donner leurs forces et même nous soigner,
témoigne Hélène. Petit à petit, on perçoit qu’on vit au cœur du même écosystème. On
peut s’appuyer sur elles. La nature pourvoit à nos besoins, sans qu’on n’ait rien à
faire. C’est cadeau: on n’a plus qu’à dire merci!» C’est d’ailleurs à l’occasion d’un
problème de santé qu’Hélène s’est mise à étudier les plantes sauvages. «Un médecin
avait diagnostiqué une infection, se souvient la jeune femme. Je ne souhaitais pas
prendre d’antibiotiques alors j’ai cherché dans les livres quelles plantes pourraient
correspondre à ma situation. Et ça a marché! Depuis, chaque fois que j’ai un petit
problème de santé, je cherche d’abord du côté des plantes. Petit à petit, j’ai
complètement cessé de prendre des médicaments. Je ne consulte que pour avoir un
diagnostic. Pour cela, les médecins sont irremplaçables.»
Grâce aux plantes sauvages, Hélène a fait de belles rencontres, découvert des lieux
qu’elle n’aurait jamais visités spontanément, approché des réalités invisibles. «Un
grand bonheur!» Tout simplement.
Pierre Lieutaghi, Le livre des bonnes herbes, Arles, Actes Sud, 1996.
Marie-Claude Paume, Sauvages et comestibles. Herbes, fleurs et petites
salades, Saint-Rémy-de-Provence, Édisud, 2011.
FORMATIONS:
Quelle est la différence entre le lait d’une vache qui passe ses journées au
pré et le lait d’une vache qui passe sa vie en stabulation industrielle? À
l’œil, quasiment aucune. Au goût, les initiés verront vite la différence à la
crème du lait issu du pré. Mais c’est à l’analyse biologique que se révèlent
les différences les plus criantes.
Nous avons interrogé le Dr Bernard Schmitt, endocrinologue, chercheur
et directeur du Centre d’enseignement et de recherche en nutrition humaine
(CERNH)37. Inquiet, comme ses collègues, de constater depuis une
vingtaine d’années une augmentation massive des pathologies «modernes»
comme le surpoids, l’obésité, le diabète, les maladies cardiovasculaires, le
cancer, il a entrepris des recherches sur le lien entre alimentation et santé.
«Nous sommes ce que nous mangeons, rappelle le chercheur en nutrition.
La qualité nutritive de notre alimentation a un impact décisif sur notre
santé.»
Il a mené des études sur le bétail, l’environnement et l’humain. Les
résultats ont montré que le lait des vaches qui passent la journée au pré
détient un taux d’acides gras bien équilibré entre oméga 6 et oméga 3 alors
que le lait des bêtes qui sont nourries en stabulation de fourrage sec et de
farines présente un excès d’oméga 6 et un déficit important d’oméga 3.
Mêmes différences pour les volailles en liberté ou en batterie et leurs œufs.
La santé des animaux dépend bien sûr directement de leur alimentation et
de leur mode de vie. Les déséquilibres enregistrés dans l’organisme du
bétail se retrouvent automatiquement dans l’organisme des personnes qui
consomment le lait, le beurre ou les œufs de ces animaux, puis se
répercutent, après des années, sur la santé humaine.
Les enquêtes du Dr Schmitt démontrent l’impact de différentes filières
d’élevage sur la santé de patients souffrant d’obésité, de diabète et de
maladies cardiovasculaires. Des populations de patients volontaires ont été
soumises pendant trois mois à un régime alimentaire strict. Tous avaient
apparemment le même menu. Mais la moitié des menus étaient
confectionnés avec des produits fermiers soumis à un cahier des charges
très précis et l’autre moitié avec des produits industriels. Au bout d’un
mois, les relevés biologiques sanguins des deux groupes de patients étaient
très différents: les uns avaient retrouvé l’équilibre souhaitable entre oméga
6 et oméga 3 (rapport de 1 à 4) tandis que les autres présentaient toujours le
déséquilibre pathogène (rapport de 1 à 12) entre ces deux acides gras
essentiels. Dans les mois suivant l’expérimentation, les patients qui avaient
bénéficié de produits fermiers conservaient durablement les avantages du
régime – car «les oméga 3 inhibent la production des cellules graisseuses»,
explique le Dr Schmitt – alors que les personnes qui avaient mangé de la
nourriture industrielle reprenaient du poids rapidement. Le Dr Schmitt a
prouvé qu’un régime riche en oméga 3 grâce à la viande d’animaux nourris
avec un supplément de lin (plante naturellement riche en oméga 3) avait les
mêmes effets protecteurs contre les maladies cardiovasculaires qu’un
régime riche en poissons.
Fort de cette démonstration scientifique de l’influence du mode
d’élevage sur la qualité nutritive de la viande, du lait, du fromage et des
œufs, le Dr Schmitt décide de faciliter la commercialisation de produits
animaux bons pour la santé en agissant sur la chaîne alimentaire, c’est-à-
dire sur la nourriture du bétail. «Je suis convaincu que l’alimentation seule
peut améliorer la santé de la plupart des patients qui souffrent de ces
maladies modernes. Il suffit qu’ils aient accès à des aliments sains», insiste-
t-il. En l’an 2000, sous l’impulsion du chercheur, un collectif rédige une
charte38 de production et de transformation garantissant l’équilibre entre les
omégas 6 et les omégas 3, nommée charte Bleu-Blanc-Cœur.
CHIFFRES-CHOCS
Alimentation et santé
Enfants en surpoids
Maladies cardiovasculaires
Première cause de mortalité dans le monde (9 millions de décès par an); deuxième
cause en France, après le cancer.
Cancer
Plus de 30% des décès dus au cancer seraient évitables grâce à une meilleure
hygiène de vie, notamment en réduisant la consommation de viande rouge**.
Diabète
Les cas de diabète diagnostiqués dans le monde sont passés de 30 millions à
260 millions entre 1985 et 2005. Environ 7,3% de la population mondiale est
concernée. En France, les cas de diabète de type 2 ont doublé en 15 ans. Au
Québec, 80% des personnes diabétiques souffrent d’embonpoint ou sont obèses au
moment du diagnostic.
Allergies alimentaires
Elles sont devenues le quatrième problème de santé publique dans le monde, selon
l’Organisation mondiale de la santé (OMS). Cette pathologie chronique
potentiellement grave touche 25% des enfants dans les pays riches. En 2050, une
personne sur deux sera allergique, selon les prévisions de l’OMS.
SOURCES:
Protéines animales et
environnement
Consommation de viande
Monoproduction de lait
83% du lait mondial est produit par la seule race de vaches Holstein**. Bonjour la
diversité biologique et économique…
Insectes
La production de protéines d’insectes ne requiert quasiment pas d’eau.
SOURCES:
** Fondation Heinrich Böll et les Amis de la Terre, Atlas de la viande: la réalité et les
chiffres sur les animaux que nous consommons, 2014,
www.amisdelaterre.org/IMG/pdf/latlasdelaviande.pdf.
Les adeptes du «moins ou pas de produits animaux» font aussi valoir, outre
les questions diététiques (comme l’acidité qu’apporte la viande), des
arguments écologiques de bon sens. Sachant que la surface de la planète est
limitée et que produire 1 kilo de viande exige de 3 à 14 kilos de végétaux
(et les surfaces agricoles correspondantes), on comprend bien qu’avec 9
milliards de bouches à nourrir en 2050, la consommation de viande ne
pourra pas continuer à grimper indéfiniment. Les hypothèses d’évolution de
la demande en viande d’ici 2050 varient de – 50 à + 80% selon les études.
On observe que les classes aisées et éduquées des pays industrialisés sont
les premières à intégrer les messages nutritionnels et à limiter leur
consommation de viande, entraînant petit à petit les autres couches sociales.
Cette nécessaire maîtrise de la demande est bien perçue par certains États
(tel le Brésil), qui mettent en place des politiques éducatives (et
contraceptives) dans ce sens. Si les arguments écologiques ne suffisent pas,
le coût sanitaire de régimes alimentaires déséquilibrés pourrait aider
certains États à passer à l’action. En Chine, où, en 30 ans, la consommation
de viande a été multipliée par 4 et celle de lait par 10, près de 25% de la
population souffre de surpoids ou d’obésité. Quel gouvernement resterait
longtemps passif devant une telle tendance?
Une piste de solution pour répondre aux besoins en protéines
consisterait peut-être à mieux équilibrer les sources végétales et animales en
introduisant par exemple, et petit à petit, quelques repas végétariens et des
protéines à base d’insectes dans son régime. C’est ce que préconisent
nombre de nutritionnistes et de défenseurs de l’environnement. La Suède,
elle, envisage une taxe carbone sur la viande rouge.
Élever quelques poulets dans son jardin permet de s’assurer une production
familiale d’œufs frais et de viande de bonne qualité. Principe permaculturel:
multiplier les fonctions (au moins trois fonctions par action). En plus de
leur service alimentaire, les poulets tondent le gazon, ils mangent un grand
nombre d’insectes, de limaces, d’escargots et d’autres larves, fertilisent le
sol avec leurs fientes. Ils peuvent éventuellement être une source de
revenus. Sans parler de l’immense plaisir de communiquer avec ces
volatiles très sociaux!
Pour optimiser l’utilité des poules dans le jardin, on peut leur construire
une cage mobile, légère, sans fond, avec perchoir, eau et protection contre
les intempéries. On déplace cette cage régulièrement dans les zones qu’on
souhaite travailler. Les poulets deviennent alors de véritables auxiliaires
dans le jardin.
L’élevage de pigeons
… et ces films:
Markus Imhoof, Des abeilles et des hommes, 2012.
Mark Daniels, Le mystère de la disparition des abeilles, Arte Thema,
2010.
Time is honey
Avec son programme de pollinisation de la ville, sa mission d’essaimage, ses zones
de butinage, ses «comptes-épargne-abeilles», une Banque du miel a été mise en
place par le Parti poétique en région parisienne. Le précieux nectar urbain, distribué
sous l’étiquette «Miel Béton» (200 à 300 kilos par an) et «Miel de la Banque», est très
recherché lors des événements citoyens et artistiques de la capitale française. Outre
le miel, l’idée est de produire de la richesse humaine et de l’esprit critique là où il en
manque. N’hésitez pas à souscrire au Fonds mellifère international (FMI)!
www.banquedumiel.org/banque.html.
De nombreux collectifs apicoles ayant une mission similaire existent aussi au
Québec. Voir: la coopérative Miel Montréal http://mielmontreal.com ou l’entreprise
Alvéoles www.alveole.buzz.
EXEMPLE INSPIRANT
Se nourrir avec les animaux
Depuis 20 ans, MICHEL JARRY pratique «l’agro-sylvo-
cynégétique» en dordogne. Il entretient un équilibre
dynamique entre une faune semi-sauvage qu’il chasse
(principalement des daims) et une biodiversité sylvestre
et agricole savamment contrôlée. Une activité plurielle qui lui permet d’être autonome
en nourriture, en eau et en bois, et de bien gagner sa vie.
Michel Jarry est un homme heureux. Il vit «en communion avec la nature» et
estime avoir «une qualité de vie idyllique». Cet ancien patron d’une grosse boucherie
industrielle, lassé d’une vie parisienne trop agitée, a choisi un jour de migrer avec sa
famille au cœur du Périgord. Arrivé en 1970 sur un terrain de 80 hectares – «des
terres pauvres et de la forêt, à 500 mètres d’altitude» –, Michel fait d’abord de
l’agriculture conventionnelle, «comme tout le monde dans ce coin-là». Il achète un
troupeau de vaches limousines (100 têtes). «On avait un rêve, on voulait réussir.»
Mais après quatre ou cinq ans, Michel découvre que ce n’est pas viable. «Je ne
voulais pas devenir un gagne-petit avec un avenir limité.» Il revend son troupeau et
met 30 hectares en culture irriguée de maïs et plus de 20 hectares de seigle et
d’avoine. «Les cours étaient soutenus, nous étions maîtres de la récolte. On vendait à
qui voulait, on gagnait bien notre vie.» Puis arrive la Politique agricole commune de
l’Europe (PAC). Il devient obligatoire de passer par une coopérative agricole. Refus
net de Michel, qui veut «garder sa liberté, ne pas se sentir mené par d’autres. Avec
l’augmentation des prix des semences, des engrais, du carburant, des financements
extérieurs devenaient nécessaires. Les prix de vente ont chuté de 40%. Des aides
étaient prévues, mais on sentait venir le naufrage du système.» Michel quitte le navire
de la PAC «par fierté et par bon sens». Il vend tout: tracteurs, système d’irrigation… Il
se dit que les produits haut de gamme, de qualité, sont dans l’air du temps. Très vite,
une nouvelle piste se dessine: il aime la forêt, le gibier, la liberté, l’innovation.
L’observation du bol alimentaire des bêtes lui révèle le secret de leurs mets
préférés. Les cervidés raffolent des fruits de la forêt: châtaignes, glands, racines,
genêts, ronces, chiendent, lichens, champignons sauvages plutôt que les belles
prairies que Michel leur avait d’abord destinées. L’homme s’adapte. Il organise le
terrain de façon à ce que le gibier dispose d’un tiers de bois, un tiers de semi-ligneux
et un tiers d’herbes. Sans oublier quelques hectares de cultures (navets, raves,
sarrasin, seigle), en rotation, comme réserve de nourriture en cas d’aléas climatiques.
Michel sait ce que diversité veut dire. Dans les bois, il élague juste ce qu’il faut pour
entretenir et favoriser le développement des champignons. «Les bolets, les gens
aiment ça. Deux cents kilos par an à 15€ le kilo, c’est rentable! Pas de travail, sauf le
ramassage.» Avec une association, il monte un atelier de conserve de châtaignes
pour exploiter les plus beaux fruits; le second choix revient aux daims. Il lance la
production de triticale, un croisement entre le blé et le seigle, pour nourrir ses
volailles. Quarante tonnes par an! L’autonomie, toujours…
Michel est un commerçant, un homme d’affaires qui diversifie ses revenus. Mais
il est avant tout un amoureux des arbres. Il pourrait en parler des heures. Il avait
planté deux hectares de chêne rouge, d’acacia, de douglas, de saule, d’aulne. Mais la
tempête de 1999 a ravagé la ressource qui devait financer sa retraite. «Je suis
associé à la nature. C’est elle qui décide, admet humblement le vieux sage. L’homme
ne fait que courir pour se protéger de l’eau, du soleil, du vent.» Depuis, Michel a
replanté 10 hectares d’arbres, dont un bon nombre d’essences qu’apprécient
particulièrement les daims.
L’observation est l’outil principal de Michel. Tous les jours, il sillonne sa forêt en
4x4 avec ses jumelles. Il repère les biches sur le point de mettre bas, suit les faons,
identifie les bichettes (femelles d’un à deux ans – les plus savoureuses), surveille les
hères (mâles de six mois à un an) et les daguets (daims d’un à deux ans) prêts à être
tirés. «Mon but, c’est d’avoir un cheptel au top! Si la pression du cheptel devient trop
importante et qu’elle menace la santé de la forêt, je régule. Je joue le rôle du
prédateur. Les clients me passent commande, selon leurs préférences.» Le moment
venu, il abat la bête sur place, dans la forêt, dans son environnement. Pas de stress
indu pour l’animal. Ce qui est bien meilleur pour la viande. Il la saigne, l’éviscère, la
dépouille et l’amène au contrôle vétérinaire. Puis, dans l’atelier qu’il a aménagé sur
sa ferme, il débite la bête – des morceaux bien préparés, sous vide, qu’il conserve en
chambre froide (ses compétences de boucher sont remarquables). Par le bouche à
oreille, il s’est constitué une clientèle fidèle, friande de ses produits haut de gamme,
dans un rayon de 50 kilomètres. Il faut dire que quand on a goûté à cette viande, on
s’en souvient! Les clients (200 à 300 foyers) peuvent venir acheter sur place, dans sa
boutique. Michel fait aussi une tournée en camion dans la proche campagne avec de
délicieuses volailles de grain (20€ pièce en moyenne). Du grain qu’il produit sur
place, bien sûr.
L’homme des bois est «heureux de cette qualité de vie, heureux de vendre beau
et bon». Combien d’heures par semaine travaille-t-il? «Planter un arbre, le greffer,
vous appelez cela travailler? s’exclame-t-il. C’est du bonheur. Et puis quelle
satisfaction de laisser quelque chose de vivant derrière soi. Cette forêt représente de
l’énergie pour 50 ans!»
Occasionnellement, la ferme accueille également des chasses sportives,
inspirées de pratiques québécoises. Des passionnés, souvent étrangers, viennent
pour tirer, sans chiens ni chevaux, une ou deux bêtes choisies sur catalogue. Ils
restent une journée et repartent avec leurs trophées et les massacres (les bois). Une
activité lucrative, qui mobilise peu de temps.
Depuis 2007, son fils, qui travaillait dans l’administration publique, a pris la suite.
Michel, bien sûr, continue avec lui. C’est seulement dernièrement qu’il a découvert
que sa démarche globale, basée sur l’observation attentive et la recherche d’équilibre
entre les différents éléments de l’écosystème, s’apparentait à un mouvement en
pleine expansion qu’on appelle… la permaculture!
CONTACT: michel.jarry36@sfr.fr.
Se nourrir grâce à la mer
LA MER, UN GIGANTESQUE
GARDE-MANGER
Aujourd’hui, 40% des produits de la pêche mondiale sont vendus sur les
marchés internationaux (contre 20% de la production du blé et 5% de la
production du riz). Ce flux de richesse échappe bien sûr aux petits pêcheurs
et fragilise les économies locales.
Dès 1995, la FAO a négocié avec les acteurs concernés un Code de
conduite pour une pêche responsable. Ce document en a inspiré beaucoup
d’autres. Ces dernières années, sous l’impulsion d’Olivier de Schutter,
rapporteur spécial de l’ONU pour le droit à l’alimentation (rapporteur
d’autant plus spécial qu’il est courageux), la communauté internationale
s’est trouvée embarquée dans une série d’obligations au titre du respect des
Droits de l’homme. Ces obligations visent à protéger la pêche artisanale et
les populations locales. Elles passent, par exemple, par la réduction des
volumes de pêche et par la création d’«aires marines protégées» (AMP) qui
garantissent, en principe, la sécurité alimentaire des populations côtières.
Or, pétries de bonnes intentions, ces mesures juridiques internationales
présentent, selon certains observateurs, un risque de privatisation des
océans: en effet, ces aires marines protégées, souvent financées par des
investisseurs privés, via de grandes ONG, favoriseraient surtout… les
intérêts des investisseurs eux-mêmes (et non l’intérêt des pêcheurs),
investisseurs qui n’ont le plus souvent rien à voir avec le monde de la pêche
mais qui imposent leurs critères de «pêche durable». Nombre de petits
pêcheurs se trouveraient ainsi interdits de travailler dans leurs zones de
pêche nourricières et traditionnelles42 au profit du développement
d’activités lucratives menées par des opérateurs privés, comme l’achat de
quotas de pêche43 et le développement du tourisme «nature». «Ce n’est pas
la pêche côtière qui menace les océans, ce sont les pollutions chimiques»,
tempête le biologiste marin Pierre Mollo lors d’un entretien qu’il nous a
accordé en 2015.
Quoi qu’il en soit, petit à petit, l’imaginaire collectif évolue dans le sens
de la protection des stocks de poissons et de la défense des petits pêcheurs.
Aux Maldives, par exemple, la seule pêche au thon autorisée est désormais
la pêche à la ligne à partir de bateaux locaux. Dans l’État brésilien de
Ceará, les pêcheurs de langouste se sont organisés en coopératives pour
vendre directement les produits de leur pêche à des détaillants américains.
Résultat: hausse de 70% de bénéfices pour les petits pêcheurs! Au Pérou,
pays qui fournit près de la moitié de la production mondiale de farines et
d’huiles de poisson, le gouvernement applique depuis quelques années une
politique volontariste pour favoriser la pêche et la consommation locales de
poisson et pour limiter la production de produits dérivés industriels.
Dans nombre de pays, des zones réservées à la pêche artisanale ont été
négociées sous la pression des petits pêcheurs. Au Cambodge, par exemple,
ceux-ci ont obtenu l’établissement de droits d’usage locaux. Bien sûr, les
violations continuent, mais le droit a changé de bord. Ces succès ouvrent
des perspectives de changement dans d’autres pays. En Europe également,
des mesures sont prises pour accompagner la transition vers une pêche
durable, protéger la ressource et développer l’aquaculture. Toute la
difficulté consiste bien sûr à veiller à l’application des engagements pris et à
éviter les effets pervers.
PRÉCAUTIONS SANITAIRES
Depuis une quinzaine d’années, on observe dans 15 à 100% des populations de
poissons sauvages ou d’élevage des parasites qui peuvent se révéler dangereux
pour l’humain. À l’origine, les anisakis sont des vers parasites du tube digestif des
cétacés et des oiseaux marins. Leurs larves (nématodes) se transmettent dans la
chaîne alimentaire et se développent dans les viscères et la chair du poisson. Les
larves sont particulièrement pernicieuses car elles ne se voient pas à l’œil nu. Le ver
lui-même se devine si on y prête attention: une petite spirale translucide roulée sur
elle-même. Chez l’humain, les larves ou les vers peuvent déclencher des allergies ou
des troubles digestifs parfois violents, appelés anisakiase.
Mais des menaces pèsent sur ces précieuses ressources marines. Certaines
espèces végétales et animales de plancton disparaissent car elles ne trouvent
plus leur nourriture ou les conditions pour vivre dans leur environnement
habituel. Le réchauffement climatique, la présence de pesticides ou
d’espèces exotiques arrivées par bateau bouleversent la chaîne alimentaire
(et, par ricochet, la pêche).
Le réchauffement climatique pousse certaines espèces animales et
végétales à migrer vers le nord au rythme de 23 kilomètres par an. Cela
représente plus de 1 000 kilomètres depuis les années 1950! Du coup, les
espèces les moins mobiles – coquillages, larves fixes – ne trouvent plus leur
nourriture et disparaissent.
Avec les pesticides, des espèces toxiques de plancton prennent la place
d’espèces indigènes, rendent certains coquillages non consommables ou
coupent l’appétit des poissons. «Réduire les pesticides de 50% ne suffit pas.
Il est urgent de passer à zéro pesticide», affirme Pierre Mollo.
«Le plancton est la source de la vie et les humains ne le savent pas, se désole le chercheur. Il est
invisible, alors on n’y croit pas! L’ours blanc est beaucoup plus populaire. Pourtant, ils
appartiennent à la même chaîne alimentaire, l’un à la base, l’autre au sommet. Si le premier
disparaît, le second disparaît aussi, et toutes les espèces qui vivent entre les deux.»
LE CAS COPÉPODES
Le copépode, un petit crustacé, est l’animal le plus répandu sur la planète. La
population mondiale de copépodes se renouvelle tous les deux mois et représente 40
milliards de tonnes de nourriture, soit 150 fois plus que la production mondiale de
viande d’élevage!
Cuisiner le plancton est dans l’air du temps. On y vient! Quelques chefs s’y
essaient, ainsi que des passionnés qui croient en l’avenir de ces précieux
végétaux marins. Les dégustations sont de plus en plus fréquentes dans les
salons gastronomiques. Ouvrez vos yeux et préparez vos papilles!
Le chef d’un restaurant parisien, sensible aux démonstrations de Pierre
Mollo, prévoit de bientôt régaler ses convives avec un succédané de caviar
à base de spiruline sphérifiée. «Pourquoi priver les végétariens de ces
délicieux amuse-bouches?» interroge le scientifique gourmet.
Cueillir les algues sans les arracher! Avec un couteau ou une paire de ciseaux,
couper la tige au-dessus du pied de façon à ce qu’elle puisse repousser. Ne pas
retourner les rochers: la biodiversité végétale et animale qui y est associée (côté
lumière, côté ombre) en serait perturbée pour plusieurs années.
Les noms communs ou commerciaux des algues variant d’une région à l’autre, il
est recommandé d’utiliser les noms latins qui, eux, ne prêtent pas à confusion. On se
familiarise finalement assez vite!
Une fois sorties de l’eau, les algues se dégradent rapidement. Ne cueillir que ce
que vous pouvez consommer dans les 24 heures. Après, c’est trop tard. La loi
française autorise de ramasser le volume qui tient dans une main. Inutile de remplir
des paniers que vous devrez jeter au bout de deux jours.
SAUVAGES OU ÉLEVÉES
choc-noir CHIFFRES-CHOCS
À propos des algues…
90% des algues françaises sont produites en Bretagne.
La filière des algues alimentaires n’est exploitée en France que depuis une
trentaine d’années.
4-5-6
Elles sont décrites ici telles qu’elles apparaissent, de bas en haut de l’estran
(la zone du littoral qui est découverte à marée basse).
Porphyra tenera (ou nori): riche en protéines, utilisée pour rouler les
sushis et les makis, ou en paillettes.
Palmaria palmata (ou dulse): utilisée séchée, en paillettes ou en chips.
Sert aussi de fourrage pour les animaux.
Alaria esculenta.
Ulva lactuca (ou laitue de mer): celle qui prolifère lorsqu’il y a trop
d’azote dans l’eau. Elle se consomme séchée, en paillettes ou en
papillote.
Ceux qui habitent loin de la mer trouveront la plupart de ces algues dans les
magasins bio, déshydratées, en conserve ou en rayons frais.
Délices apéritifs
4-5-7
Pour étonner vos invités, présentez vos fruits de mer sur un lit de goémon
passé à l’eau bouillante (puis refroidi, bien sûr). Effet fluo garanti!
Cuire des pommes de terre bio dans leur peau à la vapeur, ou mieux, dans
une soupe de poisson ou un court-bouillon de crabe. Une fois tièdes, les
huiler et les envelopper de Porphira. Passer au four. Servir brûlant. On
mange tout. Un régal.
POUR ALLER PLUS LOIN EN CUISINE: Ouvrage collectif, Savez-vous goûter… les
algues?, Rennes, Presses de l’EHESP, 2016, www.presses.ehesp.fr/produit/savez-
vous-gouter-les-algues/.
Les pieds dans l’eau, Simone lit comme dans un livre ouvert les merveilles que
recèle le microcosme d’une flaque d’eau. Un grouillement de vie d’une rare beauté:
des coquillages, des larves, des bourgeons d’algues de toutes les couleurs. Pas
grand monde n’aurait remarqué tous ces détails sans son œil avisé. La spécialiste
raconte la symbiose entre telle algue et tel coquillage, explique comment récolter les
précieux végétaux marins (avec une paire de ciseaux) pour ne pas les arracher; ainsi
ils repousseront. Il suffirait d’un geste maladroit (retourner un rocher sans le remettre
en place) pour détruire tout ce petit monde.
De retour «à terre», chacun.e étale sa récolte sur une table. Classement par
famille: les algues rouges, les brunes, les vertes. Des oreilles ébahies écoutent notre
maître raconter la création du monde, les premiers végétaux apparus dans la mer il y
a 3,5 milliards d’années, la naissance des forêts grâce aux algues vertes qui ont
colonisé la terre ferme. Les noms latins s’entrechoquent dans les têtes! Il faudra un
peu de temps pour se familiariser.
Bientôt, Dany prend le relais. D’un coup d’œil, elle apprécie les ressources
étalées sur la table et envoie chercher les poissons qu’un pêcheur de l’île a mis de
côté pour le groupe. Et les préparatifs commencent. Des heures de préparatifs pour
hacher, effiler, malaxer, broyer, faire revenir, passer au four, marier les fruits de la mer
et de la terre. Tout le monde s’y met. Pendant que les uns étendent des algues à
sécher sur un fil, d’autres préparent l’apéritif – occasion de savourer les premières
préparations tartinées – ou commencent la soupe de poisson, prennent force notes et
photos.
Des heures plus tard, le festin est prêt. Le menu est tout droit sorti de la mer et
de la créativité débridée de Dany, de nos paniers ou des filets des pêcheurs de l’île,
qui nous rejoindront pour festoyer. Plus jamais une balade sur l’estran ne sera
comme avant…
POUR EN SAVOIR PLUS: Stage «Algues et cuisine», Cap vers la nature,
www.cap-vers-la-nature.org/peche-a-pied-algues-et-cuisine.html.
Se nourrir grâce aux insectes
Les insectes représentent 80% des espèces animales connues. Ils sont les
premiers à avoir colonisé la terre ferme. De 1 000 à 1 500 espèces –
insectes, larves et vers comestibles – sont régulièrement consommées par 2
milliards d’habitants sur la planète, principalement en Afrique et en Asie:
fourmis, punaises, criquets, grillons, termites, sauterelles, chenilles, vers à
soie, asticots, etc. Leur préparation varie selon les régions et les traditions:
ils sont servis seuls ou accompagnés, vivants, nature ou frits, bouillis,
confits ou macérés dans l’alcool, avec ou sans sauce, en condiments, en
amuse-gueule, en plat principal ou en dessert.
CONTACT: claire.lemarchand@citedudesign.com.
EXEMPLE INSPIRANT
Une culture d’insectes dans
mon salon
CHANEL vit dans un petit village du Québec. Elle a
tellement aimé le goût des insectes qu’elle a décidé d’en
élever elle-même. Pour le plaisir d’abord, puis pour les
protéines. La jeune femme nous ouvre la voie de l’entomophagie.
«Fabuleux! Plus que bon! Un peu comme de la peau de poulet rôti ou des chips
bien croustillantes.» C’est ainsi que Chanel décrit le délice qu’elle éprouve à manger
des insectes. Tout a commencé vers 1995 lorsqu’elle était étudiante et qu’elle s’est
engagée comme bénévole pour l’événement «Croque-Insectes» à l’Insectarium de
Montréal. Elle n’a jamais oublié le plaisir particulier qu’elle a ressenti en dégustant
son premier scorpion laqué – une recette thaïlandaise.
Constatant que les insectes étaient introuvables sur les marchés, cette
permacultrice comprend que la seule solution consiste à lancer son propre élevage.
Ce qu’elle fait en mai 2013. Elle commande par Internet des vers de farine destinés à
l’alimentation animale. Deux mille larves de ténébrion (un coléoptère), soit 200
grammes, pour 20 dollars canadiens. «Je suis pauvre, je ne pouvais pas faire plus.»
Bénéficiant d’«une très haute formation en cuisine dans les grands restaurants»,
Chanel n’avait aucun doute sur ses goûts et aucune crainte quant à sa capacité à
préparer des mets délicieux à partir d’insectes! Lorsqu’elle entend l’OMS déclarer que
les insectes sont les protéines du futur, son choix se confirme.
Pourquoi des vers de farine et pas des grillons ou des sauterelles? «Les vers ne
sautent pas! explique la jeune femme en riant. Ils ne volent pas, ne grimpent pas. Ce
sont les insectes les plus faciles à élever.» Les bacs d’élevage sont empilés sur une
échelle à pâtisserie dans le salon, ce qui prend peu de place. Leur nourriture? Du
son, de la farine d’avoine, quelques épluchures de légumes pour l’apport en humidité
(les larves ne boivent pas). Un kilo de nourriture fournit un kilo d’insectes. Ils peuvent
vivre très entassés les uns sur les autres dans de petits espaces (200 000 spécimens
par bac), ne dégagent pas d’odeur, ne produisent pas de déchet. Tous les avantages.
Seul bémol à l’aventure entomologique de Chanel: le cycle de développement des
petites bêtes est lent. Six mois par génération, à la température de sa maison. Le
cycle serait réduit à trois mois avec quelques degrés de plus. Son cheptel est tout de
même passé de 200 grammes à 6 kilos en un an et demi.
En attendant que son élevage atteigne un seuil durable (équilibre entre les
prélèvements et le renouvellement des effectifs), Chanel ne récolte que quelques
individus pour les faire déguster à sa famille ou aux amis. Son compagnon est
conquis ainsi que son fils de neuf ans et ses copains. Chanel pense déjà aux
quiches, boulettes, chili, saucisses d’insectes qu’elle va bientôt pouvoir confectionner.
Elle s’étonne que personne ne sache lui dire à partir de quand elle pourra prélever
suffisamment de larves chaque semaine pour nourrir sa famille. «Même l’éleveur de
l’Insectarium de Montréal ne sait pas», s’amuse-t-elle.
Quand son expérience sera bien établie avec les vers de farine, Chanel prévoit
de diversifier sa production. Elle pense aux grillons (un cycle de six semaines), aux
phasmes, aux locustes. Et puis, pourquoi pas créer la filière? «Le Jardin botanique de
Montréal songe à ouvrir un restaurant avec dégustation d’insectes. Il faudra bien qu’il
trouve des fournisseurs», suggère la jeune femme. Oui, l’entomophagie en Occident
est vraiment en devenir!
OMNIVORES, ET DEMAIN?
De par sa constitution, l’humain est omnivore. La nature offre une grande
variété de ressources alimentaires. Jouissons donc de cette diversité et
mobilisons notre inventivité pour développer des modes de production
adaptés aux enjeux d’aujourd’hui.
En zones urbaines, sur les pelouses des maisons de banlieue, dans les
squares de nos villes, sur les toits-terrasses des immeubles, utilisons les
surfaces disponibles pour produire de la nourriture de qualité et de
proximité. Explorons la possibilité d’installer des microfermes telles que les
décrivent Perrine et Charles Hervé-Gruyer dans leur ouvrage Permaculture.
«Deux cents mètres carrés bien travaillés permettent de produire toute
l’année l’équivalent de 12 paniers de fruits et légumes hebdomadaires»,
assurent les auteurs. Ils savent de quoi ils parlent: dans leur ferme du Bec
Hellouin, ils produisent 60 à 80 paniers sur 1 000 mètres carrés. Ces
microfermes peuvent conjuguer la culture de petits fruits, de plantes
médicinales, de champignons, l’élevage de petits animaux, l’apiculture,
l’aquaculture. «Plus la ferme est petite, plus elle est productive», affirme le
couple. Vision partagée par le jardinier-maraîcher québécois Jean-Martin
Fortier dans son Manuel d’agriculture biologique sur petite surface�: il y
donne la recette pour nourrir 200 familles en cultivant un hectare.
Des pionnières de
l’alimentation
HILDEGARDE DE BINGEN (1098-1179), mystique
allemande – «L’épeautre met de l’allégresse dans l’esprit
de l’homme.»
Les enseignements de cette moniale sur l’«homme total» (dans ses dimensions
physique, psychique et spirituelle) se voient confirmés, huit siècles plus tard, par les
sciences modernes (et par l’Église catholique qui l’a faite docteure de l’Église en
2012). Sur le plan alimentaire, Hildegarde souligne le lien entre notre alimentation et
notre état intérieur. L’abbesse bénédictine recommande certains aliments et des
recettes qui «donnent la joie et la clarté d’esprit». Ce sont des aliments alcalinisants,
qui équilibrent le pH de notre organisme. C’est le cas de l’épeautre, une céréale qui
contient les huit acides aminés essentiels et qui est riche en calcium, en phosphore et
en magnésium. Hildegarde dit de cette céréale qu’elle est «réchauffante et purifiante
pour l’homme» (le blé, dont la valeur nutritive est moindre, a progressivement
remplacé cette céréale ancienne). Le fenouil, les châtaignes, les amandes et le
galanga font également partie de ces précieux «aliments de la joie». Hildegarde
recommande également l’usage des plantes médicinales et «un jour de décharge»
(jeûne ou diète légère) hebdomadaire.
La vocation première du «Jardin pour tous», près d’Auroville, dans le sud de l’Inde,
est la conservation et la diffusion d’une centaine de variétés de semences potagères
traditionnelles de l’Inde. Son objectif? Que tous ceux qui le souhaitent puissent se
réapproprier la production de leur propre nourriture, quelle que soit la qualité de leur
terrain, même s’ils n’ont aucun moyen financier. L’aventure de Deepika a commencé
il y a une vingtaine d’années à Pebble Garden («le jardin de cailloux»), sur trois
hectares de terrain totalement stérilisés par un déboisement sauvage. Avec son
compagnon Bernard Declerq, ingénieur agronome belge, ils ont patiemment restauré
le sol, sans importation de matière organique, sans main-d’œuvre extérieure, sans
mécanisation. Aujourd’hui, une forêt d’essences indigènes et un potager de 2 000
mètres carrés ont remplacé le désert rouge de latérite! Et Deepika consacre son
énergie à encourager le développement de banques de semences familiales, jusque
dans les pays occidentaux.
MAINTENANT QUE VOUS AVEZ INTÉGRÉ la complexité des liens entre nos
modes de vie et la santé de la planète, vous êtes encore plus motivé pour
amorcer les premiers changements. L’alimentation est l’un des domaines
privilégiés pour expérimenter. Nous vous proposons ici de réaliser votre
design alimentaire individuel, familial ou collectif, selon le cas, pour une
alimentation saine et équilibrée.
Principe de permaculture n° 1
Observer et interagir
Observer
Dans mes habitudes alimentaires actuelles, quelles sont celles qui sont
en accord avec les principes de la permaculture? Quelles sont celles
qui s’en éloignent? Quelles évolutions seraient bienvenues?
En cas de rupture d’approvisionnement en énergie, quels produits –
parmi ceux que j’utilise régulièrement – risquent de devenir
indisponibles? Par exemple, en Amérique du Nord ou dans le nord de
l’Europe: thé, café, chocolat, huile d’olive, oranges, bananes, citrons,
etc.
Concevoir le design
Déterminez les relations possibles avec les producteurs et distributeurs
locaux, les voisins jardiniers, les amis, la famille. Ces alliés sont votre
équipe. Voyez ce que vous pouvez mettre en place chez vous (jardin,
balcon), y compris pour l’eau. N’essayez pas de tout changer en même
temps! Donnez-vous du temps pour faire votre transition, en douceur.
Vérifiez que le système que vous avez mis en place est cohérent (relisez au
besoin quelques passages de ce chapitre). Peut-il fonctionner durablement?
Votre potager vous apporte-t-il une base de légumes, de fruits et de plantes
médicinales? Vos fournisseurs sont-ils proches de chez vous? Aimez-vous
cuisiner avec les produits locaux et de saison? Votre alimentation vous
apporte-t-elle des satisfactions en termes de nutrition et de partage avec vos
proches? Toutes ces conditions sont nécessaires pour que les bonnes
résolutions s’ancrent dans le temps!
Principe de permaculture n° 9
Préférer des solutions
modestes et lentes
CLÉ DU SUCCÈS: Le meilleur moment pour amorcer votre transition,
notamment alimentaire, c’est aujourd’hui! Pourquoi attendre?
Conclusion
Devenir artisanes et artisans du changement
Dans quelque temps, vous pourrez refaire les tests que nous vous avons
proposés au début de cet ouvrage pour constater le chemin parcouru et vous
encourager à continuer. Votre bilan écologique personnel aura probablement
progressé; bravo, continuez! Sinon, relisez le chapitre «Les clés de la
permaculture humaine»! Vérifiez également que le bilan de votre équipe
progresse également, sans pour autant «tanner» qui que ce soit! À vous de
créer, de façon subtile et discrète, les conditions de l’évolution de votre
entourage.
Annexe
Pour aller plus loin en permaculture humaine
Il existe aussi des cours en ligne. Plus rapides, plus économiques, mais bien
sûr sans la dimension humaine si précieuse. Le MOOC53 des Colibris
«Concevoir une oasis» (gratuit) a connu un succès étonnant début 2016
avec une équipe d’une dizaine de professeurs et plus de 27 000 inscrits! Des
rencontres régionales ont suivi.
Depuis 2016, Bernard Alonso donne des formations en ligne sur le
design (certaines gratuites, d’autres payantes) avec quelques associés, tous
engagés dans le mouvement de la permaculture.
www.universitetransition.org/
Principe de permaculture n° 9
Préférer des solutions
modestes et lentes
Notes
1. Permaculture 1. Une agriculture pérenne pour l’autosuffisance et les exploitations de toute taille
et Permaculture 2. Aménagements pratiques à la campagne et en ville ont été traduits en français
chez Charles Corlet, coll. «Équilibres» (2006 et 2011).
2. Ce dernier est traduit en 2013 par Passerelle Éco sous le titre Introduction à la permaculture,
préfacé par Claude et Lydia Bourguignon.
3. Livre traduit en français en 2014 sous le titre Permaculture. Principes et pistes d’action pour un
mode de vie soutenable, Paris, Rue de l’Échiquier.
4. Edward Teddy Goldsmith, Le tao de l’écologie. Une vision écologique du monde, Monaco, Le
Rocher, 2002.
5. Pape François, Lettre encyclique Laudato si’ sur la sauvegarde de la maison commune, Rome,
Libreria Editrice Vaticana, 2015,
http://w2.vatican.va/content/francesco/fr/encyclicals/documents/papa-
francesco_20150524_enciclica-laudato-si.html.
12. Vincent E. A. Post et al., «Offshore Fresh Groundwater Reserves as a Global Phenomenon»,
Nature, no 504, 5 décembre 2013, p. 71-78.
13. Les trois S en anglais: slow it, spread it, sink it.
14. «Eau et forêt, une association naturelle», Office national des forêts [France],
www.onf.fr/gestion_durable/++oid++91e/@@display_advise.html.
15. Francis Hallé, Plaidoyer pour la forêt tropicale, Arles, Actes Sud, 2014.
16. Paul Falkowski et al., «The Global Carbon Cycle: A Test of Our Knowledge of Earth as a
System», Science, vol. 290, no 5490, 13 octobre 2000.
17. Aymeric Lazarin, Mon potager de vivaces. 60 légumes perpétuels à découvrir, Mens, Terre
vivante, 2016.
18. Laure Waridel, Acheter, c’est voter. Le cas du café, Montréal, Écosociété, 2005.
19. Jane Goodall, Nous sommes ce que nous mangeons, Arles, Actes Sud, 2008.
20. Voir Deni Ellis Béchard, Des bonobos et des hommes. Voyage au cœur du Congo, Montréal,
Écosociété, 2014.
21. Équiterre, «Kilométrage alimentaire», www.equiterre.org/fiche/kilometrage-alimentaire.
28. Séminaire international Cultures du passé et nouvelles cultures pour affronter les défis du XXIe
siècle, Organisation des Nations unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO), Cordoue,
décembre 2012, www.fao.org/news/story/fr/item/166370/icode/.
29. Ibid.
30. Rapport du rapporteur spécial des Nations unies sur le droit à l’alimentation présenté à
l’Assemblée générale de l’ONU dans le cadre du Conseil des droits de l’homme, 20 décembre
2010.
31. Aymeric Lazarin, Mon potager de vivaces…, op. cit.
32. James Clive, Global Status of Commercialized Biotech/GM Crops: 2014, International Service
for the Acquisition of Agribiotech Applications (ISAAA), Brief no 49, 2014.
33. Voir notamment Jennifer Cockrall-King, La révolution de l’agriculture urbaine, Montréal,
Écosociété, 2016.
34. Terres en villes, www.terresenvilles.org.
35. «Agriculture urbaine: sondage auprès de la population de l’île de Montréal», Ville de Montréal,
http://donnees.ville.montreal.qc.ca/dataset/agriculture-urbaine-sondage.
36. Organisation des Nations unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO), L’élevage dans le
monde en 2011. Contribution de l’élevage à la sécurité alimentaire, Rome, 2012,
www.fao.org/docrep/016/i2373f/i2373f.pdf.
41. Organisation des Nations pour l’agriculture et l’alimentation, La situation mondiale des pêches et
de l’aquaculture (SOFIA), 2014, www.fao.org/fishery/sofia/fr.
42. Voir le film documentaire de Mathilde Jounot, Océans, la voix des invisibles, Portfolio
Production, 2016.
43. Alain Le Sann, «Qui veut des millions? Les pêcheurs entre les mains des fondations, des lobbies
environnementalistes et des fonds d’investissements», Bulletin Pêche et développement no 129,
Centre de réflexion, d’information et de solidarité avec les peuples d’Afrique, d’Asie et
d’Amérique latine, 1er juin 2016.
44. Marine Stewardship Council, www.msc.org.
45. Blue Fish, Association européenne pour la promotion de la pêche durable et responsable,
www.bluefisheurope.org/fr.
46. «Les algues», Biocontact, n° 210, février 2011, http://biocontact.fr/magazines-numeriques-au-
format-pdf/19-b.html.
47. TecKnowMetrix, État de l’art. Projet Algasud, juillet 2009,
www.algasud.fr/getlibrarypublicfile.php/100/algasud/collection_library/200900074/0001/Livrabl
eDraft_AlgaSud_300709.pdf.
48. Entretien avec Cécile Guiochon.
50. Bruno Parmentier, Faim zéro. En finir avec la faim dans le monde, Paris, La Découverte, 2014.
51. Voir http://cepdarmandie.com/.
52. Deux liens sur l’histoire de la permaculture en France: Passerelle Éco,
www.passerelleco.info/auteur.php?id_auteur=11261 et Le paysage comestible,
http://lepaysagecomestible.com/andy-et-jessie-darlington.
53. Pour Massive Open Online Course: «cours ouvert en ligne et massif».
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