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AUX REDOUTABLES
CHAVANTÈS
Tragique histoire de la conquête
d’une des tribus les plus féroces
du bassin de l’Amazone
par
le R. Père MONGOUR, S. D. B.
Éditions Saint-Remi
– 2012 –
2
NIHIL OBSTAT
Lugduni, 14 nov. 1957
A. BARUCQ, S. D. B.
Cens. del.
IMPRIMI POTEST
H. AMIELH, provincial
Lyon, le 24 avril 1957
IMPRIMATUR
Lugduni, 26 aplilis 1957
EM. BÉCHETOILLE
ÉDITIONS SAINT-REMI
BP 80 – 33410 Cadillac
Tel/Fax : 05 56 76 73 38
www.saint-remi.fr
PRÉFACE
C
HER Père,
forêt vierge, je certifie à vos lecteurs que tous les sujets que vous
avez abordés sont l’expression rigoureuse de la vérité. Aussi suis-
je heureux de l’occasion que vous me donnez par cette
publication de vous féliciter de votre travail auquel je souhaite de
tout cœur une très large diffusion.
Maintenant, si vous le voulez bien, quelques notes brèves pour
aider vos lecteurs à mieux saisir le délicat problème que soulèvent
les relations, souvent sanglantes, des Indiens avec les Blancs.
Commençons par quelques principes généraux, valables pour
toutes les tribus. Les Indiens d’Amérique Latine sont des êtres
humains, primitifs certes, mais semblables aux hommes de tous
les pays, c’est-à-dire ayant, sous une peau bronzée, un même
cœur et des passions identiques. La plupart n’ont, à l’heure
actuelle, aucune notion d’agriculture ou d’industrie et encore
moins d’instruction. La majorité des tribus en sont encore à l’âge
de la pierre, préparant arcs ou flèches en frottant des morceaux
de bois sur des cailloux durs et aigus. Pour leur nourriture ils s’en
rapportent, comme les petits des oiseaux, à la Bonne
Providence… faisant confiance à la forêt, aux fleuves et à
quelques arbres à fruits. On comprend dès lors que pour assurer
leur subsistance ils ont besoin de vastes étendues de terrain car les
poissons comme le gibier diminuent rapidement lorsqu’on fait
sans cesse appel à eux pour vivre. Les Indiens ont donc choisi
puis délimité certains territoires dont ils se considèrent comme
propriétaires à titre de premiers occupants. Ils s’estiment là chez
eux et défendent leur domaine contre tout usurpateur, en
l’occurrence les « fazendeiros » ou éleveurs toujours en quête de
nouveaux pâturages pour leurs troupeaux. Eux aussi
malheureusement ont besoin d’un certain « espace vital » pour
assurer la prospérité de leur ferme et le pain de leur famille ! D’où
conflits fréquents avec les indigènes qui réagissent
énergiquement… Commencées par de simples tracasseries, ces
frictions dégénèrent vite en lutte ouverte, se soldant par
l’incendie, le pillage et souvent d’horribles massacres.
Habituellement on donne tort aux Indiens. Parfois ils sont des
victimes plus que des bourreaux. Mais, comme dit un proverbe :
PRÉFACE 5
Outre les curieux contacts dont vous parlez dans vos pages et
qui sont vraiment étonnants, récemment un groupe de plus de
500 Chavantès s’est présenté inopinément d nos missionnaires.
Comme l’avaient fait jadis les Bororos ils leur ont demandé de les
accueillir et de s’occuper d’eux. Ils acceptèrent même de s’établir
auprès de leurs ennemis d’hier et de vivre en paix avec tous les
Indiens. Cependant ils auraient pu choisir d’autres protecteurs,
car il y en a, mais qui ne sont pas catholiques… Du haut du ciel
nos martyrs les avaient guidés vers nous…
J. B. COUTURON S. D. B.
Ancien Administrateur Apostolique
de Registro de Araguaya
PROLOGUE
Epubliait
1936, le Père Duroure, missionnaire au Mato Grosso,
N
une brochure d’une centaine de pages intitulée :
SUR LE FLEUVE DE LA MORT.
Il y contait l’histoire toute récente du massacre, perpétré dans
la soirée du 1er novembre 1934, de deux Fils de Don Bosco, ses
compagnons d’apostolat. Ces héros de l’évangile étaient depuis
près de deux ans à la recherche d’une farouche tribu indienne du
bassin de l’Amazone, les terribles Chavantès, terreurs de la forêt
vierge.
Comme toujours, le sang de ces martyrs ne fut pas répandu en
vain.
Le 29 janvier 1951, un groupe important d’Indiens se
présentait de lui-même face à la résidence missionnaire fondée
depuis peu à Chavantina, sur la rive droite du Rio das Mortes ou
Fleuve de la Mort.
Le Père Colbacchini, qui eut la joie d’établir ce premier
contact, fut d’emblée adopté par ces redoutables sauvages et
d’année en année les travaux d’approche se multiplièrent.
Aujourd’hui plusieurs centaines de Chavantès résident près du
poste missionnaire de Santa Teresinha, lieu d’où partirent en 1934
les deux pionniers qui ne devaient plus revenir !
Le récit de ce drame douloureux méritait donc d’être complété
par celui de la conquête qui suivit.
C’est ce que nous avons tenté de faire dans ces pages.
Le lecteur le moins averti ne manquera pas de remarquer
l’accent de vérité qui se dégage de ces seize chapitres, et encore
davantage de l’appel final.
Nous avons laissé à dessein la parole aux missionnaires eux-
mêmes, nous contentant d’unir les divers récits dans leur ordre
chronologique.
Notre vœu le plus ardent est que la lecture de ces lignes
émeuve le cœur de nombreux jeunes, garçons et filles. Puisse
cette passionnante aventure faire naître en beaucoup le désir de la
12 PRÉFACE
P. M.
Le Brésil a une
superficie de 8 511 189
kilomètres carrés. Il
occupe la moitié du
continent sud-
américain et sa surface
est dix-sept fois plus
grande que celle de la
France. Par ses
frontières, il touche à
tous les états de
l’Amérique latine à
part le Chili. Sa
population est
d’environ 60 millions
d’habitants. Elle
augmente d’un million
par an.
Oignore
aimait à dire naguère que le Français est un Monsieur qui
N
la géographie… Si cette boutade a eu son heure de
vérité, elle l’a considérablement perdue aujourd’hui ! La presse
comme la radio, la télévision et le cinéma font, par le texte et par
l’image, parcourir le monde aux plus distraits. Par ailleurs, les
fameux « Congés payés » voient de modestes familles ouvrières
partir pour les plages des Baléares, le Lido de Venise ou les sous-
bois ombreux de la Forêt-Noire. Non seulement le Français
moderne connaît la géographie mais il en parcourt la carte avec
délice !
Cependant, parler du Brésil à un Français moyen serait,
avouons-le, l’embarrasser quelque peu ! En ravivant dans sa
mémoire les vagues notions emmagasinées lors de la préparation
d’un lointain certificat d’études, il placera sans doute ce pays en
Amérique du Sud… Il se souviendra peut-être d’une certaine
grande ville portant le nom chantant autant qu’étrange de Rio de
Janeiro. Enfin il verra défiler aux regards de son imagination de
vastes plantations de café ou un fleuve de légende appelé
Amazone que les explorateurs parcourent régulièrement et d’où
ils rapportent non moins fidèlement des kilomètres de pellicule
accompagnés d’un reportage sensationnel !
Tout cela, hélas, ne va pas très loin… et il faut reconnaître que
cette immense République latine, grande amie de la France,
mérite mieux.
Avant donc de pénétrer au cœur de la forêt vierge qui
recouvre environ un tiers de son territoire et vient, telle une
marée sans cesse montante, battre jusqu’aux faubourgs de ses
grandes cités, voyons ce qu’est cette antique possession
portugaise découverte par Cabral à l’aube du XVIe siècle.
Tout d’abord, face aux neuf autres Républiques sud-
américaines qu’il touche presque toutes à l’exception du Chili et
CHAP. I : LE BRÉSIL, CET INCONNU… 15
UN GUIDE MYSTÉRIEUX.
Donen 1878,
Bosco, le célèbre saint de Turin, avait fait connaissance
à Toulon, d’une famille qui lui témoigna, jusqu’à
sa mort, une bienveillance peu commune. La générosité du
Comte et de Madame Colle envers ses œuvres, plus
particulièrement en faveur de ses missions d’Amérique, classa ces
fervents chrétiens parmi les premiers bienfaiteurs de la
Congrégation Salésienne naissante. On peut dire, et pour l’époque
c’était énorme, que des millions passèrent du coffre-fort de
Maître Colle dans les mains du Saint.
Or le Comte et la Comtesse avaient un fils, unique hélas, et
d’autant plus aimé. Ange de pureté et de douceur, Louis avait une
santé des plus fragile. Don Bosco le connut durant deux ans et
s’éprit pour cet adolescent d’une affection profonde. Tous les
hivers le vieillard, qui venait solliciter sur la côte d’Azur la
générosité française, rencontrait son jeune ami et s’entretenait
longuement avec lui. Il le vit pour la dernière fois sur son lit de
mourant, quelques jours avant qu’une implacable tuberculose ne
l’eût ravi à la tendresse des siens le 3 avril 1881.
Ses rapports avec l’angélique garçon, si étroits pendant cette
vie, prirent au lendemain de sa mort, un caractère absolument
étonnant. D’un regard qui n’était pas de ce monde Don Bosco
voyait soudain l’adolescent auprès de lui et recueillait de sa
bouche les ordres du ciel ! Tout ce que nous savons de ces faits
étranges nous vient évidemment du saint lui-même. Mais
pouvons-nous raisonnablement douter de sa parole ?
La première de ces manifestations surnaturelles eut lieu
quelques jours à peine après la mort du jeune garçon. Don Bosco,
sa messe achevée, confessait dans la sacristie de la basilique
Notre-Dame Auxiliatrice à Turin, quand soudain, il vit son petit
ami toulonnais jouant avec d’autres adolescents dans un jardin
merveilleux, l’air ravi d’un bonheur qui n’est pas de ce monde.
20 FACE AUX REDOUTABLES CHAVANTÈS
PRÉFACE ...................................................................................................................... 3
PROLOGUE ................................................................................................................ 11