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Biomasse et Procédés 2

Chapitre 2

Bio-carburants et cinétique des réactions de


transformations thermochimiques de la
biomasse
1. Introduction

Bien que le parc automobile soit en augmentation en France ces dernières


années, on note une réelle diminution de la consommation de carburants
fossiles.
Variations du nombre de voitures en France depuis 2012 (source : INSEE)

39.0

38.5

Nombre de véhicules (en millions) 38.0

37.5

37.0 Janvier 2023 :


38,7 millions
36.5 de véhicules

36.0

35.5

35.0
2011 2012 2013 2014 2015 2016 2017 2018 2019 2020

Année
Variations de la consommation annuelle totale de produits pétroliers en
France depuis 1965 (source : INSEE)

120
2021 : 67,3
MTEP
100
2022 : 66,2
MTEP
Consommation totale (Mt)

80

60

40

20

0
1960 1970 1980 1990 2000 2010 2020

Année
Janvier 2023 : plus d’1,5 million de véhicules électriques
Cette baisse est liée :

 Aux progrès techniques dans les domaines de la motorisation


 A la baisse des limites de vitesse sur de nombreuses routes
 Au décollage des ventes de véhicules hybrides et tout électrique

Parc de voitures au 1er janvier 2020 selon la motorisation (en milliers)


2012 2013 2014 2015 2016 2017 2018 2019 2020
Electrique et Hydrogene 4 10 17 26 42 61 82 106 141
Essence 13 679 13 304 13 119 13 120 13 316 13 665 14 185 14 756 15 354
Gazole 22 308 22 804 23 225 23 631 23 900 24 008 23 899 23 263 22 500
Gaz 190 178 172 165 160 154 148 142 135
Hybride rechargeable 15 17 18 19 24 31 42 56 73
Autres 20 18 17 16 15 15 14 13 12
Ensemble 36 217 36 332 36 567 36 977 37 458 37 934 38 371 38 336 38 215

 A l’augmentation du prix des carburants, à des périodes de


confinement, au développement du télétravail, à l’abandon du véhicule
personnel au profit des transports en commun
2. Les différents biocarburants

Quels sont les carburants « bio » ?

 L’éthanol obtenu par fermentation alcoolique de jus sucrés (sucres simples


en C6)

 Les EMVH ou Esther Méthyliques d’Huiles Végétales obtenus par


transesthérification d’huiles végétales avec du méthanol

 Les biodiesels obtenus par pyrolyse flash et/ou par réactions de type
Fischer / Tropsch

 Le méthane obtenu par méthanisation de déchets de biomasse

 L’hydrogène obtenu par gazéification ou pyrolyse flash de la biomasse


Comment utilise-t-on ces carburants « bio » ?

 L’éthanol peut être utilisé comme substituant partiel ou total des essences
sans plomb 95 ou 98.

 Les EMVH ou Esther Méthyliques d’Huiles Végétales peuvent être utilisés


comme substituants partiels du gasoil dans le moteur diesel à haut taux de
compression (type HDI ou Turbo Diesel). Ils peuvent être utilisés comme
substituants totaux du gasoil dans les moteurs diesel dits atmosphériques.

 Les biodiesels peuvent être utilisés comme substituants partiels ou totaux


du gasoil

 Le méthane est de plus en plus utilisé comme carburant de bus en


substitution du GNV (gaz naturel de ville)

 L’hydrogène est à l’heure actuelle très peu utilisé dans le domaine du


transport car ses prix de productions et de stockage sont très élevés,
Remarques :

 Des carburants dérivés d’huiles végétales ont été testés avec succès dans
le domaine de l’aviation civile. Les réacteurs, fonctionnant initialement avec
du kérosène, ont été adaptés pour utiliser sur de grandes distances (10 000
km) ce type de carburant bio.

 Le méthane est désormais le carburant utilisé par les fusées de Space X


(firme de Elon Musk) et de Blue Origin (firme de Jeff Bezos, le fondateur
d’Amazon).
Nous avons vu que tous ces « bio » carburants peuvent être produits à
partir de biomasse.

Les procédés de production mettent en jeu des réactions de


transformations thermochimiques, voir thermo-biochimiques de la
biomasse qui peuvent être caractérisées par des équations
traditionnellement employées dans le domaine du génie des procédés.

Ces réactions peuvent avoir lieu :

 en phase liquide – traitement organosolv (réacteur fermé + biomasse + eau +


éthanol + catalyseur = acide sulfurique dilué à 1 %), hydrolyse (en présence
d’enzymes), autohydrolyse (sans enzyme, sans catalyseur), méthanisation, …

 en phase gazeuse – pyrolyse, gazéification, explosion à la vapeur, …

 en phase supercritique (eau, CO2…) – à l’état expérimental jusqu’à présent.


De manière synthétique, on peut dire que ces réactions peuvent être
classées dans trois grandes familles :

F1 – Réactions de dégradation de la biomasse qui visent à séparer les 3


polymères naturels de la biomasse :

A l’état natif, les molécules de


lignine, cellulose et
hémicelluloses sont intimement
liés dans la paroi végétale.
La cellulose est constituée de
fibres entourées de lignine qui
sert de renfort mécanique.
Les hémicelluloses jouent le
rôle de « liant » entre cellulose
et lignine.
Les réactions d’autohydrolyse, les traitements organosolv ainsi que les
opérations d’explosion à la vapeur permettent de dégrader les hémicelluloses et
donc de déstructurer la matière.

F2 – Réactions de dépolymérisation :

Les réactions d’hydrolyse, d’attaque à l’acide, de méthanisation et dans une


moindre mesure les réactions d’autohydrolyse, visent à casser les longues
chaines de polymères et de produire des molécules plus simples telles que
du glucose, du rhamnose, du fructose, de l’arabinose, du saccharose, du xylose
et des acides carboxyliques (acide acétique + acide formique), du furfural, de
l’hydroxyméthylfurfural (HMF, produit par déshydratation de sucres simples par
un acide).
Ces molécules simples peuvent ensuite être transformées en carburant ou en
produits précurseurs pour la synthèse de bio-carburant.
Les molécules d’HMF peuvent être facilement converties en DMF
(diméthylfurane = bio-carburant),
F3 – Réactions de reformage :

Les réactions de pyrolyse, de gazéification sont d’abord des réactions de


dépolymérisation mais aussi et surtout de reformage. Les atomes de C, H et O
sont recombinés pour produire du méthane, de la vapeur d’eau, des
hydrocarbures légers, des huiles…

La cinétique de ces trois grandes familles de réaction peuvent être représentées


par des lois d’ordre 1 qui seront présentés de manière synthétique dans le
prochain paragraphe.
Exemple
Exemple: :utilisation
utilisationdes
desliquides
liquidesde
depyrolyse
pyrolysepour
pourlalaproduction
productionde
debio-carburants
bio-carburants

Liquides de pyrolyse rapide

Séparation

Evaporateur Amélioration Gazéification Reforming

Synthèse

Moteur

Turbine

Chaleur Electricité Fuel H2 Chimie


3. Cinétique d’une réaction de transformation thermochimique

Prenons l’exemple d’une opération de pyrolyse qui met en jeu un


ensemble de réactions chimiques parfois exothermiques, parfois
endothermiques.

Globalement, une pyrolyse douce (température de l’ordre de 500 °C,


vitesse de montée en température très lente) est légèrement
exothermique.

Pendant la montée en température, le procédé est énergivore mais lorsque la


température de consigne est atteinte et que la pyrolyse est initiée, la
production d’énergie est suffisante pour démarrer une seconde opération de
pyrolyse en parallèle.

Pour une pyrolyse flash (Θ élevée, ΔΘ / Δt très élevée), le bilan énergétique


est négatif : une pyrolyse flash est d’autant plus énergivore qu’elle est réalisée
à haute température et que le temps de séjour de la biomasse dans le
réacteur est faible.
IlIln’existe
n’existepas
pasde
dedonnées
donnéesfiables
fiableset
etuniverselles
universellesqui
quipermettent
permettentde
de
calculer
calculerl’énergie
l’énergienécessaire
nécessaireààune
unepyrolyse.
pyrolyse.

Cependant,
Cependant,ililest
estadmis
admisque
queleleschéma
schémaréactionnel
réactionnelsuivant
suivantreprésente
représenteau
au
mieux
mieuxles
lesévolutions
évolutionsglobales
globalesopérant
opérantpendant
pendantune
unepyrolyse
pyrolyse::

k1 Gaz

Biomasse k2 k4
Goudrons Gaz
anhydre

k3 Charbon
Pour toutes les transformations thermochimiques, la vitesse des réactions
chimiques sont du premier ordre dès lors que la taille des particules de
biomasse ne dépasse pas les quelques millimètres :

d B
r  r1  r2  r3
dt
r1  k1   B
r2  k 2   B
r3  k 3   B
d G
r'    k 4  G
dt
r est le débit massique spécifique de biomasse consommée par la pyrolyse.

r’ est le débit massique spécifique de goudron consommée par la pyrolyse.


ki est la constante de vitesse des réactions chimiques i considérées et son
unité est celle de l’inverse d’un temps.

Elle est appelée « constante » non pas parce qu’elle est invariable mais parce
qu’elle est supposée ne dépendre que de quelques paramètres opératoires
dont le principal est la température de la réaction.

Cela signifie que la valeur d’une constante de vitesse peut dépendre de la


présence de catalyseur solide (exemple : platine) ou liquide (exemple : acide
dilué en phase liquide).

La corrélation la plus souvent utilisée pour déterminer l’influence de la


température sur les variations d’une constante de vitesse est une loi dite de
type Arrhenius (loi énoncée par Svante August Arrhenius en 1889).
Loi d’Arrhenius :

k = k0.exp(- E / R.T)

k0 = facteur pré-exponentiel (mêmes unités que k)

E = énergie d’activation de la réaction ou du groupe de réactions considérées


(en J/mol)

R = constante de gaz parfaits (R = 8,314 J/mol/K)

T = température absolue en K

Les énergies d’activation ont des valeurs qui peuvent varier de quelques
milliers à quelques dizaines de milliers de Joule par mole.
6

E = 1000 J/mol
5 E = 2000 J/mol
E = 5000 J/mol
4
(k(T)/k0)/k(0°C)

0
0 100 200 300 400 500 600 700 800

Température (°C)
Quelques rappels sur la gazéification

On appelle agent gazéifiant le gaz qui va permettre l’oxydation ménagée de la


biomasse et sa transformation en gaz.

L’objectif d’une gazéification est d’obtenir des gaz combustibles, à savoir, par
ordre décroissant d’intérêt :
 de l’hydrogène H2
 du méthane CH4
 du monoxyde de carbone CO

La gazéification est une opération réalisée à haute température, à savoir au


delà de 900 °C. Les principaux réactifs (ou agent gazéifiant) sont :
 l'air ou air enrichi en oxygène,
 l'oxygène,
 la vapeur d'eau.
L'utilisation d'air, à ce stade, est peu coûteuse  mais introduit dans le
produit final de l'azote indésirable .

L'oxygène, provenant de la distillation de l'air, est cher et dangereux .


De plus, il favorise la formation d'oxyde de carbone. La gazéification à
l’oxygène permet cependant de produire un gaz de synthèse à plus fort
PCI .

La gazéification à la vapeur d’eau est très énergivore  mais elle


maximise la production d’hydrogène .

La gazéification peut être également réalisé avec des catalyseurs tels


que le nickel par exemple.
La Gazéification, un des procédés de valorisation de la
biomasse avec différents objectifs de production

Électricité
Co-combustion Chaleur

GNS (CH4)
Combustion H2
Directe
Biomasse Pile à Combustible Hydrocarbures par
Fischer-Tropsch:
Bio-pétrole, Bio-diesel
Pyrolyse,
Moteur Méthanol
Gazéification Turbine
Bio-fuel

“Bio-chemicals”
Liquéfaction
directe ………

Hydrolyse Ethanol,
+Fermentation Alcools+“lourds”
Le procédé Fischer - Tropsch

Les réactions chimiques de base du procédé Fischer - Tropsch


sont les suivantes :

(2n + 1).H2 + n.CO  CnH2n+2 + n.H2O

Les réactifs initiaux (H2 et CO) peuvent être obtenus par gazéification de
la biomasse.

Le procédé Fischer – Tropsch permet donc de produire des


hydrocarbures de synthèse (produits finaux : essences et gazoles de
synthèse). Il s’agit d’un procédé présentant un rendement élevé mais
nécessitant des investissements importants.
Les principales réactions chimiques qui s’opèrent pendant une
opération de gazéification sont les suivantes :

 C + O2  CO2 (ΔH0 = - 391,6 kJ mol-1)


 C + H2O  CO + H2 (ΔH0 = + 131,79 kJ.mol-1)
 C + CO2  2 CO (ΔH0 = + 179,3 kJ.mol-1)
 CO + H2O  CO2 + H2 (ΔH0 = - 47,49 kJ.mol-1)
 C + 2 H2  CH4 (ΔH0 = - 22 kJ.mol-1)

Les cinétiques de ces réactions sont toutes différentes mais sont toutes
dépendantes de la température selon des lois de type Arrhenius
Ces réactions sont généralement d’ordre 1 ou 2. Leur cinétique peuvent
donc également dépendre de la concentration (et donc la pression
partielle) d’un réactif.

La cinétique de ces réactions peut être catalysée par la présence de


certains minéraux naturellement présents dans la biomasse ou par
certains polluants (métaux lourds).

Pour favoriser la production d’un gaz, on pourra donc jouer sur la


température, la pression totale, les pressions partielles, les temps de
séjour et la nature des catalyseurs.

La technologie des gazéifieurs aura aussi une influence notable sur la


qualité des gaz de synthèse produits.
L’inconvénient majeur d’une gazéification à l’air est la production de
goudrons qui peuvent encrasser les éléments froids d’une unité de
production.

En augmentant la température de fonctionnement du gazéifieur, il est


possible de craquer les goudrons. De plus, une augmentation de cette
température se traduira par une augmentation des quantités
d’hydrogène et de monoxyde de carbone produites.

Cette augmentation de température admet cependant des limites : il est


souvent préférable de travailler à une température inférieure à celle de
fusion des sels minéraux (et de ne pas gazéifier des biomasses à forte
teneur en cendres telles que les plantes herbacées).
Bilan Matière
Le tableau précédent semble montrer qu’a priori, la pyrolyse flash est
plus intéressante que la gazéification à l’air. Cependant, le mode
d’apport énergétique est défavorable à la pyrolyse rapide.

Gazéification à la vapeur d’eau

La gazéification à la vapeur d’eau consiste à privilégier une seule


réaction sur toutes celles présentées précédemment à savoir :

 C + H2O  CO + H2 (ΔH0 = + 131,79 kJ.mol-1)

Il s’agit d’une réaction assez endothermique (donc énergivore) mais qui


présente un double intérêt :

 les gaz produits ne sont que des gaz combustibles et donc


le PCI des gaz de synthèse est plus important,
 la production d’H2 est maximisée.
Une obligation : la propreté des gaz

Applications Goudrons Particules Alkalins NH3 Chlorures Sulphures


mg/Nm3 mg/Nm3 mg/Nm3 mg/Nm3 mg/Nm3 mg/Nm3

Moteur à gaz < 50 < 50 <1 < 50 < 10 < 100


Turbine à gaz <5 < 30 ~ ppmv
Synthèses: <1 < 0,02 ~ ppmv
Méthanol, Fisher-
Tropsch

Pile à combustible <1 ~ ppmv

 Traitement des particules (cyclone, électro-filtre, etc…)

 Traitement des goudrons et limitations


- Craquage thermique (1500 °C) : bouchage par les suies
- Catalyse : attrition…
- Catalyse sur lit de charbon
- Lavage : épuration des eaux de lavages, régénération du « solvant »
Craquage catalytique des goudrons : plus la température est
élevée, plus l’efficacité est importante
3.6. Quelques exemples de réalisation industrielle

 Chaudière à gazéification de marque Atmos pour particuliers


Puissance allant de 14 kW à 48 kW avec un rendement élevé (80 %,
donnée constructeur)

Dimensions réduites
Hauteur de 1,1 m à 1,4 m
Profondeur de 0,8 à 1,2 m
Largeur de 0,6 m
 Centrale électrique de gazéification de Güssing (Autriche) permettant
de produire l’électricité pour une ville de 5000 habitants. Lit fluidisé
double. Puissance : 3 à 5 MW.
 Gaséifieurs à la vapeur d’eau Chiptec (de 72 kW à 1 MW)
Autre exemple de réalisation industrielle : Production de
carburants 2ème génération par synthèse Fischer-Tropsch

 Unité de 100 t/h biomasse sèche 1,6 Mm3/an, lit fluidisé sous
pression de 500 MWth.

 Production de 82,6 t/h syngas.

 Avec deux réacteurs FT à 75 % de rendement :


production de FTL (carburant FT): 16,1 t/h soit 0,127 Mt de gazole /an à
comparer avec la consommation française de gazole: 31 Mt.

Limitations majeures:

 Gazéifieur 500 MW (100 t/h). Maxi actuel 30 MW (17 t/h)

 Surface “forestière” minimum nécessaire: 800 km2 (28 km côté avec


un rendement de 10 t/ha).
Vidéo à visionner sur Youtube :

BioTfuel
: procédé de production du biogazole et du biokérosène de 2e génératio
n - YouTube

Projet FUTUROL : procédé de production d'éthanol de 2e génération - Y


ouTube

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