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Chapitre- Conflits et mobilisation sociale Référentiel : lutte des classes

Fiche 2 –Définition et analyse du conflit

Introduction : 2 conceptions antagonistes du conflit


Comme l’indique R.Aron dans « la société américaine et sa sociologie » :
• les sociologues américains ont comme objectif central l’adaptation de l’individu à son milieu. Ils ont donc tendance à
considérer que toute insatisfaction, toute révolte contre le milieu est un phénomène pathologique. Pour l’Américain, l’état
normal correspond à l’intégration de l’individu dans le groupe.
• Au contraire, le Français pense, selon Aron, que pour être bien né, il faut être révolté. Ceci relève donc d’une autre
conception du conflit, beaucoup plus positive qui considère que dans le conflit la société s’exprime et évolue.

Partie 1- La notion de conflit social

Plusieurs éléments généraux permettent caractériser le conflit.

I. L’antagonisme et l’interdépendance des acteurs sociaux


Le conflit social nécessite deux conditions apparemment opposées mais qui sont en réalité complémentaires :
• le conflit est une relation d’opposition entre au moins deux acteurs sociaux ( classes sociales, syndicats, classes
d’âge,...). Le conflit n’est donc jamais solitaire. Ces deux acteurs entrent en lutte, cherchent à l’emporter l’un sur l’autre
afin de dominer le champ social de leur rapport.
• mais en même temps, pour qu’il y ait conflit social, il faut que les acteurs sociaux soient interdépendants et
appartiennent au même système social. Ils ne luttent pas seulement l’un contre l’autre ; ils luttent parce qu’ils ont des
conceptions opposées sur le fonctionnement de la société. Quand ils luttent, ils entrent donc dans un jeu qui les lient.

I. Le conflit, une lutte pour la domination et le pouvoir


Comme l’indique Alain Touraine :
• le conflit ne peut être assimilé seulement à la tension qui existe entre les acteurs sociaux pour la possession de biens.
• Il a une dimension plus fondamentale ; le conflit suppose une remise en cause du pouvoir de domination qu’exerce un
acteur social sur un autre acteur social.
J.Padioleau peut alors en conclure que le conflit correspond :
• à une remise en cause de la légitimité dont dispose les institutions ou les autorités.
• Ainsi, par exemple, le risque d’un conflit est d’autant plus fort que les acteurs sociaux observent que la circulation des
élites dirigeantes est insuffisante (cf. ; critique de la thèse de Pareto dans le chapitre précédent); ce qui génère des
sentiments de frustration et d’injustice qui amènent des individus à remettre en cause les mécanismes de distribution du
pouvoir

I. Le conflit à l’origine du changement social


Même dans les cas où le conflit semble répondre à des revendications purement économiques (hausse des salaires), cette
dimension n’est jamais suffisante pour comprendre le conflit. En effet, même dans ce cas-là, ce sont deux conceptions
antagonistes du développement économique et social qui s’opposent, donc deux visions du monde alternatives :
• Le conflit n’a pas seulement pour but de remettre en cause une forme de domination, de détruire une société que l’on refuse
• il se caractérise toujours une seconde dimension : proposer un autre modèle de développement.
• Le conflit n’est donc pas seulement destructeur et pathologique, il est à l’origine du changement social et donc de
l’évolution de la société.

I. Le conflit est intégrateur


Le conflit va créer du lien social entre les individus qui vont intégrer un des deux groupes en opposition.

Pour un exemple : ici

Un diaporama de C.Thuderoz : Sociologie du conflit et de la négociation sociale

Un article de Sciences humaines : Du côté des cheminots : la grève identitaire

Partie 2- Les théories sociologiques du conflit

I. Les analyses interactionnistes du conflit : l’analyse de Max Weber : le conflit, agent de


socialisation
Pour la théorie de Simmel, fondateur de la théorie du conflit : ici

Weber considère que :


• le conflit est caractéristique de toutes les sociétés car il naît de l’inévitable sélection
sociale qui répartit inégalement les richesses, les honneurs, les droits dans la société :
Weber ne présuppose donc pas une société consensuelle

• Cette sélection sociale va être à l’origine d’une opposition entre les différents acteurs
sociaux sur :
– le fonctionnement de la société, sur les buts qu’elle recherche,
– sur la justesse et donc la légitimité des inégalités qui la caractérisent

• Dans l’analyse du conflit opérée par Weber :


– les adversaires participent à la même société,
– mais chacun veut imposer sa vision du monde social parce que de son point de
vue elle lui paraît plus juste.

I. Le conflit dans la sociologie durkheimienne

A. Durkheim contrairement aux théoriciens du consensus :

• ne considère pas que le conflit soit la preuve d’une pathologie sociale. Bien au contraire selon lui,
le conflit est, comme le crime, un phénomène normal dans la société.
• Il lui paraît donc illusoire d’espérer une disparition du conflit et l’avènement d’une société
consensuelle. En particulier, il ne croit pas que la croissance et le développement économique se
produisant dans une économie de marché assureront la suppression du conflit.

A. Mais Durkheim, contrairement à Marx :

• ne considère pas que le développement et la multiplication des situations conflictuelles,


débouchant sur une révolution économique soit souhaitable.
• Selon Durkheim, la multiplication des conflits traduit l’apparition d’une situation d’anomie
conjoncturelle, c’est à dire d’une remise en cause provisoire des règles et des valeurs fondant et
structurant une société qui évolue.
• C’est en particulier la situation qu’il observe en France à la fin du 19 ème siècle où,
l’industrialisation déstabilise l’ancienne société et laisse les individus déboussolés.

Durkheim préconise alors :


• une intervention de l’Etat
• ou l’apparition de corporations qui, en instaurant des réglementations, permettront de
prévenir un développement des conflits qui ne peut-être que déstabilisateur.

I. Le conflit au centre du changement social dans la pensée de Karl Marx

Introduction

Comme le notent H Mendras et M Forse, Marx est à l’origine de 4 idées fondamentales pour une
sociologie du conflit :
• le conflit de classe n’est pas un épiphénomène mais un trait structurel de la société, il
est inhérent à sa nature et à son fonctionnement. Toute société est donc caractérisée par la
permanence des conflits.
• le conflit ne met jamais en présence que deux groupes ; en effet, dans une société, tout
conflit d’intérêt se ramène toujours à l’opposition entre ceux qui désirent le changement et ceux
qui ont intérêt au maintien du statu quo
• Marx a vu dans les conflits le moteur principal des changements sociaux.
• Marx est un des premiers à s’être intéressé aux facteurs endogènes qui expliquent le
changement social. Il considère que toute société produit elle-même les éléments qui vont
produire sa propre transformation. Ainsi, l’analyse de la lutte des classes explique le changement
par les contradictions structurales des sociétés et non par l’intervention d’un quelconque deus ex
machina.

A. La lutte des classes au centre de l’histoire ( 8 p 377)

Selon Marx l’histoire de toute société jusqu’à nos jours n’est que l’histoire de la lutte des
classes. Cette lutte qui dans tous les modes de production s’est caractérisée par l’opposition entre les
deux classes fondamentales conduit soit à une transformation révolutionnaire de la société toute
entière, soit à la disparition des deux classes en lutte :
• Le premier cas est celui de la lutte qui a opposé la bourgeoisie et la noblesse dans la société
féodale et qui a conduit à l’effondrement du mode de production féodal et à l’instauration du
mode de production capitaliste.
• Mais celui ci n’a pas fait disparaître l’exploitation, l’antagonisme de classe , il n’a fait que le
transformer .
Pour Marx, les classes naissent de la lutte des classes.

Pour l’exemple de la classe ouvrière ici


1. Forces productives et rapport de production ( 9 p 377)

Définitions : Chaque société peut se caractériser à un moment donné par son mode de
production qui désigne la combinaison de deux éléments :
• les forces productives qui regroupent les instruments de production: la force de
travail, les sciences et les techniques en vigueur, l’organisation du travail .
• les rapports de production qui correspondent eux au rapport de propriété des moyens
de production (machines, usines) et permettent de donner une définition des classes
sociales selon la place qu’elles occupent par rapport à la propriété de ces moyens.

Pour les différents modes de production qui se sont succédés au cours de l’histoire : ici
1. Les explications de la succession des modes de production

Selon Marx, le mouvement de l’histoire s’explique par les contradictions entre les forces productives et
les rapports de production :
• Dans chaque mode de production, les forces productives représentent un élément dynamique
comme le montre l’histoire des inventions, le progrès de la division du travail, etc.
• Par contre, les rapports de production sont en revanche relativement stables et immuables. Il
arrive alors un moment où ils entravent le développement des forces productives.

L’exemple du passage du mode de production féodal au mode de production capitaliste :


• la naissance de l ‘industrie moderne avec les manufactures et le développement de l’économie
marchande sont venues buter sur les rapports de production figés (division de la société en
ordres, corporation qui entravent la liberté du commerce et du travail ).
• Marx en conclut que « les conditions féodales de la propriété ne correspondaient plus aux forces
productives déjà développées. Elles se transformaient en autant de chaînes. Il fallut les briser ;
elles furent briser ».

1. La disparition du mode de production capitaliste

R Aron considère donc que :


• le mode de production capitaliste ne diffère donc pas de ceux qui l’ont précédé, excepté sur un
point : il révolutionne en permanence les forces productives alors que la première condition
d’existence de tous les autres modes de production était de conserver le mode de production
inchangé.
• Mais excepté cette différence essentielle on peut considérer que les raisons du passage d’un
mode de production à l’autre sont les mêmes.

Conséquences : Il en sera de même pour la disparition du mode de production capitaliste et le


passage à la société socialiste :
• Comme l’indique Aron : « la bourgeoisie crée sans cesse des moyens de production plus
puissants. Mais, les rapports de production c’est à dire à la fois les rapports de propriété et la
répartition des revenus ne se transforment pas au même rythme ».
• La tendance à l’accumulation du capital bute donc sur une première contrainte qui est la baisse
tendancielle des taux de profit Définition : taux de profit = pl
C+V

* Selon Marx seul le capital variable qui correspond au salaire que reçoit le travailleur crée de la
valeur, le capital constant (machines, matières premières) ne fait que transmettre sa valeur sans
rien ajouter. Or les capitalistes qui se livrent une concurrence effrénée sont obligés pour ne pas
faire faillite d’être compétitifs et de remplacer le capital variable par le capital constant . Ce qui
correspond à une augmentation de la composition organique du capital
Définition : la composition organique du capital capital constant = C.
capital variable V

• La contrepartie de cette augmentation va être une chute du taux de profit : en effet à mesure que
le capital variable diminue relativement au capital constant la plus value( pl ) que le capitaliste
extorque aux travailleurs , c’est à dire la partie du travail non payée que s’approprie la capitaliste
ne suffit plus à compenser le coût du capital qui s’accroît .
• Le capitaliste ne peut trouver de solution que dans une augmentation de l’exploitation c’est à dire
dans une hausse du taux de plus value ou du taux d’exploitation :

Définition : taux de plus-value= pl


V

Pour la transformation du taux de profit : ici

Conclusion :
• constate à partir de ce rapport qu’en augmentant la composition organique du capital (le
dénominateur) le capitaliste ne peut maintenir le rapport (le taux de profit) qu’en élevant le taux
d’exploitation .
• Mais alors cela va être à l’origine selon Marx d’une deuxième forme de contradiction : les ouvriers
se rendant compte qu’ils sont exploités vont se constituer en classe sociale afin de prendre le
pouvoir.

A. Vers la révolution prolétarienne

Postulat : Marx considère que la disparition du mode de production capitaliste est inéluctable :
• Il est pris dans ses contradictions internes : principalement la baisse du taux de profit, qu’il essaye
de résorber en élevant le taux d’exploitation
• Mais alors il se heurte à une seconde limite historique : la constitution de la classe ouvrière dans
la lutte, sa prise de conscience qui va conduire à une révolution amenant la fin du mode de
production capitaliste .

Conséquences : La nouvelle société qui apparaîtra alors présentera deux caractéristiques essentielles
:

1. La fin de l’aliénation par le travail

L’aliénation par le travail est caractéristique de la société capitaliste. En effet comme le note R Aron
dans le mode de production capitaliste les hommes sont aliénés et la racine de l’aliénation est
économique (on retrouve le matérialisme historique) .Le travailleur est dépossédé du fruit de son
travail et n’en voit plus la finalité

Pour en savoir plus :ici

2. La disparition des antagonismes de classe

Selon Marx :
• La révolution prolétarienne amènera la fin du mode de production capitaliste sous l’égide de la
classe ouvrière, comme la révolution bourgeoise a entraîné la disparition du mode de production
féodal.
• Mais il existe une différence notable entre les deux, contrairement à la bourgeoisie, la classe
ouvrière ne va pas confisquer la révolution, elle va abolir les classes en général.

Conséquence : L’Etat, au service de la classe bourgeoise, va alors disparaître, l’ancienne société va


« laisser la place à une association où le libre épanouissement de chacun est la condition du libre
épanouissement de tous ».

A. Les limites de l’analyse de Marx

On retiendra trois limites essentielles :

• première est due à R Aron qui considère qu’ :


– on ne peut plus parler d’antagonismes liés à la propriété privée dans la société socialiste
puisque la propriété privée a disparu.
– Mais ceci n’empêche pas qu’il existe des hommes qui exercent le pouvoir sur les masses
populaires ce qui peut générer de nouveaux types d’antagonisme (cf. en URSS l’opposition
entre la nomenklatura et le reste de la population) .
– Aron en conclut donc : « il n’y a pas de raison que tous les intérêts des membres d’une
collectivité soient en harmonie du jour où les instruments cessent d’être l’objet
d’appropriation individuelle. Un type d’antagonisme disparaît , non tous les antagonismes
possibles ».

• Comme l’indique Mendras et Forse : « la théorie marxiste implique que :


– le changement structural a toujours, et nécessairement, un caractère révolutionnaire. (...).
– Cela revient à considérer les structures sociales entre deux révolutions comme des entités
fondamentalement statiques.
– Certes Marx parle de loi de développement du capitalisme, mais cette dynamique n’est en
fait que celle du développement d’un organisme, l’épanouissement progressif d’un
organisme en son image préexistante. il n’y a de transformation que révolutionnaire .
– Cette idée ne résiste pas à l’épreuve des faits » .
– Conclusion : Marx a sous estimé les capacités d’adaptation du capitalisme qui depuis le
19ème siècle a connu une évolution structurelle très profonde sans révolution qui lui a
sans doute permis d’éviter la grande crise prophétisée par Marx..

• Marx considère que le conflit de classes est nécessairement ouvert, aigu et violent .
Or :
– Mendras et Forsé constatent que : « les données empiriques conduisent au contraire à
penser qu’il ne prend que rarement la forme d’une guerre civile.
– Les changements structuraux qui ont affecté les sociétés occidentales depuis le 19ème
siècle ont abouti à l’institutionnalisation du conflit de classes, si bien qu’une classe
opprimée peut obtenir par la discussion et la négociation des changements de structure ».

I. Les théories contemporaines du conflit

A. L’analyse des conflits de R.Dahrendorf : la prise en compte de l’autorité

Dahrendorf s’oppose à Marx car : ici

Dahrendorf cherche à trouver aux conflits sociaux une autre origine que la seule propriété des moyens
de production. Pour cela il va faire appel à la sociologie de Weber en particulier à deux concepts qui
occupent une place importante chez Weber : le pouvoir et l’autorité :
• « Le pouvoir est la probabilité pour qu’un acteur engagé dans une relation sociale soit
en position d’imposer sa volonté, en dépit de toute résistance , et ceci
indépendamment des raisons qui fondent cette probabilité » (Weber). Le pouvoir s’attache
donc à la personne
• L’autorité est « la probabilité pour qu’un ordre ayant un contenu spécifique soit suivi
par un groupe donné de personnes »(Weber). L’autorité contrairement au pouvoir n’est pas
attachée à la personne mais à un rôle ou à une position sociale.

Dahrendorf va donc redéfinir la notion marxiste de classe sociale en expliquant les conflits
de classe :
• non plus par la seule propriété des moyens de production,
• mais par le contrôle pour l’exercice de l’autorité.
• En d’autres termes la cause des conflits sociaux doit être recherchée dans cette distribution
inégale de l’autorité qui se traduit par des relations de domination-soumission.

Conséquences : Cette opposition crée à son tour un autre type de conflits : les conflits d’intérêts
entre ceux qui exercent le pouvoir et ceux qui y sont soumis. Dahrendorf va distinguer deux types
d’intérêts:
• les intérêts latents qui sont des intérêts communs mal explicités qui provoquent des conflits,
mais ne correspondent pas à un degré de conscience collective suffisante pour donner lieu à des
groupes d’intérêts. Ils ne constituent que des catégories sociales composées d’individus dont les
intérêts sont identiques, mais qui ne sont pas capables de les défendre de façon organisée.
• Les intérêts manifestes, eux, donnent naissance à des groupes d’intérêts organisés et
capables d’agir sur ces bases .

Conséquences : De la sorte :
• il existe une pluralité de conflits sociaux.
• Les conflits entre groupes étant de nature très variée, on ne peut plus les ordonner comme chez
Marx entre deux grandes classes sociales .
• C’est une des erreurs de l’analyse de Marx que de penser que la domination industrielle implique
nécessairement la domination dans les autres domaines de la société, Etat, Eglise, organisations,
etc.

A. Le modèle d’Inglehart ( 2 p 169)

Inglehart relativise l’actualité de la pensée de Marx :


• en montrant qu’une fois ses besoins matériels immédiats satisfaits, l’homme tourne ses
préférences vers des besoins non matériels, de nature intellectuelle ou esthétique.
• Or, l’évolution de nos sociétés développées en serait justement à ce stade du passage des
valeurs matérialistes aux valeurs post-matérialistes, sous l’effet conjugué de la croissance
économique, de l’innovation technologique, du développement de l’éducation, des changements
dans la répartition sociale .

Conséquences :
• On passerait ainsi d’une société de classes à une société caractérisée par une
stratification complexe. Il en découle une augmentation générale du niveau de compétence
politique et une demande accrue de participation au processus de décision .Les citoyens
n’accorderaient plus leur confiance aux organisations traditionnelles ( parti, syndicat )censées
assurer dans le modèle pluraliste une médiation efficace entre le pouvoir et eux.
• Dans le même temps , on assiste parmi les nouvelles générations de la classe
moyenne à l’apparition de nouveaux enjeux qui proviennent plus de différences dans
le style de vie que de besoins économiques. On peut citer par exemple la protection de
l’environnement, le rôle de la femme, la redéfinition des valeurs qui se substitueraient au conflit
entre la bourgeoisie et la classe ouvrière.

A. L’analyse des conflits sociaux d’A.Touraine ( 2 p 379)

Les apports de Touraine à la sociologie du conflit sont nombreux :

1. Des conflits caractéristiques d’une société

Il va s’efforcer de montrer que les conflits sociaux sont caractéristiques d’un type de société et donc,
que quand les sociétés se transforment, les conflits sociaux évoluent :
• Dans la société industrielle les conflits sociaux tournent autour de l’industrie comme
chez Marx.
Pour en savoir plus : ici

• Dans la société postindustrielle , caractéristique selon Touraine de notre époque, les


conflits sociaux qui se forment sont d’une autre nature que dans la société industrielle.
○ « Ils opposent moins le capital au travail que les appareils de décision économique et
politique à ceux qui sont soumis à une participation dépendante ».
○ En effet, dans la société postindustrielle qui est une société technocratique
( caractérisée par le développement d’appareils de gestion et d’information, tendant à
modeler les conduites sociales et culturelles), le pouvoir appartient à ceux qui détiennent
le savoir , l’information. Les conflits sociaux qui étaient autrefois concentrés dans
l’entreprise, se diffusent aujourd’hui dans la société toute entière, opposant à ces appareils
leurs consommateurs et leurs usagers.

1. La diversité des conflits

Dans une société , les conflits sociaux sont très divers. Touraine distingue ainsi :
• les conflits d’intérêts qui cherchent à modifier la relation coûts-bénéfices en leur faveur.
• Les mouvements sociaux qui mettent en cause ,au-delà de l’organisation sociale et du
système de décision, les relations de domination au niveau de la société.
• Les mouvements révolutionnaires qui sont plus globaux encore puisqu’ils identifient une
domination sociale à un régime politique.

Remarque : Ces différents types de mouvements sont largement autonomes mais en même temps ils
portent la marque du conflit social central de la société

Exemple :T ouraine prend l’exemple du mouvement ouvrier qui occupe dans les sociétés industrielles
une place centrale :
• même quand les ouvriers revendiquent pour des augmentations de salaire, pour la
reconnaissance d’un droit syndical, pour une reconnaissance institutionnelle,
• derrière se trouve la marque du mouvement ouvrier basée sur la lutte des classes.

Conclusion : Il faut donc pour Touraine rechercher derrière tout conflit le conflit social central
caractéristique de la société dans laquelle il se déroule.

1. La signification des conflits

Constat : Comme l’indique Touraine :


• « la formation d’un conflit de pouvoir, de la lutte des classes en particulier n’est pas une rupture
de la société. (...)
• Au contraire, plus la lutte des classes est forte, plus les adversaires se réfèrent explicitement à
un modèle intégré de société, parlent au nom de l’intérêt général ».
Conséquence : Le conflit entre les classes n’a donc rien d’une guerre:
• les entreprises et les syndicats partagent des valeurs communes, celles de l’industrie, du travail,
du progrès technique.
• C’est cette toile de fond qui rend visible les disparités, qui permet à un groupe social de percevoir
qu’un autre groupe est en train de s’approprier le produit du travail collectif.
Conclusion : Pour qu’il y ait conflit, il faut donc que :
• les acteurs sociaux partagent des valeurs, une culture,
• mais qu’ils aient des conceptions différentes sur l’intérêt général de la société, et qu’ils cherchent
à transformer l’organisation de la société pour la rendre plus juste.
• Le conflit d’après Touraine ne remet pas en cause l’intégration sociale, au contraire il la renforce.

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