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11 - Quelles sont les composantes institutionnelles des régimes démocratiques ?
B. Définition de la démocratie
La démocratie est une forme d'organisation politique traditionnellement définie, selon la formule
d'Abraham Lincoln, comme le « gouvernement du peuple, par le peuple et pour le peuple ».
On distingue :
la démocratie directe : tous les citoyens, sans l’intermédiaire de représentants élus ou désignés,
peuvent participer à la prise de décisions publiques. La démocratie directe est caractéristique des
sociétés de petite taille où les individus sont peu différents.
la démocratie représentative ou indirecte : les citoyens élisent des représentants chargés de prendre
les décisions politiques, d’élaborer des lois et d’administrer des programmes pour le bien commun.
Cette forme de démocratie se retrouve dans les sociétés de plus grande taille et complexes.
Les institutions démocratiques sont alors des créations sociales qui assurent concrètement la représentation du peuple : élections,
Parlement, responsabilité des gouvernants devant les citoyens ou devant leurs représentants, participation des groupes sociaux et,
en particulier, des partis politiques pour organiser la compétition pour le pouvoir.
Les libertés publiques sont l'ensemble des droits, des libertés individuelles et collectives garantis par
les textes législatifs et donc par l'Etat. Les libertés ne sont dites publiques que si l'Etat intervient
pour les reconnaitre et les aménager, quel que soit l'objet de cette liberté.
Ces libertés publiques assurent alors les deux conditions de la démocratie :
le pouvoir vient des citoyens. Chaque citoyen peut voter de manière libre et être candidat.
Les individus peuvent exprimer leur désaccord grâce aux différents partis qui peuvent s'organiser librement .
il y a donc une hiérarchie de normes : certaines règles sont plus importantes que d'autres.
C'est la Constitution qui est la loi la plus importante. La Constitution est un ensemble de lois qui
définit les différentes institutions composant l’État et qui organise leurs relations.
Il y a deux types de Constitution :
- Une Constitution écrite généralement organisée en plusieurs parties
- Certains États, comme le Royaume-Uni, n’ont pas de Constitution écrite ; c’est la coutume qui prévaut
pour organiser les relations entre les institutions.
La Constitution permet alors de :
- garantir à chacun le respect de ses droits : elle pose, par exemple, le principe de l’égalité des citoyens
devant la loi, fait du suffrage universel la source de la légitimité et accorde à chacun le droit de faire
entendre sa cause devant un tribunal indépendant. Elle permet ainsi d’écarter l’arbitraire en donnant à tous
les citoyens la possibilité de connaître les différents organes de l’État.
- définir les différents organes de l’État selon le principe de la séparation des pouvoirs
1. 3 pouvoirs distincts
Montesquieu dans « L’esprit des lois » énonce la théorie de la séparation des pouvoirs indispensable à la démocratie :
La confusion des pouvoirs génère un régime autoritaire : sous l'Ancien Régime la monarchie relèvait du droit divin :
le monarque était le représentant de Dieu sur terre. Dieu lui avait donné le pouvoir. Ainsi, le roi détenait tous les pouvoirs
sans réels contre-pouvoirs. Le monarque rédigeait les lois, les mettait en œuvre et les appliquait. Ainsi, avec la lettre de
cachet, le roi pouvait envoyer en prison n'importe qui sans justification.
Au contraire, la séparation des pouvoirs favorise la démocratie : Avec la séparation des pouvoirs, chaque pouvoir est
donné à un agent différent et des procédures de contrôle entre les différents pouvoirs existent. L’objectif pour
Montesquieu est d’aboutir à l’équilibre des différents pouvoirs : "Pour qu’on ne puisse pas abuser du pouvoir, il faut
que, par la disposition des choses, le pouvoir arrête le pouvoir.". Pour cela, plusieurs règles sont mises en place :
La règle de la spécialisation : l'exécutif, le législatif et le judiciaire ont des domaines qui leur
sont propres et chaque organe ne doit pas empiéter sur le domaine de l'autre dans le but de
préserver la liberté. Ceci permet de lutter contre l’absolutisme :
- Le pouvoir législatif est généralement exercé par le Parlement, composé d’une ou deux
chambres.
- Le pouvoir exécutif est exercé par le chef de l’État, qui joue un rôle plus ou moins
important selon les régimes, et par le Gouvernement.
- Le pouvoir judiciaire est confié au juge
La règle d'indépendance des pouvoirs : les trois pouvoirs se situent au même niveau. Un organe
ne peut commander aux deux autres. Ainsi, la Justice doit être indépendante du pouvoir
politique. Cette indépendance garantit l'exercice démocratique du pouvoir et permet d’éviter
l’arbitraire
Chaque pouvoir peut détenir des moyens de contrainte sur les autres par le biais de moyens de
contrôle et d’action réciproques : c’est la doctrine des "checks and balances" (l’existence de
procédures de contrôles et de contrepoids)
- Ainsi, en France, le pouvoir exécutif peut dissoudre l’Assemblée. Le contrôle du Parlement s’exerce
aussi par la possibilité de mettre en cause la responsabilité du Gouvernement devant l’Assemblée
nationale.
- aux Etats-Unis, le législatif à un droit de regard sur les nominations des membres du gouvernement ;
l’exécutif peut mettre un droit de veto sur une loi votée par le Parlement qui ne sera levé qu’avec
l’accord des deux-tiers des parlementaires
III. Une application différente selon les pays
L’importance de la séparation des pouvoirs va permettre de distinguer deux grands types de régimes politiques démocratiques :
un régime présidentiel quand les Constitutions privilégient la stricte séparation des pouvoirs
un régime parlementaire quand les Constitutions permettent, tout en étant distincts, de disposer de moyens de contrôle
d’un pouvoir sur un autre
Ces deux régimes démocratiques, présidentiel et parlementaire, sont des idéaux types.
Un idéal-type, d’après Max Weber, est une construction intellectuelle qui a pour but d'expliquer la
réalité. On simplifie la réalité en mettant en évidence les caractéristiques qui paraissent
essentielles et en oubliant d'autres éléments. C’est donc un outil qui permet d’utiliser des
concepts simples pour pouvoir appréhender une réalité sociale complexe et multiforme.
L'intérêt de la distinction entre régime parlementaire et régime présidentiel est de pouvoir classer chaque régime
démocratique à l'intérieur d'une hiérarchie allant d'une séparation souple des pouvoirs à une séparation rigide des
pouvoirs.
Mais on ne va jamais dans la réalité trouver un régime démocratique tel qu’il est présenté dans l’idéal-type. Ces deux
régimes sont des modèles abstraits et figés, ils ne peuvent donc définir des catégories utilisables pour ranger
systématiquement les institutions existantes. Ainsi, tous les régimes démocratiques réels ne pourront pas être classés soit
dans le régime parlementaire soit dans le régime présidentiel. L'exemple du mandat de Nicolas Sarkozy montre bien qu'il
est peu pertinent de faire une distinction rigoureuse des différents régimes politiques. Au début de son mandat, il est
qualifié d'hyper président puisqu'il cumule tous les pouvoirs et tous les rôles (chef du gouvernement, ministre de
l'économie, porte- parole..). Dans la deuxième partie de son mandat on se rapproche d'un régime parlementaire puisqu'il a
été obligé de nommer François Fillon en tant que Premier Ministre alors que ses préférences portaient sur Jean-Louis
Borloo.
Fonctions Le Parlement dispose du pouvoir législatif. Le pouvoir législatif est confié dans
Il a un pouvoir de proposition, sa totalité à une ou deux assemblées.
d'amendement et de vote de la loi. Il vote Il y a donc monopole de l'élaboration
le budget de l’Etat. des lois
- Chambre basse : débat et vote les lois
- 2nd chambre ou Chambre haute :
modérateur, gagne du temps avant
l'instauration des lois
Judiciaire Indépendant des pouvoirs exécutif et A une place importante, car il peut se
législatif trouver à arbitrer les différents entre
l'exécutif et le législatif
Relations entre législatif et chaque pouvoir (législatif, exécutif) Comme chaque pouvoir a des
exécutif dispose de moyens d'action à l'égard de compétences et un champ d'action
l'autre : déterminés, il ne peut influencer
- Le Parlement a un pouvoir de contrôle activement l'autre pouvoir, sauf de
du gouvernement grâce aux manière exceptionnelle.
commissions et aux questions orales. Ainsi, il n'existe pas de procédures
Les membres du gouvernement sont juridiques permettant à l'un des
choisis généralement parmi les pouvoirs de mettre en cause
parlementaires. La Chambre basse l'investiture de l'autre :
peut révoquer le gouvernement en - Le président ne possède pas le
mettant en jeu sa responsabilité pouvoir de dissoudre la ou les
politique. Chambres
- L’exécutif ouvre et clôture les - les Chambres ne peuvent agir
sessions parlementaires, il a un droit contre l'exécutif. Élu pour une
d'entrée et de parole devant les durée déterminée, le président ne
chambres, il peut dissoudre le peut être renversé par les
Parlement (tout au moins la chambre Chambres et n'a pas besoin de
basse). leur confiance.
Inconvénients - Les gouvernements sont instables du fait - les conflits entre les pouvoirs
du risque de censure. législatif et exécutif peuvent
- une politique à moyen terme est difficile à difficilement se résoudre
mener, car la composition du - Le risque est grand que des blocages
gouvernement varie en fonction des voire des affrontements entre les
coalitions deux pouvoirs apparaissent
Le régime présidentiel s'oppose donc au régime parlementaire sur des points essentiels:
origine élective du président, étrangère à toute intervention des Chambres
absence de distinction entre chef d'État et chef de gouvernement
direction « monarchique », sans gouvernement de cabinet.
L’association de caractéristiques des régimes présidentiel et parlementaire fait que les régimes mixtes ne constituent pas une
catégorie homogène. Il existe alors des différences de fonctionnement entre ces régimes de même type institutionnel. Les
caractéristiques présentées ici seront celles du régime semi-présidentiel français.
Régime semi-présidentiel
Séparation des pouvoirs Plus rigide que dans le régime parlementaire et plus souple que dans le régime
présidentiel
Exécutif Constitution Bicéphale :
- Chef de l'Etat élu au suffrage universel. Il a donc une légitimité démocratique
- Chef du gouvernement est nommé par le Président de la République en fonction
de la couleur politique de l'assemblée, élue au suffrage universel. Le chef
du gouvernement a donc une légitimité démocratique
Fonctions - Chef de l’Etat : Il nomme le Premier ministre et les ministres sous la proposition
de ce dernier. Il a des compétences non partagées qui ne nécessitent pas de
l'accord du gouvernement pour la prise de décisions : la diplomatie et l'armée
sont des « domaines réservés » du chef de l'Etat. Il préside le Conseil des
ministres et le Conseil supérieur de la magistrature. Il négocie et ratifie les
traités. Il a un rôle d'arbitre, de garant de la Constitution et en cas de crise a
les pleins pouvoirs
- le Premier ministre est le chef du gouvernement. Il a des attributions partagées
avec le chef de l'Etat : celles qui nécessitent un contreseing, c’est-à-dire un
accord des 2 têtes de l'exécutif Le Gouvernement détermine et conduit la
politique de la Nation. Il dispose de l'administration publique et de l'armée pour
faire exécuter sa politique et faire appliquer les lois. Il a l'initiative de la loi
(Projet de loi).
Législatif Constitution Le Parlement est bicaméral :
- l’Assemblée Nationale (les députés) est élue au suffrage universel direct
- le Sénat est élu au suffrage indirect
Fonctions Le Parlement exerce une grande partie du pouvoir législatif. Il peut
- proposer des lois
- amender celles inscrites par le gouvernement
- les voter.
Le bicamérisme français est inégalitaire : l’Assemblée nationale a plus de pouvoirs
que le Sénat :
- l’Assemblée nationale a une place prépondérante dans l’examen du projet de
loi de finances et du projet de loi de financement de la Sécurité Sociale
- - en cas de désaccord avec le Sénat, l’Assemblée nationale a le dernier mot
dans la procédure législative
- elle seule peut mettre en cause la responsabilité du Gouvernement en lui
refusant sa confiance ou en votant une motion de censure-
Judiciaire - En France, en partie indépendant du pouvoir exécutif : les juges du siège, qui
rendent la justice, sont inamovibles, c’est-à-dire que le pouvoir exécutif ne
peut les déplacer
- Mais cette indépendance est relative : les procureurs, chargés d’engager les
actions judiciaires au nom de la République, peuvent recevoir des ordres du
ministre de la Justice
Relations entre législatif et - En France, le Président peut convoquer le Congrès, dissoudre l'Assemblée et
exécutif convoquer l'électorat aux urnes. Le droit présidentiel de dissoudre l'Assemblée
limite la possibilité pour celle-ci de mettre en cause, du moins à répétition, le
gouvernement.
- Le Gouvernement est doublement responsable devant le Parlement et le chef
de l'Etat.
- L’Assemblée peut renverser le gouvernement par le biais de 3 procédures :
à l’initiative du gouvernement : lorsque le Gouvernement pose une question
de confiance sur son programme ou une déclaration de politique générale. En
cas de réponse négative à la majorité absolue des suffrages exprimés, le
Gouvernement doit démissionner ;
A l’initiative de l’Assemblée : quand le dépôt d’une motion de censure par un
dixième des députés est adopté à la majorité absolue des membres de
l’Assemblée, le Gouvernement est renversé
lorsque le Gouvernement applique l’article 49.3 de la Constitution. Les
députés peuvent déposer dans les 24 heures et voter une motion de censure
pour s’opposer à l’adoption d’un texte sans vote. Dans ce cas, le
Gouvernement est également conduit à démissionner .
- L'Assemblée ne peut pas renverser le chef de l'Etat : le Président n’est pas
responsable devant le Parlement car il est élu au suffrage universel. Elle a un
pouvoir de contrôle de l'exécutif par le biais de commissions parlementaires.
Cependant, dans certains cas, le régime semi-présidentiel peut devenir un régime quasi présidentiel quand le Président
détient une majorité parlementaire pour le soutenir : c’est le cas de la présidence de Nicolas Sarkozy que l’on a qualifié
d’hyperprésidence. La chambre des députés perd du pouvoir
en cas de cohabitation quand l’Assemblée n’a pas la même couleur politique que le Président, le régime semi-présidentiel
peut se transformer en régime quasi parlementaire:
de mars 1986 à mai 1988 : François Mitterrand est président de la République socialiste depuis 1981, les élections
législatives de mars 1986 portent à l'Assemblée nationale une majorité de droite. François Mitterrand nomme
Jacques Chirac (le président du RPR) Premier ministre. De 97 à 2002, Jacques Chirac est Président de la République
et Lionel Jospin (socialiste) Premier ministre.
le régime fonctionne alors comme un régime parlementaire: le Président cède sa prééminence au Premier ministre.
- Le Premier Ministre n'est plus responsable devant le Président mais seulement devant l'Assemblée
- Les pouvoirs du Président sont à rapprocher de ceux du chef de l'Etat dans un régime parlementaire. Il nomme le Premier
Ministre mais ne le choisit pas puisqu'il est obligé de prendre un
représentant de la majorité parlementaire. Ce n'est pas une obligation légale
mais pratique pour éviter que le gouvernement soit renversé. Il ne choisit
donc plus les membres du gouvernement,à l’exception des ministres ayant
des responsabilités dans le domaine dit « réservé » du chef de l’État
(Défense et Affaires étrangères).
- Cependant, le chef de l'Etat, devenu chef de l’opposition parlementaire
garde des pouvoirs :
Face au gouvernement : il préside le Conseil des Ministres,
continue à nommer les hauts fonctionnaires, peut refuser de signer
les ordonnances
Face au Parlement : il peut convoquer le Congrès et dissoudre
l'Assemblée