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Interview du Maître paru dans Officiel Karate de juillet-août 2007.

Je n'ai pas choisi

Mon père était l'un des plus grands pratiquants d'arts martiaux de son époque, judoka de Jigoro
Kano, aikidoka de Morihei Ueshiba, experts de nombreuses écoles traditionnelles d'armes. Il avait
fondé son propre dojo, le Yoseikan... Alors on ne peut pas dire que j'ai choisi les arts martiaux.
Quand il rentrait tard, il m'appelait: « viens voir Hiroo ", et il me montrait quelque chose, une prise,
une saisie. À l'école, j'ai fait du judo et je suis devenu capitaine d'équipe au collège, puis au lycée.
J'étais plutôt fort. J'avais gagné mes trois premiers dan à chaque fois du premier coup sur une
technique différente.
Après, j'ai arrêté de passer les grades. Au Kodokan, la date des passages était toujours vers la fin de
l'année, au moment des examens, et moi, vu mon niveau, je passais tout mon temps à réviser! C'est
drôle, j'ai plein de dan dans de nombreuses disciplines -même un peu trop en karaté, 9ème dan à 71
ans, c'est trop tôt ! mais je ne suis que 3e dan de judo, alors que je me sens au fond judoka de base...
C'est la vie!

Le karaté m'a sauvé la vie

Avec mon père, c'était difficile de rivaliser, il était tellement fort en aikido, en judo. .
Mais à l'université, j'avais beaucoup progressé en judo et un jour, au club, j'ai nettement senti qu'il
ne parvenait plus à contrer mon Judo. Ce fut un choc énorme, une déception terrible, presque une
douleur, car j'étais en adoration pour lui. Et puis, au Japon, il y a des choses qui ne sont pas
possibles. Heureusement, un membre du club m'avait montré du karaté et Je m'étais inscrit à
l'extérieur pour apprendre. Le karaté m'a sauvé la vie, car mon père ne connaissait pas.

J'étais un voyou

On venait de rentrer de Chine où mon père avait été nommé plusieurs années, et on vivait dans un
village de pêcheurs.
J'avais onze ans. Certains des enfants étaient durs, car la vie était difficile, les pères absents. L'un
d'eux, un petit chef de bande, me prenait pour son cheval! Je devais porter ses affaires, ou le porter
lui. J'étais timide, effacé, je n'osais pas me révolter. Un jour, il a brutalisé un ami à moi, un garçon
malade et fragile. J'ai vu rouge, je ne me contrôlais plus. Je l'ai pris et je l'ai jeté au sol, sur le pavé,
avec o-guruma. Ensuite j'ai voulu l'étrangler. Heureusement qu'on nous a séparés, car j'envisageais
de le tuer. C'est ma première rencontre avec un aspect de moi-même que je ne connaissais pas.
Jeune adulte, je n'avais rien à faire des arts martiaux, je ne me voyais pas du tout enseigner, mais je
m'intéressais au réel... et pour cela, je me battais toutes les semaines. J'avais prévu, après mes études
vétérinaires, de partir au Brésil en profitant d'une proposition intéressante du gouvernement
brésilien qui recherchait des gens formés pour exploiter des terres vers Sao Paulo. Je voulais ouvrir
un ranch! Pour moi les techniques martiales, c'était un moyen de me faire respecter de mes futurs
employés, comme le tir au pistolet. Alors je sortais le soir et je cherchais querelle. Pour dire le vrai,
j'étais un voyou.
Des démonstrations limites

Jeune, j'ai fait une démonstration au sabre avec mon père à lame réelle devant des experts
renommés. Nous avions bien sûr préparé notre chorégraphie, mais au moment de commencer, mon
père a attaqué sous un angle imprévu! En fait, il avait oublié ce que nous avions établi et faisait
confiance à mon relâchement mental. En même temps, comme il ne voulait pas perdre la face, il
n'hésitait pas à attaquer! J'ai cru tout le long que j'allais prendre un coup de sabre, mais tout s'est
bien passé finalement et notre démonstration a beaucoup plu. Une autre fois, j'ai résisté à un
étranglement porté par un élève en démonstration. Soudain je me suis évanoui.
L'élève, qui ne pouvait croire m'avoir étranglé, a continué de toutes ses forces pendant quelques
temps. Comme j'étais le seul à avoir les compétences, ils ont mis longtemps à me ranimer! j'étais
allé assez loin. Je me suis vu au-dessus de mon corps, j'ai vu des murs gris. Il n'y avait pas de
douleur ni de tristesse. La mort, je crois que cela se fait comme ça.

Tenir la promesse de Jim Alcheik

Jim Alcheik était un pied-noir aisé qui était allé rencontrer mon père lors de son séjour de deux ans
en Europe, en 1951 et 1952, où il avait enseigné le judo et l'aikido.
Par la suite, il était venu au Japon pour s'inscrire dans son dojo. Il s'était engagé auprès d'Henri Plée
à ramener un expert et mon père, comme il était son «uchi-deshi" (disciple), s'est senti tenu par cette
promesse. En plus, Jim Alcheik voulait l'aider à implanter son dojo en Europe et un lieu de
formation pour les Jeunes Japonais auquel mon père, un humaniste, tenait beaucoup. Mais il était
tuberculeux à ce moment-là et devait rester au Japon. Et puis il ne connaissait pas vraiment le karaté
qui intéressait Henry Plée. Mon professeur de shotokan, Me Hyogo, était d'accord pour y aller, mais
au demier moment il s'est ravisé. Alors mon père a dit: «Tu aides". J'étais en 3e année d'université!
Au Japon, on ne peut pas dire non à son père. Je suis parti en juin 57, je devais rentrer en fin
d'année, remplacé par un expert trouvé par mon père, Me Murakami. Mais Jim Alcheik est revenu à
ce moment-là et a lancé le projet de salle Yoseikan.
Alors je l'ai aidé à construire la salle et j'ai enseigné jusqu'en 59. De retour au Japon, j'ai repris mon
diplôme que j'obtins finalement et en 63 j'étais prêt à partir au Brésil... c'était sans compter sur le
décès de Jim Alcheik!
Alain Floquet, à l'époque adjoint de Jim Alcheik, lançait alors un appel au secours. Mon père ne
pouvant pas, on me sollicita à nouveau! Je repartis donc, pour trouver une situation dégradée. Les
financiers du projet avaient tenté d'en faire une affaire uniquement lucrative et le niveau était bas, le
laisser-aller partout, les ceintures noires données pour de l'argent. C'était très choquant pour moi,
pratiquant japonais. On me demandait de signer des diplômes après une semaine de stage. Je me
suis opposé à l'organisation et je me suis retrouvé en procès, j'avais vingt-huit ans, ce fut très dur.
Robert Reniez m'a sauvé la vie en me recueillant dans sa salle de judo. Là, j'ai commencé à former
sérieusement des élèves dans diverses disciplines dont le karaté. Ensuite, je ne pouvais plus les
laisser. C'est ainsi que je suis devenu professeur d'arts martiaux au lieu d'ouvrir mon ranch.

Les bagares du samedi.

Avoir survécu à mes bagarres du samedi soir, quand j'y pense, c'est un coup de chance. Bien sûr,
aujourd'hui, je ne regrette pas l'expérience que j'ai acquise, mais, c'est comme le combat libre en
cage, à quoi ça sert une expérience qui risque de te tuer ou de te détruire le corps avant trente ans,
alors qu'on a soixante ans à vivre derrière? J'ai rencontré des couteaux, des tessons de bouteille, tout
cela pour apprendre qu'il faut connaître plusieurs arts, parce qu'il y a trop de variables et d'imprévus,
que les techniques de judo sont extrêmement efficaces même pour mettre KO et pour l'équilibre,
mais que si on ne connaît pas les atémis, on ne peut pas se battre contre plusieurs (et les bagarres
sont rarement des duels, ils étaient toujours au moins trois contre moi). Pour savoir aussi qu'il faut
adapter les techniques. Je me souviens d'un blocage sur coup de poing, parfaitement exécuté, mais
où j'avais quand même pris le coup dans le nez car mon blocage avait été trop rapide pour son coup
particulièrement lent! Un jour,j'ai été pris dans un guet-apens contre une dizaine d'assaillants, sans
doute pour une vengeance. Cette fois là,j'aurais dû mourir. J'ai fini par m'échapper et par m'écrouler
comme une méduse sur le pavé, le sang des coups que j'avais pris coulant jusque dans mes
chaussures. Le jeu n'en vaut pas la chandelle. Ce qui est important, peut être, c'est de trouver en soi
ce qui faisait la base de l'esprit samouraï -qui m'a peut-être sauvé ce jour- là-l'absence de peur de
mourir. Mais on n'a pas forcément besoin de se bagarrer pour cela. La compétition permet ça. Les
champions, on les reconnaît à ça, ce goût de dominer, de ne pas laisser gagner l'adversaire quoi qu'il
en coûte. ils s'oublient, ils oublient l'enjeu. ils ne sont pas paralysés par la peur d'échouer, de se faire
mal, de mourir.

La leçon de Monsieur Laffont.

Mon père, qui avait l'esprit ouvert et aimait la France, m'avait parlé de la boxe française. Moi,
karatéka, je rigolais sous cap. Mais en France, j'ai eu l'occasion de rencontrer Monsieur Laffont, une
figure historique de cet art, et de pratiquer un peu. Impossible à l'époque de gagner! En plus, il
passait son temps à me toucher avec son coup de pied bas. Alors j'ai voulu tester le shinai contre lui,
manque de chance, il était spécialiste de la canne et j'ai été touché dans tous les sens.
Cela m'a un peu mortifié. Je me suis intéressé à la façon de se pencher pour frapper les coups de
pied hauts en boxe française, j'ai cherché si notre karaté n'avait pas, lui aussi, la trace d'un coup de
pied bas. Je l'ai trouvé en wado-ryu, un mae-geri au tibia encore plus efficace. J'ai découvert les
attaques aux jambes du kenjutsu. Cela m'a fait comprendre à quel point il fallait s'ouvrir, voir autre
chose, dans sa culture et ailleurs. Aujourd'hui, dans nos sociétés, tout file à toute allure. Il faut
changer avec lui. Les arts martiaux doivent nous en donner les moyens et non pas nous scléroser.

Un Maître comme tout le monde.

Parfois on me demande pourquoi je suis accessible, comme un« homme ordinaire ». Cela choque
certains que je ne me comporte pas en maître. Mais moi je pense à Morihei Ueshiba qui venait pour
deux mois chez mon père.
Quand il repartait, il voulait arriver avec deux heures d'avance à la gare. C'était le pur esprit
samouraï, être prêt à tout, devancer le problème. Mais une fois sur place, il discutait avec tout le
monde avec naturel, les gens qui le croisaient le prenaient pour un gentil bonhomme.
Quand j'allais chez lui à la campagne, il me traitait comme son petit-fils. il me disait« tu aimes les
crevettes? » et revenait quelques heures plus tard avec des crevettes fraîches. Tous les gens vraiment
hors du commun que j'ai rencontrés avaient ça. Quand on dépasse la posture du maître, on redevient
comme tout le monde. Moi, j'ai décidé de rester comme tout le monde dès le départ.

Un seul art.

J'avais beaucoup de choses à enseigner et je me heurtais à ce problème. Pour commencer tout juste
à sentir un nouveau système martial, il faut au moins quatre ans. Les samouraïs commençaient à
sept ans à aborder le tir à l'arc, le cheval, la lance, le sabre..
Mais aujourd'hui, il faudrait douze ans environ pour commencer à tout juste maîtriser quatre
disciplines. C'est long. Mais grâce à mon expérience, j'ai commencé à sentir les points de
rapprochement entre les disciplines. Il y a des similitudes extrêmement fortes entre les gestes. Par
exemple, un coup de poing circulaire et une projection en tai- otoshi, entre un o-soto-gari et un
enchaînement mae-geri/ushiro-geri. En approfondissant, on s'aperçoit que les mouvements sont
similaires et que seule change la logique d'utilisation. Les samouraïs avaient bien compris ça. Il y a
des correspondances très fortes entre les gestes du sabre et les systèmes à mains nues. Le corps a ses
grandes logiques profondes, quand on commence à les connaître on s'aperçoit qu'il n'y a qu'un seul
art. Pas deux, un seul.
Ça aussi c'est le budo, connaître ce un, c'est toucher à l'infini.

La voie royale.

Je suis né dans le judo, j'ai fait sept ans de kendo, encore plus d'aïkido et de karate-do, du kobudo...
même si je dis qu'il y a dans tous les budo une forme de déformation des jutsu, ce n'est pas un
problème, au contraire. Si je l'avais compris plutôt, je n'aurais pas eu le comportement de ma
jeunesse. Bien sûr, il y a des techniques de jambe en ken-jutsu et pas en kendo, mais à quoi ça sert
d'apprendre à couper les jambes? À massacrer des gens? Le kendo va à l'essentiel sur le plan du
principe martial. C'est la voie royale. Chercher le principe pur à chaque fois qu'on pratique, y
compris en compétition, sans trop se soucier de si ça marche ou pas dans une bagarre, ni des
règlements en compétition, voilà la «voie ». Le judo s'en écarte et c'est dommage, cela devient un
sport où seul le règlement compte et où on peut même gagner avec, c'est tellement dommage.
Nous risquons la même chose au karatedo. Il faut rester simple et proche du principe, du projet
originel. On n'a pas besoin de caméras et de ralentis, de moyens mécaniques, de règlements pour
savoir « qui gagne ». C'est l'arbitre qui décide. Comme dans la vie, accepter la chance de la nature,
c'est suffisant. C'est en respectant la méthode du budo-chercher simplement le geste précis, juste, et
pur qu'on peut progresser soi-même et respecter les autres. Le sport en général vise à cela: comment
bien vivre ensemble, comment établir le respect mutuel pour la paix mondiale. Quand le sport se
rappelle de cela, il est en avance sur la politique. Si on oublie cela, le sport ne sert à rien, le karaté
ne sert à rien.

Le cow-boy d' Hermenonville.

C'est dans un cirque à Hermenonville, tenu par Jean Richard, que j'ai eu une forme de révélation.
Il y avait un cow-boy qui faisait un numéro de fouet. Déjà, moi qui avais fait du base-ball, je
trouvais que son geste ressemblait à un lancer, sauf que le« fouetté» allait jusqu'au bout de la
mèche, comme une onde. Ensuite, il a accroché un couteau au bout du fouet et l'a planté dans une
planche avec une force qu'aucun lancer ne pouvait obtenir. J'ai commencé à comprendre le principe
de l'onde qui existe dans tous les phénomènes naturelles comme l'électricité, le son, mais aussi dans
tous les arts martiaux à des amplitudes, des fréquences différentes. À l'époque je n'avais encore rien
compris, j'étais puissant, je croyais que les kata respiratoires, c'était une forme de musculation. J'ai
découvert que c'est le déplacement de l'onde qui donne de la puissance, y compris en karaté, même
si on l'utilise peu. C'est le concept de base de l' aïkido de Ueshiba. Quand il montrait, il faisait des
grands cercles, mais en privé, avec des partenaires aguerris, il raccourcissait jusqu'à obtenir une
véritable vibration dans le mouvement.
On trouve cela partout, en base-ball, en tennis, dans la trompette... Les arts martiaux chinois
utilisent aussi le principe. L'inventeur du tai-chichuan devait être un grand génie, un homme
d'expérience, un humaniste. Il avait compris le principe, et compris aussi qu'il pouvait être auto-
destructeur et qu'il fallait ménager les corps des pratiquants. C'est très impressionnant...

De l'égalité
On me demande parfois si je suis nostalgique du Japon, mais c'est de la France que je suis
nostalgique quand je voyage!
Je ne suis arrivé au Japon qu'à onze ans, j'en suis parti quelques années plus tard, pour la France où
je vis depuis.
Surtout, j'ai appris en France des choses fortes. Vous, ici, vous n'hésitez pas à aborder un ministre
comme un égal. Ce n'est pas forcé, c'est votre sentiment profond. C'est un vrai respect mutuel.
Quelque chose comme cela est impossible au Japon. Notre culture met des barrières où vous n'en
voyez pas, entre les générations, les différents niveaux sociaux, les hiérarchies. On ne peut pas
communiquer et le respect affiché n'est pas non plus forcément le vrai respect. En France si. Cela
m'a profondément touché. La France est le grand pays de l'égalité. C'est mon pays.

Le beau et l'utile

L'homme a toujours été attiré par la philosophie et la beauté. Il y a une partie du cerveau qui
apprécie, qui désire du sens et du beau.
Le beau, c'est ce qui est juste.
Quand un geste est juste, il est utile et beau à la fois. L'être humain aspire à cette dimension.
Quand on ne cherche que l'utile, le fonctionnel dans la société, on aboutit à l'URSS et ça s'écroule.
Les arts martiaux, c'est de l'art, parce qu'on y recherche le geste utile, mais qu'on le veut juste, au
point qu'il devient beau. L' alkido, le judo, le karaté, c'est beau. La beauté, c'est le réel qui
s'accomplit de façon juste et parfaite.
Comme dans un ippon.

Quelle efficacité ?

L'efficacité, cela dépend de quoi on veut parler. Le meilleur guerrier du monde est sûrement un
mauvais sportif, déjà. Mais à quoi sert d'être le meilleur guerrier du monde? Pour être fort à
l'extérieur d'un dojo, il faut s'entraîner à l'extérieur d'un dojo. Mais à quoi ça sert? Devenir bon en
self-défense? Alors il faut connaître des stratégies pour impressionner l'agresseur par des cris, des
mimiques, ou au contraire pour paraître faible. Et puis il y a les armes à feu. Et quand une bombe
tombe, il n'y a pas de technique qui tienne... Alors pour les jeunes, c'est bien de pratiquer l'efficacité
en compétition, sans hypothéquer l'avenir. On apprend des gestes justes, on prend confiance. C'est
un bon équilibre. Quand on prend de l'âge, c'est l'efficacité dans la vie qui commence à devenir
vraiment intéressante. Ce sont les tactiques de la vie qui prennent de l'importance. Comprendre
l'autre, adversaire, partenaire. Comprendre les mécanismes. Parce que quand on perd dans la vie,
cela peut mal finir. Un combat raté, c'est un licenciement. Les arts martiaux peuvent aider à cela,
mais pas nécessairement. Il faut une ouverture d'esprit, une progression intellectuelle. Il faut y créer
l'état d'esprit de la paix. Créer une famille avec les autres hommes. Après, cela devient impossible
de se battre, de se tuer, entre frères.

Unir le karaté

Quand je vois la désunion du karaté et que je pense que c'est dû aux Japonais, cela me fait un peu
honte. Il faut unir le karaté et cette union peut venir de France, pourquoi pas? C'est le pays de
Coubertin et c'est sans doute le seul pays au monde avec une organisation aussi forte. Un diplôme
reconnu par l'état, une méthode nationale. Et moi qui suis arrivé ici, j'ai le sentiment d'avoir de la
chance. Ce pays peut prendre en main l'unification du karaté mondial.
Être d'abord généraliste.

Sans fondation, la plus magnifique des tours s'écroule. Notre monde a des racines profondes dans
les civilisations passées, qui ont contribué à nous faire ce que nous sommes, de la Mésopotamie en
passant par la Grèce ancienne jusqu'à la France. Parfois, le passé ressemble à une momie, quelque
chose de mort, mais il faut pouvoir se situer par rapport à ce savoir. Dans les arts martiaux, il faut
respecter les systèmes anciens, les origines, car c'est eux qui vous donneront le socle solide à partir
duquel vous pouvez explorer et construire. Notre société aime bien les spécialistes, mais un bon
spécialiste c'est celui qui a une base générale solide bien maîtrisée et qui comprend l'enjeu global.
C'est valable pour les étudiants en général, les médecins... et les pratiquants d'arts martiaux.

Transmettre, je n'y pensais pas.

Jamais je ne me croiserai les bras, jamais je ne partirai en retraite. Aujourd'hui encore, je m'entraîne
et je progresse, mes mouvements sont plus courts, moins physiques, plus justes. Je tiens plutôt bien
contre les jeunes. Je fais même mes mouvements de judo, tout seul, avec des ceintures accrochées.
Même si c'est toujours du plaisir, c'est fatigant! Mais il y a toujours un moment où quelqu'un amène
quelque chose de différent qui fait réfléchir. C'est un échange. Cela dit, cela ne m'arrivait pas avant,
mais je suis arrivé à un âge où je me pose des questions, comme, que laisses-tu de positif? J'achève
la construction de mon système du yoseikan budo, c'est un peu comme une œuvre. Mais depuis
quelques années, j'ai envie d' approfondir pour moi, en travaillant autre chose, mon karaté, mon
aïkido, et j'ai envie de transmettre. J'ai oublié beaucoup de choses que j' avais apprises, des katas de
judo ou d'arme... Mais maintenant que je comprends mieux comment toutes ces parties fonctionnent
je crois que je peux conseiller. Je suis parfois un peu triste de garder trop d'idées, de savoir à
l'intérieur.
C'est devenu important, urgent, de faire passer tout ce que sait, et ce que j'ai trouvé.

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