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Avec le naturalisme Zola veut aller plus loin que Balzac en s'attachant au monde des ouvriers.
Fasciné par le succès de la méthode expérimentale dans le domaine scientifique, il veut appliquer
cette méthode au roman et ainsi donner une nouvelle dimension au réalisme, grâce à une
démarche censée fonder une analyse objective de phénomènes tels que l’hérédité et l’alcoolisme.
L’extrait fait partie du troisième volume de Les Rougon-Macquart, ouvrage qui a pour but d'étudier
l'influence du milieu sur l'homme et les tares héréditaires d'une famille, originaire de Plassans, sur
cinq générations depuis l'ancêtre Adélaïde Fouque (née en 1768) jusqu'à un enfant à naître, fruit
de la liaison incestueuse entre Pascal Rougon et sa nièce Clotilde (1874).
Le texte se situe au début du roman, à la fin du chapitre 2, et il narre le rencontre de Florent et son
demi-frère Quenu. Florent a été déporté, il revient après une longue période d’absence. On
apprend plus tard avec la lecture du volume qu’il a été arrêté par erreur à la suite du coup d'État
du 2 décembre 1851, et il a été déporté au bagne de Cayenne en Guyane, dont il a réussi à
s’évader. L’extrait se centre dans cette rencontre et surtout dans l’opposition entre des deux frères,
qui incarnent les deux groupes confrontées à l’époque pour le control de la France.
Les Rougon-Macquart est un titre classique, qu’annonce le personnage (dans ce cas, les
personnages) sur lequel se centre l’ouvrage. Le titre particulier du volume est Le ventre de Paris
(1873), titre symbolique. La signification totale de ce titre, on ne va pas la trouver qu’après la
lecture. L’histoire des développe en Paris, lieu réel, plus concrètement dans les Halles, élément
que Zola introduit comme peinture de la réalité de l’époque. La richesse de la méthode zolienne
est présente même dans le titre, dans lequel il fait personnification de la ville de Paris, en
l’accordant un ventre, voir les Halle. L’association du ventre et de Paris, s’explique à partir de la
nourriture : Zola accorde un rôle important à ces Halles, qui contiennent la nourriture pour tout
Paris. Zola a écrit : « l’idée général est le ventre, le ventre de Paris, et par extension le ventre de
l’humanité. La bourgeoisie digérant, ruminant, cuvent (…) ses joies. La bourgeoisie appuyant
solidement l’Empire, parce que l’Empire lui assure son pâté, sa nourriture. Mais Rougon et
Macquart sont des appétits. ». Le souci de Zola est de faire un portrait sociologique centré sur la
classe de la bourgeoisie. Le peuple du XIX siècle ne venait pas dans les Halles acheter de la
nourriture. C’était la bourgeoisie qui avait l’argent nécessaire pour bien manger, et c’était les
marchands qui étaient eux aussi des bourgeois, petits, mais bourgeois. Si les Halles c’est la
personnification du ventre, alors de la nourriture, les Halles sont associées à la classe des
bourgeois.
Il s’agit d’un récit de fiction (donc que l’action est réelle mais fictif), donc que le passé simple est le
temps de base du récit. Il fait avancer la narration, mais il n’est ni actuel ni inactuel. Il n’exprime
pas ni postériorité ni simultanéité par rapport à un autre passé simple. Il est le présent narratif. Le
récit est coupé de l’instance narrative. C’est pour cela que ce passé simple n’est pas un véritable
passé. C’est distanciation de la réalité. Ce temps de base est mélangé avec l’imparfait, qui est le
temps par excellence de la description dans le récit : « C’était une superbe enfant de cinq ans,
ayant une grosse figure ronde (…) Elle tenait, entre ses bras (…) », « Il était gras, en effet, trop
gras pour ses trente ans. Il débordait dans sa chemise (…) L’examinait d’un air défiant ».
La voix du narrateur est la voix d’un narrateur hétérodiègetique, car le narrateur parle en troisième
personne. Zola emploie plusieurs focalisations : Le début répond à une focalisation externe « Il
poussa une porte, au fond de l’allée. Mais, lorsque Florent entendit la voix de son frère, derrière
cette porte, il entra d’un bond », alors que la phrase suivante contient un sentiment « qui l’adorait
» et le narrateur utilise donc une focalisation interne : dans la deuxième partie, le narrateur entre
et s’identifie au point de vue de Florent, ce qui nous permet lier le narrateur et Florent avec Zola,
qui s’identifie avec Florent plutôt qu’avec Quenu, donc il était aussi contre le régime. La division
entre bourgeois et révolutionnaire arrive dans la même famille. C’est ce changement de focalisation
laquelle nous permet d’établir le contraste entre les deux frères, qui est important pour l’analyse
du texte.
L’opposition entre les deux personnages, qui est fondée sur le « gros » et le « maigre » qui est un
aspect physique, mais est-ce que c’est tout simplement physique ou bien joue-t-il là sur un niveau
symbolique aussi ? En dépassant cette première signification, l’auteur nous laisse voir les deux
types de classes sociaux représentés par les personnages de cette extrait : La famille de Quenu
qui est grosse représente la bourgeoisie, alors que Florent, qui est maigre représente le côté
idéaliste, révolutionnaire. Zola crée un mimétisme entre le personnage et le décor : une relation
métonymique (« Sa face rasée s’était allongée et avait pris à la lointaine ressemblance avec le
groin de ces cochons ») et après métaphorique s’établit entre le personnage et son milieu.
« Tu attendras le déjeuner, n’est-ce pas ? demanda Quenu. Nous mangeons de bonne heure, à
dix heures. » - « Non, j’ai faim, vois-tu. » On suppose qu’il a faim, qu’il veut manger, et quand
Quenu lui dit d’attendre, Florent dit non. Mais il ajoute qu’il a faim. Cette couple question-réponse
il faut l’interpréter : Comme il est révolutionnaire il dit ce qu’il pense. La nourriture que possède la
famille de Quenu vient du régime, et Florent est contre le régime, alors il refuse manger chez eux.
Malgré sa faim, il ne reste pas. Il n’a pas faim de nourriture, mais d’idéal, d’un autre ordre social.
Mélange de discours descriptif du narrateur, de discours direct des personnages et de discours
stylisé. Il y a deux niveaux de langues (deux tons) différents employés qui distinguent le discours
narratorial du discours des personnages. L’intention de la part de l’écrivain de rapprocher le
discours des personnages du parler. Zola a été l’un des premiers écrivains à introduire ce style («
Saperlotte »). Le discours stylisé vise aussi au souci à faire crédible le discours. C’est le langage
de la réalité.
Écrivain engagé du point de vue politique et social, l’écriture zolienne cherche toujours à offrir au
lecteur un reflet de l’époque d’un système politique. Les personnages sont des personnages types
de deux ensembles sociaux. Zola est surtout écrivain de l’épopée sociale, et à travers de ses
volumes il offre au lecteur le portrait d’un groupe social. Les personnages ne sont pas des individus,
ils fonctionnent comme représentation de toute une classe sociale, typique déjà du roman
réaliste/naturaliste, alors que le romantisme s’occupait du héros, d’un seul individu.