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Comportement et

dimensionnement
des poutres

Conception de structures
Automne 2012
R. Pleau

École d’architecture, Université Laval


Calcul des
efforts internes
dans une poutre
Calcul des efforts internes
3
dans une poutre
40 kN/m
Pour calculer les efforts internes à
l’intérieur d’une poutre il suffit de tracer
le diagramme de corps libre (DCL)
8m
d’une partie tronquée de la poutre et de 160 kN 160 kN
calculer l’équilibre statique des forces à
cet endroit. DCL
poutre entière
1m
Pour prendre en 40 kN/m
compte la charge
uniformément répartie, 80 kN
on peut la remplacer a M
a a M
par une charge
résultante équivalente
V V
placée au centre de 2m 2m
gravité du rectangle. 160 kN 160 kN

DCL DCL
poutre tronquée
poutre tronquée
Calcul des efforts internes
4
dans une poutre
40 kN/m

Par exemple, pour la poutre illustrée ci-contre,


on obtient les efforts au quart de la portée de
8m
la façon suivante :
160 kN 160 kN

∑ Fv = 0 d’où : DCL
poutre entière

160 - 80 + V = 0 à V = - 80 kN 1m

∑ Ma = 0 d’où : 80 kN
a a M
- (160 kN x 2 m) + (80 kN x 1 m) + M = 0
V
2m
160 kN
M = 240 kN-m
DCL
poutre tronquée
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Nature des efforts internes

Les forces V et M que nous venons de calculer sont des efforts internes qui
sont induits dans la poutre afin de préserver son équilibre statique.

La force V est ce que l’on appelle l’effort tranchant et il est exprimé en kN.
Cet effort induit des contraintes de cisaillement dans la poutre et la rupture
survient lorsque ces contraintes excèdent la résistance en cisaillement du
matériau.

Le moment fléchissant (M) est exprimé en kN-m. Cet effort de flexion


génère des contraintes de compression et de tension dans l’axe
horizontal qui atteignent une valeur maximale aux fibres extrêmes de la poutre.
La rupture survient lorsque ces contraintes excèdent la résistance à la
compression ou à la tension du matériau.
Effort
tranchant

6
7
Efforts internes dans une poutre

Considérons une poutre simplement


appuyée qui supporte une charge
concentrée au centre de la portée.

Si on coupe la poutre à une distance x


de l’appui gauche et que l’on trace le
DCL de la poutre tronquée on obtient
les efforts internes (V er M) dans la
poutre à cet endroit:
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Effort tranchant (V)

Imaginons que la poutre soit


constituée d’une multitude de
petites tranches verticales placées
les unes à côté des autres:

Sous l’action de la force


externe P, les tranches auront
tendance à glisser les unes p/r
aux autres:

L’effort tranchant est la résultante des contraintes de friction qui s’exercent


entre les tranches pour préserver leur équilibre statique.
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Effort tranchant (V)
Isolons une tranche sur la poutre.

La force externe induit des


contraintes internes de cisaillement,
v, qui génèrent une friction interne
verticale et empêche les tranches
de glisser les unes p/r aux autres.

La somme de toutes ces contraintes v (exprimées


v v kN/m2) multipliées par la section de la poutre
(exprimée en m2) produisent une force interne V
verticale qui est égale à l’effort tranchant V V
(exprimé en kN) et qui préserve l’équilibre statique
translationnel dans l’axe vertical (Σ Fv = 0)
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Effort tranchant (V)
Revenons maintenant à notre poutre tronquée et isolons une petit élément de
matière sur la face de la coupe. On remarque que les contraintes verticales de
cisaillement sont égales mais de directions opposées ce qui assure l’équilibre
statique translationnel dans l’axe vertical.

Cependant, les deux forces v produisent un moment p/r au point a qui impose
une rotation du cube dans le sens horaire. L’équilibre rotationnel n’est donc
pas assuré.
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Effort tranchant (V)

Pour préserver l’équilibre rotationnel, il est nécessaire de


générer des contraintes de cisaillement horizontales qui
produiront un moment p/r au point a qui imposera une
rotation du cube dans le sens anti-horaire pour annuler l’effet
des contraintes de cisaillement verticales et assurer l’équilibre
statique rotationnel.
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Effort tranchant (V)
Imaginons maintenant que la
poutre soit constituée d’une
multitude de petites tranches
horizontales placées les unes
par-dessus les autres:

Sous l’effet de la charge externe P,


la poutre va fléchir et les tranches
auront tendance à glisser les unes
p/r au autres. Ce glissement sera
empêché par les efforts de friction
internes associés aux contraintes
de cisaillement dans le plan
horizontal.
13
Effort tranchant (V)

En effet, les contraintes de


cisaillement dans le plan
horizontal empêchent les
tranches horizontales de la
poutre de glisser les unes p/r
aux autres.

v v

v
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Effort tranchant (V)
Revenons encore une fois à notre poutre tronquée et isolons deux petits
éléments de matière sur la face de la coupe. L’un de ces éléments est placé
au centre de la poutre et l’autre à son extrémité supérieure.

On constate que le cisaillement est forcément nul à la


fibre supérieure et qu’il sera maximal au centre de la
poutre. En fait, pour une section rectangulaire, la
distribution des contraintes de cisaillement suit un
profil parabolique:
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Exemple de rupture d’une poutre de bois provoquée


par les efforts de cisaillement horizontal
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Effort tranchant (V)
Si on examine attentivement le petit élément de matière, on constate que, sous l’action
des forces de cisaillement, le carré initial se déforme pour devenir un parallépipède.
v
On remarque que les deux contraintes de cisaillement dans le coin supérieur
gauche, ainsi que les deux contraintes de cisaillement dans le coin inférieur droit v v
se combinent pour créer une force résultante de tension le long d’une diagonale.

De la même façon les deux contraintes de cisaillement dans le coin inférieur gauche,
v
ainsi que les deux contraintes de cisaillement dans le coin supérieur droit se
combinent pour créer une force résultante de compression le long de l’autre
diagonale.
tension
compression

Pour les matériaux possédant une


v
faible résistante à la tension, comme
le béton, l’effort de tension dans l’axe v v
diagonal peut alors provoquer la
rupture de la poutre.
v
compression
tension
tension

tension

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Exemple de rupture d’une poutre en béton provoquée


par l’effort tranchant (V)
Moment
fléchissant

18
19
Moment fléchissant (M)

Considérons une poutre simplement


appuyée et imaginons une mince
tranche verticale au milieu de la
poutre. Avant l’application des
charges, cette tranche est de forme
rectangulaire.

P
Lorsque la poutre va être soumise à
une charge externe, la tranche va se
déformer pour devenir un élément
prismatique où les deux faces
latérales vont demeurer rectilignes en
s’inclinant p/r à la verticale.
P P
2 2
20
Moment fléchissant (M)
La figure ci-contre montre le profil de déformation sur
la hauteur de la tranche considérée.
profil initial
On peut identifier un axe neutre au centre de la
poutre pour lesquelles les fibres horizontales ne
subiront aucune déformation. compression
Toutes les fibres horizontales situées au-dessus de
l’axe neutre subiront un raccourcissement et seront
donc comprimées. axe neutre
Toutes les fibres horizontales situées en-dessous de
l’axe neutre subiront un allongement et seront donc
tendues.
P
tension
axe neutre

profil final
P P
2 2
21
Moment fléchissant (M)
Si on reconsidère notre poutre tronquée en ne prenant en compte que le
moment fléchissant (M), on constate que ce moment induit des contraintes de
compression dans le haut de la poutre et de tension dans le bas de la poutre. Il
en résulte deux forces horizontales internes F, de direction opposée (Σ Fh = 0)
séparées l’une de l’autre par un bras de levier interne (d). Ces forces génèrent
un moment interne (M = F d) qui équilibre le moment externe (M = Px/2) et
assure l’équilibre statique rotationnel.
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Moment fléchissant (M)
On remarque que, plus la matière est placée loin de l’axe neutre, plus la
contrainte est élevée et plus le bras de levier est grand. La résistance en
flexion d’une poutre sera donc grandement influencée par la géométrie de sa
section.

axe neutre

Plus la matière est située loin de l’axe neutre, plus elle est efficace
pour résister aux efforts de flexion.
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Moment fléchissant (M)
Par exemple, les deux poutres ci-dessous contiennent approximativement la
même quantité de matériau mais la poutre en forme de I est beaucoup plus
efficace que la poutre circulaire parce que la matière est concentrée loin de
l’axe neutre.
compres
sion
compres
sion
axe neutre

tens
ion
tensio
n
24

Exemple de rupture en flexion d’une poutre en béton


Diagrammes
des efforts
internes

25
26
Diagramme des efforts internes

Comme nous l’avons vu au début de cette présentation, on peut


calculer les efforts internes (V et M) sur n’importe quelle section
d’une poutre en traçant le diagramme de corps libre d’une partie
tronquée de la poutre et en faisant l’équilibre statique des forces à
cet endroit.

Si on effectue ce calcul sur plusieurs points de la poutre, on peut


tracer le diagramme des efforts internes qui est une
représentation graphique des efforts internes tout le long de la
poutre. Ce diagramme nous permet d’identifier les sections de la
poutre où les efforts internes sont maximaux.
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Diagramme des efforts internes
Le traçage manuel du diagramme des efforts internes d’une poutre
est une opération fastidieuse car elle nous oblige à calculer
l’équilibre statique des forces en plusieurs points de la poutre.

Pour les cas les plus courants, on peut retrouver les diagrammes
d’efforts internes dans plusieurs ouvrages comme par exemple le
Handbook of Steel Construction publié par l’Institut canadien de
l’acier.

Pour les cas plus complexes, ces diagrammes peuvent être


obtenus facilement en utilisant un logiciel spécialisé, comme par
exemple le logiciel DrBeamPro. Cela fera l’objet du prochain
podcast.
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Convention de signe

Effort tranchant Moment fléchissant

effort effort moment moment


tranchant tranchant fléchissant fléchissant
positif négatif positif négatif
w (kN/m)

wL L wL
2
2

Vmax

Vmax = w L
Vmax
2
Mmax

Mmax = w L2 29
8

Diagramme d’efforts internes pour une poutre simplement


appuyée et supportant une charge uniformément répartie
P (kN)

P L P
2 2

Vmax

Vmax Vmax = P
2
Mmax

Mmax = P L 30
4

Diagramme d’efforts internes pour une poutre simplement appuyée


et supportant une charge concentrée au centre de la portée
P (kN) P (kN)

P L P

Vmax

Vmax Vmax = P

Mmax

Mmax = P L
31
3

Diagramme d’efforts internes pour une poutre simplement appuyée


et supportant deux charges concentrées au tiers de la portée
P (kN) P (kN) P (kN)

3P L 3P
2 2
Vmax

Vmax Vmax = 3P
2
Mmax

Mmax = P L
32
2

Diagramme d’efforts internes pour une poutre simplement appuyée


et supportant deux charges concentrées au tiers de la portée
Efforts
résistants

33
34
Efforts résistants
Pour chaque poutre, on peut calculer deux efforts résistants (Vr et Mr) qui sont
définis comme suit:

Vr = effort tranchant maximal (exprimé en kN) qu’une poutre peut supporter


sans se rompre
Mr = moment fléchissant maximal (exprimé en kN-m) qu’une poutre peut
supporter sans se rompre

Les efforts résistants sont atteints lorsque la contrainte maximale de cisaillement


ou la contrainte maximale de flexion induite dans la poutre excède la résistance
du matériau.

Les efforts résistants sont donc fonction de deux paramètres:

1. la résistance du matériau

2. la géométrie de la section de la poutre


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Effort tranchant résistant (Vr)
L’effort tranchant résistant peut être calculé de la façon suivante:

Vr = Φ Fv k A propriétés géométriques
de la section
propriétés du
matériau
où: Vr = effort tranchant résistant (kN)

Φ = coefficient de tenue (prend en compte la variabilité du matériau)


= 0,9 pour l’acier et le bois
= 0,6 pour le béton
A = aire de la section (mm2)

Fv = contrainte admissible en cisaillement (MPa)

k = coefficient relié à la géométrie de la section


= 0.67 pour une section rectangulaire
Importance de la géométrie
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de la section
La profil des efforts de cisaillement sur une section de poutre est fonction de
la géométrie de la section.

poutre rectangulaire poutre en forme de I

Plus les efforts de cisaillement sont répartis uniformément sur toute la hauteur
de la poutre, plus sa résistance est élevée à l’égard de l’effort tranchant.
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Moment résistant (Mr)
Le moment résistant peut être calculé de la façon suivante:


Mr = Φ Fy I propriétés géométriques
de la section
c

propriétés
du matériau
où: Mr = moment résistant (kN-m)

Φ = coefficient de tenue (prend en compte la variabilité du matériau)


= 0,9 pour l’acier et le bois
= 0,6 pour le béton
I = moment d’inertie de la section (mm4)

Fy = contrainte admissible en flexion (MPa)


c = distance entre l’axe neutre et la fibre extrême (mm)
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Moment d’inertie
Le moment d’inertie est une propriété géométrique des sections qui mesure la
résistance qu’un corps oppose aux déformations de flexion.

Par exemple, pour une section rectangulaire, on a que :

c
I = b d3
axe neutre d
12

Il faut retenir que:

plus la matière est située loin de l’axe neutre,


plus le moment d’inertie est élevé
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Résistance des matériaux

Contrainte admissible (MPa)


Matériau Cisaillement Flexion

Acier de charpente 235 350


Bois lamellé-collé 1,75 25,6
Béton armé 1 20 à 40
Déformations
des poutres

40
41
Fléchissement des poutres
Sous l’effet des charges, les poutres subissent un fléchissement (i.e. des
déformations verticales appelées flèches). Si ces déformations sont trop
importantes elles peuvent occasionner:
- un inconfort pour les usagers;
- des vibrations gênantes;
- des défauts esthétiques (mauvais alignements, fissures, etc.);
- le bris d’éléments de finition (cloisons sèches, parois de verre
revêtements (gypse, plâtre, tuiles de plancher, etc.);
- des problèmes fonctionnels (par exemple un mauvais
fonctionnement des portes et fenêtres).

charge

flèche ( )
Déformations causées par les
42
charges mortes
Habituellement les charges mortes ne causent pas de problèmes car elles sont
imperceptibles pour les usagers et surviennent avant la construction des
éléments de finition (cloisons sèches, parois de verre, revêtements de
plancher,etc.)

De plus, lorsque ces déformations sont trop grandes, on peut les contrôler en
imposant une cambrure à la poutre (i.e. une déformation verticale égale à la
flèche qui sera provoquée par les charges mortes.

charge

cambrure

avant l’application après l’application


de la charge morte de la charge morte
Déformations causées par les
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charges vives
Ce sont donc essentiellement les flèches causées par les charges vives qui
causent problème dans les bâtiments. Le C.N.B. exige que les flèches
maximales causées par les charges vives non-majorées* n’excèdent pas
les valeurs suivantes (où L représente la portée de la poutre):

Flèche maximale
Élément autorisée

Toiture L/180
Plancher ne supportant pas
d’éléments de finition L/240
Plancher supportant des éléments de
finition L/360

* on ne majore pas les charges vives pour le calcul des flèches car ces
déformations ne menacent en rien la sécurité des occupants
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Fléchissement des poutres

La déformation des poutres est


directement proportionnelle à la charge
appliquée et indirectement
proportionnelle à leur rigidité.
Module élastique
Matériau
rigidité = E x I E (MPa)

où E = module élastique Acier de charpente 200 000


(propriété du matériau) Bois lamellé-collé 13 100
Béton armé 30 000
et I = moment d’inertie
(géométrie de la section)
w (kN/m)

max = 5 wL4
wL 384 EI
L wL
2
2

Vmax

Vmax = w L
Vmax
2
Mmax

Mmax = w L2 45
8

Diagramme d’efforts internes pour une poutre simplement appuyée et


supportant une charge uniformément répartie
P (kN)

max = PL3
P L P 48 EI
2 2

Vmax

Vmax Vmax = w
2
Mmax

Mmax = P L
46
4

Diagramme d’efforts internes pour une poutre simplement appuyée


et supportant une charge concentrée au centre de la portée
P (kN) P (kN)

max = 23 PL3
648 EI
P L P

Vmax

Vmax Vmax = P

Mmax

Mmax = P L 47
3

Diagramme d’efforts internes pour une poutre simplement appuyée


et supportant deux charges concentrées au tiers de la portée
P (kN) P (kN) P (kN)

max = 19 PL3
384 EI
3P L 3P
2 2
Vmax

Vmax Vmax = 3P
2
Mmax

Mmax = P L
48
2

Diagramme d’efforts internes pour une poutre simplement appuyée


et supportant deux charges concentrées au tiers de la portée
Dimensionnement
des poutres

49
50
Dimensionnement d’une poutre

Pour dimensionner une poutre, on suit les étapes suivantes:


1. On calcule les charges supportées par la poutre.
2. On trace le diagramme des efforts internes - à partir des schémas
précédents, pour les cas de charge courants, ou en utilisant le logiciel
DrBeamPro - et on calcule les efforts maximaux Vf et Mf provoqués par
l’application des charges totales majorées.

L’utilisation de DrBeamPro fait l’objet d’un autre podcast.


51
Dimensionnement d’une poutre
3. On choisit un profilé en acier ou en bois lamellé-collé qui
respecte les deux conditions suivantes:

Vr > Vf et Mr > Mf

Pour les profilés standard disponibles au Canada, on peut


choisir un profilé très facilement en consultant un tableau qui
est donné dans le document intitulé «Tables de sélection de
profilés standard» et disponible sur le site du cours.

L’utilisation de ce document fait l’objet d’un autre podcast.

On peut aussi concevoir un profilé sur mesure en utilisant les feuilles


excel conçues à cet effet et disponibles sur le site de cours.

Cela fait aussi l’objet d’un autre podcast


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Dimensionnement d’une poutre
4. À l’aide de DrBeamPro on calcule la flèche maximale causée
par la charge vive non-majorée ( max) et on vérifie que cette
flèche est inférieure à la flèche maximale autorisée par le
C.N.B. ( adm).

5. Si la flèche est trop grande, on choisit un autre profilé qui


possède un plus grand moment d’inertie (I). Le moment
d’inertie requis (Irequis) peut être obtenu à l’aide d’une simple
règle de trois :

Irequis = Ipremier profilé x max

adm

Un autre podcast donne un exemple détaillé du processus


qui mène au dimensionnement des poutres

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