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LA LIAISON CHIMIQUE

Les molécules existent parce qu’il existe des forces intramoléculaires attractives entre les
atomes que l’on appelle les liaisons . Bien que les liaisons puissent être décrites par un modèle
unique, il est commode de distinguer deux types de liaisons :
- la liaison ionique :
Elle résulte de l’attraction de deux ions de signe opposé , tels que Na+Cl- ;
- la liaison covalente :
Elle résulte de la mise en commun de deux électrons entre deux noyaux. Comme la répulsion
entre les deux noyaux est amoindrie par la présence de ces deux charges négatives qui
résident partiellement entre ces noyaux, l’édifice peut dans certains cas être plus stable que les
deux atomes séparés.
A : B
Il existe aussi des forces de moindre intensité entre les molécules, appelées forces
intermoléculaires. Parmi celles-ci, on distingue, selon leur nature :
- les forces de Van der Waals , qui sont des forces attractives entre molécules neutres.
L’origine de ces forces peut être diverse :
- interaction dipôle-dipôle, entre molécules polaires (possédant des
dipôles permanents) ;
- interaction dipôle- dipôle induit : entre une molécule polaire et une
molécule non polaire ;
- interaction dipôle induit-dipôle induit : entre deux molécules non
polaires.

- les liaisons hydrogène, qui se rencontre quand une molécule possède une liaison
X—H (avec X = O, N, F) et une molécule qui possède un atome Y (Y, comme X, peut être
O,N ou F). Son origine est électrostatique. Elle résulte de l’interaction entre le dipôle de la
liaison polaire XH et les électrons de X. Elle conduit à une pseudo liaison à trois centres X—
H—Y. Elles sont très importantes entre les molécules d’eau et de glace, et permettre de
comprendre la structure de nombreuses molécules biologiques, en particulier la structure en
double hélice de l’ADN et la structure secondaire des protéines.

I. LA LIAISON IONIQUE

I.1. Modèle de liaison ionique en phase gazeuse.


La liaison entre deux ions de signe opposé résulte de la force électrostatique d’attraction.

MZ+ AZ- L’énergie potentielle d’attraction coulombienne est


donnée par :

Z + Z − e2
r Ec =
4πε0 r
Mais à courte distance, une énergie de répulsion va contrebalancer cette énergie d’attaction
coulombienne. Elle est due au principe de Pauli : on ne peut pas placer plus de 2 électrons
dans une orbitale. Une expression approchée de l’énergie de répulsion est donnée par la
B
formule de Born : E R = n avec n voisin de 8 et B constante.
r
Si l’on représente ces deux termes en fonction de r, on a la situation suivante :

1
L’énergie potentielle totale E s’écrit :

E Z + Z − e2 B
E = Ec + Er = + n
4πε0 r r
ER
A la distance d’équilibre r0, on a :

r dE nB
= 0 = − Z+ Z−e2 − n +1
2

dr 4πε0r r
r0
Z + Z − e 2 r n −1
d’où B = −
4πε0 n
EC
Z + Z − e2 ⎛ 1 ⎞
et E(r = r0 ) = E liaison = − ⎜1 − ⎟
4πε0 r ⎝ n ⎠

C’est l’équation de Born-Landé.

Application numérique : Pour Na+Cl- , r0 =


2,81 x 1010 m, et Eliaison = - 755 kJ.mol-1.

I.2. Energie de liaison d’une paire d’ions dans un cristal


Prenons l’exemple de NaCl, dont le réseau est cfc. Un ion Na+ a 6 ions Cl- à courte distance
qu’il attire, mais il a 12 ions Na+ voisins équidistants plus éloignés qu’il repousse, et encore 8
Cl- plus éloignés qu’il attire.

L’énergie potentielle d’interaction coulombienne d’un ion Na+ avec tous ses voisins
s’exprime alors par :

e2 ⎛ 12 8 ⎞
Ec = − ⎜6 − + .....⎟
4πε0 r⎝ 2 3 ⎠

La somme de cette suite entre parenthèses converge vers une valeur M, la constante de
Madelung.

M e2
Ec = −
4πε0 r
Cette constante M ne dépend que du type de structure cristalline, et pas de la nature exacte du
cristal.
Exemple : pour un cristal de type Nal, M = 1, 747. Pour un cristal de type CsCl, M = 1, 763.
Si l’on tient compte de l’énergie de répulsion ER, on obtient Eliaison .

Me 2 1
E liaison = − (1 − )
4πε0 r n

2
II. LA LIAISON COVALENTE DANS LES MOLECULES DIATOMIQUES

II.1. L’ion moléculaire H2+

e-

r1 r2

A B

Pour ce système à un électron intéragissant avec deux noyaux, l’équation de Shrodinger


s’écrit :

h2 e2 1 1
- ∆Ψ + E p Ψ = E Ψ Ep = − ( + )
8π 2 m 4πε0 r1 r2
Cette équation possède une solution analytique exacte, mais les orbitales moléculaires
trouvées ont des expressions compliquées, difficilement exploitables. Pour construire celles-ci,
on adopte une procédure plus simple appelée Combinaison Linéaire des Orbitales
Atomiques (CLOA).

e2
Lorsque l’électron est près de A, alors E p ≈ − . On retrouve alors l’équation de
4πε0 r1
Shrodinger de l’atome H, dont la solution de plus basse énergie est Ψ1s(A). De même, lorsque
l’électron est prêt de B, il est bien décrit par l’orbitale Ψ1s(B). Ceci suggère que la sonction
d’onde moléculaire peut être décrite sous la forme d’une combinaison linéaire de deux OA :

Ψ = N { Ψ1s(A) + Ψ1s(B) } , avec N facteur de normalisation.

Cette orbitale, qui a une symétrie de révolution autour de l’axe internucléaire, est appelée
orbitale σ (on parlera plus précisément de l’orbitale 1σ).

Calcul de N : N se calcule en écrivant que la fonction d’onde Ψ est normée :

∫ Ψ 2 dV = 1 = N2 [ ∫ Ψ (A) dV
2
1s + ∫Ψ
2
1s (B) dV + ∫ 2 Ψ1s (A) Ψ1s (B)dV ]
= N2 [ 1 + 1 + 2 S ]

1
= 2 N2 (1 + S) D’où N =
2(1 + S)

Dans ces expressions, S est appelée intégrale de recouvrement. S = ∫ Ψ1s(A) Ψ1s(B) dV.

Représentation de l’orbitale 1σ :
Comme pour les orbitales atomiques, il y a plusieurs représentations des orbitales
moléculaires. Pour l’orbitale 1σ, on peut d’abord s’intéresser à la variation du carré de la
fonction d’onde Ψ le long de l’axe internucléaire A—B. En effet, on peut facilement montrer,

3
par un pur raisonnement électrostatique, que le fait de mettre une certaine fraction de la
charge de l’électron entre les deux noyaux contribue à stabiliser la structure. Il est donc
important de voir quelle est la densité de probabilité de présence de l’électron, exprimée par
Ψ2, entre les deux noyaux.

⎛ r +r ⎞
(
Ψ 2 = N 2 Ψ12s (A ) + Ψ12s (B) + 2Ψ1s (A)Ψ1s (B) ) =
1
π
r 1
π
r 2
exp(− 2 A ) + exp(− 2 B ) + exp⎜⎜ − A B ⎟⎟
π
a0 a0 ⎝ a0 ⎠

L’orbitale 1σ est une orbitale pour laquelle la densité électronique est élevée entre les deux
noyaux : ceci contribue à stabiliser l’édifice. On dit que σ est une orbitale liante.

Représentation de l’orbitale antiliante 2σ*:

De même que nous avons considéré la combinaison linéaire des deux orbitales atomiques
Ψ1s(A) et Ψ1s(B) avec le signe +, nous pouvons également considérer la combinaison avec le
signe - :

Ψ* = N’ { Ψ1s(A) - Ψ1s(B) }

Le même calcul de normalisation que celui conduit précédemment pour Ψ conduit à


l’expression du facteur de normalisation N’ :

1
N' =
2(1 − S)

On peut représenter la variation de Ψ*2 le long de l’axe internucléaire :

4
On constate que la densité de probabilité de présence de l’électron est nulle au point médian.
En fait, le plan médiateur de la liaison AB est plan nodal pour l’orbitale 2σ* ( Ψ* = 0).
L’absence d’électron au milieu des deux noyaux et le fait que, dans cette orbitale, l’électron
est plutôt situé à l’extérieur des deux noyaux, contribue à la répulsion des deux noyaux. Pour
cette raison, cette orbitale est appelée antiliante.

Diagramme d’énergie des orbitales moléculaires de l’ion H2+.

Les énergies des orbitales se calculent en remplaçant la fonction d’onde par son expression
dans l’équation de Shrodinger de l’ion H2+. Il en résulte le diagramme d’énergie suivant :

2σ∗

1sA 1sB


Par convention, la structure électronique de H2+ s’écrit 1σ1.

II.2. Les molécules d’hydrogène et d’hélium.


Procédure :
1. On construit les OM par CLOA.
2. On remplit les OM avec les électrons par ordre d’énergie croissante en respectant le
principe de Pauli et la règle de Hund.

5
Molécule H2 Molécule He2 (hypothétique !)

En fait, parce qu’une orbitale antiliante est légèrement plus antiliante qu’une orbitale
liante n’est liante, la molécule He2 est instable vis-à-vis de la dissociation en atomes séparés.

La notion de liaison a disparu dans ce modèle des OM. Pour retrouver cette notion, on
peut définir l’ordre de liaison b :

b = ½ (n – n*) , avec n nombre d’électrons liants et n* nombre d’électrons


antiliants.
Si l’on calcule l’ordre de liaison pour la molécule H2, on trouve b = 1. Par contre on trouve
naturellement un ordre nul pour la molécule He2 qui n’existe donc pas.

II.3. Les molécules diatomiques homonucléaires de la deuxième période.


Ce sont les molécules que l’on peut construire à partir des atomes :
Li Be B C N O F Ne
2 2 2 2 2 2 2 2 2 2 3
1s 2s 1s 2s 1s 2s 2p 1s 2s 2p 1s 2s 2p 1s 2s 2p 1s 2s 2p 1s 2s 2p6
2 2 4 2 2 5 2 2

L’orbitale de cœur 1s ne participe pas à la formation des OM. Par contre, les orbitales
atomiques de valence 2s et 2p contribuent à la formation des OM par combinaison linéaire des
orbitales atomiques (CLOA).

Construction des OM :
- OM de type σ :
2s 2s
2pz 2pz

A B

Les quatre OA 2sA, 2sB, 2pzA, 2pzB contribuent à la formation des OM de type σ : elles sont
toutes de symétrie cylindrique autor de l’axe AB. Pour simplifier, considérons dans un
premier temps que les OA 2s et 2pz peuvent être traitées séparément : dans ce cas, on peut
écrire l’expression des 4 orbitales moléculaires de type σ :

6
Ψ1σ = N (2sA + 2sB)
A B

Ψ2σ = N’ (2sA - 2sB) A B

B
A
Ψ3σ = N’’ (2pzA + 2pzB)

A B
Ψ4σ = N’’’ (2pzA - 2pzB)

- OM de type π :
Les quatre OM de type π sont obtenues en combinant deux à deux les orbitales 2px d’une part
(avec une combinaison liante et une combinaison antiliante), et les orbitales 2py d’autre part
(avec une combinaison liante et une combinaison antiliante).

Les orbitales moléculaires obtenues sont dites de type π à cause de leur antisymétrie par
rapport au plan xOz pour les πx (et πx*) et au plan yOz pour les πy ( et πy*).

Ψ1π = N (2pxA + 2pxB)


A B

Ψ2π∗ = N’ (2pxA - 2pxB)


A B

Diagramme d’énergie des orbitales moléculaires :

Jusqu’à présent, on a négligé le fait que les orbitales atomiques 2s et 2pz, de même symétrie
de révolution par rapport à l’axe Oz, pouvaient intervenir ensemble dans les combinaisons

7
linéaires . Cette approximation, valable pour les atomes O et F pour lesquels l’écart en énergie
entre 2s et 2pz est grand, conduit au diagramme d’énergie de gauche ci-dessous. On dit que ce
diagramme est « non corrélé ». Par contre, pour les autres atomes de la ligne pour lesquels
l’écart en énergie entre 2s et 2pz est plus faible, alors le diagramme est un peu différent :
l’orbitale 3σ passe au-dessus des orbitales 1π (diagramme de droite ci-dessous, que l’on
appelle « diagramme corrélé »).

4σ∗
4σ∗

2πx*, 2πy*
2πx ,
*
2πy*


1πx, 1πy
1πx, 1πy



Diagramme non corrélé Diagramme corrélé

On peut maintenant donner la structure électronique des molécules diatomiques :

Molécule Structure électronique Ordre Commentaire


de
liaison b
Li2 1sA2 1sB2 1σ2 1
Be2 1sA2 1sB2 2
1σ 2σ *2
0 La molécule n’existe pas

B2 1sA2 1sB2 2 *2
1σ 2σ 1πx 1πy 1
C2 1sA2 1sB2 2
1σ 2σ *2
1πx 1πy2
2
2
N2 1sA2 1sB2 1σ2 2σ*2 1πx2 1πy2 3σ2 3
O2 1sA2 1sB2 1σ2 2σ*2 3σ21πx2 1πy2 2πx* 2πy* 2
F2 1sA2 1sB2 1σ2 2σ*2 3σ21πx2 1πy2 2πx*2 2πy*2 1
2
Ne2 1sA2 1sB2 1σ 2σ 3σ
2 *2
1πx2 1πy2 2πx *2
2πy*2 *2
4σ 0 La molécule n’existe pas

II.4. Les molécules diatomiques hétéronucléaires.

Premier exemple : CO (monoxyde de carbone).

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La méthode CLOA s’applique en combinant entre elles les OA de C et les OA de O, comme
nous l’avons fait pour les molécules diatomiques homonucléaires. La seule différence est la
différence d’énergie entre les OA de départ. Dans le cas de CO, les orbitales 2s et 2pz sont
corrélées. Le diagramme des OM est le suivant :

C O Les orbitales de type σ sont construites à


partir des OA 2s et 2pz des deux atomes. Les
4σ∗ orbitales de type π sont construites à partir
des OA des deux atomes.
2πx*, 2πy*
Le diagramme des OM étant construit, on le
remplit avec les 10 électrons de valence de
2pC 2pO CO. Les cinq premières OM sont peuplées.
L’orbitale 3σ est presque non liante et joue
3σ un rôle important dans le rôle de ligand de
CO (c’est pour cela qu’il est un poison).
1πx, 1πy
L’ordre de liaison b est égal à 3 (comme N2).
La structure de Lewis que l’on peut écrire (et
2σ qui donne le sens correct du moment
2sC dipolaire) est en accord avec cet ordre de
liaison :
- +
C O
2sO

Deuxième exemple : l’hydrure de lithium LiH.

Les orbitales atomiques de valence à combiner entre elles sont 1sH et 2sLi, 2pxi, 2pyLi et 2pzLi.
Les énergies des OA sont les suivantes :

H (eV) Li (eV)
1s -13,6 - 58
2s - 5,4
2p - 3,6

H est plus électronégatif que Li (voir échelle d’électronégativité de Pauling). Ceci se traduit
par une orbitale la plus haute occupée (1sH) d’énergie plus basse que l’orbitale la plus haute
occupée du lithium (2sLi).
Pour construire les OM de LiH, on considère 1sH, 2sLi et 2pLi.

Le diagramme des orbitales moléculaires de LiH est le suivant :

9
A partir de 1sH, 2sLi et 2pzLi , on construit
3σ∗ 3 OM de type s, parmi lesquelles une est
liante (1σ), une est non liante (2σ) et la
troisième est antiliante (3σ).
Les orbitales 2px et 2py du lithium restent
inchangées dans la molécule LiH : elles
2pLi 1πx, 1πy sont dites non liantes.

2σ Dans la configuration électronique de


LiH, seule l’orbitale 1σ est peuplée.
2sLi
L’ordre de liaison est donc égal à 1 , ce
qui correspond à la liaison que l’on
trouve dans la structure de Lewis :
Li___H
Le doublet liant n’est pas également
réparti entre les deux noyaux : comme le
montre le schéma de l’OM 1s, le nuage
1sH électronique est plus dense autour de H.
Il en résulte une liaison polaire, avec un
1σ moment dipolaire dirigé de l’hydrogène
au lithium :
δ+ δ−

Li H

II.5. Le principe de variation


Nous allons expliquer le principe du calcul des coefficients des combinaisons linéaires des
OA . Soit une fonction d’onde moléculaire Ψ = cAΨA + cBΨB. Cette fonction d’onde est
solution de l’équation de Schrodinger HΨ = EΨ.

H (cAΨA + cBΨB) = E (cAΨA + cBΨB)

Multiplions les deux membres par ΨA et intégrons sur tout l’espace :

∫ ΨA H (cAΨA + cBΨB) dV = E ∫ ΨA (cAΨA + cBΨB) dV

Posons αA = ∫ ΨA H ΨA dV et αB = ∫ ΨB H ΨB dV (intégrales de Coulomb). De plus


posons β = ∫ ΨA H ΨB dV (intégrale de résonance).
L’équation précédente devient :

cA (αΑ – ES) + cB (β – ES) = 0 (1)

Multiplions maintenant les deux membres par ΨB et intégrons sur tout l’espace.
On arrive à une deuxième équation :

cA (β – ES) + cB (αB – E) = 0 (2)

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Ces deux équations sont appelées équations séculaires*. Elles admettent une solution si le
déterminant suivant, appelé « déterminant séculaire » est nul :
α A − E β − ES
= 0
β − ES α B − E
Ce déterminant conduit à une équation du second degré en E qui a deux racines :
- la plus négative donne l’énergie de l’orbitale liante,
- l’autre donne l’énergie de l’orbitale antiliante.
Dans le cas où αA = αB = α, on a :

α+β α −β
E+ = E− =
1+ S 1− S

Si on porte chacune de ces valeurs de E dans le système d’équations (1) et (2), on trouve les
valeurs des coefficients cA et cB. Dans le cas simplifié que nous venons de présenter, la valeur
de E+ conduit à cA = cB et la valeur de E- conduit à cA = - cB.

II.6. Méthodes semi-empiriques et ab initio.

En résolvant le déterminant séculaire, on trouve les valeurs de l’énergie. A partir de


ces valeurs de l’énergie injectées dans les équations séculaires, on trouve les coefficients des
combinaisons linéaires.
Le problème est que, pour trouver les énergies, il faut connaître les intégrales α et β.

Première approche : Méthodes semi-empiriques.


Les intégrales sont estimées à partir de données spectroscopiques (telles que les énergies
d’ionisation des atomes)
CNDO : « completely neglected differential overlap » : on pose S = 0
INDO : “incompletely neglected differential overlap” : on pose S ≠ 0.
Avantage : temps de calcul courts.

Deuxième approche : méthodes ab initio


Les intégrales sont calculées à partir d’une base d’orbitales atomiques. C’est la tendance
moderne, favorisée par la puissance des moyens de calcul actuels.

III. LES MOLECULES POLYATOMIQUES

III.1. Structure de Lewis des molécules et ions polyatomiques

Les structures sont basées sur la règle de l’octet : chaque atome (à partir du carbone) tend en
formant des liaisons à s’entourer d’une couche de 8 électrons (ce qui correspond à une
saturation de la couche ns,np).

*
« Séculaire » vient d’un mot latin qui signifie « âge », ou « génération ». Ce terme vient de l’astronomie où on
trouve le même type d’équations pour décrire les légères modifications des orbites planétaires.

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Exemple :
Molécule d’eau Molécule de méthane
H

O H H C H

H H
Procédure générale pour écrire une structure de Lewis :

Exemple 1 : CCl4
a) On calcule le nombre total d’électrons de valence dans la molécule :
(4 x 7) + 4 = 32
Cl C
Dans le cas d’un ion, on tient compte des électrons supplémentaires pour un anion, ou dans le
cas d’un cation on enlève un nombre d’électrons équivalent à sa charge.
b) Le nombre d’électrons nécessaire pour satisfaire à la règle de l’octet pour les
atomes est calculé :
8 x 4 + 8 = 40 électrons
Cl C
(dans le cas de H, on ne compterait que deux électrons par atome H)
c) Le nombre d’électrons partagés est c = b – a.
c = 40 - 32 = 8
d) On place les atomes autour de l’atome central de la molécule.

Cl

Cl C Cl

Cl
e) Le nombre d’électrons σ est calculé ; c’est le double du nombre de liaisons simples
à créer entre les atomes : ici, il faut prendre 8 électrons σ.
Cl

Cl C Cl

Cl
f) Le nombre d’électrons π est déterminé comme la différence entre le nombre
d’électrons partagés et le nombre d’électrons σ. Ici, 8 – 8 = 0 : pas de liaison π.
g) Le nombre d’électrons non partagés est a – c. Ils sont distribués sur tous les atomes
pour satisfaire à la règle de l’octet . Ici, a - c = 24 (ce qui donne 12 doublets libres).
Cl

Cl C Cl

Cl

Exemple 2 : La molécule de dioxyde de carbone CO2.


a) C, 2 O 4 + (2 x 6) = 16 électrons de valence
b) Règle de l’octet : 3 x 8 = 24

12
c) Nombre d’électrons partagés : c = 24 - 16 = 8

d) O—C—O
e) Nb d’électrons s = 4
f) Nb d’électrons p = 8 - 4 = 4 (soit 2 liaisons p) O C O
g) Nb d’électrons non partagés : 16 - 8 = 8
O C O
D’où la structure de Lewis de CO2 :

Exemple 3 : L’ion nitrate NO3-


a) 5 + 3 x 6 + 1 = 24 électrons de valence
b) Règle de l’octet : 4 x 8 = 32 électrons.
c) Nombre d’électrons partagés : c = 32 - 24 = 8
O N O

d) O
e) Nb d’électrons s = 6
f ) Nb d’électrons p = 8 - 6 = 2 (1 liaison p)
g) Nb d’électrons non partagés : a – c = 24 – 8 = 16 (8 doublets libres)

+ -
O N O

O
-
L’atome d’azote porte dans cette structure une charge formelle + 1, et deux atomes d’oxygène
sur trois portent une charge formelle -1. Evidemment, comme les 3 oxygènes sont équivalents,
il y a en fait trois écritures équivalentes de l’ion nitrate. Ces écritures, appelées « formes
limites de résonance », expliquent en particulier que les longueurs des 3 liaisons NO sont
équivalentes dans l’ion nitrate.

Réduction de la charge formelle par « expansion de la couche de valence » :


A partir de la troisième période de la classification périodique, la règle de l’octet n’est pas
toujours respectée, car la sous-couche 3d peut accueillir des électrons.
Exemple : Structure de Lewis de l’ion sulfate SO42-

O S O
-
O
-
III.2. Prévison de la géométrie des molécules polyatomiques
Gillespie a proposé une méthode empirique , la méthode VSEPR (« Valence Shell Electron
Pair Repulsion » ), qui permet de prédire l’arrangement d’atomes autour d’un atome central ce
qui, de proche en proche, permet de décrire la géométrie d’une molécule. Les règles de
Gillespie s’expliquent par la recherche d’un arrangement des doublets de liaisons et des

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doublets libres qui minimise l’énergie de répulsion en éloignant au maximum tous ces
doublets.
On écrit la molécule (supposée avoir un atome central A entouré d’autres atomes X ) sous la
forme A Xp Eq, où p désigne le nombre d’atomes X et q le nombre de doublets libres E.
La somme p + q définit la géométrie de la molécule.

Voir tableau règles VSEPR


On peut affiner les géométries prédites précédemment en tenant compte des propriétés
spécifiques des doublets liants et non liants. Les interactions répulsives se classent dans
l’ordre suivant :
E /E > E / X > X / X
Conséquence sur un exemple :

N O
H
H H H H
NH3 : angle de 107 ° H2O : angle de 104,5°

Rôle de l’électronégativité des atomes :


Plus un atome est électronégatif, plus il attire vers lui les doublets de liaison et plus l’angle
XAX est ouvert.
A l’inverse, pour les atomes périphériques, plus l’électronégativité augmente, et plus l’angle
XAX se ferme.

III.3. Orbitales moléculaires des molécules polyatomiques

Les OM sont construites de la même manière que pour les molécules diatomiques par
combinaison linéaire des OA de valence des différents atomes :
Ψ = ∑ c i Ψi
où Ψi sont les orbitales atomiques ayant même type de symétrie par rapport aux
éléments de symétrie de la molécule polyatomique.
La différence principale réside dans le fait que les OM sont délocalisées sur tous les atomes
(elles ne sont pas localisées sur une seule liaison, au sens de la paire électronique de Lewis).

Exemple : la molécule d’eau et le diagramme de Walsh.


Comment la théorie CLOA peut-elle prédire que la molécule H2O est coudée ?

Molécule H2O linéaire : Orbitales moléculaires :


x Type σg : construites par C.L. de Ψ2s et Ψ1sA
+ Ψ1sB. 2 orbitales
Ψσ= c1 Ψ2s ± c2(Ψ1sA + Ψ1sB)

A B Type πu construites à partir de 2px et 2py : 2


z OM non liantes Ψ=Ψ2px et Ψ’=Ψ2py

Type σu construites à partir de Ψ2pz et (Ψ1sA-


Ψ1sB) :
Ψσ= c’1 Ψ2pz ± c’2(Ψ1sA - Ψ1sB)

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H2O coudée à 90 °C Cette molécule possède un axe de symétrie
d’ordre 2 (une rotation d’un angle p laisse la
molécule inchangée), et deux plans de
symétrie perpendiculaires passant par cet
axe, le plan de la molécule et le plan
x perpendiculaire au précédent. Les OM
construites ont des symétries de type
différent par rapport à ces éléments de
symétrie.
OM de type a1 : s’obtiennent en combinant
z entre elles les OA 2s, 2px et la combinaison
A B (Ψ1sA + Ψ1sB). 3 OM sont ainsi construites.
OM de type b1 : Ψ = Ψ2py
OM de type b2 : s’obtiennent en combinant
Ψ2pz et la combinaison (Ψ1sA - Ψ1sB). 2
orbitales appartiennent à ce type :
Ψ = c’1Ψ2pz ± c’2 (Ψ1sA - Ψ1sB).

Voir figure donnant le schéma des différentes orbitales

Diagramme de Walsh :
Ce diagramme établit la corrélation entre les OM construites à partir de ces deux géométries
extrêmes et classées par ordre d’énergie croissante. Les OM de même symétrie sont corrélées
entre elles.

Pour prédire la forme la plus stable de la


molécule H2O, on place sur ce double
diagramme les 8 électrons de valence de la
molécule d’eau : les quatre orbitales figurant
sur ce diagramme sont peuplées. Il apparaît
clairement que la géométrie la plus stable
(celle qui donne l’énergie la plus faible) est
la géométrie coudée.
Expérimentalement, l’angle n’est pas de 90 °,
mais de 104,5 °.

III.4. L’approximation de Hückel

Cette approximation s’applique au cas de molécules conjuguées dans lesquelles il y a une


alternance de simples et de doubles liaisons.
Exemples :

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C C
-
C C
+
C C
C C

Butadiène -1,3
Formes mésomères (il y en a trois dans ce cas)

Benzène C6H6

Formes mésomères de Kékulé Hybride de résonance

Ces différentes formes résultent de la délocalisation des électrons π. La méthode proposée par
Hückel (1931) consiste à traiter séparément les électrons p et à laisser de côté le système σ qui
constitue le « squelette » de la molécule.

a) Ecriture du déterminant séculaire pour le système π de l’éthène.

Le déterminant séculaire qui permet de


2py 2py trouver les coefficients des combinaisons
linéaires s’écrit :
α − E β − ES
=0
β − ES α − E
avec α = ∫ Ψ2pyA H Ψ2pyAdV
et β = ∫ Ψ2pyA H Ψ2pyBdV
et S = ∫ Ψ2pyA Ψ2pyBdV (intégrale de
recouvrement)

Les racines de ce déterminant sont les solutions d’une équation du second degré facile à
résoudre.

b) Système π du butadiène -1,3.


Ecrivons le déterminant séculaire pour les 4 orbitales moléculaires π du butadiène-1,3. ces
OM sont des combinaisons linéaires des 4 orbitales atomiques 2py localisées sur les 4 atomes
de carbone :
Ca Cb

Cc Cd

α−E β AB − ES AB β AC − ES AC β AD − ES AD
β BA − ES BA α−E β BC − ES BC β BD − ES BD
=0
β CA − ES CA β CB − ES CB α−E β CD − ES CD
β DA − ES DA β DB − ES DB β DC − ES DC α−E

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Les racines de ce déterminant sont plus difficiles à trouver (de manière analytique simple).
Une idée approximative, mais tout de même assez instructive, du diagramme d’OM peut être
obtenue facilement dans le cadre des approximations de Hückel :
- Toutes les intégrales de recouvrement S sont supposées nulles ;
- Toutes les intégrales de résonance β entre atomes non voisins sont supposées nulles ;
- Toutes les autres intégrales de résonance b sont supposées avoir la même valeur β.

Application de la méthode de Hückel à l’éthène :


Pour l’éthène, le déterminant de Hückel s’écrit :
α−E β
= 0
β α−E
Les racines de ce déterminant sont E± = α ± β.
Le diagramme des OM de type π de l'éthène se représente par:

BV 2π∗ La transition π --> π* a l’énergie 2β.


L’énergie de la liaison p est aussi égale à
2β dans ce schéma.

hν 2py β est un paramètre ajustable qui a été pris


2py
égal à – 0,8 eV.

HO 1π

Application de la méthode de Hückel au butadiène :


Le déterminant de Hückel s’écrit :
α−E β 0 0
β α−E β 0
=0
0 β α−E β
0 0 β α−E

Les racines de ce déterminant sont E = α ± 1, 62 β et E = α ± 0, 62 β

D’où le diagramme d’énergie des OM, donné ci-dessous. Les coefficients des combinaisons
linéaires s’obtiennent en résolvant le système d’équations précédent pour chaque valeur de
l’énergie. La forme des OM π est donnée pour chaque valeur de l’énergie.

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α − 1,62 β

BV α + 0,62 β

2py

HO α + 1,62 β

α + 1,62 β

L’énergie totale du système π est égale à :


ETot = 4 α + 2 x 1,62 β + 2 x 0,62 β = 4 α + 4,48 β
L’énergie de liaison π est égale à 4, 48 β.

Si la molécule avait été considérée comme la juxtaposition de 2 liaisons π bien localisées


entre les atomes CACB d’une part et CCCD d’autre part, l’énergie de la liaison π aurait été 4 β.
Donc on a une stabilisation supplémentaire de 0,48 β. Cette énergie est appelée « énergie de
résonance ».

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