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1. Notre corpus de travail figure à la fin de cet article (bibliographie des sources
citées).
2. Claude Girard (poète religieux et docteur en droit), L’Orphée sacré du Paradis,
Lyon, imprimerie de feu J. Gautherin, 1627, épître dédicatoire à Louis Dinet (n. p.).
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I. LE BLÂME DU VÊTEMENT
3. Étienne Molinier (prêtre, prédicateur toulousain sous Louis xiii), Les Douze
Fondemens de la cité de Dieu, ou les Douze Articles du symbole des Apostres, expliqués par les
douze pierres précieuses de l’Apocalypse, en XXI discours, Toulouse, Arnaud Colomiez, 1635.
Vêtement et quête des sociétés idéales, entre ostentation et révélation 29
qu’elles mettent sur leur sein, au grand scandale de l’oratorien qui les
accuse de tuer ainsi les âmes 4 ; le mouchoir de col resurgit dans les
histoires comiques, même si, dans ce cas, le blâme sans équivoque
laisse place à une chronique sociale plus ambiguë.
Voilà un pauvre artisan, qui possible n’a pensé à Dieu de huit jours, qui a
passé toute la semaine sans le prier, il ne garde que le Dimanche pour ce
faire ; […] il vous [id est la coquette] rencontre à l’Église, l’éclat de vos habits
luy donne dans les yeux, luy remplit le cœur, luy dérobe sa dévotion ; et au
lieu de s’occuper de Dieu, il s’occupe de la creature 7.
10. François de Calvi, Inventaire general de l’histoire des larrons, Paris, Rolin
Baragnes, 1631, p. 1 sq.
11. Charles Coypeau Dassoucy, Les Aventures de M. Dassoucy [1669], in Libertins
du XVIIe siècle, éd. J. Prévost, Paris, Gallimard, coll. « Bibliothèque de la Pléiade »,
1998, p. 797-808.
12. Jean Le Jeune (« Sermon xxvi. Des ajustements mondains », art. cit., col. 691)
fonde le premier point de son sermon sur l’application à la coquette de Matthieu XXIV,
15 – Cum videritis abominationem desolationem stantem in loco sacro – qui lui-même
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Combien de soins criminels à nouër ces cheveus, le reste peut estre d’un
gibet ou d’une ladrerie : à ajuster sa garcette, asseoir la mouche, repartir le
fard, faire les sourcils, laver les dents possible achetées ; s’habiller à la mode
avec un luxe, une depanse et une effronterie qui crient vengeance au Ciel 13 ?
La coquette d’âge mûr cumule ainsi les défauts aux yeux du père
carme : non contente d’abandonner les soins du ménage, elle fait
preuve de libido dominandi, se montrant aussi autoritaire envers ses
serviteurs qu’insoumise avec son mari, voire le trompant avec des
galants. L’habillement trop recherché chez une femme témoignerait
pour le prédicateur d’une volonté, qu’il réprouve avec une violence
verbale manifeste, de sortir de son rôle subordonné à l’homme.
Une illustration de la page de titre gravée de la Metaneologie sacrée
d’André Valladier 15, œuvre de Léonard Gaultier, présente d’ailleurs
une allégorie de la Superbia vitæ en femme somptueusement vêtue,
tenant un miroir orné de plumes de paon, tandis que le Jeûne et la
Pénitence ne se voilent que de simples tuniques.
renvoie à Daniel IX, 27, passage évoquant la présence d’un autel de Jupiter dans
le temple de Jérusalem.
13. Léon de Saint-Jean (carme proche de Mazarin, prédicateur de la Régence
et de Louis XIV), Les Metamorphozes sacrées, naturelles, morales, divines, tirées de
l’Écriture sainte, Grenoble, André Gallé, 1665, p. 348-349.
14. Ibid.
15. André Valladier (bénédictin, prédicateur de Marie de Médicis), Metanealogie
sacrée ou Sermons sur les Évangiles du Caresme, Paris, Pierre Chevallier, 1616.
Vêtement et quête des sociétés idéales, entre ostentation et révélation 33
Ils sont si accoutumez à aller tous nus, qu’ils croient qu’on ne peut parler
de se couvrir, sans se declarer ennemi de la nature, et privé de raison 18.
Est-il [le mondain] superbe par ses sceptres, par ses crosses ? qu’il vous regarde
avec le roseau en main. Est-il superbe par les pierreries et bagues de ses doigts ?
qu’il regarde les cloux fichez dedans vos mains. Est-il superbe de ses beaux
habits ? qu’il vous voie vestu tantost de pourpre, tantost de blanc en risee :
sur tout, tout nud en vostre croix, au cramoisy de vostre precieux sang 21.
haut d’un pié et demy, avec trois pouces de bord : il estoit troussé avec
l’Aygrette à la guyse de nos vieux Gaulois 26.
[…] il fut ordonné que quand le Roy sortiroit de son palais pour venir au
Conseil, il seroit vestu d’une robbe de toile d’or cramoisi surfrisée et brodée
par devant et à l’entour avec la soutane de mesme, mais plus legere ; la
chemise à collet brodé d’or et de soie cramoisie, les pantoufles de toiles d’or
brodées, avec la couronne d’or en teste faite à fleurons, parsemez de riches
diamans, rubis et perles portant le sceptre à la main de mesme fabrique 32.
Il était vêtu d’une toge de fin drap noir, pourvue de larges manches, et d’une
cape. Dessous, il portait un vêtement long jusqu’au pied, fait de lin blanc
comme sa ceinture et comme l’étole qu’il avait sur les épaules. Il avait des
gants délicats, incrustés de pierreries, et des chaussures de velours couleur
fleur de pêcher. […] Il était coiffé d’un casque ressemblant à une montera
espagnole, duquel s’échappaient en boucles gracieuses les cheveux, qu’il avait
bruns. Il se déplaçait dans un splendide carrosse […]. Il tenait sa main nue
levée, comme pour bénir le peuple, mais en silence 33.
[…] ma parente fort proche, qui estoit encore vestuë dans le mesme
estat qu’elle estoit quand elle mourut. Je luy vis les mesmes Galoches de
Velours noir, avec les Souliers de Satin incarnadin couverts de Dantelle
d’or, et d’argent. [ …] ses cottes estoient levees, qui me faisoient voir sa
Chemise brodée de passement de Flandre, par le devant elle estoit ouverte
[…] quand vous prenez le matin votre robe à courtes manches ou votre
mouchoir de cou transparent, vous pouvez dire, sans danger de mentir :
Mieux vaudrait pour moi qu’on me mît à présent une meule de moulin au
cou, et qu’on me plongeât au fond de la mer 37 […].
C’est une chose bien seante à un grand Prince, et à toute personne d’autorité,
d’estre honorablement vestu et accompagné quand il paroist en public. Car
le lustre des habits et la pompeuse suitte apportent je ne sçai quel respect et
reverence, d’autant que l’honneur presupposant honneur (dont tels ornemens
font partie) on juge que telles personnes sont pleines aussi de vertu et de
merites, puis qu’ils en portent les marques et enseignes 39.
nous le contemplerons dans l’eau d’un bassin, c’est-à-dire sous les symboles
et emblesmes des ornemens Sacerdotaux 41.
BIBLIOGRAPHIE
Histoires comiques
Claireville Onésime de, Le Gascon extravagant, Paris, Cardin Besogne, 1637.
Dassoucy Charles Coypeau, Les Aventures de M. Dassoucy [1669], in Libertins
du XVIIe siècle, éd. J. Prévost, Paris, Gallimard, coll. « Bibliothèque de
la Pléiade », 1998.
Sorel Charles, Histoire comique de Francion [1623-1633], éd. F. Garavini,
Paris, Gallimard, 1996.
Fictions politiques
Anonyme [IDMGT], Histoire du grand et admirable royaume d’Antangil,
Saumur, T. Portau, 1616.
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