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III- LA METHODE DES DIFFERENCES FINIES

Les méthodes numériques s’intéressent à la recherche de valeurs de la fonction en des endroits particuliers.
Autrement dit, on ne cherche pas l’écriture d’une fonction qui vérifie l’équation, mais par quelles valeurs passe
la fonction en des abscisses particulières (c’est la méthode des différences finies), ou bien on recherche sur des
éléments du domaine étudié l’écriture d’une fonction simple qui approxime au mieux la solution recherchée
(c’est la méthode des éléments finis).
Une fois ce travail fait, on a donc une « image graphique » de la solution.

1. Principe de la méthode
Ce principe se décline en plusieurs étapes.

a) Le domaine étudié est maillé. On parle de discrétisation du


domaine.
Exemple de maillage d’un domaine 1D. Ce maillage peut
être régulier ou non, c’est-à-dire que le pas du maillage
peut être constant ou non

Exemple de maillage d’un domaine 2D (on n’en a représenté


qu’une partie

La méthode des différences finies recherche une solution aux nœuds du maillage.

b) On discrétise également l’EDP, c’est-à-dire qu’on va écrire en chaque nœud une approximation algébrique
de l’équation d’origine.
c) On écrit autant d’équations algébriques qu’il y a de nœuds où on cherche une solution, ce qui conduit à
écrire un système d’équations
d) on résout ce système d’équations

2. Cas d’une EDP elliptique (stationnaire)


2-1 Cas de conditions de Dirichlet
On considère un domaine carré, donc 2 dimensions d’espace (problème
2D), où on veut résoudre le problème suivant :

(équation de Laplace)

Les conditions limites sont de type Dirichlet, telles que décrites sur le
schéma ci-contre, g1 et g2 étant 2 constantes quelconques.

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a) Discrétisation du domaine d’étude
Le domaine d’étude comprend le domaine interne, noté Ω, et la frontière, notée Γ.
On va créer un maillage relativement lâche (afin de limiter ensuite les
écritures ; mais l’extension à plus de nœuds ne pose aucun problème)
et régulier.
Ce maillage introduit en tout 25 nœuds, dont 9 nœuds internes et 16
nœuds frontières. Cependant, les nœuds frontières ne constituent pas
des valeurs à rechercher, puisque la valeur de la fonction y est connue
(conditions de Dirichlet).
Seuls les nœuds ici numérotés de 1 à 9 constituent donc les inconnues
de notre problème, sachant que bien sûr, les conditions limites doivent
intervenir dans la solution.
Le maillage étant régulier, on pose Δx = Δy = h
Rappelons que la méthode des différences finies permet de trouver une valeur approchée de la solution aux 9
nœuds, solution qui vérifie l’équation :

b) Discrétisation de l’équation
Cette étape consiste à remplacer l’EDP par une équation algébrique approchée. Plusieurs approches sont
possibles.

Approche graphique
On a déjà vu qu’on pouvait remplacer une dérivée par une équation.
Considérons la courbe ci-dessous et sa dérivée 𝜕𝜕𝜕𝜕⁄𝜕𝜕𝜕𝜕 au point
d'abscisse x. Cette dérivée correspond à la tangente à la courbe au
point d'abscisse x.
On note

On peut approximer cette tangente par la pente de la corde entre les points (xi ,ui) et (xi+1 ,ui+1).

Cette pente est égale à plus Δx est petit, et plus l'approximation est valide. Autrement dit, le terme

est une approximation de la dérivée première à l'abscisse xi quand Δx→ 0.

Cette discrétisation de la dérivée première est dite avant, ou à droite, ou progressive, ou aval,
car elle fait intervenir ui+1 à l’abscisse xi+1.
De la même façon, on peut approximer la dérivée première à l'abscisse xi par la pente de la corde entre les
points (xi ,ui) et (xi-1 ,ui-1) : quand Δx→ 0.

Cette discrétisation de la dérivée première est dite arrière, ou à gauche, ou régressive, ou


amont, car elle fait intervenir ui-1 à l’abscisse xi-1.
On peut également approximer la dérivée première par la pente de la corde entre les abscisses
xi-1 et xi+1. On a alors

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Cette discrétisation de la dérivée première est dite centrée

On peut maintenant avoir une approximation de la dérivée seconde en xi, en dérivant 2 fois par rapport à x, et
en appliquant une fois une discrétisation avant, puis une discrétisation arrière :

Cette discrétisation de la dérivée seconde est dite centrée

Approche analytique
On peut arriver au même résultat en utilisant le développement de Taylor d’une fonction au voisinage d’un
point.

En écrivant ces développements à l’ordre 1 :

soit c’est le schéma de discrétisation


avant

soit c’est le schéma de discrétisation


arrière
Pour le schéma centré :

en faisant la différence de ces 2 expressions :


soit schéma de discrétisation
centré
Remarque : le schéma centré est meilleur que les 2 autres, puisqu’avec une erreur en O(∆x²) alors que les
schémas avant et arrière ont une erreur en O(∆x). Ceci se visualise aisément sur la méthode graphique.

Pour la dérivée seconde :

en faisant la somme de ces 2 expressions :


soit schéma
centré
En revenant à notre exemple et en notant :

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Par ailleurs, nous rappelons que le maillage est régulier : Δx = Δy = h

En sommant ces 2 expressions

Comme l'équation à résoudre est :

en négligeant l’écriture de O(h²)


soit

Cette expression constitue donc une approximation de l’EDP écrite au nœud Ui,j . C’est une relation entre 5
nœuds qui approxime l’EDP écrite au nœud Ui,j. Calquée sur le maillage, on l’écrit sous forme graphique comme
ci-dessous où on représente les coefficients de chacun des nœuds :

c) Ecriture du système d’équations


On va maintenant écrire l’équation discrétisée en chacun des nœuds inconnus, ce qui va conduire à un système
de 9 équations à 9 inconnues. Pour cela, on reprend la numérotation des 9 nœuds de 1 à 9 ; en effet, cela est
moins laborieux que de travailler en double coordonnées (i,j).

On représente généralement ce système d’équations sous forme matricielle, ce qui permet de bien choisir
ensuite la méthode de résolution qui sera adoptée. Ici, la première ligne sert à bien repérer les colonnes,
sachant que l’absence d’une valeur dans la matrice carrée correspond à zéro.

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d) Résolution du système d’équations
De la résolution du système pour un carré de 1 mètre de coté (donc h=0.25m) et avec g1 = 1 , g2 = 2, on obtient
l’image suivante de la solution :

Un maillage plus fin permettrait d’obtenir une meilleure précision


(mais avec plus d’équations à résoudre et au détriment de l’approche
pédagogique).

2-2 Cas de conditions de Neumann homogènes

On considère le même problème que précédemment : un domaine


carré, donc 2 dimensions d’espace, où on veut résoudre le problème
suivant :

Les conditions limites sont de type Dirichlet à droite et à gauche, telles


que décrites sur le schéma ci-contre, et de type Neumann homogène
(c'est-à-dire nulle) en haut et en bas.

a) Discrétisation du domaine d’étude


Afin de limiter le nombre d’équations à écrire, on adopte le maillage
suivant du dessin de droite. Les nœuds inconnus U sont numérotés de
1 à 8. S’il n’y a pas de problème pour les nœuds internes 3 à 6, on peut
légitimement s’interroger sur les nœuds frontières 1, 2 et 7, 8. En effet,
la valeur de la dérivée est connue en ces nœuds, mais en aucun cas la
valeur de la fonction. Ce sont donc bien des nœuds inconnus.

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b) Discrétisation de l’équation
On a exactement la même équation que précédemment ; elle peut être approximée par l’expression écrite au
nœud inconnu Ui,j

Ceci introduit une difficulté aux nœuds frontières puisque cette discrétisation de l’équation introduit à chaque
fois un nœud en dehors du domaine d’étude, qu’on appelle « nœud fictif ».

Pour éliminer les nœuds fictifs de la discrétisation, il suffit de prendre en compte la condition de flux sur la
frontière en question.
Prenons l'exemple du nœud n°1 et nommons le nœud fictif 3'.
• La discrétisation de l'équation au nœud 1 donne :

• La discrétisation centrée de la condition de flux au nœud 1 s'écrit :


ce qui implique que

On remplace u3' dans la discrétisation de l'équation

Ceci permet d'éliminer le nœud fictif de l'équation écrite au nœud 1.


Remarquons que cette discrétisation vérifie simultanément l'équation et la condition limite. On obtient donc 3
formes différentes de discrétisation selon la position du nœud :

c) Ecriture du système d’équations

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La mise sous forme matricielle donne :

d) Résolution du système d’équations


En prenant g1 = 1 et g2 = 2 dans un domaine carré de 1 mètre de côté, nous obtenons l'image suivante de la
solution :

La solution dans cet exemple est un plan entre les valeurs 1 et 2 selon Ox. Ce qui vérifie parfaitement l'équation
à résoudre (toutes les dérivées secondes sont nulles, donc leur somme est nulle) et les dérivées premières en y
sont nulles.

2-3 Cas de conditions de Neumann non homogènes

Il n'y a pas de difficulté particulière, il suffit de suivre la méthode en intégrant la condition de flux non homogène
au niveau de la discrétisation.
Prenons comme exemple des conditions de flux égales à f1 à la frontière supérieure et f2 à la frontière
inférieure.

a) Discrétisation du domaine d’étude


Cette étape est strictement identique à la précédente

b) Discrétisation de l’équation
On a exactement la même équation que précédemment ; elle peut
être approximée par l’expression
écrite au nœud inconnu ui,j
Comme auparavant, des nœuds fictifs apparaissent ; on discrétise
donc la condition de flux.
Prenons l'exemple du nœud n°1 et nommons le nœud fictif 3'.
• La discrétisation de l'équation au nœud 1 donne :

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• La discrétisation centrée de la condition de flux au nœud 1 s'écrit :
ce qui implique que

On remplace u3' dans la discrétisation de l'équation


soit
c) Ecriture du système d’équations

La mise sous forme matricielle donne :

3- Notions sur les erreurs de la méthode


3-1 Présentation
Soit une équation aux dérivées partielles en u notée L(u) = g où L est un opérateur différentiel. Par exemple,
dans l’équation de Laplace, L est l’opérateur et L(u) = 0 est alors l’équation

On peut alors formaliser l’équation discrétisée sous la forme L∆(u) = g où ∆ est symboliquement le pas de
discrétisation et L∆ un opérateur algébrique.
La solution obtenue par la méthode des différences finies peut alors se noter u∆ , c’est-à-dire l’approximation
de u avec le pas de discrétisation ∆.

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On peut étudier les erreurs au niveau des différentes étapes de ce schéma.

a) La discrétisation est liée à la notion de consistance (ou de cohérence). Un schéma de discrétisation


consistant est un schéma qui représente bien l’équation d’origine.

b) La résolution des équations obtenues est liée à la notion de stabilité de la solution. Une solution u∆ stable doit
vérifier le problème L∆(u) = g

c) La représentativité de u∆ est liée à la notion de convergence. u∆ doit être une approximation convenable de
u.

d)

3-2 La consistance
On appelle « erreur de troncature » la quantité
C’est-à-dire concrètement la différence entre le schéma discrétisé et l’équation d’origine.
L∆(u) est dit consistant si RΔ→0 quand ∆→0

Reprenons l’exemple précédent en posant et étudions la consistance.

L’opérateur différentiel "dérivée seconde par rapport à une variable z" peut se symboliser par
et l’équation peut alors se représenter par :

Le développement de Taylor au voisinage de x s’écrit :

On en déduit :

De la même façon, le développement de Taylor au voisinage de y s’écrit :

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On aboutit à :

On peut sommer les 2 expressions du dessus :

L’erreur de troncature totale est donc

Cette quantité tend vers 0 quand Δx et Δy tendent vers 0. Le schéma de discrétisation est donc consistant.

3-3 La stabilité
Cette notion concerne les résolutions des systèmes d’équations pour lesquels on est souvent amené à mettre
en œuvre des algorithmes itératifs. La stabilité peut se résumer à dire qu’une erreur d’arrondi (ou une
perturbation numérique) ne doit pas s’amplifier au cours des calculs. On peut imager cette notion de stabilité
avec une bille et un bol.
On retourne le bol et on pose la bille en équilibre. La moindre perturbation de la bille va entraîner
sa chute. C’est un système instable (la perturbation s’amplifie)

A contrario, on met le bol à l’endroit et la bille au fond. Une perturbation de la bille va entraîner
une oscillation de celle-ci au fond du bol, mais elle va revenir à un état d’équilibre. C’est un système
stable.
L’étude mathématique de la stabilité est assez complexe.

3-4 La convergence
Le théorème de Lax dit que s'il y a consistance et stabilité, alors il y a convergence. Autrement dit, un schéma
de discrétisation consistant et une méthode de résolution stable conduisent à une solution qui est une bonne
image de la solution recherchée.

Dans la méthode des différences finies, les discrétisations vues jusqu'à maintenant (les plus classiques) sont
consistantes. Aussi, on s'attachera à préciser uniquement les conditions de stabilité pour vérifier la
convergence.

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