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Chapitre 5

L’entretien clinique

Articles
« Le début du traitement » : une réflexion de Freud concernant le cadre analytique qui
demeure d’actualité :
https://psycha.ru/fr/freud/1913/debut_traitement.html

« Spécificités de la psychothérapie psychanalytique à l’adolescence » : une synthèse de


Philippe Jeammet qui aide à comprendre comment travailler auprès d’adolescents :
https://www.cairn.info/revue-psychotherapies-2002-2-page-77.htm

« Le stade du miroir comme formateur de la fonction du Je, telle qu'elle nous est révélée dans
l'expérience psychanalytique » : un article dense et complexe de Jacques Lacan qui analyse
l’impact du stade du miroir sur la vie psychique :
http://aejcpp.free.fr/lacan/1949-07-17.htm

Vidéos
« Le célèbre cas de Gloria » : la même patiente rencontre trois psychothérapeutes célèbres
Rogers (humanisme), Perls (gestalt) et Ellis (thérapie rationnelle-émotive) :
https://www.youtube.com/watch?v=SgiX0QLnpBM

« Entretien clinique du psychanalyste Otto Kernberg avec une patiente » : une illustration plus
contemporaine d’un entretien d’orientation psychanalytique :
https://www.psychotherapy.net/video/personality-disorders

« La vie de Françoise Dolto » : pour mieux comprendre la vie et les notions développées par
cette célèbre pédopsychiatre française :
https://www.youtube.com/watch?v=MOF2vYmlizU

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Cas clinique
Entretien avec la famille D.
Proposez une analyse ce premier entretien, et plus précisément des différents aspects
thématiques et des enjeux psychiques au sein de cette famille. Indiquez également la façon
de travailler avec ces enfants et le type de prise en charge que vous proposeriez.

Monsieur et Madame D. viennent avec leurs deux enfants, Mathieu, 8 ans, en classe de CE2,
et Julien, 6 ans, en classe de CP, pour une première consultation au Centre médico-
psychologique, à leur demande. Monsieur et Madame D., à l’apparence soignée, paraissent
tendus en salle d’attente et demandent à plusieurs reprises à Mathieu de ranger le livre qu’il
est en train de lire. Il paraît contrarié et ne semble guère avoir envie de venir. Quand il arrive
dans le bureau de consultation, il se cache derrière les rideaux tandis que ses parents lui
demandent de venir s’assoir avec eux et le psychologue.

PSYCHOLOGUE : Mathieu si tu ne veux pas discuter avec nous pour le moment, il y a quelques
jouets là.
[Mathieu et son frère commencent à jouer avec des Playmobils ; Monsieur et Madame D. se
sont installés face au bureau du psychologue aux deux chaises les plus éloignées l’une de
l’autre.]
PSYCHOLOGUE : Qu’est-ce qui vous amène ?
MADAME D. : Eh bien Julien a été très malade il y a deux ans... Il a été atteint d’un cancer qui
a nécessité des traitements très lourds. Il a été opéré et maintenant ça va, il faut encore
attendre quelques années pour être certain qu’il n’y a pas de rechute.
PSYCHOLOGUE : J’imagine que cela a dû être une période très difficile pour vous…
MADAME D. : Oui… et maintenant nous avons des difficultés avec Mathieu. Il n’obéit pas, il
hurle pour prendre sa douche. Parfois, il ne veut pas aller non plus aux toilettes pour faire
caca et du coup il en met plein sa culotte. Cela dure depuis un an, même si on le dispute.
MONSIEUR D : En fait, il a des problèmes avec la frustration.
PSYCHOLOGUE : D’accord…
MONSIEUR D. : Puis il est souvent dans son monde, il est un peu brouillon même s’il a des
bonnes notes en classe. A l’école, il n’a pas vraiment d’amis, il est le bouc émissaire et quand
ça ne va pas il dit qu’il est nul, qu’il est mauvais et que c’est sa faute. Puis il n’aime pas le
sport non plus, on l’a inscrit au foot, mais il ne veut pas y aller.
[Pendant ce temps, Mathieu et Julien sortent tous les jouets. Monsieur D. leur dit sèchement
de faire moins de bruit et de ne pas tout déranger.]
PSYCHOLOGUE : Je vois…
MONSIEUR D. : Puis il y a une sorte de rapport de force entre ma femme et lui. Ils se
cherchent, ils se titillent et elle est très exigeante avec lui, elle l’a dans le nez en fait. Puis il
finit par exploser, mais ça va dans les deux sens.
MATHIEU : J’ai pas le droit de mettre les pieds sur le canapé !
MADAME D. : C’est vrai que je suis très exigeante avec lui. Mais, quand on est que tous les
deux, c’est super !

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PSYCHOLOGUE : D’accord.
MADAME D. : Nous avons aussi quelques problèmes avec Julien. Il fait comme s’il était là
pour s’amuser ! Il n’aime pas qu’on le mette à sa place et il fait comme si c’était lui le père,
comme si c’était lui qui commandait. Et il ne parle jamais de sa maladie alors qu’on voit que
parfois il est triste. Puis, il a du mal à se repérer dans le temps.
MONSIEUR D. : Il a le spleen.
MADAME D. : En plus, ses amis se moquent de lui car ses cheveux sont en train de repousser.
À un moment, il ne voulait plus manger non plus. Il disait qu’il avait peur de grossir.
[Julien regarde alors le psychologue en souriant, tandis qu’il joue avec un bébé et ses
ustensiles étalés un peu partout autour de lui.]
MONSIEUR D. : Oui… enfin c’était parce que sa maman faisait un régime, il voulait faire
pareil. Ils ont des problèmes pour dormir aussi. Mathieu fait quelques cauchemars parfois et il
a peur du noir.
MATHIEU [qui s’est avancé vers le bureau] : Oui et dedans il y a des plantes carnivores.
PSYCHOLOGUE : Cela doit te faire peur dis donc...
MATHIEU : Oui !
MONSIEUR D. : Cela n’est arrivé que rarement. Généralement quand ça arrive il vient dormir
entre nous et s’endort très vite.
PSYCHOLOGUE : D’accord, et Julien ?
MADAME D. : Alors lui c’est un vrai cirque le soir, il ne veut pas aller dormir parfois jusqu’à
11 heures. Il y a toujours quelque chose…il va boire, il va faire pipi, c’est infernal !
MONSIEUR D. : D’ailleurs ils sont tout le temps en rivalité. Mathieu ça va quand on s’occupe
de lui et qu’on est seul avec lui, mais sinon c’est vraiment compliqué. Puis ils ont plein de
jouets et ils ne jouent pas avec. Si on les punit, ce n’est pas grave, ils jouent avec autre chose !
PSYCHOLOGUE : Cela rend les choses compliquées à la maison ?
MONSIEUR D. : Oui, il y a souvent des disputes autour des enfants. Ma femme me reproche de
ne pas m’impliquer assez. On a vu un thérapeute de couple à un moment puis ça allait mieux,
puis Julien est tombé malade... J’ai l’impression que ça ne suffit jamais, que ma femme me
demande toujours plus. Et donc j’ai tendance à beaucoup travailler. Le soir je fais des puzzles,
j’aime bien ça, ça me permet de m’évader. On arrive plus à gérer en fait, on sait plus quoi
faire.
MADAME D. : Oui, cet été on est parti au Sénégal avec les enfants. C’était l’enfer !
[Monsieur D. se lève, va voir Julien et lui dit sèchement de ranger ses jouets et ne plus faire
de bruit.]
PSYCHOLOGUE : C'est-à-dire ?
MADAME D. : Ils étaient absolument insupportables, ils n’obéissaient jamais. Et moi j’en peux
plus. Lorsque Julien était malade, je m’occupais de lui tout le temps, et je crois que Mathieu
l’a mal vécu. J’aimerais avoir plus de temps pour moi, pour recommencer à vivre. Mais là
c’est comme s’il y avait un rapport de domination entre nous.
MONSIEUR D. : En fait chacun tire un peu la couverture vers lui.

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[Julien vient au bureau et regarde le psychologue en souriant. Il a pris deux marionnettes avec
lesquelles il joue. Mathieu vient également au bureau, il s’assoit entre ses parents et écoute la
discussion.]
PSYCHOLOGUE : Elles sont jolies ces marionnettes, qu’est-ce qu’elles font ?
JULIEN : Elles se disputent.
MADAME D. : Comme on arrive plus à les gérer, ils sont à tour de rôle chez leurs grands-
parents le mercredi. Ma mère nous avait déjà beaucoup aidés lors de la maladie de Julien mais
ce n’est pas toujours facile. On est très fusionnels et en même temps, c’est bizarre, nous
sommes dans une sorte de rapport de domination
PSYCHOLOGUE : Et du côté du Papa comment cela se passe ?
MONSIEUR D. : C’est particulier. Ils ne me donnent jamais rien en retour. C’est comme si la
seule chose que je pourrais leur demander ce serait de l’argent ! Ils sont plutôt je m’en
foutiste. Le seul qu’il faut toujours plaindre c’est mon frère, moi je suis toujours censé aller
bien.
PSYCHOLOGUE : D’accord. Il me semble que vous avez abordé plusieurs points importants que
nous aborderons plus en détail les fois suivantes pour essayer d’aider tout le monde à se sentir
mieux.
MADAME D. : Je crois que nous en avons vraiment besoin.
MONSIEUR D. : Oui.
[À la fin de la consultation, Julien ne veut pas mettre son manteau et se plaint d’avoir rangé
ses jouets seul tandis que Mathieu se cache dans un coin du bureau.]
PSYCHOLOGUE : Tu te caches Mathieu ?
MONSIEUR D. : Il fait ça parfois.
PSYCHOLOGUE : Tu te mets au coin tout seul ?
MONSIEUR D. : Ah oui c’est vrai, il s’auto-punit comme ça aussi !

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