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26/4/2016 LE ROLE DE L'ENSEIGNEMENT SUPERIEUR DANS

LE ROLE DE L'ENSEIGNEMENT SUPERIEUR DANS 
LE DEVELOPPEMENT D'UNE CULTURE DE LA PAIX
EN AFRIQUE
 
PAR
 
MONSIEUR GOOLAM MOHAMEDBHAI
VICE­CHANCELIER DE L'UNIVERSITE
DE L'ILE MAURICE
 

1. INTRODUCTION

1.1 Si on commençait par définir ce que l'on comprend par la paix. Il faudrait dépasser cette vision
étroite de la paix qu'est un état sans guerre et sans désordre civile. La paix est bien plus que cela.
La paix signifie aussi la résolution des conflits par des moyens non­violents et l'instauration des
valeurs universelles telles le respect de la vie, les droits de l'homme, la liberté, l'équité et la justice.
C'est  la  capacité  de  toutes  les  composantes  d'une  population  à  mener  une  vie  décente,  en  toute
sécurité,  dans  un  environnement  sain  et  susceptible  de  se  développer  au  niveau  économique,
éducatif, social et culturel.

1.2  Les  statisticiens  sont  là  pour  prouver  que  l'Afrique  est  un  continent  où  l'on  constate
constamment la fragilité de la paix. L'Afrique est en crise : crise économique, sociale, politique,
religieuse  et  crise  de  l'environnement.  La  plupart  des  sous­régions  souffre  des  répercussions  de
l'instabilité  sociale,  de  la  guerre  et  des  conflits.  Ce  qui  a  amené  l'Afrique  à  comptabiliser  6
millions des 13 millions réfugiés recensés en 1996(1). Le SIDA est un prix lourd à payer en terme
de  vies  humaines,  alors  que  la  dégradation  de  l'environnement  et  la  population  sans  cesse
grandissante  sont  en  train  d'épuiser  les  ressources  existantes.  On  constate  aussi  une  montée  du
fondamentalisme religieux. Il semble donc qu'il s'avèrerait primordial pour l'Afrique, plus que tout
autre continent au monde, d'établir une culture de la paix.

1.3  Les  institutions  de  l'enseignement  supérieur,  plus  particulièrement  les  universités,  ont  pour
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mission  la  formation  de  jeunes  professionnels  et  des  futurs  meneurs  de  demain  à  travers  des
programmes d'études, l'approfondissement de la connaissance à travers la recherche, d'offrir aussi
des  services  communautaires  à  travers  des  programmes  extra­muraux.  De  telles  institutions  en
Afrique ont un rôle significatif dans le développement de la culture de la paix et dans la réforme
de  la  situation  présente.  Ils  aideront  ainsi  politiciens,  chefs  religieux  et  des  organisations
internationales telles que les Nations Unies à atteindre le même but.

1.4  Ce  document  vise  à  démontrer  comment  les  institutions  de  l'enseignement  supérieur  en
Afrique pourraient apporter leur contribution dans l'établissement d'une culture de la paix, et

souligne les activités déjà entamées.

2. L'ENSEIGNEMENT

2.1. La formation des professeurs des écoles primaires et secondaires est une activité importante
de  l'enseignement  supérieur  en  Afrique.  Il  est  reconnu  que  les  valeurs,  les  compétences  et  les
connaissances  transmises  par  ces  professeurs  déterminent  dans  une  large  mesure  la  qualité  de
l'éducation,  et  influencent  par  la  même  occasion  l'attitude  des  élèves.  Ceci  est  particulièrement
vrai  au  niveau  primaire  car  le  développement  des  attitudes  sociales  chez  l'enfant  se  fait  dès  son
plus jeune âge. A Maurice par exemple, le fait de réunir des jeunes enfants de toutes les races et
religions dans les mêmes écoles, plus particulièrement au niveau pré­primaire et primaire, de leur
donner la possibilité d'étudier ensemble et de se lier d'amitié, est un des facteurs qui contribue à
l'harmonie  sociale  d'une  société  multiraciale  et  multi­culturelle.  on  devrait  donc  former  les
professeurs  afin  qu'ils  puissent  inculquer  des  valeurs  et  des  attitudes  qui  encourageraient  la
tolérance, stimuleraient le respect pour la diversité culturelle, ethnique et religieuse et le respect
des  droits  de  l'homme,  sans  oublier  la  Déclaration  Universelle,  les  droits  de  l'enfant  et  les
méthodes d'apprentissage coopérative(2).

2.2  Les  instituts  pédagogiques  ont  aussi  la  responsabilité  de  préparer  les  programmes  d'études
pour  les  écoles.  Ces  institutions  doivent  s'assurer  que  ces  programmes  traitent  de  sujets  locaux,
régionaux, internationaux et des problèmes de paix et de droits de l'homme.

2.3 Au niveau universitaire, divers moyens existent pour promouvoir la culture de la paix à travers
les programmes d'études. En premier lieu, des modules relatifs à la paix pourraient être inclus aux
cours déjà existants dans des domaines tels que la science politique, les relations internationales,
l'histoire,  la  sociologie,  le  travail  social,  les  études  religieuses,  la  gestion,  l'éducation,  la
communication, la psychologie, l'anthropologie, etc. Il s'agit d'introduire une dimension de la paix
dans chacun de ces cours. Par exemple la matière "Résolution Alternative des Conflits" pourrait
être  un  module  de  la  licence  en  droit,  la  matière  "La  Diplomatie  Préventive"  pourrait  être  un
module de la licence en science politique, alors que la matière "Co­existence Inter­ethnique" serait
un module sur la paix dans tous les cours, même ceux de science et d'ingénierie.

2.4  Ces  modules  sont  déjà  inclus  dans  les  cours  offerts  par  plusieurs  universités  africaines.  La
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licence  en  science  politique  de  l'Université  de  Durban­Westville,  par  exemple,  propose  une
spécialisation dans les études sur la paix dans la dernière année d'études. Le Centre Africain pour
la  Résolution  Constructive  des  Disputes  (ACCORD)  a  tout  récemment  compilé  les  modules  sur
l'éducation de la paix de 30 universités de la sous­région sud africaine(3). Il serait souhaitable que
le  même  exercice  soit  repris  ailleurs  dans  d'autres  sous­régions  et  que  les  programmes  d'études
comprenant ces modules soient mis à la disposition de toutes les universités qui s'y intéressent. De
nouveaux  modules  pourraient  aussi  être  créés.  Le  Centre  pour  les  Etudes  sur  les  Réfugiés  de
l'Université  Moi,  qui  fut  fondé  en  1990  suite  aux  conditions  déplorables  auxquelles  devait  faire
face  un  nombre  conséquent  de  personnes  déplacées  dans  la  région  des  grands  lacs  de  l'Afrique
orientale,  décida  d'inclure  les  trois  modules  suivants  sur  l'émigration  forcée,  au  niveau  de  la
licence,  à  la  Faculté  des  Etudes  en  Développement  Social  et  Culturel  :  Les  Réfugiés  dans  le
Contexte des Théories Politiques, Les Réfugiés au Sein de la Transformation Globale, Les Droits
de l'Homme et les Problèmes Spécifiques aux Réfugiés. A ce jour, quelques 450 étudiants de la
Faculté ont été exposés à ces modules(4).

2.5 On pourrait aussi envisager la mise sur pied de cours spécifiques, au niveau du deuxième ou
du  troisième  cycle,  traitant  de  problèmes  relatifs  à  la  paix  en  Afrique.  Des  cours  traitant  des
problèmes  liés  aux  réfugiés  seraient  particulièrement  utiles.  Comme  on  l'a  déjà  mentionné,
l'Afrique  traverse  une  grave  crise  en  terme  du  nombre  croissant  de  réfugiés,  et  aura  besoin  de
jeunes africains formés qui pourraient faire face à cette situation complexe et qui, contrairement
aux expatriés, seront à même de saisir les nuances culturelles de leurs exigences. L'Université Moi
envisage  de  commencer  un  diplôme  supérieur  en  émigration  forcée  d'une  durée  d'un  an  pour
l'année  académique  1997/98.  Ce  cours  est  destiné  aux  fonctionnaires,  aux  membres
d'organisations, et à ceux qui souhaitent poursuivre une carrière académique(4). L'Association des
Universités  Africaines  (AUA)  et  le  Haut  Commissariat  des  Nations  Unies  pour  les  Réfugiés
(UNHCR) projetent aussi de travailler sur un programme d'études d'une durée de deux ans sur les
Réfugiés  et  les  Droits  Humanitaires  dans  les  universités  africaines.  Le  but  de  ce  cours  serait  de
"développer chez les Africains une culture et des aptitudes de gestion afin qu'ils puissent proposer
des solutions aux problèmes des réfugiés et des droits humanitaires, et en ce faisant on pourrait
ainsi  minimiser  ou  se  passer  de  l'apport  des  gestionnaires  expatriés  pour  résoudre  les  crises
d'ordre humanitaires sur le continent"(1).

2.6  Un  autre  domaine  important  pour  les  cours  universitaires  est  la  prévention  et  la  gestion  des
conflits. ACCORD, qui s'est associé à 5 universités historiquement noires de l'Afrique du Sud, a
déjà  préparé  l'ébauche  de  deux  cours  sur  les  Etudes  des  Conflits,  notamment  une  licence  d'une
durée de trois ans et une maîtrise d'une année(3). ACCORD, s'est largement inspiré du programme
d'étude de cours similaires dispensés aux Etats Unis, en Europe, en Asie et en Australie pour la
préparation de ce nouveaux cours. Ces cours vont donc débuter dans les cinq universités associées
et l'ébauche de ces programmes d'études sera mise à la disposition d'autres universités africaines.

2.7  Une  autre  façon  d'aborder  le  développement  d'une  culture  de  la  paix  dans  les  universités
africaines  serait  de  "régionaliser"  ou  même  "internationaliser"  les  activités  académiques.  On
devrait sensibiliser les étudiants sur la question de l'interdépendance des pays de la région au point
de  vue  politique,  économique,  social,  culturel  et  écologique.  Ils  devraient  aussi  apprendre  à
apprécier les différentes cultures et valeurs africaines, et être conscients des problèmes aigus qui
sévissent dans la région tels que la dégradation de l'environnement, l'explosion démographique, la
violation des droits de l'homme, la propagation de maladies telles le SIDA, etc., et être en mesure
de  débattre  de  ces  problèmes  et  de  proposer  des  solutions  concrètes.  Ils  devraient  également
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reconnaître  la  valeur  de  l'interdépendance  globale  des  pays  et  des  effets  de  la  politique
internationale  sur  la  région.  Ils  devraient  aussi  être  au  courant  du  rôle  et  des  fonctions
d'organisations internationales, plus particulièrement celles des Nations Unies. Tous les étudiants,
quelles  que  soient  leurs  disciplines,  devraient  chaque  année  suivre  un  module  optionnel
concernant  la  région  :  une  langue  d'une  autre  région,  l'histoire  ou  la  politique  de  la  région,  les
droits de l'homme et les problèmes de l'environnement propres à l'Afrique. En développant chez
ces  jeunes  africains,  quel  que  soit  le  choix  de  leurs  carrières  ou  professions,  une  vision  plus
éclairée  et  plus  globale  des  pays  de  la  région,  ils  seront  plus  tard  plus  capables  d'aborder  les
problèmes de paix de la région.

2.8 Les échanges d'étudiants entre les universités, soit pour une courte durée pendant les vacances
ou  pour  des  périodes  plus  étendues  d'un  ou  deux  semestres,  est  une  autre  façon  excellente  à
promouvoir  la  paix  et  l'entente.  Les  effets  bénéfiques  seront  encore  plus  significatifs  en  ce  qui
concerne  les  échanges  entre  pays  de  croyances  et  de  cultures  différentes  ou  opposées.  Plusieurs
programmes d'échanges d'étudiants existent déjà et les universités africaines devraient en profiter
pleinement. On devrait surtout encourager les échanges d'étudiants entre les pays d'Afrique. Les
universités africaines devraient aussi encourager les étudiants d'autres pays d'Afrique à s'inscrire à
leurs cours.

2.9  Le  "Model  United  Nations"(MUN)  est  un  programme  conçu  essentiellement  pour  des
étudiants du secondaire où des groupes d'étudiants s'attribuent le rôle de délégations diplomatiques
des  pays  membres  des  Nations  Unies,  et  discutent  des  problèmes  majeurs  sur  l'agenda
international lors d'un simulacre d'une assemblée générale des Nations Unies. Ce programme se
déroule  au  niveau  national,  régional  et  international.  Il  offre  la  possibilité  aux  étudiants  de
comprendre  les  dessous  du  système  des  Nations  Unies,  d'apprécier  le  point  de  vue  politique  de
plusieurs  pays  et  surtout  de  discuter  des  sujets  fondamentaux  d'intérêt  international  tels  que
l'environnement,  le  développement  social  et  économique,  les  droits  de  l'homme  et  l'instabilité
politique.  Depuis  son  introduction  dans  les  écoles  secondaires  à  l'Île  Maurice  il  y  a  quelques
années,  le  MUN  a  été  perçu  comme  un  programme  qui  encouragerait  l'entente  internationale,
élargirait la vision et améliorerait les aptitudes en communication des participants. Ce programme
devrait  s'étendre  à toutes  les  universités  africaines car  il  aiderait à promouvoir  une culture de la
paix  en  Afrique.  L'AUA,  en  collaboration  avec  les  agences  concernées  des  Nations  Unies,
pourraient jouer un rôle proéminent dans l'avancement de ce programme.

2.10 Une façon plutôt indirecte mais aussi efficace de développer une culture de la paix en Afrique
est  de  permettre  à  un  plus  grand  nombre  de  femmes  de  suivre  des  cours  à  l'université(1).  Le
nombre  de  femmes  étudiants  est  très  minime  dans  les  universités  africaines.  La  mère  est  la
personne la mieux placée pour transmettre à l'enfant les valeurs et les attitudes qui encourageraient
la  tolérance,  la  compréhension  et  le  respect  des  autres  ;  et  une  mère  éduquée  est  bien  mieux
équipée à le faire qu'une mère non­éduquée. Les femmes ont aussi une influence sur leurs enfants
et leurs familles en ce qui concerne l'éducation, la santé et les valeurs culturelles, et si elles sont
éduquées  elles  peuvent  avoir  un  impact  très  positif  sur  leurs  familles  et  la  société  en  général.
Prévoir l'enseignement supérieur pour les femmes est donc une priorité de plus pour l'Afrique. L'
AUA  en  est  conscient  et  a  déjà  inclus  cet  aspect  de  la  question  dans  son  programme  d'activités
pour la période 1997­2000.

3. LA RECHERCHE
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3.1 De par le grand nombre de conflits existants dans la région, les chercheurs africains ont à leur
disposition  un  vaste  champ  d'action  pour  la  recherche  en  gestion  de  conflits.  Parmi  les  sujets  à
étudier, une estimation des causes profondes de conflits spécifiques, l'identification des différences
(culturelles,  ethniques  et  politiques)  majeures  qui  conduisent  généralement  à  un  conflit,  les
techniques  de  résolutions  à  mettre  en  pratique  pour  éviter  ces  conflits,  et  la  réussite  de  telles
techniques, etc. Il faut admettre que le conflit est un fait indéniable de la vie des hommes et qu'il
ne peut être toujours évité. En fait, il arrive qu'un conflit peut s'avérer positif s'il amène avec lui
créativité et changement. On peut avoir un conflit dans un environnement paisible pourvu qu'il ne
dégénère pas en violence. Une recherche centrée sur les origines et la gestion des conflits aiderait
les "décideurs" à empêcher une telle dégénération.

3.2 La résolution des conflits a été mise en pratique en Afrique pendant des décennies, mais il y a
eu  très  peu  de  recherche  ou  de  documentation  sur  les  expériences  acquises  des  interventions
réussies  ou  soldées  par  un  échec.  De  telles  recherches  sont  d'une  importance  capitale  pour  la
gestion des conflits futurs. Fait intéressant à noter, l'initiative d'ACCORD qui propose de publier,
de façon bi­annuelle, "Le Journal Africain sur la Résolution des Conflits", le premier journal de ce
genre  en  Afrique (5).  Ce  journal  facilitera  sans  aucun  doute  la  publication  des  résultats  des
recherches portant sur les résolutions des conflits en Afrique.

3.3 Un autre sujet important de recherche est le problème des réfugiés. Il faudrait axer la recherche
sur la source même des causes et des conséquences des mouvements de personnes, les conditions
de  vie  déplorables  des  réfugiés  en  pays  étrangers,  la  gestion  des  camps  de  réfugiés,  le  rôle  des
femmes au sein de ces camps, l'éducation des enfants réfugiés, et le ré­établissement des réfugiés
dans  leurs  pays  d'origine  à  la  fin  de  la  guerre.  Le  Centre  pour  les  Etudes  sur  les  Réfugiés  de
l'Université Moi est sur le point de terminer deux programmes de recherche sur la politique des
réfugiés  au  Kenya,  et  la  gestion  et  la  coordination  des  interventions  humanitaires  et  autres
assistances  au  Kenya,  Ouganda  et  Tanzanie(4).  Les  chercheurs  africains  des  universités  situées
dans  des  pays  où  se  trouvent  des  réfugiés  devraient  suivre  l'exemple  de  l'Université  Moi  et  se
lancer dans ce type de recherche.

3.4 L'UNESCO, à travers son Programme sur la Culture de la Paix, a relancé la recherche et autres
activités académiques dans le domaine des études sur la paix en créant des Chaires UNESCO pour
la  Culture  de  la  Paix.  Une  Chaire  a  été  créée  à  l'Université  de  Durban­Westville  en Afrique  du
Sud(6).  Une  autre  Chaire  est  prévue  à  l'Université  de  Cocody  en  Côte  d'Ivoire(7).  Celle­là  va
entreprendre de la recherche et de l'enseignement au niveau du troisième cycle afin de promouvoir
la  démocratie,  les  droits  de  l'homme,  un  esprit  de  tolérance  et  d'autres  valeurs  susceptibles
d'instaurer  une  paix  durable.  La  création de  telles  Chaires  permet  à une institution  ou  une sous­
région  de  coordonner,  de  se  concentrer  sur,  et  de  promouvoir  des  études  sur  la  paix.  Ceci  est
évident  à  l'Université  de  Durban­Westville,  où  a  aussi  été  créé  l'Institut  Gandhi­Lithuli  pour  la
Paix,  portant  les  noms  de  deux  leaders  internationaux  qui  s'étaient  engagés  à  proclamer  la
politique  de  non­violence  afin  de  maintenir  la  paix.  Cet  institut  cherche  à  promouvoir  la  paix  à
travers la recherche, la dissémination de théories, de principes et de stratégies de non­violence.

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3.5  Bon  nombre  de  pays  sont  multiraciaux,  multi­ethniques,  et  multi­culturels  et  on  pourrait
penser qu'ils portent en eux les germes de conflits éventuels ; et pourtant ces pays ont une longue
histoire de stabilité, de paix et d'harmonie. Mon pays, l'Ile Maurice, en est un ; les îles Caraïbes
aussi. Il serait utile d'étudier le contexte socio­culturel de ces pays afin de comprendre les dessous
de cette stabilité, et de voir comment les transposer à des régions semblables mais où règnent des
conflits perpétuels.

3.6 Les domaines de la recherche que nous avons abordés jusqu'à l'heure ont trait aux guerres ou
aux conflits. Toutefois, l'absence de la paix peut aussi résulter d'autres facteurs tels que l'instabilité
économique ou sociale. Il y a par exemple, le taux croissant de crimes et l'insécurité dans les cités
africaines.  Quelles  en  sont  les  causes  ?  Sont­elles  dues  à  l'explosion  démographique,  ou  le
mouvement  de  la  population  des  régions  rurales,  ou  encore  à  l'effet  de  la  drogue  ?  Le
fondamentalisme religieux prend de plus en plus de l'ampleur. Qu'est­ce­qui pousse les religions à
engendrer  la  division  et  la  haine  plutôt  que  la  paix  et  l'harmonie  ?  La  démocratisation  a  été
acclamée dans plusieurs pays du continent. Ce concept de démocratisation a­t­il été introduit trop
rapidement ? A­t­il  été  bénéfique  ou  a­t­il entraîné  de  nouvelles  sources  de conflits ? Autant de
possibilités  pour  la  recherche  par  les  universités  et  les  instituts  de  recherche  africains,  dont  les
résultats  aideront  certainement  à  prendre  les  décisions  qui  s'imposent  pour  l'avancement  d'une
culture de la paix.

4. SERVICES COMMUNAUTAIRES

4.1  L'organisation  de  conférences  et  d'ateliers  de  travail  par  les  universités  aide  énormément  à
informer le public et à le sensibiliser aux sujets relatifs à la paix. Plusieurs universités en Afrique
ont  suivi  le  pas.  L'Université  de  Juba  au  Soudan  a  organisé  une  conférence  sur  la  paix  et  le
développement  en  1993(8).  Les  participants  comprenaient  des  universitaires,  des  intellectuels  et
des  fonctionnaires  du  gouvernement.  Lors  de  cette  conférence,  il  y  eut  des  discussions  franches
sur des sujets délicats ayant trait à la paix au Soudan. Le Centre pour les Etudes sur les Réfugiés
de  l'Université  Moi,  en  collaboration  avec  les  agences  des  Nations  Unies,  le  gouvernement,  les
ONGs et les églises, organisent régulièrement à l'égard des leaders de différentes communautés,
des ateliers de travail sur l'instauration de la paix afin de promouvoir la réconciliation, diminuer
les conflits et faire connaître les techniques de résolution des conflits(4). Il y a à peu près 6 ans de
cela,  l'Association  Internationale  des  Présidents  d'Universités  (IAUP)  a  mis  sur  pied  une
commission  mixte  IAUP/Nations  Unies  sur  l'Education  du  Désarmement,  la  Résolution  des
Conflits et la Paix. Cette commission a organisé plusieurs conférences sur la paix dans différentes
parties du monde(9). Le Conseil pour l'Afrique et le Moyen­Orient de l'IAUP a aussi organisé en
Egypte en février 1997, une conférence sur "Le rôle des universités dans l'instauration de la paix
dans le monde". Les thèmes abordés comprenaient de nouveaux concepts pour l'avancement de la
paix,  les  expériences  et  les  mécanismes  déjà  existants  pour  promouvoir  la  paix  en  Afrique,  le
développement économique et la paix dans le monde.

4.2  Les  universités  pourraient  aussi  organiser  des  cours  de  courte  durée  sur  des  thèmes  aussi
divers que les techniques de médiation des disputes, la gestion de conflits, les droits de l'homme,
les processus de démocratisation, la gestion des camps de réfugiés, etc. Les groupes visés pour ces

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cours  seraient  les  parlementaires,  le  personnel  militaire,  les  diplomates,  les  chefs  religieux  et
communautaires,  les  fonctionnaires  de  l'état,  et  le  personnel  des  ONGs.  L'étude  entreprise  par
ACCORD a révélé que pas mal d'universités dans la région sud africaine offrent déjà ces cours.
L'association  ACCORD  elle­même  projete  d'offrir  des  cours  de  courte  durée  sur  la  diplomatie
préventive,  le  maintien  de  la  paix  et  la  résolution  des  conflits(5).  On  pourrait  aussi  donner  la
possibilité  aux  personnes  intéressées  de  suivre  à  côté  des  étudiants  universitaires  à  plein  temps,
des modules inclus dans les programmes d'études des cours du deuxième et du troisième cycle.

4.3  Dans  des  régions  frappées  par  un  nombre  important  de  personnes  déplacées,  les  universités
pourraient  jouer  un  rôle  important  en  apportant  du  réconfort  à  ces  réfugiés.  Les  difficultés
auxquelles font face les réfugiés dans les camps sont très diverses : un meilleur habitat, une eau
potable  de  meilleure  qualité,  l'éducation  des  enfants,  les  soins  de  la  santé,  etc.  Des  étudiants
universitaires  dans  divers  domaines  tels  que  la  science,  l'ingénierie,  la  médecine,  l'éducation,
l'agriculture,  la  sociologie,  la  psychologie  pourraient  apporter  une  contribution  très  louable  à
l'encontre de ces camps de réfugiés en leur consacrant un peu de leur temps pendant les vacances.
Les  étudiants  de  l'Université  Moi(4)  sont  déjà  engagés  dans  ce  genre  d'activité.  De  tels
programmes seraient bénéfiques aux réfugiés ainsi qu'aux étudiants, car à travers ces expériences
acquises sur le terrain, ces derniers deviendront plus conscients des crises qui frappent leurs pays
en  terme  de  réfugiés. A  leur  retour  à  l'université,  les  étudiants  pourraient  aussi  entreprendre  des
études plus poussées sur quelques­uns des problèmes à travers des projets ou des dissertations.

4.4 Les chercheurs des universités africaines, en se regroupant et en arrivant à un consensus sur les
points litigieux concernant la paix en Afrique, pourraient aussi donner une direction et une vision
éclairée à  tout le  continent.  Seuls,  dans  leurs pays  respectifs,  ils ne  pourraient se  faire entendre,
mais  une  prise  de  position  commune  pourrait  avoir  l'impact  souhaité  pas  seulement  en Afrique
mais  dans  le  monde  entier.  Par  exemple,  en  1986;  à  Séville  en  Espagne  une  équipe
pluridisciplinaire  de  spécialistes  se  retrouvèrent  pour  présenter  "Le  Manifeste  de  Séville  sur  la
Violence", un manifeste scientifique qui mettait au défi la croyance populaire que la guerre était
une nécessité biologique, et qui soutenait que la guerre était en fait une invention sociale et qu'elle
pouvait être remplacée par une autre invention, la paix(10)". Ne pourrait­on pas envisager que les
chercheurs éminents de l'Afrique, soutenus par leurs homologues des autres universités du monde,
puissent  se  rencontrer  et  présenter  un  manifeste  sur  les  points  brûlants  menaçant  la  paix  en
Afrique ?

5. CONCLUSIONS

5.1  Les  établissements  d'enseignement  supérieur  en  Afrique  peuvent  donc,  à  travers
l'enseignement, la recherche et les programmes extra­muraux, aider à développer une culture de la
paix en s'assurant que la société soit bien informée, qu'elle développe une attitude de tolérance et
de  compréhension,  qu'elle  soit  libérée  des  préjugés  et  des  conceptions  erronées,  et  qu'elle  soit
capable d'évaluer de façon critique, objective et intelligente les crises passées et présentes.

5.2 Il parait que plusieurs universités de plusieurs régions d'Afrique se sont déjà engagés sur des
programmes pour la paix. Toutefois, il n'existe pas un inventaire complet de ces programmes. Il

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est donc impératif qu'une étude soit entreprise sur toutes les activités existantes ayant trait à la paix
dans les établissements d'enseignement supérieur en Afrique afin que cette information puisse être
communiquée à d'autres institutions qui en bénéficieraient. Une telle étude pourrait être entreprise
sous l'égide de l'AUA.

5.3 La coordination et l'avancement des études sur la paix dans un certain nombre de sous­régions
de  l'Afrique  se  sont  concrétisés  grâce  à  la  création  des  Chaires  UNESCO  pour  la  Culture  de  la
Paix. De telles Chaires devraient être créées dans d'autres sous­régions de l'Afrique.

5.4 On peut bien sûr avancer l'argument que les universités africaines, étant elles mêmes affligées
de crises internes et de conflits, ne sont pas bien placées pour promouvoir la paix. Mais il s'agit de
bien se rendre compte que les universités ne sont que des reflets de la société, des régions où elles
se  trouvent.  En  prenant  la  responsabilité  de  promouvoir  une  culture  de  la  paix  dans  leurs  pays
respectifs,  les  universités  trouveront  peut­être,  par  la  même  occasion,  des  solutions  à  leurs
problèmes internes.

R E F E R E N C E S
 

1. KWAKWA, E. "The Response of African Universities to Social

 Instability and Crises". Paper presented at the General

 Conference, Lusaka, Zambia, 13­17 January 1997.

2. "Outline Guidance Strategy and Integrated Framework for

 Action on Education for Peace, Human Rights and Democracy".

 Draft main Working Document for the 44th Session of the

 International Conference on Education, Regional Preparatory

 Meeting, Africa Region, Dakar, 24­25 March 1994.

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3. "Students Need Education for Justice and Peace". ACCORD,

 c/o University of Durban­Westville, South Africa.

4. "Moi University's Response to Refugee and Humanitarian

 Studies/Conflict Prevention and Management". Private

 Communication from the Vice­Chancellor of Moi University.

5. "An Agenda for Peace in Africa". Information published by

 ACCORD, c/o University of Durban­Westville, South AFrica.

6. UNESCO. "Rapport sur l'Action du Programme pour une

 Culture de la Paix", Conference Générale, 28ème Session,

 Paris, septembre 1995.

7. Commission Nationale Ivoirienne pour l'UNESCO. Rapport

 Général ­ Réunion de Suivi du Colloque Sous­Régional

 "Conflits Actuels et Culture de Paix", Abidjan, 26­29

 novembre 1996.

8. University of Juba. "Third Conference Proceedings ­ Peace

 and Development", Khartoum, February 1993.

9. LUXMUNDI, IAUP Quarterly Report, Fall 1996.

10. "Le Manifeste de Séville sur la Violence : Préparer le

 terrain pour la construction de la Paix". UNESCO, 1991.

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