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Les caractéristiques des experts comptables et la taille de leurs cabinets et


leurs impacts sur le mode d'évaluation de la compétence de leurs
collaborateurs : cas de la Tunisie

Conference Paper · October 2015

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Hazami ammar sourour SOUROUR Ammar


IHEC Sfax
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Colloque : Capital humain : Evaluation et contribution au développement des entreprises et des organisations Oujda : 28 et 29 octobre 2015

Les caractéristiques des experts comptables et la taille de leurs


cabinets et leurs impacts sur le mode d’évaluation de la
compétence de leurs collaborateurs
Cas de la Tunisie
Sourour HAZAMI AMMAR
Maître Assistant
IHEC Sfax-Tunisie
INTRODUCTION
Les cabinets d’expertise comptable sont appelés à fournir à leurs clients de nouveaux services basés sur
l’analyse du risque et la compréhension de la complexité ainsi qu’une gamme plus élargie des services
d’audit tels que l’audit opérationnel. Certes l’enjeu est important, les défis ne le sont pas moins mais les
potentiels d’innovation et d’excellence sont aussi importants. La comptabilité est un domaine de volonté
et de pouvoir. A ce titre, la profession comptable tunisienne doit affronter la réalité présente et ce selon
deux points de vue. Du point de vue de l’enseignement universitaire de la comptabilité, les mutations
économiques et technologiques ont rendu caduques les approches de gestion considérant les entreprises
comme des portefeuilles de produits à gérer dans les meilleures conditions de rentabilité. Du point de vue
de l’entreprise tunisienne et de la transparence, il est souvent fait référence aux points faibles de
l’entreprise tunisienne, au niveau de son organisation et au niveau de sa gestion. Ceux-ci se traduisent
négativement sur sa situation financière. Ses comptes sont insuffisamment fiables et le taux
d’encadrement reste peu élevé et elle fait rarement recours aux conseils externes (tendance récente limitée
à quelques grands groupes). De même, les banquiers reconnaissent volontiers le peu de fiabilité des
comptes qui leur sont présentés. Force donc est de constater que la transparence des entreprises est
aujourd’hui, en général, réduite. Ces constats impliquent de la part des experts comptables chef de cabinet
qu’ils cultivent une logique de compétence, notamment lors du recrutement de leurs collaborateurs. En
effet, Une grande incertitude règne actuellement dans ce domaine, après une longue période où les
méthodes d’évaluation n’étaient guère remises en question. Les salariés, ayant un emploi ou au chômage,
sont les premiers intéressés par la façon dont sont jugées leurs compétences. Ils ne sont pas des agents
passifs qui subiraient une évaluation. Ils doivent en de nombreuses circonstances argumenter leur
compétence, que ce soit face à un employeur, à un client ou encore à leurs collègues ou leurs proches. Les
nouvelles contraintes techniques et économiques auraient pour effet de rejeter hors de l’emploi ceux qui
n’ont pas les aptitudes requises, selon des critères qui restent parfois difficiles à établir.
Notre contribution se pose la question de savoir si les caractéristiques des experts comptables et la
taille de leurs cabinets influent sur leurs perceptions relatives à la compétence de leurs
collaborateurs. Par ailleurs, notre étude a pour objet de mettre en évidence les caractéristiques des
experts comptables (position hiérarchique, niveau d’expérience, pratique d’évaluation adoptée,
degré de satisfaction des recrutements passés) et l’impact de la taille des cabinets sur les différentes
perceptions de compétence adopté. Par ailleurs, la compétence est difficilement évaluable et mesurable
parce qu’elle est axée sur des éléments subjectifs en l’occurrence les caractéristiques personnelles du
salarié. D’un point de vue théorique, l’intérêt de notre travail est de mettre en évidence les différents
éléments qui composent le processus d’évaluation de la compétence pendant le recrutement des
comptables afin de montrer la nature et l’ampleur de l’impact de chacun d’eux sur la formation du
jugement. Notre contribution vise aussi à prouver que le recrutement ne peut pas être considéré comme
une procédure aussi rationnelle que le présuppose par exemple les tenants de l’approche
1
Colloque : Capital humain : Evaluation et contribution au développement des entreprises et des organisations Oujda : 28 et 29 octobre 2015

psychotechnique1. L’usage de l’approche conventionnelle permet mieux à notre sens d’étudier les
multiples incertitudes pesant sur le jugement. D’un point de vue pratique, notre contribution vise à faire
adopter, si possible, une démarche fondée sur un modèle de compétence en comptabilité. Cette démarche
tente de définir les caractéristiques qu’une personne doit posséder pour exécuter diverses tâches. Les
premiers chercheurs2 considéraient souvent le nombre d’années d’expérience passées dans l’exercice de la
profession comme reflétant le niveau de connaissance d’une personne. Cette démarche donnait toutefois
de nombreux résultats contradictoires. Des auditeurs relativement peu expérimentés réussissaient aussi
bien ou parfois même mieux que des auditeurs plus expérimentés, selon la tâche exécutée. L’expérience à
elle seule ne semblait pas expliquer entièrement les différences de compétence.
Notre étude a pour objet de mettre en évidence les caractéristiques des experts comptables (position
hiérarchique, niveau d’expérience, pratique d’évaluation adoptée, degré de satisfaction des
recrutements passées) et l’impact de la taille des cabinets sur les différentes perceptions de
compétence adoptées. L’incertitude et la complication inhérentes aux situations de jugement sont dues
aux contraintes de justification qui pèsent sur les évaluateurs.
Cette étude est basée sur un questionnaire administré auprès de la population entière des experts
comptables tunisiens chefs de cabinet. Un taux de réponse de 28% environ a été obtenu.
I. REVUE DE LA LITTERATURE
En 1959, Goldberg3 a comparé entre le diagnostic de lésions cérébrales effectué par des psychologues et
des secrétaires. Ces résultats étaient surprenants : les psychologues n’étaient pas meilleures que les
secrétaires ! Cependant, non aussi impressionnant, les résultats de la recherche en audit sur la compétence
en audit pendant les vingt dernières années font preuve de l’existence de différences peu frappantes entre
les auditeurs les plus compétents et les novices lors de la prise de leurs décisions. La profession d’audit est
caractérisée par l’importance qu’elle accorde à la reconnaissance de la compétence. Ainsi, le niveau
minimum de connaissance nécessaire pour être un expert comptable est réglementé par les professionnels
eux-mêmes.
Il existe deux conceptions de la compétence :
- la conception cognitive : celle ci fait de la compétence une stratégie, un « système de
connaissances qui permettra d’engendrer l’activité »,
- la conception béhavioriste ou comportementale : celle ci définit la compétence par les
tâches que le sujet sait exécuter, son expression est liée au contexte.
J.Leplat4 rappelle qu’en tout état de cause, la recherche de la compétence sous – jacente à une activité
commence par l’analyse de cette activité. Il n’existe cependant pas de correspondance simple entre tâche
et compétence, puisque les mêmes exigences peuvent être satisfaites par des compétences différentes, et
cela d’autant plus que la tâche est plus complexe. Dans le cadre de cet article, nous comptons fournir une
revue critique de la littérature existante consacrée à l’étude de la compétence dans le domaine de l’audit.
Une telle revue permet d’évaluer l’état de la connaissance du concept de la compétence en audit et
d’examiner de nouveau champ d’étude.

1
Ceux ci considèrent que toutes les phases du recrutement sont maîtrisables et que la rationalité du recrutement ne
dépend que du choix d’outils de sélection valide.
2
R.E.HAMILTON et W.F.WRIGHT (1982), Internal control judgment and effects of experience : replication and
extension, Journal of Accounting Research (Autumn, Part II), pp. 756-765.
3
Cité par J.BÉDARD (1989), Expertise in Auditing : Myth or Reality?, Accounting, Organisation and Society, Vol. 14, N° ½,
pp. 113-131.
4
J.LEPLAT (1991), compétence et ergonomie, modèle en analyse de travail, Bruxelles, Edition Mardaga, pp. 263 – 278.
2
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Approche comportementale de la compétence dans l’audit


L’approche comportementale de la compétence est basée sur le paradigme d’Einhorn5. En accomplissant
une tâche, la personne identifie les items ou les éléments d’information, mesure leurs niveaux, groupe les
informations en clusters et procède à des combinaisons pour arriver à une évaluation. Basé sur ce modèle
de jugement, Einhorn suggère trois conditions nécessaires au développement de la compétence. D’abord,
les personnes compétentes tendent à regrouper les variables selon la même façon lors de l’identification et
l’organisation des items, elles leurs accordent, ensuite la même importance, enfin elles combinent les
items selon la même manière. En respectant ces trois conditions, l’objectif de Einhorn était d’utiliser des
critères plus objectifs pour définir ce qu’est une personne compétente et qui peut être plus doué en terme
de formation et de connaissance dans des domaines bien spécifiques.
Cette vue de la compétence a conduit plusieurs études à appliquer ces critères sur des personnes ayant
différents niveaux de compétence. La nature de la compétence semble être précisée. Les études
comportementales de la compétence en audit se sont traditionnellement intéressées à étudier l’impact de la
compétence, mesurée par le nombre d’année d’expérience, sur le jugement en tant que tel et sur des
paramètres de jugement à savoir : le consensus6, l’équilibre7, la perspicacité8 et l’importance des items9.
Concernant le jugement, huit études ont examiné l’impact de la compétence sur la décision. Toutes, à
l’exception de Mock et Turner ont réussi à prouver l’existence de différences significatives dans les
jugements. Il est cependant difficile de faire des conclusions sur le sens des différences puisque, dans
quelques études, les auditeurs les moins expérimentés proposent plus de travaux en termes de quantité et
dans d’autres ils suggèrent moins. Une telle contradiction dans les études peut être due à des différences
dans le choix de la tâche objet de l’expérimentation méthodologique (évaluation du contrôle interne,
planification de la mission d’audit, inventaire physique, etc.) ou aussi, par d’autres facteurs non
suffisamment contrôlés par ces études. Par exemple, Tabor a trouvé que les auditeurs les moins
expérimentés se basent dans leurs contrôles sur un échantillon de petite taille conduisant à un allégement
d’investigations et de travaux. Ce-ci peut être expliqué soit par une grande confiance accordée au système
de contrôle interne ou une considération de la relation coût/efficacité ou encore des différences dans la
perception de la relation entre le système de contrôle interne et l’étendu des tests d’audit. Il est donc
difficile de spécifier une relation qui soit constante entre la compétence et la décision de l’auditeur.
La plupart des études comportementales sont basée sur le modèle de Brunswick, telles que Weber en
1978, Mock et Turner en 1981, Bédard en 1986. Dans ces études, les auditeurs travaillent avec une liste
complète de papiers de travail pour planifier une mission d’audit. Uniquement l’impact de la compétence
sur le jugement a été examiné par Weber, Mock et Turner. Weber a trouvé un impact significatif alors que
Mock et Turner sont arrivés à un effet non significatif. Bédard a étudié l’effet de la compétence sur le
consensus et les jugements. Il a trouvé que le jugement des experts est différent de celui des novices.

5
EINHORN (1974), Expert Judgment : Some Necessary Conditions and an Example, Journal of Applied Psychology, octobre.
pp. 562-571.
6
Cette mesure, utilisée de façon étendue, désigne la qualité de la décision d’audit. Le manque de consensus peut être une
indication de l’existence d’un problème. Aussi, lorsque le consensus est très élevé, il est possible que tous les sujets soient mis
d’accord autour de la mauvaise décision.
7
Les études effectuées dans le cadre de l’équilibre de jugement, en tant qu’indicateur de la qualité de la décision d’audit, ont
constaté que l’équilibre du jugement ne varie pas avec l’expérience.
8
La propre perspicacité désigne la compréhension par l’auditeur de son propre processus décisionnel. Les études qui ont
examiné la relation entre la compétence et la perspicacité ont trouvé une relation négative entre ces deux variables. Les
auditeurs les plus compétents ne sont pas meilleurs que les novices à comprendre leurs propres processus décisionnels.
9
L’importance des items est désignée par les paramètres pris du modèle statistique du processus décisionnel de l’auditeur. La
littérature a conclu à l’absence de relation entre la compétence et l’importance des items.
3
Colloque : Capital humain : Evaluation et contribution au développement des entreprises et des organisations Oujda : 28 et 29 octobre 2015

Approche cognitive de la compétence dans l’audit


L’objet des sciences cognitives est la cognition c’est à dire l’ensemble des activités qui découlent du
fonctionnement cérébral chez l’homme et chez l’animal : perception, langage, apprentissage, mémoire,
représentation des connaissances, décision et raisonnement. L’étude scientifique de la cognition ne peut
donc être l’apanage d’une seule discipline. Pour H.A.Simon10, un des pionniers de la science cognitive,
celle – ci regroupe des domaines tels que la psychologie cognitive, l’intelligence artificielle, la
philosophie, la linguistique.

D’après Choo11, l’approche cognitive fait référence à la séquence des actions contenues dans la structure
des unités de connaissances d’un individu. Cette séquence lui permet de comprendre une situation
spécifique et de guider son comportement. Il s’agit donc de la capacité qu’a un individu d’accomplir une
tâche donnée. Plus explicitement, accomplir une tâche12, dans le contexte des sciences cognitives, c’est
changer, au moyen d’opérations appropriées, une situation existante en une situation désirée.
Ainsi et à l’instar de R.Brien13, il faut distinguer les concepts de connaissances, compétence et
performance. Les connaissances sont des données emmagasinées en mémoire à long terme qui permettent
à l’individu de se représenter des objets et des faits et d’agir sur ces objets et sur ces faits. La performance
est le produit de l’activation d’une compétence. C’est une compétence en acte. L’approche linguistique en
termes de compétence faite par Chomsky a permis de donner à la compétence une valeur adaptative. Il ne
s’agit pas de reproduire des conduites apprises mais de créer en permanence de nouveaux
« comportements linguistiques ». Cela suppose non seulement d’acquérir des savoir-faire opérationnels
(empiriques ou formalisés) mais aussi de posséder des capacités cognitives (autorisant les opérations
intellectuelles nécessaires à l’action des plus simples, énumérer, classer, comparer, etc. aux plus
complexes, généralisation inductive, généralisation constructive, raisonnement analogique et
raisonnement par récurrence.
Mais à quoi réfère cette capacité qui permet à l’individu d’accomplir une tâche donnée ?
Simon a considéré que cette capacité consiste en des ensembles de savoirs et de savoir – faire, généraux et
particuliers, utilisés lors de la planification et de l’exécution d’une tâche donnée. Lorsque ces savoirs et
savoir – faire sont activés, ils engendrent une performance. Ce chercheur classe les compétences en deux
catégories : les compétences de type reproduction14 et les compétences de type production15. A partir de
cette classification, il est possible de considérer la compétence d’accomplir une tâche d’audit dans la
première catégorie puisque l’auditeur se base sur un planning qui prévoit les activités de collecte des
preuves.
Les études cognitives dans l’audit ont eu une influence sur les conclusions en identifiant des situations
dans l’audit où les limites dans les capacités du traitement humain de l’information vont conduire à des
10
H.A.SIMON (1981), Cognitive sciences : the newest science of the artificial, Perspective on Cognitive Science, Hillsdale,
New Jersey : Erlbaum Associates.
11
F.CHOO (1996), Auditors’ knowledge content and judgment performance a cognitive script approach, Accounting,
Organizations and Society, Vol. 21, N°4, pp. 339-359.
12
R.M.HOGARTH (1991), A perspective on Cognitive Research in Accounting, The Accounting Review, Vol. 66, N°2, avril,
pp. 277-290.
13
R.BRIEN (1991), Science cognitive et formation, Presses de l’Université du Québec.
14
L’accomplissement d’une tâche d’audit suppose l’utilisation de savoirs et de savoir-faire. Cependant, il existe différentes
modalités de planification dans laquelle la personne qui accomplit une tâche donnée, utilise ses savoirs et savoir-faire selon un
agencement bien connu. Il peut opter différentes modalités de planification.
15
Selon laquelle la personne doit découvrire l’ordre dans lequel ses savoirs et ses savoir-faire doivent être utilisés pour
accomplir la tâche.
4
Colloque : Capital humain : Evaluation et contribution au développement des entreprises et des organisations Oujda : 28 et 29 octobre 2015

biais de jugement ou des difficultés dans la formulation de certains types de jugement. Ainsi, le CRA16
paraît pragmatique car l’identification des mécanismes qui permettent de déceler les limites de la
cognition humaine peut être un majeur but de recherche.
Mais, ce qui diffère d’un auditeur à un autre, c’est l’ordre d’exécution des techniques habituellement
utilisées telles que l’examen physique, la confirmation indépendante, la vérification sur document, le
contrôle par recoupement interne, le contrôle mathématique et le contrôle de vraisemblance. Ce qui
suppose alors la maîtrise des savoirs et des savoir–faire d’un autre type. Il s’agit des heuristiques, que l’on
peut considérer comme des règles de production d’un ordre supérieur dont le rôle principal est, entre
autres d’élaborer des plans pour la solution de problèmes17.
L’objectif du CRA est donc d’expliquer la nature du processus de traitement cognitif de l’auditeur. Or, ce
processus n’est pas observable. Pour y remédier, Hogarth18 propose de se baser sur des normes19 et des
métaphores20. Par exemple, Ashton 21 a utilisé la métaphore de « l’homme en tant que statisticien ».
Seulement, à la fin de son papier, elle suggère qu’il soit plus intéressant d’adopter une métaphore plus
générale pour les auditeurs en tant que « praticiens généraux ». Ainsi, le CRA se trouve en face de deux
défis. Il doit d’une part continuer à examiner les aspects spécifiques du jugement d’audit. Il est d’autre
part impératif de déterminer quelle est la tâche, parmi les différentes tâches qui constituent la mission
d’audit, qui permet d’élucider les propriétés systémiques de l’audit et l’importance relative des traitements
cognitifs.
En d’autres termes, quelles connaissances exigent les jugements spécifiques d’audit ?
Les études cognitives de la compétence en audit ont mis l’accent sur la connaissance et son impact sur le
jugement professionnel de l’expert. Les études empiriques se sont intéressées à l’étude de deux aspects de
la compétence à approche cognitive à savoir l’organisation de la mémoire et le processus décisionnel. La
mémoire constitue un aspect important de la cognition de l’auditeur parce que ce professionnel n’accorde
pas la même attention à toutes les informations et il doit souvent se baser sur sa mémoire pour se rappeler
des preuves précédemment rencontrées22. L’étude du processus décisionnel s’est intéressée à la recherche
d’informations, la génération d’hypothèses, la stratégie de prise de décision et enfin l’action/choix.
Le CRA, pour étudier le processus de décision de l’auditeur, a importé la méthodologie adoptée par
d’autres disciplines en l’occurrence la micro-économie (modèle de l’utilité espérée) et les statistiques
(théorème de Bayes)23. L’objectif est de répondre aux questions suivantes : comment (la nature du
traitement), comment bien (quelle performance à évaluer) et comment aider (formulation d’aides à la
décision). Même s’ils fournissent des stimuli utiles à la décision, ces benchmarks ont certaines limites. En
effet les chercheurs observent souvent la notion de « devoir implique pouvoir ». En d’autres termes, si un
modèle stipule qu’un être humain doit donner un certain type de réponse24, la supposition fréquente est

16
Cognitive Research in Auditing, traduite à : étude cognitive dans l’audit.
17
J.JOSEPH et Jr.SCHUTZ (1994), Commentary on the functionality of decision heuristics : reliance on prior adult
adjustments, Behavioral research in Accounting, Vol. 6, p.90.
18
R.M.HOGARTH (1991), A perspective on Cognitive Research in Accounting, The Accounting Review, Vol. 66, N°2, avril,
pp. 277-290.
19
Les normes sont appliquées aux out-put observables.
20
Les métaphores sont utilisées sous la forme de « comme si ».
21
A.H.ASHTON (1991), Experience and Error Frequency Knowledge as Potential Determinants of Audit Expertise, The
Accounting Review, Vol. 66, N°2, avril, pp.218-239.
22
H.T.TAN (1995), Effects of Expectations, Prior Involvement, and Review Awareness on Memory for Audit Evidence and
Judgment, Journal of Accounting research, Vol. 33 N°1.
23
R.BOUDON (2003), Raison Bonnes Raisons, Paris, Edition Presses Universitaires de France, p.19.
24
Exemple : estimer le pourcentage d’erreur à partir du mémoire.
5
Colloque : Capital humain : Evaluation et contribution au développement des entreprises et des organisations Oujda : 28 et 29 octobre 2015

que la personne peut faire un tel jugement. Si, cependant, la personne ne peut pas, alors la question qui se
pose est la force du devoir impératif et donc la norme elle-même.
Pour plusieurs raisons, devoir n’implique pas pouvoir. Quelque unes résident dans les jugements faits par
les individus, et d’autres sont inhérentes à la nature des tâches qui sont exigées pour réaliser de tels
jugements. Les exemples classiques des premières existent dans les principes de Simon sur la rationalité
limitée. Les personnes n’ont pas la capacité physique de traitement de l’information pour réaliser certains
types de raisonnements ou certaines tâches de jugement. Il faut généralement satisfaire deux conditions
pour pouvoir réaliser des jugements corrects : utiliser le traitement approprié et avoir l’input approprié (les
données ou les connaissances).

Ainsi, les limitations cognitives humaines influencent clairement le traitement. Cependant, il y a plusieurs
conditions qui affectent la connaissance. A partir du point de vue « devoir implique pouvoir », il est
important de comprendre comment les personnes acquièrent la connaissance qu’ils utilisent et si les
conditions de la tâche sous laquelle ils opèrent leur permettent d’acquérir la connaissance appropriée. S’il
s’avère qu’à partir de l’expérience pratique et/ou la formation formelle, les individus ne peuvent pas
acquérir la connaissance nécessaire pour réaliser certains types de jugement, donc « devoir » n’implique
pas « pouvoir ».
En considérant cet issu, il faut distinguer deux types de situations :
- la nature de l’expérience des auditeurs est telle qu’ils ne peuvent pas acquérir la
connaissance nécessaire,
- l’auditeur acquiert la connaissance par l’expérience.
Concernant la première, le papier d’Ashton démontre qu’il n’est pas raisonnable d’espérer, même avec des
auditeurs expérimentés, d’acquérir la connaissance exacte de la fréquence des erreurs lorsque de telles
erreurs sont relativement non fréquentes dans les audits et lorsque les auditeurs n’ont pas fait beaucoup
d’audits de ce type pendant l’année. Donc, en considérant les données présentées dans cette même étude,
deux observations doivent être prise en considération :
- dire que les auditeurs n’ont pas beaucoup d’expérience avec les erreurs, le niveau
d’exactitude réalisé par les répondeurs sur certaines tâches est surprenant. En d’autres
termes, si les fréquences estimées par les auditeurs étaient seulement basées sur la
recherche dans la mémoire de ce qui a été antérieurement codé par l’expérience passée
alors leurs estimations devraient être plus males de ce qu’elles étaient !
- dire que leurs réponses aux questions sur les fréquences d’erreurs étaient peu valables,
comment alors avaient fait ces jugements ? Une possibilité est que les auditeurs se basent
principalement sur leurs connaissances causales des systèmes comptables pour générer ce
qu’on peut appeler des conjonctures éduquées.
Pour approfondir cette idée, Hogarth a considéré l’expérimentation des pensées suivantes. Est-ce que les
individus mettent beaucoup plus d’erreurs en fournissant les réponses aux questions nécessitant des
calculs mathématiques des carrés ou des racines carrées ? La plupart vont opter pour les racines carrées.
Cette expérimentation des pensés ne vise pas celui qui répond correctement, mais celui qui peut faire des
conjonctures intelligentes sur les types de fréquences d’erreurs qui sont plus courant sans jamais avoir été
expérimenté la tâche spécifique.
Autrement, même si les personnes développent des images sur les fréquences d’erreurs relatives à
différents types d’événements à travers des traitements « automatiques » de la mémoire, ce-ci ne veut pas
6
Colloque : Capital humain : Evaluation et contribution au développement des entreprises et des organisations Oujda : 28 et 29 octobre 2015

dire que toutes les estimations nécessitent simplement la recherche de fréquences qui sont
automatiquement codées. Plusieurs réponses peuvent être générées en faisant appel à la compréhension
causale de la personne concernant le traitement généré par des données et adoptant une heuristique qui
assume une simple relation entre la difficulté de la tâche et la probabilité des erreurs. Par conséquent, il
faut être conscient de la distinction « devoir implique « pouvoir » et d’utiliser ceci en tant que guide de
principe en sélectionnant les métaphores pour la modélisation des composantes du traitement d’audit. En
modélisant les traitements cognitifs, la recherche doit adopter des modèles que les gens peuvent impliquer.
Etat de la connaissance actuelle sur la compétence en audit
Il apparaît que la connaissance actuelle sur ce qu’est la compétence augmente de plus en plus. Cette
évolution semble être en concordance avec le passage de l’approche comportementale à l’approche
cognitive. Au début, la compétence était considérée comme étant un construit qui peut être mesurée de
façon approximative par le nombre d’années d’expérience. La recherche dans la compétence a notamment
mis l’accent sur la relation que peut avoir la compétence avec le processus de jugement de l’auditeur.
Avec l’approche cognitive, l’intérêt est de comprendre la mémoire et le processus décisionnel des plus
compétents.
Il faut cependant dire que l’étude de la compétence dans l’audit doit être beaucoup plus approfondie. En
effet, la plupart des études consacrées à l’étude de la compétence s’accordent sur le manque de bases
théoriques concernant l’impact de la compétence sur le comportement décisionnel. Une formulation
explicite de la théorie a l’avantage de guider les chercheurs et d’indiquer ce qu’on doit chercher lors de
l’analyse des données. Si la théorie est bien développée, il peut être possible d’identifier les hypothèses et
les conditions de leurs validations.
Des théories traitant de la compétence et de son impact sur le processus décisionnel ont été développées
dans d’autres disciplines telles que la psychologie cognitive et la médecine. Les chercheurs dans le
domaine de l’audit ont aussi développé des propositions théoriques liées à la compétence25. Il peut y avoir
des liens entre les études. Pour les études utilisant le modèle de la lentille, la comparaison entre les sujets
est facile parce que des attributs standard ont été adoptés. Pour les études utilisant l’approche cognitive, il
est difficile de faire des comparaisons et d’arriver à des conclusions.
Décider à propos de l’entrée utilisée pour observer et mesurer la compétence ne peut pas se faire sans
réfléchir sur les interactions que peut avoir l’évaluation avec les autres processus de gestion existants dans
l’entreprise. Pour cette fin, l’approche systémique est utilisée afin d’aborder l’évaluation en termes
d’analyse système. Par définition, un système est un ensemble d’éléments en interaction qui évoluent dans
un environnement et qui poursuivent des objectifs communs et formels.
Cette décomposition de l’évaluation – système en sous-systèmes interactifs permet la prise en compte des
interactions entre procédures, processus et système aux trois niveaux de l’analyse à savoir : la logique de
gestion de l’entreprise, la logique évaluative et la logique interne aux procédures utilisées pour évaluer.
C’est un système complexe caractérisé par sa totalité, dans le sens où l’évaluation est une recomposition
dans laquelle tout élément nouveau peut mettre en cause ce qui a déjà été établi. Il est aussi ouvert dans la
mesure où il interagit avec l’environnement. Les questions qui sont alors posés à ce niveau sont de l’ordre
de deux à savoir :
Quel type de relation peut-il exister entre le dispositif d’évaluation existant dans un cabinet d’expertise
comptable et la compétence ?
Quelles sont les composantes du processus d’évaluation d’un auditeur?

25
Exemple : GIBBINS (1984), WALLER et FELIX (1984).
7
Colloque : Capital humain : Evaluation et contribution au développement des entreprises et des organisations Oujda : 28 et 29 octobre 2015

La première interrogation invite à considérer la compétence de l’auditeur comme étant un « construit


social » qui dépend du dispositif de mesure (méthodes, instruments, concepts, instances de validation…)
que l’on mettra en place. On pourrait, pour cela, paraphraser ce que disait Binet à propos de son test et
dire : « la compétence, c’est ce que mesure le dispositif d’évaluation ». Ce qui est évalué, ce n’est pas la
compétence en soi, mais ce qui est nommé compétence par le dispositif d’évaluation. D’où, la compétence
n’est pas autonome par rapport au dispositif de mesure.
Or, d’après V.Marbach26, l’évaluation des compétences est une question complexe. Elle se justifie par le
fait que la compétence qui est une notion théorique offre par nature une résistance à l’observation. Les
compétences ne peuvent être mises en évidence que par un dispositif spécifique d’évaluation. De même
qu’il n’y a pas de réponse sans question, il n’y a pas de compétence reconnue sans jugement social sur la
compétence. Ce que l’on nomme compétence évolue au cours du temps, dépend des critères utilisés et est
relatif à la conception des systèmes de validation.
Selon le concept choisi, on n’évaluera pas la même chose. Plusieurs points de vue sur la compétence
doivent être réunis et confrontés. Le dialogue et la confrontation intersubjective doivent faire partie du
dispositif d’évaluation. Les points de vue de la hiérarchie et celui de la personne ont chacun leur raison
d’être, mais aussi leurs limites. Pris isolément, ils ne peuvent valider les compétences. La validité et la
validation résultent de leur dialogue et de leur confrontation. Toute déclaration de compétence exige des
preuves ou la possibilité d’une mise à l’épreuve.
Une grande partie du débat actuel sur la pertinence de la notion de compétence se heurte à une difficulté
fondamentale, celle des conditions d’observation de la compétence. Cette difficulté est associée aux
problèmes soulevés par les ambiguïtés langagières des définitions courantes. Aussi, J.Merchier et
P.Pharo27 ont évoqué les problèmes posés par la simple description d’une activité. En effet, une activité
peut toujours être décrite à différents niveaux. Elle peut varier de la description la plus compacte
correspondant à une macro connaissance (savoir rouler à vélo) à des descriptions plus fines de cette même
activité correspondant à des micro connaissances (dans le même exemple : savoir pédaler, savoir freiner).
II. HYPOTHESES DE LA RECHERCHE
Les hypothèses sont divisées en trois groupes. Il s’agit d’abord de la taille du cabinet (H1, H2 et H6), des
outils de recrutement (H3 et H4), et de l’expérience du recruté en termes du nombre et de la nature des
secteurs d’activité (H5).
La taille du cabinet d’expertise comptable et d’audit
La taille du cabinet d’audit a été mesurée par le nombre de personnes qui y travaillent. L’échelle utilisée
pour la mesurer est la suivante :
1. < 5
2. Compris entre 5 et 20
3. > 20
Au niveau de cette hypothèse, nous avons voulu tester l’impact de la taille du cabinet sur la responsabilité
de la formation, la spécialisation versus la polyvalence des collaborateurs et le mode d’évaluation de la
compétence au moment du recrutement. Pour cela, il a fallu définir en termes d’effectif ce qu’on entend
par petit, moyen et grand cabinet.

26
V.MARBACH (1999), op.cit. p. 11.
27
J.MERCHIER et P.PHARO (1992), Elément pour un modèle sociologique de la compétence d’expert, Sociologie du travail,
n°1, pp. 47-63.
8
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Petit cabinet Effectif < 5 ;


Moyen cabinet 5 ≤ Effectif ≤ 20 ;
Grand cabinet Effectif > 20.
H1 : les chefs des grands cabinets (effectif > 20 salariés) optent plus pour la spécialisation que
pour la polyvalence de leurs collaborateurs et perçoivent la compétence d’un candidat beaucoup
plus par rapport à son potentiel que par rapport à ses aptitudes présentes.
L’étude la plus récente qui a étudié l’impact des différences de connaissance lié à la position hiérarchique
ou le rang est celle de D.N.Stone, J.E.Hunton et B.Wier28. Cependant, cette étude a pris en considération
une seule composante à savoir les connaissances techniques.
Dans ce sens, l’étude de Tan et Libby a été plus large et s’est intéressé aux connaissances techniques et à
la capacité de résolution de problèmes. Il s’agit au niveau de la littérature d’un déplacement d’intérêt.
Longtemps utilisé en tant que variable explicative de la « compétence », l’expérience a été remplacée par
le rang. Désormais, le rang représente un proxy de la connaissance. D’une manière générale, l’association
entre le rang et la connaissance est le fruit de deux raisonnements. D’une part, les auditeurs très haut
placés ont généralement plus d’expérience et l’expérience est un input pour la connaissance. D’autre part,
ces auditeurs, s’ils arrivent à grimper l’échelle c’est grâce à leurs capacités cognitives.
Conformément à l’étude susmentionnée, le concept de compétence inclut des dimensions relatives à la
gestion en plus de celles liées aux exigences techniques des tâches d’audit. A partir de là, ces chercheurs
ont étudié comment ces dimensions de gestion de la connaissance, les connaissances techniques et les
capacités de résolution de problèmes différents d’un auditeur à un autre en fonction de son niveau
hiérarchique dans le cabinet.
Nous postulons que l’importance accordée aux composantes de la compétence à savoir les connaissances,
les savoir-faire et le comportement varient avec la position hiérarchique de la personne, d’où l’hypothèse
H2 :
H2 : La différence en termes de degré d’utilité accordé aux différentes composantes de la
compétence en fonction de la position hiérarchique de l’auditeur est beaucoup plus intense dans un
grand cabinet que dans un moyen ou petit cabinet d’audit.
En ce qui concerne le recrutement d’un nouveau diplômé (maîtrisard), nous vérifierons si le fait de se
baser sur l’université dans laquelle le diplôme a été obtenu constitue le critère sur lequel se basent les
cabinets d’audit ayant un nombre de personnel supérieur à 20.
H6 : La représentation des chefs des grands cabinets s’orientent vers la considération de
l’université dans laquelle le diplôme a été obtenu et ce lors du recrutement d’un nouveau diplômé.
Des outils de recrutement
A ce niveau, nous allons d’abord tester l’impact du niveau d’expérience du recruteur sur le choix de l’outil
de recrutement et sur les conditions d’une bonne évaluation de la compétence des candidats. Nous
tenterons par la suite de vérifier si le choix de l’outil de recrutement est guidé par le niveau du poste, le
souci d’une évaluation plus objective ou parce que son usage émane d’une habitude qui existe déjà depuis
longtemps dans le cabinet. Nous nous intéressons particulièrement au niveau de l’hypothèse H4 aux
recrutements non satisfaisants. L’intérêt étant de savoir quelles sont les causes d'un mauvais recrutement.

28
D.N.STONE, J.E.HUNTON et B.WIER (2000), Succeeding in managerial accounting, part 2 : a structural equation analysis,
Accounting, Organisation and Society 25, pp. 697-715.
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Nous supposons ainsi que l’insuffisance technique constitue la source la plus importante d’un recrutement
non-satisfaisant.
H3 : Plus l’expérience des recruteurs dans le recrutement augmente plus ils sont plus capables
d’évaluer la compétence des candidats, se basent uniquement sur le CV pour recruter parce qu’ils
ont l’habitude de le faire.
H4 : A mesure que le nombre de recruteurs non-satisfaits, pour insuffisance technique, des
recrutements qu’ils ont effectué augmente, le pourcentage de salariés compétents, qu’ils emploient
dans leurs cabinets, diminue
Expérience du recruté en termes du nombre et de la nature des secteurs d’activité
Pour le recrutement d’un chef de mission, nous tenterons de vérifier si la spécialisation du recruteur dans
un domaine bien particulier l’amène à considérer, au moment du recrutement d’un chef de mission, le
nombre et la nature des secteurs d’activité relatifs aux missions d’audit que le candidat a travaillé pendant
sa carrière.
H5 : La conception de la compétence propre au recruteur spécialiste dans un domaine bien
particulier se base plus sur le nombre et la nature des secteurs d’activité relatifs aux missions
d’audit pour le recrutement d’un chef de mission.
III. METHODOLOGIE DE LA RECHERCHE
Choix des répondants
Pour mettre en œuvre notre étude, nous avons opté pour l’administration du questionnaire à un échantillon
de convenance composé exclusivement d’experts comptables. Ce choix se justifie par les trois raisons
suivantes :
- Notre revue de littérature et notre cadre conceptuel nous imposaient de nous adresser à une cible
particulière ;
- Les experts comptables sont des professionnels qui doivent être à l’avant garde dans la maîtrise de
nouvelles connaissances et compétences dans des domaines variées tels que l’audit, la
comptabilité, la fiscalité, le contrôle de gestion, etc. Ils doivent donc développer sans cesse leurs
connaissances et veiller à l’évaluation et à la mise à niveau constant des connaissances de leurs
collaborateurs ;
- Comme nous souhaitons, après cette recherche vérifier nos hypothèses dans d’autres pays et
comparer avec la France, nous avons pensé que des échantillons d’experts comptables à travers le
monde pouvaient être assez comparables.
Administration du questionnaire
A ce stade, deux questions ont été résolues : quel mode de recueil de données faut-il choisir et quelle est la
taille de l’échantillon nécessaire pour tester le questionnaire ?
Concernant le mode de recueil des données, l’administration du questionnaire a été faite selon quatre
méthodes : face à face, par voie postale, par téléphone et par ordinateur via internet. En se basant sur la
liste des experts comptables répertoriée dans le site de l’OECT, nous avons remarqué que certains
disposent d’une adresse électronique alors que pour les autres, nous ne pouvons les atteindre que par le
biais de leurs adresses postales. La méthode d’administration choisie a été en fait imposée par les moyens
de bord. Les chiffres sont fournis par le tableau suivant :

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TABLEAU 1

Répartition des experts comptables en fonction de leur accessibilité

Experts comptables Nombre Fréquence


Experts comptables ayant une adresse électronique 164 43%
Experts comptables n’ayant pas une adresse électronique 216 56%

Nombre total 380 100%

En vue de collecter un nombre important de réponses pour assurer la représentativité de nos résultats,
plusieurs relances ont été effectuées.
En voici le nombre de questionnaires collectés en fonction du mode d’administration :

TABLEAU 2
Mode d’administration du questionnaire

Mode d’administration Nombre de Nombre de Pourcentage


relance questionnaires
collectés
Face à face 2 24 22,86
Voie postale 2 21 20
Internet 4 39 37,14
Téléphone29 120 appels 21 20
Total 105 100

Questionnaires administrés face à face


Selon Cette méthode, le questionnaire est directement remis aux participants après leurs avoir expliqué la
façon de le remplir et les objectifs de la recherche. Les personnes interrogées remplissent elles mêmes le
questionnaire. Ce choix nous a donné la possibilité de rencontrer des experts comptables dont nous
connaissions avant cela seulement le nom.
Questionnaires administrés par voie postale
A côté du temps limité, certains experts comptables sont trop dispersés pour être facilement atteints.
L’envoie par voie postale résout partiellement ce problème puisque cette méthode a nécessité une
infrastructure logistique comprenant plusieurs éléments. Les frais d’envoie n’étaient pas négligeables
surtout que deux relances ont été effectuées. L’enveloppe contenait, en fait, le questionnaire, une lettre
explicative et une enveloppe timbrée pour le retour.
29
Il s’agit de rappeler aux experts comptables l’envoi de notre questionnaire par la voie postale et par internet. Le remplissage
se fait chez eux et ils nous les envoient, une fois remplis.
11
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Questionnaires administrés par Internet


Devant ce faible pourcentage, l’Internet représentait au début la voie par laquelle nous avons espéré
collecter le maximum de questionnaires. Cependant, la confrontation réelle avec cette voie
d’administration n’était pas à hauteur avec les espérances. Ce mode d’administration a duré onze mois.
Les adresses électroniques utilisées sont celles existantes dans le site de l’OECT.
Questionnaires administrés par téléphone
L’utilisation du téléphone a permis de renforcer les autres voies d’administration. Il ne s’agit pas
d’interroger les répondants. Il s’agit plutôt de les rappeler qu’ils ont reçu le questionnaire, par voie postale
ou par e-mail, et de solliciter leurs réponses. Hormis les coûts très élevés, l’usage de ce moyen a facilité
l’accès et la communication avec les experts comptables en les incitant à répondre. Cependant, il faut dire
que pour certaines personnes, la multiplication du nombre d’appels (plus que 5 appels) n’implique pas
qu’ils ont répondu au questionnaire.
IV. ANALYSE DES DONNEES ET INTERPRETATION
Les données recueillies dans le cadre de cette étude ont été traitées avec Excel et SPSS. Ce traitement a été
précédé par une étape de codage des réponses. Coder les réponses brutes30 a consisté à libeller les
réponses obtenues à l’aide de codes numériques simples. Par exemple, à la réponse « oui » est attribuée la
valeur « 1 » et « 2 » à la réponse « non ». Pour une échelle à 4 positions, les réponses ont été codées avec
les valeurs « 1 », « 2 », « 3 » et « 4 ». La valeur « 0 » a été attribuée pour coder toutes les non-réponses.
Une fois les données codées, elles ont été saisies et nous avons obtenu, sur Excel, deux tableaux31 dont
chaque colonne représente une variable et chaque ligne un répondant. Sur la base de ces données, nous
avons d’abord opéré un ensemble de traitements dits « descriptifs » permettant de structurer les variables
pertinentes, c’est à dire qui apparaissent à partir du questionnaire. D’ailleurs, notre travail s’est opéré en
deux étapes complémentaires mais d’une nature profondément différente sur le plan des traitements
statistique.
Nous considérons que le recruteur opère son jugement en fonction de la taille de son entreprise, de la
conception qu’il a à propos de la compétence et en fin des outils de recrutement qu’il utilise.
Taille du cabinet d’expertise comptable et d’audit
La taille du cabinet est un facteur qui conditionne le choix de l’expert comptable en matière de
recrutement. Le choix des collaborateurs doit être cohérent avec la structure et les besoins du cabinet en
termes de nature de mission et du personnel existant. En nous référant à l’étude de Libby et Luft, il est
claire que la nature très spécialisée des tâches utilisées lors de l’expérimentation accroît la probabilité de
différence de compétence entre ceux ayant une bonne expérience dans le domaine et ceux ayant une
expérience moyenne. Or, à mesure que l’effectif augmente, les possibilités de spécialisation s’offrent de
plus en plus.
Le potentiel correspond à une compétence latente inexplorée. Dans un cabinet contenant 15 salariés, un
collaborateur potentiel représentera 6% de l’ensemble du personnel. Par contre dans un autre employant 4
salariés, celui qui occupera le poste vacant représentera 20% du corps salarial. En comparant les deux
situations, il est possible de se rendre compte de l’importance de la taille notamment lorsque nous voulons
mettre en évidence son impact sur la considération de la compétence actuelle ou du potentiel estimé. Notre
troisième hypothèse prévoit que les chefs des grands cabinets (effectif > 20 salariés) optent plus pour la

30
C’est à dire telles qu’elles ont été reçues des répondants.
31
L’un destiné aux salariés et l’autre regroupait la réponse des propriétaires individuels et associés.
12
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spécialisation que pour la polyvalence de leurs collaborateurs et perçoivent la compétence d’un candidat
beaucoup plus par rapport à son potentiel que par rapport à ses aptitudes présentes.

Pour tester la première relation, à savoir l’impact de la taille sur l’orientation du cabinet, un test de Χ2 a
été effectué, les résultats figurent dans le tableau ci-dessous. Le Khi Deux calculé, étant de
32,976. L’hypothèse nulle est vérifiée et il existe une relation entre la taille du cabinet et l’orientation du
cabinet. D’une part, parmi les 35 employeurs ayant des cabinets de petite taille (< 5), 33 affirment que
leurs salariés travaillent sur tous les dossiers. D’autre part, de l’ensemble des cabinets de grande taille (>
20) qui totalisent un nombre de 17, la grande majorité, à savoir 14 d’entre eux, optent pour la
spécialisation de leurs salariés.

TABLEAU 3

Résultat du test de Khi Deux sur les variables orientation du cabinet et taille du cabinet

Orientation du cabinet Taille du cabinet Total KHI2 (SIG)


<5 5-20 > 20
Spécialité par domaine 2 4 14 20 32,976
Travaille sur tous les dossiers 33 13 3 49

Total 35 17 17 69
Aussi, pour tester la seconde relation, qui lie la taille du cabinet à la compétence actuelle versus
potentielle, un test de Χ2 , était suffisant pour conclure à l’existence d’une relation entre ces deux
variables :

TABLEAU 4

Résultat du test de Khi Deux sur les variables compétence actuelle/potentielle et taille du cabinet
Compétence actuelle/potentielle Taille du cabinet Total KHI2 (SIG)
<5 5-20 > 20
Actuelle 18 7 25 13,337
Potentielle 17 10 17 44
Total 35 17 17 69

L’hypothèse H1 est vérifiée. L’importance de la taille du cabinet d’audit favorise le développement d’une
compétence spécialisée dans des secteurs d’activité bien déterminée et valorise les candidats au moment
du recrutement par rapport à leurs compétences potentielles.

Conception de la compétence
On peut se demander, à ce niveau, comment est-ce que les différents traits qui définissent le construit de
compétence sont estimés et si cette estimation variait avec la position de l’évalué et la taille du cabinet.
Notre deuxième hypothèse stipule que la différence en termes de degré d’utilité accordé aux différentes
composantes de la compétence en fonction de la position hiérarchique de l’auditeur est beaucoup plus
intense dans un grand cabinet que dans un moyen ou petit cabinet d’audit.

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Suite à l’analyse factorielle, les dimensions qualité de la personne et savoir-faire ont été identifié comme
les plus pertinentes et ce dans le cas du manager. L’étude porte désormais sur ces deux modalités. Il s’agit
de tenter de trouver une liaison entre ces deux modalités, la position hiérarchique, la catégorie
socioprofessionnelle et la taille du cabinet. Ces modalités étant ordinales présentent des médianes égales
d’une valeur de 7. Des croisements effectués de la variable manager/savoir-faire avec la taille, le résultat
existe dans le tableau ci-dessous.

TABLEAU 5

Résultat du croisement de manager/savoir-faire et taille du cabinet

Manager/savoir-faire Taille du cabinet


<5 5-20 >20
Non utile 2 2,9%

Plutôt pas utile 3 2,9% 5,9%


Ni utile ni pas utile 4 5,9% 11,8%
Plutôt utile 5 17,6% 5,9%
Utile 6 8,8% 5,9% 11,8%
Tout à fait utile 7 58,8% 70,6% 88,2%
Par ailleurs, le test de Spearman (rhô) indique une corrélation significative de l’ordre de 0,272. La
corrélation est positive et significative. Le savoir-faire apparaît être déterminant et son importance
augmente de plus en plus à mesure que la taille du cabinet accroît.
Concernant la dimension trait de personnalité, le résultat figure dans le tableau suivant :

TABLEAU 6

Résultat du croisement de manager/traits de personnalité et taille du cabinet


Manager/ traits de personnalité Taille du cabinet
<5 5-20 >20
Non utile 2 15,2% 35,3% 29,4%
Plutôt utile 5 15,2% 5,9%
Utile 6 6,1% 5,9% 5,9%
Tout à fait utile 7 63,6% 58,8% 58,8%

Les traits de personnalité sont, indépendamment de la taille du cabinet, tout à fait utiles. D’où, pour le cas
du manager, le trait de compétence le plus sensible à la taille du cabinet, est le savoir-faire. Dans le cas
des superviseurs, l’ACP a montré que l’échelle relative à la conception de la compétence est
unidimensionnelle. La compétence constitue un tout indissociable. Les seniors, quant à eux, se distinguent
par la motivation et le savoir-faire. Le résultat figure dans l’annexe n° 15. La motivation apparaît être tout
à fait utile dans le cas d’un petit cabinet, utile dans cabinet moyen et est plutôt utile pour un grand cabinet.
En ce qui concerne les assistants qualifiés, les résultats figurent dans le tableau suivant :

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TABLEAU 7

Résultat du croisement des éléments de compétence de l’assistant qualifié et taille du cabinet

Dimension Degré d’importance Taille


<5 5-20 >20
Motivation Tout à fait utile 7 24,2 29,4% 23,5%
Traits de personnalité Tout à fait utile 7 36,4% 58,8% 35,3%

Suite à l’ACP, les dimensions motivations et traits de personnalité ont présenté les scores les plus élevés.
L’analyse sera concentrée sur ces deux traits. Aussi bien la motivation que les traits de personnalité ne
semblent pas, pour le cas des assistants qualifiés, être affectés par la taille du cabinet. Les degrés
d’importance accordée sont comparables. L’hypothèse H4 est vérifiée pour les managers concernant le
savoir-faire et pour les seniors.
L’impact des outils d’évaluation
L’outil est un moyen d’investigation au service de la construction d’un jugement de compétence élaboré
dans la pensé de l’évaluateur. L’évaluation est un processus d’échange d’informations où les techniques
utilisées devraient privilégier la référence aux contenus des informations recherchées.
Or un jugement est plus valide s’il est plus objectif et autonome de son référent. Le tableau ci-dessous
montre que la grande majorité des répondants (81,8%) choisissent l’outil d’évaluation qui permet une
évaluation objective de la compétence :

TABLEAU 8

Résultats de l’analyse descriptive du choix de l’outil d’évaluation


Choix de l’outil Fréquence Pourcentage
d’évaluation
Poste de niveau supérieur 4 6,1%
Evaluation objective 54 81,8%
Habitude 8 12,1%
Les résultats montrent que la majorité des experts comptables (59%) utilisent le CV et l’entretien lors de
leurs recrutements. Par ailleurs, le test apparaît aussi comme un outil très sollicité puisque 39% des
professionnels l’utilisent à côté du CV et de l’entretien. L’utilisation unique du CV n’est pas courante est
on trouve un pourcentage très faible de l’ordre de 2%.
L’hypothèse H3 a pour effet de vérifier qu’il existe une relation entre le niveau d’expérience dans le
recrutement et le pourcentage de salariés compétents d’un côté et l’outil de recrutement utilisé d’un autre.
Cette hypothèse stipule que plus l’expérience des recruteurs dans le recrutement augmente plus les cas de
recrutement non-satisfaisants qu’ils ont eu diminuent et plus ils optent pour l’évaluation des candidats sur
la base de leurs CV parcequ’ils ont l’habitude de le faire.
Pour les besoins de l’analyse, la variable pourcentage de salariés compétents a été recodée d’une variable
métrique à une autre nominale conformément au tableau suivant :

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TABLEAU 9

Transformation de la variable pourcentage de salariés compétents

Salariés compétents Pourcentage de répondants


< 50 7,2%
50 – 75 42%
80 – 99 31,9%
100 18,8%
Ce tableau témoigne que les répondants ne sont pas satisfaits des personnes qu’ils emploient dans leurs
cabinets. En effet, seulement 18,8% des experts comptables considèrent que tous leurs collaborateurs sont
compétents contre 42% ayant entre 25% et 50% de salariés non compétents.
Une analyse de covariance a été menée. Elle procède en deux temps. Il s’agit d’abord de mener une
régression sur le lien entre le pourcentage de salariés compétents et l’ancienneté du recrutement (tableau
ci-dessous). Ensuite une analyse de variance est effectuée avec la variable outils de recrutement en prenant
pour variable à expliquer les résidus de la régression précédente.

TABLEAU 10

Impact de la variable ancienneté du recrutement sur le pourcentage de salariés compétent


Bêta t SIG
Pourcentage de salariés compétents 0,012 0,097 0,923

Les résultats montrent que l’ancienneté de recrutement a influencé positivement le pourcentage de salariés
compétents (p < 0,1). L’hypothèse H5 est partiellement vérifiée. Plus l’expérience des recruteurs dans le
recrutement augmente plus ils sont capables d’évaluer la compétence des candidats. L’utilisation du CV
pour recruter est, indépendamment de l’ancienneté de recrutement, très faible. La grande majorité des
experts comptables utilisent le CV et l’entretien lors de leurs recrutements.
Le test de l’hypothèse H4 implique l’existence d’une relation entre le nombre de salariés compétents
employés dans le cabinet et le fait d’être satisfait ou techniquement non satisfaits des recrutements
effectués. Cette hypothèse stipule que plus le nombre de recruteurs non satisfaits, pour insuffisance
technique, des recrutements qu’ils ont effectués augmente, le pourcentage de salariés compétents, qu’ils
emploient dans leurs cabinets, diminue
Cette hypothèse a été testée en deux temps. Le test Khi Deux va permettre de tester l’égalité ou non des
variances. L’analyse de variance simple permettra de vérifier l’effet d’une source de variation qualitative
(recrutement satisfaisant/non satisfaisant) sur la variable quantitative (pourcentage de salariés
compétents). Les résultats montrent une forte concentration de l’échantillon ayant effectué des
recrutements non satisfaisants, il représente un pourcentage de 74% par rapport à l’échantillon total des
recruteurs. Le test de Khi Deux fournit une valeur de 24,461, étant inférieur à la valeur figurant sur la
table, il n’y a donc pas de relation entre les recrutements satisfaisants/non satisfaisants et le pourcentage
de salariés compétents. De la même manière, l’anova indique que la nature des recrutements effectués ne
permet pas d’expliquer le pourcentage de salariés compétents.

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Concernant la conception implicite de la compétence, l’analyse montre que la majorité, 51%, des
répondants fondent l’insatisfaction de leurs recrutements sur l’insuffisance technique des personnes qui
ont été recrutées. L’item comportement a reçu une faible attention : 9,8% pour un mauvais comportement
vis à vis des collègues et supérieurs hiérarchiques et seulement 7,8% pour un mauvais comportement vis à
vis des clients. Enfin, l’item non intégration/non communication présente un pourcentage de 31,4%.
Exemples de recrutement
Il s’agit d’aboutir à des issues pratiques relatives au recrutement d’un chef de mission et d’un nouveau
diplômé. Il s’agit d’expliquer la convention de compétence qui leur est spécifique. Mais avant cela, nous
présenterons les résultats élémentaires susceptibles de donner un aperçu de l’idée qui règne dans la
profession comptable et qui est relative au processus d’évaluation de la compétence.
La convention de compétence/annonce de recrutement est composé de quatre mesures. Le tableau suivant
récapitule le pourcentage de réponse obtenu pour chacune des mesures en fonction de la taille.

TABLEAU 11

Impact de la taille sur la convention de compétence/chef de mission


Convention de compétence/annonce de recrutement <5 5 – 20 > 20

Niveau de formation 30,3% 23,5% 43,8%


Niveau de formation et nombre d’année d’expérience 30,3% 64,7% 31,3%
Niveau de formation, responsabilités occupées et missions effectuées 27,3% 5,9% 6,3%
Niveau de formation, responsabilités occupées et tranche d’âge 12,1% 5,9% 18,8%

D’après ce tableau, il semble que la taille n’a pas d’impact significatif sur la convention de
compétence/annonce de recrutement. Le choix des critères à insérer dans une annonce est plutôt stable.
Pour les petits cabinets, certains considèrent que le niveau de formation tout court est suffisant alors que
d’autres voient qu’il faut en plus de ça insérer une donnée relative au nombre d’année d’expérience. Pour
les moyens cabinet, la majorité des répondants, soit 64,7% est d’accord que l’annonce doit fournir une
précision sur la formation et l’expérience. Les grands cabinets sont décisifs pour dire que c’est le niveau
de formation qui prévaut sur les autres caractéristiques et qui devrait être mis dans l’annonce de
recrutement.
L’impact de la catégorie socioprofessionnelle et de l’orientation du cabinet ne semble pas être significatif.
Les avis sont partagés entre le niveau de formation tout court et le niveau de formation associé au nombre
d’année d’expérience. Lors de la phase de sélection la variable convention de compétence/sélection
contient trois mesures qui vont permettre de déterminer quel trait de compétence est le plus important sans
tenir compte de la nature du poste objet du recrutement. Le tableau suivant appréhende la grande
importance que les experts comptables répondants accordent aux qualités personnelles lors de la phase de
sélection.

TABLEAU 12
Résultats de l’analyse descriptive de la convention de compétence/sélection

Convention de compétence/sélection Pourcentage


Connaissances techniques 28,4%
Qualités personnelles 43,3%
Comportement 28,4%
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Colloque : Capital humain : Evaluation et contribution au développement des entreprises et des organisations Oujda : 28 et 29 octobre 2015

Le recrutement d’un chef de mission est examiné en testant l’impact de la nature de la compétence du
recruteur sur la convention de compétence qu’il mobilise pour recruter un chef de mission. Notre
cinquième hypothèse prévoit que la conception de la compétence propre au recruteur spécialiste dans un
domaine bien particulier se base plus sur le nombre et la nature des secteurs d’activité relatifs aux
missions d’audit pour le recrutement d’un chef de mission. Pour cela, nous avons observé, à travers le
tableau ci-après, la distribution de la variable convention de compétence/chef de mission. Dans ce cas le
test de Chi deux ne peut pas être utilisé puisque l’effectif théorique minimum dans une cellule doit être
égal à 5 ou plus, ce qui n’est pas ici vérifié.

TABLEAU 13

Tableau : Critères décisifs guidant la présélection du chef de mission sur la base du CV


Convention de
compétence/chef de Premier Deuxième Troisième Quatrième Total
mission rang rang rang rang

Diplôme 42(84%) 3 2 3 50
Nombre d’années 8 24(58,53%) 5 4 41
d’expérience
Nombre de dossiers 6 12(35,29%) 12(35,29%) 4 34
d’audit
Nombre et nature des 4 8 9 12(36,36%) 33
secteurs d’activité
Fonctions et 3 6 7(31,81%) 6 22
responsabilités
Nombre d’entreprise 1 5 14(46,66%) 10 30
Nom des cabinets 1 1 3 2 7
Recommandation 1 1 2 4

Nous constatons d’après ce tableau que le premier rang est accordé, par 42 experts comptables, au
diplôme. Le deuxième rang est occupé par le nombre d’année d’expérience. Pour le nombre de dossiers
d’audit, les avis sont partagés entre le deuxième et le troisième rang. Concernant le nombre et la nature
des secteurs d’activité, les points de vue les plus significatifs sont éparpillés entre le deuxième, le
troisième et le quatrième rang. Les fonctions et responsabilités ainsi que le nombre d’entreprises sont
classés en troisième rang. Le nom des cabinets et la recommandation présentent des scores faibles.
Nous avons fait appel, pour le test de l’hypothèse H5 à une analyse de covariance. Les résultats indiquent
que la relation entre la nature de la compétence du recruteur et la convention de compétence/chef de
mission est significative. En effet, dans les quatre cas relatifs au quatre rangs, F associé à la variable
indépendante a un degré de signification supérieur à 0,02. L’hypothèse H5 est donc acceptée.
Pour le recrutement d’un nouveau diplômé, quatre échelles de mesure ont été considérées. Il s’agit de :
université délivreur du diplôme, recommandation, mention du diplôme et sexe du candidat. Le tableau ci-
après montre une prédominance de l’université délivreur du diplôme.

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TABLEAU 14

Critères décisifs guidant le recrutement du nouveau diplômé


Convention de compétence/nouveau Pourcentage
diplômé

Université délivreur du diplôme 57,6%


Recommandation Néant
Mention du diplôme 18,2%
Sexe du candidat 24,2%

Cette variable a été croisée avec celle de la taille du cabinet, étape nécessaire pour tester l’hypothèse H6.
Notre sixième hypothèse stipule que la représentation des chefs des grands cabinets s’orientent vers la
considération de l’université dans laquelle le diplôme a été obtenu et ce lors du recrutement d’un nouveau
diplômé.
Le test adapté avec la nature des variables est le Khi Deux. La valeur de Χ 2 calculé est de 5,440. Pour un
degré de liberté de 2, la table de Χ 2 fournit une valeur de 5,991 et ce pour un alpha de 5%. Il n’existe
aucune relation entre la convention de compétence/nouveau diplômé et la taille du cabinet. La catégorie
socioprofessionnelle ne permet pas non plus d’expliquer la variabilité constatée au niveau de la variable
convention de compétence/nouveau diplômé. Le critère choisit pour recruter ne semble pas être influencé
par l’effectif déjà existant.
CONCLUSION
L’évaluation des compétences au moment du recrutement est considérée comme une démarche qui
articule deux fonctions complémentaires. La première fonction nommée « de contrôle » met l’accent sur
les outils utilisés. La seconde s’intéresse à l’évaluation proprement dite, pose les problèmes liés au
jugement de valeur ainsi que les significations données à une action. La fonction de contrôle est liée aux
outils de recrutement utilisés par les experts comptables tunisiens lors de l’évaluation des candidats. La
fonction d’évaluation retient tous les paramètres susceptibles d’avoir un impact quelconque sur le
déroulement de l’évaluation. Il s’agit de la taille du cabinet d’audit, la nature des compétences du
recruteur et ses conventions de compétence. Derrière l’examen spécifique de l’impact de chacune de ces
variables sur le processus d’évaluation des compétences lors du recrutement se cache en fait l’objectif de
mettre en question l’approche classique du recrutement. Pour cela, en faisant le point sur les hypothèses
qui sous-tendent notre article, nous préciserons que c’est pourtant la vision d’un recrutement classique qui
prévaut chez les experts comptables recruteurs.
Les hypothèses H1 et H5 ont été statistiquement vérifiées. D’où les grands cabinets d’audit favorisent le
développement d’une compétence spécialisée dans des secteurs d’activité bien déterminés et valorisent
leurs candidats au moment du recrutement par rapport à leurs compétences potentielles. Opter pour des
compétences générales ou spécialisées dépend fortement de la nature des missions que le cabinet assure. Il
s’agit selon les termes de Minzberg32 d’une spécialisation verticale. Dans ces cabinets, on ne parle plus de
généraliste, d’expert comptable classique. Leurs clients ont des problèmes spécifiques et ils optent donc
pour des spécialistes. Donc celui qui a 5 ans d’expérience, sa compétence peut de loin dépasser celui qui a
10 ans à condition que le premier le soit dans une spécialité bien déterminée. Par exemple, quelqu’un qui a
passé cinq ans dans le domaine pétrolier devient plus compétent que celui ayant vingt ans dans le domaine

32
H.MINZBERG (2000), Structure et dynamique des organisations, Paris, Edition Organisation, Treizième tirage, p.87.
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Colloque : Capital humain : Evaluation et contribution au développement des entreprises et des organisations Oujda : 28 et 29 octobre 2015

bien entendu ayant traité des dossiers dans divers domaines. A partir de là, ce n’est pas le nombre
d’années d’expérience qui guide le processus d’évaluation des compétences mais plutôt la nature des
missions effectuées par le candidat dans sa carrière. Le terme potentiel fait référence aux caractéristiques
de l’individu qui ne sont pas encore manifestées. Il a reçu l’attention d’un grand nombre de répondants, de
l’ordre de 63,76%, qui se basent pour évaluer les compétences de leurs candidats sur leurs capacités à
assimiler, à comprendre et à interpréter rapidement les législations futures. Evaluer les compétences sur la
base du potentiel estimé entre dans le cadre d’une approche méthodologique bien reconnue et défendue
par les théoriciens. Elle permet de pronostiquer les capacités d’évolution33 d’un collaborateur à un
moment donné. Elle s’oppose à trois autres approches qui sont : l’approche par les connaissances,
l’approche par les savoir-faire et l’approche par les démarches intellectuelles. Cette dernière approche est
tellement abstraite qu’elle n’a pas été appropriée par la hiérarchie. Ce ci est dû au fait qu’elle ne compare
pas les emplois à partir des activités mais de ce qui est mis en œuvre derrière les activités. Les approches
par les connaissances et celle par les savoir-faire opérationnels se focalisent sur ce que les personnes
connaissent et sont capables de mobiliser dans un contexte donné. Elles s’intéressent au présent et passé
de l’individu. Pour cela, elles ont été volontairement opposées à l’approche par le potentiel estimé.
Aussi, à mesure que le recruteur se spécialise dans un domaine bien particulier, il se base plus sur le
nombre et la nature des secteurs d’activité relatifs aux missions d’audit pour le recrutement d’un chef de
mission. Les résultats montrent aussi que les critères décisifs qui guident l’évaluation de la compétence
d’un chef de mission sont : le diplôme, le nombre d’année d’expérience, le nombre de dossiers d’audit et
enfin le nombre et la nature des secteurs d’activité relatifs aux missions travaillées pendant la carrière. Le
diplôme est celui du certificat d’études supérieures et le nombre moyen d’année d’expérience doit être
égal ou supérieur à 4 ans. Selon Marchal, l’incertitude liée au recrutement est réduite lorsque le recruteur
est spécialisé dans un domaine professionnel. Les compétences du recruteur ne peuvent pas être détachées
de celles des candidats. En effet, le recruteur peut avoir affaire à des candidats plus ou moins compétents
dans le sens où ils ont les mêmes domaines d’approfondissement où non. Autrement, à partir du moment
où le recruteur est spécialisée dans l’audit, il va alors avoir une préférence pour les candidats qui se
rapprochent de sa spécialité, pour cela, il va accorder une importance particulière au nombre et à la nature
des secteurs d’activité relatifs aux missions d’audit pour recruter un chef de mission.
F.Eymard-Duverney et E.Marchal34 disent qu’ « un bon recruteur doit chasser sa propre subjectivité, et
mettre à distance les candidats pour les juger en toute neutralité ». Pour cela, il se livre à une véritable
quête d’informations susceptibles de le guider sa décision. L’information sur le nombre et la nature des
dossiers travaillés peut lui permettre d’établir un lien entre son expérience et les qualités potentiellement
décelée chez lui. Il s’agit bien entendu d’une première évaluation opérée au moment de la présélection sur
la base du CV. En concentrant son attention sur cette information, le recruteur induit une certaine
conception de la compétence. Cette conception peut être stable comme elle peut subir des transformations
au fur et à mesure qu’il avance dans le processus du recrutement. De toutes les façons que les résultats
montrent une préférence lors de l’entretien pour le comportement et pour la nature des dossiers travaillés
lors du dépouillement sur la base du CV, cela prouve que le jugement du recruteur ne progresse pas de
façon linéaire au rythme des différentes phases du recrutement. Par ailleurs, au vu de ces résultats, que le
recruteur ait la même spécialité ou non que le candidat n’a pas d’importance dans l’absolu. En effet, A l’
occasion du tri, l’information fournie par le CV était considérées comme capables d’attester l’adéquation
du candidat à un profil donné. Elle est dotée d’une certaine autonomie. Au stade de l’entretien, elle est
33
L’évolution peut s’entendre par prise de responsabilité supérieure soit en management soit en compétences techniques. C’est
la deuxième forme d’évolution qui nous intéresse dans notre travail.
34
F.EYMARD – DUVERNAY et E.MARCHAL (1997), Façon de recruter – Le jugement des compétences sur le marché du
travail, Paris, Edition Métailié, p. 79.

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considérée comme un simple item qui n’a pas de valeur en soi, mais qui doit être confronté à d’autres
éléments, et en particulier à la personne du candidat pour acquérir une signification.
Par ailleurs, Notre étude empirique ne s’est pas déroulée en réelle situation de recrutement mais à travers
une expérimentation. Or, dans le cadre d’une expérience, les recruteurs expriment des attitudes qui ne
seront pas forcément corrélées avec des comportements futurs. L’utilisation du questionnaire imposait par
ailleurs le recours à des impressions et non à des comportements. En plus, la réalisation d’une étude
quantitative partait de l’objectif d’aboutir à des quantifications permettant d’appliquer des tests statistiques
aboutissant à des résultats mais dont la signifiance peut ne pas être excellente.
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