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Le monde est plein de gens qui vous ressemblent, qui étouffent les
meilleurs sous leur nombre. 321
Le terrible n’est pas de ces étrangers dont les routes croisent nos routes,
mais dans ce propre visage que l’âme arrachée verra soudain face à face,
et ne reconnaîtra pas. 323
« Il n’est pas vrai que tu aies perdu Dieu. Et d’ailleurs tu n’en sentirais
pas plus la perte que tu n’en as senti le besoin. Tu es aujourd’hui ce que
tu étais hier. Si ta chair tremble, c’est de froid. Seulement tu voudrais
bien croire qu’un homme tel toi ne cède qu’à des épreuves faites pour lui,
à sa mesure. Il n’est pas possible que Dieu meure en toi sans cérémonie,
sans éclairs, sans tonnerre ». 335
La grâce divine (depuis des mois, il n’en sentait même plus l’absence) se
montrait encore une fois : c’était comme la face d’un cadavre au fond des
eaux, c’était comme un cri plaintif dans la brume. 348
Trop fier pour se contenter des seules apparences, trop fin pour n’en
reconnaître la fragilité, il avait contraint jusque son âme. 33
Tel vieillard l’imagine [Satan] assez sous les traits d’un contradicteur
académique, mais c’est que l’observateur s’arrête aux jeux et bagatelles.
Parfois, bien que rarement, la noire cupidité de nuire l’emporte sur
d’autres délices moins promptes et moins âpres. Alors le mal se dénonce
lui-même, s’avoue tel quel, non pas un mode de vivre, mais un attentat
contre la vie. 375
Que d’hommes qui crurent aussi en avoir fini pour toujours des
entreprises de l’âme, s’éveillèrent entre les bras de leur ange, ayant reçu
au seuil de l’enfer ce don sacré des larmes, ainsi qu’une nouvelle
enfance ! 380
Il pense avec les haines, les amours, les envies et les rancunes de son
adolescence, et telle phrase de lui qu’on cite pour sa hardiesse ou sa
nouveauté n’est réellement que l’expression abstraite d’une humiliation
subie dans sa jeunesse, mais toujours brûlante. 388-389
… les partis triomphants haïssent ordinairement leurs flatteurs. 389
Les plus grands de nos plaisirs, jeune homme, sont ceux que nous
repoussons d’abord, parce que nous craignons sottement pour notre
fragile machine… Nous sommes encore plus paresseux pour jouir que
pour souffrir…430
Oui, rien ne vous empêchera de vous tuer, pour peu que vous en sentiez
l’envie. Car vous en avez envie. Remarquez, en passant, que les
circonstances ne justifient pas le moins du monde un suicide : la plupart
de vos maux sont imaginaires, et vous exagérez les vôtres comme à
plaisir. Il vous coûterait moins de vous tuer que d’avouer à présent que
vous vous êtes affolé pour rien. Vous êtes vaniteux. Toutes les passions
peuvent mettre un jour le revolver en main, mais à la fin du compte, c’est
la vanité qui tue. Si j’étais vaniteux, je serais mort depuis longtemps. 433
Jamais l’idée du suicide n’avait été dans son esprit plus vague, plus
inconsistante, moins formulée, et pourtant jamais encore elle n’avait été si
vivante. 435
… et il se sentit étreint par la déception des rêves, lorsque les visages qui
passent ne reflètent rien de notre angoisse. 436
« Dieu ne lui manquait pas, car il croyait bien n’avoir pas rejeté la foi :
elle s’était brusquement détachée de lui ». 458
Des gens qui se frappent comme vous n’iront pas loin. 488
… il avait senti, dès le premier jour, à sa profonde stupeur, que les forces
lui manquaient déjà, que le vieux corps pris au dépourvu allait peut-être
refuser sa tâche. 493
On a toujours assez de force pour recevoir les coups sans les rendre, et
dès qu’on n’attend pas autre chose de soi, qu’on n’en demande pas plus,
on finit par dormir tranquille. 499
Ce que Dieu refuse est superflu. Ce qui est donné suffit. 509