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17 LA CONDITION DE L’ÉCRIVAIN
De la Renaissance à nos jours, la condition sociale de l’écrivain
évolue considérablement: son rôle est défini de manières différentes
d’une époque à l’autre, et la reconnaissance qu’il tire de ses livres
connaît elle aussi d’importantes variations.

1 Naissance de l’écrivain
C’est au cours du XVIe, et surtout du XVIIe siècle, que s’élabore
progressivement la figure sociale de l’écrivain. Un certain nombre
d’institutions témoignent de cette reconnaissance nouvelle.
La fondation de l’Académie française en 1635 montre que la litté-
rature trouve un lieu où sont reconnues sa spécificité et son impor-
tance. De nombreuses académies privées, en province et à Paris,
témoignent de l’intérêt de plus en plus grand prêté aux écrivains.
Le public des œuvres littéraires et théâtrales s’accroît, et prend
conscience de son importance.
Par le mécénat, les écrivains trouvent des protecteurs (des grands
ou le roi) qui financent leur activité.
Ils peuvent occuper des charges, des fonctions officielles, notam-
ment à la cour d’un prince ou du roi: ils peuvent être historiogra-
phes ou participer aux célébrations du règne.
Mais cette reconnaissance témoigne paradoxalement de la fragilité
économique de la condition d’écrivain: un auteur a besoin d’être
aidé pour vivre, car ses œuvres ne rapportent que peu d’argent.

2 L’écrivain au siècle des Lumières


Le XVIIIe siècle invente une nouvelle figure de l’écrivain, celle du
Philosophe, qui intervient activement dans les affaires politiques du
siècle (c’est par exemple le cas de Voltaire qui prend la défense
d’un homme injustement condamné, le protestant Calas). Aussi le
XVIIIe siècle voit-il ces Philosophes se heurter à la censure de l’État
et de l’Église, qui les amène parfois en prison. Mais leurs idées
s’imposent progressivement : le public prend conscience que la
littérature peut prendre en charge les questions politiques.
Cette légitimation progressive se traduit aussi, à la fin du siècle,
par la reconnaissance du droit d’auteur, qui permet aux écrivains
d’être rémunérés en proportion de leur succès public.

HISTOIRE LITTÉRAIRE 39
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3 L’écrivain au XIXe siècle : mage romantique


et poète maudit
Le romantisme donne à l’écrivain une très grande importance
dans la cité. Les auteurs définissent en effet leur rôle comme poli-
tique: dans la lignée des Philosophes du siècle précédent, le poète
romantique est un mage qui doit guider le peuple (à l’instar d’un
Hugo ou d’un Lamartine qui s’engagent politiquement) pour lui
permettre d’accéder à une vie meilleure.
Mais le relatif échec politique de ces poètes conduit les écrivains
de la seconde moitié du XIXe siècle à se détourner des affaires de la
cité pour défendre l’Art pour l’Art, c’est-à-dire un Art qui n’ait d’in-
térêt que dans sa dimension purement esthétique. Aux écrivains
engagés s’opposent alors les poètes maudits de la Bohème. Certains
font de leur anticonformisme, de leur échec public et de leur pau-
vreté la marque de leur génie littéraire.
Cependant l’affaire Dreyfus, à la fin du siècle, conduit les écri-
vains à réinvestir le champ politique: c’est l’invention de l’intellectuel,
qui peut intervenir au nom de ses compétences littéraires dans les
affaires de la cité où il défend la vérité et la justice. Zola en est le
meilleur exemple avec sa défense retentissante de Dreyfus, J’accuse
(1898).

4 Écrire aujourd’hui
L’écrivain reste aujourd’hui une figure importante de la vie publique.
Les auteurs ont ainsi accompagné le développement des médias de
masse au cours du siècle: ils peuvent parler à la radio ou à la télé-
vision de leur œuvre, voire participer au débat politique. La figure
de l’écrivain engagé reste en effet centrale tout au long du siècle: à
Zola succèdent Gide dénonçant le totalitarisme soviétique ou la colo-
nisation, puis Sartre prenant le parti de la classe ouvrière, ou Camus
mettant sa plume au service de grandes causes humanitaires. À la
fin du XXe siècle, Michel Foucault et Pierre Bourdieu, par la réflexion
qu’ils mènent sur les sociétés modernes, incarnent à leur tour cette
figure de l’intellectuel.

40 HISTOIRE LITTÉRAIRE

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