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LE CADRE JURIDIQUE DES JEUX D’HASARD ET DE PARI EN LIGNE EN TUNISIE

I- CADRE LEGAL

 Décret-loi n° 74-20 du 24 octobre 1974 relatif aux installations foraines, aux jeux de
salon et aux loteries.
 Décret-loi n° 74-21 du 24 octobre 1974, relatif aux jeux de casino;
 Loi n° 84-63 du 06 Août 1984, portant organisation et développement des activités
Physiques et Sportives (articles 67-70 relatifs à la création de la société de
PROMOSPOT)
 Le code des obligations et des contrats ;
 La loi n° 2002 62 du 9 juillet 2002, relative aux jeux promotionnels
 Loi de Finances 2021

II- ANALYSE

De prime abord, il est fort de constater, qu’en matière de jeux de pari ou de hasard, la position
actuelle est marquée par un décalage conséquent entre la pratique et le cadre légal actuel.
La situation actuelle en Tunisie est maintenue depuis des années à savoir l’interdiction de
toute forme de jeu ou de pari pour les ressortissants tunisiens, sauf pour les cas d’exceptions
expressément énoncés par les textes de loi.

Cependant, nous nous retrouvons de plus en plus dans la société actuelle et avec l’avènement
des nouvelles technologies, face à une société ouverte vers le monde où la notion de jeux en
en ligne devient un besoin imminent dont le cadre juridique demeure à déterminer.

Nous nous attarderons dans un premier temps sur le principe de l’interdiction des jeux de
paris et de hasard en Tunisie (I°) pour ensuite dresser un constat actuel de la pratique en la
matière(II).

I- Le principe de l’interdiction des jeux de pari et de hasard en Tunisie et


l’assouplissement prévu par la loi sur les jeux promotionnels

L’interdiction en matière de jeux en Tunisie puise son fondement dans les sources chaariques
qui interdisent explicitement toute forme de gain par voie de hasard ou de chance sans qu’il
en soit question d’effort physique ou mental de la part du joueur et interdisent également les
jeux de pari pour les mêmes raisons.

En effet, le décret-loi n° 74-20 du 24 octobre 1974 relatif aux installations foraines, aux jeux
de salon et aux loteries définit les loteries et les interdit dans son article 8 qui dispose: « Sont
réputées loteries et interdites comme telles :
les ventes d’immeubles, de meubles ou de marchandises effectuées par la voie du sort ou auxquelles
auraient été réunis, sous forme de concours ou autrement, des primes ou autres bénéfices dues au hasard
et généralement toutes opérations offertes au public pour faire naître l’espérance d’un gain qui serait
acquis par la voie du sort».

De même, ledit décret-loi n° 74-20 interdit dans son article 5 l’installation d’appareil
distributeur d’argent, de jetons de consommations et de manière générale de tous appareils
analogues dont le fonctionnement repose sur l’adresse, le hasard et qui sont destinés à procurer
sous quelques forme que ce soit , un gain ou une consommation moyennant un enjeu.

Il en est de même pour les jeux offerts par les casinos dans la mesure où il est interdit pour les
résidents Tunisiens d’accéder à ces casinos qui étaient strictement réservés aux non-résidents
étrangers et uniquement pour les casinos autorisés par le ministère de l’intérieur, à exercer
cette activité dans les complexes hôteliers ou d’animation tel que le précise l’article 1 et 2 du
décret-loi n° 74-21 du 24 octobre 1974, relatif aux jeux de casino.

Cette notion d’interdiction fut maintenue à travers les articles 1452 et suivants du code des
obligations et des contrats, dans la mesure où l’article 1452 stipule « Toute obligation ayant
pour cause une dette de jeu ou un pari est nulle de plein droit».

L’article 1457 COC a apporté une exception au principe d’interdiction énoncé par l’article 1452
COC, en stipulant : « Sont exceptés des dispositions précédentes les jeux et les paris ayant pour objet
les courses à pied ou à cheval, le tir à la cible, les joutes sur l'eau, et autres faits tenant à l'adresse et à
l'exercice du corps, pourvu:

1) que les valeurs ou sommes engagées ne soient pas promises par l'un des joueurs à l'autre ; 2) que les
paris n'aient pas lieu entre simples spectateurs».

Cette exception peut parfaitement servir à votre activité, si les jeux en ligne qui seront
exploités par la société auront des éléments liés à l’esprit, à l’agilité et/ou à des éléments
invoquant l’intelligence ou un savoir-faire.

Une autre exception au principe d’interdiction des jeux de pari et de hasard est celle du
monopole du pari sportif octroyé par l’Etat à la société de promotion du sport "Promosport"
qui est une entreprise publique chargée, en vertu de la loi n° 84-63 du 06 Août 1984, portant
organisation et développement des activités Physiques et Sportives de l'organisation des
concours des pronostics sportifs, des jeux et des compétitions et de toutes les opérations
assimilées qui ont pour objet la promotion des activités physiques et sportives par la
mobilisation de ressources financières au profil du fonds national de promotion du sport et de
la jeunesse.

Il appert du bilan actuel dressé, qu’aucun texte juridique n’a explicitement abrogé
l’interdiction en matière de jeu et de pari, pour les ressortissants tunisiens sauf exception
stipulée par des textes spécifiques.

Toutefois, un grand assouplissement a eu lieu depuis la promulgation de la loi n°2002 62 du 9


juillet 2002, relative aux jeux promotionnels, qui est actuellement le fondement des jeux en
ligne initiés par les marques et les agences de publicité.

II- L’état actuel de la pratique en matière de jeux en ligne en Tunisie :


Malgré une interdiction claire des jeux de pari et de hasard terrestres aucun texte spécifique
n’a traité expressément des jeux en ligne même si il semble avoir un nombre croissant de
joueurs tunisiens qui utilisent les plateformes de jeu international car le contrôle sur ces sites
est quasi inexistant.

La notion de jeu en ligne n’a toujours pas été définie dans un régime juridique spécifique, nous
nous nous retrouvons avec des textes de lois éparpillés qui y font référence mais sont en définir
réellement les spécificités.

Il existe actuellement plusieurs sites en ligne proposant des prestations de jeux de pari et de
hasard et proposant des solutions afin de jouer anonymement et en toute sécurité.

En effet aucune mesure n’a été prise par l’Etat Tunisien interdisant clairement aux
fournisseurs d’accès internet l’accès aux sites de jeu en ligne, de plus ces sites proposent des
solutions de contournement qui ont fait leur preuve jusqu’à maintenant comme la
recommandation de l’utilisation d’un VPN qui est un réseau privé virtuel pour accéder aux
casinos tunisiens et pour pouvoir jouer en toute sécurité.
Le VPN masque l’adresse IP, ce qui rend l’activité en ligne du joueur pratiquement
introuvable.

L’utilisation également de la cryptomonnaie comme le Bitcoin (BTC) et l’Ethereum (ETH)


sont également de plus en plus utilisées dans les casinos tunisiens. Ces monnaies numériques
sont idéales pour l’anonymat et dont la BCT n’a toujours pas fixé sa position sur leur statut
en Tunisie.

Il faut donc souligner que face à l’avènement de toutes ces nouvelles technologies, l’Etat
Tunisien est dépassé par toute cette apogée d’e-gaming et peine à instaurer un contrôle sur
ces nouvelles transactions transfrontalières.

C’est d’ailleurs dans cet esprit de tenter de maintenir le contrôle sur ce secteur des jeux en
plein essor que s’inscrit la disposition relative à la taxation des jeux de pari et de hasard, les
jeux de grattage, de numérique et les jeux de loto sur internet et les sites web qui a été prévue
par la loi de Finances 2021.

En effet, cette taxe est calculée à 15% de l’excédent brut d’exploitation (EBE) réalisé par les
organisateurs des jeux susmentionnés et dégagée par la comptabilité.

L’adoption de cette mesure s’inscrit dans le cadre de la lutte contre le phénomène des jeux de
paris parallèles et de l’amélioration des ressources budgétaires de l’Etat.

Nous nous retrouvons donc face à un état des lieux mitigé en la matière et une position à demi-
mesure de l’Etat qui semble à la traine en matière d’économie numérique.

Il est à noter, qu’en France, et conformément aux prescriptions du droit de l'Union


européenne, proposer des jeux de casinos (machines à sous, roulette ...) demeure interdit sur
internet et sanctionné pénalement, même après les modifications législatives de 2019, bien que
possible dans les casinos (Articles L321-1 à L321-7 du Code de la Sécurité intérieure (CSI)) et
les clubs pour certains jeux.
Pour conclure, nous nous sommes adressés à l’APII, l’agence de promotion de l’industrie et de
l’innovation qui nous a confirmé l’interdiction juridique de la création de société ayant pour
objet les jeux de pari et de hasard.

Nous avons remarqué également que la majorité de ces sociétés ont été constitué au niveau
des recettes de finances territorialement compétentes, sans passage par l’APII, ce qui les prive
des avantages fiscaux prévus par la loi sur l’Investissement et ses textes d’application.

Pour conclure, l’interdiction légale des jeux de pari en ligne et de hasard n’a toujours pas été
abrogée, mais l’exercice de cette activité a été contourné à travers des sociétés ayant pour objet
les activités informatiques diverses qui profitent du laxisme de l’Etat en matière de
règlementation du e-gaming.

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