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Bulletin Monumental

Otto Demus. Romanische Wandmalerei.


Francis Salet

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Salet Francis. Otto Demus. Romanische Wandmalerei.. In: Bulletin Monumental, tome 127, n°2, année 1969. pp. 177-179;

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BIBLIOGRAPHIE 177
Moyen Age, en Belgique comme en France. Félicitons M. Dev- de l'architecture vers 1710-1720 » (!), est bien banal. Mais
liegher et le conseil provincial de la Flandre Occidentale l'érudit comme le curieux trouveront à puiser abondamment
d'avoir mis tant de matériaux à la disposition des historiens. dans cette documentation de qualité et, souvent, d'une
Ne serait-ce qu'au titre d'instruments fondamentaux de indéniable beauté graphique.
travail, les deux volumes devraient notamment trouver place En résumé, un livre touffu, un peu difficile à consulter
dans toutes les bibliothèques d'étude du Nord de la France, malgré ses multiples index ( cette multiplicité est en soi, à
des pays riverains de la mer du Nord et de la Baltique. notre sens, une erreur), mais riche d'une sûre documentation
Pierre Héliot. écrite et graphique, fruit d'un travail considérable qui
profitera désormais à tous les historiens de Paris.
Jacques Silvestre de Sacy. Le quartier des Halles. Paris, Georges Poisson.
Le Temps, 1969, 15,5 X 24, 300 p., nombreuses
il ustrations. Otto Demus. Romanische Wandmalerei. Aufnahmen von
Max HiRMER. München, Hirmer Verlag, s. d. (1968), in-4°,
Les opérations d'urbanisme en cours dans le quartier des 239 p., 250 pi. en noir et Cil pi. en couleurs hors texte,
Halles ont provoqué, puisque l'édition, même érudite, est 74 flg., 2 cartes.
maintenant sujette de l'actualité, la parution de plusieurs
ouvrages. Nous avions eu en particulier, l'an dernier, les Voici un livre qui fera rêver les archéologues français et
Richesses d'art du quartier des Halles, de J.-P. Babelon, peut-être les éditeurs de notre pays, un ouvrage qui
M. Fleury et J. de Sacy, ouvrage volontairement limité à embrasse l'ensemble de la peinture murale romane de la
un inventaire précis. Le même de Sacy, reprenant le chrétienté occidentale avec un texte général et des notices très
sujet, nous donne aujourd'hui, avec Le quartier des Halles, un détaillées du professeur Otto Demus, assortis d'une
ouvrage plus détaillé. illustration qui provoque l'admiration par son importance
Trop, pourrait-on presque dire. L'auteur cède un peu à ce comme par sa qualité : M. Max Hirmer, son fils et sa fille
que l'on pourrait appeler la « méthode Hillairet », c'est-à- ont en effet exploré l'Italie, la France, l'Espagne,
dire une certaine tendance à glisser du particulier au l'Angleterre, l'Allemagne et l'Autriche pour prendre, dans des
général, ce dernier étant évidemment de notoriété publique. Par conditions souvent difficiles, d'extraordinaires photos des
exemple, si la localisation de certains épisodes de la vie de peintures les plus importantes. Le résultat de cette prodigieuse
Lavoisier dans le quartier des Halles est pleine d'intérêt, il enquête, c'est une suite de 250 planches en noir de grand
paraît en revanche inutile de rappeler les grandes étapes de format, 102 planches en couleurs — d'une remarquable
la vie de ce savant, faits que l'on trouve dans tous les fidélité — sans compter 74 images insérées dans le corps des
dictionnaires. De même peut-il paraître superflu de raconter à notices. On imagine aisément ce qu'il y a de proprement
nouveau les chapitres de l'histoire de France localisés dans exaltant à trouver rassemblé un tel répertoire de formes
ce quartier, par exemple un épisode de la Fronde. Il est romanes.
parfois dangereux de vouloir relier des études de détail à la On lira avec le plus grand intérêt le texte de synthèse du
grande histoire et de vouloir « raccrocher » des personnages professeur Otto Demus. Il y a là, à travers une constante et
obscurs à d'autres plus célèbres. En voici un autre exemple : précise richesse de l'information, une évocation magistrale
à propos des Saint-Simon de Sandricourt, qui habitèrent des problèmes généraux posés par la peinture murale romane
rue Montmartre, l'auteur ne manque pas d'indiquer leur à l'historien d'art. L'auteur a d'abord défini, mieux qu'on
parenté avec le grand Saint-Simon, et ne résiste pas à ne l'a jamais fait, la mission et la fonction de la peinture
l'envie de citer ce dernier. Or, quand les Sandricourt quittèrent monumentale. Le programme y paraît beaucoup plus strict
le quartier, l'auteur des Mémoires avait six ans. que dans le domaine de la sculpture — qui sera
Hâtons-nous d'ailleurs de dire que la plus grande part du particulièrement visée par la diatribe de saint Bernard : évocation de
texte est plus substantielle, riche en faits précis, bien la majesté divine dans l'abside, scènes narratives des deux
souvent tirés de pièces d'archives inédites : c'est la première Testaments dans la nef, « adaptées au rythme des pas »,
fois que l'on se livre à l'étude systématique de ce quartier, Jugement dernier au revers du mur occidental,
maison par maison. Il faudra désormais, pour toute étude représentation des légendes hagiographiques dans la crypte, tel est le
portant à l'intérieur de ce périmètre, commencer par ouvrir schéma intellectuel assez constamment suivi, dont M.
l'ouvrage de M. Jacques de Sacy. Peut-être l'auteur se sent-il Demus étudie d'ailleurs toutes les implications — rapports
d'ailleurs plus à son aise dans l'histoire foncière que dans avec la sculpture des portails par exemple — et, bien
l'histoire de l'architecture proprement dite : nous avons entendu, les exceptions qu'il peut comporter, sur le plan
relevé, à propos de la colonne de l'hôtel de Soissons, de la iconographique en particulier, avec la figuration de la Vierge
fontaine des Innocents, de la cour Batave et surtout de la à l'Enfant entre les symboles évangéliques, telle celle d'Aqui-
Halle aux blés (dont la coupole était de Bélanger), certaines leia. Il y a beaucoup à dire aussi sur le choix des couleurs,
hésitations. qui a valeur symbolique, notamment pour le fond bleu des
Un autre gros mérite de l'ouvrage consiste en l'originalité absides. Les édifices de plan central, baptistères, chapelles
de sa documentation. L'auteur a su rassembler des dessins funéraires, chapelles castrales, obéissent à d'autres règles, à
et gravures bien souvent inédits qui, complétés par des propos desquelles il serait trop long de suivre le professeur
photos prises sur place, apportent une documentation graphique Demus dans le développement de ses pertinentes remarques.
de premier plan. Peut-être dans ce domaine, pourrait-on Disons seulement que, pour clore ce premier chapitre, il
reprocher à l'auteur de vouloir trop prouver : l'enseigne du montre que la seconde moitié du xie siècle est un « temps
« cygne couronné » de la p. 142 n'est plus qu'un souvenir, et de préparation » où les influences préromanes et byzantines
l'hôtel de Vins, présenté comme « le plus beau témoignage coexistent sans se fondre, que la première moitié du xne siècle
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voit se créer une sorte de classicisme roman, que le troisième Loire, Saint-Aubin d'Angers, etc. ; en Espagne, Compostelle
quart du siècle verse, surtout en Allemagne, dans un certain Oviedo et Leon, Ripoll, Vieh et Barcelone ; peut-être
intellectualisme théologique et qu'à la fin du siècle de Winchester, Canterbury et Lewes en Angleterre ; la région mo-
nouvelles influences byzantines orientent la peinture sane, assurément; Reichenau et les grandes cités rhénanes,
occidentale vers une meilleure appréhension de la réalité concrète. ainsi que Soest, Hildesheim, Halberstatdt, etc. Mais il est
Les remarques sur le style ne sont pas moins importantes. évident que la recherche sur ce point ne peut être
L'histoire de la peinture décorative appliquée aux différents qu'approximative dans l'état actuel de nos connaissances.
membres de l'architecture romane, piliers, colonnes, murs, Du moins peut-on, et c'est un des grands mérites de
reste à écrire ; les vestiges sont aujourd'hui si rares qu'il est l'ouvrage, distinguer des styles provinciaux et en montrer les
difficile de préciser le rôle joué par le décor peint aux xie et rapports et les différences. Il est difficile de donner une idée
xne siècles. Plus difficile encore d'imaginer quel était exacte des analyses que le professeur Demus a développées
l'accord, évidemment étudié, entre peinture et vitrail. Du moins dans la seconde partie de son livre et qui constituent — pour
peut-on définir comment la lumière dispensée par les fenêtres la première fois — une histoire stylistique de la peinture


met en valeur les scènes peintes et aussi quel sens prennent romane en Occident. Ces chapitres abondent en aperçus
les architectures peintes, niches, arcades, etc., qui se originaux. L'importance de l'Italie, qui est « la clef » de cette
superposent, aussi bien en Orient qu'en Occident, à l'architecture histoire, est affirmée avec force dans des pages très
réelle, selon une convention intellectuelle qui mérite l'analyse. substantiel es sur les peintures de l'Italie du Sud, de Rome et de
Jusque vers 1150, la peinture monumentale d'Occident, l'Italie centrale, de Milan qui rayonne sur la Lombardie, le
à Saint-Savin par exemple, a ses racines dans l'art Tessin et le Piémont, de la Vénétie, de la région alpine enfin.
carolingien et ottonien : le corps tout entier participe aux gestes Pour la France, M. Otto Demus s'élève contre la distinction
des personnages ; il est d'ailleurs modelé en plusieurs parties trop simple entre fonds clairs ou foncés, puisque tel ensemble
et fragmenté « comme un corps d'insecte ». Cette stylisation comme Saint-Savin possède des peintures de l'un et l'autre
est particulière à certaine peinture de ce temps qui, le plus types ; mieux vaut ne pas tenter des classements qui restent
souvent, reste étrangère à la grandeur de l'art byzantin. arbitraires et réfléchir aux problèmes stylistiques, par
Mais en d'autres régions l'influence antique joue directement exemple au rôle joué dans l'éclosion de la peinture française
— en Italie à Civate et Anagni — ou par l'intermédiaire de par celle de l'Italie du Sud — à la faveur des pèlerinages?
Byzance ou même par l'appel d'artistes orientaux — au L'influence des œuvres « italo-byzantines » apparaît

mont Cassin et à Venise. On ne devra pas négliger non plus clairement — et elle est ici parfaitement analysée — dans l'abside
l'apport des mosaïstes venus de Constantinople — on pense

de Berzé-la- Ville, mais il est, selon moi, imprudent de


naturellement au décor de Cefalu et Monreale — dont conclure que nous en tirons quelque connaissance de la peinture
l'influence sera sensible jusqu'en France, en Angleterre et en qui décorait le cul-de-four de Cluny, Berzé en étant « la
Allemagne du Sud. Le professeur Demus n'oublie pas, clef », tout comme Sant' Angelo in Formis pour le mont
évidemment, d'évoquer le problème des rapports entre peinture Cassin; il est toujours dangereux de remonter d'une œuvre
murale et enluminure, dont les liens sont parfois attestés conservée à une œuvre disparue par le chemin de
par la chronologie des œuvres, parfois même laissent deviner l'affirmation d'une influence, voire d'une filiation dont nous sommes
l'identité d'une seule et même main. On devra prendre garde incapables de juger. Pour Saint-Savin, le professeur Demus
que la grande peinture a parfois précédé et influencé la met en lumière la diversité des manières qui se constate dans
miniature, à Echternach par exemple. Le plus souvent, la nef, peut-être peinte par quatre artistes différents, dans
néanmoins, l'enluminure apparaît plus diverse que la peinture, la crypte et dans le porche ; le peintre de la crypte serait,
laquelle était affaire de spécialistes qui n'étaient pas selon lui, un enlumineur du scriptorium de Sainte- Radegonde
confinés dans le scriptorium d'une abbaye : le fresquiste (wand- de Poitiers ; pour la nef, il ne faut pas négliger les
maler) était essentiellement un peintre itinérant (wander- rapprochements avec Tours et Angers, pour le porche avec
maler). Saint-Julien de Tours — dont la connaissance est d'ailleurs bien
A lire les textes, on constate en effet qu'il en fut souvent imparfaite. Quant à la peinture murale espagnole, on en
ainsi : le peintre Jean est appelé d'Italie à Aix-la-Chapelle, connaît assez l'originalité et la vigueur stylistique. Mais il
le Lombard Nivardus à Saint-Benoît-sur-Loire ; on peut est difficile de la dater. La consécration de Saint-Clément de
suivre l'itinéraire de certains peintres catalans. On constate Tahull en 1123 ne fournit qu'un repère approximatif. Le
que le décor de Vicq n'a pas son équivalent en Berry et martyre de saint Thomas Becket à Santa Maria de Tarrasa
pourrait être l'œuvre d'un Toulousain. Mais ces artistes donne une date postérieure à 1173. Mais la tradition de la
voyageurs devaient évidemment subir les contraintes locales. On peinture murale remonte dans la péninsule à l'époque wisi-
leur dictait le programme, on leur donnait souvent des gothique et il faudrait étudier plus qu'on ne l'a fait le rôle
modèles à traduire, des recueils de dessins à imiter, d'où parfois que les œuvres du califat de Cordoue ont pu jouer dans son
des figures identiques comme à Pürgg et Friesach. développement. Du moins peut-on saisir en Espagne des
L'exécution comportait une esquisse exécutée par des procédés personnalités affirmées : le Maître de Pedret, le Maître de
souvent géométriques ; on sait qu'il s'en est conservé Sorpe et de Santa Maria de Tahull, celui de Saint-Clément
quelques-unes, à Burgfelden, à Naturns par exemple. de Tahull qui connaissait les œuvres françaises, le Maître de
Il faut se persuader que les vestiges de la décoration peinte Maderuelo et celui d'Urgel. Vient enfin le domaine
du Moyen Age ne représentent qu'une infime partie de ce germanique, Allemagne et Autriche, sur lequel le professeur
qui a existé à l'époque romane, d'où la difficulté de définir Demus s'est longuement étendu, au point — mais il serait vain
les grands centres créateurs. Le professeur Demus l'a de lui en faire reproche —• d'inclure dans la peinture romane
cependant tenté : le mont Cassin, Rome et Milan en Italie, mais des œuvres purement gothiques, celles de Saint-Geréon et
peut-être aussi Aquileia, Vérone, Aoste (?) ; Cluny en de Saint-Cunibert de Cologne, de Krems sur le Danube ou
France, mais peut-être aussi Marmoutier, Tours, Fleury-sur- de la tribune occidentale de Gurk.
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A la suite de ce texte magistral viennent les planches dont qualité dans l'expression des visages. M. Gardet a donné,
je ne veux pas répéter qu'elles sont d'un intérêt passionnant pour chaque scène de la Vie du Christ, le texte évangélique
par les études comparatives qu'elles permettent. Pour les qui l'explique et une analyse stylistique qui prouve assez sa
archéologues français qui s'enferment encore si volontiers profonde connaissance de la peinture française et italienne.
dans l'hexagone, il sera peut-être instructif d'avoir en mains L'influence de Giacomo Jaquerio tel qu'il apparaît à Sant'
d'admirables images des peintures de Civate et de Sant' An- Antonio di Ranverso est naturellement sensible à
gelo in Formis, des diverses églises de Rome, d'Anagni, Lanslevil ard, et surtout celle de Canavesio qui a signé les fresques
d'Aquileia et de Castel Appiano, et les grands ensembles de Notre-Dame-des-Fontaines à La Brigue et une autre à
catalans, et les quelques œuvres de valeur conservées en Suse, non loin de Lanslevillard. Bien que la Légende de saint
Angleterre, et les cycles d'Oberzell, d'Idensen, de Brunsch- Sébastien paraisse un peu plus ancienne que la Vie du Christ,
wig, et plus encore peut-être les admirables fresques de M. Gardet hésite à les attribuer à deux ateliers différents,
Lambach découvertes récemment. car elles dérivent l'une et l'autre de l'art de La Brigue, mais
Des notices d'une impeccable précision éclairent ces adouci par une sorte de familiarité tranquille. 11 pense donc
planches et donnent tous renseignements sur l'histoire des que l'atelier de Lanslevillard comprenait plusieurs
œuvres. Sans doute pourra-t-on parfois discuter les compagnons ayant travaillé soit avec Canavesio lui-même, soit
affirmations chronologiques qui s'y trouvent, pour Saint-Pierre-les-
avec le maître qui l'avait formé.
Églises par exemple, dont le décor est rapporté au xne siècle, L'état de conservation des quarante sujets peints à
malgré les arguments épigraphiques assez forts qui ont été Bessans est malheureusement beaucoup plus précaire. Nombre
proposés en faveur d'une date nettement plus ancienne. Mais de scènes sont devenues illisibles. Il s'agit là aussi d'une Vie
il n'importe. Il reste que l'ouvrage de MM. Demus et Hirmer du Christ exécutée d'après les peintures de Lanslevillard par
représente un événement scientifique de première grandeur ; des artisans beaucoup moins habiles. L'art se fait ici
sa publication est de nature à donner un nouvel essor aux populaire, mais certains détails — - la colombe qui descend vers
études sur la peinture murale du Moyen Age et l'on souhaite Jésus lors de son baptême, l'extrême simplification des Noces
voir aboutir bientôt le projet d'une édition française d'un de Cana, les scènes champêtres qui accompagnent la
livre d'une telle importance. Tentation du Christ -— méritent d'être remarqués.
Francis Salet. Quant à la cathédrale de Saint-Jean-de-Maurienne, on

sait qu'elle conserve deux fresques récemment découvertes.
Clément Gardet. De la peinture du Moyen Age en Savoie. L'Ensevelissement du Christ est l'œuvre d'un grand peintre
II : Peinture murale en Maurienne. Préface de Marc Thi- travaillant dans la tradition flamande, mais il serait
bout. Annecy, éd. Gardet, 1966, in-fol., 112 p., 56 fig. en aventuré de prononcer un nom. L'Annonciation, dont les deux
couleurs. personnages encadrent dans le bas-côté nord une fenêtre
grillagée, montre au-dessous un semis de marguerites blanches
Le premier tome du grand ouvrage de M. Gardet, recensé sur fond bleu-noir. M. Gardet se demande s'il ne faut pas
par M. Thibout ici-même (Bulletin, 1965, p. 355), traitait de voir là une allusion à la duchesse Marguerite d'Autriche et
la peinture en Savoie du xie au xve siècle. La suite intéresse si la peinture n'a pas été commandée soit par la duchesse
la peinture murale en Maurienne, qui se réduit d'ailleurs à elle-même, soit par le cardinal de Gorrevod, évêque de
trois ensembles : Lanslevillard, Bessans et Saint-Jean-de- Maurienne de 1499 à 1540, dont on sait les attaches avec la
Maurienne. L'ouvrage est aussi beau que le précédent par maison de Savoie.
la qualité de sa typographie et par l'excellence de ses images Francis Salet.
en couleurs qui donnent une idée très juste et très complète
des peintures étudiées par l'auteur. Elisabeth von Witzleben. Les vitraux des cathédrales de
On sait l'importance dans l'histoire de l'art des deux cycles France. Paris, Bibliothèque des Arts, 1968, 0,32 X 0,23,
— légende de saint Sébastien et vie du Christ — exécutées 259 p., 90 ill. en noir, 40 pi. hors texte en coul.
à la détrempe dans la petite église Saint-Sébastien de

Lanslevillard. Elles sont admirablement conservées et la La somptuosité de cet ouvrage non seulement mérite tous
fraîcheur de coloris en est étonnante. Pour la date de ce décor, les éloges, mais force l'admiration. Toutes les techniques les
on ne peut retenir ni celle de 1446, gravée sur une pierre plus modernes ont été requises pour offrir au lecteur un
à l'entrée pour indiquer sans doute l'année du début des ouvrage hors de pair : qualité du papier, beauté des caractères
travaux, ni celle de 1518 qui apparaît sur une solive. L'œuvre typographiques, présentation générale sont un fait trop peu
peint de Lanslevillard remonte certainement aux dernières courant pour qu'ils ne soient pas soulignés. Mais c'est surtout
années du xve siècle. l'abondance et la perfection des illustrations tant en noir
Les épisodes de la Légende de saint Sébastien, souvent qu'en couleurs qui ont droit à des louanges sans réserve.
illustrée dans la région des Alpes — à lvrée, à Pianezza — Les reproductions sont d'une fidélité admirable qui ne laisse
ont été transcrits en dix-sept petits tableaux rectangulaires échapper aucun détail. Quant aux planches en couleurs, le
alignés côte à côte sur trois registres ; des inscriptions très procédé adopté permet de rendre la luminosité du vitrail et
explicites permettent d'identifier les scènes. La Vie du Christ de reproduire avec exactitude la teinte de chaque morceau
est disposée de même façon et s'étend de l'Annonciation à de verre. 11 nous faut donc féliciter la technique de l'édition
la Pentecôte, avec le curieux et apocryphe Miracle du blé allemande à qui est due la réalisation totale de cet ouvrage
au cours de la Fuite en Egypte. Au total, trente-six tableaux. (Production Multi. Druck à Augsbourg), d'être arrivée à une
L'œuvre, qui dérive pour l'iconographie des ensembles réussite aussi totale.
prestiigeux de Duccio et de Giotto, n'est pas sans gaucherie, C'est à Mme Elisabeth von Witzleben qu'a été confié le
ayant été exécutée par un atelier provincial ; elle a soin de rédiger pour ce magnifique album de planches une
néanmoins beaucoup de charme et de saveur et une remarquable introduction qui comprend environ qnatre-vingts pages.

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