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XVII-XVIII.

Bulletin de la société
d'études anglo-américaines des
XVIIe et XVIIIe siècles

Vaughan, Herbert et la rhétorique de répétition


Gilles Mathis

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Mathis Gilles. Vaughan, Herbert et la rhétorique de répétition . In: XVII-XVIII. Bulletin de la société d'études anglo-américaines
des XVIIe et XVIIIe siècles. N°18, 1984. pp. 9-44;

doi : https://doi.org/10.3406/xvii.1984.1032

https://www.persee.fr/doc/xvii_0291-3798_1984_num_18_1_1032

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- 9 -

VAUGHAN, HERBERT ET LA RHETORIQUE DE REPETITION

0 ï 'tû> an 2jcu>y thing I vûâJUL no tongoA


To lOHÂXe. and 6lng ; 6 pin.
But to wiÂto. tswui, un^dignad vqaah rTA1 v »
U \)QAy hajid /... tidie. verse j
(Anguish)

La Renaissance anglaise, de Spenser à Milton, est agitée par le


grand débat qui oppose poésie profane et poésie religieuse. Ce débat,
ressenti à des degrés divers selon les milieux littéraires, les périodes et
les sensibilités individuelles, a pour toile de fond une série
d'interrogations sur la nature de 1 ' inspiration (divine ou naturelle ?) , le rôle
et la fonction de la poésie dans la vie sociale, morale et spirituelle,
plus particulièrement dans ses rapports avec la V/vérité.
Si la première épigraphe ci-dessus évoque les tensions qu'elles
font naître, la seconde témoigne des conversions qu'elles suscitent,
notamment chez des poètes "métaphysiques*1 comme Donne, Herbert et Vaughan, et
du désir d'un changement de ton et de style, sans cesse affirmé au XVI le
siècle qui se traduira par l'avènement du "plain style" et le déclin d'une
rhétorique "facile", pour faire écho à vaughan.

N.B. : Afin de faciliter la lecture du texte, les Recueils de poèmes sont


soulignés d'un trait continu ; les poèmes extraits de ces Recueils,
d'un trait discontinu.
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De même, si les deux Jordan de Herbert semblent condamner la Muse


et la Rhétorique, les deux sonnets qui ferment les portes du Temple comme
un diptyque revendiquent le droit pour le poète, "secretarie of (his) Praise"
- comme tout homme - de chanter en vers les louanges du Seigneur ^ J .
Dans l'espoir de dégager quelques constantes du style de Vaughan,
un style difficile à cerner parce que très imitât if et peu marqué, il m'a
paru intéressant d'explorer la façon dont le Silure a, sinon vécu du moins
perçu, les tensions qui opposent poésie et religion, rhétorique et vérité,
en limitant cette enquête aux figures de répétition (schemes et autres) ,
domaine négligé par la critique, plus volontiers portée vers l'analyse des
images et des tropes chez Vaughan C2") .

Il y avait au moins deux façons de procéder : ou bien comparer les


poèmes profanes et les poèmes religieux de Vaughan, ou bien comparer le
Vaughan de Silex Scintillans avec un autre poète, le Herbert de The Temple,
par_exemple._C'est la seconde solution qui a été retenue. Tout rapproche
les deux oeuvres. Silex Scintillans, on le sait, est la suite naturelle de
The Temple (jreme sous-titre, même inspiration, mêmes thèmes) et l'imitation
devient parfois franchement pastiche (The_Wreath, Loye-sick) ; d'autre
d'autre part, si le nombre de poèmes diffère sensiblement (131 pour les
deux parties de Silex Scintillans contre 1 65 pour The Temple) , celui des
vers est tout a fait comparable (autour de 5200 contre 5400,
respectivement) (3).
Le jugement apparemment surprenant de Pettet selon lequel Herbert
serait moins "rhétorique" que Vaughan montre une fois de plus que les
critiques ne parlent pas toujours le même langage. Il n'est donc pas
inutile d'énoncer brièvement, en prenant le risque de la banalité, les
présupposés qui sous -tendent cette étude et d'apporter quelques précisions
terminologiques.
11 Houses are built by rules", nous dit Herbert J ; il en va de
même pour les temples... et les poèmes. La poésie est "un cri, mais... un
cri habillé", nous rappelle à peu près en ces termes le Max Jacob du Cornet
à dés, et un Vaughan, pas plus d'ailleurs qu'un poète contemporain, ne
pouvait ignorer les Byl˧ JïQîLLessons de son art ^ qui obéit notamment à
- 11 -

deux grands principes de composition : parallélisme et, à un moindre degré,


symétrie. Ce sont principalement la prosodie, le mètre et la rhétorique
qui prennent en charge l'élaboration formelle du message poétique, mais le
terme de "rhétorique" appelle une précision. Tantôt il désigne l'éloquence
oratoire, l'art de convaincre et de persuader (ce que la rhétorique était
à l'origine), par l'éclat de la pensée, l'élévation du ton et l'énergie du
verbe (dont la manifestation extrême est l'invective) et tantôt il définit
l'art d'écrire (ars bene dicendi) et plus particulièrement un mode d'expres-
sion caractérisé par la fréquence des figures, tropes ou schemes w
(7) .
En poésie comme en réthorique la "répétition" joue un rôle
privilégié mais ce terme est lui aussi ambigu et peut renvoyer à des phénomènes
stylistiques assez différents. Dans ce travail, il faudra entendre par
"répétition" le retour libre ou construit d'un même terme (rime du même au
même) ou d'un dérivé (rime derivative considérée ici comme synonyme de
polyptote, pour simplifier) ou la reproduction parfaite ou partielle d'un
son, de préférence un écho syllabique (sauf pour l'allitération) ; d'un
côté, par conséquent, des figures lexicales (mettant en jeu des lexemes)
et de l'autre des figures phoniques ^f 81 .
Parmi les figures lexicales, auxquelles se limite cette étude, les
théoriciens distinguent parfois entre les retours non construits : épizeuxe
ou reprise immédiate avec pause faible (A, A. ..), épanode (ou ploque) avec
répétition multiple en diverses positions du lexeme de base, antanaclase ou
reprise du même mot avec changement de sens, et les retours construits :
anaphore (A , A ) , épistrophe (figure inverse : A, A) , la
combinaison des deux ou symploque (A B, A B) , épanalepse ou figure
polaire (A A), anadiplose ( A ; A ) qu'il ne faut pas confondre
avec l 'épizeuxe C9) et la concaténation ou anadiploses en chaînes. Le
terme de "schemes" est alors réservé aux retours construits, pour les autres,
on parle volontiers de "répétition libre" ^1U^. Toutefois, dans la mesure
où 1' épizeuxe dessine tout de même une figure précise attestée dès
l'origine, par tous les traités de rhétorique, il semble plus logique de
désigner par "répétition libre" tout retour plus ou moins différé n'occupant
aucune des articulations majeures du vers (début, milieu ou fin).
En accord avec une loi esthétique universelle, les (vrais)
artistes recherchent la variété dans l'unité, "to make the musick better"
(Herbert : TheJTeimoer^I) , par conséquent, comme le rappelle si justement
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Morier, les figures de répétition "se meuvent dans un climat de varia-


tio" . Il en découle un principe méthodologique : l'analyse de ce que
l'on pourrait appeler les "techniques de rupture" des schémas canoniques ne
peut être que comparative (la pratique de X est plus ou moins déviante que
celle de Y) .
En dehors des fonctions proprement rhétoriques (persuasion et
embellissement) , les figures de répétition remplissent des fonctions
architecturales (liaison, enchaînement des vers et des strophes, structuration du
poème), musicales (rythme, mélodie) et amplificatrices (soulignement du
sens). S'il est vrai qu'on peut invoquer pour certaines figures des
constantes stylistiques il est peu prudent d'attribuer aux tropes comme aux
schemes des vertus esthétiques fixes et univoques ri?") ; seule, l'analyse
stylistique en contexte, tenant compte notamment de l'interaction des
différents niveaux d'expression déterminera le mode de fonctionnement de la
figure et les effets qu'elle produit.
Il est fréquent d'identifier rhétorique et complexité. Rien n'est
plus trompeur. Larrhétorique peut- devenir une mécanique simpliste ,-une^
sorte d'écriture automatique où l'artifice remplace l'art, c'est en ce sens
que "It is an easy thing/To write and sing", comme dit Vaughan. Il vaut
mieux parler de complexité dans le cas de certaines figures ou d'effets
particulièrement élaborés : symétries recherchées, entrelacement de figures,
par exemple. Le nombre des figures, en soi, n'est pas non plus un indice
de complexité.
Rhétorique et stylistique ne sont pas les noms différents d'une
même discipline (13)J .
Dans l'analyse stylistique, les oeuvres mineures ont une fonction
heuristique qu'il ne faut pas négliger.
Le style d'un auteur se définit autant par les procédés qu'il
rejette que par ceux qu'il adopte.
Cet essai est avant tout descriptif .Le recensement des
figures permettant de confronter les deux pratiques sera suivi de l'analyse
comparée de quelques poèmes de Herbert et de Vaughan. La conclusion abordera
brièvement le domaine interprétatif.
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II

VUE V ENSEMBLE

Les poèmes lyriques de Vaughan sont en général plus longs que ceux
de Herbert (38 vers contre moins de 27) *• , mais les poèmes longs de
Herbert sont plus longs que leurs analogues chez Vaughan.
On ne retrouve pas dans Silex Scintillans les recherches
linguistiques et prosodiques de The Temple, comme :

. les calligrammes ou vers rhopaliques ("pattern poems") de Altar


et Easter Wings.

. des enchaînements comme la reprise du dernier vers d'une strophe


dans la suivante (Sinnes Round, agrémenté de l'épanalepse encadrante des
premier et dernier vers), ou la reprise de groupes syntaxiques d'une
strophe à l'autre, comme dans Businesse (vers 6 à 33).

. une anagramme comme dans le poème du none nom ("Mary /army") ,


pratique d'ailleurs ccndannée par Cowley dans sa célèbre ode O£_Wit (vers 144).

. un poème entièrement inspiré par un jeu de mots sur un nom


propre (Jesu) .

. un jeu linguistique comme dans Çoloss^^^ où une lecture en


diagonale du premier au dernier mot livre la devise "My life is hid in Him
that is my treasure", écrite en surimpression sur le poème.

. des jeux de rimes comme ceux de Paradise, ou encore de Aaron où


les fins de vers reprennent les mânes mots de strophe en strophe , dans le
même ordre.

. les symploques structurantes de The Pearl ("I know/Yet I love


thee") , Sighs_and_Grones ("0 do not., .me") , Mortification ("when... death"),
yertue ("sweet/must die") plus ou moins régulières et continues, ou même
une symploque horizontale comme dans le vers : "Wit fancies beautie ;
beautie raise th wit" (Love_I^ v. 5) .
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. une épanalepse strophique régulière comme dans la première


strophe de A_True_Hvmne ("My joy, my life, my crown11}.

. des poèmes aussi mécaniquement structurés que The_Call et Justice


I.

. des entrelacements de figures (où le chiasme domine) comme dans


Çl§§EÎ5S_2f _y§£^§ » dont la fonction est peut-être aussi de suggérer
l'image des mains jointes ?

. des "echo-poems" comme Heaven (mais il s'agit d'une parodie J .

Même s'ils ne concernent que le domaine restreint des procédés


itératifs, dont certains trahissent une certaine tendance maniériste chez
Herbert, ces nombreux exemples fournissent déjà une première indication :
l'auteur du Temple semble plus disposé à sacrifier à la rhétorique que son
disciple. Mais il y a d'autres indices.

REFRAINS ET ANAPHORES STRUCTURALES :

II n'y a chez Vaughan aucun refrain alors qu'ils sont relativement


nombreux chez Herbert. Selon l'ampleur (un mot, un groupe, un vers) et la
modalité du retour en fin de strophe (continue ou discontinue) , on peut
distinguer dans The Temple six groupes de poèmes à refrain qui se recoupent
en partie :

. groupe I : retour parfait : Grace, Antighon_I, Home (refrain de


deux vers, dans ce dernier), The_Posie, auxquels on pourait ajouter The
Sacrifice, dont la rupture du vers 216, annonçant la variation finale,
passe presque inaperçue dans ce long poème, et The_Church_Militant , malgré
les intervalles irréguliers qui séparent les retours.

. groupe II : rupture d'un refrain parfait dans la dernière


strophe : The_ Sacrifice, The_Pearl, The_Quip, ou partiel : Vertue, Dotage^

. groupe III : variation interne du "refrain" mais les derniers


mots ne changent pas à la fin des strophes : PraissI et Praise III ("more",
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dans les deux cas), Unkindnesse Cas I use Thee", précédé dans quatre
strophes sur cinq de "... use a friend"), Mortification ("death", avec deux
retours étoffés : "house of death") , Dotage ("here") , Easter_Wings (". . .
the flight in me"), auxquels s Ajoute le cas particulier de Aaron ^ .

. groupe IV : refrain discontinu : Sepulchre ("thee" dans quatre


strophes sur six, mais rupture largement compensée par la triple rime du
même au même sur "thee" des vers 13 à 15 et les échos sémantiques et
phoniques externes et internes, notamment sur "stones" et "hearts" qui font
penser à l'emblème de Silex Scintillans) , Deniall, et si l'on veut The
Sacrifice .

. groupe V : double refrain : Praise_II ("thee"/"me", avec rupture


aux vers 22 et 24), Loye_Unknown ("I sigh" et "Your heart was... I fear").

. groupe VI : refrain en libre répétition : The_Forerunners

Le seul poème de Vaughan qui se rapprocherait des refrains de


Herbert est peut être Çomei_come2_what_do_I_here ?, mais le thème apparaît
dans le premier vers et s'il revient régulièrement dans les trois strophes,
il s'agit exclusivement de retours internes (5ème vers pour chacune).
Si l'on ajoute aux refrains, les anaphores structurantes strophi-
ques (retours parallèles dans le premier vers de chaque strophe,
symétriques du refrain) et internes (autres retours) et les curiosités prosodiques
évoquées plus haut, on peut dresser la liste des poèmes les plus
rhétoriques de The Temple, du point de vue des figures de répétition :

. refrains : Grace, Antiphon_I, Home, The_Church__Militant , The


§§çri£îç.Ë> îl}Ë_E2§iË> î1}é_Eë§i1> YËïîyË» Tl}Ë_QyiE> D°.tage, ?i5i5Ë_ï> ïï
et ïïï> yD^indnesse > Mortification , Easter__Wings , Deniall, Loye^Uriknown,
y ^§125» s°it 21 poèmes.

. anaphores : un premier groupe de poèmes se détache nettement :


H}Ë_Çall, D22™sdaY ("Come away" plus "make" dans trois strophes), The
ïnYîî§îî2n ("Come ye hither all", plus "Here is", vers 22 et 28, en écho
au vers 4 qui suggère l'équation : "God = joy = love"), Justice_I, Çharms
and_Knots (tous les "Who" des six premiers couplets avec reprise dans le
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vers final) , Çonstançie ("Who" et dérivés en retours stricts et insistants) ,


Clasj3ing_qf_hands (les deux dernières rimes de chaque strophe reprenant
dans le même ordre puis dans l'ordre inverse les derniers mots des deux ana-
phores structurantes), The _Thanks giving ("Oh King", "Shall I", "If thou
dost give me", "I will") ; viennent ensuite des structurations moins
insistantes mais. perceptibles : Discipline ("Throw away thy...", "Though I...",
"Love is..." et reprise espacée de "Throw, away thy..."), Çusinesse
(combinant anaphores horizontales, prosodiques en début de vers, internes avec
enjambements d'une strophe à l'autre, comme aux vers 11-2, 16-7, 19-20), The
Quidditie ("No, no, nor" et "It", en début de vers), T£eJTejT£er_I ("How
should", les trois "sometimes" des vers 6 à 8, "0 let me", vers 17-8, "thy",
vers 26-7), Bitter- Sweet ("I will", des vers 4 à 8) , The_Familie (surtout
la première strophe : "What doth... As if/What do... As if" et les trois
"This" et dérivés de la dernière, Eghes. 4L30 ("Grieved for...", les trois
"weep" et dérivés des vers 7 à 9, les "Cry" des vers 14 et 15), Mattens
(vers 5 et 9 , retour parfait mais structuration discontinue du poème) , A
Dialogue-Antheme-("Alas-poore. . .", "poore Death", avec~décalage_ de-position,,
et l'anaphore horizontale "Thou" du dernier vers.), soit 17 poèmes.
Au total, en comptant les cas particuliers comme Altar, Easter-
Wings, Je su, Coloss. 3.3., Anagram, Paradise, A Wreath, on constate qu'au
moins 45 poèmes sur 165, soit plus de 271, de The Temple attirent
l'attention par leur caractère particulièrement élaboré et parfois très artificiel,
ce qui ne manque pas de surprendre chez un poète épris de simplicité.
En revanche, les poèmes "rhétoriques" de Silex Scintillans sont
beaucoup moins nombreux et ne mettent en jeu que l'anaphore, hormis les
deux pastiches de The Wreath et Love-sick :

. un petit groupe se signale, rassemblant The Book ("Thou knew'st


this... when", avec retour interne au vers 23 et rupture partielle au vers
25, compensée par l'anaphore interne chevauchant trois vers : "When thou
shalt"), Dressing ("Thou", pour la première partie, "Give..." pour la
seconde), Righteousness, le pendant du Constancie de Herbert, mettant en
jeu les mêmes lexemes ("Who" et son dérivé "Whose"), Anguish ("My God",
"I bow my...", et les "0 !", si fréquents chez Vaughan, tandis qu'au vers
19, "0 my God", semble vouloir réunir les deux anaphores structurantes
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principales "My God" et "0").

. un second groupe rassemble des poèmes partiellement structurés,


où dominent les deux premiers : ÇaY_of_Judgment (les "When" et "And" de la
première partie, des vers 1 à 24), Praise (série. d'anaphores structurant les
huit premières strophes dans ce poème sur lequel nous reviendrons) , Çhrist^s
Nativity ("Awake", "I would I"), And_dp_they_ so ? ("And", "Can", "They",
pour la première strophe, "Or" pour la seconde, "0 brook it not" pour la
dernière avec l'écho "0 let not me" qui répond au vers 19, par une anaphore
à distance avec légère variation syntaxique) , The^Palm^Tree (essentiellement
les "Here" des trois dernières strophes, étoffés par "is" dans deux cas),
The_Ass (les "Where", "Let me...", "When" en retours plus ou moins espacés),
The_Passion, qui sera commenté plus loin avec son jeu sur les "What didst"
et "How didst", Loye^and^iscipline (la figure encadrante "Since... blest
be..." des deux premières strophes qui se rapproche de la symploque, les ana-
phores horizontales et verticales de la troisième strophe, l1 anaphore
prosodique irrégulière "And work" /"The work", des vers 14-5, et le poème se
termine par le jeu de mots "year... ears" en figure construite selon le
schéma du vers léonin) , et pour finir : Çomei_comei_what_do_I_here ?

Ainsi, en comptant The_Wreath et Loye-sick (commentés plus loin),


15 poèmes seulement sur 131, soit moins de 121 (contre 271 pour Herbert)
retiennent l'attention par leur caractère plus ou moins construit, mais
comme nous le verrons à l'occasion de certaines analyses détaillées, la
structuration anaphorique de ces poèmes est beaucoup plus souple que dans The
Temple .
Une remarque s'impose : deux poèmes seulement (The Book et And do
theY_so ?) parmi les meilleurs de Silex Scintillans figurent dans cette
liste, et certains comme Morning-Watch, TheJVaterfail , Xhey_are_all_gone . . . ,
J°.Y._°.fJDiLlîf é > pour ne citer que quelques exemples, sont totalement ou
presque dépourvus de répétitions lexicales.

FIGURES ENCADRANTES :

L'emploi de ce procédé de structuration partielle ou totale des


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poèmes qui repose sur le retour parallèle ou symétrique d'un mot ou d'un
groupe de mots du premier vers dans le dernier (en position initiale ou
finale), est l'indice sûr d'une conscience artiste.
Bien qu'il s'agisse d'un procédé relativement rare, au moins une
dizaine de poèmes de The Temple le mettent plus ou moins à contribution :
Jystice__I et Sinnes Jtound (ce dernier sur le thème du "Mea culpa. . . mea
culpa") qui reprennent tout un vers, An_Qffering (reprise en variatio en
début de vers de "Come, bring thy gift. . . ") , §ighs_and_Grones ("me /me",
repris aussi en figure encadrante dans chaque strophe) , Discipline ("throw
away thy rod" et "throw away thy wrath" repris en fin de poème avec
décalage d'un vers)/ Jesu (figure symétrique parfaite), A_Wreath (figure
parallèle parfaite sur le mot-clé du poème : "praise", structure renforcée par
la reprise en chiasme dans les derniers vers des quatre premières rimes :
"praise, give, wayes, live" revenant en "live, wayes, give, praise",
guirlande bien bouclée en vérité) , Antinhon_II (figure encadrante plus étoffée
encore sur le même thème : "Praise be the God", mais irrégulière, le
retour intervenant dans l'avant-dernier vers), The_Bag_ (figure symétrique et
reprise en chiasme : "Away despair... despair, away") Home ("Corne" repris
en figure symétrique au vers 75, juste avant le refrain, effet redoublé
par le scheme encadrant également symétrique de la dernière strophe sur le
même mot : "Corne... corne").
On peut ajouter à cette liste deux cas particuliers : The_Odour,
où une figure encadrante structure chacune des six strophes ("My Master",
qui reprend en agencement vertical la répétition horizontale du premier
vers, "minde", "thee", "before", "sweet", "me") et The_Method, avec la
"figure" encadrante antithétique : "Poore heart, lament /Glad heart rejoyce".
Deux poèmes seulement de Silex Scintillans présentent une figure
encadrante nette, parfaite dans Trinity-SundaY ("three", thème clé du
poème), légèrement irrégulière dans Dressing ("0 thou. . . thou"). Psalm
204, comme AntiDhon_II de Herbert propose un retour irrégulier dans
l'avant-dernier vers mais lui ajoute des variations syntaxiques : "Up, 0 my
soul, and bless the Lord... 0 my soul bless thy Lord !", vers 1 et 95 ;
et ses "saint" évoque à peine le scheme encadrant *•f 1 8")J .
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EPUEUKES

Au sens strict, cette figure exige le retour immédiat du thème mais


Fontanier admet implicitement une reprise légèrement décalée C19") ; dans
les deux cas, l'épizeuxe, au contraire de l'anadiplose, forme une unité
rythmique homogène (rythme ascendant ou descendant). C'est la figure de
répétition la plus simple, la plus spontanée aussi et il n'est pas
indifférent de constater que Vaughan en fait un usage beaucoup plus fréquent que
Herbert. Un relevé exhaustif pour les deux recueils donne les chiffres
suivants : Silex Scintillans : 35 poèmes concernés, 45 figures dont 35
régulières (reprise immédiate) ; The Temple : 16 poèmes, 20 figures, dont 11
régulières, pour un nombre de vers supérieur (200 de plus dans The Temple) .
En voici la liste :

The Temple :

. même épizeuxe dans plusieurs poèmes : The_Sacrifice , Home ("away,


away", respectivement vers 102 et 33-34, avec enjambement pour ce dernier),
The_Dawning ("arise, arise", vers 13, en écho à The_Sacrif ice , vers 33),
ÏÏË-ïï^sgiving ("My God, my God", vers 9 et The_Sacrifice, vers 213 et
215).

. autres exemples : Praise_I (". . . much, much...", dernier vers), The


Forerunners ("See, see", vers 1), Sinnes_Round ("Sorry I am, my Lord,
sorry I am", vers 1), The_Odour ("... my Master sound ! My Master !", vers
1), Miserie ("... a foolish thing, a foolish thing", vers 2 et "there,
there", vers 44), Christmas ("my deare,/My dearest Lord", vers 5 et 6, avec
enjambement), The Search ("Whither, 0, whither", à l'ouverture), The
EliÉ5î!}22^ ("••• Pure things, most pure", vers 27), et trois retours en
chiasme, dont deux avec enjambement : BËEerrtanœ ("my sinne is great ;/
great is my sinne.", vers 1 et 2, Assurance ("spitefull bitter thought !/
Bitterly spitefull thought !", avec variation syntaxique, vers 1 et 2) ,
Hope ("l 'le no more, no more l 'le", vers 7), Deniall ("Come, come, my God,
0 come", vers 14).
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Silex Scintillans :

. même épizeuxe dans plusieurs poèmes : Content, Af f liçtion_l , The


Check ("peace, peace", tous à l'ouverture) ; Idle_Verse, And do they_so_?,
St_Mary Magdalen C!lgo, go", respectivement, vers 1 avec retour parallèle
strict au vers 21, vers 9 et vers 69, avec une légère variation : "Go,
leper, go") ; Easter=Day et 1 'Envoy ("arise, arise", vers 13 et 7), The
Call ("awake, awake", vers 5, cf. Easter-Day, v. 5 et 9) , Rainbow et
Lovesick ("foul, foul", vers 26 et 14), The_Passion et The_I^elling=Place
("My dear, dear God", vers 2 et 11), Çome2j:ome^jtfhat_do_IJiere ? et The_
Burial (avec quatre occurrences en "quasi-refrain" de "Corne, corne", pour
le premier et un retour en chiasme pour le second, "Lord corne, 0 corne
Lord", en clôture de poème), Religion et The__Proffer ("No, no", vers 29 et
31).

. autres cas : Palm-Sunday ("put on, put on your best array", vers 7),
D§Z_2f_Jyç[gment ("prepare , Prepare me", vers 29 et "Give me, 0 give me",
vers 33), The_Search ("Leave, leave", vers 75), The_Seed_Growing__SecretlY
("My dew, my dew", vers 5, avec un jeu de mots possible, dans le contexte
avec "My due, my due !" ?), The_British__Church ("Haste, hast my dear", vers
5), The ǧX_of_Judgment ("Descend, descend", avant-dernier vers), Begging
II ("most, most", vers 10), Love^sick ("ever, ever", dernier vers), The
Ç2n5ÎËl!§£i2n ("much» much more", vers 28) , Psalm_65 ("purge them, purge
them", vers 8), Misery ("still thine /Still thine", avec enjambement, vers
90-1, et "0 hear my God, hear", vers 105), WMte_Sunda£ ("thy own/Thy own",
avec enjambement, vers 29-30 et un retour différé mais qui respecte le
ton de la figure : "refine us with thy fire ! Refine us", vers 61-2), c'est
aussi le cas pour une série de poèmes qui présentent quelques légères
variations syntaxiques : Psalm 104 ("how great, how very great", vers 2),
The_Ass ("0 then, just then !", vers 53), The_Query ("Tell me, 0 tell",
vers 9), The_Match ("my blood/My fierce, wild blood", vers 3-4, avec
enjambement), The_Relagse, avec une variation syntaxique comparable ("thy love,
thy rich, almighty love", vers 5), To_the_HolY B^l2 ("Farewell 0 book of
God, farewell", dernier vers), Mount of Olives II ("thy name to sing/Thy
glorious name", avec enjambement, vers 24-5, figure qui relève aussi de
la correctio rhétorique) ^ ^ .
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La comparaison des deux pratiques appelle les commentaires


suivants : Herbert et Vaughan, comme tous les poètes, ont recours à la
variation rythmique qui consiste à intégrer le second terme de l'épizeuxe dans
un groupe syntaxique plus large (voir respectivement, The_Search, Deniall,
The Forerunners et Palm- Sunday, Day of_____
Judgment, Psalm 65, Begging II,
pour ne citer que quelques exemples) ; le cas inverse où c'est le
premier terme qui est syntaxiquement étoffé est plus rare, surtout chez
Vaughan eu égard au nombre élevé d'épizeuxes (The_Odour, The priesthood,
et Misery, vers 105, Whi_e_SundaY, vers 61-2, To_the_Holy_Bible , Mount_of
Olives_II) . Les deux poètes développent parfois la figure sur deux vers
(Regentance, Christmas, Home, Assurance, pour Herbert ; Misery, The_Match,
Vaughan).

Décharge affective qui libère les tensions, l'épizeuxe trouve une


place naturelle à l'ouverture des poèmes lyriques et dramatiques et Vaughan
comme Herbert pratiquent l'épizeuxe. d'ouverture, avec des effets différents,
toutefois, comme nous le verrons présentement.
L'un comme l'autre, en une occasion, utilisent l'épizeuxe pour un
effet structurant (Çome__come__what_do_I_here ?pour Vaughan et Sinnes
Round, pour Herbert ; retour en quasi-refrain à quatre reprises, pour le
premier comme on l'a vu, et figure symétrique encadrant le poème, pour le
second) , mais il faut reconnaître que la modalité des retours ainsi que la
nature des lexemes en jeu font que l'épizeuxe structurante de Vaughan
reste beaucoup plus près de l'esprit de la figure (cri spontané) que celle de
Herbert .

Cette réflexion nous invite à traiter des différences, plus


intéressantes évidemment que les ressemblances, surtout chez deux auteurs qui
restent tout de même assez proches. Ces différences sont d'ordre formel
et sémantique.
Herbert redouble la figure dans deux poèmes : dans Deniall, "corne"
apparaît trois fois dans un même vers (v. 14) et dans The_Sacrif ice , "My
God, my God" est repris à un vers d'intervalle (v. 213 et 215). Selon sa
- 22 -

sensibilité et ses préjugés esthétiques, le lecteur peut y voir un surcroît


d'intensité et de sincérité (plus probable peut-être dans Deniall) ou un
excès d'art, par amplification rhétorique. Quoi qu'il en soit, aucun
exemple chez vaughan.
A trois reprises, Herbert recourt au chiasme épizeuxique
(Repentance, Hope, Assurance), Vaughan, une seule fois (The_Burial) , avec
un groupe syntaxique moins étoffé que chez Herbert, et un effet plus simple,
pour um nombre d'épizeuxes plus de deux fois supérieur à celui de The
Temple.
On ne peut, à partir de quelques exemples, tirer des conclusions
définitives, mais ajoutés à tant d'autres, ces faits qui concernent ici la
seule figure de 1' épizeuxe, sont autant d'indices supplémentaires d'une-
plus grande recherche des effets rhétoriques chez Herbert. Aussi, le
lecteur est- il enclin à voir plus d'art que de naturel dans ce vers de
Herbert :

Ah ! Loyterer ! I'le no more, no more I'le bring (Hope)

où le rejet du verbe dans le second terme de la figure, sans doute destiné


à mimer l'émotion (le balbutiement ? le bégaiement ?) semble un peu forcé.
Si l'on se place maintenant sur le plan sémantique, on constate
que les lexemes des épizeuxes de Vaughan ont une force lyrique et
dramatique plus grande que chez Herbert, qu'il s'agisse d'épizeuxes d'ouverture
ou d'épizeuxes internes. Ainsi, des exemples comme "Peace, peace", "Go, go",
"Come, come", tous en ouverture de poème dans Content, Af£Lic:tion_I, The
Check, Come^ _____
come x what do I here ? et Idle Verse, n'ont pas d'équivalent
chez Herbert et, à cet égard, du simple point de vue de l'emploi de
l1 épizeuxe d'ouverture, Vaughan me paraît plus près de la pratique d'un
Donne.
L' épizeuxe de Vaughan tire aussi une force particulière de sa
fonction thématique.
L'un des thèmes dominants de Silex Scintillans, c'est l'appel
ardent de la venue du Christ. Vaughan l'exprime à quatre reprises par 1'
épizeuxe, avec les verbes "come", "haste", "descend", "arise" (respectivement,
I!}Ë__y____> 3}Ë_ël_______t __*__■> _î}___"____£ ___4S__n£ » _1?_Y.__1> contre une
seule occurrence pour Herbert (Denial 1) . L'impatience de la mort, c'est-à-
- 23 -

dire de la seconde naissance, serait-elle plus grande chez Vaughan ? Quoi


qu'il en soit le thème et la figure voient leur puissance stylistique s'ac-
croître, du fait même de leur conjonction (231 .
L'analyse de l'épizeuxe chez Vaughan et Herbert appelle les
conclusions suivantes :
La figure est plus fréquente, plus régulière et moins élaborée chez
Vaughan.
Dans d'assez nombreux cas, en raison de leur position privilégiée
(ouverture du poème, début du vers), de la nature des lexemes qu'elles
mettent en jeu (charge affective intrinsèque ou thématique), et plus
particulièrement quand ces deux conditions sont remplies simultanément, les
épizeuxes de Vaughan ont une force dramatique plus grande que celles de
Herbert.

AN AVIPLOSES :

Proche de sa soeur, l'épizeuxe, l'anadiplose en diffère surtout


par le ton et par une plus grande souplesse formelle ; le décalage de
position, toléré mais limité et rarissime dans le cas de la première, est plus
courant et aussi plus libre pour la seconde : pour l'occurrence du premier
terme de la figure, les traités disent qu'elle peut intervenir "à la fin
ou presque à la fin de la proposition", et ils admettent, d'autre part,
une reprise tardive, parfois très espacée, pour le second terme, parlant
alors d'anadiplose différée.
Par conséquent, à l'inverse de l'épizeuxe - figure à reprise
immédiate dans l'immense majorité des cas -, l'anadiplose, selon les positions
occupées par le thème et son retour par rapport aux articulations majeures
des vers, peut s'inscrire en théorie, dans l'un ou l'autre des schémas
métriques et prosodiques conventionnels du vers ou du distique, en pratique,
l'anadiplose immédiate restant tout de même plus fréquente en poésie que
l'anadiplose différée, cette figure privilégie certains schémas, comme le
retour en milieu de vers (qu'on pourrait appeler "rime médiane", figure
liante soudant les deux hémistiches), en fin de vers, ou au début du vers
suivant ("rime fratrisée") *• .
- 24 -

A cet égard, la pratique de Vaughan comme celle de Herbert reste


conventionnelle. L'inventaire de toutes les occurrences de cette figure
dans The Temple et Silex Scintillans montre que les deux schémas les plus
récurrents sont ceux de la rime fratrisée et de la rime médiane.
Les comptages révèlent, d'autre part, que l'anadiplose est
beaucoup plus fréquente chez Vaughan que chez Herbert : au moins 44 figures
pour 33 poèmes concernés chez le premier contre 18 figures pour 14 poèmes
chez le second.
Quant aux modalités des retours, les occurrences se distribuent
également, chez nos deux poètes, entre les deux schémas privilégiés : pour
Vaughan, 20 rimes fratrisées contre 18 rimes médianes ; pour Herbert, 8
rimes fratrisées contre 7 rimes médianes (25} .
Voici le relevé, en commençant par Herbert :

The Temple :

. rime fratrisée : Affliction-IV : ("a wonder",^vers_4-5)^; Dialogue


("thine", vers 9-10) ; Praise_III ("thy praise", vers 1-2) ; The_Odour
("my minde", v. 6-7, "broth", v. 9-10, et une troisième légèrement
irrégulière, sur le polyptote "sweetning/sweet" , v. 26 et 27) ; Conscience
("some", v. 20-1, avec léger décalage du premier terme) ; Loye_II ("dust",
v. 9-10).

. rime médiane : The Sacrifice ("peace", v. 118) ; The


I ("health", v. 5) ; Çonstancie ("vertue", v. 25) ; The_Bunch_of_Grages
("sea", v. 7) ; The_Çollar ("free", v. 4, "made", v. 23) ; Longing ("Lord",
v. 29).

. autres cas : deux exemples suivant le schéma qui relie le milieu


d'un vers au début du vers suivant : LoveJJnknown ("my heart", v. 35-6 J
et îl}Ë_Q^2yr ("breathing", v. 25-6, chevauchant deux strophes) ; un
exemple avec le schéma inverse faisant revenir le premier mot d'un vers au
milieu du suivant : Peace ("vertue", v. 34-5).

Ce qui frappe chez Herbert c'est la très grande régularité des


schémas métriques et prosodiques qu'empruntent les anadiploses ; ils repro
- 25 -

duisent tous, à une seule exception près, le dessin des figures


canoniques. On constatera une plus grande souplesse chez Vaughan :

Silex Scintillans :

. rime fratrisée :

. parfaite : The_Query ("wings", v. 11-2) ; The_Obseguies ("grave",


v. 28-9) ; The_Çheck ("the day", v. 47-8) ; Admission ("a flood", v. 30-
1) ; The_Pilgrimage ("a place", v. 5-6 ; "for thee", v. 13-4) ; They_are
all_gone... ("my days", v. 10-1) ; The_World_I (avec retour en chiasme :
"weep and sing/And sing, and weep", v. 46-7) ; Misery ("tears alone",
v. 108-9) ; As_time_one_day. . . ('Veep", v. 38-9) ; Jesus_Weeging_II
("grieve", v. 45-6 ; "pity", v. 38-9) C26} .

. légère irrégularité : The_Feast ("victory /Aye victory",


chevauchant 2 strophes, v. 18-9 ; "a part/Such a sure part", idem, v. 30-1) ;
t2YË_§S^_?i59iElî5Ë ("blest the thy skill ! /Blest be thy dew", idem,
v. 6-7) ; Psalm_65 ("unto thee repair /To thee...", v. 3-4) ; AbePs_Blood
("sea of blood/A sea", v. 14-5) ; The_Dav_of_Judgment ("voice", retour à
un vers dfintervalle, v. 17 et 19), même effet dans The_Sag ("for thee",
v. 17 et 19, également !) The_Rainbow ("a cornet", v. 35-6) ^27K

. rime médiane : The_Query ("eyes", v. 12) ; The_Agreement ("tears",


v. 61) ; The_Mutiny ("to thee", v. 22) ; Joy ("mirth", v. 14) ; Psalm_104
("face", v. 77, et "a bound", v. 25, avec légère irrégularité) ; Begging_II
(un polyptote : "spoiled, 0 spoil", v. 17) ; Jesus_Weej)ing_II ("groans"
et "tears", v. 9 et 10) ; §tJ1ary_Magdalen ("art /Her art", v. 49) ; The
Hidden_Treasure ("nothing", v. 31) ; Misery ("dust" et polyptote "cry/
crying", v. 40 et 113) ; Begging_I ("thee, v. 6) ; Asçension^Day ("sin",
v. 40) ; £etirement_I ("doors", dernier vers) ; The_Seed_Growing
Secretly ("drop", v. 14) ; The_Book ("dust ; mere dust", v. 21).

. autres cas : Childhood ("Which Angels... Angels", v. 37-8, anadiplo-


se et anaphore prosodique irrégulières) ; deux schémas reliant le milieu
d'un vers au début du suivant : The Palm-Tree ("tree", v. 15 et 16) et
- 26 -

- C'high11, v. 13 et 14) ; The^Sheçerds ("That Lamb",


v. 48-9, avec anadiplose irrégulière et anaphore prosodique stricte) ; un
agencement en clausule dite "figure virgilienne" : Admission ("heart",
v. 25) ; 1/ Envoy ("a state", revenant en retour symétrique à un vers
d'intervalle, v. 15 et 17).

En conclusion, Vaughan fait un emploi plus fréquent de ce scheme


à la fois si proche et si différent de la plus simple des figures de
répétition, l'épizeuxe. S'il suit à peu près les mêmes conventions que Herbert
en ce qui concerne le dessin des retours, il semble pourtant moins lié que
lui aux contraintes prosodiques comme en témoignent le plus grand nombre
de variations qu'il introduit dans les répétitions (voir en particulier
les rimes fratrisées) .
Plus qu'un écho, l 'anadiplose est un rebondissement de la pensée,
une précision qui prend parfois la forme de la correctio rhétorique ;
elle dédouble en quelque sorte le discours ; rêverie sur les mots, elle
personnalité"
intériorise la vision et convenait peut-être mieux à la
d'un poète plus visionnaire que Herbert ? A cet égard, on aura peut-être
observé que Vaughan combine l 'anadiplose à la parenthèse à six reprises
(EïlSïi^SÊ > v* 5-6 ; TheJVgreement, v. 61 ; PsalnMQÎ, v. 77 ; Misery,
vers 108-9, sur "tears", comme dans The Agreement ; Retirement_I , vers
55 ; Jesus_Weej>ing II, v. 39), contre un seul exemple chez Herbert (The
Odour, v. 27) ; sans aucun doute, la parenthèse, technique de rupture du
discours , contribue à intérioriser encore plus la pensée *• J .
L 'anadiplose déclenchant parfois des séries anaphoriques chez
Vaughan (Jesus_Weeging_II , "grieve /A grief" puis retours anaphoriques aux
vers 48 et 50 ; L^Envoy "state", vers 15, 17 et l'exceptionnel trio des
vers 19-21 ; StJ1arv__Magdalen , "her art", v. 49 et vers 51 et 57), c'est
vers cette figure que nous nous tournons maintenant.

AWAPHORES :

II n'est pas question pour la plus courante des figures de répéti-


tition d'en envisager le recensement complet. Je me contenterai de signaler
- 27 -

les différences essentielles qui opposent Silex Scintillans à The Temple


en illustrant, selon le cas, par quelques exemples.

1. Rappelons, en renvoyant au paragraphe "Refrains et Anaphores


Structurantes", que Vaughan emploie cette dernière moins souvent que
Herbert. Il en va de même pour "l'anaphore prosodique" (figure parallèle
stricte en début de vers) , Vaughan ayant tendance à décaler plus ou moins
les termes pour éviter un schéma trop rigide, et à espacer les retours,
le plus souvent par un intervalle d'un vers, peut-être sous l'influence
du style biblique des Psaumes ?
A cet égard, la distribution des "thou", dans les 12 derniers vers
de Jacob^s^Pillow^and^illar me semble caractéristique de sa manière.

2. Beaucoup plus souvent aussi que chez Herbert, les lexemes mis en
jeu dans les anaphores sont des mots-outils (et non des mots de sens plein
comme le nom, l'adjectif, l'adverbe, le verbe), dont certains engendrent
des schémas qui doivent plus au fonctionnement mécanique de la langue usuel
le qu'à une quelconque élaboration rhétorique ; c'est le cas de schemes
syntaxiques comme : "no... no", "no... nor", "nor... nor", "now... now",
"and... and", "some... some", "such... such" ^^ :
Exemples : The Constellation (v. 6, 9-10) : The_Stone (v. 8, 13) ;
The_Star (v. 16, 20, 26, 29-30) ; Misery (v. 89).

3. Si l'on trouve chez nos deux poètes les inévitables "what",


"when", "where", "how", "thou", et "0" (ces deux derniers plus
caractéristiques sans doute de la poésie amoureuse profane ou religieuse),
l'ampleur des groupes anaphoriques est sans conteste plus grande chez Herbert,
particulièrement dans les anaphores prosodiques, Vaughan préférant
nettement les retours monosyllabiques, si bien que des reprises étoffées
comme "Exclude" (Misery, v. 34-5), "That Lamb" (Thejhe^herds , v. 48-9),
"I grieve" (Distraction, v. 26-7), "I bow my" (Anguish, v. 2-3) sont
exceptionnels dans Silex Scintillans. Ils abondent, en revanche, dans The
Temple où les groupes de trois lexemes ne sont pas rares non plus. J'en ai
- 28 -

relevé 13 exemples : The Church-Porch (125-6, 451-2, ce dernier en retour


interne) ; Good_FridaY (v. 2-3) ; Longing (v. 3, 4, 5, avec trois
retours !) ; Assurance (v. 122-3) ; Discipline (v. 1-2) ; Providence (v. 63-
4) ; The_Pilgrimage (v. 20-1) ; The_Tem£er_I (v. 17-8) ; A_Çï§l2gue (v.
1-2) ; The_Method (v. 7-8) ; Dulnesse (v. 17-8) ; The_Holv_Sçri2tures_I
(v. 8-9, à cheval sur deux strophes), et que penser du cas particulier
^e ^2_QffËïi^S> ou seule une lettre change : "Had I many /Had I any" (v.
31-2) ?
Cinq exemples seulement pour Vaughan, dont trois internes : The
Passion ("That took'st my", v. 44-5), Anguish ("I bow my", v. 2-3), 'Fair
§Edj^oung_light ' ("Where all is", mais en retour interne, v. 24) ; The
Book ("When thou shalt", en retour interne, v. 25-7, avec un décalage
révélateur de la façon dont vaughan évite le strict parallélisme en début
de vers, surtout pour un groupe étoffé), Jesus_Weeging_II ("Why dost thou",
v. 1-2, en retour interne).
Lorsqu'il lui arrive d'étoffer l'anaphore, Vaughan préfère
espacer et varier les retours, comme dans :
An<Ldo_thev_so ? ("0 brook it not !", v. 35 et 37) ; The_Constell-
at ion ("that we may", v. 51 et 53, avec un décalage de position) ; The
L§^2«§™L1:1}ë_Ç2:?I?é1 ("Let me not", v. 31 et 34, intervalle de 2 vers) ;
The_Query ("0 tell me /Tell me, 0 tell", v. 1 et 9, mais le "0" du vers 9
appartient à une autre proposition, variation syntaxique en faux chiasme
qui atténue le parallélisme) ; Çock-Crowing ("0 take it off !", avec un -
intervalle de 3 vers, v. 43 et 47). The_Holy_Çomunion est un exemple
intéressant : une double anaphore : "Was't not enough... but thou must also"
intervient entre les vers 33 et 43 ; la première fait l'objet d'un retour
parallèle strict au vers 41 , mais Vaughan se garde bien d'en faire autant
pour la seconde.
Un Herbert a moins de scrupule, qui propose, par exemple :

Not a fair look, but thou dost call it foul :


Not a sweet dish, but thou dost call it sowre ;
(Conscience, v. 2-3) (30)

4. Le nombre des retours est parfois impressionnant chez Herbert :


- 29 -

. triple retour : Charms _and JÇhots ("who", v. 5-7) ; The_Tem£er_^


("sometimes", v. 6-8) ; The J^iurçA-^rch ("some", v. 98-100) ; Providence
("when", v. 113-5, renforcé par le strict parallélisme des "thou" internes
des vers 113-4) ; Longing, déjà cité ("To thee my", v. 3-5), ainsi que The.
Call qui est à Herbert ce que le sonnet LXVT, avec tous ses "and" est à
Shakespeare, ou le sonnet LXXVII de Astrophel and Stella à Sidney ("that").
A ces exemples très nets, il faudrait ajouter des structures syntaxiques
discontinues comme : Even^Song ("that is... this the", v. 26-8) ;
^Çyjâence^ ("The... but", v. 21-3, appuyé par des répétitions parallèles
comme "eat", "say", ou symétriques, comme "mine" ; et surtout "Nothing...
but", v. 109-11, avec une recherche qui permet l'anaphore prosodique des
"But") ^31).

. quadruple retour : il ne peut être qu'exceptionnel, comme dans


la première strophe de Justice I ("Lord, thou... yet", v. 2-5) et pourtant
4 "now" structurent toute une strophe de Giddinesse (v. 9-12, avec 3
occurrences en début de vers), 4 "what", dont deux en début de vers,
s'accumulent dans trois vers de Longing (v. 26-8), 4 "I will", dont un décalé mais
trois alignés dans Bitter-sweet (v. 4-8) et 4 "Thou" pour la seconde
strophe de Praise_II !

. Et que penser des six retours de "without", si nombreux qu'ils


éclipsent le léger décalage de position, d'ailleurs compensé par la
parenté syntaxique des lexemes qui les précèdent (noms et adjectifs
substantives), dans les vers 101 à 104 de Providence ?

Dans la quasi- totalité de ces exemples, les retours, en position


d' eminence aux articulations des vers, sont très perceptibles.
Si Vaughan utilise aussi (mais rarement) l'anaphore multiple, il
préfère la dissimuler dans l'épaisseur de la strophe et atténuer les paral-
lélismes, comme dans Misery ("thou", v. 48-9), TheJCnot ("what", v. 13-4,
à opposer aux 4 'Vhat" du Longing de Herbert) ; de même les quatre "many",
dans une série interrompue par "much", tandis que l'ampleur syntaxique
croissante varie le rythme des retours, des premiers vers de TheJTimber^
est ce qui se rapproche le plus des six "without" du Providence de Herbert.
- 30 -

C'est aussi l'unique exemple de quadruple reprise vraiment perceptible de


Silex Scintillans (32*) , une exception par conséquent, mais la double
variation sémantique ("much") et syntaxique que Vaughan introduit dans la série
est en même temps révélatrice de sa manière. On peut en voir une autre
illustration dans les quatre "0" ("33') de The_Feast (v. 61, 63-4, 66) où deux
ruptures par espacement (v. 62 et 65) permettent d'éviter le strict
parallélisme (mais faut- il voir une "rime" visuelle dans "Opening" ?) .
En fait, la véritable exception qui confirme la règle il faut
aller la chercher dans I/Envoy ("A state", v. 19-21), poème doublement
marginal puisqu'il est aussi le dernier de Silex Scintillans.

5. L'accumulation de séries anaphoriques hétérogènes (plusieurs


thèmes) en agencement successif ou alterné est fréquente chez Herbert, raris-
sisme chez Vaughan :

. Herbert : Longing (8 premiers vers ; le "no end" du vers 6 qui


interrompt brièvement la série s'applique aussi ironiquement à un tel
effet !)^ The_Call, évidemment ; Discipline (v. 21-4 : "Love is /Love is/
And can/And can", série et retours étoffés impensables chez Vaughan, en
dehors des rares pastiches), Affliction_II ("Thou" et "ail", v. 11-5) ;
The_Çollar ("No" et "ail", v. 14-6), EEhes^JLiSO ("grieved for" et "weep",
v. 4-9) et deux agencements alternés : The__Familie (première strophe :
fTWhat" et "As", ;Hie_Size ("Those... these" et "And", v. 21-4).

. Vaughan : deux exemples seulement se rapprochent vraiment de


la pratique herbertienne et l'un est un pastiche : Praise ("Not" et "but",
strophe 2) et Dav_of_Judgment (fTWhen" et "and", 8 premiers vers).

Jamais on ne trouvera chez Vaughan une densité aussi forte d'ana-


phores régulières, certaines triples, que dans ces 26 vers de Providence
(vers 101 à 126), où s'ajoutent aux exemples déjà cités (les 6 "without",
les trois "when" et les trois "Nothing... but") l'anaphore des vers 125-6
("Sometimes") et les parallel ismes des vers 121-4 : "How... are" et "yet...
make", ou encore dans les trente premiers vers de Longing
— — (notamment,
strophes 1 , 2 et 5) ^ J .
- 31 -

Doit- il accumuler les répétitions ? Il variera la modalité des


retours (espacement, variations morphologiques, décalages de position) et
la nature des figures. A cet égard, un poème comme Admission, pourtant
exceptionnel du point de vue de la densité des répétitions, a valeur
exemplaire : les deux "when" (en retour interne ) et les trois "And" de la
première strophe sont espacés (comme dans la strophe 2 pour ces derniers avec
des intervalles irréguliers) ; la chaîne "didst -didst- dost" des vers 9,
12 et 15 est irrégulière à bien des égards ; la troisième strophe contient
surtout des répétitions libres ("thou", "thee") et trois "we" espacés ;
la dernière strophe, la plus structurée aussi, combine anaphores et anadi-
ploses, les premières se pliant à la règle de l'espacement ("0", vers 25,
29), du décalage de position atténuant le parallélisme ("After /So after",
v. 26-7 ; "0 hear/Hear", v. 29-30) ou de la variation sémantique ("After
thy own/after thine", v. 26-7).
Pour conclure ce paragraphe, observons comment, dans The_Passion,
latechnique d'espacement des retours permet un effet stylistique
intéressant. Tout le poème, sauf la dernière strophe, est structuré par des
procédés itératifs concernant deux thèmes exclamât ifs : "How didst" (dominant)
et "What didst" (mineur) , disposés selon des agencements horizontaux ou
verticaux variés mais très perceptibles .
L'effet stylistique majeur concerne le thème dominant : le
rapprochement progressif des retours anaphoriques et l'éclatement du groupe
initial "How didst" libérant ("éjaculant", pour parodier Vaughan ?) l'excla-
matif "How" (v. 33, 35, 37) et nous faisant passer de l'anaphore
structurante à l'anaphore affective, à laquelle on peut assigner trois fonctions :
expressive car elle traduit la douleur du témoin (visionnaire) de la
Passion du Christ, mimétique car elle évoque les plaintes du supplicié ("How
didst thou cry !") et symbolique, dans la mesure où, par une sorte de
retour aux sources qui n'est pas sans rapport avec l'événement historique
décrit, la poésie redevient cri et gémissement, retrouvant ainsi la nudité
pathétique de la parole dont le Verbe crucifié est aussi le symbole.
Notons que, s'il n'est pas imaginaire, cet effet a été rendu
possible par une rupture de la norme interne de Silex Scintillans (du moins
en partie) qui favorise plutôt les retours à distance.
Ces deux brèves analyses serviront de transition à la troisième
- 32 -

partie de cette étude, plus synthétique, qui se propose de comparer


quelques poèmes de nos deux poètes, pour mieux faire ressortir encore les
différences .

III

Tout d'abord, Easter^Day (Vaughan) et The_Dawning (Herbert) ^ ^ .


Ils traitent du même thème, présentent des variations similaires sur
"awake /arise" (échos sans doute du Cantique des Cantiques et des versets
23 et 26 du Psaume 44 C37)j, des rimes identiques ("awake /take", "arise/
eyes") ; toutefois le poème de Herbert est de loin le plus rhétorique du
point de vue de la régularité des figures et de leur insistance.
T!}Ë_ǧwJ}iBg-Pr^sen'te> en effet, une figure encadrante et
symétrique stricte dans les cinq premiers vers des deux strophes, sur les thèmes
"awake" et "arise". Ces deux strophes sont, d'autre part, étroitement
reliées par un double parallélisme parfait : "sad heart" (v. 1 et 9) et "And
with" (v. 6 et 14). Un polyptote, agrémenté d'une paronomase, amplifie
l'écho du second thème : "riseth, raiseth. . . Arise, arise" (v. 12-3).
Rien de semblable dans Easter^Da^, à la structure plus souple et
plus discrète.
La double figure encadrante a disparu ; seule, une rime
sémantique (lexemes apparentés) fournie par les deux thèmes "awake /arise" la
suggère peut-être dans la seconde strophe. "Sad heart", emprunté à Herbert
(vers 1) ne reçoit pas d'écho, et le couple "And in/And with" (v. 6 et 13),
analogue des "And with" de The pawning, subit une variation sémantique
("in" est remplacé par "with", dans le retour).
De plus, la pause après les "refrains" est moins forte, et
moindre, par conséquent, le ralentissement du rythme, caractéristique de tous
les procédés de mise en relief du message qui attirent l'attention sur la
forme ("visée du message en tant que tel", dit Jakobson, "foregrounding"
dit Leech, "Eins tel lung", disent les Allemands).
- 33 -

Le Praise de Vaughan est un pastiche du Praise_II de Herbert. Ils


commencent par le même mot, ont beaucoup de termes en commun, recourent à
l'anaphore structurante de façon systématique, et les troisièmes strophes
ont un profil identique : "Wherefore with/I will/And/I will".
Mais la structuration est partielle chez Vaughan (8 strophes sur
12), totale chez Herbert. Praise nT exhibe pas la quadruple anaphore
prosodique de son analogue. Les vers pairs de Praise II sont agencés selon le
principe de la stricte alternance entre deux thèmes : "I will/Thou", avec
rupture dans la dernière strophe seulement.
Vaughan introduit deux autres thèmes : "but" (strophe 2) et "theyf
(strophe 7) dans le schéma et il remplace l'alternance par une succession
irrégulière de "I will" (strophes 3, 4, 5, 6 - rompue au vers 24 - et 8) ,
tandis que le thème en "I will" subit une variation morphologique ("Ifll",
v. 18) et deux variations structurales ("But I'll" et "They will", v. 18 et
28).
D'autre part, le scheme stanzaîque des vers pairs sur les thèmes
("thee/me" (alternant pour Herbert, successif pour Vaughan) est plus
régulier chez Herbert : une seule rupture dans l'avant-dernière strophe mais
elle sauvegarde en même temps la figure encadrante "thee/thee" (première
et dernière strophes). Deux ruptures, en revanche pour Vaughan (strophes 2
et 8) et la fin du premier mouvement de Praise ne rappelle pas le thème
initial des "me".

La dernière illustration (TheJVreath, Love-sick et AJVreath)


concerne la figure de rhétorique appelée "concaténation" (anadiploses en
chaînes) que nous avons réservée pour la fin de cette étude.
En raison de son caractère mécanique, propre à engendrer le
scepticisme et la monotonie, elle est plutôt rare chez les poètes et ne se
développe en général que sur quelques vers. S'il est révélateur qu'un Herbert
ait jugé bon de lui consacrer tout un poème, l'on serait en droit de
s'étonner qu'un Vaughan se soit livré par deux fois à cet exercice de style
hautement artificiel, contraire à sa nature et à sa sensibilité, si l'on
ne savait combien fut grande l'influence de celui qui devait lui ouvrir les
voies delà création poétique et de la vie spirituelle. Mais regardons-y de
plus près.
- 34 -

AJVreath, on s'en souvient, se signale d'abord par une grande


figure encadrante parfaite ("Praise... praise"), est structuré d'un bout à
l'autre et de façon très régulière par des anadiploses (selon le strict schéma
de la rime fratrisée) , agrémentées - c'est caractéristique de Herbert -
par des chiasmes (v. 1 et 2) , une épanorthose ou correction introduisant
l'antithèse du vers 5 et des jeux de rimes qui étoffent la figure
encadrante.
Le poème jumeau de Vaughan est beaucoup plus discret. Tout d'abord,
la concaténation est de moindre ampleur : elle n'apparaît qu'au vers 9 et
ne se développe que sur 11 vers. Ce décalage par rapport au poème de Herbert
entraîne la disparition de la figure encadrante de A_Wreath, ou plus
exactement son éclipse partielle puisque le retour de "praise" aux premier et
dernier vers de la concaténation (vers 9 et 19) peut la suggérer mais l'effet
est encore atténué par un décalage de position qui "cache" le dernier
"praise" dans l'épaisseur du vers. Cette réticence vis-à-vis de
l'uniformité rhétorique est confirmée par le recours à d'autres procédés de
rupture : anadîplose interne du vers 10 ("tears") , décalages de position dûs
aux variations syntaxiques ("pain/Thy causeless pain", v. 12-3 ; "sad as
death/Which sadness", v. 13-4 ; ' Breath/Thy quickening breath", v. 15-6,
et surtout "gladly bears/Through saddest clouds to that glad place", où la
figure a pratiquement disparu) , tous procédés qui altèrent quelque peu la
régularité de la concaténation (surtout si l'on compare avec Herbert),
auxquels il convient d'ajouter le recours fréquent aux polyptotes ("days/
day", "sad/sadness", "gladly /glad") qui atténuent les échos et l'emploi
d'une parenthèse (vers 15) qui provoque une rupture de ton.
Si l'on se tourne maintenant vers Love-sick, pourtant beaucoup
plus "régulier" à cet égard que The_Wreath (et par conséquent plus proche
du poème herbertien dont il est peut-être le véritable analogue) , on
constate encore le même souci de varier le procédé rhétorique de diverses
manières : rupture de la concaténation par les anaphores irrégulières
internes des vers 10 et 13 ("bow" et "Refining : refine "), l'épizeuxe du vers 14
et surtout le recours aux anadiploses internes dont Herbert ne présente
aucun exemple : vers 7, 17, 18, 19, 21 ("narrow", "open", "wretch", "weal",
"blood").
Donc, loin d'être un contre-exemple, Love-sick tout en restant
- 35 -

une exception au même titre que The Wreath, confirme à sa manière les gran-
des tendances du style "anti-rhétorique" de Vaughan T381} .
De toute évidence, le Silure est moins préoccupé de ses effets
que son maître.
La dernière image de The Wreath, qui ouvre le poème vers
l'extérieur, sur les espaces infinis du Ciel, suggère que la couronne des choeurs
angéliques qui entourent le Seigneur a plus de beauté et plus d'éclat
("cloudless choirs") que la dérisoire guirlande de louanges tressée par un
art trop terrestre.

IV

Si The Temple et Silex Scintillans contiennent des poèmes très


"rhétoriques", au sens donné à ce terme dans cette étude, et d'autres qui
le sont moins ou pas du tout, les premiers sont nettement moins nombreux
et moins élaborés chez Vaughan.
Dans Silex Scintillans, les poèmes les plus structurés sont
presque toujours le fruit de l'imitation et ressemblent à des exercices de
style. Pour les uns comme pour les autres, le principe dominant de
structuration est celui de l'anaphore, à l'exclusion du refrain, et la
discontinuité structurale, la caractéristique principale.
Pour l'emploi des procédés itératifs, il faut se rappeler la
distinction entre les deux types de figures : peu ou non construites, comme
l'épizeuxe et l'épanode (sous la forme du polyptote ou de la rime du même
au même), auxquelles on peut ajouter 1 'anadiplose qui est un retour
finalement peu élaboré, et les figures plus construites comme l'épistrophe, l'é-
panalepse, le refrain, la symploque, et bien sûr l'anaphore. Il convient
encore d'ajouter que si l'épanode, qui appartient au même groupe que
l'épizeuxe et 1 'anadiplose, n'est pas un scheme (n'est pas élaborée), sa
multiplication dans un court espace textuel produira nécessairement l'impression
d'une élaboration rhétorique.
Or, si l'on peut affirmer que l'épizeuxe et 1 'anadiplose, c'est-
à-dire les figures les plus simples de la rhétorique de répétition, sont
- 36 -

plus nombreuses chez Vaughan que chez Herbert, on peut aussi suggérer que
les épanodes systématiques et insistantes sont moins fréquentes C39) .
Pour les figures plus construites, nous savons que Vaughan
n'utilise pas le refrain et nous avons constaté la relative rareté de l'anapho-
re prosodique stricte, surtout quand elle est étoffée, dans Silex
Scintillans.
Plus généralement, pour l'épizeuxe, l'anadiplose et l'anaphore,
les figures les plus courantes chez Vaughan - et sans doute aussi chez
Herbert - nous avons observé, chez le premier, plus de souplesse, plus de
variété aussi dans les retours : "Vicissitude plays all the game"
(Mfliction_IJ.
Ce sont globalement les mêmes techniques de rupture des schémas
canoniques qui sont à l'oeuvre chez nos deux poètes, mais d'une part, la
pratique de la variatio semble plus systématique chez Vaughan, et d'autre
part, plus fréquent est le recours à la technique d'espacement des retours,
à la distribution interne qui masque ou atténue les effets, aux
contrepoints entre la syntaxe et le mètre. Au totale le style de Vaughan se
distingue par une plus grande discrétion et une plus grande économie dans
l'emploi des figures de répétition : une rhétorique en "demi- teintes", en
quelque sorte, qui est un peu à ce plan de la composition ce que le clair-
obscur de Silex Scintillans est au plan métaphorique J.

Enfin, Vaughan évite autant que possible l'accumulation et


l'entrelacement des figures, caractéristiques d'un certain maniérisme.
En atténuant les parallélismes verbaux (trait du style poétique
hébraïque), Vaughan sépare un peu plus le liturgique du poétique, comme
dans le cas des images.
Bien que les deux poètes aient ouvertement considéré leurs chants
comme des "oeuvres", au sens chrétien du terme, c'est-à-dire un don à Dieu
et l'expression de leur foi, il paraît évident que Vaughan avait une
conception de la forme et de l'harmonie assez différente de celle d'un Herbert,
poète-architecte et musicien (41 ) . Tous deux ont recherché la simplicité
("Give me simplicitie", s'écrie Herbert dans AJVreath, ce qui est plutôt
surprenant dans ce poème), et tous deux savaient que l'art est un péché
- 37 -

(irVain sinful art", proclame Vaughan dans The_Daughter_o£_Hèrodias) et


combien la rhétorique, loin d'être toujours l'affirmation triomphante des
pouvoirs du langage, pouvait aussi traduire son impuissance à dire
l'ineffable, mais l'idée me semble plus sentie et plus vécue chez un Vaughan,
plus désireux, sans doute, de briser les habitudes linguistiques, comme il
voulait briser son coeur pour le régénérer.
Bien qu'il admette, à l'occasion, que "beauty consists in colours"
(M£lïǣﰣ_P > Ie Silure se méfie des couleurs de la rhétorique, ces
"ombres" et "folies" (Idle_Verse) qui engendrent l'illusion et la torpeur
(Joy, v. 10) et trompent la vigilance du croyant ("watch", un thème clé
chez Vaughan), incapable alors d'entendre l'appel du Seigneur et de capter
le bref éclat des visions fugitives de l'au-delà.
Cette préoccupation visionnaire qui détourne l'attention de la
forme du message sur le fond, ce goût pour le silence et le calme de la
nuit - autant que pour la lumière - qui caractérise la sensibilité et
l'imaginaire de Vaughan , expliquent peut-être pourquoi le poète ,
finalement moins répétitif que Herbert, a tant évité les schemes trop rigides,
les figures trop éclatantes, et leur a préféré l'éclat tempéré des
procédés itératifs les moins élaborés.
A cet égard, si Vaughan, qui a beaucoup imité, parvient mal
parfois à se dégager de certaines influences - d'où son style hétérogène -,
Silex Scintillans, par rapport à The Temple, peut être considéré comme une
nouvelle étape dans la recherche du "plain style" et des rythmes de la
langue naturelle qui relie la révolution du XVI le siècle et la
"révolution" romantique.
Ceci dit, il faut bien reconnaître que Vaughan ne doit pas la
place qu'il occupe dans la littérature anglaise à cette modeste
contribution. Il faut plutôt en rechercher l'explication au niveau sémantique, et
plus particulièrement à celui des images, et je conclurai par un paradoxe.
La répétition que Vaughan a dans l'ensemble évitée, au plan rhé-
thorique, devient la règle de composition au plan métaphorique. Le poète
utilise un très petit nombre d'images où domine la paire lumière-obscurité
et il les répète de poème en poème, sous des formes variées, et c'est à
- 38 -

l'occasion de ces variations que jaillissent ça et là les trouvailles


ou "flashes", pour reprendre l'expression favorite de la critique anglo-
saxonne de Vaughan, qui nous surprennent et nous enchantent.

GWLoJ> MÀTHIS
de.
- 39 -

NOTES

2. A juste titre, d'ailleurs ; voir sur ce point notre conclusion. Pour


les images, voir entre autres : E.C. Pettet, Of Paradise and Light,
A Study of Vaughan' s Silex Scintillans (Cambridge at the University
Press, 1960) ; R.A. Purr, On the mystical Poetry of Henry Vaughan
(Harvard University Press, Cambridge, Mass., 1962), ch. 2) ;
R. Ellrodt, L ' inspiration personnelle et l'esprit du temps chez les
poètes métaphysiques anglais (Librairie José Corti, 1959 ; première
partie, tome II), pp. 173-260 ; Ross Garner, Henry Vaughan,
Experience and the Tradition (the University of Chicago Press, 1959) ;
L.L. Martz, The Paradise Within, Studies in Vaughan, Traherne and
Milton (New Haven and London, Yale University Press, 1964), pour ne
citer que quelques titres. Pour • la rhétorique, je n'ai pu vérifier
dans la thèse de T.O. Calhoun, The Poetics of Silex Scintillans,
(University of Michigan, 1968 ; DA XXVIII, 5010 A).

3. Editions utilisées : Henry Vaughan. The Complete Poems, ed. A. Rudrum


(Penguin Books, rpt. 1985) et The Works of Henry Vaughan, ed. L.C.
Martin (second edition, Oxford at the Clarendon Press, 1957).
The English Poems of George Herbert, ed. C.A. Patrides (Everyman's
University Library, London : Dent, 1 974) .

4. Voir Pettet, op. cit. , p. 192.

5. The Church-Porch, v. 135.

6. Dans un article fort ancien paru dans le TLS, T. S. Eliot signalait


que, même dans le vers libre, on sentait toujours la présence du
mètre.

7. C'est dans le premier sens que Pettet emploie "rhétorique" ; ajoutons


que seule une typologie des discours, qui reste à faire, pourra nous
dire- si le discours juridique comporte plus de figures que le
discours poétique, notamment lyrique. En attendant, l'opposition assez
courante entre "rhétorique" et "lyrique" doit être maniée avec
prudence.

8. Les deux types obéissent à des schémas de distribution récurrents


dont j 'ai tenté le recensement pour le vers et le distique dans mon
- 40 -

Analyse Stylistique du Paradis Perdu de John Milton : L'Univers


poétique, échos et correspondances, thèse dactylographiée (Aix, 1979,
Tome II (encart) ).

9. Cf. infra, n. 20. En attendant, qu'il suffise de comparer ces deux


vers de Vaughan :
Peace, peace ! I blush to hear thee...
The_Çheck (v. 1)
May look to thee, to thee the finisher
The_Mutii}Y (v. 20)
La première figure est une épizeuxe, la seconde, une anadiplose.

10. Terme emprunté à Geoffrey N. Leech, A Linguistic Guide to English


Poetry (Longman, 1969), p. 77.

11. H. Morier, Dictionnaire de Poétique et de Rhétorique (PUF, 1981),


p. 1165.

12. Les traités de rhétorique anciens, notamment, sont un peu


responsables de cette pratique dans la mesure où ils s'en tiennent toujours,
par la- force des choses, à-des fonctions vagues et générales.^

13. Je me permets de renvoyer à ma communication : "Rhétorique (s) et


Stylistique (s)", à paraître dans les Actes du Congrès SAES de
Poitiers, 1980.

14. Sélectif, aussi. Aucune description stylistique exhaustive n'est


possible ni souhaitable, surtout dans le cadre limité d'un article. Je
m'en tiendrai donc aux figures de répétition les plus courantes.

15. Voici le détail des comptages : pour la moyenne de vers par poèmes,
je n'ai pas compté les longs poèmes (The_Church-Porch, The_Sacrif ice ,
El2Yi<ÎËï}Ç.Ë > ï]}Ë_ÇlîyiÇ?LMilit;§nt>
dans" Thë" pour~HeïbëftJ~cë~qûi donne 4288
vërl"pôûr"i 6Î"pôèinës7 Temple contre 4938 vers pour 130 poèmes,
pour Silex Scintillans, amputé de Rules and Lessons.

16. Pour tout ce groupe III, on songe aux célèbres "Chimène" qui
retentissent à la fin des stances du Cid.

17. Citons, à titre indicatif : Regeneration, The Night, Joy of my Life,


TheJforning:Watch, ThWld7"ThêIâë~âll~5ë777 î5iïï^iiT

18. On peut éventuellement voir une figure encadrante irrégulière (par


décalage de position) dans l'écho à distance "Welcome" et "0 corne"
- 41 -

de White_Sunday (vers 1 et 61), surtout si l'on compare avec un effet


sontTlable dansjfe_HolY_Çommunion ("Welcome... Become", vers 1 et 52 ) ,
ou encore si l'on se souvient"de la collocation "come /Welcome" dans
le premier vers de Affliçtion_II : "0 come, and welcome ! Come,
refine ;", et l'échô~"Ô~cô*më""ën fin de poème (v. 14). Ce poème
n Appartient pas à Silex Scintillans.

19. Voir Les Figures du Discours (Flammarion, 1977), pp. 330-1. Fontanier
après avoir opposé la réduplication (ou épizeuxe) à l'anadiplose,
propose pour illustrer la première, deux exemples : celui de Racine :
"Songe, songe, Céphise..." et celui de Voltaire : "Songe, au moins,
songe au sang...". Ce dernier exemple montre que 1 'épizeuxe différée
n'est pas impossible mais elle reste exceptionnelle.

20. Dans The_World_I, "weep and sing/And sing and weep" (v. 46-7) est
plutôt une anadiplose, ce qui montre que le type de pause séparant
un thème et son retour n'est pas un critère de differentiation
absolu entre épizeuxe et anadiplose. Tout est plutôt une question de ton.

21. Type de variatio signalé par Morier, op. cit. pp. 1162-3.

22. Parmi les cinq epizeuxes de Vaughan apparaissant dans le premier vers,
deux seulement ouvrent véritablement le poème (Sinnes_Round et
The_ Search) , mais la seconde, seule, est vraiment dramatique, elle
êit aûisi irrégulière en raison de l'intrustion de "0" ("Whither,
0 whither..."). Pour les trois autres cas, se reporter à la liste
établie précédemment.
D'autre part, notons que le "My God, my God" de The_Thanksgiving ,
plus proche du cri que les autres epizeuxes de Herbert, appartient
en fait à un vers qui semble parodier le fameux "Eli, Eli, lamma
sabacthani" de l'Evangile de St. Matthieu, 27:46 : "ity God, my God,
why dost thou part from me ?", la typographie herbertienne
(italiques) désignant nettement la référence. Ce phénomène intertextuel
n'ôte-t-il pas une partie de sa force au cri ?

23. A cet égard, il est intéressant de noter que le premier poème de


Silex Scintillans II renouvelle cet appel de façon pressante dans
l'anaphore qui clôt Ascension-Day (v. 61). On l'entend à nouveau
dans The_Feast (v. i"37~Ï3)7~âvant de le retrouver dans le dernier
poème7~L][Ënvo2, sous la forme : "Arise, arise" (v. 7). Ainsi cet
appel encadre toute la série de Silex Scintillans II.

24. La "rime médiane" correspond au v. 8 de ma typologie. Elle est sans


doute le schéma privilégié de l 'épizeuxe.

25. Je n'ai pas indu dans les comptages les cas particuliers de The
Wreath, Love-sick et AJVreath, qui seront commentés plus loin.
- 42 -

26. Stricto sensu, la rime fratrisée sur un polyp to te devient rime


enchaînée, comme : "To grieve /A grief", mais ne compliquons pas.

27. Les "blood" des vers 29-30 de The_Rainbow seraient plutôt dans le
ton de l'épizeuxe (un cri), bien que cet exemple n'ait pas été retenu
comme telle, en raison de sa trop grande irrégularité.

28. J'ai compté pour Vaughan 76 parenthèses dans 47 poèmes, contre 23


dans 19 poèmes pour Herbert. D'autre part, Vaughan va jusqu'à
développer la parenthèse sur six vers CDisorder_and_FrailtY , v. 40-5 ;
et sur quatre vers encore dans la première strophe de The
Constellation) . Herbert ne va pas au-delà de trois vers CPraise_III ,
v7~33-57"~ët~The_Crosse, v. 14-6). Faut- il, pour autant en'dedûîrë
que Vaughan ëit7~sïnôn plus "méditatif", du moins plus "réflexif"
que Herbert ?

29. Les "the", générateurs de catalogues bien connus dans le style


épique ou pastoral (voir par exemple, ReDentance , v. 33-40) sont peu
significatifs et n'ont pas été retenus.

30. C'est moi qui souligne.

31. Herbert était-il sensible au rythme ternaire : "Since all musick is


but three parts vied/And multiplied ;" (Easter, v. 14-5) ?

32. A l'exclusion peut-être de quelques lexemes insignifiants comme


"My" ?

33. Vaughan semble décidément affectionner cette interjection.

34. Ce style, globalement plus répétitif que celui de Vaughan, car les
schemes anaphoriques et autres figures de répétition étoffées font
une impression plus durable sur le lecteur que les épizeuxes et ana-
diploses, rapproche Herbert, toutes proportions gardées, de Sidney,
Walter Raleigh, Spenser et même du Crashaw de certains poèmes. Voici
quelques ocemples parmi les plus remarquables :

. Sidney : Astrophel and Stella : anaphores multiples dans sonnets


LXIII (3 "grammar"), LXXVIII (4 "so") , LXIV (5 "let") , LXXVÏÏ
(8~nthat" !)
Arcadia : Old_Age (6 "old age" successifs, dont 2 décalés),
Solitariness (8 "nor", v. 18-25).
îï'faudrait aussi relire Doubt _You_to_whom, Since_so_mine
eves (alternance régulière "Since/That" J,~CÔm£Ïaint_of_Love,
~ etc.
Maïs, s'il y a des jeux de langage chez Herbert ofTïïe trouvera pas
les excès des vers 13-4 du sonnet_XXXV (sur le mot "praise") ou
du vers 13 du sonnet_LX ("Wnose^prësênce absence, absence presence
is") , dans Astrôpnel and Stella.
- 43 -

. Sir Walter Raleigh : voir The Lie (4 quadruples anaphores avec


"Tell", 10 strophes sur 13 structurées par la figure encadrante
•Tell... lie") The Shepherd's Praise of Diana (7 "Praise be"
successifs) , en
"And" False
yariatio)
Love ,Ç23voir
Vers
aussi
sur les
28 strophes
alignent des
100, "A"
102,avec
103,"As"
109,et
112, 113 de The Ocean's Love to Cynthia, pour les anaphores
prosodiques triples ou quadruples.

. Spenser : voir à titre indicatif : Epithalamion , strophes 10, 14,


17, et surtout 19 (4 "Ne let", suivis de 3 "Nor").

. Crashaw : Charitas Nimia : or The Dear bargain , pour les anaphores


prosodiques étoffées et la densité des retours immédiats ou
différés. Trouve-t-on chez Herbert des jongleries comme celle de Crashaw
sur "Nothing" dans Matthew 27 ?

35. Pour varier les retours, Vaughan a également recours dans ce poème
à un procédé conventionnel qui consiste à faire revenir à la
verticale des lexemes ordonnés horizontalement ou vice versa, par exemple
les "how did" des vers 24-5 et 29, ou "What did" des vers 5, 10-1,
21-2, 23. Dans Love_and_Discigline, une "épanalepse sémantique"
sur "dew" et "frôst" (même champ sémantique) revient en anaphore
prosodique (voir les vers 7 et 10-1), selon le même ordre de
présentation : dew... frost. Pour des exemples miltoniens de cet agencement
horizontal /vertical, voir mon Analyse Stylistique du Paradis Perdu,
op. cit., pp. 889, 936, 1354 (note 4) et 1357 (note 24).
On trouve confirmation de la réalité de ce schéma dans The
Wronged Lover de Sidney, où le vers : "Fire, air, sea, earth, fame,
time, place..." (v. 20) fait revenir exactement dans le même ordre,
les quatre éléments et le trio "fame, time, place", disposés à la
verticale au début de chaque strophe.

36. Le The Dawning de Vaughan est beaucoup moins répétitif.

37. Voir aussi Easter de Herbert (v. 1 et 7) et la dernière strophe de


Christ's Sleeping Friends de Southwell.

38. Et même si on le voit jongler ici avec les "mine" et les "thine",
cela n'a rien de comparable avec le Çlasping__of_hands de Herbert.

39. Faute de place , je n'ai pu parler des polyptotes et rimes du même au


même en libre répétition que de façon épisodique. Leur étude
systématique révélerait les mêmes tendances : plus de souplesse dans les
retours, et plus de discrétion que chez Herbert, pour lequel on peut
donner quelques exemples d'épanodes insistantes : les 4 "us" de
Sinne_I (strophe I) , les 4 "me" de The_HolY_Çommunion (strophe 1 ,
très riche, d'autre part, en répétitions~divêrsës)7~ïes 3 "drink"
et dérivés et les 3 "death" et dérivés de The_ Invitation (vers 10-2,
et 29-30)de, Vertue
"sweet" les 3 "dew"
ou encore
verticaux
de The_Odouf
de Grace (v.
(v7~9-TÏ)7~ënf
1, 3, 17, 20,
in 21,
tous 25,
les
26, 27), avec"cû ians polyptotesT
- 44 -

40. Je fais ici référence moins aux images de lumière et de ténèbres qu'à
la tonalité générale du système métaphorique de Vaughan, traversée,
il est vrai de quelques éclairs, mais ceux-ci ne doivent rien à
l'élaboration rhétorique. On sait qu'il rejette, plus que Herbert, il
me semble, les "conceits" pétrarquisants et métaphysiques. Le '!My
self all tears, a weeping lake" de Anguish (v. 12) est sans doute le
seul vestige pétrarquisant de Silex'Scintillans .

41 . Dans Joy, Vaughan condamne les "groan well dressed" et les "griefs
tuned" et proclame : "To me /There is no discord but your harmony".
D'autre part, il est significatif que L.L. Martz trouve beaucoup
plus de poèmes de Herbert qui se conforment plus ou moins à la
structure tri-partite du poème méditatif ("composition"/"analysis"/
"colloquy") que chez Vaughan. Pour le premier, il cite : Life, Man,

T pour ïê'second T un sëùï'poèmë (et encore !) : |_waïked


lEill^iïI^ëY' • • Voir The Poetry of Medidation, A Study in Engîîsfi
RëligiôùsTIterature olT!:he XVI Ith Century (New Haven and London,
YUP, 1954, rpt. 1969), pp. 59-61 et 64-5.

42. On ne peut, à cet égard, que renvoyer à la belle étude que R. Ellrodt
a consacrée à l'imaginaire et à la sensibilité de Vaughan, et plus
particulièrement, pour notre propos, aux pages 205 à 210, op . cit .

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