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TRIBUNAL ADMINISTRATIF DU CENTRE

REPUBLIQUE DU CAMEROUN
------------------
Paix – Travail – Patrie
CONTENTIEUX DE LA FONCTION
PUBLIQUE ------------

RECOURS N° 195/2013
AU NOM DU PEUPLE CAMEROUNAIS
DU 14 MAI 2013
---L’an deux mille quinze ;
---Et le dix-neuf du mois de mai ;
AFFAIRE
---Le Tribunal Administratif du Centre ;
MEMONO Jean Jacques Henri
---Réuni au Palais de Justice de Yaoundé, en la salle
C/
ordinaire des audiences ;
ETAT DU CAMEROUN
---A rendu en audience publique ordinaire,
(MINFOPRA)
conformément à la loi, le jugement dont la teneur suit ;
---Sur le recours intenté ;
Jugement n° 58/2015/TA-YDE
- PAR
du 19 mai 2015
---Le sieur MEMONO Jean Jacques Henri, contractuel
d’administration retraité, demandeur ;
COMPOSITION
---D’une part ;
M NOAH Joseph Vincent de Paul,
- CONTRE
Président
---L’Etat du Cameroun(MINFOPRA), représenté par le
Mmes AISSATOU épouse BELLO,
sieur MATARAI LAKE, défendeur ;
Membre,
---D’autre part ;
ETONG Théorine Blanche, Membre
---En présence de monsieur TABI OTTOU Lucien André
M TABI OTTOU Lucien André Aubert,
Aubert, Avocat Général, madame NWOS Julie Reine
Avocat Général
épouse CHENDI et monsieur ZENGUE Luc Yannick,
Mme NWOS Julie Reine, épouse
Attachés au Parquet Général près le Tribunal
CHENDI, Attachée au Parquet Général
Administratif de céans ;
M ZENGUE Luc Yannick, Attaché au
LE TRIBUNAL
Parquet Général
---Vu la requête du 13 mai 2013 enregistrée au Greffe
Me NGONO ONANA Germaine, Greffier
de la Chambre Administrative de la Cour Suprême le 14
courant, sous le n° 601 ;
---Vu la loi n° 2006/022 du 29 décembre 2006, fixant
RESULTAT
l’organisation et le fonctionnement des Tribunaux
(Voir dispositif)

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Administratifs ;
---Vu les décrets n° 2012/194 du 18 avril 2012 et
2014/569 du 18 décembre 2014, portant nomination des
Magistrats du Siège ;
---Vu le décret n° 74/759 du 26 août 1974, portant
organisation du régime des pensions civiles ;
---Vu la loi n° 90/063 du 19 décembre 1990, modifiant
et complétant certaines dispositions de la loi n°
69/LF/18 du 10 novembre 1969 et 84/007 du 4 juillet
1984, instituant un régime d’assurance pension
vieillesse, d’invalidité et décès ;
---Vu les pièces du dossier ;
---Après avoir entendu en la lecture de son rapport
monsieur NOAH Joseph Vincent de Paul, Juge au
Tribunal Administratif du Centre ;
---Ouï le sieur MEMONO Jean Jacques Henri,
demandeur, comparant en personne ;
---Nul pour l’Etat du Cameroun(MINFOPRA), ayant
déposé son mémoire en défense le 10 juin 2014, sous le
n° 1283, mais non comparant à l’audience bien que
régulièrement convoqué suivant avis du Greffe ;
---Le Ministère Public entendu en ses conclusions ;
---Après avoir délibéré conformément à la loi ;
---Considérant que par requête du 13 mai 2013,
enregistrée au Greffe de la Chambre Administrative de
la Cour Suprême du Cameroun le 14 courant sous le n°
601, le sieur MEMONO Jean Jacques Henri, agissant en
son nom et pour son propre compte, a déposé un
recours en paiement de ses droits à pension et en
indemnisation, dans l’affaire qui l’oppose à l’Etat du
Cameroun représenté par le Ministère de la Fonction
publique de la Réforme administrative;
---Considérant que cette affaire pendante devant la
Chambre Administrative de la Cour Suprême au moment
de la mise en place du Tribunal Administratif du Centre
y a été transférée en vertu de l’article 119 alinéa(4) de

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la loi n° 2006/022 du 29 décembre 2006, fixant
l’organisation et le fonctionnement des Tribunaux
Administratifs ;
---Considérant que dans ladite requête le recourant
expose :
«A l’honneur de vous saisir très
respectueusement de sa requête contentieuse aux
fins de la condamnation du Ministère de la
Fonction publique et de la Réforme administrative
à verser une pension retraite et aux paiements des
dommages-intérêts pour préjudices subis à tort ;
« ET DE VOUS EXPOSER :
« Que MEMONO Jean Jacques Henri a travaillé tour à
tour à la Société Camerounaise de Banque du 3
septembre 1975 au 15 avril 1982(pièce n° 1) et au
Ministère des Finances du 19 juillet 1984 au 31
décembre 1996, suivant contrat de travail n°
001198/MFP/DP/SDPNF/C1 du 24 novembre 1984 du
Ministère de la Fonction publique(pièce n° 2) ;
« Que le requérant assuré CNPS n° 159301-1, a
régulièrement cotisé à la CNPS durant 182 mois
jusqu’au 31 décembre 1996 suivant contrat
n°008461/MFPRA/DPE du 10 décembre 1996(pièce n°
3) ;
« Que MEMONO Jean Jacques Henri, né le 6 mai 1953,
ayant atteint l’âge de 55 ans le 6 mai 2008, devait
bénéficier de sa pension retraite conformément à
l’article 9 nouveau de la loi n° 90/063 du 10 décembre
1990(pièce n° 4) ;
« Que MEMONO Jean Jacques Henri a régulièrement
saisi la CNPS, qui lui a délivré l’attestation de
validation de ses cotisations en date du 15 février
2005(pièce n° 5) ;
« Que la CNPS a refusé de prendre en charge MEMONO
Jean Jacques Henri pour le paiement de ses droits à
pension en excipant la loi n° 90/163 du 19 décembre

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1990, qui stipule en son article 1er alinéa(3) que
« toutefois en ce qui concerne le personnel de l’Etat
relevant du Code du travail, la couverture et la gestion
de ces prestations sont assurées par l’Etat lui-même
suivant les règles fixées par la même loi »(pièces n° 6
et 7) ;
« Que MEMONO Jean Jacques Henri a saisi le Ministère
de la Fonction publique et de la Réforme administrative
en date du 1er juin 2005 en vue de l’obtention de sa
pension retraite et par requête le recours gracieux du
13 novembre 2012, resté lettre morte jusqu’à ce
jour(pièces n° 8 et 9), ce qui dénote un déni de justice
sociale ;
« C’EST POURQUOI LE REQUERANT SOLLICITE QU’IL
VOUS PLAISE, MONSIEUR LE PRESIDENT
« -Constater le silence et le refus injustifiés du
Ministère de la Fonction publique et de la Réforme
administrative de verser la pension de retraite due à
MEMONO Jean Jacques Henri ;
« Par conséquent, condamner l’Etat du
Cameroun(MINFOPRA) à verser à MEMONO la pension de
retraite à compter du 6 mai 2008, date à laquelle
l’intéressé a atteint 55 ans ;
« -Condamner l’Etat du Cameroun(MINFOPRA) à
octroyer à MEMONO Jean Jacques Henri des dommages-
intérêts à hauteur de CFA trente millions(30.000.000)
de francs pour préjudice subi à tort ;
« -Condamner l’Etat du Cameroun(MINFOPRA) aux
entiers dépens ;
« SOUS TOUTES RESERVES » ;
---Considérant que le 10 juin 2014, le représentant de
l’Etat du Cameroun(Ministère de la Fonction publique et
de la Réforme administrative), en la personne du sieur
MATARAI LAKE, a déposé au Greffe du Tribunal de
céans, sous le n° 1283, le mémoire en défense ainsi
présenté :

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« PLAISE A LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE DU CENTRE
« Attendu que par requête introductive d’instance en
date du 14 mai 2013, monsieur MEMONO Jean Jacques
Henri, contractuel d’administration, matricule 357 468-
K, en service au Ministère des Finances, vous a saisi aux
fins de condamner l’Etat du Cameroun(MINFOPRA) à lui
verser la pension de retraite à compter du 6 mai 2008,
et à lui octroyer CFA 30.000.000 de dommages-intérêts
pour préjudices subis à tort ;
« Attendu qu’au soutien de sa demande, le recourant
fait valoir qu’il a travaillé 182 mois, que la loi n°
901/063 du 19 décembre 1990, en son article 1er
alinéa(3) donne la gestion des prestations des
personnels de l’Etat relevant du Code du travail à l’Etat
lui-même ;
« Sur la date de départ à la retraite
« Attendu qu’aux termes des dispositions de l’article
117 du décret n° 94/199 du 07 octobre 1994, portant
statut général de la Fonction publique de l’Etat,
alinéa(1) « la démission est un acte écrit par lequel le
fonctionnaire marque sa volonté non équivoque de
quitter définitivement la Fonction publique, alinéa(2)
« l’initiative de la démission appartient au
fonctionnaire ; il adresse l’offre de démission au
Ministère chargé de la Fonction publique » ;
« Attendu que dans le cas d’espèce, le recourant a
formulé sa demande de départ volontaire
conformément à l’article 117 alinéa(1) du décret n°
94/199 suscité et que l’arrêté n° 008461 du 11
décembre 1996 acceptant le départ volontaire de la
Fonction publique de sieur MEMONO Jean Jacques
Henri(pièce 1), qu’il a fourni lui-même dans son
dossier, a été pris en application de la réglementation
en vigueur, la date de son départ à la retraite de la
Fonction publique n’est plus à spéculer ; elle reste et
demeure le 13 décembre 1996 ;

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« Sur la durée du service rendu à la Fonction publique
et de la pension
« Attendu que sieur MEMONO Jean Jacques Henri, aux
termes des dispositions de l’article 19 du contrat n°
001198/MFP/DP/SDPNF/C1 du 24 novembre 1984(pièce
2), a été recruté à partir du 19 juillet 1984, date de sa
prise de service à la Fonction publique et
retraité(licencié pour motif économique à la suite de sa
demande) le 13 décembre 1996, sa durée de travail à la
Fonction publique après calcul fait est de 102 mois et
non 182 ;
« Attendu qu’aux termes des dispositions de l’article
1er (nouveau) (2) de la loi n° 90/063 du 19 décembre
1990, modifiant et complétant certaines dispositions
des lois n° 69/LF/18 du 10 novembre 1969 et 84/007 du
4 juillet 1984, instituant un régime d’assurance pension
vieillesse, d’invalidité et décès, « la couverture et la
gestion de ces prestations sont confiées à la Caisse
Nationale de Prévoyance Sociale » » ;
« Attendu que sieur MEMONO Jean Jacques Henri
n’étant agent de l’Etat qu’à partir du 19 juillet 1984 au
vu de son contrat de travail, sa pension ne saurait être
supportée par la Fonction publique avant cette date ;
elle ne saurait supporter la charge d’un service rendu à
un privé aussi parapublic soit-il, et sur présentation
d’une simple attestation de travail(certificat de
travail : pièce 3) ; la durée de travail passée dans ce
service privé ne saurait être prise en considération à
cette période puisque l’intéressé n’existait pas dans les
effectifs des agents de l’Etat ;
« Attendu par ailleurs qu’aux termes des dispositions
de l’article 3 du décret n° 92/221/PM du 08 mai 1992,
fixant l’âge d’admission à la retraite des personnels de
l’Etat relevant du Code du travail qui énonce que
« l’acte qui prononce la mise à la retraite concède et
liquide en même temps la pension du travailleur » ;

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« Attendu d’avantage que le statut général de la
Fonction publique de l’Etat dispose en son article 120
alinéa(3) que « l’acte prononçant le licenciement
liquide la totalité de ses droits, y compris
éventuellement sa pension de retraite » ;
« Attendu que sieur MEMONO Jean Jacques ayant reçu
le montant de CFA trois millions cinq cent trente-six
mille trois cent vingt-neuf(3.536.329) francs lors de
l’acceptation de son départ volontaire comme
mentionné sur l’arrêté n° 008461/MFPRA/DPE du 11
décembre 1996, que ce montant correspond à ce que
l’Etat lui devait comme pension et autres, de la date de
son entrée(19 juillet 1984) comme agent de l’Etat à la
Fonction publique jusqu’à sa date de sortie le 13
décembre 1996 ; ceci pris(en conformité) dans l’esprit
des textes ci-dessus cités ;
« Attendu que sieur MEMONO Jean Jacques n’ayant
accompli que 102 mois de service, inférieurs à 180 mois
pouvant donner droit à une pension vieillesse comme
précisé à l’article 13 alinéa(1) de la loi n° 69/LF/18 du
10 novembre 1969, par conséquent l’Etat ne doit plus
rien comme pension à sieur MEMONO Jean Jacques ;
« PAR CES MOTIFS
« ET TOUS AUTRES A SUPPLEER D’OFFICE
« -S’entendre déclarer le recours contentieux
introduit par sieur MEMONO Jean Jacques irrecevable
parce que non fondée ;
« -Le condamner aux entiers dépens ;
« ET CE SERA JUSTICE FAITE
« Sous toutes réserves » ;
---Considérant que le 25 juillet 2014, le recourant a
déposé au Greffe du Tribunal de céans, sous le n° 1573,
un mémoire en réplique ainsi articulé :
« Plaise au Tribunal,
« Attendu que par courrier daté du 10 juin 2014
enregistré au Greffe du Tribunal Administratif sous le

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n° 1283, monsieur MATARAI LEKE a déposé pour le
compte de l’Etat du Cameroun(MINFOPRA) un mémoire
en défense ;
« Attendu qu’au soutien de ce mémoire, le
représentant de l’Etat fixe la date de départ à la
retraite non pas le 6 mai 2008, mais plutôt le 13
décembre 1996, date de son départ volontaire de la
Fonction publique ; qu’au surplus, sa durée de travail
dans la Fonction publique est de 102 mois au lieu de
182 ; durée motivée par le fait que sa période de
service de la Société Camerounaise de Banque(SCB) ne
saurait être prise en compte ; et enfin que la somme de
CFA 3.536.329 francs(trois millions cinq cent trente-six
mille trois cent vingt-neuf francs) correspond selon la
législation en vigueur, à la liquidation de la totalité de
ses droits, y compris sa pension retraite ;
« Mais attendu que de tels arguments ne sauraient
prospérer devant votre juridiction ; ceci du double
point de vue de l’irrecevabilité du mémoire en défense
de l’État du Cameroun pour forclusion sur la forme(I),
et de l’application stricto sensu de la loi n° 90/063 du
19 décembre 1990(II) ;
« I- SUR L’IRRECEVABILITE DU MEMOIRE EN DEFENSE
DE L’ETAT DU CAMEROUN POUR FORCLUSION
« Attendu par correspondance référencée n°
865/G/TA/YDE du 12 février 2014, le Greffier en chef
du Tribunal Administratif du Centre saisissait l’Etat du
Cameroun(MINFOPRA) de l’inexistence d’une requête
aux fins d’indemnité de monsieur MEMONO ; or, selon
l’article 38 de la loi n° 2006/022 du 29 décembre 2006,
portant organisation et fonctionnement des Tribunaux
Administratifs, « en cas de recevabilité de la requête,
le rapporteur en ordonne la communication au
défendeur qui a trente jours pour déposer son mémoire
en défense » ;
« Ainsi, par application stricte de la loi, le

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représentant de l’Etat disposait de trente jours, soit
jusqu’à 12 mars 2014, pour déposer un mémoire en
défense ; l’ayant fait le 10 juin 2014, en atteste la date
du courrier arrivée, il doit être déclaré forclos ;
« En effet, la forclusion s’analyse comme étant la
sanction de l’absence d’un acte de procès dans un délai
imparti ou le dépassement de la date limite de
satisfaction aux prescriptions légales indispensables à
l’examen serein de l’objet de la requête ; notre Juge
administratif la définit d’ailleurs dans les affaires Etat
du Cameroun(Premier Ministère) c/Société Renault-
Cameroun, arrêt n° 06/A du 26 décembre 1996 et Etat
du Cameroun c/ TEGUIA Gabriel, arrêt n° 10/A du 24
mars 1983 : « considérant que la forclusion s’analyse
comme la perte de la faculté de faire valoir un droit
par suite de l’expiration du délai » ;
« Attendu que la forclusion est un moyen d’ordre
public, c’est-à-dire un moyen pouvant être soulevé
d’office par le Juge et les parties à tout moment du
procès administratif ; moyens qui sont établis non pas
forcément pour la protection des intérêts particuliers,
mais pour l’intérêt général parce que particulièrement
importantes ; on les emploie tout aussi pour la
protection des règles fondamentales du droit
administratif(Cf. affaires Collectivité MBOUDOU NGONO
c/ Etat du Cameroun, arrêt n° 64/A du 9 octobre 2008 ;
MOMNOUGUI Robert c/ Etat du Cameroun, arrêt n°
07/A du 25 février 1999 ; BABA NGUE Jean Michel c/
Etat du Cameroun, arrêt n° 07/A du 16 décembre
1982) ;
« Attendu qu’il en est de même des délais(Cf. ATONG
Andréas c/ Etat du Cameroun, arrêt n° 09/A du 23
novembre 2000) ; position consacrée par l’article 43 de
la loi n° 2006/022, qui dispose que « les délais ci-dessus
sont prescrits à peine de déchéance » ; en conclusion,
l'Etat du Cameroun doit être débouté de sa défense in

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limine litis, pour dépôt tardif de mémoire ;
« II- SUR L’APPLICATION STRICTO SENSU DE LA LOI N°
090/063 DU 19 DECEMBRE 1990
« Attendu qu’au regard de l’état de validation établi
par la Caisse Nationale de Prévoyance Sociale(CNPS),
qui stipule que MEMONO Jean Jacques a effectué 182
mois de cotisation, soit 15 ans 2 mois, et que la durée
minimale est de 180 mois pour avoir droit à une pension
à taux plein ;
« Attendu que si l’Etat du Cameroun(MINEFI) reversait
les cotisations jusqu’en 1996 à la CNPS, MEMONO serait
déjà en possession de sa pension au niveau de la CNPS
depuis mai 2003, l’âge auquel MEMONO a atteint 50 ans
pour motif économique ;
« Qu’en définitive, l’Etat(MINFOPRA) doit octroyer la
pension retraite à MEMONO en application de la loi n°
090/063 du 19 décembre 1990 depuis mai 2008 ;
« Sur le premier moyen portant sur la date de départ
à la retraite
« La date du 13 décembre 1996 ne saurait être
interprétée comme la date de mise à la retraite comme
semble vouloir le faire croire le représentant de l’Etat,
mais comme la date de départ volontaire du sieur
MEMONO ; en effet, selon le lexique des termes
juridiques 2014, la retraite s’appréhende comme la
situation d’un ancien salarié qui, en raison de l’âge,
n’est plus en activité ou en mesure de
travailler(p.834) ; seul le critère de l’âge, donc la
vieillesse est ici mis en avant dans le cadre de la
retraite ; qualifier cette date de départ à la retraite est
un abus de droit ; elle doit plutôt s’analyser comme la
date de départ volontaire de la Fonction publique ; ce
qui n’est pas la même chose ;
« Sur le second moyen portant sur la durée du service
rendu à la Fonction publique et la pension
« Monsieur le représentant de l’Etat fait preuve d’une

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mauvaise foi manifeste quand il affirme que la durée de
travail, en comptant du 19 juillet 1984, date de sa prise
de service à la Fonction publique jusqu’au 13
décembre 1996, est de 102 mois au lieu de 182 ;
prenant en compte uniquement cet intervalle, on est à
113 mois et non 102, comme il le prétend ; au surplus,
il n’apporte aucun fondement juridique sur le moyen
selon lequel sa période de service à la Société
Camerounaise de Banque(SCB), soit du 3 septembre
1975 au 15 avril 1982 ne saurait être pris en compte
dans le décompte de la durée totale de service ; en
prenant en compte la maxime latine « actori incumbit
probatio »(la preuve incombe à celui qui l’allègue), ce
moyen n’est qu’une argutie qui ne saurait être retenu
dans l’examen des faits de la cause ;
« Par ailleurs, ce même représentant affirme que le
montant versé à l’époque à monsieur MEMONO, soit la
somme de CFA 3.536.329 francs « lors de l’acceptation
de son départ volontaire(…) correspond à ce que l’Etat
lui devait comme pension et autres, de la date de son
entrée(19 juillet 1984) jusqu’à sa date de sortie le 13
décembre 1996 » ; l’article 3 du décret n° 92/221/PM
du 8 mai 1992 et 120 alinéa(3) du statut général de la
Fonction publique venant au soutien de sa demande ;
« Attendu que cet argument ne saurait prospérer et
ce pour deux principales raisons : la première est que la
décision de séparation volontaire prise par
l’Administration résulte d’une lecture combinée de
plusieurs textes ; les visas de l’arrêté ministériel faisant
foi ; or la conclusion à laquelle parvient le représentant
de l’Administration est le fruit d’une interprétation
parcellaire et erronée de toute la réglementation sur la
question ; la seconde raison est le dispositif de l’arrêté
ministériel a le mérite d’être clair : « article 2 :
l’intéressé a droit à la somme globale de CFA 3.536.329
francs, comprenant la prime de bonne séparation et

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éventuellement les arriérés des mois de septembre et
octobre 1993 et des rappels en mémoire » ; il n’est
aucunement fait mention de la pension retraite, comme
semble le faire croire maladroitement le représentant
de l’Etat ;
« PAR CES MOTIFS ET TOUTES AUTRES, à déduire, à
suppléer au besoin d’office, l’exposant persiste dans les
conclusions antérieures de son recours » ;
---Considérant que le 5 mai 2015, le Parquet Général a
déposé à la Présidence du Tribunal de céans, sous le n°
163, des conclusions ainsi présentées :
« Vu la loi n° 2006/022 du 29 décembre 2006, fixant
l’organisation et le fonctionnement des Tribunaux
Administratifs ;
« Vu la loi n° 69/LF/18 du 10 novembre 1969,
instituant un régime d’assurance pension vieillesse,
invalidité et décès, modifiée et complétée par la loi n°
90/063 du 19 décembre 1990 ;
« Vu le décret n° 2012/119 du 15 mars 2012, portant
ouverture des Tribunaux Administratifs ;
« Vu le décret n° 92/221/PM du 8 mai 1992, fixant
l’âge d’admission à la retraite des personnels de l’Etat
relevant du Code du travail ;
« Vu le décret n° 92/220/PM du 8 mai 1992, fixant les
modalités de transfert à l’Etat de la gestion du régime
d’assurance, de pension vieillesse, d’invalidité et de
décès des agents de l’tat relevant du Code du travail ;
« Vu la requête du 14 mai 2013 aux fins d’octroi de
pension de retraite et d’indemnisation dirigée contre
l’tat du Cameroun représenté par le Ministre de la
Fonction publique et de la Réforme administrative,
ensemble les pièces du dossier de procédure ;
« Attendu que par requête susvisée enregistrée au
Greffe de la Chambre Administrative de la Cour
Suprême le 14 mai 2013, sous le n° 601, sieur MEMONO
Jean Jacques Henri a saisi le Président de la susdite

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juridiction, pour solliciter la condamnation de l’Etat à
lui verser une pension de retraite à compter du 6 mai
2008 et à lui octroyer des dommages-intérêts à hauteur
de CFA 30.000.000 francs pour préjudice né du défaut
de paiement de la susdite pension ;
« Attendu qu’au soutien de sa demande, le requérant
fait valoir qu’il a travaillé tour à tour à la Société
Camerounaise de Banque du 3 septembre 1975 au 15
avril 1982 et au Ministère des Finances du 19 juillet
1984 au 31 décembre 1996, suivant contrat de travail
n° 001198/MFP/DP/SDPNF/C1 du 24 novembre 1984 du
Ministre de la Fonction publique ;
« Qu’étant assuré à la CNPS sous n° 159301-1, il a
régulièrement cotisé durant 182 mois jusqu’au 31
décembre 1996, tel qu’il ressort de l’attestation de
validation des cotisations délivrée par la CNPS en date
du 15 février 2005 ;
« Qu’ayant atteint l’âge de 55 ans le 6 mai 2008, il
devait bénéficier de sa pension retraite conformément
à l’article 9 nouveau de la loi n° 90/063 du 10
décembre 1990 susvisée ;
« Que la date du 13 décembre 1996 ne saurait être
retenue comme celle de son départ à la retraite ; la
retraite n’étant effective que dès lors que le critère
d’âge est rempli ;
« Qu’il conteste, en s’appuyant sur les termes de
l’article 2 de la décision acceptant son départ
volontaire, la prise en compte de la somme de CFA
3.536.329 francs comme correspondant à sa pension de
retraite ;
« Que la CNPS a refusé de le prendre en charge pour
le paiement de ses droits à pension en s’appuyant sur
l’article 3 de la loi n° 90/063 du 19 décembre 1990
susvisée ;
« Qu’il a dès lors saisi le Ministère de la Fonction
publique et de la Réforme administrative d’une

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correspondance du 1er juin 2005 et d’un recours
gracieux du 13 novembre 2012 en vue de l’obtention de
sa pension retraite ;
« Qu’enfin, il a conclu à l’irrecevabilité du mémoire
en défense de l’Etat pour forclusion, comme ayant été
produit le 10 juin 2014, soit 5 mois après la
communication de sa requête par le Greffe du Tribunal
Administratif ;
« Attendu que dans son mémoire en défense du 10
juin 2014, le représentant de l’Etat, en s’appuyant sur
les dispositions de l’article 117 du statut général de la
Fonction publique affirme que la date d’admission à la
retraite de MEMONO Jean Jacques Henri est celle de
son départ volontaire de la Fonction publique validé le
13 décembre 1996 ;
« Que le temps de travail effectué par le recourant
comme employé à la Société Camerounaise de Banque
ne saurait être pris en compte par l’Etat pour le calcul
du nombre de mois de cotisation ;
« Qu’ayant exercé moins de 15 ans à la Fonction
publique, le susnommé ne saurait prétendre à une
pension retraite ;
« Que de plus la durée de cotisation à prendre en
compte dans le calcul de ses droits est de 102 et non
182 mois comme semble s’en prévaloir le recourant ;
« Qu’enfin, la somme de CFA trois millions cinq cent
trente-six mille trois cent vingt-neuf(3.536.329) francs,
qui lui a été alloué lors de son départ volontaire,
correspond à ce que l’Etat lui devait comme pension et
autres droits depuis son entrée dans la Fonction
publique ;
« SUR LA COMPETENCE MATERIELLE DU TRIBUNAL DE
CEANS
« Attendu qu’aux termes des dispositions de l’article
2 alinéa(3)c) de la loi n° 2006/022 du 29 décembre
2006 susvisée, les Tribunaux Administratifs sont

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compétents pour connaître des contrats administratifs,
à l'exception de ceux conclus même implicitement sous
l’empire du droit privé ;
« Qu’en l’espèce, sieur MEMONIO Jean Jacques Henri,
en sa qualité de contractuel de l’Administration était
lié à cette dernière par un contrat de droit privé régi
par le Code du travail ;
« Que les règles de compétence étant d’ordre public,
il convient de se déclarer incompétent à statuer dans la
présente cause ;
« PAR CES MOTIFS
« Requérons qu’il plaise au Tribunal Administratif de
céans de bien vouloir :
« Article 1er : Se déclarer incompétent ;
« Article 2 : Condamner le recourant aux dépens » ;
SUR LA COMPETENCE
---Attendu que s’il est exact que le contrat de travail
entre le sieur MEMONO Jean Jacques Henri et l’Etat du
Cameroun est conclu sous l’empire du Code du travail,
en revanche les conséquences qu’en tire le Ministère
Public quant à la compétence à connaître du différend
relatif au paiement de la pension d’ancienneté à un ce
personnel de l’Etat est inexacte ; que contrairement à
ce qu’il laisse supposer, les différends auxquels donne
lieu l’application de la législation et de la
réglementation de la prévoyance sociale, en ce qui
concerne l’attribution et le règlement des prestations
ne relèvent pas des juridictions de l’ordre judiciaire
pour deux motifs ;
---Que de première part, aux termes de l’article 14 de
l’ordonnance n° 73/17 du 22 mai 1973, portant
organisation de la prévoyance sociale, de tels
différends relèvent de la Commission régionale du
contentieux de la prévoyance sociale pour les
travailleurs du secteur privé, parce que l’article 1er
alinéa(2) de la loi n° 69/LF/18 du 10 novembre 1969,

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modifiée et complétée par la loi n° 84/007 du 4 juillet
1984 et celle n° 90/063 du 19 décembre 1990 confie la
couverture et la gestion de ces prestations à la Caisse
nationale de Prévoyance sociale ;
---Que pour les agents de l’Etat relevant du Code de
travail, de tels différends relèvent a contrario du
Tribunal Administratif, parce que l’article 1er alinéa(3)
de la loi n° 69/LF/18 susvisée, telle que modifiée,
confie la couverture et la gestion de ces prestations à
l’Etat ;
---Que de seconde part, aux termes de l’article 20
alinéa(1) de l’ordonnance n° 73/17 déjà visée, « le
recours devant les Commissions régionales du
contentieux de la prévoyance sociale ne sont recevables
qu’après rejet d’une réclamation adressée à un Comité
de recours gracieux créé au sein du conseil
d’administration de la Caisse nationale de prévoyance
sociale ;
---Qu’en l’absence d’une disposition légale contraire,
un acte de gestion de ces prestations pris par le
Ministre de la Fonction publique et de la Réforme
administrative ne peut faire l’objet d’un recours
gracieux que devant l’auteur de l’acte, conformément
à la loi n° 2006/022 du 29 décembre 2006, et non
devant le Comité de recours gracieux du conseil
d’administration de la Caisse nationale de prévoyance
sociale ;
---Que du moment où la Commission régionale du
contentieux de la prévoyance sociale ne peut être saisie
qu’après rejet du recours gracieux adressé au Comité
de recours gracieux de la Caisse nationale de
prévoyance sociale et non après un rejet d’un
semblable recours adressé au Ministre de la Fonction
publique et de la Réforme administrative, la
compétence du Juge Administratif à connaître des
différends de cette nature pour les agents de l’Etat

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relevant du Code de travail devient ipso facto
incontestable ;
---Que l’exception d’incompétence soulevée par le
Ministère Public n’est pas fondée ;
SUR LA RECEVABILITE DU RECOURS
---Considérant que le décret n° 74/759 du 26 août
1974, portant organisation du régime des pensions
civiles, prévoit que tout dossier de pension ou de
capital décès doit être introduit dans un délai de
quatre(4) ans à compter du jour de l’événement
justifiant la cessation des fonctions et ce, sous peine de
prescription ou de forclusion ; que ce délai est porté à
cinq(5) ans pour les agents de l’Etat relevant du Code
de travail ;
---Considérant qu’en l’espèce le départ du sieur
MEMONO Jean Jacques Henri de la Fonction publique à
compter du mois de décembre 1996 a été formalisée
par arrêté n° 008461/MFPRA/DPE du 11 décembre
1996 ; qu’il avait donc jusqu’en fin décembre 2001 pour
introduire son dossier de pension ;
---Qu’il dit lui-même dans sa requête introductive
d’instance et le réitère à l’audience de ce jour qu’il a
saisi la Caisse nationale de prévoyance sociale en 2005
et celle-ci lui a délivré une attestation de validation
des cotisations le 15 février de la même année ; que
celle-ci ayant cependant refusé de prendre en charge le
paiement de ses droits à pension, il a saisi le Ministre
de la Fonction publique et de la Réforme administrative
le 1er juin 2005 d’une demande de paiement de sa
pension retraite ; que celui-ci n’ayant pas fait droit à sa
demande, il l’a saisi d’un recours gracieux le 13
novembre 2012 ;
---Que même en prenant parmi ces dates celle qui est
la plus favorable au recourant, soit le 15 février 2005,
la prescription était déjà acquise depuis plusieurs
années ;

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---Que l’action en paiement des droits à pension du
sieur MEMONO Jean Jacques Henri est donc irrecevable
comme étant éteinte par la prescription ;
---Que l’action en réparation étant assise sur le refus de
paiement de la pension d’ancienneté, l’irrecevabilité
de celui-ci entraîne celle de celle-là en vertu du
brocard accessorium sequitur principale ;
SUR LES DEPENS
---Considérant que selon l’article 55 de la loi n°
2006/022 sus citée, la partie qui succombe est
condamnée aux dépens ;
PAR CES MOTIFS
---Statuant publiquement, contradictoirement, en
matière de fonction publique, à l’unanimité des
Membres du collège, en premier et dernier ressort ;
DECICE
---Article 1er : Le Tribunal Administratif est
compétent ;
---Article 2 : Le recours en paiement de la pension
d’ancienneté et en indemnisation introduit par le sieur
MEMONO Jean Jacques Henri est irrecevable ;
---Article 3 : Le recourant est condamné aux dépens
liquidés à la somme de CFA 17.400 francs ;
---Ainsi jugé et prononcé par le Tribunal Administratif
du Centre en son audience publique ordinaire du mardi
dix-neuf mai deux mille quinze, en la salle ordinaire des
audiences où siégeaient :
---Messieurs :
---NOAH Joseph Vincent de Paul………………….Président ;
---AISSATOU épouse BELLO…………………………….Membre ;
---ETONG Théorine Blanche……..…………………. Membre ;
---En présence de monsieur TABI OTTOU Lucien André
Aubert, Avocat Général, madame NWOS Julie Reine
épouse CHENDI et monsieur ZENGUE Luc Yannick,
Attachés au Parquet Général près le Tribunal
Administratif du Centre, occupant le banc du Ministère

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Détail des frais Public ;
Mise au rôle…………………………..5.000 ---Et avec l’assistance de maître NGONO ONANA
Copie rapport………………………..1.000 Germaine, Greffier tenant la plume ;
Copie conclusions………………...1.000 ---En foi de quoi le présent jugement a été signé par le
Exp. ord. désign. Rapp……….…..400 Président, les Membres et le Greffier ;
Notifications………………………….7.000 ---En approuvant_____mot(s)___ligne(s)_____rayé(s)
Exp. jugt………………………………..3.000 nul(s) ainsi que_________renvoi(s) en marge. /-
____________________ LE PRESIDENT LE MEMBRE
CFA 17.400 francs

LE MEMBRE LE GREFFIER

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