Vous êtes sur la page 1sur 5

ARRET N°28 REPUBLIQUE DU SENEGAL

du 29/5/13 AU NOM DU PEUPLE SENEGALAIS


J/255/RG/12 -----------------
11/9/12 COUR SUPREME
Administrative -----------------
------- CHAMBRE ADMINISTRATIVE
Confédération des Caisses -----------------
Mutualistes d’Afrique de A l’audience publique ordinaire du Mercredi vingt neuf mai de
l’Ouest (CCMAO) l’an deux mille Treize ;
(Me Guédel Ndiaye &
associés) ENTRE :
- Confédération des Caisses Mutualistes d’Afrique de l’Ouest
Contre : (CCMAO), dont le siège social est à Dakar, Sacré cœur 3, VDN
-Etat du Sénégal Pyrotechnie, poursuites et diligences de son représentant légal dans
(Agent judiciaire de l’Etat) ses bureaux, faisant élection de domicile en l’étude de Maître
Guédel Ndiaye & associés, SCP d’Avocats 73, bis, rue Amadou
PRESENTS : Assane Ndoye à Dakar ;
Fatou Habibatou Diallo, D’UNE PART ;
Président de chambre, ET :
Président, - L’Etat du Sénégal pris en la personne de Monsieur l’Agent
Abdoulaye Ndiaye, judiciaire de l’Etat, en ses bureaux sis au Ministère de l’Economie
Mahamadou Mansour et des Finances, building Peytavin, Avenue de la République x
Mbaye, Carde à Dakar ;
Waly Faye, D’AUTRE PART ;
Seydina Issa Sow, Vu la requête reçue au Greffe central de la Cour suprême le 11
Conseillers, septembre 2012, par laquelle la Confédération des Caisses
Mutualistes d’Afrique de l’Ouest (CCMAO), agissant en la
RAPPORTEUR : personne de son représentant légal, élisant domicile en l’Etude
Seydina Issa Sow, de Maître Guédel Ndiaye et Associés, avocats à la cour, sollicite
l’annulation des décisions n°00295, n°004633, n°005746 des 1er
mars, 27 juin et 31 juillet 2012 du Ministre de l’Economie et des
PARQUET GENERAL: Finances révoquant Mamadou Touré de ses fonctions de Directeur
Abdourahmane Diouf général de la Confédération des Caisses Mutualistes d’Afrique de
l’Ouest (CCMAO) ;
GREFFIER :
Cheikh Diop; Vu la loi organique n°2008-35 du 8 août 2008 sur la Cour
AUDIENCE : suprême ;
29 mai 2013
Vu la loi organique n°2008-47 du 3 septembre 2008 portant
MATIERE : réglementation des systèmes financiers décentralisés ;
Administrative
Vu le reçu du 18 septembre 2012 attestant de la consignation de
RECOURS : l’amende ;
Excès de pouvoir
Vu l’exploit du 8 octobre 2012 de Maître Fatma Haris Diop,
huissier de justice à Dakar, portant signification de la requête ;

Vu le mémoire en défense de l’Agent judiciaire de l’Etat reçu au


Greffe le 4 décembre 2012 ;
Vu le mémoire en réplique de la CCMAO reçu au greffe le 10
janvier 2013 ;

Vu les décisions attaquées ;

Vu les autres pièces produites au dossier ;

Ouï Monsieur Seydina Issa Sow, Conseiller référendaire, en son


rapport ;

Ouï Monsieur Abdourahmane Diouf, Avocat général, en ses


conclusions tendant au rejet du recours ;

Après en avoir délibéré conformément à la loi ;


Considérant que le 19 août 2009, la Confédération des Caisses
Mutualistes d’Afrique de l’Ouest (CCMAO) a nommé Mamadou
Touré au poste de Directeur général ; que le 13 juillet 2012,elle a
reçu notification d’une lettre du Ministre de l’Economie et des
Finances lui demandant de désigner un Directeur général par
intérim à la suite de la destitution de Mamadou Touré de ses
fonctions de Directeur général de la CCMAO pour « des actes de
nature à compromettre l’équilibre financier de l’Institution entre
2005 et 2009, ainsi que la perception à partir de 2009,
de rémunérations salariales, la mise à disposition d’un véhicule et
d’un logement de fonction, nonobstant le versement d’indemnités
de logement » ;
Que saisi le 02 mars 2012 par Mamadou Touré d’un recours
gracieux, le Ministre, par lettres des 27 juin et 31 juillet 2012, a
confirmé les mesures prises ;
Que ce sont ces décisions du Ministre de l’Economie et des
Finances que la CCMAO attaque en annulation ;

Sur le premier moyen tiré du détournement de procédure, en


ce que le rapport établi au niveau du Crédit Mutuel du Sénégal
(CMS) ne devait concerner que le CMS et Touré a été destitué de
son poste de Directeur général de la CCMAO, alors que le CMS et
la CCMAO sont deux entités juridiques distinctes ;

Considérant que l’interdiction d’exercer certaines fonctions qui


frappe les responsables d’un système financier décentralisé en
vertu de l’article 30 de la loi organique n°2008-47 du 3 septembre
2008 portant réglementation des systèmes financiers décentralisés
a un caractère personnel, qu’elle s’applique aux dirigeants quelle
que soit l’entité au sein de laquelle les manquements incriminés
ont été commis ; qu’en outre, l’article 32 des statuts de la
Confédération prévoit que ne peuvent être membres du Conseil
d’Administration ou du Conseil de surveillance de la confédération,
les personnes physiques qui, notamment, ne respectent pas
les statuts et les différents règlements (intérieur, financier, des
crédits) des Institutions de base, des Unions ou Fédérations, de la
Confédération, et d’une façon générale de toutes les entités du
Groupe ;

Considérant qu’ainsi, la requérante n’établit pas que le Ministre


aurait utilisé son pouvoir de sanction dans un but autre que celui
pour lequel il a reçu compétence ;
Qu’il s’ensuit que le moyen est mal fondé ;

Sur le deuxième moyen tiré de la violation de l’article 71 al 1 in


fine de la loi organique n°2008-47 du 3 septembre 2008 portant
réglementation des systèmes financiers décentralisés, en ce
qu’aucune sanction disciplinaire ne pouvait être prononcé à
l’encontre de Touré, sans qu’il ait été entendu ou dûment convoqué
ou invité à présenter ses observations par écrit, ce qui n’a pas été le
cas ;

Considérant qu’aux termes de l’article 71 al. 5 de la loi organique


visée au moyen, « les sanctions doivent être motivées. Aucune
sanction disciplinaire ne peut être prononcée par le Ministre, la
Banque Centrale ou la Commission Bancaire sans que l’intéressé
ou son représentant, assisté éventuellement de tout défenseur
de son choix, ait été entendu ou dûment convoqué ou invité à
présenter ses observations par écrit » ;

Considérant que par lettre du 21 octobre 2011 versée au dossier,


Mamadou Touré reconnait avoir reçu un compte rendu de la
mission de l’Inspection, laquelle prouve qu’il a été mis à même,
antérieurement à la prise de la décision, intervenue le 1 er mars 2012,
de s’expliquer sur les faits qui lui sont reprochés d’autant qu’en
émettant un chèque pour rembourser le montant de la somme
indûment perçue au titre du cumul de l’indemnité de logement avec
l’occupation d’un logement de fonction, il confirme avoir eu
connaissance des faits ; qu’en outre, la lettre de la Directrice
du CMS du 24 octobre 2011 qui atteste que l’aspect gouvernance
(cumul) a été directement soulevé en plénière lors de la restitution,
les autres thèmes ayant fait l’objet de pré-restitution, confirme aussi
qu’il a eu connaissance des faits bien avant la prise de la sanction ;

Considérant qu’ainsi, Touré ayant été mis à même de présenter ses


moyens de défense avant la prise de la sanction, les exigences du
texte visé au moyen ont été satisfaites ;
Qu’il s’ensuit que le moyen est mal fondé ;

Sur le troisième moyen tiré de la violation des articles 30 et 31


de la loi organique précitée, en ce que le Ministre, dans sa
décision du 27 juin 2012, déclare que Touré ne peut, en application
des articles 30 et 31 de la loi, être membre à quelque titre que ce
soit d’un système financier décentralisé, alors qu’au sens
de ces dispositions, l’inéligibilité à un poste de membre ou de
responsable d’un système financier décentralisé ne s’applique qu’à
l’individu, auteur principal ou complice qui a fait l’objet d’une
condamnation définitive, par suite d’infractions portant atteinte aux
biens ou pour crimes de droit commun;

Considérant qu’il résulte de l’article 31 al. 2 de la loi organique


suscitée que la même interdiction attachée à une condamnation
définitive s'applique aux dirigeants suspendus ou démis en
application de l'article 71 de la même loi ;

Considérant que Mamadou Touré ayant été démis de ses fonctions


de Directeur général de la CCMAO sur le fondement dudit article,
l’interdiction prévue à l’article 30 lui est applicable ;
Qu’il s’ensuit que le moyen est mal fondé ;

Sur le quatrième moyen tiré du défaut de base légale, en ce que


les griefs relevés contre Mamadou Touré dans la décision sont mal
fondés et injustifiés, s’agissant aussi bien de la compromission de
l’équilibre financier de l’Institution entre 2005 et 2009 qui sont des
exercices clos, contrôlés et certifiés, de la perception de salaires,
alors que son contrat de travail est en cours, de la perception
de l’indemnité de logement qui relève d’un malentendu, d’une
mauvaise interprétation, d’une absence d’information entre la
Direction des ressources humaines du CMS et la Direction du
patrimoine et des moyens généraux ;

Considérant que pour sanctionner Mamadou Touré, le Ministre,


sur la base d’un rapport d’inspection ayant relevé des anomalies
dans sa gestion, s’est fondé sur les dispositions des articles 61 et 71
de la loi organique sur les systèmes financiers décentralisés,
lesquelles lui permettent de prendre des mesures administratives et
disciplinaires à l’encontre des systèmes financiers décentralisés et
de leurs dirigeants qui auraient, notamment, manqué aux règles de
bonne conduite de la profession, compromis leur équilibre financier
ou pratiqué une gestion anormale sur le territoire national ;
Qu’il s’ensuit que la requérante est mal fondée à invoquer le défaut
de base légale ;

Sur le cinquième moyen tiré de la violation de l’article 1


de la Constitution qui assure l’égalité devant la loi de tous les
citoyens, en ce que les collaborateurs de Mamadou Touré,
également mis à la disposition du groupe CMS percevraient leur
salaire au niveau du CMS, ce qui signifie que le Ministre ne saurait
reprocher au seul Directeur général du groupe CMS, à l’exclusion
des autres, d’avoir été rémunéré sauf à violer ledit article ;

Considérant que le principe de l’égalité des citoyens devant la loi


n’implique pas que des personnes placées dans des situations
différentes soient traitées de manière identique ;

Considérant que si, comme le soutient la requérante, les


collaborateurs de Mamadou Touré, tous mis à la disposition du
Groupe CMS au même titre que ce dernier, percevraient leur
salaire au niveau du CMS, il reste qu’il est reproché, en outre,
à Touré des actes de nature à compromettre l’équilibre financier
de l’Institution entre 2005 et 2009 et la mise à disposition d’un
véhicule et d’un logement de fonction, nonobstant le versement
d’indemnités de logement ;
Qu’ainsi la CCMAO est malvenue à faire grief au Ministre
d’avoir rompu l’égalité des citoyens devant la loi ;

PAR CES MOTIFS :


Rejette le recours de la Confédération des Caisses Mutualistes
d’Afrique de l’Ouest (CCMAO) formé contre les décisions
n°00295, n°004633, n°005746 des 1er mars, 27 juin et 31 juillet
2012 du Ministre de l’Economie et des Finances ;

Dit que l’amende consignée est acquise au Trésor public ;

Ainsi fait, jugé et prononcé par la Cour suprême, Chambre


administrative, en son audience publique ordinaire tenue les jour,
mois et an que dessus et où étaient présents :
Fatou Habibatou Diallo, Président de chambre, Président,
Abdoulaye Ndiaye,
Mahamadou Mansour Mbaye,
Waly Faye,
Seydina Issa Sow,
Conseillers,
Cheikh Diop, Greffier ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le Président de
Chambre, Président, les Conseillers et le Greffier.
Le Président de Chambre, Président :

Fatou Habibatou Diallo


Les Conseillers :

Abdoulaye Ndiaye Mahamadou Mansour Mbaye

Waly Faye Seydina Issa Sow

Le Greffier :

Cheikh Diop

Vous aimerez peut-être aussi