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Sommaire
Introduction. L’énergie, c’est la vie !
Une consommation énergétique contrainte
La consommation d’énergie : croissance et inégalités
Une consommation d’énergie très contrastée selon les ressources
Énergie et développement
Une énergie de plus en plus chère
La grande question des réserves
Le réchauffement climatique : un problème majeur
Nuisances et gestion des déchets
La prévention des risques
Les grandes énergies traditionnelles
Qu’est-ce que l’énergie ?
Les sources d’énergie
Vecteurs et réseaux de l’énergie
Électricité et stockage
Le pétrole brut
Le gaz naturel
Le charbon
Nucléaire et matières fissiles
Les hydrocarbures non conventionnels
Charbon « propre » et nucléaire après Fukushima
Les énergies renouvelables au cœur de la transition énergétique
La biomasse, entre tradition et usages nouveaux
L’hydraulique
L’énergie éolienne
Les énergies solaires
Les autres ressources renouvelables
Les énergies renouvelables sont-elles viables ?
Géopolitique de l’énergie
Échanges, tensions et enjeux de pouvoir
Les grands acteurs de l’énergie
Moyen-Orient, Russie, États-Unis : trois grands producteurs
UE, Chine, Inde : consommateurs contrastés
Le « tournant énergétique » allemand : modèle ou repoussoir ?
L’Afrique subsaharienne : une inconnue énergétique
Le temps de l’action
Accroître l’efficacité et la sobriété énergétique
Diversifier les ressources et les approvisionnements
Transports et mobilité
Aménagement du territoire et urbanisme
Modes de consommation
Réduire les inégalités
Conclusion
Bibliographie et sites Internet
Index
Auteurs
Bertrand Barré était récemment professeur émérite à l’Institut national des sciences et techniques
nucléaires et enseignant à Sciences Po/PSIA, après une longue carrière dans la recherche et
l’industrie nucléaires, en France et à l’étranger. Ancien membre de nombreux conseils scientifiques
et techniques internationaux, il a récemment publié Faut-il renoncer au nucléaire ? (Le Muscadier,
2013) et Pourquoi le nucléaire (Deboeck, 2017).
Bernadette Mérenne-Schoumaker, docteur en sciences géographiques, a toujours partagé son
temps entre la recherche et l’enseignement à la fois dans les domaines de la géographie économique
et de la didactique de la géographie. Spécialiste des activités économiques et du développement
territorial, elle a publié plus de 380 ouvrages et articles, dont Géographie de l’énergie (Belin, 2 éd.,
e

2011), Énergies et minerais (Documentation photographique, 2014), l’Atlas mondial des matières
premières (Autrement, 2 éd., 2015). Elle est aujourd’hui professeur invité à l’université de Liège,
e

donne de nombreuses conférences et formations et conseille différents groupes scientifiques belges et


internationaux.
Cartographe
Anne Bailly est géographe-cartographe (DEA). Après avoir travaillé en bureau d’études privé puis
au ministère de l’Équipement en France puis aux États-Unis pour développer la cartographie dans les
études d’aménagement, elle a créé la SARL AEBK, cartes et communication. Depuis vingt-cinq ans
au sein de cette structure, elle a participé à de très nombreuses études d’échelle régionale, nationale
et internationale en développant l’usage de la cartographie comme média incontournable de
compréhension des territoires. Pour l’édition, AEBK a collaboré à de très nombreuses publications,
dont, pour les éditions Autrement, l’Atlas du développement durable (2002 et 2003).
Maquette
Conception et réalisation : Agence Twapimoa

Coordination éditoriale : Marion Chatizel


Presse : Camille Paulian

ISBN :978-2-7467-4605-3
© 2017, Éditions Autrement.
17, rue de Tournon – 75006 Paris
https://autrement.com

Dépot légal : septembre 2017.

Tous droits réservés. Aucun élément de cet ouvrage


ne peut être reproduit, sous quelque forme que ce soit,
sans l’autorisation expresse de l’éditeur et du propriétaire, les éditions Autrement.
Atlas des énergies mondiales

Introduction

Une consommation énergétique contrainte


La consommation d’énergie : croissance et inégalités
Une consommation d’énergie très contrastée selon les ressources
É nergie et développement
Une énergie de plus en plus chère
La grande question des réserves
Le réchauffement climatique : un problème majeur
Nuisances et gestion des déchets
La prévention des risques

Les grandes énergies traditionnelles


Qu’est-ce que l’énergie ?
Les sources d’énergie
Vecteurs et réseaux de l’énergie
É lectricité et stockage
Le pétrole brut
Le gaz naturel
Le charbon
Nucléaire et matières fissiles
Les hydrocarbures non conventionnels
Charbon « propre » et nucléaire après Fukushima

Les énergies renouvelables au cœur de la transition énergétique


La biomasse, entre tradition et usages nouveaux
L’hydraulique
L’énergie éolienne
Les énergies solaires
Les autres ressources renouvelables
Les énergies renouvelables sont-elles viables ?

Géopolitique de l’énergie
É changes, tensions et enjeux de pouvoir
Les grands acteurs de l’énergie
Moyen-Orient, Russie, É tats-Unis : trois grands producteurs
UE, Chine, Inde : consommateurs contrastés
Le tournant énergétique allemand
L’Afrique subsaharienne : une inconnue énergétique

Le temps de l’action
Accroître l’efficacité et la sobriété énergétique
Diversifier les ressources et les approvisionnements
Transports et mobilité
Aménagement du territoire et urbanisme
Modes de consommation
Réduire les inégalités

Conclusion
Bibliographie et sites Internet
Index
À mes petits-enfants :
Emma, Louise, Camille, Léa, Charlie-Lou, Oscar, Paul, Gabriel,
Éléonore et Adèle Qu’ils trouvent l’énergie d’un développement durable…
B. Barré

À tous les enseignants.


Que cet atlas puisse les aider à mieux former leurs étudiants aux grands
défis de l’énergie…
B. Mérenne-Schoumaker
INTRODUCTION
L’énergie, c’est la vie !
En ce XXIe siècle encore débutant, l’humanité doit faire face à un dilemme crucial : comment
permettre le légitime développement de vastes régions du globe sans compromettre l’équilibre
climatique qui, depuis le Néolithique, a favorisé ce développement. L’énergie est au cœur de ce
dilemme. En effet, il n’y a pas de développement sans un accès minimal à l’énergie mais, si nous
persistons à produire et à consommer l’énergie comme nous le faisons, et compte tenu de la
croissance démographique, nous allons presque sûrement provoquer un dérèglement des climats aux
conséquences potentiellement catastrophiques.

Que s’est-il passé de significatif dans ce domaine depuis la précédente édition de cet atlas ?

L’économie mondiale donne enfin des signes de sortie de la crise de 2008, grâce notamment au
relativement bas prix du pétrole, fixé par l’OPEP en réaction au développement de la production
d’hydrocarbures de roche-mère aux États-Unis. Lors de la COP 21 qui s’est tenue à Paris en 2015, un
consensus international est apparu sur la nécessité d’agir contre le dérèglement climatique : les
engagements volontaires des pays sont encore très insuffisants, mais c’est un premier pas. Espérons
que l’élection de Donald Trump, entré en fonction en janvier 2017, ne viendra pas perturber ce
progrès, compte tenu de ses positions sur le risque climatique… C’est à cette prise de conscience
qu’il faut attribuer l’amorce de réduction de la production du charbon chinois et le début de retour,
encore timide, des véhicules électriques.

Au sein de l’Union européenne, dont le Royaume-Uni s’éloigne à grands pas, on peut se réjouir
d’une légère diminution de la consommation d’énergie, mais la baisse des énergies fossiles
s’accompagne d’une augmentation de leur part importée. Saluons également la progression des
énergies renouvelables, même si l’intermittence de l’électricité éolienne et solaire devient difficile à
gérer. La baisse du nucléaire, notamment en Allemagne, limite les effets de la progression des
énergies renouvelables sur la réduction des émissions de gaz à effet de serre.

En France enfin, le Parlement a voté en 2015 une loi « de transition énergétique pour une croissance
verte ».
Bertrand Barré
Une consommation énergétique contrainte
Si l’humanité a toujours été contrainte dans ses choix énergétiques, elle
l’est sans doute encore davantage aujourd’hui et ce malgré une diversité
croissante des ressources. Se réinterroger sur l’évolution de la
consommation d’énergie au cours du temps éclaire sans aucun doute les
grandes questions actuelles, au même titre qu’un parcours à travers les
continents, car le modèle de consommation de nos pays occidentaux est
loin d’être généralisé.
Il est ainsi possible de découvrir les contraintes des choix déjà réalisés et
surtout celles des choix à venir. Ces contraintes sont diverses :
disponibilité des ressources et des technologies pour pouvoir exploiter ces
ressources, coûts, prix et surtout impacts environnementaux des
productions et des utilisations de l’énergie. Parallèlement, il convient de
repenser les liens entre énergie et développement, car il ne peut être
question d’imaginer une transition énergétique qui laisse sur le bord du
chemin une part non négligeable de la population mondiale.
La consommation d’énergie : croissance et
inégalités
L’histoire de l’humanité est largement liée à celle de l’énergie qui est un facteur clé des évolutions.
Depuis 1973, les changements sont assez spectaculaires : la consommation d’énergie a plus que
doublé et le bouquet énergétique s’est diversifié. Mais les évolutions observées et les moyennes
calculées cachent souvent de fortes disparités, notamment régionales, traduisant bien le maintien de
grandes inégalités.
L’énergie, une composante essentielle de l’histoire de l’humanité
L’évolution du budget énergétique individuel a toujours reflété les grands changements sociétaux.
L’histoire de l’énergie commence sans doute il y a 400 000 ans, voire 500 000 ans selon certains
auteurs, avec la découverte du feu, qui permit d’utiliser le bois. À l’époque, la consommation
annuelle d’énergie par individu se limite alors à 0,1 tep. Quand l’homme se sédentarise et qu’il
développe l’agriculture, il y a 6 000 ans environ, elle passe à 0,4 tep. Cette énergie provient alors
essentiellement de la biomasse (bois, déjections animales et déchets agricoles), sur un modèle proche
de celui pratiqué encore aujourd’hui par un milliard et demi d’individus.
Jusqu’à la fin du XVIII siècle, l’expansion de l’humanité se poursuit sur les bases héritées de la
e

révolution néolithique : utilisation de l’énergie humaine, de celle des animaux domestiques, du vent,
de l’eau courante et surtout du bois, qui est resté la source d’énergie principale jusqu’au milieu du
XIX siècle, entraînant la déforestation de certaines régions européennes. La consommation a au total à
e

peine doublé.
La révolution industrielle change la donne. Intervenue à partir de 1750, celle-ci est en fait une
révolution énergétique qui permet, grâce à la machine à vapeur (mise au point vers 1780 par James
Watt) de déployer des forces vingt à trente fois supérieures aux précédentes. La consommation est
alors multipliée par trois et c’est le début du règne du charbon qui se prolonge jusqu’à la moitié du
XX siècle.
e

Durant les Trente Glorieuses, une nouvelle accélération économique, surtout dans les pays du Nord,
provoque encore un triplement de la consommation énergétique, soutenu par un pétrole très bon
marché et, secondairement, par le recours au gaz naturel et à l’hydroélectricité. Le rythme de cette
croissance, qui conduit à une surexploitation des matières premières et au développement de
pollutions conséquentes, pose problème à certains observateurs dès les années 1970 (avec le cri
d’alarme du Club de Rome en 1972). On commence alors à s’interroger sur la durabilité d’un tel
mode de fonctionnement.
Une évolution récente qui diversifie les sources
Le premier choc pétrolier de 1973-1974 a porté un coup d’arrêt à la croissance La économique des
pays industrialisés. Mais la croissance énergétique mondiale s’est poursuivie ces quarante dernières
années puisque globalement entre 1973 et 2014, la consommation mondiale d’énergie a été
multipliée par 2,2.
Si presque toutes les sources d’énergie ont vu leur contribution augmenter en valeur absolue, seul le
pétrole a connu une réduction de sa part de marché (de 46,1 à 31,3 %). Le charbon, au contraire, a
accru significativement la sienne, passant de 24,6 % à 28,6 %. Cette croissance brutale du charbon,
aux dépens du pétrole, souvent ignorée bien que sensible depuis 2000, aggrave la menace de
changements climatiques. Le gaz connaît actuellement la révolution du gaz de roche-mère, qui
présage sans doute une nouvelle croissance. Après deux décennies de croissance faible (1985-2004),
la contribution relative du nucléaire a baissé depuis 2000 de 6,8 à 4,8 %, subissant peut-être en partie
les conséquences du drame de Fukushima (mars 2011). Enfin, les nouvelles énergies renouvelables
ne représentent encore que 1,4 %.
Une évolution récente qui diversifie aussi les consommateurs
En 1973, à la veille du premier choc pétrolier, il y avait 3,9 milliards d’êtres humains sur Terre ; au 1
er

janvier 2017, la population atteint 7,44 milliards : elle a donc été multipliée par 1,90. L’augmentation
de la consommation de l’énergie s’explique donc partiellement par la croissance démographique qui,
quoique ralentie, reste encore plus de 80 millions d’humains en plus chaque année sur cette planète !
Elle est aussi due à la croissance économique et à l’augmentation des niveaux de vie.
Si les pays riches (en gros ceux de l’OCDE) continuent à accroître leur consommation (moins en
Europe qu’en Amérique du Nord), la consommation moyenne par habitant des pays émergents (en
particulier de la Chine) et du Moyen-Orient et également celle de l’Amérique latine et de l’Afrique
augmentent nettement, contribuant à un certain rééquilibrage géopolitique.La demande d’énergie est
donc de plus en plus portée par les pays émergents.
L’inégalité des consommations dans le monde
Depuis 1900, la consommation individuelle d’énergie d’un habitant moyen de la Terre a en fait été
multipliée par cinq. Mais malgré les croissances observées un peu partout à l’échelle des grandes
régions entre 1973 et 2014, les écarts sont loin d’avoir disparu. La valeur « moyenne » de 1,9
tep/an/habitant décrit donc fort mal la réalité, comme d’ailleurs parfois aussi les moyennes
régionales.
Alors qu’un Américain du Nord dispose de plus de 7 tep/an, un Africain doit survivre avec seulement
0,67 tep/an et parfois moins de 0,40 comme au Cameroun, au Congo (RD) ou au Sénégal  ; il en est
de même de l’Asiatique (hors Chine et Asie-OCDE) qui ne consomme que 0,72 tep/an alors le
Chinois dispose de 2,24 tep/an. Bien sûr, l’Américain ne vit pas deux fois mieux qu’un Allemand
dont la consommation est de 3,78 tep/an, ni qu’un Japonais dont la consommation est de 3,48 tep/an,
mais un facteur 20, ou même 10, est intolérable à terme. Le Sahélien d’aujourd’hui vit un peu comme
l’homme de Sumer, mais ce dernier n’avait pas la possibilité d’utiliser un téléphone portable.
Une consommation d’énergie très contrastée
selon les ressources
Les contrastes entre les grandes régions du monde en matière de consommation énergétique des
différentes ressources sont saisissants. De même, les bilans de production, d’importation et
d’exportation d’énergie révèlent de fortes disparités. Dans les faits, une production importante
n’entraîne pas nécessairement des tonnages exportés importants, comme une forte consommation
n’est pas toujours liée à des tonnages importés en masse. Les profils régionaux sont donc multiples.
L’interdépendance mais pas la vulnérabilité
Nous partageons une seule planète, dont les ressources sont distribuées suivant les aléas de la
géographie et les zones de consommation selon ceux de l’histoire. La distribution de ces dernières
sur base des six grandes ressources met en évidence à la fois des constantes et des disparités, surtout
si l’on fait abstraction de la biomasse qui est avant tout consommée dans les pays des Suds. Par
exemple, Amérique du Nord, Europe et Chine se retrouvent souvent parmi les grands consommateurs
de la plupart des autres ressources. Le cas du Moyen-Orient est quant à lui assez exceptionnel car il
n’apparaît réellement que sur la carte du pétrole, voire sur celle du gaz.
Imaginer que les bouquets énergétiques soient identiques partout est dès lors un leurre, comme celui
de croire que chaque pays puisse vivre en autarcie énergétique. D’ailleurs, pourquoi se limiter aux
pays ? Voudrait-on la même indépendance pour chaque province, chaque canton ? En Europe
particulièrement, il faut viser une saine interdépendance tout en réduisant la vulnérabilité. Une
dépendance énergétique de 50 %, comme celle de l’UE en 2000, était tolérable, mais sa montée
prévue à 70 % en 2030 est d’autant plus préoccupante qu’elle sera peu diversifiée dans ses lieux
d’approvisionnement, plus d’un tiers du gaz naturel et du pétrole et près de 30  % du charbon venant
actuellement de la Russie.
Énergie et développement
De même que boisson et nourriture, vêtements et logement, santé et éducation, mobilité et
communication, l’énergie est fondamentale pour l’être humain. Elle contribue à la satisfaction de
nombreux besoins : irrigation, cuisson des aliments et réfrigération des denrées, construction et
chauffage de logements (sans parler de climatisation)… Une consommation maîtrisée de l’énergie
est une des clés du développement durable.
Consommation d’énergie et PIB
L’économie moderne repose sur la consommation d’énergie, qu’il s’agisse des productions agricoles,
industrielles et même des services. En effet, contrairement à ce que l’on croit souvent, le secteur
tertiaire consomme aussi de l’énergie, principalement sous forme d’électricité ; l’informatisation
récente de la plupart de ces activités a d’ailleurs fortement accru les consommations.
La mobilité de plus en plus grande des biens et services, comme celle des agents économiques, est
aussi responsable de l’augmentation des consommations. Il est donc logique d’observer un lien entre
la croissance ou la décroissance annuelle de la consommation d’énergie et l’évolution du produit
intérieur brut (PIB). Ce dernier représente la valeur ajoutée totale des biens et des services produits
en un an sur un territoire national, voire dans le monde (comme sur le graphique). Il ne tient toutefois
compte que des biens et services de l’économie officielle et exclut donc le secteur informel,
l’autoconsommation et les services gratuits, parfois importants dans certaines régions.
Tant pour l’énergie que pour le PIB, les fluctuations ont été fortes au fil des décennies, faisant
notamment ressortir l’impact des deux grands chocs pétroliers (1973-1974 et 1979-1981), ainsi que
la crise économique de 2008-2009.

L’électricité, indispensable au développement humain


Aujourd’hui, 1,185 milliard d’hommes sur Terre n’ont pas accès à l’électricité : 634 millions en
Afrique (essentiellement en Afrique subsaharienne) et 512 millions en Asie (dont 244 millions en
Inde). Cela représente 16 % de la population mondiale mais, en pourcentages, les différences entre
Afrique et Asie sont fortes puisque la part de la population sans électricité est de 55 % en Afrique (65
% en Afrique subsaharienne), contre « seulement » 14 % en Asie (19 % en Inde). Partout, de grands
contrastes entre le monde urbain et le monde rural existent, l’Agence internationale de l’énergie
estimant que la part des habitants ne disposant pas d’électricité est de 5 % dans le premier cas contre
29 % dans le second.
Vivre sans éclairage le soir empêche les enfants de faire leurs devoirs et d’apprendre des leçons  ;
sans réfrigérateur, impossible de conserver des vaccins et de nombreux médicaments ; sans pompage,
l’irrigation et l’approvisionnement en eau douce sont limités. Dans ces conditions, il n’est pas
surprenant de constater une corrélation forte entre l’accès à l’énergie, en particulier à l’électricité, et
la plupart des indicateurs qui entrent dans la composition de l’indice de développement humain
(IDH), au moins tant qu’un accès minimal n’est pas atteint. Au-delà de ce minimum, sans lequel il
n’y a pas de développement possible, on entre dans la zone du confort où cette corrélation disparaît,
voire dans les problématiques du gaspillage.
La consommation d’énergie : nécessité, confort ou gaspillage ?
L’IDH cherche à traduire le niveau de développement non du pays mais de sa population. Dans la
partie droite du graphique ci-contre, on ne voit aucune corrélation évidente entre la quantité d’énergie
accessible aux habitants d’un pays donné et leur niveau de développement humain. En revanche,
dans la partie gauche, la corrélation est dramatique : les pays qui consomment très peu d’énergie ont
des niveaux de développement très faibles. On notera que les quatre pays consommant plus de
10 tep/habitant sont de petits États et que deux d’entre eux (le Qatar et le Koweït) sont de grands
producteurs d’hydrocarbures qui ne doivent guère jusqu’à présent économiser l’énergie…
Une énergie de plus en plus chère
L’arrivée sur le marché des économies émergentes, la raréfaction des ressources pétrolières faciles
d’accès, la croissance démographique, la prise en compte des externalités, dont le coût des
émissions de CO2… : tout semble favoriser l’augmentation du prix de l’énergie. Ce constat n’est
pas réjouissant pour les pays en développement dépourvus de ressources en hydrocarbures, mais un
coût élevé rendra plus vite compétitives les sources d’énergies renouvelables.
Le prix du pétrole, prix directeur de l’énergie
Pendant un siècle, le prix du baril de pétrole, contrôlé par le cartel des «  Majors », est resté stable et
bas. Les choses ont changé avec la décolonisation des années 1960 et la création de l’Opep au
congrès de Téhéran en 1970.
Les deux chocs pétroliers (1974 et 1979). En riposte à la guerre du Kippour, les pays du Moyen-
Orient producteurs de pétrole ont réduit leurs productions, le prix de référence passant de 2,59
US$/baril à 11,65 US$/baril de septembre 1973 à mars 1974 (fin de l’embargo). Ce choc a entraîné
une crise économique globale au cours des années 1970. En France, il a provoqué l’accélération du
programme électronucléaire. La révolution iranienne puis la guerre entre l’Iran et l’Irak
déclenchèrent une deuxième hausse vertigineuse des prix du pétrole : de 14 US$/baril en 1978 à 35
US$/baril en 1981. Ces prix élevés ont permis d’augmenter la production hors Moyen-Orient et de
réduire la croissance de la consommation du fait de politiques d’économies d’énergie.
Le contre-choc de 1986. L’Arabie saoudite doubla sa production en 1986 entraînant un
effondrement des prix l’année suivante. Ces bas prix ont stimulé la consommation et ralenti la
production hors Moyen-Orient, où les coûts d’exploitation sont plus élevés. Les prix sont remontés à
partir du boom économique aux États-Unis et en Asie au milieu des années 1990 et jusqu’à la crise
asiatique de 1997. Ils ont ensuite chuté jusqu’en février 1999 pour atteindre 10 US$/baril. À partir de
mars 1999, à la suite d’un accord de réduction de la production des pays producteurs, les prix ont
augmenté jusqu’à atteindre plus de 30 US$/baril un an plus tard. L’Opep décida alors d’augmenter la
production pour stabiliser les prix entre 20 et 25 US$/baril.
L’arrivée de la Chine. Entre 2003 et 2007, le cours du pétrole a connu un niveau historique très
élevé, du fait notamment du dynamisme de l’économie chinoise, de l’émergence de pays
nouvellement industrialisés ainsi que de plusieurs crises politiques (Russie, Venezuela). Après une
baisse en 2009, les prix ont oscillé autour de 110 $ entre 2011 et 2014.
L’irruption de l’huile de roche-mère. En réaction à l’augmentation brutale de la production
américaine depuis 2011, l’Arabie saoudite a voulu maintenir sa part de marché, ce qui a entraîné une
surproduction mondiale et la baisse brutale des prix en mai 2014 autour de 50 $ le baril, prix très
supérieur au coût de production saoudien mais difficile à tenir par la concurrence. Ce prix reste
néanmoins bien au-dessus des 20 $ de 2002 ou des 10 $ de 1998.
Internaliser les externalités
Évaluer une filière énergétique isolée de son contexte n’a pas de sens. Il faut la comparer aux autres
voies permettant d’obtenir le service recherché. Encore faudrait-il que l’analyse économique tienne
compte de tous les effets d’une décision, ce qui est rare. Lorsque le bilan économique d’une activité
ne prend pas en compte certains de ses impacts, ces derniers sont qualifiés d’externalités et sont
payés par la collectivité. La pollution est l’exemple type d’une externalité négative.
Pour internaliser une externalité, on peut mettre en œuvre la ou les mesures qui permettent de
supprimer la nuisance ; et calculer l’impact économique de la nuisance puis l’introduire dans le coût.
C’est un des rôles de la taxation. L’analyse du cycle de vie doit prendre en compte les externalités.

Les coûts actualisés


Pour comparer sur une période étendue la rentabilité future escomptée de deux investissements dont
les calendriers de dépense et de recette sont différents, on utilise la méthode de l’actualisation, qui
traduit numériquement le fait qu’un euro aujourd’hui vaut plus que le même euro dans un an, même
en l’absence d’inflation. Le proverbe « un “tiens” vaut mieux que deux “tu l’auras” » illustre bien
cette méthode. On établit donc pour chaque option le calendrier des dépenses et des recettes
annuelles futures, le tout à monnaie constante. Puis on choisit un taux d’actualisation (« i ») un peu
analogue au taux d’intérêt d’un emprunt. Les dépenses et recettes de l’année (« n ») sont alors
diminuées en les divisant par (1+ i) pour traduire le fait que, plus l’échéance s’éloigne d’aujourd’hui
n

(plus « n » augmente), moins les dépenses futures paraissent pénibles et moins les recettes futures
semblent attrayantes.
Ensuite, on additionne, sur tout le calendrier, les dépenses et les recettes ainsi « actualisées », et on
compare. Sur le graphique des coûts prévus de production de l’électricité, le taux varie de 3 à 10 %.
La grande question des réserves
À l’échelle de la planète, les quantités totales de charbon, pétrole, gaz naturel, uranium, thorium et
lithium sont énormes mais toutes ne sont pas accessibles avec les technologies disponibles et
certaines ne le seront sans doute jamais. Parmi les ressources accessibles, toutes ne sont pas
exploitables économiquement, du moins dans le cadre d’un impact tolérable sur l’environnement.
La notion de réserve évolue donc dans le temps et varie en fonction d’hypothèses pas toujours
explicites.
Il y a réserve et réserve…
Les réserves correspondent aux ressources identifiées et économiquement exploitables : elles varient
en fonction des coûts et du perfectionnement des techniques de production. La notion de ressource
est moins précise puisqu’elle englobe les gisements non encore découverts (comment, dès lors, les
estimer ?) et ceux dont l’exploitation n’est pas rentable : les seules données vraiment fiables ne
peuvent donc concerner que les réserves. Toutefois, même en ce qui les concerne, il existe des
divergences selon les sources, notamment pour le pétrole.
En outre, les estimations des réserves ne dépendent pas seulement de facteurs techniques ou
économiques, mais traduisent aussi les stratégies des États et des firmes. Cela est bien mis en
évidence par les deux comptabilités des réserves de pétrole : la première – les réserves politiques –
prend en compte les réserves déclarées par les États et les compagnies, et la deuxième – les réserves
techniques – est obtenue par scouting, forme d’espionnage industriel donnant des réserves prouvées
et probables plus proches de la réalité, vendues à bon prix par des compagnies privées. Depuis 1990,
les réserves politiques sont supérieures aux réserves techniques, suite au réajustement vers le haut des
réserves de l’Opep en 1986 au moment de l’introduction des quotas.
Les réserves, selon les « 3 P » des pétroliers
Pour évaluer la quantité de pétrole qu’ils pourront extraire d’un gisement, les pétroliers ont une
approche probabiliste dite « 3 P ». Les sondages exploratoires donnent une fourchette de quantités :
on a 100 % de chances d’extraire au moins le minimum et 0 % de chances d’extraire plus que le
maximum. On considère alors comme :
– prouvées (1 P) les quantités qu’on a 90 % de chances d’extraire ;
– prouvées + probables (2 P) ce qui correspond à 50 % de chances ;
– prouvées + probables + possibles (3 P) ce qu’on a 10 % de chances d’extraire in fine.
Ces 3 P s’appliquent aux gisements en production et en développement techniquement et
économiquement exploitables aux conditions du moment : c’est ce que l’on appelle les réserves. Les
ressources comprennent en outre de nouvelles réserves encore à découvrir, ou que des progrès
techniques rendront exploitables. Quant aux ressources ultimes, une bonne part ne sera jamais
exploitée.
Des réserves inégalement distribuées
Converties en milliards de tep, les réserves prouvées de charbon représentent 2,5 fois celles du
pétrole et 3,7 fois celles du gaz naturel. Elles sont particulièrement abondantes en Asie-Océanie
(Chine, Inde et Australie), en Amérique du Nord et en Russie. 45 % des réserves prouvées de pétrole
et 43 % de celles du gaz se trouvent au Moyen-Orient. Quant aux réserves identifiées d’uranium, on
les retrouve principalement dans 9 pays dont plus de 23 % en Australie et plus de 12 % au
Kazakhstan.
Le réchauffement climatique : un problème
majeur
Comme toutes les activités humaines, la production et l’utilisation d’énergie provoquent nuisances,
accidents, pollutions, etc. Ces nuisances sont cependant moindres que celles dues à la pénurie
d’énergie. La plupart ont un caractère local, voire régional, à une exception près  : l’impact sur le
climat des émissions atmosphériques de gaz à effet de serre liées à l’utilisation des combustibles
fossiles.
Du jamais vu dans l’histoire de l’humanité
En analysant les « carottes » de glace prélevées dans les calottes polaires, au Groenland et surtout en
Antarctique, on peut à la fois estimer la température à laquelle se sont formés les cristaux de neige
qui ont composé cette glace et mesurer la composition en gaz des petites bulles d’air emprisonnées
dans cette dernière. Il est ainsi possible de reconstituer la température moyenne de la surface terrestre
et la composition de son atmosphère en remontant très loin dans le passé. Les derniers carottages ont
atteint une profondeur de glace de 3,5 km, ce qui correspond à de la neige tombée il y a plus de
800 000 ans. Cette très large période comprend plusieurs glaciations et plusieurs réchauffements
planétaires. En période glaciaire, la concentration de CO dans l’air est voisine de 180 vpm (volumes
2

de CO par million de volumes d’air) et, en période interglaciaire, elle monte à 280 vpm.
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Depuis le début de l’ère industrielle, cette concentration s’est envolée pour atteindre presque 400
vpm, et il ne fait aucun doute que l’activité humaine en est responsable. Cette montée des
concentrations de CO et des autres gaz à effet de serre explique au moins la moitié du réchauffement
2

rapide enregistré depuis cinquante ans. Les cinq années les plus chaudes jamais mesurées sont, dans
l’ordre, 2016, 2015, 2014, 2010 et 2005.
L’effet de serre
Bien que notre planète dispose de son propre chauffage central (la géothermie due à sa radioactivité),
la température de sa surface est déterminée par l’équilibre entre l’énergie qu’elle reçoit du soleil sous
forme de lumière visible et l’énergie qu’elle émet dans l’espace sous forme de rayonnement
infrarouge. Dans cet équilibre, l’atmosphère laisse passer l’essentiel de la lumière visible, mais
absorbe la plupart des infrarouges qu’elle renvoie en partie vers l’espace mais aussi vers la Terre,
dont elle augmente ainsi la température de surface. La vapeur d’eau naturelle, présente dans
l’atmosphère et venue de l’évaporation des océans, joue le rôle principal dans cet « effet de serre ».
Le rôle du CO émis par l’homme. Certains gaz émis par l’homme, dont le principal est le gaz
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carbonique CO , augmentent l’absorption par l’atmosphère du rayonnement infrarouge, et donc


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l’effet de serre. La concentration du CO a augmenté de 40 % depuis l’époque préindustrielle. Cette


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augmentation s’explique en premier lieu par l’utilisation de combustibles fossiles et en second lieu
par la déforestation. L’océan a absorbé environ 30 % des émissions anthropiques de dioxyde de
carbone, ce qui a entraîné une acidification de ses eaux. La montée rapide de la concentration dans
l’atmosphère de ces gaz à effet de serre d’origine humaine commence à perturber l’équilibre
thermique de la surface terrestre. On constate non seulement un réchauffement global mais une
montée des eaux océaniques et une diminution du volume des glaciers. Certains scientifiques non
spécialistes du climat, sans nier l’augmentation de la concentration de ces gaz dans l’atmosphère,
estiment que le rapport entre cette augmentation et le réchauffement constaté est exagéré par les
climatologues et que ceux-ci sous-estiment la variabilité des facteurs naturels. Cette contestation, très
médiatisée, est minoritaire.
L’inertie du phénomène. Ce n’est que depuis les années 1970 que commencent à se manifester les
effets de l’augmentation des émissions liée au décollage industriel de l’après-guerre. Ces effets sont
encore modestes aujourd’hui mais les projections des experts à l’horizon de la fin du XXI  siècle e

laissent entrevoir un scénario catastrophique.


Combien de CO2 par kWh ?
L’électricité pouvant être fabriquée à partir de toutes les sources d’énergie primaire, elle fournit un
élément de comparaison entre ces sources à service rendu égal (production de 1 kWh électrique) en
ce qui concerne les émissions de gaz à effet de serre. Toutefois, il faut comptabiliser les émissions
sur tout le cycle de vie de l’installation de production – éolienne, barrage ou centrale –, du berceau à
la tombe, ainsi que celles occasionnées par l’élaboration des matériaux (béton, acier, aluminium,
silicium) qui ont servi à la construire. En outre, il faut tenir compte du plus ou moins bon rendement
des installations (d’où les barres d’incertitude du graphique ci-contre). Il en ressort que les émissions
des énergies nucléaire et renouvelables sont négligeables par rapport à celles des énergies fossiles –
charbon, pétrole et gaz naturel. Toutefois, la capture et le stockage du CO à la sortie des centrales à
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charbon ou à gaz amélioreraient sensiblement la situation.


Nuisances et gestion des déchets
Toutes les énergies peuvent causer à l’environnement des dommages de natures différentes selon
les sources utilisées. L’énergie « propre » n’existe donc pas. On réserve le terme déchets aux
solides. Pour les liquides et les gaz, on parle d’effluents. L’évacuation des déchets peut se faire par
stockage dans des installations appropriées, ou par dilution dans l’environnement, en évitant qu’ils
n’occasionnent des pollutions.
Trois nuisances du charbon
Le grisou (méthane) est un mélange explosif avec l’air lorsque sa concentration dépasse 6  %. Dans la
plupart des mines, une bonne ventilation suffit à éliminer le risque d’explosion, mais il existe des
mines « grisouteuses » où ce risque est réel. Rien qu’en Chine, les accidents causent des milliers de
morts chaque année. Ceci ne concerne que les mines souterraines.
La silicose a frappé quasiment toute la génération de mineurs français employée avant 1945. Depuis,
l’abattage systématique des poussières a fait progressivement disparaître cette maladie
professionnelle des mines françaises. Mais ailleurs dans le monde, ses ravages continuent.
La pollution atmosphérique des centrales à charbon les plus anciennes provoque aussi des maladies
pulmonaires dans de vastes populations environnantes et fait du charbon la source d’énergie de
beaucoup la plus nuisible à la santé publique. Quant aux mines de lignite à ciel ouvert, elles dévastent
les paysages et nécessitent souvent l’évacuation de populations (comme les barrages hydrauliques).
La pollution des mers et des océans par le pétrole
On estime à six millions de tonnes par an la quantité d’hydrocarbures introduite dans les océans par
l’activité humaine. Au total, on a recensé plus de 160 marées noires depuis 1967 ; leurs causes sont
multiples et les responsabilités sont difficiles à établir. Outre les accidents, il y a les pollutions
volontaires par déballastage ou dégazage des pétroliers.
Agrocarburants
et déforestation
L’huile de palme était utilisée pour l’alimentation humaine et animale, et pour la fabrication de
cosmétiques. Désormais, elle l’est aussi pour les agrocarburants en raison d’une demande énorme des
pays du Nord. Aujourd’hui, l’Indonésie et la Malaisie fournissent 90 % du marché mondial.
7,3 millions d’hectares sont consacrés à la production d’huile de palme pour les carburants et le
gouvernement indonésien a alloué 20 millions d’hectares supplémentaires pour ces cultures. La
déforestation et la pollution des sols et des eaux vont donc s’accroître.
Les déchets des combustibles fossiles
Les déchets d’hydrocarbures proviennent de l’entretien et du nettoyage d’installations de stockage et
de distribution de carburant, de production et de distribution d’énergie et des activités de transport.
Ils peuvent également provenir d’une pollution accidentelle : le brut gorgé d’eau récupéré lors du
nettoyage des marées noires constitue un déchet encombrant. Les terrils de déchets qui ponctuaient
jadis les paysages miniers sont progressivement éliminés, mais une centrale à charbon produit un
volume énorme de déchets solides (60 000 m par an et par TWh), peu dangereux il est vrai. En
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revanche, les poussières contiennent mercure, arsenic et éléments radioactifs.


La gestion des déchets radioactifs
Toutes les activités humaines produisent des déchets et des effluents, mais le public est
particulièrement sensible à la gestion des déchets radioactifs, la plus réglementée et la plus surveillée
de toutes. On classe les déchets radioactifs en deux grandes catégories :
- les déchets faiblement radioactifs (FA ou TFA) constituent le gros du volume des déchets mais ne
contiennent qu’une faible partie de leur radioactivité. Leur origine est diverse (hôpitaux, laboratoires,
industrie nucléaire). Après conditionnement, on en dispose dans des sites de stockage, dont le niveau
de radioactivité sera redevenu proche du niveau naturel au bout de deux ou trois siècles ;
- les déchets d’activité moyenne (MA-VL) et les déchets de haute activité (HA) contiennent des
éléments radioactifs à longue durée de vie. Ils proviennent des combustibles usés déchargés des
réacteurs nucléaires. Ils rassemblent l’essentiel de la radioactivité totale, et cette radioactivité ne
décroît que lentement. Il faut donc les confiner sur des périodes (100 000 ans ou plus) très longues à
l’aune de l’histoire humaine, mais très courtes à celle des couches géologiques souterraines stables
où on veut les stocker. Certains pays considèrent qu’un combustible nucléaire usé constitue un déchet
HA dans sa globalité. D’autres pays, dont la France, considèrent qu’il contient des matières et des
déchets qu’il convient de séparer pour recycler les matières et conditionner les déchets.
Confinement, stockage géologique
Il faut confiner les déchets radioactifs HA et MA-VL : garantir que les éléments radioactifs resteront
là où on les a installés, ou que le temps qui leur serait nécessaire pour migrer jusqu’à la surface soit
suffisamment long pour que leur radioactivité soit alors retombée très en dessous du niveau
acceptable.
La communauté scientifique internationale considère que le confinement idéal est offert par le
stockage en couche géologique profonde, en mettant en œuvre des barrières multiples. La première
barrière est la matrice de conditionnement qui retient les produits radioactifs. Une deuxième
« barrière ouvragée » retarde la migration des produits ayant échappé à la première barrière, et la
barrière ultime est constituée par la couche géologique où sera implantée l’installation de stockage.
On prévoit que les colis de déchets puissent être récupérés durant un ou deux siècles  : on parle de
« stockage géologique réversible ».
Un stockage géologique est opérationnel depuis 1998 aux États-Unis, mais il n’accepte que les
déchets d’origine militaire. La Finlande et la Suède ont choisi leurs sites de stockage et en
commencent l’installation. La loi française de juin 2006 prévoit l’ouverture du stockage géologique
CIGEO en 2025, proche de Bure où un laboratoire souterrain permet de caractériser la couche
d’argile sélectionnée.
La prévention des risques
L’énergie modifie l’état des systèmes : mal contrôlée, elle peut provoquer des accidents, aux stades
de sa production, son transport, sa transformation et son utilisation finale. Pour contrer ces risques,
les industries aéronautique et nucléaire ont développé une « culture de sûreté » : défense en
profondeur, redondance et diversité des systèmes de sécurité, entraînement des personnels sur
simulateurs, analyses probabilistes, etc.
Les risques des énergies
Les énergies fossiles. Les accidents dans les mines souterraines de charbon causent chaque année
des milliers de morts : coups de grisou, coups de poussier, inondations, éboulements, sans compter la
silicose et autres maladies professionnelles… La mine reste un métier à risques  ! Si les mines à ciel
ouvert ne présentent pas ces dangers, leur impact sur l’environnement peut être dévastateur.
L’incendie d’un puits de pétrole reste un événement rare, mais le travail sur plateformes pétrolières
en haute mer n’est pas dépourvu de danger. Le gaz, lui, est à l’origine de peu d’accidents mortels en
amont de sa chaîne de production, mais les explosions de gaz domestique sont quotidiennes. En
revanche, contrairement au vieux « gaz de ville »,le gaz naturel n’est pas toxique. L’Institut suisse
Paul Scherrer (IPS) a compilé les statistiques d’accidents mortels liés à l’énergie dans le monde
entier, de 1969 à 2000. Vu leur importance, il a fallu mettre à part les accidents dus au charbon en
Chine. Le résultat de cette étude démontre que le GPL (gaz propane liquéfié) est la source d’énergie
la plus dangereuse, suivie par le pétrole et le charbon (hors Chine). Les morts du nucléaire sont les
morts immédiates dues à l’accident de Tchernobyl en 1986. Les décès tardifs dus à cette catastrophe
dans les soixante-dix ans à venir pourraient au maximum atteindre 4 000, chiffre bien inférieur aux
décès tardifs causés par les combustibles fossiles.

Les énergies renouvelables. Il est trop tôt pour évaluer les risques, probablement faibles, du solaire
(chutes durant l’installation et le nettoyage des panneaux et chauffe-eau), mais en revanche les
ruptures de barrage (de l’ordre d’une par an dans le monde), occasionnent chaque fois d’une centaine
à plusieurs milliers de morts. En 1975, la rupture du barrage de Bangio-Shimantan, en Chine, a coûté
la vie à plus de 30 000 personnes. Quant à la biomasse traditionnelle, c’est au niveau de la qualité de
l’air qu’elle est dangereuse : l’OMS considère qu’elle fait chaque année plus de victimes que la
malaria.
La sûreté nucléaire
L’industrie nucléaire manipule une grande quantité de produits radioactifs potentiellement
dangereux. Elle est en cela comparable à d’autres industries (chimie, pharmacie…) mettant en œuvre
des produits qui peuvent être très nocifs et qui sont parfois incolores et inodores comme la
radioactivité, mais beaucoup plus difficiles à détecter et à mesurer. L’industrie nucléaire doit en plus
maîtriser deux autres risques spécifiques : le contrôle de la réaction en chaîne et l’évacuation de la
chaleur résiduelle que continuent à dégager les produits radioactifs après l’arrêt de cette réaction.
L’accident de Tchernobyl (1986) a été provoqué par le premier risque, tandis que ceux de Three Mile
Island (1979) et Fukushima (2011) l’ont été par le second.
L’exigence de la sûreté nucléaire est de garantir en toutes circonstances le confinement de la
radioactivité. Ce confinement est assuré par des barrières multiples, emboîtées et indépendantes.
Comment mesure-t-on la gravité d’un événement nucléaire ?
Par analogie avec l’échelle de Richter pour les séismes, on a défini en 1991 au niveau international
l’échelle INES, pour permettre au public d’évaluer le degré de gravité d’un événement (anomalie,
incident ou accident) affectant une installation nucléaire. Les événements sont ainsi classés par
gravité croissante, de 1 à 7. En France, les exploitants déclarent chaque année une centaine
d’anomalies de niveau 1 et de un à trois incidents de niveau 2. Nous n’avons connu que deux
accidents proprement dits, de niveau 4. Les deux événements de niveau 7 survenus à ce jour dans le
monde sont les accidents de Tchernobyl et de Fukushima.
Qu’appelle-t-on exactement la non-prolifération ?
La « prolifération » est l’augmentation du nombre d’États dotés d’un armement nucléaire.
Inversement, on parle de « non-prolifération » pour désigner les moyens politiques ou techniques mis
en œuvre pour combattre la prolifération. Entré en vigueur en mars 1970, le traité de non-
prolifération (TNP) a tenté de figer ce phénomène en reconnaissant cinq puissances nucléaires
légitimes, mais pas davantage. En échange, les puissances nucléaires s’engageaient à réduire leur
armement et à ne pas freiner les transferts de technologie civile. Le rôle de contrôleur de l’utilisation
pacifique des matières nucléaires est confié à l’Agence internationale de l’énergie atomique (AIEA),
créée par l’ONU à Vienne en 1956.
EN CONCLUSION
Une consommation énergétique contrainte
FAIRE FACE À LA DEMANDE
Tout au long de l’histoire, la consommation d’énergie a augmenté globalement et aussi par individu,
malgré de grandes inégalités entre les consommations individuelles. Les ressources se sont
diversifiées mais le mix énergétique reste dominé à plus de 85 % par les énergies fossiles. Ces
énergies n’étant pas renouvelables, cela pose la question non seulement de la pérennité des réserves
à moyen terme mais encore des coûts et donc des prix car les ressources découvertes récemment,
comme les nouveaux gisements mis en exploitation, sont de moins en moins accessibles et exigent
des technologies de plus en plus coûteuses.
RÉDUIRE LES IMPACTS ENVIRONNEMENTAUX
Parallèlement, la production et l’utilisation de l’énergie engendrent nuisances, accidents et
pollutions, le plus souvent à l’échelle locale ou régionale, à une exception près : l’impact sur le
climat des émissions atmosphériques de gaz à effet de serre (GES) liées à l’utilisation des
combustibles fossiles. Réduire ces GES tout en assurant de l’énergie à tous les hommes apparaît
comme le plus grand défi de la transition énergétique.
Les grandes énergies traditionnelles
La définition de l’énergie paraît souvent un peu abstraite, mais tout le
monde sait à quoi elle sert : alimentation, chauffage, éclairage,
construction, industrie, transports, communications, loisirs, partout nous
consommons de l’énergie pour adapter à nos besoins le monde qui nous
entoure.
Les sources d’énergie sont multiples et chacune a des avantages et des
nuisances. Ce chapitre est consacré aux « grandes énergies
traditionnelles », celles qui alimentent l’essentiel de nos consommations
depuis la révolution industrielle, grâce à la combustion et, marginalement,
à la fission.
Toutes ces énergies sont naturelles, même si le gaz est le seul à bénéficier
de cette flatteuse épithète, mais ce sont des énergies « de stock », non
renouvelables à l’échelle humaine et donc épuisables à terme. Ceci dit,
leurs réserves sont encore considérables et les progrès techniques
permettent aujourd’hui de tirer parti de ressources minérales jadis
inexploitables.
Qu’est-ce que l’énergie ?
L’énergie, c’est ce qui permet de modifier le monde qui nous entoure : la chaleur peut faire bouillir
de l’eau, l’énergie mécanique mettre un véhicule en mouvement, etc. Les lois de l’énergie
(thermodynamique) datent du XIXe siècle. Elles concernent la conservation de l’énergie lors des
changements d’état d’un système isolé et la dégradation de l’énergie mécanique en chaleur. Nous
savons aussi qu’énergie et masse sont deux aspects d’une même propriété de la matière.
Les différentes formes d’énergie
Dans la vie courante, on rencontre l’énergie et on l’utilise sous les formes suivantes :
– mécanique : celle des moteurs, des muscles ;
– calorifique : celle de la chaleur, du chauffage, de la cuisson ;
– cinétique : celle de la voiture, de la balle de tennis, du vent ;
– chimique : celle de la nourriture, des carburants ;
– lumineuse : celle qu’on reçoit du soleil, celle des lasers ;
– nucléaire : celle des étoiles, des centrales nucléaires.
Il s’agit bien de différentes formes de la même chose. C’est pourquoi on peut passer d’une forme à
l’autre. On utilise les mêmes unités pour les mesurer. Par exemple, l’énergie chimique du mélange de
l’essence et de l’air se transforme en énergie calorifique dans le cylindre du moteur de voiture, puis
en énergie mécanique du piston, ensuite transmise aux roues, et finalement en énergie cinétique de la
voiture, tandis qu’une petite partie de l’énergie mécanique est transformée en énergie électrique dans
l’alternateur et en énergie lumineuse dans les phares.
Les unités d’énergie selon les utilisateurs
Les scientifiques utilisent en général deux unités pour mesurer l’énergie. Pour la physique courante,
c’est le joule (J), une unité qui mesure le travail nécessaire pour soulever de 10 centimètres une
masse de 1 kilo. À l’échelle de l’atome, l’unité d’énergie est l’électronvolt (eV), qui est l’ordre de
grandeur des échanges d’énergie entre molécules lors des réactions chimiques. La puissance qui
produit un joule en une seconde s’appelle le watt (W). Comme le joule est très petit, on utilise
souvent dans la vie courante le kilowattheure (kWh), qui vaut 3,6 millions de joules (il apparaît sur
les factures d’électricité).
Les économistes, pour qui le kilowatt/heure est trop petit, ont inventé une unité plus commode, la
tep, tonne d’équivalent pétrole : 1,9 tep représente la consommation moyenne d’énergie par an d’un
habitant de notre planète. Pour la consommation d’un pays, on parlera de millions de tep (Mtep),
voire de milliards de tep (Gtep).
Transformer les autres sources d’énergie en « équivalent pétrole » comporte un certain degré
d’arbitraire. Si cette conversion semble facile pour les autres combustibles, charbon et gaz naturel,
elle est moins évidente pour l’électricité des barrages ou des éoliennes ou même pour l’électricité
d’origine nucléaire.
Dans cet ouvrage, nous utilisons les coefficients de conversion de l’Agence internationale de
l’énergie. C’est ainsi que l’hydraulique, qui produit plus d’électricité que le nucléaire, est
comptabilisée par un chiffre moitié du sien en énergie primaire.
L’énergie diffère selon l’endroit où on la mesure
L’énergie primaire. On appelle énergie primaire celle qu’on recueille ou qu’on récupère
directement de la nature : pétrole brut sortant du puits, charbon extrait de la mine, chute d’eau au
pied d’un barrage, énergie lumineuse arrivant sur un capteur solaire ou chaleur produite dans le cœur
d’une centrale nucléaire.
L’énergie secondaire. Il est rare d’utiliser directement l’énergie primaire. En général, on la convertit
en énergie secondaire, électricité ou carburant, dans des raffineries ou des centrales électriques.
L’énergie finale. Mais, primaire ou secondaire, l’énergie doit encore être transportée et distribuée à
son utilisateur : on parle alors d’énergie finale. L’énergie finale désigne par exemple l’essence dans
le réservoir, le gaz naturel au brûleur de la cuisinière, ou l’électricité à la prise de courant. Dans le
bilan mondial de consommation d’énergie finale, la moitié est consacrée au chauffage (chauffage des
locaux et chaleur industrielle), un tiers sert aux déplacements de toutes natures et un sixième est sous
forme d’électricité spécifique.
Comme on consomme de l’énergie pour les étapes de conversion, de transport et de distribution,
l’énergie finale n’est qu’une fraction de l’énergie primaire. Sur le plan mondial, toutes énergies
confondues, l’énergie finale représente un peu plus de la moitié de l’énergie primaire.
L’énergie utile. L’énergie finale n’est pas notre besoin ultime. Le déplacement en voiture, la cuisson
des aliments, l’éclairage des pièces et l’alimentation de notre téléviseur constituent l’énergie utile qui
n’est qu’une fraction de l’énergie finale.
Les sources d’énergie
Nos lointains ancêtres n’avaient comme source d’énergie que la chaleur solaire directe et les
calories de leur nourriture... crue. Puis l’homme a appris à maîtriser le feu et à utiliser le bois qui est
resté la source d’énergie principale jusqu’au milieu du XIXe siècle. Le charbon est alors devenu la
source prépondérante, avant l’ère du pétrole-roi, presque rejoint aujourd’hui par le gaz. Le
nucléaire, bien plus récent, occupe encore une place modeste.
Les énergies « de stock »
L’essentiel de la consommation mondiale d’énergie est assuré aujourd’hui en puisant dans les stocks
non renouvelables de combustibles fossiles, pétrole, charbon et gaz, et de matières fissiles, uranium
et thorium. En fait, la planète continue à fabriquer du charbon et des hydrocarbures, mais à un rythme
si lent que ce renouvellement est négligeable. L’évaluation de la taille des stocks récupérables est
difficile et leur épuisement est inéluctable.
En cherchant plus loin et plus profond, en perfectionnant les technologies d’exploration et
d’extraction, on pourra exploiter des ressources moins concentrées mais à un coût supérieur et avec
une dépense d’énergie encore plus grande et un impact environnemental plus important. Les matières
fissiles ne sont pas renouvelables, mais elles constituent des stocks d’énergie considérables à
l’échelle humaine. Les énergies de stock sont concentrées et utilisables à la demande.
Les énergies de flux
Les énergies de flux se renouvellent spontanément – à l’échelle humaine, en tout cas. Leur source
principale est le soleil, dont on pense qu’il continuera à éclairer et chauffer la planète encore
quelques milliards d’années. Il est à l’origine des différentes formes d’énergie solaire, bien sûr, mais
aussi de la biomasse et des énergies éolienne, houlomotrice et hydraulique, via la photosynthèse
chlorophyllienne, les différences de pression atmosphérique et le cycle évaporation/précipitation de
l’eau.
L’énergie des marées nous vient plutôt de l’attraction de la Lune et l’énergie géothermique provient
directement de la radioactivité de la Terre. La biomasse n’est renouvelable qu’en dessous d’un
certain rythme d’exploitation, sinon on provoque la déforestation. Toutefois, si le rayonnement
solaire, le vent et les marées sont renouvelables et gratuits, les installations qui récupèrent ces
énergies ont une durée de vie limitée, de quelques dizaines d’années pour un capteur solaire ou une
éolienne à près d’un siècle pour un barrage. Il faut donc non seulement les construire, mais les
entretenir et les remplacer en fin de vie.
Les sources renouvelables sont souvent intermittentes et peu concentrées. Comme on ne sait pas
stocker de grandes quantités d’électricité, l’intermittence impose de mettre en œuvre des sources de
substitution, non renouvelables, de multiplier les interconnexions régionales et de disposer de
« réseaux intelligents » pour gérer l’équilibre instantané entre demande et production.
Substitution ou superposition ?
Dans les publications de vulgarisation scientifique, on voit souvent des titres du genre « Quand
l’hydrogène remplacera l’essence... » ou « Quand la fusion remplacera la fission... », comme si une
source d’énergie plus moderne allait définitivement prendre la place d’une autre. Tout est possible
dans le futur, mais ce n’est pas ce qui s’est passé jusqu’ici.
Le charbon n’a pas éliminé le bois : aujourd’hui encore, la biomasse traditionnelle fournit 10 % de
l’énergie primaire consommée dans le monde. Le pétrole a peut-être détrôné le charbon, mais il ne
l’a pas du tout éliminé : entre 2000 et 2010, presque la moitié de la croissance mondiale de la
consommation d’énergie a été due au charbon. Le gaz a connu une croissance spectaculaire et
l’avènement du « gaz de schiste » lui promet un âge d’or, mais il n’a évincé ni le pétrole ni le
charbon.
Le diagramme qui retrace l’évolution en pourcentage des sources d’énergie met bien en évidence les
âges d’or successifs des différentes sources mais contribue à cette idée de substitution : on y voit
presque disparaître la biomasse traditionnelle alors qu’avec 10 % de la consommation mondiale en
2012 – soit 1,3 Gtep –, elle dépasse le chiffre qu’avait la consommation mondiale en 1900 !
Pas d’impasse dans le jeu énergétique
La comparaison des différentes sources d’énergie est intéressante mais d’une portée limitée puisque
l’homme a besoin de toutes ces énergies ! Ce qu’il faut, c’est tirer au mieux parti de leurs qualités
propres en limitant au maximum leurs inconvénients spécifiques. Il faut aussi éviter de les gaspiller
et améliorer leur efficacité au fur et à mesure des progrès technologiques.
Le « bouquet » optimal ne sera pas le même pour chaque pays, en fonction de sa géographie, de son
climat, de sa population, de son degré d’urbanisation et de son niveau technologique. Un pays
richement doté en ressources fossiles aura moins besoin d’énergie nucléaire qu’un pays qui en est
dépourvu. Mais la sécurité de l’approvisionnement en énergie est toujours renforcée par une
diversification des sources et des lieux d’importation. Dans le jeu énergétique, mieux vaut ne pas
faire d’impasse.
Vecteurs et réseaux de l’énergie
Il ne suffit pas de produire l’énergie, il faut aussi la transporter et la distribuer. Les premières
locomotives brûlaient du bois, puis elles ont été alimentées en charbon, stocké dans un wagon. Elles
fonctionnent aujourd’hui au fuel ou à l’électricité qui circule dans les fils des caténaires. De plus en
plus, nous utilisons l’énergie non pas à la source primaire mais par l’intermédiaire de « vecteurs »,
carburants ou gaz et électricité distribués par des réseaux.
Des réseaux dans les réseaux
Les réseaux de liquide, de gaz ou d’électricité se « déclinent » dans une arborescence à plusieurs
échelles : réseaux de longue distance et à gros débit pour le transport à l’échelle continentale, réseaux
à mailles plus serrées pour le transport à l’échelle nationale ou régionale, réseau de distribution locale
à débit plus faible. De la même façon, pour l’électricité, on dispose de réseaux de transport à très
haute tension, à haute et moyenne tension, et de distribution à basse tension.

Oléoducs et pétroliers, gazoducs et méthaniers


Le transport des hydrocarbures constitue un élément majeur de la chaîne d’approvisionnement : c’est
en s’assurant du monopole des barils que Rockefeller a bâti le géant Standard Oil.
Des réseaux d’oléoducs relient les champs pétroliers aux raffineries ou aux terminaux où viennent
se charger les pétroliers géants. Partant des raffineries, un autre réseau d’oléoducs transporte cette
fois les produits pétroliers, en parallèle avec le trafic de camions-citernes.
Un réseau de gazoducs relie les champs de gaz naturel à leurs clients, ou à des terminaux de
liquéfaction où viennent se remplir les méthaniers. Si les liquides se transportent sur de très longues
distances au prix d’une dépense d’énergie minime, le gaz est compressible et son transport exige des
puissances de pompage considérables : au-delà de 2 000 ou 3 000 kilomètres, il est plus économique
en énergie de liquéfier le gaz et de le transporter dans des méthaniers. Le gaz naturel liquéfié, GNL,
doit être regazéifié avant d’être distribué dans de nouveaux gazoducs.

L’électricité : de grandes qualités et une faiblesse spécifique


Ce n’est pas un hasard si l’électricité occupe une part croissante dans la consommation d’énergie des
pays développés car elle présente des avantages spécifiques.
Des atouts souvent uniques.
L’électricité constitue un carrefour privilégié de conversion des différentes formes d’énergie, et le
passage par le vecteur électricité permet souvent une amélioration marquée des rendements, et donc
de l’efficacité énergétique globale des processus. L’électricité permet la décentralisation des moteurs
et des contrôles, mettant ainsi à disposition du citoyen moyen une foule d’esclaves mécaniques et
électroniques bien utiles. Elle est aussi le vecteur privilégié, sinon unique, de l’information et de la
communication. L’électricité est enfin une énergie propre dans les phases de transport, de distribution
et d’usage final.
Une faiblesse considérable.
L’électricité ne se stocke pratiquement pas, sauf en quantités minimes et à un coût élevé dans des
accumulateurs. On peut la stocker indirectement (stations de pompage, volants d’inertie) mais cela
reste marginal. Par conséquent, la production doit suivre la demande, en maintenant la qualité du
courant. Si un réseau est alimenté par une source intermittente et aléatoire, une ferme éolienne par
exemple, il faut prévoir en réserve une source non intermittente prête à venir la suppléer.
Gaz à tous les étages
Jusqu’au milieu du XX siècle, le gaz était fabriqué à partir du charbon. Le « gaz de ville », mélange
e

d’hydrogène et de monoxyde de carbone, servait à l’éclairage urbain et domestique ainsi qu’à la


cuisine. La mise en valeur des gisements de gaz « naturel » a fait disparaître les usines à gaz,
remplacées par un réseau de gazoducs enterrés.
Les promesses de l’hydrogène
L’hydrogène est un gaz combustible dont la molécule ne contient pas d’atome de carbone : sa
combustion ne produit que de la vapeur d’eau, sans pollution locale ni impact global sur le climat.
Dans ces conditions, l’hydrogène apparaît comme un vecteur d’énergie très attrayant, présentant la
plupart des qualités de l’électricité – qu’il peut produire dans des « piles à combustible » – tout en
étant beaucoup plus facile à stocker.
Mais il faut fabriquer l’hydrogène, que l’on ne trouve pas dans la nature. Aujourd’hui, on le produit
par « réformage » du gaz naturel ou par oxydation de certains produits pétroliers. Ces procédés
entraînent l’émission de gaz à effet de serre. Pour tirer parti des qualités écologiques de l’hydrogène,
il faudrait le fabriquer en dissociant la molécule d’eau grâce à une source d’énergie qui n’émette pas
de gaz à effet de serre, donc renouvelable ou nucléaire.
Électricité et stockage
À l’exception des panneaux photovoltaïques et des piles à combustible, l’énergie électrique sort des
centrales sous forme de courant alternatif, produit en faisant tourner le rotor d’un alternateur à
l’aide d’énergie mécanique. Cette dernière peut être fournie par une chute d’eau, par le vent ou par
la détente de vapeur sous pression (centrale thermique). Toutes les centrales thermiques nécessitent
une source froide (fleuve, mer).
Comment marche un alternateur ?
Quand on déplace un conducteur électrique dans un champ magnétique, il est traversé par un courant
« induit ». Un alternateur est une machine, constituée d’un rotor (partie tournante) et d’un stator
(partie fixe), qui convertit en courant électrique alternatif l’énergie mécanique fournie au rotor. Le
rotor, ou induit, est muni d’électroaimants alimentés en courant continu. Le stator, ou inducteur, est
constitué d’enroulements qui vont être le siège du courant électrique alternatif induit par la variation
de flux du champ magnétique, due au mouvement relatif de l’inducteur par rapport à l’induit. Dans
les alternateurs industriels, l’induit est constitué de trois enroulements qui fournissent un système de
courants alternatifs triphasés. Dans les centrales thermiques (nucléaires ou classiques), une turbine (à
vapeur ou à gaz) est couplée à un turboalternateur horizontal qui tourne généralement à 1 500
tours/minute.
Les turbines à gaz à cycle combiné
Le premier cycle fonctionne comme un turboréacteur d’avion : le gaz naturel, en brûlant dans l’air
comprimé, produit des gaz chauds sous forte pression. Ces gaz de combustion font tourner une
turbine à gaz qui actionne un compresseur et un alternateur qui produit de l’électricité. Une part
importante de l’énergie reste sous forme de chaleur à haute température, qui serait perdue dans une
centrale à cycle simple (qu’on appelle TAC, turbine à combustion). Dans une centrale à cycle
combiné, une partie de cette chaleur est récupérée pour produire de la vapeur, qui va actionner une
autre turbine et produire à nouveau de l’électricité portant le rendement total de la centrale vers 58  %.
La vapeur est alors refroidie et condensée pour être recyclée dans le circuit.

Variabilité et stockage d’électricité


Comme l’électricité ne se stocke pas, la production doit suivre la demande, variable au cours de la
journée et au cours de l’année. Cette variabilité est considérable. En France, à 20 heures, nous
demandons 35 % d’électricité de plus qu’à 4 heures du matin ; l’hiver, 50 % de plus qu’en été ; et un
jour de semaine, 20 % de plus qu’un dimanche. Ces dernières années, la demande de pointe a crû à
un rythme beaucoup plus élevé que la consommation annuelle. Pour suivre cette demande variable, le
« dispatcher », responsable du réseau de transport, fait appel aux différentes sources, en fonction de
leur prix et en jouant sur leur capacité à moduler leur production plus ou moins vite. Les barrages
hydrauliques et les TAC peuvent réagir très rapidement mais les centrales thermiques, fossiles et
nucléaires, ont beaucoup plus d’inertie.
L’électricité « de base » est celle que l’on doit fournir tout au long de l’année, jour et nuit.
L’électricité « de pointe » doit faire face aux pics de consommation. En France, la base est assurée
par les barrages au fil de l’eau et les centrales nucléaires, tandis que la grande pointe fait appel aux
barrages de montagne et aux turbines à fioul. L’ajustement final de la production à la demande se fait
par échanges avec les autres réseaux interconnectés.
Les prix d’échange, extrêmement bas en heures creuses car ils correspondent au prix marginal de
production des centrales qu’on préfère ne pas arrêter, atteignent des valeurs très élevées aux périodes
d’extrême pointe. La Suisse, idéalement placée au cœur de l’Europe et bien équipée en barrages de
montagne, achète de nuit de l’électricité « heures creuses » à la France et l’utilise pour remplir ses
barrages par pompage et revendre à ses voisins de l’électricité hydraulique aux précieuses heures de
pointe. Ce « stockage pompé » est aujourd’hui la seule méthode permettant de stocker indirectement
de grandes quantités d’électricité.
Des sources d’énergie aux rendements variables. La situation se complique encore quand à la
variabilité de la demande s’ajoute la variabilité non maîtrisable d’une partie des sources, notamment
éoliennes et photovoltaïques. C’est le cas quand leur contribution devient significative, surtout si leur
production fait l’objet d’une obligation d’achat. Ainsi, l’Allemagne exporte parfois son électricité
éolienne à des prix négatifs ! On envisage d’utiliser les surplus d’électricité intermittente en
produisant de l’hydrogène par électrolyse, mais ce n’est pas rentable en l’état actuel de la technique.

Quelques situations extrêmes


Si le Danemark a le plus grand pourcentage d’éolien dans son électricité, c’est grâce à ses
interconnections avec la Norvège, car l’hydraulique est son complément idéal. En revanche, le parc
éolien allemand met parfois en difficulté les réseaux tchèque et polonais : quand le vent souffle fort
sur Hambourg, le surplus de courant éolien ne peut atteindre Munich qu’en transitant par ces réseaux.
À tel point que, parfois, les Allemands paient pour qu’on accepte d’évacuer leurs surplus !
Si les interconnexions sont bonnes, l’intermittence de l’éolien est compensée par la différence des
régimes de vent à travers l’Europe… sauf en cas d’anticyclones, en été ou en hiver, phénomènes
pendant lesquels il n’y a aucune éolienne qui tourne de Stockholm à Séville.
Le pétrole brut
Il a servi à étancher l’arche de Noé et à produire le feu grégeois pendant les croisades. Son
utilisation industrielle a commencé par l’éclairage mais ce sont l’automobile et l’avion qui lui ont
donné son importance. Aujourd’hui, le pétrole fournit près du tiers de l’énergie primaire mondiale
et les transports de toutes natures dépendent de lui à 94 %. Le pétrole est réparti très inégalement,
ce qui a été et est encore source de nombreux conflits.
Qu’est-ce que le pétrole ?
Les hydrocarbures sont des substances dont les molécules sont formées d’atomes de carbone et
d’hydrogène. On les trouve sous trois états : sous forme gazeuse, le gaz naturel et le gaz de pétrole ;
sous forme liquide, le pétrole et les condensats de gaz naturel ; sous forme solide, les bitumes (sables
asphaltiques et schistes bitumineux).
On caractérise les hydrocarbures par le nombre d’atomes de carbone dans une molécule. De
1 (méthane) à 4 (butane) carbones par molécule, les hydrocarbures sont gazeux à température
ambiante. Au-delà, ils sont liquides, de plus en plus visqueux. À plusieurs centaines d’atomes de
carbone par molécule, on passe aux bitumes.
Le pétrole est un liquide constitué d’un mélange d’hydrocarbures et d’impuretés (eau, sulfures,
métaux lourds…).
Les produits pétroliers sont extraits des pétroles bruts par distillation. Plus un produit pétrolier
comporte d’atomes de carbone, plus élevée sera sa température d’ébullition.
D’où viennent le pétrole et le gaz ?
La formation. Le pétrole et le gaz résultent de la décomposition par la chaleur, en l’absence
d’oxygène, de matières organiques contenues dans des « roches-mères ».
Ces matières organiques, appelées « kérogène », sont les restes de plancton, d’algues et de protéines
tombés à leur mort au fond des océans : mélangés aux boues, sables et limons, ils forment des
sédiments. Les sédiments s’alourdissent et tombent au fond de l’eau, exerçant une pression qui
accroît la température de plusieurs centaines de degrés. La boue et le sable durcissent pour former
des schistes argileux et du grès. Généralement entre 2 500 et 5 000 m, le kérogène se transforme
(craquage thermique) en pétrole liquide accompagné de gaz. À plus de 5 000 m, le pétrole « craque »
à son tour et se transforme en gaz.
Les gisements. Une fois formé, le pétrole remonte vers la croûte terrestre car sa densité est inférieure
à celle de l’eau salée qui sature les interstices des schistes, des sables et des roches carbonifères
formant la croûte terrestre. Le pétrole brut et le gaz naturel s’infiltrent dans les pores des sédiments
plus gros qui se trouvent au-dessus d’eux. Quand ils rencontrent un schiste imperméable ou une
couche de rocher dense qui les arrêtent, le pétrole est emprisonné et un gisement se forme. Dans la
partie supérieure de ces poches de pétrole, du gaz naturel (plus léger) s’accumule. Toutefois, la
majeure partie du pétrole remonte librement à la surface de la terre ou sur le fond des océans.
Une distribution hétérogène
Avec plus de 100 milliards de tonnes, le Moyen-Orient est crédité à lui tout seul de 62 % des réserves
prouvées mondiales de pétrole conventionnel. Il s’agit, en outre, de pétrole de bonne qualité, dont
l’extraction est très peu onéreuse. Ce pactole est-il une bénédiction ou une malédiction pour les
populations locales ? En tout cas, il a profondément marqué la géopolitique régionale et même
mondiale
À quoi sert le pétrole ?
Une source d’énergie. Le pétrole est la plus importante source d’énergie primaire dans le monde.
Les produits pétroliers sont utilisés pour le chauffage des locaux et la fourniture de chaleur
industrielle ; le fioul lourd reste une source d’électricité, même si son importance relative dans cet
usage a beaucoup diminué depuis 1973 et, surtout, l’essence, le fioul et le carburéacteur alimentent
94 % des transports mondiaux, toutes catégories confondues (routiers, ferroviaires, aériens et
fluviaux).
Une matière première. 95 % des bitumes utilisés dans le monde, notamment comme revêtements
routiers souples, sont d’origine pétrolière, le reste provenant de goudrons, sous-produits de la
fabrication du coke (obtenu par pyrolyse de la houille). Ce sont aussi 95 % des lubrifiants divers qui
sont des paraffines provenant du pétrole. Le bitume consomme environ 100 Mt/an de pétrole et les
lubrifiants, 50 Mt/an.
La pétrochimie. Par une série de transformations chimiques, elle produit les matières plastiques, les
fibres textiles synthétiques, les caoutchoucs synthétiques, les colles et adhésifs, les détergents et
autres lessives, et une bonne partie des engrais azotés. Environ 8 % de la production de pétrole sont
utilisés dans la pétrochimie, soit 200 Mt/an.

Le pétrole va-t-il manquer ?


L’évaluation des « réserves » de pétrole est compliquée car 85 % de celles-ci sont contrôlées par des
États. De fait, certains peuvent avoir intérêt à les surestimer pour augmenter leurs quotas de
production au sein de l’Opep. Mais, avant de s’inquiéter de leur épuisement, il s’agit de se demander
combien de temps la production pourra-t-elle suivre le rythme de la demande ? Depuis le milieu des
années 1980, on découvre du pétrole chaque année, mais on en brûle beaucoup plus que l’on en
détecte. Cela ne peut évidemment pas durer. Si l’on va vers un pic, ou un plateau, de production de
pétrole conventionnel, en revanche, la production de pétrole non conventionnel démarre fort. La
question d’un manque potentiel à moyen terme reste donc très ouverte.
Le gaz naturel
D’un usage plus récent que le pétrole, le gaz fournit aujourd’hui 21 % de l’énergie primaire
mondiale, en troisième position derrière le pétrole et le charbon et devant la biomasse traditionnelle.
L’irruption des sources non conventionnelles est en train de révolutionner le marché. Plus propre
que le pétrole, le gaz est plus difficile – donc plus onéreux – à transporter et à stocker et son usage
domestique n’est pas dépourvu de danger d’explosion.
Qu’est-ce que le gaz naturel ?
Le gaz naturel est un mélange d’hydrocarbures gazeux dont le principal composant est le méthane
(CH ). La molécule de méthane étant très stable, il n’y a pas pour le gaz d’équivalent de la
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pétrochimie, ou pratiquement pas, mais certaines de ses impuretés sont récupérées et


commercialisées comme matières premières (soufre de Lacq, hélium, etc.).
La formation du gaz suit celle du pétrole : quand ce dernier atteint une certaine profondeur, la
température ambiante le transforme en gaz par un processus de « craquage » que l’on reproduit dans
certaines unités des raffineries. On appelle gaz conventionnel celui qui a migré pour s’accumuler
dans des « réservoirs » souterrains poreux recouverts d’une couche imperméable. Les autres sources
sont non conventionnelles.
Avant la Seconde Guerre mondiale, le gaz était pratiquement inutilisé et celui qu’on trouvait en
cherchant du pétrole était brûlé sur place dans une torchère pour éviter une explosion. Aujourd’hui,
40 % du gaz produit de l’électricité et le reste est réparti entre usages industriels, domestiques ou
tertiaires.
Une répartition très inégale
Si les réserves de pétrole sont essentiellement situées au Moyen-Orient, les réserves conventionnelles
de gaz sont, en gros, réparties entre ce dernier et le territoire de l’ex-Union soviétique. Les principaux
pays détenteurs sont la Russie, le Qatar et l’Iran. En termes d’années de production, le Moyen-Orient
domine largement.
Nous verrons que le gaz non conventionnel change significativement la donne.
Les découvertes de la mer du Nord ont permis au Royaume-Uni d’être, dans l’Europe des quinze, le
seul pays exportateur net d’énergie, mais, depuis 2004, même ce pays est devenu importateur de gaz.
Cela explique le renouveau de l’intérêt britannique pour l’énergie nucléaire.

Le transport du gaz
Sur terre, le gaz est transporté sous pression dans des tuyaux, les gazoducs, enterrés ou à l’air libre.
Contrairement au pétrole qui est un liquide, le gaz naturel est compressible, ce qui signifie qu’il faut
beaucoup d’énergie et une série régulière de stations de pompage pour lui faire parcourir de grandes
distances dans un gazoduc, et que celui-ci doit être de grand diamètre.
L’infrastructure des gazoducs et des stations de pompage est très chère et très rigide : on ne peut pas
rediriger les tuyaux ailleurs que vers leur destination initiale. C’est une des raisons pour laquelle la
fourniture de gaz se fait sur la base de contrats bilatéraux à long terme, où le consommateur s’engage
à payer pour des quantités déterminées de gaz, qu’il les enlève effectivement ou non (contrats take or
pay). Pour une distance supérieure à 2 000 ou 3 000 km, il est plus économique de transporter le gaz
par voie maritime, sous forme de gaz naturel liquéfié (GNL). Les bateaux spéciaux qui effectuent ce
transport s’appellent des méthaniers.

La chaîne du GNL
Tous les gaz (oxygène, azote ou hydrogène) sont liquéfiables si on les refroidit suffisamment. Pour
liquéfier le méthane, il faut le porter en dessous de - 160 °C à l’aide de gigantesques réfrigérateurs.
La dépense d’énergie est considérable, mais on en récupère une partie dans l’installation symétrique
où le GNL redeviendra gazeux. Le GNL est beaucoup plus dense que le gaz naturel : 1 m de GNL 3

fournira 600 m de gaz à la pression atmosphérique. C’est donc une forme sous laquelle il est facile à
3

transporter et à stocker, si on le maintient à basse température (ce qui nécessite une excellente
isolation thermique).
Les terminaux méthaniers sont des installations lourdes, mais ils permettent une souplesse
d’approvisionnement qui commence à créer un vrai commerce international du gaz naturel liquéfié.
Le Japon, par exemple, n’est approvisionné qu’en GNL. Dans ses scénarios récents, l’Agence
internationale de l’énergie prévoit une forte augmentation des parts de marché du GNL, qui n’aura
semble-t-il pas de grande influence sur les prix.
Le charbon
Le charbon est un terme générique qui désigne un ensemble de combustibles solides de
compositions et de pouvoirs calorifiques variés. Il a été le combustible quasi unique de la révolution
industrielle du XIXe siècle. Depuis, l’arsenal énergétique s’est diversifié et le charbon représente 29
% de l’énergie primaire mondiale. Première source mondiale d’électricité, il est irremplaçable pour
la réduction du minerai de fer ou la carbochimie.
L’origine du charbon
Le charbon, qui a commencé à se former à la fin de l’ère primaire, provient de l’accumulation de
matières végétales (fougères arborescentes de la forêt houillère, spores, mangroves, algues) déposées
sur place ou après transport. Les bassins d’accumulation sont des zones marécageuses (tourbières
actuelles), des lacs ou des zones deltaïques qui se sont enfoncés régulièrement. Les sédiments ont été
enfouis jusqu’à des profondeurs allant de quelque 100 mètres pour les lignites jusqu’à plusieurs
kilomètres pour les anthracites. Durant cet enfouissement, le carbone organique s’est transformé en
carbone minéral par action des micro-organismes, l’eau a été expulsée en forte proportion et la roche
s’est durcie. On range le charbon en plusieurs catégories selon le degré de transformation des dépôts
végétaux.
Les gisements se présentent en amas ou, le plus souvent, en veines intercalées entre d’autres
formations sédimentaires.
Le charbon est composite
Les minéraux. Morceaux de roches, de tailles diverses, sédimentés en même temps que la matière
organique, ils constituent, après combustion, les cendres et les scories.
La matière organique. Le charbon au sens strict est la partie de couleur noire et d’origine
organique. Sa composition chimique est caractérisée par une teneur en hydrogène (4 %) moitié
moindre que celle des pétroles. La teneur en carbone après séchage varie de 55 % pour les lignites, à
70 % pour les bitumineux et 90 % pour les anthracites.
L’eau. Plus il reste d’eau dans le charbon, plus bas est son pouvoir calorifique.
Les volatiles. Il s’agit surtout de CO , de méthane (CH ) et d’autres hydrocarbures ainsi qu’un peu
2 4

d’argon et d’hydrogène. À la pression atmosphérique, les gaz se dégagent, notamment le méthane,


que les mineurs appellent grisou et qui est une source non conventionnelle de gaz naturel, notamment
aux États-Unis.
La production mondiale de charbon
La production mondiale de charbon s’est fortement accrue depuis 2000 pour atteindre 7,7  milliards
de tonnes en 2015. La Chine est la principale responsable de cette croissance, avec des chiffres
impressionnants : après la fermeture de nombreuses petites exploitations très dangereuses après 1995,
elle a produit et consommé 1,3 milliard de tonnes de charbon en 2000. Treize ans plus tard, sa
production atteint 3,6 milliards de tonnes, auxquelles il faut ajouter 300 millions de tonnes importées.

En 2015, la consommation de la Chine est revenue à 3,7 milliards pour limiter la polllution
atmosphérique, mais l’Inde, l’Amérique latine et l’Afrique prendront sans doute le relais. En ce sens,
le retour du charbon paraît durable.
50 % du charbon produit sert à la production d’électricité, 16 % à la sidérurgie, 5 % aux cimenteries.
Le solde, 29 %, au chauffage et aux autres industries, dont la carbochimie. Avec une contribution de
40 %, le charbon est de loin la première source d’électricité mondiale, malgré ses nuisances. Des
solutions existent et sont progressivement mises en œuvre pour réduire de façon très significative les
rejets polluants.
Les ressources et les réserves
Les ressources ultimes de charbon avoisinent sans doute les 5 000 milliards de tonnes, dont 900 sont
qualifiées de « réserves ». Les plus grands bassins sont les suivants en ordre d’importance
décroissant et en précisant leur période géologique de formation : bassin permo-carbonifère de
Russie et du Kazakhstan, plateforme jurassique crétacé de Sibérie, bassin de l’Ouest américain et du
Canada (jurassique et tertiaire), plateforme chinoise et Mongolie extérieure (permo-carbonifère et
jurassique), carbonifère des Appalaches, bassin hercynien nord-européen, charbon permo-triasique
d’Australie, du sud de l’Inde, de l’Afrique et du Brésil (l’ancien continent du Gondwana), bassins
crétacé et tertiaire de Colombie, du Venezuela et du Chili. Cette répartition s’explique par la
formation des continents.
Les réserves de charbon sont assez bien réparties géographiquement, à l’exception notable du
Moyen-Orient, qui en dispose peu mais bénéficie d’autres ressources naturelles.
Le transport du charbon
Le pétrole est très commode à transporter, par oléoduc ou par pétrolier, avec une dépense minime
d’énergie : il voyage énormément à travers le monde. Le gaz se transporte bien, mais pour une
dépense énergétique très supérieure. Les combustibles minéraux solides, eux, sont malcommodes à
transporter et voyagent peu de région à région. C’est par conséquent le cas du charbon : les quantités
importées et exportées ne représentent que 16 % de la production mondiale totale. Les exportations
de charbon proviennent essentiellement d’Australie et d’Indonésie. Le lignite, à valeur calorifique
moindre, voyage encore moins : il est surtout utilisé dans des centrales électriques situées à proximité
immédiate des mines.
Même en intra-régional, le transport de charbon est une lourde charge. En Chine, par exemple, une
grosse proportion des transports fluviaux et ferroviaires est consacrée à son transport des zones du
nord-ouest où il est abondant à la côte sud-est, très développée et grosse consommatrice.
Nucléaire et matières fissiles
L’énergie nucléaire utilise la chaleur libérée par la fission de noyaux d’uranium ou de plutonium
pour produire de l’électricité. On ne met pas directement dans une centrale nucléaire du minerai
d’uranium : il subit une série de transformations dans des installations industrielles au cours du
« cycle du combustible nucléaire ». Il n’y a pas de nucléaire durable sans recyclage des matières
fissiles encore présentes dans les combustibles usés.
L’uranium et ses réserves
La fission d’un gramme d’uranium produit plus d’énergie que la combustion d’une tonne de pétrole :
les combustibles fossiles s’évaluent en milliards de tonnes et les matières fissiles, en milliers de
tonnes.
L’uranium est le plus lourd des éléments naturels restant sur la Terre. Son noyau est entouré de 92
électrons. Il est essentiellement composé de deux isotopes, 235 U (0,7 %) qui est fissile et 238 U
(99,3 %). Sa teneur dans la croûte terrestre est d’environ 3 grammes par tonne. C’est beaucoup moins
que le fer ou l’aluminium mais beaucoup plus que l’or.
L’estimation des ressources d’uranium, comme celle des autres ressources minérales, dépend du coût
qu’on est prêt à consacrer à son extraction. Les réserves identifiées exploitables à moins de 260
dollars par kilo d’uranium sont évaluées à 7,6 millions de tonnes, mais on pense que le vrai total des
minerais conventionnels dépasse 17 millions de tonnes. Les sources non conventionnelles (uranium
contenu dans les phosphates et les schistes noirs) sont du même ordre de grandeur, sans compter
l’uranium des océans, très abondant (environ 4 milliards de tonnes) mais très dilué.
Par comparaison, en 2016, la consommation mondiale a été de 63 400 tonnes d’uranium pour
produire 11,5 % de l’électricité mondiale. À parc constant, les réacteurs nucléaires disposeraient de
plus d’un siècle de réserves déjà identifiées, mais leur durée dépendra de l’évolution future de ce
parc : selon l’AIE, ce parc pourrait croître de 60 % d’ici 2040.
Le plutonium et la surgénération
Quand un noyau d’uranium 238 absorbe un neutron ralenti, il ne se fissionne pas mais se transforme
assez vite en noyau d’un autre élément, le plutonium 239, matière fissile meilleure que l’uranium
235, mais beaucoup plus radioactive. On dit que 238 U est « fertile ». Dans les réacteurs à neutrons
rapides, il est possible de fabriquer à partir d’uranium 238 plus de plutonium qu’on n’en consomme
dans le cœur : le plutonium est un intermédiaire pour consommer l’uranium 238. C’est la
« surgénération ».
Les réacteurs actuellement en marche et en construction dans le monde utilisent moins de 1 % de
l’énergie potentielle contenue dans l’uranium. En revanche, les réacteurs à neutrons rapides sont
capables d’extraire la quasi-totalité de l’énergie de l’uranium. Ces surgénérateurs ont déjà été testés à
grande échelle : Superphénix, malheureusement arrêté en 1997, produisait 1 200 MWe. Avec cette
nouvelle génération de réacteurs, la « génération 4 », la limite imposée par les ressources d’uranium
au développement de l’énergie nucléaire sera repoussée de plusieurs siècles.
Le thorium
Le thorium est un métal dont le noyau contient 90 protons et qui n’a qu’un isotope naturel, 232 Th. Il
est fertile comme 238 U : en absorbant un neutron, il se transforme en uranium 233, excellente
matière fissile. N’ayant pas d’isotope fissile, il a encore été peu utilisé dans des réacteurs nucléaires
mais le sera sûrement dans le futur. Il est trois fois plus abondant que l’uranium dans la croûte
terrestre mais ses réserves exploitables sont mal connues et son cycle du combustible reste à
développer.
Le thorium semble particulièrement bien adapté aux réacteurs nucléaires « à sels fondus ».
Les hydrocarbures non conventionnels
En plus du pétrole et du gaz naturel classiques ou conventionnels, il existe dans la croûte terrestre
d’autres ressources en hydrocarbures, considérables mais plus difficiles à exploiter. Ce sont les
huiles et gaz de roche-mère, les sables asphaltiques, les schistes bitumineux voire les hydrates de
méthane ou « clathrates ». Les hydrocarbures peuvent aussi être de simples vecteurs si on les
fabrique à partir de charbon, de gaz ou de biomasse.
Deux très grands gisements de sables asphaltiques
Les sables asphaltiques sont des sédiments imprégnés de bitumes, avec des minéraux associés mais
sans gaz. L’immense majorité des dépôts se trouvent au Venezuela et au Canada. Les sables de
l’Alberta contiennent 10 % à 12 % de bitume et 5 % d’eau. Le reste est un mélange minéral de sable
et d’argiles.
Le mélange d’hydrocarbures extra-lourds est trop visqueux pour couler naturellement si on fore un
puits. Quand les gisements ne sont pas trop profonds (jusqu’à 70 mètres environ), on les exploite en
carrière à ciel ouvert, comme le lignite, avec des excavatrices géantes. Les gisements plus profonds,
en majorité, doivent être exploités in situ, en augmentant la fluidité des huiles par injection de vapeur
d’eau sous haute pression (typiquement 100 bars). Le mélange migre alors vers le puits et peut être
pompé jusqu’à l’unité de traitement qui le transformera en brut synthétique.
On estime que la quantité d’huile récupérable des sables de l’Alberta dépasse les 40 Gtep et que
celles de l’Orénoque sont du même ordre de grandeur. Par comparaison, les réserves de pétrole
récupérables en Arabie saoudite seraient de 36 Gtep. Mais on ne parle pas de produits équivalents :
pour extraire et transporter 50 tonnes de brut saoudien, il faut en dépenser une tonne. Le chiffre est
plus près de 20 à 50 quand on produit un brut équivalent à partir de sables asphaltiques.
Gaz et huile de roche-mère
Il existe aussi de grandes réserves de gaz « non conventionnels » : le grisou des gisements de
charbon, le gaz extrait de réservoirs non poreux dit « tight gas » et surtout le gaz extrait, directement
et avant sa migration, de la roche-mère où il s’est formé – souvent appelé « gaz de schiste ».
L’exception américaine. Leur exploitation a spectaculairement augmenté aux États-Unis depuis
2007 grâce aux forages horizontaux et à la fracturation hydraulique de la roche, provoquant une
véritable révolution dans le marché du gaz : son prix de gros en Amérique du Nord est passé en
quelques années de 12 à 3 $/MBTU, alors qu’il reste couplé au prix du pétrole dans les autres
continents. Tandis qu’au tournant du siècle les États-Unis s’équipaient massivement en terminaux
pour importer du GNL, ils se préparent désormais à exporter ! Cette irruption de gaz bon marché a
baissé le coût de l’énergie pour l’industrie d’outre-Atlantique mais a sérieusement ralenti le
développement des énergies renouvelables et le redémarrage du nucléaire aux États-Unis. En outre,
beaucoup d’électriciens américains sont passés du charbon au gaz, et les États-Unis sont devenus
exportateurs de charbon, notamment vers l’Allemagne qui réduit sa production nucléaire depuis
2011.
En parallèle, les États-Unis se sont mis à exploiter, avec les mêmes techno-logies, l’huile présente
dans sa roche-mère avant migration vers un réservoir. En 2014, cette production a atteint 4 millions
de barils par jour, 5,6 millions si on y ajoute les condensats du gaz de schiste. Cette production s’est
maintenue en 2016 malgré la baisse des prix du baril. Les majors se retirent même des sables
asphaltiques canadiens pour investir dans l’huile de roche-mère texane !
Charbon « propre » et nucléaire après
Fukushima
À l’actif du charbon, de grandes réserves, un prix intéressant et peu de risques géopolitiques  ; à son
passif, la pollution atmosphérique des centrales, les accidents miniers et sa contribution de 30  %
aux émissions anthropiques de CO2. Peut-on croire en un « charbon propre » ? L’énergie nucléaire
produit 11 % de l’électricité mondiale. Mais alors que s’amorçait une reprise, l’accident de
Fukushima a relancé la controverse. La fusion est-elle pour demain ?
Le charbon peut-il être propre ?
Aux centrales à charbon modernes, on adjoint de véritables petites usines chimiques appelées
« scrubbers » qui réduisent les pollutions, mais il reste encore beaucoup de vieilles installations très
polluantes dans le monde. Les principales pollutions sont les suivantes :
- la formation des oxydes d’azote (NOx), à l’origine de retombées d’acide nitrique très corrosif, peut
être réduite par le maintien de la température de combustion et l’utilisation de filtres adaptés ;
- le soufre, irritant pulmonaire qui se retrouve dans les fumées sous forme de SO et SO , est limité
2 3

par l’usage de charbon à bas taux de soufre et l’installation des « scrubbers » ;


- les poussières volantes peuvent être retenues par des filtres électrostatiques.
Mais si les pollutions ont été drastiquement réduites, on ne peut pas parler de charbon propre tant que
rien n’est fait pour éliminer les relâchements de CO .
2

La capture du CO dans les fumées est démontrée à l’échelle pilote, mais elle consomme beaucoup
2

d’énergie. Une fois le CO capturé, on le « séquestre » dans un puits de carbone « durable » ou dans
2

un lieu confiné. La capture du CO baisse significativement le rendement de la centrale et ne pourra


2

être mise en œuvre que si les permis d’émission deviennent très chers ou si les réglementations
nationales l’imposent. À plus long terme, si on trouve les catalyseurs adaptés, on pourra peut-être
combiner CO et hydrogène pour fabriquer du carburant synthétique.
2

Le nucléaire, une solution pour l’environnement ?


En fonctionnement normal, une centrale nucléaire a un impact très faible sur l’environnement, avec
une pollution atmosphérique pratiquement nulle et des effluents extrêmement limités. Comme toute
centrale thermique, elle rejette de l’eau réchauffée mais dans des limites réglementaires qui protègent
la vie aquatique. Quant à l’ensemble du cycle industriel, son impact principal est celui des mines
d’uranium, très inférieur à celui du charbon à même énergie produite. Enfin, les émissions de gaz à
effet de serre sont cent fois moins élevées que celles du charbon et cinquante fois moins que celles du
gaz, pour la même production d’électricité. Les accidents constituent toutefois un risque important.
En 1986, l’explosion puis l’incendie de Tchernobyl, en Ukraine, a contaminé une bonne partie de
l’Europe et condamné pour longtemps une zone de 30 km autour de la centrale. En mars 2011, la
combinaison d’un séisme monstrueux et du tsunami qui s’en est suivi a provoqué la fusion des cœurs
de trois réacteurs à Fukushima, au Japon. La majeure partie des éléments radioactifs relâchés sont
partis se diluer dans l’océan Pacifique, mais une langue de terre s’étendant sur 50  km au nord-ouest
du site a été contaminée. Après de six d’investigations poussées, rien n’indique aujourd’hui que la
radioactivité aura un impact significatif sur la santé publique, mais le nettoyage du site et la
décontamination des environs pourraient prendre 30 à 40 ans et coûter très cher.
Depuis Tchernobyl, il ne suffit plus que la probabilité d’un accident majeur soit très faible, il faut
que, s’il se produit quand même, il n’entraîne pas de contamination massive de l’environnement.
C’est la base de conception des réacteurs « de troisième génération » que l’on commence à déployer
et dont l’EPR est l’archétype : double enceinte très robuste, dispositifs de protection de cette
enceinte, systèmes garantissant la récupération et le confinement du cœur fondu en cas d’accident
majeur, etc. Ces réacteurs sont très renforcés pour résister aux agressions naturelles (séisme,
inondation) ou malveillantes. L’énorme retard des prototypes finlandais et français s’est beaucoup
réduit chez leurs successeurs chinois.
Après l’accident de Fukushima, de grands programmes de renforcement de la robustesse des
réacteurs en marche ont été lancés pour rapprocher leur sûreté de celle des réacteurs de génération 3.
La fusion, oui, mais quand ?
Si l’on coupe un noyau lourd en deux, on récupère de l’énergie : c’est la fission nucléaire. Si l’on
fusionne deux noyaux légers, on libère aussi de l’énergie : c’est la fusion nucléaire. Les forces de
liaison nucléaires sont énormes mais agissent à très courte distance. Pour réussir la fusion, il faut
rapprocher deux noyaux chargés positivement jusqu’à ce que ces forces surpassent la force
électromagnétique qui écarte ces noyaux. Dans les étoiles, c’est la force de gravitation qui permet de
fusionner des noyaux d’hydrogène en noyau d’hélium, des noyaux d’hélium en noyau de carbone,
etc.
La seule fusion qu’on puisse espérer réaliser sur Terre au XXI  siècle est celle du deutérium et du
e

tritium, deux isotopes de l’hydrogène. La fusion D-T produit un noyau d’hélium (particule alpha) et
un neutron, ainsi qu’une grande quantité d’énergie.
Pour forcer les noyaux D et T à fusionner, on leur communique de très grandes vitesses par agitation
thermique en chauffant le « plasma » jusqu’à 100 ou 150 millions de degrés. Pour que ce plasma
ultra chaud n’entre pas en contact avec une paroi, on le confine dans une sorte de prison magnétique
dans un dispositif appelé Tokamak. Il existe aussi le « confinement inertiel », mais plutôt d’intérêt
militaire. Contrôler la fusion est une entreprise très difficile, à laquelle la communauté scientifique
internationale consacre des efforts considérables depuis plus de 50 ans.
Le projet ITER
En 2005, sept grands partenaires (Union européenne, Japon, Russie, États-Unis, Chine, Corée du Sud
et Inde) ont décidé de construire à Cadarache (Bouches-du-Rhône) le plus gros Tokamak du monde,
baptisé ITER. Cette installation devrait commencer ses expériences vers 2022 et passer en D-T vers
2027.
EN CONCLUSION
Les grandes énergies traditionnelles
UNE TRANSITION INÉLUCTABLE
Épuisables par nature, les énergies de stock devront progressivement laisser la place aux énergies de
flux, mais compte tenu de leur prépondérance écrasante dans le bouquet énergétique mondial, il ne
faut pas s’illusionner sur le rythme de cette transition. Une grande partie de la réponse dépendra de
la maîtrise de la demande d’énergie.
TROP DE FOSSILES
Si l’on attendait simplement l’épuisement de nos réserves de combustibles, le dérèglement des
climats terrestres via l’effet de serre nous conduirait presque sûrement à une catastrophe
difficilement imaginable.
DES ÉNERGIES PLUS PROPRES
Comme les énergies de stock seront encore longtemps mises en œuvre, il faut réduire leurs
nuisances, en usage courant pour ce qui concerne les combustibles, et en cas d’accident pour
l’énergie nucléaire. Le renforcement des centrales nucléaires est en cours, mais la capture du CO 2
dans les centrales « fossiles » ne se fera pas dans les conditions économiques et réglementaires
actuelles.
Les énergies renouvelables au cœur de la
transition énergétique
La transition énergétique suppose une montée en puissance des énergies
renouvelables. Celles-ci sont diverses et parfois exploitées depuis
longtemps, tout au moins sous une forme traditionnelle. Certaines ne
servent qu’à produire de l’électricité tandis que d’autres permettent de
créer parallèlement de la chaleur, du froid ou encore des agrocarburants.
Ces ressources pourront-elles se substituer aux énergies fossiles ? Pour
répondre à cette question, il est nécessaire de prendre en compte différents
paramètres : la répartition des ressources aux différentes échelles spatiales
sur terre et en mer, leur caractère intermittent ou non, les quantités
d’énergie produites aujourd’hui et pouvant l’être demain, les coûts
d’installation et de fonctionnement des systèmes de production… En
fonction de tout cela, il est possible d’analyser la viabilité des énergies
renouvelables, qui conditionne sans doute beaucoup leur futur
développement.
La biomasse, entre tradition et usages nouveaux
La biomasse assure un peu moins de 10 % de nos besoins en énergie : 60 % de cette biomasse est
utilisée de manière traditionnelle et 40 % relève de la biomasse moderne, qui permet non seulement
de produire de la chaleur, mais aussi des agrocarburants et de l’électricité. Ces deux deniers usages
se sont beaucoup développés depuis l’envolée récente des cours du pétrole. Des aides publiques ont
favorisé ces filières dans de nombreux pays.
Biomasse traditionnelle et biomasse moderne
On estime que 38 % de la population mondiale dépend de la biomasse traditionnelle pour la cuisson
de ses aliments : 69 % en Afrique, 50 % en Asie, 14 % en Amérique latine et 4 % au Moyen-Orient.
Il s’agit le plus souvent de populations qui n’ont pas les moyens financiers d’utiliser les combustibles
fossiles et recourent au bois (parfois converti en charbon de bois), aux déchets végétaux et aux
déjections animales. Ces produits sont habituellement brûlés dans des feux ouverts ou des poêles à
faible rendement pour assurer la cuisson des aliments ou apporter un peu de chaleur dans les
habitations. On rend souvent ce procédé responsable de la déforestation mais d’autres pratiques,
comme l’exploitation du bois pour les marchés internationaux des meubles ou de la construction, y
concourent également.
Les constituants de la biomasse mo-derne sont plus diversifiés : il s’agit non seulement du bois issu
des forêts, de résidus agricoles et forestiers, mais aussi de résidus des industries agroalimentaires, de
produits agricoles eux-mêmes et d’ordures ménagères. Ces ressources servent à produire de la
chaleur, de l’électricité et des agrocarburants.

Les pellets : un combustible d’avenir ?


Inventés aux États-Unis dans les années 1970, les pellets – ou granulés de bois obtenus par forte
compression de déchets de bois (scierie, copeaux) – connaissent actuellement une forte croissance,
surtout en Europe et en Amérique du Nord : leur production a ainsi été multipliée par 5 de 2004 à
2014.
Leur succès est lié à leur pouvoir calorifique élevé (2 kilos de pellets correspondent à 1 litre de
mazout), à leur facilité de transport et d’usage, à leur prix et à un bilan carbone neutre. À l’avenir, les
experts estiment que 10 % de l’énergie finale consommée en 2020 dans l’Union européenne
proviendra de la biomasse et que la consommation domestique de pellets aura doublé en 2030 par
rapport à 2010.

Les usages de la biomasse


Pour produire à partir de la biomasse de la chaleur ou de l’électricité – ou les deux en même temps,
on parle alors de cogénération –, deux techniques sont utilisées.
La combustion est la plus courante. Les chaudières peuvent fonctionner avec des déchets (forestiers,
issus des industries du bois, voire ménagers), des plaquettes de bois, des pellets, des cultures
énergétiques… L’intérêt des pellets, comparés à d’autres matières premières, est qu’ils peuvent être
utilisés dans des centrales éloignées des ressources, car ils sont facilement transportables.
La méthanisation est réalisée par fermentation anaérobique, c’est-à-dire par décomposition sous
l’action bactérienne, en absence d’air, de substances très humides telles que les déchets ménagers, les
déjections animales ou les algues. Le « biogaz », ou gaz de fumier, est un mélange de méthane et de
gaz carbonique que l’on brûle in situ.
Les agrocarburants : un bilan mitigé
Les agrocarburants actuels sont de deux sortes : l’éthanol (près de 74 % du total), produit par
distillation de sucres de canne, betterave ou maïs et qui remplace l’essence ; et le diester, produit par
estérification des huiles de palme, de colza, de tournesol ou de soja et qui remplace le gazole pour les
moteurs diesel. Ils proviennent donc pour l’essentiel de plantes destinées à l’alimentation, ce qui fait
que leur culture entre en concurrence avec l’agriculture vivrière, soit directement, soit via
l’occupation des sols.
La production des agrocarburants a augmenté depuis 2005, sauf entre 2010 et 2012. Mais elle
nécessite de l’énergie fossile et de grandes quantités d’eau douce, entraînant des coûts non
négligeables – même si moins élevés au Brésil qu’aux États-Unis et en Europe.
Les recherches portent actuellement sur des agrocarburants de « deuxième génération », qui seraient
fabriqués à partir de déchets agricoles, de parties non comestibles des plantes et de cultures dédiées à
base de végétaux très productifs (comme le jatropha et le miscanthus géant) pouvant pousser dans
des zones peu fertiles. On évoque aussi une « troisième génération » : la biomasse algale, peu
exploitée jusqu’à présent et qui ne poserait aucun problème d’accaparement des terres arables ni de
disponibilité en eau douce. Cependant, aujourd’hui, tout indique que ces agrocarburants ne pourront
pas se substituer aux produits pétroliers.
L’hydraulique
L’hydraulique, appelée « houille blanche », a sa légende et la construction des grands barrages a
toujours été une aventure hors du commun. Récupérant l’énergie cinétique de l’eau des fleuves
avant de la convertir, c’est de loin la principale source d’électricité renouvelable. Toutefois, les
barrages, malgré leur rôle essentiel dans l’irrigation et la prévention des inondations, sont de plus
en plus critiqués pour leurs impacts sociaux et environnementaux.
Les régions favorables à l’hydroélectricité
Les régions privilégiées pour la production d’énergie hydraulique sont celles qui reçoivent les plus
fortes quantités de précipitations au cours de l’année (à condition qu’elles soient régulièrement
réparties), celles qui possèdent les cours d’eau au régime régulier les mieux alimentés et celles qui
comptent des bassins à rapides et à cascades sur lit rocheux dur.
Elles se trouvent principalement dans les zones tropicales et subtropicales humides d’Asie, d’Afrique
et d’Amérique du Sud, ainsi que dans les régions montagneuses des pays tempérés d’Amérique du
Nord et d’Europe – où l’on a aussi installé des centrales sur les fleuves à fort débit. Les plus grandes
centrales sont celle d’Iguaçu-Itaipu sur le fleuve Paraná, à la frontière de l’Argentine, du Brésil et du
Paraguay (14 000 MW depuis son agrandissement en 2004) et celle des Trois-Gorges en Chine, sur le
Yangzi Jiang (22 500 MW), respectivement mises en service en 1984 et en 2006-2009.
En 2015, six pays (Chine, Brésil, États-Unis, Canada, Russie et Inde) représentent plus de 60  % des
capacités installées. Toutefois, en part de l’hydroélectricité dans la production d’électricité totale, le
classement diffère puisque les cinq premiers pays sont : la Norvège (95 %), le Brésil (62 %), le
Venezuela (61 %), le Canada (61%) et la Colombie (58 %) – la moyenne mondiale étant de 16,4 %.
Avantages et inconvénients de l’hydroélectricité
L’avantage majeur de l’hydroélectricité est de produire à la fois de l’énergie de base (grâce aux
centrales au fil de l’eau) et surtout de l’énergie de pointe grâce aux centrales d’éclusées, de lac et de
pompage (par turbinage). En effet, en libérant des « tranches d’eau », il est possible de produire sans
délai de l’énergie à la demande, une énergie d’une valeur supérieure à l’énergie en continu.
Pour les deux derniers types de centrales, l’eau arrive naturellement dans le réservoir supérieur tandis
que dans le cas d’une centrale de pompage, l’eau est pompée d’un bassin inférieur vers un bassin
supérieur grâce à de l’électricité excédentaire produite par les centrales thermiques et nucléaires
pendant les heures creuses. Le rendement de telles installations est de l’ordre de 70 %. Par ailleurs,
les barrages, qui peuvent être de tailles diverses, jouent souvent un rôle essentiel dans l’irrigation et
le contrôle des crues.
Si ces technologies sont aujourd’hui bien maîtrisées, l’hydroélectricité présente aussi des
inconvénients : les coûts d’investissement sont élevés, ce qui rend les centrales économiquement
intéressantes à long terme seulement. Quant aux grands barrages, ils ont un coût humain et
environnemental important.

La grande et la petite hydraulique


L’hydroélectricité désigne d’abord les centrales importantes installées au pied d’un barrage ou sur un
fleuve. Leur productibilité dépend de la hauteur de la chute et du débit. C’est ce qu’on appelle la
« grande hydraulique ».
La « petite hydraulique » regroupe quant à elle des aménagements simples, souvent « au fil de
l’eau », des centrales dont la puissance est inférieure à 10 MW qui produisent de l’électricité à petite
échelle. Leur impact sur l’environnement est faible mais leur capacité totale limitée.
Si de telles installations sont une solution de choix pour l’électrification des zones rurales de pays du
Sud, elles se développent aussi en Europe où plusieurs pays octroient des certificats aux producteurs
d’électricité verte. Ce type d’électricité peut être revendu aux fournisseurs d’électricité eux-mêmes,
qui sont tenus à un quota minimal d’électricité verte.
Les grands barrages hydroélec-triques : la fin d’une époque ?
Il y aurait actuellement dans le monde plus de 65 barrages couplés à une centrale hydroélectrique de
plus de 2 000 MW et plus de 15 seraient en construction, dont 6 en Chine. Mais un peu partout, des
organisations écologistes et des communautés rurales menacées d’être déplacées font pression pour
l’arrêt des chantiers.
En effet, les grands barrages conduisent presque toujours à inonder de grandes superficies, à évacuer
des populations et à modifier le paysage, le cours des fleuves et leur biodiversité, ainsi que les
climats régionaux. À titre d’exemple, la mise en eau du barrage des Trois-Gorges en Chine a
nécessité l’évacuation d’au moins un million et demi de personnes, et la construction du barrage
Nasser en Égypte a non seulement modifié les crues du Nil et les climats de la zone, mais a exigé le
déplacement des temples d’Abou-Simbel afin de les sauver des eaux.
L’énergie éolienne
Alors que les moulins à vent utilisés pour moudre les grains ou presser les olives remontent au
Moyen Âge, les matériaux de l’aéronautique et les progrès de l’électronique de puissance ont très
récemment permis l’essor spectaculaire de l’électricité éolienne. Aujourd’hui, le prix de ce type
d’électricité est de plus en plus compétitif mais l’intermittence du vent reste un problème majeur en
l’absence d’une réelle solution pour le stockage.
La montée en puissance de l’énergie éolienne
La production d’électricité à partir de petites éoliennes remonte sans doute à la dernière décennie du
XIX  siècle, mais elle est restée artisanale et marginale jusqu’aux années 1970.
e

Après le premier choc pétrolier, le Danemark est devenu le leader du développement des éoliennes.
En 2015, la firme chinoise Goldwind est devenue la première entreprise du secteur, avec 12,5  % du
marché. Elle est suivie par la firme danoise Vesta (11,8 %) jusqu’alors la première, puis par la firme
américaine GE Wind et la firme allemande Siemens.
Les principaux fabricants d’éoliennes construisent des machines d’une puissance de 2 à 6  MW, la
plus grande aujourd’hui sur le marché faisant 8 MW. La progression récente de la puissance installée
est spectaculaire : elle a été multipliée par 25 entre 2000 et 2015 Même si c’est en Chine et aux États-
Unis que la progression est la plus forte, l’Europe est aussi en croissance : ainsi, en 2016, les
capacités installées y ont dépassé celles des centrales à charbon. En 2015, le secteur emploie plus
d’un million de personnes dans le monde et produit 841 TWh, soit 3,5 % de l’électricité mondiale.
Le gisement éolien
L’efficacité d’une éolienne dépend de son emplacement. En effet, la puissance fournie augmente
avec le cube de la vitesse du vent : un site avec des vents d’environ 30 km/h de moyenne sera
environ huit fois plus productif qu’un autre site avec des vents de 15 km/h de moyenne.
Une éolienne fonctionne d’autant mieux que les vents sont réguliers et fréquents. Elle commence à
produire quand la vitesse du vent est supérieure à une valeur comprise entre 10 et 20 km/h, mais doit
être arrêtée pour des raisons de sécurité quand le vent dépasse 90 km/h. Dans l’idéal, l’axe de
rotation de l’éolienne doit rester la majeure partie du temps parallèle à la direction du vent, cette
dernière doit donc être la plus stable possible.
Enfin, l’important n’est pas la puissance de l’éolienne (en MW), mais la quantité d’électricité (en
MWh) qu’elle peut produire en une année, c’est-à-dire le nombre équivalent d’heures de marche à
pleine puissance. On construit et on installe surtout en mer des éoliennes de plus en plus grandes.
Des supergrids pour faire face à l’intermittence du vent
L’éolien est subventionné dans tous les pays, mais dans les sites favorables, le coût de production des
grandes éoliennes devient presque compétitif. Comme il est impossible d’obliger le vent à souffler à
la demande, sur un territoire donné, la production d’électricité éolienne peut varier d’un facteur 30
d’un jour sur l’autre ! La charge moyenne annuelle effective rapportée à la charge nominale de
l’installation est appelée facteur de charge ; cette grandeur est très importante dans le calcul de
rentabilité d’une installation énergétique car elle représente le temps que l’éolienne travaille à sa
puissance maximale. Sur terre dans nos régions, il est de l’ordre de 20 % à 25 % ; en mer, on peut
atteindre 40 %. C’est-à-dire qu’un parc éolien onshore (sur terre) de 30 GW en France ou en
Belgique peut très bien ne produire que l’équivalent de 6 GW de centrales thermiques, et pas à la
demande.
Pour faire face à cette intermittence, il est de plus en plus question en Europe de développer un
supergrid en mer du Nord pour relier les parcs éoliens, couplé à un supergrid terrestre qui permettrait
de relier et d’exploiter le potentiel éolien du nord, le soleil du sud et les possibilités hydroélectriques
des massifs montagneux. Un supergrid est un réseau de transport d’électricité sur de très grandes
distances. À la différence des réseaux classiques utilisant du courant alternatif, les supergrids
s’appuient sur des lignes à courant continu haute tension (CCHT) qui minimisent les pertes induites
par le transport (jusqu’à 25 %). De tels réseaux permettraient d’accroître la part des énergies
renouvelables, de diminuer parallèlement les émissions de CO  et de réduire la dépendance
2

énergétique vis-à-vis des pays du Golfe et de la Russie. Toutefois, ces projets coûtent cher.
Comment, dès lors, les financer, mutualiser les coûts et plus tard sans doute le prix de l’électricité
(qui varie fortement d’un pays à l’autre) sans une réelle politique européenne de l’énergie ?
Les énergies solaires
Une petite fraction de l’énergie que rayonne le Soleil vers notre planète suffirait, en théorie, à
combler tous les besoins énergétiques de l’humanité, sans menace d’épuisement. Le problème est
que cette énergie est très diffuse et, bien sûr, rythmée par l’alternance jour-nuit. Si l’intermittence
n’est pas un problème pour les applications thermiques, elle constitue une limite au développement
d’électricité d’origine solaire à grande échelle.
Le solaire thermique
Les technologies solaires thermiques contribuent de manière significative à la production d’eau
chaude sanitaire dans de nombreux pays : en 2015, près des deux tiers des installations en service
étaient dédiées à cet usage. Les capteurs solaires sont aussi utilisés pour des systèmes combinés (eau
chaude sanitaire et chauffage de bâtiment), pour le chauffage de piscines, les centrales de chauffage
solaire, les procédés industriels ou encore la climatisation solaire.
Les capteurs permettent de recueillir l’énergie lumineuse transmise par rayonnement et de la
communiquer à un fluide caloporteur (gaz ou liquide) sous forme de chaleur. Beaucoup de capteurs
sont vitrés : ce sont des capteurs plans (surtout en Europe) ou des capteurs à tubes sous vide
(principalement en Chine). Aux États-Unis, au Brésil et en Australie, les capteurs non vitrés
dominent.
La production en solaire thermique a été multipliée par quatre depuis 2005 pour atteindre 435
Gigawatts thermiques en 2015. La grande majorité de la capacité de chaleur solaire (71 % de la
capacité totale en 2014) se trouve en Chine.
Le solaire photovoltaïque
L’électricité photovoltaïque est produite par transformation d’une partie du rayonnement solaire par
une cellule photovoltaïque, composant électronique qui, exposé à la lumière, génère une tension
électrique et produit du courant continu. Les cellules photovoltaïques se présentent sous la forme de
deux fines plaques en contact étroit. Pour 90 % d’entre elles, elles sont constituées de semi-
conducteurs à base de silicium, pris en sandwich entre deux électrodes métalliques – mais d’autres
matériaux sont aussi utilisés comme des polymères. Pour l’avenir, il est beaucoup question du solaire
photovoltaïque concentré dont le rendement serait double (plus de 40 %) et qui réduirait fortement le
nombre de cellules et les surfaces. Les panneaux solaires actuels ont une durée de vie de 20 à plus de
30 ans et sont presque intégralement recyclables. On peut les utiliser sur des toitures de maisons ou
d’entrepôts ou dans des centrales.
Dans le monde, le parc solaire photovoltaïque est passé de 5,1 GW en 2005 à 227 GW en 2015. La
Chine dispose aujourd’hui du premier parc mondial ; elle est suivie par l’Allemagne (premier pays
jusqu’en 2014), le Japon, les États-Unis et l’Italie. La Chine est aussi le premier producteur de
cellules. Comme il faut beaucoup d’énergie pour réduire la silice en silicium, le photovoltaïque est la
source d’énergie renouvelable qui émet le plus de gaz à effet de serre, mais dans des quantités
toutefois beaucoup moins importantes que n’importe quelle source fossile.
Le solaire thermodynamique
C’est sans doute l’utilisation la plus ancienne (déjà connue dans l’Antiquité) de l’énergie solaire :
concentrer les rayons solaires en un seul point afin d’obtenir des températures très élevées.
De nos jours, les centrales de ce type, dites hélioélectriques, sont composées d’une multitude de
capteurs souvent paraboliques et orientables qui concentrent les rayons solaires et les dirigent vers
une chaudière unique. Cela permet de chauffer des fluides calo-porteurs (souvent de l’huile ou des
sels fondus) à des températures allant en général de 250 à 1 000 °C. Ces fluides chauffent de la
vapeur d’eau qui entraîne des turbines qui, à leur tour, produisent de l’électricité comme dans des
centrales classiques. Les États-Unis dominent ce marché où l’on trouve peu d’autres pays, à
l’exception de l’Espagne.
Des centrales électriques solaires de plus en plus grandes
La plus grande centrale photovoltaïque actuelle a une puissance de 648 MW : inaugurée en Inde fin
2016, la centrale de Kamuthi comporte 2,5 millions de panneaux solaires, nettoyés par des robots et
s’étalant sur 10 km . Elle devance la ferme solaire Topaz en plein désert californien, d’une puissance
2

de 550 MW et connectée au réseau électrique fin 2014 ; installés sur 25 km , ses panneaux solaires ne
2

sont surélevés que de 1,7 mètre afin de limiter l’impact sur le paysage. Fin 2015, une centrale plus
grande encore, appelée Solar Star, elle aussi en Californie, devrait disposer d’une puissance de
579 MW.
La plus grande centrale thermodynamique a une capacité de 392 MW et compte 175 000 héliostats.
C’est la centrale d’Ivanpah, entrée en activité en février 2014 dans le désert de Mojave, en Californie.
Les centrales solaires sont bien adaptées aux régions où le besoin de climatisation est important
(synchronisme entre production et demande). Leur taille rejoint, voire dépasse, celle des centrales
thermiques classiques, mais le facteur de charge – quoique très élevé en Californie – ne dépasse
jamais 35 %.
Les autres ressources renouvelables
La géothermie permet de produire de la chaleur ou de l’électricité. Elle a été exploitée avant le
premier choc pétrolier, comme l’énergie marémotrice qui est un type particulier d’énergie
hydraulique, au même titre que d’autres sources renouvelables de la mer. Parmi elles, seul l’éolien
offshore posé est arrivé aujourd’hui au stade de maturité, l’éolien flottant pour des installations au-
delà de 50 mètres de profondeur n’étant encore qu’au stade de démonstration.
La géothermie : formes et technologies
La géothermie (ou chaleur de la Terre) est issue de la circulation d’eaux en profondeur réchauffées
par la proximité des magmas. Ce n’est donc pas une énergie intermittente puisqu’elle est
indépendante des conditions climatiques, de la saison et du moment de la journée.
On distingue la géothermie de surface, qui exploite la chaleur superficielle et l’inertie thermique du
sol (de quelques dizaines de centimètres à une centaine de mètres de profondeur) pour le chauffage
et/ou la climatisation des logements individuels, et la géothermie profonde, qui exploite la chaleur
des nappes aquifères ou des roches sèches profondes (de quelques centaines de mètres à plusieurs
kilomètres de profondeur) pour le chauffage et/ou la production d’électricité. Il existe de la
géothermie à basse et très basse énergie, qui produit de la chaleur à partir de réservoirs d’eau chaude,
et de la géothermie à haute énergie, qui produit de l’électricité à partir de réservoirs de vapeur.
La production de chaleur d’origine géothermique s’appuie principalement sur trois technologies : le
puits canadien (géothermie de surface), la pompe à chaleur (géothermie de surface) et le réseau de
chaleur (géothermie profonde). Ces trois technologies permettent de transférer les calories contenues
dans le sol (aquifères ou roches) à un fluide caloporteur qui alimente les immeubles.
La géothermie dans le monde
En termes de production électrique d’origine géothermique, la puissance totale installée des centrales
géothermiques atteignait 12,6 GW en 2015, avec une production de près de 73 TWh, soit moins de
0,1 % de la production électrique mondiale. 26 pays sont concernés par cette technologie ; parmi eux,
un producteur domine les autres : les États-Unis. En termes de production directe de chaleur
d’origine géothermique, la puissance fournie en 2015 atteignait 70 GW thermiques, ce qui
correspond à une production équivalant à plus de 163 TWh. La géothermie-chaleur constituait ainsi
la deuxième énergie renouvelable pour les usages thermiques, après la biomasse. Les pays
producteurs sont assez nombreux : 75 au total, dont deux plus importants : la Chine et les États-Unis.
Cette forme d’énergie connaît par ailleurs une croissance assez nette, les derniers chiffres disponibles
traduisant une augmentation de plus de 39 % entre 2010 et 2015.
L’énergie marémotrice
C’est la première des énergies de la mer à avoir été exploitée. C’est en effet en 1966 que fut mise en
service l’usine marémotrice de la Rance, près de Saint-Malo, qui a été jusqu’en 2011 –  année du
démarrage de la centrale de Sihwa (254 MW) en Corée du Sud – la seule grande centrale de ce type.
Sa puissance est de 240 MW et, comme l’usine fonctionne non seulement au flux et au reflux mais
utilise aussi un système de pompage pendant les heures creuses dans le but d’élever le niveau du
bassin intérieur ou de le faire baisser, son facteur de charge peut atteindre 25 % mais sa production
est seulement de l’ordre de 500 GWh. L’usine est en rénovation jusqu’en 2025.
Les contraintes de localisation de telles centrales sont importantes : de fortes amplitudes de marées
sont nécessaires (au moins 5 mètres) et le site doit permettre la construction d’un barrage dans de
bonnes conditions. De même, les défis technologiques et écologiques à relever sont souvent
nombreux. Toutefois, le potentiel de l’énergie marémotrice dans le monde n’est pas négligeable
(environ 1/10 de la production mondiale d’hydroélectricité) et de nouveaux projets sont élaborés,
comme « Swansea Lagoon » (240 MW) au Royaume-Uni, avec construction d’un lagon artificiel à
hauteur de la baie de Swansea.
L’énergie éolienne offshore
C’est en 1991 que la première éolienne offshore a été installée à Vindeby, au Danemark, et c’est au
début des années 2000 qu’on a vu apparaître les premiers parcs éoliens (dénommés aussi «  fermes
éoliennes »). Mais quel essor depuis : fin 2016, l’Europe, qui concentre 95 % de la capacité
mondiale, compte 3 589 éoliennes regroupées en 81 fermes avec une capacité installée de 12,6 MW.
Toutefois leur production – 46 TWh – ne représente que 0,2 % de la consommation totale
d’électricité.
Les avantages de l’éolien offshore par rapport à l’éolien terrestre sont nombreux : des vents plus forts
et plus réguliers, un éloignement des côtes qui diminue les conflits d’usage, un meilleur facteur de
charge et dès lors un moindre recours à des centrales pour pallier à l’intermittence et une production
de CO moitié moindre pour une quantité égale d’énergie éolienne produite ; mais les sites pouvant
2

accueillir les éoliennes sont plus rares et surtout les projets sont plus coûteux et nécessitent
fréquemment l’aide des pouvoirs publics.
Les énergies renouvelables sont-elles viables ?
Pour qu’une source d’énergie soit viable, elle doit être accessible au plus grand nombre, présenter
une garantie de fourniture à long terme, avoir un impact environnemental minime et être
économiquement compétitive. Cette dernière condition handicape sans aucun doute les énergies
renouvelables et, plus encore, les énergies de la mer dont le développement constitue un réel défi.
Une question largement débattue
La question du futur des énergies renouvelables est régulièrement débattue : elle oppose les partisans
de ces énergies à certains groupes de pression représentant les énergies traditionnelles. Chiffres à
l’appui, ceux-ci ont tendance à reléguer les énergies renouvelables au second plan. Ils avancent des
valeurs absolues en termes de production d’énergie relativement faibles, alors que les défenseurs du
renouvelable évoquent, eux, des taux de croissance favorables, en termes non seulement de
production mais aussi d’emplois : d’après Irena (l’Agence internationale pour les énergies
renouvelables), le secteur compte 9,8 millions d’emplois en 2016 et pourrait atteindre 24 millions
d’ici 2030, compensant les pertes d’emplois dans le secteur des combustibles fossiles.
En ce qui concerne la part du secteur au niveau énergétique, il faut se prémunir contre certaines
confusions fréquentes et garder à l’esprit que la part des énergies renouvelables n’est pas équivalente
si on la calcule dans la consommation d’énergie finale ou dans la seule production d’électricité.
Concernant l’énergie finale, cette part diffère aussi si l’on considère toutes les énergies renouvelables
ou uniquement les énergies « nouvelles », dites EnR, donc sans la biomasse traditionnelle.

Trois interrogations majeures


Quelle viabilité ? Au-delà de ces querelles de chiffres, la question de l’avenir des énergies
renouvelables est largement liée à leur viabilité. Celle-ci varie beaucoup d’une ressource à l’autre et
selon les paramètres pris en compte. Si aucune ressource n’est réellement accessible partout,
certaines sont un peu plus répandues que d’autres : la biomasse, le soleil et le vent. Toutes, par
contre, permettent une fourniture à long terme même si les quantités d’énergie récupérables diffèrent
grandement d’une source à l’autre – l’énergie solaire, l’hydraulique et la biomasse offrant le plus de
possibilités.
Quels impacts ? En matière de conséquences environnementales, si la grande hydraulique se heurte
à des oppositions croissantes, ce sont sans doute les agrocarburants (de première génération) qui
présentent le bilan écologique le plus médiocre. Par ailleurs, certaines énergies engendrent des
déchets en fin de vie de leurs installations comme par exemple les panneaux solaires (s’ils ne sont
pas recyclés) ou les éoliennes.
Quels coûts ? C’est certainement le facteur qui handicape le plus les EnR, et plus particulièrement
toutes celles qui produisent de l’électricité, car les investissements sont très importants. Ils portent
sur les structures de production, les réseaux de distribution, les centrales thermiques de secours
éventuellement nécessaires durant l’intermittence, sans parler des sommes allouées en recherche et
développement (R & D). Toutefois, contrairement aux énergies fossiles, il n’y pas de frais
d’extraction dans le secteur du renouvelable, ni de transport de la matière première. De plus, ces
énergies ne sont pas exposées au risque d’épuisement ni aux variations brusques des cours des
produits. Elles constituent donc, de ce fait, un investissement relativement sûr à long terme. En outre,
comme dans d’autres secteurs, les coûts fixes diminuent avec le temps, généralement en raison des
gains d’efficacité et des progrès techniques. Cependant, la question du financement reste entière car
malgré une baisse des prix, ces énergies ne peuvent encore rivaliser avec les énergies traditionnelles.
Qui doit alors investir : les opérateurs privés ou les pouvoirs publics ?

L’avenir des EnR est-il en mer ?


Pour convertir l’énergie des mers et des océans en électricité, d’autres voies que le marémoteur et
l’éolien sont actuellement également prospectées : l’énergie hydrolienne qui cherche à capter
l’énergie des courants marins ; les installations houlomotrices qui cherchent à capter l’énergie des
vagues et de la houle ; l’énergie thermique des mers qui exploite la différence de température entre
les eaux superficielles et les eaux profondes des océans en utilisant le même principe que la
géothermie ; l’énergie osmotique, qui exploite le phénomène d’osmose entre l’eau douce et l’eau
salée, par exemple au voisinage des estuaires, pour générer une différence de pression et faire tourner
une turbine ; et la biomasse marine, qui exploite les algues et le phytoplancton par gazéification,
fermentation ou combustion. Toutes ces technologies sont au stade expérimental, voire de prototypes
ou même au niveau de la R & D.
Malgré leur diversité, toutes ces énergies marines renouvelables – et c’est aussi le cas de l’éolien
offshore – ont en commun les mêmes types de problématiques : elles doivent gérer des questions de
robustesse en mer, de logistique, d’exploitation et maintenance, de sécurité des personnels et des
installations, de conflits d’usages, de production, d’acheminement optimum de l’énergie et de
problèmes administratifs complexes. Toutes doivent aussi satisfaire des critères techniques et
économiques précis pour être accueillies par le système électrique. Malgré des progrès remarquables
et des potentiels parfois très importants, les énergies marines renouvelables ne pourront dès lors que
contribuer modestement – du moins à court et moyen terme – à notre approvisionnement
énergétique.de conflits d’usages, de production, d’acheminement optimum de l’énergie et de
problèmes administratifs complexes. Toutes doivent aussi satisfaire à des critères techniques et
économiques précis pour être accueillies par le système électrique.
EN CONCLUSION
Les énergies renouvelables au cœur de la transition
énergétique
DES POTENTIELS TRÈS DIFFÉRENTS
Aujourd’hui, seules la biomasse et l’hydraulique ont des valeurs significatives dans les bilans. Mais
le vent et le soleil sont appelés à de grands développements.
DES FORCES ET DES HANDICAPS
N’émettant généralement pas de GES, sauf lors de la production et du transport de matières
premières (comme la biomasse) ou aux moments de la construction et de la fin de vie des systèmes
de production (barrages, éoliennes, panneaux solaires…), les énergies renouvelables ont aussi le
grand avantage de ne guère s’épuiser. Mais elles sont pour la plupart intermittentes et leur mise en
œuvre est coûteuse et complexe.
UN GRAND DÉFI
Développer les énergies renouvelables constitue un réel défi technologique et financier, d’autant
plus que l’on ne peut imaginer résoudre les problèmes à la seule échelle nationale. Désormais, cette
question intéresse autant les pays du Sud que ceux du Nord, d’où sa dimension éminemment
politique. De grands obstacles limiteront sans aucun doute l’expansion rapide de ces énergies dans
un avenir proche et plaident en faveur d’une diversification des solutions.
Géopolitique de l’énergie
Sécuriser l’approvisionnement en énergie et l’obtenir à meilleur coût,
assurer sa distribution sur le territoire et contrôler son impact sur
l’environnement font partie des responsabilités des gouvernements qui,
pour les assumer, font usage de tous les instruments à leur disposition, y
compris militaires. Les pays dotés d’abondantes sources d’énergie en font
un élément de leur puissance.
C’est en 1956, après la nationalisation du canal de Suez et l’expédition
militaire qui l’a suivie, que les Français ont découvert à leurs dépens
l’arme du pétrole. Ceci explique pourquoi son usage en 1974, après la
guerre du Kippour, a plus traumatisé la France que ses voisins et a facilité
l’acceptation du grand programme français d’équipement électronucléaire,
largement perçu comme le moyen de diminuer la dépendance du pays vis-
à-vis du pétrole arabe.
Depuis, l’embargo ou la menace d’embargo sur les livraisons de pétrole et
de gaz ont souvent été utilisés, et les flottes occidentales surveillent les
détroits d’Ormuz et de Malacca.
Échanges, tensions et enjeux de pouvoir
Les ressources énergétiques étant inégalement réparties, il est assez logique que des échanges soient
organisés entre les pays producteurs et les pays consommateurs. Ces échanges ne sont pas
seulement régis par la loi de l’offre et de la demande, ils sont aussi source de tensions et de conflits,
surtout en ce qui concerne les hydrocarbures, les produits les plus stratégiques. Le pétrole et le gaz
sont devenus des armes du pouvoir.
De l’intérêt d’une lecture géopolitique
Si la lecture des faits géographiques et économiques est essentielle, l’approche géopolitique permet
de prendre en compte le poids des hommes et de leurs organisations, leurs valeurs et leurs
comportements, afin de dépasser ces seuls facteurs rationnels pour traiter également des rapports de
force, des stratégies et des enjeux à un moment donné. Dans le domaine de l’énergie, c’est
fondamental : toute décision d’acteur est liée à la perception qu’il a de sa propre situation et du
contexte international dans lequel il évolue.
Le poids des considérations géopolitiques est totalement dépendant du moment historique dans
lequel on se trouve. Ainsi, le déséquilibre récent entre l’offre et la demande en matière de pétrole et
de gaz principalement a complètement modifié la donne depuis le début des années 2000. Ceux qui
possèdent les hydrocarbures cherchent à valoriser au maximum leurs richesses. Ils s’en servent non
seulement à des fins économiques mais aussi politiques. Ils bâtissent de la sorte leur suprématie, telle
l’Arabie saoudite par exemple, le leader de l’Opep. Ils peuvent aussi exercer des pressions sur leurs
clients potentiels, comme le fait la Russie vis-à-vis de l’Ukraine depuis la « révolution orange » de
2004 et plus encore depuis l’accord d’association avec l’UE de la mi-2013.
En fait, dans un monde qui prend conscience de la rareté progressive des ressources, ce qui devient
déterminant pour asseoir sa puissance, c’est la maîtrise de ses richesses tant au niveau national
qu’international. Actuellement, les États-Unis mettent en œuvre une politique de soutien massif à
leur propre industrie pétrolière et gazière afin de réduire leur dépendance vis-à-vis de l’étranger, alors
que la Chine cherche pour sa part à assurer ses approvisionnements en s’installant à de nombreux
endroits du globe, là où se trouvent les réserves.
Des tensions et des conflits
Cette course au contrôle des ressources engendre fréquemment des tensions et peut même conduire à
des conflits, sur terre, comme au Soudan par exemple, ou en mer, comme en mer de Chine.
Chine et Japon s’entre-déchirent dans ce cas précis sur la délimitation de leurs zones de
souveraineté respectives en se référant tous deux à la Convention des Nations unies sur le droit de la
mer (convention de Montego Bay du 10 décembre 1982). Tandis que le Japon évoque l’existence
d’une zone économique exclusive (ZEE) autorisant un État côtier à exercer ses droits souverains en
matière d’exploration et d’usage de ressources jusqu’à 200 milles marins (370,4 km), la Chine
s’appuie sur les principes relatifs à la délimitation du plateau continental juridique permettant aux
États côtiers d’étendre leurs frontières en fonction de la morphologie et la géologie de la marge
continentale, jusqu’à une distance maximale de 350 milles marins (648,2 km). Or la zone disputée
recèle des hydrocarbures et occupe une position stratégique au cœur d’un espace emprunté par de
nombreuses routes maritimes. Les Chinois s’opposent notamment à la souveraineté japonaise sur les
îles Senkaku/Diaoyu, qui a commencé à prendre forme en 1971 et qui offre au Japon un accès de
facto au plateau continental sur lequel elles reposent. Il existe bien d’autres conflits en mer de Chine,
notamment en mer de Chine méridionale, entre la Chine et les Philippines pour l’atoll de
Scarborough.
Les grands acteurs de l’énergie
Garantir l’approvisionnement du pays en énergie est une responsabilité fondamentale d’un État,
mais les États ne sont pas les seuls acteurs. La recherche, la production et l’acheminement des
hydrocarbures sont largement assurés par quelques grandes compagnies multinationales. Les pays
exportateurs de pétrole se sont rassemblés au sein de l’Opep et la plupart de leurs clients se sont
regroupés dans l’AIE.
Le rôle des États dans le secteur de l’énergie
Les États disposent de nombreux instruments pour exercer leur responsabilité dans le secteur
énergétique :
- par des sociétés nationales, comme Aramco en Arabie saoudite ou Gazprom en Russie ;
- par le financement de la R&D, les subventions aux technologies naissantes, voire l’investissement
direct dans des moyens de production ;
- par la fiscalité – les taxes peuvent modifier le comportement des consommateurs ;
- par la réglementation, les normes et les standards ;
- par l’organisation du rationnement en période de crise ;
- par l’action militaire – de l’Irak à la Tchétchénie, une part significative des budgets militaires sert à
la sécurisation des lignes d’approvisionnement en énergie.

Les grandes compagnies multinationales


De 1860 à 1960, les « sept sœurs » ont dominé l’industrie pétrolière : Exxon, Mobil et Chevron,
issues de l’éclatement forcé de la Standard Oil en 1911 ; Gulf et Texaco, nées de la découverte du
pétrole texan en 1901 ; BP, créée pour exploiter le pétrole iranien, et Shell Royal Dutch, celui
d’Indonésie. En 1960, les sept sœurs contrôlaient 85 % des réserves mondiales de pétrole et de gaz.
Aujourd’hui, des fusions-acquisitions ont donné naissance à six « supermajors » : ExxonMobil,
Shell, BP, Chevron, ConocoPhillips et Total. Ces multinationales détiennent la technologie
pétrolière, mais elles n’ont plus accès qu’à 16 % des réserves mondiales, le reste étant contrôlé par
les États producteurs dans une grande opacité. ExxonMobil est la compagnie la plus grosse et la plus
riche du monde, mais ses réserves ne viennent qu’en seizième position, loin derrière Gazprom ou
Petrochina. Privées de leurs ressources traditionnelles, les supermajors investissent dans les
hydrocarbures non conventionnels et les énergies renouvelables.
L’Opep et l’Opaep
L’Opep, Organisation des pays exportateurs de pétrole, a été fondée en 1960 pour rééquilibrer le
partage des revenus entre les pays producteurs de pétrole et les compagnies pétrolières. Elle limite la
production de pétrole par attribution de quotas à chacun de ses membres en fonction des réserves
qu’il affiche. Ce mécanisme a pu inciter certains États à surévaluer leurs réserves. Ces quotas sont
ajustés périodiquement pour fixer une fourchette des prix du pétrole et essayer de maintenir leur
stabilité.
L’Opep réunit aujourd’hui 14 pays membres : l’Algérie, l’Angola, l’Arabie saoudite, l’Équateur, le
Gabon, l’Indonésie, l’Iran, l’Irak, le Koweït, la Libye, le Nigeria, le Qatar, les Émirats arabes unis et
le Venezuela. En 2014, l’OPEP a compté pour 41 % de la production mondiale. Les réserves
prouvées de pétrole de ses pays membres atteignent 71,6 % des réserves mondiales. L’Opaep,
Organisation des pays arabes exportateurs de pétrole, a été créée en 1968 par le Koweït, la Libye et
l’Arabie saoudite pour coordonner les activités pétrolières et favoriser l’intégration économique entre
les pays arabes. C’est l’Opaep qui a utilisé l’arme politique du pétrole fin 1973.
L’Agence internationale de l’énergie (AIE)
Fondée en 1974 en réponse au premier choc pétrolier, l’AIE est une association de pays
consommateurs d’hydrocarbures. En 2015, elle comprend 29 membres, tous membres de l’OCDE.
Organisation intergouvernementale, l’AIE œuvre à la sécurité d’approvisionnement en énergie, à la
croissance économique et à la protection de l’environnement. Les pays membres se sont engagés à
prendre ensemble des mesures afin de faire face aux crises pétrolières et à partager leurs
informations. L’AIE surveille l’évolution des marchés pétroliers. Sa publication annuelle World
Energy Outlook fait autorité.
Moyen-Orient, Russie, États-Unis : trois grands
producteurs
Les trois régions décrites ici ont des profils très différents, mais ont en commun une grande
abondance énergétique. Le Moyen-Orient et la Russie sont les plus importants exportateurs de
pétrole et de gaz. Les États-Unis figurent à la fois en tête des productions et des consommations,
mais l’essor spectaculaire des productions d’hydrocarbures non conventionnels leur fera peut-être
quitter assez vite la liste des grands importateurs.
Le Moyen-Orient
70 % des réserves de pétrole conventionnel sont concentrées sur une petite région qui va du nord de
la mer Caspienne au sud du golfe arabo-persique, et le monde entier s’y approvisionne. C’est un lieu
où s’affrontèrent les empires, les religions et les civilisations : aujourd’hui, on s’y affronte autour du
pétrole. Les gisements géants y fournissent un pétrole de bonne qualité dont l’extraction est très peu
onéreuse, conférant à ces pays relativement peu peuplés un rôle géopolitique démesuré. Les fonds
souverains de l’Arabie saoudite ou du Qatar leur donnent aussi un poids économique considérable.
Cette médaille a son revers : régimes autoritaires, guerres meurtrières et terrorisme. À noter le retour
de l’Iran avec la levée des sanctions.
La Fédération de Russie
La Fédération de Russie est le plus vaste État du monde, à cheval sur deux continents. Son territoire
regorge de richesses naturelles, pour beaucoup situées en Sibérie.
Avec 533 Mt en 2015, la Russie est le troisième producteur mondial de pétrole, derrière l’Arabie
saoudite et les États-Unis. Elle en est le premier exportateur (222 Mt). Ce pays est aussi le deuxième
producteur de gaz naturel (574 Mtep/an), ressource dont il est également le premier exportateur
(173 Mtep). C’est près de 44 % de sa production d’énergie primaire qui est exportée, en priorité vers
l’Union européenne.
L’Union soviétique se reposait en son temps sur l’Armée rouge pour assurer sa place mondiale, la
Russie compte désormais sur Gazprom. C’est pour réserver le plus possible de gaz à l’exportation
que Vladimir Poutine a relancé très activement en 2000 un programme d’énergie nucléaire que
l’accident de Tchernobyl en 1986 avait mis en hibernation. La Russie est deuxième, derrière la
Chine, en nombre de réacteurs en construction sur son territoire, et ce solide programme domestique
soutient une politique d’exportation extrêmement dynamique.
Les États-Unis d’Amérique
Troisième population mondiale, les États-Unis comptent 324 millions d’habitants. Leurs 9,4 millions
de km renferment de grandes richesses naturelles. Les États-Unis ont depuis 2009 cédé à la Chine les
2

titres de plus gros consommateur d’énergie et de plus gros émetteur de gaz à effet de serre.
Avant 1973, l’abondance d’une énergie bon marché faisait partie de l’American Way of Life. De 1985
à 2000, l’énergie semblait avoir disparu de l’agenda politique interne, puis l’augmentation des prix
de l’énergie a relancé le sujet et abouti au passage, en 2005, de l’Energy Policy Act. Pus récemment,
la montée en production des hydrocarbures de roche-mère (gaz et huile « de schiste ») a bouleversé le
paysage énergétique américain. Un des objectifs essentiels de la politique étrangère des États-Unis
est la liberté d’accès aux réserves de pétrole du Moyen-Orient. Une large part du budget militaire
américain est consacrée à cela.
Les États-Unis ont d’énormes réserves de charbon : de l’anthracite dans les Appala-ches, du charbon
bitumineux dans le centre du pays et du lignite exploité à ciel ouvert dans les États du Nord-Ouest.
En dépit d’un récent transfert vers le gaz (34 %), le charbon reste la première source d’électricité du
pays (30 %) en 2016. Cette importance du charbon dans l’économie américaine explique la non-
ratification du protocole de Kyoto. On a assisté en 2015 avec la COP 21 à une évolution parallèle des
États-Unis et de la Chine qui ont participé aux négociations climatiques, mais l’élection de Donald
Trump peut inquiéter... Indépendamment du pouvoir fédéral, certains États, notamment la Californie,
ont pris depuis longtemps des mesures énergiques pour limiter les gaz à effet de serre. Les États-Unis
sont enfin les premiers producteurs d’électricité nucléaire.
UE, Chine, Inde : consommateurs contrastés
« Vieille » Europe, Chine triomphante et Inde émergente, voici un mélange hétéroclite… Et
pourtant ces régions ont en commun d’être de grandes importatrices d’énergie, impliquées chacune
à leur manière dans une transition énergétique importante.
L’Union européenne
En 2000, l’Union européenne importait 50 % de sa consommation en pétrole, gaz et charbon, qui
fournissent 75 % de son énergie primaire. En 2030, cette part importée atteindra 70 %, rendant
l’Union encore plus dépendante du gaz russe et du pétrole du Moyen-Orient.
L’Union a édicté des objectifs communs en matière d’économies d’énergie, de réduction des
émissions de gaz à effet de serre et de développement des énergies renouvelables, mais les autres
volets de la politique énergétique varient beaucoup d’un pays à l’autre, notamment dans le domaine
nucléaire.
La République populaire de Chine
Entre 2006 et 2010, les États-Unis ont cédé à la Chine les titres de premier consommateur d’énergie
et de premier émetteur de gaz à effet de serre. Ceci dit, il ne faut pas oublier qu’une part non
négligeable des émissions chinoises vient de la fabrication de biens exportés vers les pays de
l’OCDE.
Avant tout, la Chine, c’est le charbon, dont elle est le premier producteur mondial, avec plus de
3,5 milliards de tonnes extraites en 2013, lignite inclus, auxquelles s’ajoutent 320 millions de tonnes
importées. Préoccupé par la pollution, le gouvernement chinois développe les énergies nucléaire et
renouvelables, annonce la fin de la croissance du charbon et participe désormais aux négociations
internationales sur l’effet de serre. Si la production d’électricité nucléaire de la Chine ne la place
encore qu’en cinquième position, son programme de construction de réacteurs est, de loin, le premier
du monde. La Chine est aussi le premier exportateur de panneaux solaires photovoltaïques.
L’Union indienne
La population indienne dépassera sans doute celle de la Chine vers 2030. La croissance économique
du pays est également très forte, entre 7,5 et 9 % par an depuis une dizaine d’années. L’Inde apparaît
de plus en plus comme une puissance économique planétaire, mais elle n’a pas réglé le problème de
la pauvreté. La croissance reste concentrée sur quelques zones et n’a, pour l’instant, qu’un impact
limité sur le reste du territoire.
L’Inde est le troisième producteur mondial de charbon (615 Mt) dont elle importe 180 Mt/an.
Troisième producteur mondial d’électricité, le pays connaît dans ce secteur un déficit permanent que
le gouvernement espère combler par des « super-mégaprojets » de centrales à charbon, alors que
celui-ci produit déjà 71 % de l’électricité. De 1974 à 2009, l’Inde a dû développer seule son
programme nucléaire. Elle bénéficie désormais d’un statut d’exemption et peut avoir accès à l’aide
internationale, indispensable pour atteindre ses objectifs ambitieux en la matière.
Le « tournant énergétique » allemand : modèle
ou repoussoir ?
Pour compenser leur sortie programmée du nucléaire, les Allemands ont investi depuis près de
20 ans des sommes considérables dans le photovoltaïque et l’éolien, sources d’électricité
renouvelables mais intermittentes. Comme ils sont souvent cités en exemple, il est important
d’évaluer les aspects positifs et négatifs de leur expérience.
La genèse de l’Energiewende
Il est d’usage de prendre l’année 1990 comme référence pour évaluer les variations de consommation
d’énergie et d’émission de gaz à effet de serre (GES). Dans le cas de l’Allemagne, la référence n’est
pas significative car elle se situe avant la réunification. La RDA possédait de nombreuses industries
énergivores et polluantes dont beaucoup ont été fermées très peu de temps après sa disparition. Pour
prendre un peu de distance avec cet événement exceptionnel, nous prendrons comme référence
l’année 2000. Ce choix est d’autant plus justifié que le tournant énergétique allemand, ou
Energiewende, date des élections générales de 1998 qui ont vu la CDU perdre la majorité au profit de
la coalition entre le SPD et les Verts, dirigée par Gerhard Schröder. Le nouveau gouvernement
décide alors de l’arrêt de toutes les centrales nucléaires allemandes avant 2022. En 2000,
l’Allemagne était le quatrième producteur mondial d’électricité nucléaire, derrière les États-Unis, la
France et le Japon et devant la Russie. Le nucléaire produisait 31 % de son électricité.
Deux ans de discussions entre le gouvernement et les compagnies d’électricité ont défini les
modalités de cette sortie programmée du nucléaire et, en 2000, la loi « EEG » a acté cette sortie et a
promu le remplacement du nucléaire par l’électricité d’origine renouvelable, très fortement
subventionnée :
- les propriétaires de panneaux solaires et de fermes éoliennes bénéficient désormais d’un accès
prioritaire au réseau ;
- la loi allemande garantit l’indemnisation totale des coûts d’investissement. Les taux offerts sont
garantis 20 ans à partir de l’année d’installation, mais ceux-ci baissent chaque année pour les
nouveaux systèmes installés ;
- le coût de ces tarifs de rachat est répercuté sur les consommateurs domestiques. Jusqu’à 2015, la
surtaxe a fait augmenter le prix de détail de 6,1 centimes le kilowattheure (sans compter les frais de
raccordement mensuels).
Les conséquences de Fukushima
En 2005, la CDU remporte la majorité des sièges et Angela Merkel remplace Schröder. Elle fait voter
au Bundestag, en septembre 2010, un amendement qui repousse d’une douzaine d’années la sortie du
nucléaire. Mais après la catastrophe nucléaire de Fukushima, le 11 mars 2011, elle décide de fermer
immédiatement 8 des 17 réacteurs du pays. Deux mois plus tard est annoncée la sortie du nucléaire
pour 2023.
Quels résultats ?
Après 15 ans, on constate la diminution de 10 % de la consommation énergétique, notamment par
une meilleure pénétration de l’électricité. Mais l’augmentation spectaculaire de la production
d’électricité d’origine renouvelable n’a pas permis de réduire significativement l’usage des
combustibles fossiles ni de réduire la capacité des centrales fossiles en « backup ».
Pourtant, l’effort financier a été considérable : l’Institut pour la compétition économique de
l’université de Düsseldorf a calculé le coût total de l’Energiewende : plus de 150 milliards d’euros
sur la période 2000-2015. En extrapolant sur la période 2000-2025, l’Institut arrive au chiffre de
520 milliards d’euros, dont 56 milliards d’euros pour renforcer le réseau électrique. L’Allemagne
espérait devenir le premier fournisseur mondial de panneaux solaires, mais c’est la Chine qui l’est
devenue.
Le tournant énergétique allemand a fragilisé le réseau électrique européen : quand le vent souffle très
fort sur la mer du Nord, à cause de la priorité d’accès de l’éolien sur leur réseau, les Allemands
doivent parfois indemniser leurs voisins pour que ceux-ci acceptent d’importer de l’électricité (le
2 mai 2017, ce prix négatif a atteint -75 €/MWh) ! De plus, les centrales thermiques nécessaires pour
compenser les manques de vent et de soleil ont un facteur de charge trop bas pour être rentabilisées  :
il faut aussi les subventionner pour éviter leur fermeture, qui créerait des risques de blackout.
Comment se situe l’Allemagne dans l’Union européenne ? Prenons deux critères : les émissions
individuelles de CO liées à l’énergie et le prix de l’électricité facturée aux ménages (cartes ci-
2

contre).
Alors… Modèle ou repoussoir ? Il est peut-être encore trop tôt pour se prononcer, mais une chose est
certaine : il faut avoir les reins solides de l’économie allemande pour se payer une expérience aussi
coûteuse, et ce n’est pas le cas de la plupart des États membres de l’Union européenne.
L’Afrique subsaharienne : une inconnue
énergétique
Le développement de l’Afrique subsaharienne est l’inconnue de ce siècle, mais combiné à la
croissance démographique de cette région, il entraînera une forte augmentation des besoins en
énergie, aujourd’hui fort bas. Riche en ressources naturelles, l’Afrique est exportatrice de pétrole et
de gaz et dispose d’un fort potentiel hydraulique et solaire. Ce continent, secoué par les conflits,
saura-t-il satisfaire ses besoins en énergie ?
Quand l’Afrique s’éveillera…
Sur les splendides photos de notre planète prises de nuit depuis l’espace, l’Afrique est bien le
continent noir : on voit plus de lumières dans la petite Belgique que dans toute l’Afrique
subsaharienne. À la fin du XX siècle, cette partie du continent, encore sous le coup de la
e

décolonisation, semblait prisonnière du sous-développement. L’épidémie de sida qui la ravageait


alors laissait planer des doutes sur l’évolution démographique.
Aujourd’hui, l’économie de l’Afrique subsaharienne connaît une des croissances les plus rapides au
monde, juste derrière l’Asie. Son PIB a augmenté de 5 % à 7 % au cours des dix dernières années.
Selon l’Institut national d’études démographiques, l’Afrique comptera environ 2,4 milliards
d’habitants en 2050.
Avec 12 % de la population mondiale, la région dispose de 2 % des réserves prouvées de pétrole, de
3 % des réserves prouvées de gaz et de 6 % des réserves prouvées de charbon du monde. Elle jouit
d’un vaste potentiel hydroélectrique concentré le long des fleuves Congo, Nil, Niger, Volta et
Zambèze, et bénéficie d’un rayonnement solaire constant et abondant. Elle possède également un
potentiel géothermique dans le rift est-africain.
Malgré ses richesses naturelles, l’Afrique compte parmi les régions les moins développées du monde.
Le revenu par habitant sur le continent n’atteint que 15 % de la moyenne mondiale. En 2016,
seulement 35 % de l’Afrique subsaharienne et moins de 20 % de ses populations rurales ont accès à
l’électricité, contre plus de 90 % dans les pays développés.
La consommation d’énergie y a crû de 52 % de 2000 à 2014, mais ne représente que 5,6 % de la
consommation mondiale. Seule l’Afrique du Sud dépasse la moyenne mondiale. Plus de 630 millions
de personnes n’ont pas l’électricité et près de 720 millions utilisent la biomasse pour la cuisine.
Le défi de l’électricité
Le manque d’accès à l’électricité est un frein au développement de l’Afrique subsaharienne et, plus
encore, à une distribution plus homogène de ce développement. L’Agence internationale de l’énergie
a estimé à 640 kWh la consommation moyenne d’électricité par habitant dans toute l’Afrique  : c’est
moins que la consommation annuelle d’une seule ampoule de 75 watts… L’Afrique consacre environ
11,6 milliards de dollars chaque année au secteur de l’électricité, seulement un quart des besoins
annuels de financement.
Hydroélectricité. Hors biomasse, l’hydroélectricité est la source d’énergie renouvelable la plus
utilisée en Afrique subsaharienne. Son potentiel est considérable et son coût moyen le plus bas de
toutes les sources d’électricité. Aujourd’hui, seulement 10 % du potentiel technique est exploité,
notamment à cause du faible niveau d’interconnexion régionale. Si le projet Grand Inga voit le jour,
avec ses 44 GW,il révolutionnera le paysage électrique africain. Mais les grands projets
hydroélectriques sont très coûteux en capital et ont des conséquences sociales et environnementales
non négligeables.
Solaire. L’Afrique bénéficie d’un « gisement solaire » particulièrement attrayant : une grande partie
du territoire jouit d’un ensoleillement qui dépasse 320 jours par an, avec une irradiation de presque
2 000 kWh/m , le double de la moyenne européenne. Un vaste développement du solaire en Afrique
2

semble donc possible.


EN CONCLUSION
Géopolitique de l’énergie
LES GRANDES COMPAGNIES MULTINATIONALES qui ont dominé pendant un siècle le
commerce de l’énergie ont dû, dans les années 1960, composer avec les pays détenteurs des
ressources pétrolières et gazières. Celles-ci sont devenues source de puissance et d’influence
internationale, donc de tensions et de conflits. Aujourd’hui, par exemple, Gazprom a remplacé
l’Armée rouge comme acteur et symbole de la puissance russe.

LA SÉCURITÉ D’APPROVISIONNEMENT en énergie pour un pays importateur dépend


notamment de la diversité de ses fournisseurs. À cet égard, on peut constater la vulnérabilité de
l’Union européenne vis-à-vis du gaz russe et du pétrole du Moyen-Orient. Oléoducs et gazoducs
rendent plus dépendants que pétroliers et méthaniers. Le déploiement de technologies nouvelles
peut diminuer la dépendance énergétique d’un pays, comme le montre l’exploitation du gaz de
schiste aux États-Unis.

L’EXEMPLE DE L’AFRIQUE montre qu’il ne suffit pas de disposer de réserves énergétiques :


encore faut-il pouvoir financer leur mise en production. Malheureusement, les énergies
renouvelables, qui coûtent peu en exploitation, nécessitent de fortes dépenses en capital avant toute
production.
Le temps de l’action
Les nouveaux défis de l’énergie forcent à l’action. Aujourd’hui, il ne suffit
plus d’observer, d’analyser, voire de dénoncer des situations aberrantes ; il
faut agir. Comme l’énergie est partout, dans toutes les activités
économiques, tous les déplacements, la plupart des actes quotidiens et
qu’elle touche tous les territoires, les mesures ne peuvent qu’être multiples,
à la fois technologiques et comportementales, mais aussi politiques et
sociales. De plus, toutes ces dispositions doivent être coordonnées car le
problème énergétique est multidimensionnel. Comment dès lors construire
un nouveau modèle énergétique où chaque territoire trouverait sa voie et
où chaque homme bénéficierait d’un accès durable à l’énergie ? Quelles
actions privilégier et dans quels secteurs ? Comment mettre ces dernières
en œuvre en cherchant à faire de l’énergie un facteur de développement
plus équitable et plus respectueux de l’environnement ?
Accroître l’efficacité et la sobriété énergétique
La production d’énergie est l’affaire des gouvernements, des sociétés spécialisées et de quelques
particuliers. Mais l’énergie, c’est aussi et surtout une affaire de demande et là, nous sommes tous
concernés. C’est la somme de nos consommations individuelles, directes ou indirectes, via le
contenu énergétique des biens et des services dont nous usons, qui constitue la consommation
mondiale d’énergie et entraîne la production correspondante.
Côté offre, l’efficacité énergétique
L’aspiration légitime des peuples des pays du Sud à accéder à un niveau de vie décent, combinée
avec leur croissance démographique, entraîne la hausse de la consommation mondiale d’énergie,
avec les conséquences déjà évoquées de l’épuisement des réserves et du lourd impact
environnemental.
Un des facteurs permettant de limiter la croissance de la consommation énergétique est
l’augmentation de l’efficacité due au progrès technique. Par exemple, le remplacement des ampoules
à filament par des diodes électroluminescentes LED réduit drastiquement la quantité d’électricité
nécessaire à un éclairage donné. Encore faut-il raisonner à service rendu égal : les améliorations
remarquables de l’efficacité des moteurs n’ont pas beaucoup diminué la consommation des
automobiles mais ont été utilisées pour en augmenter la sécurité et le confort.
L’efficacité énergétique a augmenté d’environ 1,5 % par an dans les pays de l’OCDE au cours des
trente dernières années : ce n’est pas négligeable, mais c’est insuffisant.
Côté demande, la sobriété énergétique
Le second facteur de contrôle de la demande est la sobriété, la somme des sobriétés individuelles.
C’est une affaire de culture, donc d’éducation.
Quand on pense consommation d’énergie, on pense chauffage, éclairage et transports. Vu le poids du
chauffage, l’isolement de l’habitat ancien est une mine d’économies d’énergie, mais au prix d’un
investissement significatif – et les déductions fiscales n’aident que ceux qui paient l’impôt direct.
Mais il y a bien d’autres sources de consommation d’énergie moins visibles dans notre vie
quotidienne : appareils électroménagers, télévisions et chaînes hi-fi, ordinateurs… tout ce qu’on
branche à une prise électrique entraîne des consommations directes. Notre nourriture incorpore les
dépenses énergétiques de l’agriculture (engrais compris), des transports de denrées, de l’industrie
alimentaire et de la chaîne du froid. Chaque objet manufacturé a son bilan d’énergie de matériaux, de
fabrication et de transport. Il est très instructif à cet égard d’évaluer sa propre « empreinte
écologique » à l’aide des logiciels que l’on trouve sur Internet. On peut également estimer les
impacts environnementaux d’un produit avec le « Bilan Produit » de l’ADEME.
Diversifier les ressources et les
approvisionnements
La sécurité énergétique s’impose désormais un peu partout dans le monde et se retrouve au cœur de
la nouvelle « Union européenne de l’énergie » décidée en mars 2015. Diversifier ressources et
approvisionnements devient donc une contrainte majeure pour la plupart des pays. Mais la situation
de chacun d’eux diffère selon leurs ressources, leurs moyens financiers et technologiques, leur
situation géographique ou leurs relations avec leurs fournisseurs…
Diversifier le mix énergétique
La diversification du mix énergétique s’impose de plus en plus partout, à la fois pour réduire la
dépendance à une seule ressource et pour aller vers un développement plus respectueux de
l’environnement, en diminuant la part des ressources fossiles (surtout les charbons). Mais cette
diversification n’est et ne sera pas facile, même dans le secteur de l’électricité où les solutions de
substitution sont plus importantes que dans les autres secteurs comme les transports par exemple.
Les cas de la Chine et de l’Inde, respectivement premier et troisième producteurs mondiaux de
charbon, l’illustrent très bien, malgré leur volonté d’investir massivement dans les énergies
renouvelables et de continuer à développer leur parc nucléaire et à accroître leurs achats en gaz
naturel. D’après l’EIA, la diversification devrait être plus forte en Chine qu’en Inde en 2040, en
raison non seulement de la volonté du pays de faire face à ses problèmes environnementaux (en
2015, la Chine a pris des mesures spécifiques pour réduire ses émissions de GES à partir de 2030)
mais aussi d’un taux de croissance des besoins en électricité plus faible (2,5 contre 3,5  % par an de
2012 à 2040).
Diversifier les lieux d’approvisionnement
Le gaz naturel est la deuxième source de consommation énergétique européenne (23 % en 2012,
contre 34 % pour le pétrole). D’après les prévisions de l’AIE, la demande de gaz au sein de l’UE
devrait croître tandis que les gisements gaziers de la mer du Nord sont en voie d’épuisement,
conduisant certainement à une dépendance énergétique de 80 % en 2030.
Malgré une volonté de diversifier les approvisionnements, la Russie et la Norvège restent
actuellement les deux principaux fournisseurs du gaz naturel importé par l’Europe, représentant
respectivement 44 et 33 % des importations. Certes, la part russe a légèrement diminué, mais recourir
à d’autres producteurs n’est pas chose aisée. De fait, cela impliquerait soit d’importer du gaz naturel
liquéfié (ce qui suppose la multiplication de coûteux terminaux d’importation), soit de construire des
gazoducs, depuis l’Azerbaïdjan par exemple ou d’autres pays asiatiques, sans passer par la Russie.
C’est d’ailleurs le cas du TAP (Trans-Adriatic Pipiline) qui doit permettre l’acheminement de la
production du gisement gazier géant de Shah Deniz, dans les eaux azerbaïdjanaises de la mer
Caspienne. Il transportera le gaz de la frontière turque jusqu’à l’Italie en passant par la Grèce et
l’Albanie. Par ailleurs, ce TAP, qui devrait être achevé en 2019 et qui a bénéficié du soutien des
États-Unis et de l’UE, ne représente qu’une partie d’un projet plus global de nouveau corridor de
transport de gaz de la mer Caspienne vers l’Europe.
Une contrainte majeure : investir massivement dans le secteur de l’énergie
D’après l’AIE, plus de 1 600 milliards de dollars ont été investis en 2013 pour assurer
l’approvisionnement mondial en énergie. Les investissements dans les énergies fossiles dominent
largement : près de 1 100 milliards de dollars (en intégrant les investissements dans le transport, le
raffinage et la production électrique de ces ressources), dont 700 milliards pour l’exploration et
l’exploitation de pétrole et de gaz naturel. Les investissements dans les énergies renouvelables ne
représentent que près de 250 milliards de dollars, mais c’est quatre fois plus qu’en 2000.
Rapportés à la période 2000-2013, les investissements mondiaux dans l’énergie se sont élevés en
moyenne à 1 230 milliards de dollars par an. La production et le transport d’électricité absorbent
presque 39 % de ce total (479 milliards par an).
Le secteur de l’énergie est donc très capitalistique et tout indique que les montants vont continuer à
croître car il faut à la fois investir pour diversifier l’offre et répondre aux nouvelles demandes –
notamment dans les pays émergents et dans les pays du Sud encore mal équipés – et moderniser et
remplacer les installations et les réseaux existants – la vie d’une centrale électrique ne dépassant
guère quarante ans. En réalité, près de 59 % de ces investissements permettront uniquement de
maintenir les niveaux actuels de production.
Transports et mobilité
Les transports représentent aujourd’hui 28 % de la consommation mondiale d’énergie. Ils
dépendent à 92 % des produits pétroliers. Pour agir, deux axes s’imposent : transporter « moins »
en réduisant les volumes de trafic (nombre de déplacements, distances parcourues) et transporter
« mieux » en favorisant un report des trafics routiers vers les modes moins consommateurs et moins
polluants (ferroviaire, fluvial, transports collectifs).
Une mobilité en hausse
Entre 2000 et 2010, la mobilité a fortement augmenté partout, et surtout en Asie où la distance totale
parcourue par l’ensemble des voyageurs a presque doublé pour s’approcher des niveaux atteints dans
les pays de l’OCDE – une croissance qui concerne l’ensemble des modes de transport. Cependant, en
2010, la part des véhicules légers ne dominait réellement que dans les pays de l’OCDE.
D’après le Forum international des transports de l’OCDE, si l’infrastructure et le prix de l’énergie le
permettent, la mobilité mondiale des voyageurs devrait continuer à croître d’ici 2050, principalement
en dehors de l’OCDE. Elle serait potentiellement de 3 à 4 fois supérieure en passagers-kilomètres à
celle de 2000 et de 2,5 à 3,5 fois supérieures en tonnes-kilomètres.
En ce qui concerne la répartition modale des services de transport, la part des véhicules privés
(voitures et véhicules légers) devrait fortement augmenter, même si le transport aérien de passagers
est le segment qui se développe le plus vite en chiffres absolus. En revanche, la part du rail et surtout
des autobus devrait diminuer, les usagers leur préférant les transports individuels, notamment sur de
courtes distances. D’ailleurs, pour le fret, l’évolution serait similaire : croissance de la route et déclin
relatif du rail.
Bien entendu, ces scénarios sont construits dans un contexte où il n’y a guère de contraintes, ni
économiques, ni environnementales.

De fortes inégalités de consommation entre les modes de transport


En termes de consommation d’énergie, le poids du transport routier est très important puisqu’il
représente 81 % de la demande d’énergie liée au transport ; dans ce total, le transport routier de
passagers représente 51 % et le transport de marchandises 30 %. Les transports aériens sont aussi de
gros consommateurs d’énergie. Le choix d’un mode de transport a donc une influence considérable
sur la dépense d’énergie correspondante et sur les émissions de CO induites.
2

Sur un même trajet, en Europe, un passager en voiture particulière consomme cinq fois plus
d’énergie qu’en métro ou en TGV. Encore faut-il que les infrastructures et l’urbanisme le permettent,
d’où l’importance de l’aménagement du territoire pour réguler les consommations énergétiques. Pour
les marchandises, le train diesel consomme à la tonne transportée un peu plus que la voie d’eau, mais
deux fois moins que les poids lourds de plus de 25 tonnes, neuf fois moins que les véhicules
utilitaires légers et vingt-neuf fois moins que l’avion.
D’une manière générale, la mobilité est bien sûr liée au niveau de vie des populations et au
développement économique.

Des chemins pour une mobilité maîtrisée


Transporter moins
- Favoriser la mixité des activités et densifier les zones proches des transports en commun.
- Consommer davantage de produits locaux et développer les circuits courts.
- Réduire les déplacements inutiles…
Transporter mieux
- Favoriser la multimodalité à la fois pour les personnes et les marchandises en développant par
exemple des parkings de délestage pour les voitures ou des plateformes multimodales pour les
marchandises.
- Reporter les déplacements sur des modes de transport moins énergétivores pour les personnes
(transports doux ou sans moteur, transports en commun…) et les marchandises (voie d’eau intérieure,
voie maritime, train…).
- Développer les usages collectifs de la voiture : covoiturage et auto-partage.
- Former à l’écoconduite…
La voiture électrique est-elle la voiture du futur ?
Selon un rapport de l’université de Californie (UC Davis), le nombre de véhicules électriques
immatriculés dans le monde durant l’année 2014 a atteint les 500 000 unités, dont 200 000 aux États-
Unis. On en attend plus de 2,7 millions en 2018.
Les ventes de véhicules progressent mais le marché doit affronter trois défis de taille : les prix de
vente, encore largement supérieurs à ceux des véhicules à essence ou diesel, le développement des
bornes de recharge et les réserves de lithium (pour les batteries actuellement utilisées).
Une autre question pose aussi problème : les véhicules électriques sont-ils aussi propres ou
écologiques que l’affirment certains ? Certes, ils ne polluent pas à l’usage, mais tout dépend de la
manière dont est produite l’électricité qu’ils consomment : charbon, gaz, nucléaire ou énergies
renouvelables. Il en est de même pour les véhicules hybrides qui disposent d’un petit moteur
thermique et d’un moteur électrique. Seul le principe du puits à la roue permet de dresser un bilan
environnemental précis, depuis la production jusqu’à l’utilisation finale à la fois des véhicules et des
carburants. Ce bilan contraindra certainement l’avenir de la voiture électrique.
Aménagement du territoire et urbanisme
La répartition des activités et des hommes sur un territoire a un impact sur la consommation
d’énergie car elle conditionne les flux, les distances parcourues et les modes de transport utilisés,
ainsi que les coûts de chauffage éventuels. Mieux consommer l’énergie tout en en consommant
moins implique donc de réfléchir à l’aménagement du territoire et à l’urbanisme pour atteindre
l’objectif d’une ville durable, moins étalée et mieux structurée.
Forme urbaine, utilisation d’énergies et polluants
De nombreuses études ont mis en évidence les liens étroits entre la densité urbaine et la
consommation d’énergie pour les transports – donc, par voie de conséquence, les émissions de gaz à
effet de serre. Le débat se pose alors en termes de ville dense vs ville étalée.
Toutefois, la densité n’est sans doute qu’un aspect de la question car il faut aussi prendre en compte
la dispersion relative des activités : leur éloignement par rapport aux zones d’habitat, comme leur
situation vis-à-vis des réseaux de transports. Les caractéristiques des formes urbaines sont ainsi des
leviers clés pour parvenir à diminuer les consommations énergétiques, que ce soit à l’échelle de
l’ensemble de la région urbaine ou à celle de chacun de ses quartiers. Il faut donc aujourd’hui
structurer les territoires pour leur permettre d’organiser leur transition énergétique, en réduisant au
maximum leur demande en énergie.

Des chemins pour un aménagement durable


- Freiner l’étalement urbain des logements et des activités.
- Favoriser la mixité des fonctions (au niveau des immeubles et des quartiers).
- Accroître la compacité du bâti (reconstruire les villes sur les villes, reconquérir les vides urbains) et
les densités urbaines (limiter les tailles de parcelles, densifier en hauteur).
- Mettre en place des aménagements qui favorisent la circulation des modes doux : marche (espaces
et circuits piétonniers) et cyclisme (pistes cyclables et parkings pour les vélos).
- Organiser les territoires à partir des réseaux et des axes de transport (gares, nœuds multimodaux,
plateformes multimodales…).
- Structurer les régions urbaines selon le modèle polycentrique avec des pôles équipés en services,
bien connectés les uns aux autres et reliés au centre-ville par des réseaux de transports en commun
efficaces.
- Favoriser le développement de villes moyennes, bien équipées, en lien avec leur environnement et
interconnectées.
- Repenser la localisation des activités à toutes les échelles.
- Réguler le trafic automobile (péages, vitesse, circulation, etc.) et le parking…

L’énergie au cœur des nouveaux projets territoriaux


Qu’il s’agisse de villes ou de territoires urbains, la voie de l’avenir est l’aménagement ou
l’urbanisme « energy oriented », comme le dit Ariella Masboungi qui a dirigé un ouvrage intitulé
L’énergie au cœur du projet urbain (Le Moniteur, 2014). À cette fin, il faut agir à la fois sur
l’organisation spatiale et sur les modes de consommation et de production de l’énergie.
En France, cette démarche est au cœur des territoires à énergie positive pour la croissance verte
(TEPCV), une initiative lancée en 2014 par le ministère de l’Écologie, du Développement durable et
de l’Énergie pour encourager les initiatives locales en matière de réduction des besoins d’énergie par
la sobriété et l’efficacité énergétiques, et développement des énergies renouvelables locales. Cette
démarche, qui ambitionne par un appel à projets annuel de promouvoir des actions exemplaires et de
favoriser la transition énergétique et écologique a été inspirée par le réseau des Territoires à énergie
positive (TEPOS), un projet européen rassemblant dix pays qui incitent leurs territoires à tout mettre
en œuvre pour atteindre la transition énergétique à l’horizon 2050. Aux États-Unis, la démarche TOD
(Transit Oriented Development) est assez proche tout au moins dans l’optique de réduire les coûts
énergétiques liés aux déplacements. Elle consiste à créer de nouveaux projets ou à redévelopper un
secteur en s’appuyant sur un usage facilité des transports collectifs. Situés à distance de marche
(400 mètres) d’un point d’accès important au réseau de transport en commun, ces territoires offrent
logements, emplois et commerces.
Modes de consommation
Si les politiques de maîtrise de la demande d’énergie ont assez bien réussi auprès des industriels, il
n’en va pas de même pour les ménages qui ont accru leur consommation. Or il existe en ce domaine
d’importants gisements d’économies possibles. Il faut donc amplifier les instruments de politiques
publiques (fiscaux, réglementaires, de sensibilisation…) et sans doute les compléter. Comme pour
les transports, il s’agit de consommer moins et de consommer mieux.
Quatre grandes catégories de consommation
Les ressources énergétiques répondent aux besoins de trois grands secteurs : les transports, l’industrie
et le groupe résidentiel, services et agriculture ; elles ont aussi des usages non énergétiques. Certains
secteurs comme l’industrie consomment toutes les sources d’énergie de manière assez équilibrée
alors que d’autres comme les transports utilisent quasiment exclusivement le pétrole. Chaque énergie
a des usages captifs plus ou moins importants qui limitent les possibilités de substitution entre les
différentes ressources, du moins à court terme.
Le poids de la consommation des ménages
Dans la plupart des pays développés et en France en particulier (où on a favorisé le chauffage
électrique), l’évolution de la consommation finale énergétique montre une réduction de la part de
l’industrie mais une augmentation nette de celle des transports et surtout du résidentiel et du secteur
tertiaire. Si cette évolution s’explique d’abord par les mutations économiques (désindustrialisation et
tertiarisation de nos sociétés), elle traduit aussi la montée en puissance de la consommation d’énergie
des ménages, à la fois pour leur logement, leurs déplacements et leurs consommations
« domestiques » qui recourent principalement à l’électricité.
Les TIC, très gourmandes en électricité
La consommation d’électricité du secteur du numérique ne cesse pas non plus de croître, et sa part
(7 % en 2012) représente deux fois la consommation totale d’électricité du Japon… Or en 2020, le
trafic Internet mondial pourrait avoir triplé. D’énormes quantités d’énergie sont en effet nécessaires
pour fabriquer et alimenter nos appareils et faire tourner les centres de données. D’où une
mobilisation croissante des leaders du secteur en faveur des énergies renouvelables, mais encore la
nécessité pour les consommateurs de modifier ses comportements : regarder un film en basse
définition, éviter d’envoyer des mails avec des pièces jointes trop lourdes, éviter tout stockage
inutile…
À la recherche de l’énergie grise
De l’énergie se cache dans tout ce que nous achetons ; cette consommation d’énergie invisible pour
les consommateurs est appelée « énergie grise ». Il s’agit de l’énergie dépensée lors de la « vie » du
produit ou du service : extraction, transport et transformation des matières premières ; fabrication du
produit ou préparation du service ; commercialisation (emballage, stockage et distribution) ; usage,
mise en œuvre du produit ou fourniture du service, démantèlement et recyclage du produit.
L’essentiel de cette énergie est comptabilisé sur les lieux de production des matières premières et des
produits, ce qui diminue sensiblement la consommation d’énergie des pays qui les importent. Il est
toutefois difficile de la calculer, non seulement par manque de données de qualité mais encore en
raison du fait que les technologies utilisées et les transports, pour un même type de produit, peuvent
varier d’un cas à l’autre. C’est pourquoi la mesure indique davantage un ordre de grandeur qu’une
valeur précise.
Afin d’économiser l’énergie grise, il faut donc réparer au lieu de jeter, favoriser l’utilisation
commune (par exemple d’une voiture), acheter des produits de sa région, préférer les articles
réutilisables (comme les sacs), éviter les emballages inutiles…
Des chemins pour une consommation durable
Consommer moins
- Isoler son logement et bien le ventiler.
- Réduire la température ambiante à 19-20 °C.
- Produire l’eau chaude lorsqu’on la consomme et ne pas la stocker.
- Laver le linge à des températures moins élevées et limiter l’usage du sèche-linge.
- Acheter des réfrigérateurs et des congélateurs A+ et A++.
- Éteindre les locaux vides et utiliser des ampoules à basse consommation.
- Débrancher les appareils lorsqu’on ne les utilise pas…
Consommer mieux
- Développer les circuits courts (produits agricoles, matériaux de construction).
- Acheter des produits plus économes en énergie.
- Éviter les emballages inutiles.
- Utiliser des produits recyclés et favoriser le recyclage des produits dont on veut se défaire.
- Développer l’économie circulaire (en faisant des déchets d’une entreprise les matières premières de
sa voisine).
- Promouvoir l’économie de la fonctionnalité (remplacer la notion de vente d’un bien par celle de la
vente de l’usage du bien, soit louer à la place d’acheter).
- Favoriser le tourisme de proximité…
Réduire les inégalités
Les contrastes en matière de consommation d’énergie par habitant à l’échelle mondiale ne sont pas
soutenables. Par ailleurs, même dans les pays riches, on observe une précarité énergétique
croissante d’une part non négligeable de la population. Quelles sont les voies possibles pour réduire
ces inégalités ? Des réponses technologiques sont indispensables mais elles ne suffisent pas ; il faut
y ajouter un important volet politique et social.
D’importants contrastes Nord-Sud
Tout au long des pages de cet atlas, des contrastes flagrants ont été mis en évidence entre les
continents et surtout entre les pays. Certes, tous les indicateurs ne montrent pas la même chose. Ainsi
la consommation d’énergie primaire par habitant traduit plus le niveau de développement
économique que celui du niveau de vie de la population. Pour mieux appréhender ce dernier, il est
préférable de se baser sur la consommation d’électricité ou de pétrole par personne et par jour.
Malgré une forte croissance, les pays émergents sont sur ces points toujours loin derrière les pays
développés.
Un accroissement de la vulnérabilité dans les pays riches
Avec l’augmentation des prix de l’énergie, la facture énergétique des ménages de nombreux pays
développés s’est alourdie, amplifiant les disparités entre les plus pauvres et les plus aisés d’une part,
et entre les ménages ruraux et les citadins d’autre part. Ainsi, en France, en 2008, 15 % des ménages
étaient en situation de « vulnérabilité énergétique » pour le chauffage, et 10 % pour les
déplacements. 22 % des ménages étaient ainsi touchés par l’un ou l’autre type de dépenses – soit
5,9 millions de ménages – et 3 % l’étaient pour les deux types de dépenses – soit 700 000 ménages.
Le risque de vulnérabilité varie selon le poste de dépenses concerné : le climat est le premier facteur
de disparité pour la vulnérabilité liée au logement, tout comme l’éloignement des pôles urbains pour
les dépenses liées aux déplacements. Cette situation de vulnérabilité – qui frappe les populations qui
consacrent pour le chauffage et le transport une part de leur revenu équivalant au double de l’effort
médian de la population (8 % pour le logement et 4,5 % pour les déplacements) – s’est sans doute
aggravée ces dernières années. Il est donc urgent de réfléchir à des mesures ciblées sur la précarité
énergétique afin de développer des politiques publiques de maîtrise de l’énergie qui ne font pas
supporter aux plus pauvres tous les efforts.
Pas de mix énergétique idéal et universel
Même si l’adoption de grands objectifs mondiaux est recherchée lors de sommets internationaux, il
n’y a pas de mix qui s’imposerait partout dans le monde. Le mix énergétique est propre à chaque
pays ou groupe de pays, car les potentialités sont spécifiques et les systèmes énergétiques en place
présentent une grande inertie. Par ailleurs, tout changement impose des ruptures technologiques
parfois bien difficiles et des modifications profondes des usages de l’énergie par les consommateurs.
Une transition énergétique nécessaire au Nord comme au Sud
Aujourd’hui, un changement de modèle énergétique s’impose pour faire face aux trois défis bien mis
en évidence par le « Trilemme énergétique ». Si la transition énergétique se met en place dans
différents pays du nord, il est impérieux que cette transition touche aussi les pays du sud, ce qui
implique de relever deux défis. D’abord, renforcer partout l’accès à l’énergie et particulièrement en
Afrique où il conviendrait de doubler, voire de tripler la production d’électricité ; et ensuite,
diversifier le mix énergétique tout en accroissant l’efficacité énergétique. Or beaucoup de ces pays
disposent de nombreuses sources d’énergie durable, de l’hydraulique à l’éolien en passant par le
solaire thermique ou photovoltaïque.
Mais ce potentiel énergétique durable reste largement inexploité par manque de moyens et parfois en
raison de l’insécurité, car il est très difficile d’attirer des capitaux privés internationaux dans certaines
zones aux conditions délicates. Le développement des énergies renouvelables dans les pays du sud
peut être soutenu à différentes échelles. Certaines stratégies sont d’ampleur régionale : l’Initiative
pour les énergies renouvelables en Afrique, lancée en 2015 dans le cadre de la COP 21, vise ainsi à
accroître la production d’électricité renouvelable en Afrique de 10 gigawatts d’ici 2020 et de
300 gigawatts supplémentaires d’ici 2030.
D’autres stratégies ciblent les zones où l’accès à l’énergie est le plus limité. C’est le cas d’ ElectriFI,
l’Instrument de financement de l’électrification de l’UE qui soutient notamment l’électrification en
zone rurale dans les pays africains les plus pauvres. Ajoutons que, dans les zones rurales excentrées,
comme il n’est pas rentable d’apporter du réseau, il s’agit davantage de déployer des dispositifs plus
souples ou plus aisés à mettre en service, comme de petits kits photovoltaïques ou des micro-
barrages.
EN CONCLUSION
Le temps de l’action
TROIS AXES D’ACTION
La transition énergétique implique des actions conjointes visant la sobriété, l’efficacité énergétique
et une mutation du bouquet énergétique. Ce dernier point nécessite des changements de
comportements (consommer moins et consommer mieux), des investissements en R&D ainsi que
des mesures réglementaires et incitatives (législations et fiscalités adéquates) pour modifier les
ressources utilisées (plus d’énergies renouvelables et moins d’énergies fossiles).

QUATRE DOMAINES D’INTERVENTION PRIORITAIRES


Il faut également intervenir de manière préventive pour réduire la demande : mieux aménager les
territoires, repenser les transports et la mobilité et favoriser de nouveaux modes de consommation
moins énergétivores. Ces domaines étant fortement corrélés les uns aux autres, les actions doivent
s’inscrire dans un plan global pour maximiser leurs impacts. Toutefois, il n’y aura pas de transition
réussie sans des mesures fortes visant à réduire drastiquement les inégalités et la vulnérabilité d’une
partie de la population.
CONCLUSION GÉNÉRALE
Des clés pour se forger une opinion et agir !

Analyser l’énergie dans une perspective mondiale est aujourd’hui fondamental tant sont fortes les
interdépendances entre les hommes en termes d’accès aux ressources et aux technologies et en
termes d’environnement. De fait, les impacts de l’énergie – et plus particulièrement le réchauffement
climatique – méconnaissent les frontières politiques, économiques et même naturelles. Mais les
bonnes pratiques et les actions innovantes sont généralement mises en œuvre localement,
régionalement, voire au niveau national, d’où l’intérêt de présenter des études de cas à ces échelles.
Cette articulation globale-locale a constitué un fil rouge pour cet ouvrage dont les nombreuses cartes
montrent les ancrages territoriaux de l’énergie et permettent de s’interroger sur les fortes disparités à
toutes les échelles spatiales. Une question émerge alors : un développement plus égalitaire et plus
propre est-il possible ?
Pour y répondre, il convient de replacer cette problématique dans le cadre du développement durable,
qui se veut à la fois équitable, vivable et viable, combinant ainsi les dimensions économique,
environnementale et sociale auxquelles on associe de plus en plus des règles de bonne gouvernance.
C’est particulièrement évident dans trois champs d’action prioritaires : la mobilité, l’aménagement du
territoire et la consommation.
Toutefois, comprendre les problèmes énergétiques reste un exercice difficile vu la complexité
croissante de ces derniers, combinaisons d’aspects technologiques, politiques, économiques,
sociaux… En outre, l’abondance d’informations parfois contradictoires et la multiplication de prises
de position diverses ne simplifient pas la tâche des citoyens. Départager l’essentiel de l’accessoire,
définir avec précision les notions de base, expliquer comment les choses fonctionnent, présenter des
questions en débat – comme les hydrocarbures non conventionnels, la viabilité des énergies
renouvelables, le charbon propre ou l’avenir du nucléaire par exemple… voilà les objectifs de cet
Atlas des énergies mondiales. À partir des données les plus récentes possibles, il fournit des clés pour
comprendre les problématiques actuelles, se forger une opinion et agir.
Ce tour du monde des problèmes énergétiques met en somme bien en évidence les grands enjeux
auxquels les hommes vont être confrontés mais il présente aussi certaines réponses possibles comme
les économies d’énergie, l’accroissement de l’efficacité énergétique, la diminution drastique des
pollutions et, bien entendu, la réduction des disparités entre les régions de la planète, de même
qu’entre les hommes au sein de ces régions.
Bernadette Mérenne-Schoumaker
Bibliographie et sites Internet
BIBLIOGRAPHIE
Principales statistiques
Agence internationale de l’énergie (AIE/IEA)
- Publications annuelles : Key World Energy Statistics et World Energy
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British Petroleum (BP)
- Publication annuelle : BP Statistical Review of the World Energy.
Energy Information Administration (EIA), É tats-Unis
- Publication annuelle : Annual Energy Outlook.
Ministère de la Transition écologique et solidaire
- É nergies et climat : plusieurs publications annuelles pour la France.
- Chiffres clés de l’énergie et Chiffres clés des énergies renouvelables.
Réseau de transport d’électricité (RTE)
- Statistiques de l’énergie électrique en France

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• British Petroleum (BP) : www.bp.com
• Conférence des Nations unies sur le commerce et le développement
(CNUCED) Commodities and Development :
http://unctad.org/en/Pages/SUC/Commodities-Special-Unit.aspx
• Conseil mondial de l’énergie (WEC) – Conseil français de l’énergie
(CFE) : www.wec-france.org
• É nergie Choix futur, blog de P. Papon : http://pierrepapon.fr
• Energy Information Administration (EIA), É tats-Unis :
www.eia.doe.gov
• IFP É nergies nouvelles (IFPEN) : www.ifp.fr
• Encyclopédie de l’énergie : www.encyclopedie-energie.org
• Manicore, site de J.-M. Jancovici : www.manicore.com
• Ministère de de la Transition écologique et solidaire :
www.developpement-durable.gouv.fr
• Planète-É nergies : www.planete-energies.com/fr
• Réseau de transport d’électricité (RTE) : www.rte-france.com
• Encyclopédie de l’énergie : encyclopedie-energie.org

Les charbons et les hydrocarbures


• Association pour l’étude des pics de production de pétrole et de gaz
naturel (ASPO France) - travaux de J. Laherrère :
http://aspofrance.viabloga.com
• Organisation des pays exportateurs de pétrole (OPEP) :
www.opec.org
• World Coal Association : www.worldcoal.org

L’énergie nucléaire
• Agence internationale de l’énergie atomique (AIEA/IAEA) :
www.iaea.org
• Agence pour l’énergie nucléaire (AEN/NEA) : www.oecd-nea.org
• Commissariat à l’énergie atomique et aux énergies alternatives
(CEA) : www.cea.fr
• Société française d’énergie nucléaire : www.sfen.org
• World Nuclear Association : www.world-nuclear.org

Les énergies renouvelables


• Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie (ADEME) :
www.ademe.fr
• International Geothermal Association : www.geothermal-energy.org
• Observatoire des énergies renouvelables : www.energies-
renouvelables.org
• Organisation des Nations unies pour la nourriture et l’agriculture
(FAO) : www.fao.org
• Renewable Energy Policy Network for the 21st Century (REN21) :
www.ren21.net
• Wind Europe : windeurope.org
• World Wind Energy Association : www.wwindea.org

Énergie et environnement
• Actu Environnement : https://www.actu-environnement.com/energie/
• Association Sauvons le climat : www.sauvonsleclimat.org
• Carbon Dioxine Information Analysis Center (CDIAC) :
http://cdiac.ornl.gov/#
• Global Chance : www.global-chance.org
• Encyclopédie de l’environnement : http://www.encyclopedie-
environnement.org/
• Groupement intergouvernemental d’étude des climats (GIEC) :
www.ipcc.ch

Énergie et territoires
• Ateliers énergie et territoires :
www.edfvilledurable.fr/atelierenergieetterritoires
• Energy Cities : www.energy-cities.eu
Index
A
Accidents 1, 2, 3, 4
Afrique 1, 2
Allemagne 1, 2
Acteurs de l’énergie 1, 2
AIE (Agence internationale de l’énergie, en anglais IEA) 1
Agrocarburants 1, 2
Aménagement
durable 1, 2
du territoire et énergie 1
Approvisionnement 1, 2
Autopartage 1
B
Barrage 1, 2, 3
Bilan énergétique 1
Biomasse 1, 2
Biogaz 1
Bois 1
C
Capteur solaire 1
Carburant 1
Centrale
hydraulique 1
nucléaire 1
thermique 1
Charbon 1, 2, 3
Charbon de bois 1
Chine 1, 2
Circuits courts 1
CO2 1, 2, 3
Cogénération 1
Compagnies pétrolières 1
Conflit énergétique 1, 2
Consommation
durable 1
d’énergie 1, 2, 3, 4, 5, 6, 7, 8, 9, 10, 11, 12, 13, 14
et énergie 1, 2, 86, 87
Confinement 1, 2
Conseil mondial de l’énergie (WEC) 1
Conversion ligno-cellulosique 1
Coû t de l’énergie 1, 2
Covoiturage 1
D
Déchets 1, 2
agricoles 1, 2
radioactifs 1
Déforestation 1
Déjections animales 1, 2
Développement durable 1, 2, 3, 4, 5, 6, 7, 8, 9, 10, 11, 12, 13, 14, 15, 16,
17, 18, 19, 20, 21, 22, 23, 24, 25, 26, 27, 28, 29, 30, 31, 32, 33, 34, 35,
36, 86, 87
Diversification 1, 2, 3
E
É changes d’énergie 1, 2
É cobilan (ACV) 1
É conomies d’énergie 1, 2, 3
É coquartiers 1
Effet de serre 1, 2
Efficacité énergétique 1, 2
É lectricité 1, 2, 3, 4
accès 1
consommation dans monde 1, 2
coû ts 1
de base 1
de pointe 1
et développement 1
flux 1
prix 1
production 1-unu5
É nergie 1, 2
acteurs 1, 2
aménagement du territoire
et urbanisme 1, 2
avenir 1, 2
calorifique 1
chimique 1
cinétique 1
coû ts 1, 2
dans le monde 1, 2
de stock 1
de flux 1
de la mer 1, 2, 3
domestique 1
efficacité 1, 2
électrique 1, 2
éolienne 1, 2
éolienne offshore 1, 2, 3
et développement 1, 2, 3, 4
et modes de consommation 86, 87
et réduction des inégalités 1, 2
finale 1
fossile 1, 2, 3, 4, 5, 6, 7, 8
géothermique 1
grise 1
houlomotrice 1, 2
hydraulique 1, 2
hydrolienne 1, 2
lumineuse 1
marémotrice 1, 2, 3
mécanique 1
nucléaire 1, 2, 3, 4, 5
osmotique 1
politique de l’Union européenne 1
primaire 1, 2
renouvelable 1, 2, 3, 4
secondaire 1, 2
solaire 1, 2
thermique 1
thermique des mers 1
transports et mobilités 1, 2
utile 1
Energiewende 1
Environnement 1, 2, 3
É oliennes 1, 2, 3, 4, 5, 6, 7, 8
EPR 1
É tats-Unis 1
É thanol 1
F
Facteur de charge 1, 2, 3, 4, 5
Ferme éolienne 1, 2
Fermentation alcoolique 1
Fission 1
Formes d’énergie 1, 2
Fukushima 1, 2
Fusion nucléaire 1
G
Gaz 1, 2
à effet de serre (GES) 1, 2
consommation 1
de pétrole 1
de schiste 1
de ville 1
flux 1
naturel 1
naturel liquéfié (GNL) 1
non conventionnel 1
prix 1
réseau 1, 2
Gazoduc 1, 2, 3, 4, 5
Géopolitique 1
Géothermie 1
Gestion des déchets 1, 2
GIEC (Groupement intergouvernemental d’étude des climats) 1, 2
Grisou 1
H
Houille 1 (voir aussi Charbon)
Huiles extralourdes 1
Hydraulique 1, 2
grande 1
petite 1
Hydrocarbures (voir Pétrole)
Hydrocarbures
non conventionnels 1, 2
Hydroélectricité 1
Hydrogène 1, 2, 3, 4, 5, 6
Hydrolienne 1, 2
I-L
IDH (Indice de développement humain) 1, 2
Inde 1, 2
Indépendance énergétique 1, 2
Inégalités 1, 2
Interdépendance 1
Intermittence 1, 2, 3, 4, 5, 6
ITER 1
Lithium 1
M
Marées noires 1, 2
Maturité des énergies marines 1
Métaux fissiles et fertiles 1, 2
Méthanier 1
Méthanisation 1
Mix énergétique 1, 2, 3
Mobilité durable 1, 2
Modèle TOD (Transit Oriented development) 1
Modes de consommation et énergie 1, 2
Moyen-Orient 1
Multimodalité 1, 2
N
Nuisances 1, 2
Non-prolifération 1
Nouvelles technologies 1
Nucléaire 1, 2, 3
consommation 1
risques 1, 2, 3
O
Oléoduc 1
Opep (Organisation des pays producteurs de pétrole) 1
Opaep (Organisation des pays arabes exportateurs de pétrole) 1
P
Peak oil 1
Pellets 1, 2
Pétrole 1, 2-unu3, 4, 5, 87
consommation 1
flux 1
multinationales 1
risques 1
Pétrolier 1
Photovoltaïque 1, 2
Plateformes multimodales 1
Pile à combustible 1
Plutonium 1
Pollutions 1, 2
réduction 1
Pompe à chaleur 1, 2
Précarité énergétique 1, 2
Prévention des risques 1, 2
Production
agrocarburants 1, 2, 3, 4
charbon 1, 2, 3, 4, 5
électricité 1-unu5, 2
énergie nucléaire 1, 2, 3
énergies renouvelables 1, 2, 3, 4, 5, 6
gaz naturel 1, 2
géothermie 1, 2, 3, 4
hydroélectricité 1, 2, 3, 4
pétrole 1, 2, 3, 4
Produits pétroliers 1
R
Raffinage du pétrole 1
Réacteur nucléaire 1
Réchauffement climatique 1, 2
Réduction des inégalités et énergie 1, 2
Réseaux d’énergie 1, 2
Réserves 1-unu2
charbon 1
gaz 1, 2
pétrole 1, 2, 3
sables asphaltiques 1
uranium 1, 2
Ressources
éoliennes 1, 2, 3, 4
fissiles 1
fossiles 1, 2, 3
géothermiques 1, 2, 3
hydroélectriques 1, 2
solaires 1, 2
d’hydrocarbures non conventionnels 1
Risques 1, 2, 3
Russie 1
S
Sables asphaltiques 1, 2
Schistes bitumineux 1, 2
Séquestration du CO2 1
Silicose 1, 2
Smart grids 1
Sobriété énergétique 1, 2, 3, 4
Solaire
photovoltaïque 1, 2
thermique 1
thermodynamique 1
Sources d’énergie 1-unu1
Stockage géologique 1, 2, 3
Sû reté nucléaire 1
Surgénérateur 1
Supermajors pétrolières 1
T
Tchernobyl 1, 2
Thorium 1
Tokamak 1, 2
TNP (Traité de non-prolifération) 1
Transition énergétique 1, 2
Transports
et énergie 1, 2
multimodaux 1, 2
Turbine
à cycle combiné 1, 2
à gaz 1, 2
U
Union européenne 1
Uranium 1, 2
réserves 1, 2
Urbanisme et énergie 1, 2
Unités d’énergie 1, 2, 3
V-X
Vecteurs d’énergie 1, 2, 3, 4
Viabilité des énergies renouvelables 1, 2
Voiture électrique 1
Vulnérabilité énergétique 1, 2

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