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sur
La notion d’enfant à
charge est-elle fluctuante ?
Catherine Bac, Sylvie Chaslot-Robinet, Cnav
© La Documentation française | Téléchargé le 20/09/2021 sur www.cairn.info (IP: 41.159.143.1)
La notion d’enfant à charge est définie par des dispositions juridiques variées. L’une des
plus anciennes repose sur le Code civil, premier domaine réglementaire à matérialiser
les relations parents/enfants. Progressivement, cette notion a été précisée dans le cadre
des politiques sociales et fiscales. En matière de fiscalité, la situation d’un contribuable
est définie par son niveau de revenu mais aussi selon la composition du foyer fiscal,
notamment la présence d’enfants à charge. Dans le domaine de la protection sociale, la
notion d’enfant à charge est également présente, mais avec des définitions variées selon
les domaines. Au sein de la politique familiale, la notion d’enfant à charge, évaluée au
moment où l’enfant est à la charge de ses parents, peut avoir des variantes selon les dis-
positifs. En matière de retraite, la plupart du temps, la notion d’enfant à charge est exa-
minée a posteriori avec là aussi, des définitions diverses.
Initialement, cette notion reposait sur la filiation dans le cadre des obligations issues du
mariage. La loi de 1803 prévoit que « les époux contractent ensemble par le seul fait du
mariage, l’obligation de nourrir, entretenir et élever leurs enfants »1. Puis la loi de 1970,
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Les charges de famille d’un contribuable sont prises en compte pour déterminer sa situa-
tion fiscale, notamment l’impôt sur le revenu : les enfants considérés à charge ouvrent
droit à des parts fiscales retenues pour son calcul, via la détermination du quotient familial.
Au sens de la réglementation fiscale, l’enfant mineur, vivant au sein du foyer, est consi-
déré à la charge du contribuable, qu’il soit légitime, adoptif, naturel (filiation légalement
établie) ou recueilli, si le contribuable en assume la charge effective d’entretien et d’édu-
cation. Il en est de même pour un enfant handicapé dans l’incapacité de subvenir à ses
besoins, quel que soit son âge. Les enfants majeurs sont, en principe, imposables person-
nellement, mais s’ils restent à charge des parents, ils peuvent sous certaines conditions
être rattachés au foyer fiscal de leurs parents ou permettre une déduction de pension
alimentaire (optimisation fiscale). Peuvent être rattachés au foyer fiscal les enfants âgés
de moins de 21 ans (de 18 ans à 21 ans) et ceux de moins de 25 ans s’ils poursuivent
leurs études. Si l’enfant mineur ou l’enfant rattaché de moins de 25 ans dispose de reve-
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Dans le cadre de la politique familiale, la notion d’enfant à charge est essentielle puisqu’elle
représente l’un des éléments permettant le bénéfice de prestations. L’appréciation de la
notion d’enfant à charge se fait au moment où l’enfant est présent et durant la période
où les parents en ont la charge effective.
Pour qu’un enfant soit considéré à charge pour les prestations familiales, il doit être âgé de
moins de 21 ans. Les parents doivent assurer la charge effective et permanente de ses frais
d’entretien (logement, nourriture, habillement, éducation) et la responsabilité éducative
et affective de l’enfant (devoir de garde, surveillance, éducation dans le but de protéger
l’enfant et d’assurer sa sécurité, sa santé et sa moralité). Il n’est pas exigé l’existence d’un
lien juridique de parenté ou d’alliance entre la personne qui assume la charge d’un enfant
et celui-ci. Il peut s’agir d’enfant légitime, naturel, reconnu ou non, des frères ou des sœurs,
des neveux ou des nièces, des pupilles, des enfants adoptés ou recueillis ou parrainés, etc.
Pour les enfants âgés de 16 ans à 20 ans, il existe en outre une condition de rémunération
mensuelle du jeune qui ne doit pas excéder 55 % du salaire minimum interprofession-
nel de croissance (Smic) basé sur 169 heures. Les enfants âgés de 20 ans à 21 ans vérifiant
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les conditions précédentes sont comptés comme enfants à charge pour le complément
familial et ouvrent droit à une allocation forfaitaire d’allocations familiales s’ils sont aînés
d’une famille de trois enfants ou plus.
En matière d’aides au logement, les enfants âgés de moins de 21 ans (dont la rémunération
est inférieure à 55 % du SMIC) sont considérés comme étant à charge au sens des pres-
tations logement, même s’ils ne résident pas en permanence au foyer de leurs parents4.
Dans la mesure où les aides au logement sont « familialisées », la présence d’enfant à
charge fait varier le montant et le plafond des aides. En outre, les pensions alimentaires
versées aux enfants majeurs sont déduites de la base ressources servant au calcul de l’aide.
En ce qui concerne l’assurance vieillesse des parents au foyer (AVPF), dispositif géré par
les caisses d’allocation familiales (CAF), on retrouve la même notion d’enfant à charge
que celle des prestations familiales. Cette condition est évaluée au moment où l’enfant
est présent au foyer, sans décalage dans le temps.
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La plupart des minima sociaux sont « familialisés », c’est-à-dire qu’ils tiennent compte
de la présence d’enfants au sein du foyer. Le montant et le plafond du RSA socle (simple
ou majoré) varient en fonction de la présence et du nombre d’enfants âgés de moins de
25 ans et percevant un revenu d’activité faible5. En contrepartie, les prestations fami-
liales sont incluses dans leur assiette de ressources. Le RSA socle majoré est versé aux
parents isolés élevant seul un enfant âgé de moins de 3 ans ou un enfant âgé de 3 ans
à 25 ans durant l’année suivant son accueil (dans le cas d’une adoption ou d’un retour
au foyer) ou la séparation des parents. En ce qui concerne l’allocation pour adulte han-
dicapé (AAH), seul le plafond varie en fonction de la présence d’enfants à charge, les
prestations familiales n’étant pas incluses dans la base ressources.
La prise en compte par le système de retraite des charges familiales intervient dans plu-
sieurs dispositifs : la majoration de durée d’assurance pour enfant (MDA), la majoration
de pension de 10 %, la majoration forfaitaire pour charge d’enfant des droits de réver-
sion et l’AVPF. À l’exception de la partie de MDA au titre de la maternité, ces dispositifs
4 À l’exception de ceux qui sont eux-mêmes bénéficiaires d’une prestation logement.
5 La logique est celle de l’optimisation pour les familles. Un enfant qui a des revenus d’activité augmente
à la fois le montant de revenu garanti et le montant des ressources du foyer : il sera compté à charge s’il
permet au total d’augmenter le montant de RSA perçu par la famille.
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sont ouverts aux hommes comme aux femmes. Les modalités d’ouverture de ces droits
familiaux sont cependant différentes selon les dispositifs. Par ailleurs, les dispositifs pre-
nant en compte la charge d’enfant peuvent varier selon les régimes de retraite. Nous
nous limiterons ici au seul régime général (Cnav).
Au régime général, la notion de charge d’enfant a été définie dès 1948, dans le cadre de
la majoration de pension de 10 % du montant de pension. Celle-ci s’ajoute à l’avantage
de base pour les assurés, hommes et femmes, ayant eu au moins trois enfants6. Il suffit
donc d’avoir été le parent biologique des enfants pour ouvrir droit à la majoration de
10 %, le droit étant lié à la seule naissance de l’enfant7.
Les enfants recueillis peuvent également ouvrir droit à la majoration s’ils ont été à la
charge de l’assuré ou de son conjoint pendant au moins 9 ans avant l’âge de 16 ans. Dans
ce cadre, la notion de « charge d’enfant » comprend l’éducation, les soins matériels et le
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De même, jusqu’en 2004, la MDA était attribuée aux femmes ayant élevé un ou plusieurs
enfants. Elle s’appuyait sur la même définition de charge d’enfant.
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À l’instar de la précédente13, la loi ne définit pas la notion d’éducation, mais elle fixe trois
conditions pour l’ouverture du droit à majoration « éducation » pour les parents : jus-
tifier d’une durée d’assurance minimale dans un régime de retraite obligatoire, ne pas
avoir été privé de l’exercice de l’autorité parentale et avoir eu une résidence commune
avec l’enfant au cours des quatre premières années de l’enfant.
12 Ce sont les parents qui font le choix d’un commun accord entre eux. En cas de désaccord, la majora-
tion est attribuée à celui des parents qui établit avoir assumé à titre principal l’éducation de l’enfant pen-
dant la période la plus longue. À défaut, la majoration est partagée par moitié entre les deux parents. Le
défaut d’option dans le délai mentionné ci-dessus est réputé, en l’absence de désaccord exprimé, valoir
décision conjointe implicite de désignation de la mère.
13 L’ensemble des décrets d’application n’est pas publié.
14 Articles L353-5 et R353-9 CSS.
15 Articles L313-3 et R313-12 CSS.
16 Si l’enfant est en stage de formation professionnelle ou en apprentissage, cet âge est fixé à 20 ans
pour le bénéfice de l’allocation veuvage et la majoration charge d’enfant de la pension de réversion, et
18 ans dans les autres cas (circ. cnav44/94).
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