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Nuit blanche

Albert Jacquard… et l’angoisse de l’avenir


Bruno Deshaies

Numéro 56, juin–juillet–août 1994

URI : https://id.erudit.org/iderudit/19606ac

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Éditeur(s)
Nuit blanche, le magazine du livre

ISSN
0823-2490 (imprimé)
1923-3191 (numérique)

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Citer ce document
Deshaies, B. (1994). Albert Jacquard… et l’angoisse de l’avenir. Nuit blanche,
(56), 51–56.

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Albert Jacquard

Albert Jacquard...
et l'angoisse de l'avenir
Albert Jacquard consentait l'automne dernier à accorder une entrevue, à Québec,
à notre collaborateur. Bruno Deshaies s'est attaché à le débusquer comme cher-
cheur, comme homme, comme penseur. Il ne s'agissait pas pour lui de mettre en
boîte un homme dont les interrogations, et les conclusions, suscitent la contro-
verse, mais de soulever ce qui apparaît comme des contradictions ou à tout le
moins des paradoxes dans le contenu de ses réflexions.

Nuit blanche : Une première question. tel que lorsqu'il aura quatre-vingt- siques, mais il faut que nous ayons
Après avoir, en 1982, dans Au péril de dix ans, il a quatre chances sur cent tous un noyau commun qui nous
la science?, posé des balises sur les d'avoir la maladie d'Alzheimer. permettrait, au moins, de nous com-
rapports entre la science et la société, Alors, vous gardez quand même?, prendre quand nous ne serons pas
comment voyez-vous maintenant le tout le monde dira oui, évidem- d'accord. Et ce noyau commun ne
problème moral de l'utilisation des ment. Or, cela pose un problème de peut pas être une religion parce
sciences dans nos sociétés ? frontière. Entre ces cas à propos qu'il y a trop de religions diffé-
desquels tout le monde est d'ac- rentes. Pourquoi plutôt écouter
Albert Jacquard : Je dirais essentiel- cord : qu'il vaut mieux mettre un Moïse que Mahomet?
lement que les pouvoirs de la terme à une vie qui va être insup-
science se sont encore accrus. Il y a portable et courte ; ou qu'il faut être Ce noyau commun, je le vois
des choses qu'on n'imaginait pas il y sérieux et que d'ici quatre-vingt-dix dans une définition lucide de
a dix ans, des pouvoirs nouveaux ap- ans, on a le temps de voir, entre ces l'homme qui intègre tout ce que
portés par la science, qui posent des évidences, il y a tous les autres cas. nous dit la science. Autrement dit,
problèmes moraux inédits : en bio- Où sera la frontière entre la vraie utilité de la science ce n'est
éthique par exemple, tout ce qui ces deux attitudes? Rien ne nous pas de nous donner des pouvoirs
concerne la médecine prédictive. Il guide pour la fixer; on peut tou- techniques, c'est de nous donner
y a dix ans, la médecine prédictive jours, évidemment, demander au une meilleure lucidité sur le monde
on en parlait à peine. Aujourd'hui, pape ou aux ayatollahs ou..., mais et, dans le monde, sur nous-mêmes.
on est capable de dire à une future ce n'est pas très sérieux. Pour moi, Je propose donc, dans mes
maman : votre embryon aura la ma- actuellement, ce qui me semble es- derniers livres, en particulier dans
ladie de Tay-Sachs; et tout le mon- sentiel, c'est une réflexion collective La légende de la vie, une définition
de est d'accord qu'on arrête le pro- sur les pouvoirs nouveaux que nous de l'homme à laquelle tout le mon-
cessus plutôt que de laisser naître avons. Pour que cette réflexion soit de pourrait se rallier après quoi on
un enfant qui va mourir aussitôt vraiment collective, il n'est pas né- aurait toutes les divergences pos-
dans des souffrances atroces. Si, par cessaire que nous ayons tous les sibles dans les choix politiques, so-
contre, on lui dit : votre embryon est mêmes arrière-pensées métaphy- ciologiques, religieux, etc. i

NUIT BLANCHE 51
La tentation parce que je me dis que ce n'est pas Il y a des mots qui viennent
foutu d'avance. après d'autres, il y a des événements
liée à l'omnipotence qui viennent après d'autres. Déjà, ce
N.B. : Vous admettez donc que vous constat d'une succession, il a une li-
N.B. : Voilà pour la question morale... êtes alarmiste. mite, c'est le fameux temps de
Passons à une autre affirmation. Vous AJ. : Il faut l'être... Planck: 10"44 secondes, les événe-
avez dit, c'était ici au musée de la Ci- ments ne sont pas simultanés, mais
vilisation, que le XXe siècle, malgré ses N.B. : Par ailleurs, vous reconnaissez il n'y en a pas un avant et d'autres
catastrophes épouvantables, est un la capacité humaine de rebondir, et, en après. C'est ce qu'on appelle le
siècle merveilleux. Ce constat exprime- ce sens-là, il y a de l'espoir. chronon, une durée tellement petite
t-il le côté optimiste de votre pensée et AJ. : Il y a de l'espoir, mais à condi- qu'à l'intérieur on ne peut plus me-
de votre personnalité ? tion d'aller vite. surer le temps. Ainsi, plus de simul-
tanéité ou d'antériorité. Nous avons
AJ. : Je crois qu'il faut être ni opti- N.B. : De pratiquer la vigilance ? donc un concept de temps très va-
miste ni pessimiste. L'optimiste,
AJ. : Et puis alors : l'urgence. Écou- seux. La seule chose qui compte,
c'est celui qui dit: «Bof! c'est pas
tez. Il faudra transformer les états c'est la succession... l'ordre de suc-
grave, la nature de toute façon ar-
d'esprit, c'est ce qu'il y a de plus cession. Et maintenant la mesure
rangera tout ça; ça s'arrangera tout
long. C'est pourquoi on a besoin des des distances à l'intérieur de ces
seul. » Le pessimiste prétendra que,
médias. On a besoin d'un système événements est forcément très arbi-
de toute façon, c'est foutu, ce n'est
éducatif très efficace et des médias. traire.
pas la peine d'intervenir.
Il faut se situer entre les Un système éducatif qui joue son Venons-en aux sciences hu-
deux, être volontariste et pour cela vrai rôle, qui est de construire des maines, au temps psychologique : il
être lucide. Je reviens au mot lucidi- hommes et non pas de les préparer est bien clair que cette espèce d'ac-
té qui est essentiel. Pourquoi est-ce à entrer dans la société... dans le célération du temps que perçoivent
que notre siècle est merveilleux? conformisme. les gens en vieillissant, elle corres-
C'est qu'il nous a donné une lucidité pond tout simplement au loga-
tellement plus grande que les siècles Un temps rithme. Entre l'âge de dix ans et
passés. Tous les mots par lesquels l'âge de onze ans, j'ai rajouté dix
sans domicile fixe pour cent à ma vie. Entre soixante
on décrit le monde ont changé de
sens au cours d'un siècle : le mot N.B. : Je me permets d'aborder avec et soixante-six, j'ai rajouté dix pour
électron, le mot vie, le mot matière, vous maintenant une question difficile cent à ma vie. Et, par conséquent,
le mot temps, le mot entropie, etc. à tous égards, la question du temps, ce j'ai ressenti les six années entre
Autrement dit, la réflexion scienti- concept cher aux historiens et aux soixante et soixante-six comme aussi
fique a été formidable au cours du chercheurs en sciences humaines. A courtes que l'année entre 10 et 11.
XX e siècle, et je suis persuadé que vos yeux existe-t-il plusieurs types de Ainsi pourrait-on mesurer l'âge par
dans cinq ou six siècles on dira : ils temps ? logiquement ou dans les faits, le logarithme [...]
ont de la chance les gens du XX e ne peut-il exister qu'une pluralité de Leçon du phénomène dont
siècle, ils ont vécu la Renaissance temps ? Bref, est-ce qu 'on peut concep- nous parlons, la durée devrait être
puisqu'ils ont vécu un siècle où on tualiser le temps ? évoquée différemment. Ainsi ai-je
n'a pas remis en cause les idées re- AJ. : Si je reste en physique, selon été amené à contester le concept de
çues. Il ne s'agissait plus de la terre les phénomènes il vaut mieux invo- vieillissement d'une population. On
autour du soleil, il s'agissait de la vie quer le logarithme du temps que le pose que les populations qui étaient
et du destin humain. temps lui-même. Pourquoi pas? en pyramide étaient plus jeunes que
Par conséquent, en tant que Dire il ne s'agit pas de mesurer le les populations qui sont verticales.
scientifique, je découvre combien temps par le nombre de tours de la Si je prends l'exemple de la pyra-
notre siècle a été libérant. Ainsi le terre autour du soleil, mais par le mide parfaite : l'âge moyen était
mot liberté n'est plus incompatible rapport entre le nombre de tours alors de trente-trois ans; celui de
avec le déterminisme, c'est formi- déjà faits et le nombre de tours l'obélisque, l'âge moyen est de cin-
dable! Au moins le théorème de qu'elle fait. Pour certains phéno- quante ans. On en déduit que le
Gôdel, le théorème sur les trois mènes physiques, c'est plus clair deuxième est plus vieux que le pre-
corps de Poincaré, montre que avec le logarithme dont l'avantage mier! Mais ce qui compte dans une
même le déterminisme absolu abou- est que ça met le temps zéro à moins population, ce n'est pas l'âge des
tit à l'indétermination, à l'imprévisi- l'infini. Par conséquent, vous ne gens, c'est la capacité qu'ils ont à
bilité, alors, c'est merveilleux! vous posez plus la question de faire des projets. Cette capacité est
La science me permet donc « Qu'est-ce qu'il y avait avant? » Si fonction de leur espérance de vie.
de penser que je suis maître du vous prenez le logarithme du temps Or l'espérance de vie est plus
monde, là où je suis, pour être en depuis le Big Bang, le Big Bang est grande, en moyenne, dans les popu-
partie maître de moi. Alors du coup, par définition zéro, le temps de l'é- lations que l'on dit « vieillies » ... elle
puisque je suis maître de moi, poque c'était moins l'infini, par con- est de cinquante ans ici, elle est de
qu'est-ce que je fais? Et je constate, séquent c'est très loin, c'est pas à 15 trente et quelques années là.
et la question hélas! est actuelle- milliards d'années, c'est à moins Si, en moyenne, les gens ont
ment à peine posée, qu'on fait n'im- l'infini. Donc, on peut très bien s'a- une espérance de vie plus longue,
porte quoi. De là une inquiétude, percevoir qu'en fait, ce que nous qu'ils font plus de projets, qu'ils sont
quand je constate qu'on fait les avons dans la tête, c'est le constat plus imaginatifs, donc la population
pires choses, doublée d'un espoir, d'une succession. est moins vieille au sens où elle est

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plus prête à tirer profit de la vie. Le fant : « Pourquoi est-ce que je suis N.B. : Je note. Cette angoisse, à propos
concept de vieillissement pour une né puisque je dois mourir? », je ré- de l'avenir de l'humanité, vous tenaille
population ne peut donc être pris au ponds : « L'important c'est ce que tu de plus en plus. Comment la transfor-
sérieux. vas faire dans l'intervalle. Tu vas ap- mation s'est-elle faite de l'ingénieur
La science prendre, toi, un beau jour à dire, dressé par tout le système d'éducation
moi, je, mais pas trop. » français à l'individu que vous êtes
en gants de velours maintenant? En d'autres mots, pou-
N.B. : Laissons la science pour parler vez-vous esquisser pour nous votre
de vulgarisation. Dans vos propos sur cheminement personnel?
« [...] u n m o t m a l d é f i n i o u m a l c o m p r i s
la science, vous adoptez fréquemment e s t p l u s d a n g e r e u x q u ' u n s c a l p e l ébré-
le ton d'un conteur: «Imaginez AJ. : J'ai essayé de le raconter dans
ché. »
que... », etc. La légende de la vie pro- un livre qui s'intitule : Idées vécues.
cède de cette manière. N'y aurait-il pas Au péril de la science, p. 195. Cette autobiographie je ne l'ai pas
un certain danger de distorsion du faite tout seul. L'éditeur me deman-
« Cette activité intellectuelle, classer, dait de raconter mon cheminement,
message scientifique à vouloir faire e s t si o r d i n a i r e , si n é c e s s a i r e a u d é r o u -
saisir ou comprendre la réalité par exactement comme vous. Je n'avais
l e m e n t d e n o t r e p e n s é e , q u e n o u s la
l'imagination ? Ny a-t-il pas parfois développons sans y prendre garde, et pas le temps et j'ai eu peur et je me
des raccourcis dangereux? r i s q u o n s d e n o u s b e r c e r d ' i l l u s i o n s sur suis dit : si c'est moi qui le raconte ça
la s i g n i f i c a t i o n d u r é s u l t a t o b t e n u . » va être beau comme l'antique, mais
A J . : Oui. Oh! j'en suis parfaite- ce ne sera pas vrai. Ce sera l'histoire
Moi et les autres, p. 50.
ment conscient, je fais ce que je de saint Albert Jacquard... et ce sera
peux, mais voilà à quoi je suis con- « La p u i s s a n c e e t l ' a g i l i t é d e n o t r e es- horrible. Et tout le monde saura
fronté. J'ai écrit, pour commencer, p r i t ne p e u v e n t ê t r e m a i n t e n u e s e t dé- bien que c'est... Je l'ai donc fait faire
des livres difficiles avec beaucoup veloppées sans effort. » par une jeune femme qui est journa-
de mathématiques. Ils étaient diffi- Moi et les autres, p. 122. liste, Hélène Amblard, et qui m'a
ciles à lire, donc faciles à écrire. Au- enquiquiné pendant des jours et des
jourd'hui, je fais des livres que je « Avec q u e l i n s t r u m e n t m e s u r e - t o n la jours en me faisant raconter ma vie,
voudrais faciles à lire donc qui sont v a l e u r ? La s e u l e r é p o n s e e s t « a v e c me disant tout le temps : ce n'est pas
difficiles à écrire.Difficiles à écrire s o n p o r t e f e u i l l e ». vrai, c'est trop beau..., tu as certai-
dans la mesure où je veux rester sé- Voici le temps du monde fini, p. 141. nement oublié quelque chose...
rieux et que je ne veux pas vendre Bon, elle avait raison. Alors, à force
n'importe quelle marchandise, en « Pour l ' h o m m e , l ' i m p o r t a n t n'est p a s de me torturer comme elle l'a fait,
particulier aux enfants. Celui que c e q u e la n a t u r e l u i a d o n n é , m a i s c e elle a écrit ce livre, puis je l'ai réé-
j'ai écrit pour eux, vous ne l'avez qu'il se donne à lui-même; c e n'est pas crit, puis elle l'a re-réécrit et Idées
peut-être pas, E = CM2 ? d e g é r e r s o n avoir m a i s d e c h o i s i r s o n
être.»
vécues répond à la question. Finale-
ment, une des façons de le dire, c'est
N.B. : Non, je ne l'ai pas. La légende de la vie, p. 237. que le petit catholique que j'ai été,
AJ. : Le voici, il vient tout juste de qui a été fait par ma famille, essaie
« Au c œ u r d e l'erreur q u ' e s t la g u e r r e , de devenir un chrétien. Voilà!
sortir. Il commence par une plaisan-
o n t r o u v e l'idée q u e l'on p e u t r é s o u d r e
terie que les Québécois ne peuvent u n p r o b l è m e par la v i o l e n c e . » Pour moi, les valeurs qui
pas comprendre. CM2, en France, sont dans l'Évangile sont formi-
tout le monde sait ce que c'est, c'est E = CM2, p. 76.
dables, les événements qui sont ra-
le cours moyen de l'école primaire, contés ne m'intéressent absolument
c'est-à-dire la fin de l'école pri- L'avenir pas. Même la Résurrection... Bof!
maire. Dire : mon enfant est en Par contre, le message d'amour en-
CM 2 , tout le monde sait ce que ça
comme hypothèse
tre les hommes, là je ne m'en fous
veut dire. Alors, évidemment, c'est N.B. : Des Concepts en génétique des pas.
une petite plaisanterie à propos populations à Moi, je viens d'où ? ou Et puis il se trouve que le
d'Einstein, du fameux me2. J'évoque à E = CM2, il y a un très long chemin scientifique est là pour être lucide et
ainsi, symboliquement, l'énergie hu- de parcouru. Aujourd'hui, vous ne la lucidité est angoissante, vous l'a-
maine, et l'énergie nécessaire pour semble:, plus être ni un ingénieur ni vez bien dit. Par conséquent, il est
devenir un homme, elle est présente même un mathématicien, mais un être normal de tirer les conclusions de
chez les enfants de douze ans. humain qui s'interroge sur son avenir, cette angoisse en disant aux gens :
l'avenir de ses enfants, de ses petits- « Réveillez-vous ! » et aux petits en-
N.B. : Est-ce que cet ouvrage serait la enfants, bref sur l'avenir de l'humani- fants : « Faites gaffe, ne jouez pas à
vulgarisation de L'héritage de la liber- té. Cette angoisse, si je ne me trompe, n'importe quel jeu. »
té? est pascalienne en quelque sorte.
AJ. : C'est ça. Dire à un enfant : tu AJ. : Oui. La liberté avec les
vas être libre... c'est pas rien la liber- autres, pas contre eux
té. Alors accepte ça. N.B. : A l'instar d'Edgar Morin...
N.B. : J'aimerais passer à une autre
N.B. : J'imagine qu 'à travers cet AJ. : Je suis chrétien, moi.
question, aborder la notion de compé-
ouvrage-là, la notion d'humanitude tition. Des sociétés qui, comme la so-
doit transparaître ? N.B. : Vous êtes chrétien.
ciété soviétique, ont ignoré les mobiles
A J . : Je n'ai pas prononcé le mot, AJ. : Ce qui ne veut pas dire que je de compétition dans leur organisation
mais il y est. À la question d'un en- suis d'accord avec les catholiques. socio-politico-économique se retrou- •

NUIT BLANCHE 53
vent aujourd'hui au bord de la catas- A J . : Ça peut pas plaire ici... mais vait jamais pensé ça; il avait espéré
trophe, sinon dans le gouffre politique. enfin ! le voir mis en œuvre en Allemagne.
Par ailleurs, les sociétés occidentales, L'Allemagne était le pays d'Europe
fondées sur la compétition, semblent N.B. : Vous vous êtes référé quand le plus évolué, le mieux éduqué et
avoir mieux réussi sur le plan écono- même à Marx. On sait que Marx et le l'Allemagne aurait pu basculer dans
mique. D'après vous, peut-on suppri- marxisme ont été galvaudés. Finale- le marxisme. Ils (les Allemands) se
mer du cœur des hommes des mobiles ment avec les événements qu'on vient seraient mis à produire; bien orga-
comme le désir, la soif, la volonté de de voir — ah! Marx, c'est terrible —, nisés, ils auraient eu un marxisme
s'imposer, de prendre sa place? on est en train de le cacher dans les complètement différent du mar-
placards. Mais vous semblez dire : « Si xisme soviétique qui était la conti-
AJ. : Je ne partage pas votre analyse l'on avait mieux compris, dans ses nuation du tsarisme. Par consé-
que la société soviétique, dont le ra- fondements, la pensée de Marx... ». En quent, on dirait maintenant, si
tage est évident, s'est effondrée par- peu de mots, qu 'est-ce que vous diriez c'étaient des Allemands qui étaient
ce qu'elle a supprimé ce moteur de Marx, du marxisme ? devenus marxistes, on dirait le
qu'est la compétition. Moi, je crois AJ. : Moi, je dirais : c'est un système marxisme cause toutes sortes d'em-
qu'elle a raté son coup en grande qui met en priorité le respect pour bêtements, mais au moins ça fonc-
partie parce que c'était une société chaque homme. C'est très rigoureu- tionne. Tandis que maintenant, on
tsariste, une société d'esclavage et sement juif et chrétien d'ailleurs, et, dit : « Ça peut avoir des avantages,
qui l'est demeurée. On a vaguement malgré toutes sortes d'erreurs pos- mais ça marche pas ! » Or la preuve
prétendu faire du marxisme, et ce sibles, ça transpose dans le méca- n'a pas été donnée. Elle est à faire.
n'était pas du marxisme, ce n'était nisme social et économique le res-
pas du communisme, ni du socia- pect pour chaque homme. Mais à N.B. : Comment situeriez-vous Adam
lisme, c'était au fond une nouvelle partir du moment où l'on admet que Smith et Marx l'un par rapport à l'au-
façon de nommer les tsars. Alors, en chaque homme est respectable, on tre?
bon scientifique, je me dis : « L'ex- élimine forcément la compétition, AJ. : La liberté [d'après Adam
périence du communisme n'a pas car pour que je gagne, il faut qu'un Smith], c'est la liberté sauvage.
été faite. » Ce qu'il faudrait, c'est la tout petit peu je ne vous respecte C'est la liberté qui devient le caprice
faire. Or, aujourd'hui, il y a un pas, que j'aie envie de passer devant et c'est par conséquent la liberté du
peuple de 10 millions de personnes vous. Admettre la compétition, c'est renard dans le poulailler. Alors que
qui se pointe comme volontaire admettre qu'on méprise. Selon moi, la liberté ne peut être qu'organisée.
pour faire l'expérience du com- le capitalisme n'est pas basé sur le Pour moi, le marxisme serait une or-
munisme. On devrait lui dire : respect. Il n'y a qu'à voir l'état des ganisation de la liberté à plusieurs
« Comme vous êtes gentils, faites-là pays capitalistes dans les zones les pour aboutir justement à l'essentiel,
et on va même vous aider, on va plus pauvres. C'est une machine un certain nombre de valeurs d'ac-
bien mesurer tout et on va pas vous merveilleuse à produire de la ri- tion, de vie : avoir le choix de l'édu-
embêter et puis on va revenir dans chesse et une machine lamentable à cation, avoir le choix de l'endroit où
vingt ans voir où vous en êtes. » répartir la richesse. Alors du coup, l'on veut aller, sans caprices, bien
C'est le peuple cubain, qui depuis j'entre en lutte, je m'avance plus sûr.
un certain temps, avec beaucoup loin que je ne l'ai fait déjà. Je pense
d'erreurs et tout ce que vous voulez, Les f e m m e s ,
que partout le grand danger ce sont
a envie de faire l'expérience du les intégrismes. L'intégriste-catholi- l'autre race
communisme. Je ne comprends pas que a été horrible au temps de l'In- N.B. : Deux questions pour terminer.
que le peuple américain, que l'État quisition; l'intégriste-musulman, on On ne peut pas ignorer le fait que la
américain, empêche l'expérience. Il voit ce qu'il est avec les ayatollahs; population de l'humanité est composée
l'étouffé comme les autres... Autre- et Pintégriste-capitaliste, quand les de cinquante pour cent de femmes;
ment dit, actuellement, c'est en ayatollahs s'appellent des ban- comment voyez-vous l'avenir, le rôle
train d'être la catastrophe à Cuba, quiers, est tout aussi dangereux, desfemmes dans notre évolution socio-
mais les Cubains sont parfaitement même plus dangereux. C'est..., c'est culturelle ? Pourquoi demeure-t-on
justifiés de dire : « Ce n'est pas à la dette du tiers-monde... Je fais de impuissant devant la violence qui leur
cause de nos théories, c'est à cause la provocation. est faite ? La question du viol — qui
de ces salauds qui nous étouffent. » est une forme de violence bien sûr —
Car chaque fois qu'un bateau va à est un sujet d'angoisse profond. Com-
N.B. : Revenons à ce que vous avez dit
La Havane, il n'a plus le droit de ment les hommes et les femmes
sur Marx et le respect du marxisme
venir dans un port américain, donc peuvent-ils vivre en harmonie ? Est-ce
pour chaque homme; vous allez en
les armateurs ne .veulent pas courir possible ?
choquer beaucoup. Car je crois que
le risque. Actuellement, la position
beaucoup de gens n 'ont jamais com-
américaine vis-à-vis de Cuba est AJ. : Voilà, bien sûr, deux races qui
pris ces fondements très profonds de la
pour moi la preuve d'un manque de ne sont pas faites pour vivre en-
pensée de Marx qui est un respect de
foi des Américains en leur système semble, mais qui ne peuvent pas
l'individu pour le sauver comme
parce que s'ils étaient si sûrs que le vivre indépendamment. Il y a deux
homme, à tout le moins, minimale-
communisme ne marcherait pas, ils races humaines, c'est pas les Noirs
ment, c'est ça?
laisseraient faire l'expérience. Ils et les Blancs, c'est les mâles et les fe-
ont peut-être peur que ça marche. AJ. : Ce qui est arrivé historique- melles...
ment est catastrophique pour le Bon, on n'est pas fait pour
N.B. : Et justement, vous avez employé marxisme, que ce soit en Russie vivre ensemble simplement, mais on
le mot... qu'il se soit appliqué. Or Marx n'a- ne peut pas se passer l'un de l'autre,

54 NUIT BLANCHE
c'est le prototype de la différence N.B. : Est-ce que les rencontres ne sont « C h a q u e h o m m e a [...] n o n p a s d e u x
constructive. pas très importantes dans cette réali- n a t u r e s , l'une c o n c r è t e , l ' a u t r e i m m a -
t é r i e l l e , m a i s d e u x s o u r c e s , l'une biolo-
Que les hommes aient do- sation de vous-même? gique, l'autre sociale. »
miné les femmes, c'est un accident
AJ. : Bien oui. Faire une confé- Un monde sans prisons, p. 20.
historique complètement ridicule
rence, c'est déjà commencer à faire
car dans la nature ce qui compte
le prochain livre. C'est au cours
c'est la femelle. Il y a des quantités
d'une conférence que les mots vous « Aujourd'hui, tout est différent. Notre
d'espèces où le mâle une fois qu'il a T e r r e e s t p e t i t e [...] N o t r e T e r r e e s t
viennent : la façon dont les gens
fait son boulot pour créer, on le f a i b l e [...] N o t r e Terre e s t p a u v r e [...]
vous écoutent, vous posent des
bouffe ou on le laisse crever. À quoi N o t r e T e r r e e s t f r a g i l e [...]. »
questions, vous amène à formuler.
il sert? Il a transmis la vie, c'est tout
Peut-être que je viens d'écrire un Voici le temps du monde fini, p. 158.
ce qu'il avait à faire. Je ne demande
chapitre avec vous? •
pas qu'on fasse de même avec les
mâles humains, mais au moins Entrevue réalisée par « L'aboutissement du développement
qu'on sente l'égalité. Et la question, Bruno Deshaies d e l ' o r g a n i s m e e s t f o n c t i o n d e s ha-
ma chère épouse qui travaille à Pa- s a r d s d e s o n e x i s t e n c e , m a i s c e s ha-
ris dans une librairie féminine y ré- s a r d s a g i s s e n t s e l o n d e s lois d e p r o b a -
bilités définis par l'héritage génétique
pondrait mieux. Quand je me suis q u e c e t o r g a n i s m e a r e ç u l o r s d e sa
marié, ma femme n'avait pas le c o n c e p t i o n , e t q u i c o n s t i t u e s o n es-
droit d'avoir un carnet de chèques! sence. »
Ça montre à quel point on était gro- Albert Jacquard a publié : Structures génétiques Structures génétiques des populations, p. 3.
tesque. On vient de faire des pro- des populations, Masson, 1970; Les probabilités,
grès, j'espère que ça va continuer... « Que sais-je ? », Presses Universitaires de France
(PUF), 1974 ; Génétique des populations humaines,
PUF, 1974; L'étude des isoiats, Espoirs et limites,
N.B. : Une dernière question pour les PUF / INED, 1976; Concepts en génétique des po-
lecteurs de Nuit blanche et pour le pu- pulations, Masson, 1977; Eloge de la différence, La Albert Jacquard
blic québécois. Les gens d'ici sont fas-
génétique et les hommes, « Science ouverte »,
Seuil, 1978; Au péril de la science? Interrogations
QU'EST-CE
cinés par le nombre d'ouvrages que d'un généticien, « Science ouverte », Seuil, 1982; QUE L'HÉRÉDITÉ?
Moi et les autres, Initiation à la génétique, « Point-
vous écrivez en un laps de temps assez Virgule », Seuil, 1983; Inventer l'homme, «Le INTRODUCTION
court. Comment y parvenez-vous?
Quel est votre secret ?
genre humain », Complexe, 1984; L'héritage de la
liberté, De l'animalité à l'humanitude, « Science ou-
À LA BIOLOGIE
verte », Seuil, 1986 ; Cinq milliards d'hommes dans Jacques Grancher, 1993,
AJ. : Il n'y a pas de secret vous sa- un vaisseau. Seuil, 1987, « Point-Virgule », 1987;
vez. Je ne passe pratiquement pas Les scientifiques parlent, « La force des idées », 185 p . ; 23,90 $
Hachette, 1987; Moi, je viens d'où?, avec Marie-
de temps en réunions diverses Josée Auderset, « Petit Point », Seuil, \989; Abé-
comme tous mes chers collègues. Je cédaire de l'ambiguïté, De Z à A : des mots, des Le biologiste français le plus visible
me suis toujours arrangé pour ne choses et des concepts, « Point-Virgule », Seuil, au Québec nous offre cette fois un
1989; Idées vécues, avec Hélène Amblard, Flam-
pas avoir ce genre de pouvoir en pri- marion, 1989; C'est quoi l'intelligence?, avec ouvrage vulgarisé sur la génétique.
vilégiant le pouvoir de la parole ou Marie-Josée Auderset, « Petit Point », Seuil, Abordant son objet par le biais de la
de l'écrit qui est un pouvoir beau- 1989 ; Tous pareils, tous différents, avec Jean-Marie ressemblance entre les parents et les
Poissenot, Nathan, 1991 ; Voici le temps du monde
coup plus important. Si bien que je fini, Seuil, 1991 ; La légende de la vie, Flammarion, enfants, Albert Jacquard nous livre
ne perds pas de temps. Et puis 1992; Un monde sans prisons, avec Hélène Am- quelques clés de compréhension des
quand je suis en voiture dans Paris, blard et Jean-Marc Heller, « Point-Virgule », mécanismes de l'hérédité dans l'é-
Seuil, 1993; Construire une civilisation terrienne,
ça m'arrive... j'ai toujours des petits (Conférence du 8 octobre 1992), Musée de la ci- volution des populations.
bouts de papier et aux feux rouges, vilisation, 1993; £ = CM2, « Petit Point des con- L'histoire de l'hérédité re-
j'écris. Et après, avec tous ces petits naissances », Seuil, 1993; L'explosion démogra- monte à l'époque très lointaine, il y
phique, «Dominos», Flammarion, 1993;
morceaux de papier épars, un livre Qu'est-ce que l'hérédité?, Introduction à la biologie, a trois ou quatre milliards d'années,
se fait assez rapidement. Et puis, je « Ouverture », Jacques Grancher, 1993 ; Science et où est apparue une molécule ca-
ne les fais pas tout seul, il y a pas mal croyances, avec Jacques Lacarrière, « Dialogues », pable de se reproduire. Le proces-
Écriture, 1994.
de livres que j'ai faits avec d'autres sus de reproduction, caractéristique
personnes, toujours des femmes essentielle du monde vivant, s'ac-
d'ailleurs. Tiens! comme par ha- compagne de la transmission, de gé-
sard. nération en génération, de ce qu'il
« L ' é d u c a t i o n n'a p l u s pour f o n c t i o n
Bon... c'est, justement, c'est q u e d e t r a n s m e t t r e d e s f a ç o n s d e vivre est convenu d'appeler aujourd'hui
complémentaire. Elles m'embêtent. o u d ' a g i r [...] Sa f i n a l i t é e s t , a u c o n - le patrimoine génétique.
Elles ne disent jamais du premier t r a i r e , de f a b r i q u e r d e s h o m m e s l u - C'est avec les expériences
coup que ce que j'ai écrit est bon. c i d e s [...]. » du moine Gregor Mendel sur des
Alors il faut que je recommence, L'héritage de la liberté, p. 182. pois de différentes couleurs, à la fin
même si moi je trouvais ça très bon. du siècle dernier, qu'on commença
Elles me disent : « Non c'est mal à comprendre les mécanismes de la
« La s a n t é e s t - e l l e u n b i e n écono-
écrit, c'est pas clair, on recom- m i q u e ? La r é p o n s e ne p e u t ê t r e q u e
transmission des gènes. La décou-
mence. » Elles m'embêtent, elles n o n ; sauf s i l'on a c c e p t e d e r e n o n c e r verte de Mendel était capitale et se
m'embêtent. Et puis, je les ai écrits à d e s v a l e u r s e s s e n t i e l l e s e t d e ne résume en peu de mots : les enfants
avec des enfants. Alors à partir du p l u s voir e n c h a q u e ê t r e q u ' u n sont faits par les gamètes que leurs
moment où l'on essaie de formu- consommateur-producteur. » parents ont faits. C'est dire que la
ler... Idées vécues, p. 73. procréation comporte une étape in- •

NUIT BLANCHE 55
termédiaire décisive, où la ren- sujet ou, dans le cas de questions
contre des cellules spécialisées de la Albert Jacquard embarrassantes, s'il ne se sent pas à
reproduction, les gamètes, permet l'aise d'y répondre. Par contre, les
une recombinaison aléatoire des
E=CM2 interrogations des enfants reflètent
traits héréditaires potentiels, les « Petit Point leur besoin de comprendre leur en-
gènes, présents dans le bagage gé- des connaissances », vironnement et manifestent aussi
nétique de chacun des géniteurs. Seuil, 1993, leur inquiétude devant l'existence.
Autrement dit, les descendants ne Comme on peut l'imaginer,
sont pas un mélange de ce 101 p.; 12,50 $ il ne s'est pas agi pour Albert Jac-
qu'étaient leurs parents mais plutôt quard de faire une présentation sa-
un mélange de ce qu'ils étaient et de Que répondriez-vous à un jeune de vante de notions scientifiques ou
ce qu'ils auraient pu être. onze-douze ans qui vous demande d'explications compliquées mais
Le fonctionnement de ce tout bonnement comment Dieu a bien d'apporter des réponses justes,
mécanisme intermédiaire génère un fait le monde ou encore pourquoi il adaptées au langage et aux points de
nombre infini de possibilités combi- faut se déshabiller pour faire l'a- référence des jeunes. Il est amusant
natoires qui aboutissent à la créa- mour? Eh bien, Albert Jacquard, de reprendre les questions propo-
tion d'un nouvel individu à jamais chercheur, généticien, écrivain, « sa- sées dans le livre et d'essayer d'y ré-
unique. Même si le processus aurait vant » (il déteste ce mot car les gens pondre le plus clairement possible,
pu être mieux illustré dans son livre, identifient le savant à quelqu'un qui puis de lire les réponses fournies par
les propos de l'auteur ne laissent au- sait tout, et il croit ne pas tout sa- l'auteur. E=CM2 peut très bien ser-
cun doute sur l'impossibilité abso- voir!) a admirablement relevé ce vir à un professeur, à un éducateur;
lue de faire le portrait d'un enfant à défi. Lors de rencontres dans des même un public plus large y trouve-
naître à partir de la connaissance écoles primaires de la France et du rait profit, car personne ne peut res-
des géniteurs. La science génétique Québec il s'est exposé aux questions ter indifférent à certains sujets. Que
peut tout au plus identifier de jeunes appartenant à des classes répondriez vous à la question :
quelques-uns des innombrables pos- de sixième année. Nombre de ces « Monsieur, pourquoi y a-t-il du
sibles. questions fondamentales, qui font chômage ? » •
Albert Jacquard insiste aus- l'objet du dernier livre du cher-
si avec raison sur le fait que l'héré- cheur, E=CM2, peuvent rester sans
dité s'inscrit dans les rapports in- réponse si l'adulte ne connaît pas le Emilie Adam-Vézina
times de l'individu avec son milieu.
Le gène transmis ne s'exprime que
dans ce milieu constitué de l'en-
semble des gènes du patrimoine gé-
nétique de l'individu, de l'ensemble DEUX HUMANISTES
des organismes vivants avec lesquels
il entrera en relation et de l'en-
semble des conditions dans les-
S'INTERROGENT
quelles se déroule sa vie.
Dans le cas des êtres hu-
mains, les choses se compliquent
encore sous l'influence de la cul-
ture. Ainsi, l'ouvrage recense plu-
sieurs cas où la génétique fut abusi-
vement utilisée pour justifier des
idées racistes ou élitistes. Dans le
même ordre d'idées, le biologiste
n'hésite pas à mettre en cause le
concept de « douance » forgé par
des éducateurs québécois. Sans être
le fruit d'une machination, ce con-
cept pourrait avoir pour effet de pri-
ver certains élèves des moyens de
réussir, si leurs dons s'expriment de
façon moins apparente.
Bien que cet ouvrage soit
conçu pour les non spécialistes, des
connaissances en statistique se-
raient fort utiles pour en com-
prendre les nombreux développe-
ments émaillés de formules
mathématiques. Ces connaissances Chez
ne sont toutefois pas nécessaires
pour saisir la pensée de l'auteur. • votre libraire
Gérald Baril

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