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UNIVERSITE MOULAY ISMAIL

FACULTE DE DROIT

COURS D’INTRODUCTION A L’ETUDE DE


DROIT

PREPARE PAR :

TAJRIOUI MOHAMED

ENSEIGNANT CHERCHEUR A LA FACULTE DE


DROIT MEKNES

EG3

1
Introduction

Le mot  « droit » a deux sens. Il désigne, d’abord, un ensemble des


règles qui régissent les relations qui s’établissent entre les hommes « et
s’imposent à eux, au besoin, par le moyen de la contrainte étatique »1.Le
droit dans ce sens est appelé « droit positif ». Celui-ci  « peut prendre la
forme d’un ordre positif ou consister en une simple défense ».2Il prendra la
forme d’un ordre positif quand la règle de droit exige l’accomplissement
des actes déterminés. Il s’agira d’une simple défense quand la règle de
droit interdit l’accomplissement de certains faits.

Le droit positif est généralement suivi d’un qualificatif qui précise


son objet, comme par exemple, le droit pénal (ensemble des règles
juridiques qui déterminent les différentes infractions et leurs sanctions, ou

1
Patrick COURBE, Introduction générale au droit, Dalloz, 5ème éd, 1997, p.1.
2
Mohamed Jalal ESSAID, Introduction à l’étude du droit, Imprimerie Fedala, Mohammedia, 1992,
p.47.

2
le droit commercial (ensemble des règles juridiques applicables aux
commerçants et régissant les actes de commerce accomplis par toute
personne).

Le mot « droit » a une autre signification. Il désigne les


« prérogatives que le droit objectif reconnaît à un individu, et dont il peut
se prévaloir dans ses rapports avec les autres hommes, sous la protection de
l’autorité publique »1.Ainsi par exemple, un père de famille qui est dans le
besoin peut réclamer le secours de ses enfants. Réclamer le secours des
enfants est un droit que la loi garantit au père qui se trouve dans le besoin
(à la mère aussi et aux autres descendants…). Le mot « droit » pris dans ce
sens est appelé « droit subjectif ». Son titulaire est appelé « sujet de droit ».

C’est sur ces deux significations du mot « droit » que ce présent


travail se penchera. Il sera donc divisé en deux parties. La première partie
se focalisera sur ce qu’on appelle « le droit positif ». Quant à la deuxième
partie, elle sera consacrée à l’étude de ce qu’on appelle « les droits
subjectifs ».

1
Patrick COURBE, op.cit.p.1.

3
4
Le droit objectif est généralement défini comme étant l’ensemble des
règles de conduite qui régissent les rapports entre les hommes « et
s’imposent à eux, au besoin, par le moyen de la contrainte étatique ».1

Dans cette première partie, nous examinerons successivement les


caractères de la règle de droit et ceux des autres règles de conduite sociale,
notamment les caractères de la règle religieuse et de la règle morale
(chapitre1) ; les fondements du droit (chapitre 2) ; ses divisions
(chapitre3) et ses sources (chapitre 4).

1
Patrick COURBE, op.cit.p.1.

5
Chapitre 1 : Les caractères essentiels de la règle de
droit et des autres règles de conduite.
Section 1 : Les caractères de la règle de droit.

La règle de droit présente un certain nombre de caractères. Ces


caractères sont les suivants :

§1 : Le caractère général de la règle de droit.

La règle de droit est une disposition impersonnelle. Cela veut dire


qu’elle ne s’adresse pas à une personne déterminée individuellement, mais
à toutes les personnes qui remplissent les conditions d’application de cette
règle. En d’autres termes, la règle de droit « vise non pas tant les
personnes en elles- mêmes que les situations juridiques dans lesquelles
elles se trouvent ».1
1
Philippe MALINVAUD, Introduction à l’étude du droit. Cadre juridique des relations économiques,
7ème éd., Litec, Paris, 1995, p.9.

6
Le caractère de généralité de la règle de droit est commandé par le
principe de l’égalité de tous les citoyens devant la loi. Il est considéré
comme « une garantie fondamentale d’impartialité, de justice et de sécurité
pour les individus ».1

Aux termes de l’article 6 de la Déclaration des Droits de l’Homme et


du Citoyen, la loi « doit être la même pour tous, soit qu’elle protège, soit
qu’elle punisse ».2

Le caractère de généralité de la règle de droit ne signifie pas que


celle-ci doit s’appliquer à la totalité des individus vivant dans la société.
Elle peut ne concerner qu’une catégorie de personnes déterminée, comme,
par exemple, les textes qui régissent le métier des médecins. Peu importe
donc le nombre des usagers de la règle de droit dés l’instant que celle-ci
n’est pas adressée à une ou à des personnes déterminées individuellement.

On peut même concevoir une règle de droit générale qui ne


concernera qu’une personne. C’est le cas, par exemple, des règles relatives
au mode de désignation du président de la République dans les Etats
républicains. Ces règles conservent leur caractère de généralité tant
qu’elles ne concernent pas une personne déterminée individuellement, mais
tout individu citoyen susceptible d’être président de la République.

Par ce caractère de généralité, la règle de droit « s’oppose aux


mesures individuelles prises par les autorités étatiques et visant une ou
plusieurs personnes dénommées ».3 En ce sens, ne figurent pas parmi les
règles de droit, les décisions de nomination, par exemple, car ces décisions
visent des personnes déterminées nommément. Il en va de même des

1
Abdelaziz SQALLI, Introduction à l’étude du droit marocain, Sofapress, Fès, 1995, p.37.
2
Cité par Rémy CABRILLAC in : Introduction générale au droit, Dalloz, Paris, 2000, pp.8-9.
3
Ph. MALINVAUD, op.cit.p.10.

7
décisions de justice. « Un jugement est tout le contraire d’une règle de
droit puisque étant un ordre particulier et concret, il n’a aucune vocation à
s’appliquer en dehors du procès dans lequel il a été rendu ».1

§2 : Le caractère obligatoire de la règle de droit.

« Le rôle de la loi ne consiste pas à faire des recommandations et


encore moins à donner des conseils ».2La règle de droit est une norme qui
s’impose et doit être appliquée dés l’instant que les conditions de son
application sont réunies. « C’est d’ailleurs ce qui a conduit certains juristes
à définir le droit comme étant un impératif catégorique ». La nécessité
d’appliquer la règle de droit trouve sa justification comme disaient les
philosophes de droit- dans le souci d’assurer la sécurité, l’ordre social et la
justice.

Il faut souligner que si la loi est obligatoire, il existe, cependant, des


degrés dans cette force obligatoire. Certaines règles s’imposent de façon
absolue ; les particuliers ne peuvent, en aucun cas, en écarter l’application.
D’autres règles peuvent être écartées si les concernés manifestent une
volonté en ce sens. On distingue alors deux catégories de règles de droit :
les règles dites impératives ou d’ordre public et les règles supplétives ou
interprétatives de volonté.

A- Les règles impératives ou d’ordre public.

On qualifie une règle de droit d’impérative ou d’ordre public lorsque


elle s’applique obligatoirement. Les particuliers, comme les tribunaux ne
peuvent, en aucun cas, en écarter la mise en application. Tel est le cas de
toutes les règles pénales, de très nombreuses règles de droit du travail.

1
Ph. MALINVAUD, op.cit.p.10.
2
Ph. MALINVAUD, op.cit.p.10.

8
Ainsi le vol est interdit et incriminé par le Code pénal. La règle qui interdit
le vol est une règle impérative, car tout individu est tenu obligatoirement à
la respecter sinon il sera sanctionné d’une peine prévue pour cet acte (le
vol). La règle qui fixe le smic est également une règle impérative. On ne
peut écarter son application. En droit civil, les règles impératives se font
rares. On peut citer, à titre d’exemple, le cas de la dot. En effet, l’article 5
de la Moudawana considère le mariage non valable si une dot n’a pas été
prévue dans le contrat de mariage. Mais la plupart des dispositions du droit
civil sont supplétives.

B- Les règles supplétives ou interprétatives de volonté.

On entend par la règle de droit supplétive ou interprétative de volonté


la « loi qui, bien que destinée à régir une situation précise, peut être écartée
par une volonté contraire exprimée ».1En d’autres termes plus clairs, on
peut dire que la règle supplétive est celle qu’on peut ne pas appliquer si on
manifeste une volonté en ce sens. A titre d’exemple, on peut citer, parmi
les règles de droit supplétives, l’article 502 du Droit des Obligations et des
Contrats (D.O.C) qui stipule :  « La délivrance doit se faire au lieu où la
chose vendue se trouvait au moment du contrat, s’il n’en a été autrement
convenu ». A travers cet exemple, on constate que le législateur pose une
règle : la livraison de la marchandise doit se faire au magasin du vendeur.
Mais le législateur a donné la possibilité de choisir un autre endroit pour la
livraison. C’est une règle supplétive car les parties peuvent ne pas s’y
soumettre si elles le veulent. La règle aurait pu être impérative si elle se
limitait à dire : « La délivrance doit se faire au lieu où la chose vendue se
trouvait au moment du contrat ». Dans ce cas, les parties du contrat ne
peuvent se mettre d’accord sur un autre endroit pour la livraison. Celle-ci
1
Ph. MALINVAUD, op.cit.p12.

9
ne peut se faire qu’au lieu où la vente a eu lieu, c’est-à-dire au magasin du
commerçant. Là on est devant une règle impérative.

Il faut souligner que parfois, il est difficile de distinguer entre les


règles impératives ou d’ordre public et les règles supplétives. Souvent le
législateur, lui-même, déclare expressément que telle règle est impérative
ou simplement supplétive. Mais ce n’est pas toujours le cas. Certains
auteurs évoquent des critères sur lesquels ils se fondent pour distinguer
entre les deux types de règles de droit. Le juriste français Jean
CARBONNIER évoque ce critère : « On ne peut déterminer si une loi est
ou non d’ordre public qu’en cherchant si elle a pour objectif principal la
protection d’un intérêt public ou d’un intérêt privé ».1

En d’autres termes, on qualifie une règle de droit d’impérative si elle


a pour but la protection d’un intérêt général ; on la qualifie de supplétive si
son objectif ne dépasse pas la protection des intérêts privés.

Le Professeur M.J.ESSAID évoque un autre critère. Il écrit à ce


propos : «  Les règles impératives sont des dispositions qui traduisent des
principes fondamentaux ou des valeurs sacrées de notre société. C’est
pourquoi elles s’imposent de façon absolue, les particuliers n’étant pas
admis à en écarter l’application ».2

§ 3- Le caractère coercitif de la règle de droit.

L’une des caractéristiques fondamentales de la règle de droit, c’est


qu’elle est sanctionnée par la puissance publique. Seul l’Etat est habilité à
faire respecter les règles de droit en imposant des sanctions en cas de leur

1
Cité par Mohamed KORRI-YOUSSOUFI et Mustapha ELGHARBI, Cours d’introduction à l’étude
du droit, Librairie Sujlmasa, 1999, p.8.
2
M.J.ESSAID, op.cit.p.50.

10
violation. La justice privée, c’est-à-dire le pouvoir de se faire justice soi-
même, n’est plus reconnue depuis fort longtemps.

La sanction – on le verra– est le critère essentiel qui distingue la


règle de droit des autres règles de conduite sociale.

Il y a deux grandes catégories de sanctions : les sanctions civiles et


les sanctions pénales.

A – Les sanctions en matière civile.

Schématiquement, on peut répartir les sanctions civiles en trois


types : la nullité, les dommages-intérêts et la contrainte.

a- La nullité.

La nullité est une sanction qui consiste à priver de tout effet un acte
juridique contraire à la règle de droit. Ainsi, par exemple, l’article 83 de la
Moudawana dispose que « l’adoption ordinaire est nulle et non avenue ».
Le juge ne peut que prononcer l’annulation de cette adoption, car, tout
simplement, l’adoption est interdite par la loi.

b- Les dommages-intérêts.

C’est une somme d’argent que doit recevoir la victime d’un


dommage de la personne qui en était responsable. Cette somme d’argent
doit être égale à la valeur de ce préjudice.

c- La contrainte.

La contrainte peut être directe ou indirecte. Directe lorsqu’elle est


exercée sur la personne elle-même, comme, par exemple, l’expulsion d’une
personne d’un local occupé illégalement par cette personne. Indirecte
lorsqu’elle n’est pas exercée sur la personne elle-même mais sur ses biens,
comme l’exemple d’un débiteur qui ne paie pas sa dette. Dans ce cas, « le

11
créancier peut s’adresser à un juge qui condamnera le débiteur à payer ; si
celui-ci n’exécute pas volontairement la condamnation, le créancier fera
saisir les biens du débiteur et – sous l’autorité du juge- requerra leur
venteaux enchères afin de se payer sur le produit de cette vente ».1

B - Les sanctions en matière pénale.

La loi pénale détermine, à l’avance, tous les comportements


susceptibles de troubler l’ordre social. On appelle ces comportements les
infractions. Les auteurs de ces infractions s’exposent à des peines dont
l’importance varie selon la gravité de ces dernières.

L’article 111 du Code Pénal Marocain classe les infractions en :


crimes, délits correctionnels, délits de police et contraventions.

a- Les crimes.

Les crimes sont les infractions les plus graves. Ils sont sanctionnés
par les peines suivantes : la peine de mort, la réclusion perpétuelle, la
réclusion à temps de 5 à 30 ans, la résidence forcée (qui se traduit par
l’assignation au condamné d’un lieu de résidence ou d’un périmètre
déterminé dont il ne pourra s’éloigner sans autorisation pendant la durée
fixée par la décision…), la dégradation civique (qui se traduit par la
destitution et l’exclusion du condamné de toutes fonctions publiques, par la
privation du droit d’être électeur ou éligible et du droit de porter toute
décoration, par l’incapacité d’être assesseur juré, expert, de servir de
témoin dans tous actes et de déposer en justice autrement que pour y
donner de simples renseignements, par l’incapacité d’être tuteur si ce n’est
de ses propres enfants, par la privation du droit de porter des armes, de

1
P. COURBE, op.cit.p.4.

12
servir dans l’armée, d’enseigner, de diriger une école ou d’être employé
dans un établissement à titre de professeur, maître ou surveillant…).

b- Les délits correctionnels.

Ils sont sanctionnés par des peines d’emprisonnement allant d’un an


à cinq ans. Le Professeur Mohamed Jalal ESSAID cite l’exemple suivant
d’un délit correctionnel : L’article 494 du Code Pénal punit de
l’emprisonnement d’un an à 5 ans et d’une amande celui qui «  par fraude,
violence ou menaces, enlève une femme mariée, la détourne, ou la
déplace…des lieux où elle était placée ».1

c- Les délits de police.

Ce sont les délits auxquels le législateur inflige des peines


d’emprisonnement dont le maximum ne dépasse pas deux ans. Citons, à
titre d’exemple, l’article 483 du Code Pénal qui prévoit une peine
d’emprisonnement d’un mois à deux ans à l’encontre de celui qui se rend
coupable d’un outrage public à la pudeur, en se promenant dans la rue dans
un état de nudité volontaire ou en faisant des gestes obscènes.2

d- Les contraventions.

Elles sont des infractions les moins graves. Elles sont punies par une
détention de moins d’un mois ou d’une amende allant de 30 à 1200dh. Il en
est ainsi, par exemple, des contraventions du Code de la route.

Section 2 - Les caractères des autres règles de conduite.

Outre la règle de droit, il existe d’autres règles de conduite humaine.


Ces règles sont nombreuses. Nous nous focalisons seulement sur deux

1
M. J. ESSAID, op.cit.p.55.
2
M.J.ESSAID, op.cit.p.55.

13
d’entre elles en essayant de les comparer avec la règle de droit. Il s’agira,
en effet, de la règle de morale et de la règle religieuse.

§1-Le droit et la morale.

Il existe entre la règle de morale et celle de droit des ressemblances,


mais aussi des dissemblances.

A- Les ressemblances entre la morale et le droit.

La règle de droit ne s’adresse pas –on l’a dit– à une personne


déterminée individuellement, mais à toute personne qui remplit les
conditions de son application.

Ce caractère de généralité n’est pas spécifique à la règle de droit,


mais on le retrouve également pour la règle de morale. Celle-ci, elle aussi,
n’est pas destinée à une personne déterminée nommément ; elle est
adressée à toute personne vivant en société et dont elle veut guider le
comportement.

Outre le caractère général de la règle de morale et de la règle de


droit, il faut évoquer également l’idée selon laquelle de nombreuses règles
de droit sont empruntées à la morale. Les exemples, à ce propos, ne
manquent pas. Prenons l’exemple d’assistance à une personne en danger :
le fait de s’abstenir de porter secours à une personne en danger est
aujourd’hui réprimé par la loi pénale, alors q’auparavant, ce comportement
était réprouvé uniquement par la morale. Il y a d’autres exemples qui
pourraient être cités, mais notre objectif consiste seulement à démontrer

14
que « le droit et la morale, tout en étant séparés, présentent entre eux des
liens assez étroits ».1

B- Les dissemblances entre la règle de droit et la morale.

Il existe –on l’a dit- plusieurs dissemblances (différences) entre une


règle de droit et celle de morale. On peut citer quelques unes qui nous
paraissent les plus importantes.

a- Au niveau de leur finalité.

Si la règle de morale tend à la perfection individuelle, la règle de


droit, elle, a pour objectif d’assurer l’ordre social.

b- Une deuxième différence peut être résumée dans les termes


suivants : la règle de morale est individuelle dans son application. En
d’autres termes, sa mise en application dépend de la seule conviction de
chacun, de son choix, c’est-à-dire, on est libre de respecter ou de ne pas
respecter la règle de morale. C’est tout à fait le contraire pour ce qui
concerne la règle de droit. L’application de celle-ci est obligatoire. Le
caractère obligatoire de la règle de droit est l’un des critères fondamentaux
qui la distingue des autres règles de conduite sociale, en l’occurrence, la
règle de morale. On dit que la règle de droit est obligatoire, cela veut dire
que son application ne dépend pas de la volonté de chacun, comme c’est le
cas pour la règle de morale. L’application de la règle de droit s’impose à
tout individu lorsque les conditions de son application sont requises.

c- Une autre différence importante concerne la sanction.

1
M.J.ESSAID, op.cit.p.60.

15
L’inobservation de la règle de droit fait subir à son auteur une
sanction prévue par la loi. Quant à la règle de morale, elle ne comporte pas
de sanction au sens juridique du terme. Elle «  ne comporte que des
sanctions psychologiques (remords de l’individu, réprobation de ses
semblables). Contrainte insuffisante pour assurer l’ordre ».1.

d- Une dernière différence importante est relative à leur contenu.

La morale pose de grands principes qui doivent guider les


comportements, comme l’honnêteté dans les contrats, par exemple. Le
droit, quant à lui, contient des règles précises qui permettent aux
particuliers de « connaître avec précision les situations visées par ces
règles. Ils doivent être en mesure de distinguer entre ce qui est permis et ce
qui est interdit »2 pour pouvoir se comporter conformément à ce qu’exigent
les règles de droit, comme, par exemple, la règle qui dispose que
« l’adoption ordinaire est nulle et non avenue » (l’article 83 de la
Moudawana).

§2- Le droit et la religion.

Les règles religieuses sont des « commandements imposés par la


religion ».3. Au sein de la religion, on distingue, généralement, deux types
de règles : les règles de culte et les règles relatives aux « mo’amalat »,
c’est-à-dire les règles qui régissent les rapports sociaux. C’est ce deuxième
type de règles religieuses qu’il faut comparer avec celles de droit.

« La question des rapports entre le droit et la religion se pose


différemment d’un système juridique à l’autre ».4

1
P. COURBE op.cit.p.6.
2
A. SQUALLI, op.cit.p.39.
3
P. COURBE, op.cit.p.6.
4
M. KORRI-YOUSSOUFI et M. ELGHARBI, op.cit.p.12.

16
Il y a, en effet, des systèmes juridiques qui écartent totalement les
règles religieuses du domaine de l’organisation des rapports sociaux. Les
règles religieuses dans ces systèmes dits laïcs ne sont ni obligatoires, ni
sanctionnées. Leur respect dépend uniquement du bon vouloir des
individus, et leur violation n’expose pas leurs auteurs à des sanctions.

A l’inverse, il existe des systèmes juridiques qui ont intégré des


règles religieuses en leur sein. Dans de tels systèmes, la règle religieuse ne
se distingue guère de la règle de droit. « Les deux traits caractéristiques
déjà relevés à propos de la règle de droit semblent marquer également la
règle issue de la religion : le caractère obligatoire et l’existence d’une
sanction ».1Toutefois, une différence fondamentale distingue les deux types
de règles, c’est que l’obligation et la sanction dont se dote la règle de droit
ont pour origine l’Etat, alors que, dans le cas de la règle religieuse, ces
deux caractères trouvent leur fondement dans les textes religieux. On peut
ajouter une autre différence : « les sanctions religieuses peuvent être aussi
bien des sanctions de l’au-delà, des sanctions promises pour une autre vie,
que des sanctions qui sont d’application immédiate ».2

Concernant les sanctions que contiennent les règles de droit, elles ne


sont –on le sait–que d’application immédiate.

Parmi les Etats qui ont opté pour l’intégration des règles religieuses
dans leurs systèmes juridiques, nous pouvons citer le Maroc. Mais il faut
préciser que notre pays, à l’instar de beaucoup d’autres pays Etats arabo-
musulmans, n’a pas intégré toutes les dispositions proprement juridiques
que contiennent les textes religieux. Il n’a intégré que certaines d’entre
elles.
1
M. J. ESSAID, op.cit.p.61.
2
M. J. ESSAID, op.cit.p.61.

17
L’article 505 du Code Pénal, par exemple, prévoit à l’encontre de
l’auteur d’un vol, non pas l’amputation de sa main, comme il est prévu
dans un verset coranique, mais une peine d’emprisonnement allant d’un an
à cinq ans. On peut citer également l’article 490 et l’article 491 qui
prévoient pour le délit d’adultère non pas la flagellation ou la lapidation,
mais des peines d’emprisonnement. « Il en va de même, en matière civile
ou commerciale, du prêt à intérêt qui est retenu par le droit positif, alors
qu’il n’est pas admis par la religion ».1

Si l’on excepte les règles organisant le statut personnel, familial et


successoralqui relèvent de ce qu’on appelle la charia, toutes les autres
règles qui régissent les rapports sociaux relèvent du droit positif. On est
loin de l’idée qui affirme que « les marocains sont régis par un droit
essentiellement religieux ».2

1
M. J. ESSAID, op.cit.p.63.
2
M. J. ESSAID, op.cit.p.64.

18
Chapitre 2 – Le fondement de la règle de droit.
S’interroger sur le fondement de la règle de droit relève du domaine
de la philosophie du droit. Il n’est possible ici d’en donner qu’un bref
aperçu.

On entend par le fondement du droit sa justification, ou sa légitimité-


comme disent certains juristes-. Cette question de la justification de la
règle de droit ou de sa légitimité a suscité des controverses et a donné lieu
aux deux conceptions différentes qui s’opposent depuis longtemps : les
théories idéalistes ou du droit naturel et les théories positivistes.

Section 1- Les théories idéalistes ou du droit naturel.

Les théories idéalistes sont les théories qui admettent l’idée de


l’existence de ce qu’elles appellent « le droit naturel ». Ces théories
définissent celui-ci comme étant un ensemble de règles idéales de conduite
humaine, supérieures aux règles de droit positif, immuables et universelles
qui s’imposent à tous, y compris aux législateurs lorsqu’ils fixent le
contenu de la règle de droit.1« Cela revient à dire que la règle de droit n’est
justifiée que dans la mesure où elle est conforme à ces règles idéales,

1
Voir P. CORBE, op.cit.p.9 et R. CABRILLAC, op.cit.p.15.

19
supérieures dont elle doit être inspirée ».1Pour les idéalistes, la
désobéissance aux lois positives contraires aux lois naturelles deviendrait
un devoir. Selon le mot célèbre de Calvin : « lorsque les lois sont injustes,
les séditieux ne sont pas ceux qui les violent, mais ceux qui les font ».2

Mais une question se pose : qu’entendons-nous, plus précisément,


par le droit naturel ? Aristote tente de préciser le contenu de celui-ci en le
définissant comme étant un principe supérieur de justice, inscrit dans la
nature des choses. De leur côté, les romains le définissent comme étant
« ce qui a toujours été bon et juste ».3 Mais qu’est-ce que la justice, le bon,
le juste ? Certaine littérature ancienne tente d’approcher ces mots par
certaines règles de conduite, comme, par exemple : vivre honnêtement, ne
faire de torts à personne, respect de la parole donnée, etc.

Si l’on veut résumer les définitions données au droit naturel, on dira


que celui-ci repose sur trois grands principes.

Premier principe : « le droit naturel est universel et immuable. Cela


revient à affirmer l’existence de règles qui seraient valables pour tous les
pays et toutes les époques. On peut citer à cet égard la règle qui impose le
respect de la parole donnée, règle qui se trouve effectivement à la base de
tous les contrats depuis le droit romain ».4

Deuxième principe : le droit naturel est basé sur un principe


supérieur de justice inscrit dans la nature des choses dont le droit positif
doit être inspiré.

1
M.J.ESSAID, op.cit.p.72.
2
R. CABRILLAC, op.cit.p.16.
3
M. J.ESSAID, op.cit.p.74.
4
M. J. ESSAID, op.cit.p.75.

20
Troisième et dernier principe : les partisans du droit naturel
soutiennent que la désobéissance aux lois positives contraires à la justice
naturelle assurée par le droit naturel est légitime, voire un devoir.

Ces principes sur lesquels reposent les théories idéalistes ou du droit


naturel ont été vivement critiqués.

On peut résumer ces principales critiques comme suit :

- On a reproché aux théories idéalistes d’être inexactes. Les


immenses différences qui existent entre les différentes législations en
vigueur hier ou aujourd’hui dans des pays différents, montreraient
qu’aucun droit immuable et universel ne peut être dégagé.1

- On a, également, reproché aux théories idéalistes d’insister sur


la nécessité pour le droit positif de se conformer au droit naturel. « Mais,
en pratique, existe-t-il des procédés susceptibles d’obliger le législateur à
respecter le droit naturel »,2 comme l’a fait remarquer le Professeur
M.J.ESSAID.

- On leur a, aussi, reproché le fait d’avoir légitimé la résistance


aux lois contraires au droit naturel. Reconnaître aux individus le droit de
désobéir aux lois positives injustes, c’est-à-dire non conformes au droit
naturel, pourrait mener au désordre et à l’anarchie. « D’autant plus que
l’appréciation du caractère injuste de la règle contraire au droit naturel peut
aboutir à des vues personnelles différant d’un individu à l’autre ».3

Section 2- Les théories positivistes.

Les théories positivistes rejettent catégoriquement la notion de droit


naturel, l’idée d’une norme supérieure à laquelle doit se conformer la règle
1
Voir R. CABRILLAC, op.cit.p.18.
2
M. J.ESSAID, Op.cit.p.77.
3
M.J.ESSAID, op.cit.p.77.

21
de droit positif. Selon ces théories, il n’y a d’autre droit que celui qui est
mis en œuvre à un moment donné, dans une société considérée. On
l’appelle « droit positif ».

On peut dire qu’il y a deux grands courants positivistes : le courant


positiviste juridique ou étatique et le courant positiviste sociologique.

§ 1- Le positivisme juridique ou étatique.

L’idée centrale que soutiennent les partisans de ce qu’on appelle le


positivisme étatique ou juridique, c’est que le droit procède exclusivement
de la volonté de l’Etat. En d’autres termes, seul l’Etat est habilité à créer la
loi ; il est la seule et unique source de la règle de droit.

Parmi les théoriciens de l’école positiviste juridique, on peut citer le


philosophe allemand Hegel (1770-1831) chez qui le positivisme étatique
trouve son expression la plus forte dans cette phrase : « Tout ce qui est
étatique est juridique et tout ce qui est juridique est étatique »1écrit-il.

Un autre nom mérite d’être cité lorsque on évoque l’école positiviste


juridique : il s’agit du juriste allemand Ihering (1818-1892) qui voyait dans
l’Etat la seule source de droit permettant d’arbitrer la lutte constante des
individus. Le positivisme étatique ou juridique a, également, été défendu
par Kelsen (1881-1973), ce juriste autrichien qui « en a donné une
présentation plus technique en établissant une pyramide des normes :
chaque norme se justifierait par sa conformité à la norme supérieure ».2

§ 2 – Le positivisme sociologique.
1
Citée par R. CABRILLAC, op.cit.p.20.
2
Voir R. CABRILLAC, op.cit.p.21.

22
Schématiquement, on peut dire que le positivisme sociologique voit
dans le droit un produit de la société. Par là, le positivisme sociologique se
distingue radicalement du positivisme juridique qui soutient – on l’a vu –
l’idée que la règle de droit procède uniquement de la volonté de l’Etat. En
d’autres termes, c’est la société qui se trouve à l’origine des normes
juridiques à travers ses coutumes, ses usages, ses mœurs et ses pratiques.1

Parmi les représentants du positivisme sociologique, on peut citer le


sociologue allemand Savigny (1779-1861) pour qui le droit est le produit
de l’histoire d’une nation ; il exprime l’âme de celle-ci.2

Lorsqu’on évoque le positivisme sociologique, on ne peut éviter de


citer le nom d’un grand sociologue français : il s’agit, bien évidemment,
d’Emile Durkheim (1858-1917) pour qui le droit est un fait de société qui
peut être observé.3Il ne découle pas de la volonté de l’Etat, mais de ce qu’il
appelle « la conscience collective du groupe social ».4

On peut également citer le juriste sociologue français Léon DUGUIT


(1859- 1928) qui a inventé ce qu’il a appelé « la masse des consciences
individuelles ». Pour DUGUIT, « une règle devient une règle juridique
lorsque cette masse des consciences individuelles est convaincue que la
règle en question est utile ou même indispensable pour préserver la
solidarité sociale ». L’autorité de la règle de droit procède, dans cette
vision, de l’adhésion des individus à la norme édictée et de leur sentiment
de sa nécessité.

Malgré l’originalité de sa pensée, Karl Marx (1818-1883) pourrait


être rattaché au courant positiviste sociologique. Certes, la règle de droit
1
Voir M. J. ESSAID, op.cit.p.70.
2
Voir à ce sujet R. CABRILLAC, op.cit.p.21 et P. COURBE, op.cit.p.11.
3
Voir P. COURBE, op.cit.p.11.
4
Voir M. J. ESSAID, op.cit.p.70.

23
est – pour le positivisme sociologique marxiste- un fait social, un produit
de la société, « mais d’une nature très particulière »1 - selon l’expression de
Jean Luc AUBERT. La règle de droit, ou le droit tout court, est – selon la
doctrine marxiste – un moyen par lequel la classe dirigeante impose sa
domination sur les autres classes sociales en assurant le maintien et la
perpétuation de ses privilèges. En d’autres termes, le droit est un
instrument qui permet à la classe dirigeante de servir ses intérêts et ses
privilèges. Le phénomène juridique ne peut donc- selon le positivisme
sociologique marxiste – exister que dans une société où existent des classes
qui s’affrontent. Mais cet affrontement disparaîtra avec l’avènement de ce
que le marxisme appelle la société communiste, la société sans classes. Et
l’avènement de la société communiste marquera – selon le positivisme
marxiste– le dépérissement de l’Etat et du droit. C’est logique –affirment
les marxistes –puisque l’existence du phénomène juridique est lié à
l’existence des sociétés de classes où la classe dominante utilise le droit
pour servir ses intérêts.

Les doctrines positivistes ont fait l’objet de nombreuses critiques.


Parmi ces critiques, nous pouvons citer quelques unes qui nous paraissent
les plus importantes.

Concernant le positivisme juridique, la critique la plus importante qui


lui a été adressée se résume dans le fait qu’il a « reconnu trop de pouvoirs à
l’Etat… Un Etat trop puissant ne risque-t-il pas de sacrifier l’individu et de
l’asservir » ?2

Quant au positivisme sociologique, on peut retenir deux critiques


fondamentales qui lui ont été adressées. D’abord, on reproche à ses
1
Jean Luc AUBERT, op.cit.p.15.
2
Voir M. J. ESSAID, op.cit.p.72.

24
partisans d’avoir utilisé des notions ambiguës et imprécises, comme la
notion de « conscience collective du groupe » employée par le sociologue
français Emile DURKHEIM, et la notion inventée par le juriste sociologue
Louis DUGUIT : « la masse des consciences individuelles ».

On reproche, également, au positivisme sociologique de donner une


place démesurée à la coutume et aux mœurs. Il ne voit dans la loi que le
reflet de ces mœurs en négligeant le rôle de l’Etat dans la création de la
règle de droit. « L’expérience révèle, en effet, que les pouvoirs publics se
décident parfois à introduire dans leur propre pays une législation
étrangère, des textes qui ont vu le jour dans un autre milieu social ».1

« De l’exposé des différentes doctrines positivistes et idéalistes, nous


retiendrons que le problème général du fondement du droit reste posé. A ce
jour, aucune théorie n’a pu lui apporter une solution satisfaisante ».2

1
M. J. ESSAID, op.cit.p.72.
2
M. J. ESSAID, op.cit.p.78.

25
Chapitre 3 – Classification des règles de droit.
La multiplicité et la diversité de l’activité humaine ont conduit au
développement et à la spécialisation du droit. Ce phénomène de
spécialisation du droit « ne doit pas pour autant – comme le fait remarquer
J. L. AUBERT– faire perdre de vue la cohérence interne du droit par-delà
toute division de celui-ci »1.

La division fondamentale du droit est celle qui oppose le droit privé


et le droit public.

Section 1 – Le droit privé.

On peut définir le droit privé comme étant l’ensemble des règles qui
régissent les rapports des individus entre eux ou avec les personnes
morales privées et les rapports de ces dernières entre elles, ainsi que les
rapports des individus et des personnes morales privées avec l’Etat qui
n’agit pas en tant que puissance publique.

Le droit privé comprend plusieurs branches dont les principales sont


les suivantes : le droit civil, le droit commercial, le droit international
privé.

§ 1 – Le droit civil.
1
J. L. AUBERT,Op.cit.p.17.

26
Le droit civil est, sans doute, la branche la plus importante du droit
privé. Il est « le tronc du droit privé »1 selon l’expression de Ph.
MALINVAUD, malgré les amputations subies depuis le début du XIX ème
siècle. Pendant longtemps, droit privé était synonyme de droit civil. Il
comprenait toutes les règles qui régissaient les rapports des particuliers
entre eux et leur vie privée. Mais à partir du XIX ème siècle, on assistait à
une parcellisation du droit civil. Malgré cette parcellisation, le droit civil
demeure- on l’a dit- la branche la plus importante du droit privé. « Il
demeure ce que l’on appelle le droit commun, c’est-à-dire, celui auquel on
se réfère lorsqu’on n’a pas à sa disposition une règle de droit plus
spécialisée ».2En d’autres termes, on qualifie le droit civil de droit commun
car on s’y réfère chaque fois qu’on est confronté à un problème qui n’est
pas prévu par une réglementation spécifique.

Aujourd’hui, on désigne par droit civil « l’ensemble des règles qui


gouvernent, outre l’individualisation de la personne, sujet de droit dans la
société (nom, domicile, état civil), les rapports les plus quotidiens de la vie
en société : la famille dans ses aspects extra-patrimoniaux (mariage,
divorce, filiation) comme dans ses conséquences patrimoniales (régimes
matrimoniaux, succession) ; la propriété et les divers droits dont l’individu
peut bénéficier à l’égard d’une chose ; les rapports d’obligation – créances
et dettes corrélatives – résultant du contrat ou de la responsabilité civile ».3

§ 2 – Le droit commercial.

On l’appelle plus volontiers aujourd’hui droit des affaires. On


désigne, généralement, par droit commercial, l’ensemble des règles
1
Ph. MALINVAUD, voir son livre intitulé : Introduction à l’étude du droit. Cadre juridique des
relations économiques, Litec, 7ème éd., 1995, p.65.
2
Ph. MALINVAUD, op.cit.p.65.
3
Voir J .L. AUBERT, op.cit.p.22.

27
juridiques applicables aux commerçants et régissant les actes de commerce
accomplis par toute personne.1

Le droit commercial est en perpétuel changement beaucoup plus que


le droit civil parce qu’il régit une matière assez dynamique.

§ 3 – Le droit international privé.

Le droit international privé est défini comme étant l’ensemble des


règles qui régissent les rapports entre particuliers, rapports qui comportent
un élément étranger. Le droit international privé comporte ainsi des règles
qui définissent les conditions d’acquisition de la nationalité pour les
étrangers, leur statut, les lois applicables et les juridictions compétentes.

Au Maroc, il existe plusieurs dahirs relatifs aux questions qui


relèvent du domaine de ce qu’on appelle le droit international privé. On
citera, à titre d’exemple, le dahir du 12 août 1913 qui détermine la
compétence juridictionnelle et le dahir du 6 septembre 1958 qui organise la
nationalité et définit le statut des étrangers pour ce qui concerne la
jouissance de leurs droits.2

Section 2 – Le droit public.

J. L. AUBERT définit le droit public comme étant l’ensemble des


« règles qui régissent l’Etat et les collectivités publiques ainsi que leurs
rapports avec les citoyens »3. Dans le même sens, Rémy CABRILLAC
propose cette définition : « Le droit public comprend traditionnellement
l’ensemble des règles qui, dans un Etat donné, président à l’organisation

1
Voir Ph. MALINVAUD, op. cit. p. 66 ; voir aussi Lexique des termes juridiques, Dalloz, 12 ème éd.
1999, p. 206.
2
Voir à ce sujet le livre de Driss FAKHOURI intitulé : Introduction à l’étude des sciences juridiques.
T. 1 : La théorie du droit, 2ème éd. Oujda, 1990, pp. 92-93.
3
J. L. AUBERT, Op.cit.p.17.

28
même de cet Etat et celles qui gouvernent les rapports de l’Etat et de ses
agents avec les particuliers ».1

Le droit public se subdivise en de nombreuses branches. Nous nous


bornerons à en définir les principales. Il s’agira du droit constitutionnel, du
droit administratif, du droit des finances publiques et du droit international
public.

§ 1 – Le droit constitutionnel.

Le droit constitutionnel est généralement défini comme étant


l’ensemble des règles qui définissent la forme de l’Etat, précisent la forme
du régime politique, les pouvoirs publics : leur constitution, leurs
compétences, les rapports entre eux et avec les citoyens, ainsi que les
différentes libertés et différents droits dont bénéficient les citoyens
collectivement et individuellement.

Les règles de droit constitutionnel ne peuvent, en aucun cas, être


contredites par une loi ordinaire sinon celle-ci sera inconstitutionnelle et
par conséquent nulle et non avenue.

§ 2 – Le droit administratif.

Le droit administratif englobe les règles relatives à l’organisation et


au fonctionnement des administrations publiques et des services publics,
ainsi qu à leurs rapports entre eux et avec les particuliers, mais en agissant
en tant que puissance publique.

§ 3 – Le droit des finances publiques.

Le droit des finances publiques rassemble l’ensemble des règles


relatives aux ressources et aux dépenses de l’Etat, des collectivités

1
J. L. AUBERT, Op.cit.p.54.

29
publiques et des services publics.1On appelle aussi le droit des finances
publiques le droit fiscal.

§ 4 – Le droit international public.

Le droit international public comprend les règles qui régissent les


rapports des Etats entre eux et leurs rapports avec les organisations
internationales, ainsi que les règles relatives à l’organisation, au
fonctionnement et aux compétences de celles-ci.

Le droit international public soulève – il faut le dire – le problème de


sa mise en application, surtout quand il s’agit de grandes puissances. Son
respect dépend de leur bon vouloir, de leur bonne volonté « au point que
l’on s’est parfois interrogé sur la réalité de l’existence de la règle de droit
en ce domaine ».2« Et s’il existe des tribunaux internationaux comme la
Cour Internationale de Justice, les décisions de ces tribunaux ne
s’appliquent que si l’Etat auquel elles s’adressent veut bien s’y
soumettre ».3

Section 3 – Les critères de distinction du droit public et du


droit privé.

On peut, généralement, dégager cinq critères essentiels de distinction


entre ces deux grandes branches de droit : le droit public et le droit privé.

1
Voir P. COURBE, op.cit.p.15.
2
J. L. AUBERT, op.cit.p.21.
3
M. KORRI-YOUSSOUFI et M. ELGHARBI, op.cit.p.24.

30
Le premier critère est relatif à leur finalité. Si le droit public a pour
objectif de satisfaire l’intérêt général, le droit privé se soucie de la
satisfaction des intérêts individuels.

Le deuxième critère est relatif à leur caractère. Les règles de droit


public sont des règles impératives auxquelles il n’est pas possible de
déroger, alors que les règles de droit privé insistent « sur la volonté
individuelle, les sujets de droit pouvant fréquemment en écarter
l’application ».1

Le troisième critère concerne les juridictions compétentes.


L’application des règles de droit public relève de la compétence des
juridictions administratives, alors que l’application du droit privé revient
aux juridictions ordinaires.

Le quatrième critère concerne l’objet de la règle de droit. Le droit


public régit l’Etat et les collectivités publiques ainsi que leurs rapports avec
les citoyens, tandis que le droit privé gouverne les rapports entre
particuliers.

Le cinquième critère a été résumé par J. L. AUBERT comme suit :


« tandis que l’administration est admise à exercerses droits directement
(pouvoir d’action d’office), le particulier ne peut exécuter les siens que
sous l’autorisation du juge ».2

La distinction entre droit public et droit privé a fait l’objet de


nombreuses critiques. Nous en retiendrons une qui paraît la plus
importante. On a, effectivement, reproché à cette distinction d’être
imprécise parce qu’il existe des branches intermédiaires ou mixtes.

1
Voir R. CABRILLAC, op.cit.p.54.
2
J. L. AUBERT, op.cit.p.17.

31
Section 4 – Les droits mixtes.

Les branches qu’on qualifie d’intermédiaires ou de mixtes sont les


suivantes :

§ 1 – Le droit pénal.

Le droit pénal englobe les règles qui déterminent les comportements


constitutifs d’infractions et les sanctions qui leur sont applicables.

Le droit pénal tend – on le dit souvent – à assurer le maintien de


l’ordre social. Et à ce titre, il peut être rattaché au droit public. Le droit
pénal peut être rattaché au droit privé lorsqu’il « protège les individus dans
leur vie, dans leur honneur et dans leur propriété ».1

§ 2 – La procédure civile.

La procédure civile détermine les règles selon lesquelles les


particuliers peuvent assurer la défense de leurs droits et précise celles
relatives à l’organisation et au fonctionnement des juridictions.

Certains juristes voient dans la procédure civile comme une branche


qui peut relever du droit public car- selon eux- elle détermine
l’organisation et le fonctionnement d’un service public, celui de la justice ;
et les jugements peuvent conduire à l’emploi de la force publique. D’autres
juristes y voient, au contraire, une matière de droit privé au motif que les
litiges sont résolus en application du droit privé et par les juridictions de
droit privé (les juridictions judiciaires).2

1
P. COURBE, op. cit. p. 16.
2
Voir à ce sujet Ph. MALINVAUD, op. cit.p.69 et P. COURBE, op. cit. p.17.

32
§ 3 – Le droit du travail.

Selon de nombreux auteurs, le droit de travail relève du droit privé


dans certains aspects, et du droit public dans certains d’autres.

Il est donc particulièrement claire que la distinction entre droit public


et droit privé est une opération tout à fait artificielle. Jean Luc AUBERT a
totalement raison d’écrire à ce propos ce qui suit : « Il serait faux (…) de
croire que droit public et droit privé constituent deux univers définis et clos
l’un par rapport à l’autre (…). Ces deux univers prétendument étrangers
sont étroitement liés l’un à l’autre et constituent deux aspects,
rigoureusement complémentaires, d’un même fait : le phénomène
juridique. Il serait dangereux de perdre de vue cette cohérence
fondamentale et d’admettre comme vérités d’évidence les divisions qu’on
assigne au droit et qui ne sont que commodités ».1

1
Jean Luc AUBERT,Op. cit.p.18.

33
Chapitre 4 – Les sources du droit.
Quand on évoque les sources du droit, on s’interroge seulement sur
le point de savoir comment, à l’époque actuelle, on procède à la création de
la règle de droit.

L’examen des sources du droit nous permet d’en distinguer deux


catégories : les sources directes et les sources indirectes.

Section 1 – Les sources directes.

Les sources directes de la règle de droit peuvent être internationales


ou nationales.

§ 1 – Les sources internationales de la règle de droit.

Quand on parle des sources internationales de la règle de droit on fait


allusion aux traités internationaux. On les appelle aussi conventions,
pactes, ou chartes.

On définit les traités internationaux comme accords conclus entre


Etats souverains et déterminant les règles applicables dans leurs rapports.

Selon le nombre des parties contractantes, on peut distinguer deux


types de traités : traités bilatéraux et traités multilatéraux.

34
Concernant les traités bilatéraux, ils sont conclus entre deux Etats.
Quant aux traités multilatéraux, ils sont conclus par plus de deux Etats,
comme, par exemple, la convention relative à la création de l’Organisation
Mondiale du Commerce (O.M.C).

Au Maroc, la signature et la ratification (acte qui fait naître


l’engagement de l’Etat) des conventions internationales relèvent de la
compétence du Roi. Mais l’article 55 de la Constitution de juillet 2011,
dans son alinéa 2dispose que certains traités être ratifiés qu’après avoir été
préalablement approuvés par le Parlement. Il s’agit des traités de paix,
d’union, de la délimitation des frontières, de commerce, de ceux qui
engagent les finances de l’Etat, des traités dont l’application nécessite des
mesures législatives et de ceux relatifs aux droits et libertés individuels et
collectifs des citoyennes et citoyens.

Le même article, dans son alinéa 4 précise que si la Cour


Constitutionnelle « déclare qu’un engagement international comporte une
disposition contraire à la Constitution, sa ratification ne peut intervenir
qu’après la révision de la Constitution ».

L’alinéa 3 de l’article 55 de la Constitution donne au Roi le droit de


soumettre au Parlement, s’il le veut, tout autre traité avant sa ratification.

Après sa ratification par le Monarque, le traité doit être publié au


Bulletin Officiel pour qu’il soit opposable aux parties contractantes.

Les traités régulièrement ratifiés et publiés ont –ils une autorité


supérieure à celle des lois en vigueur et / ou postérieures ? En d’autres
termes, les traités bénéficient – ils d’une suprématie par rapport à l’ordre
juridique interne ?

35
A ce propos, il ya deux lectures. La première lecture, c’est celle qui
considère que le Maroc admet le principe de la prééminence des
conventions internationales par rapport au droit interne en se fondant sur
les arguments suivants :

_ La souscription du Maroc à la Convention de Vienne relative au


droit des traités. Cette Convention consacre la primauté du droit
international sur le droit interne par le biais de l’article 26 qui explique que
« la règle « pacta sunt servanda » signifie que tout traité en vigueur lie les
parties et doit être exécuté par elles de bonne foi ».

_Toutes les constitutions marocaines, depuis la première constitution de


1962 jusqu’à la dernière adoptée le premier juillet 2011, affirment dans
leur préambule ce qui peut être considéré comme adoption du principe de
la primauté des traités internationaux sur la loi interne. Le préambule
stipule ceci : « Mesurant l’impératif de renforcer le rôle qui lui revient sur
la scène mondiale, le Royaume du Maroc, membre actif au sein des
organisations internationales, s’engage à souscrire aux principes, droits et
obligations énoncés dans leurs chartes et conventions respectives ».

_ Les constitutions de 1992, de 1996 et de 2011 mentionnent dans leur


préambule l’attachement du Maroc aux Droits de l’Homme tels qu’ils sont
universellement reconnus. Et depuis qu’il est affirmé dans ces constitutions
l’attachement du Royaume à ces droits, le Maroc n’a pas cessé
d’harmoniser le droit interne avec le dispositif international relatif à ces
derniers. Cet effort d’harmonisation est considéré comme preuve qui

36
témoigne que le Royaume admette le principe de prééminence des
conventions internationales par rapport à l’ordre juridique interne.

- Un autre argument est évoqué à l’appui de l’idée de la


suprématie des traités internationaux par rapport à la loi nationale. Cet
argument est fondé sur l’alinéa 4 de l’article 55 de la Constitution qui
précise que « Si la Cour Constitutionnelle, saisie par le Roi ou le Président
de la Chambre des Représentants ou le Président de la Chambre des
Conseillers ou le sixième des membres de la première Chambre ou le quart
des membres de la deuxième Chambre, déclare qu’un engagement
international comporte une disposition contraire à la Constitution, sa
ratification ne peut intervenir qu’après la révision de la Constitution ».

L’objectif de cette révision constitutionnelle, c’est de rendre la


Constitution conforme aux engagements internationaux du Royaume.
Rendre la Constitution conforme à ces engagements témoigne, selon
cette première lecture, de l’admission du Royaume du principe de la
primauté des conventions internationales sur le droit interne.

Voilà, grosso-modo, les arguments évoqués à l’appui de l’idée selon


laquelle le Maroc admet le principe de la suprématie des traités
internationaux par rapport à l’ordre juridique interne.

Mais il ya une autre lecture. C’est celle qui considère que la position
marocaine vis-à-vis du statut des conventions internationales par
rapport au droit interne, se caractérise par une certaine ambiguïté,
voire par une certaine contradiction. En effet, il est affirmé dans le
préambule de la Constitution que le Royaume  « accorde aux
conventions internationales dûment ratifiées par lui (…) la primauté
sur le droit interne du pays », mais à condition que ces conventions

37
soient conformes aux dispositions de la Constitution, aux lois du
Royaume et respectent son identité nationale immuable.

C’est une contradiction d’accorder, d’une part, aux conventions


internationales la primauté sur la loi nationale, et d’exiger, d’autre
part, la nécessité pour ces conventions d’être conformes à cette loi.

Le principe de la suprématie des traités internationaux par rapport au


droit interne du pays signifie que la mise en application de ces traités
s’impose même s’ils contiennent des dispositions contredisant la loi
interne. Dans ce cas, le législateur doit procéder à l’harmonisation de
cette loi avec les dispositions des conventions internationales.

§ 2 – Les sources nationales (ou internes)de la règle de droit.

Elles sont : la Constitution, la loi, le règlement et la coutume.

I- La Constitution.

La Constitution est le texte fondamental qui se situe au sommet de la


pyramide des normes. Toutes les autres règles juridiques doivent, en
conséquence, être conformes à ses dispositions sinon elles sont
inconstitutionnelles, donc inapplicables.

Comme nous l’avons précédemment mentionné, la Constitution


organise, dans le cadre de l’Etat, les différents pouvoirs publics, détermine
leurs compétences et les rapports qu’ils entretiennent entre eux, et définit
les droits et libertés des citoyens.

Le Royaume du Maroc a connu jusqu’à nos jours cinq constitutions.


La première constitution date de 1962. « Elle a fait l’objet d’une réforme »
en 1970, 1972, 1992, 1996 et pour la dernière fois en 2011.

II- La loi.

38
On entend par la loi, toute disposition émanant de l’autorité publique
investie du pouvoir législatif conformément à la Constitution du pays.

A - L’élaboration de la loi.

On entend par l’élaboration de la loi, les étapes par lesquelles celle-ci


doit passer avant d’être mise en application. Ces étapes sont les suivantes :
la proposition de loi, sa discussion, son vote, sa promulgation et sa
publication.

a- La proposition de loi.

La proposition de loi constitue la première étape de son élaboration.


Conformément à l’article 78 dela Constitution, la proposition des lois
revient au Chef du Gouvernement et aux parlementaires. « L’initiative des
lois appartient concurremment au Chef du Gouvernement et aux membres
du Parlement »-stipule-t-il.

Le texte de loi qui émane du Gouvernement et déposé par le Chef du


Gouvernement sur le bureau de l’une des deux Chambres parlementaires
est appelé projet de loi. On appelle proposition de loi, le texte qui émane
des parlementaires. La proposition de loi est un texte proposé soit à titre
individuel,soit à titre collectif dans le cadre notamment des activités des
groupes parlementaires.

On doit remarquer que l’initiative législative gouvernementale est


beaucoup plus importante que celle émanant du Parlement. Les statistiques,
à cet égard, sont éloquentes. On s’en tiendra seulement aux trois dernières
législatures. En effet, au cours de la législature 1997-2002 le Parlement a
adopté 176 projets de lois contre 20 propositions de lois seulement.

39
Concernant la législature2002-2007, elle a vu l’adoption de 217 projets de
lois contre 9 propositions de lois. S’agissant de la législature 2007 – 2011,
le Parlement a voté 150 projets de lois contre 14 propositions de lois.

Ce phénomène ne concerne pas uniquement notre pays. C’est un


phénomène général. Il concerne presque tous les Etats du monde. En
France et en Grande Bretagne, par exemple, plus de 90% de la production
législative émane du Gouvernement.

b- L’examen et le vote de la loi par le Parlement.

« Les projets de loi sont déposés en priorité sur le bureau de la


Chambre des Représentants. Toutefois, les projets de loi relatifs
notamment aux Collectivités territoriales, au développement régional et
aux affaires sociales sont déposés en priorité sur le bureau de la Chambre
des Conseillers ». (Alinéa 2 de l’article 78 de la Constitution).

Quant aux propositions de loi émanant des parlementaires, elles sont


déposées en priorité sur le bureau de la Chambre des Représentants si elles
proviennent des membres appartenant à cette Chambre ou déposées en
priorité sur le bureau de la Chambre des Conseillers si elles émanent des
membres de cette dernière. Conformément à l’article 80 de la Constitution
ces « projets et propositions de lois sont soumis pour examen aux
commissions dont l’activité se poursuit entre les sessions ».

Tout projet ou proposition de loi est envoyé pour examen devant


l’une de ces commissions qu’on qualifie de permanentes. Le choix de la
commission se fait « sur la base de sa spécialisation »1 ou, en d’autres
termes, selon l’objet du projet ou de proposition de loi. Si un projet de loi
1
M. BENYAHYA, op. cit. p.68.

40
concerne la presse, par exemple, ce texte sera envoyé devant la
commission de la justice, de la législation et des droits de l’homme.

La commission à laquelle est destiné le texte examine celui-ci d’une


manière détaillée, c’est-à-dire, elle l’examine article par article. Chaque
membre de la commission a le droit de présenter des amendements au
projet ou à la proposition de loi.

Il faut remarquer, par ailleurs, que lorsqu’il s’agit de la loi de


finances, les amendements formulés par les membres de la commission
parlementaire peuvent être irrecevables par le Gouvernement au cas où leur
adoption aurait pour conséquence soit une diminution des ressources
publiques, soit la création ou l’aggravation des charges publiques.

Une fois le texte est examiné au sein de la commission y compris les


amendements, bien entendu, on procède au vote. Après l’adoption par la
commission du texte, vient alors la deuxième phase, c’est celle de son
examen et son adoption au sein de la première Chambre saisie.

S’il est adopté par celle-ci, le texte sera transmis à l’autre Chambre
qui l’examinera à son tour selon les mêmes modalités.

Si la seconde Chambre adopte le texte sans modification, celui-ci est


définitivement adopté.

La Constitution a prévu le cas où les deux Chambres parlementaires


n’ont pas pu être d’accord sur un texte identique. C’est l’article 84, alinéa 2
qui en fait état. En effet, celui-ci stipule à ce propos : « La Chambre des
Représentants adopte en dernier ressort le texte examiné », en ajoutant : 
« Le vote ne peut avoir lieu qu’à la majorité absolue des membres présents,
lorsqu’il s’agit d’un texte concernant les collectivités territoriales et les
domaines afférents au développement régional et aux affaires sociales ». Il

41
faut remarquer, qu’à part ces domaines, la Constitution n’a exigé aucune
majorité.

Donner cet avantage à la Chambre des Représentants paraît assez


démocratique dans la mesure où la Chambre des Représentants est issu du
suffrage universel direct.

c- La promulgation de la loi.

La promulgation est l’une des attributions royales. L’article 50 dela


Constitution en est clair : « Le Roi promulgue la loi dans les trente jours
qui suivent la transmission au Gouvernement de la loi définitivement
adoptée ». La promulgation se fait par un Dahir qui doit être contresigné
par le Chef de Gouvernement. (Alinéa 4 de l’article 42 de la Constitution).
Le délai de promulgation court donc, d’après l’article 50 de la Constitution,
à partir de la date de transmission de la loi au Gouvernement et non pas à
compter du jour de l’adoption de cette loi par le Parlement, comme c’est le
cas dans certains pays. Il faut souligner qu’avant la révision
constitutionnelle de 1992, la Constitution ne prévoyait aucun délai de
promulgation. Il faut rappeler que la fixation du délai de la promulgation
était l’une des revendications formulées par les partis de l’Istiqlal et de
l’Union Socialiste des Forces Populaires dans leur mémorandum du 9
octobre 1991 envoyé au Roi Hassan II. Dans ce mémorandum, les deux
partis ont proposé 30 jours comme délai de promulgation de la loi à
compter de la date de son adoption par le Parlement.

La même revendication a été reprise dans le second mémorandum du


19 juin 1992 émanant des partis de la Koutla démocratique. On remarquera

42
que ces partis ont mis l’accent sur la nécessité de fixer un délai pour la
promulgation de la loi mais sans pour autant préciser ce délai,
contrairement à ce qu’a été fait dans le premier mémorandum. Cette
demande de fixation d’un délai pour la promulgation de la loi a été
introduite lors des révisions constitutionnelles de 1992, de 1996 et de
2011.

Pour le Professeur Abdelaziz LAMGHARI, « l’introduction de la


promulgation avec délai paraît, dans le contexte du système constitutionnel
marocain, apporter une touche plus visible dans le sens d’une monarchie
parlementaire…L’introduction de la promulgation non discrétionnaire dans
la Constitution marocaine…apporte aussi – ajoute l’auteur – un
changement au moins symbolique au niveau de l’ordonnancement
constitutionnel de la monarchie marocaine ».1

Il faut souligner que l’article 95 de la Constitution donne au Roi,


avant de promulguer la loi, la possibilité de demander aux Chambres
parlementaires une nouvelle lecture de celle-ci.

« La demande d’une nouvelle lecture est formulée par message. Cette
nouvelle lecture ne peut être refusée ». (Alinéa 2 de l’article 95 de la
Constitution).

Il convient de noter aussi que la loi ne peut être soumise au contrôle


constitutionnel qu’avant sa promulgation. Une fois promulguée, elle n’est
plus susceptible d’aucun contrôle. Généralement, le contrôle juridictionnel
a posteriori est exclu en raison, notamment, des risques qu’il comporte sur
la stabilité normative du pays. Toutefois, il existe deux cas où le contrôle

1
Abdelaziz LAMGHARI, voir son étude intitulée : « Les mémorandums constitutionnels. Perspectives
constitutionnelles du régime politique marocain », Publication de la Revue Marocaine
d’Administration Locale et de Développement, 1ère éd, 2001, pp.53-54.

43
peut viser un texte législatif déjà promulgué ou même ancien. Le premier
cas, c’est lorsqu’ une loi serait intervenue dans un domaine réservé au
pouvoir réglementaire. Ce texte peut être modifié par décret, mais après
avis conforme à la Cour Constitutionnelle. C’est ce que résulte de l’article
73 de l’actuelle Constitution.

Le second cas, c’est celui d’exception d’inconstitutionnalité soulevée


au cours d’un procès, lorsqu’il est soutenu par l’une des parties que la loi
dont dépend l’issue du litige, porte atteinte aux droits et libertés garantis
par la Constitution. (Art. 133 de la Constitution). C’est la Cour
constitutionnelle qui vérifiera si cette loi est inconstitutionnelle. Si la Cour
déclare inconstitutionnelle cette loi, celle-ci est abrogée à compter de la
date fixée dans sa décision. C’est ce qui ressort de l’article 134, alinéa 4.
En effet, celui-ci stipule :  « Une disposition déclarée inconstitutionnelle
sur le fondement de l’article 133 est abrogée à compter de la date fixée par
la Cour dans sa décision ».

Il faut remarquer que le contrôle par voie d’exception


d’inconstitutionnalité est limité aux seules lois susceptibles de porter
atteinte aux droits et libertés des citoyennes et des citoyens déjà garantis
par la Constitution.

« La promulgation ne concerne– constate le Professeur M. J.


ESSAID – que la Constitution et les lois votées par le Parlement »1. Cette
formalité de promulgation s’assigne un double objectif :

- « Constater que la loi a été régulièrement votée par le Parlement ;

- Ordonner l’exécution de cette loi ».2

1
M. J. ESSAID, op.cit.p.192.
2
M. J. ESSAID, op.cit. pp.192-193.

44
d- La publication de la loi.

Il ne suffit pas qu’une loi soit promulguée pour qu’elle soit


applicable. Il faut encore qu’elle soit publiée. On entend par publication le
fait que la loi soit portée à la connaissance des citoyens. Cette publication
est opérée au Bulletin Officiel. Une fois la loi est publiée, personne ne peut
désormais prétendre qu’il ignore l’existence de cette loi en application du
principe bien établi :« Nul n’est censé ignorer la loi ». Mais il faut
reconnaître que cette formalité reste fort artificielle car les citoyens, dans
leur majorité, ne peuvent accéder à la connaissance des lois surtout dans les
pays où le taux d’analphabétisme est élevé. S’il est assurément difficile de
se passer de cette formalité de publication, « du moins conviendrait-il de
rechercher des moyens plus efficaces d’information »1 - comme le suggère
le Professeur Jean-Luc AUBERT. Le moyen le plus efficace aujourd’hui
est sans doute la télévision.

B – L’application de la loi.

L’application de la loi devient obligatoire dés sa publication au


Bulletin Officiel.

IL convient de souligner que « la publication des règles juridiques au


Maroc n’a jamais fait l’objet d’une réglementation générale et précise, et
ce à l’inverse de ce qui est réservé à cette matière dans d’autres pays
comme la Tunisie, la France et la Jordanie ».2

C’est la jurisprudence de la Cour Suprême qui impose la publication


de la loi. Dés la publication de celle-ci, « nul n’est censé ignorer la loi ».
Cela veut dire, en d’autres termes, que personne ne peut prétendre qu’elle
ignore l’existence de la règle juridique pour éviter de s’y soumettre.
1
Jean-Luc AUBERT, Op. cit. p.42.
2
M. BENYAHYA, op.cit.p.87.

45
Il est difficile de ne pas partager l’idée exprimée par le Professeur
Mohammed BENYAHYA selon laquelle « la présomption de connaissance
du droit…est « une fiction de plus en plus fictive » dans la mesure –
explique – t –il – où notamment dans une société comme la nôtre, il est
bien illusoire de croire que le droit est connu de tous, alors qu’un marocain
sur deux (au moins) est analphabète ».1

« Le caractère illusoire de cette règle est d’ailleurs valable aussi pour
les sociétés développées où, en dépit du niveau de formation très élevé de
la population, il est difficile de connaître de manière satisfaisante un droit
de plus en plus compliqué et inflationniste ».2

Mais, malgré le fait qu’il est illusoire que la loi soit connue de tout le
monde, celle-ci doit s’imposer, et ce pour des raisons qui tiennent à la
stabilité sociale et à l’égalité de tous devant les règles de droit.

La mise en application de la règle juridique suscite deux questions :


celle de son application dans le temps et celle de sa mise en œuvre dans
l’espace.

a- L’application de la loi dans le temps.

Quand une matière est régie par deux lois : une ancienne et une autre
nouvelle, quelle loi sera – t – elle appliquée ? Il s’agit là du problème des
conflits de lois dans le temps. A ce propos, le Législateur marocain,
comme d’ailleurs les Législateurs des autres pays, « retient deux principes
qui semblent se compléter : le principe de la non- rétroactivité des lois
nouvelles et le principe de l’effet immédiat des lois nouvelles ».3

1- Le principe de la non-rétroactivité des lois nouvelles.


1
M. BENYAHYA, op.cit.p.89.
2
M. BENYAHYA, op.cit.p.89.
3
M. J. ESSAID, op.cit.pp.204-205.

46
Ce principe signifie qu’ « une loi ne doit pas être appliquée à des
actes ou à des faits qui se sont passés avant son entrée en vigueur, en vue
de modifier ou d’effacer les effets juridiques produits sous l’empire de la
loi ancienne ».1

Le principe de la non-rétroactivité des lois nouvelles a été adopté par


la Constitution qui indique clairement dans l’article 6, alinéa 4 que « La loi
ne peut avoir d’effet rétroactif ».

Mais il faut dire que ce principe n’est pas absolu. Il admet des
exceptions. Ces exceptions sont de trois sortes.

- Cas d’une loi interprétative.

Il est communément admis qu’une loi interprétative a effet rétroactif.


On entend par loi interprétative, la loi qui clarifie le sens ambigu de la loi
antérieure. Les lois interprétatives sont très rares. La rareté de ces lois vient
du fait que « l’interprétation est une attribution ordinaire des juridictions ou
de l’Administration publique. Mais dans certains cas, il arrive qu’une loi
soit tellement complexe ou obscure que sa mise en œuvre nécessite
l’intervention du législateur lui-même pour la rendre plus explicite. Il
prend à cet effet une loi interprétative qui n’est censée apporter aucune
règle nouvelle, et qui peut, par conséquent, s’appliquer rétroactivement à
compter de la date de publication de la loi interprétée ».2

- Cas d’une loi pénale plus favorable au condamné.

Lorsqu’une nouvelle loi pénale est plus douce et plus favorable au


condamné que celle sous laquelle l’infraction a été commise, le juge
appliquera cette nouvelle loi en faveur de l’inculpé.

1
P. COURBE, op.cit. pp. 53-54.
2
M. BENYAHYA, op.cit.p.92.

47
Plusieurs justifications ont été avancées pour fonder la rétroactivité
de la loi pénale. Parmi ces justifications, on peut citer le souci d’humanité ;
l’idée que la répression édictée par la loi ancienne était excessive
puisqu’abrogée ».1

Le principe de la rétroactivité de la loi pénale a été expressément


formulé par l’article 6 du Code pénal marocain. En voici
l’énoncé : « Lorsque plusieurs lois ont été en vigueur entre le moment où
l’infraction a été commise et le jugement définitif, la loi dont les
dispositions sont moins rigoureuses, doit recevoir application ».

Il est clair que, d’après l’énoncé de l’article 6 du Code pénal, cette


exception «ne joue que si le procès était en cours ou que le jugement
n’était pas encore définitif ».2

- Cas des lois de procédure.

Il s’agi là notamment des règles qui organisent le fonctionnement des


juridictions et précisent la procédure à suivre devant celles-ci. Ces
nouvelles règles peuvent s’appliquer dés leur publication, même aux actes
ou faits juridiques antérieurs et aux actions en justice ou procès en cours.

« La justification de la rétroactivité de ces lois est la nécessité d’une


meilleure organisation de la justice ».3

- La rétroactivité fondée sur l’intérêt général.

C’est l’une des décisions du Conseil Constitutionnel marocain qui en


a fait état. Il s’agit de sa décision no 467- 2001 du 31 décembre 2001. Cette
décision fait suite à la saisine de l’opposition issue des partis du Wifaq au
sein de la Chambre des représentants au sujet de certaines dispositions de
1
R. CABRILLAC, op.cit.113.
2
M. BENYAHYA, op.cit.p.92.
3
M. BENYAHYA, op.cit.p.92.

48
la loi de finances de l’année 2002 dont elle conteste leur constitutionnalité.
L’opposition considère, en effet, que ces dispositions sont
inconstitutionnelles dans la mesure où elles accordent « au profit des forces
armées royales une exonération des droits et taxes applicables à
l’importation des viandes de volailles, d’ovins et de bovins avec effet
rétroactif à partir du 1 janvier 1996 ».1

L’opposition conteste la rétroactivité prévue par la dite loi en


s’appuyant sur l’article 4 de la Constitution qui dispose que « La loi ne
peut avoir d’effet rétroactif ».

Que répond le Conseil Constitutionnel à cette contestation ? Il


répond en ces termes : « Le principe de rétroactivité des lois posé par
l’article 4 de la Constitution ne constitue pas une règle absolue, du fait des
exceptions qui y sont apportées dans le cadre de la loi de finances justifiées
par des critères sur lesquels se base le législateur pour régulariser des
situations exceptionnelles définies par l’administration dans un but
d’intérêt général ».2

Le Conseil Constitutionnel affirme donc que cette rétroactivité au


profit des forces armées royales est fondée sur l’intérêt général.

Cette décision constitue, pour plusieurs juristes, une grande entorse à


la Constitution. PourMohammed Amine BENABDALLAH, l’intérêt
général sur lequel le Conseil Constitutionnel a fondé sa décision « est une
notion vague et glissante qui serait de nature à tout permettre.. ».3

1
Omar BENDOUROU, Le Conseil constitutionnel et les droits fondamentaux, REMALD, no 56, Mai-
juin 2004, pp.28-29.
2
Cité par O. BENDOUROU, op.cit.p.29.
3
Mohammed Amine,voir son article « Le contrôle de la constitutionnalité des lois. Regards sur dix
années d’évolution, REMALD, mai- juin 2004, no 56, p.20.

49
Omar BENDOUROU, lui, qualifie cette décision de non-pertinente
et de curieuse dans la mesure où l’article 4 de la Constitution énonce que
« la loi ne peut avoir d’effet rétroactif ». La Constitution a – ajoute – t –il-
posé une règle absolue et interdit toute dérogation»1.

Pourquoi le Conseil Constitutionnel s’est dérogé à cette règle ? C’est


une question que se sont posés beaucoup de juristes et chacun d’eux a tenté
d’en trouver la réponse. La réponse qui semble être la plus convaincante
est celle qui a été fournie par le Professeur O. BENDOUROU.
« L’explication plausible à la décision du Conseil Constitutionnel – écrit –
il – peut être liée au statut des forces armées royales qui constituent au
Maroc une institution particulière, dotée de statut spécial au point qu’elle
peut être rangée dans la catégorie de ce que l’on appelle « les valeurs
sacrées », ce qui conduit à leur réserver un traitement privilégié, au
détriment même de la Constitution »2.

A cette loi de finances considérée par beaucoup de juristes comme


inconstitutionnelle, s’ajoutent d’autres lois qui sont- selon ces derniers-
elles aussi, contestables du point de vue constitutionnel. Ils citent, à titre
d’exemple, la loi du 28 mai 2003 relative à la lutte contre le terrorisme, et
la loi du 11 novembre 2003 relative à l’entrée et au séjour des étrangers au
Royaume du Maroc.

Le Professeur Omar BENDOUROU a fait remarquer que « dans


l’ensemble, ces lois ont fait l’objet d’un consensus entre parlementaires de
différentes sensibilités politiques, ce qui a conduit à exclure toute
contestation ».3 Pour remédier à cette situation certains juristes n’hésitent
pas à défendre l’idée « d’envisager une réforme du Conseil Constitutionnel
1
Omar BENDOUROU, op.cit.pp.28-29.
2
O. BENDOUROU, Op.cit.p.29.
3
O. BENDOUROU, Op.cit.p.37.

50
en vue de permettre aux citoyens intéressés de recourir à la justice en
soulevant l’exception d’inconstitutionnalité, ce qui permettrait de vérifier
la conformité des lois à la Constitution ».1 C’est l’opinion du
professeurOmar BENDOUROU.

Cette procédure est admise dans plusieurs pays, comme aux Etats-
Unis, par exemple. Dans ce pays, en effet, « tout citoyen est en mesure de
saisir, à tout moment, la Cour Suprême pour faire déclarer une loi contraire
à la Constitution ».2

2 – Le principe de l’effet immédiat des lois nouvelles.

Ce principe signifie qu’ « une loi nouvelle s’applique aux actes et


faits qui se produisent à compter de son entrée en vigueur ».3 En d’autres
termes, une loi nouvelle ne s’applique pas aux actes et faits commis sous
l’empire d’une loi ancienne. Une loi nouvelle n’a donc pas d’effet
rétroactif.

La doctrine évoque deux arguments que le Professeur M. J. ESSAID


qualifie d’incontestables, « pour justifier le principe de l’effet immédiat des
lois nouvelles :

- La loi nouvelle est présumée meilleure que la loi ancienne,


sinon le besoin de réforme ne se serait pas fait sentir ;

- Il faut assurer l’unité de législation, en évitant de faire coexister


la loi ancienne et la loi nouvelle ».4

b- L’application de la loi dans l’espace.

1
O. BENDOUROU, Op.cit.p.37.
2
M. J. ESSAID, op.cit.p.178.
3
P. COURBE, op.cit.p.54.
4
M. J. ESSAID, op.cit.p.214.

51
Le problème de l’application de la loi dans l’espace est complexe
dont on ne peut donner qu’un aperçu schématique.

En principe, la loi marocaine doit s’appliquer à toutes les situations


juridiques qui s’accomplissent sur le territoire national, sans qu’il y ait à
distinguer selon que ces faits ont été accomplis par des marocains ou par
des étrangers. C’est le principe de territorialité des lois. Mais ce principe
n’est pas absolu. Il admet quelques exceptions qu’on peut résumer comme
suit :

1- Certaines lois ne s’appliquent qu’aux nationaux. Ainsi en est-il


des lois relatives à certains droits et certains devoirs, comme les droits de
vote, d’éligibilité, d’accès à la fonction publique, le devoir d’accomplir le
service militaire ou civil, etc. Les lois relatives à ces droits et ces devoirs
ne concernent que les marocains.

2- Une deuxième exception qu’admet le principe de territorialité


des lois, et peut être la plus importante, concerne le statut personnel. Les
règles relatives au statut personnel s’appliquent aux marocains même
résidant à l’étranger. La loi marocaine admet aussi que soient appliquées
aux étrangers leurs lois nationales relatives à leur statut personnel. Ainsi
ces derniers « peuvent se marier, divorcer, liquider leurs successions
conformément à leur loi nationale, à condition, toutefois, que l’application
de cette loi ne soit pas contraire à l’ordre public marocain »1, comme par
exemple, le mariage entre deux personnes du même sexe admis dans
certains pays étrangers. Ce mariage ne peut être accepté ou toléré dans
notre pays.

1
M. BENYAHYA, op.cit.p.90.

52
3- A ces exceptions, on peut ajouter une autre, c’est celle qui
concerne les diplomates accrédités au Maroc. Ceux-ci sont soumis à leurs
lois nationales et à leurs juridictions.

Pour toutes ces exceptions on applique ce qu’on appelle « le principe


de la personnalité des lois ».

C – L’autorité de la loi.

La Constitution occupe le sommet de la pyramide des normes ; vient


ensuite la loi votée par le Parlement ; et en bas de la pyramide on trouve le
règlement. Conformément au principe de la hiérarchie des normes, la loi
doit être conforme aux dispositions de la Constitution, sinon elle est
considérée inconstitutionnelle, donc annulée. Il s’agit là du contrôle de la
constitutionnalité des lois.

C’est la Cour Constitutionnelle à laquelle est confiée la tâche de


vérifier si les lois votées par le Parlement sont ou non-conformes à la
Constitution. C’est une institution créée par la Constitution de 2011. Elle a
remplacé le Conseil Constitutionnel crée par la Constitution de 1992 et la
Constitution de 1996. Avant la création du Conseil Constitutionnel, c’était
la Chambre Constitutionnelle de la Cour Suprême qui était chargée de
cette tâche de vérifier la conformité ou la non-conformité des lois à la
Constitution et à laquelle« était justement reproché la modestie des
attributions, le manque d’envergure des ambitions et la timidité de la
jurisprudence, outre le manque de nuances dans la composition ».1

Vérifier si les lois votées par le Parlement sont ou non-conformes à


la Constitution n’est pas la seule tâche de la Cour Constitutionnelle. Outre
cette compétence fondamentale, elle contrôle la constitutionnalité du
1
Kh. NACIRI, op. cit. p.294.

53
règlement intérieur de chaque Chambre du Parlement avant sa mise en
application. (Alinéa 2 de l’article 132 de la Constitution). Elle statue aussi
sur la régularité de l’élection des membres du Parlement et des opérations
du référendum. (Alinéa 1 de l’art. 132). La Cour Constitutionnelle donne
également son avis conforme au Gouvernement pour modifier par décret
les textes pris en forme législative lorsqu’ils interviennent dans un domaine
règlementaire (article 73). A ces cas d’intervention de la Cour
Constitutionnelle, s’ajoutent son contrôle du fondement d’irrecevabilité
opposé par le Gouvernement à toute proposition ou amendement qu’il
estimerait excéder le domaine de la loi et son contrôle de la
constitutionnalité des engagements internationaux avant leur ratification
par le Roi.

Un dernier cas d’intervention de la Cour Constitutionnelle. C’est


l’article 133 de la Constitution qui en fait état. En effet, celui-ci précise
que : « La Cour Constitutionnelle est compétente pour connaître d’une
exception d’inconstitutionnalité soulevée au cours d’un procès, lorsqu’il est
soutenu par l’une des parties que la loi dont dépend l’issue du litige, porte
atteinte aux droits et libertés garantis par la Constitution ».

Une loi organique fixera les conditions et les modalités d’application


de cet article.

L’alinéa 4 de l’article 132 précise que la Cour Constitutionnelle


doit statuer sur la loi avant sa promulgation et le règlement de chaque
Chambre parlementaire avant sa mise en application dans le délai d’un
mois. Mais ce délai peut être réduit à huit jours à la demande du
Gouvernement si celui-ci estime qu’il y a urgence.

54
Il convient de souligner que les lois organiques et le règlement
intérieur de la Chambre des représentants et de celle des conseillers sont
soumis au contrôle automatique de la Cour Constitutionnelle. C’est une
différence de taille entre ce qu’on appelle les lois organiques et les lois
ordinaires. La Cour Constitutionnelle – on le sait – ne peut statuer sur la
conformité ou la non-conformité des lois ordinaires que s’il était saisie à
cet effet par le Roi ou par le Chef du Gouvernement ou par le Président de
la Chambre des représentants ou par le Président de la Chambre des
Conseillers ou par 1 /5 des membres de la Chambre des représentantsou
40 des membres de la Chambre des conseillers. C’est ce que précise
l’article 132, alinéa 3.

L’alinéa 2 de l’article 134 stipule que « Les décisions de la Cour


Constitutionnelle ne sont susceptibles d’aucun recours. Elles s’imposent
aux pouvoirs publics et à toutes les autorités administratives et
juridictionnelles ».

Il faut préciser, en outre, que « la saisine de la Cour Constitutionnelle


suspend le délai de promulgation » (alinéa 5 de l’art. 132).

Une remarque importante doit être faite : la Cour Constitutionnelle


n’est saisie que des lois ordinaires non encore promulguées. Le contrôle de
la constitutionnalité des lois s’effectue toujours à priori, jamais à posteriori.
Avec, toutefois, cette exception : le contrôle peut viser un texte législatif
déjà promulgué ou même ancien lorsque ce texte serait intervenu dans le
domaine règlementaire. Le texte en question peut être modifié par décret,
mais après avis conforme de la Cour Constitutionnelle. C’est l’article 73 de
la Constitution qui en fait état.

55
D - Le domaine de la loi.

On entend par le domaine de la loi, les matières dans lesquelles le


Parlement peut ou doit intervenir. On peut résumer ces matières comme
suit :

a- Les matières prévues dans l’article 71 de la Constitution.

L’article 71 de la Constitution de 2011 énumère un certain nombre


de domaines qui relèvent de la compétence du Parlement. Ces domaines
sont les suivants :

1- Les droits individuels et collectifs énumérés dans le préambule


et dans d’autres articles de la Constitution. Il s’agit là, bien évidemment,
des droits politiques, économiques et sociaux, tels que la liberté de circuler,
d’opinion, d’expression, de réunion, d’association, l’inviolabilité du
domicile, le droit à l’éducation, le droit au travail, le droit de grève, le droit
de propriété, ect…

2- Le statut de la famille et l’état civil.

3- Les principes et règles du système de santé.

4- Le régime des médias audio-visuels et de la presse sous toutes


ses formes.

5- L’amnistie.

6- La nationalité et la condition des étrangers.

7- La détermination des infractions et des peines qui leur sont


applicables, la procédure pénale, la procédure civile, l’organisation

56
judiciaire, le régime pénitentiaire et la création de nouvelles catégories de
juridictions.

8- Le statut général de la fonction publique et les garanties


fondamentales accordées aux fonctionnaires civils et militaires.

9- Le statut des services et forces de maintien de l’ordre.

10- Le régime des collectivités territoriales dont les principes de


délimitation de leur ressort territorial.

11- Le régime électoral des collectivités territoriales, dont les


principes du découpage des circonscriptions électorales.

12- Le régime fiscal et l’assiette, le taux et les modalités de


recouvrement des impôts et le régime des douanes.

13- Le régime juridique de l’émission de la monnaie et le statut de la


banque centrale

14- Le régime des obligations civiles et commerciales, le droit des


sociétés et des coopératives.

15- Les droits réels et les régimes des propriétés immobilières


publique, privée et collective.

16- Le régime des transports.

17- Les relations de travail, la sécurité sociale, les accidents de


travail et les maladies professionnelles.

18- Le régime des banques, des sociétés d’assurance et des


mutuelles.

19- Le régime des technologies de l’information et de la


communication.

57
20- L’urbanisme et l’aménagement du territoire.

21- Les règles relatives à la gestion de l’environnement, à la


protection des ressources naturelles et au développement durable.

22- Le régime des eaux et forêts et de la pêche.

23- La détermination des orientations et de l’organisation générale


de l’enseignement, de la recherche scientifique et de la formation
professionnelle.

24- La création des établissements publics et de toute autre personne


morale de droit public.

25- La nationalisation d’entreprises et le régime des privatisations.

26- Le vote des lois-cadres concernant les objectifs fondamentaux


de l’activité économique, sociale, environnementale et culturelle de l’Etat.

b- Les autres domaines de la loi.

Outre les domaines prévus dans l’article 71 de la Constitution, il y en


a d’autres dont font état d’autres articles de cette dernière. On peut les citer
comme suit :

1- La détermination des conditions de la conclusion des conventions


collectives de travail et des règles relatives à la constitution des
organisations syndicales, aux activités et aux critères d’octroi du
soutien financier de l’Etat, ainsi qu’aux modalités de contrôle de
leur financement. (Article 8).

2- La fixation des modalités d’exercice par les groupes de


l’opposition de leurs droits constitutionnels. Ces modalités
peuvent être aussi, selon les cas, fixées par les lois organiques ou

58
encore par le règlement intérieur de chaque Chambre du
Parlement. (Article 10).

3- La définition des règles garantissant aux candidats aux élections


l’accès équitable aux médias publics et le plein exercice des
libertés et droits fondamentaux liés aux campagnes électorales et
aux opérations de vote, ainsi que la définition des conditions et
modalités de l’observation indépendante et neutre des élections en
conformité avec les normes internationalement reconnues et des
sanctions applicables à toute atteinte aux dispositions et règles de
probité, de sincérité et de transparence des élections. (Article 11).

4- L’organisation de la contribution des associations de la société


civile et des organisations non gouvernementales à l’élaboration, à
la mise en œuvre et à l’évaluation des décisions et des projets des
institutions élues et des pouvoirs publics. (Art. 12).

5- La définition, pour les marocains résidant à l’étranger, des


critères spécifiques d’éligibilité et d’incompatibilité, ainsi que des
conditions et modalités de l’exercice effectif du droit de vote et de
candidature à partir des pays de résidence. (Art. 17).

6- La création des institutions consultatives et de bonne gouvernance


au sein desquelles les marocains résidant à l’étranger peuvent
participer. (Art. 18).

7- La détermination des conditions de participation des étrangers


résidant au Maroc aux élections locales et des conditions
d’extradition et d’octroi du droit d’asile. ‘Art. 30).

8- La limitation de l’étendue et de l’exercice du droit de propriété si


les exigences du développement économique et social du pays le

59
nécessitent, ainsi que l’expropriation dans les cas et les formes
prévus par la loi. (Art. 35).

9- L’approbation préalable par le parlement, avant leur ratification


par le Roi, des traités de paix, d’union, des traités relatifs à la
délimitation des frontières, de commerce, des traités engageant les
finances de l’Etat ou dont l’application nécessite des mesures
législatives et des traités relatifs aux droits et libertés des
citoyennes et citoyens. (Art. 55). Le même article, dans son alinéa
3, donne au Roi la possibilité de soumettre au Parlement tout autre
traité avant sa ratification.

10- La prorogation de l’état de siège. On sait que le Roi peut-


conformément à l’article 74 de la Constitution- déclarer l’état de
siège pour une durée de 30 jours. Mais la prorogation de cette
durée fait partie du domaine de la loi. (Art. 74).

11- Le vote de la loi de finances.

C’est l’article 75 qui en fait état. Il précise que « Le Parlement


vote la loi de finances, déposée par priorité devant la Chambre
des Représentants, dans les conditions prévues par une loi
organique ».

La présentation de la loi de finances, au début de chaque session


de l’automne, est une occasion importante qui permet aux
parlementaires – les représentants de la nation – de débattre sur la
politique gouvernementale poursuivie dans différents domaines.
Mais il faut remarquer que la Constitution a émis de sérieuses
restrictions relatives à la discussion budgétaire. Ainsi,
conformément à l’article 77, « Le gouvernement peut opposer, de

60
manière motivée, l’irrecevabilité à toute proposition ou
amendement formulés par les membres du Parlement lorsque leur
adoption aurait pour conséquence, par rapport à la loi de finances,
soit une diminution des ressources publiques, soit la création ou
l’aggravation des charges publiques ».

12- La détermination de la procédure relative à la responsabilité


des membres du gouvernement pour les crimes et délits commis
dans l’exercice de leurs fonctions. (Art. 94).

13- La création des juridictions ordinaires ou spécialisées. (Art.


127).

14- La création des collectivités territoriales.

L’article 135 de la Constitution précise clairement que la création des


collectivités territoriales émane de la loi. « Les collectivités territoriales du
Royaume sont – dispose-t-il –les régions, les préfectures, les provinces et
les communes (…) Toute autre collectivité territoriale est créée par la loi,
le cas échéant, en substitution d’une ou plusieurs collectivités
mentionnées » ci-dessus.

15 – La détermination de la composition, de l’organisation, des


attributions et des modalités de fonctionnement de la Cour des Comptes et
des Cours régionales des comptes. (Art. 150).

16 – La création des instances de régulation et de la bonne


gouvernance. (Art. 159).

17 – La détermination de la composition, de l’organisation, des


attributions et des règles de fonctionnement des institutions et instances
prévues aux articles 160 à 170 de la Constitution. I l s’agit du Conseil

61
national des droits de l’homme, du Médiateur, du Conseil de la
communauté marocaine à l’étranger, de l’Autorité chargée de la parité et
de la lutte contre toutes formes de discrimination, de la Haute autorité de la
communication audiovisuelle, du Conseil de la concurrence, de l’Instance
nationale de probité, de la prévention et de la lutte contre la corruption, du
Conseil du Conseil supérieur de l’éducation, de la formation et de la
recherche scientifique, du Conseil consultatif de la famille et de l’enfance
et du Conseil de la jeunesse et de l’action associative.

18 – La révision constitutionnelle. C’est une compétence que partage


le Parlement avec le Roi et le Chef du Gouvernement. Selon l’article 173
de l’actuelle Constitution, la proposition de révision constitutionnelle ne
peut être adoptée que par un vote à la majorité des 2/3 des membres qui
composent chaque Chambre parlementaire. La révision de la Constitution
n’est définitive qu’après avoir été adoptée par voie de référendum. (Art.
174).

19 - Les lois organiques.

Relèvent également de la compétence du Parlement les lois


organiques. Ces lois sont prévues par la Constitution et ont pour objet de
fixer les conditions et les modalités d’application de certaines dispositions
constitutionnelles qui concernent essentiellement le fonctionnement de
quelques institutions constitutionnelles. Il s’agit donc de matières
particulièrement importantes visées expressément à titre limitatif par la
Constitution. Les lois organiques ont évidemment une force juridique
supérieur à celle des lois ordinaires ; par conséquent seraient

62
inconstitutionnelles les lois ordinaires non conformes aux lois organiques.
On peut citer ces lois organiques comme suit :

- La loi organique qui définit le processus de mise en œuvre du


caractère officiel de la langue amazighe, ainsi que les modalités de son
intégration dans l’enseignement et aux domaines prioritaires de la vie
publique, et ce afin de lui permettre de remplir à terme sa fonction de
langue officielle. (Art. 5 de la Constitution, alinéa 3).

- La loi organique qui détermine la composition du Conseil national


des langues et de la culture marocaine, les modalités de son
fonctionnement et ses attributions.

Ce Conseil regroupe l’ensemble des institutions concernées par ces


domaines, comme l’Institut royal de la culture amazighe…Il a pour tâche
principale, la protection et le développement des langue arabe et amazighe
et des diverses expressions culturelles marocaines. (Art. 5, alinéas 5 et 6).

- La loi organique qui définit les règles relatives à la constitution des


partis politiques, à leurs activités, aux critères d’octroi du soutien financier
de l’Etat et aux modalités de contrôles de leur financement. (Art. 7, alinéa
7).

- La loi organique qui fixe les conditions et les modalités d’exercice


par les citoyennes et les citoyens, du droit de présenter des motivations en
matière législative. (Art. 14).

- La loi organique qui détermine les conditions et les modalités


d’exercice par les citoyennes et les citoyens du droit de présenter des
pétitions aux pouvoirs publics. (Art. 15).

63
- La loi organique qui précise les conditions et les formes dans
lesquelles le droit de grève peut s’exercer. (Art. 29).

- La loi organique qui fixe les règles de fonctionnement du Conseil


de Régence. Ainsi, l’article 44 de la Constitution, alinéa 3 précise : «  Les
règles de fonctionnement du Conseil de Régence sont fixées par une loi
organique ».

Le Conseil de Régence exerce les pouvoirs et les droits


constitutionnels de la Couronne pendant que le Roi est mineur, sauf ceux
relatifs à la révision de la constitution. Le roi est mineur jusqu’à 18 ans
accomplis. De 18 ans à 20 ans, le Conseil de Régence fonctionnera comme
organe consultatif auprès du Roi.

Le Conseil de Régence est composé du Président de la Cour


Constitutionnelle dont il est nommé Président, du Chef du Gouvernement,
du Président de la Chambre des Représentants, du Président de la Chambre
des Conseillers, du Président-délégué du Conseil Supérieur du Pouvoir
Judiciaire, du Secrétaire Général du Conseil Supérieur des Oulémas et de
dix personnalités désignées par le Roi intuitu personae.

- La loi organique qui fixe la liste des établissements et entreprises


stratégiques. (Art. 49).

- La loi organique qui fixe le nombre des membres de la Chambre


des Représentants, le régime électoral, les principes du découpage
électoral, les conditions d’éligibilité, le régime des incompatibilités, les
règles de limitation du cumul de mandats et l’organisation du contentieux
électoral. (Art. 62, alinéa 2).

64
- La loi organique qui définit le nombre des membres de la Chambre
des Conseillers, leur régime électoral, le nombre de ceux à élire par chacun
des collèges électoraux, la répartition des sièges par région, les conditions
d’éligibilité, le régime des incompatibilités, les règles de limitation du
cumul de mandats, ainsi que l’organisation du contentieux électoral. (Art.
63, alinéa 2).

- La loi organique qui détermine les modalités de fonctionnement des


Commissions d’enquête. (Art. 67).

Ces Commissions d’enquête peuvent être créées à l’initiative du Roi


ou à la demande du tiers des membres de la Chambre des Représentants,
ou du tiers des membres de la Chambre des Conseillers, au sein de chacune
des deux Chambres.

Les Commissions d’enquête ont pour objectif de recueillir les


éléments d’information sur des faits déterminés ou sur la gestion des
services, entreprises et établissements publics et soumettre leurs
conclusions à la Chambre qui les a créées.

L’alinéa 3 de l’article 67 de la Constitution précise qu’ « il ne peut


être crée de Commission d’enquête lorsque les faits ont donné lieu à des
poursuites judiciaires et aussi longtemps que ces poursuites sont en cours.
Si une Commission a déjà été créée, sa mission prend fin dés l’ouverture
d’une information judiciaire relative aux faits qui ont motivé sa création ».

La mission des Commissions d’enquête prend fin par le dépôt de leur


rapport auprès du Bureau de la Chambre parlementaire qui les a créées et,
le cas échéant, par la saisine de la Justice par le Président de la dite
Chambre.

65
- La loi organique qui fixe les conditions de vote de la loi de finances.
(Art. 75).

- La loi organique qui définit les règles relatives à l’organisation et la


conduite des travaux du gouvernement, et au statut de ses membres.
Cette loi organique détermine également les cas d’incompatibilités
avec la fonction gouvernementale, les règles relatives à la limitation
du cumul des fonctions et celles régissant l’expédition des affaires
courantes par le gouvernement dont il a été mis fin aux fonctions.
(Art. 87).

- La loi organique qui définit le statut des magistrats. (Art. 112).

- La loi organique qui détermine les modalités d’élection du Conseil


Supérieur du pouvoir Judiciaire, son organisation et son
fonctionnement, ainsi que les critères relatifs à la gestion de la
carrière des magistrats et les règles de la procédure disciplinaire.
(Art. 116).

- La loi organique qui précise les règles d’organisation de la Cour


Constitutionnelle, de son fonctionnement, la procédure qui est suivie
devant elle, la situation de ses membres, les fonctions incompatibles,
dont notamment, celles relatives aux professions libérales, ainsi que
les conditions des deux premiers renouvellements triennaux et les
modalités de remplacement des membres empêchés, démissionnaires
ou décédés en cours de mandat. (Art. 131).

- La loi organique qui fixe les conditions de gestion démocratique des


affaires des régions et des autres collectivités territoriales, le nombre
des membres de leurs Conseils, les règles relatives à l’éligibilité, aux
incompatibilités et aux cas d’interdiction du cumul de mandats, le

66
régime électoral et les dispositions visant à assurer une meilleure
participation des femmes au sein de ces Conseils. Cette loi organique
fixe également les conditions d’exécution des délibérations et des
décisions des collectivités territoriales, les conditions d’exercice par
les citoyennes et les citoyens et les associations du droit de pétition
en vue de demander l’inscription à l’ordre du jour des Conseils des
collectivités territoriales d’une question relevant de leurs
compétences, les compétences propres à ces dernières, les
compétences partagées avec l’Etat et celles qui leur sont transférées,
leur régime financier, l’origine de leurs ressources financières, les
ressources et les modalités de fonctionnement des fonds de mise à
niveau sociale et de solidarité interrégionale, les conditions et les
modalités de constitution des groupements en vue de mutualisation
des programmes et des moyens, les dispositions favorisant le
développement de l’intercommunalité et les mécanismes destinés à
assurer l’adaptation de l’organisation territoriale dans ce sens, ainsi
que les règles de gouvernance relatives au bon fonctionnement de la
libre administration, au contrôle de la gestion des fonds et
programmes, à l’évaluation des actions et à la reddition des comptes.
(Art. 146).

- Une dernière loi organique, c’est celle qui détermine la composition,


l’organisation, les attributions et les modalités de fonctionnement du
Conseil économique, social et environnemental (art. 153) dont lerôle
est défini par l’article 152 qui stipule : « Le Conseil économique

67
social et environnemental peut être consulté par le gouvernement,
par la Chambre des Représentants et par la Chambre des Conseillers
sur toutes les questions à caractère économique, social et
environnemental

Il donne son avis sur les orientations générales de l’économie


nationale et du développement durable ».

Il faut souligner que les lois organiques se distinguent des lois


ordinaires en ce que :

- Les projets ou propositions de lois organiques ne sont soumis à


délibération et au vote de la première chambre parlementaire saisie qu’à
l’issue d’un délai de 10 jours après leur dépôt.

- Les lois organiques ne peuvent être promulguées qu’après que la


Cour Constitutionnelle se soit prononcé sur leur conformité à la
Constitution.Quant aux lois ordinaires, la CourConstitutionnelle
n’intervient que si elle est saisie par le Roi ou le Chef du Gouvernement
ou le Président de la Chambre des Représentants ou le Président de la
Chambre des Conseillers ou le cinquième des membres de la Chambre
des Représentants ou quarante membres des la Chambre des Conseillers.
« La Cour devra conclure alors à la conformité de la loi à la Constitution
ou à la non-conformité ».

« Les lois organiques ayant pour fonction de compléter


ponctuellement la Constitution, la spécificité du régime se comprend
aisément »1 a pu remarquer le Professeur Khalid NACIRI.
1
Khalid NACIRI,voir sa contribution intitulée « La loi et le règlement dans la Constitution » publiée
dans un ouvrage collectif sous le titre  « Trente années de vie constitutionnelle au Maroc » dirigé par
D. BASRI, M. ROUSSET et G. VEDEL, LGDJ, Paris, 1993, p.272.

68
Les projets et propositions de lois organiques ne sont définitivement adoptés qu’après avoir
été votés, dans des termes identiques, par les deux Chambres.
Si les deux Chambres n’ont pu être d’accord sur un texte de loi organique identique, il revient
– conformément à l’article 85 de la Constitution – à la Chambre des Représentants de
l’adopter en dernier ressort à la majorité absolue des membres présents de cette Chambre.
Néanmoins, lorsqu’il s’agit d’un texte relatif à la Chambre des Conseillers ou concernant les
collectivités territoriales ou les affaires sociales, le vote a lieu à la majorité des membres de la
Chambre des Représentants.

Il faut remarquerque les Constitutions marocaines, depuis la


Constitution de 1962 jusqu’à celle de 1996, n’ont pas fixé de
délai au cours duquel les lois organiques devraient être
soumises pour approbation au Parlement. Seule la
Constitution de 2011 en a fixé un délai. Ainsi l’article 86 de
cette dernière stipule : « Les lois organiques prévues par la
présente Constitution doivent avoir été soumises pour
approbation au Parlement dans un délai n’excédant pas la
durée de la première législature suivant la promulgation de la
dite Constitution ».
Toutes les lois organiques dont fait état la Constitution de
2011doivent, donc, voir le jour au cours de la législature 2011
– 2016.

4- L’approbation préalable par le Parlement d’un certain nombre de


traités internationaux avant leur ratification par le Roi. C’est l’article
55 de la Constitution qui en fait état. Il s’agit des traités de paix,
d’union, de la délimitation des frontières, de commerce, de ceux qui
engagent les finances de l’Etat, des traités dont l’application
nécessite des mesures législatives et de ceux relatifs aux droits et
libertés individuels et collectifs des citoyennes et citoyens.

L’alinéa 3 du même article donne au Roi le droit de soumettre au


Parlement, s’il le veut, tout autre traité avant sa ratification.

69
5- La révision constitutionnelle. C’est une compétence que partage le
Parlement avec le Roi et le Chef du Gouvernement. Selon l’article 173 de
l’actuelle Constitution, la proposition de révision constitutionnelle ne peut
être adoptée que par un vote à la majorité des 2/3 des membres qui
composent les deux chambres parlementaires. La révision de la
Constitution n’est définitive qu’après avoir été adoptée par voie de
référendum. (Art. 174).

Tel est, dans sa variété, le domaine de la loi.

Le Parlement doit impérativement respecter le domaine de son


action. S’il « veut outrepasser ses attributions législatives »1, « le
Gouvernement peut opposer l’irrecevabilité à toute proposition ou
amendement qui n’est pas du domaine de la loi. « En cas de désaccord, la
Cours Constitutionnelle statue dans un délai de huit jours à la demande du
Président de l’une ou l’autre Chambre du Parlement ou du Chef du
Gouvernement ». (Art 79). Cette faculté d’ « opposer l’irrecevabilité à
toute proposition ou amendement qui ne relève pas de la compétence
parlementaire, est une procédure que le Professeur M.J.ESSAID qualifie
d’efficace car elle «donne au pouvoir exécutif le moyen de contrecarrer
tout débordement sur son domaine réglementaire ».2

Il convient de noter que la Constitution n’a envisagé que l’hypothèse


de l’empiètement du domaine réglementaire par le Législateur. Que se
passera – t- il – si c’est le Gouvernement qui empiète sur le domaine de la
loi ? La Constitution ne prévoit aucune technique procédurale qui permet
au Législateur de défendre son domaine contre les empiètements du
1
Mohamed KORRI-YOUSSOUFI et Mustapha ELGHARBI, op.cit, p. 40.
2
M. J. ESSAID, Op. cit. pp.175-176.

70
pouvoir exécutif. La seule possibilité dont Il dispose, c’est de saisir le
Conseil constitutionnel.

c- La création législative non parlementaire.

La loi relève- on l’a dit- de la compétence du Parlement. L’article 70


de l’actuelle Constitution en est très claire : « Le Parlement exerce le
pouvoir législatif. Il vote les lois »- stipule-t-il. Mais « ce principe n’est pas
absolu. Il subit un certain nombre d’exceptions ».1 En effet, il y a plusieurs
cas où la loi peut être adoptée par un autre organe que le Parlement. On fait
ici allusion au Gouvernement mais aussi au Roi. Quels sont donc ces cas
où la loi échappe au Parlement ? Ces cas sont les suivants :

1- Le cas de la délégation législative régie par l’article 70 de la


Constitution. En effet, celui-ci dispose qu’  « une loi d’habilitation peut
autoriser le Gouvernement, pendant un délai limité et en vue d’un objectif
déterminé, à prendre, par décret, des mesures qui sont normalement du
domaine de la loi. Les décrets entrent en vigueur dés leur publication, mais
ils doivent être soumis, au terme du délai fixé par la loi d’habilitation, à la
ratification du Parlement ». Le dessaisissement du Parlement est relatif
puisqu’il doit ratifier les décrets à l’expiration du délai qu’il a fixé.

Cette technique de délégation législative est empruntée à la


Constitution française de 1958.

La délégation du pouvoir de légiférer au Gouvernement trouve sa


concrétisation parfaite dans la fameuse loi no 39-89 qui a autorisé le
Gouvernement à procéder au transfert d’entreprises publiques au secteur
privé. Cette loi a fixé un délai de six mois à compter de la date de sa
publication au Bulletin Officiel au cours desquels le Gouvernement doit
1
Mohamed Jalal ESSAID, op.cit.p.153.

71
prendre par décrets un certain nombre de mesures législatives qui
concerneront ce transfert telles que « les règles d’évaluation du patrimoine
transféré et de détermination du prix d’offre ; la composition et les
pouvoirs de l’organisme chargé de cette évaluation ; les modalités
permettant d’assurer une priorité ou un traitement avantageux à certains
acquéreurs éventuels, compte tenu des objectifs fixés (promotion de
nouvelles catégories sociales, développement des économies régionales et
sauvegarde d’emploi ) ».1

Ces différentes mesures ont été prises par le Gouvernement sous


forme de décrets. L’article 5 de la loi no 39-89 relative à la privatisation
précise que ces décrets doivent être ratifiés par la Chambre des
Représentants « dans un délai d’un an à compter de la date de publication
du dernier d’entre eux au Bulletin Officiel ».

2- Un deuxième cas où la loi émane du Gouvernement. C’est


l’article 81 de la Constitution qui en fait état. En effet, celui-ci précise que
« le Gouvernement peut prendre, dans l’intervalle des sessions, avec
l’accord des commissions concernées des deux Chambres, des décrets-lois
qui doivent être, au cours de la session ordinaire suivante du Parlement,
soumis à ratification de celui-ci ».

Le contrôle parlementaire est toujours là. Les décrets-lois que peut


prendre le Gouvernement dans l’intervalle des sessions parlementaires
devront impérativement être ratifiés par le Parlement au cours de sa session
ordinaire suivante. Avant même d’arriver à ce stade, l’article 81 de la
Constitution précise d’une manière claire que « les décrets-lois ne peuvent
être pris qu’avec l’accord des commissions parlementaires intéressées ».2
1
M. J. ESSAID, op.cit.p.154.
2
M. J. ESSAID, op. cit. p.155.

72
Cette procédure est rarement utilisée. Elle a « l’avantage aux yeux de
l’exécutif de lui épargner de fastidieux débats parlementaires. Comme ce
fut le cas pour le décret-loi du 8 octobre 1980 sur les loyers ».1Et le décret-
loi du 23 septembre 1994 portant création de l’Agence de logements et
d’équipements militaires.

Les projets de décrets-lois sont examinés successivement par les


commissions intéressées des deux Chambres parlementaires afin de
parvenir à une décision commune dans un délai de 6 jours. A défaut, la
décision est prise par la commission concernée de la Chambre des
Représentants.

3- La Constitution fait état d’une autre situation où la loi échappe au


Parlement. Il s’agit du cas de la dissolution, par le Roi, par dahir, des
deux Chambres parlementaires ou de l’une d’elles seulement(art.96).
L’article 97 de la Constitution dispose que « l’élection du nouveau
Parlement ou de la nouvelle Chambre intervient deux mois, au plus
tard, après la dissolution ».

La Constitution de 2011 ne dit rien et reste muette sur l’autorité qui


devrait, entre-temps, exercer les pouvoirs dévolus au parlement en
matière législative. Les Constitutions antérieures confient clairement le
pouvoir législatif au Monarque. Ainsi, par exemple, l’alinéa 2 de
l’article 72 de la Constitution de 1996 stiple : « Le Roi exerce entre-
temps, outre les pouvoirs qui lui sont reconnus par la présente
Constitution, ceux dévolus au Parlement en matière législative ».
1
Kh. NACIRI, op. cit. pp.277et 278.

73
Mais malgré que la Constitution de 2011 ne contienne aucune
disposition claire à ce propos, on peut dire que c’est le Roi qui devrait
exercer le pouvoir législatif en l’absence de l’institution législative, car
le Roi est – selon l’article 42 de la nouvelle Constitution – « le
Représentant suprême de l’Etat et le Garant de sa pérennité et de sa
continuité ». La continuité de l’Etat exigeant la continuité du pouvoir
législatif, et l’institution législative étant absente, c’est le Roi, garant
de la continuité de l’Etat, qui détiendra ce pouvoir.

4- Un autre cas doit également être cité « parmi la


nomenclature des lois n’émanant pas du Parlement ».1 Il
s’agit du cas particulier prévu par l’article 75 de la
Constitution qui précise que « Si, à la fin de l’année
budgétaire, la loi de finances n’est pas votée ou n’est pas
promulguée en raison de sa soumission à la Cour
Constitutionnelle en application de l’article 132 de la
présente Constitution, le Gouvernement ouvre, par décret,
les crédits nécessaires à la marche des services publics et à
l’exercice de leur mission, en fonction des propositions
budgétaires soumises à approbation… ».

Cette intervention gouvernementale se justifie par le risque que


recèle le fait de ne pas disposer d’une loi de finances, définitivement votée
et promulguée à la fin de l’année budgétaire, ce qui peut perturber le
déroulement normal de l’activité financière de l’Etat. 2

Kh. NACIRI, op. cit. p.278.


1

M’faddel SMIRES, De l’exercice extra-parlementaire de la fonction législative, REMALD,


2

Septembre-octobre, no 40, 2001, pp.75-76.

74
Ce retard peut être dû à la défaillance du Parlement qui n’est pas
parvenu à se prononcer sur le projet de loi de finances dans les délais
impartis (30 jours après son dépôt).

Le retard peut également dû au Gouvernement qui n’a pas déposé en


temps utile le projet de loi de finances sur le bureau des assemblées. Les
parlementaires risquent fort bien de ne pas pouvoir être en mesure de se
prononcer sur le dit projet avant le 31 décembre de l’année d’exécution. 1

Le retard peut aussi provenir du fait de la saisine de la Cour


constitutionnelle pour statuer sur la conformité ou la non-conformité de la
loi de finances aux dispositions de la Constitution.

« Dans tous les cas, le Gouvernement, conformément aux conditions


posées par l’article 75 de la Constitution « ouvre, par décret, les crédits
nécessaires à la marche des services publics et l’exercice de leur mission,
en fonction des propositions budgétaires soumises à approbation ».

Ce décret peut être assimilé aux décrets-lois susvisés. Cependant il


n’est pas soumis à la ratification du Parlement ».2

4- Un dernier cas doit aussi être cité parmi la nomenclature des lois
n’étant pas l’œuvre du Parlement. Il s’agit du cas prévu par l’article 14
de la Constitution qui donne aux citoyens le droit de présenter des
motions en matière législative. L’article en question stipule, en effet,
que « les citoyennes et les citoyens disposent, dans les conditions et
selon les modalités fixées par une loi organique, du droit de présenter
des motivations (ou motions) en matière législative ».

1
M. SMIRES, op.cit. p.78.
2
M. BENYAHYA, op. cit. p.73.

75
En application de l’article 14 de la Constitution, une loi organique n°
64-14 a été promulguée par Dahir n°1-16-108 du 28 juillet 2016, et
publiée au Bulletin Officiel le 18 août 2016.

La loi organique a précisé dans l’article 2 le sens de la motion en


matière législative comme  « toute initiative présentée par des
citoyennes et des citoyens dans le but de participer à la vie
législative ».

Pour que la motion soit recevable, elle doit remplir certaines conditions
qu’on peut énumérer comme suit :

1- Les citoyennes et les citoyens qui ont pris l’initiative d’élaborer la


motion et ceux et celles qui ont exprimé leur appui à cette motion,
doivent jouir de leurs droits civils et politiques, et être inscrits sur
les listes électorales générales.

2- La motion doit porter sur les matières qui relèvent du domaine de la


loi conformément aux dispositions de la Constitution. (Art. 3 de la
loi organique).

3- Elle ne doit pas comporter des propositions qui portent atteinte aux
constantes fédératrices de la Nation relatives à l’islam, à l’unité
nationale, à la forme monarchique de l’Etat, au choix démocratique
et aux acquis en matière de libertés et de droits fondamentaux, tels
que prévus par la Constitution. (Art.4, alinéa 2).

4- La motion ne doit pas se rapporter à la révision de la Constitution,


aux lois organiques, à la loi d’amnistie, aux textes relatifs au
domaine militaire, à la sécurité intérieure et extérieure de l’Etat, et

76
ne doit pas contenir des propositions qui sont contraires aux traités
internationaux que le Maroc a ratifiés et auxquels il a adhéré. (Art.4,
alinéas 3 et 4).

5- Une dernière condition de la recevabilité de la motion, c’est qu’elle


doit être signée par, au moins, 25000 citoyennes et citoyens.
(Art.7,alinéa 2).

La motion est déposée ou envoyée par courrier électronique, en


priorité, au bureau de la Chambre des Représentants. (Art.8,
alinéa1).

Toutefois, la motion comportant des propositions relatives aux


collectivités territoriales, au développement régional ou aux affaires
sociales, doit être déposée ou envoyée, en premier lieu, au bureau de
la Chambre des Conseillers.

Une fois la motion est acceptée, elle est diffusée à tous les membres
de la Chambre parlementaire concernée et soumise, pour examen et
discussion, à la Commission parlementaire compétente en fonction
de son objet.

Dans le cas où la motion est rejetée, la décision du rejet doit être


motivée, mais elle n’est susceptible d’aucun recours.

E-L’abrogation de la loi.

Les règles juridiques ne sont pas éternelles. Elles peuvent être


modifiées, complétées ou abrogées en fonction des besoins de la société.

77
Une règle juridique est abrogée lorsqu’elle n’est plus opposable aux
membres de la société. En d’autres termes, abroger une loi, c’est mettre fin
à son application.

L’abrogation d’une règle de droit doit obéir à ce que les juristes


appellent « le principe du parallélisme des formes », c’est-à-dire,
l’abrogation doit être entreprise par la même autorité qui l’a créée. Cette
autorité est le Parlement.

Mais ce principe « admet des tempéraments ». Il est admis qu’une


autorité supérieure puisse abroger une règle juridique dont l’origine est une
autorité inférieure. Ainsi, une loi peut abroger un décret, et celui-ci peut
abroger un arrêté. Mais il est totalement exclu qu’une autorité inférieure
puisse abroger une règle juridique émanant d’une autorité supérieure.

En se référant à l’article 474 du D.O.C, on peut dégager deux formes


d’abrogation : l’abrogation expresse et l’abrogation tacite. L’article en
question stipule ceci : « Les lois ne sont abrogées que par des lois
postérieures lorsque celles-ci l’exprime formellement ou lorsque la
nouvelle loi est incompatible avec la loi antérieure ».

a- L’abrogation expresse.

Il y a abrogation expresse lorsqu’une loi déclare expressément


qu’une loi antérieure est abrogée. L’abrogation expresse peut être partielle
ou globale. Elle est partielle lorsque la loi nouvelle « laisse subsister une
partie de la loi antérieure ».1

L’abrogation est globale lorsque le texte nouveau abroge toutes les


dispositions de la loi ancienne.

1
M. J. ESSAID, op.cit.p.201.

78
L’abrogation est aussi expresse « lorsqu’elle concerne une loi dont
l’application a été limitée dans le temps. L’arrivée du terme, ou
l’expiration du délai entraîne automatiquement la disparition de la loi
concernée ».1

b-L’abrogation tacite.

Il y a abrogation tacite lorsqu’une loi nouvelle comporte des


dispositions incompatibles avec celles d’une loi ancienne qui n’est pas
expressément abrogée. « En bonne logique, il n’est pas possible
d’appliquer au même moment deux textes contradictoires. Il faut donc en
déduire que la loi récente a implicitement abrogé la loi ancienne ».2

III – Le règlement.

La notion de règlement englobe l’ensemble des décisions émanant du


pouvoir exécutif et des autorités administratives.

A- Les catégories du règlement.

Le règlement comprend diverses catégories. Ces catégories sont


d’importance inégale. En premier lieu, on trouve les dahirs, ensuite les
décrets et enfin les arrêtés ministériels.

a- Les dahirs.

Les dahirs sont les actes pris par le Roi. L’article 42, alinéa 3 de la
Constitution dispose, en effet, que « Le Roi exerce, par dahirs, les pouvoirs
qui lui sont expressément dévolus par la présente Constitution ».

Certains juristes marocains affirment que « les décisions royales – les


dahirs- ont juridiquement plus de valeur que les lois votées par le

1
M. BENYAHYA, op.cit.p.94.
2
M. J. ESSAID, op.cit.p.202.

79
Parlement ». C’est l’idée que défend le Professeur M .J. ESSAID dans son
remarquable ouvrage « Introduction à l’étude du droit » (p.160).

Quelle est l’argumentation évoquée par l’auteur pour soutenir l’idée


de la supériorité du dahir sur la loi ? L’interprétation selon laquelle le dahir
est supérieur à la loi « correspond – écrit – t- il à l’esprit des Constitutions
de 1970 et 1972 (son ouvrage date de 1992 avant les révisions
constitutionnelles de 1992, 1996 et de 2011). Pour s’en rendre compte –
ajoute – t-il, il suffit de comparer l’article 19 de la première (de 1962) à
l’article 19 des deux dernières Constitutions (de 1970 et de 1972). On
constate alors que ce dernier texte a conféré à Sa Majesté le Roi une qualité
nouvelle : il est le « Représentant Suprême de la Nation ». C’est dire que
les députés ne peuvent pas prétendre être les seuls représentants de la
Nation. C’est dire surtout que l’institution monarchique est
hiérarchiquement supérieure au Parlement ».1

M. J. ESSAID qualifie le pouvoir réglementaire dont dispose le Roi


d’exceptionnel. (Voir son ouvrage déjà cité, p.174).

Pour sa part, le Professeur Khalid NACIRI enlève au dahir toute


portée réglementaire stricto-sensu en s’appuyant sur deux arguments.
D’abord, « la sanction des textes de nature réglementaire est d’être soumis
au juge de l’excès du pouvoir, or – écrit l’auteur- la jurisprudence de la
Cour Suprême est définitivement arrêtée : les actes du Roi en matière
administrative sont insusceptibles de recours juridictionnels. Ensuite, le
Roi est – selon NACIRI- une véritable autorité supra-constitutionnelle.
Dominant l’ensemble des institutions, il n’est pas assimilé à l’Exécutif.

1
M. J. ESSAID, op.cit. p.160.

80
L’article 19 (l’article 42 de l’actuelle Constitution) avec sa dimension
idéologique éminente s’oppose à cette assimilation ».2

Mais cette opinion ne fait pas l’unanimité parmi les juristes. Certains
d’entre eux soutiennent l’idée que les actes du Monarque en matière
administrative doivent être soumis au contrôle juridictionnel.

b- Les décrets.

Les décrets sont des actes pris par le Chef du Gouvernement


dans le domaine qui ne relève pas de la compétence du
Parlement.
L’article 90 de la Constitution dispose que « Le Chef du
Gouvernement exerce le pouvoir réglementaire ». C’est le Chef du
Gouvernement qui est donc investi par la Constitution du pouvoir
réglementaire. Les actes réglementaires de celui-ci doivent être
« contresignés par les ministres chargés de leur exécution » (alinéa 2 de
l’article 90). Selon le même article, le Chef du Gouvernement peut
déléguer certains de ses pouvoirs aux ministres ».

Il y a deux sortes de décrets : les décrets d’application et les décrets


autonomes. Les décrets d’application sont appelés ainsi car ils sont pris
pour l’exécution de la loi en précisant les conditions de sa mise en œuvre.
Les décrets d’application sont donc subordonnés à la loi. Leur rôle se
limite uniquement à préciser – on l’a dit – les conditions de mise en
exécution de celle-ci.

Cette catégorie de décrets est visée par l’article 89 de la Constitution


qui stipule : « Sous l’autorité du Chef du Gouvernement, le Gouvernement

2
Kh. NACIRI, op. cit. pp. 286-287.

81
met en œuvre son programme gouvernemental, assure l’exécution des lois,
dispose de l’administration… ».

Quant aux décrets autonomes, ils « représentent, au contraire, des


décisions spontanées du pouvoir exécutif »1 selon les termes employés par
le Professeur J. L. AUBERT. On qualifie ces décrets d’autonomes car ils
ne sont subordonnés à aucune loi. Ils sont pris pour régir des matières qui
ne relèvent pas du pouvoir législatif.

c- Les arrêtés ministériels.

Les règlements contiennent aussi les arrêtés ministériels. On peut


définir ceux-ci comme étant les décisions administratives prises par un
ministre ou plusieurs ministres (les arrêtés interministériels).

Les arrêtés ministériels trouvent leur assise juridique dans l’article 90


de la Constitution qui stipule que « Le Chef du Gouvernement (…)peut
déléguer certains de ses pouvoirs aux ministres », mais aussi dans l’article
89 qui précise que « Sous l’autorité du Chef du Gouvernement, le
Gouvernement (…) assure l’exécution des lois, dispose de
l’administration… ».

Les arrêtés ministériels ont donc pour objectif essentiel de mettre en


exécution les lois, mais aussi « les règles générales posées par le Chef de
l’Etat et le Premier ministre ».2

B- L’autorité du règlement.

Le règlement ne peut être non-conforme à la Constitution et à la loi


sinon il est considéré comme illégal. Il s’agit là du contrôle de la légalité
du règlement.

1
J. L. AUBERT, Op. cit. p.30.
2
Voir l’ouvrage de M. J. ESSAID, op. cit. p. 161.

82
Contrairement à la solution prévalant pour les lois selon laquelle le
contrôle de leur constitutionnalité est – on l’a dit- confié à la Cour
Constitutionnelle conformément à l’article 132 de la Constitution, le
contrôle de la légalité des règlements est exercé par les juridictions
administratives et judiciaires (ordinaires).

Celui-ci peut prendre deux formes : il peut prendre la forme d’un


recours pour excès de pouvoir ou la forme d’exception d’illégalité.

a- Le recours pour excès de pouvoir.

Il n’est pas dans l’objet de ce travail de procéder à un examen


exhaustif du recours pour excès de pouvoir. On se limitera seulement au
recours en annulation de l’acte. Le recours en indemnisation ne sera donc
pas abordé.

Le recours en annulation pour excès de pouvoir ne peut être porté


que devant les juridictions administratives.

Une fois prononcée par la juridiction saisie, l’annulation du


règlement aura un effet absolu, contrairement – on le verra – à l’exception
d’illégalité. Une fois annulé, le règlement « est censé n’avoir jamais existé
et l’administration n’est plus admise à s’en prévaloir »1. Si le recours est
rejeté, « d’autres citoyens sont recevables pour le contester à nouveau sur
la base d’une argumentation différente ».2

b- L’exception d’illégalité.

L’exception d’illégalité « a un effet moindre »3, selon l’expression


employée par le juriste français Ph. MALINVAUD. Elle n’a pas pour effet

1
Kh. NACIRI, op. cit. p.290.
2
Kh NACIRI, op.cit. p. 290 ; pour plus de détails, voir l’ouvrage collectif intitulé « Droit administratif
marocain », sous la direction de M. ROUSSET, Driss BASRI et autres, 5ème éd. 1992.
3
Ph. MALINVAUD, op.cit. p22.

83
l’annulation à l’égard de tous de l’acte illégal, comme c’est le cas du
recours pour excès de pouvoir. L’exception d’illégalité permet seulement
d’écarter l’application de l’acte déclaré illégal à celui qui l’a opposée.

L’exception d’illégalité peut être soulevée devant les juridictions


administratives, mais aussi devant les juridictions ordinaires. La Cour
Suprême, au terme d’une jurisprudence que le Professeur Kh. NACIRI
qualifie d’hésitante, « admet que les tribunaux de première instance
peuvent connaître de la légalité des actes administratifs, que les règlements
aient une portée générale ou individuelle ».1

C – Le domaine du règlement.

L’article 72 de la Constitution est clair à ce sujet. L’article en


question précise que « les matières autres que celles qui sont du domaine
de la loi appartiennent au domaine règlementaire.

En d’autres termes, le domaine règlementaire englobe toutes les


matières qui ne relèvent pas de la compétence du Parlement. On connaît
déjà les matières qui relèvent du domaine de la loi. Elles sont énumérées –
on l’a dit – dans l’article 71 de la Constitution auxquelles s’ajoutent
d’autres matières « expressément dévolues par d’autres articles de la
Constitution ». Mises à part ces matières, toutes les autres matières relèvent
du domaine règlementaire.

Malgré la distinction claire entre le domaine de la loi et celui du


règlement, la Constitution n’a pas exclu le risque des conflits en matière
des compétences entre le Parlement et le Gouvernement. Elle a prévu, à ce
propos, une technique procédurale qui permet au Gouvernement de
défendre ses compétences règlementaires « contre les empiètements du
1
Kh. NACIRI, op.cit. p.289.

84
pouvoir législatif ».1 C’est l’article 79 de la Constitution qui en fait état :
« Le gouvernement peut opposer l’irrecevabilité à toute proposition ou
amendement qui n’est pas du domaine de la loi. En cas de désaccord, la
Cour Constitutionnelle statue dans un délai de huit jours à la demande du
Président de l’une ou l’autre Chambre du Parlement ou du Chef du
Gouvernement ».

IV- La coutume.

On peut définir la coutume comme étant une pratique habituelle,


formée spontanément, et à laquelle on se conforme par suite de la croyance
à son caractère obligatoire.2

A partir de cette définition on peut dire que la coutume comprend


deux éléments constitutifs : un élément matériel et un élément
psychologique.

A- L’élément matériel.

Il est constitué du comportement qui devient habituel. Un


comportement ne devient coutume que s’il est général, constant et ancien.

Il ne faut pas entendre par caractère général du comportement le fait


que celui-ci doit intéresser toute la société. Le comportement conserve son
caractère général même s’il « n’intéresse qu’un groupe limité au sein de la
société, défini par une localisation géographique déterminée, ou par une
profession ».3

Un comportement devient coutume s’il est aussi constant, c’est-à-


dire régulièrement suivi. Il faut qu’il soit également ancien, c’est-à-dire il
faut que le comportement ait une certaine durée, une consécration par le
1
M. J. ESSAID, op. cit. p.175.
2
Voir M. KORRI-YOUSSOUFI et M. ELGHARBI, op.cit.p.52 ; voir aussi J. L. AUBERT, op.cit.p.50.
3
J. L. AUBERT, op.cit.p.51.

85
temps. Mais reste à savoir combien de temps devra prendre un
comportement pour qu’il devienne coutume. C’est « une affaire
d’appréciation des tribunaux ».1

B- L’élément psychologique.

Il est constitué de la croyance chez les sujets de droit au caractère


obligatoire du comportement auquel ils se conforment. C’est cet élément
qui nous permet de distinguer la coutume des règles de politesse et de
bienséance ou encore des règles de morale. Certes, ces règles « jouent un
rôle assez important dans la vie sociale mais n’ont pas juridiquement un
caractère obligatoire ».2

Après avoir défini la notion de la coutume, il convient de s’interroger


sur le rôle de celle-ci. C’est par rapport à la loi que doit se définir le rôle
actuel de la coutume. A ce propos, il convient de distinguer trois
hypothèses.

D’abord, il faut dire que parfois c’est la loi elle-même qui revoie
expressément à la coutume et lui confère ainsi une légitimité. Le Dahir
formant Code des Obligations et Contrats, par exemple, renvoie dans
plusieurs articles aux usages et coutumes. On citera, à titre d’exemple,
l’article 510 relatif aux frais du courtage dont voici l’énoncé : « Les frais
de courtage sont à la charge du vendeur, lorsque le courtier a conclu lui-
même la vente, sauf les usages locaux et les stipulations des parties ».

Ensuite, la coutume peut combler une lacune de la loi, c’est-à-dire


qu’elle règle une situation qui n’est pas prévue par la loi. Aujourd’hui, les
coutumes qui peuvent combler les lacunes de la loi « sont très rares dans la
mesure où le législateur intervient de plus en plus dans les différents
1
Ph. MALINVAUD, op.cit.p.41.
2
M. BENYAHYA, op.cit.p.75.

86
domaines de la vie sociale, et compte tenu aussi du rôle important de la
jurisprudence ».1

Enfin, il s’agit de savoir si la coutume peut-elle contredire la loi.

Le principe est celui d’une hiérarchie entre la loi et la coutume, c’est-


à-dire la coutume ne peut contredire la loi étant donné que celle-ci est
supérieure à celle-là. L’article 475 du D.O.C est clair sur cette question :
« La coutume et l’usage ne saurait prévaloir contre la loi, lorsqu’elle est
formelle ». « Tel est du moins la situation en droit, car en fait, une coutume
peut conduire à la non-application de la loi. Cela est évident pour une loi
supplétive de volonté : puisqu’elle peut être écartée dans chaque cas par
une clause contraire, a fortiori peut-elle l’être d’une manière générale par
une coutume contraire ».2

Quant à la loi impérative, la majorité de la doctrine et les tribunaux


refusent que la coutume se prévale contre une loi présentant un caractère
d’ordre public.

Section 2 – Les sources indirectes de la règle de droit.

Il y a deux sources indirectes de la règle de droit : la jurisprudence et


la doctrine.

§ 1-La jurisprudence.

A –La notion de jurisprudence.

Dans un sens large, le terme  « jurisprudence » désigne l’ensemble


des décisions rendues par les juridictions. Dans un sens restreint, il désigne
l’ensemble des décisions rendues sur une question de droit, comme par

1
M. BENYAHYA, op.cit.p.76.
2
Ph. MALINVAUD, op.cit.p.43.

87
exemple, la jurisprudence en matière de divorce ou la jurisprudence en
matière de responsabilité de la puissance publique.

Mais il faut remarquer que pour qu’une décision puisse constituer


une jurisprudence, il faut que cette décision se répète. La notion de
jurisprudence implique donc une répétition, « en ce sens que ce n’est
qu’après plusieurs décisions de même sens qu’il est possible de considérer
que la jurisprudence est constituée, qu’elle est fixée ».1

B – Le rôle de la jurisprudence.

Le rôle de la jurisprudence se manifeste dans les fonctions qu’elle


accomplit. La première fonction est celle qui consiste à interpréter la règle
de droit. Il est clair que « l’interprétation ne se limite pas à la recherche du
sens littéral des termes utilisés par la loi. L’interprétation apporte un
complément à la loi, complément d’autant plus riche que la loi est moins
claire »2 a pu observer J. L AUBERT.

La deuxième fonction de la jurisprudence est celle de suppléance de


la loi dans le cas où celle – ci ne règlemente pas telle ou telle situation. Le
juge se trouve ainsi contraint de combler les lacunes de la loi et du
règlement. Le juge ne pourra, en aucun cas, « s’abriter derrière le silence
de la loi pour refuser de trancher ».3Sinon il est accusé du déni de justice.

Une dernière fonction de la jurisprudence est celle d’adaptation de la


loi, surtout lorsqu’ on est devant des textes vieillis ou dépassés, ne
répondant plus aux exigences de l’évolution de la vie en société.

C – La jurisprudence, source de droit ?

1
J. L. AUBERT, op.cit.p.81.
2
J.L. AUBERT, op.cit.p.82.
3
J.L. AUBERT, op.cit.p.83.

88
Peut – on considérer, à la lumière de ces trois fonctions qu’accomplit
la jurisprudence, que celle-ci constitue une source de droit ?

La mission du juge est de statuer sur les litiges qui opposent les
plaideurs selon ce que dicte la loi. Le juge ne créé pas la loi. La création de
celle-ci –on le sait- relève du législateur conformément au principe de
séparation des pouvoirs. Si la mission du juge se limite à l’application de la
règle de droit, pourquoi alors considérer les décisions rendues par ce
dernier comme source de droit ?

Le juge ne trouve pas toujours de textes juridiques clairs pour les


appliquer aux litiges qui se présentent devant lui. Dans ce cas- on l’a dit –
il est amené à interpréter ces textes, à en lever l’ambiguïté. Plus grave
encore : dans certains cas, le juge ne trouve pas de textes pour pouvoir
statuer sur des litiges qui opposent les plaideurs. Que peut-il faire dans un
tel cas ? Il ne peut pas refuser de statuer sur ces litiges, sous prétexte de
l’inexistence des textes correspondants, sinon il est accusé du déni de
justice. Le juge se trouve alors contraint de combler des vides juridiques
laissés par le législateur.

En interprétant les textes non-clairs et en comblant les lacunes


juridiques, le juge crée, ainsi, ce qu’on appelle « les précédents
jurisprudentiels ». Ce sont ces précédents jurisprudentiels qu’on considère
comme sources de droit.

Dans les systèmes juridiques anglo-saxons, ces précédents


jurisprudentiels ont un caractère obligatoire, c’est-à-dire, les juridictions
sont tenues de s’y conformer.1Par contre, dans le cadre d’autres systèmes
de droit, comme le système juridique marocain ou le système juridique
Rajaâ NAJI – MEKKAOUI, Introduction aux sciences juridiques, Imprimerie Al-maârif aljadîda,
1

Rabat, 1998, p.249.

89
français, les précédents jurisprudentiels n’ont qu’une portée relative,
facultative, c’est- à – dire, en d’autres termes, que les juridictions peuvent
valablement ne pas les appliquer aux litiges ultérieurs semblables. C’est ce
que les juristes appellent « les revirements de la jurisprudence ».1

Il convient de souligner que « la jurisprudence en tant que source


normative est parfois identifiée à la seule jurisprudence des Cours
Suprêmes »2, ce qui n’est pas exact. Les juridictions inférieures peuvent,
elles aussi, créer leurs précédents jurisprudentiels. Ces juridictions peuvent
également produire des précédents qui iraient même à l’encontre de ceux
émanant des juridictions supérieures. Rien dans la loi qui interdit cela.
Mais il faut remarquer que, dans la pratique, les juridictions inférieures se
conforment à la jurisprudence dégagée par les juridictions supérieures.

§ 2 – La doctrine.

Jean-Louis BERGEL définit la doctrine comme étant « la pensée des


auteurs en matière juridique »3, c’est-à-dire – explique le Professeur M.
BENYAHYA – les opinions critiques et thèses émises sur le droit par des
personnes qui ont pour fonction de l’étudier ou de le pratiquer (professeurs,
magistrats, avocats…) en interprétant les règles juridiques ou en les
analysant dans les ouvrages juridiques, articles de revues ou dans les notes
publiées sur les décisions jurisprudentielles ».4

Peut-on considérer la doctrine comme source du droit ? Certains


juristes la qualifient de « source interprétative de la règle de

1
M. J. ESSAID, op.cit.p.13.
2
M. BENYAHYA, op.cit.p.81.
3
Cité par M. BENYAHYA, op.cit.p.81.
4
M. BENYAHYA, op.cit.pp.81-82.

90
droit ».1D’autres la considèrent comme « source du droit par excellence ».2
D’autres encore la qualifient de « source secondaire ».3

Sans aller jusqu’à qualifier la doctrine de « source du droit par


excellence », on peut dire, en revanche, que la doctrine est une source
indirecte de la règle juridique dans la mesure où elle exerce une influence
qu’on peut qualifier de non-négligeable sur le législateur. Comment cette
influence se manifeste-t-elle ?

Il est, en effet, très souvent que les opinions défendues par la doctrine
trouvent leur concrétisation sous forme de lois.

La doctrine a aussi une grande influence sur le juge « par les


solutions qu’elle lui propose »4, par les interprétations qu’elle donne aux
textes de lois5 : lorsque, en effet, des lois ne sont pas claires, le juge se
réfère trop souvent aux écrits de la doctrine relatifs à ces textes pour y
élucider la volonté du législateur.6

1
Driss AL-FAKHOURI, Introduction à l’étude des sciences juridiques (en arabe), 2 ème éd., Oujda,
1990, p.218.
2
Alain BERNARD et Yves POIRMEUR, Doctrine civiliste et production normative, in La doctrine
juridique, ouvrage collectif, Puf, 1993, p.127.
3
Mohamed CHARFI, Introduction à l’étude du droit (en arabe), Sieres, Tunis, 1991, p.250.
4
M. BENYAHYA, op.cit.p.82.
5
M. J. ESSAID, op.cit.p.218.
6
Rajaâ NAJI-MEKKAOUI, op.cit.p.249.

91
92
François Terré donne aux droits subjectifs la définition suivante : Les
droits subjectifs sont les prérogatives – on dit aussi les intérêts – que le
droit objectif consacre et sauvegarde au profit des sujets de droit, ce qui
explique l’expression de droits subjectifs ».1

M. J. ESSAID en donne cette définition : Les droits subjectifs « sont


des prérogatives reconnues aux particuliers et qui peuvent soit porter sur
des choses…soit s’exercer contre une autre personne… »2.

Dans le même sens, M. BENYAHYA définit les droits subjectifs


comme étant « des prérogatives ou des pouvoirs reconnus aux personnes à
l’égard de certains biens ou à l’égard d’autres personnes »3.

Ainsi, par exemple, le droit de propriété est un droit subjectif qui


donne au titulaire de ce droit un certain nombre de prérogatives sur le bien
qu’il possède comme son usage, sa vente, sa location, sa transformation ou

1
F. Terré, Introduction générale au droit, Dalloz, 4ème éd., 1998, 273.
2
M. J. ESSAID, op.cit.p.35.
3
M. BENYAHYA, op.cit.p.103.

93
même sa destruction, etc. On appelle ce droit de propriété un droit réel car
il porte sur un bien.

Le droit de créance est un autre exemple de droit subjectif. C’est un


droit subjectif personnel, car il s’exerce sur une personne et non pas sur
un bien comme ce fut le cas de droit de propriété. Celui-ci – on l’a dit- est
un droit réel car il porte sur un bien et ne s’exerce pas sur une personne.
Le droit de créance, qui est un droit subjectif, permet à son titulaire, appelé
créancier, « de demander à son débiteur le remboursement de sa dette, le
cas échéant par voie judiciaire ».1

Chapitre 1- Les sujets des droits subjectifs.


Les sujets des droits subjectifs ou titulaires de ces droits sont les
personnes physiques, c’est-à-dire, les êtres humains considérés
individuellement et les personnes morales qui sont des entités ou
groupements suffisamment organisés et structurés. Nous serons donc
conduits à examiner, ci- après, les deux types de personnes juridiques : les
personnes physiques et les personnes morales.

Section 1 – Les personnes physiques.

Les personnes physiques sont les êtres humains envisagés


individuellement « qui peuvent avoir des droits subjectifs ou assumer des
obligations tant qu’ils ont la personnalité juridique ».2

§ 1 –La personnalité juridique.

On entend par personnalité juridique, l’aptitude à être sujet de droit, à


être titulaire des droits subjectifs.
1
M. BENYAHYA, op.cit.p.103.
2
M. BENYAHYA, op.cit.p.107.

94
A notre époque, la personnalité juridique est reconnue à tout être
humain. L’esclavage n’est plus admis. Les déclarations et pactes
internationaux sont formels : «  Chacun a le droit à la reconnaissance en
tous lieux de sa personnalité juridique »1; « Nul ne sera tenu en esclavage
ni en servitude. L’esclavage et la traite des esclaves sont interdits sous
toutes leurs formes ».2

A- Le point de départ de la personnalité juridique.

Tout individu est doté de la personnalité juridique dés sa naissance.


C’est le principe. « Mais le législateur marocain fait remonter le point de
départ de la personnalité juridique à la conception, à condition toutefois
que l’enfant soit né vivant. Le mort-né n’a pas de personnalité juridique,
voire d’existence juridique ».3

B- La fin de la personnalité juridique.

La personnalité juridique prend fin avec le décès de son titulaire.

Le décès produit – on le sait – d’importants effets juridiques dont


notamment l’ouverture et la liquidation de la succession de la personne
décédée.

Mais il arrive qu’on puisse avoir du doute sur le décès de la


personne qu’on veut hériter, la personne que l’on désigne par le terme :
l’absent. En matière juridique, l’absence d’une personne signifie « le fait

1
Déclaration universelle des droits de l’homme de 1948, article 6 et Pacte des Nations Unies relatif aux
droits civils et politiques de 1966, article 16. 
2
Déclaration universelle des droits de l’homme, article 4 et Convention européenne des droits de
l’homme de 1950, article 4, alinéa 1.
3
M. BENYAHYA, op.cit.p.107.

95
qu’on ne sache pas si elle est vivante ou si elle est morte ».1 « Dans ce cas,
la prise en considération de ses intérêts- qui ne coïncident pas avec ceux de
ses héritiers- exige que la liquidation de sa succession soit retardée au
maximum ».2

La législation marocaine qui a prévu ce cas de figure, a distingué


entre l’absence dans des circonstances exceptionnelles « laissant présumer
sa mort »3 et l’absence dans d’autres cas (articles 265 et 266 du Code de la
Procédure Civile).

Si l’absent a disparu dans des circonstances exceptionnelles


« laissant présumer sa mort », les ayant droits à l’héritage peuvent obtenir
du tribunal, à leur demande, un jugement faisant état du décès de l’absent
qui permettra l’ouverture et la liquidation de la succession.

Il faut souligner que les héritiers ne peuvent demander ce jugement


de décès qu’après l’expiration d’un délai d’une année de l’absence de la
personne qu’on veut hériter.

Dans les autres cas, ce jugement ne peut être obtenu qu’après enquête
et expiration d’un délai fixé par le tribunal.

§ 2 – L’identification des personnes physiques.

L’identification de la personne physique s’opère principalement de


trois manières. Tout d’abord, elle s’opère par son nom. Elle s’opère aussi
par la désignation de son domicile. Un dernier mode d’identification
concerne l’état civil de la personne physique.

A- Le nom.

1
François Térré, op.cit.p.327.
2
M. J. ESSAID, op.cit.p.336.
3
M. BENYAHYA, op.cit.p.107.

96
« C’est l’appellation servant à désigner une personne physique dans
sa vie sociale et juridique, dans l’exercice de ses droits et
l’accomplissement de ses devoirs ».1

Cette appellation est, généralement, composée d’un patronymique


(nom de famille) et d’un prénom.

Pour éviter les risques d’homonymie et pour parvenir à une


identification plus sûre « on utilise de plus en plus, accessoirement au nom,
le système du matricule (carte d’identité nationale, sécurité sociale…). 2

B- Le domicile.

« Le domicile est le rattachement d’une personne à un lieu


déterminé ».3

L’article 519 du Code de la Procédure Civile du 28 septembre 1974


en donne la définition suivante : « Le domicile de toute personne physique
est au lieu où elle a son habitation habituelle et le centre de ses affaires et
de ses intérêts ».

Le domicile est d’une importance incontestable, car bon « nombre


d’intérêts pratiques demeurent attachés à la détermination »4 de celui-ci.
Ainsi, par exemple, le domicile constitue le cadre naturel pour l’exercice
des droits politiques, ou le paiement des impôts, ou se procurer des
documents administratifs, etc.

La loi distingue entre le domicile réel, le domicile légal et le domicile


élu.

a- Le domicile réel.
1
F. Térré, op.cit.p.329.
2
M. J. ESSAID, op.cit.p.338.
3
M. BENYAHYA, op.cit.p.108 et M. J. ESSAID, op.cit.p.338.
4
F. Terré, op.cit. p.331.

97
Le législateur marocain définit le domicile réel comme étant le lieu
d’habitation habituelle d’une personne et le centre de ses affaires et de ses
intérêts. (Article 519 du C.P.C de 1974).

Selon cet article, « le domicile est déterminé à la fois par le critère
familial (c’est l’habitation habituelle) et le critère professionnel (c’est le
centre des affaires et des intérêts) ».1

Mais il faut remarquer que l’alinéa 2 de l’article 519 du C. P. C


précise qu’une personne est considérée domiciliée à l’égard de ses droits de
famille et de son patrimoine personnel, là où elle a son habitation
habituelle. Par contre, c’est le centre des affaires et des intérêts du
concerné qui est considéré comme son domicile à l’égard de ses droits liés
à son activité professionnelle.2

Mais que se passera-t-il- si une personne habite au même endroit où


elle exerce ses activités professionnelles ? Dans un pareil cas, seul cet
endroit est considéré comme domicile à l’égard non seulement des droits
de famille et du patrimoine personnel de l’intéressé, mais aussi à l’égard de
ses droits liés à son activité professionnelle.

Le C.P.C marocain a aussi défini, d’une manière assez claire, la


notion de résidence. Ainsi l’article 520 du dit Code stipule : « La résidence
est le lieu où la personne se trouve effectivement à un moment
déterminé ».

« Le plus souvent, cette notion de résidence joue un rôle subsidiaire,


en l’absence d’un domicile réel et d’un domicile élu ».3C’est ce qui résulte
de l’article 27 du C.P.C.

1
M. J. ESSAID, op.cit.p.340.
2
M. J. ESSAID, op.cit.p.341.
3
M. J. ESSAID, op.cit.p.341.

98
b- Le domicile légal.

On entend par le domicile légal, le domicile d’un incapable et d’un


fonctionnaire. Le domicile légal d’un incapable est le lieu où habite son
tuteur. Quant au domicile d’un fonctionnaire, il est fixé au lieu où il exerce
ses fonctions. C’est ce qui ressort de l’article 521 du C.P.C.

c- Le domicile élu.

Le domicile élu est l’endroit choisi pour l’exécution de certains actes


ou pour l’accomplissement de certaines obligations.1

C - L’état civil.

On entend par l’état civil, le mode de constatation d’un ensemble de


faits relatifs à une personne déterminée : date et lieu de naissance, décès,
mariage, divorce, veuvage, etc.

Il faut remarquer qu’au Maroc le système de l’état civil n’inclut que


les naissances et les décès, outre les noms. Mais M. J. ESSAID nous
rassure qu’une réforme qu’il qualifie d’importante du régime de l’état civil
est envisagée, une réforme qui inclura, en marge de l’acte de naissance, des
mentions sur les mariages et les divorces.2

Section 2 – Les personnes morales.

« On peut définir les personnes morales comme des groupements


d’individus ou de biens visant un objectif déterminé ».3

Comme la personne physique, la personne morale a un nom ou


raison sociale, un domicile ou siège social et éventuellement une
nationalité.
1
M. BENYAHYA, op.cit.p.108 et M. J. ESSAID, op.cit.p.342.
2
M. J. ESSAID, op.cit.p.343.
3
Nourdine ELAMRANI et Elbekkay MAAZOUZ, Introduction à l’étude du droit privé (en arabe),
librairie Sijlamassa, Meknès, 2004, p.219.

99
On peut distinguer deux catégories de personnes morales : les
personnes morales de droit privé et les personnes morales de droit public.

Concernant la première catégorie de personnes morales, elle contient


les sociétés, les associations et les syndicats. La différence entre ces
différents groupements que contient cette première catégorie de personnes
morales tient au but visé par chacun d’entre eux : les sociétés ont pour
objectif de réaliser des bénéfices ; les associations, quant à elles,
poursuivent un but désintéressé, non lucratif ; s’agissant des syndicats, ils
recherchent un but « à la fois désintéressé et d’ordre professionnel ».1

Quant à la seconde catégorie de personnes morales, elle englobe


l’Etat, les établissements publics et les services publics, auxquels s’ajoutent
les collectivités locales.

A l’instar des personnes physiques, les personnes morales bénéficient


de la personnalité juridique, c’est-à-dire elles sont habilitées à avoir des
droits et des obligations. Leur patrimoine est distinct de celui de leurs
membres.

Sur le terrain du droit judiciaire, la personne morale peut ester en


justice pour assurer la protection de ses droits et de ses intérêts, comme elle
peut être engagée dans un procès qui l’oppose à autrui. Et en raison de son
caractère abstrait, elle est par nature frappée d’incapacité d’exercice. Elle
doit donc, nécessairement, agir par l’intermédiaire de ses représentants qui
sont des personnes physiques.2

La disparition de la personne morale provient, généralement, de la


volonté de ses membres qui mettent fin à son existence, ou d’une décision
judiciaire. Mais il faut souligner que la personnalité juridique de la
1
M. J. ESSAID, op.cit.p.351.
2
M. BENYAYA, op.cit.p.111.

100
personne morale survit à sa dissolution jusqu’à l’achèvement de la
liquidation de son patrimoine.

Chapitre 2 - La diversité des droits subjectifs.


On peut regrouper les droits subjectifs en deux catégories : les droits
patrimoniaux et les droits extra-patrimoniaux.

Section 1 – Les droits patrimoniaux.

Les droits patrimoniaux sont les droits qui ont une valeur pécuniaire,
c’est-à-dire, ils sont appréciables en argent, comme, par exemple, le droit
pour le bailleur de recevoir un loyer pour la chose louée, ou le droit de
créancier de récupérer la somme d’argent prêtée au débiteur.

Etant appréciables en argent, les droits patrimoniaux ont une valeur


d’échange. Ils sont également transmissibles aux héritiers et aux légataires
du titulaire, saisissables par ses créanciers. Les droits patrimoniaux sont
enfin prescriptibles « et donnent prise soit à la prescription acquisitive, soit
à la prescription extinctive ».1

La principale distinction des droits patrimoniaux est celle des droits


réels, des droits personnels et des droits intellectuels.

Mais, « en considérant les objets sur lesquels peuvent porter ces
droits »2 on est amené à procéder à une classification des « choses ».

1
F. Terré, op.cit.p.340.
2
M. BENYAHYA, op.cit.p.120.

101
§1 –Les droits réels, les droits personnels et les droits
intellectuels.

A – Les droits réels.

On peut définir le droit réel comme un droit qui confère à son


titulaire un certain nombre de pouvoirs sur une chose. Ainsi, le propriétaire
d’une maison peut l’habiter, la vendre, la louer, la transformer ou même la
détruire.

Le droit réel est un droit absolu, c’est-à-dire, opposable à tous. Cette


opposabilité absolue se traduit par le fait que tout le monde est tenu à
respecter le droit réel et ne lui pas porter atteinte.

Deux conséquences importantes résultent de cette opposabilité


absolue : le droit de suite et le droit de préférence. On entend par le droit de
suite, le droit qui permet au titulaire du droit réel  de revendiquer le bien de
quiconque. Le droit de préférence, lui, permet au titulaire du droit réel de
se prévaloir de son droit avant les titulaires de simples droits personnels,
notamment les créanciers ordinaires.1

On distingue, généralement, deux catégories de droits réels : les


droits réels principaux et les droits réels accessoires.

a- Les droits réels principaux.

Ils sont énumérés limitativement par l’article 8 du dahir du 2 juin


1915 fixant la législation relative aux immeubles immatriculés. Ces droits
réels principaux sont les suivants :

1- Le droit de propriété. C’est le droit le plus important et le plus


complet qu’une personne puisse exercer sur une chose. Il comprend l’usage

1
M. J. ESSAID, op.cit.p.357.

102
de la chose, la jouissance (tirer tous fruits ou produits), le droit d’en
disposer « soit matériellement en la consommant, en la transformant ou en
la détruisant, soit juridiquement en cédant le droit que l’on a sur elle
(vente, donation) ou en la grevant de droits réels (servitude, hypothèque).

2- L’usufruit. C’est un droit d’user et de jouir d’une chose


appartenant à autrui. L’usufruit est un droit viager qui prend fin au plus
tard, au jour du décès de son titulaire (l’usufruitier), à la différence du droit
de propriété « qui est perpétuel et se transmet aux héritiers ».1

3- Les Habous. « Il sont des biens immobilisés par un donateur


musulman et dont la jouissance profite aux bénéficiaires qu’il désigne ».2

4- Les droits d’usage et d’habitation. Ces droits permettent à leurs


titulaires et à leurs familles de bénéficier des prérogatives assez limitées :
« ainsi celui qui a l’usage des fruits d’un fonds ne peut prétendre qu’aux
fruits qui correspondent à ses propres besoins et à ceux de sa famille. De
même, le droit d’habitation se restreint à ce qui est nécessaire pour
l’habitation de son titulaire et de sa famille ».3

5- L’emphytéose. Le bail emphytéotique est un autre droit réel


principal. L’article 87 du dahir de 1915 fixe la durée de ce bail : elle va de
18 à 99 ans.

6- Le droit de superficie. L’article 97 du dahir précité décrit ce


droit comme étant « le fait de posséder des bâtiments ouvrages ou
plantations sur un fonds appartenant à autrui ».4

1
M. J. ESSAID, op.cit.p.358.
2
M. ELGHARBI et M. KORRY – YOUSSOUFI, op.cit.p.188.
3
M. J. ESSAID, op.cit.p.358.
4
Cité par M. J. ESSAID, op.cit.p.359.

103
7- Le droit de servitude. L’article 108 du dahir de 1915 définit la
servitude comme suit : « La servitude est une charge imposée pour l’usage
et l’utilité d’un immeuble appartenant à un autre propriétaire ». Un
exemple : la servitude de passage qui donne à son titulaire le droit de
passer sur le terrain d’autrui (moyennant une indemnité proportionnée au
dommage occasionné par le bénéficiaire). (Article 142 du dahir cité plus
haut).

b- Les droits réels accessoires.

On les appelle aussi les sûretés réelles. Les droits réels accessoires
n’ont pas une existence autonome. Ils sont destinés à garantir l’exécution
des droits de créance. Il s’agit de l’hypothèque et du gage.

1- L’hypothèque.

L’hypothèque est un droit réel du créancier portant sur un immeuble


du débiteur. Ce droit ne permet pas au créancier d’user de l’immeuble (la
chose) de son débiteur, mais seulement de faire servir cet immeuble à la
garantie de sa créance.1

L’hypothèque permet au créancier (hypothécaire) en cas de vente du


bien du débiteur sur saisie, d’être « payé par préférence à tout créancier
chirographaire, c’est-à-dire, titulaire d’un simple droit de créance. En cas
de pluralité d’hypothèques sur un même immeuble, la préférence suit
l’ordre chronologique des inscriptions à la conservation foncière et des
hypothèques ou l’ordre indiqué éventuellement par la loi ».2

2- Le gage.

1
F. Terré, op.cit.p.346.
2
M. BENYAHYA, op.cit.p.121.

104
C’est un droit réel accessoire qui permet au créancier « de retenir la
chose engagée jusqu’à parfait acquittement de la dette, de la vendre si
l’obligation n’est pas acquittée, et d’être payé sur le prix, en cas de vente
par privilège et préférence à tout autre créancier.1

B – Les droits personnels.

On les appelle aussi les droits de créance. Les droits personnels se


définissent comme étant des droits qui permettent à une personne, appelée
créancier, d’exiger d’une autre personne, le débiteur, l’exécution d’une
prestation définie par le contrat ou la loi, comme le remboursement d’une
dette, la livraison d’une marchandise, etc.

Dans certains cas, l’exécution de la prestation consiste en une simple


abstention, comme l’engagement du débiteur à l’égard de son créancier à
ne pas ouvrir dans le même quartier d’une boutique semblable à celle de
celui-ci.

C –Les droits intellectuels.

On les appelle également les droits de propriété intellectuelle. Ce


sont « des droits qui n’ont pas pour objet des choses matérielles, mais des
choses de l’esprit ».2

Il s’agit de la propriété littéraire et artistique, des inventions, des


marques de fabrique et des enseignes commerciales.

Les droits de propriété intellectuels « sont essentiellement des droits


moraux mais aussi, dans certains cas, des droits matériels (droits d’auteur,

1
Loi relative à la titrisation de créances hypothécaires promulguée par dahir no 1-99-193 du 25 août
1999, B.O.no 4726 du 16-9-1999, p.704, cité par M. BENYAHYA, op.cit.p.122.
2
M. BENYAHYA, op.cit.p.122 et M. CHARFI, op.cit.p.242.

105
droits de cession de la clientèle d’un fonds de commerce) conférant une
prérogative d’exploitation exclusive ».1

Signalons que les droits d’auteur ont fait l’objet de plusieurs


conventions internationales. Au Maroc, c’est la loi no 2-00 promulguée par
le dahir no 1-00-20 du 15 février 2000 qui régit ces droits. (B.O. no 4810
du 6 juillet 2000, p.604).

§ 2 – Classification des choses.

Nous nous focaliserons sur les classifications fondamentales. Il s’agit


de la distinction des meubles et des immeubles, des choses consomptibles
et des choses non consomptibles, des choses fongibles et celles non
fongibles.

A – La distinction des meubles et des immeubles.

Les meubles sont des biens qui peuvent être transportés d’un lieu à
un autre. Les immeubles sont des biens qui ne sont pas susceptibles d’être
déplacés sans dommage.

B – La distinction des choses consomptibles et des choses non


consomptibles.

Les choses consomptibles sont celles qui se consomment par le


premier usage (produits alimentaires, combustibles…).

Les choses non consomptibles sont, au contraire, celles qui font


l’objet d’usages répétés (voiture, maison…).

C – La distinction des choses fongibles et des choses non


fongibles.

1
M. BENYAHYA, op.cit.p.122.

106
Les choses fongibles sont celles « qui peuvent être remplacées
indifféremment par d’autres choses semblables ».1 En d’autres termes, les
choses fongibles sont des choses interchangeables, comme, par exemple,
les billets de banque, pièces détachées d’une machine.

Les choses non fongibles sont, au contraire, celles qui « sont


envisagées dans leur individualité »2, comme, par exemple, un tableau.

Section 2 – Les droits extra-patrimoniaux.

A la différence des droits patrimoniaux, les droits extra-patrimoniaux


n’ont pas de valeur pécuniaire.

Ce qui caractérise ces droits, c’est qu’ils « sont incessibles,


intransmissibles aux héritiers et aux légataires du titulaire, insaisissables
par ses créanciers et imprescriptibles ».3

Font partie des droits extra-patrimoniaux les droits politiques, les


droits de famille (obligation alimentaire…), les droits de la personnalité
(l’inviolabilité du domicile, liberté de circuler, droit à l’honneur…).

Les droits extra-patrimoniaux n’ont pas – on l’a dit– de valeur


pécuniaire. Mais « leur violation permet, cependant, d’obtenir, en justice,
une réparation sous forme de dommages-intérêts ».4 Exemple : quand une
personne a été atteinte dans son honneur par une diffamation, elle peut,
éventuellement, obtenir des dommages-intérêts qui constituent une
sanction pécuniaire.

1
F. Terré, op.cit.pp.341-342.
2
F. Terré, op.cit.p.342.
3
F. Terré, op.cit.p.350.
4
M. BENYAHYA, op.cit.p.119.

107
Chapitre 3 – Les sources des droits subjectifs.
Il y a deux sources des droits subjectifs : les actes juridiques et les
faits juridiques.

Section 1 – Les actes juridiques.

On peut définir les actes juridiques comme étant « des manifestations


de volonté accomplies en vue de produire des effets de droit et sans
lesquelles ces effets de droit ne se produiraient pas ».1

§ 1 – Classification des actes juridiques.

Il y a plusieurs catégories d’actes juridiques. On peut les résumer


comme suit :

A- L’acte unilatéral, l’acte bilatéral et l’acte multilatéral ou


collectif.

a- L’acte unilatéral.

« Un acte juridique est unilatéral lorsque l’effet juridique auquel il


tend résulte de la manifestation de volonté d’une seule personne ».2

1
F. Terré, op.cit.p.287.
2
F. Terré, op.cit.p.289.

108
C’est le cas, par exemple, du testament, ou la reconnaissance d’un
enfant naturel, ou la renonciation à succession.

b- L’acte bilatéral.

C’est un accord entre deux personnes. L’exemple type est le contrat


de vente « impliquant la volonté du vendeur et celle de l’acquéreur ».1

c- L’acte multilatéral ou collectif.

G. ROUJOU DE BOUBEE définit l’acte collectif comme étant


« l’acte juridique par lequel se manifestent les volontés d’un ensemble de
personnes unies par une communauté d’intérêts ou impliquées par une
action commune ».2 Ainsi en est-il d’une convention collective de travail
conclue entre les employeurs et les salariés d’un secteur déterminé.

B- Les actes à titre onéreux et les actes à titre gratuit.

a- Les actes à titre onéreux.

Ce sont des actes qui impliquent des avantages pécuniaires à chaque


partie. Ainsi en est-il de la vente, par exemple.

b- Les actes à titre gratuit.

Ce sont des actes qui n’impliquent aucun avantage de nature


pécuniaire à celui qui les effectue. C’est le cas de la donation, de testament,
par exemple.

C- Les actes entre vifs et les actes à cause de mort.

a- Les actes entre vifs.


1
M. BENYAHYA, op.cit.p.115.
2
Essai sur l’acte juridique collectif, thèse, Toulouse, 1961, citée par F. Terré, op.cit.p.290.

109
Les actes entre vifs sont des actes qui produisent des effets juridiques
du vivant de leurs auteurs. Ainsi, par exemple, la personne qui vend sa
voiture, doit se dessaisir immédiatement de ce bien faisant l’objet de la
vente.

b- Les actes à cause de mort.

Ce sont des actes dont les effets juridiques ne se produisent qu’après


le décès de l’une des parties. C’est le cas du testament, par exemple, dont
le bénéficiaire ne peut disposer des biens légués qu’après la mort de
l’auteur de ce testament.

D- Les actes conservatoires, les actes d’administration et les


actes de disposition.

a- Les actes conservatoires.

Ce sont des actes qui tendent à maintenir les droits dans leur état
actuel ou à les protéger1 Exemple : faire des réparations urgentes.

b- Les actes d’administration.

Ce sont des actes qui tendent « à faire fructifier un bien sans en
compromettre la valeur en capital ».2

c- Les actes de disposition.

Les actes de disposition « sont les actes qui intéressent les biens
considérés dans leur valeur de capital »3 C’est le cas de la vente d’un
immeuble, par exemple.

§ 2 – Conditions des actes juridiques.

1
M. BENYAHYA, op.cit.p.115 ; M. J. ESSAID, op.cit.p.330 ; François Ferré, op.cit.p.291.
2
François Terré, op.cit.p.291.
3
M. BENYAHYA, op.cit.p.116.

110
L’acte juridique ne peut produire d’effet que si certaines conditions
sont requises. Ces conditions se divisent en deux catégories : les conditions
de fond et celles de forme.

A- Les conditions de fond.

On abordera, brièvement, ces conditions en raisonnant sur l’exemple


du contrat.

a- La capacité.

On définit la capacité comme étant « l’aptitude d’une personne à être


titulaire de droits et à les exercer ».1Un incapable est celui à qui la loi ne
reconnaît pas le droit de conclure un acte juridique, en particulier un
contrat. La capacité est donc une condition de fond pour la validité d’un
contrat.

Les personnes qui sont considérées incapables de contracter sont


particulièrement les mineurs non émancipés et les majeurs protégés.

On distingue deux sortes d’incapacités : incapacité de jouissance et


celle d’exercice. On entend par incapacité de jouissance la privation
absolue d’une personne du droit de conclure des actes juridiques au sujet
desquels elle est incapable. Quant à l’incapacité d’exercice, elle aura lieu
lorsque l’incapable ne peut accomplir seul nombre d’actes ; il peut les
passer, « soit par l’intermédiaire d’un représentant (tuteur, par exemple),
soit avec l’assistance d’une autre personne ».2

b- Le consentement.

1
F. Terré, op.cit.pp.303-304.
2
F. Terré, op.cit.p.304.

111
Le consentement est l’accord de volontés destiné à produire un effet
juridique. Pour que le consentement puisse produire cet effet, il faut qu’il
soit exempt de vices.

L’article 23 du D.O.C fait état de trois vices du consentement : « est


annulable le consentement donné par erreur, surpris par dol, ou extorqué
par violence ».

1- L’erreur.

Il y a erreur lorsqu’une personne, au moins, ne consent à un acte que


parce qu’elle se trompe sur l’un de ses éléments.1

Deux cas d’erreur sont expressément retenus comme causes de


nullité des contrats : l’erreur sur la substance de la chose et l’erreur sur la
personne.

2- Le dol.

Le dol est une manœuvre destinée à tromper une personne pour


l’amener à contracter.

D’après cette définition, on peut dire que le dol est constitué de deux
éléments :

- Un élément matériel : l’emploi de moyens frauduleux ;

- Un élément intentionnel : l’intention d’induire le consentement en


erreur.

3- La violence.

1
F. Terré, op.cit.p.301.

112
C’est une contrainte physique ou morale exercée sur un individu
pour l’amener à conclure un contrat.

Ces trois vices du consentement sont sanctionnés par la nullité du


contrat.

c- L’objet.

« L’objet de l’acte juridique est l’obligation qu’il crée, modifie ou


éteint ».1

L’objet de l’acte juridique doit remplir trois conditions : l’objet doit


être certain, c’est-à-dire suffisamment précisé dans l’acte ; il doit être
possible ; et enfin, il doit être licite.

d- La cause.

On entend par la cause, le motif déterminant en raison duquel le


contractant accomplit l’acte juridique.

B – Lesconditions de forme.

Le principe est que les contrats sont consensuels. Cependant, certains


d’entre eux sont subordonnés à des conditions de forme. On peut résumer
ces conditions comme suit :

a- Formalité de preuve.

Pour éviter les difficultés de preuve, il est recommandé que les actes
de quelque importance qu’elle soit, doivent être rédigés par écrit.

b- Formalité de publicité.

1
F. Terré, op.cit.p.304.

113
Nombre d’actes juridiques entraînent des effets à l’égard des tiers.
Pour que ces actes produisent ces effets et soient, de la sorte, opposables
aux tiers, la loi exige alors qu’ils soient publiés.

L’inobservation de la formalité de publicité n’entraîne pas la nullité


de l’acte, mais il est, en principe, inopposable aux tiers.1

c- Formalités administratives.

Pour accomplir certains actes juridiques, la loi impose à leurs auteurs


l’obligation d’obtenir une autorisation administrative. Autre formalité :
certains contrats doivent être soumis à une déclaration obligatoire à des
organismes publics « pour permettre à ceux-ci de déceler éventuellement
certaines irrégularités ».2

Section 2 – Les faits juridiques.

Comme les actes juridiques, les faits juridiques peuvent être à


l’origine de droits subjectifs ou d’obligations.

On distingue les faits juridiques involontaires et les faits juridiques


volontaires.

§ 1 – Les faits involontaires.

Ce sont les faits qui se produisent indépendamment de la volonté de


telle ou telle personne qui peut être plus ou moins directement concernée
par ces faits. C’est le cas de la naissance, par exemple, qui génère de
nombreux droits subjectifs, ou le cas du décès « qui provoque l’ouverture
de la succession et la transmission aux héritiers des droits du défunt ».3

§2 –Les faits volontaires.

1
F. Terré, op.cit.pp.309-310.
2
F. Terré, op.cit.p.310.
3
M. J. ESSAID, op.cit.p.330.

114
Les faits juridiques ne sont pas uniquement involontaires ; ils
peuvent être aussi volontaires, c’est-à-dire voulus. Mais il ne faut pas
confondre ces faits volontaires avec les actes juridiques. « Dans l’acte
juridique, les parties veulent non seulement l’acte, mais aussi les
conséquences juridiques que la loi y attache ».1 Dans le fait juridique
volontaire, les conséquences juridiques impliquées par ce fait ne sont pas
directement recherchées. C’est ce que l’on peut constater dans le cadre de
la responsabilité civile et dans le cadre de ce qu’on appelle les quasi-
contrats.

A – La responsabilité civile.

L’article 77 du D.O.C stipule : « Tout fait quelconque de l’homme


qui, sans l’autorité de la loi, cause sciemment et volontairement à autrui un
dommage matériel ou moral, oblige son auteur à réparer le dit dommage,
lorsqu’il est établi que ce fait en est la cause directe ».

Si le dommage a été causé intentionnellement, on sera en présence de


ce qu’on appelle le délit civil. Mais si, au contraire, le dommage a été
causé par négligence ou par imprudence, on sera en présence de ce qu’on
appelle le quasi-délit.

B – Les quasi-contrats.

Dans le cadre des quasi-contrats, on peut citer la gestion d’affaires, le


paiement de l’indu et l’enrichissement sans cause.

a- La gestion d’affaires.

On entend par gestion d’affaires le fait qu’une personne (le gérant


d’affaires) accomplit un acte pour le compte d’une autre personne (le géré
ou maître de l’affaire) sans en avoir reçu mandat ou autorisation. Exemple :
1
F. Terré, op.cit.p.281.

115
une personne prend l’initiative de payer les dettes de son ami absent afin
d’éviter une saisie de ses biens.

b- Le paiement de l’indu.

L’article 68 du D.O.C en fait état : « celui qui, se croyant débiteur,


par erreur de droit ou de fait, a payé ce qu’il ne devait pas, a le droit de
répétition contre celui auquel il a payé ».

c- L’enrichissement sans cause.

Il arrive qu’une personne s’enrichit aux dépens d’autrui sans cause


juridique. Dans ce cas, l’enrichi doit « verser à la personne appauvrie une
indemnité ».1 Exemple : une personne effectue une construction sur le
terrain d’une autre personne. Et par le phénomène de l’accession, cette
construction va appartenir au propriétaire du sol. Celui-ci se trouve ainsi
enrichi injustement aux dépens du constructeur. L’appauvri, c’est-à-dire le
constructeur, a le droit d’obtenir la restitution de ce dont il s’est appauvri,
tout au moins dans la mesure de l’enrichissement procuré.2

1
M. ELGHARBI et Mohamed KORRY-YOUSSOUFI, op.cit.p.208.
2
F. Terré, op.cit.p.285.

116
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Regards sur dix années, REMALD, mai-juin, numéro 56, 2004.
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éd. Imprimerie : Editions Maghrébines, Casablanca, 2003.
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117
11- ELGHARBI Mustapha et KORRI-YOUSSOUFI Mohamed,
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« Trente années de vie constitutionnelle au Maroc », ouvrage collectif
dirigé par BASRI, ROUSSET Et VEDEL, LGDJ, Paris, 1993.
17- NAJI-MEKKAOUI Rajaâ, Introduction aux sciences juridiques
(en arabe), Imprimerie Almaârif aljadîda, Rabat, 1998.
18- SMIRES M’faddel, De l’exercice extra-parlementaire de la
fonction législative, REMALD, septembre-octobre, numéro 40, 2001.
19- SQALLI Abdelaziz, Introduction à l’étude du droit marocain,
Sofapress, Fès, 1995.

118
Table des matières.

Introduction ……………………………………………………………………. 1
Première partie : Le droit objectif ……………………………………………... 3
Chapitre 1 – Les caractères essentiels de la règle de droit et des autres règles de
conduite sociale ………………………………………………………………... 5
Section 1 – Les caractères de la règle de droit ………………………………… 5
§ 1- Le caractère général de la règle de droit ………………………………….. 5
§ 2 - Le caractère obligatoire de la règle de droit ……………………………... 6
A – Les règles impératives ou d’ordre public …………………………………. 7
B – Les règles supplétives ou interprétatives de volonté ……………………… 7
§ 3 – Le caractère coercitif de la règle de droit ………………………………... 9
A – Les sanctions en matière civile ……………………………………………. 9
a – La nullité ………………………………………………………………..… 10
b– Les dommages-intérêts ……………………………………………………. 10
c – La contrainte ……………………………………………………………… 10
B – Les sanctions en matière pénale ………………………………………….. 10
a- Les crimes ………………………………………………………………….. 11
b- Les délits correctionnels …………………………………………………… 11

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c- Les délits de police ………………………………………………………… 12
d- Les contraventions ………………………………………………………… 12
Section 2 – Les caractères des autres règles de conduite …………………….. 12
§1 - Le droit et la morale ……………………………………………………... 12
A – Les ressemblances entre la morale et le droit ……………………………. 13
B – Les dissemblances (les différences) entre la règle de droit et la morale …..13
§ 2 – Le droit et la religion …………………………………………………… 15
Chapitre 2 – Le fondement de la règle de droit ………………………………. 18
Section 1 – Les théories idéalistes ou du droit naturel ……………………….. 18
Section 2 – Les théories positivistes …………………………………………. 20
§ 1 – Le positivisme juridique ou étatique …………………………………… 21
§ 2 – Le positivisme sociologique ……………………………………………. 21
Chapitre 3 – Classification des règles de droit ……………………………….. 25
Section 1 – Le droit privé …………………………………………………….. 25
§ 1 – Le droit civil ……………………………………………………………. 25
§ 2 – Le droit commercial ……………………………………………………. 26
§ 3 – Le droit international privé …………………………………………….. 27
Section 2 – Le droit public …………………………………………………… 27
§ 1 – Le droit constitutionnel ………………………………………………… 28
§ 2 – Le droit administratif …………………………………………………... 28
§ 3 – Le droit de finances publiques …………………………………………. 28
§ 4 – Le droit international public ……………………………………………. 29
Section 3 – Les critères de distinction du droit public et du droit privé ……… 29
Section 4 – Les droits mixtes …………………………………………………. 30
§ 1 – Le droit pénal …………………………………………………………… 31
§ 2 – La procédure civile ……………………………………………………... 31
§ 3 – Le droit du travail ………………………………………………………. 31
Chapitre 4 – Les sources du droit …………………………………………….. 33
Section 1 – Les sources directes ……………………………………………… 33

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§ 1 – Les sources internationales de la règle de droit ………………………… 33
§ 2 – Les sources nationales (ou internes) de la règle de droit ……………….. 35
I – La Constitution ……………………………………………………………. 35
II – La loi ……………………………………………………………………... 36
A – L’élaboration de la loi ……………………………………………………. 36
a- La proposition ……………………………………………………………… 36
b- L’examen et le vote de la loi ………………………………………………. 37
c- La promulgation de la loi ………………………………………………….. 40
d- La publication de la loi ……………………………………………………. 42
B – L’application de la loi ……………………………………………………. 42
a- L’application de la loi dans le temps ………………………………………. 44
1 – Le principe de la non-rétroactivité des lois nouvelles ……………………. 44
2 – Le principe de l’effet immédiat des lois nouvelles ……………………….. 48
b- L’application de la loi dans l’espace ………………………………………. 49
C – L’autorité de la loi ………………………………………………………... 50
D – Le domaine de la loi ……………………………………………………... 53
a- Les matières prévues dans l’article 46 de la Constitution …………………. 53
b- Les autres domaines de la loi ……………………………………………… 54
c- La création législative non parlementaire …………………………………. 59
E – L’abrogation de la loi …………………………………………………….. 64
a- L’abrogation expresse ……………………………………………………... 65
b- L’abrogation tacite ………………………………………………………… 65
III – Le règlement …………………………………………………………….. 66
A – Les catégories du règlement ……………………………………………... 66
a- Les dahirs ………………………………………………………………….. 66
b- Les décrets ………………………………………………………………… 67
c- Les arrêtés ministériels ……………………………………………………. 68
B – L’autorité du règlement ………………………………………………….. 69
a- Le recours pour excès de pouvoir …………………………………………. 69

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b- L’exception d’illégalité ……………………………………………………. 70
C – Le domaine du règlement ………………………………………………... 70
IV – La coutume ……………………………………………………………… 71
A – L’élément matériel ……………………………………………………….. 72
B – L’élément psychologique ………………………………………………… 72
Section 2 – Les sources indirectes de la règle de droit ……………………….. 74
§ 1 – La jurisprudence ………………………………………………………... 74
A – La notion de jurisprudence ………………………………………………. 74
B – Le rôle de la jurisprudence ………………………………………………. 74
C – La jurisprudence, source de droit ? ……………………………………… 75
§ 2 – La doctrine ……………………………………………………………… 77
Deuxième partie : Les droits subjectifs ………………………………………. 79
Chapitre 1 – Les sujets des droits subjectifs ………………………………….. 81
Section 1 – Les personnes physiques ………………………………………… 81
§ 1 – La personnalité juridique ……………………………………………….. 81
A – Le point de départ de la personnalité juridique ………………………….. 82
B – La fin de la personnalité juridique ……………………………………….. 82
§ 2 – L’identification des personnes physiques ……………………………… 83
A – Le nom ………………………………………………………………….... 83
B – Le domicile ………………………………………………………………. 84
C – L’état civil ………………………………………………………………... 86
Section 2 – Les personnes morales …………………………………………… 86
Chapitre 2 – La diversité des droits subjectifs ………………………………... 88
Section 1 – Les droits patrimoniaux ………………………………………….. 88
§ 1 – Les droits réels, les droits personnels et les droits intellectuels ………... 88
A – Les droits réels ………………………………………………………….... 88
B – Les droits personnels …………………………………………………….. 92
C – Les droits intellectuels …………………………………………………… 92
§ 2 – Classification des choses ……………………………………………….. 93

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A – La distinction des meubles et des immeubles ……………………………. 93
B – La distinction des choses consomptibles et des choses non consomptibles 93
C – La distinction des choses fongibles et des choses non fongibles ………… 93
Section 2 – Les droits extra-patrimoniaux ……………………………………. 94
Chapitre 3 – Les sources des droits subjectifs ………………………………... 95
Section 1 – Les actes juridiques ……………………………………………… 95
§ 1 – Classification des actes juridiques ……………………………………… 95
A – L’acte unilatéral, l’acte bilatéral et l’acte multilatéral ou collectif ………. 95
B – Les actes à titre onéreux et les actes à titre gratuit ……………………….. 96
C – Les actes entre vifs et les actes à cause de mort …………………………. 96
D – Les actes conservatoires, les actes d’administration et les actes de
disposition …………………………………………………………………….. 97
§ 2 – Conditions des actes juridiques ………………………………………… 97
A – Les conditions de fond …………………………………………………… 97
a- La capacité …………………………………………………………………. 98
b- Le consentement …………………………………………………………… 98
c- L’objet ……………………………………………………………………... 99
d- La cause …………………………………………………………………... 100
B – Les conditions de forme ………………………………………………… 100
a- Formalité de preuve ………………………………………………………. 100
b- Formalité de publicité ……………………………………………………. 100
c- Formalités administratives ……………………………………………….. 100
Section 2 – Les faits juridiques ……………………………………………... 101
§ 1 – Les faits involontaires ………………………………………………… 101
§ 2 – Les faits volontaires …………………………………………………... 101
A – La responsabilité civile ………………………………………………… 102
B – Les quasi-contrats ……………………………………………………… 102
a- La gestion d’affaires ……………………………………………………... 102
b- Le paiement de l’indu ……………………………………………………. 102

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c- L’enrichissement sans cause ……………………………………………... 103
Bibliographie ………………………………………………………………... 104
Table des matières …………………………………………………………... 106

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