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Filière : DROIT

Module : INTRODUCTION AU DROIT PRIVE

Unité : INTRODUCTION AU DROIT POSITIF

Enseignant : Marghich Abdellah

Support de cours N° 2

Groupe : 1 et 2

Année universitaire : 2020/2021

Chapitre 3. Identification de la règle de droit


Le système juridique apparaît comme un ensemble, de règles qui gouvernent la vie
sociale. Ce corps de règles s'appelle Droit objectif.
Comment distinguer la règle juridique d'un précepte religieux ou d'une obligation
morale, plus généralement des autres règles qui gouvernent la vie sociale, jusqu'aux
usages mondains?
Des signes extérieurs permettent, en général, de repérer la règle de droit parce que
celle-ci est consacrée par un texte de loi ou par une coutume que tout le monde connaît.
Sources formelles du droit, lois et coutumes en sont deux révélateurs.
Mais au fond, existe-t-il un critère intrinsèque qui distinguerait la règle de droit de
toutes les autres règles de la vie sociale?
Une règle est l'énoncée d'une obligation générale. C'est une disposition obligatoire et
générale. Cependant, cela reste vrai concernant toutes les règles de conduite humaine
mais, d'abord, des règles de droit.
A ces caractères génériques, communs à toutes les règles, la règle de droit associe
des caractères spécifiques qui la distinguent des autres règles de vie sociale.

Section 1. Caractères de la règle de droit


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La règle de droit apparaît comme une règle de conduite humaine qui permet,
ordonne ou défend aux personnes se trouvant dans une certaine situation de se comporter
d'une certaine manière. Cette définition est cependant imprécise car elle pourrait
s'appliquer à toutes les règles de conduite dont certaines n'ont rien de juridique: préceptes
religieux et moraux, règles de courtoisie, savoir-vivre et usages mondains etc.
Cela est si vrai que certaines règles de droit ne font que reprendre certaines règles
religieuses ou morales. Tel est le cas de la plupart des infractions pénales: la loi interdit de
tuer, de voler, de blesser son prochain, etc., au même titre que la religion ou la morale. La
règle de droit ne se distingue donc pas des autres règles par son objet, même si le droit
réglemente par ailleurs des domaines qui sont totalement étrangers à la morale ou à la
religion, par exemple: le Code de la route.
On pourrait en revanche, être tenté de caractériser la règle de droit par la forme
qu'elle revêt. On ferait alors remarquer que, dans leur immense majorité, les règles de
droit apparaissent sous la forme des lois, de décrets ou arrêtés, etc. qui sont souvent réunis
dans des Codes: code civil, code de commerce, code pénal, etc. on dirait alors que le
droit, c'est ce qui est dans les codes et les textes annexes.
D'un point de vue pratique, on serait proche de la réalité car il y a finalement assez
peu de règles de droit qui ne soient pas inscrites dans des textes, ou dérivées de ces textes.
Or un tel critère formel est quelque peu frustrant pour l'esprit qui se satisferait mieux d'un
critère tenant au fond, un critère qui permettrait de distinguer la règle de droit des autres
règles de conduite sociale. On est alors conduit à mettre en valeur certains caractères de la
règle de droit: caractère obligatoire, général et abstrait d'une part; caractère coercitif
d'autre part.
Si les premiers se rencontrent souvent dans les autres règles de conduite, le dernier
est spécifique à la règle de droit.
§l. Caractère général et abstrait :
- Le caractère général: Toute règle se définit par un certain caractère de généralité.
Non point qu'il n'y ait de règle qu'universelle et éternelle: la généralité de la règle est
relative. Sous cette précision, la vocation de la règle est de s'appliquer, à un groupe
d'individus (tous les citoyens de l'Etat, les membres d'une même profession).
Par essence, la règle de droit est une disposition absolument impersonnelle qui a
vocation à s'appliquer à un nombre indéterminé de personnes se trouvant dans telle
situation déterminée. Par exemple, les textes sur le redressement judiciaire s'appliqueront
à tous les commerçants en état de cessation de paiement: le caractère général ressort très
clairement ici parce que la situation régie intéresse une fraction significative de la
population.

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Autre exemple: les règles de droit qui régissent les examens de licence en droit
s'appliquent à tous les étudiants inscrits aux différentes facultés de droit du pays, peu
importe leurs noms, leur nombre ou leur sexe. Or, peu importe le nombre de personnes
auxquelles la règle est susceptible de s'appliquer, dès l'instant que celle-ci est conçue de
manière générale.
C'est un ordre impersonnel adressé par le législateur à un nombre indéterminé de
personnes non identifiées (quiconque ... toute personne ... celui qui ...) se trouvant dans la
situation particulière qu'il cherche à réglementer (situation de débiteur, situation de
délinquant, situation d'étudiant.. .). Elle s'adresse à chacun d'entre nous sans viser
personnes en particulier.
La loi est une norme impersonnelle et commune. C'est le contraire d'une mesure
individuelle prise par les autorités étatiques et visant une ou plusieurs personnes
dénommées.
Toutefois, peu importe le nombre de personnes auxquelles la règle est susceptible de
s'appliquer dès l'instant que celle-ci est conçue de manière générale. A la limite, on peut
même concevoir une règle de droit générale qui, en fait, ne s'appliquera qu'à une seule
personne. Tel est par exemple le cas des règles relatives au mode de désignation du
président de la Cour de cassation. A la vérité, la règle s'appliquera à tous les candidats
mais elle aboutira à la désignation d'un titulaire unique. Aussi, un texte ne visant que le
premier ministre reste général car il concerne tous les premiers ministres.
De même, on sait que certaines règles ont vocation de principe, d'autres ont valeur
d'exception. Mais l'exception aussi est une règle, car elle a vocation à saisir une série de
cas, non à donner, dans un cas singulier, une solution individuelle. Ce caractère général et
impersonnel fait que la norme juridique s'applique de façon objective. L'impersonnalité de
la loi est une garantie contre l'arbitraire puisqu'elle n'est pas faite pour ou contre une
personne déterminée. Elle représente ainsi une source de sécurité et d'égalité pour les
citoyens.
-Caractère abstrait: la règle de droit présente un caractère abstrait en ce qu'elle vise
des situations générales, et non pas la situation précise dans laquelle se trouve telle ou
telle personne.
En cela, la règle de droit se distingue radicalement des décisions de justice. En effet,
les décisions de justice, émaneraient-elles de la Cour de cassation qui est la plus haute
juridiction, ne sont pas des règles de droit, mais des mesures individuelles par lesquelles
le pouvoir judiciaire donne un ordre qui met fin à un litige entre deux ou plusieurs
personnes dénommées. Une telle décision judiciaire fait application d'une règle de droit à
une situation particulière, elle n'a de force juridique qu'entre les parties au procès, sans
pouvoir être opposée aux tiers. C'est le principe de l'autorité relative de la chose jugée.

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Autant dire qu'un jugement est tout le contraire d'une règle de droit puisque, étant un
ordre particulier et concret, il n'a aucune vocation à s'appliquer en dehors du procès dans
lequel il a été rendu1.
Il est interdit au juge d'édicter des règles de droit. Le juge peut interpréter et
appliquer la règle de droit et non pas à la confectionner.
§2. Caractère obligatoire et coercitive
_ Caractère obligatoire: le caractère obligatoire est le propre de toute règle. On le
retrouve tout naturellement dans la règle de droit. La loi n'a pas pour fonction de faire des
recommandations ou de donner des conseils. Elle est un commandement, elle veut être
obéie, elle exprime un ordre. Ce caractère apparaît d'évidence lorsque la règle interdit tel
comportement, par exemple lorsqu'elle définit et réprime les infractions pénales ou, plus
généralement, lorsqu'elle interdit de causer un dommage à autrui. C'est une interdiction
que la loi fait aux citoyens.
Ainsi, la règle de droit, qu'elle prescrive l'accomplissement d'un acte (porter secours
à une personne en détresse ...), soit qu'elle interdise d'en accomplir un autre (voler le bien
d'autrui, causer un dommage à autrui ...), elle demeure un ordre c'est évident. Or, même
lorsque la loi est libérale, permissive, par exemple, lorsqu'elle ouvre, pour un individu,
une faculté ou établit un droit, la règle de droit est un ordre adressé à tous les autres de
respecter cette liberté ou ce droit. Le caractère obligatoire de la règle n'apparaît pas
seulement dans une interdiction ou dans une prescription, mais dans une permission
(elle-même garantie, par une interdiction), ou dans l'affirmation d'un droit.
Si toutes les règles sont obligatoires, elles n'ont toutefois pas la même force
obligatoire. En d'autres termes, elles ne s'imposent pas avec la même force. Certaines
s'imposent de manière absolue, d'autres sont susceptibles de dérogations par convention
contraire. Ainsi, toute situation est régie par des règles de droit, mais elle peut l'être soit
de manière impérative par la loi qui ne tolère aucun écart, soit de manière simplement
supplétive, laissant au citoyen la possibilité de l'écarter.
I. Les lois impératives
Dite aussi d'ordre public, la loi impérative est celle à l'application de laquelle on ne
peut échapper par une convention contraire. Elles organisent la société. Tel est le cas de
toutes les règles pénales, des règles du droit des personnes (mariage, filiation,
succession...), la plupart des règles de la procédure civile et pénale, du droit du travail. ..

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On verra par la suite que la jurisprudence, c'est-à-dire, la manière habituelle de juger en chaque matière, constitue une
source de droit.

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Bref, ces règles s'imposent de façon absolue, on ne peut les écarter par aucune
convention contraire. En conséquence, toute violation de ces règles entrai ne une sanction
étatique.
II. Les lois supplétives
Une loi est dite supplétive (ou interprétative de volonté), lorsque bien que destinée à
régir une situation précise, elle peut être écartée par une volonté contraire exprimée.
Ainsi, certaines règles générales de la vente ne sont appliquées qu'en l'absence de clause
dérogatoire dans le contrat.
En revanche, lorsque les parties n'ont rien prévues dans le contrat, la loi supplétive
qui règle le point négligé par les parties devient obligatoire. Et pas seulement, même les
stipulations d'un contrat sont obligatoires. Ainsi, le jour où ces parties décident d'écarter la
loi supplétive au profit de leur propre volonté, ils doivent obligatoirement appliquer les
stipulations contractuelles.
Aux termes de l'article 230 du D.O.C. « les obligations contractuelles, valablement
formées, tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites, et ne peuvent être révoquées que de
leur consentement mutuel et dans les cas prévus par la loi ». Ce principe signifie que le
contrat est la loi des parties, et c'est une règle impérative qui donne ce caractère
obligatoire aux stipulations une fois conclues et voulues par les parties.
Donc, ce caractère obligatoire de la règle de droit connaît des degrés. Non seulement
on peut se soustraire à la règle en évitant de tomber dans son domaine d'application, mais
on peut aussi écarter, par une convention contraire, les règles normalement appliquées,
sauf celles impératives qui sont sanctionnées par l'autorité publique.
La question qui se pose désormais est de savoir comment distinguer les règles
impératives des règles supplétives? Parfois, et c'est généralement le cas, le législateur
déclare expressément que telle disposition est d'ordre public. Exemple: l'article 77 du
D.O.C prévoit que « Tout fait quelconque de l'homme qui, ..., cause sciemment et
volontairement à autrui un dommage matériel ou moral, oblige son auteur à réparer ledit
dommage, lorsqu'il est établi que ce fait en est la cause directe. Toute stipulation contraire
est sans effet ».
Pour une loi supplétive: il y a souvent cette expression: on annonce la règle, puis on
termine par « sauf stipulation contraire». Ex. art. 913 du D.O.C. qui concerne les
obligations du mandant: « le mandant est tenu de fournir au mandataire les fonds et autres
moyens nécessaires pour l'exécution du mandat, s'il n'y a usage ou convention contraire».
C'est une loi supplétive.
Mais bien souvent, dans le silence de la loi, c'est le juge qui, saisi de la validité d'une
clause contraire à une loi, devra décider du caractère impératif ou supplétif de la règle de

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droit écartée et en déduire la validité ou la nullité de la clause. A ce titre, il sera amené à
interpréter la loi.
A ces caractères qui peuvent être communs à toutes les règles, la règle de droit
associe des caractères spécifiques qui la distinguent des autres règles de vie sociale.
Caractère coercitif:
Le caractère coercitif de la règle de droit résulte de ce qu'elle est sanctionnée. Et
c'est la nature étatique de la sanction qui fait toute la différence: la contrainte étatique. Si
l'ordre juridique exclut la justice privée, qui serait le pouvoir pour le titulaire d'un droit, de
se faire justice à soi-même, c'est parce que, par compensation, il assume lui-même la
fonction de justice (ou s'y applique). Ainsi, étant donné que nul ne pouvant se faire justice
à soi-même, l'action en justice est, pour le citoyen le mode normal pour faire reconnaître
et sanctionner ses droits.
L'existence d'une sanction ne peut être considérée comme l'élément spécifique de la
règle de droit. En effet, les autres règles de conduite sont également sanctionnées: les
règles morales, par le remord ressenti dans le for intérieur, les principes du savoir-vivre et
les règles de bienséance, par la réprobation du milieu, qui peut aller jusqu'à l'exclusion du
milieu.
Notre droit, ayant, des fondements moraux, religieux, il ne faut pas s'étonner que
certaines règles de droit soient à la fois morale, religieuse et de droit comme l'interdiction
de voler ou de tuer etc. Pareille coïncidence est fréquente dans la mesure où se concordent
les domaines du droit, de la morale et de la religion, mais elle n'enlève aucune valeur à
l'affirmation que la règle de droit se reconnaît à sa sanction. De plus, il faut ajouter que le
droit est généralement moins exigeant que la morale ou la religion, ainsi lorsque la règle
de droit se réfère à la notion de bonnes mœurs, ce sont des bonnes mœurs temporisés,
minimales par rapport à ce que la morale ou la religion postuleraient.
Cependant, ce qui différencie la règle de droit des autres règles, ce n'est pas la
sanction, mais l'autorité qui l'impose. Sans ce caractère, une règle de droit ne serait pas
une véritable règle. C'est la puissance publique qui est habilitée à faire respecter ces règles
de conduite que sont les règles de droit. La justice est une dette publique, un devoir de
l'Etat envers les citoyens, et il faut bien voir que le recours à la justice englobe le recours
à la force publique car il comprend: le droit, pour un citoyen, de faire reconnaître son
droit en justice par une action en justice. Le droit d'en obtenir ensuite l'exécution forcée,
par les voies légales d'exécution si besoin est. Bref, toutes les règles de droit, mais seules
les règles de droit, peuvent bénéficier pour leur application d'une sanction étatique: la
force publique est au service du droit; le droit en a le monopole.
Ce critère appelle, cependant, plusieurs observations :

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-La loi laisse parfois un choix entre plusieurs situations, en effet, la loi réglemente
des situations auxquelles on peut parfois se soustraire, échappant ainsi à la règle
correspondante: par exemple, nul n'est contraint de se marier, ni d'ouvrir un commerce.
D'autres fois, pour une même situation, le législateur ouvre un choix entre plusieurs
moules juridiques: c'est ainsi que les fondateurs d'une société de commerce peuvent opter
entre diverses formules: société en nom collectif, société anonyme etc. User d'une option
offerte n'est pas faire échec à l'autorité de la loi. Mais une fois le choix arrêté, la norme
juridique correspondante devient d'emblée applicable.
Il existe aussi toute une série de sanctions destinées à faire régner l'ordre.
-La diversité des sanctions: sanctions civiles et sanctions pénales
Dire qu'une règle de droit est sanctionnée, cela signifie qu'on peut en demander
l'application en justice, qu'elle peut servir de fondement à un recours judiciaire. Suivant
que la décision du juge aura été rendue en matière civile ou en matière pénale, la nature
de la sanction sera différente.
-En matière pénale, le terme de sanction convient à merveille puisqu'il s'agit d'une
peine infligée à celui dont le comportement antisocial se trouve incriminé par la loi
pénale. Ainsi, toute violation d'une des règles importantes constitue une infraction pénale
sanctionnée par des peines. Certaines sanctions pénales s'exercent sur les biens de
l'individu (amendes plus ou moins élevées suivant l'infraction) ; d'autres, plus graves,
portent sur la personne même du coupable (peines privatives de liberté: emprisonnement,
réclusion criminelle perpétuelle ou à temps.
Selon le principe de la légalité sur lequel repose le droit pénal et la procédure pénale,
la législation pénale détermine tous les comportements qui troublent la société. Pas
d'infraction, et pas de peine sans texte de loi. Un tel principe suppose, puisqu'il admet la
notion de peine et d'infraction, la nécessité d'une répression qui protège l'ordre social.
Mais le même principe consacre la sauvegarde des libertés individuelles, puisque sans
texte il n'y a pas d'infraction ni peine. De cette façon, on évite l'arbitraire. Ce principe
signifie que toutes les infractions doivent être prévues par la loi. Et pour chaque
infraction, la loi qui la définit et la crée, prévoit un maximum de peine applicable.
De ce fait, les infractions pénales sont classées suivant leur gravité, en crimes, délits
et contraventions. Or, la gravité d'une infraction se marque dans la peine dont la loi
réprime cette infraction.
1). Les crimes: il s'agit des infractions les plus graves que la loi détermine comme
telle, ex. : meurtre, et sont punies par la loi d'une peine qui varie entre la peine de mort et
la dégradation civique'".

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2). Les délits qui caractérise dans l'échelle des infractions celles du deuxième degré
par opposition à contravention et à crimes. Le tribunal est compétent pour connaître des
délits (vol, agression, usage et trafic de stupéfiants ...). Ce sont donc des infractions de
gravité moyenne qu'on appelle délits correctionnels dont la peine dépasse les 2 ans. On
peut également ajouter à ces derniers un autre type de délits à savoir les délits de police
qui se situent entre les délits correctionnels et les contraventions (la peine encourue est
d'un maximum égal ou inférieur à 2 ans'".
3). Les contraventions: ces dernières appartiennent à une catégorie d'infraction
située au bas de l'échelle de gravité comme par exemple, les contraventions de police, et
qui donnent lieu à des sanctions légères.
Enfin, on peut ajouter et dire que dans la mesure fréquente où l'infraction pénale
cause un préjudice non seulement à l'ordre social mais à des particuliers, par exemple:
coups et blessures, vol, l'auteur encourra à la fois une sanction civile (restitution,
dommages et intérêts) et une sanction pénale; cela ne soulève qu'un problème de
coordination des instances civile et pénale.
-En matière civile: le terme de sanction est excessif. Il s'agira le plus souvent de
réparer le préjudice subi par une personne du fait du comportement d'une autre, que cet
auteur soit un cocontractant ou un tiers. Aussi, ces sanctions civiles sont plus fréquentes
que celles pénales. La décision judiciaire expose en premier lieu les motifs, puis, par un
dispositif, annonce sa décision: il peut s'agir:
- Soit d'annuler tel acte juridique: il s'agit d'une sanction prononcée par le juge et
consistant dans la disparition rétroactive de l'acte juridique qui ne remplit pas les
conditions requises pour sa formation. Par exemple, lorsqu'une vente est affectée d'un
vice au motif qu'elle aurait été conclue par erreur, ou par une personne n'ayant pas la
capacité nécessaire, le contrat est annulé.
-Soit de condamner telle personne à des dommages-intérêts. Il s'agit d'une somme
d'argent attribué soit à un créancier pour le réparer du dommage qu'il a subi suite à
l'inexécution, la mauvaise exécution ou le retard dans l'exécution des obligations de son
cocontractant, soit à un tiers victime d'un accident en dehors de tout contrat, par exemple
accident de la circulation etc. Les dommages-intérêts ont pour objet de réparer le
dommage causé à une personne en faisant en sorte de le rendre à la situation où il se
trouvait avant Je dommage.
-L'exécution forcée: Le juge peut également condamner telle partie à un contrat à
exécuter celui-ci conformément à ce qui a été convenu: ordre de livrer la chose objet du
contrat, ordre de payer ce qui a été promis, ordre d'expulsion.

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Aussi, il pourra être fait appel à la force publique pour l'exécution de la décision
judiciaire. Ainsi, si le débiteur ne paie pas sa dette, il est possible suite un jugement de
procéder à la saisie de ses biens meubles et immeubles.
Limite : D'un autre côté, il reste que la faiblesse et la limite du droit apparaît aussi
dans cette quête dont les résultats sont bornés, décevant. Pourquoi? La sanction peut en
effet être plus au moins parfaite. Le versement d'une somme d'argent pour la réparation
d'un préjudice corporel ou d'un dommage moral peut être juridiquement adéquat.
Humainement, est-il satisfactoire? La compensation est toujours dérisoire. Il ne faudrait
pas exagérer l'importance de la coercition dans la règle juridique. Le droit ne vit pas
éternellement sous la contrainte. Le plus souvent, la sanction étatique joue un rôle
préventif et reste à l'état de menace. Ainsi, la règle de droit est spontanément respectée; et
telle est bien en définitive la fonction de la sanction (caractère dissuasif).
La règle de droit a pour objet d'organiser et de réglementer la vie en société. Aussi,
la vie en société suppose en effet le respect d'un certain nombre de règles afin de prévenir
les conflits et, à défaut, de les régler. Le droit organise la société et les rapports des
hommes entre eux; il établit des règles qui tendent à réaliser un certain équilibre et à
conférer à tous la sécurité. A défaut de telles règles, la société serait livrée à la loi du plus
fort, c'est-à-dire à la violence.
On est, en conséquence, amené à un rapprochement avec les autres règles de
conduite, qui découlent de la religion, de la morale, etc. En quoi les règles de droit s'en
diffèrent-elles?
§1. Règles de droit et règles religieuses :
Dans certains systèmes juridiques, les règles religieuses peuvent être le droit du pays
considéré. Dans d'autres systèmes, le droit est purement laïc. En revanche, il existe dans
un grand nombre de sociétés, des systèmes juridiques intermédiaires dans lesquels le droit
s'inspire de la règle religieuse sans pour autant s'identifier à elle complètement.
Certes, il existe un certain nombre de comportement condamnés au même titre par la
loi et la règle religieuse et ce dans tous les systèmes: tuer son prochain, voler. Mais qu'en
est- il des autres règles qui sont loin des préceptes religieux: le Code de la route ... ?
Comment les distinguer?
D'abord par leur finalité: la règle religieuse vise à porter l'homme vers un univers
meilleur, et s'occupe d'avantage des relations entre l'homme et son créateur. Or, la règle
de droit vise à sauvegarder la paix social et ce, en premier lieu, et organise les relations
entre les humains au sein de la société parfois même en violation d'une règle religieuse.
Ensuite, elles se distinguent quant à l'origine et à la nature de la sanction de chacune des
règles.

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§2. Règles de droit et règles morales :
La distinction est ici beaucoup plus difficile à faire dans la mesure où la morale est
partout. La morale relève de la conscience, individuelle ou collective, et elle peut donc
s'entendre non seulement de la morale au sens strict, qui concerne principalement
l'individu, mais de la morale sociale qui tend à répondre aux besoins du groupe dans
lequel vit l'individu. Or, la morale est plus exigeante que le droit: la morale attend de
l'homme un dépassement.
Le précepte juridique n'est ni une règle de salut, ni une loi d'amour, c'est un facteur
d'ordre, un régulateur de la vie sociale, un modérateur, une norme. De ce fait, la règle de
droit et la règle morale se distinguent d'une part, à travers le caractère d'extériorité. Ainsi,
la règle de droit échappe à l'individu pour s'imposer à lui comme un fait objectif,
extérieur. En revanche, l'examen de la règle morale permet de remarquer que celle-ci
provient essentiellement de la conscience individuellement de chacun d'entre nous.
D'autre part, elle s'en distingue par l'origine de la sanction également: la sanction
juridique a une origine étatique alors que la sanction morale découle de la psychologie de
l'individu ou de la société, mais n'est jamais étatique. Elle provient du remord.
Parfois, la loi rejoint la morale lorsque, par exemple, elle instaure une protection
particulière en faveur de ceux qu'elle considère être dans une position inférieure: les
salariés par rapport aux patrons, les consommateurs par rapport aux fournisseurs etc.
Aussi, de nombreux préceptes moraux sont consacrés par le droit: ainsi en est-il du
principe du respect de la parole donnée, de la loyauté qui interdit le dol dans la conclusion
des contrats, de la bonne foi dans l'exécution des contrats, de la conformité aux bonnes
mœurs requise en matière des conventions, et de la responsabilité en cas de faute. On
constate que le droit s'inspire de la morale.
Cependant, droit et morale sont de faux amis. Le droit demeure moins exigeant que
la morale, même lorsqu'il couvre un devoir moral; les bonnes mœurs constituent un
minimum garanti de décence et d'honnêteté publique qui a horreur du scandale, non un
idéal qui glorifie la conscience. Quant aux mobiles, le droit ne les considère jamais
isolément. Le droit ne prend pas en considération les états d'âme qu'à l'occasion du geste
qui leur donne une existence et une portée sociales. A propos de cet acte, le droit tient
compte du mobile qui l'a inspiré, qu'il soit bon ou mauvais, pour en faire une circonstance
atténuante ou aggravante, mais toujours à propos d'un agissement extérieur, non intérieur.
La morale, en revanche, s'adresse aux intentions profondes de l'homme.
§3. Règles de droit et autres règles de conduite :

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Il s'agit des règles de bienséance, de courtoisie, de savoir vivre, ou encore aux
usages. Finalement, on vise ici ce qu'il est d'usage de faire dans une société donnée, ou
dans un groupe donné. Ex. : les félicitations, les condoléances ...
On admet aisément qu'il ne s'agit pas là de règles de droit, que chacun est libre de se
comporter comme il l'entend, au risque d'être rejeté par la société. Ainsi, la contrainte
reste le critère de distinction le plus important entre ces deux règles. Mais on admettra
aussi corrélativement qu'il est préférable de se conformer à ces règles de conduite si on
souhaite s'intégrer au milieu dans lequel on vit. Cela dit, certaines règles de conduite
finissent parfois par être consacrées par le droit. Ainsi en est-il du pourboire (aux USA
par exemple, et même en France) est devenu un service, tarifé par la loi et intégré dans le
salaire, alors qu'auparavant il était donné au gré du client.

Titre II : Les divisions du droit


Le système juridique n'est pas d'un seul ordre. Le droit objectif se divise en branches
dont chacune se subdivise à son tour à d'autres branches. A la base, les règles de droit ne
sont pas isolées: elles se réunissent pour former des ensembles dotés d'un degré croissant
de généralité. Ainsi, les règles relatives aux droits et devoirs respectifs des époux
concourent à définir l'institution du mariage, laquelle est un élément du droit de la famille,
lequel est une partie du droit civil, etc. Entre l'unité et le tout, il suffit de présenter les
branches maîtresses du droit.
Ainsi, il Y a toujours une nécessité de classer pour présenter. Car on voit clairement
que les règles de droit ont un registre très étendu et que ce ne sont pas les mêmes
préoccupations qui animent les unes et les autres. D'où l'intérêt qu'il y a à classer les
règles de droit, ne serait-ce que pour des intérêts pédagogiques et pour permettre à chacun
de découvrir les domaines couverts par le droit. Une classification est d'autant plus
nécessaire que l'époque actuelle se caractérise par une multiplication des règles et par une
spécialisation de plus en plus grande qui a été dénoncée comme un déclin du droit.
En droit marocain, la division repose sur la distinction du droit privé et du droit
public, distinction souvent critiquée mais souvent suivie.
La distinction du droit privé et du droit public:
L'incertitude règne sur le point de savoir quel est le critère de distinction entre ces
deux grandes branches.
On pourrait dire tout simplement: le droit étant l'ensemble des règles qui régissent
les rapports des personnes entre elles, on distingue les rapports entre personnes privées,

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qui relèvent du droit privé, et ceux dans lesquels interviennent des personnes publiques
auxquels s'applique le droit public.
Critères de distinctions:
Pour assoir cette distinction, on propose deux critères principaux tenant à l'objet et
aux finalités du droit privé et du droit public :
Premier critère: le droit privé régit les rapports des particuliers entre eux, quelle
que soit leur nature économique ou non, ou plus généralement l'activité des particuliers:
par exemple, le mariage, les divers contrats, la construction ou location d'un logement. Or,
par particulier, on entend les individus (personnes physiques) mais aussi des groupements
tels que les sociétés civiles ou commerciales, les syndicats et les associations de toute
nature: les personnes morales. A l'inverse, le droit public tend à organiser l'Etat et les
collectivités publiques et à régir leurs relations avec les particuliers.
Deuxième critère: on constate que le droit public recherche la satisfaction de
l'intérêt général d'une part, et assure l'exercice de la puissance publique. Alors que le droit
privé, est au service de l'intérêt de l'individu, il protège les intérêts particuliers. Or, cette
idée n'est pas complètement juste car même le droit privé tend à protéger la société et
l'intérêt général par exemple dans le cas des responsabilités civiles délictuelles. De son
côté, le droit public tend également à la protection des intérêts individuels. En dépit des
privatisations, l'Etat se livre parfois, à des activités semblables à celles des particuliers.
On pourrait chercher d'autres critères de distinction telles que: la compétence des
juridictions (l'action de l'Etat et des collectivités ne peut être contrôlé par un juge de
l'ordre judiciaire, mais par un juge spécial qui relève de l'ordre administratif), les règles de
droit applicables (les règles qui figurent dans les codes civils, de commerce, ne
s'appliquent pas aux personnes publiques: ex. les contrats administratifs ... ) et les
prérogatives exceptionnelles dont disposent l'Etat et les collectivités publiques (décisions
unilatérales, expropriations ... ) ce qui n'est pas le cas des particuliers.
Dans les facultés de droit marocain, certaines matières sont enseignées comme étant
des matières classiques de droit privé , alors que d'autres matières sont présentées comme
étant des matières aussi classiques de droit public Or, il existe des matières que l'on peut
considérer comme étant intermédiaire ou mixte.
Nous verrons successivement les matières composant le droit public, ensuite les
matières composant le droit privé.
D'autres matières ne peuvent être classées ni parmi le droit public, ni parmi le droit
privé seront étudiées "au niveau d'une troisième branche : les matières mixtes.

A : LES MATIERES DU DROIT PUBLIC :

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Comme nous l'avons vu, le droit public est formé par l'ensemble des règles
juridiques qui gouvernent l'organisation de l'Etat et des collectivités publiques; il régit
aussi les relations de ces entités avec les particuliers. Dans ce cas nous sommes en
présence du droit public interne. Lorsque les relations juridiques visent d'autres Etats ou
d'autres organisations internationales; ou régionales, c'est le droit public international qui
prend place.
a- Le droit public interne:
Parmi les matières qui constituent le droit public interne, incontestablement le droit
constitutionnel et le droit administratif sont les matières les plus importantes.
Les matières telles que, les finances publiques et les libertés publiques commencent
à s'émerger ces dernières années.
1- Le droit constitutionnel :
L'appellation «constitutionnel» vient du fait que la source principale de cette matière
est la constitution. C'est le droit qui se trouve à la tête de la pyramide des règles
juridiques, toutes les autres règles de droit, doivent s'y soumettre.
Le droit constitutionnel est le droit qui fixe les règles de base de l'organisation
générale de l'Etat. Il fixe les prérogatives et les limites des différents pouvoirs : Pouvoir
Exécutif, législatif et judiciaire.
En plus le droit constitutionnel permet d'étudier les différents régimes existants :
monarchie ; république libérale ou socialiste ..., la forme de l'Etat: unitaire, fédéral ou
confédéral et ses éléments constitutifs ; territoire, population, nation, souveraineté,
gouvernement. ..
2 - Le droit administratif:
Ce droit qui émerge du premier est communément appelé le droit de
l'administration.
Ce droit à deux fonctions principales.
Il permet de connaître l'organisation interne de l'administration (Etat, établissements
publics, communes, provinces, préfectures ...) 'ainsi que les pouvoirs attribués aux
autorités publiques: chef de l'Etat, ministres, gouverneurs ...
Il permet aussi de régir les rapports qui peuvent exister entre l'administration et les
particuliers, notamment les moyens d'action et les différends qui peuvent naître.
3- Les finances publiques:

13
Avec l'importance du budget de l'Etat et la nécessité d'une meilleure utilisation des
fonds publics, ce droit qui jusqu'à une époque récente faisait partie intégrante du droit
administratif, s'est détaché pour prendre son autonomie par rapport à ce dernier.
Les finances publiques ou droit public financier est le droit qui s'intéresse à l'étude
des règles se rapportant au budget général de l'Etat et ses démembrements. Ce droit
détermine les moyens permettant à l'Etat qui parfois par la contrainte à se procurer des
recettes, il fixe aussi les modalités des dépenses du budget.
4 - Les libertés publiques:
C'est une matière qui durant ces dernières années a pris une importance capitale avec
les voix qui se sont levées à travers le monde pour défendre les droits de l'Homme. La
majorité des pays a consacré directement par des textes législatifs ou indirectement par la
pratique un certain nombre de libertés publiques : liberté d'opinion, liberté de réunion,
liberté d'association, liberté de presse, d'expression etc... Ce droit permet l'étude de ces
différentes libertés et les moyens pour les sauvegarder.

b- le droit international public:


Un Etat quel que soit son importance économique, géopolitique, ne peut s'enfermer
dans ses frontières. Les relations internationales sont devenues indispensables voire
cruciales pour l'épanouissement et développement d'un pays, c'est le droit international
public qui permet de mettre en place ces relations.
Le droit international public est donc le droit qui régit les rapports qui peuvent
exister entre les Etats d'une part et entre Etats et organisations régionales et
internationales d'autre part, il réglemente de ce fait, le statut, l'organisation, le
fonctionnement et les relations de ces différents groupements.
Ainsi ce droit englobe des domaines très divers, c'est lui qui permet de définir les
composants d'un Etat, il permet aussi de régler les conflits frontaliers.
Cette discipline en dépit de son importance est fortement contestée, car ce qui
caractérise la règle de droit des autres règles de conduite, est le pouvoir de sanctionner; or
ce droit se trouve dépourvu de toute sanction. On ne peut contraindre un pays à exécuter
les décisions internationales. Cela provient du fait qu'il n'y a pas d'autorité super étatique
disposant d'un pouvoir de contrainte à l'égard de l'Etat qui enfreint les règles du droit
international public. Et pourtant il existe des tribunaux internationaux notamment la cour
internationale de justice; toutefois ses décisions ne s'appliquent que si l'Etat auquel elles
s'adressent, veut bien s'y soumettre.

14
Cette absence de sanctions a fait dire à certains juristes que le droit international
public n'est formé que par un ensemble de règles morales et de règles d'usage s'adressant
aux Etats sans aucune contrainte. En fait cela est vrai en partie, mais la pratique montre
que bon nombre d'Etats se soumettent volontairement aux règles de droit international
public. La sanction super étatique a fait son apparition ces dernières années, c'est à partir
de la première guerre du Golf et suite à l'effondrement de l'Union Soviétique, un
consensus international s'est formé autour de la nécessité du respect des décisions
internationales. Des troupes onusiennes et des troupes des pays membres de l'ONU se
sont intervenus dans différents endroits du globe, pour rétablir la démocratie, pour
instaurer la paix ou pour venir en aide à tel ou à tel pays. A côté de l'intervention militaire,
la sanction économique est de plus en plus utilisée. L'embargo économique opéré contre
l'Afrique du sud, l'Irak, la Libye et Haïti en sont des exemples.
Force est donc de constater que le droit international public commence lui aussi de
se doter de la sanction qui constitue le principal critère d'identification de la règle de droit.
S'agissant de ses sources, le droit international public tire ses règles essentiellement
des traités internationaux, de la coutume internationale, des principes généraux de droit et
de la jurisprudence internationale.
Telles sont les principales matières du droit public, quelles sont les matières du droit
privé.

B : LES MATIERES DU DROIT PRIVE:


On ne cesse de le répéter ce droit régit les relations juridiques des individus entre
eux et l'Etat lorsqu'il n'agit pas en tant que puissance publique.
Comme le droit public, nous verrons le droit privé : interne et le droit international
privé.
a- le droit privé interne:
1 - le droit civil :
Incontestablement, c'est le droit le plus important. Jusqu'à une époque récente, le
droit privé était composé essentiellement de droit civil. C'est le droit commun. Ainsi en
plus des règles qu'il régit, ce droit est en quelques sortes un droit de secours, chaque fois
qu'il y a un vide juridique dans les règles spéciales, on se réfère à ce droit pour résoudre
les problèmes en suspens.
Comme son nom l'indique, le droit civil régit les rapports des individus dans leurs
relations privées. Au Maroc ce droit réglemente un certain nombre de domaines:
15
- il détermine tous les éléments du statut des personnes (nom, capacité, état civil,
Domicile). .
- il réglemente aussi tous les problèmes de biens et de la famille, mariage, divorce,
répudiation, filiation, successions ...
- il régit enfin des matières de grande importance : ce sont les obligations et contrats
et les droits réels et personnels.
En France le code civil englobe tous ces domaines au Maroc, plusieurs textes sont
consacrés pour les matières civiles : le code de statut personnel réglemente la filiation, la
famille, et le mariage, le dahir des obligations et contrats, régit les différentes obligations
et les différents contrats usuels et le code de droits réels du 22novembre 2011 qui fixe la
législation applicable aux immeubles immatriculés.
2- Le droit commercial:
Pendant longtemps le droit commercial faisait partie intégrante du droit civil. C'est à
partir du 17eme siècle et avec le développement du commerce, l'organisation corporative
des marchands et l'apparition de l'Etat moderne que ce droit commença à se détacher du
droit civil. Les pratiques commerciales sont différentes du formalisme du droit civil. Le
commerce est basé sur la confiance réciproque, la rapidité, le crédit .... Actuellement dans
de nombreux pays, le droit commercial est indépendant du droit civil. Le Maroc fait partie
de ces Etats. La réglementation commerciale a commencé avec le dahir formant code de
commerce du 12 août 1913 ; en 1996, ce dahir a été abrogé et un nouveau code de
commerce a été promulgué. Le droit commercial est "le droit relatif aux opérations
juridiques faites par les commerçants, soit entre eux, soit avec leurs clients. Ces
opérations juridiques se rapportent à l'exercice du commerce et sont dites pour cette
raison activités commerciales.
Peu importe que le commerçant, soit une personne physique, ou une personne
morale. La réglementation commerciale est assez nombreuse et ce pour régir les situations
plus diverses : code de commerce de 1996, lois sur les sociétés de 1996 et de 1997, loi
bancaire de 1993, dahir de 1992 sur la comptabilité commerciale, etc ...
3- le droit maritime:
Souvent considéré comme faisant partie du droit commercial. Mais en dépit de son
caractère commercial, ce droit garde certaines règles qui lui sont propres et qui datent de
l'antiquité. Ce droit est régit au Maroc par le code de commerce maritime du 31 mars
1919. C'est un code qui de l'avis des spécialistes constituait un chef d'œuvre à l'époque. Il

16
était de loin meilleur que le code maritime français. L'essentiel de ses dispositions sont
tirées de la loi fédérale américaine.
Le droit maritime, est le droit relatif aux règles juridiques se rapportant à la
navigation, au transport par mer et aux assurances maritimes. Aussi c'est le droit du
navire, à ce titre il fixe les modalités d'acquisition de la nationalité, du port d'attache, il
fixe enfin les limites de la mer territoriale et les droits qui s'y attachent.
4- le droit de travail ou droit social :
Selon une définition restreinte, le droit du travail est le droit des travailleurs. Selon
une définition large, le droit du travail est constitué par P ensemble des règles applicables
aux relations individuelles et collectives de travail entre employeurs et employés au sein
d'une entreprise ou d'un établissement privé.
Avec le développement économique et le recours de plus en plus à une main
d'œuvre extra - familiale, le droit du travail a pris de l'importance, c'est ainsi qu'il régit
actuellement toutes les relations de travail depuis le recrutement en passant par les
conditions d'exercice du travail, jusqu’aux modalités de licenciement ou de démission.

Le droit du travail englobe le caractère social en intégrant le problème de la sécurité des


travailleurs. Il réglemente aussi, les syndicats, les problèmes de grève et de look - out.
Contrairement aux autres disciplines, le droit de travail est réglementé par un ensemble de
textes législatifs traitant matière par matière. Le premier texte est le D.O.C, qui définit le
contrat de louage ou de travail, d'autres textes sont venus au fur et à mesure des
revendications des salariés: semaine des 48h ; congés payés; repos hebdomadaire ...
Force est de constater que la législation du travail est constituée par un corps
hétéroclite de dahirs et de décrets traitant les différents problèmes soulevés dans les
relations de travail entre employeurs et employés. Elle est caractérisée aussi par une
réglementation sectorielle, en effet on trouve des règles propres au secteur industriel et
commercial, d'autres sont réservées à l'agriculture et d'autres à certaines catégories tels les
voyageurs, les représentants et les placiers. Cette pluralité est fortement critiquée du fait
qu'elle privilège certains et défavorise d'autres.
Enfin, la réglementation du travail présente deux autres caractères : elle est
ineffective, et exclusive. La pratique et les contentieux au sein des tribunaux nous
donnent de multitudes d'exemples de son ineffectivité. Les travailleurs du secteur

17
traditionnel ne sont pas protégés par la législation sociale et par conséquent ne peuvent
prétendre aux différents avantages accordés par ce droit social.
Conscients de ces insuffisances, le gouvernement a présenté un projet de code de
travail qui pendant longtemps n'a pas pu trouver de consensus; a finalement été adopté par
le parlement et ce après plus de dix ans de tractions entre les syndicats et les employeurs.
b- le droit international privé:
C'est la branche de droit sui régit les relations privées des particuliers marocains
comportant un élément d'extranéité, c'est à dire un élément international.
Exemple 1 : Un touriste marocain blessé à la suite d'un accident de circulation à
Paris, est en droit de connaître la juridiction compétente et quel serait le droit applicable?
Exemple 2 : Un marocain marié à une française vivant en Angleterre décide de répudier
sa femme. Quel serait le droit applicable pour la grade des enfants: droit français
marocain ou anglais et quelle serait la juridiction compétente?
Selon ces deux exemples, le droit international privé réglemente:
-Les conflits de lois : c'est à dire les conflits qui peuvent s'opposer entre plusieurs
lois nationales, et c'est à lui que revient le mérite de nous indiquer la loi applicable.
-Les conflits de juridictions : c'est à dire les conflits qui existent entre deux ou
plusieurs juridictions pour régler un problème donné. En d'autres termes, le droit
international privé nous permet de connaître quel est le tribunal compétent en cas
d'existence d'un élément d'extranéité.
Par ailleurs, le droit international privé est compétent pour connaître deux autres
domaines importants: la condition des étrangers et le problème de nationalité.
-la condition des étrangers: revient à déterminer les conditions d'entrée, de séjour et
les droits dont peuvent bénéficier les étrangers au Maroc.
-la nationalité; le dahir qui réglemente cette matière nous permet de connaître les
modalités d'octroi et de retrait de ce lien juridique et politique entre la personne et l'Etat.
Les principaux textes régissant le droit international privé sont:
-le dahir du 12 août 1913 sur la condition civile des étrangers au Maroc.
-le dahir su 5 septembre 1953 sur la nationalité marocaine.
-le dahir du 4 mars 1960 sur la célébration des mariages mixtes entre marocains et
étrangers.

18
Ce droit est parfois classé parmi les matières mixtes étant donné qu'il traite des
relations privées, mais aussi des affaires dont l'Etat est partie prenante, telles, la condition
des étrangers et la nationalité.

c - Les matières mixtes:


Sont appelées ainsi, parce que ces matières sont à cheval entre le droit public et le
droit privé, d'où la difficulté de les classer parmi l'une de ces deux grandes branches. Il
s'agit principalement du droit pénal, de la procédure pénale et du droit judiciaire privé.
a- le droit pénal:
Ce droit qui parfois appelé droit criminel se subdivise pour donner le droit pénal
général et le droit pénal spécial.
-le droit pénal général est « formé par l'ensemble des règles qui définissent,
préviennent et sanctionnent les infractions ».
L'étude du droit pénal général est souvent faite en deux parties: la première est
réservée à la théorie générale de l'infraction (Définition et classification des infractions,
éléments constitutifs de l'infraction, élément légal, matériel et moral).
Le deuxième est généralement consacré aux sanctions pénales (diverses sanctions
pénales; atténuation; aggravation et les modalités d'exécution).
-le droit pénal spécial nous donne une énumération des divers agissements
criminels, en précisant les éléments constitutifs et les sanctions qui s'appliquent; c'est lui
qui nous permet de qualifier par exemple: le vol, l'escroquerie, l'abus de confiance, le
meurtre etc.
Le droit pénal est une matière mixte du fait qu'on ne peut le classer ni parmi le droit
public, ni parmi le droit privé. C'est ainsi lorsqu'un délinquant trouble l'ordre établi et
porte atteindre à la sécurité et à la paix publiques, l'Etat intervient pour restaurer à
nouveau la quiétude au sein de la société en recherchant, en condamnent et en
sanctionnant le délinquant.
Vu sous cet angle le droit pénal est incontestablement, un droit de nature publique.
Par ailleurs, les droits lésés sont des droits privés, la victime qui s'oppose au
délinquant n'est qu'un particulier, le procès qui est intenté vise aussi à assurer une justice
privée, réprimer le vol pour protéger les biens de l'individu; condamner le meurtre pour

19
sauvegarder l'intégrité physique des citoyens. Il vise donc à protéger des intérêts privés, il
a par conséquent des affinités avec le droit privé.
Ainsi ce droit vise à la fois les intérêts privés et les intérêts publics d'où son
classement parmi les matières mixtes.
b- la procédure pénale:
C'est une discipline qui appartient à deux ensembles, le contexte criminel et le
contexte procédural. Cette matière vise à faire appliquer le droit pénal et la politique
criminelle d'un Etat.
S'agissant du droit pénal, on s'aperçoit que la procédure se situe entre l'infraction et
la mesure pénale, c'est le temps consacré au procès pénal, il est imposé par le principe de
la légalité des délits et des peines. Principe exprimé sous l'adage « pas de peine sans
jugement ». Cela veut dire qu'aucune mesure pénale ne peut être infligée à une personne
avant le déroulement du procès pénal. Principe consacré par l'article 23 de notre
constitution.
La procédure pénale apparaît donc comme une condition nécessaire pour
l'application du droit pénal.
S'agissant de la politique criminelle, grâce à la procédure pénale l'Etat vise à :
-Intimider et dissuader les criminels à ne pas commettre d'infractions.
-Découvrir les infractions et les délinquants.
-Choisir une mesure pénale appropriée.
Pour arriver à ces fins, la procédure pénale passe par, plusieurs phases.
1 ère phase : policière ; enquête et recherche des infractions et des délinquants,
instruction des dossiers.
2ème phase: judiciaire tribunal compétent, instruction, action publique ... enfin
décision de condamnation.
3ème phase: pénitentiaire: phase importante, en effet l'école de la défense sociale et
la majorité des criminologues mettent l'accent sur la rééducation des criminels et leur
réinsertion dans la société.
c- le droit judiciaire privé:
Appelé aussi procédure civile, cette matière a pris son autonomie du droit civil pour
former une discipline indépendante.

20
Le droit judiciaire privé permet de :
-Définir les règles de mise en œuvre des droits privés devant les diverses juridictions
civiles, depuis le dépôt de la requête jusqu'à la phase du prononcé de la décision.
-Connaître l'organisation judiciaire du pays: compétence, composition, organisation
et fonctionnement des différentes juridictions.
Le droit judiciaire privé est une matière mixte, du fait que si on prend en
considération le premier objectif, à savoir le déroulement du procès civil et la matière
dont les particuliers peuvent obtenir leurs droits c'est une matière de droit privé.
Si on se réfère à son second but à savoir l'organisation judiciaire, on devrait le
classer parmi les matières du droit public, vu qu'il vise a organiser un service public.
Telles sont les principales branches de droit, avec la remarque qu'on enregistre
actuellement une multiplication des matières par création ou par subdivision au sein des
principaux droits. Le droit bancaire, le droit de la propriété industrielle et le droit de
propriété littéraire sont des sous-produits du droit commercial. Le droit de la sécurité
sociale et le droit de l'immigration se sont détachés du droit social.
Le droit foncier et le droit rural qui faisaient partie du droit civil jusqu'à une date
récente, ont pris maintenant leur autonomie.
Cette multiplication de droit dans la vie moderne nous oblige à nous interroger sur
les disciplines qui s'apparentent au droit.

Titre III. Les sources du droit :


La diversité des sources: il ne s'agit pas ici de rechercher le pourquoi des règles de
droit positif qui nous régissent. Sans doute ont-elles toutes un fondement, tantôt
philosophique, tantôt matériel. C'est ainsi que les données sociales et économiques
imposent une remise à jour incessante de nombreux textes, Le système juridique n'est pas
un ordre immuable. La vie du droit est non seulement dans son évolution, mal dans sa
connaissance et sa mise en œuvre (cheminement de la règle abstraite à son application
concrète). La vie du droit va de ses sources à son accomplissement.
Quand on parle de sources du droit, on s'interroge seulement sur le point de savoir
comment, à l'époque actuelle, on crée du droit. Les différentes façons dont les règles
juridiques sont établies.

21
Il est généralement répondu que ces sources sont nombreuses, parce qu'on y fait
entrer tout ce qui, même indirectement, peut entraîner soit une règle de droit nouvelle, soit
un sens nouveau à une règle préexistante. En ce sens, on dira que la jurisprudence,
c'est-à-dire la manière habituelle de juger, est une source de droit parce qu'en appliquant
les textes à la situation litigieuse, le juge est amené à procéder à des ajustements ou à des
additions non prévus à l'origine. De même, les tribunaux sanctionnent, outre les règles
textuelles, certains grands principes qui nous viennent d'un lointain passé, certaines règles
non-écrites issues de la tradition, des usages, de la coutume. De même encore, il arrive
que le droit découle de la doctrine ou de la pratique ou des usagers eux-mêmes qui créent
de toutes pièces ou importent des formules juridiques nouvelles pour satisfaire à des
besoins d'apparition récente.
Bref, le droit est plus grand, plus étendu' que les textes qui en sont les sources
formelles. Ces textes demeurent cependant la source primordiale du droit. C'est donc à ces
textes, source formelle du droit, qu'il convient de donner la première place, sans pour
autant négliger les autres sources dont l'importance est parfois délicate à apprécier. On dit
que « la société se donne des lois; elle suit des coutumes ».
On envisagera d'abord les sources officielles: la loi et la coutume sont les deux
sources directes et obligatoires du droit objectif. Il serait équivalent de dire, que par leur
source, les règles de droit se divisent en règles légales et en règles coutumières.
On examinera ensuite les autre sources du droit dont l'importance est loin d'être
négligeable: la jurisprudence, la doctrine même si ces dernières sont considérées comme
de simple autorités, des sources par voie d'interprétation.

Chapitre 1. Les sources officielles :


Il s'agit des sources qui produisent des règles immédiatement et obligatoirement
applicables par le juge. On distingue entre les textes (la loi, la législation) et la coutume.
Section 1. Les sources formelles : les textes
Les textes sont classés suivant un principe hiérarchique. Après avoir étudié les textes
dans cette hiérarchie, on examinera successivement leurs conditions d'applications, leur
interprétation, leur application dans le temps et l'espace.
Par textes, on entend les règles écrites émanant des autorités politiques et
administratives, en principe nationales mais aussi internationales.
-Quelques précisions quant aux sources internationales:

22
La convention de vienne de 1969 définit le traité comme étant « un accord
international conclu par écrits entre Etats et régis par le droit international ». En principe,
lorsqu'ils ont été régulièrement ratifiés ou approuvés, les traités devraient se situer dans la
hiérarchie des normes entre la constitution et les lois ordinaires. Ils doivent être
conformes à la constitution. Cependant, la constitution marocaine ne donne pas de
précisions lorsqu'un traité comporte des dispositions contraires à la loi interne et s'il
devrait ou non prévaloir sur celle-ci.
Toutefois; l'article 55 de la constitution dispose que les traités susceptibles de
remettre en cause les dispositions de la constitution doivent être approuvées selon les
procédures prévues pour la réforme de la constitution 2 . Cette disposition manifeste
clairement la supériorité de la constitution sur les engagements internationaux. Qu'en
est-il des lois?
Le préambule de la constitution affirme que: « Conscient de la nécessité d'inscrire
son action dans le cadre des organismes internationaux, dont il est un membre actif et
dynamique, le Royaume du Maroc souscrit aux principes, droits et obligations découlant
des Chartes des dits organismes et réaffirme son attachement aux droits de l'Homme, tels
qu'ils sont universellement reconnus. De même, le Royaume du Maroc réaffirme sa
détermination à œuvrer pour le maintien de la paix et de la sécurité dans le monde ».
On pourrait en déduire qu'il existe une suprématie des conventions et des traités sur
l'ordre juridique interne. Cette constatation est également consacrée non pas par la
constitution, mais pas plusieurs textes législatifs. C'est ainsi que le Code de la nationalité
marocaine du 6 septembre 1958 a affirmé la supériorité du traité sur la loi interne. Ainsi,
l'article premier de ce même code dispose que: « Les dispositions des traités ou accords
internationaux ratifiés et publiés prévalent sur celles de la loi interne».
Toutefois, cette question restera source de controverses tant que le Maroc n’aurait
pas prévu expressément une disposition formelle sur la primauté du traité sur la loi.
-Sources internes:
Concernant les textes, il s'agit de l'ensemble des dispositions écrites adoptées par les
autorités politiques ou tout organe compétent. On classera les textes suivant l'autorité qui

2
L'article 55 de la constitution dispose que: « le Roi accrédite les ambassadeurs auprès des puissances étrangères et des organismes
internationaux. Les ambassadeurs ou les représentants des organismes internationaux sont accrédités auprès de Lui.

Il signe et ratifie les traités. Toutefois, les traités engageant les finances de l'Etat ne peuvent être ratifiés sans avoir été préalablement approuvés
par-là loi.

Les traités susceptibles de remettre en cause les dispositions de la Constitution sont approuvés selon les procédures prévues pour la réforme
de la Constitution»

23
leur est attachée (sous-section I). Le système marocain connaît à cet égard un principe
hiérarchique suivant lequel aucun texte ne peut aller à l'encontre d'un autre qui lui serait
supérieur (sous-section II). Ensuite, on étudiera le domaine d'application des textes (sous-
section III) et leurs méthodes d'interprétation (sous-section IV).
Sous-section 1. Classification des textes :
Sur le terrain des sources du droit, les textes désignent indifféremment les textes
émanant du pouvoir constituant (c'est-à-dire la constitution) ceux adoptés par le pouvoir
législatif (loi formelle: organique ou ordinaires) et ceux pris le pouvoir exécutif (le
règlement).
Pour s'en tenir à une présentation générale, on trouvera ainsi: La constitution, les lois
organiques, les lois ordinaires et enfin, les règlements.
§1. La constitution :
La constitution c'est l'ensemble des règles relatives à l'établissement, à l'exercice et à
la transmission des pouvoirs publics. Elle règle également les relations entre l'Etat et
l'individu. Elle constitue un instrument de garantie et de défense des droits et des
libertés3.
La première Constitution du Maroc date de 1962. Lorsque le pays recouvrit son
indépendance, le souverain, Mohamed V œuvra pour la mise en place d'institutions
politiques et constitutionnelles. Ce fut tout d'abord la création du Conseil consultatif
national par dahir du 3 août 1956 qui restera en fonction jusqu'en mai 1959: il s'agit d'un
embryon de parlement, même s'il n'était ni constituant, ni législatif, mais seulement
consultatif. Les membres de ce conseil étaient tous désignés par le roi. Il disparaît en mai
1959.
Reste à préciser que le mode d'élaboration de la future constitution fut un grand
problème qui a donné naissance à une controverse passionnée posant le problème du
pouvoir constituant. Bref, la constitution fut préparée par un cour constitutionnelle qui
devait établir des institutions démocratiques dans le cadre de la monarchie
constitutionnelle tout en respectant les principes fondamentaux de l'Islam et les
particularités du Maroc. Ce conseil se composait de 78 membres et regroupait différentes
tendances politiques. Il devait préparer le texte et le soumettre à l'approbation du-roi avant
de le soumettre au référendum. La formule fut un échec à cause de l'abandon de certains

3
Tous les pays n'ont pas forcément une constitution: la Grande Bretagne. Cependant, si d'une part les règles qui régissent la vie politique en
Grande Bretagne sont en partie coutumières, elles comportent de nombreux textes écrits. Enfin reste à préciser que certains pays comme la
Libye ou l'Arabie Saoudite (bien qu'elle ait adopté une « loi fondamentale du pouvoir en 1992), invoquent le Coran et la Sunna comme loi
suprême.

24
partis politiques et la prédominance du parti de l'Istiqlal. Après cette controverse, la
constitution a été rédigée par les soins du feu Hassan II et sera adopté par le référendum le
7 décembre 1962. Par la suite, la constitution de 1962 a
fait l'objet de cinq révisions donnant lieu à quatre constitutions (1970, 1972, 1992, 1996 et
2011).
La constitution est un pacte écrit fixant les règles régissant l'exercice du pouvoir
ainsi que l'organisation et le fonctionnement des institutions. Elle définit donc, les droits
et les devoirs de l'Etat et du citoyen, l'organisation et le fonctionnement des pouvoirs
publics (parlement, le gouvernement etc.). Il s'agit en quelque sorte du statut de l ' Etat.
En effet, l'Etat contemporain se présente comme une institution, c'est-à-dire comme une
personne morale, détentrice de pouvoir. Or, le propre des personnes morales est de ne
pouvoir exister qu'en vertu d'un statut Le statut de l'Etat est sa constitution.
La constitution se situe au sommet de la hiérarchie des normes à raison de divers
facteurs:
-Sa procédure d'élaboration: qui élabore le texte? Un monarque, un dictateur ou
une assemblée? Le procédé le plus démocratique est celui qui consiste à associer le peuple
considéré comme le pouvoir constituant originaire à la rédaction de la loi suprême. Ceci
peut se faire par le biais d'une assemblée appelée pouvoir constituant institué. Le texte
ainsi élaboré sera soumis au peuple par référendum.
-Son objet qui est l'organisation du pouvoir entre les diverses autorités de l'Etat, les
diverses assemblées et qui constitue le pacte social régissant des gouvernants et des
gouvernés. C'est la constitution qui donne au parlement et au gouvernement le pouvoir
d'édicter des règles de droit. C'est pourquoi; elle reste l'acte le plus important de notre
droit étant donné qu'elle définit le régime politique de notre pays, les différents pouvoirs
et leurs compétences et les libertés individuelles et collectives réservées aux citoyens.
Aussi, ni lois, nu règlement ne doivent la contredire.
-Le contenu de la constitution: après un préambule composé de 6 alinéas, la
constitution comporte 180 articles, répartis en 14 titres. On y trouves les règles re1atives
aux principes fondamentaux (tous les marocains sont égaux, l'islam est la religion de
l'Etat, la garantie des libertés individuelles: liberté de circuler, d'opinion, d'association ...
), à la royauté, au parlement, au gouvernement, aux rapports entre les pouvoirs: le roi et le
parlement, parlement et gouvernement, au cour constitutionnelle, à la justice, à la haute
cour (qui juge de la responsabilité des membres du gouvernement dans le cadre de leurs
fonctions), au conseil économique et social (qui peut être questionné par le gouvernement
et les deux chambres du parlement sur toutes les questions économiques ou social), à la
Cour des comptes (chargée d'assurer le contrôle supérieur de l'exécution des lois de
finances et assure la régularité des opérations des recettes et des dépenses des organismes

25
soumis à son contrôle et sanctionne les manquements aux règles ), aux collectivités
locales, à la révision de la constitution etc. L'étude de ces questions relève pour l'essentiel
du droit constitutionnel.
§2. Les lois :
A part le pouvoir judiciaire, tous les autres pouvoirs étaient, durant la période qui a
précédé la constitution de 1962, confondus entre les mains du chef de l'Etat. Or,
contrairement au système traditionnel, le nouveau régime est définit par l'article premier
de la constitution de 1962 comme étant « un régime de monarchie constitutionnelle,
démocratique et sociale ». Conformément à ces principes nouveaux, la constitution de
1962 avait posé une distinction fondamentale concernant les sources du droit: c'est la
distinction du domaine de la loi et du domaine du règlement. Pour la première fois dans
l'histoire du pays la constitution consacre et met en œuvre le principe de la séparation des
pouvoirs législatifs et exécutifs. Le pouvoir législatif est donc attribué au parlement, alors
que le pouvoir réglementaire est dévolu au gouvernement. Tout ce que l'on vient
d'évoquer a été réaffirmé par les autres constitutions.
Plusieurs questions seront abordées dans ce paragraphe: Définition de la loi (A) et
son élaboration de la loi (B).
A. Détermination de la loi :
Afin de définir la loi, on doit d'abord distinguer entre loi et règlement, connaître tous
les types de lois que la constitution prévoit ainsi que leurs domaines respectifs.
1. Distinction de la loi et du règlement:
La première constitution du Royaume a subi l'influence de la constitution française
de 1958. Celle-ci consacre la séparation des pouvoirs et distingue entre la loi et le
règlement. Cette distinction était simple car seul le parlement détenait le pouvoir de
légiférer et tous les textes étaient des lois au sens strict du terme, c'est-à-dire des actes
émanant du pouvoir législatif. Quant au gouvernement, il pouvait seulement dans le
respect de la loi, édicter des décrets ou arrêtés tendant à son application. Il y avait donc
une stricte hiérarchie entre la loi et ses éventuels règlements d'application. Mais dans les
faits cette hiérarchie a souvent été bousculée. Ainsi, la constitution a finalement partagé le
pouvoir de légiférer entre le parlement et le gouvernement en déterminant dans les articles
70 et suivants le domaine de la loi et celui du règlement; ce partage de compétence
soulève d'importantes difficultés de délimitation. Donc, il y a une question à laquelle il
faudrait répondre avec plus de précision afin de pouvoir distinguer entre loi et règlement.
2. De qui émane la loi?

26
Aux termes de l'article 70 de la Constitution: « la loi est votée par le parlement ».
Or, toujours selon ce même article, ce principe n'est pas absolu car il connaît quelques
exceptions prévues par la constitution: ainsi, la première hypothèse est prévue par l'article
70 lui-même qui ajoute que « Une loi d'habilitation peut autoriser le Gouvernement,
pendant un délai limité et en vue d'un objectif déterminé, à prendre par décret des mesures
qui sont normalement du domaine de la loi. Les décrets entrent en vigueur dès leur
publication, mais ils doivent être soumis, dans un délai fixé par la loi d'habilitation, à la
ratification du Parlement. La loi d'habilitation devient caduque en cas de dissolution des
deux Chambres du Parlement ou de l'une d'entre elles ». Il s'agit d'une autorisation donnée
par le parlement au gouvernement, et cette 'autorisation est donnée au moyen d'une loi
spéciale dite loi d'habilitation (une loi qui donne le pouvoir au gouvernement de légiférer
dans des domaines consacrées normalement à la loi). Même si ces décrets entrent en
vigueur dès leur publication, ils n'échappent pas pour autant au contrôle du parlement, qui
est appelé à ratifier une fois le délai fixé par la loi d'habilitation ait expiré (cette
dérogation à la compétence législative se retrouve de façon constante, au niveau des lois
de finances).
Deuxième hypothèse: celle-ci émane de l'article 81 de la Constitution. A la
différence de la précédente hypothèse, c'est une délégation du droit de légiférer qui joue
de plein droit, de façon automatique. Ainsi, selon l'article 81 «le Gouvernement peut
prendre, dans l'intervalle des sessions, avec l'accord des commissions concernées de deux
Chambres, des décrets lois qui doivent être, au cours de la session ordinaire suivante du
Parlement, soumis à ratification de celui-ci ». Cependant, même dans ce cas, le parlement
exerce son contrôle, Il existe d'autres exceptions comme lorsque le chef de l'Etat va
dissoudre par Dahir les deux Chambres du Parlement. Dans ce cas, c'est lui qui détient les
pouvoirs outre ceux qui lui sont dévolus par la constitution; ceux dévolus au Parlement
en matière législative (art. 96 de la Constitution).
3. Ce que doit être la loi: la loi se définit différemment suivant qu'on se place au
plan de la forme ou celui du fond: au plan formel, la loi est un acte voté par le parlement.
Mais au plan matériel, c'est une règle générale et abstraite qui, à ce titre, a et doit avoir un
caractère normatif. L'article 6 de la constitution de 2011 dispose que « la loi est
l'expression suprême de la volonté de la Nation. Tous sont tenus de s'y soumettre ». Donc,
la loi au sens étroit, signifie l'ensemble des dispositions écrites adoptées par le pouvoir
législatif c'est -à- dire le Parlement en temps normal et le Roi en période exceptionnelle.
Toutefois, il existe plusieurs catégories de lois prévues par la Constitution.
4. Plusieurs catégories de lois prévues par la constitution: loi organique et loi
ordinaire :
-Les lois organiques : elles fixent les modalités d'organisation et de fonctionnement
des pouvoirs publics prévues par la constitution. Elles relèvent également de la

27
compétence du parlement et font l'objet d'une procédure particulière fixée par l'article 85
de la Constitution et sont soumises au contrôle obligatoire du cour constitutionnelle afin
de vérifier leur conformité à la constitution. Elles présentent de ce fait deux particularités:
d'abord, elles sont adoptées sur un renvoi, un ordre d'une disposition constitutionnelle
qu'elles viennent compléter et préciser, en conséquence, elles ne peuvent intervenir que
dans certains cas bien déterminés (ex. art 29 de la Constitution. sur le droit de grève qui
renvoie à une loi organique: « le droit de grève demeure garanti. Une loi organique
précisera les conditions et les formes dans lesquelles ce droit peut s'exercer». Ensuite,
elles font l'objet d'une procédure particulière prévue par l'article 84 de la Constitution:
discussion 10 jours après le dépôt du projet de loi4, approbation obligatoire de la cour
constitutionnelle. Ces lois sont issues de la constitution c'est pour cette raison qu'elles sont
supérieures aux lois ordinaires qui doivent leur être conforme (il y a eu une décision de la
Cour de cassation du Il janvier 19130, arrêt n° 12, B.O. du 2 mai 19130, n° 3470, qui va
dans ce sens).
- Les lois ordinaires sont des actes qui émanent du pouvoir législatif à savoir le
Parlement, par opposition au décret qui émane du pouvoir exécutif. Ces lois suivent un
mode normal d'adoption et ne viennent pas' compléter une disposition constitutionnelle
comme le ferait une loi organique.
5. Domaines de la loi organique et ordinaire: il s'agit de déterminer les matières
qui sont de la compétence du pouvoir législatif.
- Domaine de la loi organique: les lois organiques sont citées dans différents articles
de la constitution qui déterminent en conséquence les cas dans lesquels elles doivent être
adoptées. Elles sont au total 19 lois organiques :
Liste des 19 lois organiques prévues par la nouvelle Constitution :
1- Loi organique sur la langue amazighe (article 5)
2- Loi organique sur le Conseil national des langues et de la culture marocaine (article 5)
3- Loi organique sur les partis politiques (article 7)
4- Loi organique réglementant le droit des citoyens de présenter des propositions en
matière législative (article 14)
5- Loi organique réglementant le droit des citoyens de présenter des pétitions aux
pouvoirs publics (article 15)
6- Loi organique sur le droit de grève (article 29)

4
«Les lois organiques sont votées et modifiées dans les mêmes conditions. Cependant le projet ou la proposition de loi organique n'est soumis à la délibération et
au vote de la première Chambre saisie qu'à l'issue d'un délai de dix jours après son dépôt.

Les lois organiques relatives à la Chambre des Conseillers doivent être votées dans les mêmes termes par les deux Chambres. Les lois organiques ne peuvent être
promulguées qu'après que le Cour constitutionnelle se soit prononcé sur leur conformité à la Constitution» Art. 85 de la Constitution.

28
7- Loi organique relative au Conseil de Régence (article 44)
8- Loi organique précisant la liste des établissements et entreprises stratégiques concernés
par les nominations aux emplois civils (article 49)
9- Loi organique sur la Chambre des représentants (article 62)
10- Loi organique sur la Chambre des conseillers (article 63)
11- Loi organique sur le fonctionnement des commissions d'enquête (article 67)
12- Loi organique des Finances (article 75)
13- Loi organique définissant les règles relatives à la conduite des travaux du
gouvernement (article 87)
14- Loi organique réglementant le statut des magistrats (article 112)
15- Loi organique sur le Conseil supérieur du pouvoir judiciaire (article 116)
16- Loi organique sur la Cour constitutionnelle (article 131)
17- Loi organique sur le recours pour non constitutionnalité des lois (article 133)
18- Loi organique sur la régionalisation (article 146)
19- Loi organique sur le Conseil économique, social et environnemental (article 153)
-La loi ordinaire :
L'article 71 de la Constitution énonce, de manière limitative, les matières réservées à
la loi; toutes les autres sont par voie de conséquence du domaine réglementaire. Ainsi, on
constate que les attributions du pouvoir législatif sont exceptionnelles par rapport aux
attributions du pouvoir réglementaire. La loi n'a pas vocation générale à réglementer toute
activité en tout secteur. Cependant, là où elle intervenait, les décrets et autres règlements
lui devaient un respect absolu. Malgré son caractère d'exception, la compétence
législative s'étend à des matières fort étendues et importantes.
Aux termes de cet article :
Sont du domaine de la loi, outre les matières qui lui sont expressément dévolues par
d'autres articles de la Constitution :
- les libertés et droits fondamentaux prévus dans le préambule et dans d'autres articles de
la présente Constitution ;
- le statut de la famille et l'état civil ;
- les principes et règles du système de santé ;
- le régime des médias audiovisuels et de la presse sous toutes ses formes ;
- l’amnistie ;
- la nationalité et la condition des étrangers ;
- la détermination des infractions et des peines qui leur sont applicables ;
- l'organisation judiciaire et la création de nouvelles catégories de juridictions ;
- la procédure civile et la procédure pénale ;
- le régime pénitentiaire ;
- le statut général de la fonction publique ;
- les garanties fondamentales accordées aux fonctionnaires civils et militaires ;

29
- le statut des services et forces de maintien de l'ordre ;
- le régime des collectivités territoriales, dont les principes de délimitation de leur ressort
territorial ;
- Le régime électoral des collectivités territoriales, dont les principes du découpage des
circonscriptions électorales ;
- le régime fiscal et l'assiette, le taux et les modalités de recouvrement des impôts ;
- le régime juridique de l'émission de la monnaie et le statut de la banque centrale ;
- le régime des douanes ;
- le régime des obligations civiles et commerciales, le droit des sociétés et des
coopératives ;
- les droits réels et les régimes des propriétés immobilières publiques, privée et collective
;
- le régime des transports ;
- Les relations de travail, la sécurité sociale, les accidents de travail et les maladies
professionnelles ;
- le régime des banques, des sociétés d'assurances et des mutuelles ;
- le régime des technologies de l'information et de la communication ;
- l'urbanisme et l'aménagement du territoire ;
- les règles relatives à la gestion de l'environnement, à la protection des ressources
naturelles et au développement durable ;
- le régime des eaux et forêts et de la pêche ;
- la détermination des orientations et de l'organisation générale de l'enseignement, de la
recherche scientifique et de la formation professionnelle ;
- la création des établissements publics et de toute autre personne morale de droit public ;
- la nationalisation d'entreprises et le régime des privatisations.
Outre les matières visées à l'alinéa précédent, le Parlement est habilité à voter des lois
cadres concernant les objectifs fondamentaux de l'activité économique, sociale,
environnementale et culturelle de l'État ».
Les lois de finances font également parties des attributions du pouvoir législatif et
constituent l'une des principales attributions du parlement. Ainsi, l'article 75 de la
Constitution dispose que: « Le Parlement vote la loi de finances dans des conditions
prévues par une loi organique ». Les lois organiques relèvent également de la compétence
du pouvoir législatif, ainsi que les lois d'habilitation par lesquelles le parlement autorise le
gouvernement à légiférer par décret5.
Donc, dans ce domaine réservé à la loi figurent les droits civiques et les garanties
fondamentales accordées aux citoyens pour l'exercice des libertés publiques, les
nationalisations d'entreprises; la détermination des infractions ainsi que les peines qui leur
sont applicable, la procédure pénale, la procédure civile, la nationalité, etc.

5
Enfin, on pourrait ajouter la révision de la constitution: aux termes de l'article 172 et 173 de la constitution «l'initiative de la révision de la
Constitution appartient au Roi, à la Chambre des Représentants et à la Chambre des Conseillers », et cette proposition doit être adoptée à la
majorité par les deux chambres du parlement. Cependant, reste à préciser que les propositions de révision sont soumises par Dahir au
référendum d'où la question qui se pose de savoir si en fin de compte, il ne s'agit qu'une compétence illusoire du parlement.

30
Reste à préciser que si, à l'occasion d'une proposition de loi ou d'un amendement
(modification de tout ou partie d'un texte), le parlement empiète sur le domaine du
règlement, l'article 1306 de la Constitution prévoit que le gouvernement peut s'y opposer
en invoquant l'irrecevabilité. On constate que le pouvoir exécutif peut arrêter tout
empiétement du parlement sur le domaine du règlement, on ne pourra en dire autant du
cas inverse, c’est -à- dire lorsque c'est le gouvernement qui empiètent sur le territoire du
parlement, il le fait par voie de règlement, en toute impunité. Le parlement voit son
domaine réduit et ne traite que des problèmes généraux laissant toute les voies au
gouvernement de réglementer de façon plus précise. Dans le même sens, l'article 73 de la
Constitution ajoute que « les textes pris en forme législative peuvent être modifiés par
décret, après avis conforme du Conseil
Constitutionnel lorsqu'ils seront intervenus dans un domaine dévolu à l'exercice du
pouvoir réglementaire ».
B. Procédure d'élaboration de la loi :
L'élaboration d'une loi passe par plusieurs étapes:
1. La proposition de loi :
Afin qu'une loi soit élaborée, il faut d'abord qu'on la propose. Et l'initiative
d'élaboration de la loi peut provenir soit du gouvernement dans la personne (lu premier
ministre, soit des membres du parlement7. Les textes présentés par- le premier ministre
sont appelés projet de loi. A cet égard, l'article 62 de la constitution ajoute que les projets
de loi ne peuvent être déposés par le Chef du gouvernement au bureau de l'une des deux
chambres sauf s'ils ont été l'objet de délibération du conseil des ministres. Pour ce qui est
du parlement, les membres composant les deux chambres ont eux aussi l'initiative des lois
ainsi que l'initiative des amendements. Dans le premier cas, on parle de propositions de
loi. Dans les deux cas, les membres déposent ces propositions sur le bureau de la chambre
dont ils sont membres.
En revanche, malgré le fait que la loi de finance est du domaine du pouvoir législatif
la constitution dans son article 77 précise que: « les propositions et amendements
formulés par les membres du Parlement ne sont pas recevables lorsque leur adoption

6
« Le Gouvernement peut opposer l'irrecevabilité à toute proposition ou amendement qui n'est pas du domaine de la loi. En cas de désaccord,
le Cour constitutionnelle statue, dans un délai de huit jours, à la demande de l'une des deux Chambres ou du Gouvernement»

7
L'article 91 de la Constitution dispose que: « l'initiative des lois appartient concurremment au chef du gouvernement et aux membres du
Parlement Les projets de lois sont déposés sur le bureau d'une des deux Chambres ».

31
aurait pour conséquence, par rapport à la loi de finances, soit une diminution des
ressources publiques, soit la création ou l'aggravation d'une charge publique ».
Ainsi, ces projets ou propositions sont envoyés pour examen devant des
commissions (art. 80 de la Constitution)
2. Examen et enregistrement des projets et propositions :
« Les projets et propositions de lois sont envoyés pour examen devant des
commissions dont l'activité se poursuit entre les sessions» (art. 80 de la Constitution).
Il existe deux sortes de commissions au sein du parlement: des commissions
permanentes et des commissions spéciales ou temporaires qui ne sont créées que pour
examiner un texte déterminé. Ainsi, un rapporteur est désigné afin d'entamer l'étude et
l'analyse du texte soumis à la commission. Par la suite, ce dernier remet le rapport dans
lequel figure les amendements nécessaires que la commission adopte ou pas. En dernier
lieu, le texte est inscrit à l'ordre du jour de la chambre saisie.
3. Discussion et vote de la loi :
« L'ordre du jour de chaque Chambre est établi par son bureau. Il comporte, par
priorité, et dans l'ordre que le Gouvernement a fixé, la discussion des projets de lois
déposés par le Gouvernement et des propositions de lois acceptées par lui» art. 82 de la
Constitution :
-La discussion: une fois inscris à l'ordre du jour de l'une des deux chambres du
parlement du projet ou de la proposition de loi, le texte est discuté. Ainsi, on examine le
texte proposé de façon minutieuse, article par article, amendement par amendement.
Donc, la procédure se déroule en trois temps: d'abord la discussion générale du texte,
ensuite, la discussion des articles l'un après l'autre, enfin le vote de l'ensemble des textes.
-Le vote: la loi est votée par le parlement (art. 70 de la Constitution), c'est-à-dire par
la Chambre des Représentants et la Chambre des Conseillers. A défaut d'accord sur un
texte identique après 'deux lectures par chaque Chambrer8, ou sur le texte commun établi
par une commission mixte paritaire9, le Gouvernement peut demander à la Chambre des
représentants de statuer définitivement10 (art.84 de la Constitution).

8
La loi n'est adoptée que si elle est votée en termes identiques par les deux Chambres.
9
« Lorsqu'un projet ou une proposition de loi n'a pu être adopté après deux lectures par chaque Chambre, ou si le Gouvernement a déclaré
l'urgence, après une seule lecture par chaque Chambre, le Gouvernement peut provoquer la réunion d'une commission mixte paritaire chargée
de proposer un texte sur les dispositions restant en discussion» art. 84 de la Constitution.

10
« Si la commission mixte paritaire ne parvient pas à l'adoption d'un texte commun ou si celui-ci n'est pas adopté par les Chambres, le
Gouvernement peut soumettre à la Chambre des Représentants le projet ou la proposition de loi, modifié, le cas échéant, par les amendements
résultant de la discussion parlementaire et repris par le Gouvernement» Art.84.

32
Aussi, les membres de chaque Chambre et le Gouvernement ont le droit
d'amendement. Cependant, « le Gouvernement peut s'opposer à l'examen de tout
amendement qui n'a pas été antérieurement soumis à la commission intéressée. Si le
Gouvernement le demande, la Chambre saisie du texte en discussion se prononce par un
seul vote sur tout ou partie de celui-ci en ne retenant que les amendements proposés ou
acceptés par le Gouvernement» (art. 57 de la Constitution). Une fois adoptée par le
parlement, le texte de loi est soumis au Roi pour approbation et promulgation
4. La promulgation :
Aux termes de l'article 50 de la Constitution: « le Roi promulgue la loi dans les
trente Jours qui suivent la transmission au Gouvernement de la loi définitivement adoptée
». La promulgation ne concerne que les lois votées par le parlement. En revanche, aucune
règle de droit ne dispose que les décrets sont soumis à promulgation. Etant l'œuvre du
pouvoir exécutif, certains auteurs estiment que les décrets sont exécutoires par nature et
ne nécessitent donc pas de formalité comparable à la promulgation.
La promulgation a un double objectif: constater que la loi a été régulièrement votée
par le parlement et ordonner l'exécution de cette loi. C'est le Roi qui déclare la loi
exécutoire.
En effet, la promulgation est la procédure par laquelle le Roi appose son sceau sur le
texte voté par le parlement et donne par voie de Dahir l'ordre de l'appliquer et de
l'exécuter aux différents organes de l'Etat et aux citoyens. Or, le Roi peut refuser la
promulgation de la loi votée par le parlement et demander, en conséquence, une nouvelle
lecture aux Chambres de tout projet ou proposition de loi (art. 95 de la Constitution).
Cette demande est formulée par un message et ne peut être refusée (art. 68 de la
Constitution). L'article 69 ajoute que: « Le Roi peut, après une nouvelle lecture,
soumettre, par dahir, au référendum tout projet ou proposition de loi, hormis le cas où le
texte du projet ou de la proposition de loi soumis à la nouvelle lecture aurait été adopté ou
rejeté par chacune des deux Chambres à la majorité des deux tiers des membres la
composant ».
5. Publication de la loi :
D'abord, il faudra préciser que la publication concerne aussi bien les lois que les
règlements. Elle consiste à informer le public, les citoyens, de l'existence de la loi et de
son contenu afin qu'ils puissent prendre leurs dispositions et agir en conséquence.
Cette formalité est dictée par des considérations de bon sens et de logique: comment
peut-on reprocher à une personne d'avoir violé un texte dont elle ignorait l'existence? Il

33
est important de faire en sorte que les textes soient connus. La publication devient par
voie de conséquence une nécessité d'autant plus que personne n'est censé ignorer la loi.
Au Maroc, il existe un Bulletin officiel depuis 1912 qui est devenu le 12 novembre
1957 le Bulletin officiel du Maroc. Il est même publié en deux langues. Seulement,
aucune disposition générale, légale ou réglementaire n'a imposé jusqu'ici la publication au
Bulletin officiel des textes marocains. Il n'y a qu'une vague allusion de la constitution à
propos des décrets pris par le gouvernement à la suite d'une délégation consentie par le
parlement. Ainsi, en vertu de l'article 70 de la Constitution « ces décrets entrent en
vigueur dès leur publication ».
Une loi non publiée est difficile à prouver non seulement par la partie qui l'invoque
mais aussi par le juge. Pendant longtemps, les tribunaux considéraient comme valable une
publication faite en dehors du BO, actuellement ce n'est plus le cas, la Cour de cassation a
clairement disposé qu'une loi, convention ou autre doit être publié au BO. Cette
publication est l'une des conditions de son entrée en vigueur. Ainsi, la loi devient
exécutoire dès sa publication.
§3. Le règlement :
1. Le pouvoir réglementaire: si le pouvoir législatif appartient au Parlement, le
pouvoir réglementaire revient à l'exécutif, c'est-à-dire au chef de l'Etat et au premier
ministre. Ce pouvoir réglementaire était toujours subordonné à la loi dont il ne pouvait
qu'assurer l'application. Il n'en est plus désormais de même. En effet, à côté de ces
règlements d'application, existent d'autres relevant également du pouvoir réglementaire, et
faisant l'objet de règlements autonomes. Ainsi, toutes les matières qui ne sont pas
réservées à la loi par l'article 72 de la Constitution, relèvent du domaine réglementaire
(l'art. 72 de la Constitution dispose que : «les matières autres que celles qui sont du
domaine de la loi appartiennent au domaine réglementaire »).
En revanche, lorsque le règlement intervient dans un domaine réservé à la loi, et
sous réserve de l'hypothèse de décret-loi, il ne peut s'agir que de règlements d'application.
Ces
derniers sont donc des actes du pouvoir réglementaire tendant à l'application d'une loi
intervenant dans l'un des domaines visés à l'article 46 de la Constitution. C'est le
gouvernement qui veille à l'exécution des lois. Aux termes de l'article 89 de la
Constitution: « Sous la responsabilité du chef du gouvernement, le Gouvernement assure
l'exécution des lois et dispose de l'administration ».
2. De qui émane le règlement?
Il émane exclusivement du pouvoir exécutif et des autorités administratifs: au
premier rang: le Dahir du Souverain; à un échelon intermédiaire: les décrets du 1 er

34
ministre et enfin les textes réglementaires pris par les membres du gouvernement: arrêtés
ministériels.
3. Le domaine du réglementaire :
L'article 29 de la Constitution dispose que « Le Roi exerce, par dahir, les pouvoirs
qui Lui sont expressément réservés par la Constitution », Donc, la compétence royale
présente un caractère exceptionnel. A l'opposé, c'est le premier ministre qui, en vertu de
l'article 63 de la
Constitution, exerce le pouvoir réglementaire. Il a une compétence de droit commun. En
définitive, on se rend compte qu'en élargissant et le domaine de la loi et le domaine
réglementaire du premier ministre, on a entendu réaliser un nouvel équilibre des pouvoirs
avec, au sommet, le souverain jouant le rôle d'arbitre. Cependant, cet équilibre n'est
possible qu'en temps normal. Il sera nécessairement rompu dès que l'état d'exception est
proclamé.
Sous-section II. Manifestation de la hiérarchie des textes :
Il s'agit de vérifier si les lois sont ou non conformes à la constitution c'est le
problème de la constitutionnalité de la loi: une loi doit être conforme à la Constitution.
Pour ce qui est des règlements: il est nécessaire de vérifier s'ils sont ou non conformes à la
loi.
§1. Le contrôle de la constitutionnalité des lois :
Au Maroc, on avait créé, dans le cadre de la première Constitution promulguée en
décembre 1962, au sein de la plus haute juridiction du pays, la Cour supreme, une
nouvelle Chambre, la Chambre constitutionnelle chargée notamment du contrôle de la
constitutionnalité des lois.
Composée initialement de cinq membres, présidée par le Premier président de la
Cour de cassation, la Chambre constitutionnelle a exercé sans discontinuité pendant une
trentaine d'années ses compétences (contrôler la constitutionnalité des lois organiques
avant leur promulgation, celle des Règlements intérieurs du Parlement avant leur mise en
application, statuer sur la régularité de l'élection des membres du Parlement et des
opérations de référendum etc.
Cependant, un nouvel organe, le Cour constitutionnelle fut créé en remplacement de
la Chambre constitutionnelle de la Cour de cassation. Il s'individualise par son
indépendance et par sa situation extérieure par rapport à l'organisation judiciaire du pays.
Composé de neuf, puis de douze membres, sa compétence et sa saisine furent élargies.
Désormais se trouve compétent pour statuer sur la conformité à la Constitution non
seulement des lois organiques et des règlements internes du Parlement, mais également
des lois ordinaires.

35
En tant qu'organe constitutionnel, le Cour constitutionnelle est d'abord régi par la
Constitution, qui définit notamment les bases de son organisation, ses attributions
essentielles ainsi que l'effet de ses décisions. Il y a ensuite les lois organiques dont l'une,
sur invitation de la Constitution, détermine les règles touchant les divers aspects de son
organisation et de son fonctionnement. Trois autres lois organiques complètent la liste de
ses attributions ainsi que le prévoit la Constitution. Il s'agit d'une part des lois organiques
relatives aux. Chambres parlementaires, et d'autre part, de la loi organique relative aux
commissions d'enquête parlementaire. Il n'y a pas de règlement intérieur du Conseil, pas
plus qu'il n'existe de texte réglementaire applicable à celui-ci. Son organisation, au plan
administratif, est définie par la loi organique elle-même, sans renvoi à des dispositions
réglementaires, et ceci à une exception près touchant la mise à disposition du personnel.
Le Conseil comprend depuis la réforme constitutionnelle de 1996, douze membres
(art. 130) : six nommés par le Roi pour une durée de neuf ans et six désignés pour la
même durée, moitié par le président de la Chambre des représentants, moitié par le
président de la Chambre des conseillers, après consultation des groupes parlementaires.
Chaque catégorie de membres est renouvelable par tiers tous les trois ans. Bien que la
Constitution ne requière des membres à désigner aucune qualité particulière, ceux-ci sont
des juristes, des professeurs d'université, des 'avocats ou des magistrats. Le président du
conseil est choisi par S.M. le Roi parmi les membres qu'il nomme. Et le mandat du
président et des membres du conseil n'est pas renouvelables.
COMPÉTENCES: le Cour constitutionnelle est investi de diverses attributions. Il
assume d'abord un contrôle des actes portant sur la conformité à la constitution et veille à
l'application des règles de répartition des compétences entre les pouvoirs législatif et
exécutif. Il statue par ailleurs sur la régularité des élections parlementaires et des
opérations du référendum et exerce d'autres attributions plus particulières.
Les actes soumis au contrôle de la constitutionnalité le sont soit obligatoirement,
comme pour le cas des lois organiques et du Règlement intérieur des Chambres
parlementaires, soit facultativement concernant les lois ordinaires ". C'est un contrôle qui
porte sur des textes adoptés mais non' encore promulgués (les lois en général) ou mis en
application (le règlement de chaque Chambre). C'est aussi un contrôle abstrait, son objet
étant bien entendu de juger la loi et non de l'appliquer.
D'une part, le Cour constitutionnelle n'intervient que dans les conditions limitées et
uniquement avant la promulgation de la loi. Une fois cette formalité accomplie, la loi, en
règle générale, s'impose de façon absolue. Or, il y a une exception prévue par l'article 73
de la Constitution qui dispose que : « les textes pris en forme législative peuvent être
modifiés par décret, après avis conforme du Cour constitutionnelle lorsqu'ils seront
intervenus dans un domaine dévolu à l'exercice du pouvoir réglementaire ». De ce fait, le
contrôle du Conseil constitutionnel peut viser un texte législatif déjà promulgué lorsque

36
ce texte serait intervenu dans un domaine réservé au pouvoir réglementaire. Aussi, après
avis conforme de la cour constitutionnelle, le texte en question peut être modifié par
décret. D'autre part, le contrôle du Cour constitutionnelle ne peut être mis en œuvre que
par les autorités publiques (le roi, le chef de gouvernement, le président de la Chambre
des représentants ou de la chambre des conseillers ou le quart des membres de l'une ou
l'autre chambre). Autrement dit, le contrôle de constitutionnalité des lois ne peut jamais
être engagé par les particuliers.
Toujours au stade de l'élaboration de la loi, rappelons que l'article 130 de la
Constitution autorise le Gouvernement à s'opposer aux propositions et aux amendements,
qui ne font partie du domaine législatif. En cas de désaccord; c'est au Cour
constitutionnelle que revient la tâche de trancher entre les pouvoirs exécutif et législatif.
§2. Le contrôle de la légalité des règlements :
Intervenant dans le domaine de la loi, les décrets et arrêtés ministériels sont
subordonnés à la loi dont ils assurent l'exécution et ne peuvent aller à son encontre: c'est
le principe de la légalité. La primauté de la loi est assurée par deux procédées de contrôle
de la légalité, et qui sont à la disposition des particuliers : le recours pour excès de
pouvoir et l'exception d'illégalité.
Le recours pour excès de pouvoir est un recours tendant à l'annulation d'un décret
ou d'un arrêté; en cas d'irrégularité, il va donc conduire à l'annulation à l'égard de tous, et
pas seulement du demandeur, de l'acte jugé illégal. S'agissant de critiquer un acte de
caractère réglementaire, l'action ne peut être intentée que devant une juridiction
administrative. Le recours pour excès de- pouvoir a été institué au Maroc pour la première
fois, en 1957, lors de la création par Dahir de la Cour de cassation, et a été confirmé par le
Code de la procédure civile (art 353). Ce qui n'est pas le cas de l'exception d'illégalité qui
s'était déjà développé au Maroc pendant le protectorat.
L'exception d'illégalité: tend non pas à annuler, mais seulement à écarter
l'application à un particulier d'un acte illégal sur le fondement duquel il est poursuivi.
N'étant enfermé dans aucun délai, elle est perpétuelle. Une telle exception peut être
librement invoquée (que se soit par un demandeur ou un défendeur) au cours d'un litige
devant n'importe quel tribunal. Il s'agit donc d'un moyen de défense invoqué au cours
d'une instance et par lequel une personne invoque l'illégalité d'un acte réglementaire qui
lui est opposé afin d'y échapper sans pour autant en arriver jusqu'à son annulation.
Sous-section III. L'application des textes :
Après avoir étudié les textes, on examinera successivement leur force obligatoire,
leur application dans le temps et dans l'espace.
§1. La force obligatoire des textes :

37
Les textes ne deviennent pas obligatoires du seul fait qu'ils ont été élaborés
conformément aux procédures requises. En principe, la loi n'a force obligatoire que si elle
a été promulguée et publiée. Bien que les lois aient vocation à s'appliquer indéfiniment,
elles peuvent faire l'objet d'une abrogation, ce qui met alors fin à leur force obligatoire.
A. L'entrée en vigueur de la loi :
Lorsqu'une loi est promulguée, elle est censée s'appliquer à l'ensemble de ceux
auxquelles ses dispositions sont destinées. Cependant, si la promulgation est l'ordre
d'exécuter la loi, la publication a pour objet de porter le texte à la connaissance du public
auquel il va s'appliquer. La publication est générale. Autrement dit, elle concerne les lois
et les règlements.
Tout texte régulièrement promulgué et/ou publié devient obligatoire pour tous, et
nul ne saurait se soustraire à son application sous prétexte d'ignorance. On peut encore
une fois se demander si la présomption de connaissance de la loi est toujours fondée
lorsque la loi est obscure ou imprécise. En effet, la fiction de connaissance de la règle de
droit connaît un certain nombre d'assouplissements ou exceptions. On pourrait par
exemple rappeler la distinction entre les lois impératives et les lois supplétives. Si les
premières sont vraiment obligatoires, on peut en revanche, écarter l'application des autres
en exprimant une volonté contraire. Cette mise à l'écart de la loi supplétive, qui est
généralement faite en connaissance de cause, peut aussi l'être par ignorance. En civil
aussi, l'erreur de droit peut être invoquée, non pas pour échapper à la loi, mais pour
demander la nullité d'un contrat conclu à la suite d'une telle erreur.
Bref, dès qu'une loi fait son apparition au BO, elle devient exécutoire et est en
consé<quence opposable à tous ceux qui en sont concernés. Cependant, même si en
principe ces lois et règlements ont vocation à· s'appliquer sans limite dans le temps, ils
peuvent être abrogés. Autrement dit, ces textes demeurent en vigueur tant qu'ils n'ont pas
été abrogés.
B. L'abrogation de la loi :
L'abrogation de la loi est « la suppression par une nouvelle disposition d'une règle de
droit qui cesse ainsi d'être applicable pour l'avenir ».
L'autorité compétente: les textes étant soumis à un principe hiérarchique, ce même
principe se retrouve en matière d'abrogation. Il s'ensuit par exemple qu'une loi ordinaire,
ne peut être abrogée que par une autre loi ordinaire, ou par une loi supérieure. Il s'agit de
la même autorité qui a l'habilitation d'adopter un texte de lui retirer par la suite sa force
obligatoire et le remplacer par un nouveau texte. En conséquence, au cas où une loi est
abrogée, il en résulte que les règlements d'application de cette loi deviennent caducs,

38
puisque sans objet. De même, un règlement « autonome» ne peut être abrogé que par un
autre règlement autonome.
Les formes de l'abrogation: on parle d'abrogation lorsqu'un texte nouveau vient
mettre fin à l'application du texte ancien. Cette abrogation peut être expresse ou tacite.
C'est ce qui découle de l'article 474 du D.O.C. selon lequel: « Les lois ne sont abrogés que
par des lois postérieures lorsque celles-ci l'expriment formellement ou lorsque la nouvelle
loi est incompatible avec la loi antérieure ».
L'abrogation est expresse: lorsqu'elle figure en toutes lettres dans le texte nouveau,
généralement sous une formule type: «les articles n? ... du Code ... sont abrogés ».
L'abrogation est tacite: dans le cas où en dehors de toute abrogation formelle, un
texte se trouve contredit par un autre plus récent. Les deux textes étant inconciliables, on
va bien évidemment privilégier le plus récent dont on considérera à juste titre qu'il reflète
la volonté du législateur. Ainsi, on peut en déduire que la loi récente a abrogé la loi de
manière implicite. L'abrogation tacite est rarement totale. Elle n'opère en effet que dans la
mesure où il y a véritablement une incompatibilité absolue entre les deux textes. A cet
égard, si les deux lois ont le même domaine, et sont incompatibles, alors Il y a abrogation
tacite totale de l'ancien texte par le nouveau.
Or, si le texte ancien édicte une règle générale, alors que le texte nouveau ne le
contredit que par une règle spéciale, en principe, on considère que la règle générale
subsiste et qu'il lui est simplement apporté une exception par le texte nouveau sur le 'point
particulier visé: la règle spéciale déroge à la règle générale. Dans le cas contraire,
c'est-à-dire, lorsque le texte ancien édicte une règle Spéciale alors que le nouveau pose un
principe général contraire, il peut y avoir hésitation. Ayant un domaine plus large
d'application que celui de la loi ancienne, les dispositions de celle-ci continuent de
s'appliquer en tant qu'exception au texte général. Donc, on privilégie le maintien de la loi
spéciale antérieure comme exception au principe nouvellement posé sauf si le législateur
exprime clairement son intention d'abroger la loi ancienne.
Peut-il y avoir abrogation par désuétude? Le fait qu'une loi ne soit pas appliquée
pendant de nombreuses années ne vaut-il pas abrogation par désuétude? En droit
marocain l'article 475 du D.O.C. dispose que: «la coutume et l'usage ne sauraient
prévaloir contre la loi lorsqu'elle est formelle ». Donc, les lois, surtout les lois
impératives, restent en vigueur même si elles ont cessé de s'appliquer depuis un certain
temps. Ainsi, une loi ne peut être abrogée que par l'autorité compétente. Elle ne cesse pas
d'être en vigueur du seul fait qu'elle n'est pas respectée et que personne n'en a demandé
l'application devant le juge. Toutefois, en pratique, quelques problèmes peuvent se poser
quant à l'application de la loi nouvelle dans temps: il s'agit du problème de conflit de lois
dans le temps.

39
§2. L'application des textes dans le temps :
Conflits de lois dans le temps: l'étude des règles relative à l'abrogation pourrait
laisser croire qu'un conflit entre les deux textes qui se succéderaient dans le temps afin de
régler le même objet est impossible: le plus récent deviendrait obligatoire au moment
même où l'autre cesserait de s'appliquer, sans qu'il n'y ait ni chevauchement ni aucun
problème. Or, sous cette apparence simpliste, il peut y avoir de graves conflits de loi dans
le temps.
Un même problème peut être régi par deux lois: à quelle loi doit-on donner la
préférence? (L'ancienne ou la nouvelle)? Il faut ainsi déterminer le domaine d'application
dans le temps des deux lois successives. Ces conflits de loi dans le temps ne sont pas
réglés par les dispositions relatives à la promulgation, à la publication et à l'abrogation des
lois lesquelles se bornent à dire à quelle date la loi nouvelle entre en vigueur. Dans ce cas,
la question est différente: elle n'est pas de savoir à quelle date la loi nouvelle s'applique,
mais à quelle situation, autrement dit, quels sont les domaines respectifs d'application de
la loi ancienne et de la loi nouvelle? La réponse est donnée par application du principe de
la non- rétroactivité des lois (A) et par celui de l'effet immédiat des lois nouvelles (B).
A. Le principe de la non-rétroactivité des lois :
Aux termes de l'article 4 de la Constitution: « La loi est l'expression suprême de la
volonté de la Nation. Tous sont tenus de s'y soumettre. La loi ne peut avoir d'effet
rétroactif ». Ainsi, lorsqu'on dit qu'une loi n'a pas d'effet rétroactif, on entend par là qu'elle
ne peut pas s'appliquer à des faits qui ont été accomplis antérieurement. Le principe tire
un trait entre le passé et l'avenir: la non-rétroactivité de la loi nouvelle pour le passé,
application immédiate pour l'avenir. La ligne de partage repose sur un double fondement,
entre deux critères sur lesquelles il faut arbitrer: le besoin de sécurité juridique. Ce besoin
de sécurité et de prévisibilité juridiques conduit tout naturellement à privilégier le
maintien des situations acquises. Ce qui ne veut en aucun dire qu'il faut qu'elle conduise
au maintien indéfini de la loi ancienne.
Le second fondement est le besoin du progrès social: il est naturel de penser que la
loi nouvelle est meilleure que la loi ancienne, ou du moins, qu'elle correspond mieux à
l'état des mœurs, aux besoins économiques et sociaux de l'époque. La loi ne peut être
figée. Elle doit évoluer en fonction du contexte économique, social etc.
La non-rétroactivité est un principe constitutionnel. En conséquence, le législateur
est tenu de le respecter, sauf à encourir la cour constitutionnelle. Ainsi, si le parlement
vote une loi rétroactive et, en cas de saisi de la cour constitutionnelle, la loi sera déclarée
inconstitutionnelle. La non-rétroactivité s'impose également au pouvoir réglementaire et
au pouvoir judiciaire. Les règlements édictés par le pouvoir exécutif doivent respecter le
principe de la non-rétroactivité, sous peine de voir ces règlements sanctionnés par le

40
recours pour excès de pouvoir ou l'exception d'illégalité. Dans le même sens, un juge ne
peut appliquer la loi nouvelle à des faits survenus avant sa promulgation. Cependant, ce
principe n'est pas absolu, il connaît quelques exceptions:
* Exceptions :
Certaines lois sont normalement rétroactives, en ce sens que, loin de porter atteinte à
la stabilité sociale, elles apportent un mieux -être conforme tant à l'intérêt général qu'aux
intérêts particuliers. Ainsi en est-il tout d'abord des lois pénales nouvelles plus douces,
c'est-à-dire celles qui modifient une infraction ou qui diminuent la peine encourue, faisant
exception au principe de la non-rétroactivité, de telles lois vont s'appliquer, non seulement
aux infractions commises postérieurement, mais également aux délinquants qui, ayant
commis l'infraction sous une loi antérieure plus sévère, n'ont, en raison des délais
inhérents à toute procédure, pas encore fait l'objet d'une condamnation définitive.
La règle de la rétroactivité de la loi pénale plus douce est expressément formulée
par l'article 6 du Code pénal: «Lorsque plusieurs lois ont été en vigueur entre le moment
où l'infraction a été commise et le jugement définitif, la loi, dont les dispositions sont les
moins rigoureuses, doit recevoir application ». Il est juste et normal que soit appliquée ici,
non pas la loi ancienne dont les pénalités ont été jugées excessives, mais la loi nouvelle
considérée comme meilleure.
Les lois relatives à la compétence judiciaire et aux règles de procédure: ces lois
s'appliquent rétroactivement parce qu'elles visent à assurer une meilleure organisation et
administration de la justice, et leur application immédiate ne peut nuire à personne. Ainsi,
les lois déterminant de nouvelles règles de compétence ou de procédure s'appliquent
immédiatement à toutes les instances judiciaires en cours.
Les lois interprétatives: dans ces lois dites interprétatives, le législateur définit le
sens d'une loi antérieure obscure ou ambiguë. En conséquence, elles sont rétroactives
étant donné qu'il ne s'agit pas à proprement parler de nouvelle loi mais plutôt de
l’interprétation d'une loi antérieure. Ainsi, la loi interprétative, faisant corps avec la loi
interprétée, s'applique à la date de la loi interprétée, si bien qu'il y a rétroactivité.
On voit clairement, qu'en principe, une loi nouvelle ne doit pas, sauf exception,
remettre en cause le passé. Elle doit au contraire, s'appliquer aux situations en cours pour
l'avenir. Il s'agit du principe de l'effet immédiat.
B. Le principe de l'effet immédiat des lois nouvelles :
Ce principe signifie que si une loi nouvelle ne doit pas régir le passé, elle doit en
revanche s'appliquer immédiatement, en remplaçant la loi antérieure qui n'a plus raison
d'être. Or, si la loi régissant une situation qui devait s'échelonner dans le temps, vient à
changer, faut-il maintenir la loi ancienne ou appliquer immédiatement la loi nouvelle?

41
Aucune disposition ne donne de réponse à ce problème en droit marocain. Plusieurs
théories ont été élaborées afin de remédier à ce problème11.
Comment distinguer le principe de l'effet immédiat du principe de la non-
rétroactivité?
Ex. : les lois pénales de fond qui concernent les différentes incriminations, aux
éléments constitutifs des infractions, et au régime de la répression. Ces lois sont sans
aucun doute soumises au principe de la non-rétroactivité. Quant aux lois pénales de
formes, qui réglementent l'organisation et le fonctionnement du procès pénal (procédure,
compétence, etc.) ces lois sont une illustration de l'effet immédiat de la loi nouvelle. Ces
lois s'appliquent immédiatement même aux instances en cours, étant donné qu'elles sont
destinées à assurer une meilleure justice.
Ainsi, le principe de l'effet immédiat des lois nouvelles est incontestable car, d'une
part, la loi nouvelle est présumée meilleure que la loi ancienne, sinon, le besoin de
réforme de se ferait pas sentir. Et d'autre part, ce principe assure l'unité de législation en
évitant de faire coexister les lois ancienne et nouvelle qui régissent la même situation.
Cependant, ce principe n'est pas absolu et connaît quelques dérogations.
Les exceptions au principe de l'effet immédiat:
-D'abord, l'effet immédiat peut être écarté par une disposition formelle: le législateur
peut estimer préférable de retarder l'application d'une nouvelle loi (la loi d'unification de
1965 adoptée le 26 janvier a été différée jusqu'au début de l'année suivante. Pour une
réforme en douceur).
-Une autre exception plus importante, au principe de l'effet immédiat concerne cette
fois-ci la matière des contrats. En générale, les situations contractuelles sont régies par la
loi en vigueur au moment de leur formation. On considère qu'une loi nouvelle ne doit pas
s'appliquer aux contrats en cours et bouleverser les prévisions légitimes des particuliers.
Une fois délimitée la sphère d'application d'un texte dans le temps, il convient de
déterminer son domaine d'application dans l'espace.
§3. L'application des textes dans l'espace :
Il s'agit de connaître les frontières au-delà desquelles, le système juridique marocain
perd sa force obligatoire. A première vue, la question paraît banale, de pure forme et en

11
D'abord, il y a la théorie classique selon laquelle, une loi nouvelle" ne doit pas remettre en cause les droits acquis qui restent régis par la loi ancienne. Mais le
terme de droit acquis est ambiguë et ne résout pas les conflits des lois dans le temps. Ensuite, on a proposé une autre théorie «dite moderne» de l'effet immédiat
des lois: ainsi, les auteurs distinguent entre plusieurs propositions:

-Lorsqu'une situation se crée après l'entrée en vigueur d'une loi, il ne fait pas de doute que celle-ci s'applique.
-De même, la loi nouvelle s'applique également aux situations en cours, autrement dit, elle s'applique aux effets futurs d'une situation qui a pris naissance
antérieurement à la loi. Exemple: si le Code de la famille modifie le régime des incapacités, ces réformes s'appliqueront immédiatement aux situations en cours

42
conséquence on serait tenté de dire qu'un conflit de lois dans l'espace ne peut se produire
étant donné que la loi marocaine est seule applicable au Maroc, et la loi étrangère est
seule applicable en étranger. Autrement dit, il Y aurait une territorialité de la loi au sein
des frontières qui exclurait tout conflit possible entre deux lois concurrentes.
Or, nombreuses sont les situations qui présentent un caractère international, un
élément d'extranéité. Il arrive ainsi que plusieurs lois, l'une marocaine, j'autre étrangère
puissent prétendre régir la même situation.
Si un marocain a un accident de voiture en France, la loi applicable à cet accident
sera- t-elle la loi marocaine sur les accidents de la circulation ou la loi française. De
même, si un marocain épouse une anglaise en France, quelle loi appliquée? Dans tous ces
cas, il s'agit d'un conflit de loi dans l'espace qui devra être réglé par le juge qui appliquera
la règle de conflit.
Il peut arriver que le juge marocain applique une loi étrangère et que,
réciproquement, le juge étranger soit amené à recevoir la loi marocaine. En effet, la loi
interne marocaine ne sera pas toujours applicable. Dans ce cas, on se demande si le droit
marocain doit s'appliquer à tous les marocains même ceux résidant à l'étranger: système
de la personnalité de la loi. Ou, au contraire, qu'il s'applique sur tout le territoire
marocain, y compris aux étrangers qui y résident: système de la territorialité de la loi?
Les domaines d'application de loi marocaine retenant le principe de
territorialité:
il s'agit de domaines où la loi va s'appliquer de manière générale sur tout le territoire
marocain, quelle que soit la nationalité des personnes concernées.
Ainsi en est-il tout d'abord de la loi pénale marocaine. Ainsi, aux termes de l'article
10 du Code pénal: «Sont soumis à la loi pénale marocaine, tous ceux qui, nationaux,
étrangers ou apatrides, se trouvent sur le territoire du Royaume ». La loi marocaine va
s'appliquer à toutes les infractions commises sur le territoire marocain, même par les
étrangers qui ne sauraient faire valoir que le comportement incriminé par la loi marocaine
est une coutume légale dans leurs pays. De même les immeubles sont soumis aux règles
du lieu où se situe l'immeuble. Pour les faits juridiques également et spécialement
s'agissant de la
responsabilité civile en cas de dommages, on appliquera la loi du lieu où le dommage a
été causé, c'est-à-dire en général le lieu de l'accident.
Quant aux actes juridiques, des contrats par exemple, entre personnes de nationalités
différentes, les règles de forme à observer sont celles du lieu de l'acte. En revanche, on
considère que les parties sont libres de soumettre leur contrat à telle ou telle loi de leur
choix pour ce qui concerne les conditions de fond et les effets de j'acte.

43
Pour ce qui est des lois relatives au droit public, elles sont également applicables sur
l'ensemble du territoire marocain quel que soit la nationalité de l'intéressé. Ainsi, les
matières directement liées à la souveraineté de l'Etat s'appliquent territorialement, en
conséquence, elles ne peuvent être concurrencées par des droits étrangers.
Or, il Y a des matières qui engendrent énormément de problèmes et sont, en
conséquence, le terrain privilégié des conflits de lois. Les domaines d'application de loi
marocaine retenant le principe de la personnalité des lois. Il s'agit essentiellement de ce
qu'on appelle le statut personnel, c'est-à-dire les règles relatives à l'état des personnes, au
mariage et à la filiation. Le statut personnel s'applique à tous les marocains, même
lorsqu'ils résident à l'étranger. Cette règle s'explique par diverses raisons. On peut tout
d'abord faire valoir que le statut personnel est attaché à la personne et qu'il ne saurait
varier au gré des déplacements de chacun par-delà les frontières. S'il suffisait en effet de
franchir une frontière pour échapper aux règles du droit marocain, la règle de droit
marocaine serait réduite à néant.
Le conflit de lois: bref, lorsqu'une situation litigieuse présente un élément
d'extranéité, la règle de conflit de lois peut amener le juge marocain saisi du litige à
appliquer une loi étrangère, et réciproquement, un juge étranger peut avoir à appliquer la
loi marocaine. On constate que la compétence de la loi marocaine n'est pas automatique et
qu'il y a des cas où elle cède face à une loi étrangère.

Sous-section IV. L'interprétation des textes :


Diverses hypothèses peuvent se présenter dans lesquelles il apparaît nécessaire de
procéder à une interprétation du texte en vue de l'appliquer à la situation considérée.
Ainsi, l'application de la loi par les tribunaux suppose que le texte est clair et précis.
Aussi, la règle de droit étant par définition une règle générale et impersonnelle, elle est
souvent conçue en termes généraux et parfois assez vague. Il faudra alors dégager la
véritable signification du texte et de s'interroger sur la volonté du législateur. Ainsi, tous
les textes quelle que soit leur origine, peuvent donner lieu à interprétation. En pratique, il
s'agit le plus souvent de lois.
§1. Les autorités compétentes en matière d'interprétation :
1. L'interprétation des lois par le parlement :
Le législateur s'autorise parfois, par une loi interprétative à préciser le sens
antérieure qui pouvait paraître ambiguë ou obscure. En conséquence, cette interprétation
s'impose aux tribunaux et s'applique rétroactivement à la date de la loi interprétée. Cette
technique de la loi interprétative est souvent utilisée pour redresser l'interprétation faire de
la loi par la jurisprudence, qui ne serait pas conforme à l'intention du législateur.

44
2. L'interprétation des textes par le juge :
Les solutions jurisprudentielles jouent un rôle essentiel dans l'interprétation et
l'évolution du droit. Les différentes juridictions du Royaume appliquent la loi en
permanence dans les affaires qui leurs sont soumises. Ainsi, le juge doit d'abord procéder
à l'analyse et à l'interprétation des dispositions légales ou réglementaires.
Reste à préciser que cette interprétation jurisprudentielle n'a qu'une portée relative.
Elle produit tous ses effets mais dans le cadre d'une instance donnée et pour résoudre un
litige spécifique. Il est donc fort probable que d'autres juridictions interprètent autrement
un texte dans un procès ultérieur posant les mêmes questions. Autrement dit,
l'interprétation jurisprudentielle, aussi concrète et fonctionnelle qu'elle puisse être, elle ne
lie pas les autres juridictions comme c'est le cas dans le système de la Common Law. En
revanche, la jurisprudence de le Cour de cassation, bénéficie tout de même d'une place à
part, et les solutions émise par cette Cour peuvent avoir une portée générale sans être
obligatoires, en raison du fait qu'elle se trouve au sommet de la hiérarchie judiciaire.
3. L'interprétation des textes par la doctrine :
La doctrine peut être définie comme l'ensemble des opinions publiées par la
communauté des juristes. Ces opinions portent notamment sur l'interprétation de la règle
de droit. Même si la doctrine n'est pas au même titre que la loi ou la coutume, une source
officielle du droit, il est certain que les réflexions des juristes participent à la formation, à
l'interprétation et à l'évolution du système juridique.
Les opinions émises n'ont certes qu'une portée limitée, mais le débats qu'engendre
une question donnée est lui-même, important et enrichissant. Il peut même mener jusqu'à
orienter le législateur, au stade de l'élaboration des textes ou les juridictions au niveau de
l'interprétation des règles de droit.
§2. Les règles d'interprétation
Les règles à appliquer ont été progressivement dégagées par la pratique, par
l'expérience, mais aussi et surtout par la doctrine qui a proposé des méthodes
d'interprétation. On oppose à cet égard deux grandes écoles, l'école de l'exégèse
(interprétation d'un texte, critique), et celle de la libre recherche scientifique.
1. L'école de l'exégèse :
« L'exégèse est la science qui consiste à établir, selon les normes de la critique
scientifique, les sens d'un texte ou d'une œuvre littéraire ». Petit Larousse.
Pour cette école, l'interprétation doit d'un texte consiste à en rechercher le sens;
l'étude doit donc être menée sur le texte lui-même. Cette école s'est développée à la suite
de la promulgation des premiers Codes réalisés par Napoléon, dans différents domaines

45
du droit privé, spécialement après la promulgation du Code civil de 1804 qui a longtemps
été considéré comme un monument de la raison. D'où, en cas d'obscurité ou d'insuffisance
de la loi, l'importance attachée à la recherche du sens du texte. La principale
préoccupation de l'interprète consiste à rester près du texte même de la loi. Contrairement
à la présentation qui en est faite, la méthode exégétique ne se ramène pas uniquement à
l'interprétation littérale du texte, mais elle tend également, au-delà de la lettre du texte, à
rechercher l'intention du législateur et à faire prévaloir l'esprit de la loi sur la lettre du
texte
En cas d'obscurité, toute une série de techniques ont été mises au point pour cerner
le problème:
Les interprètes font appel aux ressources de la grammaire, à l'histoire du droit et
surtout aux travaux préparatoires qui ont précédé et accompagné l'élaboration de la loi et
qui sont publiés au BO.
Cornu résume de façon claire et précise la méthode exégétique: « méthode
d'interprétation de la loi dont le principe est de rechercher ce qu'a voulu dire l'auteur du
texte à partir de celui-ci, du contexte, des travaux préparatoires et de l'objectif général de
la loi, d'en dégager le sens d'après l'intention du législateur, afin d'en régler la portée, de
manière à appliquer la règle dans la plénitude de sa raison d'être, en en faisant au besoin
prévaloir l'esprit sur la lettre ». Si la loi se révèle insuffisante ou présente des lacunes,
l'interprète utilisera tous les procédés du raisonnement logique: l'analogie, les arguments à
contrario, ou le procédé de déduction.
Le déclin de cette école de l'exégèse, est dû au fait du vieillissement des textes
soumis à interprétation et qui n'ont pas été renouvelés ou mis à jour. Les critiques
soutenaient qu'il était absurde de rechercher la volonté du législateur au moment où il a
élaboré le texte pour régler des problèmes qui se posent aujourd'hui et qui n'avaient pas pu
être imaginés à cette époque12.
2. L'école de la libre recherche scientifique :
Gény13 a élaboré une autre méthode d'interprétation qui repose sur la libre recherche
scientifique. Selon cette méthode, lorsqu'un texte présente des lacunes, ou si le législateur
12
En conséquence à ce déclin, il y eu une méthode qui proposait de détacher l'interprétation de la loi de l'intention de ses rédacteurs, afin d'adapter le texte de la
loi aux nécessités et besoins actuels de la société.

Autrement dit, l'interprète fait en sorte de mener le texte à la réalité économique et sociale de son époque: une sorte d'actualisation des textes anciens. Il s'agit
donc d'une interprétation qui est à la fois déformante et constructive. Cette école a été vivement critiquée parce qu'elle permet au juge de modifier les règles de
droit et leur faire dire ce qu'elles n'ont jamais voulu dire « sans tenir compte du principe de la séparation des pouvoirs ». Pour plus de détails, voir, ESSAID, option
cite, p. 222.

13
GENY (François), Méthode d'interprétation et sources en droit privé positif, Essai critique, 1899,2 ème éd. ln, M J ESSAID, pré. Note n° l, p.
223.

46
n'a rien prévu et n'a donc pas pu avoir d'intention afin de régler une situation nouvelle, il
n'y a plus alors matière à interprétation puisqu'il n'y a pas de texte régissant la situation.
Or, il faut combler le vide juridique, par une libre recherche, scientifique de la meilleure
solution. Un pouvoir créateur de droit est alors reconnu au juge, qui devra créer la
solution au problème juridique à lui posé, du moins, lorsqu'aucun texte ne peut servir de
base à son raisonnement.
Cependant, le juge doit toujours s'attacher au contexte de l'époque à laquelle il
statue, avant de poser la règle qui semble la plus adéquate aux besoins actuels. Certes, il
ne faut pas chercher la volonté du législateur pour régler des situations auquel le
législateur n'a pas pensé ou n'a pas traité, de manière artificielle. La loi ne peut pas tout
régler avec précision. Il appartient à l'interprète de rechercher la meilleure solution
adaptée au contexte sociale et économique de l'époque.
Au Maroc, le juge n'a pas de pouvoir normatif, toutefois, il s'efforce toujours de
trouver la solution d'un litige en se fondant sur un texte quitte à l'interpréter de manière
très extensive afin qu'il soit mieux adapté au contexte social, économique et
psychologique de l'époque. Autrement dit, procéder à une interprétation très large d'un
texte. De même, le juge marocain, à l'instar du juge français, fait appel aux principes
généraux du droit, s'il n'existe aucune règle de droit pouvant régir une situation.
Section 2. La coutume :
Il est évident que les textes, qu'ils émanent du législateur ou du pouvoir exécutif
restent la source primordiale du droit. Toutefois, parallèlement, à la loi et au règlement, il
existe d'autres règles, qui ne revêtent pas la forme habituelle des textes écrits présentés
sous la forme des lois ou règlements. A la différence des dispositions législatives ou
réglementaires, les règles coutumières ne sont pas d'origine étatique et procèdent
directement et spontanément des pratiques populaires.
§1. La notion de coutume :
A. définition :
Il n'existe aucune définition légale au mot coutume d'où l'incertitude sur ce qu'il faut
comprendre sous ce terme. Selon certains, « on appelle coutume, des lois que l'usage a
établies et qui se sont conservées sans écrit par une longue tradition »14. Elle présente
l'avantage de répondre plus exactement aux besoins de la société qu'elle régit.
Cependant, la coutume soulève un problème de définition en ce qu'elle est difficile à
distinguer de l'usage. L'usage est ce qui se fait habituellement et qui n'est pas, en principe,

14
CORNU (Gérard), Droit civil, Introduction, Les personnes, Les biens, s= éd., Montchrestien, Paris, 1997, n°

47
obligatoire. Ainsi, il est un passage obligé qui est à la source de la coutume. On serait en
présence d'une coutume lorsque l'usage, étant devenu suffisamment fréquent et régulier,
est ressenti par la collectivité comme étant obligatoire.
Au plan pratique, tout usage ne constitue pas une coutume. En effet, pour qu'on
puisse dire qu'il s'agit d'une coutume, deux éléments doivent être réunis: l'un matériel,
l'autre psychologique.
B. Les éléments constitutifs de la coutume :
1. l'élément matériel :
L'élément matériel réside dans un usage constant et général. L'idée de constance
sous-entend une certaine ancienneté. Autrement dit, il faut une pratique suffisamment
répétée. Il ne doit pas s'agir d'un acte isolé: « une fois n'est pas coutume» dit l'adage.
Aussi, l'usage doit remonter assez loin dans le temps et doit être observé par les gens de
manière continue. La coutume ne peut se former que lentement; elle est le fruit qui mûrit
doucement au fil des
usages.
L'idée de généralité signifie qu'une règle de droit doit être exprimée de manière
générale. Mais, au même titre que la loi, la coutume peut ne viser que certains
professionnels, auxquels elle s'applique. Il est rare qu'un usage soit suivi à l'échelle
nationale. Il peut être limité à une région, à une catégorie professionnelle etc.
2. L'élément psychologique :
Cet élément réside dans la croyance chez les sujets de droit au caractère obligatoire
de l'usage auquel ils se conforment spontanément: à force d'observer toujours les mêmes
usages, on finit un jour par croire à leur caractère obligatoire, et ce jour-là, l'usage devint
coutume, comme s'il était question d'une sorte de loi imaginaire que tout le monde
observe.
Cependant, on a parfois estimé que ce qui ferait le caractère obligatoire de la
coutume, ne serait pas la conviction qu'on en a, mais sa consécration par la jurisprudence.
Ainsi, c'est la jurisprudence qui rend un usage obligatoire. Or, c'est méconnaître
l'originalité de la coutume et donner au juge un pouvoir qu'il n'a pas.
§2. Rôle et force obligatoire de la coutume :
Le Maroc a connu une régression du droit coutumier après l'avènement de
L’indépendance 15 . Ainsi, un Dahir du 25 août 1956 a supprimé définitivement les
tribunaux coutumiers qui étaient institués dans les zones que les autorités du protectorat

15
Le droit coutumier ou « orf » était très présent dans certaines régions du Maroc, avant et pendant le protectorat. Pour plus de détails, voire:
FASSI FIHRI (M.H), l'itinéraire de la justice marocaine, Librairie populaire, Rabat, 1997 ; Essais (M.-J.), précité, p. 133.

48
qualifiaient de « berbères», et qui avaient une compétence pénale et civile. De même,
toutes les règles coutumières contraires au droit musulman ont été abrogées par la
déclaration Royale. Or, les coutumes compatibles avec la Chariâ, il découle de la
déclaration Royale de 1956, qu'elles peuvent recevoir application. Cependant, en présence
de la loi, elles s'effacent: l'article 475 du D.O.C. dispose que «la coutume et l'usage ne
sauraient prévaloir contre la loi lorsqu'elle est formelle ».
Certes, le droit marocain ne laisse que peu de place à la coutume, cependant, les
Codes marocains se réfèrent fréquemment à la coutume, ou aux usages. Ainsi, il arrive
que la loi fasse elle-même un renvoi à la coutume. Aux termes de l'article 463 du D.O.C.
« on doit suppléer les clauses qui sont d'usage dans le lieu où l'acte a été fait ou qui
résultent de sa nature». On peut également citer l'article 2 du Code de commerce selon
lequel: « il est statué en matière commerciale conformément aux lois, coutumes et usages
du commerce, ou au droit civil dans la mesure où il ne contredit pas les principes
fondamentaux du droit commercial ». L'article 3 du même Code ajoute que « les
coutumes et usages spéciaux et locaux priment les coutumes et usages généraux ».
La loi est supérieure à la coutume: un texte peut abolir une coutume mats pas
l'inverse, une coutume ne peut pas abroger un texte. Cependant, il faut préciser que
lorsqu'il s'agit d'une loi supplétive, une coutume peut aller à l'encontre de cette loi. En
effet, contrairement à une loi impérative, la loi supplétive peut être écartée par une clause
contraire, donc, elle peut l'être d'une manière générale par une coutume contraire. La loi
dans ce cas n'est pas obligatoire. Au contraire, lorsqu'il s'agit d'une loi impérative, celle-ci
ne saurait être abrogée par une coutume ou pratique contraire.
En conclusion, on peut dire que si à ce jour la coutume apparaît comme une source
du droit, il ressort de l'étude qu'elle est devenue une source secondaire, simplement
complémentaire de la règle de droit.
Chapitre II. Les sources informelles ou interprétatives :
La loi constitue la source principale mais non exclusive du droit marocain. A ses
côtés coexistent en effet d'autres sources qui enrichissent la loi et qui la complètent par
voie d'interprétation: il s'agit de la jurisprudence et de la doctrine. Ces sources de droit ne
se situent pas au niveau des sources directes que sont les textes et la coutume.
Section 1. La jurisprudence :
La jurisprudence désigne l'ensemble des décisions de justice rendues dans tel
domaine, ou dans telle branche du droit. C'est aussi la manière habituelle de juger,
d'appliquer la règle de droit en tous les domaines. Autrement dit, la jurisprudence est la
règle de droit telle qu'elle est appliquée par les tribunaux lorsqu'ils sont saisis d'un litige.
Une décision de justice prise isolément n'est qu'une mesure individuelle à laquelle il

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manque généralité et abstraction pour prétendre être une règle de droit. Mais considérées
dans leur ensemble, les décisions judiciaires révèlent une manière habituelle de juger
appelée: jurisprudence.
§1. La formation de la jurisprudence :
Le juge saisi d'un litige doit le trancher conformément aux règles de droit qui lui
sont applicables. Toutefois, la décision qu'il rend ne concerne que les parties à ce litige et
est en conséquence une mesure individuelle. De ce fait, elle ne peut être une règle de droit
qui se définit par son caractère général et abstrait.
Ainsi, le même tribunal est libre de statuer différemment dans une affaire semblable.
Le fait que le tribunal, ait interprété et appliqué une règle de droit de telle manière dans
telles circonstances, n'a qu'une portée relative, dans le sens où il n'a, juridiquement, pas de
valeur contraignante pour les juridictions qui auraient à connaître d'une affaire similaire,
et ce, contrairement au droit anglais pour lequel le précédent constitue une règle
obligatoire. Le juge marocain est libre de statuer comme il l'entend. Cependant, pour
qu'une interprétation puisse avoir une portée générale, encore faut-il qu'elle soit unique
sur tout le territoire marocain: le caractère d'unité.
Lorsqu'une question se présente fréquemment aux tribunaux, ceux-ci prennent
l'habitude de lui donner une même réponse. De ce fait, une interprétation dégagée par les
magistrats peut finir par avoir une portée générale, et cela se produit lorsque les solutions
jurisprudentielles se répètent constamment et sans interruption. Concernant, la Cour de
cassation, qui est la plus haute juridiction marocaine dans l'ordre judiciaire, elle un rôle
unificateur.
- Le rôle de Cour de cassation: en règle générale, dans l'ordre judiciaire et
exception faite pour les litiges de faibles importances, la règle de double juridiction
permet à tout plaideur, mécontent de la décision rendue par les tribunaux de
première instance de faire appel devant la cour d'appel. Or, la Cour de cassation a
une mission spéciale. Elie ne rend pas justice aux plaideurs, elle a pour rôle de
contrôler la légalité des décisions de justice rendues en dernier ressort16, et par ce
moyen, d'assurer l'unité d'interprétation, l'unité de la jurisprudence17. La Cour
cassation n'est pas un troisième degré de juridiction. A cet égard, la jurisprudence,
en l'occurrence celle qui concerne les arrêts de principe18, de la Cour de cassation
16
C'est-à-dire les décisions contre lesquelles les voies de recours normales sont épuisées: arrêt de la cour d'appel, autres décisions rendues sans
appel possible.
17
En appel, le procès recommence en entier devant la cour; devant la Cour suprême, les éléments de fait ne peuvent plus être discutés, la Cour
se contente de contrôler si la décision critiquée a bien interprété et appliqué la loi. Si la décision est incorrecte, la Cour suprême casse la
décision de la Cour d'appel et renvoie les plaideurs devant une autre juridiction ou devant la même autrement composée.
18
Arrêts de principe: il s'agit d'arrêts qui prennent position sur une difficulté d'interprétation ou d'application de la règle de droit et posent un
principe susceptible de s'appliquer à tous les cas analogues, contrairement aux arrêts d'espèce qui ne visent qu'une situation précise sans
portée générale.

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est importante et bénéficie d'une autorité particulière, étant donné qu'elle se trouve
au sommet de la hiérarchie judiciaire. Les arrêts de la Cour de cassation fixent la
jurisprudence.
§2. La force obligatoire de la jurisprudence :
La jurisprudence, simple autorité? Ou source de droit? Une jurisprudence, même
celle consacrée par la Cour de cassation, n'a pas la valeur juridique d'un texte, elle ne lie
pas le juge, quelle que soit la place de celui-ci dans la hiérarchie. De ce fait, certains
auteurs soutiennent que la jurisprudence n'est pas une source de droit, mais seulement une
autorité. Or, en pratique, cette affirmation est loin d'être entièrement juste car, on constate
que la plupart des juridictions se conforment spontanément à la jurisprudence de la Cour
de cassation.
La jurisprudence joue un rôle important d'autant plus que les textes sont plus
lacunaires. Elle peut être amenée à jouer un rôle plus ou moins large: tantôt elle se borne à
interpréter la règle, tantôt elle doit l'adapter ou la compléter, tantôt enfin, elle vient
suppléer une règle absente. Dans toutes ces hypothèses, elle reste subordonnée à la loi. Le
parlement fait la loi et le juge l'applique éventuellement en l'interprétant ou en la
complétant. Bref, la jurisprudence interprète et applique la loi. La jurisprudence peut être
considérée, malgré les critiques, comme une source de droit, mais demeure subordonnée à
la loi.
Section II. La doctrine :
Il s'agit de la littérature juridique, ou encore, de l'ensemble d'opinions émises sur le
droit par les juristes: enseignants, magistrats, avocats ou doctorants ... Ce terme peut soit
désigner des personnes, à savoir, l'ensemble des auteurs qui écrivent dans le domaine du
droit ou désigner la littérature juridique considérée dans son entier.
Sans la doctrine, le droit ne serait qu'une infinité de textes, lois ou règlements,
intégrés ou non dans un code, et une infinité de décisions de jurisprudence. Or, la doctrine
joue un rôle essentiel car il lui revient de dégager les principes, de les combiner entre eux,
d'en classer les applications et de coordonner le tout en évitant les contradictions. Ainsi, la
fonction première de la doctrine est de mettre en ordre, de synthétiser et de révéler le droit
tel qu'il est. En conséquence, elle mène vers une meilleure connaissance du droit tel qu'il
est. Ensuite, en partant d'un constat, la doctrine peut émettre un jugement de valeur sur le
droit positif, par exemple révéler ses ambiguïtés et ses lacunes, et corrélativement,
proposer les réformes qui lui paraissent nécessaires.

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La doctrine ne crée pas les règles de droit, et les opinions émises n'ont aucune valeur
obligatoire pour le juge, même en étant unanimes sur une question déterminée.
Cependant, l'autorité de la doctrine tient à la qualité de l'argumentation tenue. Ainsi,
lorsqu'une opinion repose sur un raisonnement bien conduit, elle peut influencer40 la
décision du juge et même la conviction du législateur. Bref, la force de la doctrine tient à
la qualité de l'opinion exprimée: elle est une force de persuasion. Les magistrats ne sont
pas indifférents aux écrits de la doctrine, surtout les commentaires ou les observations que
peuvent susciter les décisions qu'ils ont eux-mêmes rendues.
Il en est de même pour le législateur qui peut être influencé dans l'établissement des
textes nouveaux par la doctrine. Cette dernière incite aux réformes à travers son regard
critiques sur les textes existants et il arrive même qu'elle participe à ces réformes. En
effet, la plupart des textes sont élaborés au sein de commissions auxquelles participent des
représentants de la doctrine. C'est dire le rôle remarquable que la doctrine, étant libre de
toute contrainte, peut jouer dans la formation du droit. Ses opinions n'ont aucune force
obligatoire, mais qui peuvent, grâce à leur force persuasive, se trouver reprises dans une
loi.

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