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La Géométrie
avec les Yeux
GÉOMÉTRIE ÉGYPTIENNE
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Yvo Jacquier © Géométrie comparée - La « géométrie avec les yeux » des Égyptiens 1 sur 49
PRÉSENTATION
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La géométrie sacrée
La géométrie des Égyptiens est à l'origine de celle qui servira aux constructeurs du moyen-âge pour bâtir les
cathédrales. Sur le plan pratique, l'utilisation du triangle 3-4-5 (de la corde à 13 noeuds) comme la tradition du
quadrillage sont les attributs les plus typiques de cet héritage et surtout, de nombreuses légendes évoquent la
grande Égypte dans une atmosphère où le mystère le dispute au secret (atmosphère que l'absence de sources et
de méthodes fiables à l'étude ont amplement participé à installer). Cependant pour la science, le mystère est bien
davantage dans la beauté lumineuse de ce qui se révèle, que dans l'ombre de ce qu'on ne comprend pas.
Ainsi la géométrie égyptienne se situe à l'origine d'un pan des mathématiques appelé géométrie sacrée. L'étude
ne lui a pas encore trouvé de frontières, et le terme “occidental” ne tiendra que le temps que nous consacrerons à
cette opinion de la géographie. De même si Byzance s'avère l'un des principaux foyers de son développement, la
géométrie sacrée reprend à Ispahan, terre musulmane s'il en est, les mêmes arguments. Et ce n'est pas tout... Les
sources de cet art se perdent dans la nuit des temps. Au néolithique déjà, la géométrie sacrée fait figure
d'héritage. Dès le quatrième millénaire en Mésopotamie, l'architecture atteint un niveau de complexité qui
démontre une grande maturité, donc une très longue antériorité... C'est dans ce contexte que naît l'écriture.
Toute histoire a une fin, celle-ci s'achève par un feu d'artifice : la Renaissance. La chute de Constantinople
(1453) provoque indirectement l'apothéose de cet art. Il profite en Italie de conditions idéales, y compris
climatiques. Albrecht Dürer se charge de rédiger ce qu'il convient d'appeler le testament de cette civilisation de
l'image. Elle pense avec les yeux, contrairement à la nôtre qui calcule tout...
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I - LA CORDE - PREMIER OUTIL
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Le vocabulaire de la nature
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La corde, ancêtre du compas et de la règle
La corde est à la fois règle (tendue), compas (rayon d'un cercle autour d'un piquet) et même crayon (une fois
trempée dans la craie). Attachée à deux piquets, elle permet de dessiner une ellipse, et il suffit de la plier en deux
pour trouver son milieu. C'est le début de la mesure, le premier pas vers la Magie que les Anciens associent à
l'élément Feu. Est-ce pour avoir si longtemps pratiqué leurs exercices autour du feu ?
Cet angle droit n'est qu'un des aspects que le Triangle Sacré porte en lui. Il est raisonnable d'admettre que les
hommes ont approché l'angle droit, et développé progressivement la Géométrie jusqu'à l'avènement du Triangle
Sacré avec toutes ses propriétés. C'est à ces prémices que nous nous intéressons ici. À quel moment et dans
quelle Civilisation cet outil géométrique est-il apparu ?
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II - LE QUADRILLAGE PALÉOLITHIQUE
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La roue solaire
Traçons un cercle de rayon 2 au centre de ce quadrillage. Sa courbe croise la grille tous les 30° et définit ainsi
une partition du cercle en 12 secteurs égaux : ce schéma est à l'origine du cadran horaire et aussi du zodiaque. La
√3 n'est pas “d'époque”, il va nous falloir apprendre à penser avec les yeux. Cette proportion de √3 est, pour
l'homme du paléolithique, celle où le cercle croise la grille. Ainsi pour l'obtenir à partir d'une unité, il trace un
arc de cercle dont le rayon fait le double et qui coupe la verticale. Les premières définitions (basiques et
originelles) de la géométrie sacrée sont toutes de cet ordre : “tracées à la corde”.
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Cette partition du cercle implique le découpage de l'angle droit en
trois parties égales. La trisection des angles est un des problèmes
les plus “coriaces” de la géométrie. Archimède proposera une
solution mais elle sort de la logique simple du compas :
http://fr.wikipedia.org/wiki/Trisection_de_l'angle
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Dès l'origine, le lien entre l'astronomie et la géométrie produit une grande
partie du vocabulaire symbolique. Ainsi en occident, nombre de divinités
empruntent directement leurs noms aux astres. L'astrologie deviendra une
discipline à part entière, cependant elle ne cessera de se rappeler son
origine jusque dans sa façon de s'écrire. Ci-contre, un thème astral de la
main même de Johannes Kepler - datant de 1608. La mise en forme du
cercle zodiacal se souvient du carré de quatre carreaux sur quatre.
L'hexagramme de Salomon
Symbolique - La valeur du 6
Cette géométrie de quadrillage est connue des historiens (médiévistes). Ils désignent
par “tradition” les figures géométriques assorties de leur interprétation symbolique,
sans préciser, faute d'éléments, l'origine exacte et le développement de ces
mathématiques particulières. L'hexagramme de Salomon est assurément, on le
comprend à travers cette approche, l'une des premières figures qui naît de la corde.
Cette étoile est marquée par le 6. Sans présumer du sens que lui donnaient les
paléolithiques, les Égyptiens et même les Pythagoriciens, les idées qui se rattachent à ce nombre sont, selon la
dite-tradition : Amour, réunion, association, fidélité, équilibre - Éternel/cyclique, Soleil - Surface du triangle
sacré, et bien sûr hexagramme - son expression la plus visuelle.
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Dans l'hexagramme, les triangle contraires de l'Eau (pointe en bas) et du feu (pointe en
haut) trouvent leur équilibre par la mise en commun de leurs trois centres (gravité,
cercles inscrits et circonscrits). D'autre part, résultat du dialogue de la géométrie et de
l'astronomie, nous avons vu que le 6 sert de mesure au temps cyclique. Cette réflexion
se poursuit dans l'art des nombres, où la symbolique se focalise sur leurs combinaisons.
Les dés ont 6 faces, et ils permettent de projeter sur un fil unique une réalité à trois
dimensions (l'image du cube apparait ici à gauche, dans l'hexagramme).
Le quadrillage met en évidence les proportions de l'hexagramme, notamment son cercle inscrit de rayon 1. La
figure de l'hexagramme prend deux positions selon les 2x6 directions de la roue solaire. La figure de droite met
en évidence les rapports entre la logique du trois et celle du quatre par le jeu du cercle.
Le tétraktys pythagoricien
Le cube fait son apparition pour la seconde fois au coeur du tétraktys, dans une
autre position. Sur le visuel à droite, le tétraktys se construit deux fois, de haut
en bas et de bas en haut, si bien qu'au total la figure comporte 10 + 3 = 13 points.
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La croix cerclée
Cette croix cerclée est un grand classique de la
géométrie primitive, aux côtés de l'hexagramme et
du Vesica Piscis. Ces trois figures tissent de
nombreux liens géométriques, qui sont la base de la
géométrie sacrée, dans la pratique.
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Le vesica piscis
Formé de deux cercles jumeaux qui posent chacun leur centre sur
le cercle de l'autre, voici le vesica piscis. Considéré comme sacré
par les pythagoriciens, ce motif archaïque est le symbole originel
de Vénus, bien avant qu'elle n'hérite de toutes les qualités qui
surchargent littéralement son statut. La vulve explicite de
l'amande est pudiquement qualifiée de "déïque", en conséquence
elle représente le féminin sacré. En revanche, le 3 auquel elle se
rattache par la racine n'est pas encore révélé...
Le théorème de Pythagore établira la hauteur de l'intersection, qui fait √3 fois le rayon. La racine exprime
l'origine, la source, le mystère d'un élément. Mais même sans cette définition/explication, le Vesica Piscis se
rapporte explicitement au 3, entrainant avec lui les deux valeurs symboliques qu'il porte : féminin et sacré.
Pythagore "découvre" ainsi un 3 féminin et céleste. À cette occasion, l'on peut noter que le mot "céleste" gagne
en nuance par rapport au ciel de la fécondité archaïque dont il est issu. Cette nouvelle définition est en rupture
avec les mythes anciens où le ciel est masculin. Pythagore doit
choisir entre un héritage de type primitif et la vérité que les
mathématiques dévoilent à ses yeux. La symbolique, que l'on
qualifie aujourd'hui de tradition, lui donne évidemment raison de
choisir les mathématiques ! Remarque importante : les anciens se
relient à des croyances quand ils n'ont pas les moyens de faire
autrement, mais dès que l'outil d'observation ou de construction le
permet, leur raison se met en marche.
L'homme est naturellement bon en maths !
La grille byzantine de « La sainte Trinité » selon Andreï Rublev n'est pas comme on
s'y attendait un quadrillage trivial (même gouverné par le nombre d'or). La figure ci à
gauche sert de diapason à l'ensemble de l'oeuvre. Un cercle s'y accorde à
l'hexagramme en prenant son hexagone interne pour mesure : l'amande du vesica
piscis mesure 2 en hauteur - donc le cercle mesure 2/√3 de rayon.
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Le pentagramme et le Vesica Piscis
Pour plus de facilité, le quadrillage est ici doublé : un carreau vaut donc 1/2.
Le pentagramme est marqué par , le nombre d'or. Pour qu'une véritable relation
se révèle, une coïncidence de figure, il doit symboliquement se développer à
partir du centre des cercles du Vesica.
= (1+ √5)/2 = 1/2 + √5/2
Cette somme se traduit par un carreau plus la diagonale d'un double carreau.
L'on reporte alors ce total sur la verticale qui traverse l'amande en hauteur.
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III - LE TRIANGLE ÉGYPTIEN
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La seconde école écrit la géométrie, à commencer par ses calculs. Elle s'empare du concept de surface, qui
prolonge ses capacités de démonstration, sans se préoccuper de la signification symbolique de ses éléments. Les
prémices de ces mathématiques objectives laissent des traces dans plusieurs civilisations néolithiques entrant
dans l'antiquité, depuis l'Indus jusqu'en Grèce y compris en Mésopotamie et en Égypte. Et ce sont les Grecs qui
lui donneront sa première forme achevée à travers les Éléments d'Euclide.
Ces deux écoles coopèrent à l'intérieur des mêmes espaces culturels. C'est notamment le cas en Égypte où les
deux pratiques se complètent sur les chantiers de construction et pour organiser la société. Le calcul s'avère
indispensable à la maîtrise d'ouvrage et pour fixer les impôts et les taxes, quand la géométrie sacrée préside à
l'organisation de la nécropole de Gizeh, des temples et des fresques. Cette collaboration se perpétue tout au long
de l'histoire, jusqu'à la Renaissance où la science de Kepler naît de leur fusion.
L'école archaïque, la première, semble elle-même produire deux courants ou plutôt, l'on peut y distinguer deux
pans. La géométrie avec les yeux commence naturellement par les figures que nous venons d'exposer, très
accessibles à son quadrillage. Le triangle équilatéral et sa √3 (non explicite) y jouent un rôle central. Ces
éléments sont par exemple valorisés dans l'architecture du temple d'Eanna, appartenant à la civilisation d'Uruk:
http://www.art-renaissance.net/EDL/Yvo_Jacquier-Eanna-Uruk-IV.pdf
Un second pan de cette géométrie non écrite se développe plus tard, de part son degré de complexité, et sa figure
fétiche est le triangle 3-4-5, autrement appelé triangle de l'arpenteur ou encore sacré et surtout triangle égyptien.
Tout porte donc à croire que les Égyptiens sont les premiers a en acquérir la maîtrise - ce terme n'est pas usurpé.
Sous ses allures d'équerre pour le maçon (corde à 13 noeuds), cette forme élémentaire cache une somme
considérable de propriétés, oubliées ou ignorées des manuels scolaires. Il est à noter que les deux pans de la
géométrie se rejoignent sur la figure du pentagramme, qu'elles produisent chacune à sa façon.
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Les règles du jeu
Avec ou sans ? Thalès !
La logique égyptienne ne fait confiance qu'à l'évidence. Cela n'empêche pas la réflexion : une civilisation peut-
elle vivre trois mille ans sans réfléchir ? Concrètement, le matériel de démonstration des Égyptiens se résume
aux propriétés des triangles semblables. Thalès aurait ainsi traduit ce qu'il aurait appris chez eux. Dans ces
conditions, Raphaël Legoy nous fait remarquer qu'il est juste d'utiliser le terme de monstration plutôt que celui
de démonstration à propos des processus de construction qui établissent les propriétés. En effet, la géométrie
avec les yeux montre les choses plus qu'elle ne les démontre.
Le quadrillage
Le statut du quadrillage a évolué au fil de l'histoire. Au paléolithique, c'est le champ de découverte des
mathématiques. Au moyen-âge, il est devenu le moyen de comprendre, de démontrer et de retenir les figures de
la composition dans les arts. Dans son « Éloge du papier quadrillé », Henri Lombardi nous fait remarquer que le
quadrillage sert aussi à agrandir les figures (Repères-IREM, N° 45, 2001; http://www.univ-irem.fr/spip.php?
article=71&id_numero=45). Le quadrillage est plus qu'une façon de poser la géométrie : il s'identifie à la façon
de penser qui s'écrit sur ses mailles. En outre, il permit à la culture visuelle d'échapper au péril des bûchers, que
de Byzance jusqu'à Rome on se plaisait à allumer en son honneur. En dépit de son extraordinaire longévité et de
sa résistance, cette tradition s'est progressivement éteinte après la Renaissance.
L'unité
Que l'on prenne en référence les Ennéades de Plotin ou les écrits de Fra Luca Pacioli, le concept d'unité est un
gouffre pour les mots. En revanche, avec le quadrillage, l'unité devient une réalité, accessible. Toute figure
trouve par son entremise l'accès à l'unité de référence. Dans l'esprit des constructeurs et des artistes qui ont
utilisé cette géométrie pendant des millénaires, ce point est capital. Il est des domaines ou le principe d'unité est
facilement admis : par exemple la musique. L'idée d'en produire sans accorder les instruments est relativement
marginale, voire subventionnée. Quand il s'agit d'art et d'architecture, il est bon de se rappeler que jusqu'à la
Renaissance, le premier souci des créateurs était cette unité qui permet à l'ensemble de garder son harmonie.
Remarque 1 : L'exposition de la culture géométrique des Égyptiens ne présume ni de ses échanges avec leurs
voisins (de Mésopotamie, de l'Indus, ou même de l'Atlantique) ni de l'exclusivité de son savoir. La corde à treize
noeuds comme le culte qui s'y rattache sont attestés en diverses places au Néolithique. Cet article fait preuve
d'une sorte de “préférence” envers l'Égypte, car plusieurs raisons s'y conjuguent : l'excellence de l'art égyptien,
les fortes présomptions qui pèsent sur les Grecs d'être allés à cette école... Qui révèle sa cohérence !
Remarque 2 : les monstrations qui suivent font de nombreux emprunts à l'article paru dans la revue Repères-
IREM, Numéro 87 – Mars 2012 : « La naissance de la Géométrie : la géométrie avec les yeux des Egyptiens ».
http://www.univ-irem.fr/reperes/articles/87_article_586.pdf
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Les trois premières mesures
Si l'on s'arrête à cette définition, la longueur 5 du troisième coté, AC, reste axiomatique. Il aura fallu des années
pour résoudre ce point et il se révèle capital. En effet, selon que la longueur du 5 soit admise ou démontrée, la
géométrie égyptienne ne jouit pas du même statut, notamment face à celle que construiront les Grecs. Les
Égyptiens pratiquaient-ils la science ou le bricolage ?
Première monstration
N.B. : Le cercle inscrit au triangle n'intervient pas dans cette première monstration. Pourtant il y révèle ses
mensurations (rayon 1, diamètre 2)... Ainsi, les six premiers entiers se retrouvent unis symboliquement par une
seule et même figure, y compris le 6 de la surface du triangle.
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Le cercle inscrit, dit intime
D'autres monstrations établissent la longueur 5 de l'hypoténuse, mais elles se servent d'une propriété particulière
du cercle inscrit au triangle, dont voici une autre monstration : son rayon est égal à 1.
Monstration :
Soit HLR, un triangle 3-4-5.
Soient les points P, Q, et O du quadrillage, facilement
identifiables sur la figure.
Les triangles HPQ et HQR sont semblables.
Selon quoi l'angle PHQ est égal à l'angle QHR.
O est donc sur la bissectrice de l'angle en H du triangle 3-4-5
Or, O est aussi sur la bissectrice de l'angle en L.
Le centre du cercle inscrit au triangle est au croisement des trois
bissectrices. Deux suffisent, c'est donc O,
et le rayon du cercle est donc 1.
Ce Qu'il Fallait Montrer
Le coefficient qui différencie les triangles est HR/HQ = HQ/HP = QR/PQ = √5/2 ≈ 1,118. J'ai cru dans un
premier temps que pour les Égyptiens, ce n'était pas une question. Jean-Paul Mercier nous montre que s'ils
n'identifiaient pas cette valeur irrationnelle (√5/2), les Égyptiens étaient capables de repérer son carré : 5/4 !
Monstration :
Il suffit en effet de découper chacun des triangles de la figure précédente selon un “gabarit” connu sous le nom
de triangle de Pinwheel (en 1996, il a mis au point avec Charles Radin une méthode de pavage apériodique). En
fait pour les Égyptiens, c'est la moitié d'un double-carré. Selon ce subtil découpage, qui bouche ses trous avec
leurs surfaces symétriques, le triangle HPQ contient 4 unités et HQR en fait 5... CQFM
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Deux autres monstrations du 5
N.B. : Ces deux monstrations s'appuient sur la propriété précédente (diamètre du cercle inscrit = 2)
Monstration 2 : Cette démonstration explique la fascination des Anciens pour la figure du vesica piscis.
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Figures de transition
La logique de proportion
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IV - LA PROPORTION DORÉE DU TRIANGLE
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Avant d'aborder la proportion dorée du triangle 3-4-5, il est nécessaire de s'y préparer à travers
deux précisions d'ordre historique. La première concerne la conception de cette proportion par
les Égyptiens, et la seconde l'approche de la notion de surface : quid de leur connaissance ?
Cet exemple (un de plus) montre que le nombre d'or entre très tôt dans la
pratique des géomètres - peut-être même dès le paléolithique supérieur.
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Le concept de surface
Ainsi, les trois bissectrices d'un triangle 3-4-5 sont liées par une règle
simple. Cette propriété typique de la géométrie sacrée nous permet de
comprendre comment les Anciens ont progressé à l'étude (pas de calcul,
uniquement des évidences).
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• Lemme N° 2 (propriété utile)
Proposition
Le rectangle construit sur le cercle inscrit au triangle 3-4-5 est un rectangle d’or.
Monstration
Soit le cercle de centre I et de rayon ∂
(∂ = diagonale d'un double-carreau)
D’après le lemme N° 2 :
IC2 - IE2 = CE x CB
D'après le lemme N° 1 :
IC2 = IF2 = 5
CB/BA = AB/CE
avec AB = DC
Donc CB/BA = DC/CE
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La logique égyptienne
La toute première démonstration était laborieuse, la seconde fait intervenir le concept de surface. Ces approches
successives nous permettent une sorte d'inventaire de l'époque, de faire un tour d'horizon des méthodes.
Néanmoins quelque chose manque (ou plutôt est en trop). Les Égyptiens pensent avant tout avec des angles.
L'étude du plateau de Gizeh le démontre magistralement. 2500 ans avant notre ère, ils développent par quatre
fois, dans une même composition, la logique du nombre d'or. Plus tard, à l'époque de Pythagore, sans doute sont
il capables d'intégrer les lemmes (extérieurs) des surfaces découpées. Mais quand ils découvrent le nombre d'or,
beaucoup plus tôt, cette façon de penser n'est véritablement pas dans le ton. Et si... Oui si la définition
égyptienne de la proportion dorée était plus “pointue” encore que les deux que nous avons répertoriées. Plus
subtile que les deux diagonales qui se croisent à angle droit. Plus symbolique encore qu'un rectangle résiduel aux
mêmes proportions (que le rectangle initial auquel on retire un carré). Et si les Égyptiens étaient égyptiens...
Première étape
Comment est constitué le rectangle que
nous étudions ? Posons-le en verticale.
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Troisième étape : monstration
Le grand rectangle vertical hérite à son tour des qualités de son résidu puisqu'il ajoute un
carré de 2 à ce rectangle doré.
Ce Qu'il Fallait Montrer
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La consécration des angles
Nous allons montrer que les bissectrices d'ordre 1 et 3 du triangle 3-4-5 sont les
diagonales naturelles d'un rectangle doré. La proportion dorée apparaît ainsi pour la
deuxième fois dans la structure interne du triangle sacré.
Monstration
Nous noterons les angles sous la forme Ân
par exemple : Â3 pour l'angle n°3
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Les figures du carré du Pape
Ce carré tire son nom du cercle de diamètre 2. qu'il accompagne. Le cercle du Pape a une
grande importance dans la composition des Tarots (version de Dürer/Conver). Il décrit
parfaitement la courbe du vêtement du Pontife, exposé par la lame V des arcanes majeurs.
De façon plus générale, cette mesure de 2. revient très souvent dans la géométrie sacrée.
Elle donne souvent la “dimension de sa scène” à un tableau.
Première étape
Deuxième étape
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Troisième étape
Quatrième étape
Visuel ci à droite
Cinquième étape
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La spirale dorée du triangle
La première étape de la monstration qui va suivre consiste à distinguer un triangle de
Pinwheel collé contre l'hypoténuse du triangle. Ses mensurations sont rappelons-le de
OS = 1, SA = 2 et AO = ‘√5’.
La Bissectrice de l'angle WAT définit deux triangles qui ont chacun deux angles égaux, le deuxième étant droit.
Tandis que WA = AT = 1.
Les triangles sont donc semblables et ils forment un nouveau cerf-volant ⇤WAT.
—> Donc ⇤W = ⇤T = ⇤U =
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Ce cerf-volant exprime parfaitement les rapports du triangle sacré avec le nombre d'or :
est le rapport de son grand côté sur son petit côté. Il s'en suit naturellement une autre
figure, divisant le motif à la façon des fractales.
Les cerf-volants, fruits de divisions successives par le nombre d'or, se combinent jusqu'à
former une spirale dorée qui converge au point T, c'est à dire au croisement des
diagonales du rectangle doré et de son résidu.
À cette occasion, l'on établit que le point L, situé dans le prolongement de ⇤T, est
exactement à 1 carreau de l'angle droit du triangle. Ce prolongement d'une unité du côté
4 du triangle en crée un autre du même type, 3-4-5, avec son angle droit en T.
N.B. : Le point L est sur le tracé d'un pentagone que nous allons étudier bientôt...
http://www.art-renaissance.net/mathematiques/Or-cercles-04.jpg
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Les propriétés dorées du triangle sacré sont ‘incommensurables’ ! Pour ajouter à cet
étonnement, les monstrations ne réclament pas de nommer toutes les distances selon
l'arithmétique (au-delà des entiers et de quelques valeurs rationnelles). Notons que les
coïncidences qui réclament le calcul moderne (trigonométrie) ne sont pas exactes mais
simplement précises à quelques millièmes de carreau...
Dans le prolongement de cette remarque, voici l'un des constats que portent les
monstrations précédentes. Cette figure met en évidence les deux triangles 3-4-5 croisés
que nous avons vu. Or il est cette fois intéressant de confronter les réalités arithmétiques.
Les triangles BYL et TAY sont semblables. Ensuite, la figure précédente nous montre que
T est à la fois l'angle droit des triangles de type 3-4-5 TAY et TLC, mais aussi le point de
croisement des diagonales du rectangle doré et de son résidu. Cette deuxième propriété
mérite d'être énoncée comme lemme à part entière.
Si l'on s'en tient à sa construction classique, le point T a un statut irrationnel. Cette figure
nous explique que par la magie des angles, sa position sur le quadrillage devient
rationnelle. Ses coordonnées sont 4/5 horizontalement et 12/5 = 3 x 4/5 en verticale.
Maintenant, le milieu du cercle du pentagramme semble à H = 8/5... :-)
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L'insondable répertoire de la géométrie avec les yeux
Le jeu du carré
Ce visuel traduit l'un des grands principes qui président à cette étude :
Entre la diagonale d'un triple-carré horizontal et la diagonale d'un
double carré vertical (partageant un même carré), l'angle est celui de
la diagonale d'un simple carré (45°).
Le côté du carré mesure √10, soit la diagonale d'un triple carré. Nous
retrouvons les angles de la monstration précédente...
Le titre de « consécration des angles » prend tout son sens avec une figure que nous allons bientôt aborder. Elle
rassemble toutes les formules géométriques de passage entre les trois bissectrices du triangle sacré. Son principe
général est unique : quand deux diagonales se croisent, leur angle se rappelle du troisième ordre.
Un autre élément intègre cette figure : la proportion dorée. Et elle produit logiquement un angle prometteur : ⇥/5
- autrement dit 36°, l'angle du pentagramme...
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Compléments utiles
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V - LA FIGURE DES DIAGONALES
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Rappel : L’ordre d’une bissectrice est le nombre de carrés dont elle est naturellement la diagonale.
Propriétés : Deux à deux, les bissectrices forment deux angles : l'un est aigu et l'autre est obtus.
- La tangente de l'angle aigu n'est autre que l'ordre de la troisième bissectrice (logique trinitaire)
- La tangente de l'angle obtus est encore l'ordre de la troisième, mais précédé du signe “-”.
Exemple : les bissectrices d’ordre 1 et 3, venant du bas, forment un angle aigu ⌅dont la tangente est 2, ordre de
la bissectrice qui vient du haut du triangle (bissectrice dorée). L'angle obtus, (⌅+⇧), a pour tangente -2.
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La “belle mécanique” - La règle d'or des diagonales
Les premiers éléments de base de la symbolique sont la traduction géométrique la plus directe et la plus simple
du 1, du 2 et du 3. Ces trois nombres élémentaires peuvent a priori trouver leur expression de différentes façons.
Par exemple, le triangle peut prétendre assumer la représentation du 3. Mais quel triangle ? Il en va de cette
forme comme de celle des nuages : un cirrus d'avant garde est-il assimilable à un cumulo-nimbus de gros temps
ou même à un stratus ? La symbolique a un caractère “général” certes, pour autant elle se doit d'être claire !
Ensuite, à quoi sert de traduire une valeur si elle ne peut pas se combiner naturellement aux autres, créer un
échange ? Il est trop tôt pour “supputer” sur la façon dont le système impressionnant que nous allons découvrir
s'est mis en place. Une chose est sûre : il s'est imposé aux géomètres, notamment en Égypte, au cours du
néolithique. Nous le connaissons sous le nom de triangle 3-4-5. En réalité les côtés du triangle, souvent
considéré comme une vulgaire équerre de maçon, forment la carrosserie d'une formidable mécanique.
Rappelons cette définition de bon sens : « l'ordre » de chaque droite est le nombre qu'elle porte. Que se passe-t-il
alors entre ces lignes ? Il est plusieurs façons de les confronter, plusieurs possibilités pour les associer. De même,
leur orientation se caractérise par deux angles : les “grands", dont la tangente correspond à l'ordre, et les “petits",
dont la tangente est l'inverse. Dans le cas de l'ordre 1, ils sont égaux. Les angles des trois diagonales sont liées
par une règle simple :
Pour deux diagonales distinctes, la somme de leurs deux petits angles est égale au grand angle de la troisième.
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La figure des diagonales
La figure majeure dite “des diagonales” rassemble toutes
les possibilités d'addition de leurs angles. L'exemple
choisi ici met en évidence l'addition des petits angles
d'ordre 2 et d'ordre 1, qui a pour résultat le grand angle
d'ordre 3.
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Focus sur le triangle
Le jeu des diagonales produit le triangle
3-4-5 par trois fois - en trois couleurs sur
le visuel. Le centre du cercle inscrit est
marqué d'un point : les trois bissectrices
sont ainsi énoncées, à l'horizontale.
La proportion dorée
• Aucun barreau n'est sans objet, et le
nombre d'or y est explicite. L'échelle
d'ordre 2 croise la verticale du
quadrillage à un carreau sur la gauche du
point d'ancrage général, à la hauteur .
Nous allons étudier en détail ce visuel.
D'autres monstrations sont possibles.
Nous faisons appel au concours des
mathématiciens comme ce fut le cas à
propos d'autres monstrations...
Le nombre d'or se montre très lié à l'ordre 2. La diagonale du double-carré, expression basique de l'ordre 2,
mesure √5; et est montré comme nous l'avons vu, par la bissectrice d'ordre 2 du triangle 3-4-5.
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Monstration
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LE triangle 3-4-5
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VI - LE PENTAGRAMME DU TRIANGLE 3-4-5
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L'ADN du pentagramme
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Le pentagramme du triangle 3-4-5
Pour définir un pentagramme, le matériel minimal se résume à un angle, entre deux branches quelles qu'elles
soient, et à la mesure d'un segment, quel qu'il soit. C'est ce que nous offre la figure ci-dessus.
Il suffit de développer un rectangle doré vers le bas à partir du point que nous venons de placer, pointant “ ”,
accompagné de son cercle de rayon 1. La figure du rectangle et du cercle rassemblés exprime la proportion
dorée : le cercle de rayon 1 souligne de ses deux marques deux divisions successives du grand rectangle. ADN...
Cette confrontation de deux définitions minimales expose en outre la liaison du pentagramme avec le nombre
d'or. Et ce schéma imbrique dans un processus de construction les structures du rectangle doré (ici en jaune) et
de l'étoile. Ce fait est remarquable. Comme à propos du nombre , nous sommes habitués à envisager le
pentagramme et ses relations en termes arithmétiques alors que les définitions originales sont strictement
géométriques, avec les yeux. Enfin, cette figure se réfère au triangle 3-4-5 à travers son rectangle doré de
référence accroché à son sommet. Qui l'eut cru ? Les Égyptiens !
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Monstration
La construction au compas
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Dans cet esprit, la construction du pentagramme
inverse et des lignes complémentaires apportent leur
contribution. La précision sur le terrain de la
géométrie égyptienne suppose de nombreuses
stratégies, dont celle-ci. Chaque point concret
devient l'objet d'une multiple triangulation.
Remarques
1 - De très nombreuses coïncidences de figure
réclament la trigonométrie : leur précision est
alors de quelques millièmes (marge). En revanche,
celles qui sont accessibles à la logique des yeux
sont carrément exactes. Étonnant, non ?
Maintenant la question qui se pose est de taille : qu'en savaient les Égyptiens ?
Sans rien “nommer par les nombres”, cette construction est entièrement réalisable à la règle et au compas sur un
quadrillage. C'est même une façon de ‘trouver’ le pentagramme, de l'inventer. Le chemin qui nous a mené jusque
là est parfaitement logique. Il résulte d'une série de propriétés des angles associés au triangle 3-4-5.
À noter : le point du haut n'est pas exact par rapport au quadrillage, il s'en faut de 4,5 ‰ de carreau. En
revanche le point vert du bas est exact, et il est également sur une ligne du pentagramme inverse.
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ANNEXE I - Le miroir des astres
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Symboles
Les symboles ne sont pas des personnages de roman, adaptables à l'écran au gré du temps ou de l'inspiration. Le
propre des symboles est de servir ‘en soi’ de définition, au-delà de tout discours pictural, oral ou écrit. Il est si
difficile de les définir : leurs allégories ne sont que l'écho des structures qu'ils cachent. Portes entre-ouvertes sur
l'infini, l'invisible ou l'impalpable, la fascination qu'ils provoquent n'a d'égale que la modestie qu'ils inspirent aux
esprits les plus brillants. Les symboles sont toujours plus forts que les questions qu'on leur pose.
Composition
Une annexe est consacrée à l'étude de plusieurs fresques égyptiennes. Pour autant l'objectif n'est pas d'expliquer
entièrement le processus de la composition : cet article met en évidence la cohérence et l'intérêt d'un corpus de
géométrie égyptienne. L'extension du propos en la présente annexe est néanmoins justifiée : ce savoir ne s'est pas
constitué dans le seul but de nous séduire ou de nous étonner “intellectuellement”. Les motivations des auteurs,
des fondateurs de cette géométrie, étaient religieuses et artistiques. Que deviendrait l'archéologie si on lui
interdisait l'étude des manifestations rituelles, des tombes et des temples ? Que serait l'histoire de l'art si l'on
excluait les cathédrales et les oeuvres sacrées ? Or ce beau patrimoine n'a pas calqué ses lignes sur celles des
étiquettes que nous lui colons, mais sur celles de la géométrie...
L'étude de la géométrie de construction, à commencer par ses bases mathématiques et leur évolution, permet de
comprendre un aspect véritablement essentiel de la symbolique. La complexité et la cohérence avec lesquelles
cet art se déploie anéantit les préjugés dont nous sommes malgré nous les vecteurs. Depuis celui d'un narratif
consécutif à l'émergence du système perspectif, jusqu'à celui d'une sorte de mise en page ‘esthétisante’, médiocre
symptôme d'une société oisive. L'outil de composition assume la responsabilité du sens profond des symboles.
On le voit à la qualité de son discours mathématique, et à la façon dont il gère les propriétés étonnantes des
figures pour les assembler. Au fond des lignes de composition, il y a l'indicible, l'inexprimable, l'inaccessible.
Les Anciens ont choisi cette forme d'écriture, bien avant qu'ils n'inventent celle qui nous est familière. Mais
peut-on construire des cathédrales avec des mots ? De l'art contemporain, peut-être... Mais pas de la peinture.
Cette tradition a fini par céder devant l'imprimerie, alors que la technologie devenait la préoccupation
obsessionnelle de la civilisation occidentale. Paradoxalement, la quête des Anciens, qui cherchaient à offrir une
vision du monde à travers leurs symboles, a trouvé un autre champ d'expression : les lois de la physique. Et il est
plus que jamais question de structures. Kepler, Newton, Einstein, autant de grands mystiques qui ont à leur façon
poursuivi l'oeuvre des géomètres du sacré. Le Mâat égyptien du papyrus de Rhind, où l'on travaille encore à la
corde, est au bout d'un long cheminement devenu théorie des cordes. La mission des chercheurs ne change pas
fondamentalement : elle consiste à comprendre la cohérence du monde. Une question doit être abordée : l'art est-
il mort de la science ? Pour l'instant, l'art a grand besoin de la science pour comprendre les structures qu'il a
pratiquées pendant des millénaires. Et si les mathématiques n'ont pas de fin, pourquoi leurs applications en
auraient-elles ? Seule la négation du rôle des structures dans l'art provoque sa peine et sa vacuité.
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Unité et cohérence
La géométrie avec les yeux connaît un grand épanouissement en Égypte, cet article le montre. Cette science
avant la science essaimera en Grèce et plus tard dans le monde celte (grâce aux pythagoriciens)... La
Renaissance se souviendra de l'origine égyptienne. Que cette géométrie soit sacrée d'un bout à l'autre va sans
dire : c'est la raison sociale des objets qu'elle produit. Et à ce propos, une distinction très sévère doit être posée
entre la théologie, qui s'appuie sur des mots et se traduit en termes sinon de pouvoir, au moins de concurrence, et
la géométrie sacrée qui est mathématique et ne peut s'exprimer que par des oeuvres. Les concepts de la théologie
sont affaire d'opinion, quand la référence de l'art sacré reste aussi indéformable que son triangle. Les termes de
croyances et de superstitions comme les expressions naïves du mystère ne conviennent pas à cette culture solide.
Elle veille constamment à sa cohérence, et elle puise son inspiration dans la nature et les astres, qu'elle observe
avec méthode. Le fait qu'elle ait choisi l'art pour s'exprimer ne doit pas lui valoir un statut de bouffon.
Le vecteur des mathématiques permet de remonter vers l'origine, car ses éléments se mettent en place avec un
minimum de logique... Ainsi l'on sait que cette géométrie avec les yeux commence avec un tracé à la corde sur
un quadrillage. D'autre part, les objets rapidement produits selon cet outil de construction sont amplement
référence à la nature : essentiellement les planètes et les animaux. L'homme se mélange avec ces notions (pour
ne pas rester en reste ?), comme les planètes et les animaux eux-même se mélangent. Ce méli-mélo n'est confus
que par ses apparences. Voici l'exemple d'une explication, comme permet d'en obtenir la géométrie comparée :
La séparation du monde du calcul de celui de la géométrie est explicite dans le mythe
d'Horus, Dieu à la tête de faucon. Son oeil droit et solaire est celui du géomètre : il
exprime la précision. Le gauche s'est perdu dans la bataille qu'il livra avec l'oncle Seth
(le vilain oryctérope du Cap) afin de venger son père Osiris. Cet oeil lunaire, perdu
pour la contemplation et la réalisation du monde, est miraculeusement récupéré par les
filets de Thot (le magique ibis blanc), et il devient symbole et même outil du calcul : le
fameux oeil Oudjat, que ferme l'artisan pour viser avec l'autre.
Sans les mathématiques, le mythe d'Horus n'est qu'une suite d'histoires sans queue ni tête. De même, sans
l'explication géométrique du plateau de Gizeh, la religion égyptienne n'est qu'un recueil de croyances à caractère
fantastique, et dans ces conditions les Atlantes voire les extra-terrestres ne sont pas loin. Très simplement, les
lignes géométriques qui entrent dans la composition au sol des pyramides exposent les deux grands mystères de
l'homme : celui de la conception (naissance) et celui de l'immortalité de l'âme (mort). Les Égyptiens vont à
l'essentiel, et pour cela leur symbolique survit autant que leurs pyramides à l'épreuve du temps...
Yvo Jacquier © Géométrie comparée - La « géométrie avec les yeux » des Égyptiens 42 sur 49
Nous sommes tant habitués à concevoir le mystère à l'aune de notre incompréhension. D'autres mots du
dictionnaire se disputent ce rôle avec autant de succès ! Fort heureusement, la science nous ramène aux
fondamentaux des Anciens : le mystère est entier quand il s'est expliqué, et sa révélation provoque un sentiment
esthétique qui pousse à la contemplation et à la méditation. Expliquer les choses, par des lois ou des concepts
n'abroge pas le mystère, tout au contraire : c'est la meilleure façon d'y entrer. Parfois même, la seule.
La première logique qui se manifeste dans le ciel est celle du cycle soli-lunaire. Il suffit de compter les jours, qui
sont des “entiers naturels solaires”. Le rythme de la Lune se décompose en quatre phases clairement
identifiables : nouvelle lune (disque sombre) - premier quartier (disque pour sa moitié droite lumineux) - pleine
lune (disque entièrement clair) - dernier quartier (disque pour sa moitié gauche lumineux). Ce cycle est à
l'origine de la semaine de 7 jours. La durée exacte du cycle est de 29 jours 12 heures 44 minutes (soit ≈ 29,5
jours). Les Anciens ont repéré celui de Saturne, qui est de 29,45 ans (soit 29,5 avec une précision de 2 ‰). Ils
ont naturellement rapproché les deux cycles. Les 7 ans de chaque phase de Saturne envahissent la tradition
populaire. Les Saturnales des Romains vont du 17 au 24 décembre (soit 7 jours). De même, les douze mois de
l'année (comme les 12 signes du zodiaque) correspondent aux douze ans du cycle de Jupiter (que les Chinois ont
traduit par leur zodiaque de douze ans). Dans ce conditions, Jupiter, c'est 4 saisons de trois ans.
Un article de Christophe de Cène est consacré à ce champ de recherche :
http://www.art-renaissance.net/EDL/Christophe_de_Cene-zodiaque-nombres.pdf
Cette reconstitution en est à ses tout débuts et elle réclame l'intervention des astronomes et des astrologues.
L'étude du bestiaire mythologique est plus délicat, pour plusieurs raisons. Comme le remarque Olivier Keller, les
mythes paléolithiques et nomades se rappellent de la Terre quand la sédentarisation néolithique voit le
développement des cultes solaires, traces de l'astronomie/logie. Cependant, plus on remonte vers les origines
humaines (sapiens), plus les affirmations deviennent précaires. Une seconde raison incite à la prudence : les
animaux offrent naturellement moins de prise au discours mathématique, en dépit de la fascinante beauté des
courbes de Lascaux. L'idée de mixer les animaux et les planètes serait-elle alors une façon de mathématiser
l'animal ? Il faudra beaucoup étudier cette hypothèse avant d'en juger... Pour l'instant une chose est sûre : les
planètes, par leurs rythmes, et les figures géométriques, selon leur constitution, partagent un certain nombre de
fractions. Nous avons abordé Vénus, au chapitre V. Elle danse avec le Soleil autour de la Terre au rythme du
pentagramme (ceux qui préfèrent observer ce mouvement depuis le Soleil peuvent éventuellement y faire une
pause cigarette). La découverte de l'irrationalité de certains nombres provoque un cataclysme chez les
Pythagoriciens. Elle remet en question leur vision rationnelle du monde, ou plutôt comme le souligne Raphaël
Legoy, la commensurabilité de certains nombres. Les fractions que partagent l'astrologie et la géométrie seraient-
elles concernées ? Très subtilement, c'est peut-être à cette époque que les concepts d'exactitude (mathématique)
et de précision (physique) ont commencé à se différencier...
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ANNEXE II - L'état d'esprit égyptien
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Cette philosophie des angles s'est révélée tout au bout de l'étude. Il fut longtemps question de géométrie telle
qu'Euclide nous l'a enseignée. À propos de la proportion dorée, le langage géométrique représente un progrès
face à l'approche qui s'appuie sur le nombre. Les Égyptiens ne le connaissaient pas. Néanmoins, la première
définition posée est qualifiable de “juste sans pour autant être définitivement égyptienne” : « Un rectangle d'or
en contient un autre, de même proportion, qui s'obtient par simple soustraction d'un carré ». La dernière
définition est beaucoup plus conforme à l'esprit de la géométrie sacrée : « Quand la diagonale d'un rectangle
d'or passe son carré inscrit, elle laisse sur le côté le plus large un segment égal à la hauteur qu'il lui reste à
franchir pour aller jusqu'à l'angle ». En outre, cette définition met en évidence un second niveau de partition du
rectangle initial, ce qui est le propre de la logique dorée (elle produit ainsi la spirale dorée et le pentagramme).
La première définition est efficace et mécanique, la seconde est symbolique. Et la légende se confirme : la
géométrie sacrée a vu le jour en Égypte...
Le concept de Surface
L'approche arithmétique dans la géométrie pour les yeux des Égyptiens se limite aux proportions de figures
semblables. À l'origine, cette géométrie évite ou plutôt se passe du concept de surface. Elle s'occupe
essentiellement de lignes, de tracés, de figures. Les surfaces sont la préoccupation des arpenteurs qui préparent
les taxes et redistribuent les terrains après les inondations du Nil. Un exemple permet de comprendre cette
différence : le vesica piscis. Son amande a une forme, une signification, et une hauteur, mais le symboliste ne se
préoccupe pas de sa surface. Cette amande est un “espace”, délimité par deux portions de cercles. Les objets qui
y entrent sont issus d'un monde en trois dimensions qui se relient au spirituel grâce à l'unité d'un quadrillage. Le
Yvo Jacquier © Géométrie comparée - La « géométrie avec les yeux » des Égyptiens 44 sur 49
concept de surface est ici “décalé”. On pense “projection de l'esprit” en quelque sorte. Quant aux constructeurs,
ils ont intérêt à prévoir large quand il s'agit de poids (volume), et la surface n'est d'aucun secours pour préciser
les angles et les arrêtes de leurs pierres de taille.
En revanche, pour les mathématiciens grecs, la surface devient une préoccupation objective, et cela différencie
les deux civilisations. C'est une affaire de calcul, et aussi de méthode : le concept de surface permet de résoudre
“par la bande” bien des problèmes. Les Égyptiens n'en avaient objectivement pas besoin pour construire leur
géométrie au départ.
Maintenant, il est plausible qu'en trois millénaires cette civilisation de tradition ait évolué. Au moins qu'elle ait
cherché à vérifier par des méthodes nouvelles, pourquoi pas venues de l'extérieur, ce qui lui servait de socle.
Mais nous devons alors intégrer les conséquences des résultats. Par exemple, établir que les triangles de la toute
première monstration (concernant le cercle intime) ont un rapport de 5/4 équivaut à identifier la √5 du double
carré : la porte du théorème de Pythagore. Cette conséquence n'est pas un point de détail... Si ça se trouve, c'est
cette figure (que l'on va appeler celle des 5/4) qui a provoqué le théorème. Plusieurs schémas se disputent encore
ce rôle... Le théorème de Pythagore parle de carrés donc d'aires. Tous les problèmes du second degré peuvent
être résolus par les aires et c'est ce que feront toutes les civilisations. En revanche, les premiers géomètres qui
ont vu les deux triangles de la figure (la preuve qu'ils constituent), ne savaient vraisemblablement pas que le
rapport des surfaces est 5/4. Pour décréter qu'une figure était dans leur conscience, il nous faut un faisceau
d'éléments qui vont en ce sens.
En définitive, il est tout à fait plausible que le travail de revisite du corpus égyptien avec l'apport du concept de
surface soit l'oeuvre des Grecs. L'héritage égyptien et le progrès méthodologique grec trouvent en ce scénario
une résolution historique.
Enfin certains auteurs remettent en cause l'existence même de Pythagore. On peut imaginer le scénario extrême :
qu'un premier mathématicien ait appris des Égyptiens et ramené ce trésor en Grèce, ensuite qu'un second ait
travaillé ce savoir jusqu'à résoudre le théorème (pourquoi pas en héritant du théorème de la diagonale), et enfin
qu'un troisième personnage ait transmis ce savoir développé à l'intérieur d'une secte. Lequel des trois doit-on
appeler Pythagore ?
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AUTRES ANNEXES
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Plusieurs annexes sont en cours de préparation. L'intensité des débats avec des partenaires aussi chevronnés que
passionnés pousse ces développements vers le stade de l'émancipation : les dites annexes deviennent des articles
à part entière. Il nous faut rassembler les éléments historiques et archéologiques autour des thèmes :
1 • Une première invitation est lancée à Geneviève von Petzinger, spécialiste de la géométrie
pariétale. En dépit de ses nombreux engagements, elle nous fera la grâce d'un texte dans les mois
qui viennent sur ce thème : les traces qu'il laisse dans ses cavernes montrent que depuis qu'il est
sapiens, l'homme cherche et trouve la géométrie. Et c'est la première forme d'écriture...
4 • Un article concentre les éléments (extraits) d'étude de la géométrie comparée, appliquée aux
oeuvres qui ont permis la reconstitution de ce savoir :
http://www.jacquier.org/IREM/Yvo_Jacquier-geometrie_oeuvres.pdf
Yvo Jacquier © Géométrie comparée - La « géométrie avec les yeux » des Égyptiens 46 sur 49
TABLE DES MATIÈRES
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PRÉSENTATION
p. 2 La géométrie sacrée - La « géométrie avec les yeux » égyptienne
II - LE QUADRILLAGE PALÉOLITHIQUE
p. 5 Les deux champs ancestraux de la réflexion - La roue solaire
p. 7 L'hexagramme de Salomon
Symbolique - La valeur du 6
p. 8 Le tétraktys pythagoricien
p. 9 La croix cerclée
Confrontation de la croix, de l'hexagramme et du tétraktys
p. 10 Le vesica piscis
Module de la grille byzantine
p. 11 Le pentagramme et le Vesica Piscis
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IV - LA PROPORTION DORÉE DU TRIANGLE
p. 18 L'approche égyptienne du nombre d'or
A - Le nombre d'or avec les yeux
B - Le rectangle doré à partir du double-carré
p. 19 Le concept de surface
A - La figure magistrale des trois diagonales
B - Prolongement de la figure grâce à la notion de surface
Lemme N° 1 - surfaces
p. 20 Lemme N° 2 - rectangle et carrés par Raphaël Legoy
Proposition - Monstration
p. 21 La logique égyptienne
Première étape : Comment est constitué le rectangle
Seconde étape : propriété des angles - Propriété des angles
p. 22 Troisième étape : monstration
La définition égyptienne de la proportion dorée
Propriété des angles
p. 23 La consécration des angles
Préambule : l'angle des diagonales d'un rectangle doré
Proposition - Monstration
Propriétés (diagonales du rectangle d'or, trinité)
p. 24 Les figures du carré du Pape
Première... Cinquième étape
p. 26 La spirale dorée du triangle
p. 29 L'insondable répertoire de la géométrie avec les yeux
Le rectangle doré (et sa croix) dans sa première position - Le jeu du carré
p. 30 Compléments utiles
Les rectangles et leurs petits
Bilan des propriétés du triangle 3-4-5
Pythagore avant Pythagore ?
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VI - LE PENTAGRAMME DU TRIANGLE 3-4-5
p. 37 L'ADN du pentagramme
Propriété singulière
p. 38 Le pentagramme du triangle 3-4-5
p. 39 Monstration
p. 39 La construction au compas
Remarques
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ANNEXES
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AUTRES ANNEXES
p. 46 1 • La géométrie pariétale par Geneviève von Petzinger
p. 46 2 • « Pythagore avant Pythagore »
p. 46 3 • L'apparition progressive de l'algèbre
p. 46 4 • La géométrie dans les oeuvres
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REMERCIEMENTS
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