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des déchets
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■ Les objectifs fixés par le cahier des charges d’un procédé de terme ciment recouvre, dans le langage commun, des matériaux
stabilisation-solidification dépendent essentiellement du mode de minéraux finement broyés qui « prennent » en présence d’eau
gestion prévue pour les solidifiats. Une filière parfaitement définie pour former, après durcissement, une matière solide poreuse :
est celle de l’élimination vers un centre de stockage de déchets c’est la prise hydraulique qui est due aux réactions d’hydratation
ultimes stabilisés (décharge de classe 1) après inertage. Dans ce cas, des composés du ciment. Dès l’antiquité, les Romains ont utilisés
le test mis en œuvre pour caractériser le potentiel polluant des des mélanges de chaux et de pouzzolanes naturelles (cendres vol-
déchets est effectué par trois lixiviations successives sur un caniques) ou artificielles (briques d’argile cuites et pilées) pour
échantillon broyé du matériau, selon la norme XP X 31-210. L’arrêté obtenir un ciment avec lequel ils bâtirent de grands ouvrages dont
du 18 décembre 1992 définit les valeurs limites qui représentent les la durabilité a été fort remarquable !
critères d’admission des déchets. Le tableau 1, extrait de l’annexe 1 La stabilisation-solidification des déchets peut être obtenue par
de cet arrêté, fixe les seuils d’admission. l’ajout d’un ciment ou d’un mélange de réactifs ayant des proprié-
(0) tés pouzzolaniques. Le ciment joue alors le rôle de liant hydrauli-
que. Certains déchets possèdent par eux-mêmes des propriétés
pouzzolaniques et sont donc susceptibles d’entrer dans la
Tableau 1 – Valeurs limites des critères d’admission composition de ciments commerciaux (comme les laitiers de haut-
des déchets dans un centre de stockage de déchets fourneau ou les cendres volantes de centrales thermiques, par
ultimes stabilisés exemple). Ces déchets peuvent aussi intervenir dans la formulation
de mélanges réactifs pour les procédés de stabilisation-solidifica-
4 < pH < 13 Cr6+< 5 mg/kg CN– < 5 mg/kg tion.
Siccité > 35 % Cr < 50 mg/kg Ni < 50 mg/kg
■ Principaux ciments utilisés
Fraction soluble < 10 % Pb < 50 mg/kg As < 10 mg/kg
● Le ciment le plus commun est le ciment Portland artificiel (CPA),
DCO < 2 000 mg/kg Zn < 250 mg/kg Hg < 5 mg/kg fabriqué à partir d’un clinker obtenu par cuisson à 1 450 oC d’un
Phénols < 100 mg/kg Cd < 25 mg/kg mélange de calcaire (80 %) et d’argile (20 %). Le clinker finement
broyé est généralement additionné d’environ 3 à 5 % de gypse
(sulfate de calcium hydraté) qui permet une prise hydraulique plus
régulière, pour obtenir un CPA commercial. Un CPA est alors
Les résultats des tests sont exprimés en fonction des modalités constitué principalement de quatre phases solides :
de calcul proposés dans l’annexe de la norme XP X 31-210 et — 50 à 70 % de silicate tricalcique [(CaO)3SiO2] ou C3S ;
expriment le total des quantités extraites par les lixiviations rap- — 10 à 25 % de silicate bicalcique [(CaO)2SiO2] ou C2S ;
porté à la masse du matériau. — 5 à 15 % d’aluminate tricalcique [(CaO)3Al2O3] ou C3A ;
Un projet de modification de l’arrêté du 18 décembre 1992 pré- — 5 à 10 % d’aluminoferrite tétracalcique [(CaO)4Al2O3Fe2O3] ou
voit d’ajouter des tests de caractérisation physique pour vérifier la C4AF.
résistance mécanique des déchets et de les classer en tant que
Le C3S et le C2S sont relativement bien cristallisés, le C3A et le
solides massifs, solides granulaires ou bien dans aucune de ces
C4AF forment une phase vitreuse. Un CPA contient des phases
deux catégories. Il est alors prévu des tests de lixiviation spéci-
secondaires alcalines : chaux libre (CaO) et sulfates de sodium et
fiques (normes XP X 31-211, XP X 30-410 ou XP X 31-210) adaptés
de potassium (Na2SO4 et K2SO4).
à chacune des catégories définies.
● Différents ajouts au clinker de CPA permettent d’obtenir des
■ Une nouvelle approche réglementaire de gestion des déchets ciments « composés ». Les différentes catégories de ciments
apparaît actuellement : en effet, la nouvelle directive européenne commercialisés sont normalisées en France (NF P 15-300 et
relative à la mise en décharge (99/31/CE, 26 avril 1999, JOCE du NF P 15-301) et caractérisées par leur composition :
16/7/99) ouvre l’accès aux décharges de classe 2 (déchets ménagers — les CPA contiennent au maximum 3 % de constituants
et assimilés) pour les déchets dont le comportement à moyen et long secondaires ;
termes est jugé satisfaisant. Les tests permettant d’évaluer cette — les CPJ (ciment Portland composé) peuvent contenir jusqu’à
exigence sont actuellement en discussion et il est probable que des 35 % de constituants secondaires comme du calcaire ;
déchets ultimes stabilisés par solidification pourront trouver, dans un — les CHF et CLK contiennent de fortes teneurs (40 à 75 % pour
avenir proche, des modes de stockage plus économiques que celui les CHF, plus de 80 % pour les CLK) de laitiers de haut-fourneau,
de la classe 1. Le développement des procédés de solidification les utilisés pour leurs propriétés pouzzolaniques.
plus coûteux, tels que la vitrification, pourra alors les rendre
compétitifs sur le plan économique, dans la mesure où la gestion de ■ Propriétés des ciments obtenus
solidifiats présentant une meilleure qualité environnementale sera
Les matériaux obtenus en utilisant ces ciments ont des proprié-
moins contraignante.
tés physiques et chimiques qui dépendent de leur formulation :
temps de prise, résistance mécanique et résistance aux agressions
chimiques sont, par exemple, des paramètres essentiels lorsqu’il
s’agit de mettre en œuvre un procédé de solidification de déchets.
Mélangés à l’eau, les ciments s’hydratent. L’hydratation s’opère par
2. Stabilisation à base dissolution des phases solides suivie d’une précipitation des
de liants hydrauliques hydrates conduisant à un durcissement de la pâte de ciment et à
la constitution d’une structure solide poreuse. En fin d’hydratation
d’un CPA, les principales phases solides sont :
— des silicates de calcium hydratés (CSH) sous forme d’un gel
2.1 Liants à réaction hydraulique : amorphe qui constitue 60 à 70 % de la pâte de ciment hydratée ;
— de l’hydroxyde de calcium Ca(OH)2 ou portlandite, précipitée
principes de la solidification sous forme cristallisée et qui représente 80 à 90 % de l’alcalinité de
la pâte hydratée ;
Seuls ou en mélange avec de la chaux ou d’autres additifs, les — des sulfoaluminates de calcium : l’ettringite (3CaO · Al2O3 ·
ciments et autres réactifs pouzzolaniques sont très utilisés pour la 3CaSO4 · 32H2O) et le monosulfate (3CaO · Al2O3 · CaSO4 · 12H2O)
solidification-stabilisation des déchets solides et des boues. Le représentent 5 à 15 % de la pâte hydratée.
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La prise hydraulique est une réaction exothermique et se pour- 2.3 Procédés mis en œuvre
suit généralement pendant quelques jours. La résistance méca-
nique finale du matériau est normalement obtenue après 28 jours
de cure. Les procédés de stabilisation-solidification à base de liants
hydrauliques ont été largement développés en France, notamment
pour l’élimination des résidus d’épuration des fumées d’incinéra-
tion des ordures ménagères (REFIOM). Près de 400 000 t de tels
2.2 Mécanismes de la stabilisation résidus sont chaque année stockés en décharge de classe 1, après
stabilisation par liants hydrauliques, dans treize centres collectifs
par liants hydrauliques de traitement.
Les principaux procédés mis en œuvre ont été brevetés. Le docu-
■ Les réactions d’hydratation d’un mélange de déchets et de ciment
ment édité en 1996 par l’ADEME « Les techniques de stabilisation
et/ou de liants hydrauliques peuvent être fortement perturbées avec,
des déchets industriels spéciaux » (cf. [Doc. G 2 080]) recense les
comme conséquences, un retard de la prise et une diminution de la
procédés développés.
qualité mécanique des solidifiats obtenus. On peut même parler
« d’empoisonnement » des réactions d’hydratation quand des élé- Sept unités industrielles fonctionnent en France avec le procédé
ments présents dans les déchets inhibent la prise hydraulique. Les Inertec (Villeparisis, Jeandelaincourt, Bellegarde...), une en Belgi-
cas du chrome et du zinc ont été particulièrement étudiés : le premier que, une autre au Portugal (figure 1). L’usine de Villeparisis a une
est un accélérateur de prise mais peut donner lieu à une « fausse » capacité de 100 000 t/an et est la plus grande unité de stabilisation
prise en favorisant la précipitation de l’ettringite au détriment des en Europe. Le procédé Inertec peut s’appliquer à d’autres déchets
autres hydrates alors que le second est un retardateur de prise. Les que les REFIOM (résidus de la métallurgie, boues de stations
sels font en général courir un risque d’instabilité mécanique des d’épuration, boues d’hydroxydes métalliques, terres polluées). Les
solidifiats, en particulier les chlorures et les sulfates dont la présence « recettes » (mélanges de liants hydrauliques et d’adjuvants spéci-
peut entraîner des gonflements générateurs de fissurations. fiques) sont déterminées au cas par cas. Des prétraitements sont
parfois nécessaires pour certains déchets.
■ La stabilisation d’un déchet obtenue par la solidification à l’aide Les procédés Ecofix (figure 2) et Ashrock ne sont pas diffé-
d’un liant hydraulique doit conduire à l’immobilisation des polluants rents dans leur principe. Deux unités industrielles fonctionnent en
au sein de la matrice solide. Le contact du matériau avec l’eau et la France avec chacun de ces deux procédés.
dissolution des polluants constituent alors le principal risque de leur
dispersion. La limitation de ce risque est obtenue d’une part par les En Suisse, sept unités fonctionnent avec le procédé Sulzer pour
qualités structurelles du matériau permettant un bon confinement traiter des REFIOM et trois autres avec le procédé Lurgi.
des polluants et d’autre part par la diminution de la solubilité des Le procédé Petrifix a été mis en œuvre dans l’unité de Liège
polluants. pour traiter des boues et des terres polluées.
Ces unités industrielles fonctionnent en tant que centres collec-
■ Les solidifiats obtenus peuvent être considérés comme des
tifs de traitement des déchets industriels. Les solidifiats produits
mortiers ou des bétons suivant la taille des granulats qu’ils
sont en général coulés directement dans les alvéoles de stockage.
contiennent. Ces matériaux sont massifs et poreux.
Le traitement de solidification-stabilisation et la gestion du
● Le caractère massif du matériau résultant de la solidification stockage du déchet ultime sont alors indissociablement liés. Tous
d’un déchet doit permettre de garantir une surface d’exposition ces procédés sont difficilement comparables entre eux car les don-
minimale par rapport aux contacts avec l’eau. La pérennité du nées ne sont pas toujours accessibles et du même ordre.
caractère massif, la résistance mécanique et la moindre porosité
sont les caractéristiques qui favorisent la qualité du confinement.
● La résistance mécanique du matériau doit empêcher les phé-
nomènes de fissuration et d’émiettement. Il faut aussi éviter les 2.4 Atouts et limites de ces procédés
possibilités de délitement qui pourraient favoriser le transport de
particules contenant les polluants. Les tests de détermination de
■ Le ciment et les liants pouzzolaniques sont des réactifs relati-
la résistance mécanique des déchets solidifiés (compression, trac-
vement économiques. Les matériaux obtenus en solidifiant des
tion) sont normalisés ou en cours de normalisation au niveau fran-
déchets peuvent avoir de bonnes performances mécaniques et une
çais ou européen (norme AFNOR XP X 31-212).
durabilité suffisante, notamment pour la filière de stockage des
● La porosité des matériaux réalisés à l’aide de liants hydrau- déchets ultimes en décharge de classe 1. Les technologies mises
liques peut être très variable et dépend en particulier du rapport en œuvre, analogues à celles employées en génie civil, sont très
eau/ciment. On définit la porosité totale par le rapport de « vide » simples (broyeurs, transferts de pulvérulents, mélangeurs,
au volume total du solide, la porosité ouverte par le rapport du malaxeurs...) et peuvent être adaptées pour de larges familles de
volume de pores connectés et accessibles à la solution de lixivia- déchets et pour des capacités très variables.
tion au volume total de vide. Cette caractéristique conditionne la
pénétration de l’eau au sein de la matrice solide poreuse. ■ Les phénomènes d’interaction entre les éléments exogènes et
le ciment sont complexes et divers. En effet, la présence dans les
■ Les polluants amenés par le déchet dans la matrice cimentière déchets de sels solubles (chlorures, sulfates) et de composés
peuvent subir des transformations chimiques ou avoir des organiques peut inhiber les réactions d’hydratation et avoir un
interactions avec les phases solides du ciment qui conduisent à limi- effet négatif sur la qualité des solidifiats obtenus. Il faut cependant
ter leur solubilité et leur mobilité. Les principaux mécanismes inter- relativiser la difficulté de la mise au point des « recettes » permet-
venant sont : tant d’obtenir de bons solidifiats. Une série d’essais au laboratoire,
— la précipitation d’hydroxydes ou de sels de calcium dans un alliée à une bonne expertise de la solidification, permet en général
milieu fortement basique ; d’optimiser les compositions des mélanges pour obtenir, avec des
— l’adsorption sur la surface des hydrates et en particulier sur déchets « classiques », des solidifiats satisfaisants sans avoir
celle du CSH ; recours à des études physico-chimiques poussées. Avec des
— l’intégration dans les hydrates très peu solubles, comme la déchets pour lesquels il n’existe pas d’expertise ou d’analogie pos-
substitution, dans la maille cristalline de l’ettringite, des ions sible, il peut être cependant nécessaire d’identifier les caractéris-
chromate à la place des ions sulfate, par exemple, alors que les sels tiques des solidifiats obtenus, en particulier les spéciations des
du chrome hexavalent sont initialement très solubles dans le déchet. principaux éléments polluants présents dans la matrice.
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Bac de Eaux
Lixiviats réseau S
décantation
R3
L2
Vidangeur
de Big-Bags Lixiviats Eaux
R1 R2 L1
C1 C2
L2S
Malaxeur
Figure 1 – Schéma fonctionnel d’une unité de stabilisation-solidification par liants hydrauliques (doc. Inertec)
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3. Vitrification Historique
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sur la durée de vie des matériels et des économies d’énergie. Ce — les températures requises pour la fluidisation du bitume peu-
coût deviendra compétitif dans la mesure où un exutoire sera vent rendre nécessaire un traitement des gaz et fumées ;
trouvé pour les vitrifiats (élimination en décharge de classe 3 ou — la quantité de bitume nécessaire pour un bon enrobage des
valorisation). déchets peut être importante et entraîner une augmentation du
volume de matériau à éliminer ;
— le devenir à long terme des enrobés de bitume est difficile à
prévoir : le matériau composite constitué d’une gangue organique
contenant des inclusions minérales solubles peut connaître des
4. Procédés d’enrobage évolutions déstructurantes, sous l’action de l’eau ou dans le cas de
processus thermiques ou oxydants.
à l’aide de liants organiques
■ Mise en œuvre
Aucune installation industrielle n’a été mise en œuvre jusqu’à
4.1 Enrobage à l’aide de bitume aujourd’hui. La Société des Pétroles Shell a développé une unité
mobile de démonstration. Le principe du traitement est simple. Les
déchets préchauffés (60 à 90 oC) sont incorporés progressivement
■ Principe
dans le bitume préalablement rendu fluide par chauffage (190 oC).
Les bitumes sont utilisés pour l’enrobage des déchets solides Un malaxage est alors effectué pendant environ 8 h. L’enrobé est
faiblement radioactifs depuis plus de vingt ans. Les déchets enro- alors coulé dans des colis d’environ 1 m3 puis stocké temporaire-
bés sont alors contenus dans des fûts métalliques. Le prix relative- ment pour refroidissement avant d’être éliminé. La réglementation
ment bas des bitumes et leurs caractéristiques physico-chimiques n’autorise cependant pas le stockage de ces matériaux qui
et mécaniques peuvent les rendre intéressants pour des procédés contiennent une forte proportion de matière organique.
de solidification de déchets solides autres que d’origine nucléaire.
Le principe de la solidification consiste alors à disperser de
manière homogène le déchet granulaire dans la matrice de bitume.
La viscosité du bitume, très élevée à la température ambiante, per- 4.2 Enrobage à l’aide de matériaux
met d’obtenir un matériau relativement solide et imperméable où thermoplastiques
les polluants contenus dans les déchets sont confinés.
■ Propriétés des thermoplastiques
■ Propriétés du bitume
Les matériaux thermoplastiques sont des composés macro-
Le bitume est un mélange complexe d’hydrocarbures aliphati- moléculaires qui ont la propriété de devenir pâteux et relativement
ques, naphténiques et aromatiques à masses molaires élevées, fluides lorsque l’on élève la température. Comme pour les bitumes,
obtenu pendant la distillation des pétroles bruts. ils retrouvent un état solide si la température s’abaisse. Ils peuvent
Un bitume commercial est caractérisé par des essais empiriques alors avoir des qualités d’enrobage et permettre le confinement de
normalisés : déchets granulaires. Le polyéthylène, le polypropylène et le poly-
— la pénétrabilité d’une aiguille type au bout de 5 s, à une tem- chlorure de vinyle sont des matériaux thermoplastiques courants
pérature donnée (norme NF EN 1426) (cf. [Doc. G 2 080]) ; mais dont le coût reste prohibitif pour l’enrobage de déchets. De
— le point de ramollissement (méthode « bille et anneau », norme plus, les différents plastiques ne sont pas toujours compatibles
NF EN 1427) ; quand il s’agit de les mélanger pour les refondre.
— la densité, voisine de 1 à 25 oC pour tous les bitumes ;
■ Mise en œuvre
— la perte par chauffage (163 oC) pendant 5 h (norme NF T 66-011);
— le point d’éclair des vapeurs et le point de feu du bitume Une voie a été explorée par la société OTVD : le principe du
(NF T 66-009). traitement consiste à récupérer des matières plastiques provenant
Du point de vue mécanique, le bitume se comporte, à la tempé- du tri sélectif d’ordures ménagères et de les utiliser pour l’enro-
rature ambiante, comme un matériau viscoélastique. La viscosité bage de REFIOM en vue de leur élimination. On peut même envi-
des bitumes diminue généralement avec l’augmentation de la tem- sager la valorisation des matériaux obtenus en fabriquant des
pérature et il devient pratiquement liquide pour des températures profilés en plastique provenant des collectes sélectives d’ordures
proches de 200 oC. ménagères dans lesquels les REFIOM sont mélangés dans des pro-
portions 1/1. Le mélange est malaxé à chaud puis extrudé et pro-
■ Utilisation filé. Les qualités mécaniques des matériaux peuvent s’avérer
satisfaisantes mais leur comportement à long terme est incertain et
Le bitume peut être utilisé pour le confinement des déchets la valorisation d’objets contenant des REFIOM enrobés reste peu
grâce à son faible coût, à sa facilité de mise en œuvre et aux qua- crédible.
lités suivantes :
— bon pouvoir agglomérant car il adhère à la majorité des
matériaux ;
— bonne stabilité physico-chimique vis-à-vis de la plupart des
agents chimiques usuels ; 5. Perspectives
— très faible perméabilité et hydrophobie, qui permettent un bon
confinement par rapport à l’eau. de développement
Mais l’enrobage dans le bitume présente des inconvénients :
— comme toute matière organique, le bitume peut être sensible Les procédés de stabilisation-solidification doivent toujours être
à l’oxydation, à certaines agressions microbiologiques et sa pré- considérés comme un maillon intégré dans une filière de gestion
sence dans un centre de stockage présenterait un risque grave en de déchets. En particulier, l’exutoire proposé pour les solidifiats
cas d’incendie ; conditionne leur mise en œuvre : les qualités requises pour ces
— l’élimination de l’eau contenue dans les déchets est nécessaire matériaux sont, bien sûr, très différentes entre la décharge de
avant ou pendant leur incorporation dans le bitume chaud, avant classe 1, la décharge de classe 3 et la banalisation conduisant à la
refroidissement et durcissement ; valorisation. Les contraintes techniques entraînent des coûts très
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variables (de 700 F/t pour le traitement des REFIOM à l’aide de élimination en décharge de classe 3, sans risque environnemental
liants hydrauliques jusqu’à 3 000 F/t pour la vitrification de rédhibitoire.
l’amiante) mais qui peuvent être « équilibrés » par le coût de
l’élimination ou la possibilité de valorisation. Les stratégies indus- ■ Norme méthodologique XP ENV 12920
trielles à venir dépendent directement des évolutions réglemen- (cf. Normalisation en [Doc. G 2 080])
taires : la possibilité de « déclassement » de solidifiats aujourd’hui Cette norme expérimentale définit une méthodologie pour la
réservés à la classe 1, vers la classe 2, la classe 3 ou la valorisation détermination du comportement à long terme d’un déchet. Cette
en tant que matériau banalisé changerait bien sûr les données et détermination est fortement dépendante du scénario spécifié,
rendrait compétitives des filières comme la vitrification, actuelle- stockage ou utilisation. La publication de cette norme méthodolo-
ment réputées trop chères. gique apporte un changement important dans la façon de
L’évolution de la réglementation est intimement liée à la mise en considérer les méthodes d’évaluation des produits obtenus par
œuvre des procédures d’évaluation environnementale des solidi- solidification de déchets. En effet, cette évaluation doit se faire en
fiats. La qualité requise pour la stabilisation d’un déchet, définie par tenant compte du contexte dans lequel sera placé le déchet/maté-
le mode de gestion des solidifiats, doit être évaluée pour garantir riau. Le « scénario » est décrit en termes de facteurs pouvant
un impact environnemental acceptable. Actuellement, en France, la influer sur le relargage des polluants (facteurs mécaniques, clima-
réglementation prévoit ainsi un test de conformité des déchets tiques, géotechniques, chimiques, biologiques, etc.). L’effet de cha-
stabilisés avant leur admission en centre de stockage de déchets cun des facteurs doit être étudié et quantifié au laboratoire. La
ultimes stabilisés (mise en œuvre du test de lixiviation normalisé mise en évidence des mécanismes qui contrôlent la dynamique
XP X 31-210 et mesure des quantités de polluants solubilisés des émissions de polluants doit permettre l’élaboration d’un
comparés aux seuils fixés par le législateur). Cette précaution est modèle représentatif qui prenne en compte les conditions du scé-
certainement satisfaisante dans le cas où le déchet traité entre dans nario. Les tests de simulation (aux échelles laboratoire, pilote et/ou
une filière classique et éprouvée (telle que l’élimination des terrain) contribuent au calibrage du modèle comportemental. La
REFIOM) et où les conditions du stockage des solidifiats sont prévision des flux de polluants émis par le matériau dans les
elles-mêmes soumises à des contraintes de sécurité exigeantes. conditions du scénario, pour un horizon de temps donné, est alors
Plusieurs développements sont en cours pour élargir cette appro- possible. Cette approche méthodologique va certainement influer
che réglementaire et limitée au seul cas de l’élimination en classe 1. sur les évolutions de la réglementation qui pourra alors intégrer
des critères environnementaux plus représentatifs des compor-
■ Procédures d’évaluation de la stabilisation tements des matériaux et ouvrir ainsi des possibilités de valorisa-
des déchets industriels spéciaux ultimes tions.
L’ADEME propose des « Procédures d’évaluation de la stabilisa- ■ Concept « d’écocompatibilité »
tion des déchets industriels spéciaux ultimes » (cf. Bibliographie,
en [Doc. G 2 080]). Cette démarche s’inscrit dans la logique de la L’ADEME développe une approche très influencée par la
directive 99/31/CE du 26 avril 1999, JOCE du 16/7/99 qui prévoit la norme méthodologique XP ENV 12920 (cf. Normalisation , en
mise au point d’un système d’orientation des déchets stabilisés [Doc. G 2 080]) et basée sur le concept « d’écocompatibilité » qui
vers différents types de décharges (déchets dangereux, déchets intègre la notion « d’effet sur les milieux cibles ».
non dangereux, déchets inertes) en fonction de leurs caractéris- L’écocompatibilité d’un déchet peut être définie comme la situa-
tiques attestées par des batteries de tests normalisés. tion dans laquelle les flux de polluants émis par un déchet se trou-
Deux procédures ont été mises au point, l’une pour l’évaluation vant dans un contexte donné sont acceptables pour les milieux
de la stabilisation obtenue avec des liants hydrauliques, l’autre vivants récepteurs. La prévision des impacts doit alors être obte-
pour la vitrification. Elles ont déjà été mises en œuvre pour les nue en considérant les flux de polluants émis (terme source), leur
principaux procédés français du type « liants hydrauliques » et transfert dans les milieux et les expositions auxquelles seront sou-
pour les vitrifiats provenant de l’unité développée par Europlasma. mises les cibles. Des tests d’écotoxicité doivent permettre de juger
L’évaluation approfondie des solidifiats permet de garantir leur l’écocompatibilité du système évalué.
comportement à long terme, en fonction des agressions qu’ils Cette approche pourra concerner les déchets stabilisés par
seront susceptibles de subir. Le programme de caractérisation des solidification dans la mesure où l’on envisagera leur valorisation
vitrifiats « Europlasma » a, par exemple, permis de préconiser leur comme matériau banalisé.
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