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Bettelheim Contes de fée


Par Émilie TAIEB

📰 Texte
Résumé: La distinction entre Mythes et Contes.

Platon savait ce que les expériences psychologiques peuvent apporter a une veritable
humanité. Il proposait que les futurs citoyens de sa république idéale fussent initiés à
l'éducation littéraire par le récit des mythes, plutôt que par les faits bruts et les enseignements
prétendument rationnels.

Mircea Eliade,  définit ces histoires comme : "des modèles de comportement humain, ce qui
leur permet de donner, par le fait même, un sens et une valeur à la vie". En traçant des
parallèles anthropologiques, lui et bien d'autres suggèrent que les mythes et les contes de
fées dérivent ou sont l'expression symbolique de rites d'initiation ou autres rites de
passage, par exemple la mort métaphorique d'un ancien moi inadapté afin de renaitre sur un
plan d'existence supérieur.

Il faut d’abord distinguer les contes de fées et les rêves. Dans les rêves, l'accomplissement
des désirs est le plus souvent déguisé alors qu'il est ouvertement exprimé dans les contes de
fées.e. Le conte de fées nous projette le soulagement de toutes les pressions et, sans se
contenter de proposer des façons de résoudre le problème, il promet qu'une solution «
heureuse » sera trouvée.Le conte de fées, lui, est essentiellement le résultat du conscient
(contrairement au rêve) et d'un contenu inconscient mis en forme par l'esprit conscient, non
pas d'une personne en particulier, mais du consensus du plus grand nombre à l'égard de ce
qu'ils considèrent comme problèmes humains universels et de ce qu'ils acceptent comme
solutions désirables. Si tous ces éléments n'étaient pas présents dans les contes de fées, ils ne
seraient pas répétés de génération en génération.

Aucun rêve d'un individu ne peut éveiller un intérêt durable s'il n'est pas transformé en
mythe, comme le furent les rêves du pharaon interprétés par Joseph dans la Bible Tout le
monde est d'accord pour reconnaitre que les mythes et les contes de fées s'adressent à nous
dans un langage symbolique qui traduit un matériel inconscient. Les psychanalystes freudiens
s'appliquent à montrer quelle sorte de matériel inconscient, refoulé ou autre, est sous-jacent
aux mythes et aux contes de fées, et comment ils se rattachent aux rêves et aux rêves éveillés.

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Les psychanalystes jungiens insistent en outre sur l'idée que les personnages et les
événements de ces histoires sont conformes aux archétypes psychologiques qu'ils
représentent, et qu'ils évoquent symboliquement le besoin qu'a l'homme d'atteindre un stade
supérieur d'intégration du moi, un renouvellement interne qui s'accomplit lorsque les forces
inconscientes personnelles et raciales sont à la disposition de l'individu. S’il y a des
ressemblances importantes entre les mythes et les contes de fées, il existe également entre
eux des différences inhérentes.

On peut dire que le sentiment dominant transmis par le mythe est le suivant: cette histoire est
absolument unique; jamais elle n'aurait pu arriver à quelqu'un d'autre ni ailleurs; ces
événements sont prodigieux, terrifiants et ne pourraient absolument pas s'appliquer à de
simples mortels, comme vous et moi.
 S'il en est ainsi ce n'est pas tellement en raison du caractère miraculeux des
événements, mais parce qu'ils sont relatés en tant que tels.
 Par opposition, bien que les événements qui surviennent dans les contes de fées soient
généralement inhabituels et plus qu'improbables, ils sont toujours présentés comme quelque
chose de tout à fait ordinaire, quelque chose qui peut arriver à n'importe qui, à vous, à moi ou
au voisin, a l'occasion d'une promenade dans une forêt.
 Dans les contes de fées, les faits les plus extraordinaires sont racontés comme des
événements banals, quotidiens.

La conclusion, dans les mythes, est presque toujours tragique alors qu'elle est toujours
heureuse dans les contes de fées.
 Pour cette raison, certaines histoires parmi les plus connues que l'on puisse trouver dans les
recueils de contes de fées n'appartiennent pas vraiment à cette catégorie.

Le mythe est pessimiste, alors que le conte de fées est optimiste, aussi terrifiant que puissent
être certains passages de l'histoire. C'est cette différence décisive qui sépare le conte de fées
de certaines autres histoires où interviennent également des événements fantastiques, que la
conclusion heureuse soit due aux vertus du héros, au hasard ou à l'intervention de
personnages surnaturels. Il est typique que les mythes impliquent les exigences du surmoi en
conflit avec des actions motivées par le ça et avec les désirs d'auto-conservation du moi.
Malgré tous nos efforts, nous ne pouvons jamais porter notre vie A la hauteur de ce que notre
surmoi, tel qu'il est représenté dans les mythes par les dieux, semble exiger de nous. Le
pessimisme des mythes éclate dans l'histoire que la psychanalyse a rendue exemplaire, la
tragédie d'Œdipe.
Le mythe d'Œdipe, surtout quand il est bien représenté sur une scène, éveille des réactions
intellectuelles et émotives puissantes chez l'adulte, à tel point qu'il peut procurer une
expérience cathartique, comme le font, suivant l'enseignement d'Aristote, toutes les tragédies.
Cela peut se produire si le spectateur est profondément ému par le mythe et, en même

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temps, fortement motivé intellectuellement pour le comprendre. En expérimentant
indirectement ce qui est arrivé à Œdipe, ce qu'il a fait et ce qu'il a souffert, l'adulte peut
soumettre à une compréhension mûre ce qui, jusqu'alors, était resté à l'état d'angoisses
enfantines dans les profondeurs de son inconscient. Le mythe n'est pas un conte de mise en
garde, comme l'est la fable qui, en suscitant l'angoisse, nous empêche d'agir d'une façon qui
nous est décrite comme nocive. Le mythe d'Œdipe ne peut jamais être ressenti comme un
avertissement à ne pas nous laisser prendre à un complexe œdipien. Il ne faut surtout pas que
les conflits œdipiens de cet enfant soient actives par ce mythe.

Il ne peut résulter de cette révélation qu'une angoisse accrue vis-à-vis de l'enfant lui-même et
du monde qui l'entoure.

Après avoir entendu le mythe d'Œdipe, il ne peut que conclure que ces, choses horribles la
mort de l'un de ses parents, et,.
 pour lui, la mutilation - lui arriveront.

Les conte de fées alimente l'imagination avec des matériaux qui, sous une forme
symbolique, suggèrent à l'enfant quel genre de batailles il aura à livrer pour se réaliser, tout
en lui garantissant une issue heureuse. Les héros mythiques offrent d'excellentes images
favorables au développement du surmoi, mais les exigences qu'ils personnifient sont si
rigoureuses qu'elles découragent l'enfant dans ses tentatives de novice tendant à accomplir
l'intégration de sa personnalité. Tandis que le héros mythique connait une transfiguration
dans une vie éternelle céleste, le personnage principal du conte de fées est promis à une vie
éternellement heureuse sur la terre, parmi nous. C’est ainsi que les contes de fées présentent
comme une existence heureuse et banale le résultat des épreuves et des tribulations qui sont
impliquées dans tout processus normal de croissance.

Le héros des contes de fées a beau vivre des événements extraordinaires, il n'en devient pas
pour autant un surhomme, contrairement au héros mythique.
Cette humanité authentique fait comprendre à l'enfant que, quel que soit le sujet du conte de
fées, il' n'est qu'une transposition imaginaire et exagérée des tâches qu'il aura à accomplir, de
ses espoirs et de ses appréhensions.

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