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Compte rendu

Ouvrage recensé :

Lire Industrial Relations Systems de John T. Dunlop. Les règles au coeur des relations de travail,
par Arnaud Mias, Paris : Ellipses, 2012, 160 p., ISBN : 978-2-7298-7123-9.

par Pier-Luc Bilodeau


Relations industrielles / Industrial Relations, vol. 68, n° 3, 2013, p. 533-534.

Pour citer ce compte rendu, utiliser l'adresse suivante :

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DOI: 10.7202/1018440ar

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recensions / book reviews 533

Lire Industrial Relations Systems « le contexte de marché ou les contraintes


de John T. Dunlop. Les règles budgétaires  » ainsi que «  le contexte de
au cœur des relations de travail pouvoir et le statut des acteurs ». Les deux
par Arnaud Mias, Paris : Ellipses, 2012, sections suivantes présentent les chapitres
160 p., ISBN : 978-2-7298-7123-9. portant sur l’application, par Dunlop, de
Comme les autres titres de cette collection, son modèle à des secteurs particuliers  :
Lire Industrial Relations Systems de John T. l’extraction du charbon et la construction.
Dunlop présente un ouvrage classique, le Enfin, les deux dernières sections de cette
deuxième partie rendent compte de chapi-
contexte de sa production et sa postérité.
tres transversaux de l’ouvrage, portant
L’exercice est intéressant dans la mesure
respectivement sur le développement des
où il permet d’exposer un public euro-
systèmes nationaux et « le développement
péen francophone à cet ouvrage phare du
économique et les règles du travail ».
champ des relations industrielles, lequel a
connu une diffusion limitée hors de notre La troisième et dernière partie porte
domaine et n’a fait l’objet, à ce jour, que sur les «  prolongements  » de l’ouvrage
d’une traduction française très partielle. et compte une cinquantaine de pages.
Elle est sans doute celle qui présente le
L’ouvrage de 160 pages est structuré en
plus d’intérêt pour le lecteur familier avec
trois parties d’importance inégale. Dans la
les relations industrielles et les travaux
première, comptant une trentaine de pages,
de Dunlop puisqu’il y est question de la
l’auteur expose le contexte de publication
réception de l’œuvre, aux États-Unis, en
de Industrial Relations Systems. Pour ce
Angleterre et en France, de ses applica-
faire, il survole le développement du champ
tions et des raffinements qui y ont été
des relations industrielles aux États-Unis,
apportés ainsi que des voies de dépasse-
des origines jusqu’à l’âge d’or des années
ment du cadre proposé en 1958. Arnaud
cinquante en mettant l’emphase sur l’as-
Mias y présente Industrial Relations
pect pratique des relations industrielles et
Systems comme «  un classique qui n’a
le caractère essentiellement descriptif de
pas fait école » (p. 101). En effet, s’il a été
la recherche qui y est effectuée. Une brève
accueilli positivement aux États-Unis et en
biographie de Dunlop permet également
Angleterre, ce n’est que dans ce dernier
de mieux saisir la place de cet ouvrage
pays que l’apport théorique de l’ouvrage a
dans le projet intellectuel de son auteur.
alimenté de véritables débats grâce à l’in-
À travers ces présentations, Arnaud Mias
térêt qu’y a porté l’École d’Oxford, et plus
met en lumière l’importance des divergen-
particulièrement Allan Flanders. De façon
ces de vues entre, d’une part, plusieurs générale, le système de Dunlop a été plus
chercheurs en relations industrielles (dont souvent reçu comme un outil heuristique,
Dunlop) et, d’autre part, les tenants de permettant de structurer les connaissan-
l’école des relations humaines. ces produites en relations du travail, que
Dans une seconde partie, de près de comme une véritable théorie. Dans son
soixante-dix pages, chacun des huit chapi- traitement de la réception de l’ouvrage en
tres de l’ouvrage, dans sa version remaniée France, l’auteur offre un exposé intéres-
de 1993, fait l’objet d’un résumé de trois à sant du développement de l’enseignement
dix pages. Ainsi, après avoir présenté, dans et de la recherche sur le travail et l’emploi
une première section, le premier chapitre, dans ce pays. On y apprend que ce n’est
portant sur le système dans son ensemble, qu’une dizaine d’années après sa publica-
l’auteur aborde tour à tour les trois contex- tion et par le biais des travaux britanniques
tes principaux identifiés par Dunlop, soit que les milieux universitaires français ont
« le contexte technique du lieu de travail », découvert les travaux de Dunlop. Les divi-
534 relations industrielles / industrial relations – 68-3, 2013

sions disciplinaires traditionnelles ainsi que toire du champ des relations industrielles et
l’inexistence institutionnelle du champ des de son rayonnement.
relations industrielles dans ce pays permet- Au-delà de son contenu immédiat,
tent d’expliquer cette réception tardive. l’ouvrage recensé fournit au lecteur québé-
Paradoxalement, les pistes de développe- cois une occasion de réflexion. En effet, bien
ment proposées par l’auteur nous laissent qu’il soit question d’un ouvrage publié aux
croire que c’est peut-être en France que États-Unis dans un champ d’étude large-
l’on considère le plus sérieusement ce ment dominé par les milieux universitaires
classique aujourd’hui. Nul doute que les anglophones, il est néanmoins regretta-
travaux de Jean-Daniel Reynaud sur la ble que la présentation du contexte de sa
régulation aient joué un rôle déterminant production et surtout des conditions de sa
en ce sens. En ce qui concerne l’Angleterre réception en France ne fasse aucunement
et surtout les États-Unis, c’est surtout à mention du Québec. Les relations indus-
travers les travaux de Thomas A. Kochan, trielles existent pourtant depuis près de
Harry C. Katz et Robert B. McKersie, et trois quarts de siècle dans cette province où
notamment leur ouvrage commun de trois universités accueillent des program-
1986, que le système de Dunlop demeure mes d’enseignement et de recherche dont
présent dans les recherches contemporai- le plus ancien, celui de l’Université Laval,
nes en relations industrielles. Ces auteurs remonte à 1943, deux ans avant la création
et leurs collaborateurs, bien qu’ils aient des premiers programmes états-uniens
critiqué le modèle « dunlopien » pour son mentionnés dans l’ouvrage. De même, la
caractère statique et trop étroitement asso- revue dans les pages de laquelle est publiée
cié à la période des « Trente Glorieuses », cette recension (Relations industrielles/
en ont néanmoins conservé l’essentiel en y Industrial Relations) existe depuis 1945,
intégrant des éléments tirés de la théorie deux ans avant la publication de ILR Review
des choix rationnels. de l’Université Cornell, « première revue
En ce qui a trait à la forme, l’ouvrage américaine spécifiquement dédiée aux
d’Arnaud Mias constitue une introduction relations professionnelles » (p. 12). Malgré
intéressante et très accessible à l’ouvrage ces réalisations et les relations développées
de Dunlop. La qualité de la rédaction et le et entretenues depuis plusieurs décennies
style tout à fait adapté à la visée du texte avec de nombreux départements et centres
rendent la lecture de cet ouvrage fort de recherche aux États-Unis, en Angleterre
agréable. et en France, il semble que l’apport québé-
cois aux relations industrielles sur le plan
Quant au fond, il n’y a rien à redire sur
international demeure très limité, ou du
la justesse de l’exposé. Le travail de lecture
moins peu connu. Sans porter un jugement
de l’œuvre et de recherche sur son contexte
trop dur à l’endroit de nos prédécesseurs,
et sa postérité ont manifestement été effec-
c’est peut-être là une limite de leur contri-
tués avec toute la rigueur nécessaire. Bien
bution que de n’avoir pas profité davantage
qu’il intéressera plus particulièrement un
d’une position privilégiée pour assumer un
lectorat ne lisant pas l’anglais ou souhaitant
rôle de passeurs entre un champ d’étude
accéder rapidement à l’essentiel de ce clas-
dominé par les milieux anglophones et les
sique des relations industrielles, l’ouvrage
communautés de recherche intéressées
est également d’intérêt pour un public plus
par le travail et l’emploi en Europe franco-
familier avec les travaux de Dunlop. En effet,
phone.
que l’on ait lu ou non Industrial Relations
Systems, la troisième partie de l’ouvrage Pier-Luc Bilodeau
constitue une contribution originale à l’his- Université Laval

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