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Tous droits réservés, y compris le droit de reproduction de ce livre ou de quelque citation que ce soit, sous
n’importe quelle forme.
Ouvrage dirigé par Bénita Rolland
Couverture : Raphaëlle Faguer
Photo de couverture : GettyImages
Photos intérieures : © Julien Poupart
Pour la présente édition
© 2017, Hugo et Compagnie
34/36, rue la Pérouse
75116 - Paris
www.hugoetcie.fr
01 - ISBN: 9782755629095
02 - ISBN: 9782755629132
03 - ISBN: 9782755629149
04 - ISBN: 9782755629156
05 - ISBN: 9782755629163
06 - ISBN: 9782755629170
07 - ISBN: 9782755629187
08 - ISBN: 9782755629194
09 - ISBN: 9782755629200
10 - ISBN: 9782755629217
11 - ISBN: 9782755629224
12 - ISBN: 9782755629231
Ce document numérique a été réalisé par Nord Compo.

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Dédicace

À LA VÉRITABLE
MIA SAUNDERS

Tu n’es pas encore née mais je t’aime déjà.


J’espère qu’un jour, lorsque tu seras adulte, ma chère
amie Sarah te fera connaître cette histoire.

Je te souhaite plein d’amour et la patience


de toujours savoir faire confiance à la vie…

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JANVIER

Mia Saunders rêve de devenir actrice, elle a quitté Las Vegas où elle vivait avec
sa sœur et son père pour s’installer à Los Angeles. Mais elle va devoir revoir ses
projets, car Mia a besoin d’argent, de beaucoup d’argent. Elle doit en effet
rembourser les dettes de jeu de son père. Un million de dollars.
Son ex-petit ami est celui qui a prêté de l’argent à son père, l’a fait tabasser et l’a
envoyé à l’hôpital où il est dans le coma. Bref, il faut qu’elle protège son père et
sa petite sœur qui est la prochaine sur la liste de Blaine. Elle ne voit qu’une
issue, contacter sa tante qui possède une agence d’escorts.
Celle-ci, trop heureuse de pouvoir aider sa nièce, lui propose un accord. Elle sera
l’escort d’un homme différent par mois pendant un an.
Chaque contrat lui rapportera 100 000 dollars. La jeune femme accepte et se
prépare donc à sillonner les États-Unis et à rencontrer les hommes qui s’offrent
ses services.
De mois en mois, nous allons suivre Mia dans ses différentes missions.

Une Mia déterminée, sexy, drôle et généreuse.


Une Mia qui s’est promis de ne pas tomber amoureuse, mais qui aura du mal
tenir sa promesse.
Mia relèvera-t-elle le défi de sauver sa famille ?

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Chapitre 1

J’ai cru au grand amour pendant des années. J’ai même cru l’avoir trouvé – à
quatre reprises, pour être précise.
Il y a eu Taylor, mon premier copain, avec qui je suis restée durant tout le
secondaire. C’était la star de l’équipe de base-ball et le meilleur joueur de toute
l’histoire du lycée. Il était grand, avec plus de muscle que de cervelle, et son kiki
faisait la taille de mon petit doigt. Sans doute était-ce à cause des stéroïdes qu’il
prenait derrière mon dos. Il m’a larguée le soir du bal de promo et s’est enfui
avec ma virginité et la capitaine des pom-pom girls. À ce qu’il paraît, il a vite
lâché la fac et il est désormais mécanicien dans une ville minuscule, avec deux
gamins et une femme qui aguiche tous les hommes de la ville.
Ensuite, il y a eu l’assistant de mon prof de psychologie à la fac. Il s’appelait
Maxwell et j’étais persuadée qu’il était le Messie et qu’il était capable de
marcher sur l’eau. Cependant, c’est mon cœur qu’il a piétiné en couchant avec
une fille dans chaque classe dont il était chargé. J’ai eu ma vengeance lorsqu’il a
mis en cloque deux nanas en même temps et qu’il s’est fait virer de la fac. À dix-
neuf ans, il versait deux pensions alimentaires à deux femmes différentes. La vie
est bien faite, vous ne trouvez pas ? Dieu merci, j’ai toujours exigé qu’il sorte
couvert avec moi.
À vingt ans, lorsque j’étais serveuse au MGM Grand à Las Vegas, j’ai eu la
chance de rencontrer Benny, le troisième amour de ma vie. J’ai su trop tard que
le pauvre avait aussi peu de chance que moi dans la vie. Benny était un tricheur
amateur, or il m’avait dit qu’il était commercial et qu’il venait au casino parce
qu’il adorait le poker. Pour moi, c’était le coup de foudre, même si finalement
notre relation était loin d’être romantique. J’ai passé la plupart de notre histoire

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bourrée et allongée sous lui. Hélas, j’étais persuadée qu’il m’aimait. Après tout,
il me le disait tout le temps. Pendant deux mois, nous avons bu, nagé dans la
piscine de l’hôtel et baisé toute la nuit dans une des chambres que me procurait
mon amie femme de ménage. Au bar, je lui servais, à lui et ses amis, des verres
gratuits. Ça a marché – jusqu’à ce que ça ne marche plus. Benny s’est fait
prendre en train de compter les cartes et il a disparu du jour au lendemain. J’étais
dans tous mes états, et cela a duré un mois. Puis j’ai appris qu’il s’était fait
tabasser à mort – ou presque – et qu’il était à l’hôpital. Il a quitté la ville sans me
dire au revoir.
Ma dernière erreur fut la cerise sur le gâteau – le pompon, la goutte d’eau qui
m’a persuadée que le grand amour est une invention des fabricants de cartes de
vœux et des auteurs de romans à l’eau de rose. Son nom était Blaine, mais il
aurait pu s’appeler Lucifer. C’était un beau parleur et un homme d’affaires – en
tout cas c’est ce que j’ai cru au début. En vérité, Blaine était usurier, c’est lui qui
a prêté à mon père plus d’argent qu’il ne pourrait rembourser en une vie entière.
Il s’est alors retourné contre moi, puis contre mon père. Pour moi, à l’époque,
l’amour ne pouvait être que celui qu’on trouve dans les contes de fées. Blaine
m’avait promis le paradis, il m’a donné l’enfer.
– C’est pour ça que tu devrais prendre le boulot que t’offre ta tante, comme ça,
ce sera réglé, dit Ginelle, ma meilleure amie, avant d’éclater une bulle de
chewing-gum dans le téléphone. C’est ta seule option, Mia. Sinon, comment tu
vas sortir ton père de ce pétrin ?
Je sirote mon verre d’eau glacée en regardant les gouttes de condensation
scintiller sous le soleil californien.
Je soupire :
– Je ne sais pas quoi faire, Gin. Je n’ai pas assez d’argent de côté – d’ailleurs je
n’en ai pas du tout.
– Tu as toujours été amoureuse de l’amour…
– Plus maintenant !
Derrière Ginelle, j’entends le brouhaha du casino. Les gens pensent que le désert
est un endroit calme, mais pas à Las Vegas, où les machines à sous tintent à

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toute heure du jour et de la nuit et où des jingles retentissent partout, où que vous
soyez.
– Je sais, je sais, dit-elle. Mais tu aimes le sexe, n’est-ce pas ?
– C’est complètement différent, Gin.
– Je veux seulement dire que si tu acceptes ce boulot, tu as juste à te faire belle
et à beaucoup baiser. Ça fait des mois que tu n’as pas pris ton pied, autant en
profiter, non ?
Il n’y a que Ginelle qui soit capable de faire passer un job de call-girl de luxe
pour un boulot dont tout le monde rêve.
– On n’est pas dans Pretty Woman et je ne suis pas Julia Roberts ! je m’exclame
en me dirigeant vers ma moto.
C’est une Suzuki GSXR600 que j’appelle Suzi. Elle est la seule chose de valeur
que je possède. Je grimpe dessus en mettant mon téléphone sur haut-parleur, puis
je tresse mes longs cheveux noirs.
– Écoute, je sais que tu veux m’aider, mais je ne sais vraiment pas quoi faire. Je
ne suis pas une pute et je n’ai pas envie de le devenir, je dis en frissonnant rien
que d’y penser. Mais il faut que je trouve un million de dollars, et vite.
– Je sais. Appelle-moi ce soir, si tu peux, tu me raconteras ton entretien avec
Escorts Exquises. Merde, je vais être en retard pour la répétition et je ne suis
même pas en tenue.
Sa voix devient tendue, et je l’imagine en train de courir à travers le casino,
téléphone plaqué à l’oreille, ne prenant pas garde à ceux qui la prennent pour
une folle. C’est pour ça que j’adore Ginelle – elle dit les choses telles qu’elles
sont et elle se fiche de ce qu’on pense d’elle. Comme moi.
Elle travaille pour le Burlesque Doll Show1 à Las Vegas. Elle est petite, douce,
et elle sait comment remuer son joli cul pour plaire aux hommes du monde entier
qui viennent voir son spectacle. Hélas, Ginelle ne gagne pas assez d’argent pour
me tirer d’affaire et aider mon père. Cela dit, je ne le lui aurais jamais demandé,
quand bien même elle aurait eu les moyens.
– Ok, je t’aime ma p’tite salope, je dis en coinçant ma tresse sous mon blouson
en cuir.
– Je t’aime encore plus, p’tite pute.

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Je démarre ma moto et je la fais vrombir avant de mettre mon casque. Je glisse
mon téléphone dans ma poche intérieure et je pars en direction d’un futur dont je
ne veux pas, mais que je n’ai aucun moyen d’éviter.
*
* *
– Mia ! Ma chérie ! s’écrie ma tante en me serrant dans ses bras maigres.
Elle est sacrément forte, pour une si petite femme. Ses cheveux noirs sont coiffés
en chignon banane et sa chemise blanche est douce comme de la soie –
probablement parce que c’est de la soie. Elle porte une jupe crayon noire très
stricte et des talons aiguilles noirs avec cette semelle rouge que j’ai vue partout
en feuilletant le dernier Vogue. Elle est magnifique et, plus encore, elle a l’air
hors de prix.
– Tante Millie, ça me fait plaisir de te voir, je dis alors qu’elle lève deux doigts
parfaitement manucurés pour me faire taire.
– Ici, tu m’appelleras Miss Milan, poupée, dit-elle.
Je lève les yeux au ciel et ça ne lui plaît pas non plus.
– Chérie, premièrement, ne fais pas ça. C’est impoli et ce n’est pas élégant.
Elle marche lentement autour de moi, m’étudiant comme si j’étais une œuvre
d’art – une statue froide et impénétrable. Peut-être le suis-je. Elle tient dans sa
main un éventail en dentelle noire qu’elle ouvre et referme avant d’en frapper la
paume de sa main.
– Deuxièmement, ne m’appelle jamais Millie. Cette femme est morte il y a
longtemps, le jour où le premier homme en qui elle a eu confiance a grillé son
cœur au barbecue pour le donner à manger à ses chiens.
Beurk, quelle métaphore affreuse ! En même temps, Tante Millie a toujours été
très directe.
– Tiens-toi droite, dit-elle en me tapant sous le menton pour me faire lever la
tête.
Elle me frappe ensuite sur le bas du dos, là où mon t-shirt moulant et trop court
ne rejoint pas tout à fait mon jean slim préféré. Je me redresse en poussant mes
seins en avant.

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Un sourire s’étend sur ses lèvres rouges, dévoilant des dents parfaitement
alignées et blanches, les plus belles du marché. Car c’est un véritable business à
Los Angeles. Lorsque les riches héritières ne sont pas chez leur dermatologue
pour leur injection de Botox mensuelle, elles sont chez leur dentiste. À
l’évidence, Tante Millie fait partie de ces femmes et elle a sans doute raison –
elle est loin de paraître ses cinquante ans et elle est canon.
– Eh bien, tu es magnifique, ma poupée, et tu le seras encore plus quand on
t’aura habillée pour la séance photo, dit-elle en grimaçant, tout en inspectant ma
tenue de motarde.
Je fais plusieurs pas en arrière jusqu’à me cogner contre un fauteuil en cuir.
– Je n’ai pas encore dit que j’étais d’accord.
Le regard de Tante Millie est à la fois moqueur et exaspéré.
– Je croyais qu’il te fallait beaucoup d’argent et vite parce que mon minable
beau-frère est à l’hôpital et qu’il a des ennuis ?
Elle s’assied lentement, croise les jambes et pose ses bras sur les accoudoirs en
cuir blanc de son fauteuil. Tante Millie n’a jamais aimé mon père. C’est
dommage, parce qu’il a fait du mieux qu’il pouvait pour nous élever seul après
que sa sœur, ma mère, nous a abandonnés. J’avais dix ans, Madison en avait
cinq, et aujourd’hui, elle n’a pas le moindre souvenir de notre mère.
Je me mords la lèvre et plonge mon regard dans ses yeux vert pâle. Nous nous
ressemblons beaucoup, elle et moi. Si l’on oublie les petits coups de bistouri
qu’elle a fait faire ici et là, elle est telle que je serai dans vingt-cinq ans. Nous
avons les mêmes yeux vert clair, presque jaunes, devant lesquels les gens se sont
émerveillés toute ma vie – comme de l’émeraude verte, disent-ils – et nos
cheveux sont si noirs qu’à la lumière ils paraissent presque bleus.
– Ouais, papa a de gros ennuis avec Blaine, dis-je en essayant de me mettre à
l’aise dans le fauteuil inconfortable.
Millie secoue la tête et je repense à mon père, le visage pâle et émacié, le corps
couvert de bleus, immobile et sans vie sur son lit d’hôpital.
– Il est dans le coma, pour l’instant. Ils l’ont tabassé il y a quatre semaines et il
ne s’est toujours pas réveillé. Les médecins pensent que c’est à cause des

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hémorragies au cerveau, mais on n’en saura pas plus avant un moment. Ils lui
ont cassé tellement d’os qu’il a un plâtre des orteils aux clavicules.
– Quelle horreur, les sauvages ! chuchote-t-elle en remettant une mèche derrière
son oreille.
C’est ainsi que Millie reprend le contrôle de ses émotions. Je l’ai déjà vue faire –
elle est maîtresse dans l’art de la manipulation et elle contrôle ses émotions
mieux que quiconque. Si seulement j’avais son talent !
– Oui, et la semaine dernière, quand je suis allée lui rendre visite à l’hôpital, les
molosses de Blaine sont venus me voir. Ils ont dit que si je ne leur rendais pas
leur argent avec les intérêts, ils allaient le tuer et qu’ils s’en prendraient ensuite à
Maddy et à moi. Ils ont appelé ça la « dette du survivant ». Quoi qu’il en soit, il
faut que je trouve un million de dollars.
Tante Millie se pince les lèvres et tapote ses ongles sur l’accoudoir. Comment
peut-elle être aussi calme ? La vie d’un homme ainsi que la mienne et celle de
ma petite sœur sont en jeu, bordel ! Je comprends qu’elle se fiche de papa, mais
je pensais qu’elle tenait à Maddy et moi, bon sang !
Millie se lance.
– On peut y arriver, dit-elle enfin en plongeant son regard dans le mien. En tout
cas, en un an, c’est possible. Tu penses qu’il accepterait que tu le rembourses un
peu tous les mois ?
– Je ne sais pas. Je suppose que ce qui compte, c’est qu’il ait son argent, d’une
manière ou d’une autre. On était ensemble il n’y a pas si longtemps, peut-être
qu’il m’accorderait cette faveur. Ce psychopathe a toujours aimé me voir le
supplier à genoux.
– Garde tes escapades sexuelles pour toi, poupée, dit-elle en souriant d’un air
machiavélique. Il va falloir te mettre au boulot tout de suite. Je ne sélectionnerai
que les comptes les plus chers. Sois ici aux aurores, demain, pour le shooting, et
prévois de passer la journée avec nous. On fera d’abord les portraits, puis les
vidéos, etc.
Tout va beaucoup trop vite à mon goût, mais les mots « on peut y arriver »
résonnent dans ma tête comme une bouée de sauvetage dans un océan rempli de
requins.

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– Est-ce que… est-ce que je devrai coucher avec eux ?
Je ferme les yeux en attendant sa réponse et je sens soudain ses mains sur les
miennes.
– Poupée, tu n’as pas à faire quoi que ce soit que tu ne veuilles pas. En revanche,
si tu veux gagner du fric rapidement, tu devrais l’envisager. Mes clients et moi
avons un accord tacite. Si mes filles couchent avec eux, elles gagnent un bonus
de vingt pour cent qu’ils laissent en cash dans leur chambre. Cet argent ne passe
ni entre mes mains ni dans les comptes de la boîte, puisque la prostitution est
illégale en Californie. Cependant, il est normal que mes filles soient
dédommagées, tu ne penses pas ? demande-t-elle en me lançant un clin d’œil.
Je hoche lentement la tête, ne sachant pas vraiment ce que j’en pense, mais prête
à foncer quand même.
– Tu travailleras au mois, c’est le seul moyen de gagner autant d’argent, dit-elle.
Elle a l’air si sûre d’elle que j’ai l’impression que le job va être facile, du
moment que j’arrive à garder l’esprit ouvert.
– Tu rejoindras le client où qu’il soit, et tu joueras le rôle qu’il veut pendant un
mois. Mais attention, ma poupée : je ne vends pas de sexe. Si tu couches avec
eux, c’est parce que tu en as envie, et crois-moi, quand tu verras les hommes que
j’ai sur liste d’attente, tu réfléchiras à deux fois avant de refuser – sans parler de
la prime que tu gagneras.
Elle se lève en souriant, fait le tour du bureau et s’assied devant son ordinateur.
J’ai l’impression d’être collée au fauteuil, incapable de bouger, accablée par le
poids de toutes les questions qui se précipitent dans ma tête.
– Je vais le faire, je m’entends chuchoter.
– Bien sûr que tu vas le faire, dit-elle en souriant. Tu n’as pas le choix si tu veux
sauver ton père.
*
* *
Je comprends pourquoi elle m’a dit de prévoir la journée. Comme Sandra
Bullock dans Miss Détective, j’ai été frottée, épilée, pelotée, brossée, à tel point
que j’ai failli frapper l’esthéticienne que Millie a embauchée pour « m’arranger
». J’étais vexée qu’elle pense que j’ai besoin de tous ces soins. Cependant,

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lorsque je me suis regardée dans le miroir, j’ai failli ne pas reconnaître mon
reflet. Mes longs cheveux noirs sont plus brillants que jamais et tombent en
vagues parfaites dans mon dos et sur mes épaules. Chaque éclat de lumière
illumine ma peau comme si elle était couverte de paillettes et le bronzage que je
m’efforce d’avoir depuis que je suis arrivée en Californie a pris un ton de miel
qui fait ressortir mes yeux verts. Elle m’a choisi une robe lavande à la fois
confortable et chic, qui met en valeur mes atouts. Je suis sexy et élégante,
comme un ange de mauvais augure sous l’objectif du photographe. Au bout d’un
moment, j’ai même fini par faire la moue sans son aide et à regarder au loin sans
exprimer la moindre émotion. C’est ainsi que je dois être à présent, apathique.
À la fin de cette interminable séance photo, je me dépêche de remettre mes
vêtements habituels, c’est-à-dire un jean et un t-shirt moulant, et je retourne dans
le bureau de Tante Millie – pardon, de Miss Milan.
– Ma poupée, les photos sont magnifiques ! J’ai toujours su que tu ferais un
superbe mannequin, dit-elle en regardant son écran d’ordinateur.
Je fais le tour du bureau pour voir le résultat et j’en ai le souffle coupé. Je suis
méconnaissable.
– Waouh. J’ai du mal à croire que c’est moi.
Je secoue la tête en regardant les photos charger sur le site d’Escorts Exquises.
– Tu es très belle, dit ma tante en souriant et en me regardant tendrement dans
les yeux. Tu ressembles tellement à…
– Peu importe, dis-je en secouant la tête, ne voulant pas entendre que je suis le
portrait craché de ma mère. Alors, c’est quoi la suite ? je demande en croisant les
bras, comme si ça pouvait me protéger.
Elle recule dans son fauteuil et me regarde avec des yeux pétillants de malice.
– Tu veux voir ta première mission ?
Je fais de mon mieux pour ignorer l’appréhension qui s’empare de moi et je me
redresse en la défiant du regard.
– C’est parti.
Millie glousse en cliquant sur sa souris pour afficher la photo de l’homme le plus
beau que j’aie jamais vu. La photo est très business, mais ses cheveux blond
foncé sont coiffés-décoiffés, avec des mèches plus claires. Ses yeux sont verts et

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sa mâchoire saillante avec l’ombre d’une barbe naissante. Il est à croquer. Cet
homme n’est pas le genre à devoir payer pour une femme, au contraire, c’est le
genre dont toutes les femmes tombent amoureuses dès le premier regard.
– Je ne comprends pas pourquoi ce beau gosse a besoin d’une escort ? je
demande en pointant la photo du doigt.
Ma tante se recule dans son fauteuil, joint les mains sur ses cuisses et me regarde
en souriant.
– Tu sais, c’est lui qui t’a choisie.
Je dois sembler perdue, parce qu’elle se dépêche de poursuivre.
– J’ai envoyé tes premières photos à lui et sa mère, avec qui je travaille
beaucoup. Il enverra une voiture te chercher demain matin. Il habite dans le coin,
mais tu vivras chez lui pendant les prochains vingt-quatre jours.
J’ai l’impression d’avoir été frappée à la tête avec une batte de base-ball.
– Vingt-quatre jours ? Tu es folle ? Comment je suis censée travailler et aller à
des castings ?
Ma carrière d’actrice est loin d’être au top, mais j’ai un agent bon marché qui me
déniche des auditions de temps en temps, et puis il y a le restaurant où je
travaille le soir !
Millie me regarde en se pinçant les lèvres et en retroussant son nez comme s’il
venait de me pousser un troisième œil sur le front.
– Mia, tu vas démissionner de tous tes boulots. Tu es désormais une employée
d’Escorts Exquises et tes engagements iront de un à vingt-quatre jours, selon les
besoins du client. Comme tu dois gagner beaucoup d’argent en peu de temps, tu
n’as d’autre choix que de prendre les contrats les plus longs. Au bout de vingt-
quatre jours, tu auras jusqu’à la fin du mois pour rentrer chez toi, te reposer et te
refaire une beauté. À chaque début de mois, tu seras envoyée sur une nouvelle
mission.
– Je n’arrive pas à y croire…
Je fais les cent pas dans le bureau, comme un animal en cage, réalisant soudain
que ma vie ne m’appartient plus, du moins pendant les douze mois à venir. Finis
les rencards – même si cela fait une éternité que je n’en ai pas eu – et finies les

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auditions et ma carrière d’actrice, si tant est que l’on puisse parler de carrière. Je
n’aurai plus le temps de voir ni papa, ni Maddy, ni Ginelle.
– Eh bien crois-le, mon petit, parce que ce n’est pas une blague. Si tu en es là,
c’est à cause de ton père et de ton ex. Tu as de la chance que je te libère de la
place, alors ne sois pas ingrate. Maintenant assieds-toi et ferme-la ! ordonne-t-
elle d’une voix froide.
– Je suis désolée.
Je sais qu’elle essaie de m’aider, c’est juste que c’est trop… rapide. C’est
incroyable. Je me laisse tomber sur la chaise devant son bureau et je me prends
la tête dans les mains. Je réalise que je suis désormais une femme à louer.
Chaque mois, je serai avec un nouvel homme. Si je couche avec lui, j’aurai un
bonus de vingt pour cent en liquide.
J’éclate de rire, puis je lève la tête et regarde le plafond. Quelques secondes
passent et une détermination s’empare de moi peu à peu. C’est ce que je dois
faire. Je vais laisser un beau gosse m’emmener à des dîners d’affaires ennuyeux,
et je ferai ce qui lui passera par la tête. Je ne suis pas obligée de coucher avec lui,
et surtout, je ne vais pas tomber amoureuse de lui. En changeant de mec tous les
mois, je n’aurai pas le temps de tomber amoureuse comme j’en ai eu l’habitude
par le passé. Et puis je ne suis pas obligée d’abandonner ma carrière – après tout,
quel meilleur moyen de progresser qu’en incarnant ce que ces hommes veulent
que je sois ? Chaque mois, je deviendrai quelqu’un d’autre, et mon père sera en
sécurité.
J’inspire lentement et je me lève en tendant la main à ma tante. Son sourire est
diabolique mais sexy – elle est vraiment faite pour ce travail.
– Très bien, Miss Milan, dis-je en insistant sur son faux nom pour qu’elle
comprenne ma détermination. Je suis votre nouvelle Calendar Girl.

1. Le Show des Poupées Burlesques. (NdT, ainsi que pour les notes suivantes)

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Chapitre 2

Weston Charles Channing III. Je lis et relis son nom en me demandant quel
genre de personne trouve normal d’avoir un chiffre romain rattaché à son nom.
Je parie que c’est un mec plein aux as dont la pauvre mère n’en peut plus d’être
ridiculisée par les pimbêches qu’il ramène aux soirées mondaines. En tout cas,
selon moi, c’est la seule raison qui expliquerait pourquoi un mec aussi beau a
besoin d’engager une escort. Je feuillette les pages et je trouve la liste des règles
que Miss Milan m’a données à lire hier soir.
1. Toujours être apprêtée. Le client ne doit jamais vous voir démaquillée et
décoiffée. Vos ongles doivent toujours être manucurés et vos vêtements repassés.
Le client vous procurera la garde-robe de son choix. Vos mensurations et vos
préférences ont été communiquées à sa styliste personnelle.
Je lève les yeux au ciel en étudiant mon immense pile de jeans. Waouh, ces gens
ne savent vraiment pas quoi faire de leur argent pour avoir une styliste
personnelle. Est-ce si difficile de choisir ses vêtements ? Et mes mensurations lui
ont été fournies ? Super ! Maintenant, il sait que j’ai besoin de perdre quelques
kilos. J’ai l’avantage d’être grande et d’avoir l’air plus mince que je ne le suis,
mais je sais que ma tante aime que ses filles fassent du trente-quatre. Or, je suis
plutôt du côté du trente-huit, voire du quarante, si je ne fais pas attention à ce
que je mange. Dans le milieu du mannequinat, c’est sans doute l’équivalent du
XXL.
Il t’a choisie, me rappelle une petite voix dans ma tête alors que je range mes
objets fétiches dans un petit sac à dos : mes crèmes, mon maquillage, mon
parfum, mon Kindle, mes bijoux préférés. Tout ça est sans valeur, mais ça
m’appartient et j’ai besoin de rester moi-même. J’emporte également mon

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journal intime tout neuf. J’ai pensé que comme cette expérience va durer une
année, j’allais en profiter pour noter certaines choses. Peut-être qu’un jour j’en
ferai un film.
Je jette mon sac sur l’énorme fauteuil qui prend la moitié de mon studio et je
reprends la lecture des consignes.
2. Souriez tout le temps. N’ayez jamais l’air ni en colère ni triste, et de manière
générale, ne montrez pas d’émotion négative. Les hommes ne paient pas pour
gérer vos problèmes. Ils paient pour ne pas avoir à le faire, justement.
Ok, pas d’émotion. Aucun souci. Je m’y suis déjà préparée psychologiquement
après avoir accepté ce job.
3. Ne parlez que si vous y êtes invitée. Vous êtes là pour être belle et charmante.
Avant toute apparition publique, discutez de votre rôle avec le client afin de vous
mettre d’accord.
Ça va, j’ai compris ! Tu es là pour être sa Barbie. Capiche. Facile.
4. Soyez disponible à tout moment. Si le client souhaite rester à la maison, vous
y resterez avec lui. Soyez respectueuse, polie et suivez ses directives. S’il
cherche de la compagnie, vous pouvez lui proposer un câlin. Le sexe n’est pas
requis.
Elle veut que je fasse un câlin au client quand il veut baiser ? J’éclate de rire en
imaginant la scène. « Salut beau gosse, tu veux des papouilles ? »
5. Le sexe avec les clients n’est pas inclus dans le contrat. Si vous choisissez de
le proposer, cela relève de votre choix, et la société Escorts Exquises ne peut
être tenue pour responsable. Toutefois, nous exigeons que nos escorts soient
sous contraceptif, quelle que soit la forme, et nous pouvons en demander la
preuve à tout moment. Un test sanguin peut être exigé.
D’où elle sort ces âneries, bon sang ? Sans rire ! Elle pense vraiment que
beaucoup de femmes voudraient tomber enceintes d’un homme qu’elles viennent
de rencontrer ? Aaaaah, mais oui, je viens de comprendre. Il s’agit d’hommes
riches et de femmes stupides. Eh bien, je ne fais pas partie de ces femmes. Dès
que mon père sera en sécurité et que sa dette sera payée, ma vie redeviendra
normale, même si elle ne l’a jamais vraiment été.

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Un coup d’œil à mon radioréveil me dit qu’il est l’heure de partir. Millie voulait
que je me rende chez le client dans une de ses limousines, mais je lui ai promis
que je m’y rendrais par mes propres moyens. C’était une de mes conditions. Elle
pense bien sûr que je vais y aller en taxi, mais j’ai décidé de prendre ma moto. Si
la première mission se passe bien, j’accepterai que les prochains clients viennent
me chercher chez moi.
Vêtue de mon jean noir le plus sexy et d’un t-shirt assorti, j’enfile mon perfecto
en cuir et mes cuissardes. Je sais que Millie me tuerait si elle me voyait habillée
ainsi, mais j’ai envie de surprendre Weston Charles Channing III.
Le message arrive enfin.
À : Mia Saunders
De : Numéro inconnu
J’ai hâte de vous rencontrer. El Matador Beach, près des marches qui mènent à
la plage. À très vite.
Un peu mystérieux, vous ne trouvez pas ? Il me demande de le retrouver à la
plage à huit heures du matin ? Je me dépêche de demander à Siri les instructions
pour m’y rendre. El Matador Beach est à dix kilomètres au nord-est de Malibu, à
une heure de route de chez moi. Je regarde mon studio une dernière fois et je me
dis que je l’ai rendu aussi douillet que possible. C’est un trente mètres carrés des
plus banals où le futon que j’ai acheté cinquante dollars au vide-grenier du coin
me sert de canapé et de lit, mais je n’ai pas les moyens de louer plus grand. Les
murs sont d’un beige doux, et même si les meubles sont loin d’être assortis,
l’ensemble est plutôt mignon.
C’est le premier appartement où je me suis sentie chez moi et, maintenant, je
dois le quitter. Je vide la bouteille d’eau posée sur la table dans le bambou qui
est censé porter bonheur. S’il a de la chance, il survivra. Au moment où je passe
la porte de chez moi, je me rends compte de tout ce que cette pauvre plante et
moi avons en commun. J’espère que, moi aussi, je survivrai en son absence.
*
* *
Les gravillons du parking crépitent sous les roues de Suzi. Je m’arrête devant la
rambarde surplombant le vide et j’aperçois les marches qui mènent à la petite

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plage isolée. Il n’y a qu’une seule voiture garée sur le parking – sans doute parce
que nous sommes lundi et qu’à huit heures du matin, les gens sont à leur boulot.
Je trouve un peu étrange de rencontrer mon client ici, mais au fond, cela me
plaît. La vue est magnifique. Les vagues bleues se cassent sur le rivage en
formant des nuages blancs qui s’éparpillent en s’écrasant sur le sable. Depuis
que j’ai emménagé à Los Angeles il y a six mois, je ne suis allée à la plage
qu’une seule fois. Je suis venue ici pour percer dans le milieu du cinéma, pas
pour la baignade. D’ailleurs j’aurais pu aller n’importe où – je voulais surtout
quitter Las Vegas aussi vite que possible. Dans ma tête, l’océan était l’opposé de
la sécheresse du désert de Vegas, et c’est ce contraste qui m’a plu.
J’aperçois un surfeur au loin, seul dans les vagues, et je le regarde glisser sur les
rouleaux comme un pro. Je ne vois personne d’autre sur la plage, et en dehors de
Suzi et de la Jeep, le parking est vide. Peut-être qu’il n’est pas encore arrivé ?
Le surfeur prend une vague qui l’amène jusqu’à la plage et il descend
tranquillement de sa planche. Il doit venir souvent ici ou être prof ? Pourtant, je
ne vois pas de cabanon indiquant qu’il y aurait une école dans le coin. L’homme
secoue la tête pour s’ébrouer et il détache la leash qui relie la planche à sa
cheville. Je suis trop loin pour distinguer ses traits, même lorsqu’il regarde dans
ma direction. Je relève la visière de mon casque pour mieux le voir au moment
où il défait sa combinaison, révélant une masse mouillée, épaisse et bronzée, de
muscles exquis. Il dégage le haut de son corps de la combi et la laisse pendre à
sa taille, puis il prend sa planche et remonte la plage en trottinant.
Fascinée, je le regarde approcher en reluquant ses pectoraux angulaires et ses
abdos sculptés, je salive en remarquant les grains de sable collés sur sa peau à
l’endroit où le V de son bassin disparaît dans sa combinaison. Je me demande
quel goût aurait sa peau si je la léchais…
Je suis soudain victime d’une grosse bouffée de chaleur quand il gravit les
marches. Mon cœur martèle dans mes oreilles et j’ai l’impression que c’est
l’océan qui rugit dans mon casque – comme quand vous êtes en voiture et que
quelqu’un ouvre une fenêtre.
Lentement, j’enlève mon casque et secoue la tête pour libérer mes cheveux. Je
retiens mon souffle lorsque le surfeur s’arrête en haut des marches et me fixe

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avec des yeux intenses et avides. Ses cheveux trempés gouttent sur ses épaules
avant de ruisseler sur un torse digne d’une statue grecque. Il me reluque de bas
en haut, s’arrêtant sur ma poitrine avant de croiser mon regard.
– Quelle belle surprise ! dit-il en souriant.
– Quelle surprise, en effet ! je réponds en me léchant les lèvres.
Il se dirige vers la Jeep grise et je me dis que ce n’est pas une voiture très chère
pour quelqu’un qui est prêt à dépenser cent mille dollars pour vingt-quatre jours
avec moi. Cela dit, celle-ci n’a pas de toit, ce qui lui permet d’y mettre sa
planche de surf sans problème. Est-ce que c’est léger, une planche de surf ? Je ne
le pensais pas, mais à le voir faire, ça semble plus léger qu’une plume. Il cale la
planche à l’arrière de sa voiture et je frissonne en voyant ses biceps se
contracter. Il doit mesurer plus d’un mètre quatre-vingts et il a le corps d’un
nageur qui fait quelques heures de musculation par semaine.
– Vous êtes Mia ?
Je descends de ma moto et me dirige vers lui en prenant soin de me déhancher.
Son regard pétillant me dit qu’il apprécie.
– C’est bien moi. Vous êtes Weston Charles Channing troisième du nom ? je
réponds en levant trois doigts.
Il rit doucement en s’adossant à sa Jeep, m’offrant une vue encore plus attirante
de son torse nu. Merde, il est magnifique.
– Trois, répond-il en imitant mon geste. Mes amis m’appellent Wes.
– Et… sommes-nous amis ? je demande d’une voix moqueuse.
– Je l’espère, Mademoiselle Mia, répondit-il en me faisant un clin d’œil.
Il me tourne le dos pour fouiller dans sa Jeep et en sort un t-shirt blanc. Il
l’enfile, recouvrant son corps splendide, et je suis à deux doigts de le remercier,
car la Barbie en moi disparaît pour laisser mon cerveau reprendre sa place.
– Vous êtes prête ? demande-t-il.
– Je suis à vos ordres, après tout c’est vous qui payez, je réponds en souriant.
Wes me regarde de nouveau de haut en bas, puis il secoue la tête.
– J’aurais bien proposé de vous emmener, mais vous êtes déjà véhiculée, on
dirait.
– En effet. Je vous suis.
*

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*
* *
Le temps que nous arrivions à sa maison de Malibu, ma libido est de nouveau
sous contrôle, même si je pense qu’il n’en faudra pas beaucoup pour qu’elle
redémarre au quart de tour. Le portail s’ouvre, et je suis la Jeep le long d’une
allée qui serpente jusqu’à sa maison. Ce n’est pas tout à fait un chalet, mais son
architecture est plutôt montagnarde. Elle est en pierre, avec des poutres
apparentes, et les arbres qui l’entourent la dissimulent pour partie.
J’enlève mon casque et nous gravissons les marches en pierre. La porte d’entrée
n’est pas fermée à clé – peut-être les hauts grillages et les portails qui clôturent
les propriétés de Malibu suffisent-ils à protéger leurs habitants. Ou peut-être y a-
t-il des vigiles cachés dans les fourrés.
Nous pénétrons dans une immense pièce avec un parquet en merisier. D’épais
tapis de couleur, rustiques, s’étalent un peu partout, et les canapés rouge
bordeaux ont l’air si moelleux que j’ai envie de me jeter dessus. Tous les murs
ont des baies vitrées, sauf celui où est fixé un gigantesque écran télé. Il y a une
bibliothèque pleine de DVD et de livres, des cadres et des œuvres d’art partout,
et une quantité impressionnante de plantes. Je ne m’attendais pas à ça chez un
homme aussi jeune, et je prends note de lui demander son âge ainsi que son
métier – il faut être brillant ou avoir hérité d’une fortune pour avoir une aussi
belle baraque.
– Cette maison est incroyable, je dis en sortant sur le balcon en bois et en
découvrant la vue sur les collines.
Je vis dans le centre de Los Angeles et je n’ai guère l’occasion de voir de tels
paysages.
Wes sourit et prend ma main. La sienne est chaude, douce et confortable.
– Venez, je vais vous montrer pourquoi j’ai acheté cette maison.
Il me guide le long du balcon qui entoure la maison, et lorsque nous arrivons de
l’autre côté, la vue me coupe le souffle.
– Waouh…
Il serre ma main plus fort et je frissonne. Je suis face à l’océan Pacifique, et j’ai
l’impression que rien ne m’en sépare – que je pourrais plonger depuis le balcon

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dans les vagues bleues et blanches. Wes se rapproche de moi et pointe du doigt
une petite plage nichée entre deux falaises.
– Là-bas, c’est El Matador Beach, chuchote-t-il.
Il est si près de moi que son souffle chatouille mon cou.
– C’est…
Je ne trouve plus mes mots.
– Incroyable, je sais, dit-il comme s’il découvrait la vue.
Je suis touchée qu’il continue d’être émerveillé par la vue alors qu’il l’a tous les
jours sous les yeux. Peut-être n’est-il pas un petit héritier qui pense que tout lui
est dû, finalement.
– Maintenant, j’aimerais qu’on se tutoie. Après tout, on va passer les prochains
vingt-quatre jours ensemble. Viens, je vais te montrer ta chambre, annonce-t-il.
Nous passons devant d’innombrables pièces dont je n’aperçois que brièvement
l’intérieur. Je suis surprise qu’il continue de me tenir la main, mais je ne dis rien,
car ça me plaît – je me sens en sécurité et ça fait des années que je n’ai pas
ressenti ça.
Il finit par me lâcher pour ouvrir une double porte en chêne massif.
– Voilà ta chambre, dit-il en souriant.
La pièce est totalement blanche. Tout est blanc : les meubles, le linge de lit,
même les œuvres d’art aux murs, qui sont dans divers tons de blanc avec de
minuscules éclats de couleur. Le contraste avec les couleurs riches du reste de la
maison est si frappant que je fronce les sourcils sans m’en rendre compte.
– Tu n’aimes pas ? demande-t-il, l’air déçu.
Il entre dans la chambre et ouvre une autre porte donnant sur un dressing plein
de vêtements de couleurs vives. Voilà qui est mieux. Je pourrai emménager dans
le dressing si le blanc m’énerve – ce qui est sûr, c’est qu’il est assez grand.
– C’est magnifique, merci, je dis en allant m’asseoir sur le lit. Alors, explique-
moi ce que je fais ici.
Il s’assied sur un fauteuil et inspire lentement. Il pose son coude sur l’accoudoir
et promène ses doigts sur son menton.
– C’est ma mère, dit-il comme si ça expliquait tout. Je suis invité à plusieurs
événements à la fois professionnels et personnels durant les prochaines

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semaines. En y allant avec toi, je n’aurai pas à me soucier des croqueuses de
diamants qui ont l’habitude de se jeter sur moi, et je pourrai rencontrer les
personnes qui m’intéressent.
– Donc, il te faut une garde du corps pour éloigner les vautours qui te tournent
autour ? je demande en riant.
Je croise les jambes et j’enlève mes cuissardes, Wes hoche la tête en me
regardant faire. Je remue les orteils pour les dégourdir et je comprends pourquoi
il sourit jusqu’aux oreilles. J’ai oublié que j’avais mis mes chaussettes de Noël,
aujourd’hui. Elles sont rayées vert et rouge et elles m’arrivent au genou. Si ça, ce
n’est pas un faux pas… J’ai sans doute enfreint une des règles de Millie avec
mes affreuses chaussettes. Je me mords la lèvre et je lève les yeux vers Wes qui
continue de sourire.
– Je me suis habillée dans le noir, dis-je sur la défensive.
– Je vois ça, dit-il en riant. Je trouve ça chou.
– Chou ? Tu sais qu’aucune fille de plus de cinq ans n’a envie d’être décrite
comme chou ? je lui lance en fronçant les sourcils. Eh bien, tant pis pour toi,
mon pote. Tu l’as dit toi-même, je suis là pour vingt-quatre jours. Je ne suis ni
reprise ni échangée ! je m’exclame en me levant et en posant mes mains sur mes
hanches.
Il recule dans son fauteuil et croise ses jambes au niveau des chevilles. Mince, je
n’avais pas vu ses pieds ! Ils sont longs et fins, et il y a de petits grains de sable
collés sur le dessus. Je ne sais pourquoi, c’est ce qui réveille brusquement ma
libido – c’est injuste, même ses pieds sont sexy.
– Détends-toi, Mia. J’ai dit que tes chaussettes étaient chou, je n’ai pas parlé de
toi. Tu es sans doute la femme la plus belle et séduisante que j’aie jamais vue.
J’ai hâte de te voir nue, dit-il en souriant.
J’inspire lentement puis je retiens mon souffle lorsqu’il se lève. Nos yeux ne se
quittent pas et j’ai l’impression que nous passons des heures à nous regarder.
– Euh… eh ben… je suis contente que tu me trouves suffisamment jolie pour
être ici. Comme je l’ai dit, je suis là pour un mois et… attends. Je te demande
pardon ? Tu as hâte de me voir nue ? Ce n’est pas inclus dans le contrat !

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– Je sais parfaitement que ce n’est pas dans le contrat, répond Wes en venant
vers moi.
Il passe sa main dans mon dos et me plaque contre lui. Je retiens mon souffle et
pousse un cri aigu en sentant une très grosse érection contre mon ventre. Ses
yeux se promènent sur mon visage et il est si près que son souffle chatouille mes
lèvres.
– Crois-moi, si tu te mets à poil pour moi, ce ne sera pas parce que je te paie, dit-
il avant de déposer un minuscule baiser sous mon oreille.
Je reste parfaitement immobile alors que des décharges de désir enflamment mes
veines. Chacun de mes nerfs est sur le qui-vive, attendant que Wes me touche de
nouveau. Sa mâchoire râpe ma joue, déclenchant une nuée de frissons qui se
précipitent entre mes jambes.
– Tu te déshabilleras pour moi quand tu seras prête, chuchote-t-il avant de
presser ses lèvres sur les miennes.
Il recule la tête et je découvre son regard brûlant.
– Je vais travailler dans mon bureau, maintenant. Fais comme chez toi, tu peux
bronzer, te baigner… comme tu veux. Il faut que tu sois en robe de soirée à dix-
sept heures pétant. Nous avons un cocktail dînatoire, ce soir.
Il effleure une dernière fois ma hanche, puis il tourne les talons et disparaît,
laissant sur ma peau son empreinte brûlante.
Merde. Ça ne va peut-être pas être si simple, finalement.

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Chapitre 3

Je fais quelques longueurs dans la piscine chauffée et je peaufine mon


bronzage. Weston, ou Wes, n’a toujours pas réapparu. Je l’imagine travailler
derrière une de ces portes fermées devant lesquelles je suis passée.
Je viens de sortir de l’eau lorsqu’une petite femme rondelette, vêtue d’un
pantalon vert kaki et d’un pull noir, arrive avec un plateau. Je cherche vite ma
serviette avant de me rappeler que je n’en ai pas pris, et elle sourit en allant à un
grand panier en osier dont elle extirpe une immense serviette de plage
multicolore.
– Tenez, mon petit, dit-elle avec un adorable accent britannique.
Elle me fait penser à Mary Poppins, mais avec des cheveux poivre et sel et
quelques kilos en plus.
– Bonjour, je suis Mia, dis-je en m’enveloppant dans la serviette pour cacher
mon minuscule bikini rouge.
Il y en avait d’autres, mais ils étaient tous aussi petits les uns que les autres, alors
j’en ai choisi un au hasard.
Mary Poppins sourit en me tendant sa petite main.
– Je suis Miss Croft. Je m’occupe de la maison, je cuisine, je fais le ménage et
tout le reste, dit-elle.
Je hoche la tête en essorant mes cheveux avant de les relever en queue-de-
cheval.
– Je voulais vous apporter à manger, me présenter et vous dire que si vous avez
besoin de quoi que ce soit, il vous suffit d’appuyer sur le bouton Aide de
l’interphone. Il y en a dans toutes les pièces.
En effet, elle désigne un interphone sur le mur du patio.

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– Chaque jour, je vous donnerai un planning avec le programme de monsieur
Channing pour que vous sachiez à quelle heure vous devez être prête. Je pourrais
le glisser sous votre porte, le matin ?
Je hausse les épaules. Miss Croft me plaît. Comme elle, je suis une employée –
la différence, c’est que je suis embauchée pour être jolie et faire peur aux
pimbêches. Chacune sa mission.
– Comme ça vous arrange, je ne suis pas difficile.
Miss Croft me regarde des pieds à la tête et penche la tête sur le côté en souriant.
– J’ai l’impression que vous êtes tout sauf facile, mon petit, dit-elle en me faisant
un clin d’œil. On devrait s’amuser, ajoute-t-elle en tournant les talons avant de
disparaître dans la maison.
Qu’est-ce qu’elle a voulu dire ?
Peu importe. Je regarde de nouveau le superbe environnement et je me dis que
c’est de l’argent facile. Le mec est canon, je ne vais pas tomber amoureuse de
lui, la maison est sublime et j’ai une tonne de nouvelles fringues. Pour l’instant,
c’est le plan du siècle.
Par la porte ouverte, je vois l’horloge de la cuisine. J’ai une heure et demie pour
me préparer avant que mon surfeur beau gosse et plein aux as m’emmène dîner.
Je vais lui en mettre plein la vue.
*
* *
Monsieur Channing frappe une fois à ma porte et entre sans que je l’y aie invité.
Note à moi-même : habille-toi dans le dressing ou dans la salle de bains si tu ne
veux pas te donner en spectacle devant ton boss. Quelque chose me dit que ça ne
le dérangerait pas du tout. En tout cas, c’est ce que je lis dans son regard
lorsqu’il m’inspecte des pieds à la tête. De son côté, le spectacle n’est pas mal
non plus. Il est en costume noir et sa chemise blanche n’est pas boutonnée
jusqu’en haut, laissant entrevoir un beau cou musclé et viril. Il est tout
simplement délicieux. Il me présente trois cravates tout en étudiant ma tenue.
Je porte une robe aubergine qui tombe en deux pans sur mes seins, et le milieu
est ouvert pour révéler un maximum de décolleté. Les pans se croisent sur ma
taille, laissant voir mes hanches, et le dos est entièrement nu. Des colliers de

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perles suivent les mouvements de la robe et tombent dans mon dos jusqu’au
creux de mes reins. Je n’ai jamais porté de robe aussi élégante, sexy et chère. J’ai
l’impression d’être Elizabeth Taylor dans une de ses pubs pour les diamants. Le
dos nu ne permet pas de porter de soutien-gorge, mais la robe est si bien faite
qu’elle tient bien mes seins en place, même si j’ai une poitrine plutôt généreuse.
Ça fait longtemps que je n’ai pas été et que je ne me suis pas sentie aussi belle.
– Waouh, dit Wes. Euh… laquelle ? demande-t-il en levant les trois cravates et
en se raclant la gorge.
Je souris, ravie de surprendre un homme habitué à repousser des hordes de belles
femmes. Je m’en sors plutôt bien pour une petite motarde, non ?
Ses cravates sont jolies et il y en a une qui va mieux avec ma robe. Cependant,
au lieu de la lui prendre, je saisis le col de sa chemise et le sors pour qu’il repose
sur sa veste.
– Je te préfère sans cravate. Tu es canon.
Après tout, je n’ai pas de raison de mentir, il est superbe.
Il dégaine un sourire si sexy que je mouille légèrement. S’il continue comme ça,
je vais lui sauter dessus. Comme me l’a si gentiment rappelé Ginelle l’autre jour,
ça fait des mois qu’un homme ne m’a pas touchée. Ce qu’elle ne sait pas, c’est
qu’en vérité ça fait presque un an. Après Blaine, j’en ai eu assez des mecs et je
me suis persuadée que je pouvais vivre sans eux si j’avais un bon vibromasseur
et suffisamment de glace au chocolat. Maintenant, face à cet Apollon, je ne suis
plus certaine que le célibat ait été une bonne idée, parce que je suis prête à lui
arracher ses vêtements.
– Ma mère n’apprécierait pas, chuchote-t-il en saisissant mon poignet pour me
tirer à lui.
Je vacille légèrement sur les talons aiguilles que sa styliste a choisis et je tombe
sur lui. Je me raccroche à son torse, sentant ses muscles d’acier à travers son
costume.
Il baisse les yeux tandis que je lève les miens. Je le défie du regard.
– Tu fais toujours ce que te dit ta maman ?
Il éclate de rire et le vert de ses yeux devient encore plus intense. Je pourrais me
perdre dans son regard pendant des jours entiers.

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– Non, mais c’est elle qui organise le cocktail ce soir, et j’aime lui faire plaisir,
répond-il avant de baisser sa tête dans mon cou. Waouh, tu sens divinement bon.
Ses lèvres effleurent ma mâchoire.
Des frissons parcourent mon corps depuis la racine de mes cheveux bouclés à la
pointe de mes pieds.
– Et tu es magnifique, ajoute-il en m’embrassant sur le coin de la bouche.
Je me retiens de grogner, frustrée de ne pas sentir ses lèvres sur les miennes.
Cependant, ça fait sans doute partie de son jeu de séduction, un jeu pour lequel il
est doué, à l’évidence.
– On devrait y aller, je chuchote.
Wes sourit, prend ma main et tourne les talons en me tirant derrière lui, me
laissant à peine le temps de saisir la pochette qui contient mon téléphone, mon
rouge à lèvres et ma carte d’identité.
Miss Croft nous attend dans l’entrée, une poignée de mouchoirs de poche dans la
main. Elle regarde ma robe, choisit celui qui y est assorti et s’affaire à le glisser
dans la poche de la veste de Wes.
– Et voilà, dit-elle en lissant son costume. Tu es splendide, mon garçon.
Ses yeux brillent comme si elle préparait son propre fils pour son bal de promo.
Je trouve ça un peu bizarre, mais je n’en dis rien et je la regarde nouer la cravate
de Weston.
– Merci, Judi, dit-il avant de l’embrasser sur la joue.
Il me regarde de la tête aux pieds avant de rediriger son attention sur sa
gouvernante.
– La robe est parfaite, dit-il avant de me mener à la limousine garée devant la
maison.
C’est Judi qui a acheté mes vêtements ? Toutefois, je n’ai pas le temps de
m’attarder sur ce point car je suis face à la limousine la plus longue que j’aie
jamais vue.
– Tu es déjà montée dans une limousine ? demande Wes en me regardant d’un
air amusé.
La réponse est non, bien évidemment, mais je refuse de le lui dire.
– Bien sûr, je dis en ouvrant la portière.

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Wes met sa main sur sa bouche en riant et je grimace, ne comprenant pas la
blague.
– Alors pourquoi tu veux à monter à l’avant ? demande-t-il en désignant la porte
que je viens d’ouvrir.
Je regarde à l’intérieur et je vois le volant du conducteur. Lorsque je me
redresse, je réalise qu’un homme en uniforme de chauffeur tient la portière
arrière ouverte.
– Je le savais, je voulais simplement demander au chauffeur où nous allons, dis-
je en me sentant rougir.
– Mais bien sûr, dit-il en posant une main sur le creux de mes reins pour
m’accompagner.
Une fois à l’intérieur, il me propose une coupe de champagne que j’accepte
volontiers.
– Merci.
Il sourit et se verse une coupe, puis nous trinquons.
– À quoi trinquons-nous ?
– À l’amitié ? répond-il en souriant avant de poser sa main chaude bien trop haut
sur ma cuisse pour que nous puissions parler d’amitié. Aux bons amis, ajoute-t-il
en regardant ma bouche.
– Des amis qui se veulent du bien ? je demande en haussant un sourcil.
Je croise les jambes et sa main remonte sur ma cuisse. Il plonge son regard dans
le mien et mon sang s’embrase.
– Bon sang, je l’espère, chuchote-t-il en approchant son visage.
Je me dépêche de boire une gorgée de champagne, à la fois pour stopper le cours
de cette conversation et pour éviter de devenir folle.
Wes recule dans son siège, grogne et remet son érection en place – pas très
subtil. Lorsque je glousse ouvertement, il me fusille du regard puis il secoue la
tête en souriant. Ce jeu du chat et de la souris va me plaire – même si je ne sais
pas encore qui est le chat et qui est la souris.
La villa où se tient le cocktail est dans les Malibu Hills, près de chez Wes. Elle
est immense et remplie de gens en tenue de soirée, des verres à la main. La

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plupart des femmes semblent avoir mon âge, ce qui est étrange car ce n’est pas le
cas des hommes.
– Tu fais quoi dans la vie, en fait ? je chuchote en le suivant au bar.
Je ne réalise que maintenant que je ne sais rien de ce que je suis censée faire ce
soir, à part éloigner les pimbêches hollywoodiennes.
– Je suis scénariste, dit-il l’air de rien, en attendant que le barman nous
remarque.
Je trouve un peu prétentieux d’avoir un véritable bar chez soi, mais après tout, je
ne connais rien à ce milieu. La pièce est tellement vaste que c’est peut-être
normal. D’ailleurs, c’est une salle de bal avec des chandeliers suspendus au
plafond, des miroirs et des portes vitrées donnant sur une terrasse avec vue sur
l’océan. Cette personne doit être supra-riche – à côté, la maison de Wes paraît
modeste.
– Tu veux dire pour des pièces de théâtre ? je demande en prenant la coupe de
champagne qu’il me tend.
Je balaie la salle du regard, repérant immédiatement un groupe de filles prêtes à
se jeter sur Wes.
– Non, pour des films.
– Ah, tu penses que j’en connais ?
– Sans doute, dit-il en buvant une gorgée de liquide ambré.
L’odeur du whisky me monte au nez et je grimace sous l’effet des mauvais
souvenirs qui me viennent à l’esprit.
– Qu’est-ce qu’il y a ? demande Wes en posant sa main sur mon épaule et en me
regardant d’un air inquiet.
J’inspire profondément en essayant de ne pas penser au fait que c’est
l’alcoolisme et les paris compulsifs de mon père qui m’ont mise dans ce pétrin.
– Rien, je réponds en secouant la tête.
Il lève mon menton et plonge son regard dans le mien.
– Ce n’est pas rien, prévient-il, et je ne te le demanderai pas deux fois.
– Je hais l’odeur du whisky, je réponds en haussant les épaules.
Il pose immédiatement son verre sur le bar et fait signe au barman de revenir.
– J’ai changé d’avis, je vais prendre un Gin Tonic, s’il vous plaît.

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– Tu n’es pas obligé de faire ça…
Je ne termine pas ma phrase, car il pose sa main sur ma joue et promène
délicatement son pouce sur ma lèvre.
– J’en ai envie. Maintenant suis-moi, je vais te présenter à ma mère.
Cette fois-ci, je dois faire un effort surhumain pour le suivre. Je meurs d’envie
de sortir en courant sur la terrasse et de me précipiter jusqu’à l’océan pour m’y
noyer. Qu’est-ce que je fais à une soirée comme celle-ci, au bras d’un homme
comme Wes, qui écrit des films et qui a plus d’argent que je n’en verrai de toute
ma vie ? Je suis la fille d’un joueur obsessionnel, abandonnée par sa mère, qui
travaille surtout comme serveuse en rêvant d’obtenir n’importe quel rôle
d’actrice.
J’entends des bribes de conversation tandis que Wes me guide à travers la foule
– vacances exotiques, film d’action, stars d’Hollywood et scandales financiers.
Les hommes me regardent chaleureusement lorsque je passe devant eux, leurs
femmes ont l’air moins amicales. Apparemment, la dernière mode est aux lèvres
boudeuses et à l’anorexie, deux traits que je n’ai pas, et la robe que je porte ne
laisse aucune place à l’imagination.
À l’autre bout de la salle se trouve un coin avec des fauteuils en cuir marron et
de grandes bibliothèques. Une femme d’une cinquantaine d’années discute avec
un homme qui ressemble étrangement à Wes. Il est grand et blond comme lui,
mais ce gentleman a davantage le physique d’un quaterback alors que Wes est
taillé comme un nageur-surfeur. Son costume gris foncé s’assortit à merveille à
la robe rose pâle de sa femme.
– Mère, Père, dit Wes en s’approchant du couple.
Les cheveux de la femme sont blond clair, presque blancs, et relevés en chignon
banane. Ses yeux sont bleu turquoise et ses lèvres charnues, comme celles de son
fils. Elle porte du rouge à lèvres mauve et des perles ornent ses oreilles et son
cou. Son look est classique et élégant.
– Fiston, dit monsieur Channing Senior en mettant une tape dans le dos de son
fils.
Sa mère l’embrasse sans lui toucher les joues. D’habitude, je trouve ça
affreusement prétentieux, mais elle prend ensuite la tête de son fils dans ses

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mains et lui sourit chaleureusement.
– Je vois que tu as suivi ma recommandation, chuchote-t-elle à son fils avant de
se tourner vers moi.
L’angoisse que je ressentais avant de rencontrer Wes est de retour, mais cette
fois-ci elle est accompagnée d’un désir de vengeance. C’est elle qui m’a choisie
? Je savais que Tante Millie et elle se connaissaient, mais n’est-ce pas un peu
étrange qu’une mère choisisse l’escort de son fils ?
Wes se tourne vers moi et passe sa main dans mon dos, déclenchant
immédiatement une bouffée de chaleur. J’avais oublié que mon dos était nu en
dehors des fines bretelles qui s’y croisent. Je frissonne et me rapproche de lui.
– Mère, Père, je vous présente Mia Saunders, dit-il tandis que je leur serre la
main. Mia, voici Weston Channing Deux et ma mère, Claire.
– Je suis ravie de vous rencontrer, Monsieur et Madame Channing.
La mère de Wes croise les bras sur sa poitrine et touche sa joue avec le bout de
ses doigts. Ses joues rosissent légèrement et elle sourit si largement que je finis
par croire que j’ai raté une blague.
– N’est-elle pas resplendissante ? demande-t-elle à son mari avant de me faire un
clin d’œil.
– Euh, merci… je réponds, ce qui fait rire son père.
– C’est un plaisir de vous rencontrer, Mademoiselle Saunders, répond-il.
– Oh, appelez-moi Mia, je vous en prie.
Il penche la tête sur le côté, puis il prend le bras de son fils. Apparemment, la
conversation est terminée.
– Maintenant, fiston, parle-moi de ton dernier projet. On me dit qu’ils veulent te
proposer trois pour cent du budget. Ça ne fait que trois millions de dollars alors
qu’ils se sont fait des centaines de millions sur le dernier Honor de la série. Il
faut que tu négocies plus, fils.
La série Honor. Weston Channing Trois a écrit la foutue série Honor ? Nom
d’un chien ! Tous ces films ont eu un immense succès ! Le premier est sorti il y a
trois ans et, depuis, il en sort un par an. Sa façon de raconter l’histoire d’un
soldat qui cherche l’amour de sa vie tout en y ajoutant une bonne dose de sang,

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de violence et d’explosions, en plus de scènes de sexe super-chaudes, a fait
battre à ces films tous les records du box-office !
– … Ils vont me donner dix pour cent du budget global et la possibilité de diriger
certaines scènes du film, dit Wes.
Je viens de réaliser que je vais passer un mois aux côtés d’une star du cinéma
quand deux femmes approchent de Wes. L’une d’elle entortille une mèche
blonde autour de son doigt tandis qu’elles attendent qu’il les remarque. La
blonde est vêtue d’une robe bustier dorée avec des faux seins rapprochés et
remontés autant que possible. Je la regarde de la tête aux pieds et je grimace.
Elle est si maigre que je vois toutes ses côtes à travers sa robe. La brune n’est
pas mieux : elle a aussi des faux seins, dont l’un a l’air plus gros que l’autre, et le
tissu de sa robe ultra-moulante est presque transparent. Ses tétons pointent et je
suis à deux doigts de lui dire de les réchauffer un peu avant de se ridiculiser,
mais quelque chose me dit que c’est l’effet qu’elle désire.
À toi de jouer, Mia. À moi de mériter les cent mille dollars que Wes me paie,
même si l’idée de donner autant d’argent à Blaine tous les mois me donne la
nausée. Lorsque mon père ira mieux, je ne perdrai pas de temps à l’engueuler de
s’être mis dans ce pétrin.
– Chéri, il me semble qu’il y a des gens à qui tu dois parler, là-bas, je dis en
montrant l’autre côté de la pièce tout en lui faisant un signe de tête pour qu’il
regarde derrière lui.
Wes comprend mon signal – très subtil n’est-ce pas – et regarde par-dessus son
épaule. Pimbêche une et deux se dépêchent de mettre leurs faux nichons en avant
et de lui faire une moue pleine de collagène.
Wes se contente de passer son bras autour de ma taille.
– Qu’est-ce que je ferais sans toi ? demande-t-il en effleurant ma joue avec son
nez.
– Ce n’est pas un travail facile, Chéri, mais il faut bien que quelqu’un le fasse,
dis-je sur un ton théâtral en souriant jusqu’aux oreilles.
Wes se penche pour m’embrasser dans le cou et je souris encore plus largement.
– Mmm, merci, chuchote-t-il avant de s’éloigner. Mère, Père, nous vous verrons
au gala de charité la semaine prochaine, annonce-t-il.

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– Ah non, non, non, cela ne me convient pas du tout, répond sa mère en se
précipitant sur nous. Je veux passer plus de temps avec Mia, mon chéri, dit-elle.
Son sourire est si plein d’amour que c’est comme si la présence de son fils était
la chose la plus précieuse sur terre. Hélas, je n’ai jamais connu cela.
Je sens Wes se crisper à mes côtés.
– Mère…
Elle lisse le col de sa veste, refait un de ses boutons, et je ris doucement en la
voyant faire.
– Oh, Chéri, détends-toi. Je sais que Mia n’est qu’une amie, il n’y a pas de mal à
ce qu’elle brunche avec nous dimanche, si ? demande-t-elle sur un ton qui n’en a
pas l’air mais qui est clairement culpabilisateur.
Je me demande soudain si elle est catholique – ma grand-mère parlait sur le
même ton et c’était généralement suivi d’une citation de la Bible.
Wes soupire et secoue la tête.
– D’accord, on viendra. Même heure que d’habitude ?
– Oui, c’est bien mon garçon, tu es mignon, répond-elle en lui refaisant la bise
sans lui toucher les joues.
Elle se tourne vers moi et fait de même.
Nous tournons les talons et partons vers le bar.
– J’ai besoin d’un verre, dit-il immédiatement, ce qui me fait éclater de rire.
Qu’est-ce qui est si drôle ?
– Tu fais toujours ce que te dit ta mère ! je m’exclame. Tu es vraiment le parfait
fils à maman !
– Roh, tais-toi ou je vais regretter ma décision. J’aurais pu choisir une Barbie
écervelée, tu sais, dit-il en haussant un sourcil.
Son regard enjoué me confirme qu’il plaisante. Je suis sur le point de répondre
lorsque je vacille sur mes talons hauts. Il me rattrape en me tirant vers lui et je
pose ma main sur son épaule. Son regard s’illumine instantanément. Il se lèche
les lèvres et je ne peux m’empêcher de l’imiter. La chaleur de sa main sur le
creux de mes reins pénètre sous ma peau, et tout disparaît autour de nous. Il ne
reste que Weston et moi, et les battements de son cœur contre ma poitrine.
**Boum boum** **boum boum** **boum boum**

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– Je sens que tu vas me causer des ennuis toi, dit-il en s’approchant.
Nous sommes à quelques millimètres l’un de l’autre, au milieu d’un cocktail
d’affaires, plantés devant le bar à la vue de n’importe qui. Mieux vaut changer
de sujet.
– Et toi, tu n’es qu’un fils à maman, je répète en reculant aussi vite que mes
chaussures me le permettent pour m’asseoir sur un tabouret.
– C’est comme ça que tu veux la jouer, alors ? demande-t-il en souriant et en
caressant son menton. Tu ne paies rien pour attendre, Mia.

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Chapitre 4

Nous rentrons chez Wes quelques heures plus tard et, faisant mine d’être
fatiguée, je me précipite dans ma chambre et ferme la porte à clé. Je tends
l’oreille quelques secondes pour savoir s’il me suit. J’ai beau mourir d’envie
d’être avec lui – sous la couette –, je dois garder mes distances pour ne pas
m’attacher. Wes est sympa, il a les pieds sur terre, et ce soir il a fait l’effort de
m’inclure dans ses conversations professionnelles. Je ne dois pas perdre de vue
ce que je fais là. Je ne suis guère plus qu’une employée.
Cela dit… est-ce que je ne peux pas m’amuser un peu ? Je suis majeure et il est
canon. Nous sommes jeunes et nous allons nous côtoyer quotidiennement
pendant presqu’un mois. Vu l’alchimie qu’il y avait entre nous ce soir, je suis
certaine que le sexe serait génial. Ça me ferait du bien, d’ailleurs ça fait
presqu’un an que je n’ai pas eu de rapport sexuel et mon vibromasseur ne me fait
plus le même effet. J’ai besoin de ce lien physique et charnel, de sentir un corps
chaud et viril sur le mien.
Je regarde les différents tons de blanc qui m’entourent et ce lit moelleux et
duveteux qui ressemble à un nuage. Je parie qu’il est confortable. Wes n’est pas
le genre de mec qui donne des draps bon marché à ses invités. Je fais les cent pas
dans la chambre en réfléchissant à ce que je vais faire. D’après le radioréveil, il
est une heure du matin. Nous avons passé une excellente soirée. Je me suis
amusée à compter le nombre de fois où une croqueuse de diamants a tenté
d’approcher Wes et combien de fois l’une d’entre elles m’a fusillée du regard. Je
comprends pourquoi il m’a engagée, maintenant. Jamais il n’aurait pu parler aux
producteurs, aux directeurs et aux acteurs si je n’avais pas été avec lui.

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Wes était clairement dans son élément. Il a abordé les gens avec une élégance
naturelle et a pris soin de ne jamais passer plus de temps avec une personne
qu’avec une autre. Il doit avoir une méthode précise, mais je ne lui ai pas posé la
question. Quant à moi, je me suis contentée de le suivre et d’éloigner les harpies.
Chaque fois qu’une Barbie l’a approché, je me suis présentée et j’ai pris soin de
toucher Wes et de me coller à lui jusqu’à ce qu’elle comprenne le message et
qu’elle s’éloigne en grimaçant. Toutes les femmes ont agi ainsi. À part la mère
de Wes, je n’ai pas rencontré une seule femme sympathique. Il semblerait que,
dans ce milieu, les hommes d’un certain âge aiment avoir une paire de seins
accrochée à leur bras. Les nanas restent plantées à leur côté, le regard vide
tourné vers l’océan, juchées sur leurs talons aiguilles, sirotant des coupes de
champagne qui coûtent trois fois le prix de mon futon. Sans doute boivent-elles
pour oublier.
Pourtant, en y réfléchissant, ma situation n’est pas très différente de la leur.
Techniquement, je suis avec Wes pour les mêmes raisons qu’elles sont avec
leurs vieux : l’argent. J’en ai besoin, et qu’elles en aient besoin comme moi ou
simplement envie, ça ne change rien. En pensant à ça, une certaine amertume
s’empare de moi, et toute la joie de la soirée disparaît.
Sans réfléchir, je sors de ma chambre. La maison est plongée dans l’obscurité.
Dans le salon, je me dirige vers un couloir que je n’avais pas remarqué et au
bout duquel se trouve une grande porte en bois. J’y colle mon oreille et j’entends
le son d’une télévision. Je frappe à la porte sans l’avoir véritablement décidé.
– Entre, dit Wes.
Je respire un bon coup et ouvre la porte. Les lumières sont éteintes, mais le poêle
à bois diffuse une lumière rougeâtre et chaleureuse qui se reflète sur la baie
vitrée. Les meubles sont en bois massif et sur l’un d’eux est posée une télé dont
l’image est arrêtée sur ce qui ressemble à un match de foot.
Wes est assis dans son lit et ne dit rien. Les flammes de la cheminée dansent sur
son torse nu, vacillant sur les collines et les vallées de son abdomen musclé. Ses
pecs divins me font saliver. Bon sang, ce type est une œuvre d’art. Mon cœur bat
si fort que je ne serais pas surprise que Wes l’entende.

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Plutôt que de retourner dans ma chambre et de faire semblant de m’être perdue,
comme je devrais sans doute le faire, je passe mes mains dans ma nuque et
défais ma robe. Elle tombe au sol en un mouvement fluide, formant une flaque
de soie violette. Wes ne bouge pas. Je dégage mes cheveux pour les passer dans
mon dos. Je suis parfaitement immobile, nue devant lui, en string de dentelle
noire et en talons aiguilles.
– Viens ici, ordonne Wes d’une voix grave.
J’avance lentement vers lui et je m’arrête à un demi-mètre de son lit, sentant le
feu réchauffer mon corps. Cependant, c’est le regard de Wes qui est brûlant,
faisant pointer mes tétons et fourmiller mon sexe.
– Tourne-toi, dit-il.
Je lui obéis en silence et lui tourne le dos, lui arrachant un grognement.
Quelques secondes s’écoulent sans qu’il ne se passe rien et je suis sur le point de
lui ordonner de faire quelque chose lorsque sa main effleure délicatement mon
cou. Ses doigts descendent dans mon dos, frôlant chacune de mes courbes. Je
retiens mon souffle lorsqu’un parfum d’homme et d’océan m’enveloppe, et je
ferme les yeux. Ses caresses se font moins délicates, et Wes empoigne bientôt
mes bras pour m’attirer contre lui, peau contre peau. Je sens son souffle sur mon
oreille tandis qu’il passe sa main autour de ma taille. Il empoigne fermement un
sein, et sa bouche se promène lentement sur mon cou. Il pince à peine mon téton
que je gémis.
– Chérie, il faut qu’on établisse les règles de base, tout d’abord, grogne-t-il avant
de me mordre l’épaule.
– Les règles de base ? je bégaie.
Je suis trop envoûtée par ce que font ses doigts pour comprendre ce qu’il dit.
– Règle numéro un : nous allons baiser comme des lapins, dit-il en pinçant de
nouveau mes tétons.
Je pousse un cri tandis que la chaleur entre mes jambes trempe le tissu fin de
mon string.
– C’est une règle ? je demande en haletant et en reculant pour frotter mes fesses
à son érection.
Si toutes ses règles sont comme ça, je signe.

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Wes grogne en tordant mes tétons, créant la dose parfaite de plaisir et de
douleur.
– Règle numéro deux : si nous sommes ensemble ainsi, il n’y a que toi et moi.
Nous sommes exclusifs pendant un mois.
Je me mords la lèvre et je me concentre sur le mouvement de mon bassin contre
son sexe apparemment énorme.
– D’accord.
Ses mains quittent mes seins un instant, puis elles reviennent humidifiées,
glissant de façon délicieuse sur chacun de mes tétons. Je fonds contre lui,
presque incapable de rester debout. Sans doute le sent-il, car il me plaque
fermement contre lui en continuant de tourmenter mes seins. Mon Dieu, ce mec
est mon héros – s’il continue comme ça, je vais jouir sans avoir été pénétrée. Je
tends un bras derrière pour saisir sa nuque et l’embrasser, mais il me tient trop
fort contre lui pour que je puisse mettre mon projet à exécution.
– Règle numéro trois : nous ne dormons jamais dans le même lit. Il ne faut pas se
tromper sur la nature de cette relation. Je t’apprécie beaucoup, Mia, et je ne veux
pas te faire de mal. Tu dois comprendre que je ne suis pas en mesure de t’offrir
une relation amoureuse. Tu m’entends ?
Sa main descend lentement sur mon ventre, et bientôt elle est là, là où je veux
tant la sentir.
– Putain oui, j’ai compris ! je m’exclame en avançant mon bassin contre son
doigt.
Et c’est vrai, j’ai compris. Nous voulons la même chose : de l’amitié et du plaisir
physique.
Wes rit doucement dans mon cou et son souffle me donne la chair de poule.
Soudain, il me retourne, s’agenouille et baisse mon string. Je baisse les yeux
alors qu’il lève la tête, puis il écarte mes lèvres et sa bouche s’empare de mon
sexe.
– Oh, oh, oh !
C’est tout ce que je parviens à dire.
Puis il se met à parler entre deux coups de langue, mais j’ai du mal à me
concentrer sur ce qu’il dit. Il recule la tête et j’empoigne ses cheveux pour

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l’obliger à continuer.
– Règle numéro quatre, nous ne tomberons pas amoureux.
Il replonge sur mon sexe et suce mon clitoris en le titillant avec sa langue. Je suis
à deux doigts de m’effondrer, et il m’aide à m’allonger sur le lit en laissant mes
pieds au sol.
– C’est peut-être impossible, je réponds alors qu’il s’agenouille entre mes
jambes.
Je suis à deux doigts de jouir lorsqu’il s’arrête en plein combo langue-doigt.
– Je te demande pardon ? demande-t-il sèchement.
Je saisis ses cheveux et je me relève en m’appuyant sur un coude.
– Détends-toi, Wes, c’est de ta langue que je suis amoureuse. Maintenant, lèche-
moi pour que je puisse jouir et que je te renvoie l’ascenseur.
Son sourire est si sexy que c’est tout juste si je n’ai pas un orgasme sur-le-
champ.
– T’embaucher est la meilleure décision que j’ai prise de toute ma vie, dit-il
avant de souffler sur ma chair humide.
– Prouve-le ! je rétorque en soulevant mon bassin.
Et c’est ce qu’il fait – encore et encore.
*
* *
– Pourquoi dîne-t-on avec ce mec, déjà ? je demande à Wes lorsque nous
montons dans l’ascenseur qui nous mène au rooftop du plus haut gratte-ciel de la
ville.
Ça fait six mois que j’habite à Los Angeles et je n’ai jamais dîné dans un
restaurant de luxe, ce qui me fait prendre conscience que ma vie amoureuse est
affreusement triste. Au moins, ce boulot va me permettre de goûter à de belles
choses… du moins je l’espère, mais je suppose que ça dépendra du client. Pour
l’instant, je tiens la main de l’homme le plus sexy de la planète et je m’amuse
comme une folle.
Hier soir, après qu’il m’a fait jouir plusieurs fois avec sa bouche, je lui ai rendu
la pareille en lui faisant une pipe du tonnerre. Ensuite, nous nous sommes
douchés et nous avons discuté en nous savonnant. Lorsque j’ai vu qu’il bandait

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de nouveau, je me suis agenouillée devant lui pour le sucer, puis il m’a fait
grimper aux rideaux une nouvelle fois. C’est étrange, mais j’ai réalisé seulement
ce matin que nous n’avions pas véritablement baisé, et que nous ne nous sommes
pas embrassés une seule fois. Nos ébats n’avaient rien d’émotionnel, or c’est de
loin la meilleure expérience sexuelle que j’aie jamais eue. Peut-être que c’est ça
l’astuce, justement ? Ce que Ginelle et mes autres amies ont compris et pas moi
?
Baiser… sans attache. C’est contre-nature, pour moi. J’ai beau me considérer
comme une dure à cuire, je suis quand même tombée amoureuse de tous les
hommes avec qui j’ai couché. Tous, sans exception.
Ça fait à peine vingt-quatre heures que je le connais, et je me sens mieux avec
Wes qu’avec tous les autres, parce que tout est fondé sur du respect et de l’amitié
– et une montagne d’orgasmes. Lorsque j’ai fini de me doucher, je suis retournée
dans ma chambre et je me suis laissée tomber sur le lit, la tête la première dans
l’oreiller, sur un petit nuage. Je me souviens vaguement que Wes est venu me
border et qu’il m’a embrassée sur la tempe en me souhaitant bonne nuit.
Ce matin, c’est le bruissement du programme de la semaine qui m’a réveillée
lorsque Miss Croft l’a glissé sous ma porte. Je me suis préparée en vitesse et je
suis allée dans la cuisine où j’ai trouvé Wes assis devant une assiette d’œufs et
de bacon. Miss Croft m’a servi le même petit déjeuner et j’ai passé en revue le
programme avec Wes, qui m’a détaillé la tenue exigée pour chaque événement,
les horaires et le but de chaque sortie.
J’ai presque l’impression d’être l’assistante personnelle de Weston Charles
Channing III et pas juste une prostituée de luxe. Techniquement, je ne le suis
pas, bien sûr, même si j’ai couché avec lui dès le premier soir. Toutefois, c’est
simplement parce que j’étais excitée, qu’il est canon et que je me sentais seule.
Et puis les règles de Wes me conviennent parfaitement. Nous sommes exclusifs,
nous ne dormons pas ensemble et nous ne tombons pas amoureux. Facile. Les
doigts dans le nez.
Wes appuie sur le bouton du dernier étage et s’adosse au mur de l’ascenseur.
– C’est le réalisateur du quatrième Honor, que j’ai intitulé Honor Code. C’est
l’histoire d’un espion en mission chez l’ennemi qui écrit des messages cryptés à

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ses officiers. Il envoie aussi des messages à sa fiancée en utilisant le même code,
mais comme elle ne peut pas les lire, il l’entraîne dans un voyage qui lui
permettra de déchiffrer ses lettres.
Je le regarde en souriant, remarquant la manière dont son regard s’illumine
lorsqu’il me parle de son scénario.
– Ça a l’air super-romantique.
Il me sourit en jouant des sourcils.
– C’est l’idée, en tout cas. Les nanas deviennent accros à des films qui sont
traditionnellement destinés aux mecs – avec du sang, de la violence, des
explosions, la guerre et des espions.
Les portes de l’ascenseur s’ouvrent et je le suis à une table où sont déjà assis un
homme en costume et une petite femme blonde.
– Monsieur Underwood, Madame Underwood, dit Wes en leur serrant la main.
Je suis content de vous voir. Voici Mia, mon amie.
Je leur serre la main, et Wes recule ma chaise pour que je m’y asseye. Je le
regarde en souriant, et ses yeux s’adoucissent momentanément avant qu’il ne
remette son masque d’homme d’affaires. La jolie blonde à ma gauche me dit
qu’elle s’appelle Jennifer, puis elle me complimente sur ma robe. C’est une robe
de cocktail plutôt sage – bleu roi, portefeuille, avec un joli décolleté. En dehors
de ça, elle n’a rien de spécial. J’ai lissé mes cheveux et ils m’arrivent en bas du
dos en un rideau noir et brillant. Cependant, le meilleur aspect de ma tenue reste
les chaussures.
Miss Croft a peut-être l’air de Mary Poppins, mais elle doit avoir une carte VIP
chez Prada, Gucci et Louis Vuitton ainsi qu’un abonnement à Vogue, parce que
ces bottines à talons Louis Vuitton sont tout simplement magnifiques. Si pour
une raison ou pour une autre je n’arrivais pas à tenir une année avec ce boulot, je
pourrais me faire une fortune en revendant toutes ces chaussures et ces fringues
haute couture. Rien qu’avec ces bottines, je pourrais me faire mille deux cents
dollars – eh oui, j’ai regardé. Ça paraît sans doute matérialiste, mais je n’ai pas
pu m’empêcher de regarder leur prix sur Internet.
– Attends, tu n’as pas vu mes chaussures ! je m’exclame en sortant un pied de la
table pour les montrer à Jennifer.

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Nous parlons ensuite de sa tenue, de son styliste et de ce qu’elle fait de ses
journées. En gros, pas grand-chose. Elle est surtout là pour être jolie et s’assurer
que monsieur Underwood est satisfait. Je suppose que ça signifie qu’elle fait ce
qu’elle veut de ses journées, qu’elle s’assure que la cuisinière prépare ce que
désire son mari, que la femme de ménage repasse ses chemises et nettoie la
maison comme il faut, et de son côté, elle s’occupe d’être épilée, gommée et
prête à écarter les jambes lorsqu’il rentre du boulot.
– C’est vrai que je ne sais pas quoi faire de mes journées, chuchote Jen.
Ouaip, au bout de vingt minutes, elle me confie déjà ses problèmes. Cependant,
j’ai l’habitude. J’ai le genre de visage qui inspire confiance. Je sais désormais
qu’elle a rencontré son mari quand elle était figurante sur un de ses films et
qu’elle l’a épousé il a un an, à l’âge de vingt-trois ans. Apparemment, c’était le
coup de foudre.
– Pourquoi tu ne fais pas du bénévolat ? Tu as des passions ?
Elle cligne rapidement des yeux, l’air confuse.
– J’aime nager, je nage tous les jours !
Ça ne m’étonne pas, à la regarder. Son corps est svelte, mais elle n’a pas l’air
anorexique comme toutes les autres nanas d’Hollywood. Ses seins sont faux, ça
c’est évident, mais ils lui vont plutôt bien.
– Et si tu faisais du bénévolat auprès des jeunes ? je propose mais elle secoue
déjà la tête en grimaçant.
– Je ne pense pas que Jay serait d’accord.
J’y réfléchis une minute.
– Tu aimes les enfants ?
Ses yeux s’illuminent comme ceux d’un enfant devant un gâteau d’anniversaire.
– Oui, je les adore ! Tu ne vas pas me croire, mais j’étais institutrice en
maternelle, avant de rencontrer Jay.
Elle regarde son mari et son sourire s’agrandit. Il le sent et lui lance un clin d’œil
sans interrompre sa conversation avec Wes. Lorsque Jen me regarde, son visage
exprime la plus grande joie que j’aie jamais vue, et c’est contagieux.
– Pourquoi tu ne travaillerais pas avec des enfants alors ? Ou mieux, faites-en !
Elle écarquille les yeux, regarde Jay et me regarde de nouveau.

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– Ça ne fait qu’un an qu’on est mariés, et ça ne faisait que quelques mois qu’on
se connaissait, avant ça. Tu ne crois pas que c’est trop tôt ? demande-t-elle.
Je hausse les épaules et bois une longue gorgée de vin.
– Peu importe ce que je pense. Ce qui compte, c’est ce que vous pensez. Si tu
veux des enfants, fonce ! Et puis, il a quinze ans de plus que toi, ça doit bien
ralentir ses nageurs, non ? Vous pourriez ne pas y arriver tout de suite.
Jen y réfléchit, et son enthousiasme croît sous mes yeux. Elle se redresse et elle
ne cesse plus de sourire et de gigoter. Elle ne quitte pas son mari des yeux et il se
tourne de nouveau vers elle. Cependant, cette fois-ci, Jay lève un index pour
mettre sa conversation sur pause.
– Qu’y a-t-il, ma chérie ? demande-t-il.
Elle sourit jusqu’aux oreilles et hausse les épaules.
– Rien, je suis juste heureuse. Et il faudra qu’on parle en rentrant à la maison,
dit-elle en posant sa main sur la sienne.
Il se penche pour l’embrasser sur la joue.
– Tu es sûre que ça peut attendre ? demande-t-il d’un ton inquiet sans la quitter
des yeux.
Elle l’embrasse tendrement et secoue la tête.
– Oui, ne t’en fais pas. Tout va bien.
Wes se penche et passe son bras dans mon dos.
– C’est quelque chose que je devrais savoir ? demande-t-il.
– Je te raconterai tout plus tard, je chuchote.
– J’espère bien, dit-il en chatouillant mon cou avec son nez.
Le dîner se poursuit sans problème. En tenant compagnie à Jen, j’ai permis à Jay
de se sentir à l’aise pour discuter du prochain film. Apparemment, il va laisser
Wes diriger une bonne partie des dialogues du couple ainsi que des scènes plus
intimes – j’ai trouvé ça hilarant et je n’ai pas pu me retenir d’éclater de rire.
La conversation s’arrête net et Wes me dévisage.
– Pardon, j’ai repensé à quelque chose d’amusant, ne faites pas attention à moi.
Cependant, à l’heure du dessert, lorsque Jay sort fumer accompagné de sa
femme, Wes m’attire à lui et je sens que je vais me faire gronder.
– Qu’est-ce qui était si drôle ? me demande-t-il.

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– Rien, je réponds en jouant avec ma serviette. Je trouvais juste marrant que
Monsieur Je-ne-suis-pas-en-mesure-d’offrir-une-relation-amoureuse dirige les
scènes romantiques. Ça me semble bizarre, c’est tout.
– Pourtant, tu ne t’es pas plainte hier soir, dit-il d’une voix rauque.
Je me rapproche encore de lui, jusqu’à ce que ma bouche soit à quelques
centimètres de la sienne.
– Hier… c’était…
Il respire brusquement et se lèche les lèvres, ces lèvres que je meurs d’envie de
croquer.
– … du sexe. Ça n’avait rien de romantique.
Wes prend délicatement mon cou dans sa main et caresse ma mâchoire avec son
pouce. Il rapproche encore un peu sa bouche de la mienne, mais il ne
m’embrasse toujours pas.
– C’est ce que tu veux ? Du romantique ? demande-t-il alors que ses lèvres
effleurent les miennes.
– Non, je veux du sexe… je dis, au moment où une lourde main saisit mon
épaule.
– Alors, les tourtereaux ! s’exclame Jay Underwood, nous faisant sursauter.
Je ne vais jamais goûter à sa bouche, apparemment. Or je le veux… plus que
tout. Je commence à perdre patience, mais il est hors de question que je fasse le
premier pas.
Wes couvre sa bouche pour cacher son sourire.
– Plus tard, chérie. On a toute la nuit, promet-il.
– Ouais ouais, des promesses, toujours des promesses, je dis en feignant de
bâiller.
Je bois une gorgée de mon thé – désormais tiède – tandis qu’il secoue la tête, le
regard pétillant de malice.
– Si c’est un défi, j’accepte, déclare-t-il.

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Chapitre 5

Nous avons à peine passé la porte de la maison que Wes me saisit par la taille
pour me plaquer contre le mur. Il plonge la tête dans mes cheveux et lèche la
zone sensible de mon cou, descendant sur ma clavicule avant de remonter vers
mon oreille. Ma nuque se couvre de chair de poule et je ferme les yeux. Ses
mains glissent sous ma robe pour empoigner mes fesses, et il lève mes jambes
pour les passer autour de ma taille.
– Je vais m’enfouir si profondément en toi que tu vas me sentir dans ta gorge,
promet-il en me portant dans sa chambre.
Sans préambule, il me lâche sur le lit et reste debout à me mater, les yeux noirs
de désir, fermant et ouvrant les poings.
– Enlève ta robe, ordonne-t-il.
Je m’exécute et me dresse sur mes genoux, en soutien-gorge et string bleu
marine. Wes retient son souffle, puis il expire en sifflant.
– À toi maintenant, enlève-moi ce costume, je dis en promenant mes mains sur
mes seins.
Sa mâchoire se contracte et il se dépêche d’enlever sa veste et sa cravate. Il
déboutonne sa chemise, exposant ce torse hâlé que j’aime tant, et je me mords la
lèvre.
– Tout. Je te veux à poil.
Wes sourit et prend son temps pour enlever sa ceinture et ouvrir sa braguette. Il
sort une capote de sa poche, l’ouvre avec les dents et la déroule sur son érection,
sans jamais me quitter des yeux. Je passe ma main dans mon dos et défais mon
soutien-gorge. Lorsque son pantalon atterrit par terre, mon soutif le rejoint.
– Putain, tu es tellement belle, dit-il d’une voix émerveillée.

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Je hausse les sourcils en observant son superbe corps nu – grand, bronzé,
musclé, avec une queue épaisse, prête à me servir.
– Tu n’es pas mal non plus, tu sais, dis-je en profitant de la vue.
– Prouve-le, se moque-t-il en souriant, répétant mes paroles de la veille,
montrant qu’il a fait attention à nos échanges.
Cette constatation me rend beaucoup trop heureuse, mieux vaut ne pas y penser.
Je marche à quatre pattes au bord du lit et je plaque mes mains sur son torse. Je
baisse la tête pour lécher et mordiller son téton, le faisant gémir. Il empoigne
mes cheveux et je lève la tête, survolant sa bouche avec la mienne. Il humidifie
ses lèvres, se préparant pour ce premier baiser, mais je ne le lui donne pas, me
contentant de l’embrasser au coin de la bouche.
– Tu as décidé de me tourmenter, c’est ça ? demande-t-il d’une voix enjouée.
J’effleure sa joue du bout de mon nez, puis je prends le lobe de son oreille dans
ma bouche.
– Je ne vois pas de quoi tu parles, je murmure.
Il saisit mes hanches et baisse mon string.
– Je crois que si, rétorque-t-il en me faisant reculer sur le lit.
Je tombe sur le dos et lorsque je rouvre les yeux, ses mains sont sur mes genoux.
Il écarte mes jambes, voit mon sexe humide et affamé et pousse un long
grognement. Il promène un doigt sur ma fente avant de le poser sur mon clitoris,
m’arrachant un gémissement.
– J’ai envie de te dévorer, dit-il en plongeant son regard brûlant dans le mien.
Mais d’abord, je veux être en toi.
Il se positionne sur moi et me pénètre avec le bout de son gland. Je me cambre,
car ce n’est pas assez. Il me faut plus, j’ai besoin de plus.
– Regarde-moi te prendre pour la première fois, dit-il d’une voix suave et sexy.
Et c’est ce que je fais. Je regarde son sexe me pénétrer centimètre après
centimètre. Mes lèvres sont étirées autour de sa verge épaisse. Jamais je ne me
suis sentie aussi pleine.
Je pousse un grognement et rejette la tête en arrière, incapable de continuer à
regarder.
– Mia, chuchote-t-il d’une voix tendue.

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J’ouvre les yeux pour découvrir son regard affamé. Il se relève sur les coudes et
pose ses mains sur mes joues. Il recule son bassin avant de replonger en moi tout
en s’emparant de ma bouche. Nos corps fusionnent. Il n’y a plus de Mia ni de
Wes, il n’y a plus qu’un nous frémissant et bouillonnant.
Le baiser est sauvage et accablant. Il plonge sa langue dans ma bouche alors que
sa queue s’enfouit en moi, m’offrant tant de plaisir que chaque cellule de mon
corps crie de joie. Je l’entoure de mes jambes et mes bras, m’accrochant à lui
tandis qu’il me baise en touchant des zones érogènes dont je ne connaissais pas
l’existence. Mon plaisir est si intense que mon premier orgasme déferle bientôt
dans mes veines.
– Putain, oui, Mia. Tu me serres si fort ! Encore, ma chérie.
Wes continue ses allers-retours, mais son orgasme n’arrive toujours pas. Bon
sang, ce mec est un étalon. J’ai tiré le gros lot quand ma tante m’a assigné ce
contrat.
Il suce mes lèvres une dernière fois puis il se retire brusquement. Cependant, je
n’ai pas le temps de protester qu’il m’a déjà retournée en soulevant mon bassin.
– Tu as un cul parfait, Mia.
Il gifle ma fesse avant de replonger sa queue en moi.
– Mon Dieu, tu es incroyable, je râle en baissant mon torse sur le lit.
Il empoigne mon bassin et son rythme devient effréné, nos chairs claquent
sèchement l’une contre l’autre.
– Je veux sentir ta chatte se contracter sur moi, grogne Wes alors que sa main
descend entre mes jambes.
Ses doigts ont à peine touché mon clitoris que les parois de mon sexe se
referment sur sa verge. Il grogne longuement, et trois allers-retours plus tard, il
s’immobilise, niché entre mes fesses. Il s’effondre sur moi et son souffle chaud
chatouille ma nuque. Nous sommes tous les deux haletants et ébahis de plaisir. Il
roule sur le côté et me tire contre lui, puis nous passons quelques minutes à nous
bécoter comme des adolescents. Sa chambre sent l’océan, le sexe et mon parfum.
Si je pouvais mettre cette odeur en bouteille, je la porterais tous les jours.
– Alors, raconte-moi quelque chose…
– Tu peux être un peu plus précise ? demande Wes en riant.

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Je hausse les épaules.
– Raconte-moi n’importe quoi, quelque chose à propos de toi, je réponds en
promenant le bout de mon index sur son torse.
– Hum… eh bien tu sais que j’adore écrire des scénarios de films. Et que j’aime
le surf, dit-il en me faisant un clin d’œil. Tu as rencontré mes parents et ma
nounou. Enfin, c’était ma nounou quand j’étais petit, maintenant elle s’occupe de
ma maison.
– Miss Croft ?
Il hoche la tête.
– Il y a autre chose à dire ? demande-t-il.
– Ben oui, plein ! Tu as des frères et sœurs ?
– Une sœur, plus âgée que moi. Elle est mariée et elle n’a pas encore d’enfants.
Elle est institutrice et son mari est le proviseur de l’école.
– Alors, je n’ai pas besoin de te demander comment ils se sont rencontrés, je dis
en jouant des sourcils. Comment elle s’appelle ?
– Jeanine. Et toi ? Des frères et sœurs ?
– Ouais. Maddy. Enfin, Madison. Elle a cinq ans de moins que moi. Elle a dix-
neuf ans, elle est à la fac à Las Vegas.
– D’accord. Qu’est-ce qui t’a fait venir ici ?
Je me rapproche un peu de lui.
– J’avais besoin de changer d’air. Je pensais que j’étais destinée à être actrice.
Enfin, je le souhaite toujours, mais…
Je m’arrête là, car je n’ai aucune envie de lui raconter ma vie en détail.
– Mais ? insiste-t-il, si tu veux être actrice, pourquoi tu es escort ?
– Pour l’argent, je réponds en haussant les épaules. D’ailleurs, tu es mon
premier, tu sais.
Il se tourne sur le côté pour que l’on soit face à face.
– Mon premier client, je veux dire.
– Ah. Et qu’est-ce que tu en penses, pour l’instant ? demande-t-il en souriant.
Je fais mine de ne pas être emballée.
– Hmm, je te mettrais un sept sur dix.
Il roule sur moi en coinçant mes bras le long de mon corps.

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– Eh ! je m’exclame en souriant jusqu’aux oreilles.
– Sept sur dix ! Tu me donnes un sept alors que tu n’as aucun point de
comparaison ?
Il m’embrasse brièvement, puis ses mains descendent sur mes côtes pour me
chatouiller. Immédiatement, je hurle de rire. Lorsqu’il voit à quel point je suis
chatouilleuse, il ne se retient plus et continue jusqu’à ce que je gigote
violemment, me débattant aussi fort que possible, lui criant d’arrêter, essoufflée
de rire.
– Avoue-le, je mérite un dix ! dit-il en arrêtant sa torture.
– D’accord, d’accord, je concède en reprenant mon souffle. Je t’accorde un joli
huit.
Il remue de nouveau les doigts.
– D’accord, un neuf ! je crie tandis qu’il poursuit son assaut. Neuf virgule cinq !
Il cesse.
– Neuf virgule cinq, ça me laisse de la marge pour m’améliorer, dit-il avec un
regard pétillant. J’ai le reste du mois pour obtenir un dix.
*
* *
Je passe les journées suivantes toute seule à la maison, car Wes travaille au
studio avec l’équipe de Honor Code. Lorsqu’il rentre le soir, nous dînons
ensemble, nous regardons un film ou nous lisons côte à côte. Puis, plus tard, il
me fait grimper aux rideaux, et l’un ou l’autre regagne sa chambre. La routine
marche à merveille. Je m’amuse beaucoup et le sexe est incroyable. Mieux
encore, je ne risque pas de m’attacher à lui. Ce job d’escort est fabuleux.
Je me laisse tomber sur le lit après que Wes et moi venons de jouir.
– Alors ça, chérie, ça mérite un dix ! me félicite-t-il.
Je lui pince le téton en riant et il saisit mon poignet.
– Aïe ! Tu es folle, tu le sais ça ? dit-il en m’embrassant.
Il empoigne mes cheveux et me tire sur lui.
– Encore ? je m’exclame.
– J’y peux rien, avec toi je suis plus dur que ma planche de surf.
Il m’embrasse langoureusement et saisit mes poignées d’amour.

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– Tu viens vraiment de comparer ta bite à une planche de surf ?
Il plonge son regard dans le mien et s’immobilise.
– Merde, je crois bien, oui. Ton corps me rend stupide. J’en perds la tête.
– Si tu le dis. Mais je suis courbaturée et j’ai besoin de dormir. Alors, lève-toi et
ramène ton joli p’tit cul dans ta chambre, dis-je en roulant sur le matelas et en
enfonçant ma tête dans l’oreiller.
La main de Wes caresse lentement mon dos.
– Tu n’aurais pas oublié quelque chose, ma chérie ? dit-il d’une voix amusée.
J’ouvre un œil et je le vois me dévisager en souriant.
– Tu es dans ma chambre.
– Et zut ! je m’exclame en rejetant la couette alors qu’il s’installe
confortablement.
– On brunche avec mes parents demain, sois prête à dix heures ! crie-t-il au
moment où je sors de sa chambre toute nue.
– Va te faire voir ! je crie par-dessus mon épaule.
Je vire à gauche pour emprunter le couloir vers ma chambre et je tombe nez à
nez avec Judi Croft.
– Saperlipopette, ma chère ! s’exclame-t-elle en se couvrant les yeux.
Je grimace et la contourne en trottinant.
– Pardon, Miss Croft, je ne voulais pas vous faire peur.
Au bout du couloir, j’entends Wes se fendre la poire. Eh bien, si Judi ne pensait
pas déjà que je suis une prostituée, je viens de le lui prouver.
*
* *
– Tu es très en beauté, Mia, dit la mère de Wes en me serrant dans ses bras.
Je ne sais comment réagir à ces marques d’affection, n’ayant pas l’habitude
qu’une figure maternelle me prenne dans ses bras.
– Merci, Madame Channing. Votre maison est très belle.
Elle sourit, et un employé me propose un Mimosa dans une flûte à champagne.
Je prends le temps d’étudier l’immense véranda. Des tons or et crème sont
associés à du rouge bordeaux et du bleu marine – un mélange élégant et luxueux.
La table est dressée avec de la porcelaine fine, et il y a plus de couverts que j’en

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ai dans tous mes tiroirs. Un beau bouquet de roses est posé au centre de la table,
donnant un air d’été à la pièce alors que nous sommes en janvier. Cela dit, je
suppose que l’hiver n’est jamais très rude à LA, un peu comme à Vegas où il ne
gèle jamais. D’ailleurs de toute ma vie, je n’ai vu la neige qu’une ou deux fois.
– Te voilà ! s’exclame une jolie blonde en déboulant dans la pièce.
À ses côtés se tient un grand brun avec des lunettes en écaille de tortue.
Wes la prend dans ses bras.
– Salut sœurette !
Elle recule la tête et étudie son visage.
– Tu as l’air en forme, Wes.
Je ne l’ai jamais vu afficher un tel sourire, sauf quand il me chatouillait, l’autre
soir.
– Sœurette, je te présente mon amie, Mia, dit-il en mettant une main sur le bas de
mon dos.
– Salut ! C’est Jeanine, c’est ça ? je demande en tendant la main.
Elle hoche la tête et me la serre.
– Alors… une amie, c’est ça ? demande-t-elle en nous regardant tour à tour.
– Oui petite sœur, une amie, répète-t-il.
Elle lève les yeux au ciel.
– Si tu le dis.
À table, nous passons aux choses sérieuses.
– Alors Mia, que fais-tu dans la vie ? demande Jeanine. Vous vous êtes
rencontrés au travail ?
Je regarde Wes, qui a l’air aussi gêné que moi.
– On peut dire ça, oui, je réponds en enfournant une bouchée de quiche.
Sans préambule, Claire Channing s’immisce dans la conversation.
– Oh, allez, bien évidemment que vous vous êtes rencontrés en travaillant. Mia
est une escort. Je l’ai choisie moi-même, n’ai-je pas merveilleusement bon goût
?
Elle parle sur un ton nonchalant, comme si le fait de sélectionner l’escort de son
fils n’avait rien de bizarre.
Jeanine écarquille les yeux.

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– Tu es une call-girl ?
– Je te demande pardon ? je m’exclame en même temps que Wes rétorque «
Absolument pas ! ».
Je me sens pâlir, et soudain ma quiche a du mal à passer.
– Alors tu ne couches pas avec mon frère ? demande-t-elle d’un ton dénué de
malice, comme si elle parlait de la météo.
– Euh…
– Ça ne te regarde pas, répond Wes en se levant de table.
Il jette sa serviette sur sa chaise en rougissant.
– Je ne te laisserai pas insinuer de telles choses sur Mia, ajoute-t-il.
Jeanine se lève aussitôt et court vers son frère.
– Je suis désolée, pardon. Ce n’était pas ce que je voulais dire ! J’ai juste entendu
le mot escort et… j’en ai tiré les mauvaises conclusions. Je ne voulais pas être
méchante.
Claire se lève de table à son tour.
– Mais non, Jeanine n’a pas cherché à mal. C’était une simple erreur, dit-elle.
Cependant, Wes ne veut rien entendre.
– Pas simple, non. Mia est mon amie, et je l’ai peut-être engagée pour m’aider à
supporter un mois de dîners et de cocktails ennuyeux, mais elle n’a rien à voir
avec une prostituée, dit-il en me regardant. Je suis désolée, Chérie, ajoute-t-il
d’un regard plein de remords.
Il a l’air si désolé que je sais que je dois arranger les choses.
– Écoutez, c’était une simple erreur. J’ai pensé la même chose quand ma tante
Millie m’a parlé du job. Mais j’ai décidé de tenter l’expérience, et je ne le
regrette pas, parce que j’ai rencontré Wes, et maintenant vous tous, et ça en vaut
le coup.
Claire se rassied en me regardant d’un air chaleureux et Jeanine prend son frère
dans les bras.
– Et puis, vous avez vu les chaussures que j’ai gagnées ? je demande en me
tournant sur ma chaise pour lever ma jambe aussi haut que possible, comme me
l’a montré ma prof de danse au lycée. Elles sont canon, non ?

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Claire se couvre la bouche pour cacher son rire et Jeanine regarde mes talons
avec envie. Son mari ne dit rien, mais il regarde ma jambe comme si elle
renfermait les secrets de l’univers, et le père de Wes lui frappe l’épaule en lui
disant « Bien joué, fiston ! ».
– Bref, j’aimerais en savoir plus sur vous, dis-je en buvant une gorgée de
Mimosa. Wes m’a dit que tu étais prof, et toi proviseur ? Comment ça se passe ?
Le reste de l’après-midi se déroule sans encombre. Claire, Weston Deux, Jeanine
et Peter, son mari, me racontent l’enfance de Wes au sein de la famille
Channing. Je ris davantage en quelques heures que durant toute l’année qui vient
de s’écouler. Le ton léger sur lequel ils racontent leurs anecdotes est presque
insupportable pour quelqu’un comme moi qui ai grandi sans famille. La mienne,
si on peut l’appeler ainsi, consiste en un père alcoolique et ma petite sœur
Maddy que j’ai passé le plus gros de mon enfance à élever. Nous avions beau
savoir que papa nous aimait plus que tout, il n’a jamais cessé de boire et de
parier, gâchant tous les souvenirs que nous aurions pu avoir avec lui.
Lorsque nous partons, Claire fait promettre à Wes de me ramener le dimanche
suivant, ce qu’il accepte. Nous marchons à sa Jeep lorsqu’il m’attire à lui pour
m’embrasser langoureusement.
– C’était étonnamment sympa, non ?
Je souris en retour, me sentant soudain très émue.
– Je suis d’accord. C’est une des plus belles journées que j’aie connues depuis
longtemps. Merci de m’avoir amenée.
– Quand tu veux, chérie, répond-il en me faisant un clin d’œil. Ils t’apprécient
beaucoup.
J’attache ma ceinture et je regarde par la vitre tandis que nous quittons leur villa
haut perchée en descendant la longue allée sinueuse.
– Ta famille est vraiment sympa, tu sais. Tu as de la chance.
– Elle est comment, ta famille ? chuchote-t-il, et son sourire s’évanouit.
Je recule dans mon siège et regarde les vagues s’écraser sur la plage.
– Ma sœur Maddy est géniale. Elle est brillante. Je pense qu’elle va avoir une
super-carrière scientifique. J’ai passé la plus grande partie de mon enfance à
m’occuper d’elle.

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– Où étaient tes parents ?
– Mon parent, je corrige.
Il me regarde du coin de l’œil avec le regard le plus triste au monde.
– Ma mère était danseuse à Las Vegas et elle a quitté mon père quand j’avais dix
ans. Maddy n’avait que cinq ans.
– Elle n’est jamais revenue ? demande Wes sans quitter la route des yeux.
– Non. Et à cause de ça, mon père s’est mis à boire. Beaucoup. Et à parier –
encore plus.
Il prend ma main et la porte à ses lèvres pour l’embrasser.
– C’est pour ça que tu fais ce que tu fais ?
Je pourrais mentir et lui sortir une excuse pourrie, mais ça gâcherait l’honnêteté
qui s’est installée entre nous et grâce à laquelle la situation fonctionne aussi bien.
Au lieu de répondre, je me contente de hocher la tête.
– Tu veux en parler ? demande-t-il d’une voix douce et encourageante.
C’est trop tôt. Je ne suis pas prête à parler de mes problèmes. Par ailleurs, Wes
est un mec bien et je sais qu’il chercherait à arranger la situation en payant ma
dette, ou quelque chose comme ça. Or, c’est mon problème, c’est mon père, et
c’est pour le sauver que je suis là.
– Tu m’en parleras, un jour ?
– Oui.
Pour l’instant, c’est tout ce que je peux promettre.

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Chapitre 6

– Réveille-toi, Chérie. C’est ce que j’entends juste avant de recevoir une


fessée.
– Aïe ! je m’exclame en sursautant.
Je saisis la couette pour couvrir mes parties intimes et je fusille Weston du
regard.
– C’est quoi ton problème ?
Je n’ai pour réponse qu’un immense sourire.
– Allez, dépêche-toi. Prends ton maillot de bain et des fringues confortables. On
va à la plage ! s’exclame Wes, clairement emballé par son programme.
Il a travaillé dur toute la semaine et je ne l’ai vu que tard le soir, sauf lorsque
nous sommes allés à un dîner d’affaires affreusement ennuyeux. Cependant, je
me suis occupée en déjeunant avec Jennifer Underwood, la femme du
réalisateur, ainsi qu’avec la mère de Wes. Personne ne semble choqué par mon
rôle dans la vie de Wes, et il est lui-même ravi que je me fasse de nouveaux amis
pendant qu’il est occupé. La possibilité que je m’attache à lui en passant du
temps avec ses proches semble moins l’inquiéter que l’idée que je m’ennuie
toute la journée.
– Comment ça, on va à la plage ? Tu sais que nous sommes en janvier et qu’il
fait un froid de canard ? je réponds en tirant la couverture au-dessus de ma tête.
Je sens un poids sur le matelas puis Wes est sur moi, me coinçant sous la
couverture. Il la retire et, en un mouvement rapide, il relève mes bras au-dessus
de ma tête. Il se penche pour m’embrasser – un baiser lent, mouillé et si sensuel
que mes orteils se recroquevillent. Il enlève davantage la couverture et effleure
mes tétons avec son nez avant d’en prendre un dans sa bouche et de le sucer.

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– Aaah, tu vois ? C’est comme ça qu’on réveille une fille, dis-je en gémissant.
Il me récompense en suçant mon téton plus fort.
– Je tâcherai de m’en souvenir pour la prochaine fois. Si je te fais jouir, tu seras
de meilleure humeur ?
Il se met à lécher la pointe dure de mon sein tandis que sa main se charge de son
jumeau, et je hoche bêtement la tête, trop perdue dans le plaisir qui m’ôte toute
capacité à parler.
Wes rigole doucement.
– Si je mets ma bouche sur toi et que je donne un orgasme, tu feras ce que je dis
?
Il m’est impossible de lui dire non. Avec sa bouche et ses doigts sur ma poitrine,
je ne peux que lui donner ce qu’il veut.
– Oui, mon Dieu, oui ! je gémis.
Sa tête descend sur mon ventre puis entre mes jambes, et il me donne tout ce que
je veux, et plus encore. Wes mérite une médaille d’or dans l’art du cunnilingus –
il sait exactement quand mordre, quand sucer et lécher, et il le fait avec un talent
exquis.
Il mord.
Il suce.
Il lèche.
Sa langue tournoie sur mon clitoris et il n’arrête pas tant que je n’ai pas joui. Je
me cambre et mes mains plongent dans ses cheveux pour le retenir sur moi. Il
grogne en me dévorant, semblant prendre autant de plaisir que moi. Peut-être
même plus, à en croire la vitesse avec laquelle il plonge soudain son sexe en
moi.
Nous n’arrivons à la plage qu’une heure plus tard. Nous sommes accueillis par
un prof de surf du nom d’Amil.
– Tu m’as amenée ici pour que je vous regarde surfer ? je demande sur un ton
irrité après avoir serré la main de l’autre génie du surf.
Wes regarde Amil, puis moi, puis il sourit. Un sourire machiavélique.
– Non. En fait, je t’ai amenée ici parce que nous allons surfer. Amil va m’aider à
te montrer comment faire. Il a tout l’équipement nécessaire pour toi, y compris

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une combinaison. C’est lui qui tient Surf Shack1 à l’autre bout de la plage, dit
Wes en pointant son doigt vers l’horizon.
Je regarde Wes et ses cheveux blonds qui volettent dans la brise matinale. Une
étincelle dans ses yeux verts les rend presque émeraude à la lumière du soleil.
– Tu es sérieux ?
Il hoche la tête en désignant Amil, qui me tourne le dos – m’offrant une vue
sublime sur son dos musclé et bronzé – et sort de sa voiture une combinaison qui
semble être à peu près à ma taille.
– Ça devrait t’aller. Tu mesures quoi – à peu près un mètre quatre-vingt-cinq ?
Et tu pèses soixante-trois kilos ?
– Un mètre quatre-vingts, et… ta mère ne t’a jamais dit qu’on ne demandait pas
son poids à une femme ?
– Hélas, non, répond Amil en secouant la tête et en riant.
– Eh bien, elle a failli à sa mission alors, dis-je sur un ton sarcastique. C’est
impoli, et les femmes détestent ça. Tu es marié ?
Il secoue la tête.
– Tu as une copine ?
Il secoue de nouveau la tête.
– C’est bien ce qui me semblait. Je n’ai plus rien à dire, je conclus en frappant
dans mes mains comme si je venais de prouver la théorie de la relativité
d’Einstein.
Wes éclate de rire à côté de moi.
– Elle a raison, mec.
– Désolé Mia, dit Amil. Mes sincères excuses. Je voulais juste m’assurer que la
combinaison t’irait.
Il me tend le vêtement en question et, après maintes tentatives, je réussis enfin à
l’enfiler, non sans l’aide de Wes. Ma poitrine est compressée, et c’est si
étouffant que je suis à deux doigts d’ouvrir la fermeture Éclair pour la libérer.
Cependant, lorsque je baisse les yeux, je ne peux me retenir de sourire. J’ai
l’impression d’être Catwoman, et le regard de Wes me dit qu’il pense la même
chose. D’ailleurs, il semble prêt à arracher ma combinaison.

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Amil n’apprécie pas notre manque d’attention durant ses instructions. Le truc,
c’est que je m’en fiche, j’ai juste envie de me jeter dans les vagues. Dix minutes
plus tard, « L’introduction à l’art du surf » d’Amil est terminée, et Wes me mène
au bord de l’eau en portant nos planches.
– Tu sais, je peux porter ma propre planche.
– Je suis sûr qu’il y a beaucoup de choses que tu peux faire, Chérie, mais j’ai
besoin d’aider ma nana pour me sentir viril. Et puis, tu es sympa de jouer le jeu.
Sa nana ? Il vient vraiment de dire ça ?
– Ma nana ? je demande avant que mon cerveau n’en vienne à nous imaginer le
jour de notre mariage.
– Ouais, enfin tu vois ce que je veux dire, répond-il en souriant.
Euh, non, je ne vois pas ce qu’il veut dire. Je suis sur le point de creuser
davantage la question lorsqu’Amil nous interrompt.
– Ok, alors on va d’abord faire des leçons pratiques là-bas où la mer est plus
calme. Allez, ne fais pas ta poule mouillée, ajoute-t-il quand il me voit grimacer.
Je suis sur le point de protester lorsque Wes me met une fessée et me pousse vers
l’océan. Néanmoins, une fois dedans, il se comporte en parfait gentleman. Il
m’aide à bien me positionner, me conseille sur ma posture et tient ma planche en
place pour que je puisse m’entraîner. Nous décidons que je dois d’abord monter
sur les genoux avant d’essayer de me lever.
Au bout de quelques essais, lorsque mon stress s’est dissipé, j’arrive à prendre
de petites vagues en étant allongée sur la planche. Il me faut plus d’une heure
pour arriver à me mettre à genoux, mais je n’ai jamais été aussi fière de moi.
J’entends Wes crier et siffler pour m’encourager, ce qui est nouveau pour moi.
J’ai toujours été celle qui encourageait les autres – que ce soit Maddy ou Ginelle.
Même lorsque je faisais de la danse contemporaine et que j’étais une des
meilleures danseuses, je n’avais pas un sentiment de fierté aussi fort. Peut-être
est-ce à cause du beau gosse qui m’attend sur la plage à côté de sa planche. Je
prends une dernière vague avant de lâcher ma planche et de courir à lui.
– Tu m’as vue ? je m’écrie.
– Bien sûr ! C’était génial ! Tu es faite pour ça, ma chérie, répond-il en ouvrant
les bras.

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Je me jette sur lui et nous tombons dans le sable. Ses lèvres trouvent
immédiatement les miennes et ses mains empoignent mes cheveux pour me
plaquer contre lui. Nous restons ainsi un moment, à nous rouler des pelles
comme des ados. Un raclement de gorge exagéré nous interrompt alors que les
mains de Wes sont sur mes fesses, pressant son érection contre mon sexe. Nous
nous séparons lentement, haletant et souriant comme des idiots, pour tomber sur
le visage enjoué d’Amil.
Wes m’aide à me lever et me garde contre lui.
– Tu étais sublime, dit-il en caressant ma joue avant de l’embrasser.
– Merci de m’avoir appris, on pourra revenir ? je demande, excitée à l’idée de
surfer de nouveau.
– Tout ce que tu voudras, ma douce Mia.
*
* *
Le programme de ma troisième semaine est composé de dîners ennuyeux et
d’une autre soirée mondaine. Le cocktail dînatoire me gêne moins que les dîners,
car je peux déambuler parmi la foule, goûter à de délicieux canapés et boire des
champagnes qui coûtent autant, voire plus, que mon loyer. Cependant, je ne peux
pas dire que je m’amuse. Wes passe la plupart du temps à parler et à parcourir la
foule.
Il ne plaisantait pas en disant qu’il n’a pas le temps pour une relation sérieuse.
La femme qui décidera d’être à ses côtés doit s’attendre à passer beaucoup de
temps toute seule. Il lui faut une femme qui a sa propre carrière et que ça ne
dérange pas d’attendre tard le soir pour un petit coup rapide et un câlin.
Une vive douleur me perce les entrailles en imaginant Wes avec une autre
femme – tomber amoureux, se marier, avoir des enfants, être heureux, pendant
que moi… Quoi ? Je continue d’être une escort ?
Je repose le petit four que je viens de prendre et je bois le reste de ma flûte de
champagne cul sec.
– Hop là, doucement, dit Wes en passant un bras autour de ma taille. Tu veux
finir saoule, ou quoi ? demande-t-il d’une voix enjouée.

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– Pourquoi ? Tu profiteras de moi si c’est le cas ? je demande d’une voix
aguicheuse en pressant mes seins contre son torse.
Il inspire brusquement en me serrant contre lui.
– Absolument, répond-il très sérieusement en regardant mes seins.
Il suffit de ça pour que mon string soit trempé.
– Ne m’excite pas, ce n’est pas juste quand tu as encore plein de gens à qui
parler, dis-je en faisant la moue.
Je l’embrasse dans le cou en prenant soin de souffler pour le faire frissonner. Il
grogne en appuyant son bassin contre le mien afin de me faire sentir la force de
son désir.
– Je ne sais pas si j’arriverai à te laisser partir dans huit jours, dit-il, et son regard
devient on ne peut plus sérieux.
Je retiens mon souffle et plonge mon regard dans le sien.
– C’est comme ça, pas le choix.
Il baisse la tête et appuie son front contre le mien.
– Et si on avait le choix, justement ?
Merde. Nous nous sommes pourtant promis que ce genre de conversation était
impossible, non ? Ça va à l’encontre de tout ce que nous avons négocié lorsque
j’ai signé le contrat – et en plus, c’est contre les règles qu’il a fixées lui-même
lorsque nous avons couché ensemble pour la première fois, il y a plus de deux
semaines.
– Ne fais pas ça, je chuchote.
Il inspire lentement et expire plus lentement encore.
– D’accord, dit-il fermement, semblant décidé à laisser les choses telles quelles.
Telles qu’elles doivent être, car je n’ai pas le choix. Même si je voulais que les
choses deviennent sérieuses avec Wes – ce à quoi je préfère ne pas penser –,
c’est tout simplement impossible. Je dois toujours trouver un million de dollars
pour sauver mon père, et personne d’autre que moi ne peut le faire. Je ne vais
pas risquer sa vie pour une relation qui pourrait finir en queue de poisson comme
toutes les autres, car je m’en voudrais toute ma vie d’avoir choisi mon bonheur à
ses dépens. Il a beau être alcoolique et dilapider le peu d’argent qu’il a, il reste
une des seules personnes à m’avoir vraiment aimée. Je ne peux pas l’ignorer,

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même pour Wes, et même si cette possibilité emplit mon cœur, ma tête et mon
âme d’espoir. J’ai un travail à faire et je vais le faire.
– Allez, viens danser, propose Wes pour détendre l’atmosphère.
La soirée est l’occasion pour les acteurs, l’équipe de tournage et les investisseurs
du film de se rencontrer. C’est la première soirée où Wes peut fêter tout ce qu’il
a accompli, et je suis déterminée à ce qu’il passe un bon moment.
Il me tient contre lui et je repense au temps que nous avons passé ensemble. Les
deux dernières semaines ont été un rêve pour moi. Lorsque ma tante Millie m’a
proposé ce boulot, j’étais persuadée que j’allais vendre un bout de mon âme au
diable. Or, deux semaines plus tard, je me suis faite à l’idée, je sais comment je
veux que les choses se déroulent avec mes futurs clients, et je suis convaincue
que les onze prochains mois vont aller comme sur des roulettes. Peut-être
arriverai-je même à me faire des contacts dans le milieu du cinéma, ou peut-être
que je continuerai à être escort et à ramasser du fric à la pelle. Cela dit, je ne vais
pas voir la couleur de cet argent pendant un an. Je vais simplement m’assurer
d’en garder assez pour en envoyer à Maddy et payer mon loyer.
En gagnant cent mille dollars sur douze mois, j’aurai deux cent mille dollars de
plus que le million que je dois à Blaine. Je pourrai donc payer les cent mille
dollars que va coûter la fac de Maddy, et il me restera encore cent mille.
J’enverrai trois mille dollars à ma sœur pour ses dépenses quotidiennes, et
j’aurai encore quelques milliers de billets à la banque.
Bien sûr, mon temps ne m’appartient plus, et ça va sans doute finir par m’agacer,
mais je croise les doigts pour que mes autres clients soient comme Wes – qu’ils
bossent beaucoup et qu’ils n’aient guère besoin de moi. Comme ça, j’aurai le
temps de me détendre dans leurs sublimes maisons.
Toutefois, je sais déjà que dire adieu à Wes ne va pas être facile. Je me demande
si ce sera le cas avec tous mes clients. J’aime passer du temps avec Wes, et le
sexe avec lui est incroyable. Rien que de repenser à ce qu’il m’a fait ce matin
sous la douche me fait rougir… mon Dieu, cet homme est un sex-toy géant.
– Eh, tu as l’air fiévreuse, ça va ? demande Wes d’une voix inquiète.
Je baisse les yeux et j’appuie mon front contre son torse. Les battements de son
cœur me replongent dans un état contemplatif et je remue mon bassin pour qu’il

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sache que je n’ai pas fini de danser. J’ai besoin de sentir ses bras autour de moi –
avec lui, j’ai l’impression d’être la seule femme sur terre.
– Je vais bien. Il fait chaud, et tu me donnes encore plus chaud.
Je lève les yeux au moment où il baisse les siens, et nos regards se verrouillent.
– Tu sais, en dehors de ma mère et de ma sœur, tu es sans doute la femme la plus
précieuse que je connaisse.
– Précieuse ? je demande en riant.
– Ouais. Je veux dire que…
Ses lèvres effleurent ma joue, puis elles trouvent mon oreille.
– … tu comptes pour moi, chuchote-t-il.
Je le serre fort dans mes bras, le plus fort possible. Je veux qu’il sache combien
il compte pour moi aussi, mais je ne trouve pas les mots pour le lui dire. Je
m’accroche à son dos, m’agrippe à sa veste, et il empoigne mes bras pour me
faire reculer un peu.
– Eh, eh, Mia… On n’a pas besoin d’en parler, mais il faut que tu saches…
Je secoue la tête, refusant d’entendre une nouvelle déclaration de sentiments que
je ne peux pas lui retourner.
– Mia, écoute-moi, dit-il en prenant mon visage dans ses mains.
Je retiens mon souffle en attendant ce qu’il a à dire.
– Ce n’est pas parce que nous ne pouvons pas être en couple qu’on ne peut pas
garder contact. On peut rester amis, tu sais.
Je sais qu’il pense ce qu’il dit, et un sentiment de profond soulagement
m’envahit, me faisant sourire jusqu’aux oreilles.
– Tu es sérieux ?
– Très sérieux, ma chérie. Maintenant, allons nous chercher un verre. Ils vont
bientôt annoncer le casting d’Honor Code. Tout le monde le connaît déjà, mais
ça fait partie du rituel, dit-il en me faisant un clin d’œil.
Lorsque nous arrivons au bar, je tombe nez à nez avec Jennifer Underwood.
– Mia ! Mon Dieu, je t’ai cherchée partout ! dit-elle en prenant mon bras et en
m’éloignant de Wes.
Ce dernier me regarde en fronçant les sourcils, clairement inquiet, et je secoue la
tête pour lui dire de se détendre.

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– Qu’est-ce qui se passe, Jen ?
Elle se rapproche de moi et regarde autour d’elle pour être sûre que personne ne
peut l’entendre.
– J’ai du retard, dit-elle avant de se mordre la lèvre.
– Pardon ? je réponds, ne comprenant pas où elle veut en venir.
– J’ai du retard sur mon cycle, explique-t-elle.
Soudain, je comprends. Elle a du retard ! Waouh ! Lorsque nous nous sommes
revues pour déjeuner, elle m’a remerciée d’avoir changé sa vie. Apparemment,
lorsqu’ils sont rentrés du dîner où nous nous sommes rencontrées, elle a annoncé
à Jay qu’elle voulait un enfant, et il était aux anges. Il semblerait qu’il y pensait
depuis le soir de leur mariage mais qu’étant donné qu’ils ne se connaissaient que
depuis peu, il avait pensé qu’elle voudrait attendre. Depuis cette conversation, ils
baisent comme des lapins.
Je prends les mains de Jen dans les miennes.
– De combien ? Vous venez juste de vous y mettre !
– Je sais ! s’exclame-t-elle un peu trop fort, attirant l’attention de quelques
personnes autour de nous.
Je l’emmène un peu à l’écart, dans un coin plus tranquille.
– J’ai cinq jours de retard, et je ne le suis jamais, même pas d’un jour.
– Putain ! je m’écrie.
– Je sais !
– Mon Dieu !
– Je sais ! répète-t-elle.
Nous nous mettons toutes les deux à sautiller sur place en nous tenant les mains
comme des enfants, puis je la prends dans mes bras. Sauf lorsqu’il s’agit de
Ginelle et de Maddy, je ne suis pas pour les démonstrations d’affection avec les
femmes, mais je me sens très proche de Jennifer – c’est quelqu’un de bien et je
la considère déjà comme une amie.
– Il faudra que tu me tiennes au courant quand je serai partie.
Je n’ai pas dit à Wes que j’avais expliqué à Jen ce que je faisais avec lui, mais
elle m’a promis de ne rien dire, et pour l’instant, elle a mérité ma confiance.
– C’est génial ! Comment a réagi Jay ?

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– Il a envie de le dire à tout le monde, même si on n’en est pas encore sûrs, dit-
elle en levant les yeux au ciel.
– Les hommes sont bêtes. Attends, si tu es tombée enceinte tout de suite, tu ne
dois être qu’à deux semaines, donc un test maison ne sera peut-être pas assez
précis. Tu ferais mieux de faire une prise de sang et de voir un toubib.
– C’est ce que j’ai pensé, moi aussi. J’ai rendez-vous vendredi prochain. J’espère
juste qu’entre-temps je n’aurai pas mes règles, dit-elle en grimaçant.
Je la serre à nouveau dans mes bras et nous retournons lentement vers les
garçons.
– Restons positives et croisons les doigts, hein ?
Elle hoche vivement la tête.
Nous retrouvons Wes et Jay alors que la foule se rassemble devant une petite
scène montée au milieu de la salle de bal. L’orchestre cesse de jouer et Wes me
tend une coupe de champagne.
– Tout va bien ?
– Super-bien, oui.
– Est-ce que j’ai besoin de savoir quelque chose ? demande-t-il en haussant un
sourcil.
– Non, je réponds en secouant la tête. Tu sauras tout plus tard.
Il rit et me guide vers la scène au moment où le présentateur commence à
annoncer les acteurs du film.
– Tu es excité ? je demande.
– Je connais déjà le casting.
– Et alors ? Maintenant, tout le monde va le savoir et en parler pendant des mois
! Moi je suis excitée, alors que je ne connais presque rien du film !
Wes pose sa main sur mon épaule et me colle contre lui. Les acteurs montent sur
scène les uns après les autres pour saluer le public lorsque le présentateur
annonce leur nom et le rôle.
– J’ai hâte de savoir qui va jouer Will, le soldat qui envoie les lettres d’amour à
Allison. Oh ! Qui va jouer Allison ? je demande en me tournant vers lui.
– Personne ne va jouer Allison, répond-il en baissant les yeux.
– Comment ça ? Je croyais qu’elle était l’amour de sa vie ? je demande, confuse.

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Wes sourit jusqu’aux oreilles et désigne la scène de la tête.
– Regarde, tu vas voir.
À peine a-t-il dit ces mots qu’une superbe femme aux cheveux noirs approche de
la scène. Je la connais ! C’est l’actrice Gina DeLuca ! Elle est grande et mince,
tout en ayant des courbes sublimes – tous les hommes l’adorent et toutes les
femmes veulent lui ressembler. En plus, on dit qu’elle est infiniment généreuse
et qu’elle prend soin d’être un bon exemple pour les jeunes filles.
Toutefois, ma surprise ne s’arrête pas là.
– Et voici Gina DeLuca, pour le premier rôle féminin, Mia Culvers !
Je suis bouche bée en me tournant vers Wes.
– Surprise ! s’exclame-t-il en souriant de toutes ses dents.
Jamais je n’oublierai ce sourire et ce moment.
– Évidemment, tu as changé le nom du personnage principal ?
– Oui, dit-il simplement.
Je cligne plusieurs fois des yeux pour éviter que mes larmes ne coulent.
– Pourquoi ?
– Parce que tu comptes.

1. Cabanon de surf.

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Chapitre 7

Jésus Marie Joseph. Je compte. Il a appelé le personnage principal du film


comme moi. Il a même changé son physique pour qu’elle me ressemble. Allison
devait être petite, blonde, et avoir les yeux bleus. Rien à voir avec une grande
femme à forte poitrine et aux cheveux ébène comme Gina DeLuca… ou moi.
Je ne sais pas encore ce que j’en pense. Wes et moi nous sommes mis d’accord
pour ne pas nous attacher – or, si je suis honnête, je ne peux pas dire que je ne
tiens pas à lui. Est-ce que je l’aime ? Je ne crois pas. Je me suis tellement
concentrée pour ne pas tomber amoureuse que la possibilité d’ouvrir mon cœur
ne s’est jamais présentée.
Les vibrations de mon téléphone coupent court à la série de « et si » qui se
prépare dans ma tête. J’étais sur le point d’imaginer nos enfants. Ralentis, Mia,
ce n’est pas une option, et tu le sais. Il le sait aussi, d’ailleurs – il faut que nous
nous en contentions.
– Bonjour, dis-je en voyant le nom de ma tante sur l’écran.
– Salut, ma poupée ! Alors, cette vie dans le palais des merveilles ?
La voix enjouée de ma tante ne fait que me rappeler ma véritable place dans le
monde. Ce job m’offre une vie de luxe… temporaire. Ce n’est pas ma vie, et ça
ne le sera jamais.
Je réponds à ma tante par un soupir.
– Si bien que ça ?
– Non, oui, ça va. Quoi de neuf ? je demande en étudiant les pointes de mes
cheveux.
Il est temps de passer chez le coiffeur.
– Je t’appelle pour parler de ton prochain client, poupée.

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À l’autre bout du fil, j’entends le bruissement de feuilles de papier et le bruit de
ses ongles sur son clavier.
– Tu files à Seattle ! s’exclame-t-elle.
Je n’y suis jamais allée, ça peut être marrant.
– Celui-ci va être intéressant. Il s’appelle Alec Dubois. Il a trente-cinq ans, il est
grand, brun et beau. Mais il est bizarre.
Je ne dis rien, car avant de rencontrer Wes, toute cette situation me semblait
bizarre. Or, je sais maintenant qu’il est possible qu’un homme bon et généreux
ait besoin d’embaucher une amie, pour une raison ou pour une autre. Sans ce
job, je n’aurais jamais rencontré Wes. Je ne lui ai pas encore dit, mais il compte
énormément pour moi.
– … Il t’a choisie sur le site le lendemain de ton départ chez monsieur Channing,
et il m’a fait promettre de t’avoir pour le mois suivant.
Je grimace et je m’enveloppe dans le plaid laissé sur la chaise.
– C’est un psychopathe ?
Millie éclate de rire au téléphone, je l’éloigne de mon oreille.
– Non, ma chérie, c’est un artiste ! Tu vas être sa muse ! Apparemment, il a su
dès qu’il t’a vue qu’il voulait te peindre pour sa nouvelle série Amour sur toile.
J’entends le cliquetis de ses ongles et mon téléphone bipe pour m’annoncer
l’arrivée d’un message. Je la mets sur haut-parleur et j’ouvre le mail qu’elle m’a
envoyé.
– Waouh !
– Je t’avais dit qu’il était beau, répond la voix mielleuse de ma tante. Presque
autant que monsieur Channing, non ?
Je hoche la tête en regardant la photo de monsieur Alec Dubois. Cet homme est
sublime – le portrait craché de Ben Affleck, mais avec des cheveux longs relevés
en chignon sur le dessus de la tête, une barbe et une moustache. J’ai hâte de voir
jusqu’où lui arrivent ses cheveux !
J’inspire et j’expire lentement pour évacuer la bouffée de chaleur qui envahit
mon corps.
– Alors, qu’est-ce que je suis censée faire en tant que muse ?

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– Je ne sais pas trop. Je sais que ses œuvres sont inhabituelles et qu’elles se
vendent pour des centaines de milliers de dollars. Par contre, si tu te déshabilles
pour lui, il doit payer plus. Si tu couches avec lui, et quelle femme ne le voudrait
pas, ajoute-t-elle en riant, il est quand même censé te payer vingt mille dollars en
plus du contrat.
– Est-ce qu’il peut exiger que je me déshabille ? je demande.
Je me sens sale, tout à coup, et je ne me souviens plus de ce que j’ai signé dans
le contrat.
– Non, non, non, ça ne fait pas partie du deal. Mais il en a parlé en te réservant.
Je lui ai dit que ça lui coûterait vingt-cinq pour cent supplémentaires et que
c’était toi qui avais le mot de la fin. Techniquement, il n’est pas censé te toucher
sexuellement, bien évidemment.
Vingt-cinq pour cent, ça fait vingt-cinq mille dollars.
– Tu es sérieuse ? J’aurai vingt-cinq mille dollars si je le laisse peindre des nus
de moi ?
– Non, poupée, toi tu auras vingt mille dollars. Escorts Exquises touche vingt
pour cent de ce que tu gagnes, donc on prend cinq mille et toi tu en prends vingt.
Je hausse les épaules, car je m’en fiche, j’ai déjà décidé de me mettre à poil. Ces
vingt mille dollars me rapprochent plus vite de mon but. Ça paierait les emprunts
qu’on a faits pour la première année de fac de Maddy.
– Pas de souci, je suis partante ! Du moment que je ne suis pas obligée de
coucher avec lui, je veux bien poser nue.
Mon Dieu, c’est affreux. Je n’ai même pas encore quitté Wes que je salive
devant la photo du prochain. Peut-être suis-je une salope, finalement.
– Nickel. Ton vol partira le premier février, alors ne le rate pas. Ton dernier jour
avec monsieur Channing est le vingt-huit janvier, donc ça te laisse quelques
jours pour aller chez l’esthéticienne, le coiffeur et le gynécologue. Bon, si tu n’as
pas de questions, je te laisse…
– Euh, Tante Millie ?
– Miss Milan, tu te souviens ? prévient-elle.
– Pardon, mais tu réalises que je ne vais pas t’appeler comme ça que devant les
clients, non ? je réponds de manière tout à fait sérieuse.

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– Qu’y a-t-il, Mia ? demande-t-elle froidement.
– Est-ce qu’il est possible pour les escorts de revoir leurs clients après une
mission ?
– Oh, non, je t’en supplie. Ne me dis pas que tu es tombée amoureuse de
monsieur Channing ?!
– Non ! Ce n’est pas ça du tout !
Enfin… Non, pas vraiment. Pas du tout même. Je crois.
– C’est juste qu’on est devenus amis et j’aimerais garder contact avec lui sans
enfreindre de règles.
Tante Millie soupire lentement.
– Aucune règle ne l’interdit, mais fais attention, Mia. Ces hommes peuvent te
promettre la lune, ça ne veut pas dire qu’ils la décrocheront pour toi. Crois-moi,
j’ai déjà entendu ça. Trop de fois, d’ailleurs.
– Alors, il n’y a rien qui l’interdit ?
– Non, mais… protège ton cœur, ma poupée. Ce métier n’est pas pour tout le
monde et tu as déjà beaucoup souffert pour quelqu’un de si jeune. Prends le
temps de t’amuser, de te détendre, et goûte à tout ce que la vie peut t’offrir. C’est
sans doute ta seule occasion de le faire. Appelle-moi quand tu auras rencontré
monsieur Dubois. Je t’envoie les infos par mail, annonce-t-elle avant de
raccrocher.
Je ravale le nœud qui se forme dans ma gorge. Ma tante a raison. Je ne peux pas
laisser Wes me convaincre qu’il pourrait y avoir quelque chose de sérieux entre
nous. Je m’envole pour Seattle dans quelques jours.
*
* *
– Chérie, je suis rentré ! s’écrie Wes.
Je suis dans la piscine, en train de me détendre, lorsqu’il sort dans le patio en
costume, tout sourires. Mon Dieu, que ce mec est sexy ! Il est toujours beau
gosse, mais quand il est en costume… il est à croquer.
– Tu rentres tôt, non ? Il n’est que quatorze heures trente, dis-je en me soulevant
pour m’asseoir sur le bord de la piscine, du côté opposé à Wes.

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Il s’arrête au bord de l’eau, et son regard balaie mon corps avec un regard si
brûlant que je sens ses yeux sur mes cuisses, mes seins et ma gorge. Je le regarde
enlever ses chaussures, puis sa veste, et je m’appuie sur mes mains en me
cambrant pour remonter mes seins vers le ciel en penchant la tête en arrière.
J’écarte un peu les jambes, et lorsque je relève la tête pour voir si mon petit
spectacle fonctionne, j’entends un énorme plouf. Wes nage vers moi, tout
habillé, comme un requin nageant sur sa proie. Il émerge de l’eau et je me
penche pour saisir sa cravate et le tirer entre mes jambes. Il pose ses mains sur
mes genoux et les écarte davantage.
– C’était impulsif, dis donc, dis-je en effleurant sa bouche.
Je ne l’embrasse pas, laissant l’eau de la piscine ruisseler entre nous.
– Tu trouves ? Alors, tu vas adorer ça, dit-il.
Il fond sur ma bouche et sa langue s’y engouffre, m’embrassant comme si c’était
la dernière fois.
– J’ai pensé à toi toute la journée, grogne-t-il.
Il promène sa langue sur mon cou, puis sur ma poitrine. Ses doigts glissent sous
les triangles de mon bikini et les écarte, libérant mes seins.
– Putain, j’adore tes seins, dit-il en léchant une pointe avant de la sucer.
Je gémis en plongeant mes mains dans ses cheveux pour le tenir en place, mais
Wes ne semble pas avoir l’intention d’arrêter. Il continue de torturer mes seins
jusqu’à ce que j’ondule contre son corps, cherchant n’importe quelle forme de
friction. Lorsque je suis au bord de l’orgasme – alors qu’il n’a touché que mes
seins –, il repousse mon torse pour m’allonger sur le béton froid. Il trouve les
nœuds de mon bikini sur mes hanches et il tire dessus. Mon Dieu, il va faire ça
ici, en pleine journée, à la vue de tous.
– Wes…
Je n’y crois pas moi-même. Je suis déjà sur un nuage. Si Miss Croft passe, elle
poursuivra sa route. Parce qu’elle est classe, contrairement à moi. Wes mordille
mes cuisses et sort mes pieds de l’eau pour les poser sur le rebord, pliant mes
jambes à quatre-vingt-dix degrés. Il saisit mes genoux et les ouvre, m’écartant
comme les ailes d’un papillon prêt à s’envoler. Et mon Dieu, je m’envole. Sa
langue m’a à peine touchée que je sens les premières contractions de mon

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orgasme. J’empoigne ses cheveux, mais il prend mes mains et les glisse sous
mes fesses.
– Tu t’assieds dessus. Pas le droit de toucher, gronde-t-il.
Alors, c’est comme ça qu’il veut la jouer ? Il veut garder tout le contrôle, ce qui
veut dire qu’il va me pousser à ma limite et me faire jouir une fois après l’autre.
Il l’a déjà fait, une fois, et il m’a donné tant d’orgasmes que je me suis évanouie
alors que j’étais à cheval sur lui. C’était l’expérience la plus sensuelle et la plus
charnelle de toute ma vie. Jusqu’à celle-ci.
Du bout des doigts, il écarte mes lèvres et pose sa langue sur mon sexe,
m’offrant mon premier orgasme. Ensuite, il se met à grogner dans ma chair,
chantant une sorte de cantique coquin.
– Je te baise.
– Je te dévore.
– Je te suce.
– Encore. Encore.
– Putain, Mia, je pourrais te bouffer toute la journée.
À peine a-t-il prononcé ces mots qu’il suce mon clitoris aussi fort que possible,
et je m’échappe sur un deuxième nuage orgasmique. Mon corps est parcouru de
spasmes et je n’ai pas le temps de m’en remettre que Wes me soulève pour me
replonger dans l’eau.
Le choc de température et de sensations décuple mon orgasme, et je n’ai pas
atterri qu’il passe mes jambes autour de sa taille et plaque mon dos contre le mur
de la piscine.
– J’ai tellement envie de toi, chérie. Je veux que tu me sentes en toi, même
quand tu ne seras plus là, grogne-t-il en me pénétrant brusquement.
Je ne l’ai même pas vu enlever son pantalon, qui doit flotter quelque part dans la
piscine. Quant au reste, il est toujours en chemise et en cravate. Je m’accroche
au tissu mouillé tandis qu’il s’enfonce rapidement et profondément en moi. Je
crois qu’il ne sait même pas qu’il parle, mais je m’accroche à chacun de ses
mots, gravant chaque phrase dans ma mémoire pour me replonger dans ce
souvenir plus tard quand j’aurai besoin de lui… lorsqu’il me manquera.
– J’étais ici.

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– Ensemble.
– Putain.
– J’adore.
– Ne m’oublie pas.
– Ne m’oublie pas, répète-t-il plus fort en s’enfouissant en moi, touchant le point
qui me fait basculer, m’offrant l’orgasme le plus puissant et le plus long de toute
ma vie.
Je m’entends crier, mais mon corps ne m’appartient plus. Ma voix n’est plus la
mienne. Lorsque je reprends mes esprits, sa bouche est sur la mienne. Nous
restons connectés au bassin tandis qu’il me porte dans sa chambre et qu’il
m’allonge sur son lit. Il ne me quitte qu’une seconde, le temps d’enlever sa
chemise et sa cravate, puis il s’étend sur moi. Il écarte mes jambes et replonge en
moi.
Cependant, cette fois-ci, il ne me baise pas. Il me fait lentement l’amour.
*
* *
– Salut ma salope ! Ça fait longtemps ! crie Ginelle d’une voix agacée.
– Salut ma pute, désolée de ne pas t’avoir appelée, mais je travaillais.
– Ouais, si on appelle chevaucher la queue de Weston du boulot, rétorque-t-elle
sur un ton légèrement plus enjoué.
– Nous n’avons pas toutes le talent nécessaire pour danser comme une déesse, tu
sais.
– C’est vrai… dit-elle en faisant traîner la dernière syllabe.
– Tu me manques, je déclare d’une voix tremblante.
Ginelle soupire longuement avant de répondre.
– Ta vieille tronche me manque aussi. Je me fais beaucoup plus draguer quand tu
n’es pas là, à croire que tu es plus jolie que moi. Je rêve.
C’est comme ça que je sais qu’elle a pardonné mon silence.
– Comment va mon père ? je demande alors que je suis morte de trouille
d’entendre la réponse.
– Physiquement, il va mieux. Il ne s’est toujours pas réveillé, mais ils l’ont sorti
des soins intensifs, donc c’est bon signe.

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C’est un bon signe, c’est vrai. Ça signifie qu’il va survivre, mais qu’il n’est pas
encore tiré d’affaire.
– Est-ce qu’ils savent pourquoi il n’est pas sorti du coma ?
– Ils ne me disent pas grand-chose, tu sais, Mia. Officiellement, je ne fais pas
partie de la famille.
C’est absurde, Ginelle fait davantage partie de la famille que tous les membres
des deux côtés que l’on ne voit jamais. Elle est la seule en qui j’ai confiance.
– Merci de lui avoir rendu visite, en tout cas. Comment va Maddy ? je ne lui ai
parlé qu’une fois et ce n’était que quelques minutes entre deux cours. Elle a l’air
de crouler sous les devoirs.
– Ouais, c’est vrai. Et elle s’inquiète de ne pas avoir assez d’argent. Les factures
commencent à s’entasser. Tu veux que je lui donne du cash ?
– Non, non ! J’ai de l’argent. Enfin, je vais en avoir beaucoup dans une semaine.
Assez pour les factures et la nourriture. Et bientôt, je vais en avoir encore plus !
Il faut juste que je prenne l’avion la semaine prochaine, et j’aurai cent mille
dollars sur mon compte en banque. J’ai aussi la possibilité de gagner vingt mille
de plus, et ça, ce ne sera que pour moi.
– Ah bon ? Comment ? demande-t-elle en tirant sur sa cigarette.
Je ronge l’ongle de mon pouce et j’en regarde la pointe dentelée.
– Mon prochain client est artiste et je vais être sa muse, ou un truc comme ça. Il
veut que je pose nue pour lui. Si je le fais, je me fais vingt mille dollars.
– Putain ! Je me désape tous les jours et personne ne me file vingt mille balles !
Donne-moi le numéro de Tata Millie, je veux du fric, moi aussi, grogne-t-elle.
J’éclate de rire. Bon sang, ça me fait un bien fou de parler à ma meilleure amie.
Ça me rappelle qui je suis et d’où je viens. Je suis peut-être habillée comme une
Barbie, mais je reste Mia Saunders. Celle qui a élevé sa petite sœur, qui s’est
débrouillée toute seule et qui va sauver son père… pour la énième fois. Avec un
peu de chance, ce sera la dernière. J’espère que lorsqu’il se réveillera et qu’il se
rendra compte de ce qu’il a fait, il apprendra la leçon. Peut-être qu’il arrêtera de
boire et qu’il ira voir un psy.
– Tu vas rentrer, ou pas ? demande Gin tandis que je sors du dressing la robe que
je vais porter ce soir.

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Wes m’emmène à un cocktail avec les acteurs du film. Ça a l’air chouette et je
vais rencontrer des gens célèbres avec qui j’espère travailler un jour. Pour
l’instant, ma carrière d’actrice s’est éloignée. Je trouve drôle d’avoir enfin un
pied dans le milieu du cinéma alors que je ne suis pas en mesure d’aller à des
auditions ni de faire quoi que ce soit. Tant que mon père n’est pas sorti de ce
pétrin, cette partie de ma vie est en suspens.
– J’aimerais bien, mais je dois aller à Seattle trois jours après avoir quitté
Malibu. Tante Millie m’a prévu un tas de rendez-vous chez l’esthéticienne et
compagnie durant ces trois jours. Mais j’essaierai le mois prochain, promis.
– Eh, ne t’en fais pas, je sais que tu as autant envie de rentrer que j’ai envie de
voir ton gros cul. Tout va bien se passer ici. Bon sang, Mia, il faut que ton père
comprenne, cette fois-ci. Tu ne peux pas continuer à tout chambouler chaque
fois qu’il fait une connerie.
– Je n’ai pas le choix, Gin, si je ne le fais pas, ils vont le tuer. Et il est dans le
coma, ce n’est pas comme s’il pouvait se défendre.
Ce n’est pas la première fois que nous avons cette conversation. J’aime Ginelle
du fond du cœur, mais elle m’a déjà fait la leçon des dizaines de fois à ce sujet.
Ce n’est pas que j’aie envie d’aider mon père, c’est simplement que je ne peux
pas laisser les molosses de Blaine le tuer. Blaine n’hésiterait pas une seconde à
mettre sa menace à exécution – il serait plus inquiet à l’idée de tacher son
costume Armani de sang que d’ôter la vie à mon père.
Il y a un bruissement au bout du fil, puis j’entends les jingles et les alarmes des
machines à sous tandis que Ginelle retraverse le casino.
– Promets-moi simplement que tu trouveras un moyen de vivre ta vie ?
– Mais oui, mais oui. De toute façon, je m’amuse pas mal ici, à Malibu. Wes m’a
appris à surfer !
– Ok, ça c’est très cool. Je n’ai jamais vu l’océan, grogne-t-elle. Quand ton job
t’aura rendue riche, tu m’emmèneras à la plage ?
J’éclate de rire.
– Pour voir ton cul de salope en bikini ? Beurk.
Je fais un bruit de régurgitation et je fais semblant de m’étouffer.

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– Tu es tordue, tu sais. Je crois que je vais annuler ton statut de meilleure amie,
crache-t-elle.
– Tu ne peux pas révoquer mon statut – je le suis et puis c’est tout. Comme les
dix commandements, c’est comme ça.
– Tu viens de comparer notre amitié aux dix commandements ? Tu es sérieuse ?
– Euh… ouais !
– Tu vas aller en enfer, déclare-t-elle.
– Si c’est le cas, tu auras intérêt à être là pour venir me chercher !
Elle glousse et je souris en serrant fort mon téléphone.
– Bien sûr que je serai là.
– Je t’aime.
– Je t’aime aussi, salope.

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Chapitre 8

La réception se déroule au restaurant Nubu, le plus chic de Malibu. Tous les


acteurs et les scénaristes de Honor Code sont là. Lorsque nous arrivons, une
hôtesse nous guide dans le jardin privatisé. Un plancher en bois massif recouvre
le sol de l’immense véranda, ornée d’un mobilier en osier couvert de coussins
moelleux. Le jardin offre une vue à cent quatre-vingts degrés de l’océan dans
lequel le soleil couchant se fond en des mélanges de rose et d’orange qui sont à
couper le souffle. Je m’appuie à la rambarde de la terrasse, face à la plage, et
Wes me prend dans ses bras par-derrière, me serrant contre son torse.
– Magnifique, dit-il dans mon oreille.
– Oui, c’est sublime, je réponds.
– Je ne parlais pas de la vue.
Il me mord le cou, m’envoyant une avalanche de frissons entre les jambes.
– Espèce de beau parleur, dis-je en lui pinçant la cuisse.
– Aïe ! Très bien, je ne te ferai plus de compliments, répond-il, feignant d’être
vexé.
Je tourne la tête et saisis sa nuque pour l’embrasser. Il a passé la journée au
studio de production et il m’a manqué. C’est la première fois que j’ai l’occasion
de l’embrasser. Il grogne dans ma bouche et recule pour me dévisager. Après un
long moment, il secoue la tête et sourit. Je sais qu’il veut dire quelque chose,
mais je sais aussi que je n’ai pas la force de l’entendre.
– On va boire un verre et manger un bout ?
– Ok, répond-il d’une voix déçue.
Il prend ma main et m’emmène au bar, où nous commandons à boire, puis nous
nous servons sur le plateau que nous présente le serveur. Nous mangeons nos

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canapés asiatiques lorsque la plus belle femme du monde traverse la foule pour
nous rejoindre. Elle porte une robe bustier rouge cerise qui met parfaitement ses
atouts en valeur. Elle s’arrête juste au-dessus du genou, révélant des jambes
interminables. Ses cheveux noirs et épais ressemblent beaucoup aux miens, sauf
que les siens forment des anglaises parfaites qui rebondissent sur la peau pâle de
ses épaules. Cette femme est le fantasme de tous les hommes, et le cauchemar de
toutes les femmes. Sauf le mien, parce que moi j’aimerais être elle.
– Gina, dit Wes en lui tendant la main. J’aimerais te présenter mon amie, Mia
Saunders.
Elle écarquille les yeux et sourit lorsqu’il prononce le mot « amie ». Elle pose
une main sur son épaule et le regarde en battant des cils, puis elle se tourne vers
moi. Wes semble déjà envoûté, et moi aussi.
– Gina DeLuca, dit-elle en me tendant la main. Les amies de Wes sont mes
amies, dit-elle d’une voix grave et sensuelle.
Nous nous serrons la main et elle se place devant moi, pressant sa poitrine sur le
torse de Wes.
– J’ai vraiment hâte de commencer le tournage. L’histoire est fascinante, dit-elle
en caressant son col.
Wes reste immobile, sans voix, dévisageant la belle tentatrice comme s’il était
hypnotisé. J’ai presque l’impression d’interrompre un moment privé. En dépit de
la promesse que je me suis faite, je sens que je commence à être jalouse. Certes,
officiellement, je ne suis pas la copine de Wes, mais il me reste encore quelques
jours avec lui, bon sang ! J’essaie de me racler la gorge, mais ni Gina ni Wes ne
semblent remarquer mon existence.
– Tu sais, tu pourrais passer chez moi un de ces quatre pour mieux m’expliquer
le personnage, dit-elle.
Soudain, je bous de rage – elle se prend pour qui, cette garce ?
– Euh, ouais, pourquoi pas, ce serait…
Je ne laisse pas Wes aller au bout de sa réponse, parce que j’en ai eu assez.
– Chéri, je meurs de faim. On passe à table ? je demande en battant des cils à
mon tour, même si je suis sûre qu’ils n’ont pas le même effet que ceux de Gina.

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Wes me regarde, secoue la tête et sourit. Ses yeux pétillent lorsqu’il passe son
bras autour de moi et qu’il m’attire à lui.
– Je suis à tes ordres, Mia, dit-il en m’embrassant le front. Désolé, Gina, tu veux
bien nous excuser ?
Je suis ravie de la voir bouche bée. Elle semble outrée que je lui aie cassé son
coup – alors qu’en vérité, c’est elle qui a cassé le mien.
– Mia ? Comme dans le film ? demande-t-elle.
Wes me regarde en dégainant son sourire orgasmique, puis il répond.
– Oui, comme ça, je n’oublierai jamais ma nana, dit-il sans regarder Gina.
– L’oublier ? Pourquoi, tu vas où ? demande-t-elle en croisant les bras sur sa
poitrine généreuse.
J’inspire lentement avant de répondre.
– Seattle, je réponds.
La grimace de Wes ne m’échappe pas.
– Ah bon ? Pourquoi ?
– Pour le travail.
Je n’ai rien de mieux à dire. C’est la vérité, et je ne peux pas dire à cette nana
que je suis payée pour être là et que Wes peut baiser qui il veut.
– Ah ? Et tu fais quel genre de boulot ?
– Eh bien, pour celui-ci, je vais être modèle pour un artiste.
– Je vois, et… est-ce que tu seras habillée, pour cet artiste ? demande-t-elle en
souriant faussement.
Elle est perspicace, cette garce.
– Je crois que ça suffit, Gina. On se voit la semaine prochaine. Viens Mia, allons
chercher à manger, dit-il en me prenant par la hanche pour m’éloigner de
l’actrice.
Nous nous installons à une table d’où la vue sur l’océan est encore plus belle. Un
serveur nous apporte nos verres et nous sert deux assiettes de petits fours. J’ai à
peine le temps de mettre un canapé dans ma bouche que Wes passe à l’attaque.
– Alors… Seattle ?
Je n’ai aucune envie d’avoir cette conversation et je me contente de hocher la
tête.

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– Et… est-ce que la supposition de Gina est juste ?
J’enfourne un second canapé dans ma bouche, me retenant de gémir tant
l’explosion de saveurs est délicieuse.
– Est-ce qu’elle a raison, Mia ? Tu vas poser nue pour un artiste ?
Je hausse les épaules.
– La question est pourtant simple, dit-il en serrant les dents.
– Peut-être. Il peint des nus, donc c’est possible.
Il n’a pas besoin de savoir que j’ai déjà prévu de me mettre à poil.
Wes secoue la tête et boit une longue gorgée de bière.
– Putain, il me faut quelque chose de plus fort.
Il se lève et part d’un pas rapide vers le bar. Je recule dans ma chaise et je fais un
point sur le déroulement de la soirée. J’ai été jalouse de lui, et maintenant il est
jaloux d’un mec qu’aucun de nous n’a rencontré. Qu’est-ce qui se passe, bon
sang ?
Il revient avec un verre plein d’un liquide ambré qui me file la nausée. Depuis le
premier soir, il n’a plus bu de whisky, ce que j’apprécie énormément. Ce soir, il
le boit comme du petit-lait.
– Pourquoi tu es en colère ?
Il secoue la tête.
– Je ne suis pas en colère, rétorque-il.
– Je sais quand tu es en colère, Wes. Ça fait presque un mois qu’on vit ensemble.
– Tu as vraiment envie de faire ce job ? demande-t-il enfin.
– Ce n’est pas une question d’envie. Je n’ai pas le choix ! je m’exclame.
Il regarde autour de nous pour s’assurer que personne ne nous écoute.
– Bien sûr que tu as le choix. On a toujours le choix. Tu pourrais très bien rester
ici avec moi.
Et voilà, le pas est franchi. Il veut que je reste, alors qu’il sait que c’est
impossible.
– Ne commence pas…
– Pourquoi pas ?! Parce que ça te forcera à ressentir quelque chose ? crache-t-il.
Je me lève et je m’éloigne à grandes enjambées. Wes ne me suit pas.
*
* *

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* *
Je suis tirée d’un profond sommeil par un bruit de verre brisé. Je me lève et
marche dans le couloir sur la pointe des pieds, sans bruit, jusqu’à ce que je
trouve Wes, mort de rire, se débattant pour enlever sa veste.
Je vais à lui pour l’aider, ce qui est une mauvaise idée, car la veste n’a pas
touché le sol qu’il me plaque contre le mur et qu’il se jette sur mon cou. Il me
mord trop fort et je pousse un cri en le repoussant.
– Mia, Mia, Mia. J’ai trop besoin de toi. Je ne veux pas te perdre… S’il te plaît.
– Allez viens, je vais te mettre au lit, je dis en essayant de le soutenir.
Nous faisons quelques pas, puis il s’arrête et me serre dans ses bras en me
plaquant contre un autre mur. Cette fois-ci, sa main s’empare de mon sein et je
gémis quand il pince mon téton.
– Putain, j’adore les bruits que tu fais. Ça me rend tellement dur.
Il ne plaisante pas, car je sens son érection contre ma hanche. Je n’ai pas le
temps de me dégager, car il me soulève dans ses bras, une main sous les genoux
et l’autre autour de ma taille. Il a beau être ivre, il sait ce qu’il fait – il est
simplement moins coordonné et plus brouillon.
– Wes, pas ici. Il faut que tu dormes.
– Tu peux venir avec moi ? supplie-t-il en me mordillant le cou. Reste avec moi
dans mon lit.
– Oui, d’accord, on peut baiser dans ton lit cette fois-ci.
Dans sa chambre, il me tourne et m’empoigne par le bassin pour m’embrasser.
Même avec un goût de whisky, je ne peux me passer de sa bouche.
– Non, je veux que tu dormes avec moi. Toute la nuit. Je veux me réveiller avec
toi, dit-il en me tirant vers le lit.
Il s’assied, baisse ma culotte, enlève mon débardeur et me regarde, debout, nue
devant lui.
– J’adore ton corps.
Sa main se promène sur ma clavicule puis sur mon sein, qu’il pince légèrement,
sur ma taille, sur ma hanche et sur ma cuisse.
– Juste cette fois. Reste toute la nuit. Laisse-moi me réveiller avec toi.

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Il se penche et prend un téton dans sa bouche. Des décharges électriques
parcourent mon corps.
– Juste une fois, répète-t-il.
C’est la deuxième fois que nous faisons l’amour, mais cette fois-ci est teintée de
désespoir. Au milieu de la nuit, Wes se réveille sobre et me prend de nouveau en
me chuchotant qu’il veut tout refaire avec moi pour être sûr de ne jamais
l’oublier.
*
* *
Lorsque je me réveille, Wes me regarde dormir. Ses cheveux sont tombés sur
son front et je lève une main pour les repousser, voulant voir tout son visage
dans la lumière du matin.
– Pourquoi tu fais ce travail ? demande-t-il.
Sa voix est dénuée de jugement. C’est une simple question, comme s’il mourait
d’envie de me la poser depuis que nous nous sommes rencontrés. Sans doute est-
ce le cas.
Il mérite de savoir pourquoi je ne peux pas lui offrir davantage. Je sais qu’il veut
que je reste, qu’il veut que je vive avec lui pour voir où cette histoire peut nous
mener. Il sait que ça ne me dérange pas qu’il soit aussi occupé, et il m’a dit que
c’est une des raisons pour lesquelles il ne veut pas de relation sérieuse. Je ne suis
pas collante comme la plupart des femmes trophées et, justement, je n’ai pas
envie d’être une simple femme trophée ni même une simple copine. J’ai besoin
de tracer mon propre chemin et d’être indépendante. Or, je ne le peux pas pour
l’instant, parce que je dois aider mon père.
Au lieu d’effleurer la vérité ou d’inventer quelque chose, je lui explique la
situation telle qu’elle est.
– Mon père doit de l’argent à des types très dangereux. Beaucoup d’argent.
– J’ai beaucoup d’argent, dit-il doucement.
J’ai les larmes aux yeux lorsque je me tourne vers lui.
– Oui, c’est vrai, mais c’est ton argent. Mon père s’est endetté auprès d’usuriers
parce qu’il ne peut pas s’empêcher de jouer dans des casinos et de parier. Je
travaille pour rembourser sa dette.

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– Combien ?
– Un million.
Il expire lentement.
– J’ai vraiment beaucoup d’argent, Mia. Je peux t’aider.
Je secoue la tête. Je savais qu’un mec aussi généreux que Wes voudrait aider ma
famille, seulement ce sont mes problèmes, pas les siens.
– Je sais que tu peux m’aider, mais je ne te l’ai pas demandé.
Il est crucial qu’il comprenne que c’est ma décision. Je ne suis pas une
demoiselle en détresse et il n’est pas mon chevalier en armure. Les contes de
fées n’existent pas, surtout pour les nanas de Las Vegas avec un bagage
émotionnel aussi lourd que le mien.
– Et si je te dis que j’ai quand même envie de t’aider ?
– Tu es très gentil, Wes.
Il secoue de nouveau la tête et s’allonge sur le dos.
– Non, Mia, je ne le suis pas. Je suis égoïste. Je ne veux pas que tu partes et que
tu poses pour un artiste plein aux as à Seattle. Je te veux ici, avec moi, dans ma
maison et dans mon lit. Je paierais n’importe quoi pour avoir ça.
J’en ai le souffle coupé et je mets un moment à parler.
– Est-ce que tu m’aimes, Wes ?
Il plonge son regard dans le mien.
– Euh… Je sais que je t’apprécie – énormément, même.
Je souris et je promène mon doigt, du haut de son front à son menton.
– Je t’apprécie énormément, moi aussi. Vraiment. Mais c’est quelque chose que
je dois faire. Pas seulement pour mon père – même si c’est la raison principale –
mais pour moi, aussi. Et toi, tu dois te concentrer. Le tournage de ton film
commence la semaine prochaine. Tu vas diriger des scènes pour la première
fois…
Wes passe sa main dans mes cheveux.
– Je sais tout ça. Ça ne change pas le fait que je te veux avec moi.
– Je sais, je comprends. Pour être honnête, je n’ai pas envie de partir, mais c’est
ce qui va se passer. Et on va rester amis, toi et moi, n’est-ce pas ?

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Il soupire et me tire pour m’étendre sur lui. J’appuie mes bras sur son torse et
mon menton sur son sternum.
– Bien sûr. Tu es le meilleur pote que j’aie eu de toute ma vie.
Je hausse les sourcils.
– Je veux dire que tu es la meilleure amie fille que j’aie eue.
– Je comprends, je réponds en lui faisant un baiser sur la bouche.
– Alors, tu pars dans deux jours, et je ne peux rien faire pour te faire changer
d’avis ?
Je secoue la tête et pose mon oreille contre son cœur, écoutant ses battements
lents. Au fond de moi, je sais que la seule raison qui pourrait me faire envisager
de rester serait qu’il m’aime. Je ne peux pas nier que j’ai des sentiments pour lui
et que je me retiens parce que l’amour n’est pas une possibilité – pas après que je
suis tombé amoureuse de tous les hommes avec qui j’ai couché. Cette fois-ci,
avec Wes, je me suis protégée de manière si féroce qu’il n’a eu que des petits
bouts de mon cœur.
– Qu’est-ce que ça veut dire, pour nous ? demande-t-il en empoignant mes
fesses.
Bon sang, son talent au pieu va vraiment me manquer. Mon vibromasseur va me
paraître sacrément ennuyeux, à présent.
– Et si on se contentait de dire que nous sommes amis ?
Il grimace.
– Meilleurs amis ? ajoute-t-il.
Il me soulève par la taille pour me placer au-dessus de son érection et je
descends lentement, enfonçant toute sa longueur en moi. Ce mec est foutrement
bien gaulé – et il sait se servir de ce que la nature lui a donné.
– Des meilleurs amis qui se veulent du bien, je dis en mettant un coup de bassin
et en penchant ma tête en arrière.
Je pose mes mains sur ses pectoraux musclés et je contracte les muscles de mon
sexe.
– Ça me va, dit-il en me soulevant pour me renfoncer sur lui.
Nous crions tous les deux à l’unisson.
– Maintenant, chevauche-moi, ajoute-t-il.

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Chapitre 9

– Q u’est-ce que tu veux faire aujourd’hui ? demande Wes lorsque j’entre dans
la cuisine.
Je suis surprise de constater que c’est lui qui fait à manger.
– Où est Judi ? je demande.
– Je lui ai donné sa journée. Je voulais être seul avec toi pour ton dernier jour,
répond-il avec un sourire et un clin d’œil.
Je m’assieds au bar où il finit de préparer notre petit déjeuner. J’ouvre grand les
yeux en regardant la pile de pancakes dégoulinante de beurre et de sirop
d’érable. Il termine le tout par une dose de chantilly, et lorsqu’il pousse l’assiette
vers moi, je découvre qu’il a dessiné un sourire sur le premier pancake.
– Ce sont des happy cakes, annonce-t-il en jouant des sourcils.
Cet homme est plein de surprises – c’est un surfeur, un acharné du travail, qui
loue des escorts et conduit une Jeep, qui est plein aux as et qui fait des pancakes
avec des smiley dessus.
– Quoi ? dit-il en penchant la tête sur le côté.
Ses joues sont couvertes de cette petite barbe du matin à laquelle je me suis
habituée et que j’adore. Je secoue la tête en coupant une part dans la pile des
cinq pancakes.
– Tu me déconcertes, c’est tout. Chaque fois que je pense t’avoir cerné, tu
révèles un autre aspect de ta personnalité.
Wes hoche la tête et entame son petit déjeuner.
– Que dire ? J’aime te surprendre, déclare-t-il en souriant.
– C’est réussi. Mais revenons-en à ta question, dis-je la bouche pleine des
meilleurs pancakes au monde. Aujourd’hui, j’aimerais faire un tour à moto.

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Il hoche la tête.
– Ça me va, où va-t-on ?
Je souris en rejetant mes cheveux par-dessus mon épaule.
– Nous irons là où nous guide la moto. Ce n’est pas la destination qui compte,
c’est la route.
Wes fait le tour du bar, s’assied à côté de moi et me regarde. Je me tourne vers
lui, pensant qu’il veut m’embrasser, car d’habitude c’est la première chose qu’il
fait le matin. Or, aujourd’hui n’est pas une journée ordinaire. Tout semble
pesant, écrasé par mon départ imminent. Au lieu de m’embrasser, Wes dépose
une goutte de chantilly sur mon nez.
– Waouh, quelle philosophe ! dit-il en se moquant de moi.
– Tais-toi ! je m’exclame en le poussant.
– Attends, Mia. Ce n’est pas la destination, c’est la route ? Tu sors ça d’où ?
Dis-moi la vérité, c’était écrit sur un autocollant quand tu as acheté la moto,
n’est-ce pas ?
– Mais c’est vrai !
Je secoue la tête et recommence à manger. De temps en temps, il me met un
coup de coude dans les côtes pour me faire savoir qu’il me chambre. Bon sang,
ce beau gosse va me manquer – plus que je n’ai envie de l’admettre.
Beaucoup plus.
*
* *
– Hey ! siffle Wes lorsque j’entre dans le garage où est garée ma moto.
Il ne parle pas de Suzi, mais de moi. Il me mate des pieds à la tête, depuis mes
cuissardes à ma veste en cuir noir en passant par mon jean slim et mon t-shirt
Radiohead.
– Ça te plaît ? je demande en me déhanchant, consciente que ça accentue mes
courbes.
Car je sais que mes courbes lui plaisent. Il m’a dit des tonnes de fois qu’il était
amoureux de mon corps. Il aime les femmes avec des formes – pas les brindilles
avec un corps d’enfant.

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Il pourrait me mentir, bien sûr, mais à en juger à l’expression sur son visage, je
ne pense pas que ce soit le cas.
Il jette son blouson en cuir sur le siège de la moto, fait le tour de la Jeep et prend
possession de ma bouche. Pour Wes, un baiser n’est pas un simple préliminaire.
C’est un moyen de me marquer à vif, de laisser son goût dans ma bouche afin
que je l’emporte avec moi toute la journée. Je n’oublierai pas un seul de ses
baisers, tant ils sont délicieux. Il alterne entre de petits mordillements et de longs
coups de langue. Quant à ses mains, elles sont magiques. Il sait toujours où
caresser, quand pincer, quand chatouiller. Sa main est sur mes fesses tandis que
l’autre est sur mon sein, il les malaxe avec une expertise exquise.
Je suce sa langue, puis je mords sa lèvre jusqu’à ce qu’il gémisse. Il rompt le
baiser et appuie son front sur le mien.
– Je croyais qu’on allait faire un tour, je chuchote contre ses lèvres.
– Ouais, ça, c’était avant que je te voie comme ça. Maintenant, ma bite a
d’autres idées.
Il avance son bassin contre le mien pour me faire sentir son érection. Cependant,
je parviens – non sans efforts – à reculer. Je pose mes mains sur ses joues et je
plonge mon regard dans le sien.
– Plus tard. L’attente rendra ça meilleur, dis-je avant de mordre sa lèvre une
dernière fois.
Je retourne auprès de Suzi et monte dessus.
– Salut ma belle, dis-je en tapotant son réservoir. Tu es prête à montrer à Wes ce
dont tu es capable ?
– Euh, je pense que tu dois reculer pour que je puisse monter, dit Wes.
– J’ai du mal comprendre. Tu suggères que je m’asseye à l’arrière ? je demande
en haussant les sourcils.
Wes pose une main sur le guidon et l’autre sur sa hanche.
– Si ça implique que tes cuisses serrent mes fesses et que je sente tes seins dans
mon dos, alors oui, c’est ce que je suggère, dit-il.
– Dans ce cas, nous avons un problème, parce que Suzi est ma nana, et il n’y a
que moi qui la conduise. Donc, mon ami, ce sont tes cuisses qui vont serrer mes

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fesses, j’annonce en avançant pour lui faire de la place. À moins que tu craignes
d’endommager ta virilité ?
Wes me surprend en enfilant son blouson et en jetant sa jambe par-dessus Suzi
sans broncher. Cela dit, c’est parce qu’il a une idée en tête. Il a décidé de me
faire vibrer avant même que je n’aie démarré Suzi. Il se plaque contre moi, glisse
une main sous mon mon t-shirt, dégage mon soutif et s’empare de mon sein. Il le
tire et le titille jusqu’à ce que mon téton soit dur, et je gémis lorsqu’il lèche mon
cou. Je me cambre et j’appuie ma tête sur son épaule, reculant mes fesses contre
son érection. Je tourne la tête pour l’embrasser alors que ma braguette s’ouvre et
que sa main glisse dans mon string.
– Mon Dieu, je chuchote lorsqu’il plonge deux doigts en moi.
Ses doigts me fouillent tandis que son pouce titille mon clitoris. Il me cambre
contre lui, plongeant plus profondément en moi, continuant à m’explorer en me
mordant le cou. Je lève mon bassin, me frottant contre ses doigts pour atteindre
l’orgasme.
– C’est ça, Bébé, chuchote-t-il contre ma tempe.
Sa voix rauque m’excite encore plus et mon bassin accélère ses allers-retours,
forçant ses doigts à me baiser. Son autre main pince mon téton tandis qu’avec
l’autre, il frotte mon clitoris tout en me fouillant, pliant ses doigts pour former un
crochet et me faire atteindre le sommet de mon orgasme.
Putain.
Douce folie.
– C’est ça, Chérie, reviens-moi, chuchote Wes alors que son pouce continue
d’encercler mon clitoris, déclenchant des décharges de plaisir dans tout mon
corps, accompagnant mon retour sur terre. Je retire ce que j’ai dit, chuchote-t-il
avant de m’embrasser dans le cou.
– Qu’est-ce que t’as dit ?
– La destination était sympa, mais c’est la route qui a compté. Te regarder perdre
la tête comme ça, dans mes bras et sur cette moto, c’est quelque chose que je
n’oublierai jamais.
Moi non plus.
*
* *

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* *
Nous empruntons la Highway One1 pour admirer les innombrables points de vue
sur l’océan. Au détour d’un virage, Wes désigne un panneau délavé indiquant
une plage, et j’avance dans le chemin cabossé, m’arrêtant à un minuscule sentier
qui mène à une petite crique. Sur la plage, Wes enlève son sac à dos et en sort
une fine couverture. Il s’assied face à l’océan, et son regard se perd au loin. C’est
une plage publique, or nous sommes seuls – il semble n’y avoir personne à des
kilomètres à la ronde. Wes fouille dans son sac et en extrait des sandwichs.
– Tu as préparé un pique-nique aussi ? D’abord, les pancakes et maintenant ça ?
Laisse-moi deviner, c’est de la dinde label rouge avec du houmous maison et des
légumes frais ?
Il se couvre la bouche pour sourire en retroussant son nez.
– Perdu, Princesse, dit-il en me tendant la moitié d’un sandwich.
– Du beurre de cacahuète et de la confiture ? dis-je en ouvrant le sandwich et en
secouant la tête.
Je mords dedans et découvre le parfait ratio beurre de cacahuète/confiture. Il
sourit en me tendant un thermos, que j’ouvre pour boire, surprise d’y trouver du
lait.
– Du lait ?
– Je voulais te donner le meilleur, Miss Mia, dit-il en reprenant le thermos pour
boire à son tour.
– Tu savais que les sandwichs confiture-beurre de cacahuète étaient mes préférés
?
Il écarquille les yeux.
– C’est vrai, je suis sérieuse – j’adore. Et tu sais quoi ? J’adore ça. Être assise ici
avec toi après une virée à moto. C’est… eh bien… je ne l’oublierai pas, Wes. Ce
mois avec toi a été le plus beau de ma vie. Et je ne parle pas seulement du sexe.
Il hausse les sourcils.
– Ok, je parle du sexe, j’ajoute, et nous éclatons tous les deux de rire.
Il reprend une gorgée de lait avant de répondre.
– Je vois ce que tu veux dire. J’ai l’impression qu’avec toi, tout est facile.
Je penche la tête sur le côté et il sourit.

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– Mais non… Je ne dis pas que tu es facile, je dis que les choses sont agréables.
Tu ne m’as pas fait tourner en bourrique. Tes envies sont simples et tu ne fais
pas dans le mélodrame. Je ne pensais pas qu’un couple pouvait être comme ça.
– Je n’ai jamais connu ça moi non plus. Il y avait toujours quelque chose pour
gâcher l’histoire.
Wes regarde au loin et j’en profite pour admirer son profil. Sur l’échelle des
beaux gosses, Weston Channing est au sommet. Il est sexy sans effort – c’est
naturel, tout simplement. Il est détendu et élégant, même au saut du lit. Et là,
maintenant, sur cette plage abandonnée, alors qu’il se confie à moi… il est
irrésistible.
– Est-ce que tu as déjà été amoureux ?
Il tourne brusquement la tête vers moi en souriant légèrement. Il s’allonge sur le
dos en se redressant sur ses coudes, et il secoue la tête.
– Non, je ne crois pas. J’ai cru l’être, une ou deux fois, mais comme je l’ai dit,
les choses n’étaient jamais simples. Je crois que lorsqu’on aime quelqu’un, c’est
censé être facile. Les choses doivent trouver leur place naturellement, sans
forcer, non ?
Je hoche la tête.
– Les planètes, les lunes et les étoiles s’alignent et tout fonctionne, c’est ça ? je
réponds en souriant.
– Quelque chose comme ça, ouais, dit-il en riant. Et toi ?
– Moi quoi ?
– Tu as déjà été amoureuse ?
Je réfléchis si longtemps à ma réponse qu’il pose sa main sur mon épaule et la
serre délicatement.
– Tu n’es pas obligée de me le dire, ne t’en fais pas.
– Non, ce n’est pas ça. C’est juste qu’il serait plus simple de me demander s’il
m’est arrivé de ne pas tomber amoureuse. D’une certaine manière, je suis
tombée amoureuse de tous les hommes avec qui j’ai été. Hélas, ici, avec toi, je
me demande si j’étais vraiment amoureuse ou si j’étais simplement… accablée
par leur présence.
– Qu’est-ce qui te fait dire ça ?

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Je plie mes jambes pour ramener mes genoux sous mon menton.
– Je ne sais pas. C’est différent avec toi.
– Donc, pour résumer, ça fait un mois que tu es avec moi, tu as admis que le
sexe était le meilleur de toute ta vie…
Je lève les yeux au ciel, mais il poursuit.
– … tu as admis que c’était différent avec moi… est-ce que ça veut dire que tu
m’aimes ?
– Peut-être.
Je ne connais vraiment pas la réponse à sa question.
– Eh ben, waouh.
Il se tourne sur le côté et s’accoude pour appuyer sa tête dans sa main.
– Et si je te dis que je suis en train de tomber amoureux de toi ?
– Wes…
Il sait qu’il ne vaut mieux pas s’aventurer dans cette direction.
– Je suis sérieux, parlons-en une minute.
Il me force à m’allonger et à imiter sa pose afin que nous nous regardions dans
les yeux.
– Tu m’aimes peut-être, et moi je tombe amoureux de toi. Tu ne crois pas qu’on
devrait agir ?
– C’est le cas, je réponds en souriant. Nous allons rester amis. Tu vas travailler
et tourner ton film. Nous allons rester en contact, et quand j’aurai remboursé ma
dette…
Je plonge mon regard dans le sien et je me tais.
– Quand tu auras remboursé ta dette… quoi ?
– Je reviendrai à Los Angeles. Là où tu vis.
– Mais tu vas quand même partir demain, dit-il, et son regard s’emplit de
tristesse.
– Oui. Je pars demain.
Il hoche la tête et baisse les yeux.
– Donc, quand tu reviendras…
Cette fois-ci, c’est lui qui ne termine pas sa phrase.

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– Je ne veux pas que tu m’attendes, Wes. Si tu rencontres quelqu’un avec qui tu
te sens bien, profites-en. Fonce et amuse-toi. Un homme avec ton charisme
n’aura aucun mal à trouver quelqu’un pour réchauffer son lit.
– C’est ce que tu vas faire ? Laisser tes clients réchauffer ton lit ? demande-t-il
d’une voix froide à laquelle je ne m’attendais pas.
Je savais que cette conversation était risquée. Elle pourrait ruiner tout ce que
nous avons construit durant ce mois, et tout ce que nous pourrions construire à
l’avenir.
– Je dis simplement que pour l’année qui vient, chacun doit tracer son chemin.
Chacun doit faire ce qui lui fait envie.
Il soupire lentement et se rassied.
– Ça veut dire que tu ne vas pas m’attendre.
– Non, je réponds en secouant la tête. Je vais faire ce qui me semble bien sur le
moment, ce qui est bien pour moi. Et je veux que tu fasses la même chose, même
si je ne veux pas te perdre.
Il prend ma main pour l’embrasser.
– Je ne veux pas te perdre non plus. C’est juste que… j’essaie de me convaincre
que j’ai raison de te laisser partir. Parce que ça me semble être une connerie.
Il serre plus fort ma main, et cette fois-ci c’est moi qui embrasse la sienne.
– Pour moi aussi, mais c’est ce qui va se passer, et j’ai besoin que tu le respectes.
Tu peux faire ça pour moi ? Nous verrons où nous en sommes plus tard. Pour
l’instant, ça doit suffire.
– C’est loin d’être suffisant, Mia. Mais si c’est tout ce que j’ai, alors je m’en
contenterai.
Il m’attire à lui et me serre dans ses bras. Je m’accroche à lui, consciente qu’il
me faudra bientôt le lâcher.
*
* *
Toutes mes affaires sont dans le quatre-quatre que je regarde partir en direction
de chez moi. Le chauffeur a ma clé, et il va tout déposer chez moi avant de
laisser ma clé chez le concierge.

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Wes s’attend à ce que nous dînions ensemble une dernière fois, ce soir. Hélas, je
n’en ai pas la force. Lorsque nous sommes rentrés de la plage, hier, nous avons
passé l’après-midi et la soirée à faire l’amour, encore et encore, jusqu’à ce que
nous soyons épuisés et que nous nous effondrions, blottis l’un contre l’autre dans
son énorme lit. Il m’a dit qu’il rentrait à dix-huit heures pour m’emmener au
restaurant, mais je ne serai plus là. Je ne peux pas lui dire adieu après tout ce que
nous avons vécu ensemble.
C’est peut-être cliché, mais j’ai préféré coucher ce que je ressens sur le papier.
Weston Charles Channing III,
Je me fends la poire en écrivant ton nom. Tu l’as déjà dit à voix haute ? Fais-le
pour moi. C’est drôle, tu vas rire. En tout cas, moi j’ai ri.
Plus sérieusement, je veux te dire merci. Je m’attendais à détester chaque
seconde de ce boulot, or c’est la chose la plus exaltante que j’ai faite de toute
ma vie. Te rencontrer a été un cadeau. Tu es un cadeau, Wes. Je sais que c’est
naze, dit comme ça, et j’ai failli le rayer, mais tu dois l’entendre de la bouche de
quelqu’un qui tient à toi. Et je tiens à toi, Wes. Beaucoup. Plus que je ne le
devrais.
Être avec toi, passer du temps à tes côtés, m’a transformée. Pour le mieux, je
crois. À présent, j’ai l’impression que je peux endurer cette année tout en
apprenant quelque chose. Je vais sauver mon père, certes, mais je vais me
sauver également.
Il est temps que je vive pour moi. Si je restais chez toi et que je te laissais
résoudre mes problèmes en remboursant la dette de mon père, je le regretterais
jusqu’à la fin de mes jours. J’aurais toujours ça en tête et ça pèserait sur notre
relation. En partant, je pars parce que je l’ai décidé, et je pars alors que nous
sommes de bons amis. Des meilleurs amis. Des meilleurs amis qui se font du
bien.
Suis-je triste de partir ? Bien sûr. Je n’en ai pas envie, mais tu le sais déjà. Je
sais que ce que je fais est horrible pour nous deux, mais je sais également que
c’est la seule façon que j’ai d’être vraiment libre. Quelle est cette expression
déjà ? « Si tu aimes une personne, laisse-la partir, si elle ne revient pas, il n’y
avait aucune raison qu’elle reste avec toi. »

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J’espère revenir un jour. Si c’est dans les cartes, alors je reviendrai, n’est-ce
pas ? Sinon, nous aurons toujours un ami sur qui compter. J’espère sincèrement
que tu le comprends. Je te souhaite le meilleur, Wes. Tout le monde va adorer
ton film, parce que c’est toi qui l’as écrit et que tes paroles sont magnifiques.
Ce matin, quand tu pensais que je dormais, tu m’as embrassée et tu m’as dit : «
Ne m’oublie pas. » Wes, je te le promets, je n’oublierai jamais le temps que nous
avons passé ensemble, et surtout, je ne t’oublierai jamais, toi.
De tout mon cœur,
Mia
J’embrasse la lettre à côté de mon nom, laissant la trace rose bonbon de mes
lèvres. Un dernier baiser pour Wes.
*
* *
Les deux jours qui suivent sont un cauchemar de rendez-vous organisés par ma
tante pour me préparer à rencontrer l’artiste Alec Dubois. Les rendez-vous chez
le coiffeur et pour ma manucure-pédicure sont plutôt agréables, même si je les
trouve ennuyeux à mourir. J’aime être chouchoutée comme toutes les filles, mais
accorder des heures à mes cheveux et à mes ongles de mains et de pieds me
paraît tout simplement ridicule. Or, ce n’était pas le pire, car après ça, Millie m’a
envoyée chez l’esthéticienne.
Autant dire chez le bourreau Elle commence avec un masque apaisant pour le
visage, elle berce mes sens avec des parfums sublimes, de la musique relaxante
et un massage facial. Puis elle sort le gros néon aveuglant. Le choix s’impose
entre fermer les yeux et perdre la rétine. J’ai bien fait de fermer les yeux, car je
découvre que c’est le moment où elle dégaine « l’extracteur », une machine qui
racle la peau pour en sortir tous les points noirs et déboucher les pores. C’est
barbare. Cependant, je sors de là avec une peau lumineuse et parfaite, douce
comme les fesses d’un bébé.
Ensuite, ma journée continue pour le pire, car je dois me faire épiler. Partout.
L’artiste a des exigences très spécifiques. Si je me déshabille – et qu’il lâche
vingt-cinq mille dollars –, je ne peux avoir de poil nulle part. Heureusement, j’ai
le droit de garder le duvet sur mes bras. Quant au reste, bye bye. Je n’avais

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jamais eu droit à une épilation intégrale. D’abord, l’esthéticienne – cette sadique
– couvre chaque millimètre de mes parties intimes avec de la cire brûlante.
Lorsqu’elle refroidit et qu’elle durcit, elle appuie sur ma peau pour arracher tous
mes pauvres petits poils, me laissant davantage comme une petite fille que
comme une femme.
C’est déprimant, et je ne comprends pas pourquoi des femmes font ça
volontairement si elles ne sont pas payées une fortune. Je sais ce que j’y gagne,
moi – c’est quoi leur excuse, à elles ?
*
* *
Les gens finissent de s’installer avant le décollage lorsque mon téléphone sonne
dans la poche arrière de mon jean.
De : Wes Channing
Pour : Mia Saunders
J’ai eu ta lettre. Désolé de ne pas t’avoir écrit avant, j’ai pensé qu’il valait
mieux nous laisser du temps. Je veux te souhaiter un bon voyage. Il y a quelque
chose dans la poche avant de ton sac. Je t’appelle bientôt. Ne m’oublie pas.
Je sors mon sac de sous le siège avant en souriant. Je trouve une petite boîte
noire que je n’avais pas remarquée. Lorsque je l’ouvre, je souris si largement
que j’en ai mal aux joues. La boîte renferme une petite clé en bronze attachée à
une minuscule planche de surf jaune. C’est la clé dont je me servais lorsque
j’étais chez Wes. Ma clé. Il y a autre chose suspendu au porte-clés, à présent. Un
petit cœur rouge à paillettes.
Au fond de la boîte, je trouve un mot plié en quatre.
Mia,
Tu as oublié ta clé. Elle n’ouvre pas qu’une simple porte. J’espère qu’un jour tu
t’en serviras.
Wes
J’attrape les clés de Suzi et de mon appartement, et j’y attache la clé de Wes.
Son message est on ne peut plus clair. Si je reviens à lui, je dois être prête à lui
offrir mon cœur, car il m’a déjà donné le sien.

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1. Route célèbre de Californie qui longe la côte pacifique.

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FÉVRIER

Mia se rend à Seattle où elle sera la muse d'un célèbre peintre français.

L'amour sur toile, tel est le titre de l'œuvre du bel artiste avec lequel elle va
partager ce mois qui sera riche en émotions. Il faut dire qu'Alec est surprenant
dans son travail et qu'il a cette manie si sexy d'utiliser des expressions françaises
lorsqu'il s'adresse à Mia.

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Chapitre 1

La grille rouillée de l’ascenseur résonne d’un bruit métallique lorsque le


chauffeur la ferme. Il ne m’a pas adressé la parole depuis qu’il m’a demandé si
j’étais Mia, lorsque je suis arrivée à l’aéroport de Seattle. Il tenait une pancarte
avec mon nom dessus. Tante Millie m’avait dit de m’attendre à ce qu’un
bûcheron me conduise à mon prochain client, et elle ne s’est pas trompée, car ce
type est énorme. Il ne mesure que quelques centimètres de plus que moi, mais il
compense sa petite taille par sa largeur. Il me fait penser à un de ces
bodybuilders qu’on voit tirer des camions à la télé.
L’ascenseur monte au dixième étage et s’arrête dans un crissement de métal
rouillé, me projetant contre le torse de l’ogre qui m’accompagne. Il ne semble
pourtant pas le remarquer. Il se contente de grogner, puis il me guide dans un
loft au sol en béton et dont le plafond, dix mètres plus haut, est recouvert de
tuyaux. Il y a des gens partout, la moitié sont nus.
Mon Dieu, dans quoi me suis-je embarquée ?
Des cliquetis d’appareils photo retentissent partout tandis que des chariots pleins
de projecteurs sont poussés d’un côté à l’autre de la pièce par des hommes en
noir. Le bûcheron pose mon bagage au pied d’un mur et pointe du doigt un
homme accroupi, visage collé à un appareil photo.
– Monsieur Dubois, grommelle-t-il avant de tourner les talons et de remonter
dans l’ascenseur.
Je ne sais pas quoi faire. Est-ce que je dois m’asseoir quelque part et attendre
que quelqu’un vienne à moi – en priant pour que ce ne soit pas un des hommes à
poil – ou est-ce que je dois aller déranger l’artiste ?

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Plutôt que d’attendre, je décide de faire un tour de la pièce. Sur le mur de droite,
de vieilles fenêtres rétro, qui s’ouvrent à l’aide d’une manivelle, éclairent le loft.
Des femmes nues ou seins à l’air passent devant moi et me reluquent avant de
prendre place devant de grandes toiles blanches. Elles prennent une pose, que les
assistants en noir corrigent – en bougeant leur coude ou leur index d’à peine trois
millimètres sur la gauche ou sur la droite – avant de prendre la photo. Puis ils
recommencent – l’index bouge de deux millimètres dans l’autre sens – et ils
prennent un autre cliché. C’est bizarre.
Dans un autre coin de la pièce, un couple nu est allongé sur une gigantesque toile
blanche. Un assistant grimpe en haut d’une échelle menant à une plate-forme
située au-dessus du couple, sur lequel il verse méthodiquement le contenu d’un
seau de peinture bleue.
– Ne bougez pas ! hurle-t-il. Sinon il faudra que je recommence, et Monsieur
Dubois ne sera pas content !
Le couple ne bouge pas d’un iota. La femme tient le visage de l’homme comme
si elle s’apprêtait à l’embrasser. Le modèle la serre contre lui, une main sur sa
fesse, ramenant sa jambe sur sa hanche, l’autre main sur sa nuque, tandis que des
gouttes de peinture bleue dégoulinent sur leur corps et tachent la toile.
– J’ai dit, ne bougez pas ! crie de nouveau l’assistant.
Je suis tellement fascinée par cette scène étrange que je ne sens la personne
arriver derrière moi que lorsqu’elle balaye mes cheveux sur le côté.
– Parfaite, chuchote-t-on dans mon oreille avant d’embrasser la courbe de mon
cou.
Prise de panique, je recule sans regarder où je vais, essayant de m’éloigner de
l’étranger qui me tripote, mais je rencontre un obstacle et trébuche sur un coin de
la toile. J’atterris dans le pilier de la plate-forme sur laquelle se tient l’assistant,
et le reste est un chaos total. Le seau de peinture dessine un arc de cercle dans les
airs, peignant tout sur son passage. En dessous, le couple le voit venir, et
l’homme fait rouler la femme sur le côté, évitant l’assistant, son seau de peinture
ainsi que la plate-forme qui leur serait tombée dessus si le modèle n’avait pas eu
des réflexes de Ninja.
Quant à moi, il n’y a pas de Ninja pour me sauver.

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Je tombe en arrière et mon talon transperce la toile épaisse. Il s’y coince alors
que mon corps se tourne dans la direction opposée, et je pousse un cri strident
lorsque ma cheville se tord, puis j’atterris dans une flaque de peinture bleue.
– Doux Jésus ! s’exclame l’homme que j’ai essayé de fuir, en venant – trop tard
– à ma rescousse.
Il m’empoigne sous les aisselles et me soulève pour m’inspecter de ses yeux
dorés inquiets. Au vu de ses petites pattes d’oie, je dirais qu’il a une dizaine
d’années de plus que moi. Ses cheveux châtains sont striés de mèches blondes et
rousses, et relevés en chignon. Sa mâchoire sculptée et ses lèvres charnues sont
accentuées par une barbe châtain clair. Je ne suis jamais sortie avec un homme à
barbe, et face à celui-ci, blottie dans ses bras musclés, je me demande bien
pourquoi. Il est magnifique, il ressemble à Ben Affleck, mais en plus beau.
– Je ne voulais pas te faire peur. Je t’ai vue, là, et… Je n’ai jamais vu de femme
aussi belle. Il fallait que je pose mes lèvres sur ta peau hâlée. Ma Mia, dit-il
d’une voix pleine d’admiration.
Ses yeux caramel m’inspectent de la racine des cheveux à la pointe de mes
bottes à talons aiguilles, des bottes que je vais m’empresser d’enlever, ma
cheville gonfle déjà.
Je tente de poser le pied par terre, mais la douleur qui remonte tout le long de ma
jambe me fait gémir et je m’agrippe aux bras du barbu, plantant mes ongles dans
sa chair.
– Oh non, tu as vraiment mal ! s’exclame-t-il.
Je lève les yeux au ciel.
– Tu crois, Sherlock ?
Il se baisse pour passer un bras derrière mes genoux et me soulève pour
m’emmener sur une méridienne, de celles que l’on voit dans les vieux films
romantiques et sur lesquels les demoiselles en détresse s’évanouissent avec
classe et élégance. Pas de raffinement pour moi, je n’ai rien d’une Blanche-
Neige, je ressemble plutôt à la fille cachée de Grincheux et d’un Schtroumpf. Je
suis couverte de peinture bleue et prête à arracher la tête du premier qui essaiera
de toucher à ma cheville.

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– J’appelle un médecin ! dit à mon nouveau client un des assistants tout vêtu de
noir.
– Non, ce n’est pas nécessaire*1, répond-il en français. Allez à l’appartement
3B, elle est médecin et c’est une amie. Tout ira bien, Mia, dit-il en plongeant son
regard dans le mien.
Mes cuisses se contractent, mais je ne sais si c’est à cause de son accent
follement séduisant ou de l’atroce douleur qui se propage toujours plus fort dans
ma jambe.
Quelques minutes plus tard, une minuscule petite femme tenant une sacoche à
l’ancienne arrive. Elle m’aide à enlever ma botte sans me tordre la cheville.
J’entends quelqu’un ricaner derrière moi et je découvre, en me retournant, que
c’est mon client, Alec Dubois.
– Quoi ? je demande.
– Tes chaussettes. Elles sont tout simplement divines, ma jolie*.
Je ne sais pas ce que veut dire « ma jolie », et même si c’est super-sexy, ça
m’agace. Il pourrait me traiter de maladroite ou de débile et je ne le saurais pas.
Je regarde mes chaussettes de Noël puis le médecin, qui sourit mais ne dit rien.
Elle me plaît. Quant au Frenchie, je n’ai pas encore décidé si je l’apprécie.
– Eh bien, elle n’est pas cassée, dit le médecin, mais vous avez une belle entorse.
Je vais vous mettre un bandage, et il faut que vous évitiez de lui faire supporter
le moindre poids. Ça devrait aller mieux d’ici deux semaines. Vous devez la
reposer, la maintenir surélevée et y mettre de la glace. Je vous conseille aussi
d’utiliser des béquilles.
Mince, je déteste les béquilles – tout le monde les déteste. Je n’ai pas envie
d’avoir les aisselles rouges et irritées en plus d’avoir mal à la cheville. Surtout
sur un tout nouveau contrat. Je me demande si l’artiste va vouloir se faire
rembourser, et soudain je panique en pensant à mon père et à la manière dont je
rembourserai Blaine ce mois-ci si le Français ne veut plus de moi maintenant.
– Je vais m’occuper de toi, ma jolie*. Ne t’inquiète pas.
Alec s’assied à côté de moi, passe un bras autour de ma taille et m’attire contre
lui, comme si nous nous connaissions depuis des années. À l’évidence, ce type
n’a pas la même notion que moi de la distance à respecter entre deux personnes.

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Cependant, je dois avouer que je trouve ça réconfortant, et ça me rassure un peu
quant au fait qu’il me renvoie chez moi.
– Retournez travailler*, dit-il, suite à quoi ses assistants déguerpissent et
reprennent leur activité.
– Qu’est-ce que ça veut dire ? Et qu’est-ce que tu fais ? je demande tandis qu’il
se lève et qu’il me prend de nouveau dans ses bras en se dirigeant vers
l’ascenseur.
– Je t’emmène à la maison pour que tu puisses te reposer. Tu dois être fatiguée
de ton voyage. Et maintenant, avec ton entorse, tu dois t’allonger. Et j’ai dit à
mon équipe de se remettre au boulot, ajoute-t-il dans un anglais parfait.
– Cette situation est super-bizarre. Je suis désolée pour la peinture et tout le
bazar, et de m’être fait mal alors que je suis censée être une muse spectaculaire.
– Oh, ne t’en fais pas, tu l’es, spectaculaire. Tes traits sont sublimes et ton visage
en deux est un miroir parfait, dit-il d’une voix émerveillée.
– Je ne comprends pas, qu’est-ce que tu veux dire par « mon visage en deux » et
« un miroir parfait » ?
Un de ses hommes nous suit dans l’ascenseur avec mon bagage et il appuie sur
le bouton du douzième étage, le plus haut de l’immeuble. Les portes s’ouvrent
sur un nouveau loft, aussi grand que le précédent, mais qui est aménagé en
appartement. Il y a une cuisine ouverte, un grand salon et des escaliers qui
doivent mener aux chambres. Il m’emmène à la salle de bains, où il me pose
délicatement sur un pied tandis que je me tiens au lavabo. Mon sac apparaît
comme par magie, et Alec fouille dedans avant d’en sortir mon top et mon
shorty Aubade.
– Tiens, mets ça, je vais chercher un sac pour tes vêtements.
Quelques secondes plus tard, il revient avec un sac-poubelle.
– Ça va aller ? demande-t-il en me regardant, une main sur la poignée de la
porte.
– Oui, merci, je dis en me sentant rougir.
Mais quelle imbécile ! Je me dépêche d’enlever mon jean et mon t-shirt maculés
de peinture bleue et j’enfile mon pyjama. Ensuite, je prends un gant propre et
j’enlève le plus possible de taches sur ma peau. Le mieux serait que je me

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douche, mais ça devra suffire pour l’instant, je veux d’abord mettre les choses au
point avec mon client, histoire d’évaluer son humeur et de voir s’il est en colère
contre moi.
Lorsque j’ouvre la porte de la salle de bains, Alec m’attend devant et il me
reprend dans ses bras. Il m’emmène jusqu’à un canapé d’angle en velours
pourpre, m’y dépose, puis il rapproche un tabouret sur lequel il s’assied. Il
soulève mon pied sur sa cuisse et je me penche pour attraper mon mollet des
deux mains, ne sachant pas comment réagir face à cet homme qui me touche
sans complexes.
– Donc, tu voulais savoir pour le miroir parfait ? dit-il, reprenant le fil de la
conversation.
Je hoche la tête et me mords la lèvre. Du bout de l’index, il trace un trait
invisible du milieu de mon front jusqu’au bout de mon menton. Je frissonne sous
son geste, mais peut-être est-ce à cause de son regard de braise qui me donne
l’impression d’être la plus belle femme sur terre. Wes me regardait de la même
manière. Un éclair de culpabilité s’empare soudain de moi, mais je le mets de
côté, car Wes et moi ne sommes pas en couple. Nous sommes amis – des amis
qui se veulent du bien. Peut-être serons-nous ensemble un jour. Peut-être. Mais
pas aujourd’hui.
– Si on coupait ton visage en deux, ici, dit Alec en redessinant son trait invisible,
chaque côté serait le reflet parfait de l’autre.
– Comme tout le monde, je réponds en fronçant les sourcils.
Il pose sa main sur ma joue et plonge ses doigts dans mes boucles.
– Oui, ma jolie*, mais chez les autres, le visage n’est pas symétrique. Le tien est
parfait. C’est le même des deux côtés. Ni plus beau ni plus moche que l’autre
côté. C’est très inhabituel et fascinant. Tu es unique, dit-il avant de déposer un
baiser sur chacune de mes joues. Demain, nous commençons le travail, oui* ?
Aujourd’hui, tu te reposes.
Il attrape un coussin qu’il pose sur le tabouret avant d’y allonger ma cheville
enflée.
– Je dois retourner travailler maintenant, reprend-il d’une voix distante, comme
s’il était déjà replongé dans son art.

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Il est intéressant, cet Alec Dubois.
*
* *
N’ayant pas le courage de gravir les escaliers à cloche-pied, je passe l’après-midi
sur le canapé où je fais une sieste avant d’appeler Ginelle, ma meilleure amie,
ainsi que Tante Millie. Les deux ont trouvé hilarant que je me sois tordu la
cheville. Apparemment, je suis chanceuse de me retrouver à la merci d’un
bellâtre français.
La cloche signalant l’arrivée de l’ascenseur retentit et j’entends la grille en fer
s’ouvrir. Alec entre dans le salon avec une paire de béquilles et un sac en papier
blanc dont s’échappent de divins arômes. Il pose la nourriture sur la table basse,
appuie les béquilles sur le dossier du canapé et vient s’asseoir à côté de moi.
Je n’ai pas le temps de dire un mot qu’il saisit déjà mon visage pour
m’embrasser sur chaque joue, laissant une marque brûlante sur ma peau. Il
recule la tête et plonge son regard dans le mien.
– Comment vas-tu, ma jolie* ?
– Euh, bien je crois. Ça veut dire quoi, « ma jolie » ?
Alec sourit et penche la tête sur le côté. Il enlève une mèche de mon front et la
place derrière mon oreille. L’air autour de nous semble soudain chargé de
promesses, d’un espoir inexplicable.
– Ça veut dire que tu es belle, répond-il.
– Ah, ok, je chuchote, envoûtée par ses yeux ambrés.
– Tu as faim ?
Je hoche la tête.
Il part à la cuisine et revient avec deux assiettes et des couverts, puis il se rassied
en se collant à moi. Je ne peux pas me décaler sur le canapé sans qu’il le
remarque, et je ne veux pas faire mauvaise impression, donc je reste enveloppée
dans sa chaleur et son parfum C’est un mélange d’Hugo Boss et de peinture
fraîche. Je le reconnais parce que j’ai travaillé dans une parfumerie à Las Vegas
où je devais proposer à tous les clients de se faire parfumer. La senteur d’Hugo
Boss était divinement virile, à tel point qu’elle semblait se diriger tout droit entre
mes cuisses chaque fois que j’en aspergeais quelqu’un.

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J’appuie le poids de mon corps sur mes mains et je me décale discrètement de
quelques centimètres. Alec se contente de me regarder en souriant et de me faire
un clin d’œil avant de me tendre une assiette de nouilles sautées et de poulet aux
champignons noirs.
– J’espère que tu aimes la cuisine chinoise, dit-il.
Je prends le plat et le porte à mes narines, fermant les yeux pour respirer le
délicieux parfum de poulet aux épices. J’en ai l’eau à la bouche et je gémis en
mâchant ma première bouchée. Lorsque je lève la tête, Alec ne mange plus. Il
m’observe avec un regard incandescent, si intense que je manque m’étouffer.
– Tu es incroyablement belle, dit-il.
Il effleure ma joue et je l’appuie contre sa paume. Ça ne fait que quelques jours,
mais la présence d’un homme me manque déjà.
– Tu es le cadeau de Dieu au monde*, susurre-t-il d’une voix rauque en
promenant son pouce sur ma lèvre.
– Qu’est-ce que ça veut dire ?
– Que tu es un miracle. Un sublime miracle.
Et je vais faire en sorte que tout le monde le sache.
Un miracle. Alec pense que je suis un miracle. Sublime.
Je ne sais quoi répondre, mais peu importe car je n’ai pas le temps d’y réfléchir.
Il pose son assiette puis la mienne, et il avance son visage vers le mien. Nos
bouches ne sont qu’à quelques millimètres, et je suis hypnotisée par sa présence.
Cependant, mon cerveau sort de sa torpeur lorsque ses lèvres chaudes et tendres
effleurent les miennes et qu’il suce ma lèvre avant d’y promener sa langue.
Je saisis sa nuque et tire sa tête vers moi en plongeant mes doigts dans ses
cheveux. Je trouve son élastique et je lui détache les cheveux, libérant une masse
de vagues épaisses sentant le citron et le savon. Ses cheveux tombent sur son
visage et encadrent notre baiser. Alec attrape mon menton et penche ma tête sur
le côté pour plonger sa langue dans ma bouche, apprenant déjà comment me
faire gémir. Je mordille ses lèvres comme un animal affamé, mais ça ne semble
pas le gêner. Je crois même qu’il grogne dans ma bouche.
Les muscles de mon corps se contractent, désespérés de sentir Alec plus près
encore. J’essaie de m’allonger sur le dos pour qu’il s’étende sur moi, mais il

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rompt le baiser et appuie son front contre le mien.
– Très jolie*, chuchote-t-il.
Ses mots en français me caressent comme sa langue a caressé mes lèvres il y a
quelques secondes, m’excitant encore plus maintenant que je connais la
sensation de sa bouche sur la mienne.
– Tout doux, chérie*, dit-il d’une voix douce. Nous avons tout le temps
d’apprendre à nous connaître physiquement. Je veux profiter de toi. Découvrir
ton goût, la douceur de ta peau sous mes doigts, ton corps sur ma toile.
– Waouh, je murmure en plongeant mon regard dans le sien.
– « Waouh » ne suffit pas à décrire le plaisir que nous allons prendre. Mais
mangeons, maintenant. Apprenons à nous connaître. Ce n’est que de cette
manière que la manifestation physique de notre union sera divine.
Alec Dubois est tout simplement étrange. « La manifestation physique de notre
union ? » Qui parle comme ça ? Je ne sais même pas ce que ça signifie !
– Tu es un mec bizarre, dis-je avant de reprendre mon assiette.
J’enroule des nouilles sur ma fourchette et j’en avale une énorme bouchée. C’est
délicieux, presque aussi bon que le baiser que nous venons d’échanger.
Alec penche la tête en arrière et éclate de rire. Comme je disais, il est totalement
bizarre.
Il saisit son assiette à son tour, pose ses pieds sur le tabouret, à côté du mien, et
me transperce du regard.
– Oh, ma chérie, tu n’as pas idée. Mais tu le découvriras bien assez tôt.
Maintenant, mangeons.

1. * Tous les mots marqués d’une astérisque sont en français dans le texte.

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Chapitre 2

Hier soir, après m’être gavée des meilleures nouilles chinoises que j’aie
goûtées de toute ma vie, Alec m’a portée dans la chambre à l’étage et il m’a
installée dans son lit. Je ne crois pas qu’il y ait d’autre chambre dans
l’appartement, mais il n’a pas supposé que nous dormirions ensemble, même
après notre baiser. Je lui en suis reconnaissante, car j’avais besoin de la soirée
pour trouver ma place dans ce nouveau monde.
J’ai eu du mal à réaliser que je n’étais plus à Malibu, dans la maison de Wes
nichée sur la colline, dans mon lit de nuages. Le lit d’Alec est ferme mais
confortable, dans une chambre aux tons bleu et gris pâle. Le sommier repose sur
une plate-forme en bois massif et il est décoré d’une tonne de coussins bleu
marine. Il y a peu de meubles, une armoire, une commode, deux petites tables de
nuit, l’une avec une lampe de chevet, l’autre avec une pile de livres. Je remarque
que plusieurs des titres sont en français et, je ne sais pourquoi, je souris en
voyant que certains proviennent d’une bibliothèque.
Pour l’instant, Alex s’est comporté en parfait gentleman. Il ne m’a pas renvoyée
chez moi lorsque je me suis tordu la cheville, au contraire il a été aux petits
soins. Il me regarde comme s’il était prêt à m’offrir la lune. Et puis, bien sûr, il y
a eu ce baiser. Des frissons me parcourent l’échine en repensant à ses lèvres
chaudes sur les miennes. J’ai été surprise qu’il m’embrasse, même si j’aurais
sans doute dû m’y attendre étant donné sa façon de me toucher en permanence.
Je crois qu’il m’a plus touchée en vingt-quatre heures que Wes en une semaine,
alors que Wes adore me toucher.
Wes. Non, je refuse d’y penser. Nous allons rester amis et voir ce qui se passera
par la suite. Il sait que je dois faire ce travail pour sauver mon père, et je ne veux

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pas faire vœu d’abstinence tant que ce n’est pas fait. Maintenant que j’ai goûté à
la passion que Wes m’a fait découvrir, je ne peux plus m’en passer. Mais je suis
prête à passer à autre chose – et à quelqu’un d’autre –, et c’est ce que je vais
faire. Je sais qu’il y a de l’alchimie entre Alec et moi et il suffit de voir sa façon
d’embrasser pour savoir qu’il est bon au lit. Il est temps que je m’amuse.
Alex a dû poser mes béquilles et ma valise contre le mur à côté du lit, pendant la
nuit. Lorsque je me réveille, je regarde autour de moi et sautille jusqu’au petit
placard, mais il ne contient que des vêtements d’homme. Or, mon contrat stipule
que mes clients me fourniront les tenues nécessaires pour la durée de la mission.
Je me demande où il a bien pu mettre mes habits. J’ouvre la commode, mais je
n’y trouve que des boxers, des chaussettes et des pyjamas.
Je sors un jean propre et un t-shirt Radiohead de ma valise. Ginelle et moi nous
étions amusées comme des folles à ce concert, à tel point que nous n’avions plus
de voix le lendemain. Thom Yorke a un talent incroyable, et lorsqu’un groupe
comme Radiohead venait à Las Vegas, je faisais tout mon possible pour me
procurer des billets.
Une fois habillée, j’enfile une seule basket et je me contente d’une chaussette
pour l’autre pied. Arrivée en haut de l’escalier, je décide de descendre les
marches sur les fesses, laissant mes béquilles glisser le long de l’escalier, et je
dois dire que je suis plutôt fière de moi d’y avoir pensé.
– Eh ! Je t’aurais aidée à descendre, ma jolie*, dit Alec en faisant le tour du bar
pour venir à moi.
Merde. Il est en bas de pyjama, torse nu, et je me retrouve bouche bée devant ses
abdos sculptés et sa peau hâlée. C’est un véritable festin pour les yeux. Ses
cheveux ondulés tombent sur ses épaules dans des tons châtains, roux et blonds.
Les muscles de son abdomen se contractent quand il m’aide à me relever, puis il
me guide vers le bar. Une fois que je suis installée sur un tabouret, il me tourne
le dos, et je retiens mon souffle sans pouvoir m’empêcher de laisser échapper un
cri aigu. Tout le côté gauche de son dos est couvert d’encre noire, des mots en
français qui commencent sur son épaule et finissent dans le creux de ses reins.
Alec tourne la tête et me surprend en train de le reluquer.
– Ton tatouage… il est… il est magnifique, je bégaie.

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D’une main experte, Alec casse deux œufs dans une poêle, sans utiliser le rebord
comme je le fais, et je prends note de lui demander de m’apprendre à le faire
d’ici la fin du mois.
– Merci*, répond-il avant d’ajouter deux œufs aux premiers.
Dans une autre poêle, il fait frire du bacon.
– Qu’est-ce que ça veut dire ? je demande.
Il passe une mèche derrière son oreille et attrape une tasse pour me servir un
café.
– C’est un poème de Jacques Prévert, un auteur français. Il l’a écrit en 1966. Tu
veux du lait ou du sucre ? demande-t-il en désignant ma tasse.
– Les deux, s’il te plaît.
Il pose la tasse devant moi, puis il retourne les œufs et le bacon.
– Ça te gênerait de me dire de quoi parle le poème ? je demande timidement.
Alec se lèche les lèvres, s’adosse au plan de travail et croise ses chevilles. Mon
Dieu, ce mec est aussi magnifique que Wes, même s’ils sont complètement
différents. Là où Wes avait le teint et les cheveux plutôt clairs et était
généralement rasé de près, les cheveux, la moustache et la barbe d’Alec sont
plutôt foncées et il est assez mat de peau.
– « Ces gens peints avec amour dans le furtif silence et l’obsédant vacarme des
rues de tous les jours ». C’est un extrait du poème Gens de Witold de Jacques
Prévert, qui décrit le public devant les tableaux de Witold-K1. Il raconte
comment les gens passent d’un tableau à l’autre, et ne voient que les dos de ceux
qui les précèdent. Mais nous aussi, face au tableau, nous ne montrons que notre
dos à ceux qui nous suivent. Ça me rappelle que le public va venir voir mes
tableaux et mes photos, et que parfois, les gens s’observeront entre eux. Et cette
observation changera leur expérience – finalement, du point de vue de celui qui
approche, la personne qui regarde ma peinture fera partie de la toile.
Je réfléchis un moment à ce qu’il vient de dire.
– C’est une perspective intéressante.
Alec me sourit et me tend une assiette avec deux œufs et du bacon.
– Mange, ma jolie*. Nous avons une grosse journée de travail devant nous.

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– D’ailleurs à ce propos, où sont mes vêtements ? je demande en dévorant mon
petit déjeuner.
Il fronce les sourcils en mâchant un morceau de bacon.
– Quels vêtements ?
– Tu sais, les vêtements, ceux que tu veux que je mette pendant que je suis ici.
Normalement, ils doivent être fournis…
Je ne finis pas ma phrase, trop mal à l’aise de faire allusion à mon contrat.
Alec sourit d’un air narquois et pose ses mains sur le comptoir pour approcher
son visage du mien.
– Ma jolie*, il n’y a pas de vêtements pour toi, parce que tu seras nue pendant
ton séjour chez moi. Tu es ma muse, et j’ai besoin de voir ton corps et tes
courbes autant que possible.
Je cligne des yeux plusieurs fois, puis j’ouvre la bouche et la referme. Il ne peut
pas être sérieux, si ?
– Tu veux que je me promène à poil ? Tout le temps ?
– Oui*, répond-il, comme si c’était sans importance.
– Oui* ? C’est tout ce que tu as comme réponse ? (Je pose bruyamment ma
fourchette dans mon assiette.) Tu crois que je vais me balader toute nue ? Toute
la journée ?
Alec fronce de nouveau les sourcils.
– Tu n’es pas à l’aise avec ton corps, ma jolie* ?
– Bon sang, je n’arrive pas à le croire ! je réponds en croisant les bras. Ça n’a
rien à voir avec le fait d’être à l’aise ou pas avec mon corps, même s’il est vrai
que je pourrais perdre quelques kilos, mais je ne connais personne qui
apprécierait d’être à poil toute la journée !
– Hmmm, dans ce cas, nous avons un problème. Finis ton petit déjeuner, nous
devons aller à l’atelier. Je veux faire des photos de toi avant que la lumière ne
change, puis je commencerai les tableaux.
Il avale sa dernière bouchée de bacon tout en allant à l’évier, où il rince son
assiette avant de la mettre dans le lave-vaisselle.
– Je vais me préparer, nous en reparlons plus tard, oui* ?
– Oui*, je réponds d’une voix sarcastique.

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Il secoue la tête et monte les escaliers en courant. Il redescend une seconde plus
tard avec ses vêtements, et il file sous la douche.
Il veut que je sois nue tout le temps. Ce type est vraiment bizarre. Je lève les
yeux au ciel en grinçant des dents. Il ne m’a pas vraiment répondu, en fait. Il m’a
simplement dit que nous avions un problème, puis il a changé de sujet et il est
parti. Cette deuxième journée ne semble pas mieux partie que la première – mis
à part le fait que je l’ai vu à moitié à poil. Cependant, malgré notre baiser d’hier
et même si je rêve de lui sauter dessus, il est hors de question que je sois nue à
longueur de journée. Ça ne fait pas partie du contrat, je n’ai lu nulle part que «
Mia accepte pleinement de courir nue pendant un mois ». Il est complètement
fou, ce type !
*
* *
Après sa douche, Alex m’emmène deux étages plus bas, dans son atelier.
– Les deux étages sont à toi ? je demande en le suivant à travers le loft.
Je suis surprise de ne voir que deux assistants dans le loft, alors qu’il est huit
heures du matin. Peut-être ne travaillent-ils pas de huit heures à dix-sept heures
comme ailleurs ?
– Oui. Ici, c’est mon atelier, et au douzième étage, c’est ma maison, comme tu le
sais. J’aime être près de chez moi, car je travaille parfois toute la nuit. Quand je
finis ma journée, je n’ai pas envie de traverser la ville pour rentrer à la maison.
Ici, je n’ai qu’à prendre l’ascenseur.
– Je comprends, c’est logique. Où sont tous tes employés ? je demande en
m’asseyant sur la chaise qu’il me donne.
Devant nous, à environ trois mètres, se trouvent deux toiles blanches suspendues
au mur, éclairées par de nombreux projecteurs. Elles mesurent à peu près un
mètre quatre-vingts sur un mètre vingt, mais l’une est à la verticale, l’autre à
l’horizontale.
– C’est un jour réservé à la création, donc je n’ai pas besoin d’assistants. Je n’ai
besoin que de toi, de mon appareil photo et de ma peinture.
– Cool. Alors, qu’est-ce que tu veux que je fasse ?

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– On va commencer avec des tests. J’aimerais que tu te tiennes debout devant la
toile qui est en position paysage.
Il m’aide à me lever, puis il me porte jusqu’à la chaise qui est devant la toile. Il
me place debout, mais de façon à ce que je puisse m’appuyer sur le dossier.
– Si tu as besoin de poser le pied, fais-le sur ce coussin, pas sur le béton dur. Ça
devrait aller, oui* ?
– Oui, merci, Alec. Fais ce que tu as à faire, je vais très bien. Je suis très
confortable.
Il hoche la tête et retourne à son trépied où il ajuste les lumières.
– Ok, maintenant, je veux que tu enlèves ton t-shirt. Garde ton soutien-gorge
pour l’instant, je veux seulement voir la courbe de tes épaules, de tes bras, de ton
cou et de ta taille.
Je retiens mon souffle et me mords la lèvre en enlevant mon t-shirt.
– Comme tu veux, Frenchie, mais ça va te coûter cher.
– Je connais le prix, ne t’en fais pas, dit-il derrière son appareil photo.
J’ai à peine jeté mon t-shirt par terre que le cliquetis de l’appareil retentit. Je
reste parfaitement immobile dans mon soutien-gorge en dentelle noire.
Heureusement, il couvre complètement mes seins, comme un bikini, mais ça ne
m’empêche pas d’être nerveuse car je n’ai jamais fait de mannequinat. Après
tout, je n’ai jamais pensé que j’avais le corps qu’il fallait.
– Impressionnant*, marmonne Alec en français.
J’ai l’impression que c’est un compliment, donc je me tais et je le laisse faire son
truc.
– C’est très bien, ajoute-t-il quelques minutes plus tard.
– Comment ça ? Je ne fais rien ! je m’exclame.
– Ta beauté suffit. Et puis ces photos sont surtout pour la lumière, la position,
etc. Tu en as marre d’être debout ? demande-t-il.
– Un peu.
Je ne pensais pas que je serais aussi fatiguée de rester en équilibre sur un pied.
Nous faisons donc une courte pause, il m’apporte de l’eau et un châle pour
couvrir ma poitrine. Lorsque nous reprenons le travail, il me demande de me
pencher et d’ébouriffer mes cheveux avant de me relever. Je répète le

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mouvement deux ou trois fois jusqu’à ce qu’il soit satisfait du résultat. À mes
yeux, j’ai l’air d’une folle qui sort du lit, mais apparemment ça lui plaît.
– Tes couleurs sont parfaites, ma jolie*.
Il se dirige vers une table sur laquelle il prend un petit pot de peinture rouge
cerise et un pinceau.
– Ça va te paraître étrange, mais je vais peindre tes lèvres. La peinture n’est pas
toxique.
– Ok, comme tu veux. C’est toi le boss.
Il secoue la tête en riant doucement. Je souris, puis je fais la moue pendant qu’il
recouvre mes lèvres d’une peinture brillante et visqueuse. Ensuite, il décoiffe un
peu plus mes cheveux et retourne à son appareil photo.
– Maintenant, Mia, je veux que tu penses à quelque chose de triste. Quelque
chose qui te brise le cœur. Peut-être quelqu’un qui te manque, oui* ?
Je regarde au loin en pensant à Wes, à ce qu’il est en train de faire. Je me
demande s’il est seul et si je lui manque. Peut-être est-il nu devant quelqu’un
d’autre, lui aussi ? Ces pensées sont trop tristes et j’essaie d’en changer.
Cependant, je ne sais pourquoi, je pense à mon père. Ça fait un mois que je ne
l’ai pas vu. Il est toujours dans le coma, et sa fille n’est pas à ses côtés.
– Mia ! crie Alec.
Je tourne brusquement la tête vers lui et je cligne des yeux. Une larme solitaire
s’échappe et coule sur ma joue.
– Je l’ai eue, chuchote-t-il.
– On a fini ? je demande d’une voix tremblante tandis qu’il me tend un chiffon
humide.
– Pour cette partie du projet, oui, nous avons fini. Tu peux enlever la peinture et
te reposer. Je vais chercher ton t-shirt.
– Merci, je chuchote.
Je me rhabille et nous nous asseyons côte à côte, face à la fenêtre donnant sur la
rue. Une pluie fine tombe sur la ville et les gens marchent d’un pas rapide pour
ne pas se mouiller.
– Quel est le tableau sur lequel on travaille ?
– Tu veux dire, quel est son nom ?

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Je hoche la tête, les yeux rivés sur les passants en contrebas.
– « Pas d’amour pour moi ».
Bien évidemment. Ce devrait être le slogan de toute ma vie.
– Je suis prête à reprendre le travail.
Nous retournons devant la toile et, en silence, j’ébouriffe mes cheveux et
j’enlève mon t-shirt.
– Quelle est la suite ? je demande.
– Tu trouves l’amour, bien sûr.

1. Witold Leszek Kaczanowski, dit Witold-K, peintre et sculpteur polonais et


américain, était un ami de Jacques Prévert. Il peignait très souvent des
personnages de dos.

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Chapitre 3

Après un million de photos et de poses subtilement différentes qui nous ont fait
sauter le déjeuner, nous sommes enfin rentrés à la maison. Apparemment,
lorsque l’inspiration frappe, il faut en profiter.
J’ai eu du mal à contenir mon désir, je mourais d’envie de mettre mes mains sur
lui, n’importe où, mais surtout dans ses cheveux, dans ses longues vagues
rousses et dorées. J’ai passé ma deuxième journée à imaginer que je griffais son
torse musclé et sa fine taille. Logiquement, lorsqu’une femme se retrouve en
soutien-gorge devant un homme hétérosexuel, il n’est pas difficile de penser que
les choses vont déraper. Hélas, Alec est accro à son travail.
Lorsque nous sommes rentrés chez lui, nous avons avalé une pizza en vitesse,
puis il est reparti à l’atelier pour travailler sur les photos de la journée. Je me suis
couchée seule, avant qu’il ne rentre. J’ai trouvé étrange qu’il ne m’ait pas fait de
nouvelles avances depuis le baiser du premier jour. De mon côté, je suis prête à
passer à l’étape suivante qui m’aiderait à cesser de penser à Wes et à la petite
planche de surf qui tient la clé de sa maison et de son cœur.
Ce matin, j’ai de nouveau descendu les escaliers sur les fesses, m’attendant à
découvrir Alec aux fourneaux, comme hier, mais je ne trouve qu’un petit Post-it
sur la cafetière.
Ma jolie*,
Rejoins-moi à l’atelier quand tu es prête. Il y a beaucoup à faire.
A.
Je mange une banane et me sers un café avant de claudiquer jusqu’à l’ascenseur.
Il y a bien plus de monde dans l’atelier qu’hier, des hommes en noir qui prennent
des photos ou qui portent du matériel d’un côté de la pièce à l’autre. Je suis

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contente qu’Alec ait fait mon shooting lui-même, au moins j’ai eu quelqu’un à
qui parler. Les assistants ne semblent pas apprécier que les modèles parlent
toutes les deux minutes, j’en entends un dire « ne bouge pas » ou « chut » à l’une
d’entre elles. Même si tout cela me paraît encore bizarre, je me sens chanceuse
de découvrir les coulisses d’un artiste mondialement reconnu.
– Te voilà enfin, me dit un des hommes en noir.
Il me saisit le bras et me tire en avant plus vite que ne le permet mon handicap.
Je fais de mon mieux pour le suivre, mais le bout en caoutchouc de ma béquille
roule sur un fil électrique, et je suis forcée de mettre tout mon poids sur ma
cheville blessée pour éviter de tomber. Je vacille, mais je parviens à rester
debout.
– Fais gaffe, mec. Tu vas te prendre une béquille dans la tronche si tu n’arrêtes
pas de tirer sur mon bras. Je ne suis pas un chien en laisse, je m’exclame,
furieuse.
– Que se passe-t-il* ? demande une voix agacée derrière nous.
Alec nous regarde, l’air furieux, mains sur les hanches, comme un lion prêt à
bondir sur sa proie.
– Monsieur Dubois, votre modèle n’était pas assez rapide, vous l’attendiez il y a
une heure, répond l’assistant.
Il y a une heure ? S’il voulait que je me lève tôt, il aurait dû mettre un réveil ou
trouver une manière croustillante de me réveiller. Je ne suis pas responsable de
mon retard.
– Imbécile*, murmure Alec. Tu as oublié tes lunettes ?
L’homme se gratte la tête.
– Pardon ?
– Tu es sourd, en plus d’être aveugle ?
Cette fois, l’homme ne se laisse pas faire.
– Écoutez, Monsieur Dubois, les modèles doivent suivre les règles et être à
l’heure. Or, elle est en retard. Très en retard. Je voulais juste qu’elle se
dépêche…
– Ça suffit. Tu n’es qu’un idiot, dit-il en pointant son index sur l’homme en noir.
Tu ne vois pas qu’elle est blessée et qu’elle ne peut pas courir avec des béquilles

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?
– Je voulais juste…
– Assez* ! Tais-toi avant de creuser un trou si profond que tu ne reverras plus
jamais la lumière, crache Alec.
Il regarde autour de lui et tend le bras vers moi.
– Maintenant, pour tous ceux qui écoutent, et je sais que vous écoutez…
Quelques personnes essaient de tourner la tête, comme pour cacher le fait
qu’elles tendaient l’oreille pour ne pas perdre une miette de la dispute.
– … Cette femme s’appelle Mia. Elle est la muse pour toute la série « Amour sur
toile ». Elle est aussi précieuse que n’importe laquelle de mes toiles et j’attends
que vous la traitiez ainsi. Maintenant, retournez au travail, dit-il en frappant deux
fois dans ses mains.
– Tu vas bien, ma jolie* ?
– Oui, il m’a agacée, c’est tout. Il a trop tiré sur mon bras et j’ai failli tomber.
C’était une simple erreur.
– Une erreur qu’il ne commettra pas deux fois, aboie-t-il avant de me soulever
dans ses bras comme une princesse. Tu as bien dormi ?
Autant en profiter, parce que ce sera peut-être ma seule chance.
– J’aurais mieux dormi avec un corps chaud à côté de moi.
Il s’arrête brusquement et plonge son regard brûlant dans le mien.
– C’est vrai, ça ?
– Je ne mens jamais.
Bien sûr, ce n’est pas vrai, puisque je mens chaque fois que ça m’arrange. Mais
il ne le sait pas.
– Ça, j’ai du mal à le croire, ma jolie*.
Il m’emmène dans le coin où nous avons travaillé hier et me dépose sur la
chaise, mais je ne le laisse pas partir avant de lui avoir répondu.
– Crois-le, je chuchote avant d’embrasser sa joue.
– Alors, nous allons devoir y remédier. Je ne veux pas que tu te sentes délaissée.
– Ce serait une tragédie, je rétorque en souriant jusqu’aux oreilles.
Il me répond par un clin d’œil, puis il se tourne pour prendre la peinture et son
pinceau.

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– Tu vas me repeindre les lèvres ?
Il vient vers moi et lève le menton pour me dire de regarder derrière moi.
Je me retourne, prenant soin de ne pas mettre de poids sur ma cheville blessée, et
c’est là que je les vois, que je me vois. Deux images de moi : l’une est un portrait
peint en blanc et noir, l’autre est une photo de moi qui ne recouvre qu’une moitié
de la toile. Sur cette dernière, les lèvres rouges sont la seule touche de couleur.
Quant au tableau, il est encore plus réaliste que la photo, à tel point que je me
lève pour le regarder de plus près. Les coups de pinceau sont minuscules. C’est
une copie parfaite de la photo. On y voit la larme sur ma joue, la tristesse de mon
regard, les épaules voûtées d’une femme torturée. Une femme triste, mais…
magnifique.
– C’est… je n’arrive pas à croire… comment ?
Je lève la main pour toucher le tableau, mais Alec s’empresse de saisir mon
poignet.
– Ne touche à rien, la peinture est encore fraîche. J’ai travaillé dessus toute la
nuit.
J’écarquille les yeux en réalisant ce que j’ai failli faire.
– Je suis désolée ! Je n’avais pas compris ! Je suis bête, j’aurais dû le deviner,
c’est logique. Désolée.
Alec caresse une de mes boucles avant d’effleurer ma tempe du bout du doigt,
puis ma joue, puis mon menton. Je frissonne et les poils de mes bras se hérissent.
– Tu as froid ? demande-t-il avec un sourire en coin, parfaitement conscient de
l’effet qu’il a sur moi.
– Non, je réponds en le dévorant des yeux et en me léchant les lèvres, le
suppliant en silence de poser sa bouche sur moi, n’importe où, partout.
– Dans ce cas, au travail.
Il passe sa main dans mes cheveux pour dégager mon visage. Ce n’est pas ce que
j’espérais, mais je m’en contenterai pour l’instant.
– Assieds-toi, je vais peindre tes lèvres, dit-il.
Je pousse un grognement et sautille de nouveau jusqu’à ma chaise pour
m’asseoir.

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– Tu ne penses jamais à autre chose qu’à ton travail ? je lui demande alors qu’il
s’agenouille devant moi.
– Tu me demandes si j’ai envie de t’embrasser à t’en couper le souffle ? Ou si je
meurs d’arracher ton t-shirt pour sucer les pointes de tes seins jusqu’à ce que tu
me supplies de te faire l’amour ?
– Me faire l’amour ? je ricane malgré les fourmillements qui naissent entre mes
jambes.
– Bien sûr, chérie*, les Français font l’amour. Mais il y a bien des manières de
faire l’amour. Ça peut être dur, rapide, lent, tendre. J’ai l’intention de te faire
toutes ces choses durant de nombreuses heures. Mais pas maintenant.
Maintenant, nous devons travailler. Nous nous amuserons plus tard.
Je hoche la tête, ne trouvant pas les mots pour lui répondre. J’aimerais lui
demander ce qu’il entend par s’amuser, même si j’ai une bonne idée de ce qu’il a
en tête.
Alec peint délicatement mes lèvres avec son rouge visqueux. Lorsqu’il a fini, il
me porte jusqu’au portrait qu’il a peint de moi pendant la nuit.
– C’est maintenant que ça devient compliqué. Je veux que tu poses tes lèvres sur
celles du tableau. Je vais te diriger aussi bien que possible. Tu vas t’approcher,
puis tu les presseras lentement sur la toile pour transférer la peinture de ta
bouche sur l’autre.
Je le regarde en écarquillant les yeux mais, comme hier, je ne parle pas pour ne
pas abîmer la peinture sur mes lèvres. Il pose sa main derrière ma tête, et je place
mes mains sur le mur, de part et d’autre de la toile, approchant ma tête à
quelques centimètres.
– Surtout, ne touche pas le portrait ailleurs que sur les lèvres, sinon je devrai le
recommencer, dit-il.
J’inspire et expire lentement par le nez avant d’approcher un peu plus. Lorsque
je pense être au bon endroit, Alec prend ma tête entre ses mains et me
repositionne légèrement. Il me fait avancer la tête, et je fais la moue avant de
presser mes lèvres sur la toile. Il m’aide à reculer pour éviter que je tombe et il
me guide de nouveau vers la chaise. Les lèvres du portrait en noir et blanc sont
désormais rouges, comme celles de la photo. Elles sont si bien faites que c’est

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presque comme si Alec les avait peintes, mais on voit que c’est un baiser sur la
toile.
– C’est exactement comme je l’avais imaginé. Tu me fascines, Mia, dit-il d’une
voix émerveillée en regardant son œuvre.
– Prends une photo, elle durera plus longtemps, je taquine lorsqu’il passe
plusieurs minutes à admirer sa toile en silence.
Il tourne lentement la tête vers moi et je découvre un regard envoûtant.
– Cette œuvre va trôner dans la maison de quelqu’un jusqu’à la fin de ses jours.
Elle passera d’une génération à une autre, en héritage, jusqu’à la fin des temps.
Certes, lorsqu’on voit les choses ainsi, ça semble plutôt génial.
*
* *
Alec passe le reste de la journée à me prendre en photo. Cette fois-ci, je suis
vraiment torse nu, debout, face à la toile à moitié vierge.
– Je ne comprends pas pourquoi je dois être nue pour ça, je dis en cachant ma
poitrine.
Mes seins sont couverts de chair de poule et j’ai du mal à croire que ce soit très
beau à l’écran. Mes cheveux sont lâches et ébouriffés, mais cette fois-ci il a fait
venir quelqu’un pour les décoiffer professionnellement. J’ai tellement ri qu’il a
fini par quitter la pièce pour jeter un œil sur ses autres travaux. Je sais que je
l’agace, je suppose qu’il n’est pas habitué à ce que ses muses le contredisent ou
se moquent de lui. D’ailleurs, je me demande combien de muses il a eues, l’idée
que je sois la dernière d’une longue liste me met mal à l’aise.
– Tu as déjà embauché d’autres muses ? je demande sans vraiment vouloir
connaître la réponse.
Le cliquetis de l’appareil photo retentit, et il parle en français à un des assistants
qui s’empresse d’ajuster les projecteurs de quelques centimètres.
– Non, ma jolie*, tu es la première, répond-il en continuant le shooting.
Sa réponse me satisfait. J’aime savoir que je suis la seule qu’il ait engagée. Je ne
suis pas certaine que cela me place au-dessus des autres modèles, mais j’aime le
penser pour booster ma confiance.

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– Que fait-on, au juste ? je demande, toujours debout devant la partie vierge de
la toile.
– Je vais te faire aimer ton image, et le public y verra une femme qui s’aime.
– Mais encore ? je rétorque en fronçant les sourcils.
– Ma jolie*, soupire-t-il. Je dois finir ces photos pour avoir le temps de peindre,
de dîner avec toi, de te faire l’amour et de peindre ta photo sur la toile. Il y a
beaucoup à faire.
Waouh, est-ce qu’il vient vraiment de réciter une liste de tâches à faire et d’y
inscrire le fait de me « faire l’amour » comme si c’était un travail comme un
autre ?
– Surtout, ne te force pas à faire quoi que ce soit dont tu n’aies pas envie, je
rétorque sèchement.
– Mia, ton humeur affecte ton image. Cesse de penser à ta frustration, je te prie,
et concentre-toi sur le travail que nous faisons.
Je me tourne brusquement vers lui, poings sur les hanches, oubliant que mes
seins ballottent dans tous les sens devant une horde d’étrangers.
– Je ne peux pas faire ça, justement, je réponds en haussant le ton, parce que je
ne sais même pas ce que tu attends de moi !
Plusieurs de ses assistants arrêtent leur travail pour me regarder, et je me couvre
la poitrine avec un bras.
Alec avance vers moi et me replace devant la toile, puis il dégage mes cheveux
dans mon dos et se penche pour chuchoter dans mon oreille.
– Ma jolie*, je suis désolé. Je ne cherche pas à t’énerver. Nous sommes tendus,
alors concentrons-nous, et nous parlerons plus tard. Oui* ?
Il me parle de cette voix calme qui, au bout de trois jours à peine, semble
immédiatement me détendre. Il embrasse délicatement mon épaule nue, et je
prends cela pour une promesse.
– Maintenant, mets ta main ici, dit-il en soulevant mon bras droit et en le posant
sur le mur. J’aimerais que tu mettes ton autre main sur la toile, sur ton cœur.
Je lui obéis en mesurant chacun de mes gestes afin de ne pas abîmer la photo, et
Alec retourne à son appareil.

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– Très bien, Mia, maintenant regarde ton portrait. Pense à un moment où tu t’es
sentie aimée. Belle. Où tu étais bien dans ta peau.
Je suis immédiatement plongée dans un souvenir datant d’avant que ma mère ne
nous abandonne. À l’époque où nous étions une joyeuse famille de quatre. Je
venais de décrocher le rôle principal dans la pièce de l’école, et même maman
était contente pour moi, elle qui était toujours centrée sur ses propres désirs et
ses propres victoires. Or, ce jour-là fut différent. Elle m’a prise dans ses bras et
elle m’a embrassée, puis elle m’a dit qu’elle était fière de moi et qu’elle
m’aimerait toujours. Ensuite, mon père m’a tenue fort contre lui et il a chuchoté
à mon oreille qu’il avait toujours su que j’avais quelque chose de spécial.
Quelque chose qu’aucune autre fille n’avait. En cet instant, dans les bras de mon
père, enveloppée par l’amour de ma mère, je les ai crus. C’est mon plus beau
souvenir. Le plus beau jour de ma vie.
Derrière moi, Alec prend une rafale de photos.
Toutefois, mon souvenir ne s’arrête pas là. Le lendemain, maman est partie et
elle n’est jamais revenue. Je n’ai jamais joué dans la pièce de l’école. J’ai
longtemps cru qu’elle était partie à cause de moi, parce que j’avais réussi
quelque chose et que j’avais toute l’attention de papa pour moi, ce dont elle avait
désespérément besoin. Aujourd’hui, avec du recul, je vois les choses
différemment.
Je lève la tête vers les larmes de Mia, sur la toile, et j’ai pitié d’elle. Pendant une
seconde, je m’autorise à avoir pitié de mon enfance, des choix de ma famille, de
la manière dont j’ai vécu ma vie jusqu’à maintenant. Je ne vois plus une
magnifique jeune fille sur la photo, je vois l’image d’une fille triste qui a perdu
quelque chose de précieux. Quelque chose de beau.
Sans demander si nous avons fini, je remets mon soutien-gorge et mon t-shirt, je
sautille jusqu’à mes béquilles et je m’éloigne. Les remparts que j’ai construits
autour de mon cœur sont en train de s’effondrer, et je ne pense pas pouvoir
endurer un nouveau choc.
– Mia ! crie Alec.
Je ne réponds pas. Je me contente de lever la main pour lui dire au revoir. Il est
tard et la journée a été longue, il ne peut pas m’en vouloir d’avoir besoin de me

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reposer.
Chez lui, je vais tout droit dans la cuisine, où je trouve une bouteille de vin déjà
ouverte. Je m’en sers un grand verre et j’en bois une longue gorgée avant de
laisser les larmes couler.
J’entends la porte de l’ascenseur s’ouvrir, c’est Alec qui me rejoint. Il prend un
autre verre à pied et le remplit du liquide pourpre. Il s’appuie contre le plan de
travail et me regarde tandis que j’essaie de me calmer.
– Pourquoi tu ne t’aimes pas ?

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Chapitre 4

J
– e m’aime, je rétorque sèchement.
Alec plonge son regard dans le mien, et je remplis de nouveau mon verre.
– Ah bon ? On ne dirait pas, répond-il avant de finir son vin rouge.
– Tu crois me connaître ? Au bout de trois jours ? je crache en fronçant les
sourcils.
Alec pince ses lèvres et me pénètre d’un regard plein de frustration. Cependant,
il y a autre chose dans son regard, quelque chose que je ne parviens pas à
identifier.
– Je crois que je te connais mieux que tu ne te connais toi-même, répond-il.
Il fait un pas vers moi et pose sa main sur ma joue, mais je l’enlève et je fais un
pas en arrière.
– Tu penses que parce que tu es un artiste, tu as un don spécial pour analyser les
gens ? Si c’est le cas, ta magie se plante, Frenchie, parce que la dernière
personne avec qui j’ai envie d’être en ce moment, c’est toi ! je m’exclame en
posant violemment mon verre sur le plan de travail. Merde ! je grogne lorsque
j’en renverse sur le comptoir.
Je sautille vers l’essuie-tout et j’en saisis une quantité bien trop grande pour
éponger ma petite éclaboussure.
– Laisse-moi faire, dit Alec.
Il essaie de prendre l’essuie-tout, mais je le repousse encore une fois.
– C’est bon, je peux le faire. J’ai réparé mes erreurs et celle des autres toute ma
vie, je peux bien m’occuper d’une petite tache de vin.
Je renifle, faisant de mon mieux pour retenir les émotions qui menacent de
déborder. Il est hors de question que je m’effondre maintenant. Il me percevrait

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comme étant faible et inutile.
Alec recule en levant les mains.
– Ok, ok. Je suis désolé*. Pardon.
J’ai conscience d’être injuste envers lui. Ce n’est pas sa faute. Il n’a rien fait
pour mériter que je lui parle ainsi. Lorsque j’ai fini d’essuyer ma bêtise, il me
tend une autre bouteille de vin et je remplis de nouveau mon verre.
– Parle-moi, ma jolie*. Je suis là. Je veux être là pour toi, dit-il d’une voix
douce.
Je lève les yeux vers les siens et je sais qu’il est sincère. Il n’y a pas de pitié dans
son regard, simplement de l’inquiétude.
– Alec, je suis désolée. C’est juste que pendant le shooting, quand tu m’as
demandé de penser à un moment heureux, j’ai revu le meilleur de mes souvenirs.
Seulement, il a été immédiatement remplacé par un autre très douloureux, lié à
une époque de ma vie que je n’ai pas encore acceptée. C’est tout. Ce n’est pas
toi.
J’avance vers lui et je passe mes bras autour de sa taille, nichant ma joue contre
son torse. Il me serre fort dans ses bras et caresse lentement mon dos.
– J’ai l’impression que tu as passé une bonne partie de ta vie à t’occuper des
autres, oui* ?
Je me contente de hocher la tête contre lui, et il inspire profondément avant de
resserrer son étreinte.
– Alors maintenant, ma jolie*, il est temps que tu t’occupes de toi, oui* ?
Je hoche de nouveau la tête.
– Je vais t’aider. Ce projet, « Amour sur toile », sera libérateur. Ensemble, et aux
yeux du public, nous allons trouver la paix. Pour toi. Je vais te montrer, à travers
l’art, combien tu es parfaite.
Il pose ses mains sur mes épaules et me fait reculer pour me regarder dans les
yeux. Je réalise alors que je pleure, mais je découvre son regard serein et je me
perds dedans.
– Ce sera mon chef-d’œuvre, et grâce à lui, tu trouveras une partie de ce dont tu
as besoin pour avancer.

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Il sourit jusqu’aux oreilles, puis il avance son visage. Enfin – enfin –, Alec
m’embrasse, comme je le veux tant depuis que je suis arrivée. Un baiser
profond, humide, long.
Nos lèvres fusionnent. Il s’écrase sur moi et me piège entre lui et le plan de
travail sur lequel il appuie ses mains. Je commence alors mon exploration de son
corps, promenant mes mains sur ses abdos, ses pectoraux, rêvant déjà de
parcourir le même trajet avec ma langue. J’arrive sur son cou et je poursuis mon
chemin dans ses cheveux soyeux. Il penche ma tête en arrière pour plonger
encore plus loin dans ma bouche, puis il caresse mon corps comme si j’étais une
toile et que sa main était un pinceau. Ses caresses sont précises – tantôt délicates
tantôt puissantes –, mais le but est toujours le même : séduire. Je veux sentir ses
mains sur moi, partout, et sans vêtements. J’ai mal au pied à force de vouloir le
poser par terre, j’aimerais me mettre sur la pointe des pieds et plaquer mon corps
contre le sien. Frustrée, je recule brusquement.
– Qu’est-ce qu’il y a ? demande-t-il d’une voix essoufflée.
– Mon pied… j’ai mal… j’ai besoin de… m’allonger. Le lit ? je demande d’une
voix haletante tout en caressant sa joue.
Il sourit jusqu’aux oreilles et pose ses mains sur mes fesses pour me soulever.
– Avec plaisir, ma jolie*, dit-il alors que j’entoure mes jambes autour de sa
taille.
Il me porte jusqu’au premier étage tout en m’embrassant délicatement dans le
cou. Dans sa chambre, il pose un genou sur le lit et se penche sans me lâcher,
pour m’allonger sur le dos. Je glisse tout de suite mes mains sous son t-shirt,
pressée de sentir sa peau. Il l’enlève, puis il défait les boutons de son jean et le
laisse ouvert, me donnant un aperçu de touffes de poils auburn et d’un bout
d’érection. Apparemment, Frenchie ne met pas de sous-vêtements, c’est
fascinant.
– Tu es commando ? je demande en souriant.
– Quoi* ? demande-t-il en fronçant les sourcils.
Je pose mes mains sur ses hanches et je me redresse pour les glisser dans son
jean et empoigner ses fesses nues.
– Tu ne portes pas de boxer, j’explique alors que ses fesses se contractent.

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– Non. Les boxers sont inconfortables et inutiles. Ils m’empêchent d’avoir tout
de suite l’objet de mon désir. Toi, par exemple.
Il s’étend sur moi, ses genoux de part et d’autre des miens, et il plonge son
visage dans mon cou qu’il embrasse à la fois tendrement et sauvagement. Il
empoigne d’abord mes seins par-dessus mon t-shirt, puis il se redresse pour
l’enlever complètement. Une seconde plus tard, l’agrafe de mon soutif est
défaite et je suis de nouveau torse nu devant lui. Du bout du doigt, Alec forme
des dessins invisibles sur mon torse. Je ferme les yeux et je le laisse me toucher
comme jamais je n’ai été touchée, avec révérence, comme si j’étais spéciale et
que mon corps était précieux.
– Tu es l’art*, chuchote-t-il en promenant son doigt le long de mes côtes. Tu es
l’amour*, poursuit-il en effleurant mes seins. Tu es la beauté*, conclut-il alors
que ses pouces tracent des cercles autour de mes tétons.
Je retiens mon souffle avec un cri aigu et je me cambre, cherchant à accentuer sa
caresse si légère.
– Qu’est-ce que tu as dit ? je chuchote d’une voix rauque.
Il se penche en avant et répète ses paroles en déposant des baisers sur mon torse,
sur mon cœur, mes seins, puis il suce et lape un téton, m’arrachant un
gémissement.
Quant à moi, je promène mes ongles le long de son dos musclé avant de plonger
mes doigts dans ses cheveux, qui chatouillent mon ventre lorsqu’il descend vers
mon nombril. Il enlève brusquement mon jean et mon string, et il s’installe entre
mes jambes. Il en soulève une pour embrasser mon cou-de-pied, puis ma
cheville, et il remonte lentement jusqu’à mon genou, qu’il mordille et qu’il
lèche. Je ne savais pas que le genou était une zone érogène aussi sensible.
Waouh, mon sexe se met à pulser violemment, alors qu’il ne l’a même pas
encore touché. Alec répète les mêmes mouvements sur l’autre jambe, prenant
soin de ne pas me faire mal à la cheville. Lorsqu’il atteint mon genou, cette fois-
ci, je frissonne.
– Tu as froid ? demande-t-il en souriant.
Je secoue la tête et il repose ma jambe à côté de l’autre avant de les écarter
délicatement.

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– Je veux goûter à ta beauté, dit-il en haussant les sourcils, comme s’il me
demandait respectueusement la permission.
Il attend un moment, sans me quitter des yeux, et je réalise qu’il demande
vraiment mon autorisation. Je lèche mes lèvres et je fais oui de la tête. Soudain,
ses yeux deviennent sombres et brûlants de désir. Il se baisse alors que je lève la
tête pour admirer ce corps magnifique entre mes jambes, et soudain, sa bouche
est sur mes lèvres tandis que sa langue s’enfouit en moi.
– Oh mon Dieu ! je crie en m’agrippant à sa tête.
Ses mouvements ne sont pas mesurés, comme je m’y attendais. La plupart des
hommes commencent lentement, mais pas Alec, qui attaque mon sexe comme
s’il n’allait plus jamais en avoir l’occasion. Sa langue lape chaque millimètre de
chair à laquelle il a accès et de petites décharges électriques tournoient dans mon
sexe tandis que sa barbe frotte mes lèvres. Les sons qu’il fait ont quelque chose
d’animal, des grognements, des bourdonnements et des gémissements de joie
tandis que mes hanches se cambrent sous son visage.
Son pouce tournoie autour de mon clitoris et sa langue continue de me fouiller.
Je lâche sa tête pour empoigner les draps tandis qu’un orgasme se prépare dans
le bas de mon dos et que tout mon corps s’engourdit, électrifiant toutes mes
cellules.
– Tu es divine. Tu es si douce, ma jolie*, gémit-il en léchant ses doigts avant de
les plonger en moi. Comme le plus fin des champagnes, grogne-t-il en lapant
mon clitoris. Je n’en aurai jamais assez. Je vais me gaver de toi jusqu’à sentir ton
jus, chérie*.
Ses paroles sont provocantes, mais c’est ce dont j’ai besoin pour me faire
chavirer. Il forme un crochet avec ses doigts pour toucher ce point sensible tout
en me dévorant, et tout mon corps se contracte sous le plaisir extrême qu’il
libère en moi.
Au sommet de mon orgasme, il retire ses doigts et lèche la petite rosace entre
mes fesses, me faisant sursauter et frissonner. Ensuite, il suce mon sexe. Lorsque
je redescends sur terre et qu’il a fini de me boire, il écarte mes jambes. Je
m’attends à ce qu’il s’étende sur moi et qu’il me pénètre – en tout cas c’est ce
que j’espère –, mais ce n’est pas ce qu’il fait.

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Il se remet à lécher mon sexe et il pose un doigt sur mon anus, tournant autour
avant de l’y enfoncer lentement sur un centimètre. Je pousse un cri et recule les
hanches, ne sachant pas si je veux que cette partie sombre de moi soit envahie
ainsi. Cependant, je ne peux réprimer les soubresauts de plaisir qui
m’envahissent lorsqu’il le touche, et Alec remarque ma réponse. Il sourit lorsque
je baisse les yeux vers lui, et il mord sa lèvre inférieure, comme je rêve de le
faire.
– Baise-moi, Alec, je m’exclame, exaspérée.
– Non, pas encore*, murmure-t-il.
Je ne parle pas français, mais je sais ce que « non » veut dire.
Cette fois, les mouvements de sa langue sont lents comme s’il guérissait ma
chair ou qu’il essayait d’en mémoriser les détails. Cela dure un moment et je
finis par perdre patience. Mon bassin dessine des cercles sous son visage tandis
qu’il me caresse avec sa langue et ses doigts. Sans prévenir, il glisse deux doigts
en moi et je gémis. Enfin ! Il les retire aussitôt, mais ma déception ne dure pas
longtemps car sa langue remplace ses doigts avant de remonter sur mon clitoris.
Il l’a à peine touché qu’un nouvel orgasme se prépare.
– Putain, oui !
Je soulève mes hanches et j’empoigne ses cheveux, plaquant son visage sur moi.
Il comprend qu’il doit aller plus vite, plus fort, et il ne me déçoit pas. Je suis
tellement concentrée sur la quête de mon deuxième orgasme que je ne réalise pas
que son doigt tournoie de nouveau au-dessus de cet endroit secret que personne
n’a jamais exploré auparavant. Il appuie sur ma rosace en même temps qu’il suce
plus fort sur mon clitoris. Mon bassin essaie de se soulever, mais Alec le
maintient en place, baisant mes fesses avec son doigt alors que je tremble de tout
mon corps. La sensation est différente, si brûlante et si délicieuse que j’en
demande encore, reculant contre sa main, voulant qu’il y aille plus fort et plus
vite encore.
– Très belle*, chuchote-t-il contre mon clitoris.
Alec est infiniment doux avec mon sexe, mais il est sauvage avec mes fesses,
plongeant en moi, me faisant remonter sur le lit avec la force de sa main. Jusqu’à

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maintenant, je ne savais pas que c’était quelque chose qui pouvait me faire envie
et je m’en délecte. Mon Frenchie.
Alec s’agenouille sans cesser ses mouvements et il se concentre sur mon sexe, là
où j’ai le plus besoin de lui. Je gémis et je ferme les yeux, consciente qu’il me
regarde.
– Ouvre les yeux, dit-il.
Je lui obéis et je plonge mon regard dans le sien, qui est noir de désir.
– Je veux te regarder. Pour me souvenir de ton visage quand ta beauté intérieure
brille le plus.
Il enfonce son doigt en moi tandis que de son autre main, il pince mon clitoris. Je
pousse un cri, je soulève mes hanches et je m’envole, libre comme un oiseau
après qu’Alec m’a donné des ailes.
Quelque part dans mon rêve, j’entends un bruissement de plastique et je sens une
odeur de latex. Alec empoigne mes épaules et, soudain, je sens son sexe me
pénétrer. Son jean râpe mes cuisses à chaque aller-retour. J’ai l’impression que
le plaisir ne cessera jamais. Je ne me suis même pas encore remise de mon
dernier orgasme. Je l’entoure avec mes bras et mes jambes, profitant de la
chaleur de sa peau contre la mienne.
– Chaud, soyeux et parfait*, chuchote-t-il avant de s’emparer de ma bouche.
Le sexe long et dur d’Alec est profondément enfoui en moi et j’aimerais qu’il y
reste à jamais. Cependant, je veux qu’il jouisse, lui aussi, alors j’emploie toutes
mes forces à le retourner pour m’asseoir sur lui et le chevaucher. Il empoigne
mes hanches et m’aide à me soulever et à m’asseoir sur lui. Il est magnifique
dans cette position, les muscles de ses avant-bras se bandent à chaque va-et-vient
de nos bassins, et une fine couche de sueur recouvre son abdomen musclé. Je me
penche en avant pour laper et sucer son téton.
– Putain, oui* ! s’exclame-t-il en serrant les dents.
Je continue de titiller son téton jusqu’à ce qu’il soit pourpre et dur, puis
j’accorde la même attention à son jumeau. Alec saisit mes hanches, m’indiquant
qu’il a besoin que j’y aille plus fort. Je me redresse, je rejette mes cheveux en
arrière et je le chevauche aussi fort et vite que je le peux. Chaque fois que je me

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rassieds sur lui, mon clitoris se frotte à son bassin, envoyant des décharges de
plaisir dans mon sexe que je contracte autant que possible.
Il parle dans un français rapide que je ne comprends pas. Il s’assied et pousse sur
ses pieds jusqu’à ce qu’il soit adossé à la tête de lit. Il recule mon corps et prend
le contrôle de mes mouvements, les yeux rivés sur le point de rencontre de nos
corps. Je voulais que tout cela soit pour lui, mais mon corps est de nouveau en
train de s’envoler, et Alec le sait. Il avance la tête pour prendre un téton dans sa
bouche et il le suce fort, longtemps, jusqu’à ce qu’il ne puisse plus se contrôler.
Il plaque sa tête contre le cadre en bois et je m’y agrippe pour avoir encore plus
de puissance. Je nous fais chavirer tous les deux, nous plongeant dans un océan
de plaisir où le seul bruit est celui de nos gémissements. Mes muscles se
contractent sur sa verge avec une force que je n’ai jamais connue auparavant. Il
me tient contre lui, soulevant son bassin contre le mien tandis qu’il tremble de
plaisir.
Nous restons ainsi un moment, sans changer de position. Il promène ses mains
dans mon dos, sur mes bras et mes cuisses, comme s’il avait besoin de me
toucher pour être sûr que j’existe vraiment. Je le comprends, lorsque l’on
s’abandonne ainsi et que le plaisir est aussi intense, il est dur de revenir à la
réalité.
Peu à peu, les battements de nos cœurs s’apaisent et je passe mes bras dans son
dos pour le tenir contre moi. Il ne me lâche pas non plus et il me touche et
m’embrasse partout où il le peut. C’est agréable, très agréable, pour être tout à
fait honnête.
L’espace d’un instant, cela me fait penser à Wes, mon Wes magnifique,
adorable, et terre à terre. Le seul homme dont je crois que je pourrais vraiment
tomber amoureuse. J’inspire profondément et je retiens mes larmes, car je ne le
trompe pas. Je ne trompe pas Wes. Cependant, j’ai beau me le répéter, je ne peux
effacer la culpabilité que je ressens.
– Qu’y a-t-il ? demande Alec en me faisant reculer pour voir mon visage.
Je secoue la tête, refusant de lui dire ce à quoi je pense.
– Je me détendais dans tes bras, c’est tout, je réponds en lui embrassant le nez.
On devrait s’occuper de la… euh…

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Je baisse la tête et Alec suit mon regard.
– Ah, la capote, oui. Je m’en charge.
Je m’assieds sur le matelas à côté de lui, puis il se lève, enlève la capote et la
jette à la poubelle alors que je m’allonge sur le dos en poussant un grognement.
– Qu’est-ce qu’il y a ?
– Il faut que je fasse pipi, je marmonne.
Il éclate de rire et, avant que je n’aie pu dire quoi que ce soit, il me prend dans
ses bras comme il aime tant le faire et me porte jusqu’à la salle de bains. Il me
pose devant les toilettes, puis il repart vers la porte.
– Je nous prépare de quoi manger, oui* ?
– Oui*, je réponds, le faisant rire tandis qu’il referme la porte derrière lui.
Lorsque j’ai fini, je prends la robe de chambre rouge bordeaux qui est suspendue
au crochet derrière la porte. Elle est douce et épaisse, il se pourrait que je n’aie
plus jamais envie de l’enlever.
Je sors de la salle de bains à cloche-pied et sautille jusqu’à la cuisine, où je
trouve Alec tenant un plateau dans une main et deux verres de vin dans l’autre. Il
est toujours à poil, mais je ne vais pas me plaindre.
– Un moment*, dit-il en montant les escaliers.
Deux secondes plus tard, il revient à moi en courant, son sexe saute dans tous les
sens.
– Quoi ? demande-t-il en souriant lorsque j’éclate de rire.
Il me prend dans ses bras et me porte à l’étage.
– Je vois que tu as trouvé mon peignoir, dit-il d’une voix faussement austère.
Il me repose sur mon pied et défait le nœud de la ceinture.
– C’est inacceptable, poursuit-il. Je te l’ai déjà dit, ma jolie*, j’ai besoin de voir
ton corps nu.
Je le laisse m’enlever la robe de chambre, puis je remonte sur le lit et je me mets
à l’aise. Il pose le plateau devant nous et me tend un verre de vin dont le riche
parfum de fruits rouges réchauffe déjà mon ventre. Sur le plateau qu’il a apporté,
il y a une sélection de salamis, de petits cubes de cheddar, des raisins verts et des
fraises. Mon estomac gargouille bruyamment tandis que je me demande par quoi

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commencer, et je décide de goûter au fromage, qui va divinement bien avec le
vin.
– Merci, je dis en tirant le drap pour couvrir ma poitrine.
– Pour quoi ?
– Pour ça, pour ce soir, je dis en prenant une fraise. Merci de me peindre et de
partager ton travail avec moi. C’est un honneur d’être ici avec toi.
– Tu es ma muse, Mia, dit-il en caressant ma joue. Ta place est ici.

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Chapitre 5

Après avoir mangé, nous batifolons un moment, apprenant à nous connaître en


nous embrassant et nous caressant. À la suite d’un long baiser particulièrement
langoureux, je m’appuie sur le torse d’Alec et le serre dans mes bras.
– Tu sais que tu ne parles quasiment qu’en français quand on baise ?
– Je ne baise pas, chérie*, répond Alec en se crispant. Je te l’ai dit, je te fais
l’amour, je fais l’amour à ton corps, dit-il d’une voix sérieuse que je n’explique
pas. Et je parle français parce que tu me fais perdre la tête et que je me perds en
toi, dans ton corps sexy.
Je dégaine mon sourire le plus coquin et je réfléchis à cette histoire de baiser
versus faire l’amour.
– Ça ne complique pas les choses, de parler d’amour ? Est-ce que toutes les
femmes ne tombent pas amoureuses de toi si tu leur parles ainsi ?
– J’espère bien, répond-il en caressant mon bras.
– Attends, tu veux que je tombe amoureuse de toi ? je demande en levant la tête
pour plonger dans ses beaux yeux.
– Bien sûr, pas toi ? répond-il d’un air confus.
Je secoue vivement la tête.
– Non, pas du tout. Je veux m’amuser avec toi, et après, je passerai à un autre
client avec qui je coucherai peut-être.
– C’est pareil pour moi, dit-il sans sembler comprendre où se situe le problème.
– Alors, si je comprends bien, tu veux que je sois amoureuse de toi, même si tu
sais que je vais partir pour être avec quelqu’un d’autre. C’est ça ?
Il hoche la tête en souriant innocemment.

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– Et toi, tu vas tomber amoureux de moi, mais quand je partirai, tu vas baiser
comme un lapin avec une autre nana.
– Baiser comme un lapin ? répète-t-il en souriant jusqu’aux oreilles.
– Concentre-toi, je gronde en frappant son torse.
– Je ne peux pas me concentrer quand tu parles d’amour et de sexe. Pour moi, les
deux vont ensemble. D’ailleurs, on devrait les rassembler de nouveau, tu ne crois
pas ?
Alec m’attrape par la taille pour m’allonger sur lui et je découvre qu’il bande
déjà. Il empoigne mes fesses et appuie mon bassin contre le sien.
– Est-ce qu’on a fini de parler, ma jolie* ? J’aimerais te refaire l’amour.
– Non ! je rétorque en m’asseyant à cheval sur lui et en croisant les bras. Je ne te
comprends pas, Alec.
– Qu’y a-t-il à comprendre ? Je te fais l’amour, et chaque jour, je tombe un peu
plus amoureux de toi.
– Ok, approfondissons cela. Tu m’aimes un peu plus chaque jour, mais ça ne te
gêne pas de me laisser partir ?
– Si tu voulais rester, je ne m’y opposerais pas, dit-il, sarcastique.
– Tu ne t’y opposerais pas ? je m’exclame. Je ne te comprends pas, Frenchie !
Il saisit mes épaules et me plaque contre lui, puis il nous fait rouler pour être sur
moi, et il m’embrasse en frottant son érection sur mon sexe. J’ai beau respirer
lentement pour ne pas me laisser distraire, ça ne marche pas.
– Laisse-moi t’expliquer, oui* ?
– Je t’en prie, oui* !
– Les Français font l’amour. Je fais l’amour. Je dois avoir des sentiments pour
toi si je veux te faire l’amour, oui* ?
– Oui*, je répète.
Jusque-là, c’est assez logique. Ce qui n’a aucun sens, c’est de tomber amoureux
l’un de l’autre et de se séparer ensuite. C’est précisément pourquoi il était si dur
pour moi de quitter Wes, car même si je n’aime pas l’admettre, j’ai des
sentiments pour lui. Et maintenant, voilà que le Frenchie veut que j’aie des
sentiments pour lui aussi ?!

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– Donc, poursuit Alec, pour avoir cette intimité avec toi, je dois t’aimer un peu.
Mais ça ne m’empêchera pas de te laisser partir. Et quand tu ne seras plus avec
moi, tu auras toujours une partie de mon amour avec toi, dans ton cœur. Pour
toujours. Ce morceau de mon amour est à toi jusqu’à la fin de tes jours.
Je dois reconnaître que sa théorie est assez belle, cette idée que le sexe lui
permet d’offrir un peu de son amour à une femme et que cet amour sera à elle
pour toujours.
– Donc, si je comprends bien, nous nous aimerons toujours, mais nous ne nous
engageons pas auprès de l’autre comme un couple.
– Oui*, exactement, ma jolie* ! Tu as compris. Je m’engage à t’aimer tant que tu
es là et je te promets que mon amour restera avec toi toute ta vie. De mon côté,
j’emporterai ton amour partout où je vais. Nous saurons toute notre vie que cette
relation était construite sur la confiance, l’amour et l’amitié, dit-il avant de
m’embrasser. Dans la vie, ce sont les seules choses qui comptent.
J’ai soudain les larmes aux yeux. Je cligne des paupières et une larme solitaire
s’échappe, qu’Alec essuie avec son doigt.
– Est-ce que je peux t’aimer, maintenant ? demande-t-il avec une simplicité qui
résonne profondément dans mon cœur.
– Oui, Alec. J’aimerais beaucoup que tu m’aimes, je dis en ravalant le nœud
dans ma gorge.
C’est donc ce qu’il fait. Il m’aime toute la nuit, ou du moins jusqu’à ce que je
m’endorme, m’offrant le réconfort dont j’avais besoin pour oublier ce qui s’est
passé plus tôt dans le loft, ainsi que la culpabilité qui me ronge vis-à-vis de Wes.
Alec et moi allons nous aimer comme des amis et nous traiter avec respect. Nous
allons profiter du corps et de l’esprit de l’autre, et à la fin du mois, nous nous
dirons adieu. Nous aurons toujours de l’affection l’un pour l’autre et notre amour
ne nous quittera jamais, comme un souvenir qu’on peut revisiter lorsqu’on en
ressent le besoin.
Je trouve cela parfait et je décide de m’autoriser à m’attacher à chacun de mes
clients, mais à ma manière. Je ne promettrai pas de les aimer pour toujours, car
cette promesse est sacrée et elle ne peut être faite qu’au bon moment et avec la
bonne personne.

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Je repense à Wes et à combien il me manque. À la lumière de ce que dit Alec, je
vois maintenant que j’ai passé tout le mois à essayer de ne pas tomber
amoureuse de Wes, à me protéger. Cependant, ça n’a pas marché, car j’aime
Wes, à ma façon. Et je crois qu’il m’aime aussi. Seulement, avec lui, je crois que
ça pourrait être un amour pour toujours, et c’est pour cela que j’ai dû partir.
Nous tenons énormément l’un à l’autre, et si nous sommes faits pour être
ensemble, nous avons le temps d’y penser. En attendant, je vais profiter de mon
Français et de toutes les expériences que je vais vivre d’ici la fin de mon année
d’escort.
*
* *
Le lendemain, lorsque je descends à l’atelier, il est de nouveau plongé dans le
silence. Je commence à comprendre le schéma de travail d’Alec : un jour, il
prend les photos et le suivant, lorsqu’il peint, il libère ses employés pour
travailler seul. Au fur et à mesure que j’avance dans le loft, j’entends une
musique envoûtante, une voix sublime et des notes de piano qui résonnent dans
l’atelier. La chanteuse est pratiquement en train de chuchoter, et le morceau est
si beau que c’en est perturbant. Des instruments à corde s’y mêlent alors, et je
ferme les yeux, me laissant imprégner par la musique.
Click. J’ouvre brusquement les yeux et je trouve Alec devant moi, son appareil
photo à la main.
– Je n’ai pas pu m’en empêcher. Tu étais trop belle et gracieuse dans cette
lumière. Il fallait que je capture ce moment.
Je penche la tête sur le côté en souriant.
– Tu as eu ce que tu voulais ? je demande sur un ton ironique.
– Et toi ?
J’inspire lentement et je regarde autour de moi.
– Viens, il y a beaucoup à faire, dit Alec en tournant les talons.
Je le suis et je m’installe sur ma chaise, face à mon portrait qui me coupe le
souffle. Cette fois-ci, la toile est orientée en mode paysage. La première moitié
est une sérigraphie, l’autre est une peinture qu’il a dû faire dans la nuit après que
je me suis endormie.

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– Comment… ?
C’est un tableau de moi face à la photo qu’il a prise hier. Mon front est à
quelques centimètres de la toile, et il a peint ma main sur le cœur de la photo.
Jamais je n’ai vu un tel mélange de techniques, je comprends sa renommée
mondiale et pourquoi les gens sont prêts à payer une fortune pour son art. Dire
que maintenant je fais partie de son art… Je suis sa muse !
– J’ai très peu besoin de dormir et j’étais inspiré par ton corps. Il fallait que je le
peigne.
– Tu veux dire qu’on a fait l’amour et que l’expérience t’a tellement inspiré que
tu es descendu peindre ça ?
– Oui*. Ton corps nu, te faire l’amour, m’a donné toute l’énergie dont j’avais
besoin pour créer cette image, mon cadeau au monde entier. Tu comprends
maintenant, oui* ?
J’étudie le tableau en noir et blanc, où on aperçoit une touche de mes seins nus.
Je vois ma joie tandis que mon image touche le cœur triste de la veille. C’est
comme si mon moi heureux venait consoler mon moi triste. J’en ai la chair de
poule.
Alec peint de nouveau mes lèvres tandis que je continue d’admirer ses tableaux,
envoûtée, incapable de détourner le regard, comme s’ils avaient une emprise sur
mon cœur. Mon rythme cardiaque accélère et j’ai les larmes aux yeux. Alec
prend ma main, puis il me soulève et me porte jusqu’au tableau. Cette fois-ci, ce
ne sont pas mes lèvres que j’embrasse.
– Embrasse la toile ici, dit-il en désignant la main qui recouvre le cœur de la
deuxième image.
Je me penche et j’embrasse le canevas, laissant l’empreinte parfaite de ma
bouche sur la main peinte. Alec remet une couche de peinture rouge sur mes
lèvres, puis il désigne le coude sur l’image, et je l’embrasse. Il repeint mes
lèvres, et j’embrasse l’épaule, puis le dos de mon image. Encore une couche de
rouge. Nous répétons l’opération plusieurs fois, jusqu’à ce qu’il y ait des baisers
partout sur le tableau qu’il a peint pendant la nuit. C’est bizarre, mais cela
rajoute une nouvelle dimension à son œuvre, les baisers rouge vif contrastant
avec le noir et blanc des photos et du tableau.

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Lorsque nous avons terminé, il me porte sur ma chaise et essuie délicatement
mes lèvres avec des lingettes pour bébé, puis il me donne une bouteille d’eau et
du baume à lèvres. Il pense vraiment à tout.
Il traverse la pièce, me laissant avec la musique et les tableaux que je continue
d’étudier. Celui du premier jour montre mon visage triste, la larme sur ma joue
et le baiser rouge sur mes lèvres. À sa droite, la photo de moi est la même, mais
on me voit face à cette photo, ma main sur le cœur de la toile, couverte de la tête
aux pieds par des traces de lèvres rouges.
La lumière au-dessus des tableaux est vive, elle semble naître au centre des
images pour éclater vers l’extérieur, accentuant le contraste entre le blanc, le noir
et le rouge, ainsi que la différence de textures.
– Tu as compris la signification ? demande Alec.
Je tourne la tête et je le dévisage pendant un long moment tandis qu’il analyse
ses créations. C’est lui qui aurait dû être le sujet de ses tableaux, lui qui est si
grand, si fort et si viril.
– Alors, ma jolie* ?
Je secoue la tête en me concentrant de nouveau sur les tableaux.
– Je vois que c’est magnifique et que ça me touche.
– Ça te touche ?
– Oui, je chuchote en me focalisant sur la première image. Dans celle-ci, j’ai
l’air triste, mais c’est plus que ça. Il y a un sentiment de dévastation sous-jacent,
une tristesse si profonde dans les yeux que tu as peints que je pourrais presque
croire que je ne serai jamais heureuse. Que cette femme ne connaîtra jamais le
bonheur.
J’essaie de prendre du recul par rapport au tableau, mais c’est impossible, et j’ai
l’impression que c’est justement ce qu’il souhaite.
– Oui, dit-il. Quand j’ai capturé ton image, j’ai ressenti une souffrance, et c’est
comme ça que j’ai su que la photo était la bonne. L’art doit émouvoir celui qui
l’observe, que ce soit des sentiments de joie ou de tristesse, de colère ou
d’amour. Au quotidien, tout ce que nous voyons nous émeut d’une façon ou
d’une autre. Ce tableau t’a touchée de la manière que j’espérais.

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– Pourquoi ? Pourquoi tu voudrais qu’une personne ressente une tristesse qui est
si profonde qu’elle ne s’en remettra peut-être jamais ?
– Parce que je veux que le public le ressente. Le tableau s’appelle « Pas d’amour
pour moi ».
Ces mots transpercent mon cœur comme une flèche et mes larmes se mettent à
couler sur mes joues.
– Et celui-là ? je demande en craignant la réponse.
– Que ressens-tu en le regardant ?
Je regarde rapidement la triste photo de moi et je détourne les yeux.
– De la honte.
Sa mâchoire semble se crisper et il hoche légèrement la tête. Je me concentre de
nouveau sur la main qui est posée dessus.
– De l’espoir, j’ajoute.
Il continue de me dévisager sans rien dire, et je regarde alors tous les baisers sur
la Mia qui tend la main vers la première Mia triste.
– De l’amour, je conclus en haussant les épaules.
Alec vient vers moi et s’agenouille à mes pieds avant de prendre mon visage
dans ses mains et de m’embrasser tendrement.
– Tu as vu ce que je voulais que tu voies : la honte, l’espoir, l’amour, dit-il en
me regardant d’un air émerveillé.
– Mais pourquoi ? Ces choses sont véritablement dures à comprendre.
– Tout comme l’art, parfois. Tout repose dans les yeux de celui qui l’observe. Ce
que tu vois, ou ce que je vois, sera peut-être différent de ce que verra une autre
personne, et c’est tout l’intérêt.
– Tu lui as donné un nom ?
Il hoche la tête.
– Comment ?
– Comme je veux que les gens le perçoivent.
Je déglutis en attendant qu’il s’explique, ce qu’il ne fait pas.
– C’est-à-dire ? j’insiste.
Il promène son doigt de ma tempe à ma bouche en suivant sa main des yeux.
– « S’aimer soi-même ».

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Chapitre 6

Durant la semaine suivante, Alec et moi tombons dans une routine : il prend
les photos, nous mangeons, nous faisons l’amour. Ou bien : il peint, nous
mangeons et nous faisons l’amour. Nous n’avons toujours pas quitté l’immeuble,
et il pleut presque tous les jours. Le soleil de Malibu me manque, comme la
possibilité de nager, d’aller me balader ou de surfer. Ce qui me manque le plus,
en dehors de ma famille, c’est Wes. Je ne dis pas qu’Alec n’est pas super, mais,
même si nous nous entendons bien et que le sexe est génial, il n’y a rien de plus
à notre relation que le travail et la baise. Il a beau parler de « faire l’amour »,
pour moi, c’est du sexe, et j’adore. Ça pourrait être pire, je suppose, il pourrait
me traîner dans des musées ennuyeux pour me faire voir les œuvres d’autres
artistes.
Aujourd’hui, Alec ne veut pas que je descende à l’atelier avant ce soir, ce qui est
nouveau, puisque d’habitude il veut que j’y aille dès que je suis levée. Sa
nouvelle requête est problématique, car lorsque je suis seule, je ne peux
m’empêcher de penser à toutes les personnes qui me manquent : comme mon
père, qui ne s’est toujours pas réveillé. Il a été transféré dans une unité de soins
payée par l’État, et Gin dit que l’endroit n’est pas mal. Apparemment, elle et
Maddy y vont tous les deux ou trois jours pour lui lire le journal ou simplement
lui tenir compagnie. Elle m’a envoyé une photo de lui, allongé dans son lit. Les
hématomes sur son visage ont disparu, mais il est toujours dans une sorte de
plâtre qui le couvre des épaules jusqu’aux pieds. Sur cette photo, c’est comme
s’il dormait, on ne voit pas s’il se bat pour survivre. Les médecins ne connaîtront
l’état de sa santé mentale que s’il sort du coma. Quand il sortira du coma, inutile

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de projeter des ondes négatives dans l’univers. Je ne crois pas à ces conneries,
mais on ne sait jamais.
Je parcours ma liste de contacts et j’appelle Maddy, à qui je n’ai pas parlé depuis
plus d’une semaine.
– Coucou, répond la voix chantante de Maddy.
Immédiatement, l’étau sur mon cœur semble se desserrer.
– Salut Mads, comment tu vas ?
J’entends un bruissement de feuilles et une fermeture Éclair.
– Boh, je me prépare à aller en cours.
– C’est un cours de quoi ?
– De médecine légale.
Je me passe la main dans les cheveux en ramenant le plaid sur mes épaules.
– Attends, c’est pas l’étude des cadavres, ça ?
– Ouais, enfin techniquement, le but est de déterminer la cause exacte de la mort
en étudiant le cadavre. L’autopsie est faite par un médecin légiste, et c’est
souvent dans le cadre d’une enquête pour meurtre ou dans certaines affaires de…
Ma petite sœur continue de parler, mais je ne l’écoute plus, m’étant arrêtée au
mot « cadavre ».
– Tu vas découper des morts ? je m’exclame d’une voix choquée.
Qui pourrait avoir envie de faire ça ? Je sais que c’est un métier, bien sûr, et que
c’est nécessaire pour résoudre des enquêtes pour meurtre, et caetera, mais je n’ai
aucune envie que ma petite sœur découpe des morts ! J’en ai la chair de poule.
– Un cadavre, oui, et ça fait partie du programme. On doit tous suivre une variété
d’options, et j’ai choisi celle-là. C’est super-intéressant, tu ne croiras jamais les
trucs tordus que font les gens !
– Je sais ce que font les psychopathes, et je n’ai aucune envie que ma petite sœur
soit liée à ce genre d’horreurs. Tu es un petit ange, Maddy, je ne veux pas que tu
sois corrompue par les ordures de ce monde.
– Mamma Mia, tu ne pourras pas me protéger toute ma vie. J’ai dix-neuf ans, tu
sais. Et puis, tu n’as que cinq ans de plus que moi.
– Ça ne m’a pas empêchée de m’occuper de toi jusqu’à maintenant ! je rétorque.
– Mia, je ne sais pas encore quel type de scientifique je veux être…

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– Le genre qui guérit les cancers et qui invente des nouvelles pilules qui me
feront rester maigre pour toujours ! Pas le genre qui voit des morts tous les jours
!
Je me redresse sur le canapé. Il est hors de question que Maddy soit entourée par
les horreurs de ce monde. Nous en avons connu assez durant notre enfance, et
j’ai tout fait depuis qu’elle a cinq ans pour qu’elle ne voie que la lumière et la
beauté qui l’entourent.
– Tu sais que je t’aime, dit-elle doucement de cette voix qui me fait toujours
céder. Je sais que tu veux le meilleur pour moi, et je…
Elle marque une courte pause avant de poursuivre.
– … Mia, je dois choisir moi-même ce que je vais faire de ma vie, d’accord ?
Promets-moi de me laisser décider toute seule.
Qu’elle décide de quelque chose toute seule ? Ma petite sœur ? Faire quelque
chose sans moi ? Sans que je sois là pour la guider, la protéger, la sauver si
nécessaire. Je ne comprends pas, mais je fais taire la voix qui panique dans ma
tête et je fais de mon mieux pour la soutenir.
– Je veux que tu sois heureuse, Mads. Promets-moi simplement d’envisager
toutes les options.
– Oui, bien sûr ! Je suis aussi un cours de botanique et c’est fascinant !
s’exclame-t-elle en retrouvant son ton joyeux.
– C’est quoi, la botanique ?
Mon Dieu, je me sens bête d’avoir à demander à ma petite sœur ce que veut dire
un mot. Je l’ai déjà entendu, mais je ne sais pas dans quel contexte.
– C’est la science des plantes, répond-elle en riant.
Elle vient vraiment de dire la science des plantes ? Elle passe de l’étude des
morts à celle des plantes ?
– Les plantes ? je demande.
– Ouais, c’est super-cool, en fait ! Pour l’instant, on étudie le lien des plantes et
des fleurs avec leur environnement. Ensuite, on va passer à l’horticulture, où on
apprendra à cultiver les plantes et les fleurs pour la nourriture et la décoration.
Ça me paraît tout aussi bizarre, mais bien moins dangereux et beaucoup plus
mignon.

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– Je préfère ça, petite sœur.
– J’étais sûre que tu me dirais ça. Eh Mia, je suis en binôme avec un mec, et mon
Dieu, il est canon ! s’exclame-t-elle en riant, comme la jeune fille qu’elle est.
Voilà enfin un sujet dont je peux parler.
– C’est vrai ? Allez, raconte-moi tout !
Et c’est ce qu’elle fait. Elle m’explique que ça fait deux semaines qu’ils flirtent,
mais qu’il n’a pas encore osé lui demander de sortir avec lui. Il a un an de plus
qu’elle et il s’est spécialisé dans la science des plantes. Ça me plaît, ça veut dire
que c’est un intello. Je suggère à ma petite sœur de faire le premier pas, et elle
panique, car il est hors de question qu’elle demande à un mec de sortir avec elle,
ce dont je suis plutôt fière. Cependant, je suis encore plus fière qu’à dix-neuf ans
elle soit toujours vierge. Elle a hésité à coucher avec un ou deux garçons, mais
nous en avons discuté à l’époque, et elle a décidé qu’ils n’en valaient pas la
peine. Je voulais que ce soit quelque chose de spécial, pas comme moi, qui étais
ivre à l’arrière de la voiture de mon copain du lycée, juste avant qu’il ne me
quitte pour la pom-pom girl avec des seins plus gros et un QI bien plus petit.
J’ai pensé qu’il serait utile de lui parler des moments pourris de ma vie si cela
signifie qu’elle apprenne à se protéger. Maddy est la plus belle chose à laquelle
je me sois consacrée, et je suis déterminée à m’assurer qu’elle réussira. Pour
nous deux.
Je me sens beaucoup mieux après avoir parlé à Maddy. Je sais qu’elle s’en sort
bien à la fac, qu’elle a trouvé un bel intello avec qui flirter et que les factures
sont payées. Je me sens en paix. Je suis certaine, à présent, que j’ai fait le bon
choix en acceptant ce boulot d’escort. Maddy a de l’argent sur son compte en
banque, le frigo est rempli et je suis à jour dans mes paiements pour Blaine. Je
suis de bonne humeur lorsque je sors de la douche et je suis en train de sécher
mes cheveux avec la serviette lorsque j’entends mon téléphone sonner. Je
sautille jusqu’aux toilettes, où je m’assieds pour lire le message.
De : Wes Channing
À : Mia Saunders
Alors, c’est comment, Seattle ?

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Mon cœur bat la chamade et mon ventre fait un saut périlleux en voyant le nom
de Wes sur mon écran. Je suppose qu’il cherche à me montrer que nous pouvons
être amis, puisque c’est ce que nous avons décidé. Je réfléchis quelques minutes
à ma réponse, accablée de culpabilité d’avoir couché avec Alec. Cependant, je la
range de côté, car je dois traiter Wes comme un ami, et inversement. Certes, j’ai
des sentiments pour lui et j’adorerais être avec lui, mais ma vie ne le permet pas,
et ce sera ainsi durant les dix mois à venir.
De : Mia Saunders
À : Wes Channing
Humide. Tu savais qu’il pleuvait presque tous les jours, ici ?
Là. Voilà, ça devrait faire l’affaire. Un message court. Amical. Je relis plusieurs
fois ma réponse, puis je l’envoie. J’ai la tête penchée en avant sous le sèche-
cheveux lorsque mon téléphone sonne de nouveau.
De : Wes Channing
À : Mia Saunders
Tout le monde sait ça ! Il pleut presque autant qu’il fait beau. Bon, j’avoue, j’ai
regardé la météo sur Internet. Tu auras du soleil dans quelques jours. Bien sûr,
tu pourrais venir à Malibu, où le soleil brille et la piscine est chaude.
Bien évidemment. Je ne suis pas surprise qu’il m’invite à revenir. Je me
demande si ce sera toujours ainsi entre nous : simple et, plaisant, avec le désir
d’une histoire sérieuse juste en dessous de la surface.
De : Mia Saunders
À : Wes Channing
Pardon, Monsieur Météo, j’aurais dû le savoir. Merci pour l’info, Malibu en
janvier était chouette. J’y referai peut-être un tour en janvier prochain ;)
J’ajoute un clin d’œil pour alléger ma réponse, car même si nous en avons parlé,
je ne peux pas lui faire de promesse. Il me reste encore dix mois à travailler et je
ne sais pas ce qui peut m’arriver.
De : Wes Channing
À : Mia Saunders
Alors, j’attends ta visite avec impatience. Reste au sec, ma chérie.

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Je ne réponds pas, car je ne peux pas répondre. Wes incarne tout ce que je
cherche chez un homme – et plus encore –, mais il n’est pas à moi. Il le sera
peut-être un jour, mais pas maintenant. Ça m’a fait plaisir de lui écrire car ça m’a
rappelé qu’une belle histoire m’attendait peut-être à la fin de cette année, mais
pour l’instant, c’est un artiste sexy qui occupe mes journées et mes nuits.
*
* *
À dix-huit heures, je prends l’ascenseur pour rejoindre Alec. Je ne l’ai pas vu de
la journée, ce qui n’est jamais arrivé jusqu’à présent. Cependant, j’ai aimé avoir
du temps pour moi, car ça fait deux semaines que nous sommes collés l’un à
l’autre. Je vois Alec bouger dans le coin opposé à celui où nous avons travaillé
les jours précédents. Il est derrière son appareil et il est en train de prendre en
photo un homme qui se tient debout devant une toile blanche. Ah ! Un homme
nu, et bien monté. Waouh. Ce n’est pas la première fois que je vois un homme à
poil, bien sûr, mais je suis rarement face à des types aussi musclés dont le sexe
se dresse à la verticale.
Je fais de mon mieux pour ne pas faire de bruit avec mes béquilles et j’avance
discrètement vers eux.
De temps en temps, l’homme ferme les yeux et branle doucement son érection. Il
se lèche les lèvres et avance le bassin tandis qu’Alec enchaîne les photos en
l’encourageant.
– Oui*, comme ça.
– Cambre-toi plus, fais comme si tu faisais un spectacle pour une femme.
– C’est ça, lâche ton sexe et mets tes deux mains derrière la tête.
J’ai l’impression d’être une voyeuse en regardant cet homme se branler devant la
caméra d’Alec. La scène est érotique et chargée d’une tension sexuelle qui
envahit le loft entier, à tel point que je me sens déjà mouiller ma culotte.
– Fini, déclare Alec.
Il attrape un peignoir qu’il jette au modèle. Ce dernier l’enfile et regarde les
images que lui montre Alec sur son appareil.
– Ce ne seront pas des photos, je vais les peindre, oui* ? Tu es d’accord ?
demande Alec.

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L’homme hoche la tête.
– Vous faites du bon travail, répond-il. Au début, je pensais que ça allait être
comme du porno, mais ça n’a rien à voir.
– Non, en effet, dit Alec en frappant l’homme sur l’épaule. Tu es prêt pour la
femme ? demande-t-il.
Je tourne la tête à la recherche d’une autre femme dans la pièce et ma chaussure
râpe le sol en béton, attirant le regard des deux hommes.
– Salut, je dis bêtement en leur faisant un signe de la main.
Heureusement, il fait sombre là où je suis et ils ne peuvent pas me voir rougir.
– Mia, viens ici. Je te présente Aiden. Il va poser avec toi, ma jolie*.
Les paroles d’Alec me font l’effet d’un seau d’eau glacée jetée au visage.
– Euh, quoi ?
Alec vient vers moi et me guide vers Aiden, qui me serre la main.
– Enchanté de faire ta connaissance, Mia. J’ai hâte de travailler avec toi ce soir,
dit-il gentiment.
Ok, donc il est gentil, musclé et canon ? Dieu doit être une femme sans cœur
pour créer Aiden, Alec et Wes – trois hommes parfaits – et les mettre sur mon
chemin à quelques semaines d’intervalle.
Je grommelle un « bonjour » avant de me tourner vers Alec.
– Comment ça ? Je vais poser avec lui ?
– C’est pour « Amour interdit », chérie*. Je vais vous prendre en photo en train
de faire l’amour sur la toile.
Faire l’amour ?!
– Explique-toi… et vite, je gronde.
– Oh, non*, vous n’allez pas faire l’amour*, s’empresse-t-il de corriger. Pas
vraiment, non, vous allez faire semblant pour la photo. Tu comprends,
maintenant ? demande-t-il en prenant mon visage dans ses mains.
– Non. Pas du tout. Donne-moi plus de détails avant que je m’enfuie en courant,
Frenchie.
Alec pince ses lèvres et pose ses poings sur ses hanches. Aiden s’assied en nous
tournant le dos, ce que j’apprécie, car nous sommes plus tranquilles pour
discuter.

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– Mon amour*, j’ai besoin de vous prendre tous les deux en photo, nus, en train
de vous tenir comme des amants. Lorsque j’aurai ce qu’il me faut, je le peindrai.
Après t’avoir fait l’amour, bien sûr, dit-il en effleurant mon nez avec le bout du
sien. Ce sera ma plus belle œuvre. Toi et cet homme, qui est très viril, perdus
dans les méandres de la passion.
Il se penche et m’embrasse brièvement, lapant ma lèvre avant de reculer, tentant
clairement de me convaincre de faire quelque chose sans avoir à en parler
davantage. Ce petit con de beau gosse français.
Je soupire et retire mes cheveux de mon visage.
– Tu as dit qu’on devait être nus, si j’ai bien compris ?
– Oui*, tu sais que je dois voir le corps pour pouvoir le peindre. Mais aucune
femme n’a un corps plus beau que le tien.
Il me regarde des pieds à la tête. Je n’ai pas mis de soutien-gorge, consciente que
j’allais devoir l’enlever de toute manière, et son regard brûlant fait pointer mes
seins sous mon caraco moulant. Ses mains effleurent mes côtes et ses pouces
survolent mes tétons dressés.
– Je vois que cette idée te plaît beaucoup, dit-il.
– J’aime l’idée d’être avec toi, je précise en m’approchant de lui. Mais je ne
connais pas cet homme.
Je trouve déjà suffisamment dur de me mettre nue devant Alec pour ses
photos… et maintenant je dois me rouler par terre avec un autre homme, à poil,
et faire semblant de faire l’amour ? Ça n’a rien à voir avec les photos qu’il a
prises jusqu’à maintenant et où il n’y avait qu’Alec et moi.
Il me dévisage en attendant ma réponse, mais son regard est infiniment doux.
Après tout… ce n’est pas comme si je devais coucher avec cet homme, je dois
seulement faire semblant. Je tourne la tête vers Aiden, assis sur la chaise, jambes
croisées, balançant son pied dans le vide.
– Très bien. Je veux bien essayer. Pour toi, je dis à Alec.
Je veux qu’il sache que ça ne me fait pas plaisir, mais que je le fais parce que j’ai
confiance dans sa perspective d’artiste.
– Ok, Mia. Va là-bas et déshabille-toi. Aiden, donne-moi ton peignoir, dit Alec
en retrouvant son ton professionnel.

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Aiden se lève et enlève la robe de chambre, révélant de nouveau son magnifique
corps nu. Même au repos, son sexe est impressionnant. Je me dis qu’il doit
rendre les femmes sacrément heureuses et je rigole bêtement.
– Il y a un problème ? demande Aiden en fronçant les sourcils et en baissant les
yeux avant de couvrir son sexe avec sa main.
J’écarquille les yeux en réalisant ce pour quoi il pense que je ris.
– Oh mon Dieu, non ! Tu as un superbe pénis… je veux dire… euh… je ne riais
pas à cause de ta taille… euh… aaargh ! je m’exclame en levant les yeux au ciel.
Bon sang, Mia, maintenant le pauvre va douter de sa virilité.
– Pourquoi je ne peux jamais être normale ? je rouspète en soufflant longuement.
– Ça va, dis Aiden en riant. Ne t’en fais pas, je comprends.
Il tourne les talons et s’assied sur le drap blanc qui recouvre le matelas.
– Sans rire, Aiden, je me disais juste que tu étais canon et que tu devais rendre
les femmes très heureuses, je dis en ouvrant ma braguette et en baissant mon
jean.
– Ma copine ne se plaint pas, en tout cas, répond-il.
Il me lance un clin d’œil, et tout à coup, cette situation ne me semble pas si
horrible. Il a une copine. L’idée qu’il n’est là que pour poser et qu’ensuite il
rentrera auprès de sa copine me soulage énormément. C’est absurde, puisque je
vais quand même me rouler par terre avec lui, mais c’est ainsi.
– Complètement nue, ma jolie*, dit Alec en gravissant une échelle surplombant
le matelas.
J’enlève mon caraco, libérant mes seins, et mes tétons durcissent
immédiatement, seulement cette fois-ci, c’est parce que j’ai froid.
– Il y a un radiateur là-bas, donc tu auras chaud lorsque tu seras sur le matelas
avec Aiden.
Je retiens mon souffle et je baisse ma culotte avant de boiter vers Aiden. Ma
cheville est presque guérie, mais j’ai un peu mal lorsque je mets trop de poids
dessus, donc je fais attention de ne pas trop m’en servir. Je m’assieds sur le
matelas et je rampe timidement vers lui.
– Ne t’inquiète pas, tu as un corps canon, toi aussi. Tu es prête à ce que je te
touche ?

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Je me lèche les lèvres et je lève la tête vers les projecteurs au-dessus de nous. Je
vois à peine la silhouette d’Alec et, soudain, une vague de peur m’envahit,
recouvrant mon corps de chair de poule.
– Euh, je suppose, ouais, je dis sans en être convaincue.
– Mia, allonge-toi, dit Alec. Aiden, mets ton bras sous sa nuque pour qu’elle
repose sa tête dessus. Mets ta main droite dans son dos pour la tenir contre toi.
Aiden se rapproche et s’étend sur le côté. Lorsque je baisse les yeux, je vois que
son sexe a durci. Je déglutis, faisant de mon mieux pour effacer le malaise qui
s’empare de moi en voyant son érection. Je sais qu’il est normal pour un homme
d’être excité lorsqu’il voit une femme nue, mais ça n’empêche que ça ne me
plaît pas. Du tout.
Pendant ce temps, Alec continue de crier ses ordres.
– Passe sa cuisse sur la tienne pour cacher ton sexe.
Aiden fait ce qu’on lui dit et prend mon genou pour le tirer par-dessus sa cuisse.
C’est alors que sa queue se niche entre mes cuisses, et je grimace.
– Mia ! gronde Alec. Fais comme si tu tenais l’homme que tu aimes. Regarde-le
dans les yeux.
Je grince des dents et je lève les yeux dans ceux d’Aiden. Ils sont chocolat et
doux. Cependant, j’y vois précisément ce que je ne voulais pas y voir, du désir.
Sa main remonte sur ma cuisse pour empoigner ma fesse. Je me crispe et
j’entends le cliquetis de l’appareil photo au-dessus de nous.
– Mia, tu ne fais pas semblant, insiste Alec. Lève le cou. Maintenant, Aiden,
embrasse lentement sa gorge. Plante tes ongles dans sa chair.
Nous lui obéissons, et alors qu’Aiden appuie son sexe plus fort contre moi, je
sens une goutte tomber sur ma peau. Je suppose que c’est du liquide préséminal,
puisque ça ne peut pas être autre chose, et je déglutis difficilement. Je commence
à compter dans ma tête, espérant qu’Alec aura vite la photo qu’il désire et que
nous en aurons bientôt fini.
– Ça ne marche pas du tout, dit l’artiste en descendant bruyamment de son
échelle. Ce n’est pas bon*. Pas bon du tout, dit-il en faisant les cent pas. Deux
corps magnifiques entremêlés, ce devrait être magnifique, non* ?

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Alec se parle à lui-même et j’en profite pour m’écarter, m’asseyant plus loin en
croisant les bras sur ma poitrine. Alec tourne la tête vers moi et plonge ses yeux
dans les miens. C’est alors qu’Aiden touche mon épaule, et je tressaille. Alec le
voit et comprend tout de suite.
– Aiden, tu peux partir, dit-il en allant lui chercher le peignoir.
– Et la photo ? J’ai vraiment besoin de cet argent, dit-il d’une voix inquiète.
– Tu seras payé, tu as fait du bon boulot. Ma vision est spécifique. La première
pièce sera peinte.
– Vraiment ? demande Aiden, et son visage s’illumine.
Alec lui sourit et lui frappe l’épaule.
– Oui. Maintenant, tu dois partir. Je vais travailler avec ma muse.
Aiden part se changer dans la salle de bains et Alec me tend son peignoir
personnel, ce qui me fait sourire. Je l’enfile et je m’assieds en tailleur sur le bord
du matelas.
– Tu n’as pas aimé ce shooting, dit-il en s’asseyant à côté de moi.
Sans déconner, Sherlock, t’as capté ?
Je reste assise en silence, le laissant tirer ses propres conclusions.
– Il me faut vraiment cette photo, Mia. Alors, j’ai une idée.
– Ok… je chuchote d’une petite voix timide et inquiète.
Il promène sa main sur ma joue et plonge son regard dans le mien.
– Je serai ta muse pour cette photo.

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Chapitre 7

– Toi ? Ma muse ?
Je ne comprends pas.
J’entends Aiden traverser le loft, ouvrir la grille de l’ascenseur et la refermer.
Alec se lève et retire son t-shirt à manches longues, révélant son torse musclé qui
n’est que plus beau dans la lumière vive de l’atelier. Il défait sa ceinture et baisse
son jean. Comme d’habitude, il ne porte pas de caleçon. Je saisis ses hanches en
me léchant les lèvres et je le regarde.
– Tu poseras avec moi. Je me servirai de ça, dit-il en me montrant un petit boîtier
noir avec un bouton rouge qui me fait penser aux détonateurs de bombe que
tiennent les méchants dans les films. Je vais poser avec toi. Comme ça, ce sera
vraiment de l’amour sur toile.
L’idée présente en effet une quantité infinie de possibilités. Je souris d’un air
machiavélique en remontant mes mains dans son dos pour le tirer à moi et
embrasser son gland. Lorsque je l’ai léché sur toute sa longueur, je recule.
– Tu n’étais pas obligé de faire ça, tu sais, je murmure.
– Si, ma jolie*. Tu n’étais pas à l’aise. Une seule grimace sur ton joli minois est
déjà de trop. Je savais que l’idée était délicate, mais lorsque j’ai vu ton
expression quand il t’a touchée, sachant ce que tu faisais pour moi… non, ce
n’était pas bien*. J’aurais dû m’en douter, tu t’es engagée auprès de moi, donc
tu ne peux pas faire semblant d’aimer un étranger. L’amour, celui que je veux
montrer à travers mon art, doit être authentique*. Il doit être vrai, et il doit être
offert volontairement.
J’avance la tête et je prends sa verge dans ma bouche pour lui montrer combien
ses paroles me font plaisir. J’apprécie l’importance qu’il accorde à mon bien-être

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et le fait qu’il comprenne que je ne suis pas seulement en quête de bon temps. Il
sait que je suis à lui, et seulement à lui, pour le mois à venir.
Alec penche la tête en arrière tandis que je l’avale aussi profondément que
possible, et le cliquetis de l’appareil photo retentit. L’idée qu’il capture ce
moment d’intimité m’excite encore plus et je n’ai plus qu’une envie – qu’il me
prenne, ici, maintenant. Il continue de baiser ma bouche pendant un moment,
puis, brusquement, il recule les hanches.
– C’est trop bon, Mia. Mais je dois nous prendre en photo pendant qu’on fait
l’amour.
Je hoche la tête et je le regarde ramasser son jean pour en sortir une capote. Je
suis à deux doigts de lui dire que je prends la pilule et que techniquement il n’en
a pas besoin, mais quelque chose me dit que ce n’est pas une bonne idée. Il
enfile le préservatif et vient vers moi, lentement, comme un prédateur. Il
m’allonge sur le côté, comme il l’a fait avec Aiden. Cependant, cette fois-ci, je
me rapproche de lui autant que possible, écrasant mes seins contre son torse.
– Je vois que tu n’as plus peur de l’appareil, dit-il en souriant.
– Tais-toi et prends ta photo, Frenchie.
Je m’empare de sa bouche alors que les flashs éclairent nos corps nus. Il
promène ses mains partout sur mon corps, et lorsque le boîtier repose sur mon
sein, le métal froid ajoute un frisson de plaisir à l’excitation immense que je
ressens déjà.
– Et maintenant, le véritable amour, grogne-t-il.
Il prend ma jambe sur la sienne, aligne nos bassins et me pénètre lentement. Je
penche la tête en arrière et je me cambre pour coller mon bassin au sien.
– Oui, chérie*, prends mon amour, chuchote-t-il en empoignant mes fesses pour
s’enfouir complètement en moi, touchant par la même occasion ce point qui me
fait jouir instantanément.
Fini. Je m’envole. Mon orgasme parcourt mon corps de long en large et de bas
en haut. Je tiens Alec fort contre moi, voulant être toujours plus près de lui,
m’accrochant à cette vague de plaisir en essayant de ne pas m’y noyer. Les
flashs illuminent mes paupières fermées, capturant ce moment de jouissance

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exquise. Lorsque je reviens sur terre, je le pousse sur le dos pour le chevaucher
et je saisis le boîtier du déclencheur.
– Chacun son tour, je grogne en souriant.
Il ne rechigne pas, profitant d’avoir les deux mains libres pour jouer avec mes
tétons, tirant et frottant jusqu’à les rendre brûlants. Je penche la tête en arrière,
puis je me soulève et me rabaisse sur lui. Ses muscles se contractent, et je clique
sur le boîtier. Ces photos ne sont peut-être pas pour son exposition, mais je ne
serais pas contre en avoir une copie.
Je chevauche mon bel artiste avec une telle ardeur qu’il se met à haleter et à
grogner. Cependant, j’attends qu’il commence à parler français pour lui accorder
du répit, car ce n’est qu’alors que je sais qu’il a atteint un point de non-retour.
– Ton sexe est si chaud*.
– Je pourrais t’aimer toute la nuit*.
– Encore, Bébé*.
La dernière phrase, j’ai appris ce qu’elle voulait dire depuis longtemps.
Cependant, je n’ai pas le temps d’accélérer, car il me fait rouler sur le dos. Mon
Dieu, cet homme est un dieu du sexe, son endurance est épatante. Ses coups de
bassin s’amplifient, frappant mon clitoris à chaque aller-retour, et je sens un
nouvel orgasme se préparer. Nos corps sont en sueur et les projecteurs chauffent
au-dessus de nous.
– Qu’est-ce que tu as dit en français ? je demande avant de mordre sa lèvre et de
l’aspirer dans ma bouche.
– J’ai dit que ta chatte est chaude et que je pourrais te faire l’amour toute la nuit.
Et je pense que c’est ce que je vais faire, ma jolie*.
Ses va-et-vient accélèrent encore et nous ne parlons plus. Le boîtier a disparu
lorsque je l’ai lâché durant mon deuxième orgasme. Alec passe sa main entre
nous et son doigt masse mon clitoris. Je plante mes ongles dans la chair de son
dos, griffant sa peau comme une furie, puis je passe mes jambes autour de sa
taille pour le tenir contre moi. Il se redresse sur ses avant-bras, recule son bassin
jusqu’à ce qu’il n’ait plus que son gland en moi, puis il s’enfouit de nouveau
avec une violence inouïe. Mes orteils se recroquevillent et je me mets à trembler
violemment sous la puissance de mon troisième orgasme. C’est violent et

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chaotique, et je pousse un cri strident qui se mêle bientôt à celui d’Alec. En plein
orgasme, il nous fait rouler sur le côté, et click. C’est la dernière chose dont je
me souviens avant de m’endormir.
*
* *
Je me réveille seule, couverte par deux peignoirs, bercée par de la musique
classique. Je m’assieds lentement et je balaye l’atelier du regard à la recherche
d’Alec. Je l’aperçois de l’autre côté du loft, en jean, torse nu. Miam. Les muscles
de son dos se contractent et ondulent sous le mouvement de son pinceau. Je ne
sais pas combien de temps j’ai dormi, mais Alec a presque fini le tableau
d’Aiden. J’y vois le modèle tenir son érection, cambré, la tête en arrière la
mâchoire crispée. J’avance vers lui sans faire de bruit, mais je crois qu’il ne
m’entendrait pas de toute manière tant il est perdu dans son monde.
Je m’assieds en silence sur une chaise à une dizaine de mètres de lui, et je le
regarde opérer sa magie. Il est méticuleux et ses coups de pinceau sont parfaits.
Il peint rapidement, avec des gestes précis. J’ai l’impression que chaque
mouvement est fait en rythme avec les notes du piano. De l’art musical, c’est
magnifique. La vue, cet homme, ce tableau, le tout forme une expérience céleste
que je n’oublierai jamais.
J’attends un long moment, mais je ne peux plus me retenir de le toucher, alors
j’enlève mon peignoir et je le pose sur la chaise, puis je vais silencieusement
vers lui. On dirait qu’il est en transe. Le tableau me semble fini, mais je n’ai pas
l’œil d’un artiste. Mes seuls domaines de compétence sont les hommes, les t-
shirts de concert et les motos, et encore.
Je passe délicatement mes bras autour de sa taille pour poser mes mains sur ses
pectoraux, et je l’embrasse entre les omoplates. Son odeur est divine, un
mélange de bois, de sexe, de transpiration et de peinture. Je sais que j’interromps
un moment de création, mais ça ne semble pas le déranger. Je crois qu’Alec aime
avoir mes mains sur lui. Ou plutôt, je le sais.
– Tu es beauté et lumière, je murmure en embrassant ses épaules et en
promenant mes mains sur ses abdominaux.

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Il a le corps d’un homme qui passe des heures à la salle de sport, mais je ne l’ai
jamais vu faire d’exercice.
– Non*, je suis caché dans l’ombre et je ne m’illumine que lorsque mon art est
exposé. C’est toi qui m’éclaires. C’est le reflet de ta beauté que tu vois en moi,
de la même manière que mon corps appelle le tien et que le tien appelle le mien.
Je défais lentement sa braguette et empoigne son érection. Dans cette position, sa
verge me paraît énorme, presque trop grande pour mes mains. Je plonge mes
dents dans la chair de son épaule, incapable de retenir mon désir pour lui.
Il pose sa palette et son pinceau et il baisse son jean sur ses chevilles. Je fais le
tour de son gland avec mon pouce pour étaler son liquide préséminal, puis je le
branle, tantôt vite et fort, tantôt lentement et délicatement. Il prend ma main et la
porte à sa bouche pour lécher et sucer chacun de mes doigts et la paume de ma
main. Il la guide de nouveau sur sa verge et me montre avec quelle pression le
serrer, comment le branler, bien plus fort que je n’aurais osé le faire. Lorsque
j’atteins le rythme qu’il souhaite, il lâche ma main.
Il se remet à parler français et il appuie ses mains contre le mur. Je n’ai jamais
trouvé sa langue maternelle aussi belle que lorsqu’il est perdu dans l’acte. J’aime
l’entendre plus que je ne daignerais l’avouer. Je serre fort son sexe en remontant
lentement vers son gland, puis je descends brusquement, recommençant encore
et encore. Il gémit, puis il tend un bras en arrière pour le passer entre mes jambes
où je mouille déjà.
Ses doigts tournoient autour de mon clitoris avant de plonger en moi. Je retiens
mon souffle et je remonte ma main pour m’accrocher à son épaule pendant que
mon autre main continue de le branler. Il parle français, je parle anglais,
chuchotant tous deux nos mots d’amour. Mon sexe se contracte sur ses doigts,
lui signalant mon orgasme au moment où son pénis se couvre d’une couche de
liquide. Je l’étale sur toute sa longueur et, soudain, je tressaille, surprise par la
violence de ma jouissance. Ma chatte emprisonne ses doigts et ma main enserre
sa verge. Nous nous cambrons l’un contre l’autre, parcourus de spasmes, tandis
qu’il éjacule sur ma main et le sol en béton. Je mords son dos et il grogne
comme un animal.

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Lorsque nos souffles et les battements de nos cœurs ralentissent, je lèche
l’endroit où mes dents l’ont marqué. Il me tend une serviette et j’essuie ma main,
mes yeux sont rivés sur la trace de morsure que j’ai laissée dans son dos.
– Je suis désolée, je chuchote.
– Ne le sois pas. Ne t’excuse jamais d’avoir été noyée dans la passion. Je
porterai la trace de tes dents avec fierté.
Il remonte son jean. Il me serre dans ses bras et je m’accroche à lui, encore
tremblante, lorsqu’une vague d’émotions s’abat sur moi et que les larmes coulent
sur mes joues. Alec me console comme il le fait toujours, en me caressant le dos,
en chuchotant des mots en français et en anglais, me disant à quel point je suis
belle. Me disant que je suis la lumière. L’amour.
Plus tard, je pose de nouveau devant lui. Il est trois heures du matin, et je m’en
contrefiche. J’ai joui trois fois ce soir et rien ne pourrait gâcher ma bonne
humeur.
– Tends la main, comme si tu voulais cacher ton sexe, dit Alec. Couvre tes seins
avec ton bras et penche la tête en arrière. Ferme les yeux et ouvre la bouche.
Je suis ses instructions à la lettre.
Alec prend les photos et je souris. Il reprend une photo, et j’ouvre les yeux pour
le regarder. Mon Frenchie. Il est superbe derrière son appareil photo, torse nu, le
jean ouvert, m’offrant un aperçu de sa virilité. Je ferme de nouveau les yeux et je
couvre mes seins et mon sexe.
Click.
– Tu as fini ?
– Maintenant, oui, dit-il en dégainant son sourire le plus sexy.
Il vient vers moi et me soulève comme une princesse.
– Tu sais, ma cheville va beaucoup mieux.
– Mais je préfère te porter.
Il m’emmène chez lui, où il me dépose dans son lit avant de se nicher derrière
moi, un bras sur ma taille, me serrant contre lui.
– Ce soir, ma jolie*, c’était plus fort que tout ce que j’ai connu auparavant. Être
avec toi est comme… c’est un endroit spécial dans ce monde. Je ne connaîtrai
plus jamais ça. Je veux que tu saches que j’apprécie tout ce que tu me donnes.

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J’ai beau être sur le point de m’endormir, je roule sur le dos et je l’attire à moi.
Je ne pourrai jamais remercier Alec pour ce qu’il m’a offert, il m’a fait découvrir
que je ne suis pas seulement Mia la sœur, la fille, l’amie. Je suis une femme avec
des sentiments, des désirs et des aspirations. Je ne suis pas seulement une petite
fille de dix ans abandonnée par sa mère.
Je dois faire ce job pour sauver mon père, une fois de plus. C’est un moyen de
parvenir à une fin. Néanmoins, je vais tâcher de m’amuser.
Blottie contre lui, sa tête sur mes seins, je passe mes doigts dans les longs
cheveux d’Alec. Il grogne lentement, et je sens peu à peu son poids reposer sur
ma poitrine. Pour la première fois depuis que nous nous sommes rencontrés,
Alec s’endort dans mes bras.
*
* *
Aujourd’hui, Alec me surprend en me servant un petit déjeuner au lit.
Apparemment, le shooting d’hier lui a plu. J’ai hâte de voir les photos, mais je
l’encourage à les regarder seul afin d’éviter que je lui saute dessus de nouveau. Il
me promet que nous nous amuserons plus tard, mais, comme d’habitude, il y a
beaucoup à faire. Cependant, ça ne l’empêche pas de me réveiller en m’offrant
un orgasme, sa tête entre mes jambes, ayant compris que c’est tout ce dont j’ai
besoin pour lui obéir.
Dans l’atelier, il me demande de me dévêtir entièrement et de me placer à côté
du tableau d’Aiden qu’il a peint hier. Je suis appuyée contre le mur et il lève
mon coude en plongeant ma main dans mes cheveux, de sorte à ce que si j’étais
allongée, j’aurais l’air de branler le modèle. Alec prend une tonne de photos, et
j’ai fini pour la journée.
Le lendemain, je suis de nouveau assise sur ma chaise et mes lèvres sont peintes.
La peinture qu’il a finie hier soir est dans le même thème que les autres, mais
elle est plus simple. C’est une sérigraphie de mon bras et de ma main couvrant le
sexe d’Aiden. Il me demande d’embrasser la photo sur ma main. C’est
intéressant, même si je ne comprends pas bien la signification.
– Tu comprendras, Mia. Je te le promets, affirme-t-il sans m’en dire davantage.

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Le lendemain, lorsque j’arrive à l’atelier, je découvre une peinture d’Alec et moi
en train de faire l’amour. Elle est accrochée à côté de celle d’Aiden, mais les
deux sont séparés par une nouvelle sérigraphie. Une photo que je ne pensais pas
voir et dont je ne soupçonnais pas l’existence.
Elle a été prise lorsqu’Alec a fini le shooting d’Aiden et moi, l’autre soir, mais
nos parties intimes sont couvertes et nous regardons dans des directions
opposées. On m’y voit assise, les genoux ramenés sous le menton, et Aiden me
tend la main. Si la photo n’était pas si honnête, je l’aurais détestée.
– Qu’est-ce qu’elle fait là, cette photo ? je demande.
– Tu sais bien, Mia. Regarde les trois toiles comme un seul tableau et tu
comprendras.
Je regarde la première image, dans laquelle Aiden se masturbe, et où ma main
essaie de le cacher sans y parvenir. J’étudie ensuite la photo où il essaie de me
toucher et où je suis affreusement gênée. Je termine avec la photo d’Alec et moi.
Ma jambe est sur la sienne, et on ne voit pas qu’il me pénètre. J’ai mon bras sur
lui, couvrant mes seins, et nos regards sont voilés par le plaisir que nous
procurent nos orgasmes simultanés.
Lorsque je regarde les trois ensemble, je vois une histoire. Un homme se
masturbe, un homme qui est censé me protéger mais qui n’y parvient pas. Son
amour est à sens unique, comme on le voit dans la deuxième image. Ensuite, je
trouve l’amour dans les bras d’un autre.
– Tu le vois maintenant ? chuchote Alec tandis que son bras m’entoure par-
derrière pour m’attirer contre lui.
– Oui, je réponds en hochant la tête. C’est comme si c’était brisé.
– L’amour est brisé ?
Je hoche la tête, ne trouvant pas quoi dire.
– Alors, c’est ainsi que nous l’appellerons. Le triptyque se nommera « Amour
brisé ».
Bien évidemment : Amour brisé, c’est tout ce que j’ai connu dans ma vie, et que
je connais toujours. Ça tombe sous le sens.

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Chapitre 8

Mon séjour avec Alec prendra fin dans huit jours, et je ne suis toujours pas
sortie de l’immeuble. Je n’ai rien vu de Seattle et même si le soleil brille
aujourd’hui, je doute qu’Alec veuille aller se promener. Il a passé les derniers
jours à ajouter des touches à chacun de ses tableaux et il m’a expliqué qu’il va
continuer à les peaufiner jusqu’au vernissage qui aura lieu la semaine prochaine.
Le lendemain, je quitterai Alec et je rentrerai à la maison avant de partir à la
rencontre de mon prochain client.
À la maison. Hélas, je ne parle pas de mon petit studio à Los Angeles, car cette
fois-ci, je vais à Las Vegas. Non seulement il est temps que je voie mon père
mais Blaine m’oblige à lui verser le second paiement en mains propres, ça fait
partie du deal. Quel enfoiré ! Si seulement j’avais su quelle mauvaise idée c’était
de le fréquenter… Or, je m’empêtre toujours dans des situations impossibles
avec les hommes. Au moins, maintenant, je suis payée et je peux partir à la fin
du mois sans heurts, ça fait partie du job.
Cependant, je ne peux pas considérer Wes et Alec comme des boulots. Ce sont
des mecs bien à qui je tiens énormément, des hommes avec qui n’importe quelle
femme adorerait sortir, mais pas moi, c’est impossible. Cela dit, même dans
d’autres circonstances, je ne pense pas qu’une histoire avec Alec durerait
longtemps. Je ne dis pas que je ne l’apprécie pas, simplement je ne me vois pas
construire une relation avec lui. Il a besoin de moi pour son travail et j’ai besoin
de lui pour l’argent, ce qui ne nous a pas empêchés de créer un lien qui repose
sur notre attirance mutuelle et une forte amitié. Wes, en revanche… c’est une
autre histoire. Wes est le genre de mec dont on devient folle et dont on parle sans
cesse à ses amies, qu’on rêve d’épouser. Ce n’est pas un coureur de jupons,

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même s’il a essayé de jouer ce rôle au début, jusqu’à ce qu’il me demande de
rester.
Wes m’a demandé de rester. Avec lui. Pour lui. Pour qu’on forme un couple.
Je soupire longuement en observant la pièce et en regardant par la fenêtre, il fait
tellement beau. Il faut qu’Alec me sorte d’ici, point à la ligne. Ça fait plus de
deux semaines que je suis enfermée dans cet immeuble, et j’ai atteint ma limite.
Je me dirige vers l’ascenseur lorsque mon téléphone sonne.
– Allô ? je réponds sans regarder l’écran.
– Bien le bonjour, ma poupée. Comment va ma petite travailleuse préférée ?
– Salut, Tante Millie, je réponds en m’asseyant sur un fauteuil près de la porte.
– Qu’est-ce que j’ai dit au sujet de m’appeler Millie ? C’est Miss Milan, chérie,
me rappelle-t-elle.
– Je ne t’appellerai jamais comme ça, tu sais. Tu as changé mes couches et tu me
connais mieux que ma propre mère, ton horrible sœur. Je t’appellerai toujours
Millie, Tatie.
– Argh. Ne me rappelle pas à quel point je suis vieille, tu vas me faire
complexer. D’ailleurs, tu me fais penser que…
Elle marque une pause durant laquelle je l’entends noter quelque chose sur un
bout de papier.
– …il faut que j’appelle mon chirurgien pour rafraîchir mon Botox.
– Beurk, c’est moche, Tante Millie. Ne te mets pas ces trucs dans la peau. Tu
pourrais rester bloquée comme ça, tu sais.
– C’est bien ce que j’espère, ma chérie ! répond-elle d’une voix joyeuse. Bref !
Je t’appelle à propos de Monsieur Mars. Tu vas à Chicago !
– Chicago.
Je n’y suis jamais allée, ça peut être sympa. De toute façon, je n’avais jamais
quitté le Nevada et la Californie jusqu’à il y a deux semaines.
– Comment s’appelle le petit veinard ? je demande, moqueuse.
– Anthony Fasano, un grand restaurateur. Il détient la plus grande chaîne de
restaurants italiens du pays. Tu connais Fasano’s ?
– Waouh, bien sûr ! J’y ai mangé un million de fois ! Gin et moi adorons y aller,
c’est le meilleur resto italien de Vegas !

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– Ouais, eh bien, Anthony Fasano a hérité des mille deux cents restaurants de la
chaîne quand son père est décédé l’an dernier. Apparemment, sa famille est
déterminée à lui trouver une femme pour qu’il ait un héritier, parce que c’est le
seul fils dans une famille de cinq enfants. Tu vas jouer le rôle de sa fiancée
longue distance qui habite sur la côte Ouest. L’idée, c’est qu’il te fait venir pour
rencontrer la famille et qu’ils lui fichent la paix.
– Waouh, tu crois pas qu’on dirait un scénario de Jerry Springer1 ?
– Écoute Mia, tout ce qui compte, c’est qu’il paie pour louer ton joli petit cul. Le
reste est sans importance. Que tu ailles à des cocktails mondains, que tu joues le
rôle d’une muse ou que tu fasses semblant d’être la fiancée de quelqu’un… on
s’en fiche. Fais ton boulot. D’ailleurs, c’est encore un beau spécimen, tu pourrais
retoucher un bonus de vingt pour cent. À ce propos, j’ai vu que tu avais reçu les
vingt mille dollars de Monsieur Channing et que Monsieur Dubois t’a également
fait le versement hier. Tu as l’air de bien t’amuser ma poupée.
– Pardon, qu’est-ce que tu viens de dire ?
– C’est sans compter la fortune que tu…
– Attends, Wes et Alec m’ont payée pour… du sexe ?
Je ferme les yeux alors que mon cœur cesse de battre.
– C’est quoi, cette merde ? je chuchote, les larmes aux yeux.
– Chérie, ils sont censés te payer. Je suis surprise que tu ne l’aies pas remarqué
avant. Monsieur Channing m’a demandé ton relevé d’identité bancaire et il a
transféré l’argent avant-même que tu quittes Malibu. Monsieur Dubois a fait
faire le transfert par un de ses employés, hier. Où est le problème ?
Je secoue la tête et je ferme les poings, luttant contre l’envie de frapper le mur le
plus proche tandis qu’une vague de colère noire déferle dans mes veines.
– Faut que j’y aille. Envoie-moi les infos pour le prochain client.
Je lui raccroche au nez, puis j’envoie un message.
Je laisse mon téléphone sonner deux ou trois fois, le temps de laisser ma colère
monter.
– Salut, dit la voix de Wes. Je pensais justement à toi…
– Ne te fatigue pas. Tu joues à quoi ? je crache d’une voix furieuse.

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– Attends, ralentis, Mia. Qu’est-ce qui se passe ? demande-t-il d’une voix
faussement inquiète.
Je sais maintenant que tout entre nous n’a été qu’un mensonge.
– L’argent, Wes ! Comment tu as pu faire ça ?
– Tu ne l’as pas reçu ? Oh mon Dieu, est-ce que ton père va bien ? Où es-tu, je
paierai tout ce que tu veux. Dis-moi que tu vas bien, Mia ! crie-t-il à l’autre bout
du fil.
– Mon père va très bien, enfin, il est toujours dans le coma. Je ne parle pas de
l’argent que je dois aux requins, Wes. Je te demande comment tu as pu me payer
parce qu’on a couché ensemble. C’était que de la baise, pour toi ?
– Il n’a jamais été question d’argent, Mia, et tu le sais très bien ! répond-il d’une
voix rauque et tremblante.
– Alors pourquoi ? Pourquoi tu me traites comme une prostituée ? je demande
alors que les larmes ruissellent sur mes joues.
– Non ! Bon sang, non ! Ne dis pas ça, Mia, ce n’était pas comme ça.
– Ah non ? Alors, pourquoi il y a vingt mille dollars sur mon compte en banque
? Millie me l’a dit !
– C’est qui, Millie ?
– Ma tante. Miss Milan, c’est pour elle que je travaille, Escorts Exquises, ça te
dit quelque chose ?
– Tu travailles pour ta tante ?
Je réprime un grognement de frustration.
– Ne change pas de sujet, Wes ! Je pensais qu’il y avait quelque chose de spécial
entre nous. C’est pour ça que je ne t’ai pas parlé des vingt pour cent
supplémentaires. Je ne te les aurais jamais fait payer, je ne suis pas une call-girl !
J’ai couché avec toi parce que je le voulais, pas parce que tu me payais !
– Mia, ma chérie, écoute-moi. C’est dans mon contrat… Et puis, de toute façon,
je voulais te donner cet argent. Tu ne m’as pas laissé rembourser les usuriers de
ton père, alors la moindre des choses que je pouvais faire, c’était t’aider à payer
la dette plus vite. Je suis désolé, je n’ai jamais voulu te faire de mal, dit-il en
soupirant. Putain, Mia, je suis désolé. Il faut que tu me croies, je n’ai jamais

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pensé ça de toi ! Je tiens à toi. Énormément… chuchote-t-il. Tu me manques.
Beaucoup trop. Je… Dis-moi ce que je peux faire pour arranger les choses.
J’inspire lentement en regardant les arbres verdoyants par la fenêtre après toutes
ces journées de pluie.
– Ça m’a blessée, Wes. Mais…
– Mais quoi ? demande-t-il d’une voix désespérée.
Je ferme les yeux et je ravale le nœud qui s’est logé dans ma gorge.
– Je comprends pourquoi tu l’as fait. Je vais te le renvoyer.
– Non, ma chérie, non. S’il te plaît, garde-le pour te sortir plus vite de ce pétrin.
C’est égoïste, je sais, mais… peut-être que ça te ramènera à L.A. plus vite, ou
que ça aidera ta sœur avec la fac. Mia, je veux juste t’aider. Laisse-moi faire ça
pour toi.
– Wes…
– S’il te plaît, Mia.
– D’accord.
– Merci, murmure Wes à voix basse. Est-ce que tout est arrangé entre nous ?
Est-ce qu’on est toujours…
– Amis ? je termine.
Il rit doucement, et je réalise que c’est le plus beau son que j’ai entendu depuis
trois semaines.
– Oui, amis, répète-t-il.
– Oui, on l’est toujours, Wes. Faut que j’y aille.
– Ton client ? demande-t-il d’une voix distante.
Je hoche la tête, même s’il ne peut pas me voir.
– Tu me manques aussi, tu sais, je dis.
– C’est vrai ?
– Oui. Tout va bien, Wes. On se parle bientôt ?
– Tu sais où je suis, ma belle. Tu as la clé.
– Au revoir, Wes.
Je raccroche avant d’entendre sa réponse car j’aurais trop envie de tout laisser
tomber pour courir à lui et le réconforter. Je me sens soulagée de savoir qu’il

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m’a versé cet argent pour m’aider, il ne s’est simplement pas rendu compte de la
façon dont j’allais l’interpréter.
Je ne suis la pute de personne, et à présent il est temps de l’expliquer à Alec.
*
* *
– Ma jolie* ! Je suis prêt. On doit faire les photos pour « Amour égoïste », dit
Alec dès que je passe les portes de l’atelier. Déshabille-toi, nous n’avons pas de
temps à perdre, ajoute-t-il en me guidant vers un matelas recouvert d’un drap
blanc.
Je n’ai pas le temps d’exprimer ma colère, car il enlève lui-même mon t-shirt
avant de commencer à défaire ma braguette.
– Alec, stop ! Il faut que je te parle.
– Non*. Enlève tes vêtements, mais garde ta lingerie, dit-il en allant vers
l’échelle.
Ses mouvements sont brusques et ça m’énerve encore plus. Il est de nouveau
perdu dans sa bulle de création et je crois qu’il n’entend pas ce que je dis.
– Alec, il faut que je te parle, je retente alors qu’un de ses assistants essaie de
m’aider à enlever mon jean.
Je fais finalement ce qu’ils veulent et, une fois que je suis en soutif et en culotte,
l’assistant m’aide à prendre la position. Je laisse la coiffeuse d’Alec me
décoiffer, mais lorsqu’un autre assistant vient vers moi avec le pot de peinture, je
décide que c’en est assez.
– Non ! je crie en le repoussant de la main. Alec, je t’ai dit que je devais te
parler. À propos de l’argent qui est apparu sur mon compte hier.
Je serre les dents en attendant qu’il me regarde, mais il continue à trifouiller son
appareil photo et à donner des ordres à ses assistants.
– Oui*, je l’ai fait faire hier, répond-il enfin en regardant à travers l’objectif de
son appareil.
– Pourquoi ?
– Mets ta main dans ta culotte, ferme les yeux, et fais comme si tu te donnais du
plaisir.
– Je te demande pardon ?

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Alec soupire et je vois sa mâchoire se contracter.
– Concentre-toi, Mia. Il y a beaucoup à…
– Beaucoup à faire, ouais, je sais, je grogne. Ce n’est pas la première fois que
j’entends ça.
Il lève la tête et nos regards se croisent, mais il a l’air aussi agacé que moi.
– Dans ce cas, tu sais aussi que je suis à court de temps. Le vernissage est dans
une semaine et j’ai encore deux tableaux à faire. Celui-ci, et un autre que je dois
encore visualiser. Alors, quel est le problème ? J’ai envoyé l’argent, tu l’as reçu,
oui* ?
– Oui, Alec, mais…
Je regarde autour de nous. Il y a une dizaine de personnes qui sont là pour
assister Alec, ce qui est inhabituel car d’habitude, lorsque je dois être à moitié à
poil, Alec fait en sorte qu’on ne soit que tous les deux.
– Je veux te parler seule à seul.
– Nous parlerons une fois que ces photos seront finies, rétorque-t-il sèchement.
Je soupire, résignée, et je hoche la tête, décidée à lui obéir. Le problème, c’est
que les photos ne lui plaisent pas, ce qui le rend difficilement supportable. Au
bout d’un moment, il renvoie ses assistants chez eux.
– Ça aura été une perte de temps, dit-il d’une voix pleine d’amertume.
Il passe sa main dans ses cheveux pour défaire l’élastique qui les retient, puis il
fait les cent pas et se met à marmonner en français.
– Tu t’attendais à quoi, Alec ? Tu veux que je me doigte dans une pièce remplie
de gens que je ne connais pas, alors que je suis énervée contre toi ?
Il cesse de faire les cent pas et lève brusquement la tête en posant ses mains sur
ses hanches.
– Et pourquoi es-tu en colère, Mia ? demande-t-il d’une voix grinçante,
m’agaçant juste assez pour faire renaître la colère que j’avais réussi à réprimer
durant les deux dernières heures.
– Tu m’as payée pour avoir couché avec toi, c’est ça le problème.
Il respire lentement, comme pour se calmer.
– Et ça ne te plaît pas, apparemment. Tu peux me dire pourquoi ?

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– Parce que je ne suis pas ta pute ! C’est la deuxième fois de la journée qu’un
homme me traite comme une prostituée. Je n’ai pas couché avec toi pour l’argent
! Bon sang, pourquoi les hommes sont-ils aussi bêtes ?
Je hurle si fort que l’écho de ma voix résonne aux quatre coins du loft.
– On a couché ensemble, Mia. Ton contrat stipule que tu dois recevoir un bonus
de vingt pour cent si tu te déshabilles et/ou si tu couches avec moi.
Je me lève en grognant et je marche vers lui d’un pas rapide.
– Je croyais que tu me faisais l’amour ? je lui crache au visage.
– C’est le cas. Hélas, aux yeux de la loi, c’est la même chose.
– Aux yeux de la loi, le fait que tu me payes est de la prostitution, Alec !
– Alors, fais-le enlever de ton contrat ! De toute manière, tu t’es déshabillée très
souvent pour mon art, donc je te dois ce bonus, rien que pour ça. Qu’est-ce que
j’étais censé faire, hein, chérie* ?
Merde. Ce n’est pas de sa faute. Il n’a rien fait de mal ; il ne fait que respecter
les règles du contrat. C’est officiel, je suis une imbécile.
Alec pourrait me réprimander ou enfoncer le clou, mais au lieu de cela, il me
serre contre lui pendant que je m’apitoie sur mon sort. Ce ne sont pas les
hommes qui me voient comme une pute, c’est moi.
– Je suis désolée.
– Chut, ce n’est rien. Je comprends que ce soit difficile pour toi.
Enveloppée dans la chaleur de ses bras, je tente de me raisonner. Je réaffirme
dans ma tête que je me connais, que je sais ce que je suis et ce que je ne suis pas.
Aucune somme d’argent, aucun malentendu et pas même Millie ne peuvent
changer ça. Je suis beaucoup de choses : la fille de quelqu’un, une sœur, une
amie, une actrice en herbe. Je suis la muse de cet homme, certes, mais je ne suis
pas une pute. Une salope, peut-être, mais pas une prostituée.
À l’aise avec ce que j’ai établi dans ma tête, j’embrasse Alec avec toute ma
gratitude. Ensuite, je reprends place sur le matelas et j’écarte les jambes. Je le
toise du regard en plongeant ma main dans mon soutif, et ses yeux s’embrasent
tandis que mon autre main caresse mon corps, descendant lentement vers mon
nombril. Alec se dépêche de remonter sur son échelle pour prendre son appareil
photo.

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– Montre-moi combien tu peux être égoïste avec ton corps, ma jolie*.
Une fois de plus, je prends plaisir à lui obéir, fermant les yeux, jouant avec mon
corps comme si mes mains étaient les siennes. Chacun de mes soupirs est le sien,
chaque gémissement sort de sa bouche. Grâce à mon imagination et mon désir
pour lui, je ne manque pas de lui donner le cliché parfait qu’il espérait tant.

1. Talkshow américain à la C’est mon choix dans lequel les deux parties
opposées sont invitées à se confronter durant l’émission, qui finit souvent par
des insultes et des bagarres.

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Chapitre 9

Alec et moi sortons de l’immeuble main dans la main. Le soleil est


resplendissant, le vent fait voler mes cheveux et le monde entier me tend les
bras. Bonjour, monde extérieur, tu m’as manqué.
– Tu te rends compte que c’est la première fois qu’on sort de chez toi depuis que
je suis arrivée ? Et je pars dans trois jours.
Alec lève ma main pour l’embrasser.
– Je ne l’avais pas réalisé, non. Je suis désolé, ma jolie*, j’ai été un hôte terrible.
Je ris et je balance nos mains d’avant en arrière tandis que nous marchons.
– Il y avait…
– Beaucoup à faire, nous disons en même temps avant d’éclater de rire.
– Je suis vraiment désolé, chérie*. Lorsque je suis concentré, ma vie n’est plus
que travail, nourriture, sexe et sommeil.
– Sachant que tu as négligé le dernier.
Et c’est vrai, ce type dort encore moins que la plupart des insomniaques.
– Alors, où va-t-on ? je demande.
Ses cheveux sont attachés en chignon, et dans la lumière du soleil, ils sont
vraiment flamboyants. Il est vêtu d’un t-shirt blanc à manches longues et d’un
jean bleu marine et il porte son appareil photo en bandoulière. Alec Dubois est
délicieux : viril, sexy, élégant. Et c’est moi la veinarde qui ai son attention
pendant encore trois jours.
– Qu’est-ce que tu veux faire ?
Je regarde autour de moi et je réponds comme n’importe quelle touriste.
– J’aimerais aller à la Space Needle1, bien sûr.

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– Ça tombe bien, répond-il en souriant, car nous allons y dîner ce soir. D’ici-là,
que dirais-tu d’une surprise ?
– Ok !
Alec hèle un taxi et donne des instructions au chauffeur que je ne peux pas
comprendre, ne connaissant rien de la ville. Je regarde joyeusement les passants
vaquer à leurs occupations jusqu’à ce que nous arrivions à notre destination.
Alec paie le chauffeur, sort du véhicule et me tend la main. Je sors derrière lui et
reste immobile face à la grille.
– Tu m’emmènes au zoo ? je demande en souriant jusqu’aux oreilles.
– Pourquoi pas ? Je n’y suis jamais allé, et ça fait des années que j’habite ici.
– Non, c’est une super-idée ! je dis en lui prenant la main. Allons voir les
animaux.
Je ne dis pas à Alec que je ne suis jamais allée dans un zoo. Ici ou ailleurs. Ça ne
fait pas partie des attractions de Las Vegas et une fois que ma mère est partie,
mon père a cessé toutes les sorties en famille, quelles qu’elles soient.
Je découvre donc, à l’âge de vingt-cinq ans, que j’adore les zoos.
– Alors, pour l’instant, quel est ton animal préféré ? demande Alec en passant
son bras autour de mes épaules.
– Il y en a tellement… je réponds en secouant la tête. Mais je crois que ce sont
les ocelots.
– Les gros chats ?
– Oui, la vie que mènent les femelles me parle. Elles sont solitaires, elles
s’accouplent quand elles en ont besoin, elles s’occupent de leurs petits en leur
apprenant à chasser, puis elles les libèrent et elles retrouvent leur indépendance.
Alec fonce les sourcils.
– Et elles sont magnifiques et plutôt sexy, pour des chats. Si je devais être un
animal, je choisirais celui-là. Et toi ?
Il reste silencieux et je prie pour qu’il ne pose pas de questions à propos de ma
réponse. Ce n’est pas le moment d’ouvrir d’anciennes blessures, au contraire,
c’est plutôt le moment de faire de nouvelles expériences et de créer de nouveaux
souvenirs.
– Si je devais en choisir un, je dirais le renard polaire.

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Je trouve son choix étrange, car je l’aurais plutôt vu dire une gazelle, ou quelque
chose d’exotique.
– Pourquoi ?
– Parce qu’ils choisissent un seul partenaire avec qui ils restent toute leur vie.
J’ai toujours envié les gens qui pouvaient faire ça. Je viens de découvrir qu’une
créature aussi magnifique que le renard le fait et… ça me donne de l’espoir.
– Oh, mon Frenchie. Tu es un vrai Bisounours, sous tous ces muscles, n’est-ce
pas ? je demande en l’embrassant.
Il passe ses bras autour de moi tandis que je l’embrasse langoureusement.
Click.
Je tourne la tête et je remarque qu’il vient de prendre une photo de nous en train
de nous embrasser.
– Tu viens de faire un selfie ? Toi, un artiste ? Je suis choquée !
– Par quel autre moyen veux-tu que je capture ce baiser pour m’en souvenir
jusqu’à la fin de mes jours ? répond-il en souriant.
– Sers-toi de ton cerveau, je réponds en tapotant sa tempe. Tout sera dans tes
souvenirs, non ?
– Certes, mais maintenant, je l’ai aussi en photo.
Nous passons le reste de la journée à admirer les animaux. Je comprends
maintenant pourquoi les gens aiment tant y aller. Il y a des familles et des
enfants partout, et soudain, Maddy me manque. Est-elle déjà allée au zoo ? Je
me fais la promesse de l’y emmener un jour. Il y a beaucoup de choses que
Maddy et moi n’avons pas faites lorsque nous étions petites, et je fais le serment
d’y remédier dès que mon père sera en sécurité et qu’il sera sorti du coma. Peut-
être même qu’il voudra venir avec nous. J’en doute, mais ce n’est pas
impossible.
*
* *
Le taxi nous dépose au pied de la Space Needle en début de soirée. Nous nous
arrêtons d’abord à la plate-forme d’observation qui offre une vue à trois cent
soixante degrés sur la ville. Nous trouvons une petite avancée d’où nous
pouvons admirer le coucher du soleil, et j’appuie mes mains sur la rambarde.

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Mon regard se perd bientôt au loin, mais une rafale de cliquetis me sort de ma
rêverie.
– Qu’est-ce que tu fais ? je demande à Alec en souriant.
Il vient vers moi, passe ses mains dans mes cheveux et m’embrasse tendrement.
C’est un baiser dont je me souviendrai longtemps, lent, doux, et si chaud qu’une
vague de chaleur embrase mes veines.
– Tu es trop précieuse. Trop belle, dit-il en appuyant son front sur le mien. Trop
pour qu’un homme te garde pour lui seul. Celui qui obtiendra ton amour… pour
toujours… sera un homme très chanceux, dit-il en plongeant son regard dans le
mien.
– Alec… je chuchote en appuyant ma tête sur son torse.
– Ma jolie*, ma vie va être vide sans toi, dit-il en me serrant si fort que j’ai du
mal à respirer.
Cependant, ça ne me dérange pas. J’ai encore deux jours avec lui, mais c’est de
ce moment que je me souviendrai toute ma vie. Le moment où j’ai réalisé qu’il
existe différentes formes d’amour et que j’ai le droit d’aimer ceux à qui je me
donne, même s’ils ne le méritent pas. Alec le mérite, et ce lien que nous avons
tissé existera toujours entre nous.
Nous avons créé de l’art ensemble et nous avons fait l’amour, à notre façon.
C’est ce qui comptera lorsque je regarderai en arrière et que je repenserai aux
décisions que j’ai prises. Mon séjour avec Alec a été spécial et je comprends peu
à peu que chacun de mes clients m’apprendra quelque chose sur moi et sur la
vie.
– Viens, allons dîner pour qu’on puisse rentrer. C’est toi que je veux manger au
dessert, dit-il en jouant des sourcils.
La nourriture du Skycity Restaurant est divine. Je commande un suprême de
poulet à la mozzarella di bufala fumée et un bread pudding2 qui sont tout
simplement délicieux. De son côté, Alec déguste un faux-filet accompagné d’une
fondue au bacon qui est succulente. Nous nous faisons goûter nos plats en
partageant un peu de nos vies avant notre rencontre pour « Amour sur toile ».
Alec est surpris d’apprendre que j’ai grandi dans le désert, mais il ne me
demande pas pourquoi je suis devenue escort, je lui en suis reconnaissante. Il se

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concentre surtout sur ma pseudo-carrière d’actrice et mon goût prononcé pour
les motos. De mon côté, j’apprends qu’il est venu vivre aux États-Unis à vingt
ans et qu’il rentre en France après chacun de ses vernissages. D’ailleurs, il y
partira quelques jours après mon arrivée chez mon prochain client.
J’apprends à connaître Alec autrement que sur le plan physique, et cela me plaît.
Je me vois rester amie avec lui après mon départ, même si je sais que nous ne
serons jamais aussi proches que Wes et moi. Mon beau surfer est tout
simplement hors catégorie.
*
* *
Aujourd’hui est le grand jour. Le vernissage de l’exposition « Amour sur toile »,
par Alec Dubois. Un des assistants m’a expliqué que son atelier allait être
complètement transformé pour accueillir le public, et j’angoisse un peu à l’idée
de ce que vont penser les gens de ces tableaux, surtout parce que je suis présente
dans tous. En tout, il y a sept toiles, mais je n’en connais que six. Alec m’a dit
qu’il voulait que la dernière soit une surprise, c’est celle qui l’a occupé durant
ces deux derniers jours.
D’ailleurs, c’est une bonne chose, car cette courte séparation nous a quelque peu
préparés pour mon départ. Demain matin, je m’envole pour Vegas, et il se
pourrait que je ne voie plus jamais Alec.
Millie m’a envoyé mes billets pour Las Vegas, où Gin et Maddy viendront me
chercher pour m’emmener voir mon père, puis je reprendrai l’avion pour
Chicago, où Anthony Fasano m’accueillera en personne.
Il est dix-huit heures, et il est grand temps que je me prépare pour ce soir. Je
fouille dans ma valise à la recherche de la seule robe que j’ai apportée.
Heureusement, ayant grandi à Las Vegas, je sais qu’il faut toujours avoir une
petite robe noire sur soi qui ne se froisse pas et qui peut survivre une semaine au
fond de son sac à main. Toutefois, il va falloir que j’assume d’aller au vernissage
pieds nus, en claquettes ou en cuissardes… Je suis en train d’étudier les choix
limités qui s’offrent à moi lorsqu’une boîte blanche, rectangulaire avec un nœud
rouge, atterrit sur le lit à côté de moi.
– C’est pour toi, dit la voix d’Alec.

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Je me tourne et je reste bouche bée. Mon artiste est prêt pour sa soirée, vêtu tout
de noir, son costume, sa chemise, sa cravate en satin. Il est tout simplement
canon. Des pulsations naissent immédiatement dans mon sexe et la tension
devient électrique lorsque je laisse ma serviette tomber par terre.
– Jésus Marie Joseph*, murmure Alec, m’excitant encore plus, comme chaque
fois qu’il parle français.
Je me mords la lèvre et je vacille légèrement en le regardant venir vers moi.
L’instant d’après, sa bouche s’empare de la mienne et il me plaque contre le
mur. Ses mains empoignent mes fesses et me soulèvent, nichant son érection
entre mes jambes lorsque je les passe autour de sa taille.
– On n’a pas le temps de faire ça maintenant, je dis sans vraiment y croire.
Je mordille son cou et je plante mes talons dans le creux de ses reins pour me
coller à lui. Il grogne en plongeant sa langue dans ma bouche, et nous devenons
silencieux, perdus dans ce baiser langoureux et affamé.
– Mais si, murmure-t-il dans le creux de mon cou. On va se dépêcher.
Je suce le carré de peau derrière son oreille qui l’excite tant, et il défait sa
ceinture. Il met ensuite sa main dans la poche de son pantalon, sort un préservatif
et, quelques secondes plus tard, son gland est à l’entrée de mon sexe.
– Putain, ne t’arrête pas maintenant, Alec, je t’en supplie.
Je sais qu’il aime que je l’implore. Il remonte son sexe sur mon clitoris et il le
masse en dessinant des cercles avec son bassin. Ses mains agrippent mes fesses
puis, sans prévenir, il s’enfouit en moi.
– Mon Dieu ! je crie alors que sa verge m’emplit complètement, me coupant
presque le souffle. C’est tellement bon. C’est toujours tellement bon avec toi, je
chuchote.
Il gémit dans mon cou, avance brusquement le bassin pour me plaquer contre le
mur, puis il ramène ses mains sur mes seins. Il titille chaque téton en poursuivant
ses allers-retours, m’approchant de plus en plus du nirvana que je désire tant.
– Je vais jouir.
Alec sourit, puis il baisse la tête et prend mon téton dans sa bouche.
C’est tout ce qu’il me faut pour chavirer. Mon orgasme déferle en moi et je me
mets à trembler furieusement.

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– N’oublie jamais comment tu te sens en cet instant, ma jolie. Je t’aime*, dit
Alec avant de m’embrasser de nouveau.
Ma chatte se resserre sur sa verge, le faisant grimper aux rideaux à son tour.
Lorsque nous avons fini, il s’assied sur le lit sans se retirer, et nous restons ainsi
un moment, le temps que nos souffles se calment.
– On va être en retard à ton propre vernissage, je dis en riant.
– Mais on aura une bonne excuse, dit-il en me faisant un clin d’œil. Ça, c’est
pour toi. Pour ce soir, ajoute-t-il en désignant la boîte.
Excitée comme une puce, je me lève et je vais de l’autre côté du lit pour ouvrir
mon cadeau. J’y découvre une robe de soirée couleur champagne, couverte de
minuscules cristaux qui brillent dans la lumière. Le décolleté drapé met
merveilleusement en valeur ma poitrine sans la révéler totalement, et la robe
tombe juste au-dessus du genou. Elle me va comme un gant. En même temps,
Alec a eu largement le temps de mémoriser la forme de mon corps… Il me tend
une autre boîte pendant que j’ajuste la robe – des escarpins Gucci, dorés, avec
des talons de dix centimètres. Ils sont parfaits.
– Je n’ai jamais rencontré une femme qui n’aimait pas les chaussures.
– On aime toutes les talons qui disent baise-moi, surtout quand elles sont aussi
belles que celles-ci. C’est dans nos gènes. On est nées comme ça, je dis en
haussant les épaules.
Alec ajuste son costume pendant que je finis de me préparer, puis il me guide au
dixième étage. La fête bat déjà son plein lorsque nous arrivons, et nous avons à
peine passé la porte que des flashs illuminent la pièce de leur lumière blanche et
que des applaudissements retentissent à travers le loft. Une petite femme blonde
en tailleur blanc prend le bras d’Alec pour l’emmener parler aux journalistes. Je
ne l’ai pas vue depuis mes premiers jours ici, mais à l’évidence, elle n’a pas
l’intention de le laisser s’échapper. Il me regarde par-dessus son épaule en
fronçant les sourcils, mais je le rassure en lui envoyant un baiser et en souriant.
Un serveur m’offre une coupe de champagne rosé, que j’accepte volontiers, et je
me dirige vers le premier tableau qui, bien évidemment, me représente.
Cependant, Alec y a ajouté beaucoup de profondeur depuis la première fois que

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je l’ai vu, à tel point que j’ai désormais l’impression de pouvoir tendre la main
pour saisir la larme qui coule sur ma joue.
« Pas d’amour pour moi », indique la vignette sous le tableau.
Cinq mètres plus loin, la même image montre un double de moi de dos, en train
de toucher le cœur de l’original. Le titre, « S’aimer soi-même », me fait l’effet
d’une flèche tirée en plein cœur, réveillant des émotions que je n’ai pas
suffisamment bien enfouies.
Je me dépêche de passer à la suivante, le triptyque qui semble attirer le plus de
monde. Au-dessus, sous la lumière, une vignette explique l’œuvre au public : «
Amour brisé ». Cependant, je remarque que chaque tableau a son propre titre. Le
premier, où ma main couvre l’érection d’Aiden, se nomme « Amour interdit ».
Le suivant, montrant le moment où Aiden me tend la main et où je détourne la
tête, s’intitule « L’amour fait mal ». Le dernier, devant lequel la foule est
rassemblée, s’appelle « Notre amour ». On y voit Alec et moi, perdus dans les
méandres de la passion. C’est clairement l’œuvre la plus marquante des trois.
C’est notre amour, en effet : à Alec et à moi. Beau, passionné, sauvage. Un
amour pur, qu’Alec a parfaitement retranscrit sur la toile.
J’avance encore et j’observe les gens qui découvrent les toiles. Je n’entends pas
une seule exclamation outrée et je ne vois pas la moindre grimace. Le public
semble accepter la vision de l’artiste.
Plus loin, je me retrouve de nouveau excitée, déterminée à sauter sur Alec dès
que je le verrai de nouveau. « Amour égoïste » me montre en train de me
masturber devant l’objectif, mais il y a une puissance et une innocence dans mon
regard à laquelle je ne m’attendais pas, étant donné le sujet de l’œuvre.
Je sens Alec passer son bras autour de moi pendant que je regarde le tableau.
– Tu aimes ?
– Oui, mais j’ai préféré le faire, je susurre.
– Ah, je vois. Peut-être pourrons-nous renouveler l’expérience plus tard ?
Laisse-moi te montrer le dernier. C’est la meilleure photo que j’ai prise de toute
ma vie.
Ce n’est pas peu dire, car Alec Dubois est un artiste et un photographe
véritablement brillant. Ses tableaux sont partout, que ce soit dans les musées ou

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sur les t-shirts des boutiques les plus branchées. Il me mène au dernier tableau
qui est recouvert d’un drap blanc.
J’attends sans bouger tandis que la foule s’attroupe autour de nous, afin de
découvrir la pièce maîtresse de l’exposition.
– Ce portrait sera vendu deux fois le prix demandé. Et la moitié de la somme te
reviendra, ma jolie*.
Je suis choquée et je secoue la tête plusieurs fois, mais il se contente de sourire
et de faire glisser le drap.
C’est en effet un portrait de moi, seulement c’est la vraie moi. La vraie Mia. Je
suis debout sur la plate-forme d’observation de la Space Needle, le regard perdu
dans l’horizon. Mes cheveux volent au vent comme un drapeau, et j’ai l’air
heureuse : sereine, sur un nuage, envoûtée par la beauté de la vue. J’ai l’air
parfaitement libre, je ne suis pas coincée dans un boulot que je ne veux pas mais
auquel je m’habitue, je ne sauve pas mon père et je ne suis pas une actrice en
herbe qui galère à trouver du boulot à L.A. C’est une beauté brute, à l’état pur.
Pour la première fois de toute ma vie, je me trouve belle, et c’est Alec qui
m’offre cette vision.
J’ai les larmes aux yeux en regardant l’instant qu’il a capturé. Une bouffée de
chaleur envahit mon corps et ma vue se rétrécit, comme si tout était sombre
autour de moi, la seule source de lumière provenant du portrait. Je baisse
légèrement les yeux et je découvre le titre. Les larmes se mettent alors à couler
sur mes joues, tombant dans mon décolleté et sur le béton sous mes pieds.
Je plonge mon regard dans celui d’Alec, qui semble aussi ému que moi.
Sous la plus belle photo de moi que j’aie jamais vue, la vignette dit tout ce qu’il
y a à dire.
« Adieu, amour ».

1. Aiguille de l’espace : tour futuriste construite à Seattle pour l’Exposition


universelle de 1962. Elle ressemble à une soucoupe volante avec une grande
aiguille en son sommet.
2. Plat à base de pain, de lait et d’œuf, qui peut être sucré ou salé.

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Chapitre 10

Hier soir était une soirée de rêve. Je me suis sentie comme Cendrillon au bal
du roi. Après que le public a découvert la dernière photo, il a compris qui j’étais
et les médias ont voulu m’interviewer et faire des photos d’Alec et moi. C’était
très amusant. Bien sûr, les coupes de champagne que j’ai bues tout au long de la
soirée m’ont aidée à me détendre face à autant d’attention. À la fin de la soirée,
tous les tableaux étaient vendus. Alec m’a expliqué qu’avant de prendre place
chez les acquéreurs, ils seront exposés dans différentes galeries du pays pendant
six mois afin que tout le monde puisse les voir. C’est sa passion, et il souhaite la
partager avec autant de gens que possible.
Le ciel est encore noir, mais le soleil ne devrait pas tarder à se lever. J’ai fait mes
valises hier, avant de me préparer pour le vernissage, j’ai caché mon sac dans un
coin de l’appartement d’Alec. Mon vol décolle tôt, et j’aimerais partir sans me
faire remarquer, comme avec Wes, je ne supporte pas l’idée de faire des adieux.
Je mate une dernière fois mon beau Frenchie, son magnifique visage et son corps
d’athlète.
Il a bu bien plus de champagne que moi, hier soir, mais ça ne l’a pas empêché de
me faire l’amour comme un dieu en rentrant, s’endormant sur moi sans s’être
retiré. C’était une partie de jambes en l’air complètement folle et pleine
d’émotions qui symbolisait parfaitement tout le mois que nous avons passé
ensemble. Je préfère que ce soit notre dernier souvenir ensemble.
Je sors du lit sans faire de bruit, sans oublier de lui voler son t-shirt. Je ne vois
pas pour quelle raison je n’aurais pas le droit de garder un souvenir de lui, et il
porte son parfum divin.

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Je file me doucher avant d’aller dans la cuisine pour laisser un mot à Alec,
comme je l’ai fait avec Wes. Il est cinq heures du matin et j’ai vingt minutes
avant que mon taxi n’arrive pour m’emmener à l’aéroport.
Alec, mon cher Frenchie,
Je suis désolée de partir ainsi, mais je préfère que ton dernier souvenir, ce soit
nous en train de faire l’amour. Car c’est bien ce que c’était – un acte d’amour.
J’aurais dû te le dire hier, et je ne sais pas pourquoi je ne l’ai pas fait, mais
c’est vrai, tu sais.Je t’aime, Alec. À ma façon. C’est un amour d’amis, d’amants,
de deux personnes qui étaient destinées à s’aimer durant le peu de temps
qu’elles avaient ensemble.
Je n’oublierai jamais mon séjour avec toi, car tu m’as appris qu’il y a différents
types d’amour.
Ta perspective est spéciale, et elle restera avec moi toute ma vie. À travers ton
art, j’ai découvert une relation basée sur l’honnêteté la plus complète.
Tu m’as toujours dit la vérité, et je t’en suis reconnaissante.
Cette expérience, d’avoir été ta muse… je ne pensais pas que ça me
transformerait autant, mais j’avais tort, car j’ai énormément changé, pour le
mieux.
Merci, Alec, de m’avoir montré que je peux aimer, que je peux me donner
librement et accepter ce qu’on m’offre, même si ce n’est que pour une courte
durée.
Je t’aime. Au revoir*.
Mia
J’embrasse la lettre à côté de mon prénom et je la laisse à côté de la cafetière,
puis je me force à aller doucement dans sa chambre pour le regarder une dernière
fois. J’appuie sur le bouton de l’ascenseur, puis je monte dans le taxi qui
m’attend.
*
* *
Il y a tant de monde à l’aéroport que le temps que je passe la sécurité, je dois
courir à ma porte d’embarquement pour ne pas manquer mon vol. Je m’assieds à
ma place, essoufflée, lorsque mon téléphone vibre dans la poche avant de mon

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sac. J’y plonge la main et je sens une enveloppe. Je m’occupe d’abord du
message et mon cœur bat la chamade en craignant que ce soit Alec.
De : Ginelle Harper
À : Mia Saunders
J’ai hâte de voir ta sale tronche ! Ha ! Mads me gronde de t’avoir traitée de
moche. Désolée, ma salope ;)
Je ris et je mets mon téléphone en mode avion, puis je sors l’enveloppe de mon
sac. Mon nom est écrit dessus dans une belle écriture italique, seulement ce n’est
pas mon nom, mais Ma Jolie*. Bon sang, il me manque déjà.
Je secoue la tête et je mets de côté mes émotions pour éviter le déluge de larmes.
J’ouvre l’enveloppe et j’en sors une carte de vœux qui est une réplique d’un
paysage français qu’Alec a peint il y a quelques années. C’est un peu mégalo,
mais c’est aussi attendrissant que drôle.
J’ouvre la carte et des photos tombent sur mes cuisses. Ce sont ses tableaux,
mais il y aussi le selfie qu’il a pris au zoo et dont je me suis moquée. On m’y
voit en train de tenir son visage et de l’embrasser langoureusement. Des mèches
de ses cheveux se sont échappées de son chignon et mes boucles volent dans la
brise tandis que le soleil illumine nos visages. Je tiens la photo contre mon cœur
et je laisse enfin les larmes couler. Mon Frenchie va me manquer, énormément.
La dernière photo est une copie de l’œuvre qu’il a si bien nommée « Adieu,
amour ». C’est la fin parfaite pour un mois parfait. Il n’a rien écrit sur la carte,
mais les photos disent tout ce qu’il y a à dire.
Comme Wes, je n’oublierai jamais le temps que j’ai passé auprès d’Alec. Je
chérirai à jamais les souvenirs de cette vie dans laquelle j’ai vécu et aimé
librement.
Je parcours les mails de Tante Millie à propos de mon prochain client. Je clique
sur la photo et… waouh, elle avait raison, c’est encore un beau gosse. Pas besoin
de savoir qu’il est italien pour le deviner. Je ne sais pas d’où elle sort ces types.
Anthony « Tony » Fasano a trente et un ans, et à en croire la photo, c’est un
ancien boxeur. Vêtu d’un simple short, je vois que sa peau est hâlée, que ses
cheveux sont aussi noirs que les miens et que ses yeux sont d’un bleu glacial. Il
ne mesure qu’un mètre soixante-dix, mais il est bien assez beau et viril pour

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compenser sa petite taille, et il n’a pas un gramme de graisse sur lui, ce qui est
étrange étant donné qu’il est à la tête d’une chaîne de restaurants italiens. Mais
peut-être est-ce une vieille photo ? Millie ne sait pas pourquoi il a besoin de moi,
mais c’est ainsi. Je vais donc faire semblant d’être sa fiancée – Dieu sait
pourquoi un homme comme lui a besoin de payer une femme. Je suis sûre qu’il
n’a qu’à claquer des doigts pour qu’une dizaine de filles plus jolies les unes que
les autres se jettent à ses pieds. Peut-être est-ce pour les mêmes raisons que Wes,
ou peut-être ne rencontre-t-il que des nanas sans lendemain, et pas de femme
avec qui il veut s’engager ?
Bref, j’ai quelques jours à Las Vegas, puis je reprendrai l’avion pour rencontrer
Anthony Fasano, de Chicago, dans l’Illinois.
À moi la ville des vents1.

1. Surnom donné à la ville de Chicago.

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MARS

Avant de s'envoler vers sa prochaine mission, Mia fait un petit séjour à Las
Vegas où elle retrouve sa soeur et sa meilleure amie. Elle en profite pour aller
rendre visite à son père qui est toujours dans le coma.
Elle a rendez-vous avec son usurier pour lui remettre le deuxième versement, et
cette rencontre n'est pas des plus sympathiques ! Mais la voilà à nouveau dans un
avion, direction Chicago, pour y retrouver le bel Anthony Fasano, propriétaire
d'un restaurant italien.

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Chapitre 1

J’ai à peine posé un pied sur le sol carrelé de l’aéroport de Las Vegas que je
suis écrasée entre deux corps – l’un grand et mince, l’autre petit et robuste. Mes
narines sont assaillies par des odeurs de chewing-gum à la menthe et de cerise.
Les deux corps m’entraînent avec eux en sautillant, pleins d’énergie, et en criant
pour exprimer leur joie. On dirait les hyènes qu’Alec et moi avons vues rire dans
leur cage au zoo.
– Bon sang, ta tronche m’a tellement manqué ! s’exclame Gin avant de
m’embrasser sur la bouche.
Tiens, voilà le chewing-gum à la menthe. Elle est vite poussée de côté par
Maddy, ma petite sœur, qui me serre fort dans ses bras minces. Et voilà les
cerises. Elle a toujours senti la cerise, depuis qu’elle est toute petite – je ne me
suis jamais vraiment demandé pourquoi. Comme beaucoup de choses, j’ai
toujours accepté que ce soit ainsi. J’ai beau être l’aînée, à côté d’elle, je me sens
petite avec mon mètre soixante-douze, comparé à son mètre quatre-vingts. À
dix-neuf ans, Maddy n’a pas encore toutes les courbes que j’avais à son âge,
mais elle est superbe. Elle semble avoir un formidable métabolisme qui la
maintient maigre comme un clou – petite veinarde.
Elle me regarde, les larmes aux yeux, et je prends son visage dans mes mains.
– Tu es la plus belle fille du monde, mais seulement quand tu souris.
– Tu dis toujours ça, répond-elle en souriant enfin.
À mes yeux, aucun sourire n’est aussi beau que le sien.
– Parce que c’est vrai. Tu l’es, n’est-ce pas qu’elle est la plus belle, Gin ?
Gin éclate une bulle de chewing-gum et me prend par le coude.
– Ouaip. Allez, on s’arrache !

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J’éclate de rire et je me sens infiniment mieux, toute ma tension a disparu d’un
coup. Bon sang, ça fait du bien de rentrer à la maison.
– Où est la voiture de papa, Mads ? je demande en fourrant mon sac dans le
coffre de la voiture de Gin avant de m’installer sur le siège passager.
Maddy s’installe à l’arrière de la Hyundai de Ginelle et entortille une mèche de
cheveux autour de son index.
– Hum…
Elle regarde par la vitre, je vois bien qu’elle prépare sa réponse.
– Qu’est-ce qui se passe avec la voiture de papa ?
– Rien de grave, soupire-t-elle.
Elle continue de jouer avec ses cheveux et s’étale sur la banquette arrière. À
l’évidence, elle ne veut rien me dire.
– Dis-lui, Mads, gronde Ginelle.
Maddy rouspète et se redresse. Elle ferme les yeux, et lorsqu’elle les rouvre, je
découvre un regard éclatant de détermination.
– Les mecs qui ont cassé la gueule à papa ont aussi abîmé sa voiture.
– Quoi ?! Pourquoi tu ne m’as rien dit ? je m’exclame, folle de rage.
– C’est juste que…
– Que quoi ? Comment tu fais pour aller à la fac ?
– En général, je prends le bus, quelquefois Ginelle m’emmène, dit-elle en
regardant ma meilleure amie qui lui sourit. Et parfois Matt, le mec dont je te
parlais, passe me prendre ou me ramène. Il dit qu’il est prêt à m’aider autant
qu’il le peut.
– Tu m’étonnes – petit con. Mads, c’est dangereux. La maison est loin de la fac
et tu es crevée après ta journée de cours. Comment tu fais quand tu restes tard à
la bibliothèque ?
Je retiens mon souffle et me retourne sur mon siège, folle de rage que ma petite
sœur doive prendre des risques parce que Blaine et ses molosses ont foutu en
l’air la voiture de mon père. Quoi d’autre ? À quoi dois-je encore m’attendre ?
Maddy pose sa main sur mon épaule et la masse tendrement.
– Ça va, Mia. Je vais bien. On fait avec ce qu’on a, n’est-ce pas ?

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– Absolument pas ! Demain, je vais t’acheter une voiture. Je n’arrive pas à croire
que ça fait deux mois que tu n’en as pas. Et toi, je dis en enfonçant mon index
dans le bras de Ginelle, tu aurais dû me dire ce qui se passait !
Je soupire et je repousse les mèches de cheveux qui me tombent sur le visage.
– Mia, tu n’as pas les moyens…
– Ne t’avise pas de me dire ce pour quoi j’ai les moyens ou pas. Ça fait quinze
ans que je m’occupe de toi. Ce n’est pas parce que tu as dix-neuf ans que je vais
arrêter de m’inquiéter pour toi du jour au lendemain. Bon sang, je suis folle de
rage de t’imaginer marcher depuis l’arrêt du bus jusqu’à la maison, dans notre
quartier ! Ne refais plus jamais ça, s’il te plaît. Je t’en supplie, promets-le moi.
Demain, je t’achète une voiture. Mes deux derniers clients m’ont donné un
bonus.
– Tiens donc ! dit Ginelle en me regardant en coin. Et comment as-tu fait, ma
chérie ? Ce ne serait pas en te mettant sur le dos, par hasard ? demande-t-elle en
souriant.
Je lui frappe le bras sans ménager mes forces.
– Aïe ! Espèce de garce ! Qu’est-ce qui te prend ?
– Tu me traites de salope, ma salope ? Tu l’as bien mérité, je dis en la fusillant
du regard.
Elle a beau garder les yeux sur la route, je suis sûre qu’elle sent mon regard
assassin sur elle.
– D’accord, je l’ai mérité, mais si j’ai un bleu, tu n’as pas fini d’en entendre
parler.
– Ok meuf. Tu pourras nous emmener chez un concessionnaire auto, demain ?
Elle hoche la tête.
– J’ai pris quelques jours de congé, puisque tu venais.
– Oh, tu es trop mignonne, dis donc !
– Je sais être mignonne, tu sais, dit-elle en fronçant les sourcils.
– Je n’ai jamais dit le contraire.
– Mais tu as insinué que c’était étonnant que je le sois. Sache que j’étais avec un
mec, hier soir, qui n’a pas arrêté de dire à quel point mon vag…
Je plaque ma main sur sa bouche pour la faire taire.

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– Tu penses que tu peux garder cette histoire pour plus tard, ma pupute ? je dis
en regardant Maddy du coin de l’œil.
– Bon sang, râle ma petite sœur, comme si je ne savais pas de quoi vous parlez !
Tu crois toujours que je suis si innocente…
J’enlève ma main de la bouche de Gin et me retourne brusquement.
– Tu veux dire que tu n’es plus innocente ?
Maddy croise les bras et lève les yeux au ciel.
– Je suis toujours vierge, si c’est ta question. Tu sais bien que je te le dirais. Mais
ça ne m’empêche pas de savoir ce qu’est un cunnilingus, je ne suis pas bête, tu
sais.
– On t’en a déjà fait un ? je demande en retenant mon souffle, ne sachant pas si
je veux vraiment connaître la réponse.
Elle secoue la tête, se mord la lèvre et regarde au loin par la vitre.
– Non, mais je n’aime pas que tu te comportes comme si j’étais une gamine. Je
suis une adulte, sœurette. Il faut que tu l’acceptes. Si je veux laisser un mec
lécher mon minou, je le ferai.
– Lécher ton minou ? répète Gin. Tu veux dire ta cha…
Je lui pince la cuisse avant qu’elle n’énerve davantage Maddy. Je grogne :
– Pas un mot !
Elle écarquille les yeux et frappe ma main pour que je la retire.
– Mads, tu sais que je suis là, hein ? Si tu veux parler de ce genre de choses, je
dis en lui prenant la main. Même si je ne suis pas à Vegas. Tu peux toujours
m’appeler – jour et nuit. D’accord ?
Elle se penche en avant et pose son front sur ma main.
– Tu m’as manqué, chuchote-t-elle.
– Et toi encore plus, je dis en serrant sa main.
Elle m’offre son plus beau sourire et je remercie le Ciel de m’avoir donné
Maddy comme petite sœur. Je n’aurais pas pu en choisir de meilleure.
– On va à la maison de repos, alors ? demande Gin, ruinant notre moment
d’intimité entre sœurs.
– Ouais, il faut que je voie papa.
*
* *

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* *
La maison de repos est perchée en haut d’une colline qui domine le désert. C’est
étrange, c’est un peu comme si elle avait été construite là pour que les malades et
les convalescents ne gâchent pas la fête permanente qui se déroule à Vegas.
Nous parcourons les couloirs jaune pâle décorés de tableaux du désert et, sans le
vouloir, je ralentis le pas. Maddy s’arrête bientôt devant une porte ouverte.
– Il est là. Tu veux entrer seule ?
– Ça ne te gêne pas ?
Elle me répond par un sourire plein de tendresse. Maddy a toujours su deviner
les émotions des autres, contrairement à moi. Peut-être que si j’avais été
davantage comme elle, je ne serais pas attirée par des hommes voués à me faire
du mal. C’est sans doute pour cela qu’elle est encore vierge, d’ailleurs. Elle, au
moins, voit arriver les connards de loin et elle les évite.
– Viens, Gin, allons à la cafétéria pour voir si madame Hathaway a refait ses
délicieux cookies.
Le regard de Ginelle s’illumine, comme si elle partait à une distribution de
diamants.
– On se tire, dit-elle en passant son bras dans celui de ma sœur.
Je respire lentement et serre les poings pour empêcher mes mains de trembler.
Tu peux le faire. C’est ton père – Papa.
J’entre doucement dans la chambre, contournant le rideau fermé qui sépare son
lit de la porte, et je retrouve enfin mon père. Il semble dormir, mais je sais que ce
n’est pas le cas. J’ai les larmes aux yeux en approchant du lit et en m’asseyant
sur la chaise. Ses bras sont tendus le long de son corps et je prends sa main dans
les deux miennes avant de me pencher pour l’embrasser.
– Papa… je chuchote d’une voix à peine audible.
Je me racle la gorge et fais une nouvelle tentative.
– Papa, c’est moi, Mia, je suis là…
Je porte sa main à ma poitrine, m’approchant le plus près possible. Il a l’air mille
fois mieux que la dernière fois que je l’ai vu, juste après que Blaine lui avait fait
casser la gueule, il y a deux mois. Les bleus de son visage ont disparu, ne

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laissant derrière eux que de minuscules traits roses sur sa tempe et sur sa joue.
Peut-être aura-t-il toujours ces cicatrices, peut-être pas. Le temps nous le dira.
Pour le reste, il a l’air d’aller bien. Il a perdu énormément de poids et il ne
ressemble plus au gros nounours que j’adorais câliner quand j’étais petite.
Finalement, c’est juste un mec sans vie, ce sont les restes de l’homme fort et fier
qu’il était avant que maman ne parte. Je retiens mes sanglots, mais je ne peux
empêcher mes larmes de couler.
– Pourquoi il a fallu que tu t’endettes autant auprès de Blaine ? Pourquoi ?
Je frotte mon menton sur sa main, puis je me laisse tomber sur sa poitrine et je
lâche tout. Je libère ma haine contre ceux qui lui ont fait du mal, ma colère
contre lui parce qu’il a trop emprunté, parce qu’il est accro aux jeux et qu’il est
alcoolique, et parce qu’encore une fois, c’est moi qui dois nettoyer après lui.
– Papa, tu as vraiment merdé, cette fois-ci. Tu ne peux même pas imaginer ce
que je dois faire pour toi…
Je ne vais pas au bout de ma pensée, car je ne veux pas admettre que je suis une
escort. Que je couche ou pas avec mes clients, ce n’est pas un métier vraiment
respectable.
– Je fais tout ce que je peux, Papa. Je m’occupe de Maddy, je m’assure qu’elle
continue la fac. Elle s’en sort super-bien, tu sais. Elle a même rencontré un
garçon… il faudra peut-être que tu te réveilles pour lui botter le cul, je dis en
étudiant son visage, espérant qu’il ouvre les yeux. Rien.
Je prends un mouchoir de la boîte sur sa table de nuit et je me mouche
rapidement.
– J’ai rencontré des gens super durant ces deux derniers mois. J’ai d’abord cru
que travailler pour Tante Millie allait être un cauchemar, mais en fin de compte,
c’est plutôt sympa. Mon premier client était Weston Channing troisième du nom.
Tu imagines ? Weston Channing trois. Je me moquais tout le temps de lui, je dis
en riant en repensant à notre rencontre. (En fait, j’ai su dès que je l’ai vu gravir
les marches de la plage que j’allais tomber sous son charme.) Wes m’a appris à
surfer, et que tous les hommes ne sont pas créés égaux, je dis en riant.
Je recule dans ma chaise et pose mes pieds sur le bord de son lit, puis je parle à
mon père de mes deux mecs préférés. Je lui explique que Wes fait des films et

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vient d’une vieille famille, et je lui promets que quand il se réveillera, je
l’emmènerai voir un de ses films et que je lui achèterai du pop-corn.
– Et puis, il y a Alec. Il est français, Papa. Un véritable Français en chair et en
os. Il m’appelait « ma jolie1 ». Je dois admettre que ça va me manquer.
J’enlève une mèche bouclée de mon visage et je penche la tête en arrière pour
regarder le plafond. Sur les carreaux, au-dessus de son lit, sont peints des
paysages de plage. Ça me plaît. Je me dis que quand il se réveillera, la première
chose qu’il verra, c’est la plage, pas des carreaux blancs comme une feuille A4.
– Alec a fait des tableaux de moi, Papa. Je suppose qu’ils ne te plairont pas,
parce que je ne suis pas habillée dessus, mais tu dois savoir qu’il n’a pas profité
de moi. Pas vraiment. On s’est amusés et il m’a aimée. Toutefois, c’était un
amour différent de ceux que j’ai connus et des sentiments intenses que j’ai
encore pour Wes. Je suppose que mon amour pour Alec est un peu comme celui
que j’ai pour Ginelle, en version masculine, le contact physique en plus.
Beaucoup plus. Je souris et je regarde papa, mais ses yeux sont toujours fermés.
– Alec m’a appris que j’avais le droit d’aimer d’autres gens en dehors de toi,
Mads et Gin. Il m’a expliqué qu’on peut tenir à quelqu’un, et même l’aimer, tout
en acceptant de ne pas être avec lui pour toujours. C’était mignon. Il m’a appris
beaucoup de choses sur moi-même. Je suis triste de penser que je ne les reverrai
sans doute plus jamais. Enfin, peut-être que je reverrai Wes, mais tu sais, je suis
encore un peu paumée vis-à-vis de lui, Papa.
J’étudie son visage, si serein et paisible, et je réalise que je peux enfin admettre
ce qui me taraude depuis un mois. Je regarde la porte et je ne vois personne.
– Tu sais Papa, je dis d’une voix tremblante, je pourrais vraiment tomber
amoureuse de Wes. Et tu sais quoi ? Ça me fout la trouille. Tous les mecs que
j’ai aimés jusqu’à présent étaient pitoyables. Mon cœur a envie de franchir le
pas, mais mon cerveau me rappelle sans cesse tous les enfoirés que j’ai connus
avant lui. De toute façon, j’ai encore dix mois avant de rembourser ta dette
auprès de Blaine. Bien évidemment, Wes a proposé de la payer. Il m’a demandé
de rester avec lui, à Malibu, mais je suis partie quand même.
En fermant les yeux, je m’appuie au dossier de ma chaise. Je pose ma main sur
mon petit cœur qui souffre encore de ne pouvoir vivre cette histoire avec Wes

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alors que j’en meurs d’envie. Je ne suis pas le genre de fille qui rêve d’une vie
faite de fric, de belles voitures et de jeunesse éternelle. Non, j’ai grandi en étant
pauvre, j’ai travaillé dur, je me suis occupée de ma sœur et j’ai aidé mon père à
survivre. La vie que mène Wes est radicalement opposée à la mienne et, bien
sûr, c’est en partie ce qui m’attire chez lui. Cependant, ce n’est pas le bon
moment, et c’est pour ça que je suis tombée dans les bras d’Alec aussi
facilement. Tant que le timing n’est pas bon, il me reste encore plein de choses à
vivre.
– Si seulement tu pouvais te réveiller, je dis en embrassant sa main. Papa,
réveille-toi. On a besoin de toi. Maddy a besoin de toi. J’ai besoin de toi.
Ma sœur et Ginelle reviennent quelques minutes plus tard, et j’écoute Maddy
raconter à papa ce qui se passe à la fac en évitant soigneusement de lui parler de
son mec, sujet sur lequel j’ai la ferme intention de l’interroger plus tard. Ensuite,
Ginelle nous raconte plusieurs blagues qu’elle a apprises durant la semaine.
Pendant tout ce temps, nos yeux sont rivés sur lui, attendant, espérant voir le
signe que papa est encore là, quelque part. Qu’il ne nous a pas vraiment laissées.
Avant de partir, le médecin me résume son état de santé, m’expliquant qu’il va
bien d’un point de vue physique et que ses blessures seront bientôt guéries. Une
kinésithérapeute vient le voir tous les jours pour détendre ses bras et ses jambes,
et ils vont bientôt apprendre à Maddy les mouvements à faire pour qu’elle le
stimule davantage. Je déteste qu’elle doive apprendre ça, ça me tue de ne pas
être là pour aider ma famille à traverser cette épreuve.
Lorsque nous partons enfin, ma colère a refait surface et je meurs d’envie de me
défouler sur quelqu’un. Il est grand temps de rentrer à la maison, j’ai besoin de
manger un bon repas, de boire quelques bières avec ma meilleure amie et de
dormir pour oublier ces deux derniers mois.
Demain, j’irai voir Blaine.

1. En français dans le texte. (NdT, ainsi que pour toutes les notes suivantes)

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Chapitre 2

Ginelle et moi traversons le casino d’un pas déterminé. Notre mission est
d’aller au bureau de Blaine, de lui donner le chèque de mon deuxième versement
et de déguerpir. Demain, j’ai tous mes soins chez l’esthéticienne, et je prends
l’avion tôt après-demain pour retrouver mon prochain client à Chicago.
– Tu sais pourquoi il a un bureau dans un hôtel ? demande Gin tandis que nous
évitons les serveuses à moitié à poil.
Il n’est même pas dix heures du matin et l’alcool coule déjà à flots. Ce n’est pas
pour rien qu’il n’y a pas de fenêtres dans les salles de jeu, et que l’alcool et les
buffets sont à volonté pour les joueurs. C’est ce qui les transforme en zombies
accros aux jeux et à l’alcool, désespérés de ne jamais gagner. Or, la première
règle du jeu, c’est justement que la maison gagne toujours. Tout le monde le sait,
mais ça n’empêche pas les gens de continuer à tenter leur chance en dilapidant
toutes leurs économies, anéantissant les chances de leurs gamins d’aller à la fac.
Dans le cas de gros parieurs comme mon père, ils empruntent l’argent. Beaucoup
d’argent. Plus qu’ils ne peuvent rembourser au cours de leur vie. Tout ça pour
gagner.
– Blaine m’a dit qu’il ne cherchait pas à cacher ce qu’il fait. Il se voit comme un
« investisseur ». Pour lui, le fait d’avoir un bureau et des employés lui donne la
légitimité d’un homme d’affaires plutôt que l’air d’un criminel.
– C’est pas bête, en fait, répond Gin en faisant éclater une bulle de chewing-
gum.
– Ouais ben… j’ai jamais dit qu’il l’était. C’est juste un connard sans cœur.
Nous arrivons à l’ascenseur et montons à son étage. Les portes s’ouvrent et je
m’arrête. Je me recoiffe et ajuste mon t-shirt pour m’assurer qu’il couvre bien

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mon ventre. J’ai opté pour mon blouson en cuir noir et mes cuissardes à talons.
La cerise sur le gâteau, c’est mon rouge à lèvres rouge vif qui, si j’en crois la
pub, devrait rester fixé sur ma bouche pendant vingt-quatre heures. Je me sens
forte, féroce et prête à affronter un enfoiré avec une petite bite. Bon, en vérité, sa
queue est tout à fait normale, mais ça me fait du bien de l’émasculer en pensée.
Je sors dans le couloir et me tourne vers Ginelle, tout en bloquant les portes de
l’ascenseur.
– Bon, toi, tu ne vas pas plus loin.
Ma meilleure amie fronce les sourcils, son regard devient furieux.
– Si tu penses une seule seconde que…
Je plaque ma main sur sa bouche et m’approche tout près de son visage, si près
que je sens son haleine à la menthe.
– Chérie, Blaine a déjà fait du mal à un membre de ma famille et il a menacé de
s’attaquer à Maddy et moi. Je ne supporterais pas qu’il menace une autre des
personnes à qui je tiens. J’ai besoin que tu partes et que tu m’attendes en bas,
j’ajoute en fourrant un billet de vingt dollars dans sa main. S’il te plaît.
– Et s’il décide de s’en prendre à toi ? demande Gin, les larmes aux yeux.
– Ça ne sera pas le cas. J’ai trop de valeur à ses yeux. Crois-moi.
Et je plonge mon regard déterminé dans le sien.
Elle inspire profondément.
– Ok… Mais si tu n’es pas revenue dans une demi-heure, j’appelle les flics.
Je la pousse dans l’ascenseur.
– Ça me va. Maintenant va-t’en, avant que quelqu’un ne te voie.
– Je t’aime à la folie, dit-elle.
– Moi aussi. À tout de suite, ma salope.
Elle écarquille les yeux, mais elle n’a pas le temps de répondre car les portes se
referment sur elle. Je ricane quelques secondes, puis je prends mon courage à
deux mains. Il est temps d’affronter ce monstre.
*
* *
Le bureau de Blaine est décoré en noir, rouge et blanc. Ça me fait penser aux
drapeaux à carreaux qu’on voit dans les courses de voitures ou de motos. Ce

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n’est pas très original, mais je suppose que ça rappelle son désir de « gagner ».
Une blonde avec d’énormes faux seins, un petit cul, un QI encore plus petit et
une taille d’anorexique m’accompagne à son bureau.
– Monsieur Pintero, Mia Saunders est arrivée, dit-elle en s’effaçant pour me
laisser passer.
Blaine et son mètre quatre-vingt-treize se lèvent. Ses épaules sont larges et il
semble avoir pris vingt kilos de muscles depuis la dernière fois que je l’ai vu.
– Mia. Ma belle, ma superbe Mia, dit-il en me tendant la main pour me tirer
contre lui.
Je tends le bras pour le repousser, fermement ancrée dans mes bottes.
– Je suis là pour parler affaires, Blaine, pas par plaisir.
– On ne peut pas faire un peu des deux ? lance-t-il d’un ton suave.
Ses yeux verts et jaunes, comme ceux d’un serpent, s’embrasent. Sa pupille est
noire et envoûtante, comme s’il pouvait m’hypnotiser d’un simple regard. Je
tourne la tête, m’assieds sur une chaise, puis je sors l’enveloppe de mon blouson
et je la balance sur son bureau en verre.
– Tiens, voilà ce que tu veux.
– Comment pourrais-tu savoir ce que je veux, ma belle Mia ? Ça fait bien trop
longtemps que nous ne nous sommes pas vus. Suffisamment longtemps pour que
des blessures guérissent, tu ne penses pas ?
Au lieu de s’asseoir en face de moi, il choisit la chaise à côté de la mienne.
– Très bien, qu’est-ce que tu veux, Blaine ?
– Du temps.
– Ok, je veux bien jouer à ton petit jeu. Du temps pour quoi ?
– Je crois savoir que tu n’as pas perdu le tien.
– Blaine, crache le morceau. Qu’est-ce que tu veux ?
– Je veux que tu dînes avec moi, ce soir.
Ce mec est vraiment barjot.
– Tu es devenu fou ?
– D’après mon médecin, non.
Soudain, j’étouffe dans cette pièce, malgré la vue superbe sur tout Vegas. J’ai
l’impression que ma peau est en feu, couverte d’acide – peut-être est-ce la colère

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qui bout en moi, prête à jaillir.
– Tu as tabassé mon père à mort, Blaine. Il est encore dans le coma.
– Ça, c’est les affaires, tu le sais bien, Mia. Il ne m’a pas laissé le choix.
Il tend le bras pour prendre ma main, mais il m’a à peine touchée que je sursaute
et la retire vite fait.
– Ne t’avise pas de me toucher, tu as perdu ce privilège il y a bien longtemps
quand tu as décidé de me faire du mal. Et maintenant, tu as fait du mal à mon
père. Tu sais qu’il n’est toujours pas sorti de son coma ? je hurle si fort que les
gens du bureau d’à côté m’entendent sans doute. Ils ne savent même pas s’il
pourra reparler ni remarcher !
Blaine plonge son regard de serpent dans le mien.
– Ça, c’est un dommage collatéral de sa punition. Je me suis occupé de l’homme
qui lui a fait du mal. Il ne posera plus de problèmes, ne t’en fais pas.
– Que je ne m’en fasse pas ? Non, mais tu t’entends parler ? Tu parles de la vie
d’un homme comme si on pouvait la donner et la reprendre sur un simple
claquement de doigts !
– Nous ne sommes que de passage sur cette terre, Mia.
– Ouais, surtout quand tu t’en mêles ! Écoute, tu as ton fric, je dis en me levant
et en désignant l’enveloppe. C’est le deuxième paiement. Tu auras le troisième
dans un mois.
– Tu n’auras qu’à me l’apporter en personne, dit-il en grinçant des dents.
Il me prend pour un de ses larbins ?
– Ça ne fait pas partie du deal, ça.
– Les deals se renégocient.
– Pas celui-ci, certainement pas, je rétorque en me dirigeant vers la porte.
– Et si je réservais tes services pendant un mois ? menace-t-il.
Je me tourne brusquement et, en deux enjambées, je suis nez à nez avec lui. Je
suis si près que mon souffle fait voler ses cheveux.
– Si j’étais toi, je ferais très attention en me laissant t’approcher quand tu es
vulnérable.
– Ah, mais tu sais à quel point j’aime jouer, Mia, ricane-t-il.

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– Eh bien, ne mise pas sur moi, mon pote, parce que ce sera le dernier pari de ta
vie. Je ne serai pas tenue pour responsable de ce qui t’arrivera dans ton sommeil.
J’entends déjà ma déclaration aux flics, je dis en me redressant et en faisant la
moue. C’était un accident, Monsieur l’Agent, je vous le jure. On faisait l’amour
– il aimait que ce soit brutal. Je ne pensais pas qu’il étoufferait. Il était en train
de jouir, et l’instant d’après… il était parti…
Je reprends un air déterminé et le regarde de haut. Je le vois déglutir, mais en
dehors de cela, il ne semble pas affecté par ma menace. Cependant, je le connais
suffisamment pour savoir qu’il ne sait pas trop s’il doit me prendre au sérieux.
Peu importe, le fait qu’il se pose la question est déjà une victoire pour moi.
– Je m’en vais, maintenant. Merci pour ce face-à-face. C’est toujours sympa de
voir de vieux amis. Surtout quand ils n’ont pas bien vieilli. Tu devrais t’acheter
une crème antirides, la chaleur du désert est catastrophique pour la peau, tu sais.
Allez, ciao ciao !
Et je claque la porte derrière moi.
*
* *
Lorsque j’arrive au bar, je retrouve Ginelle assise devant deux verres à shot
pleins.
– Oh, Dieu merci, dit-elle en s’affaissant sur son tabouret de bar.
Je prends un des verres et j’avale la tequila cul sec, puis je prends le second et je
l’enquille aussi.
– Eh ! On était censées fêter ça à deux ! s’exclame-t-elle.
– Deux de plus, je dis au barman.
Il hoche la tête, attrape la bouteille et nous sert deux autres shots.
Au bout du quatrième verre, j’arrête enfin de trembler.
– Est-ce que ça va ?
– Ouais, c’est juste… cet homme est le seul humain sur terre à m’énerver autant.
Elle boit une gorgée de son Coca et repose son verre.
– Il t’a menacée ?
– Ouais, il a menacé d’être mon prochain client, tu le crois, toi ?
Elle écarquille les yeux.

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– Quoi ? C’est complètement dingue !
– Exactement, c’est ce que je lui ai répondu.
– Alors, comment tu t’en es tirée ? Tu ne vas pas vraiment le laisser faire ça, si ?
Elle gigote sur son siège, clairement mal à l’aise.
– Bien sûr que non ! En gros, je lui ai dit que s’il faisait ça, je le tuerais dans son
sommeil.
Elle ouvre grand les yeux, puis elle penche la tête en arrière et éclate de rire.
– Il n’y a que toi pour… il n’y a que toi pour menacer de mort un assassin, Mia.
Tu devrais surveiller tes arrières.
Je réfléchis un instant à ce qu’elle vient de dire. Blaine pourrait s’en prendre à
moi, c’est vrai, mais tant que je lui dois de l’argent, j’ai plus de valeur vivante
que morte. Ce raisonnement fonctionnera jusqu’à la fin de l’année, ce qui me
laisse assez de temps pour rembourser la dette de mon père et décider de la suite.
– Alors, quels rendez-vous m’as-tu pris pour demain ? Mon contrat exige que je
sois présentable à tout moment.
– Eh bien, avec le budget que tu m’as donné, Mads et moi t’accompagnons au
spa. J’avais une réduction – trois pour le prix de deux. Au menu : soins du
visage, épilation, manucure, pédicure. Ah, et tu vas te faire couper les pointes,
aussi. J’ai dû payer ça en plus, mais tu m’as dit que tu en avais besoin, alors
bon…
– Et tout ça, c’était dans mon budget ?
– Je connais des gens qui connaissent des gens qui me filent de grosses
réductions. Donc ouais, c’était dans le budget.
Gin fouille dans son sac et en sort un paquet de chewing-gums. Elle l’ouvre,
fourre une dragée dans sa bouche, la mâche deux ou trois fois et pousse un
grognement. Je la dévisage en essayant de mettre le doigt sur ce qui a changé.
– C’est quoi, cette obsession pour le chewing-gum ?
Son regard s’illumine et elle sourit jusqu’aux oreilles.
– J’essaie d’arrêter.
– D’arrêter quoi ?
Son sourire disparaît et elle prend un air blasé.
– De fumer, dit-elle d’une voix lugubre.

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Oh merde, je n’avais pas remarqué ! Les meilleures amies sont censées
remarquer que leur amie ne respire plus un cancer en barre, non ?
– Merde, Gin, c’est génial ! Comment ça se passe ? Pourquoi tu ne me l’as pas
dit ?
Elle soupire.
– Eh ben, j’allais te le dire, mais tu n’as pas arrêté de parler de Wes, d’Alec et de
ton boulot, et tu ne m’as pas posé une seule question à propos de ma vie ici – à
part ce qui concernait Maddy et ton père.
Je ferme les yeux avant de les plonger dans ceux de ma meilleure amie.
– Je suis désolée. Je n’ai pas été une très bonne amie, ces derniers temps, hein ?
– Non, répond-elle en secouant la tête, mais c’est normal, tu en as gros sur le
cœur. Je comprends, t’en fais pas.
– Si, c’est grave. Toi aussi, tu comptes énormément pour moi, tu sais. J’ai envie
de savoir ce qui se passe dans ta vie. Tu es ma meilleure amie et j’ai merdé. Ça
ne se reproduira plus, promis.
Je le pense. J’ai été une mauvaise amie, alors que Gin n’a pas cessé de me
soutenir et de m’aimer pendant toute cette affreuse période. Elle s’occupe de
Maddy et elle va voir mon père, tout ça en gérant sa propre vie et ses propres
ennuis.
– Si jamais tu recommençais, j’aurais quoi en échange ? demande-t-elle d’un ton
léger.
Elle m’a déjà pardonné. Cela dit, c’est ainsi qu’on fonctionne. Nous ne sommes
jamais restées énervées l’une contre l’autre plus d’un jour.
– Des photos d’un de mes clients ? je demande à mon amie quasi-nymphomane.
– Ça marche ! s’exclame-t-elle en me tendant la main.
Nous crochetons nos petits doigts, puis elle les embrasse. J’en fais de même, et
je constate qu’il n’y a aucune marque sur nos mains. C’est le meilleur rouge à
lèvres au monde.
– Cela dit, tu n’as vraiment pas été sympa… commence-t-elle en me regardant
avec les yeux du Chat potté, alors je pense que je mérite un avant-goût.
Je me lèche les lèvres en la dévisageant, puis je souris et je sors mon téléphone
de ma poche. J’ouvre ma galerie de photos et je les fais défiler jusqu’à trouver la

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bonne, que Ginelle regarde, bouche bée.
– Bon sang, tu es vraiment une garce, chuchote-t-elle, les yeux rivés sur l’écran.
Je reprends mon téléphone et je regarde à mon tour la photo. On y voit Alec,
profondément endormi sur le ventre, à poil, révélant son dos musclé et ses fesses
fermes. Ses longs cheveux ambrés sont étalés sur l’oreiller. Il était si beau, ce
matin-là, que je n’ai pas pu résister à l’envie de le prendre en photo.
J’ai pris la photo suivante lorsque Wes et moi sommes allés surfer sans le prof.
En un mois, je m’étais pas mal améliorée, et ce jour-là, j’étais déjà de retour sur
la plage, regardant l’heure sur mon téléphone, lorsqu’il est sorti de l’eau à son
tour. Il a commencé à enlever sa combinaison. Sur la photo, on voit son torse
hâlé et musclé ainsi que sa taille fine et ferme et la délicieuse ligne de poils qui
disparaît dans sa combinaison.
Je tourne mon téléphone et Ginelle écarquille les yeux. Elle prend son shot, le
vide et le repose brusquement sur le bar.
– Je te déteste, dit-elle sans quitter mon portable des yeux.
– Ouais, moi aussi je me déteste.
Je me perds un instant en admirant Wes, l’homme qui m’a demandé de rester.
L’impression que j’ai oublié quelque chose en Californie avec ce scénariste
surfeur ne me quitte pas, mais je ne l’admettrai jamais.

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Chapitre 3

Le valet m’ouvre la porte, puis il me guide à travers l’énorme penthouse situé


au quarantième étage de l’immeuble. L’ascenseur a mis tant de temps à monter
jusqu’en haut que je me suis crue sur une attraction de fête foraine. L’homme
pose mon sac au pied d’un grand lit, puis il tourne les talons et disparaît, me
laissant seule à écouter le bruit d’une douche couler.
Merde, merde, merde. Je n’ai pas vraiment envie de rencontrer mon client à poil.
Je remonte l’anse de mon sac à main sur mon épaule, me préparant à déguerpir
de là, lorsque la porte s’ouvre. Une silhouette imposante émerge d’un nuage de
vapeur et de lumière, créant autour de lui une image surréelle qui aurait sa place
sur grand écran.
Fascinée, je ne bouge plus.
Mon client entre dans la chambre, « vêtu » d’une minuscule serviette nouée
autour de la taille, son corps musclé recouvert de minuscules gouttelettes qui
ruissellent sur lui. Ma bouche est sèche, tout à coup, et mon cœur semble avoir
cessé de battre, cependant ça ne m’inquiète pas, car c’est plutôt une belle mort,
non ? J’ai vingt-quatre ans et j’ai enfin vu la perfection masculine.
– Doux Jésus, je murmure.
Je crois qu’un filet de bave coule sur mon menton. Wes et Alec sont tous les
deux magnifiques. Or, la beauté d’Anthony Fasano est au-delà de tout
entendement. Il est immense, une véritable armoire à glace. De ce que je vois
sous sa serviette, ses cuisses font la taille de deux troncs d’arbre. Ses pecs sont
carrés et ses abdos rectangulaires, fermement dessinés sur son torse. Quant à ses
bras… j’en perds la tête, tant j’ai envie de les toucher, de les sentir autour de moi
pour me faire oublier les deux derniers mois.

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Ses cheveux ébène sont plaqués en arrière et l’eau goutte des mèches les plus
longues, tombant sur les épaules les plus larges que j’aie vues de toute ma vie –
et j’ai vu un bon nombre de mecs à poil. Ce type est sacrément en forme. Je sais
qu’il fait de la boxe, Tante Millie m’avait communiqué une photo de lui en short,
mais ce n’est rien comparé à la réalité.
Je me lèche les lèvres, les yeux rivés sur lui, et je laisse mon sac à main tomber à
mes pieds. Quant au dieu qui se tient devant moi, il me regarde de la tête aux
pieds. Il s’appuie contre le cadre de la porte et il passe la serviette qu’il avait
dans la main autour de son cou avant de croiser les bras. Bon sang, les muscles
de ses bras se gonflent davantage et mon souffle accélère tandis que mon sang
s’embrase.
– Papi, Mia est là, dit-il.
Papi ?
Un autre homme émerge de la salle de bains et passe son bras autour de la taille
du demi-dieu en souriant jusqu’aux oreilles. Cet homme-ci est plus petit, mais
néanmoins musclé, sans le moindre gramme de graisse sur lui. Il me fait
davantage penser à mon Frenchie. Cela dit, comparés au mur de muscles à côté
de lui, peu d’hommes seraient à leur avantage.
Quoi qu’il en soit, le visage du second est aussi beau que celui du premier,
magnifique, presque androgyne. Le genre qu’on veut prendre en photo et
accrocher aux murs. Mon flair californien me dit qu’il est d’origine hispanique –
ses cheveux bruns, ses yeux foncés, sa peau mate et ses traits pointus sont
typiques.
Les deux hommes m’observent, côte à côte, détendus, quasi à poil, se tenant l’un
l’autre… et je comprends enfin la situation. Je crois même que je reste bouche
bée quelques secondes, les désignant tour à tour.
– Ah ! Waouh. Euh, ok. Alors… ok. Je comprends pourquoi vous avez besoin de
moi, maintenant !
– Tiens, elle est intelligente en plus d’être belle, dit l’inconnu en me détaillant de
la tête aux pieds. Il fallait que tu choisisses la plus jolie ? demande-t-il en
fronçant les sourcils.
Il s’éloigne d’Anthony, croise les bras et soupire de manière théâtrale.

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– Est-ce que je dois m’inquiéter ? demande-t-il en tapant du pied comme une
nana cherchant à épingler son mec.
Le regard d’Anthony parcourt lentement toutes mes courbes, puis il sourit d’un
air diabolique.
– Peut-être… dit-il lentement. Eh oui, il fallait que je prenne la plus jolie. Ma
famille veut que je sois avec une femme parfaite, dit-il en regardant l’autre
homme. Elle est plutôt parfaite, tu ne trouves pas ?
L’inconnu fronce une dernière fois les sourcils, puis son visage se détend.
– Si, tu es très belle, dit-il en s’adressant enfin à moi.
– Euh, merci, je crois. Alors… qui es-tu ?
– Je suis Hector Chavez. Le partenaire d’Anthony.
– Enfin, ce mois-ci, tu n’es pas censé l’être, non, ricane Anthony.
– Je ne trouve pas ça drôle, rétorque Hector d’un air triste. C’est une épreuve à
passer et moi, je n’ai pas hâte d’y être, dit-il avant de tourner les talons et de
disparaître par une autre porte.
Le dressing, peut-être ?
– Alors, vous êtes en couple ? je demande en désignant la porte par laquelle
Hector est parti.
Anthony sourit et hoche la tête. Mon cœur bat de nouveau la chamade. Zut, je
sais que ce n’est pas vrai, que tous les beaux gosses ne sont pas gays, mais est-ce
qu’il fallait vraiment que le beau gosse des beaux gosses le soit ?
– Et si on s’habillait avant de parler de tout ça ?
– Ah oui, bien sûr, je dis en me tournant et en attrapant mon sac.
– Deuxième porte à gauche. Ce sera ta chambre pour le mois. Tu devrais y
trouver ce dont tu auras besoin pour les prochains jours. Demain, Hector
t’emmènera faire les magasins.
Je grimace et Anthony penche la tête sur le côté, rivant ses yeux d’un bleu
glacial sur moi.
– Cette idée ne semble pas t’emballer. La plupart des filles seraient ravies de
pouvoir dépenser d’immenses sommes d’argent pour des fringues de luxe.
– Eh bien, tu apprendras vite que je ne suis pas la plupart des filles. Sans parler
du fait que je suis une femme, pas une fille, j’ajoute en lui lançant un clin d’œil

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et en baissant la tête. Tu devrais resserrer ta serviette, je vois ta bite.
Il ne bouge pas d’un iota, se contentant de se lécher les lèvres en m’étudiant avec
un air curieux.
– Je sens qu’on va s’amuser, ce mois-ci.
Je tourne les talons et j’ouvre la porte.
– À quoi bon vivre si tout est prévisible ! je dis par-dessus mon épaule.
Il ricane et secoue la tête en refermant la porte.
*
* *
Je suis assise au bar, occupée à dévorer un sandwich poulet-crudités, quand
Hector et Anthony émergent de leur chambre, une demi-heure plus tard.
– C’est de loin le meilleur sandwich au poulet de toute ma vie, je dis à Renaldo
en me tournant pour saluer mes deux nouveaux amis.
Pendant qu’il me faisait à manger, Renaldo m’a expliqué qu’il n’était pas
seulement le valet mais aussi l’homme de ménage, le chef et l’assistant
personnel d’Hector et Anthony. Il semble également avoir un goût prononcé
pour les potins. Apparemment, mon statut d’employée me donne le droit d’être
tenue au courant des dernières aventures de nos beaux patrons.
Renaldo pose deux assiettes de chaque côté de la mienne et continue de
fredonner doucement. Je l’aime bien, ce mec. Je suis sûre qu’il est italien ou
hispanique, lui aussi. Il mesure environ un mètre soixante-cinq, il est rondouillet,
il doit avoir la cinquantaine et, après l’avoir entendu vanter la beauté de ses
patrons, je peux dire avec certitude qu’il est gay lui aussi.
– Mia Saunders, dit Hector en venant vers moi, bras ouverts, pour me faire un
câlin. Merci d’être venue.
– Inutile de me remercier, vous avez payé pour me faire venir, non ?
Il recule et dégage une mèche de cheveux de mon visage.
– Oui, mais tu aurais pu refuser. On est contents que tu sois là.
– Cool. Je suis ravie de vous rencontrer, je dis en tendant la main au géant.
Anthony Fasano, mon nouveau fiancé, je présume ?
Anthony éclate de rire avant de serrer fermement ma main.
– Le seul et l’unique. Je suis ravi de rencontrer ma future épouse.

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Hector tourne la tête si vite que je me demande s’il s’est froissé un muscle.
– Pardon, mais tu veux dire ta fausse future mariée, non ? Si quelqu’un doit te
dire oui à l’autel, mon grand, c’est moi ! s’exclame-t-il en s’asseyant à côté de
moi.
– Papi, ne sois pas comme ça. Tu sais très bien que je plaisante, arrête de tout
prendre au pied de la lettre, répond Anthony en secouant la tête. Et tu peux
m’appeler Tony, me dit-il. Si tu dois faire semblant d’être ma fiancée, autant
régler ça tout de suite.
Il s’assied sur le tabouret – trop petit pour accueillir un corps comme le sien – et
je regarde les pieds en me demandant dans combien de temps ils vont céder.
Hector me met un léger coup d’épaule et me sort de ma rêverie.
– Eh, garde tes yeux sur ton sandwich, ma belle. Toute cette splendeur masculine
est à moi et à moi seul. Si tu piges ça, tout ira bien.
J’ouvre la bouche pour répondre, mais je me contente finalement de hocher la
tête.
– Alors, quelle est ma première mission ? je demande en les regardant tour à tour
tout en mordant dans mon sandwich.
En trois bouchées, Tony a avalé la moitié du sien. Il s’essuie la bouche avec une
serviette avant de répondre.
– Ce soir, nous allons apprendre à nous connaître, et demain soir, tu rencontreras
Mamma.
– Demain ? Après une seule soirée, tu t’attends à ce que je me comporte comme
si j’étais amoureuse de toi devant ta mère ? La femme qui t’a donné la vie ?
Hector et Tony hochent la tête en même temps.
– Dans ta description, il était précisé que tu es actrice. On s’est dit que c’était un
bonus. Et puis, on dîne toujours avec Mamma et la famille le vendredi soir.
– La famille ?
Tony sourit avant de reprendre une bouchée digne d’un alligator. Renaldo pose
un autre sandwich dans son assiette, accompagné d’un grand verre de lait dont
Tony boit la moitié en une gorgée.
– Impressionnant, je remarque.

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– Je sais, dit Hector en me remettant un petit coup d’épaule et en jouant des
sourcils.
Je secoue la tête en m’efforçant de me concentrer sur ce dont nous parlions.
– Donc, tu me demandes de faire semblant d’être sa fiancée, je dis à Hector, et
de convaincre sa mère et le reste de sa famille qu’il est l’amour de ma vie ? En
une soirée ?
– Si. Je savais que tu étais maligne, dit-il d’un air enjoué.
– C’est impossible.
– Mais non, dit Tony en me frappant l’épaule comme si je faisais partie de sa
bande de mecs. Tu vas gérer, je le sais. Tu es magnifique, tu as les pieds sur terre
et tu es un peu rentre-dedans. Les Italiens aiment ça. Tu sais cuisiner ?
– Je me débrouille.
Tony se lèche les lèvres avant d’appuyer son avant-bras sur le bar, envahissant
mon espace.
– Tu aimes la cuisine italienne ?
– Tu connais des gens qui n’aiment pas ?
Il regarde Hector du coin de l’œil avant de revenir à moi.
– Est-ce que tu te laisses facilement intimider…
Je m’avance vers lui et je le défie du regard.
– J’ai l’air du genre à me laisser intimider ?
– Je n’ai pas fini, dit Tony en approchant encore son visage du mien.
Je fais de mon mieux pour ne pas reculer, mais j’échoue et je finis par
m’appuyer contre Hector qui me retient.
– Es-tu intimidée par les femmes fortes ?
– Écoute, je peux tenir tête à une bande d’Italiennes.
Tony et Hector sourient tous les deux jusqu’aux oreilles.
– Ok, dit Tony. Alors passons aux choses sérieuses.
– Ok, mais d’abord, il va nous falloir du vin, dit Hector en se levant et en sortant
de la cuisine.
*
* *

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– Nooon, vous n’avez pas fait ça ! je m’écrie en éclaboussant du vin sur la table
basse.
Hector, mort de rire, laisse tomber son visage sur mes cuisses tandis que Tony
essuie la table avant de remplir de nouveau mon verre.
– Si, je te promets ! Nus comme des vers. On a traversé tout le terrain de
football, vêtus d’un casque et rien d’autre. On avait chacun peint une lettre
différente sur notre torse et après le dernier but, on a couru sur le terrain, on s’est
plantés face aux gradins des visiteurs assez longtemps pour que tout le monde le
lise, puis on a couru aussi vite que possible vers la sortie. On avait écrit « L-E-
S… L-O-S-E-R-S1… S-O-N-T… P-D ».
– Toi aussi ? je demande à Hector.
Il hoche la tête avant de se relever.
– Peu de temps après, Anthony et moi nous sommes mis en couple. En privé, en
tout cas.
– Alors, qui sait que vous êtes ensemble ? je demande, posant enfin la question
que je retiens depuis le début de la soirée.
– Pas grand monde, répond Hector d’un ton amer.
– Papi, ne commence pas.
Hector soupire et me tire contre lui. Nous reculons dans le canapé, épaule contre
épaule, collés l’un à l’autre. Cette proximité platonique avec un homme est
nouvelle pour moi – j’ai un peu l’impression d’avoir un frère, et ça me plaît.
– Tu comprends, mon Anthony n’a pas envie d’avoir à gérer la presse, sa famille
et les ragots dans le monde des affaires s’il décidait d’admettre son
homosexualité.
– C’est débile, je dis sur un ton plus sec que je ne le voulais.
– À qui le dis-tu ! s’exclame Hector en trinquant avec moi.
Tony pose son verre sur la table basse.
– Il faut que tu comprennes que c’est déjà dur d’être un jeune boxeur qui est
devenu homme d’affaires. Ajoute à ça le fait d’être gay et c’est un désastre
assuré. Je ne pourrais plus jamais monter sur un ring.
– Ils n’ont pas le droit de t’en empêcher, si ? je m’écrie, indignée. C’est de la
diffamation ou quelque chose comme ça, non ?

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Mon cerveau, imbibé d’alcool, ne parvient pas tout à fait à expliquer pourquoi
c’est horrible, mais dès que j’aurai récupéré ma capacité à réfléchir, je dégainerai
une réponse parfaite.
– Non, mais ils trouveraient d’autres raisons, même si la véritable est que je suis
gay. Ensuite, il y a l’entreprise. Je suis un homme italien à la tête d’une chaîne
de restaurants familiaux. L’image de marque a toujours été mon père, ma mère,
mes quatre sœurs et moi.
– Tu as quatre sœurs ? je m’exclame. Wouah. Elles ne vont jamais croire qu’on
est en couple, je dis en secouant la tête alors qu’Hector hoche la sienne. Les
femmes savent quand il se trame quelque chose. Tu es sûr qu’elles ne savent pas
déjà que tu es gay ?
Tony se lève et se met à faire les cent pas.
– Bien sûr que non. Je ne leur ai jamais donné aucune raison de le penser. Ce
que tu ne sais pas, Mia, et c’est d’ailleurs la raison principale pour laquelle tu es
là, c’est le nom de notre famille.
– Fasano ! je m’écrie en me sentant comme ces gamins à l’école qui
connaissaient toutes les réponses et qui les disaient sans y être invités.
– Oui, dit-il en s’asseyant sur l’accoudoir à côté de moi. Mes quatre sœurs ont
bien sûr chacune leur rôle à jouer, mais je suis l’unique héritier de l’entreprise de
mon père. Et c’est plus que ça. Tu vois, étant le seul mâle Fasano… si je n’ai pas
d’enfant, notre nom meurt avec moi. Et comme je suis gay…
Il ne finit pas sa phrase et regarde dans le vide, comme s’il portait le poids du
monde entier sur ses épaules.
– Est-ce que tu veux des enfants ? je demande abruptement, comme toujours
quand j’ai bu trop d’alcool.
Tony se passe la main dans les cheveux et regarde Hector.
– Eh bien, euh, on n’en a jamais vraiment parlé.
Hector se redresse, puis il se lève, marche jusqu’à Tony et prend son visage dans
ses mains.
– Chéri, tu veux des enfants ?
Je devrais partir, filer sans qu’ils me voient. Cependant, ce n’est pas dans ma
nature. Ma nature est plutôt de me faire toute petite et de me mêler de leurs

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affaires sans me faire remarquer.
– Oui, j’en ai toujours voulu, dit Tony en portant sur Hector un regard plein
d’amour et de tristesse.
– Alors, on trouvera un moyen. On peut adopter ou trouver une mère porteuse.
Je souris jusqu’aux oreilles avant de finir mon verre de vin qui me réchauffe tout
le corps. Je me lève et, sentant que mes jambes ne coopèrent pas tout à fait
comme d’habitude, je tends le bras pour retrouver mon équilibre.
– Ok, mon travail ici est fait, je dis en faisant une révérence.
Cependant, les deux hommes m’ignorent parfaitement, perdus dans les yeux l’un
de l’autre, face à face, front contre front, chuchotant des mots qu’eux seuls
peuvent entendre. C’est magnifique, et je suis contente d’en avoir été témoin.
Sans regarder en arrière, je file dans ma chambre où je me laisse tomber sur le
lit, tout habillée, avant de sombrer dans un sommeil profond.

1. PERDANTS.

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Chapitre 4

Tony nous tient ouverte la grande porte en bois du restaurant. Il est dix-huit
heures vendredi soir, et Chez Fasano’s est plein à craquer. Les serveurs courent
partout, vêtus de leur chemise blanche, de leur pantalon noir et de leur cravate
assortie, servant les tables dont se dégagent de divins parfums de cuisine
italienne – j’en ai déjà l’eau à la bouche. Un des serveurs se retourne et je dois
me retenir de rire en voyant de plus près sa cravate. Des pâtes, leurs cravates
sont imprimées de plats de pâtes.
– J’ai raté une blague ? demande Hector alors que Tony nous mène vers le fond
du restaurant.
– Tu as vu leurs cravates ?
– Oui, c’est mon idée, répond-il en souriant.
– Ah bon ?
Il hoche la tête en me faisant un clin d’œil. Tony m’entoure de son bras et pose
sa main sur ma hanche.
– Bon, tout le monde est déjà arrivé, chuchote-t-il à mon oreille. Suis mes
indications et ne sois pas surprise si je te touche… beaucoup.
Des frissons parcourent mon dos depuis ma nuque jusqu’au creux de mes reins,
et je me réprimande intérieurement. Tony est incroyablement beau… et dans une
relation sérieuse avec Hector. Que j’apprécie énormément. Je calme ma
respiration tandis que nous arrivons devant un épais rideau rouge.
– Il n’y a que ma famille qui mange ici, c’est notre salle privée. Elle remplace la
salle à manger de Mamma, parce qu’on est si nombreux maintenant qu’on doit
faire nos dîners de famille ici. J’ai fait construire cette pièce exclusivement pour
les Fasano.

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– Waouh.
Il tire le rideau, révélant une immense pièce, pleine de gens qui rient aux éclats,
boivent et mangent en criant les uns par-dessus les autres et en gesticulant de
manière théâtrale. C’est le chaos. De la folie pure, je ne saurais le décrire
autrement.
Lorsque nous entrons, une personne nous remarque, puis une autre, et ainsi de
suite. Un silence de plomb s’abat bientôt sur la pièce tandis qu’une petite femme
à la peau mate se lève. Ses cheveux sont gris et elle a les mêmes yeux bleus que
mon prétendu fiancé. Elle se tient avec assurance, le dos droit, la poitrine en
avant, le regard rivé sur moi.
Arrivée à nous, elle tend d’abord le bras vers son fils, qui l’embrasse sur la
bouche. Ce n’est rien de plus qu’un baiser affectueux, mais c’est la première fois
que je vois un homme embrasser sa mère sur la bouche. En tout cas, moi je
n’embrasse pas mon père ainsi – d’ailleurs, je ne l’embrasse pas du tout – c’est à
peine si nous nous faisons un câlin.
– Mamma, dit Tony en se redressant et en me désignant, voici Mia, ma fiancée.
Mia, voici ma mère, Mona Fasano.
– C’est un honneur de vous rencontrer, Madame Fasano, je dis en souriant.
Ses lèvres tressaillent, mais elle ne me retourne pas mon sourire, préférant
m’inspecter des pieds à la tête sans chercher à être discrète.
– Vous êtes très belle, dit-elle enfin.
– Merci, je réponds en dégainant un immense sourire tout en me rapprochant de
son fils.
Cependant, elle ne s’arrête pas là.
– Et vous avez des formes. Les hommes de la famille aiment les formes, dit-elle
en posant ses mains sur ses larges hanches.
Si elle avait été plus fine, j’aurais été vexée.
– J’aime bien manger, surtout la nourriture italienne, je mens.
Autant marquer quelques points d’entrée avec la belle-mère.
– Votre bassin est bien large – c’est bien pour les enfants, ça.
– Euh, oui…
Je ne m’y attendais pas, à ça.

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– Mamma, dit Tony, essayant de l’arrêter.
Cependant, à l’évidence, lorsque cette femme a quelque chose à dire, elle ne s’en
prive pas et elle a l’habitude qu’on l’écoute.
– Oui, vous me donnerez de très beaux garçons. Il ne faut pas que notre nom de
famille s’éteigne, vous comprenez ? dit-elle en me transperçant du regard. Vous
voulez des enfants, n’est-ce pas ?
– Mamma, ça suffit, je suis mort de faim et je veux présenter Mia au reste de la
famille, dit Tony, venant à ma rescousse.
– D’accord, d’accord, concède-t-elle.
Elle frappe dans ses mains, puis elle empoigne mes bras et m’attire dans les
siens, me serrant fort contre elle.
– J’ai prié nuit et jour pour que mon Anthony trouve son âme sœur. Je suis
tellement contente que vous soyez là… chuchote-t-elle dans mon oreille.
Elle recule, prend mon visage dans ses mains et m’embrasse sur la bouche.
D’habitude, embrasser une fille ne me dérange pas. Parfois, Gin ou Maddy me
font un smack. Cependant, je viens de rencontrer cette femme et je sais déjà que
je vais lui briser le cœur dans un mois – ça ne me plaît pas du tout.
Hector nous contourne, salue plusieurs personnes en les prenant dans ses bras,
puis il s’assied sur une des trois chaises vides au milieu de la pièce.
– Viens ma chérie, dit Tony.
Ma chérie. C’est comme ça que m’appelait Wes. Bon sang, il trouverait ce
scénario hilarant. Peut-être qu’il pourrait s’en servir dans un de ses films, un
jour, s’il décidait décrire une comédie romantique. Un homme d’affaires canon,
boxeur, embauche une escort parce qu’il est gay et qu’il n’est pas prêt à l’avouer
à sa famille.
Tony me propose la chaise à côté d’Hector – un choix stratégique, à mon avis –
qui a l’air déçu que l’homme de sa vie ne s’asseye pas à ses côtés. Je trouve
toute l’histoire parfaitement déprimante : deux hommes, clairement fous l’un de
l’autre, ont l’impression d’être séparés parce que la société, leur famille et leur
milieu professionnel n’approuveraient pas leur relation. Je prends la main
d’Hector sous la table pour la serrer et je le vois sourire du coin de l’œil.
– Ne t’en fais pas, ma belle, j’y suis habitué, depuis le temps.

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Durant l’heure qui suit, Tony me présente chacune de ses sœurs. Il y a Giavanna,
la plus âgée, qui a trente-neuf ans. Elle doit avoir les gènes de sa mère, car elle
est petite – environ un mètre cinquante-sept – avec des cheveux bruns et épais.
Cependant, ses yeux sont marron comme des grains de café, si noirs qu’on ne
voit presque pas sa pupille. Cependant, elle n’est pas moche pour autant, bien au
contraire. Elle a quelques ridules au coin des yeux, mais elle est magnifique,
comme toutes les femmes de la famille. Quant à ses enfants, je n’ai capté que
des prénoms italiens dont je ne me souviendrai pas, et le fait qu’il y a deux filles
et deux garçons.
Ensuite, il y a Isabelle, qui est un peu plus grande que sa sœur. Elle a trente-sept
ans, et elle a les mêmes cheveux bruns et les mêmes yeux noirs. Toutefois, elle a
la bouche parfaite de Tony. Elle me présente ses deux fils, qui doivent avoir
environ sept ans – même si je n’ai pas fréquenté suffisamment d’enfants pour en
être sûre.
Sophia est la troisième. À trente-cinq ans, elle est encore un peu plus grande que
la précédente. Apparemment, plus les enfants Fasano sont jeunes, plus ils sont
grands – ce que je ne manque pas de faire remarquer à Hector plus tard. Celle-ci
est super-classe. Elle est vêtue d’une jupe crayon noire, d’une chemise en soie
blanche, et ses cheveux noirs sont relevés dans un chignon serré. Elle porte des
lunettes à écailles de tortue et, si elle a les mêmes yeux que ses deux sœurs, sa
peau est beaucoup plus pâle que le reste de la famille. Je me demande si
monsieur Fasano senior était aussi pâle qu’elle.
– Tu sors tout juste du travail ? je demande.
– Oui, répond-elle en buvant une gorgée de vin. La journée a été longue. Je suis
la DAF1 de Fasano’s.
– Ah, alors c’est toi qui gères l’argent ? je dis pendant que nous trinquons.
– C’est ça ! Il faut bien que quelqu’un surveille ce que font les autres. Sans moi
et mon équipe, ils dépenseraient tout l’argent à droite et à gauche pour des tas de
choses inutiles. Tony et moi nous assurons que la famille garde les pieds sur
terre et qu’elle n’entache pas notre réputation. Fasano’s est synonyme de bonne
cuisine italienne authentique, à la portée de tous les budgets.

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Je hoche la tête en balayant la pièce des yeux. Tout le monde semble heureux et
souriant. Les membres de la famille ont l’air agréables et à l’aise les uns avec les
autres. Je n’ai jamais connu ça chez moi puisque ma mère nous a abandonnés et
que mon père n’a pas pu combler son absence.
– Alors, vous travaillez tous ensemble dans l’entreprise familiale ?
– Oui, mais à différents niveaux. Par exemple, les enfants s’occupent d’envoyer
les bons et les cartes de vœux ou d’anniversaire à nos clients. Quant à mes
sœurs, elles ont toutes un rôle. Giavanna gère la crèche et la garderie
d’entreprise. Moi, je m’occupe des finances, Isabella est aux RH2 et Angelina au
marketing. Même Mamma a un bureau, bien qu’elle passe la plupart de son
temps dans sa cuisine, à trouver de nouvelles recettes et à mettre sur pied le
menu. Comme tu le sais, Tony est le directeur. Même Hector travaille avec nous,
c’est notre avocat. On le connaît depuis si longtemps, il est un peu comme un
frère pour nous.
– Je n’en doute pas. C’est un mec super.
Je suis sur le point de l’interroger discrètement sur les deux hommes en question
lorsque je sens une main sur mon épaule. Je me retourne et je découvre la plus
belle femme que j’aie vue de toute ma vie. Ses cheveux ébène tombent en
boucles épaisses jusqu’à ses fesses. Ses yeux sont aussi bleus que ceux
d’Anthony et sa bouche est d’un superbe rose délicat. Elle porte une longue robe
fluide dans des tons orange, rouge et jaune.
– Je mourais d’envie de te rencontrer, Mia ! dit-elle en se baissant pour me
prendre dans ses bras. Je suis Angelina, ou « Angie ». Le beau gosse derrière
moi, c’est mon mari, Rocko.
S’il y a bien un homme typiquement italien sur cette planète, c’est Rocko. C’est
le portrait craché de Sylvester Stallone, sans rire. Quant à son prénom, autant
s’appeler Rocky, non ? C’est dingue ! Je ferme les yeux et les rouvre pour être
sûre que je ne rêve pas, puis je secoue la tête en lui tendant la main.
– Tu es le portrait craché de…
– Sylvester Stallone ? dit-il en jouant des sourcils.
Il prend ma main, puis il m’attire dans ses bras et me serre si fort que j’en ai le
souffle coupé. Heureusement, deux paires de mains empoignent mes épaules et

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me sauvent des bras de Rocko.
– Doucement avec ma femme, frérot, dit Tony d’un ton protecteur.
La tension émanant d’Hector, témoin de toute la scène, est palpable.
– Je n’en reviens pas, tu lui ressembles tellement ! je m’exclame.
Rocko éclate de rire en penchant la tête en arrière.
– On me le dit tout le temps. En plus, je fais de la boxe avec ton mec – c’est
comme ça que j’ai rencontré Angie. C’est moi qui l’entraînais à l’époque.
Maintenant, on passe plus de temps à entraîner la nouvelle génération qu’à
boxer. Enfin, c’est surtout moi qui entraîne les enfants, dit-il en frappant le bras
de Tony, puisque celui-ci a une affaire à gérer. Mais je ne me plains pas, c’est lui
qui s’assure qu’on ait de quoi manger.
– Ouais, ouais, si tu le dis, Rocky Balboa. Retourne t’asseoir, tu veux ? dit Tony
avec un mélange d’accent italien et de Chicago, qui doit ressortir quand il
plaisante.
– On devrait faire quelque chose ensemble cette semaine ! s’exclame Angie en
prenant ma main. On pourrait faire du shopping demain, tu en penses quoi ? Il
faut qu’on se trouve une robe pour la soirée de lancement des surgelés Fasano.
On organise une grosse soirée avec tous les caïds de l’industrie. C’est notre plus
grosse réussite ! s’écrie-t-elle.
– Tony va travailler, et j’avais prévu d’emmener Mia faire les boutiques. Tu n’as
qu’à venir avec nous, il lui faut une nouvelle garde-robe pour son séjour ici. Ce
serait super d’avoir un deuxième avis, propose Hector.
– J’adore faire les boutiques avec Hector ! me dit-elle d’une voix tout excitée.
Angie doit avoir à peine deux ans de plus que Tony, et c’est la plus grande des
quatre sœurs. Nous faisons à peu près la même taille, et je n’ai pas remarqué
d’autres enfants qui pourraient lui appartenir. Apparemment, le boxeur et le
mannequin n’ont pas encore procréé. Bon sang, le jour où ils se lanceront, leurs
enfants seront superbes.
Ce n’est qu’alors que je réalise ce dont ils parlent. De shopping. Beurk. Je
grimace, rien qu’à l’idée d’avoir à racheter une garde-robe.
– Euh, ouais, ce serait cool, je suppose… Merci.

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Angelina s’assied sur la chaise que Tony vient de libérer pour aller parler à un
autre membre de la famille.
– Tu supposes ? Mia ma belle, tu ne comprends pas : Hector est gay. Il connaît
les meilleures boutiques de la ville, et il saura immédiatement quelles fringues
t’iront à merveille…
– C’est vrai, interrompt Hector. Écoute-la. C’est moi qui habille Angie depuis
qu’elle a vingt ans.
– Et Hector a un goût incroyable en matière de mode, ajoute-t-elle. Tu n’as pas à
t’inquiéter. Il saura quoi acheter. Et avec un corps comme le tien, tu seras
magnifique, quoi qu’il arrive.
– Ha ! Tu parles, tu es la plus belle fille que j’aie jamais vue, à côté de toi,
j’aurai l’air d’un sac, je dis avant de me réprimander intérieurement en
m’obligeant à remettre mon filtre.
– Tu penses que je suis la plus belle fille que tu as rencontrée ? demande-t-elle
en souriant jusqu’aux oreilles.
Je hausse les épaules tout en sirotant mon verre de vin.
– C’est adorable. On va devenir meilleures amies, tu vas voir, dit-elle en me
prenant dans ses bras.
Bon sang, ces gens sont vraiment tactiles. Ils n’ont absolument aucune notion
d’espace personnel. Je crois qu’il n’y en a pas un qui ne m’ait pas embrassée,
touchée ou prise dans ses bras. À l’évidence, je vais devoir m’y faire.
Le repas – des plats délicieux servis dans de grands saladiers, comme à la
maison – est tout simplement exquis. Le vin coule à flots et les membres de la
famille Fasano parlent si fort que j’ai bientôt des bourdonnements dans les
oreilles. Ça me rappelle les soirs où j’allais voir un concert de rock et que mes
oreilles résonnaient encore quand j’étais au lit dans ma chambre. Ces gens
aiment vraiment parler – tout le temps – à des décibels auxquels les humains
normaux ne sont pas habitués.
Toutefois, je dois avouer que, de manière générale, la famille Fasano me plaît.
Ils sont tous pleins d’entrain, amicaux, joviaux et beaux. J’ai l’impression d’être
dans une pièce remplie d’acteurs italiens qui attendent pour auditionner pour un

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film. Quand j’étais à Los Angeles, mon agent m’envoyait souvent à des castings
qui ciblaient les Italiens à cause de mes cheveux noirs et de mes courbes.
Le repas se termine avec d’immenses plats de tiramisu, faits maison par Mona,
bien évidemment, et par des tasses du café le plus noir que j’aie goûté, les deux
allant divinement bien ensemble.
Plus tard, Tony, Hector et moi sortons du restaurant lorsque, soudain, Tony
regarde par-dessus son épaule en paniquant avant de plaquer ses lèvres sur les
miennes. Elles sont douces, chaudes et humides. Il enfouit ses mains dans mes
cheveux, penche ma tête en arrière et plonge sa langue dans ma bouche. Bon
sang, je ne m’attendais pas à ce que Tony – un homme gay qui est en couple –
m’embrasse comme ça. Cependant, je ne peux pas m’empêcher de répondre à
son baiser irrésistible. Sa langue titille la mienne avant de la caresser lentement,
et nous trouvons peu à peu notre rythme. Je lève les bras, je m’accroche à son
cou et je plaque mon corps contre le sien. Puis il saisit mes hanches et me tire à
lui – et c’est là que je le sens. Ou plutôt, que je ne le sens pas. Tony ne bande
pas.
Je recule la tête et je plonge mon regard dans le sien – mais c’est derrière moi
qu’il regarde. Je me tourne pour découvrir Mona, les mains jointes, souriant
jusqu’aux oreilles, si heureuse qu’elle semble avoir rajeuni de dix ans. Je suis
soudain accablée de culpabilité en voyant la joie et l’espoir de cette femme pour
son fils. Son fils unique. Son fils unique homosexuel.
J’entends alors quelqu’un se racler la gorge et je regarde de l’autre côté, où se
tient Hector, les traits tirés, pleins de tristesse, voire de colère. Mamma Mona
tourne les talons et retourne dans le restaurant.
– Hector… je chuchote.
Il secoue la tête et ouvre la portière de la voiture.
– Monte, Mia. Il faut que je parle à Tony.
– Papi, tu sais que ce n’était que du faux… ça ne voulait rien dire, dit-il avant de
pousser un juron et de serrer les poings.
Je ne devrais pas être vexée. Cependant, mes parties intimes n’ont pas été
insensibles à ce baiser, contrairement à celles de Tony. Je pensais qu’un homme
n’embrassait une femme ainsi que lorsqu’il cherchait à la séduire, or à

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l’évidence, Tony n’était pas excité. Il va falloir que je mette de côté tout
sentiment de désir pendant un mois. Cet homme est peut-être le plus beau sur
terre, mais c’est Hector qu’il veut séduire, et personne d’autre.
Je marche jusqu’à la voiture, et Hector ne me regarde même pas. Avant d’y
monter, je pose ma main sur son épaule et le regarde dans les yeux.
– Ça ne voulait rien dire. Mona nous regardait. Il n’était même pas excité,
Hector. Il n’y a que toi qui peux l’exciter. Crois-moi, je sais quand un homme
me désire, et celui-là ne veut qu’une seule personne, toi.
C’est le mieux que je puisse faire.
Je m’assieds sur le siège passager et Hector penche la tête dans la voiture.
– Merci de me l’avoir dit.
– Y a pas de quoi. Et si vous rentriez en taxi ? Allez boire un verre pour discuter
de votre plan d’attaque pour le mois à venir. Je ne sais pas comment vous
envisagiez votre relation pendant mon séjour, mais à l’évidence, il vous faut un
peu d’intimité.
Il hoche la tête et regarde ses pieds.
– J’ai ma clé. Je vous vois demain, ok ?
– Mia, merci, dit Tony en hélant un taxi qui s’arrête devant lui. Hector, viens
avec moi, s’il te plaît, dit-il d’une voix aussi douce que ferme.
Je les regarde monter dans le taxi et disparaître dans le trafic. La limousine me
ramène au penthouse et j’arrive tout juste dans ma chambre lorsque je reçois un
message.
De : Wes Channing
À : Mia Saunders
Tu es libre pour parler ?

1. Directrice administrative et financière.


2. Ressources humaines.

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Chapitre 5

Je relis le message une bonne dizaine de fois, hésitant entre les deux possibilités
qui s’offrent à moi. Je peux l’ignorer et attendre d’être moins fatiguée sur un
plan émotionnel ou alors je peux l’appeler et laisser la voix de Wes ôter toute la
culpabilité que je ressens après la scène entre Hector et Tony. J’espère
sincèrement qu’ils vont réussir à régler leur problème. La dernière chose que je
souhaite, c’est m’immiscer entre deux personnes qui s’aiment. C’est triste qu’ils
ne puissent être ensemble, du moins aux yeux de Tony. Peut-être que je peux le
convaincre que le seul moyen d’être heureux est de sortir du placard. À la
longue, ce secret fera trop de mal à Hector et sans doute finira-t-il par partir. En
tout cas, c’est ce que je ferais.
Ma décision est prise. Je tapote deux fois sur mon téléphone, et Wes décroche
après la première sonnerie.
– Coucou ma chérie, ce n’est pas trop tard ? Enfin, là où tu es ? demande-t-il.
Sa voix rauque me rappelle toutes nos promesses chuchotées dans le noir, tous
ses gémissements et ses murmures passionnés. Mon temps avec Alec était super,
mais Wes avait déjà placé la barre trop haut. Le sexe avec lui était tout
simplement fabuleux, et après la soirée que je viens de passer, je rêverais de
m’oublier dans ses bras.
– Ce n’est pas trop tard, non. Je suis à Chicago.
– Ah, la ville des vents. Que fait le mec ?
Je ne suis pas certaine qu’à ce stade notre amitié soit assez forte pour supporter
que nous parlions de nos autres conquêtes. Cependant, comme je n’ai pas
l’intention de coucher avec Tony, je suppose qu’il ne compte pas.
– Il dirige une chaîne de restaurants.

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– Ah, je sais combien tu aimes manger un bon plat fait maison.
Instantanément, je revois Wes préparer mon petit déjeuner, torse nu, si bronzé et
musclé, si délicieux que je préférais le manger lui plutôt que ses pancakes.
Je réalise soudain que ça fait un moment que je n’ai rien dit.
– Euh, ouais, tu me connais.
– Oui, je sais. Il te cuisine de bons plats ?
– Non, pas encore. J’espère qu’il s’y mettra bientôt.
J’entends un long soupir à l’autre bout du fil, et un silence s’installe entre nous.
– Est-ce que tu es avec lui… comme tu étais avec moi ? demande Wes.
J’ai beau être vexée qu’il me pose la question, je ne lui dois pas d’explication.
Nous ne sommes pas en couple.
– C’est important ? je chuchote en m’allongeant sur le lit.
– Pour moi, oui.
– Alors non, et je ne le serai jamais.
– Pourquoi ? Je crois savoir que tu as une libido très saine, dit-il d’une voix
amusée.
Wes a eu un mois pour apprendre à me connaître, et sans doute en a-t-il trop
appris. Il s’est frayé un passage derrière les barrières que j’avais érigées autour
de mon cœur et il s’y est creusé une jolie niche douillette. C’est un morceau de
moi qu’il possédera à jamais, même si je ne vais pas le lui dire.
– Parce que je ne pense pas que son partenaire, Hector, serait ravi que je séduise
son mec.
Un rire tonitruant remplit mon oreille. Bon sang, qu’est-ce que son rire me
manque ! C’est le genre de rire qui pourrait mettre fin à des guerres décennales.
– Alors, pourquoi un mec gay a-t-il embauché la plus belle escort de la planète ?
– Espèce de lèche-cul, je rétorque.
Il rit de nouveau, et l’écho résonne jusque dans mon cœur, atténuant la
culpabilité causée par les événements de la soirée.
– C’est un peu tordu. Il est en couple avec ce mec, qui est génial, depuis super-
longtemps, mais il se sent obligé, vis-à-vis de sa famille et de son entreprise, de
jouer le rôle du macho italien chef d’entreprise et champion de boxe.

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– Merde. Ça ne doit pas être facile. D’un point de vue professionnel, je
comprends qu’il veuille que sa vie sentimentale reste privée. S’il peut se
permettre de t’embaucher pendant un mois, c’est qu’il est plein aux as et que la
presse lui colle aux fesses. Sans rire, Mia, l’argent c’est cool, mais aucune
somme ne remplace une vie paisible et privée une fois que celle-ci est étalée sur
la place publique.
Je repense au quartier où habite Wes, avec ses hautes haies, ses énormes portails
et les agents de sécurité qui se relaient nuit et jour, puis je pense aux tapis rouges
sur lesquels il déteste aller et au fait qu’il a dû embaucher une escort juste pour
pouvoir travailler en paix, le temps d’un cocktail dînatoire. Je suppose que Wes
comprend ce que traverse Tony, en effet.
– Il y a aussi des histoires de famille. C’est le seul héritier masculin de la fortune
familiale, et s’il n’a pas un fils, le nom de la famille mourra avec lui.
– Bon sang, tu parles d’une pression.
– Ouais. Bref, assez parlé de mon client. Et toi ? Comment avance ton film ?
– Très bien. Gina est l’actrice idéale pour le rôle, dit-il d’une voix pensive qui
ravive ma jalousie. Elle comprend parfaitement ce que j’attends d’elle, poursuit-
il. Je suis content d’avoir modifié le personnage, finalement.
Je me mords la lèvre pour me retenir de lui faire remarquer que c’est moi qu’il a
remplacée par elle, car je sais que ce serait injuste. Le fait qu’il donne mon nom
à un personnage est un véritable honneur. C’est mignon, même. C’est un cadeau
qu’il me fait, et je ne dois pas l’oublier – et surtout je ne dois pas le gâcher avec
ma jalousie. De toute façon, je n’ai aucun droit sur lui, en dehors du fait que
nous sommes amis… qui se veulent du bien.
– Alors, toi et Gina vous entendez bien, hein ? je dis en levant les yeux au ciel et
en essayant de garder un ton plaisant.
– Ouais, elle est cool. Mais elle n’est pas aussi belle que celle qu’elle est censée
incarner, dit-il d’un ton lourd de sous-entendus.
– Ah ouais ?
– Ouais.
– Mais tu aimes jouer avec elle et… enfin, la diriger.
– Pas autant que j’aimerais te diriger.

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– Ah oui ? Qu’est-ce que tu me demanderais de faire ?
Soudain, la conversation vire dans une direction totalement différente et
inattendue.
Je l’entends inspirer par le nez et lorsqu’il parle de nouveau, c’est d’une voix
rauque et pleine de désir.
– Eh bien, d’abord, je mettrais mes mains sur tes genoux et je te dirais de les
écarter. Tu te souviens d’avoir fait ça, Mia ? Je sens encore combien tu étais
mouillée sous mes doigts.
De ma main libre, je dessine des cercles autour de mon genou, du bout du doigt.
– Je me souviens, oui. Et ensuite ?
Il grogne dans le téléphone et je pose le mien une seconde, attrapant le bas de ma
robe pour l’enlever et la jeter de l’autre côté de la pièce.
– Mes mains glisseraient jusqu’à tes pieds, gardant tes jambes ouvertes, juste
pour pouvoir te regarder mouiller davantage. Ensuite, du bout du doigt, je
toucherais ton clitoris. Ça te plairait, ma chérie ?
Je me mords la lèvre en gémissant doucement.
– Bon sang, oui.
– Tu es habillée comment, là ? demande Wes.
– J’ai enlevé ma robe quand tu as commencé à me dire… euh… des
cochonneries. Maintenant, je suis allongée sur le lit, seule dans la maison, en
sous-vêtements. Et toi, tu es habillé comment ?
Je ferme les yeux, me sentant toute légère et étourdie. Je n’arrive pas à croire
que je suis en train de faire ça… mais c’est super-excitant.
– J’ai juste un pantalon de pyjama, le rouge, celui que tu aimes bien.
Oh que oui. Ses pantalons de pyjama sont tissés dans le coton le plus doux au
monde. J’adorais les mettre le matin, après qu’on avait couché ensemble. Je lui
en ai même volé un, mais je ne le lui dirai pas.
– Est-ce que tu es dur, Bébé ?
C’est la première fois que je l’appelle comme ça, et ça me plaît.
– Putain, tu n’as pas idée, Mia. Je mouille, même.
– Utilise ton pouce, frotte-le sur ton gland. Tu te souviens de la sensation de ma
main sur ta queue ?

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– Putain, oui.
– Fais-le. Ferme les yeux et branle-toi, lentement, au début. Imagine que c’est
ma main. Utilise ton pouce pour étaler ton liquide, partout où je promènerais ma
langue. Si j’étais là, je mouillerais toute ta queue puis je la lécherais sur toute sa
longueur, et je titillerais surtout le dessous de ton gland.
Wes gémit et j’entends son souffle accélérer.
– Et moi, qu’est-ce que tu me dirais de faire ?
– Enlève ta culotte, ordonne-t-il.
Je lui obéis et la jette au pied du lit.
– Tu es nue, maintenant, ma chérie ?
– Oui.
Je soulève mon bassin, comme si Wes était sur moi et que j’essayais de coller
mon corps au sien.
– Pose ta main sur ta chatte comme je le ferais si j’étais là. Prends-la bien, tu sais
comment j’aimais faire.
– Comme si elle t’appartenait, je rétorque en faisant comme il me dit.
Le plaisir est déjà intense, il parcourt mon corps en l’électrifiant.
– C’est ça. Ta chatte serait mienne. Et dès que tu commencerais à dessiner des
cercles avec ton bassin, pour te soulager, j’enfoncerais deux doigts dans ton
sexe. Écoute-moi, Mia.
Je lui obéis, plongeant deux doigts entre mes lèvres. Des vagues de plaisir
éclatent dans mon bas-ventre et remontent dans mes seins tendus. Mes tétons
pointent et luttent contre la barrière de dentelle qui les enferme. C’est tellement
bon.
– Maintenant, tu te souviens comment j’ai pris le contrôle de ta chatte quand on
était sur ta moto ?
Je réponds par un grognement en me rappelant comment ses doigts me
fouillaient et s’accrochaient à moi.
– Fais des crochets avec tes doigts, ma chérie, comme je l’aurais fait.
J’essaie, mais je n’y arrive pas.
– Je ne peux pas, j’ai besoin de toi, je dis d’une voix pleine de frustration tout en
continuant de me doigter.

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Je me revois sur ma moto, dans le garage de Wes, sa main dans mon pantalon,
me baisant avec sa passion habituelle.
– Tu approches de l’orgasme, ma chérie ?
– Oh, oui… Je te veux… en moi, Wes…
Une série de jurons parvient dans mon oreille et son souffle accélère encore. Le
mien l’imite bientôt et nous continuons de nous masturber ensemble, perdus
dans la passion et dans nos souvenirs.
– Si j’étais là, mes doigts appuieraient sur ce point au fond de ta chatte et je le
chatouillerais. Je rajouterais ma langue, aussi, pour titiller ton clito. Il serait enflé
et dur et je le sucerais jusqu’à ce que ton sexe se contracte sur mes doigts.
– Oui, Wes, je vais jouir, Bébé. Je vais jouir tellement fort. Je te veux avec
moi… je gémis en penchant la tête en arrière.
– Je suis là, ma chérie. Ce sont mes doigts qui sont en toi. Maintenant, frotte ton
clito avec ton pouce. Putain, Mia, je vais jouir aussi, là, avec toi. C’est tellement
bon avec toi, Mia. Je n’ai jamais connu mieux. Putain ! hurle-t-il dans le
téléphone.
Je fais ce qu’il me dit, étalant ma mouille sur mon clitoris.
C’est ce qui me manquait car, soudain, une vague d’énergie et de lumière déferle
dans mes veines et je jouis. Tout mon corps se contracte et un cri m’échappe
tandis qu’à l’autre bout du fil, j’entends Wes grogner de plaisir aussi.
Nous revenons sur terre lentement. Seuls nos souffles saccadés rompent le
silence.
– Mia, murmure Wes sur un ton plein d’admiration.
Dans sa bouche, mon prénom est comme une bénédiction. Si seulement je
pouvais l’entendre tous les jours.
– Bon sang, Wes, on vient de baiser au téléphone, je dis en riant. Tu sais, je
n’avais jamais fait ça, avant.
– Ah bon ? s’exclame-t-il, surpris.
Je soupire et repousse la couette pour me glisser sous les draps. La journée a été
longue, et après un orgasme comme ça, je ne rêve que d’une chose : me blottir
contre l’homme qui m’a fait jouir et m’endormir en entendant battre son cœur.
– Oui, vraiment, je dis avant de bâiller et de fermer les yeux.

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– J’ai hâte qu’on remette ça, dit-il.
– Moi aussi, je réponds en bâillant de nouveau.
– Tu me manques, Mia.
Je souris et je colle le téléphone à mon oreille pour entendre toutes les nuances
de sa respiration. Je me sens en sécurité en l’entendant, comme s’il était là avec
moi.
– Tu me manques tout le temps, Wes, je dis d’une voix endormie, imaginant déjà
nos retrouvailles.
– Fais de beaux rêves…
C’est la dernière chose que j’entends avant de sombrer dans un profond
sommeil.
*
* *
Lorsque je me réveille le lendemain matin, je tiens encore dans ma main mon
téléphone, qui n’a plus de batterie. Je roule sur le dos et fixe le plafond en
repensant à hier – à la soirée mais aussi à toute la journée, sans oublier le repas
et le coup de fil inattendu de Wes. Au moins, la fin de journée aura été
satisfaisante. Je me demande ce que Tony et Hector ont fait et s’ils ont réussi à
régler leur problème. Ces deux-là sont faits pour être ensemble, et pour toujours.
Pas comme moi et l’artiste français que je me suis tapé pendant un mois et que je
ne reverrai sans doute jamais. Cela dit, il me manque, mon Frenchie. Je lui suis
éternellement reconnaissante pour ce qu’il m’a appris durant le temps que nous
avons passé ensemble. Non seulement nous avons créé des œuvres d’art
magnifiques mais il m’a appris un tas de choses sur moi-même, sur l’amour, sur
la vie. Peut-être que je peux utiliser ses enseignements pour aider Tony et Hector
– en fin de compte, l’amour c’est l’amour, et on ne choisit pas de qui on tombe
amoureux et combien de temps l’amour durera. Je suis persuadée que le leur est
fait pour durer toujours, mais pour cela, il va falloir que quelque chose change.
Je réfléchis à cela pendant que je me douche et que je m’habille, et j’y pense
encore quand je sors pour aller dans la cuisine. J’ouvre la porte de ma chambre
et je suis accueillie par une délicieuse odeur d’œufs et de bacon, mon estomac
gargouille lorsque je m’assieds sur le tabouret de bar.

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– J’ai l’impression que votre ventre est heureux de me voir, si ?
– Si ! Comment allez-vous ce matin, Renaldo ?
– Très bien, Miss Mia. Et vous ? Vous avez l’air très reposée, dit-il en souriant et
en me lançant un clin d’œil.
– Oui, j’ai très bien dormi, je réponds en souriant à mon tour et en repensant à
mon appel avec Wes.
Bon sang, ce mec sait parler sexe. En quelques minutes, il m’a fait passer de zéro
à un million sur l’échelle de l’excitation. J’étais tellement comblée que je me
suis endormie sans avoir raccroché. Dès que mon téléphone sera rechargé, je lui
enverrai un message pour le remercier et lui dire combien j’ai aimé notre
discussion – et je ne parle pas seulement du sexe. J’aime parler à Wes, c’est
toujours très naturel, comme si nous avions toujours été amis. Avec lui, les
choses sont simples, et j’espère que ça restera ainsi pour le reste de l’année. Seul
le temps nous le dira.
Renaldo pose devant moi une assiette fumante d’œufs brouillés, de bacon et de
fruits. Lorsque Tony et Hector entrent, main dans la main avec un sourire
satisfait, j’ai la bouche pleine.
– J’ai comme l’impression que je ne suis pas la seule à avoir passé une bonne
nuit, je dis en souriant.
Je ne sais pas pourquoi j’ai dit ça. Apparemment, il y a quelque chose chez ces
mecs qui me donne envie de tout leur dire, or ça ne me ressemble vraiment pas.
Tony hausse les sourcils tandis qu’Hector s’assied à côté de moi, pose ses deux
coudes sur le bar et appuie sa joue sur une main.
– Ah ouais ? Je veux bien te raconter ma soirée, mais d’abord, il faut que tu
m’expliques pourquoi ta soirée a été géniale alors que tu es rentrée ici toute
seule.
J’y réfléchis une seconde en mâchant une bouchée d’œufs que je fais passer avec
une gorgée de café.
– Ça marche.
C’est ainsi qu’Hector et Tony apprennent l’existence de Wes.

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Chapitre 6

– Et tu es partie ? Tu es dure, meuf, rétorque Hector d’une voix indignée.


Je n’ai même pas expliqué la situation de mon père ni pourquoi je suis escort
qu’il est déjà du côté de Wes. Je vous jure, les hommes… ils n’entendent que ce
qu’ils veulent. Peu importe qu’ils soient gays ou non, il leur manque tout de
même ce gène qui leur permettrait de comprendre les femmes et les raisons de
leurs actes.
– Hector, tu ne comprends pas, je réponds en secouant la tête. J’étais obligée de
partir, je n’ai pas eu le choix.
– Eh bien explique-moi pourquoi, et vite, ma belle. Si Tony me laissait comme
ça, je serais anéanti.
– Non, ce n’est pas comme ça entre Wes et moi.
– Ah ouais ? C’est comment ?
– On est amis.
– Des amis qui baisent au téléphone ? Des amis qui passent un mois à coucher
ensemble…
J’essaie de l’interrompre, mais il lève la main pour me faire taire.
–… dont l’un supplie l’autre de rester avec lui… pour toujours !
– Il n’a pas dit ça ! Oui, il m’a demandé de rester et oui, j’ai refusé, même si ça
m’a déchirée… mais c’était impossible !
– Alors, pourquoi tu as dit non ? demande-t-il.
Je n’ai pas le temps de répondre, car un bruit de talons frappant le carrelage
retentit dans le couloir. Je retiens ma respiration, essayant de me rappeler ma
mission, histoire que la sœur de Tony ne m’entende pas parler de Wes. C’est
quand même une des nombreuses personnes que je suis censée convaincre.

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– Salut ! J’ai tellement hâte d’aller faire du shopping, aujourd’hui ! s’exclame
Angelina en entrant dans la pièce.
Elle prend d’abord Hector dans ses bras, puis moi.
– Mon frère est déjà au travail ?
– Oui, il est parti il y a environ une heure. Tu veux manger ou boire quelque
chose ? propose Hector.
– Non merci, je suis prête à faire les boutiques ! Et toi Mia ?
Je grogne en tendant le bras pour prendre mon sac à main.
– Ouais, si on veut.
– Tu n’as pas l’air emballée, marmonne Angelina.
Hector ricane et prend Angelina par le bras.
– Elle n’aime pas le shopping, lui confie-t-il.
Angelina me regarde bouche bée, les yeux écarquillés.
– Tu es sûre que tu es une fille ?
– Bien sûr, mais je ne suis pas le genre qui aime faire les magasins. Je le vis très
bien, tu sais.
– Ouais, sauf que ta garde-robe est constituée de jeans, de débardeurs unis et de
t-shirts de concerts. C’est pitoyable. Son pyjama est plus stylé que toute sa
valise, rétorque Hector.
Il n’a pas tort.
– C’est parce que c’est la styliste de Wes qui l’a acheté.
Je regrette immédiatement ce que j’ai dit et je me mords la lèvre.
– Wes ? C’est qui, Wes ? demande Angelina en me scrutant du regard.
– Oh, c’est juste un ami. Mon meilleur ami homo.
Je me sens immédiatement coupable de mentir à propos d’un homme aussi
génial que Wes.
– Hmm, d’accord, dit-elle en rejetant ses magnifiques cheveux par-dessus son
épaule. Bref, allons-y !
Nous la suivons à l’ascenseur et, dans son dos, Hector me lance un regard
désapprobateur. Je grimace et le regarde d’un air coupable en articulant «
désolée ».
*
* *

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* *
Hector et Angelina m’ont enfermée dans une cabine d’essayage chez Gucci. Ils
m’ont obligée à essayer toute la collection, des robes aux jeans en passant par les
jupes – des vêtements magnifiques et branchés que je n’aurais jamais envisagé
d’acheter moi-même. Chaque fois que j’essaie une tenue, je dois sortir de la
cabine et faire un petit défilé pour la leur montrer. Je monte même sur une petite
estrade devant un mur de miroirs, mon pire cauchemar, pour leur permettre de
commenter la tenue dans les moindres détails et me tripoter comme un animal en
cage. Certes, les vêtements qu’ils décrètent comme « essentiels » me vont bien,
mais je trouve tout le processus très dégradant.
Durant tout ce temps, Angelina ne cesse de parler de son frère et de notre
relation, et je commence à fatiguer.
– Alors, est-ce que Tony et toi avez fixé une date pour le mariage ? demande-t-
elle.
– Pas encore, non, je réponds en secouant la tête.
Elle tire le débardeur que j’ai essayé pour l’aplatir sur ma taille.
– Ah bon ? Mais vous vous connaissez depuis super-longtemps, non ? Tony a dit
que vous vous êtes séparés et remis ensemble plusieurs fois.
– Oui, on peut dire ça comme ça.
– Je ne comprends pas pourquoi vous attendez. Maman a dit qu’elle allait vous
en parler, à tous les deux, pour vous convaincre de vous marier ce mois-ci, tant
que tu es là, histoire que ce soit officiel.
Hector et moi nous figeons et dévisageons Angelina.
– Quoi ? je demande.
Hector retrouve sa voix avant moi.
– Tu n’es pas sérieuse ? demande-t-il, horrifié.
Il ne semble pas gérer très bien la situation.
– Hector… je préviens.
Angelina hausse les épaules.
– Ce n’est pas la fin du monde, si ? Vous vous aimez, vous ne rajeunissez pas et
Maman veut un héritier masculin. Elle déjeune avec Tony aujourd’hui pour lui
en parler, d’ailleurs.

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Je suis bouche bée. Soudain, il fait beaucoup trop chaud dans la cabine
d’essayage.
– Euh, Tony et moi n’avons pas vraiment pensé aux détails.
– Pas grave. Maman obtient toujours ce qu’elle veut, de toute façon. N’est-ce
pas, Hector ?
Elle se tourne pour regarder Hector, qui recule lentement jusqu’à rencontrer une
chaise sur laquelle il se laisse tomber.
– N’est-ce pas ? répète Angelina.
Il hoche la tête, pose ses coudes sur ses genoux et baisse la tête pour passer ses
mains dans ses cheveux. La dernière fois que j’ai vu un homme dans cet état,
c’était Wes quand je lui ai dit que je ne pouvais pas rester avec lui. Je descends
de l’estrade et vais vers lui, m’agenouillant à ses pieds. Lorsqu’il lève la tête, je
vois des larmes dans ses yeux. Je pose mes mains sur ses joues et secoue la tête
pour lui montrer que ça n’arrivera pas. C’est hors de question, c’est impossible.
Tony l’aime ! Il ferme les yeux et respire par le nez tandis qu’une larme solitaire
coule sur sa joue.
– Ce ne sera jamais moi, chuchote-t-il.
– Mais c’est toi, je lui promets fermement. C’est toi qu’il aime.
Hélas, nous avons tous les deux oublié que nous ne sommes pas seuls.
– Je le savais ! s’exclame Angelina en s’asseyant sur la chaise à côté d’Hector.
Tout à coup, il se transforme. Il se tient plus droit et ses mains se referment sur
ses genoux. Comme s’il redevenait le Hector cool, calme et mesuré que tout le
monde connaît et adore, pas cet homme au cœur brisé qui affronte de sérieux
problèmes avec son partenaire.
– Euh, Hector traverse juste une passe difficile, et je l’aide à…
– Tu aides Tony et lui à berner toute la famille à propos du fait qu’ils sont
ensemble.
Alors là ! Je ne m’attendais pas à ça.
– Je ne vois pas de quoi tu parles… essaie-t-il de manière peu convaincante.
– Ne te fatigue pas. Tu crois que je ne sais pas que mon frère et toi êtes ensemble
depuis la fac ? Tu me prends pour une idiote ? Je suis la meilleure amie de Tony.
Enfin, après toi, bien sûr.

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– Il te l’a dit ?
Elle secoue la tête.
– Non, mais je connais mon frère. Et je te connais. Aucun de vous deux n’a
jamais été en couple. De temps en temps, Tony ramène un rencard au dîner de
famille, mais j’ai toujours vu que ces filles ne lui plaisaient pas. Cela dit, je dois
avouer que lorsque tu es arrivée, Mia, je me suis un peu inquiétée, dit-elle. S’il y
a une femme qui peut rendre un gay hétéro, c’est bien toi.
– C’est un compliment vraiment étrange, mais… merci, je crois. Alors, qu’est-ce
qu’on fait maintenant ? je demande en m’asseyant par terre.
Angelina hausse les épaules.
– Tony doit le dire à maman.
Hector secoue la tête.
– C’est impossible. Il ne veut pas décevoir Mona et la famille. En plus, il y a la
boîte à gérer et le club de boxe qu’il ne veut pas laisser tomber.
– On s’en fout, de la boxe. Il n’en fait presque plus, de toute façon, depuis que
papa est mort. Et puis, Rocko gère le club, Tony peut participer autant qu’il veut,
mais il n’a aucune d’obligation. C’est une excuse bidon, ça.
– Et la boîte ? insiste Hector. Tu crois qu’une entreprise comme Fasano’s peut
supporter que son PDG annonce qu’il est gay ?
Angelina hausse les épaules.
– Le travail, c’est le travail. Je me fiche de ce que pense la boîte.
– Mais pas Tony. L’entreprise de son père est tout pour lui, soupire Hector.
– Non, tu te trompes, je dis en posant ma main sur son genou. C’est toi qui es
tout pour lui.
Hector se lève brusquement.
– Sans vouloir te vexer, Mia, si c’était vrai, tu ne serais pas là, dit-il en tournant
les talons et en quittant la pièce.
Je me lève pour m’asseoir à sa place, à côté d’Angelina.
– Quel bazar !
– C’est clair. Ça fait longtemps que je me doute qu’ils sont ensemble, mais c’est
la première fois que je décide de m’en mêler. Mia… dit-elle en me regardant, ses
yeux bleus remplis de larmes. Mamma pense vraiment que tu es la bonne, tu

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sais. Elle est convaincue qu’elle doit vous marier pour que vous lui donniez vite
un héritier.
– Eh, ne t’inquiète pas. Je vais parler à Tony et Hector. On va trouver une
solution. Ça va bien se passer. Je ferai mine de le plaquer devant tout le monde,
ou quelque chose comme ça. Ce n’est pas la peine de te mettre dans tous tes
états.
– Ce n’est pas ça, c’est juste que… Rocko et moi essayons d’avoir un bébé
depuis un certain temps, maintenant. Maman ne m’en parle jamais, mais elle n’a
qu’une idée en tête, c’est que Tony ait un fils pour perpétuer le nom de famille.
– Ça ne doit pas être facile, je dis en lui caressant le dos. C’est dur de toujours
passer en second.
– Ouais. En même temps, on est cinq, Mia, dit-elle d’une voix épuisée. Il y en a
toujours une qui est deuxième, troisième, quatrième et cinquième. C’est juste
que Tony est toujours le premier.
Je comprends ce qu’elle dit. Après ce premier dîner de famille, j’ai vu que Mona
regardait son fils comme le Messie, j’ai vu son amour pour ses petits-enfants…
Si Tony a été jusqu’à embaucher une escort pour faire semblant d’être sa
fiancée, c’est que sa mère a une sacrée emprise sur toute la famille.
– Que doit-on faire, à ton avis ?
Angelina se lève et ramasse les vêtements qu’on a choisis tandis que je retourne
dans la cabine pour me rhabiller.
– Pour maman, je ne sais pas encore. Ce qui est certain, c’est que le club de boxe
s’en sortira très bien sans Tony. Quant à la boîte, eh bien… je pense qu’il
faudrait qu’on embauche une chargée des relations presse. Quelqu’un qui fera du
coming out de Tony une histoire banale afin que les médias ne s’y intéressent
pas. Je peux consulter mon équipe et trouver des idées. Quoi qu’il en soit, c’est
notre entreprise, dit-elle d’une voix pleine d’assurance. L’homosexualité du
PDG va sans doute susciter des rumeurs pendant un certain temps, mais on a un
bon produit. On ne va ni faire faillite ni perdre nos distributeurs. Les gens
adorent les recettes de Mamma, et les prix sont idéaux pour les familles aux
revenus modestes.

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– C’est vrai que la nourriture est délicieuse. C’est le meilleur restaurant italien
que je connaisse.
– Exactement ! Il faut simplement que Tony arrête d’essayer de faire plaisir à
tout le monde, tu comprends ?
Je hoche la tête, car je vois exactement ce qu’elle veut dire, même si je ne vais
pas l’admettre devant une étrangère. Depuis que ma mère est partie, j’ai tout fait
pour garder la famille soudée : m’occuper de papa quand il était ivre mort, aider
Maddy à finir le lycée… Aucun souci, j’ai couché mon père et j’ai aidé Maddy
tous les soirs avec ses devoirs, veillant toute la nuit pour finir les miens.
Par ailleurs, je me suis toujours assurée que nous avions de quoi manger et un
toit au-dessus de nos têtes. À seize ans, j’étais serveuse dans les casinos pour me
faire du fric. Certains soirs, je rapportais les restes du buffet et, pour une fois,
nous mangions bien. Même papa me félicitait d’avoir fait du « bon boulot ».
J’ai tellement travaillé avant l’âge de dix-huit ans que le jour où je suis devenue
majeure, j’avais déjà assez d’heures pour bénéficier de la Sécurité sociale.
Aujourd’hui, encore une fois, je ne suis escort que pour rembourser la dette de
mon père. Ce serait donc parfaitement hypocrite de ma part de dire à quelqu’un
comment vivre sa vie alors que j’ai aussi mal géré la mienne. Cependant, les
choses changent et la situation s’améliore peu à peu. J’ai des ressources, à
présent. Des gens qui se soucient de mon bien-être et qui m’aideraient en cas de
besoin, Maddy, Ginelle, Millie, Wes et même Alec.
– J’aimerais aider Tony et Hector, de quelque manière que ce soit.
– Au fait, comment ils t’ont rencontrée ?
Je ne suis pas certaine de pouvoir le lui dire. Si je lui dis que je suis escort, est-ce
qu’elle va me voir différemment ? D’habitude, lorsqu’on entend ce terme, on
pense immédiatement à une prostituée. Or, dans mon cas, ce n’est pas vrai.
Enfin… techniquement, j’ai couché avec Wes et Alec et… quand je l’ai
rencontré, je dois admettre que j’ai un peu fantasmé sur Tony, mais ce n’est plus
le cas à présent.
Angelina attend patiemment que je décide de ma réponse, ce que j’apprécie. Il se
dégage de cette femme une tranquillité et un calme qui sont admirables. J’étudie

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son beau visage un instant, ses yeux sont tendres, généreux et si bleus qu’on a
envie de se noyer dedans.
– Je suis escort.
Elle hausse les sourcils et retient son souffle. Puis, plutôt que de m’insulter, elle
laisse tomber sa tête en arrière et éclate de rire, si fort qu’elle en pleure. Son rire
est contagieux et je ne peux me retenir de me joindre à elle.
Lorsque nous retrouvons Hector à la caisse, nous pleurons à chaudes larmes.
– Qu’est-ce qui vous est arrivé, bon sang ? demande-t-il en nous regardant tour à
tour.
Nous essayons toutes deux d’arrêter de rire pour lui répondre, mais ce n’est
qu’au bout de trente bonnes secondes que j’y parviens.
– Elle a appris comment je gagnais ma vie, je glousse.
Il écarquille les yeux et saisit Angelina par le coude pour la tirer contre lui.
– Ce n’est pas ce que tu crois, marmonne-t-il.
– Quoi ? Que vous payez Mia pour que Mamma vous fiche la paix et que Tony
puisse continuer à vivre sa vie ?
– Ok, eh bien, si c’est précisément ce que tu crois, alors.
Nous nous remettons toutes les deux à rire pendant qu’Hector paie la vendeuse
et nous entraîne dehors. Une fois dans la limousine, nous retrouvons enfin notre
calme.
– Tu ne dois rien dire à Mona, dit Hector à Angelina. Elle serait anéantie. J’ai
promis à Tony qu’on tiendrait le mois et je soutiens sa décision. Il pense que
Mona est incapable de comprendre ce que nous représentons l’un pour l’autre. Il
sait que, pour elle, le véritable amour n’est possible qu’entre un homme et une
femme.
– Même si ça vous oblige à cacher votre amour toute votre vie ?
Hector s’affaisse dans le siège et fronce les sourcils. Il ferme les yeux et semble
réfléchir. Angelina et moi attendons patiemment.
– Si c’est le prix à payer pour avoir l’amour de ton frère, alors ça me suffit. Je
l’aime, je ferais n’importe quoi pour lui.
*
* *

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Il s’avère qu’Hector n’a pas menti. Il joue le jeu à merveille. Durant la semaine
qui suit, nous nous rendons à divers événements professionnels et familiaux. Je
passe la plupart de mon temps avec Hector, ne servant que de figurante auprès
de Tony lorsqu’il lui faut quelqu’un avec qui poser pour les photos. Ça m’énerve
terriblement, et pas parce qu’on m’utilise pour mon physique. Je suis dégoûtée,
car chaque fois que Tony me présente comme sa fiancée et que les gens
s’émerveillent, le cœur d’Hector se brise un peu plus.
Je ne sais pas encore quoi, mais il faut faire quelque chose.

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Chapitre 7

Hector arrive dans la cuisine en glissant, en chaussettes, sur le carrelage.


– Elle sera là dans une minute ! annonce-t-il. Où sont mes chaussures, bon
sang ?
– Papi, pourquoi tu as besoin de mettre des chaussures, de toute façon ? dit Tony
en riant.
– Il ne comprend vraiment rien, me dit-il avant de s’arrêter net devant moi. C’est
ça que tu mets ? s’exclame-t-il en reluquant d’un air dédaigneux mon jean et
mon débardeur noir.
Apparemment, je ne devrais pas être habillée comme ça.
– Ta mère vient faire à manger, ce n’est pas une grande occasion, si ? je
demande en tirant sur mon débardeur pour m’assurer qu’il couvre bien mon
ventre.
J’ai décidé de laisser mes cheveux lâches, parce que c’est un de mes plus beaux
atouts, en dehors de mes seins, qui sont plutôt canon.
Tony me regarde du coin de l’œil avant de hausser les épaules.
– La police du style, c’est Hector. Pour moi, ta tenue est parfaite.
– Tu vois, pour lui je suis parfaite, je dis en tirant la langue à Hector. C’est toi
qui te comportes comme un taré, pourquoi tu en fais tout un plat ?
Hector m’ignore et s’en va en marchant d’un pas lourd et agacé.
– Sans rire, qu’est-ce qui lui prend ?
– T’inquiète, il est juste obsédé par l’idée de convaincre Mamma qu’il est
l’homme parfait.
– Et c’est le cas, tu n’es pas du même avis ?

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– Bien sûr que si, dit-il en fronçant les sourcils. Je ne serais pas avec lui depuis
toutes ces années si je ne le pensais pas.
C’est le moment de vérité. Cela va faire deux semaines que je vis avec Tony et
Hector, et je crois avoir compris la dynamique de leur couple. Hector est le plus
passif et le moins dominant des deux, tandis que Tony est le mâle alpha. Peut-
être que je peux lui faire comprendre que s’il ne dit pas la vérité à sa mère et à sa
famille dès que je serai partie, il risque de perdre une chose qu’il a toujours
considérée comme acquise, la confiance d’Hector.
– Écoute, Tony, je trouve ça chouette d’être ici et j’adore passer du temps avec
Hector et toi.
– Nous aussi, on aime t’avoir avec nous, Mia. Vraiment. Tu es la bienvenue
quand tu veux. On est touchés que tu nous aides à gérer ce problème.
– Tu sais que tu me paies pour le faire ? je réponds en souriant. C’est juste que…
je me demandais si… tu n’as jamais envisagé de faire ton coming out ?
Le sourire de Tony se transforme en grimace.
– Écoute-moi une seconde.
Il s’adosse au plan de travail et croise les bras. Bon sang, quels bras ! J’ai beau
savoir qu’il est homo, je ne peux m’empêcher de baver devant son corps de rêve.
– Angelina est au courant.
Tony écarquille les yeux et je m’empresse de me justifier.
– Je ne lui ai rien dit, promis ! Elle l’a compris la semaine dernière quand on
faisait les magasins. Elle a dit qu’elle le savait depuis que vous avez fini la fac.
Tony retient son souffle et se gratte la barbe.
– Bon sang, qu’est-ce que tu as dit ? Est-ce qu’Hector est au courant ?
– Oui, il était là, je dis en regardant mes doigts de pieds vernis par Hector. Ta
sœur se demande surtout pourquoi tu ne leur as pas dit.
– Et qu’est-ce que tu as répondu ?
– Moi ? je m’exclame en secouant la tête. Je n’ai rien dit du tout !
Je ne devrais pas m’énerver, mais je ne peux m’en empêcher. C’est comme si
toute ma frustration avait soudain décidé de jaillir.
– En gros, Hector lui a dit que tu ne voulais pas décevoir ta famille et qu’il
pourrait y avoir des soucis avec le club de boxe et la boîte. Mais surtout, que tu

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t’inquiétais pour ta mère.
Les épaules de Tony s’affaissent et il se tourne face au plan de travail,
s’appuyant dessus, comme si le poids de toute la famille Fasano pesait sur ses
épaules.
– Tu sais, Mia, c’est épuisant de toujours se cacher, de s’inquiéter de qui pourrait
le découvrir, de la réaction de Mamma et de la famille. De la réaction du public.
Je ne supporte pas l’idée de faire du mal à ceux que j’aime et à Hector juste pour
soulager un désir égoïste.
Je contourne le bar pour aller jusqu’à lui et je pose mes mains dans son dos.
– Ce n’est pas égoïste de vouloir être avec la personne que tu aimes, Tony.
– Ah non ?
– Non. C’est ton droit, en tant qu’être humain. Et Hector t’aime. Plus que tout, il
aimerait que tu cries ton amour pour lui au monde entier ! Ou du moins, que tu
lui donnes la permission de le faire à ta place, j’ajoute en riant.
Tony se tourne et me prend dans ses bras, ses bras magiques, chauds, forts et
protecteurs. Ils sont comme je les avais imaginés. Les câlins de Tony sont
probablement les meilleurs au monde.
– Je ne sais pas quoi faire, chuchote Tony dans mes cheveux.
– Bien sûr que si. Tu l’as toujours su, il ne te reste plus qu’à le faire.
– Le bon moment ne se présente jamais, répond-il en secouant la tête.
Je recule pour le regarder dans les yeux.
– Ce ne sera jamais le bon moment pour faire du mal à quelqu’un, je dis en
posant ma main sur son cœur. Mais lorsque ce sera fait, tu n’auras plus jamais à
le refaire. Tu n’auras plus à t’en soucier. Tu passeras à autre chose. Tout le
monde passera à autre chose.
– Et le club de boxe ?
– Angelina dit que tu n’es plus très impliqué, de toute façon, et que ça ne regarde
personne.
Il penche la tête sur le côté et me regarde droit dans les yeux. J’ajoute :
– Tu sais, étant donné que tu es un des plus gros sponsors, je ne pense pas qu’ils
prendront le risque de te perdre. Et puis, tu t’es vu ? Tu es un géant et tu es

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canon. Tout le monde – et je dis bien tout le monde – veut continuer de voir ton
corps en sueur sur le ring, que tu sois gay ou non, je conclus avec un clin d’œil.
Tony éclate de rire en passant sa main dans ses cheveux.
– Et la boîte ?
– Eh ben, Angelina dit qu’en tant que directrice marketing, elle peut embaucher
une chargée de relations presse qui fera en sorte que ça ne reste pas longtemps
dans les journaux, et qu’après ça les affaires reprendront leur cours normal. Elle
pense que la nourriture est trop bonne et trop abordable pour que l’orientation
sexuelle du PDG ait un impact sur les ventes.
Il soupire, puis ouvre le frigo et en sort une bière. Il la décapsule et, en deux
énormes gorgées, il la vide. Regarder cet homme boire et manger est vraiment
hors du commun.
– Et Mamma ? Et toute la famille ? Les choses ne sont pas si simples… dit-il
sèchement.
Je hoche la tête.
– Ce sera dur, et elle va peut-être s’énerver, voire pleurer ou te jeter quelque
chose à la figure. Ta mère est vraiment féroce !
Il retrouve son magnifique sourire étincelant.
– Hector et toi avez parlé d’avoir une famille ? je demande.
Je meurs d’envie de savoir ce dont ils ont parlé depuis que je suis arrivée, mais
je n’ai pas encore osé poser la question.
Tony prend une autre bière et jette la capsule sur le plan de travail, à côté de la
première.
– Ouais. Il dit qu’il veut des enfants et qu’il les veut bientôt, dit-il en souriant
jusqu’aux oreilles. Le truc, c’est qu’il veut être marié ou avoir une sorte de
cérémonie officielle avant.
– Je le comprends. Si vous avez des enfants, c’est bien d’être marié avant, tu ne
penses pas ?
– Peut-être, mais je ne nous ai jamais vus nous marier. C’est un peu vieux jeu et
officiel, je trouve. Notre relation semble tellement évidente… je n’ai jamais
ressenti le besoin d’en faire tout un plat, tu vois ce que je veux dire ?

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– Est-ce qu’Hector voit les choses de la même manière ? Parce que j’ai beau le
connaître depuis à peine deux semaines, il m’a donné l’impression qu’il adorait
les grandes occasions. Je ne serais pas surprise qu’il veuille une grande
démonstration d’amour en public.
– Tu passes beaucoup trop de temps avec Angie, Mia. Tu es passée dans leur
camp.
– Absolument pas ! je réponds en secouant la tête. Si je me marie un jour, ce qui
est peu probable, j’irai à Las Vegas.
Tony me pointe du doigt en souriant jusqu’aux oreilles.
– Tu vois ?! Ça, je comprends. Un mariage à Las Vegas, c’est parfait !
– Il faudra me passer sur le corps, dit la voix de Mona Fasano.
– Mamma ! On ne t’a pas entendue entrer, dit Tony en allant vers elle et en
l’embrassant sur chaque joue avant de la prendre dans ses bras.
Hector se tient derrière elle, le regard meurtrier. Je secoue la tête en écarquillant
les yeux pour lui faire comprendre que ce n’est vraiment pas ce qu’il pense.
Mona vient vers moi, me fait la bise et me tient à bout de bras, le regard aussi
foudroyant que celui d’Hector.
– Tu es parfaite pour faire des bébés, dit-elle en frappant dans ses mains. Hector,
mon garçon, dit-elle par-dessus son épaule.
– Oui, Mona.
– Que cuisine-t-on ce soir ? demande-t-elle.
Elle pose une main sur sa joue et le regarde avec une tendresse évidente. Elle
l’aime comme un fils, personne ne peut en douter. J’espère que ça l’aidera quand
elle apprendra la vérité, si Tony se jette à l’eau un jour.
– Des enchiladas !
– On ne mange pas italien ? je demande, surprise que ce ne soit pas la mère
italienne par excellence qui nous prépare à manger.
Mona secoue la tête.
– Non, lorsqu’Hector et moi cuisinons ensemble, nous puisons dans son héritage.
Ça me permet d’élargir mes compétences, et un jour, j’inventerai une recette
pour le restaurant qui mêlera les cultures mexicaine et italienne, déclare-t-elle en
me poussant par les hanches pour me faire asseoir sur un tabouret. Toi, tu

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t’assieds là, et nous allons discuter pendant qu’Hector et moi faisons à manger.
Capisce1 ?
Ça me va. Tony me tend une bière et prend place à côté de moi.
– Alors, c’est quoi cette histoire de mariage à Las Vegas ?
Mamma Mona n’y va pas par quatre chemins.
– Mamma, on discutait, c’est tout. Ça ne veut rien dire, dit Tony en regardant
Hector au moment où Mona nous tourne le dos. Je ne m’enfuirais jamais pour
épouser Mia. Jamais, jure-t-il d’une voix rauque.
Hector ferme lentement les yeux, et lorsqu’il les ouvre, ils sont de nouveau
pleins d’amour et d’espoir. C’est une chose si belle à voir, j’espère que la honte
que ressent Tony ne va pas finir par leur coûter leur relation.
– Tant mieux, répond Mona. Parce que tu es un bon catholique. Tu te marieras à
Saint Peter, dans notre église. Là où ton père et moi nous sommes mariés, dit-
elle d’une voix pleine de fierté. J’ai longtemps eu peur que tu ne te maries
jamais, mais maintenant que nous avons Mia…
Elle tourne la tête vers moi et me sourit généreusement, brisant mon cœur en
mille morceaux.
– … notre famille sera au complet et tu porteras notre nom.
Elle pose la cuillère en bois qu’elle tient à la main, se tourne et prend son fils
dans les bras.
– Ton père et moi sommes tellement fiers de toi. S’il était là, aujourd’hui, il vous
donnerait sa bénédiction.
Elle essuie ses larmes, se racle la gorge et se remet au travail. Je vois Hector
déglutir, ravalant ses émotions.
– En parlant d’église, le père Donahue sera ravi de vous unir. Mais il faudra que
vous suiviez une préparation au mariage, avant. Pourquoi ne pas commencer ce
week-end ?
L’église ? Une préparation ? Je secoue la tête.
– Euh… je ne sais pas trop.
– Mamma, on n’a pas fixé de date. Et on n’a pas parlé de nos religions.
Mona lève brusquement la tête.

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– Quoi ? Comment ça ? C’est une des premières choses dont il faut parler dans
un couple. Mia, ma chère, tu es catholique ?
– Je ne suis rien du tout. Je, euh… Je n’ai pas eu d’éducation religieuse, je dis, et
Mona me dévisage froidement.
– Tu es baptisée ?
– Non, je réponds sèchement, prise d’angoisse.
– As-tu déjà été mariée ? demande-t-elle en posant une main sur sa hanche tandis
que l’autre tient la cuillère.
Je secoue la tête.
– Mon fils, il va tout de suite falloir qu’elle commence à venir à l’église avec
nous. Pour se marier, il faut être bien vu à Saint Peter. Vous aurez sans doute
besoin d’une préparation plus longue pour que le prêtre accepte de marier
quelqu’un qui n’est pas catholique. Il faut qu’on s’y mette tout de suite.
Le poids de ses paroles m’écrase comme un rouleau compresseur.
– Mon Dieu, je dis en me levant, parfaitement paniquée.
Ma poitrine est oppressée, je n’arrive plus à respirer. Il me faut tout de suite de
l’air. Je me précipite vers le balcon, j’ouvre la porte-fenêtre et je respire à pleins
poumons l’air frais du mois de mars. Dieu merci. Enfin non, plus question de
parler de Dieu, ce soir. Je vais m’en assurer.
Deux bras costauds m’enlacent. Cependant, même s’ils sont fabuleux, ce ne sont
pas ceux que je veux. Je veux Wes. Si seulement il était là… il trouverait la
situation hilarante.
– Mia, ne la laisse pas t’atteindre. On va gérer tout ça, dit Tony en me serrant
contre lui.
Je m’oblige à respirer plus lentement et je suis bientôt assez calme pour le
regarder en face.
– Il faut que tu dises la vérité à ta mère, je dis en le poussant légèrement. Ça va
trop loin.
– Je sais, admet-il en laissant tomber sa tête en avant. C’est juste que… c’est
tellement dur, tu sais ?
– Ouais, je sais.
Nous nous asseyons dans des transats, face à face.

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– Je ne suis pas la seule à encaisser. Hector a de plus en plus de mal à supporter
cette situation, lui aussi.
– Comment ça ? demande Tony en levant brusquement la tête.
Je prends ses mains dans les miennes.
– En n’acceptant pas qui tu es, tu ne l’acceptes pas, lui. Je déteste avoir à te le
dire, Tony, mais il le faut. Essaie de voir les choses du point de vue d’Hector. En
gros, c’est comme s’il n’était pas assez bien pour toi, que son amour ne valait
pas la peine de prendre de risques.
Il retient son souffle et recule la tête comme si je venais de le gifler.
– Ce n’est pas vrai ! Je l’aime !
– Ah bon ? Alors, pourquoi tu le caches ?
– Tu sais pourquoi.
– Ça ne suffit pas ! Ce sont des excuses, Tony, et ça fait quinze ans que tu as les
mêmes. Il est temps de te libérer de ce poids et de faire d’Hector ta priorité.
Comme il fait de toi la sienne. Pendant toutes ces années, il aurait pu cracher le
morceau à ta famille, à tes amis, à tes collègues, mais il ne l’a pas fait. Il a
accepté de rester dans l’ombre du moment qu’il était avec toi. Ton bonheur est
ce qui compte le plus à ses yeux, mais je te promets que cette mascarade est en
train de le tuer à petit feu, Tony. Je le vois dans ses yeux, pourquoi toi, tu ne vois
rien ?!
– Merde ! Pourquoi il faut que ce soit si compliqué ?
– C’est la vie, Tony. Grandis un peu. Choisis Hector, quelles qu’en soient les
conséquences. C’est ce qu’il a fait pour toi. Il a fait passer ton bonheur avant le
sien parce qu’il a choisi d’être avec toi.
Sur ce, je me lève et je retourne dans le salon, où nous attendent Hector et Mona.
– Mia… dit Hector d’une voix tremblante.
Cependant, je continue sur ma lancée. Mais je réalise soudain que ma colère est
impolie, pour mes clients, pour Mona. Je m’arrête et je me tourne vers eux.
– Je suis désolée, mais je ne me sens pas très bien, tout à coup. Je vais me
coucher. Merci d’être venue, Mona, je suis sûre que le dîner sera délicieux.
Je tourne les talons pour regagner ma chambre, mais Hector m’arrête et me
prend dans ses bras.

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– Je suis désolé. On est désolés, tous les deux, chuchote Hector, assez bas pour
que je sois seule à l’entendre.
– Je sais, je réponds, tandis que les larmes remplissent mes yeux. J’ai juste
besoin d’un peu d’espace.
Il me lâche et je m’enferme dans ma chambre. Je m’allonge sur le lit, prends
mon téléphone et j’appelle la seule personne que je ne devrais pas appeler. Ça
sonne quatre fois avant que sa messagerie ne décroche.
« Vous êtes sur le répondeur de Wes. Laissez un message après le bip et je vous
rappellerai dès que possible. »
** Biiip **
– Salut, c’est moi, euh, Mia. Je voulais juste…
J’inspire profondément en cherchant mes mots, quelque chose qui ne sonne pas
désespéré.
– … j’avais juste besoin d’entendre ta voix, je dis en fermant les yeux. On
s’appelle bientôt. Ok ? Ciao.

1. « Compris» en italien.

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Chapitre 8

La semaine qui suit, les relations sont tendues au sein de notre trio. Pour la
première fois en trois semaines, j’ai conscience d’être une pièce rapportée. Tony
est stressé et il grogne à peine un bonjour et un au revoir. Hector est plus
aimable, plus doux, mais il est sur les nerfs et c’est sur moi qu’il se défoule. À
l’évidence, les choses ne se passent pas bien entre eux, mais je comprends qu’il
ne veuille pas m’en parler. Je ne suis pas fière du caprice que j’ai fait avec
Mona, le week-end dernier, mais je ne regrette rien de ce que j’ai dit à Tony. À
force de refuser de parler des sujets qui fâchent, leur relation va se détériorer peu
à peu, et c’est sans compter le poids que représente le fait de mentir
constamment aux autres Fasano.
Et puis il y a moi, la nana coincée au milieu.
Je suis en soutif-culotte, face à mon armoire ouverte, perdue dans mes pensées,
alors que je suis censée m’habiller.
– Salut, enfile un jean sexy et un blouson, dit Hector depuis la porte ouverte.
Je ne l’ai même pas entendu entrer. J’attrape mon slim noir tandis qu’il choisit
pour moi un pull vert et un blouson en cuir chocolat. Je m’habille sans dire un
mot. Quand Hector veut parler, il le fait en privé, et en général, il le fait dans
l’intimité de l’autre personne.
– Je sais qu’il m’aime, dit-il en sortant du placard une paire de bottes.
Elles sont à talons hauts et de la même couleur que mon blouson. Surtout, elles
coûtent sans doute plus que la voiture que j’ai achetée à ma sœur. Au lieu de
répondre, je m’assieds sur le lit en silence. Hector s’agenouille à mes pieds,
soulève ma jambe et m’aide à enfiler la botte.

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– C’est juste qu’il a peur de décevoir sa mère. Avant, c’était son père. Joseph
Fasano était un vrai macho italien, en plus d’être très conservateur. Quand il est
décédé, l’an dernier, j’ai pensé que peut-être… il leur dirait. Mona m’adore. Elle
me traite comme son fils.
Il lève la tête et je vois les larmes dans ses yeux.
Je prends son visage dans mes mains.
– Oui, je sais.
– Alors j’ai pensé… commence-t-il en secouant la tête. J’ai vraiment espéré,
mais maintenant, je ne sais plus. Depuis que tu es là, toutes ces conversations de
mariage et de bébés… ça me fait espérer davantage. Tu vois ce que je veux dire
? Ça me fait voir tout ce qu’on devrait avoir depuis longtemps.
Une larme coule sur ma joue et il l’essuie avec son pouce.
– Oh, ma belle Mia, rien de tout ça n’est de ta faute, tu sais.
– Ah non ? Pourtant, c’est moi qui suis ici.
– Seulement parce qu’on t’a fait venir, répond-il en fronçant des sourcils.
– C’est vrai. Tu as raison. Ça n’a rien à voir avec moi, je ricane, lui arrachant un
sourire.
– Allez, viens. Tony et moi voulons te montrer quelque chose.
Il se lève et sort une écharpe vert fluo du placard.
– C’est quoi, cette obsession pour le vert ?
Il écarquille les yeux et soupire.
– Mia, c’est la Saint Patrick. La ville entière fête ça, et nous aussi ! C’est notre
fête préférée. Pas de tristesse, pas de soucis, il n’est question que de s’amuser
avec ses amis et ceux qu’on aime. Tu es partante ?
Un soulagement énorme s’abat sur moi et je me sens infiniment plus légère.
– Et comment !
– Alors viens, señorita, on y va !
*
* *
– Waouh, quel vent ! je m’exclame en sortant de la voiture.
Une bourrasque fait voler mes cheveux dans tous les sens tandis qu’Hector et
Tony me prennent chacun par un bras.

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– C’est pour ça qu’on appelle Chicago la ville des vents. Ne t’en fais pas, dans
une demi-heure, le temps va changer.
Je regarde Tony d’un air dubitatif.
– Je ne plaisante pas, insiste-t-il. J’ai habité ici toute ma vie et je n’ai jamais
connu une journée où la météo est restée la même du matin jusqu’au soir.
– Tu devrais venir en Californie. La météo est parfaite tous les jours, je réponds
en souriant.
– Il y a de la place près de la rambarde, là-bas, dit Hector.
Des centaines de gens sont agglutinés à une rambarde en fer donnant sur l’eau.
– On est où ? je demande en regardant les vagues s’écraser sur les berges
bétonnées.
– On est sur la rivière Chicago, dit Tony d’une voix pleine de fierté.
Je regarde Hector, qui lève les yeux au ciel.
– Ne me regarde pas comme ça, dit-il, c’est le truc de Tony, ça. Moi, je viens de
San Diego.
– Je ne savais pas que tu venais de Californie ! je dis en lui donnant un petit coup
d’épaule.
– Ouais, j’ai été à la fac à Columbia et c’est là que j’ai rencontré Tony. Et je suis
venu vivre ici avec lui.
– Columbia ? Waouh.
Je savais que ces mecs étaient intelligents, mais pas qu’ils avaient été en Ivy
League1. En même temps, moi je n’ai pas terminé la fac et je gagne cent mille
dollars par mois. Pas trop mal pour une serveuse de casino, non ?
Tony lâche mon bras pour se mettre entre Hector et moi et il nous prend par les
épaules.
– Ça va commencer. Mia, regarde le bateau ! s’exclame-t-il, tout excité.
C’est la première fois en une semaine que je vois Tony aussi enthousiaste. Son
magnifique sourire m’a manqué. Il nous serre fort contre lui, puis il regarde par-
dessus son épaule et balaie la foule des yeux.
– Allez, soyons fous !
Il se tourne vers moi et m’embrasse brièvement sur les lèvres, comme un frère
embrasserait sa sœur. Puis il se tourne vers Hector et l’embrasse

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langoureusement, pendant un long moment – ça dure si longtemps que le temps
qu’ils finissent, je suis toute rouge.
– Joyeuse Saint Patrick, Papi, dit Tony avant de lui faire un smack sur les lèvres.
Hector sourit d’un air choqué, émerveillé et amoureux.
Un bateau passe devant nous à toute vitesse, déversant un liquide vert fluo dans
l’eau.
– À quoi il joue, lui, à polluer l’eau comme ça ? je m’exclame, horrifiée.
Tony secoue la tête.
– Ils teignent l’eau en vert ! répond-il en sautillant sur place. C’est la tradition,
ça fait cinquante ans qu’ils font ça. Tous les ans, ils teignent la rivière Chicago
en vert pour la Saint Patrick, ça met des jours à partir. Ce n’est pas toxique, ne
t’en fais pas. Ils utilisent une teinture végétale qui ne fait pas de mal aux
poissons et qui ne pollue pas l’eau. C’est même sponsorisé par le syndicat des
plombiers.
Je dois admettre que c’est sacrément cool. Je n’ai jamais vu une chose pareille,
une ville qui teint sa rivière en vert pour une fête qui n’est même pas nationale ?
Je secoue la tête, émerveillée.
– C’est quoi la Saint Patrick, en fait? je demande.
– Elle marque l’arrivée du christianisme en Irlande, explique Tony en nous
serrant contre lui. Pour fêter ça, tous les dix-sept mars, l’Église catholique
autorise la consommation d’alcool.
Je réfléchis un moment à ce qu’il dit.
– Tu es irlandais ? je demande à Hector, qui secoue la tête.
Je regarde ensuite Tony, qui sourit.
– Non plus, répond-il.
– Alors, pourquoi vous fêtez ça ?
Je ne comprends absolument pas l’importance de cette journée.
– Je suis catholique, Mia. Tout ce qui est lié à ma religion est important pour
moi, dit-il.
Je l’observe un moment en silence. Ses lèvres tremblent et il serre mon biceps
comme s’il se retenait de rire.

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– Tu aimes juste faire la fête, avoue-le ! je m’exclame en enfonçant mon index
dans ses côtes.
– Aïe ! crie-t-il en riant. Allez viens, Mia, notre pub nous attend.
J’écarquille les yeux tandis qu’une bourrasque projette mes cheveux dans le
visage d’Hector.
– Désolée !
Il me lance un clin d’œil et nous poursuivons notre chemin.
– Comment ça, votre pub ? Vous êtes propriétaires d’un pub, aussi ?
– Mais non… Tu prends toujours les choses au premier degré ?
– Non, mais je n’ai pas l’habitude de traîner avec des gens riches. Je me dis que
tout est possible avec votre fortune.
– Allez, il est temps de rencontrer un gentil Irlandais qui s’appelle Jamison.
– Tu sais, je le connais bien, ce Jamison. Je suis ravie de le revoir, je réponds en
souriant.
– Ah, c’est de ça que je parle ! s’exclame Tony en nous ramenant à la voiture.
*
* *
Les mecs m’emmènent au Declan’s Irish Pub. La porte est en bois massif, peinte
en rouge et noir, avec le nom du bar en doré. Il y fait sombre et nous nous
frayons un chemin jusqu’au bar dans le brouhaha de la foule. Trois tabourets
libres semblent nous attendre et, sur le bar, trois verres à shot sont retournés sur
une serviette en papier marquée « réservé ». Tony recule un tabouret, et je
m’assieds.
– Vous réservez vos tabourets dans un bar ? je m’exclame en secouant la tête.
– Tous les ans, chica, répond Hector.
– Je connais le patron, explique Tony.
– Tu penses le connaître, espèce de rital ! dit le barman en lui tendant la main.
Tony se penche par-dessus le bar pour prendre l’homme roux dans ses bras.
– Declan, comment tu vas ?
– Les affaires vont bien, dit-il en désignant le bar bondé.
– C’est la Saint Patrick, espèce d’abruti. Bien sûr qu’il y a du monde, ricane
Tony.

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– C’est qui, la jolie brune ? Elle n’est pas avec toi, ça c’est sûr, dit Declan en
regardant Hector de ses beaux yeux verts.
Hector tend la main et serre celle du barman.
– Je te présente Mia. On lui fait visiter Chicago, explique Tony.
– Et, bien sûr, tu l’emmènes dans mon pub, parce qu’on y sert le meilleur whisky
de la ville.
– Exactement, répond Tony.
– Mia, je suis enchanté de faire ta connaissance. Je m’appelle Dec, ou Declan.
Il me tend la main et je lui donne la mienne, mais au lieu de la serrer, il la porte à
ses lèvres pour embrasser mes phalanges. Une petite vague d’excitation parcourt
d’abord mon bras puis tout mon corps quand il plonge son regard dans le mien
en jouant des sourcils.
Tony dégage ma main de celle de Declan.
– Arrête ça, abruti. Ils sont où nos verres, et nos menus ?
Dec éclate de rire, jette son torchon sur son épaule et nous tend trois menus. Il
nous sert ensuite un shot de Jamison chacun, ainsi qu’un pour lui-même. Nous
levons tous nos verres pour trinquer tandis que Declan s’exclame « Cul sec ! ».
Mon téléphone sonne dans ma poche au moment où je repose mon shot vide.
De : Wes Channing
À : Mia Saunders
Joyeuse Saint Patrick. Tu sais ce qu’on dit à propos des filles aux yeux verts ?
Hector hausse les sourcils en me voyant sourire jusqu’aux oreilles. Je rapproche
le téléphone de ma poitrine et je relis le message, ce qui n’empêche pas Hector
de lire par-dessus mon épaule. Je laisse tomber et je baisse mon téléphone pour
qu’il puisse lire tandis que j’écris ma réponse.
De : Mia Saunders
À : Wes Channing
Non, qu’est-ce qu’on dit ?
Il répond immédiatement.
De : Wes Channing
À : Mia Saunders
Où es-tu ?

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De : Mia Saunders
À : Wes Channing
Dans un pub irlandais en ville. Chez Declan’s.
Tu ne vas pas me dire ce qu’on dit à propos des filles aux yeux verts ?
De : Wes Channing
À : Mia Saunders
Elles manigancent toujours quelque chose. C’est ton cas ?
De : Mia Saunders
À : Wes Channing
Eh bien oui ! Je picole ! Joyeuse Saint Patrick !
J’attends quelques minutes, mais il ne répond pas. C’est bizarre, il a dû être
interrompu. Hector et moi nous regardons, il hausse les épaules, puis il fait signe
à Declan de remplir nos verres, et le barman s’exécute.
– Tu veux une bière aussi ? demande-t-il.
– Avec plaisir !
Je bois mon shot cul sec. J’ai la gorge en feu, ce qui ne m’aide pas à y voir plus
clair quant au mystérieux message de Wes. Je pense beaucoup trop à lui, c’est
idiot, et je ne suis pas une idiote.
– Et plus de shots ! je m’exclame.
Durant l’heure qui suit, Hector et Tony se mettent à me parler de leur jeunesse,
ils m’expliquent qu’ils ont rencontré Declan à Columbia et qu’ils se sont tous
retrouvés à Chicago. Depuis, ils ne sont plus jamais perdus de vue, ce qui
explique pourquoi Declan ne cesse de faire des sous-entendus au sujet de leur
relation. Il doit être un des seuls à en connaître la véritable nature. Je découvre
également qu’il est un des mecs qui a traversé le terrain de foot à poil.
Je ris tellement en écoutant leurs histoires que je manque me faire pipi dessus, et
je me lève promptement du tabouret.
– Où tu vas ? demande Tony en me prenant le bras.
– Aux toilettes, je dis en gigotant.
– Non, ne fais pas ça, répond-il en grimaçant. Si tu y vas maintenant, tu vas être
obligée d’y aller toutes les vingt minutes.

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– Je n’y peux rien ! Et puis, mêle-toi de tes affaires ! je dis en lui frappant le
bras.
– Petite joueuse ! répond-il en souriant et en se frottant le biceps.
Je sais que je l’ai frappé un peu fort et j’espère qu’il aura un bleu demain, mais
j’en doute. Il est tellement musclé qu’il n’a sans doute rien senti.
Je fais ce que j’ai à faire et je me lave les mains. Je penche la tête en avant,
j’ébouriffe un peu mes cheveux pour leur donner du volume et je me redresse
brusquement. Je suis obligée de m’accrocher au lavabo pour ne pas tomber, il est
vraiment temps de manger quelque chose. Le whisky commence à faire son effet
et si je ne me remplis pas le ventre avec quelque chose de solide, je vais bientôt
finir par terre. Petite joueuse. Ce n’est pas de ma faute si je fais la moitié de la
taille de ce géant et que je ne peux pas boire une bouteille de whisky sans rien
sentir. Tony devrait être content, je ne vais pas lui coûter grand-chose.
J’ouvre la porte des toilettes et me faufile à travers la foule. Il y a beaucoup plus
de monde que lorsque nous sommes arrivés. Je me déhanche discrètement en
rythme avec la musique irlandaise lorsque je me cogne contre un torse dur.
– Aïe, je dis en me frottant le nez et en levant la tête.
Même avec les spots de toutes les couleurs, je ne peux pas manquer son regard
vert. Je retiens mon souffle, estomaquée qu’il soit là, devant moi.
– Tu ne dis rien, ma chérie ? dit-il en enlevant ses cheveux blonds de son front.
– Je n’arrive pas à croire que tu sois là…
Ses yeux verts me balaient de la tête aux pieds.
– Bon sang, tu es spectaculairement belle. Viens ici, grogne-t-il.
Soudain, me voilà avec lui, dans les bras de mon Wes. Ses lèvres sont chaudes et
sa bouche a un parfum de menthe et d’océan. Mon Dieu, l’océan me manque, la
brise salée… lui. Il tient ma tête d’une main tandis que l’autre m’attire contre lui.
Nos corps sont collés l’un à l’autre et il n’existe plus que nous, plus que notre
attirance mutuelle. Ma langue effleure sa lèvre et il ouvre la bouche.
Je suis au paradis. Nous sommes bousculés par la foule qui essaie de nous
contourner et j’entends plusieurs « excusez-moi », mais nous ne nous arrêtons
pas. C’est impossible. Le lien qui nous unit nous empêche d’arrêter. Il
m’embrasse comme dans les films, lorsqu’un homme revient de guerre et qu’il

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revoit enfin la femme qu’il aime, comme si j’étais tout pour lui. Ce qui est
certain, c’est qu’en cet instant, Wes est tout pour moi.
– Bon sang mais lâche-la ! aboie la voix de Tony quelques secondes avant que je
sois arrachée aux bras de Wes.
– Non, Tony, non ! dit Hector en s’interposant derrière moi, entre Wes et Tony.
– Tu te prends pour qui ? demande Wes en faisant un pas vers Tony, écrasant
Hector et moi qui sommes au milieu.
– Non, Wes, non ! C’est Tony ! je m’exclame en me collant à Wes pour essayer
de le retenir.
– Ouais, eh ben, il va falloir qu’il te lâche sinon il va avoir de sérieux ennuis,
grogne Wes en fusillant Tony du regard.
– Ah ouais ? rétorque Tony en avançant, nous écrasant davantage.
– Les mecs, arrêtez ! Wes, Tony est mon client. Tony, c’est mon euh… Wes ! je
m’écrie d’une voix désespérée pour être entendue par-dessus la musique.
Tony fronce les sourcils et Hector le pousse en arrière.
– Bébé, c’est son mec. Tu sais, celui dont je t’ai parlé, le surfeur qui fait des
films.
Je ferme les yeux et je tends les bras pour empêcher Wes de se jeter sur lui.
– Ton mec ? Ton surfeur qui fait des films ? ricane Wes en me serrant contre lui.
C’est comme ça que tu m’appelles ? chuchote-t-il dans mon oreille, me faisant
frissonner de la tête aux pieds.
Je me sens désormais entièrement sous l’emprise du whisky, qui semble
annihiler toutes mes barrières, ce qui explique ma réponse.
– Tu aurais préféré que je t’appelle mon dieu du sexe ?
Et je passe mon bras autour de son cou en me collant contre lui.
– Bien sûr, dit-il en frottant son front contre le mien. D’ailleurs, tu n’auras qu’à
dire ça à tous tes clients et à tous tes rencards, dorénavant.
– Ha ! Ça te plairait, hein ? je ricane un peu bêtement.
– Énormément. Est-ce que tu peux me présenter à tes amis, maintenant, histoire
que le grand ne me casse pas la gueule ?
– Mais oui !

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Je me tourne et Wes pose ses mains sur mes hanches, sous les regards d’Hector
et Tony.
Hector sourit, Tony fronce les sourcils.
– Les mecs, je vous présente mon ami Wes. Wes, voici Tony et son… euh,
Hector.
– Hector est mon partenaire, admet Tony suffisamment fort pour que les gens
autour de nous l’entendent.
Certes, personne ne fait attention, mais c’est néanmoins un pas énorme, et dans
le bon sens, qui plus est. Entre ça et le baiser au bord de la rivière… Je regarde
Hector, qui a l’air surpris, excité et amoureux. Cela dit, Hector a toujours l’air
amoureux lorsqu’il regarde Tony. C’est une des raisons pour lesquelles je
l’apprécie autant – il est facile à déchiffrer et il dit toujours ce qu’il pense ou ce
qu’il ressent. Je ne suis pas habituée à ce genre de sincérité.
– Wes, je suis désolé, mec. Mais tu connais les hommes bourrés face à une belle
femme. Ils ont parfois les mains baladeuses. Je voulais juste la protéger, dit Tony
en frappant sur le dos de Wes tout en lui serrant la main.
– J’apprécie. Je suis content de savoir que quelqu’un s’occupe de ma nana,
répond Wes.
Ma nana. Bon sang, je suis dans de beaux draps.
– Eh bien, maintenant que tu es là, viens boire un verre avec nous, dit Tony.
– Avec plaisir. Je vous suis, dit Wes en s’effaçant pour laisser passer Tony et
Hector.
Nous nous asseyons tous au bar et Wes rapproche son tabouret du mien pour
passer son bras autour de moi. Il marque clairement son territoire, ce qui pourrait
me gêner, en temps normal. Cependant, le whisky qui coule dans mes veines le
laisse faire sans que je dise quoi que ce soit.
– Tu restes combien de temps à Chicago ? lui demande Hector.
– Juste ce soir. J’ai un vol pour Los Angeles aux aurores, demain. J’ai profité
d’être là pour retrouver Mia, j’espère que ça ne vous gêne pas ?
Je plonge mon regard dans le sien et je m’y noie. Ses lèvres brillent dans la
lumière du bar et ses cheveux tombent sur son front. Quand je lève la main pour
les dégager, il pose une main sur ma joue. Cela fera bientôt deux mois que je me

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passe de ce genre d’affection, et j’ai l’impression de revivre maintenant que Wes
est là. Il m’en faut plus. Beaucoup plus.
– Bien sûr que non, au contraire.

1. Groupement des huit universités les plus anciennes et prestigieuses des États-
Unis.

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Chapitre 9

Wes me plaque contre la porte qui claque derrière moi. Nous sommes tous les
quatre rentrés au penthouse, ivres, et Hector m’a regardée en levant le pouce et
en traînant Tony dans leur chambre. J’ai pris ça comme l’autorisation d’avoir un
homme chez eux. En même temps, je crois que rien ne m’aurait arrêtée. Le
whisky ainsi que mon manque de lui sont trop forts pour que je me sente le
courage de les combattre.
– Bon sang, tu m’as manqué, grogne Wes en empoignant mes seins. Ton corps
m’a manqué. Déshabille-toi, tout de suite.
Sans hésiter, je soulève mon pull et le jette par terre tandis qu’il s’attaque à ma
braguette. Je n’ai même pas le temps d’enlever mon jean que sa main est là,
entre mes jambes, où je mouille déjà.
La langue de Wes titille mes seins avant de remonter sur ma gorge puis sur mon
oreille pour la mordiller.
– J’adore les réactions de ton corps, chuchote-t-il. Elles me prouvent que, quoi
que tu puisses me dire, tu me veux.
Il plonge un doigt entre mes lèvres, puis un deuxième. C’est tellement bon. Je
penche la tête en arrière contre le mur.
– Je n’ai jamais dit le contraire, je murmure d’une voix haletante.
– Mais tu essaies de t’en persuader, répond-il.
Il enfonce ses doigts et forme un crochet, touchant mon point le plus sensible,
tandis que son pouce dessine des cercles sur mon clitoris. Il a raison. J’essaie
toujours de nier l’effet qu’il a sur moi, mais j’y suis obligée si je veux garder une
distance entre nous. Or maintenant, en cet instant, je suis toute à lui.

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– J’ai besoin de te sentir, je chuchote alors que le plaisir s’accumule dans mon
bas-ventre.
– Tu as été avec quelqu’un d’autre depuis que tu m’as quitté ?
– Wes, je gronde.
Ce n’est absolument pas une conversation que je souhaite avoir alors que ses
doigts sont enfoncés dans ma chatte et que je mouille sur sa main.
Il m’embrasse, plongeant sa langue en moi avant de reculer.
– Est-ce que tu as été avec quelqu’un sans préservatif ?
– Seulement toi, je réponds sincèrement.
Alec et moi avons toujours mis une capote, ce qui n’était pas le cas avec Wes –
mais je lui fais confiance. Il plonge son regard en moi, cherchant la vérité, puis il
retire sa main et baisse mon jean et ma culotte. Je les dégage avec mes pieds tout
en déboutonnant son pantalon, qu’il baisse juste assez pour libérer sa verge
épaisse. Bon sang, qu’est-ce qu’elle m’a manqué !
En un mouvement rapide, Wes empoigne mes fesses et je passe mes jambes
autour de sa taille.
– Accroche-toi à mes épaules, ma chérie.
Je lui obéis et il me fait remonter le long du mur, brûlant ma peau. Cependant, la
douleur ne fait qu’ajouter du plaisir à sa virulence. Wes place son gland entre
mes lèvres, et une de ses mains tient mon épaule tandis que l’autre agrippe ma
hanche. Il me serre plus fort, puis, sans prévenir, il m’abaisse sur lui.
– Mon Dieu ! je m’exclame.
Je suis entièrement remplie par son énorme sexe et le plaisir est presque
insoutenable.
– Chhuut, ma chérie, ils vont t’entendre.
Il me rappelle où nous sommes –, que je suis chez Tony et Hector et que je suis
en train de baiser mon premier client alors que je travaille pour mon troisième.
Je suis sûre que c’est tordu, psychologiquement parlant, mais je m’en fiche. La
sensation que me procure Wes est trop bonne – il m’a beaucoup trop manqué.
Il se retire avant de s’enfoncer de nouveau en moi. Sa bouche s’empare de la
mienne et je suce sa langue, dévorant sa bouche comme si j’étais affamée.

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– Tu te souviens de ça, dit-il en se retirant jusqu’à son extrémité avant d’avancer
de nouveau le bassin.
Je retiens mon souffle et je hoche la tête, tellement accablée de plaisir que je ne
peux pas prononcer un mot.
– Je ne te laisserai pas oublier combien c’est bon, dit-il en dessinant un cercle
avec ses hanches. Quand je serai parti, je veux que tu continues à me sentir.
Il saisit ma taille pour amplifier ses allers-retours. Je me mords la lèvre quand
une décharge électrique embrase le sang dans mes veines, électrifiant chacun de
mes pores. Un dernier coup de bassin et je vais jouir, je le sens.
– Ne m’oublie pas, dit-il en serrant les dents.
C’est ce qu’il m’a dit la dernière fois que nous avons fait l’amour. Cette fois-ci,
ses paroles sont mêlées à la douleur et au plaisir. Il se retire, me fait remonter
contre le mur et passe ses deux bras autour de moi. Je resserre mes cuisses
autour de sa taille en plantant mes talons dans son dos.
Il plonge violemment en moi et mon orgasme explose, répandant des décharges
de plaisir dans tout mon corps. Il s’empare de nouveau de ma bouche, ne la
lâchant plus tandis qu’il tremble en moi, déversant son essence dans mon sexe
qui pulse.
Sa bouche m’empêche de crier et je mords sa lèvre alors que les derniers signes
de notre orgasme s’effacent lentement. Nos peaux sont trempées de sueur. Nous
respirons le même air, pantelants dans le visage de l’autre, front contre front,
renouant le lien qui a toujours existé entre nous.
– Tu vas m’oublier ? demande-t-il d’un ton doux et inquiet.
– Jamais, je te promets.
– Allez, à la douche, je suis loin d’en avoir fini avec toi.
Il me tient contre lui et me porte jusqu’à la salle de bains, de l’autre côté de la
pièce.
– Heureusement, parce que j’ai encore envie de toi, je déclare en l’embrassant
partout sur le visage, léchant la sueur de son cou, profitant de celui dont je n’ai
jamais oublié le goût.
Il me pose sur le meuble, et lorsqu’il se retire, quelques gouttes de sperme
tombent sur le carrelage entre mes cuisses.

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– Ça, j’y repenserai plus tard, dit-il en les regardant couler et en souriant d’un air
enfantin.
– À la douche, espèce de pervers, je réponds en lui frappant l’épaule.
J’attrape un gant de toilette pour m’essuyer entre les jambes, puis un autre pour
nettoyer le meuble, et je jette les deux dans le panier à linge sale.
Wes est nu à côté de sa pile de vêtements, et son corps de surfeur bronzé n’a
jamais été aussi beau. Je marche jusqu’à lui et je pose mes mains sur ses
pectoraux carrés, puis j’appuie mon front sur son torse et je l’embrasse. Il est
chaud, familier, et il me rappelle tout ce qui me manque et que je rêve d’avoir,
mais qui m’est hors de portée pour l’instant. Des larmes se forment dans mes
yeux tandis que j’embrasse la peau sur son cœur.
Il pose sa main sur ma joue et essuie mes larmes.
– Je sais. Moi aussi, chuchote-t-il. Profitons du peu de temps que nous avons
ensemble, d’accord ?
Je hoche la tête et je le suis sous la douche, où il entreprend de me laver les
cheveux sans se presser.
– Ils ont beaucoup poussé, dit-il.
– Ouais, ils poussent vite.
– Ils sont tellement beaux, dit-il en regardant la mousse couler sur mes cheveux.
Je finis de me rincer la tête tandis qu’il verse du gel douche dans sa main. À
Malibu, il ne se servait jamais d’un gant ou d’une fleur de douche lorsqu’on se
douchait ensemble.
– Tu aimes utiliser tes mains, hein ? je dis en jouant des sourcils.
– Tu sais bien.
Il pose ses mains sur mes épaules et se met à les masser. C’est divin. Il palpe
mes muscles tendus avant de descendre sur mes seins, puis il me tourne et
plaque mon dos contre son torse. Il pince mes tétons, les faisant durcir jusqu’à ce
que mes seins soient lourds de désir.
Je gémis en m’appuyant contre lui et en fermant les yeux.
– J’adore tes seins. Ils sont gros, pleins et parfaits pour mes mains.
La vapeur chaude nous enveloppe, amplifiant l’impression que tout ceci n’est
qu’un rêve. Il joue avec mes seins jusqu’à ce que je sois haletante, gémissante,

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reculant mon bassin, cherchant une friction.
– Dis-moi ce que tu veux, dit-il en léchant mon cou.
– Je veux sentir ton sexe en moi. S’il te plaît.
– Penche-toi en avant, ma chérie. Les mains contre le mur, montre-moi tes
fesses.
Wes aligne ses pieds à côté des miens et m’oblige à écarter davantage les
jambes. Il empoigne mes hanches et les penche pour trouver le bon angle.
J’attends en retenant mon souffle, excitée à n’en plus finir à l’idée que je vais
bientôt sentir de nouveau son sexe.
Wes frotte mes fesses puis il écarte mes lèvres, et son gland remplace ses doigts.
– Tu veux que je te baise, ma chérie ? Que ce soit brutal ?
– Mon Dieu, oui. Aime-moi comme tu sais faire, Wes.
– Que je t’aime ? demande-t-il en me pénétrant sur un centimètre.
J’essaie de serrer les cuisses pour l’obliger à me pénétrer davantage, mais il me
retient.
– Oui, montre-moi, je supplie.
Il incline son bassin, plante ses ongles dans mes hanches et m’empale
brusquement. Je plaque les paumes de mes mains sur le mur carrelé tandis que
mes pieds quittent le sol – me laissant suspendue sur son sexe, comme il aime
tant le faire. Il me repose par terre, je ne respire plus, je ne bouge plus. Je ne me
suis jamais sentie aussi entière avec un homme. Il se retire et je suis à deux
doigts de fondre en larmes à l’idée qu’il me quitte.
– Ne pars pas, je dis d’une voix étouffée.
– Je suis là.
Il pose une main sur la mienne, puis il me pénètre de nouveau.
– Sens-moi, ma chérie. Je suis là. Avec toi. En toi. Je fais partie de toi.
Un fourmillement éclate à l’endroit où s’unissent nos corps avant de se propager
dans mes veines, me chatouillant de la tête aux pieds. C’est une sensation
nouvelle pour moi.
– Je vais jouir.
Le plaisir s’empare de mon esprit et de mon corps, m’emportant dans un endroit
paradisiaque que je ne veux plus jamais quitter.

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– Oui, dit-il en faisant tourner son sexe en moi, m’arrachant un cri. Tu vas jouir
avec moi. Tu vas serrer ma queue, ma douce Mia, et me prouver que je contrôle
ton corps. Quand je suis avec toi, il n’y a que nous. Toi et moi, comme ça devrait
être.
Il se retire et s’enfonce de nouveau en moi. Je pousse un cri strident, perdue
encore une fois dans un brouillard de volupté, brûlante et électrifiée. C’est alors
que je me mets à bafouiller des paroles insensées, sous l’effet de ses coups de
bassin lents et réguliers.
– S’il te plaît…
– En moi…
– Brûlante…
– Maintenant…
– J’aime…
– Chaud…
– Wes…
Il passe un bras autour de ma taille et s’accroche en haut du mur carrelé, se
dressant sur la pointe des pieds pour m’abaisser sur sa verge. Son érection dure
comme fer s’enfonce au plus profond de mon sexe, écartelé comme jamais,
touchant un point qu’aucun homme n’a atteint. Je perds la tête, secouée par mon
orgasme, et mes parois se contractent et pulsent autour de lui comme si elles
étaient électrocutées. Ma chatte se referme sur sa queue tandis qu’il grogne
derrière moi. Il me mord l’épaule, et des éclats de douleur se joignent à mon
exquise jouissance.
Wes m’arrache un orgasme après l’autre et je cesse bientôt de les compter. Tout
ce que je sais, c’est que lorsqu’il finit de me baiser, l’eau est glacée et nous
frissonnons tous les deux. Il me rince à l’eau froide, puis il me couvre avec une
serviette tandis que je m’appuie contre lui. Je suis incapable de faire quoi que ce
soit. Il m’a baisée si fort que j’en ai perdu la tête, littéralement. Mon cerveau
n’envoie plus de signaux à mes membres, plus rien ne fonctionne.
Une fois qu’il m’a séchée, Wes me porte dans la chambre. Il défait le lit pour
m’y déposer, puis il me borde en se blottissant derrière moi.
– Je ne veux pas te quitter demain, soupire-t-il.

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Je ferme les yeux et tire son bras sur mes seins pour embrasser ses doigts.
– Il le faut, pourtant, je chuchote.
Bien évidemment, c’est plus compliqué que cela, car j’ai autant besoin qu’il
parte que j’ai envie qu’il reste.
– Je sais, dit-il d’une voix à la fois ferme et triste.
– Mais le fait que tu veuilles rester compte beaucoup pour moi.
Je veux qu’il sache que sa venue est importante à mes yeux. Que tout le temps
passé avec lui est spécial.
– Oh, Mia, je ne vais pas te laisser nous ôter ce qu’on a.
– Je n’en ai aucune envie, Wes. Durant les neuf prochains mois, j’espère bien
que tu vas continuer de me rappeler ce lien qui existe entre nous.
Je pose sa main sous ma joue en essayant d’ancrer dans ma mémoire la sensation
de son corps contre le mien.
– Je ne te laisserai jamais oublier ce qui pourrait être à toi. Ce qui t’attend.
Sur ces paroles, enveloppée dans la chaleur de ses bras, je glisse dans un
sommeil profond et paisible.
*
* *
Les rayons du soleil s’engouffrent dans la chambre et me frappent directement
dans les yeux, m’arrachant à un rêve merveilleux dans lequel Wes et moi surfons
à Malibu. Bien évidemment, dans mon rêve, je surfe comme une pro, alors qu’en
réalité, je tiens tout juste debout. Il faut vraiment que je retourne à l’océan pour
m’entraîner si je veux un jour surfer comme la Mia de mes rêves.
Je glisse lentement un pied derrière moi, mais je ne rencontre que le froid du
drap.
Je m’assieds brusquement dans le lit et je regarde à ma droite. Il est parti. Il n’y a
plus que la marque de sa tête sur l’oreiller, ainsi qu’un bout de papier.
Mia,
Hier soir était un moment exceptionnel et précieux. Lorsque je suis avec toi, j’ai
l’impression d’atteindre la crête parfaite et de glisser sur l’océan, sur une vague
infinie. C’est exaltant et terrifiant, et rien n’est jamais plus comme avant.

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Tu m’as transformé, Mia. Je ne suis plus persuadé que la femme parfaite
n’existe pas, car je l’ai rencontrée, je lui ai fait l’amour et je l’ai vénérée de la
seule manière que je connaisse.
Comme tu ne m’as pas laissé d’autre choix, je resterai ton ami et je continuerai
de te rappeler ce que nous pourrions vivre ensemble. Plus que neuf mois.
Jusqu’à nos prochaines retrouvailles, je penserai à toi, et je t’appellerai bientôt
pour prendre de tes nouvelles.
Quand tu seras prête, tu sais où me trouver. Tu as la clé.
Ne m’oublie pas.
Ton surfeur qui fait des films,
Wes
Je serre la lettre contre ma poitrine et je fonds en larmes, pleurant pour Wes,
pour moi, pour ce que nous pourrions vivre ensemble et que j’espère connaître
un jour, si une autre femme ne se saisit pas de lui entre-temps. Cependant, je
dois le laisser vivre pendant mon absence. Savoir que Wes tient à moi et qu’il ne
veut pas que je l’oublie, qu’il espère que je le retrouverai un jour, m’aidera à
supporter les neuf prochains mois. Néanmoins, je souhaite vivre ma vie, tout
comme je l’ai encouragé à vivre la sienne. Je ne peux pas laisser mes sentiments
pour lui affecter ce que je fais ni les expériences que je me suis promis de vivre.
Je ne sais pas ce que la vie va m’apporter durant les neuf mois à venir. Même si
je rêve de tout plaquer et de courir à lui en le laissant rembourser la dette de mon
père, je sais que je dois le faire toute seule. Cette année va déterminer ce que je
veux faire du reste de ma vie. Peut-être Wes en fera-t-il partie, peut-être pas.
Peut-être retournerai-je en Californie, peut-être irai-je à Tombouctou. Peu
importe que mon cœur me crie d’aller à lui, j’ai pris ma décision.
Cependant, je n’oublierai pas Wes, le temps que nous avons passé ensemble,
notre amitié et le lien intense qui nous unit lorsque nous sommes ensemble. Alec
m’a appris cette leçon et, comme j’aime Alec, j’aime Wes, à ma façon. Si c’est
dans les cartes, peut-être notre amour durera-t-il à jamais.
Mais pas aujourd’hui.

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Chapitre 10

C’est ce soir que nous célébrons l’expansion de Fasano’s au rayon surgelé.


Tout le monde est réuni au restaurant pour fêter ça, des chefs célèbres, les
médias, les distributeurs, des investisseurs potentiels, en plus de tout le clan
Fasano et des clients réguliers. Apparemment, plusieurs maisons d’édition et de
production veulent proposer à Tony de faire une émission de télé et à Mona
d’écrire un livre de recettes. C’est à la fois excitant et effrayant, car c’est ce soir
que mes fiançailles avec Tony sont censées être annoncées. Je l’ai prévenu que
les médias allaient s’éclater à raconter que j’ai été vue avec deux autres
célébrités durant ces deux derniers mois, mais il m’a promis que tout allait bien
se passer et que tout était sous contrôle. Traduction dans ma tête : tout ne se
passera pas bien, ça va être la cata et je vais me retrouver coincée au milieu,
encore une fois.
Angelina m’a dit que le restaurant avait été vidé pour offrir plus de place. Toutes
les tables ont été stockées dans l’entrepôt accolé au restaurant afin d’être
remplacées par des tables de bar plus hautes. La pancarte indique que le
restaurant est fermé au public, mais qu’il sera de nouveau ouvert demain. Quoi
qu’il se passe ce soir, c’est ma dernière soirée avec les garçons et j’ai l’intention
d’en profiter. J’espère seulement que ce sera possible.
Nous avons passé une super-soirée pour la Saint Patrick et, bien évidemment, le
lendemain, ils ont tout voulu savoir à propos de Wes. Depuis, les relations sont
de nouveau tendues. Tony s’est comporté de manière très bizarre toute la
semaine. Chaque fois que j’entrais dans une pièce, il devenait agité et oubliait ce
qu’il était en train de dire. Il a également passé énormément de temps au bureau,

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nous délaissant, Hector et moi. Pour être honnête, il se comporte comme
quelqu’un qui cache un énorme secret.
C’est ce secret qui fait le plus peur à Hector. Il m’a dit que, durant toutes ces
années ensemble, ils ne se sont jamais rien caché. Angie l’a rassuré en lui disant
que tout allait bien au travail mais que Tony était simplement plus impliqué
qu’avant. Elle lui a confirmé qu’il arrivait au bureau plus tôt et qu’il partait plus
tard que d’habitude. Il ne trompe donc pas Hector, c’est juste qu’il semble
préoccupé par le lancement de la gamme de surgelés. En même temps, son nom
va se retrouver dans tous les supermarchés du pays, – je suppose que ce doit être
stressant.
Hector a accepté de laisser plus d’espace à Tony et a passé la semaine avec moi.
Le soir, lorsqu’il rentrait du travail, nous allions au cinéma, nous jouions aux
cartes ou alors nous buvions trop de vin. Hector et moi sommes vite devenus
amis et je suis déterminée à ne jamais le perdre de vue. C’est quelqu’un sur qui
je peux compter, comme Gin, Mady, Alec et Wes. Mon cercle d’amis s’agrandit,
et j’en suis ravie. Bien sûr, il en va de même de Tony et Angelina. Tony a beau
avoir beaucoup travaillé depuis mon arrivée, nous avons passé de bons moments
ensemble et je l’apprécie. C’est un homme qui en a gros sur le cœur, tant sur un
plan professionnel que personnel. J’admire sa détermination et son besoin de
rendre tout le monde heureux. Enfin, tout le monde sauf lui-même et la personne
qui compte le plus à ses yeux, Hector.
Or, Hector est toujours là pour lui.
– C’est ce qu’on fait quand on aime quelqu’un, m’a-t-il dit. On fait passer les
besoins de l’autre avant les siens, et un jour, ce sera l’inverse.
Il n’y a jamais de manque d’amour, de compassion ou de confiance entre eux,
même lorsqu’ils sont aussi tendus qu’ils l’ont été cette semaine. C’est
simplement qu’ils sont coincés dans une situation étrange et qu’ils font de leur
mieux pour s’en sortir et retrouver leur équilibre. J’espère sincèrement qu’ils y
parviendront.
Je suis en train de faire ma valise lorsque mon téléphone sonne.
– Allô ?

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– Bonjour, ma poupée. Tu es prête à quitter la ville des vents ? dit la voix
mielleuse de Tante Millie.
– Pas vraiment non, c’est cool ici. Tony et Hector sont des mecs super.
– Tony et… quoi ? Qui est Hector ?
– C’est le partenaire de Tony.
– Anthony Fasano est gay ? Le grand boxeur gaulé comme un dieu ?
– Lui-même, je dis en souriant et en secouant la tête.
Ma tante Millie est un peu la fée marraine des beaux gosses.
– C’était trop beau pour être vrai, dit-elle. J’ai su tout de suite, en voyant son
profil, que quelque chose n’allait pas. Alors, tu n’auras pas de bonus cette fois-
ci, n’est-ce pas ?
J’éclate de rire.
– Tu penses toujours autant à l’argent ?
– L’argent est roi, ma poupée. Tu devrais le savoir mieux que quiconque, vu ce
que tu fais. En parlant de cash, je viens de t’envoyer par mail le profil de ton
prochain client. Tu vas adorer, c’est tout à fait ton truc.
– Ah ouais ? Pourquoi ?
– Eh bien, déjà tu vas te rendre à Boston, dans le Massachusetts.
Je n’y suis jamais allée – tout ce que je sais, c’est que c’est la ville de la
meilleure équipe de base-ball de tout l’univers.
– Qu’y a-t-il à Boston et pourquoi je vais adorer ?
– Des garçons, du base-ball et de la bière, répond-elle en riant.
– Mes trois choses préférées ! je m’exclame en souriant.
C’est vrai que j’adore le base-ball, une des seules choses que papa et moi
faisions ensemble quand j’étais petite. Même quand il était ivre mort, il regardait
toujours les matchs à la télé. Notre équipe préférée, c’était les Red Sox. Au
départ, je les aimais surtout parce que leur logo représente des chaussettes et que
je trouvais ça génial, mais maintenant c’est surtout parce que mon père les adore
et que ça nous rapproche. À dix ans, quand ma mère est partie, je faisais tout
pour trouver une connexion avec le seul parent que j’avais. Même Maddy
adorait ça. Elle sera ravie que j’aille à Boston.
– Ouaip, et ce n’est pas fini ! dit ma tante.

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– Ah bon ?
– Tu es assise ?
Je m’empresse de m’asseoir au bord du lit.
– Maintenant, oui.
– Tu vas être l’escort de la toute nouvelle recrue des Boston Red Sox : Mason
Murphy.
– Non, tu es sérieuse ? J’ai entendu parler de lui, il détient le record annuel du
plus grand nombre de frappes !
Millie glousse au bout du fil.
– Et puis, il est sacrément beau, ajoute-t-elle. Il a ton âge, il est irlandais et il est
gaulé comme un demi-dieu.
Je repense au dernier match que j’ai regardé et je dois avouer que je suis
d’accord avec Millie. Je me souviens même d’avoir rembobiné le match pour
revoir le gros plan sur ses fesses dans ce petit pantalon blanc moulant.
– C’est complètement dingue ! Mais pourquoi a-t-il besoin d’une escort ?
– Apparemment, le fait d’avoir une femme à son bras lui donne l’air d’être plus
engagé auprès de l’équipe et ça aide à son image. Son agent pense qu’avoir une
copine pour le début de la saison lui enlèvera la pression et montrera aux
publicitaires que c’est un type fidèle.
– Ok, si tu le dis. Quoi qu’il en soit, je suis ravie. Ça va être génial ! Envoie-moi
les détails du vol et tout le reste. Il faudrait que j’arrive plus tôt, il me faut des
rendez-vous chez l’esthéticienne, et tout le reste.
– Je vais te réserver un hôtel pour les trois jours où tu seras à Boston avant de
retrouver monsieur Murphy. Je vais t’en trouver un avec un institut de beauté et
un spa. Tu mérites de te reposer un peu pour mieux te concentrer sur ta mission.
– Ha ha, très drôle. Ça a l’air top, merci Tante Millie.
– Tout pour ma poupée. À bientôt, ma belle.
– Ciao.
*
* *
– Tu es canon, Mia, dit Tony en me prenant dans ses bras lorsqu’Hector et moi
arrivons.

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Je sens Hector se raidir nerveusement à mes côtés.
– Merci. Tu nous as manqué, aujourd’hui, je dis sincèrement.
Tony se lèche les lèvres et inspecte Hector de la tête aux pieds, le regard
électrique et plein de désir pour l’homme qu’il aime. Hector baisse la tête en
souriant jusqu’aux oreilles.
– Hector, chuchote Tony. Tu es parfait, Papi.
– Tu es tellement beau que j’en ai mal aux yeux, répond Hector en le prenant
dans ses bras pour un câlin viril.
Ils se tiennent trop longtemps pour des amis, mais pas assez pour attirer
l’attention des gens dans le restaurant. Mona Fasano nous repère depuis l’autre
côté de la pièce et vient vers nous, cependant son langage corporel n’est pas le
même. Elle est froide, comme la première fois que je l’ai rencontrée. Elle me
prend dans ses bras, mais ce n’est pas sincère. Elle en fait de même avec Hector,
qui fronce les sourcils en me regardant par-dessus son épaule. Je lui réponds
avec les yeux que je ne comprends pas non plus. En fin de compte, je ne sais
jamais vraiment ce que pense Mona Fasano. Pour moi, elle reste un mystère.
– Mon fils, tu as des gens à séduire. J’ai décidé qu’on devrait faire le livre de
recettes, finalement. Allons discuter avec les éditeurs.
Tony rit, et Hector et moi nous détendons. Il a été affreusement tendu toute la
semaine, c’est la première fois qu’il semble un peu lui-même. Il a l’air mieux
dans sa peau.
– D’accord, Mamma. J’arrive dans une seconde.
Mona me regarde de nouveau, puis elle regarde Hector et soupire en secouant la
tête. Elle repart en marmonnant quelque chose dans sa barbe.
– Qu’est-ce qui lui arrive ? je demande.
– Elle n’est pas contente.
– Ça, je l’avais deviné. Tu peux nous expliquer pourquoi ?
– Pas vraiment non. Vous saurez tout bientôt. Et si vous alliez vous chercher un
verre ? Je vous ai réservé des places à l’avant. Je veux que vous soyez là pour le
discours d’ouverture, d’accord ? Promettez-moi que vous serez devant, avec ma
famille.
Hector se rapproche de lui pour lui parler tout bas.

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– Bébé, tout ce que tu voudras. Tu le sais. Je suis là pour toi.
– Pour toujours ? demande Tony sur un ton étrange.
Il commence vraiment à m’inquiéter, même si en vérité, il semble plus à l’aise
que jamais. Est-ce parce qu’il va annoncer son mariage au public ? Est-ce parce
que son entreprise grandit ? Est-ce que ce sont les émissions de télé et les livres
de recettes ? À mes yeux, c’est plus de travail et de stress – pas moins – or, Tony
se comporte comme si tout était merveilleux pendant que sa mère est plus
ronchonne que jamais.
– Toujours, tu le sais bien, promet Hector. On sera devant. Allez, va charmer
tout le monde. Et, tu sais… je suis super-fier de toi.
Tony tend le bras et caresse la main d’Hector. Quelques personnes aperçoivent
le geste, mais il s’éloigne avant que je ne puisse les prévenir.
– Tony se comporte bizarrement, non ? je demande à Hector.
– Ouais, il se trame quelque chose, c’est clair, mais il ne m’a rien dit. En même
temps, ce n’est pas surprenant. Tony fait toujours ça : il réfléchit d’abord seul à
ses problèmes avant de m’en parler. Quoi qu’il se passe, il semble aller plutôt
bien. Il a dû prendre une décision à propos de la boîte qui lui plaît, il a l’air
d’être de nouveau lui-même.
– Te toucher en public, c’est être lui-même ? Et sa mère qui nous fusille du
regard ?
– Ouais, ça, ce n’est pas normal, je sais. Mais on ne peut pas y faire grand-chose.
Allons nous chercher à boire et trouver Angie, elle pourra peut-être nous aider.
Nous passons la demi-heure qui suit à boire du champagne et à discuter avec la
famille de Tony. Je dois avouer que, globalement, je m’amuse bien. Soudain,
une grosse voix retentit dans les haut-parleurs.
– Est-ce que tout le monde pourrait se rapprocher de la scène, s’il vous plaît ?
– Ah, c’est le moment ! dit Hector en m’emmenant aux côtés de la famille
Fasano.
Tony est debout sur la scène, vêtu d’un costume trois-pièces gris clair,
magnifique, comme d’habitude. La foule se tait et tout le monde s’attroupe
devant lui.

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– Je veux commencer par vous remercier d’être venus. L’expansion de
l’entreprise Fasano’s dans le surgelé était un des rêves de mon père, Joseph
Fasano. Il a dirigé cette entreprise avec équité, fierté et fidélité et, avec ma mère
et mes sœurs, nous souhaitons poursuivre cet héritage en nous assurant que nos
produits soient de bonne qualité et abordables pour tous les budgets. C’est
quelque chose qui nous a toujours tenu à cœur.
La foule applaudit et quelques personnes sifflent.
– Merci. Notre marque envisage désormais quelques aventures supplémentaires.
Premièrement, les recettes de Mamma Fasano.
Un rugissement d’applaudissements retentit.
– Deuxièmement, vous découvrirez bientôt une émission de télévision sur une
chaîne du câble, ajoute-t-il. Vous y verrez ma mère, mes sœurs et l’amour de ma
vie.
Les sifflements étouffent les petits cris de surprise d’Hector et moi. De quoi
parle-t-il ? Comment ça, l’amour de sa vie ? Il est hors de question que je reste
avec lui pour l’aider à berner les spectateurs de tout le pays !
– Nous voilà donc arrivés à mon annonce la plus importante. J’ai parlé des
nouvelles professionnelles, passons maintenant aux informations personnelles.
Je tiens à présenter au public la personne que j’aime le plus au monde. La
personne qui a été à mes côtés durant tous les défis que la vie m’a présentés, et
qui ne m’a jamais tourné le dos. Mon partenaire, l’amour de ma vie, mon
fiancé… s’il veut bien de moi, bien sûr.
Mon fiancé ? Jésus Marie Joseph.
À mes côtés, Hector ouvre grand ses yeux remplis de larmes tandis que Tony
tend la main pour prendre la sienne.
– Hector Chavez, je t’aime. Je t’aimerai toujours. Je veux passer le reste de mes
jours à t’aimer. Cette entreprise et mon nom de famille ne valent rien si tu n’es
pas là pour en profiter avec moi.
Soudain, Tony met un genou à terre, et ouvre un écrin en velours rouge qui
renferme un anneau en or.
– Sois à moi pour toujours. Épouse-moi. Prends mon nom, construis une famille
avec moi.

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Un silence de plomb s’abat sur la pièce. Il n’y a pas le moindre bruit.
– Lève-toi, dit Hector. Mon homme ne s’agenouille pour personne. Il se tient
droit et fier, comme je le fais pour lui. Je serai honoré de t’épouser et de prendre
ton nom.
Tony sourit jusqu’aux oreilles, tire Hector contre lui et se tourne vers le public.
Des flashs illuminent la pièce et leurs cliquetis retentissent autour de nous.
Anthony Fasano, boxeur, chef d’entreprise, chef de famille, vient de sortir du
placard et de demander à son partenaire de l’épouser, de prendre son nom et
d’avoir des bébés avec lui. En public.
Bon sang ! C’est un moment épique ! Je balaie du regard les visages de tous les
Fasano tandis que Tony leur demande leur bénédiction à chacun, à commencer
par Giavanna et son mari.
– Giavanna, acceptes-tu Hector comme mon fiancé et comme futur beau-frère ?
Elle sourit jusqu’aux oreilles en hochant la tête.
– Oui, dit-elle d’une voix pleine d’émotion.
– Isabella, acceptes-tu qu’Hector fasse partie de la famille ?
– Oui, je l’ai toujours accepté. Je suis heureuse pour toi, dit-elle en fondant en
larmes contre son mari.
– Sophia… commence-t-il, mais elle l’interrompt.
– Enfin, tu dis la vérité dit-elle, faisant éclater de rire le public.
Tony tient Hector contre lui tandis que ce dernier essuie ses larmes.
– Angie, tu acceptes qu’Hector se joigne à notre famille ?
Plutôt que de répondre, elle saute sur scène et les prend tous deux dans ses bras.
– Je t’aime, je t’aime, dit-elle en les embrassant sur la bouche.
Ces fichus Italiens et leurs baisers sur la bouche.
Elle leur chuchote quelque chose à l’oreille et ils écarquillent les yeux, puis
Tony s’agenouille devant elle et embrasse son ventre en le caressant. Son sourire
radieux explique tout sur la situation.
Je regarde Mona Fasano qui observe ses enfants en pleurant.
– Ma sœur va avoir un bébé ! crie Tony au public.
Tout le monde applaudit et Angie descend de la scène pour courir vers son mari,
qui la prend dans ses bras et la fait tourner dans les airs.

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– Mamma, dit Tony au micro. Est-ce que j’ai ta bénédiction ? Est-ce qu’Hector
peut devenir un membre officiel de la famille ? Je sais que tu voulais que je fasse
ma vie avec une femme catholique de bonne famille, mais ça ne me rendra pas
heureux. Hector et moi allons fonder une famille, Mamma. On en a parlé. Je sais
que c’est dur à accepter pour toi. Mais je t’ai prévenue en début de semaine et tu
savais que ce moment arriverait. Ça a toujours été Hector, Mamma.
Mona hoche la tête et se couvre la bouche avec ses mains, secouée par les
sanglots.
– Je t’aime, Mamma, mais j’aime aussi Hector, dit Tony en allant vers elle. Mon
avenir est avec lui et je ne peux plus faire semblant. Je ne peux plus vivre ma vie
en sacrifiant mon bonheur et celui d’Hector. Ce n’est pas juste.
Mona prend son fils dans ses bras.
– Espèce d’imbécile. J’aurais compris, avec le temps. Je comprends l’amour. Je
sais ce que c’est lorsqu’un autre représente tout à ses yeux. C’est ce que ton père
était pour moi. Si c’est ce qu’Hector est pour toi, alors rien ni personne ne
devrait vous empêcher d’être ensemble. Je t’aime. Je vous aime tous les deux,
dit-elle en posant sa main sur la joue d’Hector. Maintenant, tu seras vraiment
mon fils, même si tu l’as toujours été, n’est-ce pas ?
Les larmes d’Hector se remettent à couler et elle les essuie avant de les prendre
tous les deux dans ses bras.
– Je veux juste que mes garçons soient heureux.
Voilà. Le reste de la nuit est une véritable fête. Pour Hector et Tony, pour
Angelina et Rocko. J’apprends en discutant avec Angelina que Tony est allé voir
chacune de ses sœurs, durant la semaine, pour leur annoncer qu’il était gay, qu’il
aimait Hector et qu’il allait lui demander de l’épouser. Apparemment, ses sœurs
s’en doutaient depuis longtemps, mais elles n’en parlaient jamais. Puis, quand je
suis arrivée, elles ne savaient plus quoi penser.
Angie a passé la semaine avec Tony pour réfléchir à comment gérer au mieux
l’annonce sans affecter le nom des Fasano. La chargée de relations presse a lancé
une campagne sur « L’amour sous toutes ses formes » pour faire taire les
médisants. Apparemment, les responsables de l’émission de télé sont ravis, car
ça élargit automatiquement leur panel de spectateurs. L’idée est que chaque jour

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de la semaine sera consacré à un des enfants Fasano, et à la mère, et ils sont ravis
de pouvoir montrer Tony et Hector cuisiner ensemble.
En fin de compte, l’amour l’a emporté et la famille Fasano n’en est que plus
forte.
*
* *
C’est l’aube d’une journée radieuse et je traîne ma valise jusqu’à l’ascenseur,
repensant à la soirée d’hier qui a été tout simplement magnifique. Les Fasano
n’ont pas cessé de parler de toutes les possibilités qui s’offraient à eux et à
l’entreprise qui ne pouvait que se porter mieux. Tony a même avoué à sa famille
ce que je faisais là, sans toutefois dire que je suis une escort, parlant de moi
comme d’une amie. Après un mois avec ces deux garçons, c’est justement ce
qu’ils sont devenus. Mes amis.
Je laisse un mot à côté d’une nouvelle bouteille de Jamison que j’ai achetée hier
en me promenant, et je me baisse pour embrasser ma signature.
Tony & Hector,
Je vous quitte, le cœur heureux et les larmes aux yeux. Ma rencontre avec vous
m’a ouvert les yeux quant aux merveilles que la vie peut offrir si on s’autorise à
prendre des risques. Tu en as pris, Tony, et maintenant ta vie sera à jamais
remplie de joie. Peut-être pourrai-je en faire de même à l’avenir. Merci de
m’avoir montré la voie du courage.
Hector, nos conversations et nos séances de cinéma vont me manquer et je ne
sais pas comment je vais faire pour m’habiller sans toi. Je suis toujours plus
belle quand c’est toi qui choisis mes vêtements. Plus sérieusement, tu as
énormément d’amour à donner, et je te suis infiniment reconnaissante d’avoir
partagé avec moi… en ami.
Merci à tous les deux de m’avoir ouvert vos cœurs. Je ne sais comment vous dire
à quel point je suis heureuse pour vous. Envoyez-moi des nouvelles, et j’attends
mon faire-part de mariage !
Votre amie,
Mia

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C’est vrai, j’ai beaucoup appris de Tony et d’Hector. J’ai appris à ne pas avoir
peur, à ne pas laisser quelqu’un d’autre choisir à quoi ressemble mon bonheur.
Je vais emporter ce savoir avec moi dans mes aventures afin qu’il me guide sur
le droit chemin. Pour l’instant, ce chemin m’emmène aux côtés de Mason
Murphy, à Boston, dans le Massachusetts.

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AVRIL

Le premier contact avec Mason Murphy est assez rude ! Le joueur phare de
l'équipe des Red Sox est un véritable goujat. Mais il ne connaît pas encore le
caractère bien trempé de Mia qui va rapidement le faire changer d'attitude.

Un mois entourée des joueurs de son équipe de base-ball favorite, Mia est aux
anges. Pourtant, son bonheur va être entaché d'une mauvaise nouvelle. Pourra t-
elle surmonter cette déception ?

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Chapitre 1

– Salut, Beauté.
Ce sont les premiers mots qui sortent de sa bouche – qui, au passage, est
terriblement sexy. Dommage que ses paroles et la façon dont ses yeux me
reluquent des pieds à la tête me fassent bouillir… de rage. Adossé à sa
limousine, Mason Murphy porte des lunettes de soleil d’aviateur, ses cheveux
sont châtain foncé avec des reflets roux, et son sourire en coin fait sans doute
fondre les culottes de ses fans. Heureusement pour moi, je suis désormais
habituée à être entourée de mecs canon.
Je lui tends la main, et il m’étudie en remontant ses lunettes sur sa tête, révélant
de magnifiques yeux verts.
– Quoi, tu m’embrasses pas ?
Je le dévisage en fronçant les sourcils et en croisant les bras.
– Tu es sérieux ? C’est ça, ton plan drague ?
Il enlève ses lunettes et mordille une branche en me matant de nouveau des pieds
à la tête.
– Cette fougue ? J’aime les nanas coriaces.
Je cligne plusieurs fois des yeux pour m’assurer que je ne rêve pas. Peut-être le
somnifère que j’ai pris avant de décoller fait-il encore effet. Je suis toujours sur
les nerfs quand je prends l’avion, mais ce n’est rien à côté de ce que je ressens
maintenant.
Il écarquille les yeux et sourit jusqu’aux oreilles. Il a vraiment un très beau
visage, des pommettes hautes, un petit creux dans le menton, des yeux
étincelants et diaboliques. Il fait un pas vers moi, passe un bras autour de mon

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cou et m’embrasse sur la tempe, pendant que je me retiens de ne pas lui en coller
une.
– Tu vas enlever ton bras et reculer. Tu as oublié tes bonnes manières ou quoi ?
Mason ancre fermement ses pieds dans le sol et approche son visage comme
pour me confier un secret.
– Je sais ce que tu fais et ça me va parfaitement. J’en suis ravi, même. On va
beaucoup s’amuser, toi et moi.
Je pose ma main entre ses pectoraux et le pousse pour éloigner son visage du
mien. Reprenons à zéro.
– Écoutez, Monsieur Murphy…
– Monsieur Murphy ? Hmmm, ça me plaît.
J’inspire lentement et je serre la mâchoire. Ce type est insupportable.
– Ce que j’essayais de dire avant que vous ne m’interrompiez, c’est que vous
faites erreur à mon sujet. Je suis une escort, ce qui signifie que je dois vous
accompagner à divers événements publics et que je vous tiendrai compagnie de
manière amicale.
Il se rapproche de nouveau, saisit mes hanches et les plaque contre les siennes.
– J’ai hâte qu’on soit amicaux, susurre-t-il en frottant son bassin contre le mien,
me faisant sentir son érection grandissante.
Je soupire et le repousse en décidant de lâcher l’affaire.
– Contente-toi de prendre mes sacs.
C’est alors qu’il siffle son chauffeur, comme un chien, et je grimace en enlevant
ses mains de mes hanches.
– T’en fais pas, Bébé, tu t’habitueras tôt ou tard, dit Mason.
Je lève les yeux au ciel et j’ouvre moi-même la portière pour me faufiler à
l’intérieur. Il me suit et, une fois installé en face de moi, frappe dans ses mains.
– Tu veux un petit remontant ?
J’écarquille les yeux.
– Il n’est même pas midi ?
– Il est midi quelque part dans le monde, lance-t-il en me faisant un clin d’œil.
Il ouvre le minibar et en sort une bouteille de champagne en se léchant les lèvres.
Mon corps réagit instantanément, je ressens des fourmillements entre les jambes.

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Je secoue la tête et croise les cuisses. Ce type est un enfoiré, mais je ne peux pas
nier que c’est un très bel enfoiré. Mason Murphy doit mesurer un mètre quatre-
vingts et quelques, et son corps mérite toutes les unes de magazines qu’il a déjà
faites. Les muscles de ses biceps sont délicieusement gonflés sous sa chemise et
ses quadriceps grossissent quand il coince la bouteille entre ses cuisses pour faire
sauter le bouchon.
– Maintenant, ma douce, mettons une ou deux choses au clair, annonce-t-il.
J’écarquille les yeux en haussant sévèrement les sourcils. Il me tend une coupe
de champagne et, même s’il n’est que dix heures du matin, je décide de la
prendre en espérant qu’elle me détende un peu.
– Tu es ici pour être ma petite amie. Donc, si nous voulons que mes fans, mes
sponsors potentiels et les médias y croient, toi et moi allons devoir être très
amicaux, et vite. Et à te regarder…
Il se lèche de nouveau les lèvres en promenant ses yeux de mes bottes jusqu’à
mes seins. Quel porc ?
– … je vais adorer.
Ce mec ne va pas être facile. Il est arrogant, sexy, hyper-agaçant, cochon,
bougrement sexy et immature. J’ai oublié quelque chose ? Ah oui, il est
terriblement sexy.
Il recule dans son siège, sourit et boit sa coupe cul sec. Il est hors de question
que ce gamin ait le dernier mot, alors je décide d’en faire de même et de vider
mon champagne. Il hausse les sourcils et ses yeux étincellent d’approbation.
Je m’avance vers lui, saisis la bouteille pour me resservir un verre, puis je lui
fais signe de lever le sien.
– Ok. Écoute-moi bien parce que je ne le répéterai pas, dis-je en remplissant sa
coupe et en le fusillant du regard. J’ai peut-être été embauchée pour jouer le rôle
de ta petite amie pendant un mois, mais je ne suis pas ta pute. Coucher avec toi
est une option, et ce n’est pas dans mon contrat. Tu aurais dû le lire
correctement, mon pote, parce que tu es sur le point de vivre un mois
d’abstinence.
Il me regarde bouche bée, les yeux ronds.
– Tu te fous de ma gueule ?

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– Pas du tout. Va falloir t’habituer à passer du temps avec ta main, parce que si
la presse te voit au bras d’une des pimbêches qui sont prêtes à vendre leur mère
pour une nuit avec toi, elle saura que notre histoire n’est qu’une mascarade, et
les cent mille dollars que tu as payés pour m’avoir n’auront servi à rien.
J’imagine que tes sponsors n’aimeraient pas que tu n’arrives pas à garder ta
nouvelle copine plus d’un jour. Ah, et souviens-toi que mon salaire n’est pas
remboursable.
Je recule dans mon siège, croise les bras et sirote mon champagne, laissant les
bulles danser sur ma langue et chatouiller mes sens.
Mason me dévisage d’un air confus.
– Alors, qu’est-ce que tu proposes, ma douce ?
– D’abord, arrête de m’appeler ma douce.
– Je ne peux pas avoir un surnom affectueux pour ma copine ?
– Peut-être, mais ta façon de le dire te donne l’air plouc.
Mason éclate de rire, ce qui détend soudain l’atmosphère. Peut-être que si
j’entends son rire tous les jours, le mois à venir ne sera pas si affreux. Il se lèche
les lèvres et je sens mon entrejambe mouiller de plus belle en imaginant sa
bouche entre mes cuisses. J’ordonne mentalement à ma libido de se calmer.
Depuis ma folle nuit avec Wes, il y a deux semaines, je suis plus chaude que
jamais, or, je n’ai pas la moindre chance d’assouvir mes envies. Comme il est
hors de question que mon nouveau client devienne un compagnon de chambre, il
semblerait que je doive, moi aussi, accepter un mois d’abstinence. Merde.
Je finis par lui dire :
– Écoute, ce n’est pas grave, laisse tomber. Je crois qu’on devrait apprendre à
mieux se connaître. Parle-moi un peu de toi.
Il pose une immense main sur son genou et regarde par la fenêtre.
– Il n’y a pas grand-chose à dire. Ma famille est irlandaise. Mon père est éboueur
alors que je lui ai dit qu’avec mon salaire il n’avait plus besoin de travailler,
mais il refuse d’arrêter. Il est trop fier et trop têtu.
– Il m’a l’air d’être quelqu’un de bien.
Contrairement à mon propre père. Je regrette immédiatement cette pensée car,
techniquement, ce n’est pas vrai. Il a fait du mieux qu’il pouvait étant donné les

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circonstances. Il s’est effondré lorsque ma mère l’a quitté, certes, mais personne
n’est réellement équipé pour supporter la perte de l’amour de sa vie.
Mason sourit, révélant des dents blanches et une canine juste assez tordue pour
donner du caractère à son sourire.
– Mon père est génial, mais il travaille trop. Il a toujours bossé comme un
malade pour nous nourrir, mes frères et moi.
– Tu as combien de frères ?
Il lève trois doigts tout en avalant une gorgée de champagne.
– Mes frères sont complètement tarés, mais je les adore. Ils vont adorer que je
cohabite avec une nana aussi bonne que toi.
Et revoilà l’enfoiré. Je secoue la tête et je respire lentement.
– Ok, trois frères. Plus jeunes ou plus vieux ?
– Plus jeunes. Brayden a vingt et un ans, Conner dix-neuf et Shaun dix-sept. Il
est encore au lycée.
– Waouh, quatre garçons, dis-je en posant mon verre vide.
– Ouais. Brayden est barman le soir et il va à la fac la journée. Il a engrossé une
nana juste après le lycée. Cette garce lui a laissé le gamin et elle s’est barrée.
Je le dévisage, bouche bée. Comment une femme peut-elle abandonner son
propre enfant ? Cela dit, c’est précisément ce qu’a fait ma mère. Toutefois,
entendre que c’est arrivé à un autre gamin me met hors de moi.
– Du coup, Bray habite avec papa et sa fille, Eleanor.
– C’est vieux jeu comme prénom, non ?
– Ouais, dit-il en regardant par la fenêtre. C’était le prénom de maman. Elle est
morte il y a dix ans d’un cancer du sein. Donc, ça fait longtemps qu’on n’est
qu’entre mecs.
Je me penche un peu pour poser ma main sur son genou.
– Je suis désolée. Je ne savais pas.
– C’était il y a longtemps… Bref. Connor est à l’université de Boston et Shaun
passe ses journées à fourrer ses doigts dans des minous d’adolescentes.
Je pousse un grognement dégoûté.
– Quoi ?
– Rien.

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À quoi bon lui expliquer que je me serais volontiers passée de cette dernière
information ?
– Alors, quels sponsors et quelles pubs tu vises ? je demande.
*
* *
Lorsque nous arrivons chez lui, je suis surprise d’être accueillie par une belle
blonde un peu trop maigre. Je considère que j’ai un poids plutôt normal pour une
femme de mon âge, or celle-ci est taillée comme un mannequin. Elle ressemble
un peu trop à une Barbie, à mon goût : ses cheveux blond platine sont attachés
dans un chignon parfait, ses yeux bleus sont étincelants, sa bouche rose, son
tailleur noir impeccable. Elle respire le fric et l’efficacité, mais sa façon de
regarder Mason est loin d’être professionnelle.
– Euh, Monsieur Murphy, commence-t-elle avant de bouder lorsqu’il passe
devant elle sans un regard.
Je m’arrête sur la marche devant Barbie, et lorsqu’elle cesse enfin de mater le cul
de Mason, elle daigne tourner la tête vers moi.
– Chéri, cette jolie blonde essaie d’attirer ton attention, dis-je à mon client sans
quitter l’autre femme des yeux. Et tu as oublié mes valises, enfoiré, je marmonne
à voix basse.
– Je vous demande pardon ? dit-elle en tendant l’oreille.
– Je suis Mia Saunders, la petite amie de Mason.
La blonde ferme les yeux et inspire lentement comme pour se calmer.
– Je sais qui vous êtes, Mia, c’est mon équipe et moi qui lui avons suggéré de
vous embaucher. Je suis Rachel Denton, sa chargée de relations presse. Je vais
travailler avec vous pour vous aider à convaincre le public que vous êtes
ensemble. Normalement, ce serait le rôle de son agent, mais je me suis proposée
de le remplacer, explique-t-elle en se mordant la lèvre.
– Dans ce cas, nous nous serrerons les coudes, il a un sacré caractère, je réponds
en souriant.
C’est alors que Mason apparaît de nouveau à la porte.
– Tu t’es perdue, Beauté ? demande-t-il d’une voix moqueuse.
Je lève les yeux au ciel et saisis Rachel par l’épaule pour l’attirer à mes côtés.

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Mason semble la remarquer pour la première fois – et quand je dis remarquer, je
veux dire de la tête aux pieds… deux fois.
– Rachel, qu’est-ce que tu fais là ? Je croyais que c’était Val qui devait bosser
avec nous ?
Elle secoue la tête en rougissant.
– Non, Val est super-occupé avec les sponsors et les pubs.
– Ok. Je ne peux pas dire qu’il va me manquer, répond-il simplement.
Soudain, cette femme à l’attitude si sérieuse se met à glousser en réaction à la
réponse de Mason. Quant à lui, son regard semble s’adoucir en la regardant. Il
ouvre la porte et nous invite toutes deux à entrer.
– Euh, mes valises ?
– Ah oui.
Il s’arrête, regarde Rachel, fait un pas en arrière et se cogne à la porte, puis il
sourit bêtement.
– Je vais juste… euh… chercher les sacs, dit-il enfin.
Je regarde partir ce pervers trop confiant qui semble se liquéfier en présence de
Barbie. Quant à elle, je ne peux pas dire qu’elle masque mieux l’intérêt qu’elle
porte à son client. Ses joues sont rosées et elle se mord toujours la lèvre.
– Tu le kiffes ? je lui demande en désignant Mason.
Elle hoche la tête en silence avant d’écarquiller les yeux.
– Non ? Quoi ? Tu te trompes ? Notre relation est purement professionnelle,
s’empresse-t-elle de dire.
Elle croise fermement les bras, mais je ne peux m’empêcher de rire.
– Si tu le dis…
Et j’entre dans la maison. Je creuserai cette histoire plus tard, histoire de
m’occuper un peu. Si je dois faire vœu d’abstinence pendant un mois, autant
m’amuser, non ?
Mason largue mes affaires dans le hall d’entrée de sa maison typiquement
bostonienne. Dans le centre du salon se trouve un canapé en cuir noir, et en face,
suspendu au mur, il y a un énorme écran plat, entouré de maillots de base-ball
signés et encadrés. Apparemment, il prend soin des choses auxquelles il tient.

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Peut-être Mason Murphy a-t-il deux faces. En tout cas, je l’espère, si je dois
passer un mois à faire semblant d’être sa copine.
– Alors, qu’est-ce qui t’amènes ici, Rach ? demande-t-il.
Rach. Il a raccourci son prénom. Seuls les gens qui se connaissent bien ou qui
sont intimes se donnent des surnoms.
Elle s’assied sur le canapé et croise les jambes, faisant remonter sa jupe sur ses
cuisses, ce que Mason ne manque pas de remarquer. Je ricane, mais aucun des
deux ne semble m’avoir entendue. D’ailleurs, ils ont l’air d’avoir oublié que je
suis là.
– Je voulais juste m’assurer que vous étiez tous les deux prêts pour demain. Ce
sera votre première apparition en public en tant que…
Elle se racle la gorge et remet une mèche derrière son oreille. Celle-ci refuse d’y
rester et retombe sur sa joue, sous le regard fasciné de Mason qui semble vouloir
la toucher ou caresser sa joue.
– … euh, en tant que couple. Il faut que ce soit réaliste, que vous vous teniez la
main, que vous vous touchiez, que vous souriiez… euh… que vous vous
embrassiez, ajoute-t-elle en se raclant la gorge. Est-ce que ça vous pose un
problème, Mademoiselle Saunders ?
Je la regarde en écarquillant les yeux.
– Et vous, est-ce que ça vous pose un problème ? je répète d’une voix incrédule.
Ça ne fait que dix minutes que je les ai rencontrés, mais il est évident qu’ils sont
fous l’un de l’autre. Pourquoi font-ils semblant, bon sang ?
Rachel recule comme si je venais de la gifler.
– Je vous demande pardon ? Pourquoi ça me poserait problème ?
– Vous êtes sérieuse ? je rétorque en secouant la tête.
– Je crois que Mia veut savoir si les démonstrations d’affection en public posent
problème aux sponsors ou à l’agence, intervient Mason.
Non, ce n’est pas du tout ce que je demande. Sur quelle planète ai-je atterri en
descendant de cet avion ? Je soupire et décide de jouer leur jeu jusqu’à ce que je
comprenne leur véritable relation.
– Ouais, c’est ça, je réponds.
Rachel serre les dents, et je vois ses épaules se crisper.

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– Notre équipe a longuement réfléchi à cette stratégie. Nous sommes conscients
que c’est une approche inhabituelle, mais pour l’instant Monsieur Murphy n’a
pas l’étoffe d’une idole. Il faudra, entre autres, qu’il cesse les barathons, les
soirées trop alcoolisées et même ses cigarettes occasionnelles. Notre équipe
pense que la horde de femmes avec qui il a été aperçu la saison dernière n’aide
en rien son image, d’autant plus qu’il n’a jamais été vu deux fois avec la même.
Nous sommes déterminés à changer les choses, et vous êtes la première étape,
conclut-elle en me regardant.
Je regarde enfin Mason, dont les coudes sont sur ses genoux et la tête dans ses
mains. Si ça, ce n’est pas une posture de défaite… Je me rapproche de lui et pose
ma main dans son dos pour le caresser de haut en bas.
– Bon sang, j’ai vraiment merdé, dit-il en tournant la tête vers moi.
Je le rassure.
– On merde tous de temps en temps. Tu as bien fait d’embaucher Rachel, et ton
agent pense que tu peux changer les choses. C’est déjà bien.
– Ouais, tu as peut-être raison. Alors, tu veux des démonstrations d’affection en
public ? demande-t-il à Rachel, qui hoche la tête. Ça roule ?
Il se tourne vers moi et me regarde d’un air déterminé.
– C’est parti ?
Il pose ses mains sur mes joues, et sa bouche s’empare de la mienne. Je retiens
ma respiration et ouvre la bouche par accident, ce qu’il prend pour une
invitation. Ce n’en était pas une, mais lorsque sa langue au goût de champagne
titille la mienne… je ne peux que lui répondre. Cela ne fait que deux semaines,
mais j’ai l’impression qu’on ne m’a pas embrassée depuis des mois, et je me
noie dans son parfum viril. Il plonge sa langue plus loin dans ma bouche,
exigeant que je lui réponde, ce que je m’empresse de faire en agrippant sa
chemise pour le tirer à moi. Je penche la tête sur le côté, exigeant plus
davantage. Merde, ça ne fait pas partie du plan, ça.
Lorsque nous rompons enfin le baiser, nous sommes tous deux haletants.
– C’était bien comment, ça ? demande Mason en tournant la tête vers le fauteuil
de Rachel.
Rachel n’est pas là, mais ses talons aiguilles résonnent dans le couloir.

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– Rachel ? s’écrie-t-il.
– À demain ? C’était génial ? répond-elle deux secondes à peine avant que la
porte d’entrée ne claque derrière elle.
Mason s’avachit dans le canapé.
– Eh merde ?
– Qu’est-ce qui s’est passé ? je demande.
– J’embrassais une escort canon, pourquoi ? répond-il en me toisant du regard.
Heureusement pour moi, j’ai récemment appris qu’une attirance physique et un
intérêt sincère pour un homme sont deux choses complètement différentes.
– Elle te plaît, dis-je enfin.
– Bien sûr qu’elle me plaît. Elle est sympa et je la paie bien. La situation plaît à
tout le monde.
– Ce n’est pas ce que j’ai voulu dire, et tu le sais.
– Écoute, je meurs de faim et toi, tu dois défaire tes bagages. Rachel et Val t’ont
acheté une tonne de fringues et tous les sacs sont sur ton lit. Je n’ai rien rangé.
Ça faisait partie du deal, non ? Ça te va, de la pizza ?
Il se lève brusquement et s’éloigne avant de se raviser.
Il se tourne vers moi et me tend la main.
– Merci d’avoir accepté ce boulot, dit-il en m’aidant à me lever. À moins que tu
ne veuilles partager la mienne, ta chambre est au premier étage à droite.
Je secoue la tête, exaspérée, puis je tourne les talons.
– Tu as vraiment un joli petit cul, Mia, dit-il en me mettant une fessée.
Je m’arrête et me tourne vers lui en le fusillant du regard.
– Écoute, petit. Si tu ne veux pas devenir manchot, je te conseille de ne plus
jamais toucher mes fesses.
Il recule face à moi, mains levées.
– Ok, d’accord. Je m’entraînais juste pour demain. Y a pas de mal, ok ?
– Ouais c’est ça, garde plutôt tes forces pour demain.
Je gravis l’escalier, contente d’avoir eu le dernier mot, mais sa réponse me
parvient lorsque j’atteins le premier étage.
– Chérie, tu apprendras vite que je ne manque jamais de forces avec les femmes.
Bon sang, je ne sais pas si je vais réussir à le supporter un mois.

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Chapitre 2

Je n’aurais jamais cru que je trouverais un jour du réconfort dans des vêtements.
Pour moi, c’est un jour que je devrais marquer d’une croix sur le calendrier.
J’enfile un nouveau jean ultra-moulant et un t-shirt des Red Sox et je me retiens
d’appeler Tante Millie pour la remercier mille fois de m’avoir déniché ce boulot.
Certes, mon lanceur de base-ball est un peu brut de décoffrage et il mériterait
une bonne fessée – pas de celles que j’aime mettre au lit  –, mais je suis trop
heureuse que ma tenue requise soit un jean et un t-shirt pour m’attarder sur ce
détail. J’enfile des Converse rouges et je me retiens de sautiller de joie.
Je me regarde dans le miroir en caressant mes fesses. Je suis satisfaite d’être
toujours ferme et de ne pas avoir pris de poids depuis le début de ce job, je mets
toujours du trente-huit et je suis musclée là où je le souhaite et moelleuse partout
ailleurs. Apparemment, mon physique plaît puisque j’ai du boulot tous les mois.
Si tout continue ainsi, j’aurai versé mes six prochains paiements à Blain d’ici la
fin de l’année et je pourrai raccrocher ce job avant Noël. Cela dit, je gagne cent
mille dollars par mois, avec parfois un bonus de vingt briques. Au fond,
pourquoi j’aurais envie d’arrêter ?
Je coiffe mes boucles brunes en deux queues-de-cheval basses – je sais que ça
plaît aux mecs comme Mason  – et je parfais le tout avec une casquette de base-
ball rouge. Je ne sais pourquoi, je pense soudain à Wes. Il est le seul auprès de
qui j’aurais envie de m’investir. Lorsque je suis avec lui, j’ai l’impression que je
ne pourrais pas vivre sans mon surfeur californien. Or, lorsque nous sommes
séparés, je trouve un tas de raisons justifiant que nous ne sommes pas faits pour
être ensemble – il faut croire que je suis douée pour me protéger. Toutefois, je

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dois avouer qu’il me manque. Deux semaines ont passé depuis que je l’ai vu. Il
ne peut pas y avoir de mal à le contacter, si ?
Je sors mon téléphone et je compose son numéro. Sa ligne sonne plusieurs fois,
puis une voix de femme me répond.
– Bonjour ? glousse-t-elle joyeusement.
– Euh, bonjour, je pense que j’ai dû faire un faux numéro.
Elle rit et j’entends des pas sur du parquet, puis le rire tonitruant de Wes.
– Vous appelez pour Weston ? demande-t-elle d’une voix suave que je reconnais
enfin.
Gina DeLuca, une des actrices les plus belles et les plus prisées de Hollywood.
Elle a le rôle principal dans le dernier film de Wes, Honor Code.
J’entends un bruissement au bout du fil, puis la voix amusée de Wes.
– Gina… ma belle, tu ne paies rien pour attendre ? Viens ici, poupée, dit-il.
– Désolée, mais Wes devra vous rappeler. Il est très occupé ? s’écrie-t-elle.
– Je t’ai eue ? s’exclame Wes.
Viennent ensuite des bruits de baisers, suivis par un gémissement de femme.
– Raccroche, grogne-t-il.
Gina pousse une sorte de miaulement et j’ai l’impression de me faire poignarder
en plein cœur. Cependant, je ne parviens pas à raccrocher. Je suis scotchée au
téléphone, comme un piéton devant un accident de voiture. Je n’ai pas le droit
d’être blessée, or je suis anéantie d’entendre Wes avec une autre femme.
Est-ce que c’est ce qu’il ressent en sachant que, tous les mois, je pars vivre avec
un autre homme ? Même si c’est le cas, il a dû s’en remettre, à en croire les
baisers qui me parviennent.
– C’est ton téléphone, pas le mien. Tiens, c’est une meuf, dit Gina.
Wes est sur le point de comprendre qui est à l’autre bout du fil et ce que j’ai
entendu, et le temps ainsi que les battements de mon cœur semblent s’arrêter.
– Merde ? jure-t-il.
– Qu’est-ce qu’il y a, Bébé ? Ok, tu as gagné. Reviens au lit, râle Gina dont la
voix s’éloigne du téléphone.
– Mia, grogne Wes d’une voix torturée. Je suis désolé.
Il hésite :

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– Tu… Ça n’aurait pas dû arriver.
Je secoue la tête, oubliant qu’il ne peut pas me voir. Des larmes remplissent mes
yeux, mais il est hors de question que je les laisse couler. Si je les y autorise, je
vais m’effondrer et je serai bien incapable de jouer le rôle de la joyeuse copine
de la nouvelle star des Red Sox, Mason Murphy.
– Non, t’en fais pas. J’appelais juste pour te dire salut. Alors, salut.
– Salut, répond-il tristement. Merde, Mia. C’est pas… euh… techniquement,
c’est juste… putain ? râle-t-il.
J’entends le bruit d’une porte à l’autre bout du fil, puis le chant des oiseaux. Il
est sans doute sur son balcon dominant Malibu. Si j’étais là-bas avec lui, je le
tiendrais par la taille et je ferais la même chose. Maintenant, il a Gina pour faire
ça.
– Ça ne change rien, dit-il d’une voix étouffée.
– Ah bon ? Pour moi ça change tout, je rétorque.
– Pourquoi ça ? On est amis, non ?
– C’est vrai, on est amis.
– Cette histoire avec Gina… on ne fait que s’amuser. On se détend, c’est tout.
Elle sait que je ne cherche rien de sérieux. Du moins, pas avec elle.
– Mais avec moi, oui ?
Wes expire lentement avant de répondre.
– Ça changerait quoi à la situation si je répondais sincèrement ? Je t’ai tendu la
perche plusieurs fois et tu ne l’as pas saisie. On était d’accord pour mener des
vies séparées jusqu’à la fin de l’année. Tu reviens sur notre promesse ?
Une larme me trahit en coulant sur ma joue.
– Non, Wes, c’est juste que… je crois que je ne m’attendais pas à ce que tu
tournes la page.
– Qu’est-ce qui te fait croire que j’ai tourné la page ? Parce que je couche avec
Gina ? Tu vas me dire que tu n’as pas passé le mois à coucher avec le Frenchie
après m’avoir quitté ?
– Wes… je gronde.
– C’est vrai ? C’est la même chose. Mia, on n’est pas ensemble, mais tu sais que
je ferais n’importe quoi pour être avec toi. Ça va te sembler cliché, mais… j’ai

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des besoins, moi aussi.
Je me mords la lèvre et je m’assieds sur le lit.
– Tu as raison, Wes. Je ne peux pas te demander de m’attendre alors que je ne
suis pas prête à en faire de même. Mais Wes…
Ma gorge se ferme brusquement et je ne parviens pas à finir ma phrase.
– Ma chérie, dis-moi… je t’en supplie… putain, Mia, je ferais n’importe quoi
pour rester dans ton cœur. Rien n’a changé.
Je sais qu’il pense ce qu’il dit, mais c’est faux. Tout a changé.
– Je ne veux pas te perdre, je réponds enfin.
– Mia, je pense à toi tout le temps. Quand tu seras prête et qu’on aura une chance
d’être ensemble… on reparlera de tout ça, d’accord ?
– Ouais, ok. Mais promets-moi une chose, Wes.
– Tout ce que tu voudras, ma chérie.
– Ne m’oublie pas.
Je raccroche sans attendre sa réponse et j’éteins mon téléphone. Je n’ai pas la
force de lui parler plus longtemps. J’ai un boulot à faire et, pour cela, je dois
mettre de côté tous mes problèmes pour pouvoir me concentrer.
Mason Murphy, prends garde, j’arrive ?
*
* *
Je suis tout de suite envoûtée par l’odeur de hot dogs, de pop-corn et de bière. Je
suis dans le stade des Red Sox et, pour une fan comme moi, c’est le paradis.
Mason prend ma main et me guide dans les tunnels souterrains. Je fais de mon
mieux, mais je n’arrive pas à rester calme lorsqu’il m’emmène aux vestiaires, où
des mecs quasi nus et gaulés comme des dieux discutent tranquillement en se
préparant pour le match. Une autre femme que moi se couvrirait sans doute les
yeux, mais c’est le plus beau jour de ma vie et je reluque les joueurs un à un,
comme un adolescent pervers qui mate sa voisine par la fenêtre de sa chambre.
– Eh, Junior, je te présente ma copine, dit Mason à Junior Gonzalez, le premier
receveur des Boston Red Sox.
Je serre fort le biceps de Mason comme une fan hystérique et j’essaie de rester
cool. Il pose sa main sur la mienne, la tapote et me regarde en me lançant un clin

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d’œil.
– Mon pote, dit-il, je crois que tu as une nouvelle fan.
Junior est taillé comme une armoire à glace. Son corsaire moulant s’étire sur ses
cuisses énormes, et un fourmillement naît entre mes jambes. Ses cheveux sont
noirs, courts et épais. Ses yeux sont marron foncé et ses dents tellement blanches
qu’elles paraissent étincelantes à côté de sa peau bronzée.
– Salut ma poule, ça roule ? me demande-t-il en jouant des sourcils.
Je me laisse aller contre Mason comme une adolescente dans une comédie
romantique. Les deux hommes éclatent de rire, mais c’est la bouche de Junior
que je mate. Il est le meilleur receveur de l’histoire du base-ball, et c’est un des
plus beaux hommes sur terre.
– Tu es incroyable, je finis par bégayer.
Il me regarde des pieds à la tête, puis il sourit à son ami.
– Tu es plutôt canon, toi aussi. Tu sais, tu devrais laisser tomber ce minet et
sortir avec un vrai homme.
Mason éclate de rire et je fais non de la tête alors que je rêve de me jeter dans ses
bras. Si je pouvais passer une nuit avec Junior Gonzalez, je n’aurais aucun mal à
oublier ma conversation avec un certain surfeur blond, qui est occupé à se taper
une déesse pour laquelle tous les hommes de la planète se battraient.
– Mason m’a dit que tu… euh… que tu es avec nous pour un mois ? chuchote-t-
il pour me faire comprendre qu’il connaît la véritable raison de ma présence ici.
– Ouaip, je réponds en frappant le torse de Mason.
– Eh, tout doux, rétorque ce dernier en se massant les pectoraux. Mais tu sais
quoi, mec ? C’est la meuf la plus belle du service d’escorts, et elle fait la
mijaurée.
Junior ferme les yeux, baisse la tête et la secoue lentement en regardant Mason
d’un air dépité.
– Mec, quand est-ce que tu vas apprendre que tu ne peux pas traiter les femmes
comme des objets ? Ma belle Mia, j’espère que tu vas l’éduquer à mieux se
comporter, dit Junior.
– Tu peux compter sur moi ?
Je lui fais un clin d’œil, puis je pousse Mason vers la sortie des vestiaires.

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– Bonne chance, ricane Junior. Tu vas en avoir besoin.
– Hélas, je réponds par-dessus mon épaule, la chance n’a jamais été de mon côté
par le passé, et je ne pense pas qu’elle vienne à moi maintenant ?
– Pourquoi aurait-elle besoin de chance quand elle m’a, moi ? rétorque Mason en
souriant.
– Allez, Chéri, viens me montrer ma place, je murmure d’une voix mielleuse en
me collant contre lui.
Il passe son bras autour de mes épaules et m’embrasse sur la tempe.
*
* *
J’ai beau être fan de ce sport depuis toujours, il y a quelque chose que je ne
savais pas à propos du base-ball. Il existe un club d’élite qui s’appelle le WAG –
pour Wives And Girlfriends1. Comme nous sommes en retard, Mason me dépose
avec les WAG et m’abandonne en me fourrant une liasse de billets dans la main.
Ça lui aurait coûté moins cher de me traiter directement de prostituée, non ?
Rien que pour ça, je décide de dépenser la totalité des deux cents dollars en
bières, souvenirs et hot dogs.
Je trouve un siège vide et m’y installe discrètement pour ne pas me faire
remarquer. Une horde de femmes parlent toutes en même temps et à la vitesse de
la lumière, ce qui ne les empêche pas de me reluquer des pieds à la tête. Elles ont
à peu près mon âge, certaines un peu plus, d’autres un peu moins.
Je décide de tenter l’approche amicale d’abord.
– Salut, je lance avec un signe de la main. Je m’appelle Mia.
Quatre têtes se tournent dans ma direction et l’une d’entre elles, sans doute la
meneuse, se penche vers moi.
– C’est toi la nana de Mason pour la soirée ?
Je fronce les sourcils en la dévisageant.
– Euh non, je reste ici un mois. J’arrive de Vegas. On est de vieux amis, mais on
tente notre chance pendant un mois, pour voir si notre relation peut durer ou pas.
Une blonde, assise à deux sièges du mien, fait mine de se retenir de rire.
– Durer ?

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– Mason n’a jamais été en couple, reprend la meneuse de la meute. C’est plutôt
le genre à se taper des nanas dont il ne connaît même pas le prénom.
– Je suis sûre que les nanas savaient à quoi s’attendre, je réponds en lui montrant
que je ne vais pas me laisser faire.
Une femme au visage gentil et aux cheveux blond vénitien pose sa main sur mon
genou.
– Ne l’écoute pas. Elle ne connaît pas Mace. Moi si, et je sais qu’il peut
s’engager s’il trouve la bonne fille, et je suis sûre que c’est toi.
Elle a le sourire et la voix d’un ange, et ses yeux chocolat sont infiniment doux.
– Je suis Mia Saunders, dis-je en lui tendant la main.
– Moi, c’est Kristine, répond-elle en la serrant. Mais tu peux m’appeler Kris. Je
suis avec Junior, ajoute-t-elle en rougissant légèrement. Ça ne fait que trois
mois, mais je suis dingue de lui. C’est pour ça que je connais bien Mason. Junior
et lui sont comme des frères – et c’est sans compter les frères de Mason et le
clan de Junior.
– Junior a une grande famille ? je demande en souriant.
– Ha ? Un peu, oui. Junior a huit frères et sœurs.
– Waouh ?
J’aperçois un vendeur de hot dogs qui vient vers nous.
– Eh toi, là-bas ? Viens par ici ? Je meurs de faim. Tu veux un hot dog et une
bière ?
Le visage angélique et adorable de Kris s’illumine et je comprends pourquoi elle
plaît à Junior.
– Je veux bien, merci, c’est gentil. Vous voyez, les filles, Mia n’est pas une
pimbêche, elle est cool ? annonce-t-elle aux autres.
– Ouais, on verra, dit la brune aux deux autres.
Je hausse les épaules.
– Peu importe. Je ne suis pas là pour elles. Je suis venue voir mon mec envoyer
la pâtée ? Entre ses lancers et les réceptions de Junior… on va gagner les doigts
dans le nez ? je m’exclame en levant ma main pour que Kris tape dedans.
– Mon mec est le meilleur première base du pays, dit une jolie rousse. Je
m’appelle Chrissy.

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– Ravie de faire ta connaissance, Chrissy.
– Et moi, je suis Morgan ? s’exclame une jeune femme aux cheveux châtains.
La meneuse du groupe marmonne dans sa barbe, clairement agacée de perdre du
terrain alors que je suis accueillie chaleureusement par les WAG.
– Elle, c’est Sarah, dit Morgan en la désignant. Elle est de mauvais poil parce
qu’elle et Brett, son mec, se sont engueulés à propos d’une groupie, hier soir.
Brett joue en seconde base.
Je hoche la tête.
– Ah oui, il est canon, je réponds en hochant la tête. Je comprends que les
groupies se jettent sur lui.
Ses épaules s’affaissent légèrement.
– Cette salope a eu le culot de s’asseoir sur ses genoux quand je suis partie aux
toilettes. Il n’a rien fait… enfin, pas grand-chose. Mais il a pris ça pour un jeu et
il l’a attrapée par les hanches ? s’exclame Sarah en fronçant les sourcils avant de
pousser un cri étouffé.
Apparemment, il n’est pas très difficile de se faire de nouvelles amies. Pendant
toutes ces années, je n’ai eu que Gin et Maddy, or à présent, j’ai Jennifer qui est
enceinte à Malibu, et Angie, la sœur de Tony, enceinte elle aussi. Cette
expérience est donc assez nouvelle pour moi – apparemment, il suffit de se
plaindre de son mec pour faire partie de la clique. C’est noté. Je laisse donc
Sarah râler et pleurer à propos de son copain qui est un connard, et à la fin du
premier tour de batte, je suis devenue sa meilleure amie.
Je les fournis toutes en bières et en hot dogs, dépensant avec plaisir les deux
cents dollars que j’ai empochés gratos, et je m’offre même un énorme gant en
mousse rouge avec un index géant. J’en ai toujours voulu un et je décide que,
dorénavant, je l’emporterai partout avec moi.
Lors du premier strike de Mason, je me lève brusquement et je hurle aussi fort
que possible en agitant mon gigantesque index.
– Mason ? C’est ça, montre-leur, Bébé ? C’est mon mec, ça ?
Soudain, j’entends des dizaines de cliquetis et je réalise que plusieurs
photographes ont tourné leur appareil vers moi. Show time. Je souffle des baisers
à Mason et il enlève sa casquette pour la placer sur son cœur. Bon sang, on est

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sacrément bons à ce petit jeu. Il l’a à peine remise qu’il évince un autre joueur de
l’équipe adverse.
Durant le septième tour de batte, Mason rejoint les remplaçants sur leur banc,
qui n’est qu’à quelques mètres du carré réservé aux WAG. Je descends les
marches jusqu’à lui et il se penche par-dessus la rambarde pour m’empoigner par
la nuque. Il sourit jusqu’aux oreilles puis il m’embrasse, offrant aux
photographes un superbe spectacle. Hélas, sincèrement, je ne ressens aucune
excitation, pas la moindre bouffée de chaleur. C’est juste un baiser sympa avec
un beau gosse.
Lorsque je recule, il me regarde en fronçant les sourcils.
– Tu ne ressens strictement rien, c’est ça ? Putain, tu vas anéantir mon ego, ma
douce, rouspète-t-il en plongeant son regard dans le mien.
Le problème, c’est que ce ne sont pas les yeux verts dans lesquels je veux me
perdre. Je souris néanmoins et je passe mes bras autour de sa nuque. Il soulève la
visière de ma casquette et j’appuie mon front au sien.
– Je suis désolée, je pense à Rachel, c’est tout.
Ce n’est pas tout à fait vrai, bien sûr. Je suis triste pour elle parce qu’elle est
clairement dingue de Mason, c’est vrai, mais je suis surtout anéantie par ma
conversation avec Wes.
Mason pose une main sur mon cou et il m’embrasse sur le front avant de me
lancer un clin d’œil.
– Ne le sois pas. Moi, je ne pense pas à elle, dit-il d’une voix faussement
assurée. À tout à l’heure, ma douce.
Je le regarde partir en faisant mine d’être éperdument amoureuse de ma star de
base-ball. Normalement, un mec aussi sexy que lui m’exciterait à n’en plus finir.
Mais je ne suis pas moi-même depuis que Gina DeLuca a répondu au téléphone
de Wes. J’ai l’impression d’avoir perdu un morceau de mon cœur, et l’énergie
qui bouillonne d’habitude en moi a disparu.
C’est injuste et parfaitement ridicule de supposer qu’il allait m’attendre, surtout
quand, de mon côté, je baise avec qui je veux. Or pour moi, quelque chose a
changé lorsqu’il m’a fait la surprise de venir à Chicago. J’ai pensé que je
pourrais peut-être l’attendre. J’aime le sexe comme toutes les filles de mon âge,

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mais avec Wes, c’est bien plus que ça. Des sentiments y ont toujours été mêlés,
ce qui n’était pas le cas avec Alec.
Maintenant, j’ai peur que tôt ou tard Gina comprenne à quel point ce mec est
génial, et c’est alors moi qui perdrai la bataille. Hélas, je n’ai pas le choix. Je
dois faire ce job pour ma famille, et c’est ça la priorité.
Tant que je n’aurai pas remboursé la dette de mon père, je dois me concentrer
sur mon boulot qui consiste à rendre la vie d’un autre plus facile. Ce mois-ci,
c’est Mason, et je refuse de penser qu’il est une cause perdue. Je sais qu’un
gentleman se cache sous ses manières de cochon. Je pense qu’il a choisi de vivre
l’instant présent et que tout l’argent qu’il gagne lui a fait oublier le respect des
autres.
Je me demande s’il est vraiment heureux. J’ai du mal à croire qu’il le soit s’il
doit embaucher une escort pour jouer sa copine. Après tout, il est suivi en
permanence par une horde de femmes qui crient son nom.
Je dois en apprendre plus à son sujet – ce qui l’agace, ce qui lui plaît, pourquoi il
est devenu le coureur de jupons qu’il est ou qu’il fait semblant d’être. Quoi qu’il
en soit, je vais passer un mois avec lui et il est hors de question que je passe mon
temps à chialer. Je vais en profiter pour m’amuser avec un des joueurs de base-
ball les plus beaux du pays et ses amis plus sexy les uns que les autres.
À moi de jouer ?

1. Femmes et copines.

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Chapitre 3

Ma première semaine aux côtés de Mason « Mace ? Murphy s’avère parfaite.


J’ai l’impression d’être en vacances. J’assiste à quatre matchs à domicile et à
trois victoires des Red Sox, et je dois avouer qu’être du côté de l’équipe
gagnante est génial. Nous faisons la fête à chaque fois, et les magazines people
montrent Mason à peu près sobre, sans cigarette et au bras de la même nana :
moi. Il se comporte comme un prince, et les gens le remarquent. Bien sûr, cela
n’empêche pas les magazines de se demander quand il tombera de son piédestal
pour redevenir le bad boy qu’il est réellement. Eh bien, ils peuvent continuer
d’attendre, car ça n’arrivera pas tant que je suis là.
J’ai profité de cette semaine pour réfléchir à propos de Wes et Gina, et j’ai
décidé de les appeler Wesina1 pour que ma colère ne s’estompe pas. C’est
injuste, mais j’ai évité tous ses appels et ses messages – j’en ai eu un de chaque
par jour. Or, je sais que si je veux rester proche de Wes, même comme simple
amie, je dois lui répondre. C’est pour cela que cette fois-ci, lorsqu’un message
s’affiche sur mon écran, je ne l’efface pas sans le lire.
À : Mia Saunders
De : Wes Channing
Ça m’a fait penser à toi pendant le tournage. Parle-moi, s’il te plaît.
Sous son message, je découvre une photo d’une planche de surf plantée dans le
sable avec une superbe vue de l’océan en arrière-plan. Bon sang, le surf me
manque. D’ici à ce que je retourne enfin en Californie, j’aurai tout oublié et il
faudra qu’il me réapprenne toutes les bases. Cette pensée me fait sourire et, sans
réfléchir, je réponds à son message.
À : Wes Channing

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De : Mia Saunders
C’est paradisiaque. Prends quelques vagues pour moi, tu veux ? Ça me manque
de ne pas surfer avec toi.
Je n’ai pas le temps de ranger mon téléphone qu’il vibre de nouveau.
À : Mia Saunders
De : Wes Channing
Tu es vivante ? Bon sang, ma chérie, j’ai bien cru que tu n’allais plus jamais me
parler. Je suis ravi que ce ne soit pas le cas. Comment tu vas ?
À : Wes Channing
De : Mia Saunders
Base-ball, bières, bouffe, Boston… ça ne pourrait pas aller mieux.
À : Mia Saunders
De : Wes Channing
C’est un rêve devenu réalité pour toi. Et les autres lettres de l’alphabet ?
Je me dépêche de répondre, car cela fait trop longtemps et la tension était trop
vive entre nous. Nous devons trouver un moyen pour que la situation nous
convienne à tous les deux. La triste vérité est que nous tenons énormément l’un à
l’autre, mais que nous ne pouvons pas être ensemble. Or, ça ne veut pas dire que
nous ne ressentons rien. En revanche, je dois accepter qu’il ait des relations
sexuelles avec d’autres femmes. Je ne peux pas lui demander de faire vœu de
célibat alors que je ne le fais pas de mon côté.
À : Wes Channing
De : Mia Saunders
Les autres n’ont pas d’importance puisque j’ai tout ce dont j’ai toujours rêvé ?
Bien évidemment, j’ai beau essayer de garder la conversation détendue, Wes ne
peut pas s’empêcher de parler de choses sérieuses.
À : Mia Saunders
De : Wes Channing
Même si le reste, c’est la Californie, les Câlins et les Cabrioles avec les
Channing… ?
J’éclate de rire. C’est tout lui, ça, de mélanger le sérieux aux blagues.
À : Wes Channing

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De : Mia Saunders
J’ai déjà goûté aux cabrioles d’un Channing, et c’était génial.
Je suis déterminée à faire en sorte que la conversation reste fun et légère, sinon
je risque de perdre Wes pour de bon. Oui, l’idée qu’il couche avec Gina a failli
m’anéantir, mais j’ai eu la semaine pour y penser et, même si je meurs d’envie
de tout plaquer pour prendre le premier vol pour Los Angeles et récupérer mon
homme, c’est tout simplement impossible. Les choses ne sont pas sérieuses entre
Wes et Gina et, si elles le devenaient, je serais obligée de l’accepter.
À : Mia Saunders
De : Wes Channing
Les cabrioles t’attendent. Il te suffira de claquer des doigts.
À : Wes Channing
De : Mia Saunders
Espèce de fou ? Va surfer ? ne laisse pas les vagues t’échapper. On se reparle
dans quelques jours. Le devoir m’appelle.
De : Wes Channing
À : Mia Saunders
Fou oui, mais de toi.
C’est la dernière chose qu’il m’écrit. Fou de moi. Je suis folle de lui, moi aussi,
mais je ne veux pas me lancer dans une conversation aussi sérieuse. Il nous faut
du temps – beaucoup de temps  – pour nous remettre de nos déceptions. Il sait
que je me tape d’autres mecs, et je sais qu’il se tape Gina.
– D’où vient ce sourire, ma douce ? demande Mace en entrant dans ma chambre
d’hôtel, vêtu d’un sublime costume trois-pièces.
Bon sang, ce mec est canon dans un uniforme de base-ball comme dans un jean
troué, mais en costard… il a un côté professionnel qui me plaît et qui m’excite.
Mason sourit et fait jouer ses sourcils en faisant lentement un tour sur lui-même.
– Ça te plaît ?
– Tu sais bien que oui. J’ai hâte que Rachel te voie. Elle a passé la semaine à se
planquer.
Mason fronce les sourcils.

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– Tu te trompes à propos de Rachel et moi, tu sais. Il va falloir que tu lâches
l’affaire.
– C’est hors de question. J’ai vu comment vous vous regardez, tous les deux.
Elle te kiffe. Je ne sais pas pourquoi elle ne dit rien.
– Elle ne me kiffe pas. Elle devrait bientôt arriver pour nous emmener à Power
Up.
Nous entendons alors frapper à la porte, et je souris jusqu’aux oreilles avant
d’aller ouvrir aussi vite que mes talons aiguilles me le permettent. Rachel est en
tailleur, comme d’habitude, mais celui-ci est gris. Une chemise rose pâle met en
valeur la fraîcheur de ses joues et sa peau légèrement hâlée. Cette fois, ses
cheveux sont attachés dans une queue-de-cheval basse et l’élastique est caché
par ses cheveux. Il faudrait que je lui demande comment elle fait – ça pourrait
me servir et je pourrais l’apprendre à Gin et Maddy, aussi.
– Salut Rachel, comment tu vas ? je demande en ouvrant grand la porte.
Elle me regarde de haut en bas plusieurs fois. Je suis vêtue d’une jupe crayon
taille haute en cuir, assortie d’un chemisier blanc très ample et bouffant. La jupe
moule mes fesses et le chemisier laisse entrevoir une bonne dose de décolleté
sans que ce soit trop aguicheur. Je pense que c’est le genre de tenue que
choisirait la copine d’un joueur de base-ball sexy.
– Ta tenue est ouvertement sexy, dit Rachel en grimaçant. Cette jupe est censée
être assortie d’une chemise cintrée, ajoute-t-elle.
– Euh, d’accord, mais je n’ai apporté aucune chemise cintrée parce que je
pensais qu’elles allaient avec les pantalons, je réponds d’une voix coupable.
Mason fait son apparition et j’entends Rachel retenir sa respiration. Ses yeux
scintillent et elle se mord la lèvre. Cette nana est complètement folle de lui.
Pourquoi Mason ne le voit-il pas ? Lorsque je me tourne vers lui, il fait un tour
sur lui-même pour la deuxième fois en cinq minutes.
– Alors ? Est-ce que j’ai l’air du nouveau porte-parole de Power Up et de Quick
Runners ?
Rachel hoche la tête en silence.
– Apparemment, toi tu es parfait et moi j’ai l’air d’une traînée, je marmonne en
empoignant ma pochette.

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Mason fronce les sourcils et me prend par la taille pour me ramener contre lui. Il
baisse la tête et me regarde d’un air inquiet. Je tourne la tête vers Rachel qui fuit
mon regard.
– Eh ma douce, tu es superbe, méga-sexy. Les médias t’ont vue en jean et en t-
shirt toute la semaine, il est temps qu’ils te voient en tenue habillée. C’est
comme ça que j’aime les femmes de toute façon. Tu crois vraiment que les boss
le croiraient s’ils me voyaient au bras d’une nana frigide qui a un balai dans le
cul ?
Les épaules de Rachel s’affaissent soudain et elle détourne la tête. Sans doute se
dit-elle qu’elle est la définition même d’une nana frigide avec un balai dans le
cul. Ma mission secrète « Aider Rachel Et Mason À Se Choper ? ne va pas être
facile. Il me faut une nouvelle stratégie.
J’embrasse Mason sur la joue, puis je l’essuie pour enlever la trace de rouge à
lèvres.
– En parlant de sexy, tu ne trouves pas Rachel jolie dans son tailleur ?
Mason sourit en la matant des pieds à la tête.
– Je cracherais pas dessus… dit cet abruti, méritant le coup que je lui mets dans
le bras.
– Combien de fois je t’ai dit de ne pas te comporter comme un enfoiré ? je
demande.
– Désolé, Rachel, répond-il en se frottant l’épaule. Mais tu sais bien que je me
ferais un plaisir de te choper. Aïe ? s’exclame-t-il quand je le frappe de nouveau.
Arrête de me cogner, bon sang ?
– Alors, arrête d’être un enfoiré ?
– Arrêtez, tous les deux, intervient Rachel. Mia, c’est rien, je suis habituée aux
cochonneries de Mason, depuis le temps.
– Ça ne change pas le fait qu’il est immature et dégoûtant.
Rachel éclate de rire, et je réalise que même son rire est adorable.
– C’est vrai. Je vous remercie néanmoins du compliment, Monsieur Murphy.
– Combien de fois je t’ai dit de m’appeler Mason ou Mace, Rachel ? grogne-t-il.
On se connaît depuis deux ans. On est plus que de simples collègues, du moins
je l’espère.

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Elle lève les yeux dans les siens et joint les mains devant elle en se triturant les
doigts.
– Oui, euh, vous avez raison. Enfin, tu as raison. Je suis désolée, c’est une vieille
habitude. On y va ?
– Est-ce que je dois me changer ? je demande.
Je suis là pour redorer son image, or apparemment je n’ai rien compris en termes
d’habillage approprié.
Rachel me reluque une nouvelle fois avant de répondre.
– Tu es très belle, Mia. Comme toujours. Je suis désolée, j’ai mal réagi. Tout va
bien. Ne faisons pas attendre nos sponsors potentiels.
Elle ouvre la porte et nous sortons tous les trois.
*
* *
Pour une entreprise de boissons énergisantes qui cible des jeunes athlètes,
l’équipe de Power Up est étonnamment ennuyeuse. Les murs des bureaux sont
noirs et blancs avec des photos montrant la bouteille de leur boisson sur un fond
blanc. Je n’y connais rien, mais je m’attendais plutôt à des photos de sportifs
extrêmes en pleine action. À mon avis, ils ont plus besoin de Mason que ce
dernier n’a besoin d’eux. S’ils veulent une chance de rivaliser avec les gros de
l’industrie, comme Gatorade, ils ont sérieusement besoin de rajeunir leur image.
Rachel n’est pas là pour être jolie, comme moi, et je comprends vite pourquoi
elle peut se permettre des tailleurs haute couture. Lorsqu’elle finit de parler, les
dirigeants de Power Up – tous des hommes  – lui mangent dans la main. Elle leur
promet que Mason sera beaucoup plus présent dans les médias, mais que ses
statistiques sur le terrain prouvent qu’il n’est pas que de passage chez les pros.
Elle leur explique également que les jeunes adorent les bad boys qui ont retrouvé
le droit chemin, et elle leur présente différentes manières de redorer leur image à
travers Mason. Elle leur promet que son équipe marketing travaillera avec la leur
afin de créer des campagnes de pub qui seront bénéfiques aux deux entreprises.
Enfin, l’agent de Mason parle argent.
Apparemment, le job de porte-parole d’une boisson sportive vaut des millions.
Lorsqu’ils se mettent à parler chiffres, je manque m’étouffer. Je ne comprends

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pas que quelques pubs, une dizaine de photos et de poignées de main valent
autant d’argent. Cela dit, je suis payé cent mille dollars pour avoir l’air jolie au
bras de quelqu’un. Les gens sont complètement fous.
Lorsque nous avons fini chez Power Up, dont les patrons répondent qu’ils vont
réfléchir et qu’ils prendront une décision dans la semaine, nous nous rendons en
limousine au siège de Quick Runners. Apparemment, ce sont les prochains
Reebok ou Nike, et ils ont besoin d’un peu de pub pour les mettre au-devant de
la scène. Mason Murphy, le meilleur lanceur de base-ball du moment, est
justement celui qu’il leur faut, et Rachel s’assure qu’ils le comprennent.
Quick Runners n’a rien à voir avec Power Up, où les cadres étaient en costard.
Ici, les gens semblent tout juste sortis de la fac et ils sont tous en jean, polo et
baskets. Nous quittons leurs bureaux avec un accord verbal pour une montagne
de millions de dollars et, du moment que Mason garde une image impeccable, ils
respecteront leur part du deal.
Les portes de l’ascenseur sont en train de se refermer lorsque nous les voyons se
taper dans la main pour se féliciter. De son côté, Mason se tourne vers Rachel et
pose ses mains sur ses joues.
– Tu es une femme in-croy-able ?
Il l’attire dans ses bras et l’embrasse sur la joue, et je reste dans un coin de
l’ascenseur, les mains sur la poitrine, essayant de ne pas hurler de joie. Lorsqu’il
recule, Rachel semble étourdie. Ensuite, il me saisit par la taille pour me prendre
dans ses bras et je sautille en criant comme une folle.
– Tu as vu ça ? Ils étaient suspendus aux lèvres de Rachel ? C’était génial ?
Mason prend Rachel par les épaules et la tire à ses côtés pour avoir une femme à
chaque bras.
– Mesdemoiselles, aujourd’hui est une grande victoire pour la Team Murphy2.
– La Team Murphy ? je ricane.
Il hoche vigoureusement la tête.
– Ouaip, la Team Murphy. Toi, dit-il en secouant mon épaule, notre reine Rachel
et, bien sûr, le superbe visage de l’équipe, moi.
Rachel et moi soupirons à l’unisson.
– Ça va, les chevilles ?

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– Nickel. Maintenant, il faut fêter ça ?
Rachel écarquille les yeux et le dévisage.
– Mason, on ne peut pas aller traîner dans les bars. Tout le monde te connaît et tu
as un match demain.
– C’est vrai, tu as raison. Dans ce cas, invitons les mecs et leurs copines dans
notre suite. On commande des pizzas, on achète des bières et on se fait une petite
soirée sympa. Vous êtes partantes ?
Des bières, des mecs, de la pizza…
– Carrément ouais ? je m’exclame. Allez Rachel, viens faire la fête, détends-toi
un peu.
– Écoute-la, Rach. Je ne t’ai encore jamais vue détendue, répond Mason. Qu’est-
ce que j’aimerais voir tes cheveux lâchés, tombant en cascades dorées sur ton
joli visage, chuchote-t-il au creux de son oreille.
Rachel a l’air sur le point de s’évanouir de surprise, et peut-être aussi de peur.
– Bon sang, tu sens tellement bon, poursuit Mason en la reniflant. C’est ça, ce
parfum d’amande qui me suit partout ?! C’est toi, ça a toujours été toi ? Tu sens
tellement bon que j’ai envie de te manger.
Il grogne dans son cou et inspire bruyamment avant de reculer en regardant
Rachel comme un lion affamé devant un steak bien saignant.
Les portes de l’ascenseur s’ouvrent et le sort est soudain rompu. Rachel
déguerpit aussi vite que le permettent ses talons aiguilles et elle émerge dans
l’air frais new-yorkais.
– Allons acheter ces pizzas et ces bières. Tu veux appeler tes amis, Mason ?
demande-t-elle en sortant son téléphone, ignorant son air confus.
Il ferme les yeux, puis monte dans la limousine.
– Ouais, Rachel, je vais les appeler.
Je m’assieds à côté de lui et pose ma main sur son genou.
– Tu vois, je te l’avais dit, me chuchote-t-il avant de sortir son téléphone de la
poche de sa veste.
*
* *

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Notre suite est pleine de joueurs des Red Sox et, étrangement, des joueurs des
Yankees. Nous avons commandé deux fûts de bière et environ trente pizzas, qui
disparaissent à la vitesse de la lumière. Bizarrement, il y a plus de femmes que
d’hommes. Apparemment, certains des joueurs célibataires ont invité leurs
groupies qui ont fait passer le message à leurs amies, et ainsi de suite. Il y a
celles qui sont habillées normalement, en jean et en débardeur, et les salopes qui
collectionnent les joueurs et qui sont prêtes à tout pour ajouter un nom à leur
liste.
La fête finit par déraper un peu – voire beaucoup  – à tel point que Rachel et moi
finissons enfermées dans ma chambre, assises sur mon lit, à nous passer une
bouteille de whisky.
– Tu sais, si tu voulais être avec Mason, il te suffirait de le lui dire, dis-je à ma
nouvelle amie, maintenant que l’alcool a anéanti mon filtre.
Elle grimace et soupire en gonflant ses joues et en désignant sa tenue débraillée.
– Tu crois qu’il a envie de ça ?
Elle porte toujours sa jupe, mais sa chemise rose est froissée. Sa queue-de-cheval
est tirée sur le côté et son mascara a coulé sous ses yeux. Quant à moi, je dois
faire peur à voir. J’ai enlevé mon chemisier haute couture et je l’ai troqué contre
un débardeur, mais j’ai gardé ma jupe parce que je la trouve « guedin3 ?, comme
dirait Ginelle, ma meilleure amie.
Je me dresse sur les genoux, me place derrière Rachel et défais sa queue-de-
cheval.
– Waouh. Tu es vraiment canon ? je m’exclame en buvant une gorgée avant de
lui repasser la bouteille.
J’attrape un mouchoir dans la boîte sur la table de chevet et j’essuie son mascara.
– Voilà, maintenant tu es encore plus canon ? Mais il faut que tu te détendes un
peu. Tu te fais trop de soucis, je bafouille avant de me laisser tomber sur les
oreillers.
Rachel se pince fermement les lèvres, ce que j’ai pris l’habitude de la voir faire.
Cela signifie qu’elle réfléchit sérieusement à ce que je viens de lui dire.
– Ouais, tu as raison. Il faut que je sois un peu plus comme toi. Libre, jeune et
prête à croquer la vie à pleines dents ?

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Elle lève un bras en l’air en fermant le poing, mais son manque d’entrain lui
donne l’air de tenir une torche, comme la Statue de la Liberté. Je me mets à rire
en la regardant et je ne peux bientôt plus m’arrêter. Je ris si fort qu’un
grognement de cochon m’échappe, et Rachel éclate de rire à son tour en me
pointant du doigt.
Lorsque j’arrive enfin à me calmer, je prends sa main et la regarde sérieusement.
– Tu devrais foncer, tu sais. Ce soir.
– Quoi ? ! s’exclame-t-elle en écarquillant les yeux.
– Sans rire ? Tu devrais aller le voir et lui dire qu’il te plaît ?
Rachel secoue la tête, bouche bée.
– Tu crois que je devrais lui dire que je le kiffe ?
– Je vais t’aider ? je m’écrie en descendant du lit et en l’obligeant à se lever.
Je tire sur sa chemise et je défais les premiers boutons pour révéler un beau
décolleté.
– Qu’est-ce que tu fais ? gronde-t-elle en enlevant ma main.
– À ton avis ? Il y a quatre choses qu’aiment les hommes. La première, c’est les
seins ? Tu en as, donc tu devrais les montrer.
Elle hoche la tête et avance la poitrine.
– Voilà, c’est bien ? Fais ça quand tu es face à Mason. Ok. Ensuite, les hommes
aiment les cheveux, dis-je en ébouriffant les siens. Parfait.
Je pince mes lèvres entre mes doigts et je vacille légèrement.
– Les fesses ? je crie en désignant les siennes.
Je la retourne pour qu’elle soit dos à moi, puis je saisis sa jupe et je la déchire
pour agrandir la fente sur le côté de sorte à révéler ses jambes, puis je lui mets
une petite fessée.
– Excellent ?
– Je ne sais pas, Mia…
– Mais si, tu vas voir, ça va être génial ? Bon, je ne sais plus où j’en étais, mais
la bouche ? Ça, c’est important aussi, les hommes aiment les bouches.
Je me précipite sur ma trousse de maquillage pour en sortir mon gloss et en
mettre à Rachel.

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– Les hommes adorent les lèvres brillantes. Ça les fait fantasmer que tu vas leur
tailler une pipe. Tu aimerais tailler une pipe à Mason ?
Ses joues deviennent soudain écarlates.
– Ouais, chuchote-t-elle néanmoins.
– Ok. Alors, ce sera la phase deux. La première, c’est de faire en sorte qu’il te
regarde et de lui dire qu’il te plaît.
Je saisis la bouteille de whisky et j’en bois une bonne gorgée avant de la tendre à
Rachel.
– À toi maintenant.
Elle m’obéit, puis nous retournons au cœur de la fête. J’ai une mission à
accomplir et je suis convaincue que je vais réussir.
Bon sang, je n’aurais pas pu me tromper davantage.

1. Wes + Gina, référence à Brangelina (Brad Pitt et Angelina Jolie).


2. L’équipe Murphy.
3. Dingue, en verlan.

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Chapitre 4

J’ai souvent entendu que l’enfer est pavé de bonnes intentions, mais c’est la
première fois que je saisis vraiment le sens de cette expression. Je ne me doutais
pas de ce que nous allions trouver en quittant le sanctuaire qu’était devenue ma
chambre. L’ambiance de notre petite soirée tranquille a sacrément changé. Il y a
des gens partout et des nuages de fumée – qui ne proviennent pas seulement de
cigarettes  – remplissent la pièce.
Des corps nous écrasent de part et d’autre et je dois m’agripper à Rachel pour ne
pas la perdre dans la foule. Qu’est-ce qui s’est passé, bon sang ? Combien de
temps sommes-nous restées dans ma chambre ? À voir la façon dont je titube en
marchant… je dirais que nous y sommes restées un bon moment. Je ne reconnais
personne autour de nous, mais je finis par atteindre la chambre de Mason.
Si je ne suis pas préparée à ce que nous découvrons, Rachel – cette pauvre et
naïve Rachel qui est amoureuse de Mason Murphy  – l’est encore moins que
moi. La pièce est plongée dans le noir et la musique est si forte que je ne peux
rien voir ni entendre. Je tire Rachel par la main et je la fais entrer, pensant que
Mason est parti se coucher. Quelle belle surprise ce sera pour lui d’être réveillée
par une femme superbe dont il est déjà dingue ? Bien évidemment, ce n’est pas
ainsi que se passent les choses.
Lorsque mes yeux s’habituent à la pénombre, je découvre que Mason est bien au
lit, mais qu’il n’est pas seul, je veux dire par là qu’il est avec deux femmes très
peu habillées. Choquée – et soudain excitée  –, je regarde Mason se faire sucer
par une femme brune qui, dans mon cerveau imbibé d’alcool, me semble avoir
une sacrée technique. Elle arrive à le prendre profondément dans sa gorge, ce qui
n’est pas rien. La deuxième protagoniste est une blonde pulpeuse qui est face à

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la tête de lit et qui chevauche le visage de Mason en balançant son bassin tandis
qu’il semble engloutir sa chatte. Il semble être pro en la matière, dévorant sa
chair comme s’il était affamé. C’est une des scènes les plus érotiques que j’aie
vues de ma vie. Je suis même en train d’envisager de m’asseoir dans un coin
pour les regarder – et pourquoi pas me masturber au passage  – lorsque j’entends
un sanglot parmi les gémissements.
Des larmes coulent sur les joues de Rachel et elle couvre sa bouche de sa petite
main délicate. Je suis sur le point de l’accompagner dehors lorsque la blonde
s’écrie « Je vais jouir ? ? et je ne peux m’empêcher de regarder la scène. Mason
saisit ses hanches en grognant dans sa chatte pendant qu’elle jouit, puis il
soulève son bassin alors que la brune plonge sa main entre ses cuisses pour se
masturber à son tour. Mason éjacule dans sa bouche et son foutre dégouline sur
son menton tandis qu’elle l’accompagne dans l’orgasme. Putain, je n’ai jamais
vu quelque chose d’aussi chaud. Lorsque je me tourne vers Rachel, elle n’est
plus là. La porte est ouverte, mais je suis trop ivre pour lui courir après et la
consoler.
– Merde, je soupire.
– Tu es qui, toi ? s’exclame la brune en se redressant et en s’essuyant la bouche.
Je croise les bras, et Mason dégage la blonde de son visage pour me regarder.
– Mia, ma douce. Je te présente, euh… Chatte Juteuse et Super Suceuse, conclut-
il en riant, faisant sourire les nanas.
– Tu es sérieux mec ? ! Je t’avais apporté un cadeau ? je réponds en tapant du
pied.
Ses yeux vitreux révèlent que non seulement il est joyeusement ivre mais qu’il
est défoncé, aussi. Heureusement, nous sommes dans notre suite et pas en public,
sinon il risquerait de perdre ses sponsors.
– Dis-moi que tu le caches sous tes vêtements, alors. Je serais ravi de virer ces
deux meufs pour goûter ta superbe chatte.
– Mais quel PORC ? Arrête de penser avec ta bite, bon sang ?
En parlant de bite, la sienne est clairement dure et prête pour un deuxième round.
En l’inspectant un peu, je découvre qu’elle est longue et épaisse, et très tentante.

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La brune l’empoigne et la branle lentement. Mason grogne, mais il ne me quitte
pas des yeux.
– Tu es sûre que tu n’en veux pas un peu ? C’est moi qui offre.
Je secoue la tête.
– J’avais amené Rachel. Elle allait te dire que tu lui plais. Mais elle t’a vu avec
ces pétasses et elle s’est enfuie.
Tiens, je semble avoir trouvé les mots magiques, car il dégage la brune puis la
blonde et se lève du lit.
– Rachel était là, dit-il en pointant le sol à ses pieds. Ici ?
Je hoche la tête.
– Elle m’a vu avec elles ?
Je hausse les sourcils en le regardant comme l’abruti qu’il est.
– Merde ? Sortez d’ici ? aboie-t-il aux deux nanas.
Elles ne comprennent pas, et la brune passe ses bras autour de son cou en frottant
ses faux seins dans son dos.
– Allez viens, Bébé, on va te réconforter, comme tout à l’heure.
– Partez tout de suite ? grogne-t-il en allant dans sa salle de bains.
– Vous êtes sourdes ? je demande en ouvrant la porte de la chambre.
– C’est juste parce que tu le veux pour toi toute seule.
– Eh bien, étant donné que je suis sa petite amie… je vais répondre oui.
Maintenant, dégagez.
J’ai à peine refermé la porte que Mason revient, vêtu d’un jean. Il fouille dans sa
valise et en sort un t-shirt.
– Il faut que je la retrouve.
Je masse mon front un instant, puis je prends sa main.
– Pour lui dire quoi ? « Je suis désolé que tu m’aies surpris en plein plan à trois ?
? Je ne pense pas que ça va marcher, Mace.
Il passe ses mains dans ses cheveux, puis il tombe assis sur le lit.
– Je ne peux pas la laisser comme ça.
– Techniquement, tu ne lui dois rien du tout. De toute façon, c’est de ma faute.
– Mais non, tu voulais juste m’aider. Comme d’habitude, je me suis mis à penser
avec ma bite.

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– Qu’est-ce qui s’est passé ? je demande.
Quand je suis partie dans ma chambre, il traînait avec ses potes en mangeant des
pizzas.
– Ben… j’étais en train de discuter avec les gars… et tout à coup, j’ai réalisé que
Rachel et toi vous étiez parties. Les deux groupies me tripotaient sans arrêt, et
plus je buvais, plus je m’en fichais. Je voulais juste… sentir… quelque chose. Tu
comprends ? Je t’ai cherchée, j’ai cherché Rachel, mais elles ne me lâchaient
pas… alors, j’ai faibli. Est-ce que tu me détestes ? demande-t-il.
– Mais non, je ne te déteste pas, dis-je en le prenant par les épaules. Ce que j’ai
vu était super-excitant.
Il glousse doucement et je réalise qu’il est magnifique lorsqu’il rit de manière
sincère.
– Mais je ne pense pas que ta nana, celle que tu veux vraiment, a trouvé ça aussi
chaud que moi. Elle était super-triste. Elle pleurait, et tout…
– Elle pleurait ? s’exclame-t-il en levant brusquement la tête. Honnêtement, Mia,
je savais qu’elle me kiffait peut-être, mais ça n’a jamais été comme ça entre
nous. Elle a toujours été intouchable. Parfaite, professionnelle, jolie, le gros lot,
quoi. Une nana comme ça n’aurait jamais envie d’un mec comme moi. On est
dans des catégories complètement différentes.
Il se gratte le menton, et le bruit me file des frissons en me replongeant aux côtés
d’un autre homme, à une époque qui me semble désormais lointaine.
– Je comprends. Il y a un mec qui me plaît, moi aussi. Il est beaucoup trop bien
pour moi, mais j’aime penser que quand le moment sera venu, on sera dans la
même catégorie au même moment. Je pense que tu peux le faire, toi aussi.
– Tu kiffes un gars ?
Je souris, j’aurais dû me douter que c’est là-dessus qu’il s’arrêterait.
– Oui, mais ce n’est pas le bon moment. Et quand ça le sera – si ça l’est un jour 
– ça se fera, et ça marchera. Il faut que je le croie. La différence entre toi et moi,
c’est que toi, tu peux agir maintenant.
Mason réfléchit un instant, puis il plonge son regard dans le mien. Il est doux,
presque désespéré, comme si je détenais les réponses à toutes ses questions.

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– Montre-lui quel genre d’homme tu peux être, quel homme tu es au fond de toi,
et elle reviendra vers toi.
– Tu crois ?
Je souris jusqu’aux oreilles et je l’attire contre moi. Il pue le sexe et le parfum
bon marché. Beurk.
– J’en suis sûre.
– Merci Mia. Tu n’es pas si mal, tu le sais, ça ?
J’éclate de rire contre son cou.
– Ouais, toi non plus en fin de compte, mais tu sens la pute. Rends-moi service,
va te doucher. Je m’occupe de Rachel. Toi, occupe-toi de toi.
Il se lève et me tend la main pour que je me lève à mon tour.
– Je m’occupe de moi, répond-il.
– Et pendant que tu t’occupes de toi, tu peux t’occuper de te débarrasser de tous
ces gens qui sont dans notre suite ? Je n’arriverai pas à dormir si des gens baisent
sur le canapé, fument des joints et écoutent la musique à fond.
Il ouvre la porte de sa chambre et observe la fête.
– Bordel ? Je ne referai plus jamais la fête.
– Il ne faut jamais dire jamais, je ricane.
*
* *
Je ne vois pas la fin de notre séjour à New York passer. L’équipe joue trois
matchs et en remporte deux. Pour l’instant, leur classement est très prometteur.
Quick Runners a engagé Mason pour être le porte-parole officiel de leur
nouvelle basket multisport qui est faite pour courir, marcher, jouer au tennis et
ainsi de suite. Nous n’avons toujours pas de nouvelles de Power Up, mais on
nous a expliqué qu’ils avaient su que Mason allait faire la pub de Quick Runners
et qu’ils voulaient s’assurer que cela ne ternissait pas leur image. Ce n’est pas
nécessairement une mauvaise chose cependant, car, en attendant, d’autres
opportunités se sont présentées : l’une pour un équipementier de base-ball,
l’autre pour des barres énergisantes. Les nouvelles circulent vite, on dirait.
Maintenant, il ne nous reste plus qu’à attendre. Mason donne tout ce qu’il a sur
le terrain et fait en sorte que les médias ne le voient pas dans des situations

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compromettantes. Rentrer chez son père fait partie du plan, et c’est là que nous
nous rendons. Je vais enfin rencontrer la famille de Mason.
Lorsque nous arrivons à la petite maison en périphérie de Boston, Mason entre
sans frapper.
– Par ici, fiston ? crie une grosse voix accompagnée des cris stridents d’un
enfant.
Mason tient ma main et me guide à travers la maison, dont le sol est jonché de
peluches et de poupées abandonnées par l’enfant qui a soudain vu quelque chose
de plus intéressant. Les pièces sont tamisées et chaleureuses. Les photos
accrochées aux murs révèlent qu’une femme a vécu un jour dans cette maison,
mais l’épaisse couche de poussière qui les recouvre prouve que cela fait
longtemps qu’elle n’habite plus là. Sur une des photos, une femme rousse, pâle
et très belle se tient en robe de mariée traditionnelle aux côtés d’un homme brun
baraqué, au regard infiniment doux. Un homme qui est le portrait craché de
Mason.
Nous arrivons à la cuisine, où nous sommes immédiatement assaillis par une
délicieuse odeur de romarin, de sauge et de viande qui me met l’eau à la bouche.
Un gros rôti est posé sur le plan de travail et un homme, dos à nous, est en train
de le couper en tranches. Une petite fille rousse, avec d’immenses yeux bleus, se
redresse sur sa chaise lorsqu’elle me voit et frappe dans ses mains.
– Tu es là ? s’écrie-t-elle d’une voix si aiguë que c’est presque douloureux pour
les oreilles.
Je lui souris quand l’homme nous fait face. Bon sang, je ne m’étais pas trompée.
Il ressemble comme deux gouttes d’eau à Mason – ou plutôt à Mason dans vingt-
cinq ans.
– Salut, Papa, je te présente Mia. C’est ma… euh…
Monsieur Murphy sourit et me tend la main.
– Vous êtes celle que tout le monde décrit comme la copine de mon fils.
Je ne sais pas ce que Mason veut révéler ou cacher à son père, donc je décide
d’en rester là.
– Je suis ravie de vous rencontrer, Monsieur Murphy.

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– Appelez-moi Mick, comme tout le monde. Enfin, tout le monde sauf mes fils,
parce qu’ils savent que je leur botterais le cul s’ils osaient me manquer de
respect.
– Ton père est génial, dis-je à Mason en lui mettant un coup de coude dans les
côtes.
– Ouais. Hélas, quand il est là, je suis automatiquement moins cool.
– Et tâche de ne pas l’oublier, fiston ? Maintenant, mets la table, tu veux ?
Mason obéit à son père pendant que je me présente à Eleanor, qui aime qu’on
l’appelle Ellie. Elle déambule dans la maison en me montrant un à un tous ses
jouets, puis sa chambre de princesse dont elle est particulièrement fière.
Je balaie la pièce du regard en me disant que je n’avais pas cela lorsque j’avais
son âge – une pièce où je pouvais enfermer tout ce à quoi je tenais. Maddy et
moi avons toujours partagé notre chambre, et ni l’une ni l’autre n’avions quoi
que ce soit que l’on pouvait déclarer comme étant à nous. Cela m’attriste de
penser à tout ce que je n’ai pas eu, et en même temps, je suis heureuse de voir
que même si Ellie est élevée par des hommes, ils la chouchoutent comme la
meilleure des mamans.
– Tu peux être la reine et moi je serai la princesse, déclare Ellie en posant une
couronne sur ma tête.
Elle en met une à son tour et je hoche la tête en la prenant dans mes bras. Elle
me serre fort contre elle lorsqu’un autre sosie de Mason nous interrompt. Est-ce
qu’ils ressemblent tous les quatre à leur père ?
– Tu dois être Mia ?
Je hoche la tête et me lève sans lâcher la main d’Ellie.
– Papa, elle c’est la reine Mia, et moi, je suis la princesse Ellie. Tu veux être le
roi ou le prince ? demande-t-elle très sérieusement.
– Moi, je voudrais que princesse Ellie se lave les mains avant de passer à table et
qu’on laisse la reine Mia retrouver son roi, répond-il.
Ellie me regarde avec ses grands yeux bleus, – qu’elle doit tenir de sa mère car
son père a les mêmes yeux émeraude que son père et son grand-père.
– Tu me gardes une place à côté de toi, reine Mia ?

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– Bien sûr, princesse Ellie, ce serait un honneur, je réponds en lui faisant une
révérence.
Elle applaudit plusieurs fois, puis elle tourne les talons et disparaît dans le
couloir en courant.
– Désolé, dit le sosie de Mason. Ellie voit peu de femmes… Je suis Brayden.
– Je comprends, y a pas de souci. Ça fait des années que je n’ai pas joué avec un
enfant.
Il n’y a pas d’enfants dans ma famille ni dans mon cercle d’amis. C’est vraiment
la première fois que je passe du temps avec un enfant, et je me suis beaucoup
amusée.
Brayden m’accompagne dans la cuisine, où je m’installe pour me joindre à la
discussion avec son père, Mason et lui.
Monsieur Murphy vient de nous servir lorsqu’une tornade débarque par la porte
arrière de la maison, s’arrête en glissant sur le sol et laisse tomber son sac à dos
avec un bruit sourd.
– Putain, Mace, ta nana est super-bonne ? s’exclame le grand gringalet roux avec
les mêmes yeux verts que les autres, tandis que les autres Murphy rouspètent.
– Surveille ton langage ? crie Mick en pointant sa fourchette en direction de son
fils.
– Désolé Papa, mais… ta meuf est canon, Mace, dit-il en me reluquant des pieds
à la tête. Je suis Shaun, comment vas-tu, ma douce ?
C’est une blague ? Il vient vraiment de m’appeler ma douce ?
– Eh bien, je vois qui a influencé ce pauvre esprit adolescent, dis-je en fusillant
Mason du regard.
– Shaun, n’appelle pas les nanas « ma douce ?, répond l’aîné de la fratrie. Elles
n’aiment pas.
– Bien sûr que si, et la nana que j’ai bouffée aujourd’hui ne s’en est pas plainte.
J’écarquille les yeux alors que Brayden plaque ses mains sur les oreilles d’Ellie.
– Mec, je te jure que si tu ne fais pas attention à ce que tu dis en présence de ma
fille, je vais te raccourcir de cinq centimètres. Et arrête de parler des femmes
comme ça, tu lui montres le mauvais exemple ?
Ellie frappe les mains de son père.

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– Papa, arrête, j’entends pas quand tu fais ça ? Est-ce qu’Oncle Mace te fait ça,
toi aussi ? me demande-t-elle.
Les quatre hommes éclatent de rire et je souris en lui tapotant le nez.
– Non, parce que je suis grande. Ton papa veut te protéger pour ne pas que tu
entendes des bêtises. C’est un très bon papa, tu sais.
Elle hoche lentement la tête avant d’enfourner une énorme bouchée de purée.
Ses joues se gonflent comme celles d’un hamster. Je secoue la tête en regardant
Shaun.
– Si un jour tu veux rester avec une femme plus de trois jours, tu apprendras
qu’il vaut mieux lui donner des noms qui lui donnent le sentiment d’être
spéciale, et pas juste une parmi tant d’autres. Tu ferais bien de t’en souvenir.
Il me reluque avec le regard typique d’un ado qui ne pense qu’au sexe.
– Si ça m’aide à choper une meuf aussi bonne que toi, je ferai tout ce que tu dis,
ma douce.
Mason frappe son front sur la table et Brayden secoue la tête tandis que je me
retiens de jurer. Quant au chef de famille, il traîne le benjamin par l’oreille dans
la pièce d’à côté et il ne mâche pas ses mots. Lorsqu’ils reviennent, Mason et
Brayden sourient bêtement, apparemment ravis que leur petit frère se soit fait
gronder.
Quant à Ellie, elle finit son assiette de purée et en redemande joyeusement.
– Je suis désolé d’avoir été impoli, Mia. J’essaierai de faire preuve de plus de
respect, marmonne Shaun d’un air bougon.
– Merci, Shaun. C’est gentil de t’excuser. Maintenant, j’aimerais que vous me
racontiez les histoires les plus embarrassantes de Mason.
Tous les Murphy, à l’exception de Mason bien évidemment, sourient et
s’empressent de partager leurs anecdotes.
Lorsque Mike se lève pour débarrasser la table et servir le cheesecake, j’ai
tellement ri que j’ai mal au ventre et que je suis bien incapable de goûter au
dessert. J’ai appris que lorsque Mason était petit, il était le clown de la classe, il
pensait être le plus grand inventeur de tous les temps et il n’avait strictement
aucun talent avec les filles. Je trouve cette dernière information particulièrement
difficile à croire, vu qu’il a toujours été beau et bien taillé. Cela dit, il est vrai

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que même s’il est attirant, il faut parvenir à passer outre son attitude de play-boy
à deux balles pour voir que c’est un mec bien. Heureusement, il fait beaucoup
d’efforts et il a fait de grands progrès, pas assez pour que Rachel change d’avis
sur lui, mais je suis sûre qu’il arrivera à la séduire avec le temps.
Les quatre hommes font la vaisselle et rangent la cuisine après m’avoir expliqué
que chez eux, les invités ne doivent pas lever le petit doigt. Je suppose qu’ils
sont habitués à tout faire eux-mêmes depuis que Eleanor est décédée. Ainsi,
pendant qu’ils sont occupés en cuisine, je regarde les photos. Il y en a beaucoup
d’Eleanor avec chacun des garçons, avec les quatre en même temps, ou juste
avec son mari. Ils ont tous l’air très heureux et leur famille semble soudée. Voilà
une femme qui s’est battue contre son cancer et qui aurait sans doute tout donné
pour rester avec sa famille, alors que ma mère, en bonne santé, a abandonné la
sienne pour assouvir ses désirs égoïstes. À ce jour, je ne sais toujours pas où elle
est et j’ai beau faire comme si ça m’était égal, c’est faux, je suis toujours aussi
furieuse.
Mason arrive derrière moi et pose une main sur mon épaule sans dire un mot.
– Ta mère était magnifique.
– Oui. En plus c’était la meilleure mère au monde. Elle était prête à tout pour
nous. Quand les médecins ont diagnostiqué son cancer, il était déjà tellement
avancé qu’on n’a rien pu faire. Elle avait à peine trente-cinq ans quand elle est
morte. Papa s’en veut terriblement de ne pas l’avoir obligée à se faire dépister
plus tôt. Il dit qu’ils ont vécu dix-sept années parfaites ensemble. Puis, elle nous
a quittés. Elle pensait se faire dépister à quarante ans comme tout le monde, mais
pour elle, c’était déjà trop tard.
Mason parle d’une voix triste, et je pense à la belle Eleanor qui est partie si jeune
alors que ses quatre enfants et son mari avaient besoin d’elle. Heureusement
pour eux, ils se serrent les coudes et ils sont restés une famille.
– On devrait faire quelque chose en son honneur.
– Comment ça ? demande Mason en fronçant les sourcils.
Plus j’y pense, plus je trouve l’idée géniale.
– Je parle du cancer du sein. Tu devrais t’impliquer auprès d’une association. Tu
es un joueur professionnel de base-ball. On devrait lancer une collecte de fonds

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ou quelque chose comme ça, on verserait tout à l’association de dépistage de
Boston. On pourrait faire faire des bracelets roses qu’on porterait tous les deux,
et des t-shirts pour moi et les autres WAG. Toute l’équipe pourrait s’impliquer,
si tu penses que ça peut les intéresser. Ce serait une belle chose à faire en
souvenir de ta mère et ça pourrait inciter les femmes à se faire dépister plus
jeunes, surtout si elles ont des antécédents familiaux. Et, cerise sur le gâteau, ce
serait super pour ton image.
Mason sourit en me regardant d’un air fasciné.
– On pourrait aider les femmes comme ma mère. J’adore. Tu es un génie ?
s’exclame-t-il en me soulevant dans ses bras et en me faisant tourner dans les
airs. Alors, tu penses qu’on devrait commencer par quoi ?
Nous passons l’heure qui suit à dévorer le cheesecake de Mick – qui était le
préféré d’Eleanor  – et nous parlons des différents moyens de faire passer notre
message en utilisant la renommée de Mason.

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Chapitre 5

Nous décidons finalement de nommer la campagne « Think Pink ?. Dès notre


retour à Boston, Mason et moi nous mettons au travail. Nous commandons des
bracelets en silicone rose que nous ferons distribuer lors de ses matchs ainsi que
des t-shirts spéciaux pour les WAG, et nous payons une fortune pour tout
recevoir dès le lendemain et ne pas perdre de temps. Je commande mon t-shirt
moi-même et je le paie sans mettre Mason au courant, car je veux que ce soit une
surprise. Il est un peu différent des autres, car j’ai fait imprimer son numéro de
maillot devant et derrière, surplombé de la mention « Pour Eleanor ?. C’est
super-mignon et je sais qu’il sera ému.
Je reste chez lui pendant qu’il va à son entraînement et j’essaie de mettre au
point un projet pour la collecte de dons. Rachel est à fond derrière nous et elle a
proposé de nous aider à faire en sorte qu’on lève une belle somme d’argent tout
en améliorant l’image de Mason.
Nous n’avons pas reparlé du cauchemar qu’était la soirée à New York, la
semaine dernière, car elle n’a jamais semblé d’humeur à revenir dessus. Chaque
fois que nous nous sommes vus, elle est restée froide et professionnelle, mais je
dois trouver un moyen pour qu’elle me refasse confiance. Sinon, je ne pourrai
jamais lui faire voir que Mason est capable d’être un copain sérieux. Or, pour
l’instant, je ne sais vraiment pas comment m’y prendre. L’orgie dont Rachel a
été témoin l’a convaincue que jamais Mason ne pourrait être intéressé par elle, et
elle a sans doute moins envie d’être avec lui, à présent.
Pour moi, ça l’a rendu plus désirable, mais c’est probablement parce que je suis
en manque de sexe. Il me suffit de revoir dans ma tête comment cette femme
suçait Mason pendant qu’il léchait l’autre pour me faire mouiller. J’y ai

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longuement repensé en me masturbant, d’ailleurs, mais j’ai vraiment besoin de
baiser pour de vrai, maintenant. Hélas, Mason ne m’intéresse pas, le seul homme
que je désire habite à Malibu et il est en train de tourner un film avec la nana
avec qui il couche pour se distraire en m’attendant.
Je soupire et je décide que j’ai besoin de renforts pour rédiger mon projet.
– Quoi de neuf, ma pute ? s’exclame Ginelle à l’autre bout du fil.
Il me suffit d’entendre sa voix pour être immédiatement heureuse, réaliser
également à quel point elle me manque.
– Eh ben, j’organise une collecte de dons.
Je l’entends faire exploser une bulle de chewing-gum, puis elle éclate de rire.
– Je croyais que tu avais déjà trouvé un moyen de rembourser la dette de ton
père ? Tu sais, en écartant les cuisses ? s’exclame-t-elle en riant de plus belle.
– Ce n’est pas pour moi, poufiasse. C’est pour Mason.
– Le richissime joueur de base-ball a besoin de fric ? Pourquoi ?
– Laisse-moi parler, bon sang, je vais t’expliquer. On veut améliorer son image
en soutenant l’association de lutte contre le cancer du sein de Boston. Sa mère en
est morte très jeune et il veut faire quelque chose en son honneur et pour le bien
de la société. Il est à son entraînement, et moi je réfléchis à un événement où on
pourrait lever des fonds tout en revalorisant son image. Tu piges ?
Une nouvelle bulle éclate et je lève les yeux au ciel, puis je me dis que je préfère
entendre ça plutôt que ses inhalations de clopes.
– Alors, tu as pensé à quoi ? demande-t-elle.
Je ne connais personne qui ait un esprit aussi créatif que Gin. Je suis sûre qu’elle
aura de super-idées. Je lui explique que nous allons organiser un gala dans un
hôtel de luxe et que presque tous les joueurs de l’équipe de Mason sont d’accord
pour participer. Deux de ses amis célèbres, un DJ et un chef étoilé, ont
également accepté de travailler gratuitement.
– Ah, et on va organiser une vente aux enchères où les gens pourront acheter
divers objets liés au base-ball ou bien des voyages que les joueurs acceptent
d’offrir. Mais j’ai besoin de quelque chose qui attirera des gens avec beaucoup
d’argent. Tu as une idée ?

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Ginelle reste silencieuse si longtemps que je me demande si elle n’a pas
raccroché.
– Alors ?
– Je réfléchis, ne t’affole pas, râle-t-elle.
Je souris et lui accorde le temps dont elle a besoin en ouvrant un nouvel onglet
dans mon navigateur pour chercher d’autres événements de charité et voir ce que
les autres ont fait.
– Ok, dit-elle enfin. Donc, il y a un troupeau de joueurs de base-ball canon qui
vont venir à cet événement ? Genre une vingtaine ?
– Ouais.
– Eh ben, au lieu de vendre des balles et des casquettes, pourquoi ce n’est pas
eux que tu mets aux enchères ? Fais venir un commissaire-priseur et fais en sorte
que les joueurs s’habillent en costard super-sexy. Ou plutôt, fais-leur enlever
leur chemise ? Les femmes riches adorent ce genre de truc.
Elle n’a pas tort. Je vois bien des femmes imbibées de champagne se battre pour
acheter un joueur de base-ball torse nu.
– Gin, ton idée est brillante.
– Je sais. Je suis un génie, dit-elle.
– Je suis tout à fait d’accord avec toi, ma salope.
Je m’arrête un instant pour réfléchir à son idée. Je dois convaincre les mecs
d’accepter un rencard avec la femme qui les achètera. Ils devront faire ce qu’elle
désire pour une durée de quatre heures. Même ceux qui sont mariés accepteront
pour la bonne cause, j’en suis sûre.
– Gin, je crois sérieusement qu’on pourrait récolter énormément d’argent.
– Bah oui, ces mecs sont super-canon. Quelle pouffiasse pleine aux as n’aurait
pas envie d’être vue avec l’un d’entre eux pour une soirée ?
Encore une fois, elle n’a pas tort.
– Je vais rédiger tout ça. Merci, merci, merci ?
– Tu n’as qu’à me payer avec des photos des gars torse nu. Je suis sérieuse,
meuf. Si tu organises ce gala et que tu ne m’envoies pas de photos, je vais
trouver des milliers de moyens de te foutre la honte. Et n’oublie pas que j’ai moi
aussi des photos pour prouver les conneries que tu as faites dans le passé.

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– Connasse ? je m’exclame en me rappelant brusquement toutes les idioties que
nous avons faites quand nous étions plus jeunes. Tu ne ferais pas ça ?
– Mais si ? Tu sais ce qu’il te reste à faire. Je veux des photos de mecs torse nu
sur mon téléphone. Et n’oublie pas Mason. J’en veux une de lui, aussi.
J’éclate de rire alors que Rachel entre dans la cuisine où je me suis installée. Je
lui fais coucou de la main et elle sourit en allant se servir un café.
– Ça roule, j’ai compris ton chantage, espèce de pouffiasse.
Rachel écarquille les yeux et manque lâcher sa tasse. Je secoue la tête pour lui
faire comprendre que ce n’est pas ce qu’elle croit.
– Tu auras tes photos, je dis à Gin. Mais tu es dure en affaires.
– Je l’ai toujours été. Ah, et Mads va super-bien, au fait. Tu sais, ce mec qu’elle
voit, il est très sympa. J’ai mené mon enquête : elle est toujours vierge mais…
pas pour longtemps, à mon avis. Il est mignon, il l’aime beaucoup et elle fait tout
pour lui plaire. Ils sont très chou, tous les deux. Pour l’instant, il m’a l’air d’un
mec sérieux. Elle pourrait faire bien pire pour sa première fois.
Je grogne et je cache mon visage dans ma main.
– Tu crois qu’elle va perdre sa virginité avec lui ? Pour de vrai ?
– Ouais. Tu sais, elle ne peut pas rester innocente à jamais, Mia. C’est une
femme, maintenant. Elle a dix-neuf ans, bon sang. Ça fait tellement longtemps
que j’ai perdu ma virginité, moi, que je ne me souviens pas d’une époque où je
ne touchais pas des bites.
– Gin, je ne veux pas que tu parles de bite dans une phrase où tu parles de ma
sœur. Tu vas me filer des boutons. Et tu n’as pas intérêt à l’encourager à coucher
avec lui, sinon je vais te clouer à un mur, te couper les cheveux et te couvrir de
miel pour laisser les fourmis te dévorer.
– Bon sang, tu es tordue, tu sais ? Tu ferais ça à ta meilleure amie ? Il faut que
j’en trouve une nouvelle. La mienne est une psychopathe, s’écrie-t-elle en
éclatant de rire.
– Tu as raison, je le ne ferais pas, mais s’il te plaît, la prochaine fois que tu la
vois, demande-lui de m’appeler, d’accord ?
– Ça marche. Il faut que je raccroche, je dois aller répéter une nouvelle
chorégraphie. Appelle-moi pour me raconter comment se passe le gala et

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n’oublie pas ma récompense ?
– Eh, ma salope, je t’aime, et je suis fière de toi pour avoir arrêté de fumer. Il
faut que tu restes en vie si je veux qu’on vieillisse ensemble, qu’on achète un
troupeau de chats et qu’on vive dans une maison sur la plage.
– J’ai toujours aimé les chats, soupire Gin en me tendant une perche magnifique.
– Tu veux dire que tu aimes la chatte, non ? je m’exclame avant de raccrocher
pour qu’elle n’ait pas le temps de répondre.
Je relève la tête et je découvre le visage choqué de Rachel.
– Quelqu’un te fait du chantage ? s’inquiète-t-elle.
– Non, c’était Gin, ma meilleure amie, je réponds en riant. On est toujours
comme ça.
– Vous vous menacez toujours et vous vous insultez ?
– Euh, ouais. Tu ne fais pas ça avec ta meilleure amie ?
Elle secoue la tête.
– Non, pas du tout. Jamais. On se dit des choses gentilles, on déjeune et on fait
les magasins ensemble.
Elles font les boutiques ensemble. Beurk. Gin et moi n’avons jamais fait ça. On
boit des bières, on mate les mecs, on joue un peu au casino ou aux cartes, on va à
des concerts. Mais jamais nous ne faisons de shopping.
– Ma pauvre. Je te plains, dis-je sincèrement.
– C’est marrant, j’allais dire la même chose de toi, répond-elle en souriant.
Alors, comme ça, Rachel n’est pas complètement passive, c’est bien. Le
caractère de Mason est tellement fort qu’elle se fera dévorer si elle n’a pas un
minimum de répondant.
*
* *
Rachel n’a pas adoré la vente aux enchères des joueurs, mais Mason a trouvé
l’idée brillante. Il s’est empressé d’appeler tous les mecs de son équipe, et
lorsqu’il a eu fini, ses vingt coéquipiers s’étaient engagés à participer. J’ai trouvé
des bretelles roses pour chacun d’entre eux et je leur ai demandé de mettre un
beau costume. L’idée est qu’ils enlèveront leur veste, puis leur chemise, et qu’ils
seront torse nu avec les bretelles roses. J’ai aussi prévu de peindre le ruban rose

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qui symbolise la lutte contre le cancer du sein juste au-dessus de leur cœur pour
rester dans le thème.
Nous échangeons tous les trois nos idées tout en préparant à dîner, Mason fait
griller des steaks sur le balcon tandis que je m’occupe de l’accompagnement, et
nous trouvons plein de moyens de faire passer le mot à propos du gala. Nous
invitons également le père et les frères de Mason, puisque l’idée de départ est
d’honorer Eleanor. Je dis à Mason de demander à son père de trouver sa photo
préférée de sa femme et de la faire agrandir pour expliquer au public la raison de
ce gala. Enfin, nous nous assurons que le président de l’Association de lutte
contre le cancer sera là et pourra faire un discours.
– Mia, Rachel, vous êtes les reines de l’organisation de dernière minute, dit
Mason en souriant.
Il me prend par l’épaule et m’embrasse sur la joue, puis il avance vers Rachel,
qui se crispe immédiatement.
Il a beau lui parler à voix basse, j’entends ce qu’il lui dit.
– Je suis désolé pour ce que tu as vu la semaine dernière. Ça n’aurait pas dû
arriver. Ce n’est pas le genre d’homme que j’ai envie d’être, admet-il en la
regardant droit dans les yeux.
Elle hoche la tête en silence, puis il se rapproche encore un peu et sent ses
cheveux avant de l’embrasser sur la joue.
– Merci de nous avoir aidés. Tu n’y étais pas obligée.
Rachel lève la tête et cligne plusieurs fois des yeux, envoûtée par le regard vert
de Mason. Il suffit de voir ces deux-là pour savoir qu’ils se plaisent. Il faut
vraiment que j’arrive à les rapprocher.
– Mason, je t’aiderais avec n’importe quoi, murmure Rachel à son tour.
Il plonge sa main dans ses cheveux et saisit sa nuque tout en posant son autre
main sur sa joue. Elle retient son souffle avec un cri aigu et je les regarde,
fascinée, espérant qu’il est sur le point de l’embrasser.
– Ce que tu fais pour aider ma mère… compte beaucoup pour moi. Je ne
l’oublierai pas. Si tu as besoin de moi un jour, je serai là. Tu peux m’appeler à
tout moment, je viendrai. N’importe où. Compris ?

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Il se penche et l’embrasse délicatement sur le front, comme si elle était quelque
chose de précieux.
C’est alors que je comprends qu’aux yeux de Mason, Rachel est trop précieuse.
Elle compte trop pour lui. Elle n’est pas comme les autres femmes et il a
l’impression de devoir la manipuler avec des gants, de la toucher comme si elle
était faite de verre ou de sucre. Waouh ? Mason a peut-être couru tous les jupons
de la ville, mais je crois qu’il se voit à long terme avec Rachel. Je crois
également qu’il ne sait pas comment s’y prendre dans ce genre de situation, face
à une femme qui n’a pas juste envie de coucher avec lui. Heureusement, j’ai
encore une quinzaine de jours pour les aider.
– Compris, Mace, dit-elle en souriant.
Il recule et retourne sur le balcon pour surveiller la cuisson des steaks sous le
regard fasciné de Rachel.
– Tu vas vraiment me faire croire que tu ne le kiffes plus ? lui dis-je en souriant.
Elle tourne brusquement la tête vers moi et fronce les sourcils.
– Je ne vois pas de quoi tu parles. J’étais bourrée la semaine dernière, et j’ai dit
n’importe quoi. Je t’ai sans doute donné une mauvaise impression quant aux
sentiments que j’ai pour mon client, dit-elle en insistant sur le dernier mot.
Je penche la tête sur le côté en buvant une longue gorgée de bière.
– Je ne gobe pas tes mensonges, et Mace est loin d’en être convaincu, lui non
plus. Il a deviné ton secret, ma belle. Et bientôt, il passera à l’attaque.
Rachel grogne et secoue la tête.
– Il faut que tu arrêtes avec ça, Mia. Au cas où tu l’aurais oublié, c’est toi sa
copine.
– Sa fausse copine, ma belle, ne l’oublie pas toi non plus. Je fais mon job. Les
fans l’adorent, on organise un gala qui va redorer son image professionnelle et
qui lui fait du bien sur un plan personnel. Il aimait beaucoup sa mère et elle lui
manque. Le fait que tu l’aides autant à réaliser ce souhait ne fait que prouver que
tu n’es pas seulement là pour soigner l’image de Mason. Je pense que tu as
beaucoup plus qu’un petit béguin pour lui, avoue-le.
Elle se mord la lèvre et finit par hocher la tête en soupirant.

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– Très bien, je l’avoue. Ça fait longtemps que je tiens à lui. Je crois que je suis
tombée amoureuse de lui dès que je l’ai rencontré, il y a deux ans. Mais ça ne
change rien au fait que je l’ai vu enchaîner les femmes, que je l’ai vu ivre mort
bien trop de fois et que j’ai passé beaucoup trop de temps à nettoyer derrière lui.
Ça change l’opinion qu’on a de quelqu’un, je t’assure.
– Je sais, je suis d’accord. Mais, à l’évidence, ça ne change pas ce que tu ressens
pour lui, sinon tu ne ferais pas ce que tu fais. Tu ne te serais pas proposée pour
l’aider à retrouver le droit chemin. Tu tiens sincèrement à lui et tu as beau
essayer de le cacher, tu n’y arrives pas. Je vois comment tu le regardes, comment
ton visage s’illumine quand il entre dans une pièce. Tu es transparente, Rachel.
Ça fait peut-être deux ans que tu lui caches ton jeu, mais c’est fini. Il a enfin
ouvert les yeux et il est ravi de ce qu’il a découvert.
Elle frotte délicatement ses joues et me regarde d’un air inquiet.
– Comment tu peux en être sûre ? Je ne veux pas juste être une énième femme
sur sa liste. Je préfère ne pas l’avoir du tout et rester dans sa vie pour toujours
plutôt que de goûter à lui et de le perdre à jamais quand il se rendra compte que
je ne suis pas le genre de femme qu’il aime. Si tu voyais les femmes avec qui il a
été, tu saurais que je ne suis pas son genre. Sans vouloir te vexer, il aime les
femmes comme toi, belles, sexy, sûres d’elles.
Elle soupire et laisse tomber sa tête entre ses mains.
– Ma chérie, je ne suis pas le genre de femme qu’on épouse. Je suis le genre
avec qui on flirte et on baise. Mason ne veut pas s’engager avec une femme
comme moi. Il veut ce que son père a connu : une femme, une maison, des
enfants. Toi, tu es le genre à lui offrir tout ça, pas moi. Je suis une escort dont le
talent est de servir dans des bars, de baiser et, peut-être, de jouer dans des films.
Je ne dis pas que je ne suis pas fière de moi, mais ça ne va pas forcément
m’obtenir un mec pour la vie – plutôt des mecs pour un soir. Je crois que tu
devrais être plus sincère avec Mason.
– Ok… Alors, si tu étais moi, comment ferais-tu le premier pas ? Je ne sais pas
comment m’y prendre, surtout après la tentative désastreuse de la semaine
dernière.

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– Ouais, c’était une catastrophe, je le concède. Mais tu sais, Mason est un mec
assez facile.
– C’est le moins qu’on puisse dire, rétorque-t-elle en m’arrachant un éclat de
rire. J’aimerais savoir comment… Je n’ai pas beaucoup d’expérience en matière
de… tu sais…
– De baise ? je demande.
– Mon Dieu ? Non. Enfin si, mais j’allais dire de flirt ou de drague. Bon sang, tu
es aussi vulgaire que lui.
Mince, est-ce qu’elle a raison ? Est-ce que je suis comme Mason ? Non, c’est
juste que Rachel est un peu coincée, en tout cas, c’est ce que je choisis de me
dire.
J’entortille mes boucles en un chignon approximatif et je les attache avec la
pince qui pend au bas de mon t-shirt.
– Voilà ce que tu vas faire. Au gala, ce week-end, tu vas boire un ou deux verres
de champagne pour te détendre. Tu flirteras avec lui toute la soirée. Rien de trop
flagrant, mais effleure-le de temps en temps.
Je promène mon index depuis le haut de son épaule jusqu’à son coude, puis je
remonte lentement.
– Peut-être que tu pourrais lui prendre la main, dis-je en prenant celle de Rachel
et en la promenant dans le salon.
Je m’arrête, je me déhanche et je la regarde en battant des cils, puis je tourne la
tête.
– Assure-toi de lui donner l’occasion de profiter de tes atouts.
Sur ces paroles, Rachel se mord la lèvre.
– C’est que… je n’en ai pas, marmonne-t-elle.
Je la dévisage comme si un troisième œil lui poussait au milieu du front.
– Ma chérie, toutes les femmes ont un organe qui attire le sexe opposé, je déclare
en la regardant de la tête aux pieds. Tu as des jambes sublimes. Mets une robe
courte. Mets un soutien-gorge push-up et choisis une robe qui montre ton
décolleté.
Elle hoche la tête, alors je poursuis.

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– Ah, et lâche tes cheveux. Tu te souviens qu’il a dit qu’il rêvait de voir tes
cheveux détachés ? Fais-toi des grosses boucles pour qu’elles tombent dans ton
dos. Si la robe est dos-nu, ce sera encore mieux.
– Pourquoi ? demande-t-elle.
Bon sang, cette femme peut-elle vraiment être aussi naïve au sujet des hommes ?
Elle a vingt ans passés, bon sang. Elle doit forcément avoir une petite idée de la
manière dont pensent les hommes, non ? Bien évidemment, je ne dis rien de tout
ça.
– Parce que quand il verra ta peau nue, il pensera au sexe. Et s’il pense au sexe
en même temps qu’il pense à toi, c’est une bonne chose.
– Mais j’ai vraiment envie d’être avec Mason, pas juste de coucher avec lui.
Cette fois-ci, je ne peux réprimer un soupir exaspéré.
– Les hommes associent le sexe aux bons moments qu’ils pourraient passer avec
une femme. Pour eux, les deux vont ensemble, compris ? Alors, tu vas séduire
Mason à la soirée ce week-end ? je demande en souriant.
– Je vais y réfléchir, répond-elle.
Je fronce les sourcils, mais je comprends que je ne peux pas pousser Rachel
davantage. Elle a sa façon de faire, et je pense qu’après avoir réfléchi quelques
jours, elle aura assez de courage pour prendre la bonne décision.
– Promis ? j’insiste.
Elle sourit jusqu’aux oreilles.
– Promis.
Mason entre dans la pièce et referme la porte derrière lui.
– Est-ce que les deux plus belles femmes au monde ont faim ?
Je secoue vigoureusement la tête.
– Tu ne peux vraiment pas t’empêcher de draguer ? je réponds en riant.
Cette fois-ci, Rachel se joint à moi alors que je m’attendais à ce qu’elle lève les
yeux au ciel, comme d’habitude.
Il y a du progrès, non ?

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Chapitre 6

Mason et moi restons bouche bée en découvrant la salle de bal de l’hôtel où se


déroule le gala Think Pink ce soir. Des ballons roses gonflés à l’hélium
recouvrent la totalité du plafond, et sur les murs sont projetés les nœuds roses
qui symbolisent la lutte contre le cancer du sein ainsi que notre slogan Think
Pink. Cerise sur le gâteau, une boule disco fait danser des éclats blancs dans
toutes les directions. De petites tables hautes sont éparpillées ici et là, couvertes
d’une nappe noire et décorées de bouquets de fleurs roses et de bougies. Le tout
est beau et classe tout en étant jeune et branché.
Dans un coin de la salle, les serveurs reçoivent les instructions de leur chef. Les
hommes portent un t-shirt rose sous leur costume et celui des femmes dit
« Sauvez nos nichons ?. C’est un peu vulgaire, mais c’est marrant et c’est le
genre de chose qui plaît aux sportifs et à leur public.
Quant à Mason et moi, nous sommes tirés à quatre épingles. Il est vêtu d’un
costard noir impeccable avec une chemise rose et des bretelles assorties, d’une
cravate noire, et il porte un ruban rose sur le revers de sa veste. Ses cheveux sont
coiffés en arrière et ses yeux verts balaient la salle du regard, admirant le fruit de
notre travail.
– Mia… commence-t-il.
Il est resplendissant de fierté, et je le suis sans doute aussi. Mon premier gala de
charité est époustouflant. Bien évidemment, c’est aussi grâce à la sublime blonde
qui vient vers nous. Si je pensais être belle dans une longue robe de soirée rose
bonbon à sequins, je suis loin d’être aussi canon que Rachel. Elle porte une robe
bustier rose pâle en satin qui lui arrive au genou, qui est fendue jusqu’en haut de
la cuisse et dont le décolleté en cœur montre juste ce qu’il faut de poitrine. Ses

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cheveux sont lâchés en grosses boucles, ses lèvres sont rouge coquelicot et un
trait d’eye-liner met en lumière ses yeux bleus. Je ne m’attendais pas à ça :
Rachel est une pin-up tout en restant élégante.
Mason reste immobile à la regarder en silence, la mâchoire contractée, le regard
brûlant. Jamais il ne m’a regardée ainsi. Ce regard de braise est réservé à la
grande blonde à côté de qui je me sens véritablement vulgaire dans ma robe
tape-à-l’œil.
– Vous êtes canon, dit-elle en arrivant vers nous.
Mason la toise des pieds à la tête, puis il la prend par la taille, pose une main sur
sa joue et la regarde droit dans les yeux. Elle ne dit pas un mot, lui accordant ce
geste viril, parce que lorsqu’un homme comme Mason Murphy vous prend ainsi,
vous acceptez en remerciant le Ciel d’avoir cette chance.
– Tu es magnifique, lui dit-il. Tous les hommes de la soirée vont tomber
amoureux de toi.
– Il n’y a qu’un homme qui m’intéresse ce soir, répond-elle d’une voix pleine de
confiance.
Si je n’essayais pas de me fondre dans le décor, je lui aurais tapé dans la main
pour la féliciter de sa réplique. C’est osé et hyper-sexy.
– Ah oui ? C’est quelqu’un que je connais ? demande-t-il en effleurant sa joue
du bout de son nez.
Je la vois frissonner, et c’est ma peau qui se couvre de chair de poule. J’ai
l’impression de regarder une comédie romantique étrangère, sauf que je
comprends ce que disent les personnages.
Rachel se lèche les lèvres et Mason suit sa langue des yeux. Ce type est cuit.
– Peut-être. Nous verrons comment se déroule la soirée, chuchote-t-elle à
quelques centimètres de sa bouche.
– Eh bien… tu me gardes une danse ?
– Je ne sais pas, il faudra voir s’il me reste une place, répond-elle en souriant.
– Il t’en restera, ne t’en fais pas. Je m’en chargerai.
Elle se rapproche de lui quelques secondes avant de s’éloigner de nouveau, et
j’ai l’impression que la température de la salle augmente brusquement.

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Cependant, peut-être parce qu’une poignée de joueurs arrive et qu’ils sont tous
plus sexy les uns que les autres, également en costume avec des chemises roses
et divers accessoires assortis, j’ai hâte de savoir comment les enchères vont se
passer. D’ailleurs, à ce propos, je prends Rachel par la main pour l’emmener à la
table où sont présentés les biens qui sont mis en vente : des bouteilles de vins
rares, des voyages, des croisières, des adhésions à des clubs privés, des locations
saisonnières et ainsi de suite.
– Alors, tu as invité tout le gratin de Boston et de New York ?
– Oui, répond Rachel en ouvrant son carnet. Quatre cents personnes ont répondu
présentes, et toutes sont millionnaires.
– Waouh. Je ne savais pas qu’il y avait autant de gens riches sur cette planète.
– Eh bien si, ce sont des célébrités, des sportifs, des managers, des sponsors, et
cetera. Ils feront forcément un don parce que c’est bon pour leur image. C’est le
cercle vicieux des gens riches, ils aiment montrer leur fric en le donnant à
d’autres.
– Je me fiche pas mal de leurs raisons, du moment qu’ils ne repartent qu’après
avoir fait un gros chèque à Think Pink. Tu penses qu’on arrivera à récolter
cinquante mille dollars ?
Rachel éclate brusquement de rire. Elle rit si fort qu’elle pose la pointe de ses
index au coin de ses yeux pour empêcher les larmes de couler et de gâcher son
maquillage.
– Mia, je serais surprise qu’on ne récolte pas un million de dollars.
Un million de dollars. En une nuit. Je dois travailler tous les jours pendant un an
auprès de mecs pleins aux as pour gagner cette somme et rembourser la dette de
mon père – et Rachel pense qu’on va encaisser ça en une soirée.
– C’est incroyable.
Elle pose sa main sur mon épaule et la serre délicatement.
– Ils ont une vie très différente de la nôtre. Ne t’en fais pas, ils ont les moyens.
– Ouais, je suppose. Au moins, c’est pour une super-cause. Mason sera ravi
qu’on puisse donner autant à l’association.
– Allez, il est temps que la fête commence, déclare-t-elle. Les gens vont arriver.
*
* *

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* *
Les trois heures suivantes défilent à toute vistesse. Je passe mon temps à serrer
des mains, goûter des petits fours, boire du champagne, danser et rire avec les
WAG. Tout le monde s’éclate et, la dernière fois que j’ai vérifié, la table des
voyages et autres cadeaux de luxe avait déjà récolté des centaines de milliers de
dollars. Ainsi, même si les enchères des joueurs font un flop, l’association
empochera quand même un demi-million de dollars.
Je me déhanche sur la piste de danse en sirotant mon champagne rosé – toutes
les boissons de la soirée sont roses et coulent à flots  – lorsque Rachel vient me
trouver et me tire par la main.
– Ne me regarde pas comme ça, dit-elle lorsque je fais mine de bouder. C’est
l’heure des enchères des joueurs ? Je nous ai gardé une bonne place.
Bien joué, Rachel. Je n’arrive pas à croire que certains des hommes les plus
beaux de la planète vont se désaper devant moi et que c’est dans le cadre de mon
travail. Je sors mon téléphone de mon décolleté et Rachel me regarde en
secouant la tête.
– Je n’en reviens pas que tu puisses cacher ton portable dans ton soutif. Les
hommes doivent adorer ta poitrine.
Je baisse la tête pour étudier mes seins.
– Je n’ai jamais eu de réclamations, je réponds en souriant.
Le commissaire-priseur que nous avons embauché monte alors sur scène.
– Mesdemoiselles et Mesdames ? lance-t-il. Ce soir, nous vous avons préparé
une petite surprise rien que pour vous. En effet, étant donné que c’est une soirée
de charité qui concerne les femmes, nous avons souhaité vous faire une
proposition… que vous aurez du mal à refuser ? Messieurs, c’est à
vouuuuuuuuus ? crie-t-il dans le micro.
Les vingt joueurs de base-ball arrivent sur scène et se mettent en ligne face à la
salle. Le spectacle est superbe. Tous sont sublimes.
– Nous vous proposons donc de miser sur le jeune homme de votre choix pour
remporter un rendez-vous avec un de ces splendides joueurs de base-ball ? Ils
vous offriront quatre heures et vous emmèneront là où vous le désirerez – du

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moment que c’est en public, Mesdames, ajoute le commissaire-priseur en faisant
un clin d’œil à la salle.
Le DJ lance un morceau digne des meilleurs strip-teases de Las Vegas, et un
joueur de troisième base s’avance.
– Mon Dieu ? C’est Jacob Moore ? crie une femme en brandissant dans les airs
la carte rose qui porte son numéro.
– Eh bien, répond le commissaire, il semblerait que l’enthousiasme soit au
rendez-vous. Et si tu enlevais ta veste, Jake, pour nous montrer ce que tu caches
en dessous ?
Jacob joue le jeu et enlève sa veste en souriant et en déambulant sur le podium.
– Et si nous commencions les enchères à mille dollars ? lance le commissaire.
Waouh. Mille dollars pour commencer ? Je n’en reviens pas. Bien évidemment,
c’est loin d’être fini. Jacob commence à peine à déboutonner sa chemise que les
enchères grimpent déjà à quarante mille dollars.
– Il faut croire que les femmes pleines aux as n’ont pas moins de libido que les
pauvres, je dis à Rachel en prenant Jake en photo pour l’envoyer à Gin, qui
répond immédiatement.
À : Mia Saunders
De : Ma Salope Chérie
Je te déteste. Tellement jalouse de toi. Mais n’arrête pas, c’est ce que je dirais à
ce demi-dieu si je passais une nuit avec lui.
J’éclate de rire et je montre sa réponse à Rachel, qui secoue la tête.
– Je n’arrive pas à croire que tu aies enregistré ta meilleure amie sous le nom de
« Ma Salope Chérie ?.
– Pourquoi ? C’est drôle ?
– Si tu le dis, répond-elle.
Nous regardons ensuite le joueur de champ extérieur partir pour vingt mille
dollars. Puis, c’est au tour du joueur de champ gauche. Près de la scène, une
femme bave pratiquement devant sa peau chocolat et il part pour cinquante mille
dollars après qu’elle a commencé les enchères à vingt-cinq mille.
Je prends une photo de lui et je l’envoie à Gin.
À : Mia Saunders

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De : Ma Salope Chérie
Doux Jésus. Je croquerais à pleines dents son petit cul en chocolat. Je me
demande s’il fondrait dans ma main avant d’arriver dans ma bouche.
Sur ce, dans mon état d’ébriété avancé, j’éclate de rire de manière si incontrôlée
que je rate un des joueurs. Je ne le dis pas à Gin, toutefois, car ça l’énervera à
coup sûr, et je prends ses menaces très au sérieux.
– Alors, Rachel, on devrait semer la pagaille un peu, tu crois pas ? Obliger ces
femmes à augmenter leur mise ?
– Ouais, on pourrait, mais elles s’en sortent plutôt bien sans nous. D’après mes
calculs, huit mecs sont passés et on a déjà récolté trois cent mille dollars. Les
deux derniers sont partis pour cinquante mille dollars chacun.
Je regarde ensuite Junior venir à l’avant de la scène et Kris, sa jolie petite amie,
accourir vers nous.
– Junior m’a autorisée à miser sur lui ? s’écrie-t-elle en souriant.
Voilà qui devrait être intéressant. Presque toutes les femmes ont le béguin pour
Junior Gonzalez.
– Désolée, Kris, je dis en prenant son homme en photo lorsqu’il révèle ses
superbes tablettes de chocolat.
– Moi, moi ? hurle Kris. Je veux l’acheter ? Moi ? insiste-t-elle.
Je dois avouer que, cette fois-ci, je ne me contente pas que d’une seule photo. Je
le prends de face, de profil, et de dos, bien sûr. Je les envoie à Gin, et mon
téléphone sonne alors que des dizaines de femmes crient leur enthousiasme pour
Junior.
À : Mia Saunders
De : Ma Salope Chérie
OMG ? Junior ? Je t’aime Junior ? Dis-lui que je l’aime.
Je n’ai pas encore rangé mon téléphone qu’il sonne de nouveau.
À : Mia Saunders
De : Ma Salope Chérie
Ce cul ? Que Dieu ait pitié de mon âme de salope. Je laisserais cet homme me
lancer et me rattraper autant de fois qu’il le veut du moment qu’il le fait à poil et
qu’il me baise à me faire perdre la tête.

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Les enchères s’enflamment pour Junior et, à chaque mise, Kris fait la moue,
jusqu’à ce qu’elle se mette vraiment en colère. Elle lève sa carte rose et l’agite
en direction du commissaire-priseur qui ne la remarque pas, tout en fusillant les
autres femmes du regard.
– Cent mille dollars ? crie-t-elle enfin.
Je manque tomber en arrière. Heureusement, Rachel me rattrape et m’aide à
retrouver l’équilibre.
– Kristine ? Tu as le droit de dépenser autant d’argent ? je demande, inquiète
qu’elle s’attire de sérieux ennuis avec Junior.
Elle hoche vivement la tête sans abaisser sa carte et en continuant à intimider les
autres femmes, ce que je trouve hilarant.
– Il voulait faire un don à l’association, de toute manière, explique-t-elle, et de
cette façon, personne ne me vole mon homme. Il m’a dit qu’il a toujours voulu
faire quelque chose en l’honneur de la maman de Mace.
– Vendu à la petite blonde pour cent mille dollars ? annonce le commissaire-
priseur.
Kris sourit jusqu’aux oreilles et sautille sur place. Puis, au lieu de retourner à sa
place, Junior bondit au pied de la scène et, sans quitter Kris des yeux, il avance
jusqu’à elle pour la prendre dans ses bras.
– Tu as été géniale, Bébé ? s’exclame-t-il.
Elle couvre son visage de baisers et je me dis que ces deux sont faits l’un pour
l’autre. Je sais que d’habitude, un homme comme Junior – qui est hispanique et
qui vient d’une famille pieuse et vieux jeu  – choisirait d’être avec une femme
latina comme lui, or il a l’air fou de Kris. Je serais curieuse de savoir comment
ça va se passer lorsqu’il la présentera à sa mère. Cela dit, j’ai comme
l’impression qu’il n’a rien à faire de ce que pensera sa famille.
Les joueurs continuent de se présenter un par un et aucun n’est vendu à moins de
plusieurs dizaines de milliers de dollars. Le record est déjà de cent cinquante
mille dollars pour un joueur lorsque c’est au tour de Mason, qui passe en dernier.
– Très bien, Mesdames, c’est désormais le tour de celui que vous attendez toutes.
Mason « Mace ? Murphy ? Il peut lancer une balle à cent soixante kilomètres
heure, il a été en tête de toutes les listes des mecs les plus sexy de la planète, et

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ce soir, il est ici pour votre plus grand plaisir ? Commençons les enchères à
cinquante mille dollars ? annonce le commissaire-priseur.
Des dizaines de cartes sont brandies dans les airs à travers la salle.
– Ah, alors ce n’est pas assez pour ces dames. Alors, disons cent mille ?
Dix cartes restent encore levées.
Lorsque le commissaire-priseur annonce deux cent cinquante mille dollars, il ne
reste plus qu’une carte en l’air.
– Est-ce que j’entends deux cent cinquante mille dollars ? Une fois, deux fois,
trois fois pour la dame en satin rose ?
J’écarquille les yeux et je tourne la tête vers Rachel, dont le bras est levé. Mason
fait un clin d’œil à la foule et descend de la scène, marchant d’un pas ferme vers
elle.
– Tu viens vraiment de m’acheter pour un quart de million de dollars ? demande-
t-il d’une voix pleine d’admiration.
– La boîte m’a dit combien je pouvais miser. Tu es sur le point de décrocher
plusieurs contrats pour des pubs et des sponsors, donc ce n’est qu’une goutte
d’eau à côté de la commission qu’on va gagner.
Un quart de million de dollars n’est qu’une goutte d’eau ? Bon sang, j’ai
vraiment choisi la mauvaise carrière.
– Je ne sais pas quoi dire, répond Mason.
– Tu peux commencer par « merci ?, rétorque-t-elle en souriant en coin.
Il tient son visage dans ses mains, mais les photographes prennent déjà des
photos, ce qui n’est pas bon. Il la serre donc dans ses bras, lui chuchote un
« merci ? à l’oreille et vient à mes côtés pour m’embrasser sur la joue.
– Rachel, ce n’est pas fini. J’aimerais qu’on soit seuls ce soir, après le gala. Ne
pars pas. Retrouve-moi dans ma chambre, il faut qu’on parle. Promets-moi que
tu viendras, murmure-t-il.
– Je te le promets, répond-elle.
Mason m’embrasse de nouveau sur la joue, puis il part serrer les mains de celles
qui ont misé aux enchères.
*
* *

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La soirée s’écoule tranquillement et les invités continuent de danser et de
s’amuser. Lorsque Mason monte sur scène pour annoncer la fin de la soirée, il
est minuit passé et j’ai les pieds en compote. J’ai besoin d’un bon bain bien
chaud, et c’est justement ce que j’ai l’intention de faire dès que j’aurai regagné
ma chambre d’hôtel. Mason nous a réservé une suite avec deux chambres dans
ce même hôtel pour qu’on n’ait pas à conduire ou à prendre un taxi pour rentrer
chez lui.
Il se racle la gorge et le bruit résonne dans les haut-parleurs tout autour de la
salle de bal.
– Puis-je avoir votre attention, s’il vous plaît ?
La foule se dirige vers la scène tandis qu’un spot vient éclairer son visage.
– Je tenais simplement à remercier tout le monde pour être venu ce soir et pour
votre soutien à l’Association de lutte contre le cancer du sein de Boston. Il y a
dix ans, mon père a perdu sa femme et mes trois frères et moi avons perdu notre
mère. Elle n’avait que trente-cinq ans, et je pense à elle tous les jours. Elle
n’avait jamais fait de mammographie parce qu’elle n’avait pas quarante ans et
que, même avec des antécédents familiaux, elle pensait qu’elle serait épargnée.
Or, c’est arrivé. Ne perdons plus les femmes que nous aimons à cause de cette
maladie.
Les applaudissements de la foule sont assourdissants.
– Même si cette soirée est en l’honneur de ma mère, Eleanor Murphy, elle est
surtout pour toutes les femmes qu’il reste à sauver. C’est pour cela que j’ai
l’immense plaisir d’accueillir sur scène le président de l’Association de lutte
contre le cancer du sein de Boston afin de lui remettre le chèque pour toutes les
donations qui ont été faites ce soir.
Mason regarde le chèque qu’il tient entre les mains et, même de loin, je vois
qu’il a les larmes aux yeux.
– Je crois que j’ai quelque chose dans l’œil.
La foule rit, et moi aussi. Il secoue la tête et sa main tremble. La salle entière
semble estomaquée de voir un homme si fort et sûr de lui dans un tel état.
Mick Murphy saute sur scène, passe son bras autour des épaules de son fils et le
serre fort contre lui. Il est là pour lui, l’aidant à se tenir droit et fier durant ce

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moment chargé d’émotion. Si seulement mon père était comme lui.
– C’est avec un plaisir immense que je vous offre ce chèque d’un montant d’un
million deux cent soixante-dix mille dollars, dit Mason alors que des
rugissements, des cris, des sifflements et des applaudissements retentissent à
travers la salle.
Je frissonne de la tête aux pieds. Nous avons levé presque un million trois cent
mille dollars en une soirée ? Le président de l’association prend le chèque,
visiblement très ému, et se confie à Mason.
– Fiston, ma femme est morte d’un cancer il y a quelques années. Elle aurait été
fière de voir ce que vous avez fait. Si ma fille est en vie aujourd’hui, c’est grâce
au travail que nous faisons et au dépistage précoce qu’elle a eu à vingt ans. Je ne
vous remercierai jamais assez pour l’attention que vous avez attirée sur notre
cause. Merci à toute l’équipe des Red Sox, merci à tous. À tous ceux qui sont
présents ce soir et qui ont contribué à cette belle soirée. Nous allons nous
empresser d’utiliser cet argent à bon escient ? conclut-il en essuyant ses larmes.
Je crois qu’aucune femme ne peut résister face à des hommes adultes qui
pleurent. Toutes les femmes autour de moi se tamponnent les yeux avec des
mouchoirs, et je ne fais pas exception.
Cela faisait vraiment longtemps que je n’avais pas passé une aussi belle soirée.
*
* *
J’ai le plus grand mal à sortir du bain tiède. Cela fait un moment qu’il n’y a plus
de bulles, que ma bouteille de champagne est vide et que j’ai fini mon panier de
fraises couvertes de chocolat. J’enfile mon kimono Aubade pour aller souhaiter
une bonne nuit à Mason. Il était occupé avec ses frères lorsque je suis partie et je
lui ai dit que je le verrais dans sa chambre plus tard ou demain matin au petit
déjeuner. Il m’a embrassée sur la bouche pour le plus grand plaisir des
journalistes, il a pris mes mains dans les siennes et il m’a remerciée pour tout.
Une des WAG et moi sommes montées dans nos chambres, laissant les hommes
entre eux. De façon générale, je suis surprise que les choses se soient déroulées
sans encombre. Nous avons récolté une somme énorme, l’événement a fait un
bien fou à l’image de Mason ainsi qu’à celle des Red Sox, et un tas de gens

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riches auront des déductions fiscales. Surtout, la mémoire de la mère de Mason a
été célébrée, et davantage de femmes seront dépistées et, je l’espère, sauvées.
J’ai l’impression d’être une Mère Teresa des temps modernes, en plus jeune et
plus baisable. Je ricane toute seule en titubant dans le salon. Il est vide, mais la
veste de Mason est posée sur le dossier du canapé, donc il a dû rentrer. J’arrive
devant sa chambre sur la pointe des pieds et je vois une faible lumière dans la
fente étroite de sa porte entrouverte.
Je me rapproche et j’entends des bruits que mon cerveau ne parvient pas à
déterminer jusqu’à ce que je sois confrontée à la scène – Mason, allongé sur une
femme, la prenant sauvagement par-derrière.
– Putain oui, tu es tellement serrée, grogne-t-il.
Quant à moi, je les regarde, incapable de tourner la tête. Mason remonte sa main
le long du dos de la femme et il la plonge dans ses cheveux blonds. Il les pousse
sur un côté et c’est alors que je vois qui est à quatre pattes. Rachel. La douce et
pure Rachel en train de reculer son petit cul parfait contre Mason qui la baise
brutalement.
– Tu es à moi, maintenant, Rachel. Et je vais profiter de ta chatte parfaite jusqu’à
la fin de mes jours.
– Oui, bon sang, oui, Mace. Je vais… je vais… Mon Dieu ?
– C’est ça, Bébé, répond Mason.
Il relève son torse et pince ses tétons entre ses doigts. Ses seins sont petits, mais
ils tiennent parfaitement dans ses mains et il ne semble pas s’en plaindre. Je sais
que je devrais partir. Je ne devrais vraiment pas rester là, à les regarder, mais je
les trouve magnifiques. Rien à voir avec le dernier spectacle auquel j’ai vu
Mason participer avec deux autres femmes. Avec Rachel, j’ai l’impression d’être
face à un acte d’amour sincère.
Je me mords la lèvre et je serre les cuisses alors que Mason continue de titiller
les tétons de Rachel. Mon entrejambe fourmille de manière insupportable, mais
je ne peux pas faire ça. Je refuse de me masturber en les regardant. Ce serait aller
trop loin.
Je commence à reculer pour les laisser en paix lorsque Mason plonge sa main
entre les jambes de Rachel pour masser son clitoris. Elle se cambre tandis qu’il

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accélère ses allers-retours, et ils crient à l’unisson en jouissant tous les deux.
C’est exotique et sensuel, c’est quelque chose que j’ai désespérément envie de
vivre. Seulement, je ne sais ni quand ni avec qui. J’ai brièvement cru connaître
un tel amour, mais maintenant, je suis de retour à la case départ et je suis libre.
J’ai le droit d’être avec qui je veux, tout comme Wes.
Wes. Mon Dieu, je mouille de plus belle rien qu’en pensant à lui.
Je me dépêche de retourner dans ma chambre et je ferme la porte avant de me
jeter sur mon lit. Je ne devrais pas, mais je ne peux pas m’empêcher. Je sors mon
téléphone pour afficher les photos que j’ai prises de Wes et d’Alec. Il me suffit
alors de me toucher pendant trente secondes et je crie sous l’effet de mon
orgasme, étouffant ma voix contre mon bras, mordant mon peignoir alors que je
tressaille de la tête aux pieds.
Hélas, la joie que cela me procure n’est que de courte durée et, étendue sur mon
lit dans ma chambre silencieuse, je me sens affreusement seule. Pour la première
fois de ma vie, je me sens véritablement seule au monde.

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Chapitre 7

Après notre gala de charité, plusieurs sponsors approchent Mason. Il s’avère


que lorsqu’un jeune joueur de base-ball professionnel devient philanthrope,
toutes les organisations ou entreprises sportives, aussi petites soient-elles,
veulent leur part du gâteau. Rachel passe donc la semaine à gérer toutes les
demandes d’interviews et de pubs.
Quant à moi, je continue de jouer le rôle de la belle petite amie dévouée tout en
me goinfrant de bière et de base-ball. C’est tout simplement génial. C’est ma
troisième semaine à Boston et je sais que je vais regretter ce train de vie si facile.
Certes, je vais bientôt rencontrer un autre homme plein aux as qui a besoin de
moi pour une raison ou pour une autre, et le cadre sera sans doute super mais,
hélas, ça ne comblera pas le manque d’affection que je ressens. Une fois qu’il a
cessé de se comporter comme un imbécile, la vie auprès de Mason s’est avérée
très confortable. Il est drôle, intelligent, et il sait profiter de la vie. Cela fait
longtemps que je ne me suis pas sentie aussi jeune. Je n’ai rien d’autre à faire
que de penser à moi-même. Mason m’apprécie pour qui je suis et nous nous
entendons comme de vieux amis alors que cela ne fait pas un mois que nous
nous connaissons.
La bonne nouvelle, c’est que Rachel vient plus souvent chez lui. Ils sont super-
mignons ensemble, et Mason fait tout pour lui plaire. Je me demande comment
ça se passera lorsque je ne serai plus là. Cela fait trois semaines que les fans et le
public me voient comme la copine dévouée qui est dingue des Red Sox et qui a
aidé son copain à organiser un immense gala de charité.
– Eh Mace, tu crois qu’il faut qu’on mette au point une sorte de plan pour se
séparer ? je demande en remuant les œufs brouillés dans la poêle.

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C’est à mon tour de préparer le petit déjeuner et Mason mange une quantité
surprenante de protéines, donc je cuisine une douzaine d’œufs, dont dix seront
dévorés par ses soins.
Il prend une tranche de bacon dans l’assiette et la mâche d’un air pensif.
– Je ne sais pas. On devrait poser la question à Rach. À mon avis, on va devoir
cacher notre relation pendant quelques semaines pour que les médias ne me
voient pas passer d’une nana à une autre, tu ne crois pas ?
Je hoche la tête en ajoutant du fromage râpé dans la poêle ainsi que du sel et du
poivre.
– Ouais, ça semble logique. Comment ça se passe entre vous, d’ailleurs ?
Je ne parle pas d’un point de vue sexuel, car j’entends leurs ébats de l’autre bout
du couloir. Ils feraient bien d’essayer d’être plus discrets, d’ailleurs.
Il vole une deuxième tranche de bacon et s’appuie contre le plan de travail
pendant que je remplis les assiettes. Je les pose sur le bar, où Mason et moi
aimons manger, car la salle à manger nous semble trop formelle pour tous les
deux.
– Ça se passe bien, répond-il en souriant. Je n’aurais jamais imaginé qu’une
sauvageonne se cachait sous ses tailleurs, mais bon sang, je suis l’homme le plus
heureux sur terre.
Je ricane et manque m’étouffer sur mes œufs brouillés, Mason me frappe le dos
jusqu’à ce que ça passe.
– Une sauvageonne ? Tu es sérieux ?
Il hoche la tête et sourit jusqu’aux oreilles.
– C’est le meilleur coup de ma vie.
Je le frappe sur le bras. Il se masse en continuant de sourire.
– C’est vrai ? s’exclame-t-il. Elle a l’air mignonne et proprette en tailleur, mais à
la seconde où elle l’enlève… bon sang, Mia, cette nana est une vraie cochonne.
– Je suis ravie pour toi, Mace, je réponds en souriant. Tu crois que ça peut
devenir sérieux entre vous ? je demande en essayant de masquer à quel point je
suis excitée pour eux.
Il hoche la tête.

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– C’est déjà sérieux. Je ne peux pas imaginer qu’un autre homme mette la main
sur elle. Ça me rend dingue rien que d’y penser. Je me dis que si j’ai la nausée en
l’imaginant avec quelqu’un d’autre, ça doit vouloir dire quelque chose, non ?
– Je suis d’accord.
– Du coup, je me suis dit que je pouvais lui en parler demain soir, quand on sera
à Seattle.
Seattle. Nous allons à Seattle ?
– On va à Seattle ?
– Ouais. L’avion part aux aurores demain. On y reste deux jours, pour trois
matchs. Ressaisis-toi et prépare-toi, ma douce, dit-il en terminant son assiette.
Je me lèche les lèvres à l’idée que je vais peut-être pouvoir éloigner
momentanément la solitude qui m’a suivie toute la semaine.
– Euh, j’ai un ami à Seattle. Pendant que Rachel et toi vous… tu sais… ça te
gênerait que je le voie ?
Mason écarquille les yeux en souriant.
– Tu as un ami ?
Je le regarde en fronçant les sourcils.
– Ouais, ça te surprend que j’aie un ami ?
– Quel genre d’ami ? demande-t-il d’une voix amusée.
– Qu’est-ce que ça peut te faire ? je rétorque sèchement.
Ça ne le regarde absolument pas et je n’ai aucune intention de me confier à lui.
– Rien, je voulais juste t’agacer. Je me fiche de qui tu baises, du moment que la
presse n’apprend pas que ma fausse copine me trompe.
Je souris et le regarde en jouant des sourcils.
– Je sais rester discrète.
Mason se lèche les babines et sourit à son tour.
– Je n’en doute pas, ma douce.
*
* *
Notre vol a été retardé par la pluie, qui nous accueille en trombe lorsque nous
atterrissons à Seattle. Cela fait une heure que le match aurait dû commencer,

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mais cela n’a pas découragé les fans des Mariners1 qui ont attendu – sans doute
sont-ils habitués à la pluie.
À : Alec Dubois
De : Mia Saunders
Salut Frenchie… Je suis en ville pour deux jours. Tu es libre ce soir ?
Je n’arrive pas à croire que je fais ça. Je n’ai pas parlé à Alec depuis que je suis
partie il y a bientôt deux mois.
À : Mia Saunders
De : Alec Dubois
Ma jolie, je te retrouve où tu veux. Est-ce que c’est ce qu’on appelle un « plan
cul ? ?
J’éclate de rire en imaginant Alec prononcer ces paroles avec son accent
français. Je serre mon téléphone contre moi, me sentant déjà infiniment plus
légère et beaucoup moins seule.
À : Alec Dubois
De : Mia Saunders
Ça t’intéresse ?
À : Mia Saunders
De : Alec Dubois
Tu as vraiment besoin de poser la question ? Ne t’habille pas trop. Je veux voir
ta peau parfaite dès que tu ouvriras la porte.
Ma peau parfaite. Il veut voir ma peau parfaite. Il a toujours su montrer combien
il aimait mon corps Je repense à ses doigts caressant ma hanche, puis ma taille et
mes seins. Je repense à ses chuchotements, me disant de belles choses en
français. Alec me faisait croire que j’étais belle. À tous les niveaux.
Soudain, des bouffées de chaleur parcourent mon corps, déferlant dans mes
veines et embrasant mon sang à l’idée que je vais revoir Alec. J’ai hâte ?
*
* *
J’ouvre la porte, et voilà Alec Dubois, mon Frenchie. Je n’ai pas le temps de lui
dire bonjour qu’il passe son bras autour de ma taille pour m’attirer contre lui et
me soulever dans ses bras. Sa bouche s’empare de la mienne et je passe mes

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jambes autour de sa taille. Il se tourne, claque la porte et m’appuie contre le bois.
Son sexe dur se frotte contre mon entrejambe mouillé. Je gémis et j’ouvre plus
grand la bouche pour y accueillir sa langue.
J’avais oublié à quel point j’aimais les baisers d’Alec. Quand il m’embrasse,
c’est de tout son corps et de toute son âme, avec toute sa passion, son désir, sa
grâce et sa beauté. Il finit par reculer la tête pour poser son front contre le mien.
– Ma jolie. Ton amour m’a manqué, chuchote-t-il.
Des larmes emplissent mes yeux et je plonge mon regard dans ses superbes
pupilles ambrées. Je mordille sa lèvre et promène la pointe de mon nez dans son
cou.
– Tu m’as manqué, toi aussi. Je ne savais pas à quel point jusqu’à ce que je te
voie devant moi.
Il pose ses mains dans mon cou et caresse mes lèvres avec ses pouces tandis que
ses yeux semblent faire l’inventaire de mon visage pour en cataloguer le moindre
détail.
– Tu as été triste, ma chérie. Pourquoi ?
Je secoue la tête, car je n’ai pas envie de parler de ça maintenant.
– On en parlera plus tard. Pour l’instant, est-ce que tu as faim ? Je peux t’offrir
quelque chose ?
Alec appuie son érection contre mon ventre et mon sang se met à bouillir dans
mes veines. Je resserre mes jambes pour le rapprocher de moi alors que son
regard brille avec une intensité qui m’a manqué. C’est le regard d’un homme qui
est impatient de posséder une femme.
– Je n’ai faim que de toi et de ton sexe sucré, ma jolie.
Et revoilà mon Frenchie cochon.
Sans plus un mot, il m’emmène à ma chambre et ferme la porte derrière nous. Il
pose un genou sur le lit et se penche en avant pour m’allonger avec une
délicatesse infinie – comme si j’étais aussi précieuse qu’une de ses toiles.
– Déshabille-toi, dit Alec en se redressant. Je veux te voir révéler ta lumière.
Sa façon de parler et son regard de braise m’excitent à n’en plus finir. Sans la
moindre pudeur, je me dresse sur les genoux et je passe ma minuscule robe au-
dessus ma tête. Je ne porte rien dessous.

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– Tu es encore plus belle qu’avant, dit Alec en français.
Ses mots glissent sur mon corps comme une caresse. Je n’ai pas besoin de parler
sa langue pour savoir ce qu’il a dit. Ses yeux révèlent tout ce que j’ai besoin de
savoir.
– Il n’y a que toi qui le penses, je réponds en secouant la tête.
– Tu ne te vois pas comme le reste du monde te voit, ajoute-t-il en posant une
main sur ma joue.
– Tu n’es pas le reste du monde, Frenchie, je rétorque en riant.
Alec tapote ma lèvre, et je prends son pouce dans ma bouche pour le sucer et le
titiller avec ma langue. Soudain son regard s’assombrit.
– Oh, Chérie, as-tu oublié ce que tu as appris pendant que tu étais avec moi ?
chuchote-t-il en enlevant son t-shirt, révélant ces pecs carrés et ces abdos que
j’aimais tant mordre.
– Je n’ai pas oublié combien j’aimais ton corps, je réponds alors que ma
respiration accélère.
Il tend les mains et empoigne mes seins, serrant et massant mes globes lourds
comme s’il redécouvrait mon corps. Un cri m’échappe lorsque ses pouces
effleurent mes pointes dures, et il inspire profondément dans mon cou comme
pour avaler mon odeur.
Je ferme les yeux et gémis en penchant la tête en arrière pour m’offrir à lui.
– J’adore que tu me touches.
Une sensation mouillée couvre mon sein droit, puis je sens ses dents mordiller
ma peau sensible. Une nouvelle décharge de désir électrifie mon corps lorsqu’il
mord plus fort mon téton, et des frissons se propagent tout droit entre mes
cuisses. Mon clito se met à pulser en se languissant de ses caresses, impatient
qu’Alec le dévore. Il passe de longues minutes sur mes seins, à les sucer, les
pincer, les mordre. Mon bassin dessine des cercles, cherchant n’importe quoi
pour s’y frotter.
– Alec, je gémis.
Je le vois sourire contre mon téton, puis il recule la tête et me regarde. Je
suppose qu’il voit une femme prête à être baisée. Seulement, Alec ne baise pas.
Il fait l’amour.

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Ses mains descendent sur son jean, qu’il déboutonne et qu’il baisse, libérant son
sexe épais qui perle déjà en son sommet. Je me penche en avant pour lécher la
petite goutte crémeuse et je souris en redécouvrant son goût.
– Oui mon amour, soulage-moi pour que je puisse te savourer.
Je suis à quatre pattes face à lui et il plonge sa main dans mes cheveux pour
enfoncer sa queue dans ma bouche. Je l’avale profondément dans ma gorge,
comme il l’aime tant.
– Si bon, chuchote-t-il.
Il n’a pas tort. Tailler une pipe à Alec est incroyable. Son goût et son odeur me
rappellent de merveilleux moments de sexe, de rires, d’amour et d’amitié –
toutes les choses qui me manquent aujourd’hui. Avec Alec, je n’étais pas seule.
Je redouble d’efforts en prenant sa queue dans ma bouche, titillant son gland,
lapant chaque goutte de liquide pré-séminal comme un chaton devant un bol de
lait. Il me regarde l’engloutir et lorsque je lève la tête, je découvre que ses
narines sont dilatées, ses yeux entrouverts et que sa bouche est tordue par le
plaisir que lui procure ma bouche. Ensuite, sans prévenir – mais Alec ne prévient
jamais  –, il se déverse en moi et remplit ma bouche de son essence chaude. Je
l’avale en le vénérant jusqu’à ce que sa main empoigne mes cheveux pour se
retirer de ma bouche.
– Oh, ma jolie, ce soir, je vais t’aimer pour te rappeler comment tu dois t’aimer
toi-même. Ce que tu viens de faire, ma superbe Mia, c’est le début parfait pour
cette soirée.
*
* *
Nous venons de nous doucher après deux superbes parties de jambes en l’air.
– Merci d’être venu ce soir, dis-je en me nichant contre son torse nu.
Il promène sa main sur mon bras et mon épaule, dessinant des motifs invisibles,
puis il frotte sa mâchoire barbue sur le dessus de ma tête.
– Pourquoi es-tu si seule alors que tu es payée pour être avec quelqu’un ?
demande-t-il d’une voix curieuse.
Je lèche son téton, puis je l’embrasse avant de répondre.
– Je ne couche pas avec tous mes clients, Alec.

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– Ah bon ? Vraiment ?
– Vraiment, je réponds en riant.
– Je ne comprends pas. Pourquoi – alors qu’ils te paient pour être avec eux  – tu
n’es pas avec eux de la plus belle manière qui soit ?
Je glousse de nouveau contre son torse. Je ne suis pas surprise qu’Alec ne
comprenne pas.
– Tu sais, je n’étais pas obligée de coucher avec toi.
Il étudie mon visage et je sais qu’il essaie de comprendre quelque chose.
– Chérie, toi et moi étions faits pour nous aimer. Il n’y a jamais eu le moindre
doute, si ?
– Non, je réponds. Mais ce n’est pas le cas avec tout le monde. Je ne suis pas
payée pour baiser.
– Je ne baise pas, rétorque-t-il en grognant.
Je lève la tête, pose mes mains sur son torse, puis j’appuie mon menton sur mes
mains.
– Je sais. Et j’adore ça chez toi. Tu m’as appris comment aimer la personne avec
qui on est, mais ça ne veut pas toujours dire qu’on doit systématiquement
coucher avec elle.
Il fronce les sourcils et me regarde d’un air stupéfait.
– Pourquoi pas ? Tout le monde a besoin de se détendre et d’une connexion
physique. Faire l’amour est le meilleur moyen d’être apaisé.
Je ne suis pas surprise que mon Frenchie voie les choses ainsi.
– Eh ben, le client après toi était homo, et en couple, je réponds en haussant les
sourcils.
– Et alors ? Tu aurais pu leur faire l’amour à tous les deux.
Il me tire sur lui de sorte que je le couvre entièrement, puis il empoigne mes
fesses et écarte mes jambes. Je le sens durcir sous moi. Alec est de loin l’homme
le plus viril que je connaisse. Il a dit qu’il me ferait l’amour toute la nuit et je ne
doute pas que je m’évanouirai d’épuisement avant qu’il en ait fini avec moi.
Du bout de la langue, je dessine un trait d’un téton à l’autre et je les suce jusqu’à
ce qu’ils durcissent.
– Ç’aurait été une première, c’est sûr, mais ce n’était pas comme ça avec eux.

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– Je n’arrive pas à comprendre. Mais peu importe. Continue.
Je penche la tête sur le côté et retrace sa moustache et sa barbe du bout du doigt.
Ses longs cheveux châtain roux ont séché et sont superbement ondulés.
– Ensuite, il y a le mec avec qui je suis maintenant. Le joueur de base-ball. Au
début, je pensais vouloir coucher avec lui. Mais, en fait, il aime quelqu’un
d’autre.
– Ah. Et l’autre femme n’aime pas partager. Alors pourquoi a-t-il besoin de toi ?
demande-t-il.
J’ai du mal à me concentrer sur sa question, car il choisit ce moment pour
plonger un doigt en moi par-derrière. Ensuite, il me doigte lentement jusqu’à ce
que je mouille assez pour accueillir un second doigt.
– Tu disais ? insiste Alec en souriant jusqu’aux oreilles.
– Euh… ouais. Eh bien, il s’est comporté comme un enfoiré quand on s’est
rencontrés, et ensuite je l’ai aidé à… Mon Dieu, Alec…
Je laisse tomber ma tête sur lui et je recule les fesses contre ses doigts pour
l’aider à toucher le bon endroit.
– … euh… séduire celle qu’il voulait.
– Dommage pour lui, mais c’est mieux pour moi, répond Alec en se léchant la
lèvre.
Il enfonce profondément ses doigts en moi et j’écarte les jambes autant que je
peux en gémissant. Je suce ensuite son téton et le mordille alors qu’un orgasme
se prépare dans mon bas-ventre. Lorsque je lève brusquement la tête pour crier,
il me fait rouler sur le dos et descend entre mes jambes en déposant en route de
petits baisers.
– Je veux ta crème sur ma langue, ma jolie. J’ai besoin de me rappeler ton goût.
Maintenant, je vais te manger. Tu as fini de raconter tes histoires ?
Bon sang, quel talent ? Je pousse sur mes talons pour approcher mon sexe contre
son visage, et il pousse un grognement en plongeant sa langue aussi loin que
possible dans ma chatte. Ses doigts écartent mes lèvres alors qu’il frotte sa
moustache et sa barbe partout sur mon sexe.
– Je veux ton odeur sur moi quand je dors. Comme ça, je rêverai de ma superbe
Mia. Oui, ma chérie ?

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– Putain, oui ? je grogne avant de pousser un cri strident lorsqu’il suce mon
clitoris plus fort.
Alec prend son temps entre mes jambes, me suçant, me baisant avec un doigt,
me mordillant. Il dépose même un suçon sur l’intérieur de ma cuisse. Il
m’emmène au bord de l’orgasme plusieurs fois avant de faire marche arrière, et
je suis bientôt folle de désir, désespérée de jouir enfin. Je mouille tellement que
des gouttes glissent entre mes fesses, et Alec ne les gaspille pas. Il aplatit sa
langue sur l’orifice qu’il aime tant et il boit mon jus. Mes joues se creusent et je
me cambre, puis, lorsqu’il mordille mon clito, je jouis enfin en hurlant comme
une hystérique. Je jouis encore lorsqu’il enfile un préservatif pour s’enfouir en
moi et me baiser plus fort que jamais. Nous sommes sauvages, hors de contrôle,
et nous baisons comme si nous n’allions plus jamais en avoir l’occasion.
– J’aime ton corps.
– J’aime ton sexe.
– J’aime ton cœur.
– J’aime ton âme.
– Je t’aime, Mia.
Nous passons la soirée et la nuit à faire l’amour. C’est une des expériences
sexuelles les plus passionnées de toute ma vie. Il nous fait jouir de nouveau et,
lorsque les vestiges de son essence ont fini de se déverser dans mon sexe chaud
et pulsant, il s’effondre sur moi. Nous nous endormons tous les deux, toujours
liés physiquement, émotionnellement et mentalement.

1. Équipe de base-ball de Seattle.

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Chapitre 8

Je me réveille en plein orgasme, la tête d’Alec entre mes cuisses. Puis, sans
même un « bonjour ?, il enfile une capote. J’ai cessé de compter combien nous
en avons utilisé la veille. Il se faufile lentement entre mes lèvres gonflées qui
n’ont jamais été autant sollicitées. La sensation n’en est pas moins divine. Ma
pauvre chatte se contracte, soulagée que cette fois-ci ses allers-retours soient
plus lents. Nous savons tous deux que ce sera la dernière fois, mais je n’ose pas
dire que c’est la dernière de toute ma vie. J’ai revu Wes, et maintenant Alec,
donc je ne peux être sûre de rien.
Lorsque nous avons fini, il remet ses vêtements de façon méthodique.
– J’ai adoré cette nuit avec toi, ma jolie. La prochaine fois que tu es en ville, ou
que tu as besoin que je te rappelle que quelqu’un t’aime, appelle-moi, oui ?
Je hoche la tête, je me lève et j’enfile mon kimono pendant qu’il attache ses
cheveux. Bon sang, j’adore ce chignon fouillis qu’il porte. Je me hisse sur la
pointe des pieds pour l’embrasser, et il me serre fort dans ses bras.
Il recule la tête pour m’embrasser sur le nez.
– J’ai beaucoup de travail – sinon j’aurais passé la journée à te dévorer, dit-il.
Il prend mes joues dans ses mains et concentre ses yeux ambrés sur mon visage
triste.
– La tristesse ne te sied pas. Est-ce que tu es triste à cause d’un homme ?
Je ferme les yeux en repensant à ce coup de fil. Mon Dieu, je regrette tellement
de l’avoir appelé. J’aurais simplement pu lui écrire, comme ça, nous aurions
continué comme avant, satisfaits d’être tous deux amoureux. Or, voilà que je fais
la même chose que lui – je me perds dans une partie de jambes en l’air à en

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perdre la tête. Du sexe absolument fabuleux, mais qui n’est pas avec la bonne
personne.
– Ouais, c’est à cause d’un homme. Mais, tu sais, de t’avoir vu et d’avoir aidé
Mason à avoir cette femme, je me rends compte que ça fait partie de l’aventure.
Le chemin que j’ai à parcourir cette année est long, et si, en fin de compte, je
suis censée être avec un certain homme, alors je le serai.
Alec hoche la tête et je souris. Il coiffe mes cheveux en arrière et caresse ma
joue.
– Ma jolie, tu es très jeune. Prends le temps de profiter de la vie et de tout ce
qu’elle peut t’offrir. Y compris les plaisirs charnels, oui ?
Je sais ce qu’il essaie de me dire, et cela renforce l’idée que cette année est pour
moi, et pas pour moi et quelqu’un d’autre. Il s’agit de sauver mon père et de
découvrir qui je suis vraiment. J’irai partout où m’emmènera cette aventure.
Alec a raison. Je suis jeune et je ne suis pas dans une relation sérieuse, et Wes ne
l’est pas non plus. Je ne peux pas lui en vouloir d’avoir cherché une connexion
avec quelqu’un d’autre. Je l’ai fait aussi, et c’est génial. Je me sens rafraîchie et
prête à affronter tous les obstacles que la vie mettra sur mon passage.
– Tu sais, tu es assez génial, Frenchie.
Alec sourit jusqu’aux oreilles et je vous jure que je le ressens dans mon clitoris.
– Je sais, Chérie.
Il se penche et m’embrasse tendrement.
– En revanche, toi, tu dois te rappeler que tu es un cadeau pour le monde entier.
Alec a toujours su trouver les mots pour me consoler ou m’exciter.
Je prends sa main pour l’accompagner dans le salon. Je suppose que ce n’est pas
la peine d’espérer que Rachel et Mason soient déjà sortis – et lorsque je regarde
par la fenêtre, je découvre qu’il pleut des cordes. Donc, l’entraînement sera soit
repoussé soit annulé.
Contre toute attente, Rachel et Mason sont assis à table, devant ce qui ressemble
davantage à un déjeuner qu’à un petit déjeuner. Merde, quelle heure est-il ?
Mason voit Alec, puis il m’étudie, dans mon kimono, les cheveux en bataille, les
joues sans doute rosies par mon orgasme récent. Toute mon apparence doit crier
« Je viens de me faire baiser ?.

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– Salut ma douce, bien dormi ? demande Mason en souriant.
Alec répond à ma place.
– Je ne dirais pas que nous avons dormi, dit-il en jouant des sourcils.
Mon Frenchie est incorrigible. Rachel ne dit pas un mot. Elle nous dévisage,
bouche bée, sa fourchette arrêtée à quelques centimètres de sa bouche.
– Euh, je vous présente Alec. Alec, voilà Mason et sa copine, Rachel.
Rachel laisse tomber sa fourchette dans son assiette et se racle la gorge.
– Euh, salut ? !
C’est la première fois que je vois cette femme – d’habitude si pro et maîtrisée  –
perdre ses moyens face à quelqu’un d’autre que le joueur de base-ball qui est
assis à côté d’elle.
Mason hoche la tête, et je prends Alex par la main pour le reconduire à la porte.
Nous ne sommes pas vraiment hors de leur vue, en même temps Alec se fiche de
ce que pensent les gens. Au lieu de sortir dans le couloir, il me tire contre lui,
pose une main sur ma fesse, l’autre sur ma nuque, et il me serre contre lui pour
dévorer ma bouche. C’est le plus beau baiser d’adieu de toute ma vie.
Il ne me libère que lorsque je suis à bout de souffle.
– Je t’aime, Mia, dit Alec d’une voix sincère.
Je sais que j’ai une place dans son cœur et que cette place sera toujours mienne,
ça me suffit.
– Je t’aime aussi, Alec.
Je le regarde se diriger vers l’ascenseur.
– À une prochaine fois, ma jolie, dit-il quand les portes se referment sur lui.
Je tourne les talons et reviens vers la table, où Mason me tend la moitié de son
club sandwich. Je m’assieds et mords dedans, soudain affamée.
Aucun des deux ne dit mot, jusqu’à ce que Mason se tourne entièrement vers
moi.
– Alors, tu aimes ce mec ?
– Ouais, mais pas de la manière que tu penses. Je ne suis pas amoureuse de lui.
Mais on tient l’un à l’autre. Quand on est ensemble, on est ensemble, il n’y a que
nous. Mais la plupart du temps, on est séparés.
Rachel secoue lentement la tête.

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– Je ne comprends pas. Il a dit qu’il t’aimait. En français. Mon Dieu, c’était
super-sexy, ajoute-t-elle alors que Mason la fusille du regard. Pardon,
marmonne-t-elle.
Elle baisse la tête et se concentre sur son assiette.
Je ramène mon pied sur ma chaise et me concentre sur mes deux amis en
décidant que je n’ai rien à cacher. Il faut que je sois moi-même, que ça plaise ou
non. Si ce sont mes amis, ils accepteront qui je suis.
– Alec était un client. On a couché ensemble, et c’était génial. Il m’a beaucoup
appris à propos de l’amour qu’on peut avoir pour les autres et pour soi-même.
Donc oui, je l’aime. Mais ça ne veut pas dire que je veux l’épouser et avoir des
bébés avec lui. C’est plutôt que… j’adore qu’il me baise et je tiens à lui et je
l’aime comme un ami. Vous comprenez ?
Mason et Rachel secouent tous les deux la tête, et je pousse un grognement.
– Je ne peux pas l’expliquer. Mais ne vous inquiétez pas pour moi.
– D’après ce qu’on a entendu, il t’a assez baisée pour rattraper le temps perdu.
Bon sang, chaque fois que je t’entendais crier, je bandais et j’ai sauté Rachel
tellement de fois hier soir que je crois que ma bite a une tendinite.
Rachel et moi lui mettons toutes les deux un coup de poing sur le bras.
– Aïe ? s’exclame-t-il en se frottant. Eh, tu as aimé ça, toi aussi, dit-il en
désignant Rachel, qui rougit immédiatement.
Je finis le sandwich et je me lève.
– Je vais me doucher.
– À plus, espèce d’obsédée ? répond Mason.
– C’est l’hôpital qui se fout de la charité ? Venant de toi, je le prends comme un
compliment…
Mason pourrait être une version masculine de ma Ginelle. Ça serait sympa.
– Vous êtes tous les deux des enfants, répond Rachel alors que je ferme la porte
de ma chambre.
*
* *
Mason et les Red Sox remportent leur match à Seattle. Tout le monde est de
super-bonne humeur, et cela se voit. Lorsque nous rentrons à Boston, nous

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descendons de l’avion et prenons un taxi pour nous rendre au Black Rose, le pub
où Brayden, le frère de Mason, travaille. Il est temps de fêter la victoire et toute
l’équipe est prête. Des dizaines de mecs sortent de leur taxi, un par un, et
remplissent peu à peu le pub.
« We are the Champions ?, de Queen, retentit dans le bar, lancée sur le jukebox
par une jolie serveuse. À seize heures un jour de semaine, le bar était
pratiquement vide avant que l’équipe arrive, et celle-ci se fiche du jour et de
l’heure. Ils ont joué comme des stars sur le terrain et, maintenant qu’ils ont
quelques jours de repos, ils sont prêts à se détendre, une bière à la main. Les
WAG prennent leur place à côté ou sur les genoux de leur joueur, et tout le
monde se met à boire.
Plusieurs heures plus tard, je me sens particulièrement heureuse.
– Mace, je vais rentrer, dit Rachel en s’approchant de lui, mais pas assez pour
éveiller les soupçons des joueurs.
Personne en dehors de Junior ne sait que Mason se tape Rachel, et pas moi.
– Bébé, non, tu ne veux pas m’attendre chez moi ? demande-t-il en lui lançant le
regard d’un chaton abandonné.
– Je travaille demain, répond-elle en secouant la tête. J’ai de la lessive à faire et
j’ai envie d’être en forme au boulot. Si tu veux, je passerai demain midi ?
Il hoche la tête et pose une main sur son cou. Rachel ouvre grand les yeux, tout
comme moi, et nous regardons autour de nous pour nous assurer que personne ne
nous regarde, or tout le monde est occupé à boire et à s’amuser.
– Mace ? je gronde.
Heureusement, il se contente de tapoter son épaule.
– Tu vas me manquer, Bébé. À demain.
Rachel sourit tendrement et me prend dans ses bras.
– Tu t’occupes de lui ?
Je la regarde en fronçant les sourcils bien trop sérieusement, puis je lève ma
main sur ma tempe en guise de garde-à-vous.
– Oui, M’dame ?
– Je vous jure, vous êtes vraiment des enfants, répond-elle en secouant la tête
avant de tourner les talons.

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Mason la regarde partir en matant son cul qui est très beau, je dois l’avouer. Il
est petit, mais elle sait le mettre en valeur.
– Bon sang, regarde-moi ce cul. Je meurs d’envie de le mordre, grogne-t-il avant
de finir sa bière cul sec. Ça te dit qu’on se la colle et qu’on rentre en taxi ?
C’est alors que Brayden fait le tour du bar pour venir à nous.
– Ça va, vous deux ? demande-t-il.
– On va passer aux choses sérieuses. Il va nous falloir des shots et des bières.
Mia, on va jouer à un jeu ?
– J’adore les jeux. Comment ça s’appelle, j’ai peut-être déjà joué ? je réponds en
me hissant sur un tabouret.
– Ça s’appelle le Biskit.
– Ça roule, ma poule. Ma pote Gin et moi en avons pratiquement écrit les règles
?
Mason sourit, diabolique.
– Allez, frérot, sors-nous les dés et prépare-nous à boire ?
J’enlève mon sweat à capuche des Red Sox et je le mets sur le dossier de mon
tabouret, ce qui me laisse en débardeur noir et moulant. Mes seins fabuleux sont
clairement à la vue de tous, et Mason baisse les yeux en souriant.
– Tu triches, dit-il. Tu essaies de me distraire, ou quoi ?
– Eh bien, il va nous falloir d’autres joueurs, je réponds en riant.
Junior et Kris sont assis près de nous, alors nous les incluons au jeu et Mason
leur explique les règles. C’est alors que la fête commence vraiment.
*
* *
– Biskit ? s’exclame Mason lorsqu’il fait un double trois avec les dés.
Ce qui veut dire qu’il est enfin libéré de son sort.
Le jeu consiste à lancer deux dés. Le résultat obtenu indique ce que doit faire le
joueur. Par exemple, si le total des chiffres est neuf, le voisin de droite du
lanceur doit boire une gorgée. Mason a été le premier à obtenir un trois, donc il a
eu la malchance d’être le Biskit, ce qui signifie que dès qu’un autre joueur a
obtenu un trois, il a dû boire un shot cul sec. Son double trois vient enfin de le
libérer, et ce n’est pas trop tôt, car il est ivre mort.

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À la fermeture du bar, je suis aussi ivre que Mason, car j’ai pris le relais du
Biskit. Nous n’avons pas vraiment dîné, même si nous avons grignoté des frites
et des nachos durant le jeu. J’ai essayé de boire un verre d’eau chaque fois que
Brayden en a posé un devant moi, mais je crois que les verres d’eau ont été
séparés par au moins trois bières et deux shots.
Brayden nous appelle un taxi, donne au chauffeur plusieurs billets qu’il prend
dans le portefeuille de Mason, puis il dit au chauffeur où nous emmener.
Nous animons notre retour à la maison en chantant à tue-tête des airs et des
hymnes de base-ball. Nous sortons du taxi, remontons l’allée jusqu’à la porte de
Mason en titubant et nous appuyons à la porte en bois.
– Comment on fait pour rentrer ? bafouille-t-il.
Je vacille et je regarde autour de moi. Sa rue est super-jolie. Des taches colorées
égaient la nuit et le vent fait voler mes cheveux et me donne la chair de poule.
– J’adore ta rue. Elle est comme une œuvre d’art.
Je commence à redescendre une marche, mais Mason saisit mon bras avant que
je ne dévale l’escalier sur les fesses.
– Les clés ? s’exclame-t-il comme s’il venait de gagner au loto.
Il plonge sa main dans sa poche et il en sort un trousseau de clés qu’il agite
fièrement.
– Yes ? je crie à mon tour.
J’essaie de taper dans sa main, mais je la rate et je frappe la porte à la place.
Nous parvenons à ouvrir la porte, non sans difficulté, et nous titubons dans le
hall d’entrée. Nous nous appuyons l’un sur l’autre pour gravir l’escalier jusqu’au
premier étage.
– Chhhut, tu vas réveiller Rachel, chuchote Mason en se cognant contre un mur.
J’emploie tous mes efforts pour me concentrer et je le pousse en avant.
– Elle n’est pas là ?
Tout son visage devient triste.
– Oh non, ça craint ? J’avais super-envie de baiser…
– Ohhh, ça va, c’est pas grave, tu pourras baiser demain ? je réponds en avançant
vers ma chambre.
Soudain, il me plaque contre le mur et m’écrase avec son torse.

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– Tu sens super-bon, Mia. Je te l’ai déjà dit ?
Je secoue la tête et je cligne des yeux plusieurs fois.
– Non, mais c’est super-gentil. Tu devrais être gentil plus souvent. Je t’aime bien
quand tu ne te comportes pas comme un connard.
Il pose ses mains sur mes hanches et me ramène contre lui.
– Rachel me manque, dit-il en posant sa joue contre mes seins.
Je tapote son dos et passe une main dans ses cheveux.
– Ne t’en fais pas. Elle sera bientôt là. Elle va probablement nous faire à manger,
parce qu’elle est trop mignonne.
Je n’ai pas la moindre idée de ce que je raconte. Bon sang, j’ai vraiment
beaucoup trop bu. Soudain, je réalise que j’ai abandonné la fac. Mais peu
importe. Je gagne cent mille dollars par an. Par mois. Bref. Je gagne une fortune.
Pendant que je pense à tout ça, Mason a remonté ses mains sur mes seins, qu’il
palpe en les regardant d’un air fasciné.
– Tu as des seins géniaux. Rach a des petits seins, mais je les aime bien. Les
tiens sont les plus beaux du monde, j’te jure. Je peux baiser tes seins ? Ce serait
trop cool ? s’exclame-t-il.
Je le repousse et il se cogne au mur de l’autre côté du couloir.
– Mais non, espèce d’idiot. Tu ne peux pas baiser mes seins. Mais merci, je
réponds en souriant et en soutenant mon énorme poitrine. Je sais qu’ils sont
géniaux. Les mecs les aiment beaucoup. C’est un de mes plus beaux atouts.
Mason secoue la tête tellement de fois que dans mon état d’ivresse bien trop
avancé, je m’inquiète que son cou se brise.
– Non, non, non. Tu as des seins géniaux et un super-cul, c’est clair. Mais tes
cheveux et tes yeux sont ton plus bel atout. Tes yeux sont comme des amandes
vertes, dit-il en prenant mon menton pour lever ma tête vers la lumière. Ouais,
on dirait des émeraudes. Tu as des yeux de bijoux précieux ?
Il frotte sa mâchoire dans mon cou, et tout son corps semble s’écraser contre le
mien.
– Je suis fatigué, dit-il.
Il a à peine prononcé ces paroles que tout mon corps me semble soudain très
lourd, comme si je portais un carton de cailloux dans chaque main et qu’un autre

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était attaché à mon torse. Mon cerveau arrive à comprendre que ce poids, c’est
Mason qui s’endort debout contre moi.
– Non, il faut que tu ailles au lit.
J’arrive à le traîner dans sa chambre, où l’attend son lit géant.
– Maintenant, prépare-toi.
Il lève la tête et il enlève son t-shirt. Bon sang, son torse est doré et parfaitement
musclé. Je repense à mon Frenchie, qui a un corps magnifique, comme Mason.
– À ton tour.
Je ne sais pourquoi, dans mon état, sa requête ne paraît pas absurde. J’enlève
mon débardeur, et nous baissons nos pantalons en même temps. Je suis en soutif-
culotte et il est en boxer.
– Est-ce qu’on va baiser ? demande-t-il en vacillant.
Je baisse la tête pour inspecter son matos, mais mon corps ne réagit pas.
– Non ? Espèce d’imbécile, je réponds en retirant la couverture de son lit. Et puis
ta bite est bourrée, je glousse en me glissant sous la couette.
Ma tête vient à peine de toucher l’oreiller que je commence à sombrer.
J’entends Mason fouiller dans sa chambre, puis il se glisse sous la couette à côté
de moi.
– Pas bitée ma bourre, marmonne-t-il.
J’éclate de rire en me blottissant plus profond dans la couette.
– Je veux dire pas bourrée ma bite, bafouille-t-il.
Il saisit ma taille et m’attire contre son torse.
– Bonne nuit, Rach, dit-il.
– Pas Rach. Suis Mia, je réponds en frottant ma joue contre la chaleur de son
pec.
– D’ac. Bonnuit, Mia.
Nous sombrons tous deux dans un profond sommeil que seul l’alcool peut
provoquer.
*
* *
J’entends vaguement des bruits au rez-de-chaussée, et je me dis que Mason doit
être en train de préparer le petit déjeuner. J’ai l’impression qu’une batucada

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entière a élu domicile dans ma tête. Plutôt que d’ouvrir les yeux, je m’enfonce
sous la couette, blottie dans la chaleur qui m’enveloppe.
– Putain, j’ai tellement mal à la tête, marmonne Mace.
Cependant, sa voix ne me parvient pas de la cuisine ni de l’autre côté de la pièce.
Plutôt, elle ronronne juste à côté de mon oreille, aggravant le vacarme qui
résonne déjà dans ma tête.
Je cligne plusieurs fois des yeux pour les ouvrir. Je m’éloigne du corps qui est
collé au mien, et la couette tombe sur mes hanches, me laissant à moitié nue en
sous-vêtements.
– Qu’est-ce que… je commence en regardant Mason, qui ouvre lentement les
yeux à son tour.
Il est torse nu. Rien de tout ceci n’a de sens. Des rugissements retentissent dans
ma tête et j’appuie sur mes tempes en essayant désespérément de soulager la
pression et en cherchant à me rappeler ce qui s’est passé hier soir.
C’est alors que la porte s’ouvre et que Rachel, dans son tailleur habituel, entre en
souriant joyeusement.
– Debout là-dedans… commence-t-elle.
Elle me voit, et Mace s’assied brusquement dans le lit, révélant son torse nu
lorsque la couette tombe sur ses hanches.
– Mon Dieu ? s’exclame Rachel alors que les larmes remplissent déjà ses yeux.
Elle se couvre la bouche, le regard horrifié.
– Non… marmonne-t-elle en tremblant des pieds à la tête.
Mason me regarde, confus, puis il regarde Rachel et il bondit hors du lit, comme
si ses fesses étaient en feu. Hélas, cela ne fait qu’empirer la situation parce qu’il
n’est vêtu que de son boxer. Rachel s’étouffe, et je secoue la tête.
– Non, Rach, s’il te plaît. Ce n’est pas ce que tu crois, dis-je en me levant à mon
tour.
Hélas, encore une fois, cela n’arrange rien parce que je ne suis vêtue que d’un
tanga en dentelle blanche qui ne couvre rien et d’un soutif demi-lune assorti dont
mes seins débordent. Je suis sûre que si je me penche, mon téton va faire son
apparition. J’empoigne la couette et je m’enroule dedans.

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– Je crois que tu viens de coucher avec mon copain, crache-t-elle en me pointant
du doigt. Cela dit, j’aurais dû m’y attendre vu que tu es la pute que j’ai
embauchée ?
Ses paroles me vont droit au cœur et me font l’effet d’une gifle, ruinant en
quelques secondes tout le travail d’estime de moi que j’ai fait ces derniers temps.
– Rachel, il ne s’est rien passé ? dit Mason en allant vers elle.
Elle tend le bras pour l’arrêter.
– Je n’arrive pas à croire que je t’aie fait confiance. Tu as toujours été un salaud,
mais je pensais que tu avais changé. Mais tu faisais semblant, sanglote-t-elle
alors que les larmes coulent à flots sur ses joues. J’étais amoureuse de toi, Mason
? J’allais te le dire quand Mia serait partie et qu’on serait tous les deux ? hurle-t-
elle avant de tourner les talons et de partir en courant. Vous vous êtes bien
trouvés ? crie-t-elle depuis les escaliers.
Mason et moi restons plantés dans la chambre, écoutant le bruit de ses pas
s’éloigner puis la porte claquer.

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Chapitre 9

Mason se passe la main dans les cheveux.


– Merde. Putain de bordel de merde. Je n’arrive pas à croire qu’on ait couché
ensemble. Merde ? s’exclame-t-il en faisant les cent pas.
Je m’accroupis pour ramasser mon débardeur, je l’enfile, puis je mets mon jean.
– Mason, on n’a pas couché ensemble.
Il s’arrête et se tourne vers moi, puis il désigne son lit et me regarde comme je
venais de dire la plus grosse bêtise du monde.
– Euh, allô ? !
Je vide tout l’air de mes poumons, profondément agacée. Il me faut un café et
une demi-douzaine d’Ibuprofène, et vite. La batucada dans ma tête vient d’être
remplacée par un chantier de construction dont les ouvriers se moquent de moi
pour avoir trop bu hier soir.
– Non. On a dormi ensemble, mais il ne s’est rien passé. On était ivres morts.
Crois-moi, je le saurais si j’avais été baisée et je te promets que ce n’est pas le
cas.
Il me regarde, des pieds à la tête.
– Ouais, tu le saurais, répond-il en souriant, ce qui me fait grimacer. Euh non,
pardon, ajoute-t-il immédiatement. Comment je suis censée la convaincre de me
croire ? Elle me connaît, Mia. C’est justement le genre de truc que je faisais
avant d’être avec elle.
Il se laisse tomber assis sur le lit et je m’assieds à ses côtés.
– Ok, alors voilà ce qu’on va faire. On va se doucher, on va manger, on va boire
un café et prendre des antidouleurs. Ensuite, on va l’appeler. Tu vas te confondre
en excuses et lui expliquer qu’on était juste bourrés, qu’on n’a pas baisé et que

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même si les apparences sont contre nous, on s’est contentés de dormir dans le
même lit. Rien d’autre.
Il masse ses tempes avec ses pouces.
– Je me souviens que j’ai peloté tes nichons et que j’ai demandé à les baiser,
grogne-t-il en me regardant d’un air coupable.
– Ouais, mais c’est rien, je marmonne.
Ses épaules s’affaissent et il se prend la tête dans ses mains en posant ses coudes
sur ses genoux.
Je lui caresse le dos pour le rassurer.
– Est-ce que tu l’aimes ? je demande.
Il lève brusquement la tête et plonge son regard dans le mien. Il ferme les yeux
et hoche lentement la tête.
– Alors, tu dois lui dire, Mace. Ce sera peut-être le seul moyen de te sortir de ce
pétrin.
Il expire bruyamment en gonflant ses joues.
– Elle ne va pas me croire. Je connais Rachel. Elle va penser que je dis ça pour la
récupérer. J’aurais dû le lui dire à l’instant où je l’ai su.
Mason aime Rachel. Le monde ne cessera jamais de me surprendre. Le coureur
de jupons arrogant et macho a parcouru un long chemin depuis que je suis arrivé
il y a presqu’un mois.
– Tu l’as su quand ?
Il se lève et va à la fenêtre.
– La première fois qu’on a fait l’amour. C’était… c’était… tu sais. J’ai su tout de
suite qu’elle était la seule avec qui je voulais passer ma vie. Et j’ai merdé. Putain
? s’exclame-t-il en frappant le mur avec la paume de sa main.
Dieu merci, il n’a pas utilisé son poing, sinon il se serait sans doute blessé et il
ne pourrait pas jouer pendant quelque temps.
Je vais à lui et j’appuie mon front contre son dos.
– On va arranger tout ça. Tu vas voir. Tout finira bien.
Il secoue la tête.
– Qu’est-ce qui te fait penser ça ?

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– Parce qu’il n’y a pas d’autre solution. Si c’est la femme de ta vie, on doit
trouver un moyen de le lui prouver. On va trouver, tu verras. On la récupérera.
Dans la vie, il faut prendre des risques.
– Merci, Mia. Tu es une vraie amie.
– Je sais, je réponds en lui mettant un coup de bassin. Donc, voilà ce qu’on va
faire, dans l’ordre : on se douche, on prend des médocs, on mange et on boit
quinze litres d’eau.
Je tends la main, et il la regarde en haussant les sourcils. Sans doute pense-t-il
que c’est ringard.
J’insiste :
– Deal ?
– Deal, répond-il en serrant ma main.
*
* *
Joindre Rachel s’avère beaucoup plus difficile que je m’y attendais. Je pars dans
deux jours et Mason n’a toujours pas réussi à lui parler. Tous mes appels vont
directement sur sa messagerie, où je la supplie de me rappeler, de rappeler
Mason, de parler à l’un d’entre nous. Pas de réponse. Cette femme est têtue
comme une mule. Je commence vraiment à croire qu’elle ne va pas laisser de
seconde chance à Mason, et ça me fend le cœur.
Même si Rachel m’a dit des choses affreuses, je comprends pourquoi elle les a
dites. Quand on semble sur le point de perdre tout ce dont on a rêvé, on passe à
l’attaque, et la femme dans le lit avec son mec est une bonne cible. Cependant, je
n’aime pas qu’elle pense que je suis une pute, car c’est un point qui me dérange,
moi aussi, en tant qu’escort. Une escort qui a couché avec ses deux premiers
clients. Je n’ai pas couché avec les deux derniers, mais ça, Rachel ne le sait pas.
Mon téléphone sonne dans ma main.
– Allô ?
– Bonjour, ma poupée, tu es prête pour le client suivant ?
La voix de Tante Millie me fait l’effet d’un baume apaisant. J’ai passé les deux
derniers jours à me sentir affreuse en sachant que Mason et Rachel souffrent tous

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les deux, consciente du rôle que je joue dans leur malheur. J’ai beau être prête à
les aider, je ne sais pas par où commencer.
– Eh ben, ouais, le plus tôt sera le mieux, je réponds pour la première fois depuis
que j’ai commencé ce job.
Je n’ai jamais autant eu envie de passer à autre chose. Fuir le problème me
semble être une bonne idée.
– Qu’est-ce qui se passe, ma chérie ? Le beau gosse du base-ball ne te traite pas
bien ?
– Si, il est cool, une fois qu’on ignore ses manières de macho et maintenant qu’il
a appris comment on traite une femme, il est même plutôt fun.
– Très bien, alors je dois m’attendre à recevoir le bonus d’un jour à l’autre,
n’est-ce pas ?
– Tante Millie ? Bon sang, tu penses que je couche avec tous mes clients ?
– Poupée, tu es jeune, canon, et tu escortes des hommes riches et incroyablement
beaux. Donc, oui, je m’attends à ce que tu en profites. C’est ce que je ferais à ta
place, en tout cas. J’ai eu mon lot de beaux hommes riches par le passé, tu sais.
Je m’assieds en écarquillant les yeux.
– Tu étais escort, toi aussi ?
– Poupée, comment tu crois que j’en sais autant sur ce milieu, sur les tarifs à
appliquer, sur les hommes en qui je peux avoir confiance ? J’ai dû être escort
avant de monter la première boîte d’escorts du pays. J’ai tout fait, ma chérie,
mais à l’époque, il n’y avait pas de bonus. Les hommes pensaient que c’était
inclus, c’est tout. Aujourd’hui, comme tu le sais, tout est légal et je paie mes
impôts. Mes comptes sont audités régulièrement et tout est sous contrôle. Si mes
filles veulent faire des extras, les hommes doivent récompenser leurs efforts en
leur offrant un bonus. Tu vois, c’est simple.
– Je vois. Je pensais que tu gérais une boîte, c’est tout.
– C’est le cas, mais il y a vingt ans, j’étais à ta place. Mais je n’étais pas très
maligne, vois-tu. À l’époque, je suis tombée amoureuse d’un de mes clients et il
m’a fait un sale coup.
On pourrait presque dire que l’histoire est en train de se répéter, mais je ne suis
pas tout à fait prête à dire que je suis amoureuse de Wes.

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– Aujourd’hui, je traite les hommes comme ils traitent les femmes. J’en profite
tant qu’ils sont là, rien de plus. Je ne m’attends à rien à part à passer du bon
temps.
Sa façon de voir les choses n’est pas illogique. C’est ce que j’essaie de faire sans
y arriver, parce que mon cœur s’embrouille dans les détails. Avec Wes, je suis
perdue dans mes sentiments. Avec Alec, les choses sont fun et simples et je n’ai
pas l’impression de perdre quelque chose parce qu’il n’a jamais été à moi.
J’aime le temps que je passe avec Alec, car lorsque nous nous séparons, nous
trouvons d’autres moyens d’être heureux sans nous sentir coupables.
Si seulement j’étais capable de ça avec Wes.
Je décide de reconstruire le mur qui protégeait mon cœur et qui s’est effrité avec
Wes. Rien n’est comparable à ce que je vis avec Wes. Là où il est évident
qu’Alec et moi ne sommes pas faits pour durer – ce qui rend notre relation pleine
de passion et crée de merveilleux souvenirs  – tout avec Wes semble lourd de
sens et lié à des sentiments qu’aucun de nous deux n’aurait dû ressentir pour
l’autre. C’est là que nous avons fait fausse route. Avec Wes, les choses sont
automatiquement sérieuses. Or, les choses doivent être claires. Il doit y avoir des
limites. Bien évidemment, c’est un autre problème que je n’ai aucun espoir de
résoudre bientôt.
– Tu as raison. Merci du conseil, Tante Millie.
– De rien, répond-elle alors que j’entends ses ongles tapoter son clavier. Je suis
désolée que le base-ball ne se soit pas passé comme tu l’espérais. Le mois a dû te
sembler long.
Je souris en repensant à Alec.
– Eh bien, en fait, j’ai retrouvé un vieil ami quand on était à Seattle.
– Ah, et tu t’es bien amusée avec ton vieil ami ?
– Absolument.
Je change vite de sujet, parce que je ne connais pas trop les règles sur le fait de
revoir d’anciens clients, même si j’ai revu Alec et Wes en tant qu’amis et que
cela n’a rien à voir avec mon travail d’escort.
– Alors, tu vas me dire où je vais le mois prochain ou tu veux que je le devine ?
– Oh, ma poupée, tu vas t’éclater. Tu es déjà allée à Hawaii ?

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Du surf, du soleil et de la crème solaire.
– Tu es sérieuse ? Je vais à Hawaii ?
– Oui, ma poupée, et tu vas être modèle ?
Je grogne.
– Comme je l’étais pour Alec ?
Je me suis pas mal amusée, mais cette expérience a eu un effet cathartique qui
n’a pas été de tout repos. La dernière chose dont j’aie besoin, c’est un deuxième
round.
– Non ma belle. Tu vas être mannequin de maillots de bain pour le plus grand
designer de bikinis au monde. Il s’appelle Angel D’Amico. Il t’a demandée
parce qu’il t’a vue dans les magazines people avec des célébrités. C’est génial
pour ceux comme lui qui apportent des nouveautés au monde de la mode. Sans
parler du fait qu’il crée des maillots pour les vraies femmes.
– C’est-à-dire ?
– Ses créations ne commencent pas au trente-deux, mais au trente-huit. Il veut
plus de femmes avec des formes dans ses pubs. Tu sais, une femme avec une
paire de seins qui ne peut pas rentrer dans deux minuscules triangles. Il a adoré
que tu fasses du quatre-vingts D et que tu aies une morphologie en huit. Je crois
qu’il veut prouver que la beauté vient sous toutes sortes de formes et de tailles.
Hmm. Plutôt cool, en fait. Un designer qui se concentre sur des tailles réalistes.
– Ça a l’air chouette. Et puis… Hawaii ? C’est génial ? je m’exclame en
sautillant dans ma chambre.
– Le vol va être long, ma puce. C’est six heures depuis Boston, puis cinq heures
depuis la Californie. Tu passeras deux nuits chez toi pour te reposer.
Immédiatement, je pense à Wes et au fait que je pourrai peut-être le voir s’il
n’est pas en tournage, mais je rejette aussitôt l’idée, car ça va rendre les choses
plus difficiles. J’ai envie de m’amuser à Hawaii – de choper un surfeur bien
gaulé dans le but de baiser pendant un mois. Ouaip, c’est mon nouveau projet.
– Je peux faire escale à Vegas, plutôt ? Comme ça, je peux voir Maddy, Ginelle
et mon père ?
Gin m’a dit que Maddy pourrait bientôt perdre sa virginité avec son nouveau
mec et peut-être veut-elle parler seule à seule à sa grande sœur ?

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– Je pourrais redemander à Ginelle de prendre les rendez-vous pour les trucs de
beauté.
Tante Millie retient sa respiration et la relâche avec un sifflement.
– À ce propos, tu vas devoir te faire épiler.
– Ouais, comme d’hab.
– Non, ma belle. Je veux dire partout. Tu vas être mannequin pour maillots de
bain – il ne peut pas y avoir le moindre poil qui dépasse ou qui se voit quand tu
poses dans l’océan.
– Ça craint… et ça va faire mal, je grogne.
Je sens déjà les bandes de cire sur ma peau si sensible.
– Oui, ma poupée, ça fait mal. Mais la bonne nouvelle, c’est que le couturier est
un Italien de cinquante ans qui est marié à une ex-mannequin qui s’occupe des
filles. Et tu ne vas pas travailler tout le temps. Tu poseras un jour ou deux et tu
auras le reste de la semaine libre. Apparemment, tu auras un bungalow sur la
plage pour toi toute seule.
– Pour moi seule ? Je ne vais pas vivre chez eux ?
– Non, mais ils ne te donneront pas de vêtements, c’est la contrepartie. Comme
tu ne seras avec eux que pour les shootings photo et peut-être pour quelques
soirées, tu seras libre la plupart du temps et tu pourras porter ce que tu veux. En
revanche, tu pourras garder les maillots de bain.
Génial ? Je vais passer un mois à Hawaii. Ma vie vient de devenir mille fois plus
belle.
– Tu crois que je pourrais emmener Gin et Maddy ?
Avec les vingt mille dollars supplémentaires que j’ai gagnés avec Wes et Alec,
j’ai mis assez de sous de côté pour payer leurs vols. Elles pourraient rester avec
moi, donc on n’aurait à payer que les vols et la nourriture.
– Du moment que tu es disponible pour les jours de shooting, tu peux faire ce
que tu veux. Tu veux que je leur réserve des billets ?
– Ouais, mais il faut que je te rappelle pour te dire quand, parce que je ne sais
pas quand sont les vacances de Maddy ni si Gin peut poser des jours de congé.
Mon Dieu, je vais à Hawaii avec ma sœur et ma meilleure amie ? C’est le plus
beau jour de ma vie, je crie dans le téléphone, faisant hurler de rire ma tante.

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– Je suis contente que tu sois heureuse, ma poupée. Tu t’en souviendras quand tu
te feras arracher tous tes poils. Je t’envoie un mail avec les infos de ton vol. Tu
veux partir à l’aube, comme d’habitude ?
– Ouais, j’aime partir tôt.
En vérité, c’est simplement que j’aime m’échapper avant que mes clients sachent
que je m’en vais. Ça a marché les trois dernières fois, donc il n’y a pas de raison
que cette fois-ci soit différente.
– Je t’aime, Tante Millie.
– Moi aussi, ma poupée, répond-elle avant de raccrocher.
Maintenant que c’est réglé, il ne me reste plus qu’à trouver un moyen de
rabibocher Rachel et Mason.
Je suis en train de ranger mon téléphone dans la poche arrière de mon jean
lorsqu’il sonne de nouveau.
– Allô ?
– Suis-je bien sur le portable de Mia Saunders ? demande une voix sérieuse et
douce à la fois.
– Oui, qui êtes-vous ?
– J’appelle depuis l’hôpital Mass General. Nous avons votre copain aux
urgences, Mason Murphy.
– Mon Dieu ? je m’exclame en regardant autour de moi, prise de panique.
J’aperçois mon sac à main sur la commode et je le saisis avant de dévaler les
escaliers.
– Est-ce qu’il va bien ? Qu’est-ce qui s’est passé ?
– Il a quelques contusions et une légère commotion. Il a eu un petit accident de
voiture avec deux autres joueurs qui sont aussi chez nous. Est-ce que vous
pouvez venir ? Il a aussi demandé une certaine Rachel Denton, mais elle ne
décroche pas.
– Je vais la trouver. Vous êtes sûre qu’il va bien ?
– Oui, Madame. Il pourra sortir dans quelques heures, il faudrait que quelqu’un
vienne le chercher.
– Bien sûr, bien sûr. Je vais appeler sa famille, au cas où.
– Très bien, Madame. À tout à l’heure.

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Je raccroche et je regarde autour de moi. Je suis debout sur un trottoir de Boston,
devant la maison de Mason, et je ne sais pas par où commencer. Je n’ai pas le
numéro ni l’adresse de son père, et Rachel ne répond pas quand je l’appelle. Je
me rappelle alors que son frère travaille au Black Rose. Il y aura forcément
quelqu’un dans le pub qui saura me donner le numéro de son frère.
J’appelle les renseignements et ils me mettent en ligne avec le bar.
– Le Black Rose Pub, Brayden à l’appareil, répond le frère de Mason.
Ouf, quelle chance ? Je m’assieds sur le perron de Mason et je fais de mon
mieux pour parler calmement.
– Brayden, c’est Mia. Ton frère a eu un petit accrochage et il est à l’hôpital Mass
General.
– Quoi ? Il va bien ?
– Oui, il va bien. Des contusions et une commotion, rien de grave. J’y vais tout
de suite, mais je dois d’abord trouver Rachel, sa copine, je dis en oubliant mon
rôle.
– Je croyais que c’était toi, sa copine ? demande-t-il d’une voix étrange.
Je soupire et je me lève pour héler un taxi.
– Non, ce n’était que du cirque. Rachel, la blonde de l’autre soir, est sa vraie
copine, mais elle est furax contre nous deux. Elle croit que Mason l’a trompée
avec moi, et maintenant elle ne répond plus à nos coups de fil. Il souffre et il
veut la femme qu’il aime à ses côtés. Il faut que je la retrouve.
C’est alors que Brayden fait quelque chose à quoi je ne m’attendais pas, étant
donné les circonstances. Il éclate de rire.
– Tu ne m’as pas entendue ?
– Mia, Mia, cette belle blonde qui gravite toujours autour de lui ? Avec les
grands yeux bleus, mince et toujours en tailleur ?
Un taxi me voit enfin et s’arrête devant moi. Je monte dedans et je m’apprête à
lui dire d’aller à l’hôpital quand Brayden m’explique pourquoi il rit.
– Elle est ici, dans le bar, en train de picoler. Tu veux que j’arrête de la servir ?
Apparemment, le Ciel est de mon côté, ce soir. Je n’ai jamais autant de chance,
d’habitude.
– Ouais, fais-lui boire de l’eau. J’arrive dans quinze minutes.

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Je raccroche et je range mon téléphone.
– Je voudrais aller au Black Rose Pub, s’il vous plaît. Et je vous donne un bonus
de vingt dollars si vous vous dépêchez ?
– Ça roule, ma p’tite dame. Ma femme râlait justement parce qu’on n’a pas de
fric. Vingt balles de plus vont nous faire du bien ?
– Je vous en donne quarante si j’y suis dans dix minutes.
Le chauffeur s’insère brusquement dans la circulation et fait demi-tour avant
d’accélérer en direction du bar. Il doit vraiment avoir besoin d’argent parce qu’il
m’y emmène en onze minutes. Je règle la note et je lui donne quarante dollars
supplémentaires.
– Merci, mon pote ? je m’exclame en sortant de la voiture.
J’ouvre la porte du pub et je scanne la pièce à la recherche d’une tête blonde.
Assise au bar, avachie sur son tabouret, ses cheveux tombant de son chignon
sophistiqué, Rachel boit pour oublier son malheur.
– Dieu merci ? je m’écrie en allant vers elle.
Elle fronce les sourcils et grimace, mais elle n’en est pas moins jolie. C’est une
de ces femmes qu’on voit faire ses courses ou faire la queue à la poste et qu’on
admire pour son élégance naturelle.
– Rach, Dieu merci, je t’ai trouvée ? je me réjouis en m’asseyant sur le tabouret
à côté du sien.
– Hourrah, déclare-t-elle sans le moindre enthousiasme. Je ne peux pas dire que
je sois contente de te voir, voleuse de mec, répond-elle en me fusillant du regard.
– Rach…
– Tu n’as pas assez de mecs, avec ton job ? Tu t’es vue ? demande-t-elle en me
regardant des pieds à la tête. Tu es parfaite. Tu es justement le genre de femme
qui mérite d’être avec Mason Murphy. Il est parfait, lui aussi. Vous allez bien
ensemble.
Rachel boit une grosse gorgée du cocktail fruité qu’elle tient à la main et elle se
lèche les lèvres.
– Tu sais, poursuit-elle. Je suis contente que ça soit arrivé. Au moins maintenant,
je sais que je ne peux pas être avec un homme comme lui. Les apollons comme

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Mason ne peuvent pas être heureux avec une fille comme moi, pas quand ils sont
des nanas exotiques à portée de main ?
Je pousse un grognement et la saisis par les épaules. Elle se mord la lèvre et se
tait, enfin.
– Écoute-moi, dis-je en la secouant légèrement. Mason t’aime. Toi ?
Elle écarquille les yeux et ils se remplissent de larmes, mais elle les retient.
– Si ? j’insiste lorsqu’elle secoue la tête. Il est amoureux de toi et si tu l’écoutais
ne serait-ce que cinq secondes, tu le saurais ? Est-ce qu’au moins tu as écouté les
messages vocaux qu’on t’a laissés ?
Elle se met à trembler et elle fait non de la tête alors que quelques larmes coulent
sur ses joues.
– Bon sang, pour une femme aussi intelligente que toi, tu peux parfois être une
vraie imbécile ?
Elle croise les bras, baisse la tête et se renferme sur elle-même.
– Va-t’en, tu veux ?
– Je ne peux pas ? je grogne. Mason est à l’hôpital et il demande à voir sa
copine. Sa vraie copine ?

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Chapitre 10

J
– e crois que je vais vomir, dit Rachel en pâlissant brusquement et en couvrant
sa bouche de sa main.
Un seau apparaît devant elle comme par magie et elle le saisit. Elle plonge sa
tête dedans et se vide de tout l’alcool qu’elle a avalé, pendant que je lui frotte le
dos sous le regard triste et inquiet de Brayden.
Lorsqu’elle a terminé, Brayden prend le seau et file à l’arrière de la salle. Quant
à moi, j’emmène la jeune femme tremblante aux toilettes. Elle se rince la bouche
et je lui donne un chewing-gum pour masquer l’horrible goût quelle doit avoir
dans la bouche, puis j’enlève les épingles de ses cheveux et laisse tomber ses
boucles sur ses épaules. Je fouille dans son sac à bandoulière qu’elle n’a pas
enlevé en s’asseyant au bar, où je trouve une brosse. Lorsque j’ai fini, la masse
blonde de ses cheveux brille comme d’habitude. J’humidifie un mouchoir et elle
essuie les traces de mascara sur ses joues et sous ses yeux. Je fouille de nouveau
dans son sac pour en sortir son gloss et je suis contente d’y trouver un petit
poudrier. Je lui tends les deux et elle fait de son mieux pour se refaire une
beauté.
– Qu’est-ce qui est arrivé à Mason ? demande-t-elle d’une voix tremblante.
Elle semble redevenir la Rachel que je considère comme mon amie.
– Il a eu un accident de voiture avec d’autres joueurs. Il a une commotion, mais
il pourra sortir dans quelques heures. Je ne l’ai pas vu, il voulait te voir, donc je
me suis chargée de te trouver.
– Il veut me voir ? demande-t-elle en réprimant un sanglot.
Je hoche la tête et pose ma main sur son épaule.

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– Rachel, je te promets qu’il ne s’est rien passé entre nous. On était bourrés.
Super-bourrés. Je pensais me coucher dans mon propre lit. On s’est effondrés
dans le sien et on s’est tout de suite endormis. C’est tout. Il ne s’est rien passé
d’autre.
Elle ferme les yeux et elle hoche la tête.
– Je te crois.
J’inspire profondément, soulagée, libérée de la culpabilité et du poids énorme
qui pèsent sur mes épaules depuis plusieurs jours.
– Dieu merci. Mason est perdu sans toi, tu sais. Il pensait qu’il n’arriverait
jamais à te reconquérir.
– Ça ne veut pas dire qu’on est faits pour être ensemble, Mia. Comme je te l’ai
dit, le fait de le voir avec toi m’a ouvert les yeux. Il n’est pas fait pour être avec
une femme qui a sa propre carrière à mener. Il lui faut quelqu’un qui aime
s’amuser, qui peut aller à ses matchs et qui peut traverser le pays avec lui. Moi,
je ne peux pas en faire autant.
– Tu n’es pas sérieuse ? Tu bosses pour son agence de relations presse ? Tu
t’occupes de tous ses sponsors et des pubs qu’il fait. Il a besoin de toi pour tout
ça, aussi.
Elle penche la tête sur le côté.
– Ouais…
Les poils dans mon dos se hérissent, excitée de commencer à l’atteindre.
– Qui est-ce qui va l’empêcher de se ridiculiser à ces rendez-vous, hein ? Tu l’as
vu comme moi, il est tellement naïf qu’il se fera bouffer tout cru si tu n’es pas là
? La seule raison pour laquelle il s’est calmé, c’est pour te faire plaisir. On lui
fait des propositions à la pelle, maintenant, et je ne pense pas que ça s’arrête de
sitôt. Il va lui falloir une publiciste à plein temps, j’en suis certaine. Et c’est toi
qui dois le faire. Il n’a confiance qu’en toi.
Elle dégage ses cheveux de son visage et se tient plus droite.
– Tu as raison. Il se serait fait avoir sans moi. Il est trop généreux et insouciant.
Je sais qu’il est passionné par ce sport et qu’il ne fait pas ça pour l’argent mais
quand même, ils essayaient de l’avoir à bas prix.

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– Exactement, et tu le savais. Toi, Rachel, dis-je en enfonçant mon doigt dans sa
poitrine, c’est toi qu’il lui faut.
Ses yeux scintillent, sa confiance en elle semble renouvelée.
– Il faut qu’on aille le voir ? s’exclame-t-elle.
Nous sortons des toilettes d’un pas rapide et nous dirigeons vers la porte.
– Brayden, je t’appelle dès que j’en sais plus ?
Il hoche la tête sans rien dire.
– Et mets ses cocktails sur la note de Mason ? j’ajoute en souriant.
– C’est déjà fait, répond-il. Et celui-là aussi, dit-il en portant une pinte de bière à
sa bouche.
*
* *
Lorsque nous arrivons aux urgences, c’est un véritable chaos. Apparemment, un
semi-remorque s’est plié en deux et a provoqué un carambolage de quatorze
voitures. Il y a des gens avec des bandages ensanglantés à la tête, aux bras et aux
jambes, partout. Je grimace en courant à l’accueil.
– Je suis Mia Saunders, nous venons voir Mason Murphy.
La secrétaire cherche son nom sur l’ordinateur.
– On l’a déplacé dans une chambre temporaire. Au deuxième étage, chambre
cent trente.
– Merci.
Rachel et moi allons à l’ascenseur, où nous attendons en vain.
– Eh merde, je m’exclame.
Nous prenons les escaliers et arrivons au deuxième étage. Nous ne ralentissons
que lorsque nous trouvons sa chambre. Je tiens la main de Rachel et nous nous
regardons quelques secondes, liées par notre inquiétude, comme des sœurs ou
des meilleures amies qui cherchent à se réconforter. Nous calmons notre
respiration et nous tournons vers la porte. J’entre la première, suivie par Rachel.
Mason est allongé dans le lit, les yeux fermés. Les lumières sont tamisées et son
père est assis sur une chaise dans un coin.
– Mia, ma puce, ils ont enfin réussi à te joindre, dit Mick en me prenant dans ses
bras.

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Rachel s’approche du lit et Mason ouvre les yeux en se léchant les lèvres. Une
plaie avec des points de suture s’étend sur deux centimètres sur son front.
Plusieurs petites coupures et égratignures couvrent ses bras, mais il ne semble
pas y avoir de casse.
– Rachel…
Il tend la main et elle la prend dans les siennes. Les larmes qu’elle a retenues
pendant le trajet en taxi coulent enfin sur ses joues et tombent sur leurs mains
jointes.
– Bébé, je vais bien. C’est pour toi que je m’inquiète…
– Euh, je crois que j’ai raté quelque chose, dit Mick en se raclant la gorge.
Il me serre plus fort contre lui comme pour me protéger. Cet homme est
adorable. Il s’inquiète pour son fils et pour la fausse copine de son fils. Je le
serre contre moi à mon tour et je secoue la tête.
– Ça va, je chuchote.
Rachel tourne la tête vers lui avec l’air d’une petite souris morte de peur.
– Eh, ma belle, regarde-moi, dit Mason. Je suis désolé. Il ne s’est rien passé, je te
le jure, dit-il. Il ne pourrait jamais rien se passer. Il n’y a que toi que je veux. Tu
es la femme de ma vie.
– Chut, ne dis rien, tu dois te reposer, dit-elle d’une voix rauque.
Il secoue la tête et grimace. Elle caresse la joue du côté qui semble avoir été
épargné. Sa tête a dû frapper la vitre et la briser – ça expliquerait toutes ses
microcoupures.
– Je n’ai pas besoin de repos. Ce dont j’ai besoin, c’est que la femme que j’aime
m’écoute ? grogne-t-il.
Son père et moi restons parfaitement immobiles, regardant la scène se dérouler
sous nos yeux. Pour moi, c’est magnifique. Pour son père, c’est
incompréhensible.
– Mason, commence-t-elle d’une voix tremblante.
Il tire sur sa main pour la rapprocher de lui.
– Tu m’as entendu ? Je t’aime. Je t’aime depuis le premier soir. Et jamais je ne
foutrais ça en l’air. Avec Mia, c’était parfaitement innocent ? s’exclame-t-il.

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– Elle me l’a déjà dit, répond-elle. Et je te crois. Je suis désolée d’avoir douté de
toi.
– Tu avais tes raisons, mais, Bébé, après cet accident… ça aurait pu être pire. Et
à présent, je ne supporterai pas de ne pas t’avoir à mes côtés… J’ai besoin de toi.
Toujours. Tout le temps.
Les grands yeux bleus de Rachel ne semblent voir que l’homme devant elle,
comme si plus rien n’existait sur cette terre.
– Alors, je serai là. Je ferai tout ce que tu voudras. Je t’aime aussi, tu le sais.
J’ai envie de crier et de sauter de joie, mais je me contente de sourire jusqu’aux
oreilles.
– Fiston, dit Mick en se rapprochant du lit, il va falloir que tu t’expliques, dit-il
d’une voix amusée.
– Papa, je te présente Rachel. Elle sera ma publiciste à plein-temps, si elle
accepte le poste.
Elle hoche la tête en souriant.
– Et en plus de ça, poursuit Mason, c’est ma copine. Ma vraie copine.
Rachel est rayonnante de joie, et son sourire semble illuminer la pièce.
– Bonjour, Monsieur Murphy. Je suis Rachel Denton et je suis amoureuse de
votre fils.
Mick regarde Rachel, puis son fils, puis moi.
– Et elle ? demande-t-il en me désignant.
– Mia est une escort, répond Mason simplement.
J’ai envie de me frapper la tête contre un mur alors que Mick écarquille les yeux.
– Ah non. Non, non, ce n’est pas ce que vous croyez ? s’exclame Rachel.
– Papa, non. On l’a embauchée pour booster mon image. Il me fallait une copine
sérieuse et, à l’époque, Rachel et moi n’étions pas ensemble. D’ailleurs, c’est
Mia qui nous a rapprochés.
– Je suis désolée de ne pas vous avoir dit toute la vérité, Mick, mais ça faisait
partie de mon rôle. Vous pouvez me pardonner ? je demande en le suppliant du
regard.
– Nous pardonner ? ajoute Mason en lui faisant ses yeux de chaton abandonné.

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Mick pousse un grognement et pose une main sur l’épaule de son fils en signe de
soutien, comme toujours.
– Fiston, si cette jolie dame est avec toi et que tu l’aimes comme tu le dis, alors
je suis sûr que je l’aimerai aussi. Mais si tu t’avises de me mentir de nouveau, ce
ne sont pas des microcoupures que tu auras, compris ?
Rachel et moi éclatons de rire et Mason fronce les sourcils.
– Oui, j’ai compris, Papa.
*
* *
Le soleil n’éclaire pas encore l’horizon lorsque je ferme ma valise et que je la
descends en silence dans le hall d’entrée. Mason et Rachel dorment dans sa
chambre. Après que les médecins ont autorisé Mason à sortir de l’hôpital, nous
sommes tous rentrés avec lui et son père nous a préparé un bon repas. Selon lui,
pour guérir un rhume, il faut le nourrir. Mason a eu un accident de voiture, pas la
grippe, mais personne n’a osé le lui faire remarquer. Je crois que son père avait
besoin de se sentir utile et de passer du temps avec son fils pour s’assurer qu’il
va bien.
Après dîner, les frères de Mason sont venus le voir. Shaun est passé avec sa
nouvelle copine, pas celle que j’ai vue en photo la dernière fois. Après tout, les
relations adolescentes ne sont jamais de très longue durée. Cela dit, je ne peux
pas dire que mes relations soient beaucoup plus stables, en ce moment. Il faut
dire que je passe d’un homme à un autre tous les mois sans savoir où je vais ni
quand.
Ses frères sont restés suffisamment longtemps pour se moquer de son accident et
du fait qu’il avait deux copines, ce qui a mis Rachel très mal à l’aise. Elle n’est
pas encore habituée au clan Murphy, mais je sais qu’elle y trouvera sa place en
peu de temps. Sans doute Ellie aura-t-elle son rôle à jouer, car elle a
immédiatement déclaré que Rachel était la princesse parfaite. Comme Eleanor,
Rachel est élégante, elle parle doucement et elle a une beauté classique ainsi
qu’une élégance naturelle. Je crois qu’elle et Mason sont faits pour être
ensemble et j’espère que, contrairement aux événements récents, ils arriveront à
se parler lors des moments difficiles.

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Je traverse la maison plongée dans le noir pour me préparer un café, et je le
sirote en regardant par la fenêtre. Le moins que l’on puisse dire, c’est que mon
séjour avec Mason a été intéressant. J’ai adoré assister à ses matchs, rencontrer
les joueurs et trouver ma place parmi les WAG. Surtout, j’ai découvert la vie
d’une équipe soudée. Celle des Red Sox est faite d’hommes qui se soutiennent
les uns les autres et qui sont virtuoses de la balle ou de la batte. Je suis encore
plus fan des Red Sox que je ne l’étais avant de venir à Boston, je ne pensais pas
que c’était possible.
Les WAG vont me manquer aussi. Elles ont leur propre petite clique et j’ai
beaucoup aimé faire partie de leur club pendant un mois. Je n’oublierai pas
Sarah, Morgan, ni bien sûr la petite Kris. Toutes ses femmes soutiennent leurs
hommes à cent pour cent et je leur souhaite à toutes d’être heureuses.
Plus que tout, j’ai pu voir deux personnes tomber amoureuses l’une de l’autre.
Deux personnes qui ne pensaient pas pouvoir être ensemble et qui ont découvert
que la seule chose qui ne leur convenait pas était d’être séparées. Rachel et
Mason se complètent parfaitement.
Je suis ravie que Mason ait perdu ses manies de Don Juan, mais en fin de
compte, je crois que c’était sa façon de se protéger. C’était un mur qui repoussait
les femmes sérieuses, peut-être parce qu’il ne pensait pas les mériter. Toutefois,
lorsqu’il a changé ce qui n’allait pas dans sa vie et qu’il a commencé à découvrir
qui il était vraiment, il a vu qu’il n’avait plus besoin de jouer un rôle. Désormais,
il sait qu’il peut être lui-même, et cela lui a sacrément bien réussi puisqu’il est
avec l’adorable Rachel, qui est prête à s’occuper de lui, professionnellement,
physiquement, psychologiquement et émotionnellement.
Quant à Rachel, je crois qu’il a fallu qu’elle pense avoir perdu Mason pour se
rendre compte qu’elle lui suffisait amplement. La femme ambitieuse que tout le
monde connaît est justement celle dont Mason est tombé amoureux, et je suis
persuadé qu’elle est celle avec qui il passera sa vie.
Je finis mon café et je sors mon papier à lettres de mon sac.
Mason,
Il y a quelque chose que tu ne sais pas sur moi, et c’est que je n’aime pas les
adieux. Ils sont tristes et gênants, et c’est pour ça que je te quitte alors que tu

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dors à poings fermés dans les bras de la femme que tu aimes. Celle qui est faite
pour être avec toi.
Je suis flattée que tu m’aies choisie pour être ta fausse copine. Ça faisait
longtemps que je ne m’étais pas autant amusée. J’ai appris plusieurs choses,
aussi. Je pars en sachant qu’il faut toujours se présenter sous son meilleur jour
et savoir accueillir les opportunités qui se présentent à soi. Je sais désormais
qu’il est important de prendre des risques pour trouver son bonheur et que bien
trop de gens se laissent piéger par la routine en pensant que leur vie ne peut
s’améliorer, même quand ils ont conscience de ne pas être heureux. Tu as choisi
le bonheur avec une belle et adorable femme aux cheveux blonds. Chéris-la. Elle
prend des risques, elle aussi, en s’offrant à toi.
Rachel,
Prends soin de lui. Il a besoin d’une femme forte qui refusera d’encaisser ses
conneries. Je sais que tu es la femme parfaite pour cela.
Vous allez tous les deux me manquer et je penserai souvent à vous. Merci de
m’avoir montré à quoi peut ressembler la vie lorsqu’on choisit son bonheur. Un
jour, je trouverai le mien, et ce jour-là, je ne le lâcherai plus.
Ne vous lâchez jamais,
Avec tout mon amour,
Mia.
Je laisse mon mot sur le plan de travail de la cuisine, je retourne dans le hall
d’entrée et je descends les marches du perron où m’attend mon taxi.
– Le Logan International Airport, s’il vous plaît.
Je regarde la ville défiler devant mes yeux alors que le soleil glisse au-dessus de
l’horizon, éclairant le ciel et les rues de son éclat doré. Ce mois aura été beau.
Entre les matchs de base-ball, les moments que j’ai passés avec Mason, Rachel
et le reste de la bande, je peux dire que je me suis amusée. J’ai également fait
mes premiers pas dans l’événementiel en organisant un gala de charité dont le
succès a été foudroyant et qui aidera de nombreuses femmes à lutter contre la
maladie. Je n’oublierai jamais ce mois d’avril.
Le taxi me dépose à l’aéroport, où je m’enregistre, et je passe la sécurité avant
de trouver un Starbucks où je m’installe pour boire un deuxième café et manger

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une part de cake au citron. Cependant, j’ai beau chercher ce que c’est, quelque
chose ne cesse de me tracasser.
Je sors mon téléphone et mon cœur cesse de battre. J’ai un message de Wes.
Nous ne nous sommes pas reparlé depuis que je lui ai raccroché au nez il y a
plus de deux semaines.
À : Mia Saunders
De : Wes Channing
On est toujours amis ?
Je réfléchis longtemps à sa question. Toujours amis. Wes et moi sommes-nous
amis ? Amants, oui. Amis… Avant de découvrir qu’il couchait avec Gina,
j’aurais répondu oui sans hésiter. J’aurais dit que nous sommes des amis qui se
font du bien. Je pense à Gin et à ce qui fait que nous sommes amies. Notre
confiance mutuelle, notre histoire, nos points communs. Cela dit, il s’agit surtout
de ce que serait ma vie sans elle, elle serait horrible. Je me sentirais perdue sans
son amitié. Est-ce le cas de Wes ? La réponse, sans aucun doute, est oui. Oui, je
me sentirais perdue. Je sais que si j’appelais Wes et que je lui disais que j’ai
besoin de lui, il prendrait immédiatement un avion pour me retrouver. Tout
comme Hector, Tony et même Alec. Et Mason, bien sûr. Car tous sont mes amis.
Ce sont des gens avec qui j’ai partagé un bout de vie et qui ont chacun une place
dans mon cœur.
Je me dépêche de répondre.
À : Wes Channing
De : Mia Saunders
Oui. Nous serons toujours amis. Je ne peux pas imaginer ma vie sans toi.
Je traverse l’aéroport, je m’achète un magazine et j’attends à ma porte
d’embarquement lorsque je reçois un message.
À : Mia Saunders
De : Wes Channing
Je ressens la même chose. Y a-t-il encore une chance que nous soyons plus
qu’amis ? Ou bien t’ai-je perdue à jamais ?
À : Wes Channing
De : Mia Saunders

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Tu ne pourras jamais me perdre. Pour l’instant, nous suivons chacun notre
chemin.
À : Mia Saunders
De : Wes Channing
Alors, on garde le même plan ?
À : Wes Channing
De : Mia Saunders
Oui.
À : Mia Saunders
De : Wes Channing
Quand est-ce que je peux te revoir ?

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MAI

Avant de s'envoler pour son nouveau job, Mia passe à Las Vegas où elle
rencontre le petit ami de sa soeur lors d'un dîner très officiel chez les parents du
jeune homme. Les tourtereaux annoncent leur intention de s'installer ensemble et
de se marier. Mia a un peu de mal à digérer la nouvelle.

C'est à Hawaï que nous la retrouvons. Elle est engagée comme mannequin pour
une célèbre marque de maillots de bain. Angel D'amico veut prouver qu'on peut
être belle même si on ne fait pas une taille 34. Il a créé une nouvelle ligne pour
les filles ayant des formes, et Mia est son mannequin vedette.
En arrivant dans ce lieu paradisiaque, Mia découvre son partenaire mannequin,
Tai Nikko, dont le corps musclé et les tatouages tribaux la font immédiatement
fantasmer.
Son séjour sur l'île risque de ne pas être de tout repos, d'autant qu'elle attend
l'arrivée de sa soeur et de sa meilleure amie qui viennent la rejoindre pour une
semaine de vacances.

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Chapitre 1

C’est le pire voyage de tous les temps ! Je suis partie de Boston, j’ai fait
escale à Chicago puis à Denver, où je remercie le Ciel d’avoir mis mes bottes de
moto, aussi confortables que des pantoufles, parce que je me retrouve à traverser
l’aéroport en courant. Je suis à deux doigts de rater mon vol pour Las Vegas,
mais j’y parviens à temps. Je suis cette personne qui met tout le vol en retard et
qu’on déteste devoir attendre. Lorsque je monte dans l’avion et que je cherche
ma place en traînant mon bagage à main, trois cents yeux me fusillent du regard.
Hélas, les choses ne s’arrangent pas, car je suis assise entre un homme très
enrobé et une gamine de huit ans terriblement curieuse, qui voyage seule. Ses
parents sont divorcés, et elle a désormais deux familles. Elle déteste la nouvelle
« sorcière » de son père et sa fille plus âgée qu’elle décrit comme étant une
brute.
Elle retourne chez sa mère, qui est strip-teaseuse à Vegas. De toute façon, les
gens qui vivent à Vegas même travaillent soit dans les casinos, soit dans les
restaurants, soit auprès des touristes. Ceux qui habitent en dehors de la ville ont
d’autres types d’emplois. J’apprends tout ça de la petite Chasteté, parce qu’elle a
décidé de me raconter tout ce qu’il y a à savoir sur elle. Tout. Je sais que sa
couleur préférée est le violet, mais pas le foncé, le plus clair ; celui qu’on
appellerait lavande. Les animaux sont son truc, surtout les chevaux. Ce qu’il y a
de mieux à Denver, chez son père, c’est le terrain et les animaux, parfait pour
une gamine de huit ans. Le désavantage, c’est qu’il y a la sorcière et qu’elle
gâche le temps qu’elle passe avec son père. Et puis… il y a la culpabilité. La
mère de Chasteté a très peu d’amis et aucune famille. La petite fille considère

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donc qu’il est de son devoir de tenir compagnie à sa mère, parce que « Personne
ne veut être seul. Les gens ont besoin des gens ».
Lorsque le pilote annonce que nous atterrissons dans vingt minutes, je prie pour
que Chasteté et sa mère trouvent un moyen d’être heureuses. Je prends aussi un
moment pour remercier la recherche scientifique d’avoir inventé la
contraception. Tout ce temps passé avec une môme de huit ans a renforcé mon
sentiment que je suis loin d’être prête à procréer. D’ailleurs, peut-être que je
n’aurai jamais d’enfants. Toutes les femmes ne sont pas faites pour être mères, et
j’ai déjà l’impression d’avoir élevé Maddy, ma petite sœur.
Au retrait des bagages, je récupère mon énorme valise remplie de vêtements aux
couleurs des Red Sox, de jeans et de fringues haute couture que je traîne depuis
Chicago. Je laisserai tout chez Papa, et Mads pourra choisir ce qu’elle préfère
entre les tenues de princesse d’Hector ou la version plus branchée proposée par
Rachel.
Une série de sonneries retentissent lorsque je rallume mon téléphone.
À : Mia Saunders
De : Mason Murphy
Ta lettre est cool, ma douce, mais ç’aurait été encore mieux que tu nous dises au
revoir en personne. Rach et moi voulions t’emmener à l’aéroport. Elle est vexée.
Je suis déçu. Trouve un moyen de te rattraper. ;-)
Ce n’est pas la première fois qu’un client, ou plutôt qu’un « ami », n’aime pas
ma façon de faire mes adieux. Si Wes l’avait anticipé et qu’Alec était resté aussi
cool que d’habitude, Hector avait pleuré comme une madeleine. Il m’avait laissé
un message dans lequel il m’expliquait en sanglotant que j’avais ruiné les adieux
parfaits. Apparemment, il avait vu ça dans un film et il avait tout prévu, jusqu’à
l’envol des colombes blanches. Tony avait ensuite saisi le téléphone pour me
gronder parce que je l’avais abandonné avec un fiancé en larmes.
Le message suivant vient de mon amie Ginelle.
À : Mia Saunders
De : Ma Salope Chérie
Yo. Suis dehors. Je fais des tours. Ne m’oblige pas à m’arrêter et à prendre un
billet pour ta sale tronche.

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J’éclate de rire. J’aperçois sa Hyundai dehors. Je lui fais un grand signe de la
main et elle s’arrête dans la zone de dépose minute en faisant crisser ses pneus.
— C’est parti, ma p’tite pute ! s’écrie-t-elle pendant que je hisse mon énorme
valise et mon bagage à main sur le siège arrière de sa voiture.
Lorsque je me jette sur le siège passager, ses boucles blondes rebondissent sur
ses épaules et un chewing-gum vert apparaît entre ses dents blanches quand elle
sourit.
— Salut ma chérie, merci d’être venue me chercher, je dis d’un ton mielleux.
D’un coup de poignet, elle sort en trombe de sa place de parking et elle s’insère
dans le trafic de l’aéroport. Ginelle n’a jamais eu une conduite souple, d’ailleurs
je pense qu’elle pourrait gagner des rallyes. Ses manœuvres semblent toujours
pressées et saccadées et elle a le chic pour prendre des décisions de dernière
seconde. Elle compte énormément sur la chance qui, jusqu’à présent, ne lui a pas
fait défaut. En tout cas, c’est ce que je me répète en m’accrochant à la poignée
au-dessus de la portière.
Lorsque nous arrivons sur l’autoroute, je reprends lentement ma respiration et je
me détends en profitant du silence. Ginelle et moi n’avons pas toujours besoin de
parler, et c’est pour cela qu’on s’entend aussi bien. Il est important, dans une
amitié, d’apprécier les silences. Je l’écoute claquer ses bulles de chewing-gum,
je sens son shampoing au citron et j’en ai presque les larmes aux yeux, parce que
je suis enfin à la maison. C’est ici que j’ai grandi. Je ne vivrai peut-être pas ici
toute ma vie, mais j’aime ce lieu de tout mon cœur.
Ginelle semble deviner que je suis en pleine réflexion nostalgique et elle ne
cherche pas à combler le silence. Cependant, elle me regarde tendrement à
plusieurs reprises et elle prend ma main, tout simplement. Une solidarité de
sœurs. Nous ne sommes pas liées par le sang, mais c’est tout comme. Ce n’est
que lorsque je lui chuchote que je l’aime que je réalise à quel point je suis
d’humeur émotive. Elle me regarde, le visage plein d’amour, et j’attends qu’elle
me dise qu’elle m’aime aussi.
— Je sais, dit-elle simplement.
J’éclate de rire et je la remercie une fois de plus de savoir que c’est de rire que
j’ai besoin. La journée a été longue : j’ai pris trois avions, j’ai dit adieu à mon

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dernier client que je considère désormais comme un frère, et je ne suis ici que
trois petits jours avant de reprendre l’avion pour rencontrer mon prochain client.
Je suis restée à Boston deux jours de plus. D’habitude, je reste environ vingt-
quatre jours chez un client afin d’avoir six jours pour m’occuper de mes affaires
personnelles et deux pour me rendre d’un endroit à un autre. Je ne suis pas
rentrée en Californie depuis janvier, et voilà que dans trois jours nous serons en
mai. Un autre mois, un autre chèque de cent mille dollars pour Blaine.
Je tends justement l’enveloppe à Ginelle.
— Tu peux déposer ça à l’accueil de l’hôtel ? Ça m’évitera de payer un timbre.
— Bien sûr ma poule, dit-elle en prenant l’enveloppe.
Elle la range dans son sac en se garant devant ma maison d’enfance.
— Tu dois avoir faim. Mads prépare un dîner de retrouvailles. Du pain de
viande, de la purée, du maïs, et la fameuse tarte aux cerises et au chocolat de ton
père.
Elle fait le tour de la voiture pour sortir un pack de bière du coffre.
— Je t’aime vraiment, tu sais, je répète.
Je regarde la bière dans ses mains, puis ma minuscule maison délabrée dont le
porche minuscule est éclairé par une simple ampoule. Derrière les rideaux en
dentelle, je vois mon adorable petite sœur mettre la table, pour moi, parce que je
rentre à la maison. Tout est parfait.
Gin me prend par les épaules et me tire vers la maison.
— Sans déconner, meuf, je sais que tu m’aimes. Tu ne m’as pas entendue la
première fois ? dit-elle en levant les yeux au ciel.
Je secoue la tête et la serre contre moi. Lorsque j’ouvre la porte, je suis assaillie
par une délicieuse odeur de viande cuite, de légumes et d’ail.
— Mads ! Je suis là ! j’annonce en posant mon sac à main sur la petite table de
l’entrée.
J’attends son cri aigu, car Maddy hurle toujours comme une fillette quand elle
est excitée, et elle ne me fait pas faux bond. Le cri vient d’abord, puis ma petite
sœur déboule pour se jeter dans mes bras.
— Ma petite puce ! Tu m’as manqué !

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Je la serre fort contre moi. Ça fait presque deux mois que je ne l’ai pas vue et j’ai
déjà l’impression qu’elle a plus de courbes qu’avant, elle perd sa maigreur
d’adolescente pour devenir davantage comme maman. Ce qui est certain, c’est
qu’elle a plus de poitrine et que ses hanches semblent plus formées. Je respire
son parfum d’amande et de cerise une dernière fois et je recule pour la regarder
dans les yeux alors qu’elle sourit jusqu’aux oreilles.
— La plus belle fille au monde, mais seulement quand elle sourit.
C’est la phrase que je lui ai répétée durant toute son enfance.
Elle rougit en me regardant tendrement et elle me reprend dans ses bras, me
serrant beaucoup plus fort, cette fois-ci, comme si elle ne voulait plus me lâcher.
— Qu’est-ce qui ne va pas ? je demande en prenant son visage dans mes mains
et en la regardant dans les yeux.
Maddy secoue la tête, faisant tomber une mèche sur son front.
— Rien, je suis super-contente que tu sois là. J’ai préparé ton repas préféré.
— Oui, je le sens ! je réponds en souriant.
C’est le moment que choisit mon estomac pour gargouiller, informant ma sœur
et ma meilleure amie que je meurs de faim.
— Le dîner est prêt, dit Maddy en prenant ma main pour m’emmener dans la
cuisine.
Ouais. C’est parfait. J’avais vraiment besoin de rentrer à la maison.
*
* *
— On va à Hawaii ?! s’écrie Ginelle d’une voix si aiguë que je suis surprise que
les verres n’éclatent pas.
— Bon sang, calme-toi, tu veux ? je réponds en me couvrant les oreilles.
— Tu te fous de moi ? Je vais à Hawaii ? Je ne suis sortie du Nevada qu’une fois
pour venir te voir en Californie, et maintenant je vais traverser un océan plein de
baleines, de poissons et de je ne sais quoi ? Putain, je vais à Hawaii ! crie
Ginelle.
Elle prend un nouveau chewing-gum avant de boire une énorme gorgée de bière.
Beurk. Ce doit être dégoûtant, mais je ne dis rien parce que je suis trop heureuse
qu’elle ne se soit pas remise à fumer.

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— Respire, Gin, je dis en buvant moi aussi une gorgée. Oui, je vous emmène
toutes les deux à Hawaii. Il ne vous reste plus qu’à trouver le meilleur moment
pour venir. Prévoyez une semaine ou deux, vous pourrez rester dans mon
bungalow. Mais, je dis en levant la main pour qu’elles ne m’interrompent pas, je
ne sais pas dans quelles conditions ce sera. Il faudra peut-être qu’on dorme
toutes les trois dans le même lit.
— On s’en fout, putain ! Je veux bien dormir par terre si c’est à Hawaii !
— Eh Gin, tu peux te calmer sur les putains quand Maddy est là ?
— Roh, ça va, je ne suis plus une petite fille, Mia. D’ailleurs, depuis le week-end
dernier… je suis officiellement une femme, dit Maddy d’un ton hautain.
Waouh, ce n’est absolument pas ce que j’ai envie d’entendre de la bouche de ma
petite sœur. Je ferme les yeux et je renverse sans faire exprès ma bouteille de
bière. Heureusement, Ginelle la rattrape avant qu’elle ne se déverse partout.
— Mads… je chuchote.
Elle sourit timidement et promène son doigt sur la table.
— On peut parler de ça plus tard ? demande-t-elle en regardant brièvement
Ginelle.
Ginelle a beau être pour moi une seconde sœur, Maddy et elle ne sont pas aussi
proches. Elles s’aiment, mais elles ne se confient pas tous leurs secrets comme
Maddy et moi le faisons.
Ginelle regarde ouvertement sa montre.
— Eh bien voyez-vous ça, il est l’heure de partir ! s’exclame-t-elle. Il semblerait
que j’aie des maillots de bain à acheter demain. Ah, et on a rendez-vous à
l’institut de beauté à treize heures, toutes les trois, c’est ok ?
— Gin… merci. Pour tout. Tu sais que…
Comme d’habitude, Ginelle ne se vexe pas que Maddy veuille me parler seule à
seule. Elle passe un bras autour de moi et me serre brièvement contre elle, puis
elle embrasse Maddy sur la tête avant d’ébouriffer ses cheveux.
— À demain, mes salopes !
Maddy et moi répondons à l’unisson :
— Ciao !

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Un silence de plomb s’abat sur la pièce, mais il n’est ni pesant ni gênant. C’est
simplement le genre de silence qui précède une conversation importante.
— Je n’avais pas prévu que ça arriverait… commence Maddy, les larmes aux
yeux. Je voulais t’en parler d’abord, mais on est tellement bien ensemble et il
m’aime tellement… Je l’aime, et…
Je pose ma main sur la sienne et je la regarde dans les yeux.
— Et… c’était comment ?
Elle se lèche les lèvres et baisse la tête.
— Ça a fait mal, au début. J’ai un peu saigné, mais il a vraiment pris son temps,
à tel point qu’il tremblait, d’ailleurs. Mais la douleur est partie peu à peu.
Je souris et je suis tout émue moi aussi de réaliser que ma petite sœur est
devenue une femme.
— Ça t’a plu ?
Elle secoue vivement la tête.
— On l’a fait deux fois depuis, dit-elle en riant, et c’était… un million de fois
mieux !
Je ris et hoche la tête, consciente de ce qu’elle veut dire.
— Et votre relation ? Comment ça se passe ? C’est toujours aussi bien ?
Son regard s’illumine comme un gâteau d’anniversaire entièrement recouvert de
bougies.
— Il est tellement cool, Mia. Il me dit tous les jours que je suis la plus belle fille
au monde, et qu’il m’aime, et qu’un jour on se mariera.
Elle joint ses mains sur sa poitrine.
— Il est tout, Mia. Tout ce dont j’ai rêvé chez un homme. Tout ce que tu m’as
dit de trouver avant de franchir ce cap. Je ne pourrais pas être plus heureuse.
Je rapproche ma chaise de la sienne et je la prends dans mes bras.
— Je suis ravie que ça se soit bien passé et que l’homme avec qui tu es t’aime
pour qui tu es. C’est le cas, n’est-ce pas ? Il t’aime pour toute ta beauté intérieure
et pas seulement la beauté de ton visage ?
Maddy hoche la tête contre la mienne alors que je lui caresse les cheveux.
— Je crois, oui. Il me le dit tout le temps. D’ailleurs, il voudrait te parler. Je lui
ai dit que ce n’était pas possible ce soir, mais que peut-être demain tu voudrais

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bien dîner avec ses parents ? Ils veulent rencontrer ma famille et… tu es la seule
que j’ai.
Soudain, je me sens coupable de ne pas avoir été là. Cependant, je suis aussi en
colère contre notre mère de nous avoir abandonnées, et triste que notre père n’ait
pas été assez fort pour être là durant les grandes étapes de notre vie. Au moins
pour Maddy, c’est elle qui le mérite.
J’attrape le visage de ma petite sœur et je l’embrasse sur la bouche.
— Je serai ravie de rencontrer les parents de ton copain et de discuter avec lui.
Une fois de plus, son visage rayonne. Elle se lève pour aller à la cafetière et je la
regarde y mettre deux cuillerées de décaféiné en se tortillant en rythme avec une
chanson dans la tête.
— Ça mérite une fête chocolatée ! s’exclame-t-elle.
— Tu as raison, ma puce. Tu sais, je rêve de cette tarte depuis la dernière fois
que tu l’as faite pour mon anniversaire.
Nous passons la soirée à parler de sœur à sœur, à se raconter nos vies. Je lui
parle de chacun de mes clients en lui avouant je me suis attachée à chacun
d’entre eux. En tant que digne fan des Red Sox, elle demande surtout que je lui
parle de Mason et je sais qu’elle va adorer le t-shirt, la casquette et la photo que
j’ai fait dédicacer par lui et tous les autres joueurs.
Lorsque nous en arrivons à parler de Wes, je lui raconte tout dans le moindre
détail, comme si j’avais besoin d’en parler.
— Quel connard ! s’indigne-t-elle lorsque je lui dis que la star de son film avait
décroché son téléphone et qu’il avait admis qu’il se la tapait.
— Tu es mignonne de le penser, et crois-moi, j’ai eu la même réaction au début.
Mais en fait, réfléchis une seconde : est-ce que Wes devrait attendre sagement en
Californie que je règle mes problèmes et que je m’éclate avec tous les mecs que
je veux ?
— Non, ce ne serait pas très juste, dit-elle.
— Exactement. Je ne dis pas que je n’en ai pas souffert pendant une bonne
semaine, mais en fin de compte, je le comprends. En plus, quelques jours plus
tard, j’ai retrouvé Alec et… tu sais… une chose en entraînant une autre…
Maddy fronce les sourcils.

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— Comment ça, une chose en entraînant une autre ? Comment il savait que tu
serais en ville ?
Je regarde au loin en sirotant mon café.
— Euh… je ne sais plus, les détails sont flous…
— N’importe quoi ! Tu l’as appelé pour batifoler, c’est ça ? s’exclame-t-elle sur
un ton à la fois accusateur et amusé.
— Batifoler ? Qu’est-ce donc ? Je crois que le terme officiel est un plan cul,
Maddy, et crois-moi, ce mec a un des plus beaux culs que j’aie vus de toute ma
vie.
Je recule dans ma chaise en souriant, plutôt fière, et je continue de dévorer la
délicieuse tarte de ma sœur.
Maddy rouspète, outrée, et je ris. Elle est si jeune, si naïve. J’espère que son
copain est un mec bien et qu’il ne profitera pas d’elle. Je suppose que je le
découvrirai demain soir quand je rencontrerai ses parents. Un frisson d’angoisse
parcourt mon dos et je me demande si c’est ce que ressentent tous les parents
lorsqu’ils rencontrent la belle-famille de leur enfant pour la première fois. Après
tout, ce n’est pas comme s’ils allaient se marier ; c’est un simple repas. C’est ce
que font les familles normales, non ?
Je n’en ai pas la moindre idée.
Plus tard, lorsque je me couche enfin, je sors mon téléphone pour contacter
Angie, la sœur de Tony. Nous sommes devenues très proches à Chicago, et s’il y
a une personne qui saura tout de la rencontre des beaux-parents, c’est elle.
À : Angelina Fasano
De : Mia Saunders
Salut Angie, c’est Mia. Désolée pour l’heure. J’ai une question. Quand les
parents d’un garçon invitent les parents de sa copine à dîner, est-ce que c’est
une grosse affaire ?
Mon téléphone sonne presque immédiatement et je regarde l’heure. Il est trois
heures du matin ici, donc cinq heures chez elle.
À : Mia Saunders
De : Angelina Fasano

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Salut ma belle. Question bizarre, mais ouais, c’est assez formel. Ils veulent
s’assurer que la fille est assez bien pour leur fils en rencontrant sa famille.
Pourquoi ?
Merde. J’appellerai Hector demain pour savoir quoi mettre. Il saura, lui.
Premièrement, je dois avoir l’air d’une grande sœur normale et responsable. Je
ne peux pas parler de mon travail, bien évidemment. Je ne dois pas non plus
parler du fait que mon très cher père alcoolique est dans un centre de
convalescence payé par l’État parce que mon ex-copain, un usurier, l’a tabassé à
mort. Bon sang, ça a l’air sacrément tordu, même pour moi.
Je pousse un grognement et je réponds à Angie.
À : Angelina Fasano
De : Mia Saunders
C’est le premier vrai copain de ma sœur. Beurk.
À : Mia Saunders
De : Angelina Fasano
Ha ! J’aimerais pas être à ta place ! Lol.

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Chapitre 2

Ma dernière envie, après avoir passé la journée à me faire bichonner comme


une reine avec Gin et Maddy, c’est de passer la soirée avec des étrangers.
Cependant, j’ai surtout peur que ces étrangers me jugent inférieure à eux, ce qui
explique pourquoi je grogne non-stop en me préparant pour le grand dîner de ce
soir. Quant à ma petite sœur, elle volette joyeusement dans la maison, s’arrêtant
ici et là pour se regarder dans un miroir, lissant sa robe d’été, rangeant des
mèches invisibles dans sa queue-de-cheval.
Elle a l’air jeune, insouciante et magnifique. Il fait suffisamment bon à Las
Vegas à la fin du mois d’avril pour mettre cette robe légère qui, sur elle, est
carrément élégante. Je m’arrête pour l’observer et je me dis qu’elle est
l’incarnation parfaite de la girl next door1 avec ses longs cheveux blonds et ses
grands yeux verts, le seul trait que nous avons en commun. Je sais qu’elle fera
une épouse parfaite et qu’elle rendra un homme très heureux. D’ailleurs, pour
autant que je me souvienne, elle a toujours voulu se marier, avoir une ribambelle
d’enfants et vivre dans une banlieue calme. Tout l’inverse de mes rêves.
— Alors, quelle est la spécialisation de Matt ? je demande en bouclant la
dernière mèche de mes longs cheveux noirs.
— La science des plantes, tu te souviens ?
Elle s’assied sur le lit et joint ses mains devant elle, je croise son regard dans le
reflet du miroir.
— Et toi, tu as décidé ? Je sais qu’il y a quelques mois tu t’intéressais aux
sciences, toi aussi.
Dans ma tête, je la supplie surtout de ne pas devenir médecin légiste. S’il te plaît,
Maddy. J’entends déjà les questions. Que fait ta sœur, dans la vie ? Oh, elle

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découpe les morts. Une grimace surgit sur mon visage, mais je me dépêche de la
cacher. J’ai beau vouloir prendre toutes les décisions importantes à sa place, je
sais que je dois la laisser vivre. Ma petite sœur est adulte, et il est temps que je la
traite comme telle.
Elle inspire lentement et glisse son pied sous ses fesses.
— Eh ben oui. J’aimerais me spécialiser en biochimie.
Je me tourne vers elle en réfléchissant. La biochimie… ça doit être lié à la
biologie… mais ça ne veut pas dire que c’est du médico-légal, si ? Pourvu que
non…
— D’accord, et qu’est-ce que tu ferais exactement avec ce genre de diplôme ?
Maddy se lèche les lèvres et se lance. Plus elle parle, plus son visage s’anime.
Elle sourit jusqu’aux oreilles, et ses joues rougissent alors que son regard
s’illumine. J’ai honte de dire que je n’écoute pas tout ce qu’elle dit, parce qu’elle
se met à parler geek et que mon filtre est allumé.
— … donc, en gros, les biochimistes étudient les différents aspects du système
immunitaire, l’expression des gènes, et ils peuvent isoler, analyser ou synthétiser
différents produits. Je pourrais travailler sur les mutations du cancer, gérer un
labo ou diriger une équipe de recherche. Les options sont infinies !
Je souris si grand en entendant toutes les possibilités qui se présentent à elle que
j’en ai mal aux joues.
— Je suis super-fière de toi, Mads. La biochimie a l’air difficile, mais ça semble
fait pour toi. Combien d’années d’études vas-tu faire ? Tu vises toujours le
master, n’est-ce pas ?
Elle se mord la lèvre et baisse les yeux.
— Maddy, je sais que tu t’inquiètes pour tes frais de scolarité, mais tu ne devrais
pas. J’ai déjà payé ton inscription cette année, en plus de ce qu’il restait de l’an
dernier.
Elle écarquille les yeux et me regarde, bouche bée.
— D’ici la fin de l’année, j’aurai sauvé les fesses de Papa et j’aurai assez
d’argent pour payer la suite de tes études. Je ne veux pas que tu fasses de
concessions, Maddy. Compris ?

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Pas comme moi, je me retiens d’ajouter. Cependant, je dois accepter que ma vie
est incertaine. Pour l’instant, je gagne l’argent nécessaire à la survie de ma
famille.
Maddy se lève brusquement pour me serrer dans ses bras et elle me regarde avec
des larmes aux yeux.
— Je t’aime. Quand je serai riche, je t’achèterai une maison juste à côté de la
mienne pour que tu saches toujours que ta maison est près de moi.
Je caresse le côté de sa tête et elle embrasse ma tempe.
— Maintenant, ne t’inquiète pas. Je vais également postuler à des bourses, parce
que pour aller où je veux dans ce domaine, il va me falloir un doctorat.
Un doctorat. Les poils de mes bras se hérissent et je deviens hystérique.
— Un docteur ! je m’exclame sur un ton plein de fierté et d’émerveillement.
Maddy lève les yeux au ciel.
— Je ne serai pas docteur, Mia. J’aurai simplement un doctorat. En science,
ricane-t-elle.
— Je m’en fous ! Ma petite sœur va être docteur et scientifique ! C’est le plus
beau jour de ma vie !
Je secoue la tête en pensant à l’avenir, et j’imagine Maddy sur scène, obtenant
ses diplômes en étant major de sa promo, ou prenant un poste dans une
entreprise où elle portera une blouse blanche. Ma petite sœur a une belle carrière
devant elle, et je vais tout faire pour que tous ses rêves soient réalisés. Mon
regard se perd au loin, et je sursaute quand Maddy chatouille mon bras.
— Je me suis dit que ce projet te plairait. On peut y aller, maintenant ? J’ai hâte
de voir Matt.
Matt. Le copain. Celui avec qui elle vient de perdre sa virginité. Il a intérêt à la
mériter, sinon il aura affaire à moi. Rien n’empêchera Maddy de réussir. Rien.
*
* *
Les parents de Matt sont ce genre de parents qu’on voit à la télé, que tout le
monde veut mais que personne n’a. Matt Rains a les parents parfaits. Sa mère,
Tiffany, est grande avec des cheveux bruns et des yeux marron. Son père mesure
une tête de plus qu’elle et il est brun également, mais avec des yeux bleus très

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clairs. Matt, le jeune homme que ma petite sœur regarde avec des étoiles dans les
yeux, est canon. Il est vêtu d’une chemise cintrée qui montre ses épaules
musclées, révélant qu’il prend soin de lui et qu’il fait de la muscu. Ses cheveux
bruns sont ondulés et coiffés de sorte à ne pas cacher son visage, et il porte des
lunettes à bords rectangulaires et noirs qui lui donnent un air geek et chic. Il a les
mêmes yeux bleus que son père, et les siens n’ont pas quitté ma sœur depuis le
début du repas.
— Mia, j’ai cru comprendre que votre père était à l’hôpital ? demande Trent
Rains lorsque nous passons au dessert.
— Oui, il a eu un accident. Cela fait plusieurs mois qu’il est dans le coma, mais
nous prions chaque jour pour qu’il se réveille.
Les traits de Tiffany s’adoucissent et elle pose une main sur mon épaule.
— Je suis désolée de l’entendre. Ce doit être dur pour deux jeunes femmes de se
retrouver seules.
Elle secoue la tête, attristée, et je dois me retenir de lui rétorquer que je suis
seule depuis que j’ai dix ans et que je m’en sors très bien, merci. Cependant,
j’arrive à ravaler ma remarque acerbe, car ils essaient seulement d’être gentils.
Au lieu de me comporter comme une garce, je souris et je sirote mon décaféiné.
Bon sang, même leur café est meilleur que celui que nous avons à la maison. Ils
achètent sans doute une marque chic qu’il faut moudre tous les jours.
— Bon, tout le monde, j’ai une annonce à faire, dit Matt en se levant et en tenant
la main de ma sœur qui le regarde amoureusement.
Merde, ce genre de déclaration n’est jamais bonne. Horrifiée, je vois Matt se
rapprocher de ma sœur, en la serrant fort contre lui, un peu trop à mon avis. Il
baisse la tête et la regarde avec une dévotion totale.
— J’ai demandé à Madison de m’épouser, et elle a accepté ! dit-il en souriant
jusqu’aux oreilles.
Sa mère pousse des cris de joie et son père frappe dans ses mains. Quant à moi…
je n’arrive plus à respirer.
Putain de bordel de merde.
Je n’ai jamais vu Maddy aussi souriante et radieuse. Toutefois, lorsqu’elle tourne
la tête vers moi, son sourire s’efface aussitôt. Sa lèvre tremble et des larmes

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remplissent ses yeux.
— S’il te plaît, Mia… je l’entends chuchoter.
Je secoue la tête, je me lève et je sors me réfugier sur le porche, face au désert,
pour respirer l’air frais de la soirée. Si j’étais restée assise à table, j’aurais pété
un câble. J’aurais arraché ma sœur des griffes de cette banlieue proprette et je ne
me serais arrêtée que quand elle aurait laissé tomber pour de bon cette idée
absurde qu’elle va se marier… à dix-neuf ans. Putain !
Je fais les cent pas sous le porche, bouillante de colère, et des perles de sueur
couvrent mon front et le dessus de ma lèvre. Je réfléchis à un moyen de
kidnapper Maddy sans passer pour la vilaine sœur quand j’entends la porte
d’entrée se refermer. Je me tourne et je me retrouve nez à nez avec Matt. Il
semble avoir des remords, mais pas assez pour me laisser croire qu’il va retirer
son annonce.
— Je suis désolé de ne pas t’avoir demandé avant, mais après le week-end
dernier…
— Tu veux dire quand tu as dépucelé ma petite sœur ? je hurle d’une voix qui ne
ressemble pas à la mienne.
On dirait une Banshee2.
Il recule comme si je venais de le gifler.
— Non pas que ça te regarde, mais Madison est une adulte. Une adulte que
j’aime énormément. Ce qu’elle m’a donné est un cadeau, et je le chérirai toute
ma vie. Et tant que je suis en vie, c’est un cadeau que je veux qu’aucun autre
homme ne touche.
Il parle avec une telle assurance qu’il se tient presque plus droit lorsqu’il a fini.
Toutefois, s’il pense m’avoir convaincue, il se trompe. Il ne sait pas à qui il a
affaire.
— Qu’est-ce qui te fait penser que tu dois l’épouser ? Tout de suite ! je demande
en m’adossant à la rambarde.
Il fait un pas vers moi.
— Pas tout de suite ; on va d’abord obtenir nos licences. C’est dans plus de deux
ans.
Ma peur s’apaise aussitôt et ma colère devient plus gérable.

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— C’est l’engagement que je voulais. Je veux qu’elle sache que je suis à elle et
qu’elle est à moi. Et je veux qu’elle ait quelque chose de concret, parce qu’on a
l’intention d’emménager ensemble… bientôt.
Ma frustration redouble d’intensité.
— Tu plaisantes ? je grogne.
— Pas du tout. Je n’aime pas où elle vit, surtout parce qu’elle y est toute seule.
Quand elle n’avait pas de voiture, je devenais dingue de savoir qu’elle traversait
ce quartier la nuit. Puis tu lui as acheté une voiture et c’était super, mais ton père
n’est pas là, Mia. Et toi, tu n’es pas là non plus.
Sa dernière phrase me fait l’effet d’une douche froide, et le visage de Matt
devient dur.
— Elle est toute seule. Sans protection. C’est inacceptable, ajoute-t-il en se
donnant un air beaucoup plus âgé.
Je relâche les épaules, vaincue. Il n’a pas tort. Il a même raison, en fait. Je
n’aime pas que Maddy soit seule, moi non plus. Je déteste ça. C’était une source
de stress permanent ces derniers mois. C’est pour cela que Ginelle passe devant
la maison tous les soirs en rentrant du boulot, pour s’assurer que tout va bien.
Je respire lentement par le nez pour calmer mon rythme cardiaque.
— Tu as raison, Matt. Le quartier est craignos.
Il hoche la tête, mais reste silencieux, et je lui suis reconnaissante de me laisser
dire ce que j’ai à dire, de me permettre de lui faire part de mes inquiétudes. Nous
sommes à Las Vegas, ils auraient pu s’enfuir et se marier dans n’importe
laquelle des millions de chapelles de la ville.
— C’est simplement que je ne veux pas qu’elle fasse d’erreur. Vous êtes
tellement jeunes.
— Mais on va prendre notre temps, Mia. On va d’abord habiter ensemble, pour
voir comment ça se passe. On va se soutenir durant nos études et on obtiendra
nos licences ensemble. Il nous reste encore deux années après celle-ci.
Je bondis sur l’occasion, parce que ce qu’il dit n’est plus vrai puisque Maddy
veut faire un doctorat. La première de la famille !
— Et Maddy veut aller en master, puis en doctorat. Tu vas la soutenir quand
vous serez mariés ?

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Matt hoche vigoureusement la tête.
— Absolument, c’était mon idée ! Elle est première de sa classe. Elle a de bien
meilleures notes que moi alors que je travaille comme un malade. Ses capacités
naturelles et son intelligence sont du jamais-vu dans cette université. Elle va
devenir une chercheuse célèbre, et c’est moi le chanceux qui serai à ses côtés
lorsqu’elle récoltera ses prix et qu’elle fera tous ces superbes discours. C’est moi
qui serai à ses côtés pour l’encourager, et elle en fera de même pour moi, bien
sûr.
Matt pose sa main sur mon bras et me regarde dans les yeux.
— On ne prend pas les choses à la légère et on n’est pas bêtes. Mais on est
amoureux, et je ne veux pas risquer de la perdre.
Son regard est si déterminé que je ne peux plus rester en colère. Toutefois, je me
sens vidée à présent.
— Est-ce que je peux sortir, maintenant ? demande la petite voix de Maddy à
travers la porte.
— Oui, ma puce, viens. Montre-moi la bague, je dis en m’efforçant de paraître
enjouée. J’espère qu’il y a une bague, au moins ! j’ajoute en fronçant les
sourcils.
Lorsque Maddy sort de la maison en sautillant et en me tendant sa main gauche,
je ne peux me retenir de sourire. La bague n’est pas énorme, mais elle n’est pas
petite non plus.
— Elle était à ma grand-mère. Maman me l’a donnée le jour où j’ai amené
Maddy à la maison, dit Matt en riant.
— Elle est superbe.
Je lève la tête pour regarder ma petite sœur, qui a soudain l’air nerveuse et pleine
de doutes. Bon sang, j’espère que Matt pourra lui apprendre à avoir confiance en
elle. Cela dit, s’il peut affronter la sœur tarée que je suis, il doit bien pouvoir
insuffler un peu d’assurance à ma petite puce.
— Je suis tellement heureuse, Mia, dit Maddy, et des larmes coulent sur son
beau visage. Je t’en supplie, sois heureuse pour moi. Je ne supporte pas de te
décevoir.

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Depuis qu’elle est petite et que notre mère est partie, je suis sa seule influence
féminine. Au fil du temps, elle a de moins en moins supporté de penser qu’elle
m’avait déçue ou blessée d’une manière ou d’une autre. Cette fille préférerait
marcher sur des charbons ardents plutôt que de voir que je n’approuve pas une
de ses décisions.
— Oh, ma belle, tu es bête ! Viens ici, je dis en la prenant dans mes bras.
Elle pleure doucement contre moi, libérant sa peur et son stress alors que je
chantonne sa chanson. Après le départ de maman, papa a écouté « Three Little
Birds », de Bob Marley, en boucle, et je l’ai apprise par cœur. Il écoutait surtout
« No Woman No Cry » quand il était ivre, mais c’est la première que j’ai retenue
parce qu’elle me laissait penser que les choses iraient bien… un jour ou l’autre.
Maddy relève la tête, et j’essuie ses larmes avec mes pouces.
— Je suis désolée d’avoir réagi comme ça. Tes parents doivent penser que je
suis folle, je dis en regardant Matt.
— Non, ne t’en fais pas. Je crois qu’ils comprennent notre impulsivité et aussi ta
réaction. Ils se sont mariés trois mois après s’être rencontrés, alors pour eux, je
suis simplement aussi spontané qu’ils l’ont été. Mais je t’assure que je ne le suis
pas, Mia. Nous allons finir l’école d’abord, promis. Je veux juste qu’elle porte
ma bague et qu’elle soit en sécurité chez moi, en face de la fac.
— Tu habites en face de la fac ?
Mon côté maternel ressort quand il s’agit de ma petite sœur, et ce que vient de
dire Matt me réjouit.
Il sourit et hoche la tête en prenant Maddy dans ses bras.
— Ça va, mon soleil ? il chuchote assez fort pour que je l’entende.
J’observe l’attention avec laquelle il touche ma sœur et l’inquiétude qu’il a pour
elle, et je me dis qu’il a l’air d’être un bon gars.
— Du moment que Mia va bien, alors moi aussi, dit-elle en me regardant.
— Très bien, je réponds en grognant. Je vous donne ma bénédiction.
Fidèle à elle-même, Maddy pousse un cri de joie stri-dent et sautille sur place
comme une adolescente.
Je leur fais une ou deux leçons de morale supplémentaires, puis nous retournons
dans le salon où Tiffany et Trent nous attendent patiemment.

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— Mon fils prendra bien soin de votre sœur, je vous le promets, dit monsieur
Rains fièrement. Il a la tête sur les épaules, mais on n’arrête pas un homme
amoureux. Quand les Rains tombent amoureux, la chute est rapide et elle dure
toute la vie, dit-il en prenant sa femme par la taille. C’est un fait ! ajoute-t-il
joyeusement.
Je m’assieds et regarde les deux couples heureux devant moi.
— Maddy et moi n’avons pas eu une enfance facile, vous savez. Nous n’avons
pu compter que l’une sur l’autre. Donc… quand j’ai entendu que ma petite sœur
allait épouser votre fils, à dix-neuf ans… quelque chose en moi a craqué. Je n’ai
pas très bien géré la situation et j’en suis navrée.
Tiffany se lève pour s’asseoir à mes côtés.
— Ne vous inquiétez pas. Nous avons été choqués, nous aussi, lorsque Matt
nous a parlé de ses intentions en début de semaine. Enfin, nous savions qu’il
l’aimait, bien sûr. Après tout, cela fait deux mois qu’ils ne se sont pas quittés.
Deux mois. Ils sont ensemble depuis deux mois, et ils sont fiancés. Je n’arrive
pas à le croire.
— Ça semble tellement rapide…
— Ce genre de chose arrive, dans la famille Rains, dit Tiffany en souriant
jusqu’aux oreilles.
Elle pose sur son mari un regard plein d’amour, de dévotion et de loyauté, et je
souhaite que ma sœur connaisse cela, elle aussi. Peut-être que ce sera le cas en
faisant partie de cette famille. J’espère seulement que ce sera une fois qu’elle
aura sa licence.
Tiffany passe sa main dans mon dos et le frotte de haut en bas, un geste tendre et
maternel que je n’ai pas connu depuis des années.
— Tout ira bien. Ils vont attendre d’avoir leur diplôme, et ce n’est qu’après que
nous prévoirons le mariage. Nous avons le temps.
Le temps.
J’ai l’impression que c’est justement ce qui me manque, ces jours-ci.
*
* *

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Je ne vois pas le reste de mon séjour à Vegas passer. Bien évidemment, Gin
trouve l’annonce des fiançailles de Maddy hilarante. Cette garce sait quoi faire
pour m’agacer et elle ne cesse de le faire jusqu’à la fin de mon séjour, disant que
Matt et Maddy s’enfuiront pour être mariés par un sosie d’Elvis Presley, ou bien
que Maddy sera enceinte d’ici quelques mois. C’est cette dernière blague qui me
pousse à avoir une petite conversation avec ma sœur afin qu’elle comprenne
l’importance de ne jamais oublier sa pilule. Elle me promet qu’elle ne ratera
jamais un jour et qu’elle la prend tous les soirs avant de se coucher. Après cette
conversation gênante – pour elle, pas pour moi –, je l’oblige à me promettre «
juré-craché » qu’elle ne se mariera pas sans moi, car c’est mon seul moyen de
m’assurer que les choses se dérouleront comme prévu. Durant nos dix-neuf ans
ensemble, jamais l’une d’entre nous n’a rompu une promesse après que nous
avons craché.
Une fois installée dans l’avion, je repense à la manière dont j’ai réagi à
l’annonce de leurs fiançailles. Est-ce que c’est parce que ma petite sœur va avoir
son conte de fées avant moi ? C’est ce que Gin a dit, pour plaisanter. Cependant,
je ne crois pas que ce soit la raison, puisque je n’ai jamais voulu les mêmes
choses qu’elle.
En vérité, si je creuse suffisamment, la réponse est simple : c’est parce que je ne
peux pas la perdre.
Je suis responsable de Maddy depuis toujours. Le fait qu’elle vive avec un
homme et qu’elle compte sur son soutien n’est que la première étape. Sa famille
m’a dit qu’ils payaient le loyer de leur fils et que Maddy n’aurait besoin que
d’argent de poche. Apparemment, ils sont ravis d’augmenter le budget « courses
» de leur fils parce qu’ils considèrent déjà que Maddy est des leurs. C’est aussi
simple que ça. Ma sœur fait désormais partie de leur famille et ils la soutiennent
financièrement.
La nourrir, l’habiller pour qu’elle n’ait pas froid… ce sont mes responsabilités,
et cela fait dix-neuf ans qu’elles le sont. Je ne sais pas comment gérer la
situation.
Je vais continuer à payer le loyer de papa et je vais envoyer de l’argent à Maddy
pour ses sorties, ses fournitures et tout ce dont elle peut avoir besoin. Elle le

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mérite, ma sœur travaille dur pour ses cours et je ne veux pas qu’elle soit tentée
de chercher un travail en plus. Je veux qu’elle ait toutes ses chances d’accomplir
ses rêves. À présent, je dois simplement accepter que c’est Matt Rains qui lui
tiendra la main.
Heureusement, nos vacances à Hawaii sont toujours à l’ordre du jour. Matt a eu
l’air anéanti quand elle lui a dit, et secrètement, j’ai été ravie. Je suis vraiment
une garce, mais je n’ai aucun remords. D’après Maddy, il comprend notre besoin
de passer du temps « entre filles », surtout après leur annonce qui m’a choquée.
Il semblerait qu’à la fin de leur conversation, ce petit con me félicitait d’avoir eu
cette idée et me donnait sa bénédiction. Comme si j’en avais besoin. Il est drôle,
celui-là, mais il apprendra vite qui est le patron. J’espère seulement qu’en fin de
compte, ce sera encore moi.

1. « La fille d’à côté  »  : archétype culturel et sexuel américain qui désigne une
femme à la féminité modeste et non prétentieuse.
2. Créature féminine surnaturelle de la mythologie celtique irlandaise qui se met
à crier quand quelqu’un est sur le point de mourir.

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Chapitre 3

Des traits d’encre noire s’enroulent autour de muscles robustes et bronzés. Les
tatouages tribaux commencent sur l’épaule gauche, descendent sur son biceps et
le long de sa cage thoracique, puis de sa taille, et disparaissent dans le paréo
noué sur ses hanches. Les lignes noires dévalent ensuite ses cuisses énormes et
ses mollets découpés pour s’arrêter brusquement sur ses chevilles.
Je ne sens pas le sable brûler la plante de mes pieds tant je suis fascinée par la
superbe créature que j’ai sous les yeux. La créature en question se tourne
légèrement et m’offre un aperçu de son dos trapu. Il a l’air assez fort pour me
jeter, moi et deux autres femmes de ma taille, dans l’océan qui s’étend au loin.
Soudain, le demi-dieu me reluque. Ou plutôt, il cherche mon regard malgré la
dizaine de mètres qui nous séparent. Ses yeux couleur café semblent pétiller en
découvrant lentement mon corps, brûlant chaque centimètre qu’ils caressent.
Mon sang s’embrase et j’évente mon visage. Le déclencheur de l’appareil photo
ne cesse de cliquer et une voix à l’accent italien crie quelques ordres. Monsieur
Tatouage tourne enfin la tête, brisant aussitôt l’emprise qu’il exerce sur moi.
J’ai beau être libérée, je ressens une sensation étrange qui ressemble à un
manque, comme si je venais de perdre quelque chose. Cet homme m’appelait,
ses yeux étaient comme un phare incitant mon désir à venir se jeter à ses pieds,
et la réaction de mon corps ne s’est pas fait attendre, puisque j’ai déjà une
sensation mouillée entre les jambes.
— Finito ! Perfetto, dit le photographe en fendant l’air avec son bras.
Je parviens non sans mal à détourner mon regard du demi-dieu tandis que le
photographe se tourne vers moi. Il porte un chapeau Fedora en paille, un
bermuda beige et une chemise en lin blanc qui n’est fermée que par un bouton,

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révélant un corps mince et musclé. Je reste figée près de la tente blanche, où le
chauffeur de la limousine m’a dit d’attendre quand il s’est garé, m’apprenant que
mon boss était derrière l’appareil photo. Je ne pensais pas que mon client serait
le photographe de la campagne publicitaire, mais ça ne change rien. Le travail,
c’est le travail, et du moment que j’ai mon chèque de cent mille dollars à la fin
du mois, je suis satisfaite.
Mon patron se rapproche et je découvre un sourire amical, des dents blanches,
quelques rides aux coins de ses yeux bleus et de sa bouche, des cheveux poivre
et sel qui dépassent de son chapeau.
— Bella donna, dit-il en me prenant par les épaules avant de me faire la bise. Je
suis Angel D’Amico, et tu es encore plus belle que je le pensais. C’est ma
femme qui a insisté pour que tu sois l’égérie de notre campagne.
À peine a-t-il mentionné sa femme qu’une grande brune d’origine latine sort de
la tente. Sa peau marron contraste avec le paréo Aubade à fleurs qui est drapé sur
elle, et ses longs cheveux volent autour de son visage comme si elle se déplaçait
avec son propre ventilateur. Angel frappe dans ses mains tandis qu’elle vient
vers nous.
— Ah, voilà ma femme. Elle est à couper le souffle, n’est-ce pas ?
Je hoche la tête, car elle réellement si belle qu’on en oublierait de respirer.
Un immense sourire s’étend sur ses lèvres.
— Mia, nous sommes ravis que tu fasses partie du projet, dit-elle en souriant
jusqu’aux oreilles.
Elle m’embrasse et, de plus près, je vois qu’elle porte elle aussi les traces du
temps, ce qui ne la rend pas moins belle. Tante Millie m’a dit que le couturier et
sa femme avaient environ cinquante ans, mais ils paraissent plus proches de la
quarantaine.
— Je m’appelle Rosa, je suis la femme d’Angel. On est très excités que tu sois
ici.
Je remonte mon sac sur l’épaule et dégage les cheveux de mon front.
— Je suis ravie d’être là, moi aussi. Le peu que j’ai vu de l’île en venant de
l’aéroport est magnifique.

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— Elle l’est. Tu vas pouvoir profiter des deux prochains jours pour la visiter. On
vient de terminer les photos de Taï et on doit les retravailler avant de passer aux
portraits de toi.
Angel regarde par-dessus son épaule Monsieur Tatouage vider une bouteille
d’eau, puis prendre une chemise des mains d’un homme qui semble être un
assistant.
— Taï, vient rencontrer ta partenaire, lui lance le photographe.
Partenaire ? Millie ne m’a pas dit que j’aurais un partenaire. Je suis sur le point
de lui demander ce qu’il veut dire par là, mais Taï vient vers nous et, soudain,
tous les bruits autour de nous semblent disparaître. Plus rien n’existe sur cette
terre en dehors de cet homme envoûtant. Les muscles de ses cuisses géantes se
bandent et ses abdos se contractent à chacun de ses pas. Lorsqu’il nous rejoint, je
dois me retenir de faire un pas en arrière tant sa posture et sa taille sont
impressionnantes. La plage semble trop petite pour un tel magnétisme animal.
— Taï Niko, je te présente Mia Saunders, dit Angel en tendant le bras vers moi.
Elle va résider dans le bungalow à côté du tien et elle fera toutes les photos de
couple avec toi. Vous allez incarner le couple des tropiques pour notre campagne
« La beauté ne se mesure pas ».
Taï croise mon regard et lèche sa lèvre charnue avant de la mordre. Je fais de
mon mieux pour ne pas m’évanouir, mais la chaleur que dégage cet homme est
comme un mur de feu. Il inspire lentement, et ses narines se dilatent alors qu’il
me reluque des pieds à la tête. Je ne dis rien. Je suis incapable de bouger ou de
respirer sous son regard de braise.
— Tu es rayonnante, Mia. Je vais aimer te travailler.
Son regard sous-entend qu’il a l’intention de faire bien plus que travailler avec…
Zut, qu’est-ce qu’il vient de dire ?
— Tu veux dire travailler avec moi ? je clarifie en haussant les sourcils.
Il baisse la tête en souriant et regarde mes pieds, et ce n’est qu’à ce moment-là
que je remarque qu’il n’a presque pas de cheveux, juste un petit duvet sur la tête,
un peu comme Dwayne Johnson. D’ailleurs, plus je le regarde, plus je réalise
qu’il ressemble à l’acteur. Il est énorme, avec une peau chocolat au lait et des

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tatouages. La seule différence, c’est que les origines samoanes de Taï sont plus
marquées que chez l’acteur.
— Non, ce n’est pas ce que je voulais dire, répond Taï avec un sourire en coin.
Zut, j’ai comme l’impression que ce mois à Hawaï va être une sacrée aventure.
Avec un peu de chance, je vais passer la plupart de mon temps sur ou sous le
demi-dieu samoan qui se tient devant moi.
*
* *
Un rayon de soleil se faufile entre les rideaux et atterrit sur mon visage,
m’arrachant aux griffes d’un rêve merveilleux dans lequel je faisais un strip-
twister avec un certain Hawaïen. Je me lève et grignote des morceaux d’ananas
pendant que mon café coule. Situé au sud de Honolulu, sur la plage de Diamond
Head, le bungalow que m’ont fourni les D’Amico est le genre d’endroit où les
gens rêvent de passer leurs vacances. Quand je dis sur la plage, je veux dire que
lorsque j’ouvre la baie vitrée, je n’ai que deux pas à faire pour avoir les pieds
dans le sable et j’ai une vue imprenable sur l’océan. J’ouvre les portes pour
laisser entrer la brise océane et écouter le bruit des vagues.
Je ne peux attendre plus longtemps, alors j’enfile un bikini blanc, j’empoigne
une serviette et je file au bord de l’eau. Cela fait bien trop longtemps que je ne
suis pas allée à la plage. La dernière fois, c’était avec Wes.
Wes. Zut, je ne peux pas penser à lui. Lorsque je suis arrivée à l’aéroport, à Las
Vegas, Gina DeLuca faisait la une d’un tabloïde, avec le titre « Le nouvel amour
de Gina ». Il y avait une photo d’elle en dessous, à table avec un homme qui
n’était autre que mon Wes. Enfin, pas mon Wes. Cela dit, c’est moi qui l’ai eu la
première, donc il est un peu à moi, non ? En même temps, c’est elle qui l’aura eu
le plus longtemps, alors… Bref. Wes n’est pas plus à moi que je ne suis à lui. Il
détient peut-être un morceau de mon cœur, mais pas mon cœur tout entier. Nous
avons beau avoir des sentiments l’un pour l’autre, nous avons décidé dès le
début que nous les mettions de côté pour mener chacun notre vie. Et c’est bien
ce que j’ai l’intention de faire.
Vivre ma vie.

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Je pose ma serviette à une dizaine de mètres de l’océan et je regarde à l’horizon,
au-delà de l’eau transparente, là où elle devient plus profonde et plus sombre. Au
loin, un surfeur solitaire en short de bain noir prend de sacrées vagues. Je le
regarde un moment, envoûtée par ses mouvements. Il prend quelques petites
vagues avant de faire un 360 et de se recoucher sur sa planche pour repartir au
large. Deux minutes plus tard, il est de nouveau debout et il s’engouffre dans un
superbe tube, le traversant comme un pro.
Peu de temps après, il vient dans ma direction en surfant une vague et j’ai
l’impression que la scène se déroule au ralenti. Des tourbillons noirs couvrent
son corps depuis son épaule à sa cheville et mes yeux remontent sur la surface
mouillée et lisse du torse le plus large que j’aie vu de toute ma vie. Tony, de
Chicago, était le plus puissant jusqu’à maintenant, mais ce n’est rien à côté de ce
géant. Malgré mon mètre soixante-quinze et mon beau trente-huit quarante si on
prend en compte mes seins énormes et mon cul rebondi, je me sens minuscule à
côté d’un homme comme Taï Niko. J’aime me sentir aussi petite.
Lorsqu’il atteint la plage, il descend de sa planche avec un saut parfait, puis il se
baisse pour la ramasser et il la porte sous son énorme bras, comme si elle ne
pesait rien du tout.
— Salut, haole, dit-il.
Note à moi-même, chercher la signification de haole sur Wikipedia.
— Je ne savais pas que c’était toi, là-bas. Tu es bon, je dis en hochant la tête en
direction de l’océan, cherchant un moyen de ne pas baver en regardant son torse.
— J’espère bien, je donne des cours les jours où je ne suis pas mannequin et où
je ne fais pas les spectacles avec ma famille, répond-il en souriant.
— Tu es prof ?
— Ouais. Pourquoi, tu veux que je t’apprenne ? demande-t-il d’une voix
sensuelle que je prends comme une invitation à flirter.
— Mais il n’y a pas que sur la planche que je veux m’allonger, je réponds avec
un sourire lourd de sous-entendus.
Ses lèvres se pincent et son regard se promène sur mes courbes.
— Tu peux t’allonger où tu veux, aussi longtemps que tu le veux, frangine,
répond-il.

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Hmmm. Ça doit être un truc d’Hawaïen. Cela dit, « frangine » n’a rien de
mignon dans sa bouche. Il le grogne, en insistant sur le « r », avec un ton
possessif, comme si nous nous connaissions déjà et que je lui appartenais. Mes
orteils se recroquevillent dans le sable et mon bas-ventre me chatouille
légèrement.
— Ah oui ? On parle toujours de planche de surf ? je demande sur un ton enjoué,
alors que j’imagine déjà un tas d’autres moyens de m’amuser avec lui.
— À ton avis ?
Son regard devient noir de désir et, intérieurement, ma libido saute de joie à
l’idée que je flirte avec cet homme magnifique. Je décide de tenter le tout pour le
tout. Je n’ai rien à perdre et tout à gagner.
— Bébé, avec toi, je m’allongerai où tu voudras.
Les narines de Taï se dilatent et il inspire brusquement. Sa planche atterrit sur le
sable avec un bruit sourd et il passe une main énorme dans mon dos pour me
plaquer contre son torse. Il s’empare sauvagement de ma bouche et nous nous
dévorons l’un l’autre, nous mordillant, nous léchant, goûtant à l’autre, explorant
nos bouches. Sans un mot, sans demander ma permission, Taï empoigne mes
fesses et me soulève dans ses bras. Je passe mes jambes autour de sa taille et je
m’accroche à lui, incapable de rompre ce baiser envoûtant, ne serait-ce qu’une
seconde, pour regarder où nous allons. Ce n’est que lorsque mon haut de maillot
disparaît et que j’atterris sur une surface moelleuse que je réalise que nous ne
sommes plus sur la plage. Je me fiche d’où nous sommes. La seule chose qui
compte, c’est que mon désir soit assouvi.
Taï mordille mon téton et je tiens sa tête sur ma poitrine, plantant mes ongles
dans son crâne chauve, y laissant mes marques. Mon agressivité ne le dérange
pas puisqu’il l’est encore plus que moi, m’arrachant un cri lorsqu’il plante ses
dents dans mon sein. Il le libère et sourit d’un air diabolique avant de jeter son
dévolu sur son jumeau. Ses mains sont partout sur mon corps, elles palpent mon
autre sein, massent mes fesses, puis elles saisissent ma nuque quand il s’empare
de nouveau de ma bouche. Il semblerait qu’avec Taï, tout soit question de
possession.

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— Je vais d’abord te prendre violemment, puis doucement, et je vais finir
quelque part entre les deux. Ensuite, je vais recommencer, grogne-t-il.
Il roule sur le côté et ouvre le tiroir de sa table de chevet pour en sortir une
capote. Dieu merci, il a encore les idées claires, car mon cerveau est embourbé
dans un brouillard de plaisir si épais que je ne pense plus qu’au moment où cet
homme plongera en moi, si fort que j’en oublierai comment je m’appelle.
Le short de Taï disparaît et je me dresse sur mes coudes pour mieux voir ce
spectacle splendide qui alimentera sans doute mes fantasmes pour les dix ans à
venir. Il s’avère que son tatouage n’épargne pas sa taille et qu’il couvre tout le
côté gauche de son corps, formant des boucles et des symboles dont je ne
connais pas la signification. Taï me fait un sourire machiavélique avant de
prendre sa queue énorme dans sa main pour la branler lentement. Quand je dis
énorme, je veux dire que je sais que je vais avoir mal la première fois qu’il va
me pénétrer. Cependant, je sais aussi que c’est le genre de douleur que l’on
accepte sans se plaindre et dont on se vante après, et qu’on redemande encore et
encore, car plus jamais on n’aura l’impression d’être comblée.
— Waouh. Tu es grand… de partout, je dis en écarquillant les yeux devant sa
verge.
Il me regarde gigoter et remuer mon bassin pendant que la température de mon
corps augmente dangereusement, aussi vite que ma chatte mouille et que mon
clito durcit.
— Enlève ton maillot, ordonne-t-il.
Son ton devrait sans doute me gêner, mais je suis tellement excitée que je lui
obéis, tirant sur les ficelles de ma culotte et la laissant tomber entre mes cuisses
ouvertes.
— Plus. Je veux voir ta fleur ouverte et mouillée.
Taï vide tout l’air de ses poumons avec un sifflement lorsque je m’exécute et que
j’écarte davantage les jambes. Mon geste pourrait être avilissant, mais avec lui,
cela semble interdit et… chaud, et cela me donne encore plus envie de lui.
Il continue de se branler en me regardant, et je me lèche les lèvres lorsqu’une
perle de liquide apparaît sur son gland.
— Tu veux goûter, frangine ? propose-t-il.

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Sa voix grave déclenche une nuée de frissons qui parcourent mon dos, et je ne
trouve pas de mots pour lui répondre. Plus rien n’existe à part lui et mon besoin
de plaquer mon corps contre le sien. Je hoche la tête, et il cesse le mouvement de
sa main.
— Lèche-moi. Goûte l’effet que tu me fais.
Je rampe devant lui à quatre pattes et j’approche mon visage. Lorsque mes lèvres
sont suffisamment près pour qu’il sente mon souffle chaud sur sa verge, je lève
la tête vers lui. Son regard est noir comme la nuit et il se mord la lèvre. Sans le
quitter des yeux, je lèche son essence d’un coup de langue. Son goût acidulé et
salé me fait mouiller de plus belle et il pousse un grognement.
— Je sens ta fleur, frangine. C’est comme un soleil liquide. Je vais dévorer ton
corps jusqu’à ce que tu t’évanouisses de fatigue, c’est ça que tu veux ?
Au lieu de répondre, j’enfonce son sexe dans ma bouche et je le glisse dans ma
gorge. Sa main s’enfouit dans mes cheveux, sans les tirer, mais il masse
fermement mon crâne pendant que je le suce. Je lève une main pour empoigner
la base de sa verge, car il est bien trop gros pour que je le prenne entièrement
dans ma bouche, moi qui me vante d’avoir la gorge profonde. Or, je ne peux le
prendre qu’à moitié, et l’idée que cette bite va s’enfoncer en moi me fait
accélérer le mouvement.
— Ralentis, frangine, dit-il en retirant sa queue de ma bouche.
Il s’allonge sur le lit, étendu sous mes yeux comme un délicieux buffet. Je ne
sais pas ce que je veux goûter ensuite, une autre bouchée de sa queue ou un de
ses délicieux pectoraux.
— Chevauche-moi. Je veux te bouffer pendant que tu m’avales, et tu n’en
laisseras pas une goutte.
Le ton de sa voix est toujours aussi dominant, mais je dois admettre que ça
m’excite. Je chevauche ses larges épaules et il saisit mes hanches. Je n’ai pas le
temps d’abaisser mon bassin qu’il lève la tête pour plonger sa langue dans ma
chatte.
— Putain, Taï !
Il appuie derrière mes cuisses pour me faire écarter davantage les jambes, et je
frotte mon sexe sur sa bouche, oubliant complètement de lui renvoyer

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l’ascenseur. Taï est le champion du monde du cunni, clairement dans mon Top 3,
aux côtés de Wes et d’Alec. La différence, c’est que Taï me suce comme s’il
avait passé dix ans en prison et qu’il avait utilisé tout ce temps à rêver de ma
chatte.
Quelques minutes plus tard, je jouis déjà sur lui et cela semble l’exciter encore
plus, car il se met à parler en grognant.
— Du sucre.
— Trempée.
— Hmm.
— Toute la journée.
— Te bouffer toute la journée.
C’est la dernière chose que j’entends avant de redescendre sur terre après mon
orgasme, m’étendant sur Taï, manquant m’éborgner sur sa bite dure comme fer
lorsque je pose mon visage sur sa cuisse. Je lève faiblement la tête et je prends sa
queue dans ma bouche, soudain électrisée lorsque je redécouvre son goût. Je le
lèche, le suce, le mordille et le caresse, lui accordant toute mon attention, sans
relâche.
Sa verge devient pourpre, puis ses veines gonflent sous ma langue, m’indiquant
qu’il est sur le point d’exploser, et je me délecte de lui offrir le même plaisir
divin qu’il me procure. Quand il plonge deux doigts en moi, je me contracte des
orteils à la tête, sentant que le moindre mouvement pourrait me faire jouir de
nouveau. Les gros doigts de Taï savent précisément quoi faire et ils trouvent tout
de suite mon point le plus sensible. Il le titille encore et encore, et je suis si
excitée que je suce sa verge aussi fort que possible, comme si ma vie en
dépendait.
Taï me fouille profondément avec ses doigts et il soulève son bassin pour
s’enfouir dans ma bouche. Une vague de plaisir infernal déferle soudain dans
mes veines et je jouis sur ses doigts et sa bouche. Son essence jaillit dans ma
gorge et je l’avale jusqu’à ce qu’il ne lui reste plus rien. Il finit par enlever ses
doigts et nous soupirons tous les deux, épuisés par tant de réjouissances.
Il m’aide à me retourner pour m’allonger à ses côtés et il me tient fort contre lui.

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— La prochaine fois, on se servira de ça, dit-il d’une voix enjouée en me
montrant la capote.
— Ça marche, je réponds en riant.
Je me blottis contre lui et je respire son parfum d’océan, de sexe et de moi, un
mélange délicieux.
Je connais un autre homme qui sent toujours l’océan, mais je ferme les yeux en
essayant de ne pas penser à lui. Je viens de m’envoyer en l’air, et j’ai bientôt
l’intention de remettre le couvert, ce n’est pas le moment de penser à Wes.
Profite de ton Hawaïen sexy tant que tu peux.
Taï promène ses mains dans mon dos puis dans mes cheveux pour masser mon
crâne, et je crois que je ronronne comme un chaton.
— Tu aimes ça hein, haole ?
Je pose mon menton sur son torse et je retrace du bout des doigts l’encre qui
recouvre son cœur.
— Qu’est-ce que ça veut dire, haole ?
Il sourit et se penche pour embrasser mon front. C’est un geste infiniment tendre
pour quelqu’un qui vient de me manipuler comme un dominant dans un club
BDSM. Enfin, peut-être pas, car je ne connais rien à ce style de vie, mais ce qui
est sûr, c’est qu’il assume son côté dominateur.
— Haole veut dire étranger.
— Hmm, je préfère frangine, je grommelle avant de lécher son téton.
Il éclate d’un rire tonitruant, me faisant trembler de la tête aux pieds, et je sens
une pointe de désir renaître en moi rien qu’à entendre son rire. Bon sang, je suis
dans de beaux draps.
— C’est noté, frangine, dit-il.
Il lève ma tête et m’embrasse fougueusement sur la bouche. Je crois que Taï ne
fait jamais rien à moitié lorsqu’il s’agit de donner du plaisir.

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Chapitre 4

En fin de compte, nous n’avons pas utilisé cette capote, parce qu’au moment
où notre baiser a commencé à s’enflammer, Taï a reçu un coup de fil, puis un
autre, puis un autre, et encore un autre. Apparemment, la famille Niko prend le
dîner du dimanche soir très au sérieux. C’est ainsi que, alors que je ne connais
Taï – et surtout sa bite – que depuis un jour, je suis sur le point de rencontrer sa
famille. Toute sa famille.
— Bon, Mia, ma famille est cool. Vraiment. Mais tu es blanche et tu viens du
continent. Donc, s’ils font un commentaire sur le fait que tu es une haole, laisse
couler. Notre peuple est très fier de sa culture, de son héritage et de sa
généalogie. Ils te traiteront bien et t’accueilleront à bras ouverts… du moment
qu’ils ne pensent pas que toi et moi sommes dans une relation sérieuse.
— Ça devrait être facile à faire, puisqu’on ne l’est pas. Je reste ici un mois pour
bosser, point final. Je serai ravie de le confirmer à ta famille. Si on s’amuse un
peu pendant notre temps libre… c’est du bonus, n’est-ce pas ? je demande en lui
mettant un petit coup de coude.
Un sourire sexy s’étend sur ses lèvres, et je meurs d’envie de le dévorer.
— Exactement, frangine. Allez, viens chez moi, on rencontre mon père avant
tous les autres. Ensuite, tu rencontreras mes frères, puis ma mère.
— Pourquoi ta mère la dernière ? je demande en haussant les sourcils.
— Parce qu’il faut garder le meilleur pour la fin, répond-il.
Je le soupçonne de répondre cela pour éviter de prendre un coup de pied entre
les jambes.
Nous arrivons à destination et je me sens bête, car je m’attendais à une propriété
beaucoup plus tribale. Or, la demeure coloniale des parents de Taï est grande,

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peinte en bleu azur, avec des finitions blanches et un porche qui en fait tout le
tour. Une allée de gravier mène au perron et, de part et d’autre, une pelouse
luxuriante s’étend jusqu’aux limites du jardin. Une vingtaine de voitures sont
déjà garée. Vingt. Pour un repas de famille. S’il fallait que toute ma famille se
rende à un dîner, nous tiendrions tous dans une Twingo.
Nous approchons à pied et je suis surprise par un brouhaha de voix qui résonnent
partout, à l’intérieur de la maison, mais également au loin, comme si elles
venaient de derrière la maison. Je suis surtout ébahie par les rires qui ne cessent
de retentir. La joie qui règne en ce lieu me frappe dès que nous passons la porte
d’entrée.
Sans un mot, Taï me prend la main alors que nous traversons les pièces bondées
de la maison. Tout le monde lève la tête et nous regarde passer en souriant
jusqu’aux oreilles. Je ne sens pas la moindre trace de jugement, rien qu’une
légère curiosité. Nous parvenons enfin de l’autre côté de la maison, dans le
jardin arrière, où se déroule vraiment la fête.
— C’est un repas de famille ou une réunion ?
Taï éclate de rire, et plusieurs personnes tournent la tête vers nous.
— Mia, c’est comme ça tous les dimanches soir. Ma famille est très proche. Tout
le monde participe en apportant un plat qui est assez gros pour nourrir de
quarante à cinquante personnes. C’est simple.
— Mais on n’a rien apporté, nous, je dis en serrant plus fort sa main.
Je me mords la lèvre, soudain inquiète de ne pas suivre le protocole samoan.
— Bien sûr que si. Pourquoi tu crois que tu es là ?
— Moi ?
Je fronce si fort les sourcils qu’une douleur vive éclate dans mon nez.
Il m’attire contre lui et je passe mes bras dans son dos, juste au-dessus de ses
fesses. Bon sang, je pourrais planter mes dents dans ce cul. Je regrette
sincèrement que nous ayons été interrompus avant de passer aux choses
sérieuses. Cela dit, j’aurais sans doute eu du mal à marcher jusqu’ici.
Taï se lèche les lèvres et appuie son front contre le mien, parlant d’une voix si
basse que j’en ressens les vibrations jusque dans mon sexe.

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— Ne me regarde pas comme si tu voulais me baiser, frangine, sinon je vais
devoir te plaquer contre le mur le plus proche. Je me fiche qu’on t’entende et,
crois-moi, on t’entendra. Il n’y a rien de mieux que de faire hurler de plaisir une
femme en étant enfoui jusqu’aux couilles dans sa fleur.
Je le dévisage, sans voix, jusqu’à ce que Taï s’arrête devant un autre géant.
Celui-ci est torse nu, vêtu d’un simple short de bain. Je regarde autour de nous et
je remarque que tout le monde est habillé en tenue de plage, contrairement à Taï
qui porte un bermuda beige et un polo blanc, un look qu’Hector, mon meilleur
ami gay de Chicago, décrirait comme « golf chic ». Cela dit, Taï pourrait porter
n’importe quoi – voire rien du tout –, il aurait l’air tout aussi délicieux.
— Tama, dit Taï en samoan pour annoncer notre présence.
Je suppose que cela veut dire « père » ou « papa ».
Il baisse les yeux et j’en fais de même, ne connais-sant pas le protocole.
— Fils, qui as-tu emmené dans notre maison ? répond son père d’une voix
chaleureuse.
— Tama, je te présente Mia Saunders, dit Taï en souriant. Mia, voici mon père,
Afano Niko. Mia travaille avec moi sur une campagne publicitaire.
Je lui tends ma main et monsieur Niko la serre en haussant les sourcils.
— Un autre mannequin ? Je croyais que tu avais appris de ta dernière erreur,
grogne-t-il d’une voix inquiète et mécontente.
— Mia n’est pas ma copine, Tama. C’est simplement une amie proche. Elle n’est
sur l’île que pour un mois. Ensuite, elle repartira.
Cela semble égayer le chef de famille, qui frappe le dos de son fils et lui serre
l’épaule.
— Eh bien tant mieux, c’est bien. Dans ce cas, elle devrait manger et parler avec
la famille pour apprendre notre culture.
— C’est justement ce que je me disais, répond Taï en souriant.
Je rencontre ensuite les frères de Taï, qui sont tous immenses, beaux, et qui ont
une version légèrement différente du tatouage de Taï. Le soleil sur son épaule,
dont les rayons descendent sur son bras et le long de son torse, est le même que
celui de son père. Tao, le frère aîné de Taï, a la même tortue que lui, et deux
autres de ses frères ont les mêmes bandes d’encre noire sur les bras et les

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jambes. Je découvre qu’il y a des dizaines de motifs que je n’ai pas eu le temps
d’observer lorsque nous nous sommes dépêchés de nous habiller pour venir.
Lorsque chacun des trois frères m’a draguée et s’est moqué de moi, nous
retournons dans la maison. J’ai mon deuxième cocktail à la main, un « Lilikoï
Passion » qui, apparemment, veut dire « passion du fruit de la passion ». C’est
délicieux et cela réchauffe mon ventre tout en libérant ma tête. La dernière fois
que j’ai trop bu, j’ai fini au lit avec mon dernier client, Mason Murphy. Même
s’il ne s’est rien passé, car Mason est comme un frère pour moi, ça n’a pas plu à
sa copine quand elle nous a retrouvés le lendemain midi en sous-vêtements.
Comme toujours lorsque je bois de l’alcool, je me mets à penser à tous les gens
avec qui je devrais reprendre contact, comme mes amis Hector et Tony, Mace et
Rachel, ou Jennifer, à Malibu, qui est enceinte de quelques mois, maintenant.
Bien sûr, il y a Wes, aussi. Nous avons échangé quelques messages, et pour
l’instant, ça suffit. Je n’ai pas spécialement envie de lui parler depuis que j’ai vu
les photos de lui et Gina en couverture de mon magazine people préféré. Je suis
à Hawaï pour travailler et m’amuser. Le boulot ne commence que demain, et je
m’éclate déjà dans les bras de mon « The Rock1 » personnel.
Taï s’arrête devant une minuscule femme aux longs cheveux noirs tressés qui est
en train de remuer quelque chose dans une grande casserole. Elle est vêtue d’un
paréo orange qui lui arrive aux chevilles et d’un débardeur assorti recouvert d’un
t-shirt blanc en crochet. Elle a dû mettre ce dernier par pudeur, car les jeunes
femmes de la famille n’ont aucun scrupule à montrer leur peau. Cela dit, elles
peuvent se permettre de se promener en maillot de bain car elles sont toutes
minces. Je crois que je suis la femme la plus habillée de la soirée, or je ne porte
qu’un short blanc et un débardeur vert. Mon seul point commun avec elles, c’est
que mes cheveux noirs sont ondulés et brillants avec l’humidité.
— Tina, dit Taï avant de baisser les yeux comme avec son père.
Ce doit être une marque de respect, car j’ai remarqué que tout le monde agit
ainsi face à quelqu’un de plus âgé. Je ne sais si c’est une tradition hawaïenne ou
familiale, je poserai la question à Taï plus tard.
— Mon garçon, mon cœur pur et sincère, dit-elle en souriant.

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Elle tapote son cœur, puis elle tire sur sa nuque pour qu’il baisse la tête et elle
l’embrasse sur les joues et sur le front.
Ses yeux marron sont les mêmes que ceux de Taï et pleins d’amour maternel. Je
ne me souviens pas de la dernière fois que j’ai vu un tel regard chez ma mère.
Peut-être n’ai-je jamais connu ça.
— Tina, voici Mia Saunders, une amie du travail. Je lui fais visiter l’île et je lui
apprends notre culture pendant qu’elle est là. Mia, je te présente ma mère,
Masina.
— Je pensais qu’elle s’appelait Tina ?
Ils éclatent tous deux de rire, et celui de Taï parcourt mes veines en y embrasant
mon sang.
— Tina veut dire « mère » en samoan, explique Masina. Mes enfants emploient
cette langue lorsqu’ils s’adressent à quelqu’un de notre culture.
— Oh, pardon, je m’empresse de dire en me sentant rougir. Taï est la première
personne que je rencontre qui parle samoan. Je suis ravie de faire votre
connaissance, Madame Niko.
Je lui tends la main, mais elle ne la prend que pour m’attirer dans ses bras et
m’embrasser sur les joues et sur le front comme elle a fait avec son fils. Ensuite,
elle pose ses mains sur mes joues et caresse mes tempes avec ses pouces.
— Tu es perdue au cœur d’un grand voyage. Mais n’aie jamais peur. Cette
expérience te procurera une grande joie et tu finiras par t’engager éternellement.
La moindre brise légère pourrait me faire tomber. Je suis face à elle, immobile,
sans répondre. Le mieux que j’arrive à faire est un « Oh ».
— Tina… gronde Taï avant de m’attirer à ses côtés. Ma mère a quelque chose de
spirituel en elle. Elle a le don de voyance.
— De voyance ? je répète en m’accrochant à lui et en dévisageant sa mère.
Il hoche la tête et serre mon épaule.
— Tout sera comme il se doit, Mia. Ne laisse pas mon garçon mêler ton éternel
au sien. Hélas, les deux ne sont pas liés, dit-elle en fronçant les sourcils. Tu as
peu de temps, profites-en, ajoute-t-elle avant de sourire jusqu’aux oreilles.
— Mia n’est pas ma copine, soupire Taï. Nous sommes amis et nous allons
passer un mois ensemble et travailler.

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— Je sais, cœur pur, répond Mesina. Ne t’attends pas à plus, car ce n’est pas
pour toi, dit-elle d’un ton ferme. Maintenant ouste, j’ai beaucoup à faire pour le
dessert.
Taï me guide dans le couloir alors que je vide le reste de mon verre. J’ai
vraiment besoin d’un autre. Nous allons jusqu’au bar où sont alignées les carafes
du divin liquide.
*
* *
De retour au bungalow, après bien trop de Lilikoï Passion, nous sommes assis
sur la plage, les orteils et les fesses dans le sable. Le seul bruit nous vient des
vagues sombres qui s’écrasent sur le sable en reflétant la belle lune jaune.
L’océan semble sans fin et ses eaux prêtes à nous engloutir à tout moment. Je
crois que j’aime l’océan autant que je le crains, je le respecte et jamais je ne
sous-estime sa puissance.
Je m’allonge sur le dos, le buste relevé sur mes coudes, et je croise les chevilles
en regardant l’homme torse nu à mes côtés.
— Qu’est-ce qu’ils veulent dire, tous tes tatouages ?
— Ils ont chacun leur signification, frangine. Lequel a retenu ton attention ?
Ses yeux sont aussi sombres que l’océan, mais bien moins effrayants, et je me
noierais dans leurs méandres.
Je m’assieds et je suis du doigt les traits du soleil caressant chacun de ses rayons,
laissant derrière ma caresse une nuée de chair de poule.
— Ça, c’était mon premier, un honneur incroyable. Dans ma culture, le soleil
représente la richesse, la lumière, la grandeur et la qualité d’un meneur. Pour
moi, la façon dont les rayons traversent mon cœur montre mon désir de diriger
avec justesse. Je veux être riche en amour, comme mon Tama. Et un jour,
j’espère être un grand homme à la tête de mon entreprise et de ma famille,
comme mon Tama, encore une fois. C’est pour cela que j’ai demandé à mon père
de le partager avec moi.
— Wouah, c’est très spécial.
Taï gonfle ses poumons avant d’en expirer tout l’air.

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— Chez les Samoans, pour avoir un tatau – l’encre –, il faut le mériter. Et il faut
qu’un membre de ta famille le partage avec toi. Comme ça, ta vie est à jamais
liée à la sienne.
Taï se lève et baisse son short sur ses chevilles, se retrouvant complètement nu.
Il se met de profil et je découvre sa semi-érection – rien à voir avec la taille qu’il
peut atteindre quand il est vraiment excité. Sa main parcourt sa cage thoracique
jusqu’à une forme de croissant de lune renfermant un moulin à vent en papier.
— J’ai reçu celui-là de mon frère, Tao, qui souhaitait trouver le bien-être dans sa
vie. Il se disputait beaucoup avec nos parents, moi, nos sœurs, nos frères, les
autres enfants à l’école. Quand il a enfin trouvé le droit chemin, il a voulu que je
sois à ses côtés pour l’emprunter.
Je ramène mes genoux sous mon menton et les serre dans mes bras.
— Et la tortue ?
Il sourit jusqu’aux oreilles et promène sa main sur ses abdos. Enfin, ce ne sont
pas vraiment des abdos – je dirais plutôt que ce sont des carrés de désir. Chaque
abdo me donne envie de le lécher et de le mordre, de couvrir son torse de
baisers, de coups de langue et de morsures.
— C’est une autre de mes requêtes. Je la partage avec mon plus jeune frère. La
tortue est le symbole de la longévité, de la santé et de la paix. C’est ce que je
souhaite pour ma famille et moi.
— Et les vagues et les tourbillons ? Il y a une signification ou c’est juste pour
remplir ?
Il rit, puis il retrace les traits sur son corps. Sa verge a durci et je suis prête à
mettre les histoires de côté pour ce soir. Cependant, je suis curieuse de savoir
pourquoi il n’a tatoué qu’un côté de son corps.
— Dans notre culture, l’océan a une place prédominante. D’une part, parce qu’il
nous entoure et que nous sommes à sa merci, d’autre part parce que,
historiquement, le peuple samoan pensait que c’était là qu’on allait lorsqu’on
mourait. Comme je surfe et que ma culture veut que j’en sois toujours proche, je
lui ai donné une place dans l’histoire de ma vie et celle de ma famille.
Il continue à me montrer d’autres dessins qui sont pour des cousins, son autre
frère, et ainsi de suite. Il a même enfreint la règle en se faisant tatouer la même

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fleur que toutes les femmes de sa famille sur le pied.
Je l’ai remarqué au repas de famille, mais je n’ai rien dit. J’ai trouvé un peu
étrange que toutes les femmes aient une fleur sur le pied, mais je comprends,
maintenant. C’est ainsi que les femmes expriment leur respect pour la famille, en
marquant leur corps de façon permanente.
— C’est ma dernière question, promis !
Il lève les yeux au ciel et s’assied sur la serviette que nous avons apportée. Je me
mords la lèvre en dévorant des yeux cette érection que je rêve d’avoir en moi.
— Vas-y, frangine, pose-moi ta question. Mais déshabille-toi en même temps.
Lentement.
Je regarde autour de nous, comme si quelqu’un allait débarquer sur notre plage
privée, comme par magie. En même temps, j’ai grandi à Las Vegas, où on ne sait
jamais quand un pervers va surgir de derrière un buisson. Bien évidemment, il
n’y a pas de buissons ici. Il y a seulement des kilomètres de plage et de palmiers.
Je me lève et j’enlève mon débardeur avant de déboutonner mon short, les jetant
tous deux dans le sable.
— Continue, grogne Taï.
— Ma question ou mon déshabillage ?
— Les deux, répond-il en haussant les sourcils.
Je dégrafe mon soutien-gorge, mais je le tiens sur mes seins.
— Pourquoi tout le côté droit de ton corps est-il vierge de tatau ? je demande en
m’essayant au samoan.
Il sourit, j’ai dû le prononcer correctement. Cool !
— Les melons.
— Quoi ?
— Je veux voir tes melons. Lâche ton soutien-gorge.
Je lui obéis, laissant tomber mes seins qui rebondissent joyeusement. Je suis
assez fière qu’ils soient aussi fermes pour des bonnets D. J’en prends un dans
chaque main et je les tripote sans gêne. Taï pousse un grognement et s’appuie
sur ses mains en écartant les jambes.
— Tu vois ça, frangine ? dit-il en secouant la tête, faussement indigné.

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— Je vois, oui. Maintenant réponds-moi, histoire qu’on puisse clore cette soirée
comme il se doit.
Il me fait signe de venir à lui avec son index, et je secoue la tête. Il recommence
et, incapable d’ignorer ma chatte soudain mouillée et le désir brûlant qui coule
dans mes veines, j’avance vers lui. Il m’attire brusquement sur ses cuisses et,
sans un mot, il plonge deux doigts dans mon sexe, aussi profond que possible,
tout en frottant mon clitoris avec son pouce. Je penche la tête en arrière et je me
cambre, lui offrant mes seins, ce dont il ne manque pas de profiter.
Je rebondis sur ses cuisses et il me baise de manière exquise avec ses doigts.
Lorsqu’il mord fermement mon téton et qu’il augmente la pression sur mon
clitoris, je jouis de façon spectaculaire.
Je retrouve peu à peu mes esprits et il s’empare de ma bouche, m’embrassant
longuement et fermement. Lorsqu’il recule la tête, je me sens encore plus saoule,
mais maintenant c’est lui qui m’enivre.
— Je veux qu’un côté de mon corps reste pur pour moi. Ce côté est pour ma vie,
et je ne le partagerai qu’avec ma femme et mes enfants. Puis, quand le moment
sera venu, je partagerai les tatau de mes fils, puis de leurs fils.
Mes cheveux tombent contre ses joues quand j’appuie mon front contre le sien,
effleurant sa bouche avec la mienne.
— Tu n’es pas sérieux, je chuchote. Aucun homme n’est aussi altruiste.
— Ma belle, je suis loin d’être altruiste, et j’ai la ferme intention de te le montrer
quand je ferai ce que je veux de ton corps sublime.
— Oui, s’il te plaît.
Sur ce, il empoigne mes fesses, me soulève et me ramène à mon bungalow.

1. Personnage qu’a incarné Dwayne Johnson lorsqu’il était catcheur.

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Chapitre 5

La queue de Taï me laisse une sacrée impression. Hier soir, il était insatiable. Il
m’a prise tellement de fois que ma chatte a fini par se sentir vide, incapable de
ressentir la plénitude que son sexe lui procurait au début. C’est une nuit à graver
dans les annales. C’était une nuit de sexe cochon et libéré, le genre dont les
femmes rêvent mais qu’elles n’ont que rarement.
Je souris jusqu’aux oreilles en gravissant les marches de la superbe villa où se
déroule mon premier shooting photo pour la campagne « La beauté ne se mesure
pas ». Je suis sur le point de frapper lorsque la porte s’ouvre, et je suis accueillie
par un hipster rachitique.
— Dieu merci, tu es là. Tu es Mia, n’est-ce pas ? demande-t-il en me faisant
signe de le suivre à l’intérieur.
Je profite qu’il soit devant moi pour observer son apparence. Il porte un jean
skinny noir qui semble collé aux bâtons qui lui servent de jambes, et un t-shirt
noir, méthodiquement débraillé, qui révèle que la circonférence de son ventre
fait la taille de ma cuisse. J’ai du mal à le suivre avec mes claquettes.
— Elle est là, dit-il lorsque nous arrivons dans un salon.
Des têtes se tournent vers nous, mais rien de plus.
Le salon de cette villa a été transformé en espace de travail pour le maquillage,
la coiffure et l’habillage. Des portants pleins de maillots de bain et de robes de
plage sont alignés le long d’un mur, alors que celui d’en face est recouvert de
miroirs et de fauteuils, comme dans un salon de coiffure. D’ailleurs, la musique
est la même aussi.
L’homme qui m’a ouvert, et qui ne s’est toujours pas présenté, frappe le dossier
d’un siège en me regardant.

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— Assieds-toi là.
Je lui obéis, parce que je ne sais pas quoi faire d’autre. Je regarde par la baie
vitrée ouverte qui donne sur une immense piscine et un jardin, où Angel et un
photographe sont en train de mettre le matériel en place en donnant des ordres
aux assistants. Quand j’ai posé pour Alec, nous étions souvent seuls, tous les
deux, et il n’y avait pas grand-chose en termes de coiffure et de maquillage car il
n’était pas question de ça dans son art. Ce shooting me fait penser à ceux des
pubs que j’ai faites lors de ma brève tentative pour devenir actrice, avant d’être
escort.
— Je suis Raul, ton styliste, ton maquilleur et ton coiffeur, les trois en un, dit-il
en me faisant un clin d’œil.
Je regarde son corps maigrichon en priant pour qu’il ne soit surtout pas
nutritionniste à ses heures perdues. Sa seule couleur provient de ses cheveux
violets, rasés sur le côté et gonflés puis coiffés en arrière sur le dessus. Vu la
longueur de ses cheveux, je me demande s’il se fait parfois des mohawks. Il
s’occupe d’abord de me maquiller, avec une vitesse impressionnante, puis il
s’attaque à mes cheveux et nous discutons plaisamment.
Raul donne quelques ordres à des assistants et une jeune femme incroyablement
maigre revient avec un maillot de bain. Il la regarde des pieds à la tête, puis de la
tête aux pieds, se lèche les lèvres et la remercie. Elle se pavane un peu, puis elle
tourne les talons pour aider un autre styliste.
— C’est ta copine ? je demande alors qu’il met la touche finale à ma coiffure.
— Pas encore, mais j’y travaille. Elle est timide. Je ne veux pas lui faire peur,
mais on sort ensemble ce week-end.
— Cool ! je m’exclame en souriant.
Il sourit à son tour, puis il gonfle mes cheveux et y met de la laque pour s’assurer
qu’aucune mèche ne s’échappe de sa coiffure. Il déclare alors qu’il a terminé, et
lorsque je me regarde dans le miroir, j’ai du mal à me reconnaître. Je retiens mon
souffle avec un cri aigu tant je suis canon ! Mes cheveux sont brillants,
volumineux, et des anglaises soyeuses se balancent de gauche à droite comme
des ressorts lorsque je tourne la tête. Son maquillage est un chef-d’œuvre. Mes
yeux verts paraissent immenses et irradient de lumière, et ma peau semble

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fraîchement bronzée et naturelle, sauf qu’il a fallu trente minutes et des tonnes
de maquillage pour obtenir cette « beauté naturelle ».
— Tu es un génie, Raul.
— Je sais, répond-il en me tendant un maillot de bain noir brillant.
Le haut est un tankini qui se noue dans le dos et le bas se noue sur les hanches
avec des ficelles blanches. Il est plus couvrant que les bikinis que j’ai l’habitude
de porter, ce qui est plutôt sympa pour mon premier shooting.
— Va te changer là-bas, avec les autres filles.
Lorsque j’entre dans la pièce, je découvre des femmes de toutes les formes et de
toutes les tailles en train de se déshabiller. Des assistantes déambulent parmi
elles, mettant du spray sur leur peau ou ajustant leur maillot de bain. Une femme
noire avec des courbes généreuses avance vers moi. Elle porte un maillot une
pièce blanc avec des lanières qui se croisent sur les seins avant de descendre
pour couvrir son ventre. Le tissu laisse un espace ouvert sur ses hanches puis il
finit en short sur ses fesses. Sur elle, avec son physique et sa peau chocolat, le
maillot est canon.
— Salut, je m’appelle Michelle.
— Mia, je réponds en lui serrant la main.
Je regarde autour de moi en souriant, et les autres femmes me saluent de la main.
Michelle passe son bras autour de mes épaules.
— Écoute-moi. La blonde canon là-bas, qui fait un peu pétasse, c’est Taylor, dit-
elle.
Elle désigne une femme qui est en train de scotcher ses gros seins à son maillot.
Ses cheveux blonds sont magnifiques et tombent sur ses fesses généreuses. Elle
doit faire du quarante-huit ou du quarante-six, or elle est superbe dans son bikini
noir. Taylor me fait un signe de la main.
— Elle, c’est Lindsay. C’est ma pote, poursuit Michelle.
Elle pointe du doigt une brune dont les cheveux coupés au carré sont plaqués en
arrière, dont les lèvres sont peintes en rouge vif, et qui doit faire une taille de
moins que Taylor.
J’avance dans la pièce avec Michelle, qui me présente ensuite à des jumelles
vêtues du même maillot, mais de couleurs différentes. Leurs cheveux auburn

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sont parcourus de mèches caramel et sont coiffés dans des chignons complexes
dont des mèches s’échappent de façon stratégique.
— Salut, disent-elles en même temps avant de glousser comme des ados.
En fait, plus je les regarde, plus j’ai l’impression qu’elles sont en effet des ados
avec beaucoup de maquillage.
— Misty et Marcia sont les plus jeunes, ici, alors on prend toutes soin d’elles et
on s’assure qu’elles ne s’attirent pas d’ennuis. On ne veut pas qu’elles
deviennent les salopes de l’île, n’est-ce pas les filles ?
Elles gloussent de nouveau, et elles me font penser à Maddy. Elles sont aussi
considérées comme des grandes tailles, or elles doivent faire du quarante-deux, à
peu près. Je ne suis pas beaucoup plus fine qu’elles.
Michelle m’emmène dans un coin et elle tient mon maillot pendant que je me
déshabille, tout en continuant son topo sur les mannequins.
— Les jumelles n’ont que seize ans et elles sont là sans leur famille. L’agence a
engagé un chaperon pour les surveiller pendant qu’elles sont sur l’île, mais ce
connard n’est jamais là. Leur père est célibataire et il travaille dur pour subvenir
à leurs besoins, mais comme tu peux le voir, elles sont canon et elles ont été
choisies sans passer de casting. C’est une occasion en or pour elles et ça va
servir à payer leurs études à la fac. C’est la seule raison pour laquelle leur père
les a autorisées à venir.
Une fois en maillot, une assistante vient me mettre du spray sur les fesses au cas
où la culotte remonterait durant le shooting, et elle scotche le haut à mes seins.
Ensuite, elle se verse de l’huile sur les mains et elle l’étale partout sur moi pour
faire briller ma peau, puis elle passe à Michelle qui, elle, écarte les bras et les
jambes comme lors d’une fouille à l’aéroport.
Quelqu’un frappe à la porte et nous nous taisons toutes immédiatement.
— Mia et Michelle, c’est à vous ! annonce une voix tonitruante.
— Que le spectacle commence ! dit Michelle.
Angel est un photographe et un être humain incroyable, et je m’éclate à travailler
avec lui pour la pub qui s’appellera « Yin et Yang ». Michelle et moi nous
allongeons sur le dos, tête-bêche, courbant nos corps pour dessiner un cercle
alors qu’il nous prend en photo de dessus. À un moment donné, il nous demande

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de tenir la cheville de l’autre et de nous étirer dans une position compliquée. Il
nous montre le résultat, et je suis surprise de découvrir une photo qui donne à
réfléchir.
Lorsque nous avons fini, Michelle et moi traînons avec les autres filles autour de
pizzas. Ce n’est probablement pas le repas idéal pour des modèles, mais
Michelle me fait remarquer qu’il y a des épinards, des artichauts, des tomates,
des poivrons verts, des olives et du poulet sur les pizzas, et que ce ne sont que
des choses saines. Son explication nous satisfait, et nous concluons que nous
sommes des mannequins grande taille, de toute façon, et que nous avons eu ce
boulot grâce à nos corps, pas pour la taille que la société voudrait que l’on ait.
*
* *
Je passe les deux jours qui suivent à faire des photos de groupe et des portraits
avec les filles. Hélas, je n’ai pas le plaisir de travailler avec Taï. Je commence à
l’aube et je ne finis que lorsque je ne tiens plus debout. Le mannequinat est loin
d’être de tout repos. Jamais je n’aurais pensé que c’était un boulot aussi dur.
C’est marrant au début, jusqu’à ce que ça fasse une heure que je pointe mon
orteil, que je cambre ma poitrine et que je serre les fesses pour ne pas avoir l’air
d’une strip-teaseuse, ou que je répète de légers ajustements à ma posture, en plus
des retouches aux cheveux et au maquillage. J’ai une crampe permanente dans le
pied droit à force d’essayer d’imiter le pied de Barbie – la différence avec elle,
entre autres, c’est que j’ai de la vraie chair et des vrais os.
Aujourd’hui, je revois Taï, et je souris non-stop en pensant à ce corps ferme,
bronzé et délicieux que je vais pouvoir coller contre le mien. Je pensais que nous
passerions la journée à poil chez moi, or il est déterminé à me faire visiter l’île,
et je ne peux pas dire non à un tel guide touristique.
Il m’emmène d’abord au Pali Lookout, non loin de Honolulu, au sud de l’île, où
l’on peut profiter d’une vue panoramique de la côte d’Oahu. Le vent est si
puissant, en haut de la montagne, que Taï finit par me donner sa casquette pour
empêcher mes cheveux de nous fouetter le visage à tous les deux.
— C’est génial, non ? dit-il en regardant la vue magique.
— C’est superbe. Jamais je ne l’oublierai.

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J’apprends que c’est là qu’a eu lieu une des batailles les plus meurtrières de
l’histoire d’Hawaï. Alors qu’ils défendaient Oahu contre Kamehameha Ier,
presque quatre cents soldats ont été pris au piège dans cette vallée et ils ont fini
par être poussés par-dessus la falaise.
— C’est tellement triste, je dis alors que nous retournons à sa voiture.
Taï reprend sa casquette, et mes cheveux retombent en cascade dans mon dos.
— Si ça, ça t’a rendue triste, on va peut-être éviter Pearl Harbor.
— Bonne idée.
— Tu as faim ?
— Oui !
— Tu aimes la bière hawaïenne ?
— Est-ce qu’il y a des gens qui n’aiment pas ?
Il m’emmène à la Kona Brewing Company, une brasserie située dans un centre
commercial, ce qui me fait penser que ça ne va pas être aussi bon que Taï le dit.
Cependant, je suis ravie d’avoir eu tort.
Nous suivons la serveuse à travers un restaurant lambda jusqu’à l’arrière, où une
terrasse surplombe la baie et le port de plaisance. Taï m’explique que les gens
peuvent amarrer leurs bateaux en bas et gravir les escaliers entre les rochers pour
venir dîner. La vue est aussi belle qu’à Pali Lookout, mais très différente. Elle
n’offre pas le même panorama, puisque de chaque côté du restaurant s’étend une
chaîne de montagnes. Des éclats de vert, jaune, marron, violet, bleu et toutes les
autres couleurs de l’arc-en-ciel donnent au paysage un air de tableau
impressionniste. Je comprends, à présent, pourquoi tant de gens ont peint ces
montagnes, ils ont voulu transmettre le sentiment de paix qu’elles inspirent.
Nous commandons une bière et discutons de la vie sur l’île, de la culture
samoane, mais aussi de ma vie en Californie, du surf et de l’avenir. Taï boit une
bière blonde qui s’appelle The Big Wave1 et moi une bière fruitée, la Castaway2.
Étrangement, les noms de nos bières semblent coller à la réalité de nos vies. Je
suis comme une naufragée qui flotte dans la direction que lui impose le courant,
s’échouant ici ou là, et Taï est constamment en recherche de la grande vague qui
complétera sa vie. Secrètement, je crois qu’il ne se sentira entier que lorsqu’il

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choisira une partenaire, mais pour le mois à venir, je suis contente d’être la
femme de sa vie.
— Bon, tu es allée au belvédère, tu as goûté à la bière et à la nourriture locale,
que dirais-tu de nourrir ton âme, à présent ?
— Mon âme ? Tu crois que tu peux nourrir mon âme ?
Il sourit jusqu’aux oreilles et nous remontons en voiture. Nous roulons pendant
plus d’une demi-heure, mais le trajet ne semble durer que quelques minutes tant
je me perds dans les paysages qui défilent à travers la vitre.
Nous suivons un panneau pour la Valley of the Temples Memorial Park, le long
d’une route qui traverse un cimetière. Cependant, cela n’a rien à voir avec les
tombes en béton froid et les plaques de bronze que nous voyons aux États-Unis.
Ici, de grands carrés en marbre noir s’érigent à la verticale avec des gravures
dorées, ils ressemblent à des sentinelles protégeant les morts couchés à leurs
pieds, prouvant la vénération qu’ont les Hawaïens pour leurs morts. Alors que le
lieu devrait triste et froid, je suis prise d’un sentiment de compassion et d’amour
pour ces gens qui partagent avec moi l’endroit où ils sont venus reposer en paix.
Taï se gare sur un parking et nous descendons de voiture. Il me tient la main et
me guide sur le chemin qui mène à une petite grotte découpée dans la montagne
dans laquelle se dresse un temple rouge d’architecture japonaise.
— Voici le Byodo-In Temple, chuchote-t-il. C’est un temple bouddhiste, où les
gens de toutes les fois sont les bienvenus pour venir prier, méditer ou
simplement profiter de l’environnement. Viens, il faut que tu le voies de plus
près.
Je suis tellement surprise et fascinée que Taï doit me tirer par la main. Le temple
est niché au pied de l’immense montagne. D’un côté se déploie une forêt de
bambous, de l’autre le cimetière. C’est l’endroit le plus beau que j’ai vu de toute
ma vie, mais je n’ai pas les mots pour expliquer le sentiment de plénitude qui
envahit mon esprit et mon âme. La quiétude et l’humanité qui règnent en ce lieu
remplissent mes yeux de larmes.
— Je n’ai jamais vu une chose pareille, je dis en me tournant vers Taï, qui se
baisse pour m’embrasser tendrement.
— Tant mieux, parce que tu n’as pas vu le meilleur.

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Nous parcourons les sentiers bordés d’arbres aux branches basses en nous
arrêtant pour admirer les carpes koïs dans les nombreux bassins. Près de l’entrée
du temple sont suspendues une cloche géante et une bûche. Quand je dis une
bûche, je veux parler d’un tronçon d’arbre qui est attaché au plafond par deux
cordes. L’idée est que les visiteurs tirent la bûche en arrière pour sonner la
cloche. Bien évidemment, je ne peux m’empêcher d’essayer. Toutefois, j’ai si
peu de force que le tronc bouge à peine, effleurant tout juste la cloche.
— Attends une seconde, frangine, dit Taï.
Il donne son téléphone à un couple de Japonais qui attendent leur tour avec la
cloche, et l’homme se prépare à prendre la photo. Taï passe son bras sur mon
ventre, attrapant également la corde, puis il nous tire toutes les deux avec sa
force surhumaine. Le tronc d’arbre recule et s’écrase sur la cloche avec un dong
assourdissant avant de rebondir et de la frapper de nouveau, un peu moins fort, et
de recommencer une troisième fois.
Je sautille sur place en frappant dans mes mains, puis je me jette sur Taï pour
l’embrasser langoureusement en guise de remerciement. Il me serre dans ses bras
et dévore ma bouche en suçant ma langue comme s’il essayait d’avaler toute ma
joie. Quelqu’un se racle la gorge derrière nous et je vois la femme japonaise
lever les pouces derrière le dos de son mari. Je me couvre la bouche en faisant de
mon mieux pour ne pas m’esclaffer.
Taï remercie l’homme et range son téléphone dans sa poche. Il reprend ma main
et nous gravissons les marches jusqu’à la porte d’entrée. Taï enlève ses
chaussures et je l’imite, m’accrochant au dos de son t-shirt dans la pénombre. Je
n’entends personne d’autre à l’intérieur du temple. Nous avançons jusqu’à une
immense statue de Bouddha de trois mètres de haut, assis dans une pose
méditative sur une fleur de lotus.
— C’est la plus grande statue de Bouddha en dehors du Japon, explique Taï. Elle
a été sculptée par Masuzo Inui, un artiste célèbre. J’aime qu’il soit assis dans une
fleur de lotus.
— Pourquoi est-elle dorée ? je demande en balayant la statue du regard, essayant
de graver le moindre détail dans ma mémoire.

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— Pour mettre en valeur sa beauté. Elle est couverte de trois couches de peinture
d’or, puis d’une couche de feuilles d’or. Tu vois toutes les silhouettes qui
l’entourent ? demande-t-il en les désignant.
Je hoche la tête, essayant de m’approcher autant que possible sans dépasser la
corde.
— Il y a cinquante-deux Boddhisattvas3 autour de lui, des êtres « illuminés » qui
flottent sur des nuages, jouent de la musique ou dansent. Ils représentent la
culture Fujiwara4.
Lorsque la leçon d’histoire est finie, nous allumons des bâtons d’encens que
nous déposons au pied de la statue.
— Maintenant, fais une prière ou un vœu, ou envoie de la lumière et de l’amour
à quelqu’un qui en a besoin, selon toi.
Taï s’assied en tailleur devant la statue, et encore une fois, je l’imite. Il presse
ses paumes de main l’une contre l’autre et les rapproche de son torse, comme
pour une prière. Ensuite, il ferme les yeux et baisse la tête. Je ferme également
les yeux et baisse la tête, mais au lieu de choisir entre prier, faire un vœu ou
envoyer de l’amour, je fais les trois.
Je t’en supplie, Dieu, ne laisse pas mourir mon père.
Je souhaite que Maddy obtienne tout ce qu’elle veut dans la vie.
Bouddha, je voudrais envoyer de la lumière et de l’amour à Wes, pour qu’il ne
se sente plus jamais seul lorsqu’il est dans une pièce remplie de gens.

1. La Grande Vague.
2. La Naufragée.
3. Dans la religion bouddhiste, êtres humains ou divins cherchant à atteindre
« l’éveil  » et à devenir Bouddhas à leur tour.
4. Famille de noblesse japonaise dont de nombreux descendants ont été régents
des empereurs du VIIIe au XIIe siècle.

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Chapitre 6

Taï passe le reste de la soirée à me promener autour de l’île. Nous nous


arrêtons à North Shore pour manger mexicain, et je découvre que cela n’a rien à
voir avec ce que je mange dans mon resto mexicain habituel en Californie.
Cependant, la seule chose qui compte est que les plats sont chauds et épicés, car
c’est ce dont j’ai besoin après une soirée à regarder les plages défiler sous mes
yeux. Je passe la main par la vitre et je joue un moment avec le vent, pendant
que Taï tient ma main gauche en conduisant. Une douce musique hawaïenne
passe à la radio, dont la mélodie m’apaise, même si je ne comprends pas les
paroles.
— Quand penses-tu mettre fin à ta vie de célibataire ? je demande.
Il penche la tête sur le côté et ses lèvres se pincent.
— J’en rêve tous les soirs, mais je n’ai pas de réponse, déclare-t-il avec un
visage inquiet qui me dit que c’est un sujet qui le travaille énormément.
Taï est un de ces hommes qu’une femme pourrait décider d’épouser tout de suite
après l’avoir rencontré. Entre nous, il n’est question que de sexe et d’amitié, pas
d’amour et d’engagement, or je sais que c’est cet engagement que Taï désire
avec une femme.
— Que dit ta mère ? je demande en serrant plus fort sa main. Tu as dit qu’elle
voyait le futur. Quant à ce qu’elle a dit sur moi, eh bien… j’espère qu’elle a
raison.
— Tina dit que je rencontrerai ma partenaire quand je ne m’y attendrai pas,
soupire-t-il en baissant la tête timidement.
Il la relève lentement et me regarde avec des yeux pleins d’admiration.
— Au début, j’ai pensé que c’était peut-être toi.

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Je secoue vivement la tête.
— Je sais, je sais. Nous sommes faits pour être amis. De toute façon, Tina se
serait jetée sur toi si tu avais été la femme de ma vie. Je suis frustré d’attendre.
J’ai l’impression de ne vivre qu’une moitié de vie alors que l’autre est seule dans
la nature, sans moi.
Mon Dieu, cet homme est un saint et il mérite d’obtenir tout ce qu’il souhaite.
Les gens aussi gentils que lui, aussi bons et qui viennent de familles aussi solides
s’en sortent toujours.
— Tu la trouveras, j’en suis sûre.
— Tina m’a donné quelques indices, en fait.
J’écarquille les yeux et je me tourne dans mon siège pour mieux le voir.
— Dis-moi tout ! je m’exclame en lui mettant un petit coup de poing dans le
bras.
Il rit !
— Allez, qu’a dit Mesina sur l’amour de ta vie ?
Il frotte sa main sur son crâne.
— Elle a dit que ses yeux auraient la couleur de l’herbe fraîchement tondue et
que ses cheveux seraient dorés comme le soleil.
— Alors, on cherche une blonde aux yeux verts ? C’est génial ! je dis en riant.
— Ouais, mais ça veut dire qu’elle ne sera pas hawaïenne, dit-il en fronçant les
sourcils, ce que ma famille aura du mal à accepter.
Je caresse son épaule et je me rapproche pour m’appuyer contre lui.
— L’amour sincère l’emporte toujours, je réponds. Je crois simplement qu’il
faut affronter les épreuves et réussir les tests pour parvenir à sa fin heureuse.
— Tu crois ?
— Je le sais, je réponds en souriant et en embrassant son épaule.
— En attendant, je compte profiter un maximum de la belle brune qui vient de la
terre ferme, grogne-t-il en remontant sa main entre mes cuisses.
— Ça me semble une excellente idée, je réponds d’une voix pleine de désir.
*
* *

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Au lieu de tourner vers Honolulu et la plage Diamond Head où sont nos
bungalows, Taï tourne à gauche sur une route sinueuse qui serpente à travers les
bois et semble nous mener en haut de la colline.
— On va où ?
— Tu verras. Fais-moi confiance, répond-il.
Je boude en fronçant les sourcils.
— Eh, où est passé ton beau sourire, frangine ?
— Tu le verrais si on était à la maison en train de baiser, je rétorque.
— Crois-moi, ça en vaut la peine, répond-il alors que son regard s’embrase.
— Ce serait mieux qu’un orgasme signé Taï Niko ? J’en doute, je grommelle
d’un ton enjoué.
Ça fait plusieurs jours que je n’en ai pas eu et je commence à être sérieusement
en manque.
Taï finit par se garer dans un pré où les seules lumières proviennent de Honolulu
et de la lune. La vue est époustouflante, comme partout à Oahu, et je dois
reconnaître qu’elle vaut largement le détour que nous avons fait. Taï étend une
serviette de plage dans l’herbe et il m’assied dessus avant de retourner à la
voiture pour baisser les vitres et augmenter le volume de la musique hawaïenne.
La nuit est chaude et humide, mais pas au point que je me sente visqueuse.
Lorsqu’il revient, Taï tient une bouteille de champagne dans les mains.
— D’où tu sors ça ? je demande.
— Les vrais hommes ont des secrets qu’ils ne partagent pas avec leur femme.
J’éclate de rire en prenant le minuscule gobelet en carton qu’il me tend.
— Alors, je suis ta femme ?
Comme l’a dit sa mère, Taï ne peut pas craquer pour moi, et je ne peux pas
craquer pour lui. Notre relation est fun et amicale et elle ne peut pas aller au-
delà.
— Eh bien, pendant les dix-sept prochains jours, oui. Ensuite, ce sera à un autre
malheureux de te supporter.
— Espèce d’enfoiré ! je m’exclame en riant.
— Tu sais bien que je plaisante, répond-il.

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Nous restons à boire du champagne un moment, jusqu’à ce que je sois un peu
pompette et désinhibée, comme toujours avec le champagne. Du coin de l’œil, je
regarde Taï, plus sobre que moi puisqu’il va devoir conduire au retour, à moitié
allongé, appuyé sur ses avant-bras, admirant la vue. Je me tourne de côté et
j’effleure sa mâchoire du bout du doigt, lui faisant tourner la tête.
Je lèche mes lèvres en caressant les siennes, et le bout de sa langue sort pour
mouiller mon doigt. Il le mord, et je retiens mon souffle. Je ne savais pas qu’un
doigt pouvait être aussi sensible, or c’est comme si sa bouche était sur mon
clitoris. Il continue de le sucer et je sens ma culotte devenir de plus en plus
mouillée. Je referme mes jambes et je serre mes cuisses pour exercer une
pression à l’endroit où je désire tant le sentir.
— Ta fleur est mûre, dit Taï en promenant une main sur mes seins.
Il soulève ma jupe, et ses doigts se ruent sur mon clito, tournant autour avant de
plonger entre mes lèvres, et je m’allonge sur le dos alors qu’il me fouille de sa
main experte.
— Je sens ton nectar, frangine, susurre-t-il en ajoutant un doigt. Je peux le
goûter ? Ici, en pleine nature ?
Je hoche vivement la tête en agrippant ses épaules.
— Oui, je t’en supplie, je gémis quand il rajoute un troisième doigt entre mes
jambes.
— Et si je te déshabillais complètement et que je te baisais ici ? On t’a déjà prise
sur le capot d’une voiture, Mia ?
— Seulement sur une moto, je réponds d’une voix tremblante en secouant la
tête.
Je penche la tête en arrière quand il accélère le mouvement de ses doigts.
— Ah bon ? Tu me raconteras ça plus tard, grogne-t-il.
Il retire sa main pour me mettre debout devant la voiture, puis il baisse ma
culotte et la range dans sa poche. Il passe mon t-shirt par-dessus ma tête, j’enlève
sa chemise pour sentir sa peau parfaite sur mes tétons pointus, et je plaque
violemment ma bouche sur la sienne. Cependant, il rompt le baiser pour me faire
reculer et me soulever sur le capot encore tiède de la voiture.
— Allonge-toi. Je veux te voir allongée à poil sur le capot de ma Jeep.

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Je lui obéis, brûlante de désir, impatiente qu’il me touche… n’importe où.
— Occupe-toi de tes seins, moi je me charge de ta fleur et de ton nectar qui
coule déjà entre tes fesses.
Mon Dieu, ses paroles ont toujours pour effet de m’exciter davantage, et les
pulsations de mon clitoris s’intensifient.
Je m’empare de mes seins, je les palpe lentement et je suis sur le point de pincer
mes tétons quand Taï plonge sa langue en moi. Il grogne et je gémis, et je me dis
qu’à tous les deux, nous pourrions passer pour une meute d’animaux sauvages
en train de se battre dans la forêt. Lorsque Taï fait un cunni, c’est comme s’il
goûtait au plus savoureux des desserts pour la première fois de sa vie. Il lèche, il
suce, il mord, et il appuie partout où il faut. Il plaque ses lèvres charnues sur
mon clitoris et il tourne sa langue autour tout en écartant davantage mes jambes.
Il lève ses yeux noirs et nos regards se croisent. Il serre fort mes cuisses, ouvre la
bouche et pose sa langue à plat sur mon bouton de chair pour le frotter. Je gémis
et le supplie du regard de me faire jouir. J’essaie de soulever mon bassin, mais je
suis à sa merci. Lorsque sa bouche me quitte une seconde, je suis à deux doigts
de pleurer. Les larmes me montent aux yeux et mon corps se met à trembler sous
la pression qui s’accumulait et qui n’a plus d’échappatoire.
— Ne ferme pas les yeux. Regarde-moi te faire jouir, grogne-t-il.
Il suffit d’un dernier coup de langue pour que je me contracte des orteils aux
épaules tandis qu’un orgasme puissant parcourt mes veines. Je ne peux plus
bouger. Ses mains viriles et expertes ont immobilisé mes jambes. Au bout d’un
moment, je ne peux plus supporter de jouir ainsi et je pose mes mains sur sa tête
pour le repousser. Ses lèvres quittent mon bourgeon rouge et enflé comme une
cerise bien mûre. Je n’ai pas la force de le repousser davantage, mais Taï décide
d’enfoncer sa langue dans ma chatte. Il ne perd pas une goutte de mon essence,
s’acharnant à tout avaler, jusqu’à ce que je sois de nouveau sur le point de jouir.
Il décide alors de reculer pour enlever son short, laissant surgir sa queue qui
semble douloureusement gonflée. Je me redresse pour la prendre dans ma
bouche et lui renvoyer l’ascenseur, mais il secoue la tête. Il me tend une capote,
que j’ouvre avec les dents avant de la dérouler sur son énorme verge.

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Taï saisit mes genoux et les ramène brusquement sur ses pectoraux, si fort que je
dois plaquer mes paumes sur le capot pour tenir assise. Il positionne son sexe sur
le mien, puis il me pénètre violemment, m’arrachant un cri strident. Cet homme
est véritablement énorme. Quelques secondes plus tard, il tient plus fort mes
genoux pour aller plus profond encore, et je m’accroche autant que possible à ses
épaules et à son cou.
Soudain, il se retire et il me retourne pour que je sois agenouillée sur le capot.
J’allonge mon torse sur la tôle et je m’accroche au niveau des essuie-glaces alors
qu’il tire mes fesses vers lui. Il écarte mes lèvres, puis il me transperce de
nouveau, atteignant des points de mon vagin restés vierges jusque-là.
— Je veux laisser ma trace en toi pour que ma queue te manque quand tu
partiras, tu m’entends, frangine ?
— Oui, je gémis.
Son gland explore le moindre recoin de mon sexe, et des frissons de plaisir se
précipitent dans mes veines, parcourant mon corps dans une course effrénée
tandis que les parois de ma chatte commencent à se contracter.
— Ma bite te manquera ?
— Putain oui. Baise-moi, Taï ! je m’écrie.
Il ramène mon bassin à lui et je m’accroche de toutes mes forces au capot. Il
garde le même rythme enragé tout en posant son pied sur le pare-chocs de la
Jeep. Sa main descend à l’endroit où nos corps se rejoignent et il masse mon
clitoris. Quelques secondes suffisent pour me faire jouir de nouveau avec la
même intensité.
Je m’élève et m’envole, légère comme la brise, alors que quelque part sur terre,
Taï continue de me prendre comme une rock star, me punaisant au capot de sa
Jeep jusqu’à ce qu’il jouisse lui aussi dans un rugissement assourdissant.
*
* *
Lorsque je me réveille le lendemain, je ne me souviens pas du trajet du retour ni
de m’être couchée dans mon lit. Comme Taï l’a annoncé, mon minou est
douloureux et sensible au toucher. Même ma culotte irrite ce qu’il appellerait
mes « pétales ». Je souris sous la douche, laissant l’eau chaude apaiser ma peau.

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Toutefois, lorsque je baisse la tête, un juron m’échappe. Quatre petits bleus
ronds, de la taille d’une pièce de dix centimes, décorent le devant de mes
cuisses, et un dernier un peu plus gros les imite à l’arrière.
Bordel de merde. Comment je suis censée expliquer ça à un designer de maillots
de bain ? « Euh salut Angel, j’ai baisé à ciel ouvert, en haut d’une montagne, sur
le capot d’une voiture, hier soir. Et… tu sais, le Samoan géant que tu as
embauché ? Eh bien, les bleus sont de sa faute parce qu’il s’est un peu emballé
en broutant mon minou. »
Je vais me faire virer.
Lorsque j’arrive au shooting qui, heureusement, se déroule sur la plage près de
nos bungalows, je ne me suis pas encore calmée. Taï sourit jusqu’aux oreilles
quand il me voit.
— Salut frangine, tu as l’air…
Il ne termine pas sa phrase car je le fusille du regard. Je pose mon sac à main et
je l’ignore. Je sais que c’est une attitude puérile, mais j’ai trop honte de ce qui
est sur le point de se passer. Je n’ai vraiment pas hâte d’expliquer à Angel
D’Amico, cet extraordinaire designer que tout le monde s’arrache, qu’il va
devoir retoucher ses photos de moi pour cacher les bleus sur mes cuisses. Taï
pose sa main énorme sur mon épaule, que j’enlève brusquement avant de lui
lancer un nouveau regard assassin.
— Que s’est-il passé entre le moment où je t’ai couchée et maintenant ?
demande-t-il d’une voix inquiète.
— Ce qui s’est passé ? C’est toi ! Avec tes grosses mains ! j’aboie en soulevant
ma robe pour lui montrer les dix traces de doigts sur ma peau.
Je lève la tête, m’attendant à le voir plein de remords, or il se couvre la bouche,
essayant de cacher son rire.
— Tu te fous de moi ? je chuchote, indignée.
Je suis folle de rage, mais je veux rester professionnelle, je ne veux pas être cette
nana qui fait des scandales à ses shootings.
Raul apparaît à nos côtés, vêtu entièrement de blanc cette fois-ci. J’ai appris
qu’il n’était pas gothique, en fin de compte. C’est simplement que lorsqu’il
choisit une couleur pour la journée, il la porte des pieds à la tête. Aujourd’hui,

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c’est le blanc. Même ses Converses sont dans le thème. Les cheveux, eux,
restent violets, quel que soit le jour.
— Quel est le problème ?
— Rien, je réponds en dévisageant Taï.
— Elle a des bleus sur les cuisses, admet le coupable.
Si j’avais eu un couteau à portée de main, je crois que je le lui aurais planté dans
l’œil, mais les pinceaux à maquillage ne sont pas un mauvais plan B.
— On s’est un peu emballés hier soir, si tu vois ce que je veux dire, poursuit-il
en prenant Raul par l’épaule. Tu crois que tu peux réparer ça ?
— Faites-moi voir, répond le styliste.
Je lève les yeux au ciel en remontant ma robe. Raul s’agenouille, tient mes
jambes et regarde mes bleus de près.
— Il me faut dix petites cuillères au congélateur. Tout de suite ! crie-t-il par-
dessus son épaule.
— Je m’en occupe ! s’écrie la nana avec qui il sort depuis dix jours en se levant
d’un bond.
— Ne t’en fais pas, ma belle, dit Raul. Je vais éclaircir les bleus avec les
cuillères froides, puis je vais les cacher.
— Oh, Dieu merci. J’aurais détesté qu’Angel doive retoucher les photos.
Le regard de Raul devient noir tandis qu’il se relève.
— Ma belle, Angel D’Amico ne retoucherait pas plus la photo d’un mannequin
portant un de ses maillots qu’il ne tromperait sa superbe femme. C’est un artiste,
avant tout. Il ne corrigerait jamais ses photos. C’est important pour lui que la
photo soit originale.
— Ah, ok. Mais tu peux m’aider, n’est-ce pas ? je lui demande en lui faisant
mon plus beau regard.
Il m’invite à m’asseoir dans un fauteuil.
— Pour toi, je ferais n’importe quoi, répond-il en souriant.
— Merci Raul, je dis en me relevant pour l’embrasser sur la joue.
— Et moi ? C’est moi qui lui ai demandé, râle Taï dans mon dos.
Je grimace et rejette mes cheveux par-dessus mon épaule.

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— Ouais, mais c’est toi qui t’es acharné sur mes cuisses avec tes mains de Cro
Magnon !
Taï a enfin l’air désolé, mais ça ne dure qu’une seconde.
— Tu sais, je n’ai aucun remords. D’ailleurs, si j’en avais l’occasion, je
recommencerais. Tu vas me dire que tu regrettes ce qui s’est passé hier soir ?
Quand t’étais à poil sur le capot de ma voiture, les seins à l’air, mouillée
comme…
— Putain… grogne Raul en s’immobilisant, tenant un peigne au-dessus de ma
tête, le regard voilé et les joues légèrement roses.
— Merde, j’ai oublié que tu étais là, s’excuse Taï d’une voix sincère, cette fois-
ci.
— Euh, ce n’est rien. Et si tu me disais plutôt où tu t’es garé ? demande Raul.
— Bien sûr, mec, on en reparle plus tard. On se voit dans l’eau, me dit-il.
Aujourd’hui, on fait la pub des couples sexy qui se trifouillent sur la plage, dit-il
en jouant des sourcils.
— Tu es sérieux ?
— Absolument. Je vais pouvoir te tripoter toute la journée.
— Ce ne sera pas une première, je rouspète.
— Et ce ne sera pas non plus une dernière, frangine.

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Chapitre 7

Angel D’Amico est un génie. Grâce à lui, Taï et moi avons l’air d’un couple
qui est ensemble depuis des années. La lumière, le décor et les maillots de bain
sont tout simplement canon. Avec ses modèles, dont je suis la plus fine, puisque
les autres font du quarante-deux au cinquante, il présente au monde une nouvelle
façon pour les femmes de voir leur corps. Toutes les mannequins ont des formes
généreuses dont elles sont fières, et elles ont raison de l’être. Ce sont des femmes
superbes avec de vrais corps de femmes.
— Allez les filles, rapprochez-vous du beau gosse, dit Angel. Taï, pose une main
sur la fesse de Taylor et l’autre sur la hanche de Michelle. Mia, ma belle, tu
restes sur le côté et tu les regardes d’un air… comment dire… dégoûté.
Rosa, sa femme, positionne Taylor et Michelle comme le veut Angel.
— Mia chérie, viens ici. Mets tes mains sur tes hanches, voilà. Tu les regardes
avec un air digne, superbe, mais en colère. Marcia et Misty, venez ici, mes
poussins.
Les jumelles arrivent en courant, leurs cheveux auburn volant derrière elles.
— Oh, si, si, je vois, mon amour. Je vois ! Tu es un génie, tu mérites que je me
prosterne devant toi, dit Angel à sa femme.
— Quand ne te prosternes-tu pas à mes pieds, mon amour ? répond-elle en
souriant.
Il pose une main sur son cœur et, pendant plusieurs minutes, regarde sa femme
avec des yeux pleins d’amour.
— Au travail, lui dit-elle en recoiffant les jumelles.
— Si, si. Donc, Taï, tu t’es fait prendre la main dans le sac. Mais tu regardes les
jeunes filles aussi, et Miss Mia te surprend. D’accord ?

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Taï hoche la tête et empoigne Michelle et Taylor. Un éclat de jalousie saisit
soudain mes entrailles lorsque je le vois planter ses ongles dans leur chair.
Toutes les femmes prennent la pose et je m’exécute également. Je n’ai aucun
mal à avoir l’air en colère, tirant ma frustration des bleus laissés par Taï, du
sentiment d’impuissance vis-à-vis de mon père et de mon irritation à avoir vu
encore un autre magazine montrant Wes et Gina en train de s’embrasser. « Ce
n’est pas sérieux » – mon œil, oui ! J’ai pris le magazine en photo pour les
regarder chaque fois que je me sens légèrement coupable.
— C’est bien, Mia, tu projettes beaucoup de colère et de frustration, dit Angel en
prenant dix photos par seconde.
Soudain, Taï improvise et s’éloigne des autres mannequins qui ont l’air
surprises, et il tombe à genoux devant moi.
— Si, Taï, perfetto !
Il se penche pour embrasser ma cuisse, puis il saisit mes hanches et lève la tête
vers moi comme s’il était sincèrement désolé. Je caresse sa tête et il sourit,
confiant de m’avoir reconquise, mais je repousse ses épaules pour le faire
tomber sur les fesses. Je me tourne ensuite face à la caméra, je me déhanche et je
fais un clin d’œil à l’objectif.
Angel éclate de rire en laissant tomber la tête en arrière.
— C’est trop ! Celle-là sera pour le bêtisier !
Tout le monde suit son exemple et, lorsque nous recouvrons notre sérieux, nous
nous remettons au boulot. C’est une belle journée de travail. Bien évidemment,
Taï et moi nous rabibochons grâce au travail d’équipe et à la bonne humeur
ambiante. Nous partons main dans la main sur la plage pour regagner nos
bungalows. Demain, ma sœur et ma meilleure amie arrivent. J’ai hâte.
*
* *
Le taxi s’arrête devant mon bungalow, où Taï et moi attendons, assis sur le seuil.
Je me lève d’un bond quand Ginelle ouvre la portière. Elle court vers moi, puis
elle se jette dans mes bras, nous faisant tomber toutes les deux dans l’herbe.
— Espèce de garce ! Je n’arrive pas à croire que tu vis au paradis sans moi
depuis tout ce temps ! Mais je suis là maintenant, ma salope !

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Elle couvre mon visage de baisers et j’entends Mads glousser derrière nous.
Deux pieds bronzés et un mollet couvert de tatouages apparaissent dans le
champ de vision de Ginelle, et elle lève la tête, encore et encore.
— Jésus Marie Joseph. D’où vient cette belle bête ? Bon sang ! C’est ton client ?
me demande-t-elle.
Je secoue la tête, et elle regarde de nouveau Taï.
— J’espère que tu te tapes ce demi-dieu, poursuit-elle d’un air très sérieux.
Je hoche vivement la tête.
— Alors, je n’ai aucune chance de glisser sur cette vague hawaïenne, moi ?
Taï rit si fort que je suis surprise de ne pas voir les palmiers trembler autour de
nous.
Je secoue la tête en fronçant les sourcils.
— C’est toi qui as tous les mecs, c’est injuste ! rouspète-t-elle avant de se lever.
— Aloha, dit Taï en lui tendant la main. Tu dois être Ginelle.
— Tu as parlé de moi ? répond-elle en m’interrogeant du regard. En bien,
j’espère !
— Je l’ai surtout mis en garde, je dis en prenant la main de Taï pour qu’il m’aide
à me lever.
Aussitôt debout, je mets un coup de hanche à Gin pour atteindre mon adorable
sœur.
— Voici Madison, Maddy. Ma petite sœur, et la fierté de ma vie. Maddy, voici
Taï.
Maddy sourit jusqu’aux oreilles en rougissant.
— Tu vois ? Qu’est-ce que je t’avais dit, Taï ? je dis en désignant le visage de
ma sœur.
— La plus belle fille du monde, répond-il. Aloha, Madison.
— Exactement ! je m’exclame en l’attirant dans mes bras. Comment tu vas,
sœurette ?
Je recule pour étudier ces yeux verts qui ressemblent tant aux miens et je suis
satisfaite de voir qu’ils ont l’air heureux.
— Je vais bien. Super-bien, même si je m’inquiète pour papa, il n’a personne
pendant qu’on est ici. Mais Matt et sa famille vont passer le voir.

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Bien évidemment, parce que c’est la meilleure famille de l’univers. J’ai envie de
les détester tant ils sont parfaits, mais comme ma sœur va rejoindre leur clan
d’ici deux ans, je dois être indulgente. Par ailleurs, je ne peux pas leur reprocher
d’être des gens bien, si ?
— C’est gentil de leur part, je dis en la prenant par la taille. Est-ce qu’il y a du
nouveau ?
Maddy fait non de la tête alors que Taï prend leurs sacs, tous leurs sacs. En une
fois. Des frissons de désir me parcourent à la vue de sa virilité et de sa force. Je
me lèche les lèvres en admirant son superbe dos quand il nous précède dans mon
bungalow.
— J’aimerais que papa se réveille, admet Maddy en s’asseyant sur un tabouret
de bar.
Je fais le tour de la cuisine, sortant tout l’alcool et les jus de fruit, ainsi que le
mixeur, car les vacances sont synonymes de cocktails.
— Est-ce que les médecins savent pourquoi ce n’est pas le cas ? Son corps est
pourtant guéri.
Gin écarquille les yeux devant tout l’alcool à disposition.
— Les toubibs disent qu’il se réveillera quand son corps l’aura décidé. Mais ils
disent qu’avec le traumatisme crânien qu’il a eu, on ne doit pas se faire trop
d’espoir.
— Je suis désolée les filles, dit Ginelle. Je sais que vous angoissez.
Maddy se lève brusquement pour ouvrir la baie vitrée, et la brise océanique
s’engouffre dans la pièce, chassant la mauvaise ambiance. Ça va me manquer
quand je serai partie.
J’étudie les possibilités de cocktails et je choisis mes ingrédients. Ayant bossé
comme serveuse et barmaid pendant quelques années, je m’y connais. J’attrape
la vodka au citron, le schnaps à la pêche, le triple sec, puis les jus d’orange,
d’ananas et de citron vert. Je remplis quatre verres de glaçons sous le regard de
Taï, appuyé sur le bar, les bras croisés sur son torse massif, un air attentif sur le
visage. Ginelle ne se prive pas de le mater, ce qui ne semble pas le déranger,
avec un corps comme le sien et les métiers qu’il fait, il doit être habitué à se faire
reluquer.

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— Gin, sans rire, arrête de le dévorer des yeux !
Elle fait la moue et regarde ailleurs, mais deux secondes plus tard, ses yeux sont
de nouveau sur mon beau Samoan, attirés comme par des aimants.
— Gin ! je m’exclame lorsqu’elle se lèche les lèvres.
Elle ferme les yeux et appuie ses doigts sur ses paupières.
— Désolée, je suis désolée ! C’est juste que ça fait longtemps que je n’ai pas vu
un si bel homme. Tu es vraiment canon, Taï.
Il baisse un peu la tête en souriant.
— Tu n’es mal non plus, minus, dit-il d’une voix si basse et sexy que je mouille
ma culotte.
Quant à Gin, elle semble se liquéfier, d’ailleurs elle fait semblant de tomber en
pâmoison et je mets un coup de coude dans les côtes de Taï.
— Aïe ! Qu’est-ce que j’ai fait ? s’exclame-t-il.
— Tu l’encourages ! je réponds en le fusillant du regard.
Il éclate de rire alors que je finis de préparer nos cocktails, puis je les distribue et
nous levons tous nos verres pour trinquer.
— Au fun, au soleil… et à Hawaï ! je clame avant de trinquer et de boire une
gorgée.
— Vous êtes prêtes pour la plage ? demande Taï.
— Ah oui, les filles, il y a des maillots de bain pour tout le monde dans ma
chambre. Vous allez être folles quand vous allez voir tout ce que j’ai collecté au
boulot !
Maddy et Gin poussent des cris stridents et elles partent en courant dans la
chambre.
— Tu vas vraiment leur donner les maillots qu’elles veulent ? Ils sont haute
couture, ils valent sans doute quelques centaines de dollars chacun.
— Et alors. J’aime ces filles plus que tout, et surtout plus que l’argent et les
fringues de luxe. Il faut partager ses richesses, n’est-ce pas ? je dis, parce que
c’est justement ce qu’il fait avec sa famille.
Au fond du petit couloir, j’entends les cris de joie de ma sœur et de ma meilleure
amie. Cependant, cela semble vite déraper en bataille de chiffonnières comme
entre de véritables sœurs.

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— Tu es trop grande pour celui-là !
— Tais-toi, rétorque ma sœur. Tu es juste jalouse parce que tu es minuscule.
— Toi, tais-toi ! C’est toi qui es jalouse parce que je suis format pocket et que
tout le monde aime ce qui est petit !
Taï m’attire dans ses bras et appuie son front sur le mien.
— Frangine, ta famille est tarée.
— Inutile de me le dire, je le sais déjà, je réponds en riant.
Je l’embrasse tendrement et notre baiser dure un moment. Nos langues dansent
et ses mains descendent sur mes fesses pour les empoigner. Il appuie son
érection contre mon ventre et je pousse un grognement.
— On finit ça plus tard quand le décalage horaire rattrapera les filles ? Chez toi ?
— Avec plaisir.
*
* *
Le lendemain, Taï et moi avons un autre shooting photo, mais nous finissons en
milieu d’après-midi et nous retrouvons Gin et Maddy qui ont passé la journée à
bronzer. Ce soir, Taï nous emmène à un luau où lui et sa famille font un
spectacle. Cela va bientôt faire trois semaines que je suis là, et je n’ai toujours
pas vu Taï et sa danse de couteaux de feu. J’ai hâte. Je n’ai pas la moindre idée
de ce que c’est, mais ça a l’air exotique et excitant.
Gin, Maddy et moi sommes toutes les trois vêtues de robes longues et amples
dans des couleurs différentes, et nous laissons toutes les trois nos cheveux
lâches, décorés des fleurs que Taï nous a apportées. J’ai trouvé son geste
adorable et digne d’un gentleman – tout l’opposé de la manière sauvage dont il
m’a prise hier soir contre le mur de son salon puis sur la table de sa cuisine.
Apparemment, je lui avais manqué.
Nous arrivons à l’hôtel cinq étoiles où se déroule le spectacle pour lequel Taï
nous a eu des billets. Lorsque nous les donnons à l’entrée, je suis surprise de
découvrir que notre table est au premier rang.
Les serveurs nous apportent une variété de plats polynésiens, tous plus sublimes
les uns que les autres. Je découvre le véritable poulet teriyaki, je goûte un lau lau
de porc, du poï hawaïen, des légumes verts sautés, des rouleaux de taro, et nous

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finissons par un plateau des plus beaux fruits frais exotiques. Les fruits d’Hawaï
sont les meilleurs au monde – et je dis ça alors que j’habite en Californie, où
nous sommes gâtés dans ce domaine. Or je sacrifierais n’importe quoi pour
manger des mangues hawaïennes fraîches tous les jours.
— C’est délicieux, dit Maddy en avalant un énorme morceau d’ananas. Je
n’arrive plus à m’arrêter.
— Je sais, c’est dingue.
Gin, Maddy et moi dînons tranquillement et discutons avec les gens à côté de
nous tout en regardant le soleil se coucher. La scène est installée devant la plage
et l’océan afin que le public profite de la vue tant qu’il fait jour. Ce n’est qu’à la
nuit tombée que le spectacle commence. C’est alors que des tambours
retentissent, résonnant jusque dans ma poitrine.
Afano, le père de Taï, arrive sur scène, vêtu d’un minuscule paréo qui cache à
peine sa virilité. Ses tatouages sont magnifiques et des bracelets d’herbe sont
attachés à ses mollets, pendant sur ses pieds. Nous sommes tellement près de la
scène que j’entends le bruissement de l’herbe à chacun de ses pas.
Il présente les batteurs, alignés sur le côté de la scène, et ceux-ci se lancent dans
une démonstration de prouesses rythmiques qui réjouit le public. Il remercie les
spectateurs de s’initier à la culture samoane, puis il présente le premier spectacle.
Je suis surprise de voir toutes les femmes de sa famille, y compris Masina, la
mère de Taï, venir sur scène. Plus âgée que les autres, elle est vêtue d’un paréo
noué sur sa poitrine, alors que les plus jeunes n’ont un paréo que sur les cuisses,
avec des noix de coco sur les seins.
La musique commence et les femmes enchantent le public avec leur
chorégraphie. Je n’ai vu ce genre de danse qu’en film, et le hula mérite d’être
découvert en live. Les femmes Niko lèvent les bras au-dessus de leur tête et se
tournent d’un côté et de l’autre, se déhanchant gracieusement avec de petits pas
légers sous les yeux fascinés des spectateurs.
Après encore deux danses – encore plus compliquées – elles demandent des
volontaires, et Gin et moi levons le bras maigrichon de Maddy, à son grand
désarroi. Masina me regarde en me faisant un clin d’œil, je joins mes mains
devant moi comme pour prier et je baisse la tête pour la remercier. Les

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volontaires apprennent à danser et Maddy semble comprendre tout de suite. Cela
dit, je ne devrais pas être surprise car ma petite sœur est douée pour tout ce
qu’elle entreprend, y compris la danse. Masina lance la musique, et les
volontaires suivent leurs professeurs. Très vite, Maddy sourit jusqu’aux oreilles,
levant les bras en l’air comme si elle avait fait ça toute sa vie. Je suis folle de
joie de la voir aussi heureuse sur scène, consciente que c’est moi qui lui offre ce
souvenir. C’est la première fois qu’elle sort du Nevada, et c’est avec moi, pour
aller à Hawaï. Elle s’en souviendra longtemps et elle pourra en parler à ses
enfants, plus tard. Mon Dieu, faites que ce soit dans de nombreuses années. La
musique s’arrête, et le public acclame les danseuses, volontaires comme
professionnelles.
Les spectacles continuent et s’enchaînent, et plus le temps passe sans que Taï
n’ait fait son apparition, plus je deviens nerveuse. Les dernières démonstrations
sont souvent les plus dangereuses, non ?
Lorsqu’Afano revient sur scène, il est vêtu d’un costume différent – qui révèle
toujours autant de peau.
— Et maintenant, voici venu le moment que vous attendez tous. Il faut avoir le
cœur d’un guerrier pour manipuler les couteaux, et mes fils… dit-il en frappant
son poing sur sa poitrine… mes fils ont les cœurs les plus purs. Ils ont fait le
vide dans leurs esprits, et ils sont prêts pour vous présenter cet aspect de notre
culture. Fils ! rugit-il.
Taï et ses trois frères arrivent sur scène, vêtus de paréos rouge sang et de
bandeaux d’herbe sur les mollets et sur les coudes, tenant dans leur main un long
bâton. Taï se place devant, avec son père, et les trois autres se positionnent
derrière eux. Masina revient sur scène avec une torche en feu, vêtue cette fois-ci
d’une longue robe blanche qui vole dans la brise. Elle allume les deux bouts des
bâtons, tapote leurs joues un par un, et retourne sur le côté de la scène. Les
bâtons en feu illuminent les visages d’Afano et de ses fils, et ils se préparent,
écartant les jambes pour se baisser un peu.
— Mon Dieu, comment suis-je censée me contrôler lorsque j’ai toute cette chair
virile devant moi ? chuchote Gin.
— Tiens-toi bien, je réponds en lui mettant un coup d’épaule.

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— Je ne peux rien promettre.
Nous éclatons de rire, mais je ne quitte pas Taï des yeux. Mon cœur bat la
chamade quand Afano crie un ordre.
Les cinq hommes crient quelque chose qui ressemble à « Hut » et frappent leurs
pieds par terre. Puis ils font tourner les bâtons à bout de bras. Les couteaux de
feu. Je suis sur le point de mourir d’angoisse, déjà persuadée qu’ils vont tous se
brûler quand ils jettent en l’air les bâtons. Ils les rattrapent aisément, puis ils
serpentent les uns entre les autres sans cesser de faire tourner les torches dans
leurs doigts. Je les regarde sans respirer, une main sur la bouche, l’autre fermée
sur mes cuisses, morte de trouille.
Cependant, ils ne s’arrêtent pas là. Le père et les frères de Taï reculent jusqu’au
fond de la scène et tiennent les bâtons au-dessus de leur tête comme pour éclairer
la nuit. Les tambours retentissent et chaque boom résonne dans ma poitrine. Taï,
seul au milieu de la scène, jette son bâton à une dizaine de mètres au-dessus de
lui. Il fait un saut périlleux avant de le rattraper et de le passer autour de sa taille
puis entre ses jambes et dans son os. Ses bandeaux d’herbe pourraient prendre
feu à tout moment. Il roule le couteau de feu sur son cou et dans sa nuque, le fait
tourner comme un bâton de majorette, puis il lève un bras, main ouverte.
Derrière lui, Afano jette son bâton. Taï s’agenouille, un genou relevé, et attrape
le bâton dans sa main. Je retiens mon souffle en fermant les yeux. Quand je les
rouvre, il fait tournoyer les deux dans ses mains. Je le dévisage, abasourdie, alors
qu’autour de moi le public l’applaudit vivement.
Taï passe quelques minutes à faire différentes figures avec les bâtons – toutes
plus difficiles les unes que les autres – et le bruit des tambours devient de plus en
plus oppressant. Puis les frères crient « Hut » à chaque pas qu’ils font vers Taï,
frappant le sol avec leurs pieds, et, chacun leur tour, ils lancent leur bâton dans
les airs. Taï fait un flip sur le dos, jambes en l’air. Il rattrape d’abord les bâtons
avec la plante de ses pieds, puis il les passe dans ses mains. Lorsqu’il a rattrapé
les cinq bâtons, il se lève en les tenant de sorte à dessiner un « H » – deux dans
chaque main, à la verticale, et le dernier à l’horizontale entre ses pouces. Chaque
frère prend alors Taï dans ses bras, éteint les flammes et salue les spectateurs.

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Le public entier – composé de plusieurs centaines de personnes – se lève pour
applaudir et siffler les Niko. Afano fait revenir toute sa famille sur scène pour
saluer les spectateurs. Le regard de Taï est rivé sur moi et les larmes coulent sur
mes joues alors que j’applaudis si fort que j’en ai mal aux mains. Il dégaine le
sourire qui fait fondre le cœur et la culotte de toutes les femmes qui le croisent,
et une voix dans le micro annonce que le luau est fini.
— Ton mec de mai a un talent de dingue, dit Ginelle en me tirant contre elle.
Mon mec de mai.
Je suppose que c’est ce qu’il est, oui – comme Alec a été mon copain de février
et Wes celui de janvier. La plupart des femmes n’ont pas plusieurs copains dans
l’année, comme ça, mais il n’y a pas d’autre moyen d’appeler une relation
monogame d’un mois, avec des rencards et la rencontre des familles. Si je ne
peux pas dire que ces hommes à qui je confie mes rêves et mes secrets, et aux
côtés de qui je m’endors toutes les nuits, sont mes petits amis, alors je ne sais pas
ce qu’est la définition d’un copain.
— Oui, je sais. Allons le remercier pour les billets.
Nous allons en coulisse où je trouve Taï vêtu d’un short de bain – et rien d’autre
– le torse huilé, ce qui met en valeur tous ses muscles.
— Tu crois que je peux avoir un des frères ? demande Gin en regardant les trois
hommes occupés à la reluquer.
Tao, le frère aîné, mate Gin comme si elle était un morceau de viande juteuse et
qu’il était affamé. À voir Ginelle, le sentiment est réciproque.
— Fonce, ma pute. Fais-lui perdre la tête.
— Bon sang, vous me faites regretter Matthew, soupire Maddy alors que Taï
vient vers nous.
— Tu as aimé le spectacle ? demande-t-il.
Je hoche la tête sans un mot. Je suis si excitée que mon sang bout déjà dans mes
veines et que ma culotte est trempée. Je me jette dans ses bras et il me serre
contre lui quand ma bouche s’écrase sur la sienne. Il pousse un grognement et
suce mes lèvres alors que je le dévore sauvagement en frottant mon sexe contre
son érection.

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— Frangine, grogne-t-il. Ce n’est pas le lieu pour ça. Mais ne t’en fais pas, on
continuera à la maison quand les filles seront couchées. Je vais te torturer et te
faire hurler de plaisir pour m’avoir fait bander maintenant alors que je ne peux
pas te prendre. Prépare-toi à enflammer les draps, promet-il.

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Chapitre 8

— Mon Dieu, non ! Je ne peux plus, stop… je… putain ! Prends-moi ! je


hurle.
Je presse mes hanches sur la bouche de Taï et je tiens sa tête dans mes mains
alors qu’il tient mes fesses. Il m’arrache un énième orgasme, ce que je ne pensais
pas possible. J’ai cessé de compter le nombre de fois qu’il m’a fait jouir avec sa
langue. Tout ce que je sais, c’est que s’il ne met pas bientôt sa verge épaisse en
moi, je vais céder à l’épuisement et je vais m’évanouir.
Taï pousse un grognement rauque, comme un animal. Je connais désormais le
bruit qu’il fait quand il est sur le point de perdre la tête et de plonger son sexe en
moi. Il me retourne sur le ventre et soulève mes hanches pour me mettre à quatre
pattes.
— Accroche-toi à la tête de lit. C’est trop tard. Il faut que je te baise, et ça ne va
pas être joli.
Il saisit ma taille, appuie son gland à l’entrée de ma chatte trempée et il me
pénètre lentement, centimètre par centimètre. Je retiens mon souffle, m’attendant
à ce qu’il se déchaîne sur mon sexe, mais je suis surprise que ce ne soit pas le
cas.
— C’est ça, tout doucement, mouille ma bite avec ton minou juteux, susurre-t-il.
Ses allers-retours sont lents, et j’en profite pour calmer ma respiration. Je baisse
la tête pour voir la capote couverte de mon essence, puis je touche l’endroit où
nos corps se rejoignent.
— Oui, frangine. Tu aimes me sentir déchirer ta fleur, hein ? C’est la plus belle
chose sur terre.

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Il remonte une main sur mon sein pour le palper et titiller un téton, et je recule
mon bassin pour rencontrer le sien.
— Quoi ? Qu’est-ce que tu veux ? Tu dois me le demander, haole.
Je déteste qu’il m’appelle étrangère et il le sait, et c’est pour ça qu’il le dit
pendant que nous faisons l’amour. Cela dit, on ne peut pas vraiment dire que Taï
et moi fassions l’amour. Pas une seule fois nous n’avons pris notre temps avec
des bougies, des chocolats ou ce genre de cliché romantique. Le moment qui
s’en rapproche le plus a été la semaine dernière quand il m’a prise sur le capot de
sa Jeep après qu’on avait bu du champagne. Donc non, Taï et moi baisons, et ce
avec un abandon total. C’est une chose que j’adore chez lui. Nous sommes amis,
et nous le resterons après que je l’aurai quitté pour ma prochaine aventure, mais
pour l’instant, je profite qu’il me punaise à sa tête de lit avec sa queue énorme.
— Baise-moi avec ta grosse bite hawaïenne ! je grogne en reculant les hanches
pour m’empaler sur sa verge.
— Tu es prête à marcher bizarrement, demain, frangine ?
— Est-ce que mon cul est blanc ? je réponds en frétillant des fesses et en le
regardant par-dessus mon épaule.
Ses yeux sont rivés dessus, et il resserre sa poigne sur ma taille.
— Oh que oui ! dit-il en s’enfonçant davantage en moi pour atteindre ce point
que seule sa queue peut toucher.
— Alors, ne pose pas de questions idiotes, je réponds.
Bon sang, les hommes posent toujours des questions idiot…
— Putain !
Ma chatte se resserre sur lui alors qu’il la pulvérise. Je pousse un cri, mais aucun
son ne sort. Ses couilles frappent ma chair enflée à chaque aller-retour, ajoutant
une légère douleur qui est si délicieuse que je me redresse et me cambre. Taï
descend sa main sur mon ventre et pince mon clito entre ses doigts, donnant lieu
à une pression si intense que je finis par céder et par jouir violemment, tremblant
de tout mon corps. Ses mains me tiennent contre lui, le temps qu’il atteigne lui
aussi le nirvana en poussant un rugissement digne d’un lion, si fort que je ne
serais pas surprise qu’il réveille Gin et Maddy dans la maison mitoyenne.
C’est la dernière chose à laquelle je pense avant de m’évanouir.

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Lorsque je reprends connaissance, il est en train d’essuyer mon sexe avec un
gant d’eau tiède.
— Je t’ai fait mal ? demande-t-il avec un regard froid et vide.
Je secoue la tête.
— Tu veux retourner dans ton lit ?
Je secoue de nouveau la tête, n’ayant toujours pas retrouvé ma voix.
— Tu es sûre ? il insiste d’une voix tremblante qui m’inquiète.
Il s’assied sur le lit à mes côtés et je rampe jusqu’à lui pour me blottir dans ses
bras.
— Tu ne m’as pas fait mal, Taï.
— Tu t’es évanouie, dit-il.
Sa voix est si pleine d’émotion que je quitte la chaleur de ses bras pour le
regarder dans les yeux. Je prends son visage dans mes mains et je l’oblige à me
regarder pour qu’il voie que je suis sincère.
— Taï, j’ai rarement pris autant de plaisir et je m’en souviendrai jusqu’à ma
mort. Tu ne m’as pas fait mal. Je me suis arrêtée de compter à six orgasmes. Six.
C’est inouï.
Je ne lui dis pas que je connais deux autres mecs qui seraient capables d’un tel
score, car avec Taï, c’est véritablement unique. L’intensité est différente, les
membres aussi, les paroles, les pensées. Tout ce que nous vivons au lit est génial
et spécifique à Taï.
— Mia, j’ai perdu le contrôle, dit-il en plongeant sa main dans mes cheveux.
Je secoue la tête et lui réponds en souriant.
— On s’est tous les deux emballés. Tu as dit que j’allais mettre le feu aux draps,
non ? Eh bien, je crois qu’on peut dire que je les ai enflammés, pas toi ?
Il penche la tête sur le côté et respire profondément.
— Du moment que tu vas bien…
— Chéri, je vais mieux que bien. Laisse-moi dormir et je serai prête à remettre le
couvert. Mais cette fois… c’est moi qui serai dessus !
Taï éclate de rire, m’allonge dans les draps frais et me tient contre son corps
chaud. Épuisés, nous sombrons immédiatement dans un profond sommeil.

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Lorsque je me réveille le lendemain, le soleil brille dans mes yeux et j’entends le
bruit des vagues. Je suis caressée par la brise océanique et j’ai la tête d’un beau
Samoan entre les jambes.
Hawaï.
C’est le plus beau mois de toute ma vie.
*
* *
Heureusement, mon walk of shame1 n’est pas très long puisque Taï et moi
sommes voisins. J’entre chez moi pieds nus, mes sandales à la main, et je tombe
sur Maddy qui se sert un café en me regardant. Oups.
— Tu as passé une bonne nuit ?
Je souris et je sens une vague de chaleur recouvrir mes joues.
— Ma Mia rougit ? Wouah. Serait-ce d’avoir crié « Baise-moi avec ta grosse
bite hawaïenne » que tu souris si grand ce matin ?
Je reste bouche bée si longtemps que je pourrais avaler toutes les mouches de
l’île.
— Oui, grande sœur, j’ai tout entendu. Savais-tu que la chambre d’ami partage
un mur avec… le lit de Taï ?
Maddy rit si fort que son visage en devient rouge cramoisi.
— Euh… je… je ne sais pas trop quoi dire.
— Il a fallu que j’aille dormir dans ton lit. Bon sang, j’ai hâte de baiser comme
ça toute la nuit. Par curiosité, est-ce que tu as mal à la chatte ?
Je m’assieds sur un tabouret, pose mes sandales sur le bar et me sers une tasse de
café.
— Tu veux vraiment parler de ça ? je demande en grimaçant alors qu’elle hoche
la tête. Dans ce cas oui, je suis courbaturée, mais ce n’est que du bonheur.
Je pose une main sur mon front et je masse mes tempes tandis que Maddy
promène son doigt sur le dessus de sa tasse.
— Matt et moi avons fait l’amour une dizaine de fois et ça n’a jamais été comme
ça, dit-elle en rougissant sans lever les yeux. Je ne dis pas que ce n’est pas bien,
au contraire, mais je ne crie jamais comme ça. Peut-être que je fais quelque
chose mal ?

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— Oh non, ma chérie, non, je réponds en posant ma main sur la sienne.
— Mais je n’ai jamais entendu Matt hurler de plaisir, non plus. D’habitude, il me
dit juste qu’il m’aime et il grogne un peu.
Je me penche pour cogner plusieurs fois mon front sur le plan de travail. La
dernière chose dont j’ai envie, c’est de parler de sexe avec ma petite sœur. C’est
dans des moments comme celui-ci que je déteste encore plus ma mère. C’est elle
qui devrait avoir cette conversation avec sa fille, pas moi.
Toutefois, je me redresse, je lève le menton et je jette mes cheveux en arrière,
prête pour une conversation qui promet d’être gênante, mais qui est néanmoins
nécessaire. Mads veut savoir comment donner du plaisir à son mec. Je suis sa
seule influence féminine, je vais la guider dans la bonne direction. Que Dieu me
vienne en aide.
— Allons nous asseoir sur la terrasse.
Elle se lève d’un bond, prend l’assiette de fruits qu’elle a dû couper hier, et
l’emporte sur la table de jardin. Heureusement, mes lunettes de soleil y sont
encore, alors je les mets et j’étends mes jambes sur la chaise en face de la
mienne. Maddy s’assied en face de moi, attendant patiemment pendant que je
cherche quoi lui dire.
Je gonfle lentement mes poumons, puis je les vide avant de me lancer.
— Ok. Ce que j’ai appris, c’est que les hommes aiment que leur partenaire soit
active. Donc, ne te contente pas de rester allongée sur le dos. Touche-le,
embrasse-le, fais ce qui te semble naturel.
Elle hoche la tête, silencieuse.
— Est-ce que vous avez essayé autre chose que la position du missionnaire ? je
demande.
Je pousse un grognement et je me remonte le moral en levant la tête pour laisser
le soleil réchauffer mon visage.
— Non, dit-elle en fronçant les sourcils. Mais j’aimerais bien. Comment tu leur
dis que tu veux essayer autre chose ?
Ouf, une question facile.
— Parle-lui en quand vous êtes seuls mais que vous ne faites pas l’amour. Par
exemple, après manger. Assieds-toi avec lui et parle-lui de tes désirs.

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— Mais je ne sais pas quels sont mes désirs.
Je me mords la lèvre et je gonfle ma poitrine. Je peux le faire.
— Eh bien… quand vous êtes sur le canapé, mets-toi à cheval sur lui, et puis…
tu sais… chevauche-le.
J’ai un haut-le-cœur violent et je ravale ma bile. Bon sang, c’est affreux. Des
perles de sueur couvrent mon front et je meurs soudain d’envie de me jeter dans
l’océan et de me laisser emporter par les vagues.
— Les hommes aiment ça ? Qu’une femme s’asseye sur eux ?
Je hoche la tête.
— Ouais. Ce sera bon pour toi, aussi, mais vas-y doucement parce que c’est plus
profond comme ça.
— Plus profond ! s’exclame-t-elle en écarquillant les yeux. J’ai déjà l’impression
que Matt me déchire en deux !
Eh bien, au moins, son prochain coloc est bien loti. Quand elle s’habituera à
faire l’amour, ce sera un point de plus pour le bon vieux Matt.
— Quoi d’autre ? demande-t-elle.
— Bon sang, tu ne regardes jamais de films porno ? je grogne.
Elle secoue la tête.
— Très bien, alors… essaie la levrette. Tu te mets à quatre pattes et il te prend
par-derrière. Essayez ça.
Si elle avait un stylo et un papier sur elle, elle aurait tout noté. Ma sœur prend
toujours des notes et elle aborde toujours une nouvelle situation de manière
scientifique.
— Et… qu’est-ce que tu ressens ? demande-t-elle.
Mes épaules se relâchent et je soupire.
— C’est bon. Très bon. C’est comme ça que Taï me prenait hier soir quand on
s’est un peu emportés.
Elle sourit timidement, puis rougit de nouveau.
— Tu sais, vous avez juste besoin de vous explorer l’un l’autre. Faites ce qui
vous semble bien et ne vous inquiétez pas de ce que font les autres, de comment
ils le font ni de savoir s’ils font plus de bruit que vous dans la chambre. Ce qu’il

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y a entre Matt et toi ne regarde que vous, et à l’évidence ça lui plaît puisqu’il t’a
passé la bague au doigt ! je m’exclame en riant.
Son sourire est si rayonnant que j’aurais presque besoin d’une deuxième paire de
lunettes de soleil.
— C’est vrai, répond-elle.
— Alors, ne t’en fais pas. Matt et toi trouverez votre façon de faire. Tu n’as pas
besoin que je te dise comment donner du plaisir à un mec. Il n’y a que toi qui
peux savoir ce qu’il aime et ce qu’il n’aime pas. Sois honnête avec lui. Parle-lui
des choses auxquelles tu penses et de tes fantasmes. Et pour l’amour de Dieu, lis
des bouquins sexy ou quelque chose comme ça – je suis morte de honte !
Maddy se met à glousser comme la jeune femme de dix-neuf ans qu’elle est, et
je réalise soudain qu’elle ne l’est plus pour longtemps. Mince, quel jour
sommes-nous ? Les Hawaïens ont leur propre rythme de vie et les jours passent
sans que l’on s’en rende compte.
— On est quel jour ?
— Le dix-neuf mai, répond-elle en souriant.
Merde. Elle a vingt ans demain.
— Il faut qu’on t’organise une méga-fête !
— J’ai hâte d’avoir vingt ans, répond-elle en gigotant sur sa chaise, même si
Matt est dégoûté de ne pas pouvoir fêter ça avec moi.
— Oh, ne t’en fais pas, il aura tous tes autres anniversaires. Ton vingtième est le
mien, comme tous les autres, avant.
S’il y a une chose dont je me suis toujours assurée durant l’enfance de Maddy,
c’est de fêter son anniversaire comme il se doit. Notre mère est partie quand elle
avait cinq ans, et même si je n’avais que onze ans, j’ai fait tout ce que j’ai pu
pour que son sixième anniversaire et les suivants soient aussi beaux que
possible, même si nous n’avions pas beaucoup d’argent. Il faut que je parle à Taï
de ce que l’on peut faire. Je veux qu’elle se souvienne de son vingtième
anniversaire toute sa vie.
J’entends la porte s’ouvrir derrière moi. Pensant que c’est Taï, je me tourne en
lui faisant un signe de la main. Cependant, c’est Gin qui est, là vêtue de la même

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robe qu’elle portait hier soir au luau. Cette garce fait son propre walk of shame,
génial !
— Salut Gin ! Moi qui pensais que tu dormais encore, je dis d’une voix réjouie
tandis qu’elle s’assied à côté de moi, ses cheveux blonds brillant au soleil.
Elle prend ma tasse de café et s’empresse de la boire. J’en profite pour étudier
son visage et son corps : je vois des marques rouges dans son décolleté et dans
son cou, ainsi qu’un suçon sous son oreille. Quant à sa bouche, elle semble avoir
doublé de taille.
— Tu as passé une bonne nuit ? demande Maddy, répétant la question qu’elle
m’a posée il y a quel-ques minutes.
— Quoi ? grogne Gin en se couvrant les oreilles. Vous êtes obligées de parler si
fort ?
Mon Dieu, c’est merveilleux ! Elle a la gueule de bois, en plus ? J’adore !
Je me redresse dans ma chaise et je ramène mon genou sous mon menton.
— Alors, ce n’est pas pour rien que tu as l’air d’avoir été baisée comme une
reine ?
Gin joue des sourcils avant de s’étirer en souriant.
— Oh que non ! répond-elle. Si ton Taï est comme son frère Tao… waouh,
soupire-t-elle en s’éventant. Il m’a prise de six façons différentes avant de
recommencer à zéro. Jamais de ma vie… Je ne veux plus jamais partir. Je veux
rester à Hawaï pour devenir son esclave sexuelle. Je laverai sa maison et je lui
ferai à manger, et il peut me payer avec sa bite.
Je lui reprends ma tasse, et elle fait la moue.
— Bon sang, Gin, fais gaffe à ce que tu dis, tu veux ? je gronde en désignant
Maddy.
— T’es sérieuse, Mia ? rétorque ma sœur. Après la conversation qu’on vient
d’avoir ?
— Quelle conversation ? demande Gin.
— Eh bien, Mia a passé une nuit similaire à la tienne. Sauf que j’entendais tout
ce qu’elle disait. Ou plutôt, qu’elle criait.
— Espèce d’hypocrite ! s’exclame Gin en me fusillant du regard.
— Tais-toi ! Je ne savais pas qu’elle entendait !

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Je croise les bras sur ma pauvre poitrine endolorie, et mes tétons hurlent de
douleur. Taï a été un véritable aspirateur, hier soir.
Maddy continue de parler pendant que Gin et moi nous chamaillons. Elle y est
tellement habituée que ça ne la dérange pas le moins du monde.
— Alors, j’ai demandé à Mia des conseils pour satisfaire un mec. Tu sais, Matt
et moi n’avons fait l’amour qu’en missionnaire, alors… elle m’a donné des
astuces.
Ginelle trouve cela parfaitement hilarant et elle éclate de rire en donnant des
coups de pied dans le vide et en agitant les bras. De loin, on pourrait croire
qu’elle apprend à nager.
— Et comment tu as géré ça ? demande-t-elle en cherchant mon regard. Je parie
que tu préférerais te faire harponner par un tisonnier brûlant que d’avoir cette
conversation, dit-elle en riant et en caressant mon bras.
— Je te déteste, je réponds en dégageant sa main.
— Arrête, je sais que tu m’aimes ! s’exclame-t-elle en levant ma main et en
faisant mine de mordre mon bras, de mon poignet jusqu’à mon épaule.
Je ne peux m’empêcher de rire et je la repousse gentiment. Je ne pourrai jamais
rester en colère contre Gin. Il n’y a personne que je préférerais avoir à mes côtés
pour traverser les obstacles dans ma vie.
— Tu sais, tu peux me demander, Mads. Je serai ravie de te faire connaître les
merveilles du sexe. Je peux t’expliquer comment sucer un mec si bien qu’il te
suppliera de faire preuve d’indulgence…
Maddy écarquille les yeux et rapproche sa chaise de la table, comme si elle était
sur le point de découvrir un secret.
— C’est hors de question ! je gronde.
— Oh, allez… Ne fais pas ta rabat-joie, Mia. Il faut bien que Maddy apprenne à
sucer si elle veut garder son homme.
Ginelle se tourne vers Maddy et prend sa main.
— Ma chérie, laisse-moi te dire tout de suite que les hommes adorent que tu
avales. Ça ne les gêne pas que tu craches, mais il y a quelque chose dans le fait
de te voir avaler leur semence gluante qui les excite.
Je me lève et je couvre la main de Ginelle avec ma main.

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— Ginelle va arrêter de dire n’importe quoi. Il est temps d’aller se doucher,
maintenant.
Je la tire de sa chaise et je soulève son corps minuscule dans mes bras.
— Sérieusement. Mets-toi à genoux et prends la queue de Matt aussi loin que tu
peux dans ta gorge, poursuit Gin alors que je l’emmène vers l’océan.
Maddy doit nous suivre, parce que ma meilleure amie ne se tait toujours pas.
— Quoi d’autre ? glousse Maddy.
— Prends ses hanches et laisse-le te tirer un peu les cheveux pour baiser ta
bouche. Mais quoi que tu fasses, rentre les dents…
C’est le dernier conseil qu’elle offre à ma petite sœur avant que je la jette à l’eau.
Elle émerge en riant et en crachant l’eau salée puis, flottant à la surface, elle
laisse les vagues la rapprocher de la plage.
— Viens, on va petit-déjeuner, je dis en prenant Maddy par le bras.
— Tu penses qu’elle va bien, demande ma sœur en regardant par-dessus mon
épaule.
— Laisse-la refroidir un peu, elle ira mieux après.
Au loin, alors que nous traversons la plage pour rentrer à la maison, nous
entendons Ginelle rire toute seule en éclaboussant l’eau comme une enfant.

1. Marche de la honte  : expression qui fait référence au fait de ne rentrer chez


soi que le lendemain d’une soirée après avoir passé la nuit avec un inconnu.

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Chapitre 9

Un océan de verdure s’étend à perte de vue dans la vallée. De chaque côté, les
montagnes sont si hautes que je dois pencher la tête en arrière pour en voir les
sommets. Le brouillard et les nuages tourbillonnent dans les coins les plus
humides, comme du coton accroché à un scratch. Nous suivons Taï et Tao
jusqu’au cœur de la vallée, puis nous coupons le moteur de nos quads. Tout est
beau à Hawaï mais, ici, j’ai l’impression de découvrir un joyau de la nature,
caché du reste du monde et sans doute un des rares endroits sur terre préservés
de l’homme.
Assis sur son quad, Tao sort un petit ukulélé de son sac à dos et commence à
jouer « Drob, Baby, Drop » de Manao Company, fredonnant l’air avec sa grosse
voix de baryton. Je ne connaissais pas cette chanson jusqu’à l’autre soir, quand
Taï l’a passée dans sa chambre.
Je ne suis pas la seule à être apaisée par le cadre et la musique. Maddy se
balance de gauche à droite, assise sur son véhicule, mais elle rompt le charme
lorsqu’elle glousse. Apparemment, ma partie préférée du morceau est aussi la
sienne : « Je t’aime comme une mangue » chante Tao.
Taï prend alors ma main et me tire contre lui.
— Tu pars dans deux jours, chuchote-t-il en me serrant dans ses bras et en me
faisant valser doucement.
— Oui, je réponds en portant sa main à ma bouche pour l’embrasser.
— Et si je ne veux pas que tu partes ? demande-t-il d’une voix chargée
d’émotion qu’il emploie peu souvent.
— Tu sais que je ne peux pas rester, je dis en frottant mon nez contre son cou,
respirant son odeur d’océan, de feu et de bois.

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Il a dû répéter sa chorégraphie ce matin.
— Mais c’est bien de savoir que je veux que tu restes, non ? Même si tu ne peux
pas ? dit-il en appuyant son front contre le mien.
— Oui, bien sûr. Je ne veux pas partir non plus, Taï. Mais tu sais que nous ne
sommes pas faits pour être ensemble.
Il soupire et m’embrasse tendrement et tristement, regrettant le futur que nous
n’aurons jamais ensemble. Il me serre plus fort contre lui et j’en fais de même,
voulant graver ce moment dans ma mémoire. Ce n’est pas par amour que nous
nous accrochons ainsi l’un à l’autre mais par amitié, par désir, et aussi par
facilité. Avec Taï, les choses sont simples. C’est le mois le plus paisible que j’ai
passé avec un homme.
— Tu sais, un jour, un homme tombera à genoux à tes pieds et il suppliera le
Ciel de te garder à ses côtés à jamais.
— Je l’espère, oui. Et toi, tu ne penses pas que l’amour de ta vie est au coin de la
rue ?
Il niche ma tête dans son cou et nous continuons à danser, comme si nous étions
seuls au monde, bercés par la musique.
— Parfois, je me dis que je ne trouverai l’amour que dans une autre vie,
chuchote Taï.
Je recule le visage et je prends le sien dans mes mains.
— Ne dis pas ça. Tu le trouveras. Je te le promets.
*
* *
Après notre balade en quad, Taï nous emmène au Kualoa Ranch où Akela, son
ami, nous donne des chevaux. Il nous fait une visite de son domaine qui s’étend
sur presque quarante mille hectares.
Maddy a d’abord un peu de mal à guider son cheval, mais elle finit par y arriver.
Quant à moi, je traite Bouton d’Or avec autant de tendresse que Suzi, ma moto.
Je la caresse, je lui chuchote à l’oreille et je tresse sa crinière pour qu’elle me
ressemble. Chaque fois que je regarde Taï et qu’il me voit faire des papouilles à
la jument, il ferme les yeux et secoue la tête. Peu importe. Je n’ai jamais eu

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d’animaux et, perchée sur ma monture, je suis aussi heureuse qu’une gamine le
matin de Noël.
— Laisse-moi tranquille, je grogne avant de caresser Bouton d’Or entre les
oreilles.
J’explique ensuite à l’équidé que Taï a beau être un des hommes les plus canon
de la terre, cela ne lui donne pas la permission de faire tout ce qu’il veut. Je la
préviens ensuite qu’elle doit se méfier des beaux gosses tatoués et faire attention
parce que je vois que le bel étalon noir lui fait de l’œil.
Ginelle arrive en trottant sur son cheval comme si elle avait fait ça toute sa vie.
— Quoi ? demande-t-elle lorsque je la regarde d’un air impressionné. Je ne vois
pas de différence avec les hommes. C’est avec ses cuisses qu’on exerce le
contrôle, n’est-ce pas, Bébé ? dit-elle en tapotant la croupe de son cheval.
— Je peux attester de ce qu’elle dit, ricane Tao en arrivant à ses côtés. Tu
pourrais casser des noix de coco entre tes cuisses.
Elle lui sourit et joue des sourcils.
— Vous êtes dégoûtants, je grogne en levant les yeux au ciel.
— C’est vrai, ça ! s’exclame-t-elle. Je parie que je peux ouvrir des noix de coco !
On devrait essayer, ce soir, tu ne crois pas mon grand ? susurre-t-elle alors que je
fais mine de vomir. Quoi ? Il faudrait que tu sois la seule à avoir un beau
Samoan entre les jambes ? C’est hors de question ! Je vais chevaucher cet
homme comme je chevauche cet étalon !
— Quelle salope, Gin !
— C’est toi qui dis ça ? Alors que tu étais au pieu avec Taï un jour après l’avoir
rencontré ?
Je la fusille du regard en repoussant ma natte dans mon dos.
— Comment tu sais ça, toi ?
— Ha ! Je le savais ! s’exclame ma meilleure amie en écarquillant les yeux. Tu
es aussi chaude que moi, avoue-le ! Je n’ai aucun scrupule à admettre que j’ai
sauté sur cette délicieuse occasion, dit-elle en dévorant Tao des yeux. D’ailleurs,
j’ai envie de baiser rien qu’en le regardant, pas toi ? ricane-t-elle. Sérieusement,
Tao, j’ai vraiment envie de baiser, susurre-t-elle.

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Elle soupèse ses seins puis elle les masse pour faire rire Taï. Je frappe son bras,
manquant la faire tomber de son cheval.
— Meuf, arrête, on dirait une chatte en chaleur.
Elle commence à peine à ouvrir la bouche que je sais qu’elle va faire un
commentaire sur sa chatte, et je m’empresse de l’arrêter.
— Je ne veux rien savoir de ton minou !
Elle ferme la bouche et fait la moue.
— T’es pas drôle.
Je secoue la tête, puis je trotte jusqu’à Maddy et Akela. Ma petite sœur l’écoute
attentivement parler du ranch, de la terre, des arbres et des tournages de films qui
ont eu lieu ici. Apparemment, Jurassic Park en fait partie ! Fascinée, Maddy lui
pose des questions, commente ce qu’il dit et relate ce qu’elle a appris dans ses
cours de botanique. Un sentiment de fierté extrême m’envahit en l’entendant
parler et je suis épatée qu’elle connaisse le nom d’autant de plantes ainsi que ce
qu’elles font, d’où elles viennent, en plus de savoir leurs usages médicinaux et
ainsi de suite.
— Ta sœur est très instruite pour quelqu’un d’aussi jeune, dit Taï.
— Oui ! Je me suis assurée qu’elle ne fasse qu’étudier après son bac avec la
meilleure note du lycée. Moi, je l’ai eu de justesse parce que j’avais deux boulots
pendant que j’étais à l’école.
— Je comprends. Ma famille fait des spectacles depuis que je suis tout petit,
mais Tina a toujours veillé à ce que cela ne gêne jamais notre scolarité. Elle
voulait que ses enfants aient le choix. Cela dit, aucun de nous n’a jamais quitté
l’île ni pour travailler ni même pour les vacances. Je crois qu’aucun de nous ne
veut sauter le pas. Nous vivons pour être ensemble.
— Moi, je vis et je travaille pour elle, je réponds en désignant Maddy. Mais
j’aimerais trouver quelque chose qui soit à moi et à moi seule. Je te le dirai si ça
arrive, je rajoute en ricanant. Tu n’as jamais peur que ta partenaire n’habite pas
sur l’île et que tu ne la rencontres jamais ?
— Si, tout le temps, répond-il en baissant la tête. Surtout depuis que Tina m’a dit
que ma femme serait blonde aux yeux bleus. Ce ne sont pas des traits communs
à Hawaï.

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Il a raison, les Hawaïens, les Samoans et la plupart des Polynésiens qui sont nés
dans les îles ont plutôt les traits foncés, la peau, les yeux, les cheveux sombres.
C’est tout l’inverse de ce qu’a décrit Masina.
— Peut-être que c’est une touriste. Qu’est-ce qui se passera si je la rate ?
— Tu ne la rateras pas. Ce qui doit arriver arrivera, Taï. Laisse-toi porter.
— Je me laisse porter, répète-t-il d’un ton pensif.
*
* *
Plus tard, Akela nous emmène sur une plage privée. Il ouvre son sac à dos et
distribue des sandwichs à la dinde et au fromage ainsi que des bouteilles d’eau,
et chacun trouve un coin pour s’installer et manger.
Maddy est debout face à l’océan et je vais vers elle, passant un bras autour de ses
épaules, rapprochant délicatement nos têtes l’une contre l’autre.
— Est-ce que tu aimes ton anniversaire, ma chérie ?
— C’est le plus beau de toute ma vie, répond-elle en souriant.
Nous déjeunons en regardant l’eau turquoise à nos pieds où de petits poissons
frétillent dans les vagues.
— Je pense que Matt et moi viendrons ici pour notre lune de miel. J’aimerais lui
montrer tous ces endroits.
— Ouais ? je demande en essayant de garder un ton positif.
Toutefois, l’idée que ma petite sœur de vingt ans soit déjà fiancée me fait
angoisser au plus haut point. Elle n’a pas encore assez vécu pour prendre un tel
engagement !
— Oh ! s’exclame-t-elle, et son regard s’illumine. Peut-être qu’on pourrait se
marier ici ! Je n’ai pas beaucoup de famille et seulement quelques amis. Ça
pourrait être chouette ! Qu’est-ce que tu en penses ?
Je l’ai toujours imaginée rejoindre son prince à l’autel, vêtue d’une longue robe
blanche.
— Tu ne veux pas un grand mariage avec une belle robe blanche ?
— Tu sais, la blouse blanche m’a toujours plus fait rêver que la robe, répond-elle
en haussant les sourcils.

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C’est là que je réalise que Maddy a deux objectifs dans sa vie dorénavant. Elle
veut, toujours cette blouse blanche, et sa relation avec Matt n’y change rien.
Pour elle, le fait de se marier n’est qu’un plus. Elle veut partager sa vie avec
quelqu’un, tout en poursuivant le rêve pour lequel elle a tant travaillé.
— Pour être honnête, Mads, je suis ravie de te l’entendre dire. Si j’ai eu peur,
quand j’ai su que tu acceptais la demande en mariage de Matt, ce n’est pas à
cause de lui ou de ton âge. C’est un mec génial et il a l’air fou de toi.
— C’est vrai, il l’est.
— Je sais. J’ai juste flippé, parce que j’ai pensé que tu allais peut-être vouloir
mettre de côté ta carrière pour devenir mère et épouse, plutôt que docteur. Tu
auras le temps d’être mère au foyer si tu le veux, mais tu dois faire ton doctorat
tant que tu es jeune, sinon tu ne le feras jamais.
Maddy me serre fort contre elle et me regarde d’un air sérieux.
— Rien ne m’éloignera de mes objectifs de carrière, Mia. Matt m’encourage à
faire tout ce que je désire. C’est juste que maintenant j’ai quelqu’un avec qui le
partager, en dehors de toi.
Quelqu’un en dehors de toi.
Ses paroles me font l’effet d’une lame froide plantée en plein cœur. Je sais
qu’elle ne pense pas à mal et que je dois laisser ma petite sœur prendre son
envol, mais bon sang, qu’est-ce que ça fait mal !
— Il n’y a toujours eu que nous deux, je dis en ravalant mes larmes et en
rangeant une mèche derrière son oreille.
Maddy soupire, et j’ai l’impression que le poids de mon amour l’écrase au lieu
de lui servir de marchepied.
— Je l’aime et je veux être avec lui, mais je ne veux pas qu’on s’éloigne non
plus. Tu resteras toujours ma sœur, Mia. Qu’est-ce que je dis, tu es plus une
mère qu’une sœur. Cependant, il est temps que je prenne moi-même mes
décisions, que je commette des erreurs et que je prenne des risques qui ne
t’impliquent pas.
— Tout ce que tu fais m’implique, je réponds automatiquement.
— Ça ne devrait pas être comme ça, Mia. Il faut que tu vives pour toi,
maintenant. Je vais bien ! J’ai encore besoin d’aide pour payer la fac, bien sûr, et

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un jour je pourrai tout te rembourser…
— Hors de question ! je m’énerve. Le fait de pouvoir m’occuper de toi et de ton
avenir est la plus belle chose que j’aie accomplie. Tu ne peux pas savoir
combien je suis fière de savoir que tu vas réussir là où j’ai échoué.
— Ça me rend triste. Tu mérites mieux.
Je prends une profonde inspiration, ne parvenant plus à respirer alors que les
larmes me montent aux yeux. Je l’attire à moi et je la serre fort dans mes bras.
— Tu es tout pour moi, Maddy.
— Je sais. Mais maintenant, je vais être tout pour Matt, et il va être tout pour
moi. Tu dois trouver ça, toi aussi.
Les paroles de ma petite sœur me laissent perplexe. Elle veut que je trouve un
nouveau « tout ». Comment suis-je censée changer ce que je suis ? Je ne suis pas
certaine d’en être capable. Où que je sois, quoi que je fasse, je m’inquiéterai
toujours pour elle. Je penserai toujours à elle et elle me manquera toujours. Je ne
peux pas imaginer ce que serait ma vie si toutes mes décisions ne tournaient pas
autour de ma petite sœur.
J’ai donc besoin d’un nouveau « tout ». Maddy s’inquiète pour moi.
— Je vais essayer, ma chérie. Je vais essayer.
— C’est tout ce que je te demande.
— Allez viens, on n’a pas fini de fêter ton anniversaire !
Je prends sa main et nous marchons sur la plage en balançant nos mains comme
lorsque nous étions petites et que nous rentrions de l’école. Je finissais une heure
plus tôt et je l’attendais devant sa salle de classe pour la raccompagner à la
maison. Or, ma petite sœur est grande, maintenant. Elle est à la fac, elle a vingt
ans et elle est fiancée. Elle n’a pas besoin – et elle n’a pas envie – que sa sœur
s’occupe d’elle en permanence.
Qu’est-ce que je vais faire, maintenant ?
*
* *
Après notre longue randonnée à cheval, Taï et Tao nous emmènent Chez Duke’s,
sur la plage Waikiki. Nous dînons en terrasse, et je mange le meilleur burger de
toute ma vie. Des flambeaux éclairent le jardin et illuminent nos visages d’une

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lumière chaleureuse. Nous regardons le soleil se coucher à l’horizon et lorsqu’il
fait nuit et que nous avons fini de dîner, nous rentrons dans le bar et allons à
l’étage, où il y a de la musique live.
Gin, Maddy et moi dansons comme des folles sous les regards fascinés des deux
frères. Cela fait longtemps que nous ne sommes pas sorties toutes les trois.
J’en profite pour tout lâcher : ma tristesse de devoir quitter cette île et de dire au
revoir à Taï, mon angoisse à propos de Wes et Gina et de la possibilité que leur
relation soit devenue sérieuse, mon stress à propos du mariage de ma sœur et de
ses études. Cependant, je réalise que tout ça est hors de mon contrôle. Je ne peux
pas faire grand-chose, à part appliquer moi-même le conseil que j’ai donné à Taï
plus tôt.
Laisse-toi porter.
C’est donc ce que je décide de faire tant que je suis sur l’île et durant le reste de
mon année. Je suis déterminée à sauver mon père, déterminée à aider Maddy à
finir la fac et déterminée à trouver mon destin. J’ai passé si peu de temps à
penser à mes envies, mes rêves et mes désirs que je ne sais même pas ce qu’ils
sont. Pendant six mois, j’ai cru que je voulais être actrice et je ne m’en suis pas
trop mal sortie. Cependant, je crois surtout que c’était un moyen de fuir le
Nevada et tous les hommes qui m’y avaient fait du mal ainsi que la possibilité
d’échapper à mon père. Il a beau avoir fait de son mieux, il n’a jamais pris soin
de nous et il s’est déchargé de ses responsabilités sur moi.
Maddy a raison. Je dois découvrir ce qu’est mon « tout ». À quoi ça ressemble ?
Qu’est-ce que j’ai envie de faire de ma vie à la fin de cette année ? C’est comme
si je me posais la même question que posent tous les adultes aux enfants : qu’est-
ce que tu veux faire quand tu seras grande ?
Je vais avoir vingt-cinq ans et je n’ai pas la moindre idée de ce que je veux faire
dans la vie.
Il est temps d’y réfléchir sérieusement.

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Chapitre 10

Je rejoins Maddy dans sa chambre où elle finit de faire sa valise en attendant


que le taxi arrive.
— Tiens.
Je lui tends une petite boîte en bois sur laquelle est gravé un paradisier.
— Qu’est-ce que c’est ? Encore un cadeau d’anniversaire ?
— Eh bien, techniquement, je ne t’ai pas offert de cadeau que tu peux tenir dans
la main. Mais je voulais t’offrir quelque chose pour marquer tes vacances ici.
Elle ouvre la boîte, qui renferme un bout de corail rose que j’ai trouvé en
marchant sur la plage, hier. Au fond, enveloppé dans du papier tissu, il y a aussi
un bracelet en or blanc auquel est accroché un charme1 en forme de cœur sur
lequel j’ai fait graver quelque chose.
— Sister ? demande-elle en souriant.
Elle regarde le bracelet à la lumière où il scintille, et je lui montre mon poignet
où je porte le même.
— Maintenant, quand je te manquerai, ou quand tu voudras penser à ta grande
sœur, tu n’auras qu’à mettre ce bracelet et tu sauras que moi, je pense toujours à
toi. En plus, on pourra ajouter des charmes au bracelet, toute seule où ensemble.
Elle m’attire dans ses bras, des larmes coulent sur ses joues.
— Je le mettrai tous les jours, parce que tu me manques tous les jours. Je t’aime,
Mia. Tu es la seule personne sans qui je ne peux pas vivre.
— Moi non plus, Maddy.
Nous nous séparons au moment où une voiture klaxonne devant le bungalow. Je
prends sa valise, et nous nous dirigeons vers la porte d’entrée. Je serre Gin et

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Maddy dans mes bras une dernière fois et je les regarde monter dans le taxi et
disparaître dans la rue.
Je n’ai plus qu’un jour sur l’île avec Taï. Il faut que j’en profite.
*
* *
Je suis en train de me préparer pour ma dernière soirée quand mon portable
sonne.
— Allô ?
— Bonjour poupée ! dit tante Millie.
Je souffle dans le micro du téléphone pour m’assurer qu’elle entend ma
frustration.
— Eh bien, ce n’est pas trop tôt ! J’ai eu peur de retourner à Las Vegas ou en
Californie.
— Désolée de ne pas t’avoir appelée avant, mais je ne t’avais pas réservée pour
le mois de juin avant aujourd’hui.
Son aveu me fait soudain paniquer, parce que je ne peux pas me permettre de ne
pas travailler pendant un mois. Si je ne paie pas Blaine, il tuera mon père avant
de s’en prendre à Maddy.
— Tu me fais peur, Millie. Qu’est-ce que tu veux dire ? Ton dernier mail disait
que j’étais réservée toute l’année.
— Oui, toute l’année, sauf juin. Mais je n’étais pas inquiète, j’aurais appelé un
ou deux de tes anciens clients et ils t’auraient embauchée avec plaisir. Ton
Frenchie, Alec, m’a dit qu’il prendrait n’importe quel mois où tu aurais une
annulation.
— Ah bon ?
Il va falloir que j’en touche un mot à Alec.
— Tu es surprise ? Ce n’est pas le seul, tu sais. Le premier, celui dont tu étais
gaga, Weston, m’a dit de l’appeler si tu avais des problèmes financiers ou si tu
avais besoin d’aide. C’est intéressant de voir que tes deux premiers clients
veulent s’assurer que tu vas bien.
Intéressant, en effet, mais je préfère ne pas trop y penser.

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— Alors, je vais où cette fois-ci ? je demande en finissant d’appliquer mon
mascara.
Millie reste silencieuse quelques secondes.
— Eh bien, c’est le point négatif. C’est loin d’être aussi exotique qu’Hawaï et,
hélas, ce client-ci n’est pas un beau gosse. La situation va peut-être te paraître
bizarre, mais je te promets que tu n’es pas obligée de coucher avec lui et qu’il est
vraiment sympa.
— Il est si vilain que ça ?
Soudain, j’imagine un homme immense avec un bide à bière et une haleine
affreuse.
— Non, pas du tout, je le trouve très beau, en fait. Moi, je n’aurais aucun
scrupule à me jeter sur lui !
— Attends, tu te jetterais sur lui ? Tu n’as jamais dit ça d’un de mes clients. Tu
m’as souvent dit de me les faire pour gagner vingt mille dollars de plus, mais tu
n’as jamais sous-entendu que tu en ferais de même. Qu’est-ce qui se passe ?
Ça fait longtemps que je n’ai pas été aussi nerveuse. Je file dans la cuisine où je
me sers un shot de Malibu, puis je mords dans une tranche d’ananas frais.
Délicieux. Je me lèche les lèvres et me sers un deuxième shot.
— Tu vas parler, ou je dois lire dans tes pensées ?
— Eh bien… disons qu’il n’est pas aussi fringant que tes clients habituels.
Oh non ! Je pousse un grognement et je vide mon deuxième verre avant de
terminer la rondelle d’ananas. Le rhum fait son job et je me sens légèrement plus
détendue.
— Crache le morceau, Tante Millie.
— Combien de fois je dois te dire de m’appeler Miss Milan ?
— Tu changes de sujet…
— Et si je t’envoyais ça par mail ? dit-elle de sa voix mielleuse.
— Et si tu me disais ce que j’ai besoin de savoir tout de suite, avant que je
prenne le prochain vol pour Los Angeles et que je me pointe sur le pas de ta
porte ?
— Très bien, ça va… Il est plus vieux, c’est tout.
— Il me faut un chiffre, Millie. Quarante ? Cinquante ?

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J’entends ma tante inspirer profondément à l’autre bout du fil.
— La soixantaine. Peut-être un peu moins, peut-être un peu plus.
— Beurk ! Tu es sérieuse ? C’est un pervers, c’est ça ?
Bon sang, je commençais tout juste à adorer ce boulot, et maintenant je dois
passer un mois avec un vieux libidineux.
— Ça craint, Tante Millie.
— Je sais, je sais. Mais il était très agréable au téléphone. Il a besoin d’une nana
de ton calibre pour aller à des dîners professionnels. Apparemment, quand on est
un homme d’affaires de Washington DC, il faut avoir une femme trophée. Il doit
séduire plusieurs sénateurs et des investisseurs, et il lui faut une jolie nana à ses
côtés. D’après ce que j’ai compris, il travaille sur un projet de restauration de
bâtiment historique et il a besoin de réunir des soutiens, bla-bla-bla. C’est
vraiment important ?
— Non, pas vraiment, j’ai juste besoin de fric. Du moment qu’il ne s’attend pas
à ce que je couche avec lui, ça ira. Tu as été claire avec lui sur ce point, n’est-ce
pas ? Bon sang, il est plus vieux que mon père ! je m’exclame soudain.
— En fait, c’est lui qui a été clair avec moi. Il a dit qu’il ne savait pas quel genre
d’escort tu étais, mais qu’il ne voulait aucun service sexuel.
— Tu m’en vois ravie, je dis, sarcastique.
En réalité, je suis plus que soulagée. Je suis un peu déçue de passer un mois sans
sexe, bien sûr, mais je survivrai. J’espère. Il faut que je pense à recharger les
batteries de mon vibro.
— Ok, je t’envoie les détails par mail. Il s’appelle Warren Shipley.
— Tiens, son nom me dit quelque chose.
— C’est normal, son fils est sénateur de Californie.
— Ah, oui ! Tu vois, lui, il est canon. Il a trente-cinq ans et c’est le plus jeune
sénateur de l’histoire, c’est ça ?
— Tout à fait, poupée Et aux dernières nouvelles… il est célibataire.
Voilà qui rouvre le champ des possibles. Je me souviens d’avoir mis une croix à
côté de son nom aux dernières élections. Et pas seulement parce qu’il est canon,
même si c’est vrai. Il est grand, les cheveux blond foncé, avec des yeux marron

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chaleureux. Il était tellement sexy dans son costume que j’avais même imaginé
deux ou trois manières de le déshabiller en moins de dix secondes.
— Envoie-moi les infos par mail, je pars dîner avec Taï.
— Taï ? Qui est-ce ? demande-t-elle d’une voix confuse.
— Un des Samoans les plus sexy de l’île. Ciao, Tatie !
*
* *
Taï prend ma main lorsqu’il vient me chercher chez moi et il la tient jusqu’à la
voiture, puis dans le restaurant, même lorsque nous nous asseyons à table.
Apparemment, il a un peu de mal à lâcher prise.
— Eh, mon grand, je peux récupérer ma main ?
Il la lâche brusquement comme s’il venait de se brûler et je me penche pour
caresser sa cuisse musclée.
— Ne t’en fais pas. Tout ira bien, Taï.
— Comment tu peux dire ça ? demande-t-il en secouant la tête. Alors que tu pars
demain !
— Oui, exactement. Alors, profitons de notre dernière soirée, tu veux bien ?
Il ferme les yeux en gonflant ses poumons. Lors-qu’il les rouvre, il concentre
son attention sur moi.
— Mia, c’est juste que… je n’ai jamais rencontré de femme comme toi. Jamais.
Tu es drôle, intelligente, magnifique…
Il se penche sur la table pour chuchoter dans mon oreille.
— … tu es une tigresse au pieu…
Son regard se remplit de regrets, et il secoue la tête.
— Je ne sais pas comment dire ce que je ressens.
— Tu sais, tu vas me manquer, toi aussi. Plus que je ne veux bien l’admettre, je
dis en prenant sa main.
— Oui, exactement, admet-il.
— Mais on va rester en contact ! On s’appellera et on s’écrira des messages et
des mails. Tu me raconteras ce qui se passe dans ta famille tarée, au travail et
avec les spectacles. Et envoie-moi des vidéos des nouveaux tours que tu
apprends avec tes couteaux de feu. Quant à moi… eh bien… je ne sais ce que je

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t’enverrai. Sans doute des selfies de moi en train de faire des trucs stupides dans
des endroits improbables.
Il éclate de rire, et ce rire remplit mon cœur de joie. J’avance vers lui pour
l’embrasser sur la joue.
— On restera amis ? il demande d’une voix hésitante.
— Meilleurs amis, je réponds.
Sur ce, mon beau géant frappe dans ses mains et recule sa chaise.
— Je vais chercher du champagne. Je veux fêter notre dernière nuit ensemble !
Il recule brusquement sa chaise pour se lever, et celle-ci tombe en arrière,
atterrissant au sol au moment où une serveuse passe avec un plateau de verres de
vin. Son pied se prend dans un barreau de la chaise et elle vole en avant,
précédée par son plateau. Taï la rattrape de justesse et ils tombent tous deux par
terre, lui sur le dos, elle allongée sur lui.
D’où je suis, je ne vois qu’une chaise cassée, une belle blonde et les mains
bronzées de Taï autour de sa taille. Elle se redresse et sa jupe remonte sur ses
cuisses. Taï pose ses mains sur ses cuisses pour qu’elle ne perde pas l’équilibre,
et je suis sur le point de l’aider lorsque je vois son visage. Elle est face à moi et
Taï est allongé par terre, la tête levée vers elle. Elle rougit, du menton jusqu’aux
sourcils, et je remarque soudain ses grands yeux verts. Une petite tache de sang
perle sur sa lèvre inférieure à l’endroit où elle s’est mordue, et Taï lève une main
pour appuyer un doigt sur sa lèvre.
Il passe un long moment à contempler son visage. La serveuse ne bouge pas
d’un iota, concentrée sur lui, et lui seul. Le restaurant pourrait exploser, ni l’un
ni l’autre ne le remarquerait. C’est comme s’ils étaient en transe. Taï pose
ensuite une main sur sa joue et elle s’y frotte, comme si c’était la chose la plus
naturelle au monde.
— Est-ce que ça va, Sunshine2 ?
Sunshine.
Doux Jésus, c’est sa nana ! Les cheveux blonds, dorés par le soleil, les yeux
verts comme de l’herbe fraîchement coupée… Et il l’a appelée Sunshine !
Je ne fais pas un bruit, ravie de regarder la scène se dérouler devant moi.
— Euh, pardon ? répond-elle d’une voix gênée.

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— Tu saignes, dit-il sans enlever son pouce.
Elle se lèche la lèvre et finit par lui lécher le doigt. Ils retiennent tous les deux
leur souffle avec un cri aigu, mais celui de Taï est plus viril et animal. Je vois
son regard s’enflammer et elle ne le quitte pas des yeux. J’ai l’impression d’être
devant un film, mais en mieux puisque c’est en live. Zut, si seulement j’avais du
pop-corn !
La jeune femme finit par secouer la tête et essayer de se mettre debout. Taï se
lève en la tenant contre lui, si fort que lorsqu’il est enfin debout, elle glisse le
long de son corps jusqu’à ce que ses pieds touchent de nouveau le sol. Il pousse
un grognement que je ne connais que trop bien, et j’ai envie de taper des pieds
par terre tellement je suis excitée. Personne ne peut ignorer l’attirance qui les lie
l’un à l’autre.
Après quelques secondes supplémentaires passées à se tenir l’un l’autre, la
serveuse fait un pas en arrière et baisse la tête.
— Merde, s’exclame-t-elle en constatant les dégâts à ses pieds. J’aurais dû
regarder où j’allais. Je vais me faire virer, dit-elle.
Sa lèvre se met à trembler, et les larmes lui montent aux yeux. Je me ressaisis et
je passe à l’action.
— Merci infiniment, Mademoiselle, je dis en me levant. Pardon d’avoir renversé
votre plateau. Nous paierons pour tous les verres que nous avons renversés.
Son manager arrive à ce moment-là, l’air très agacé.
— Monsieur, vous êtes là, Dieu merci. Cette femme a évité à mon ami d’être
trempé de vin. Ce grand dadais est tellement maladroit, parfois, n’est-ce pas Taï
? Il s’est levé trop vite et il a renversé sa chaise au moment où…
Je désigne la serveuse pour qu’elle se présente.
— Amy.
— … où Amy est passée. Elle aurait pu blesser quelqu’un si elle n’avait pas été
si habile. Je ne sais pas comment elle a fait pour ne tacher aucun client. Cela
relève de l’exploit. Nous recommanderons votre établissement à tous nos amis.
— Ah, eh bien, oui. Merci. Nous n’embauchons que les meilleurs. Amy, bon
boulot. Je vais envoyer un commis nettoyer tout ça pendant que tu t’occupes de
tes tables.

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Amy me tend la main.
— Merci, dit-elle.
Son regard est plein de remords, or si c’est la faute de quelqu’un, c’est bien celle
de Taï.
— Il n’y a pas de souci. Je suis Mia, et ce beau jeune homme célibataire est Taï
Niko.
— Alors, vous n’êtes pas ensemble ? demande-t-elle avant de couvrir sa bouche.
À l’évidence, elle n’avait pas prévu de dire ça.
Je souris et je regarde Taï, dont les yeux sont scotchés sur Mademoiselle Amy.
— Non. Mais nous sommes de très bons amis, et je retourne aux États-Unis
demain. Il aurait bien besoin d’une nouvelle amie, d’ailleurs. Tu habites ici
depuis longtemps ?
— Non, j’ai emménagé cette semaine avec mon père. Je ne voulais pas qu’il
vienne seul. Il n’y a que nous deux, alors… me voilà. Je ne connais personne,
pour le moment.
Elle se baisse pour ramasser son plateau et quelques bouts de verre en attendant
que le commis arrive.
— Eh bien, maintenant, vous vous connaissez. Tu as ton téléphone sur toi ?
Elle fronce les sourcils et sort un iPhone de sa poche. Je le lui prends, j’ajoute
Taï aux contacts et je lui envoie un message. Le téléphone de Taï vibre et il le
sort à son tour.
— Maintenant, Taï a ton numéro. Il t’appellera demain.
Taï ouvre la bouche, mais je le fusille du regard pour l’empêcher de dire une
bêtise. Amy nous regarde tour à tour.
— Est-ce que tu aimes le surf ? je lui demande.
— Je n’ai jamais essayé, répond-elle en haussant les épaules.
Je souris jusqu’aux oreilles et je la prends par les épaules pour la tirer contre
moi.
— Taï, n’est-ce pas horrible ? Amy n’a jamais surfé. Tu ne sais pas le meilleur,
Amy ? Taï est prof de surf !
— Ça a l’air chouette, en tout cas, dit-elle en époussetant sa jupe et en lissant son
tablier sous le regard fasciné de Taï. Il faut que j’y aille. Je serais ravie d’avoir

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un nouvel ami. Je suis vraiment désolée de t’être rentrée dedans.
Il plonge ses mains dans ses poches et se balance d’avant en arrière, passant de
ses talons sur ses orteils, prenant un air cool.
— Si tu veux, tu peux te faire pardonner en dînant avec moi demain soir après
que j’aurai déposé Mia à l’aéroport.
Bien évidemment, Taï ne sait pas que mon départ n’implique pas des adieux en
tête à tête.
— J’ai hâte que tu m’appelles, Taï, dit-elle en rougissant, mais son regard
pétille.
— Ah, Amy, je dis quand elle commence à tourner les talons, une dernière chose
: que penses-tu des tatouages ?
Elle vient à moi et chuchote dans mon oreille. Puis elle me remercie et elle part
au bar pour se procurer de nouveaux verres. Dieu merci, nous sommes à Hawaï
et pas dans un resto BCBG de New York, où nous aurions été insultés d’avoir
une conversation en plein milieu d’une flaque de vin et de verre brisé. Ici, à
Hawaï, les gens s’occupent de leurs affaires, se contentant de contourner les
dégâts.
Taï et moi nous rasseyons enfin.
— Alors, champagne ? je lui rappelle.
Son regard s’assombrit et il grogne.
— Qu’est-ce qu’elle t’a dit ?
— À propos des tatouages ?
— Non, à propos du pape ! Bien sûr, des tatouages.
Il a l’air affreusement nerveux, ce qui est génial, parce que depuis que je l’ai
rencontré, Taï a toujours eu l’air merveilleusement sûr de lui, sans compter la
nuit où il m’a fait jouir tant de fois que je me suis évanouie.
Je m’appuie sur la table avec un air mystérieux, puis je regarde autour de nous
pour m’assurer que personne ne nous entend.
— Elle adore. Elle dit que ça l’excite. Et ce n’est pas tout…
Taï se rapproche encore, et mes lèvres effleurent son oreille.
— … tout le côté gauche de son dos, jusque sur ses fesses, est tatoué. Mais ce
n’est pas un tribal.

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Je recule dans ma chaise pour mieux profiter de son regard de braise.
— Son tatouage représente les branches d’un cerisier en fleurs, c’est canon, tu ne
trouves pas ?
Ses narines se dilatent et sa respiration devient plus lourde.
— Ouais, canon.
— Je me suis dit que ça te plairait, je dis en jouant des sourcils.
— Et c’est toi qui m’arranges le coup, c’est pas un peu bizarre ?
— Pourquoi ?
— Parce que ça fait un mois qu’on baise.
Je comprends son raisonnement, mais je ne vois pas les choses ainsi. Taï a
besoin de quelqu’un, et vite. Par ailleurs, je suis convaincue qu’Amy est la
femme dont Masina lui a parlé.
— Ouais, mais après ce soir, ce sera fini. Tu vas me dire adieu avec une nuit que
je n’oublierai jamais et, demain, tu commenceras ta nouvelle vie. Tu n’as pas vu
ses cheveux, ses yeux et son corps ? C’est la femme de ta vie !
— Tu n’en sais rien.
— Tu vas me dire que tu n’as rien ressenti quand elle t’est rentrée dedans ? Et
que tu avais tes mains sur ses cuisses, sa taille, ses joues et ses lèvres ?
— Non… Si, bien sûr que j’ai ressenti quelque chose.
J’éclate de rire, et il sourit enfin.
— Je suis tellement contente pour toi ! je m’exclame en sautillant sur ma chaise.
Et si on sautait le repas et qu’on passait directement au dessert et au champagne
?
— C’est ta soirée, frangine. Demain, une nouvelle vie commence pour toi.
*
* *
Heureusement, j’ai fait mes valises avant d’aller dîner hier soir, car je n’aurais
pas pu les faire en rentrant. Taï pense que mon avion part ce soir puis que je lui
ai dit qu’il décollait à vingt heures. En réalité, je pars à huit heures du matin. Je
n’aime vraiment pas les adieux.
Je sors du tiroir le petit cadeau que je lui ai acheté et je le pose sur le bar.
Lorsque je suis sortie de la bijouterie où j’ai acheté le bracelet de Maddy, l’autre

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jour, une artiste locale peignait des images et je lui ai demandé si elle connaissait
le symbole samoan pour l’amitié. Elle m’a répondu que oui et elle l’a peint. Pour
moi qui n’y connais rien, on dirait un L majuscule en écriture cursive. En
dessous, j’ai dessiné un cœur au feutre noir et j’ai écrit mon prénom à côté, puis
je l’ai mis dans un petit cadre en bois.
Je sors mon papier à lettres et je m’installe sur le tabouret pour écrire mon mot à
Taï.
Taï, mon Samoan diaboliquement sexy…
Merci de m’avoir offert un des plus beaux mois de ma vie. Tu as rempli mon
monde d’une joie immense, de rires et de plaisir. Je n’arriverai jamais à
t’oublier, non pas que j’en aurais un jour envie. Lorsque je suis venue ici,
beaucoup de choses m’attristaient : ma famille, mes relations amoureuses, mon
travail. Tu as changé tout cela. Il t’a suffi d’un clin d’œil et d’un sourire pour
chasser les ténèbres qui m’enveloppaient et laisser entrer la lumière en moi.
Durant mon séjour ici, j’ai appris à profiter de la vie, quoi qu’elle apporte. De
simplement « me laisser porter » et d’apprécier le moment présent. Sincèrement,
cela faisait longtemps que je ne m’étais pas autant amusée. Tu m’as rappelé que
je suis jeune et que j’ai encore beaucoup de temps pour décider qui sera avec
moi « à jamais ». Je sais que tu as hâte de trouver la femme qui sera à tes côtés
pour toujours, et du fond du cœur, je crois que tu l’as trouvée. Appelons cela
l’intuition féminine. Les choses n’arrivent jamais par hasard. C’est simplement
que, parfois, la raison ne nous paraît pas évidente.
Je suis ravie de t’avoir rencontré lors de mon premier jour sur l’île. Chaque
moment avec toi a été une nouvelle expérience, une aventure. Merci de m’avoir
offert cela. Je suis triste de partir et tu vas terriblement me manquer. Reste en
contact, s’il te plaît.
Ta frangine,
Mia
Comme à mon habitude, je me suis glissée hors du lit, j’ai écrit ma lettre, j’ai
laissé son cadeau et je suis montée dans le taxi sans réveiller mon beau Samoan.
Je me demande ce qui m’attend à Washington avec monsieur Warren Shipley,
homme d’affaires et politicien. Peut-être vais-je rencontrer son beau fiston, le

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jeune Aaron Shipley. Sinon, eh bien tant pis, on me paie cent mille dollars pour
avoir l’air belle au bras d’un vieux qui ne veut pas de sexe. Mais peut-être que ce
sera comme avec Tony et Hector, et qu’il est secrètement gay ? Ce serait génial !
Mais non, il y a forcément quelque chose de louche pour qu’il embauche une
escort. Même s’il est vieux, il est beau et riche, il y a des dizaines de vipères qui
seraient prêtes à se taper un vieux schnock gratos.
Une fois encore, je décide de me laisser porter. Je recule dans mon siège alors
que nous décollons et je m’endors immédiatement. Je rêve de marches en marbre
blanc, de symboles phalliques dans le ciel et de la statue en marbre d’un
président défunt, assis dans son fauteuil, surveillant une ville bétonnée3.

1. Pendentif.
2. Soleil.
3. Mia rêve des monuments phare de Washington  : les marches menant au
Lincoln Memorial, l’obélisque du Washington Monument et l’immense statue
d’Abraham Lincoln.

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JUIN

Voilà Mia dans la capitale, Washington, DC. Elle n'est pas très enthousiaste sur
sa mission du mois, puisqu'elle doit jouer la compagne de Warren Shipley, un
homme âgé et surtout l'un des plus riches businessmans des États-Unis. Elle doit
lui servir de faire valoir vis-à-vis des hommes d'affaires qu'il veut approcher.
Mais elle va vite changer d'avis lorsqu'elle est accueillie par Aaron Shipley le fils
de Warren.

Aaron est non seulement irrésistible physiquement, raffiné, mais aussi le plus
jeune sénateur des États-Unis. À trente-cinq ans, il est riche comme Crésus,
célibataire, et fait les couvertures de tous les magazines du pays.
Mia, qui pensait que la politique était un monde ennuyeux, va s'apercevoir qu'il
n'y a rien de plus excitant que la démocratie. Et, pourtant, il va lui falloir
beaucoup de force et de courage pour surmonter de bien tristes événements.
Heureusement, elle sera bien entourée...

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Chapitre 1

L orsque je sors de l’aéroport, je découvre un ciel gris, pas du tout ce à quoi je


suis habituée après un mois à Hawaï. L’air est oppressant et si humide que mes
vêtements me collent comme une seconde peau.
Je balaie des yeux la rangée de voitures noires garées le long du trottoir et je vois
un homme qui tient une pancarte sur laquelle est écrit mon nom.
– Je suis Mia Saunders, dis-je en lui serrant la main.
– Je suis James, votre chauffeur. C’est moi qui vous conduirai où vous le
souhaitez durant votre séjour chez les Shipley.
Il prend ma valise et la met dans le coffre avant d’ouvrir ma portière. Je grimpe
dans la voiture en faisant de mon mieux pour que mes cuisses en sueur ne
laissent pas de traces sur le cuir. La jupe ample que j’ai choisie pour voyager
m’a paru une bonne idée sur le moment, mais j’aurais mieux fait de mettre mon
legging habituel. J’essuie mes mollets avec mes mains.
– Il fait toujours aussi humide au mois de juin ? je demande en sortant mon
téléphone de mon sac pour l’allumer.
– Il faut s’attendre à tout. Il peut faire trente-cinq degrés et lourd comme
aujourd’hui, pleuvoir des cordes, ou bien la météo peut être parfaite. Vous aurez
sans doute droit à un peu de tout ce mois-ci. Cela dit, il fait anormalement chaud
cette année.
Mon téléphone s’allume et se met à sonner avec tous les messages que j’ai reçus
pendant le vol.
À : Mia Saunders
De : Samoan Sexy
Frangine, faut que tu m’expliques. Tu m’as planté. Pas cool.

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Je lis les messages suivants, découvrant que Taï ne s’est pas calmé après son
premier message.
À : Mia Saunders
De : Samoan Sexy
Ton cadeau… je suis sans voix.
À : Mia Saunders
De : Samoan Sexy
Je suis furieux de ne pas avoir eu de baiser d’adieu.
Je m’empresse de lui répondre.
À : Samoan Sexy
De : Mia Saunders
Embrasse la femme de ta vie, elle guérira tous tes maux.
Je ricane de façon très peu féminine, et le chauffeur me regarde dans le
rétroviseur. Il hausse les sourcils, mais je secoue la tête et me concentre sur mes
autres messages.
À : Mia Saunders
De : Wes Channing
Tu vas me reparler un jour ? Ça fait un mois. Ne m’oblige pas à te courir après.
En deux secondes, je rédige le message le plus désinvolte et froid que j’aie
jamais écrit.
À : Wes Channing
De : Mia Saunders
Je suis certaine que Gina a su t’occuper. Je vous ai vus vous rouler des pelles en
couverture d’un magazine people.
Après vingt minutes passées à ressasser mon irritation et à regarder mon
téléphone toutes les deux secondes, il répond enfin. Par « il », je veux dire Wes,
pas Taï, mais je l’ignore, m’efforçant de rester cool, préférant repenser à mon
Samoan sexy.
Taï doit être en train de se préparer pour son premier rencard avec Amy. Mon
cœur bat plus fort en repensant à la manière dont leurs chemins se sont croisés…
littéralement. Amy a carrément atterri sur ses genoux ! Bon sang, j’espère que
c’est bien la bonne. Je prendrai des nouvelles de Taï dans une semaine pour

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savoir où ils en sont. Quelque chose me dit qu’Amy est l’amour de sa vie. Quant
à moi, je ne sais pas quand je vais trouver le mien. Ce qui est certain, c’est que
ce ne sera pas avant la fin de cette année.
Hélas, penser à Taï et à l’avenir ne m’aide pas à oublier le message de Wes qui
m’attend.
À : Mia Saunders
De : Wes Channing
Tu es jalouse ?
Est-il possible de castrer un homme à distance ? Peut-être, si j’engage quelqu’un
pour le faire ? Après tout, j’ai de l’argent de côté, je me dis en ricanant, réalisant
que si j’ai assez d’économies pour lui couper la bite, c’est parce que j’ai baisé
avec lui.
À quoi il joue, bon sang ? Est-ce que je dois lui répondre ou le laisser ruminer
tout seul ? À l’évidence, il n’a pas aimé que je lui impose un silence d’un mois.
Mais tant pis pour lui. Il a fait la couverture des magazines people avec la
sublime Gina DeLuca, moi j’ai pris mon pied avec un superbe Hawaïen.
Ça. N’a. Pas. D’importance.
Hélas, j’ai beau me répéter ces paroles en boucle, le résultat est le même. Il
m’est impossible de ne pas être affectée par ce que fait Wes. Je tiendrai toujours
à lui et je ne supporte pas de ne pas savoir ce qu’il fait et avec qui il est… Ça me
ronge.
Taï était une diversion fabuleuse. Je m’amusais et il faisait en sorte que chaque
journée soit plus belle que la veille et chaque nuit plus chaude que la précédente.
Je n’ai eu aucun mal à oublier mes problèmes avec Wes, parce que j’occupais
mon esprit avec tout ce qu’une jeune femme de vingt-quatre ans est censée faire,
s’éclater. Hélas, maintenant, ça ne marche pas.
– Est-ce que nous en avons encore pour longtemps ? je demande à James.
– Quarante-cinq minutes environ. Je suis navré, Mademoiselle, mais la
circulation est affreuse à cette heure-ci.
Quarante-cinq minutes. C’est bien assez de temps. Si Wes veut parler, alors qu’il
parle ! Après tout, techniquement, nous sommes amis.
Je sors mon téléphone et je tente de me calmer.

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– Elle est vivante ! s’exclame Wes avec sa voix rauque et son accent californien.
– Ha ha. Très drôle. C’est quoi, cette histoire de jalousie ? Tu sais très bien que
je ne le suis pas.
Je mens, bien sûr.
Wes respire lentement et soupire. J’entends le bruit de l’océan derrière lui, peut-
être est-il à la plage, prêt à surfer, et je regrette immédiatement de ne pas être
avec lui.
– Je me suis dit que si je te provoquais, tu m’appellerais immédiatement.
– Wes, c’est quoi ton délire ? je demande d’une voix de peste agressive, ce qui
n’est pas du tout ce que j’avais prévu.
– À toi de me le dire. Tu t’es éclatée à Hawaï ? rétorque-t-il sur le même ton que
le mien.
Je pense à Taï et à ses tatouages tribaux que j’ai tant aimé lécher depuis son
épaule jusqu’à sa cuisse. Ça a été mon passe-temps préféré durant le mois de
mai, et un « oui » suave m’échappe avant que j’aie pu le retenir.
Wes glousse doucement.
– Tant que ça, hein ? C’était un client ou tu as choisi un autochtone ?
La tension entre nous disparaît momentanément.
– C’est important ? je réponds en fermant les yeux.
– Tout ce qui te touche est important, Mia. Tu ne l’as pas encore compris ?
Son ton est sincère, mais plein de regrets. Il essaie de se la jouer cool, mais il
échoue misérablement, nous le savons tous les deux.
– Wes…
Je l’entends retenir son souffle avant de répondre.
– Non, Mia. Je ne vais pas faire mine de ne pas être dégoûté que tu aies baisé qui
tu voulais à Hawaï, alors que tu ne te prives pas de me dire que tu ne supportes
pas que je fasse la même chose avec Gina.
Il n’a pas tort. Toutefois, le cœur a ses raisons… Wes a beau dire la vérité, ça ne
change pas que ça me blesse de le savoir avec Gina. Énormément. Nous nous
faisons tous les deux du mal, et aucun de nous ne trouve de moyen de l’éviter.
Ma gorge me semble soudain serrée quand je réponds.
– Écoute, Wes, je suis désolée. Je comprends ce que tu dis, et tu as raison.

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– Ça veut dire que tu vas rentrer à la maison ? demande-t-il d’une voix pleine
d’espoir.
Rentrer à la maison. Où est ma maison ? En Californie, dans mon minuscule
studio où je n’ai pas mis les pieds depuis cinq mois ? À Las Vegas, dans la
maison pourrie où j’ai grandi ? À Malibu, dans les bras d’un homme superbe qui
détient probablement un plus gros morceau de mon cœur que je ne suis prête à
l’admettre.
Je me lèche les lèvres et rouspète.
– Wes, tu sais que je ne peux pas faire ça.
Il pousse une série de grognements légers, et chacun me fait l’effet d’un coup de
poignard dans le ventre.
– C’est faux. Tu peux. Tu ne le veux pas.
Je secoue la tête en essayant de démêler toutes les émotions qui se bousculent en
moi.
– Je ne peux pas te laisser payer la foutue dette de mon père.
– Encore une fois, soupire-t-il, tu peux, mais tu ne le veux pas.
Il me semble soudain fatigué, comme si chaque mot lui pesait, et tout cela est de
ma faute. C’est moi qui le fais souffrir, qui nous fais souffrir. Ces conversations
sont plus dures à chaque fois, et je dois encore tenir six mois. Dieu sait où nous
en serons à la fin de cette année. Pour l’instant, notre amitié n’est pas au top.
Nous sommes sans arrêt en train de nous faire du mal, même sans le vouloir.
Un long silence s’installe. Je cherche quoi dire, ne trouvant pas les mots pour
arranger la situation.
– Quand est-ce que je peux te revoir ? demande-t-il.
Il veut toujours me voir ? Je ne comprends pas ce mec. Cela dit, je ne comprends
pas la plupart des mecs, mais celui-là encore moins que les autres.
– Euh, je ne sais pas. Je viens d’atterrir à Washington où je dois faire la jolie au
bras d’un homme qui a l’âge de mon père.
Wes éclate de rire.
– Un vieux ? Au moins, je sais que tu ne vas pas coucher avec un papi qui prend
du Viagra !

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– C’est pas sympa, je gronde d’une voix amusée. Et puis, il a un fils canon qui
est sénateur. Tu sais l’effet que me font les hommes de pouvoir…
Le rire de Wes s’évanouit instantanément, et la tension entre nous redevient
palpable.
– Tu plaisantes ?
– Pas du tout.
– Bon sang, tu ne veux pas plutôt coucher avec moi ?
Il ne rate jamais une occasion.
– Avec plaisir, je réponds sans réfléchir.
– Quand ?
– La prochaine fois que je te verrai, bêta.
– Et ce sera quand ?
Mince, je ne suis plus vraiment certaine que nous plaisantions.
– Je ne sais pas. Je suppose que je te verrai quand je te verrai, je réponds.
– Pourquoi moi ? demande-t-il d’une voix grave et frustrée, comme s’il regardait
le ciel pour s’adresser à Dieu. Pourquoi je me suis entiché d’une tarée comme toi
?
Il éclate de rire, et mon cœur bat plus fort. Ce rire. J’adore ce rire.
– Si le destin te distribue les mauvaises cartes, parie contre le dealer. Salut, Wes.
Je n’attends pas qu’il réponde pour raccrocher et je tente de me calmer. Il est
temps de te concentrer sur ton prochain client, Mia.
*
* *
Ce n’est pas Warren Shipley qui m’accueille à l’entrée de sa demeure. L’homme
qui se tient en haut des marches en pierre, adossé à la colonne en marbre blanc,
semble tout droit sorti du magazine GQ. C’est Aaron Shipley, le sénateur
démocrate de Californie. J’ai fréquenté mon lot de beaux gosses au cours de ma
vie. J’ai également fréquenté des hommes capables de fendre du bois de leurs
mains nues. Cependant, je n’ai encore jamais vu d’hommes qui portent aussi
bien un costume.
Le tissu gris anthracite moule parfaitement ses larges épaules, sa taille fine et ses
longues jambes. Il a sans doute été fait sur mesure. Ses yeux sont cachés par des

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lunettes de soleil Ray Ban, et ses cheveux blond foncé sont coiffés façon « saut
du lit », ce qui lui va parfaitement bien. Il a l’air apprêté avec une touche de
fantaisie, une combinaison mortelle pour une fille comme moi. Et sans doute
pour toutes les filles de la planète.
Il descend lentement les marches, une à la fois comme un félin, jusqu’à l’allée de
gravier. La plupart des femmes iraient à sa rencontre, mais je ne suis pas comme
toutes les femmes et il n’est clairement pas comme tous les hommes. Je profite
du spectacle en regardant chacun de ses gestes. Un air d’autorité lui colle à la
peau comme un parfum distingué. Il vient à moi avec une grâce, une agilité et
une telle puissance que je manque fondre sur place. L’humidité qui m’a surprise
tout à l’heure n’est plus rien, maintenant que je sens la sueur perler dans ma
nuque, chaque goutte ruisselle dans mon dos, me chatouille et me fait presque
frissonner malgré la chaleur.
– Vous devez être Mademoiselle Saunders, dit-il d’une voix ferme et
chaleureuse.
Il me tend la main et à peine nos doigts se touchent-ils qu’une décharge
électrique remonte le long de mon bras. J’essaie de retirer ma main, mais il la
tient plus fort.
– C’est étrange, je sens rarement l’essence de quelqu’un en ne faisant que le
toucher.
– Mon essence ?
Un sourire mystérieux se dessine sur ses lèvres délicieuses. Elles ne sont ni trop
fines ni trop charnues, parfaites pour les miennes. Il n’a toujours pas lâché ma
main qu’il retourne dans la sienne. Ce simple contact me fait saliver et rêver
qu’on aille plus loin. Il remonte ses lunettes sur sa tête avec un geste bien trop
cool pour un homme politique. Les hommes comme lui sont censés être
ennuyeux et ne parler que de lois et du gouvernement et… Ses yeux marron
plongent soudain dans les miens et me transpercent. Je soupire tandis que son
pouce frotte le dessus de ma main.
– Votre essence est votre force de vie, votre magnétisme. Quand nous nous
sommes touchés, j’ai senti une décharge électrique. Vous aussi ?

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Je hoche la tête, la langue engourdie, perdue dans ses iris chocolat, concentrée
sur son nez droit, ses pommettes hautes et sa mâchoire saillante.
– Quand j’appuie nos paumes l’une contre l’autre, l’énergie est plus forte, dit-il
en serrant nos mains.
Il hausse les sourcils, et son regard se pose sur ma bouche. Mes genoux se
mettent à trembler et je fais un effort surhumain pour garder ma langue où elle
est.
– Venez, dit-il.
Ce n’est qu’un mot, mais je me sens de nouveau électrocutée. Or, cette fois-ci,
tous les frissons convergent entre mes cuisses. Il dit autre chose, mais je suis
perdue dans mes pensées, ou plutôt dans mon désir. Il lâche ma main pour
caresser ma joue, et j’en ai la chair de poule.
– Mia, est-ce que ça va ?
Son regard inquiet balaie mon visage et il fronce les sourcils.
– J’ai dit, venez, Père vous attend.
Je cligne plusieurs fois des yeux, m’obligeant à revenir sur terre.
– Ah oui, pardon, je réponds en secouant la tête. La journée a été longue. J’étais
à Hawaï et je suis venue directement ici, avec quelques escales. Je n’ai pas dormi
de la nuit.
Les escales m’ont obligée à courir d’une porte à une autre pour ne pas rater mes
vols. J’aurais pu tuer Tante Millie de ne m’avoir laissé que quarante-cinq
minutes pour changer d’avion. Je n’ai même pas eu le temps d’aller aux toilettes
entre deux vols et il faut attendre d’être à une certaine altitude pour pouvoir
détacher sa ceinture. C’est loin d’avoir été mon meilleur voyage.
Aaron secoue la tête.
– C’est terrible, je vais vous présenter à Père, puis je dirai à James de vous
montrer votre chambre pour une petite baise.
– Quoi ? je demande en m’arrêtant net en haut des marches.
– J’ai dit que j’allais vous présenter à Père et vous montrer votre chambre où
vous pourrez vous mettre à l’aise.
– Ah, me mettre à l’aise, je répète en me retenant de rire.
– Qu’aviez-vous compris ?

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Il sourit, révélant des dents parfaites. Il aurait sa place en couverture des
magazines. Ah zut, c’est déjà le cas, c’est vrai. Peu importe.
– Je pensais que vous aviez parlé de baise, je réponds en riant.
Cette fois-ci, c’est lui qui s’arrête net devant la porte.
– Eh bien, commence-t-il en souriant en coin, cela peut s’arranger, même si je ne
suis pas certain que mon père apprécie que je couche avec vous avant de vous
avoir invitée au restaurant.
Il me lance un clin d’œil et reprend ma main. Une nouvelle décharge électrise
nos paumes, remuant notre énergie magnétique. Aaron me regarde en coin en me
guidant dans le hall d’entrée.
– Vous la sentez, vous aussi ?
Bon sang, si seulement je ne sentais rien… Plutôt que de mentir, je ferme les
yeux, je retiens ma respiration et je hoche la tête.
*
* *
Depuis l’extérieur, l’immense maison de maître est impressionnante, mais ce
n’est rien, comparé à l’intérieur. Dans le hall d’entrée, un double escalier couvert
d’un tapis jaune me rappelle la route de brique jaune sur laquelle Dorothée
sautille gaiement. Si je n’étais pas si fatiguée, je sautillerais moi aussi. Cette
demeure est plus luxueuse que toutes celles que j’ai vues jusqu’à présent.
Pourtant, la maison de Wes est superbe, confortable et vaut sans doute une
fortune. L’atelier d’Alec était impressionnant, le penthouse de Tony et Hector
branché. Or, le propriétaire de cette baraque doit être la personne la plus riche
que j’aie jamais rencontrée. Quand Tante Millie m’a dit que Warren était un
homme d’affaires, je ne savais pas à quoi m’attendre. Je me suis dit qu’il vivrait
dans un endroit sympa, or j’ai l’impression d’être chez la reine d’Angleterre. Les
murs sont arrondis pour accueillir l’escalier, il y a des moulures au plafond, et
les fenêtres immenses sont bordées de lourds rideaux bordeaux. Mes pieds
s’enfoncent dans une moquette épaisse qui semble si moelleuse que je rêverais
d’y marcher pieds nus.
– C’est incroyable.
Aaron sourit et regarde autour de nous, l’air légèrement blasé.

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– Ma mère avait un vrai talent pour la décoration.
– Ah ? Elle doit être très fière, c’est magnifique.
– Elle nous a quittés il y a longtemps, mais elle appréciait les compliments et les
magazines de déco qui sont venus faire des photos. Elle en a fait la couverture
plus d’une fois. Cette maison était sa fierté et sa joie, conclut-il.
Je suis Aaron en silence, observant toute la splendeur qui m’entoure, jusqu’à ce
que nous arrivions devant une double porte en chêne. Des rires retentissent de
l’autre côté. Aaron frappe fort sur le bois mais n’attend pas de réponse, ouvrant
la porte comme s’il en avait le droit.
– Aaron, fiston, viens, entre. Kathleen et moi discutions justement de la débâcle
de la semaine dernière, dans la cuisine.
Il désigne une femme vêtue d’une jupe crayon bleu marine avec un tablier blanc
et une chemise beige boutonnée jusqu’au cou.
– Vois-tu, le traiteur de la semaine dernière pensait que je voulais…
– Père…
Aaron l’interrompt brusquement, ce que je trouve trés impoli.
Soudain, je le trouve moins excitant.
–… Mademoiselle Saunders est là.
Il m’invite à avancer et je me retrouve face à une copie plus âgée du jeune
Shipley.
– Eh bien, vous êtes encore plus belle en personne que sur votre profil. Cette
Miss Milan sait ce qu’elle fait. Elle sera parfaite, tu ne crois pas, Aaron ?
Aaron me reluque des pieds à la tête.
– Si, c’est la candidate idéale pour attirer l’attention de tes confrères.
– Venez ici, mon enfant, je suis Warren Shipley, me dit-il d’une voix enjouée en
me prenant dans ses bras comme le ferait un père. Vous n’êtes pas du tout ce à
quoi je m’attendais, déclare-t-il en reculant pour me regarder dans les yeux.
Un vieux pervers regarderait plutôt mes seins, dans cette position.
Apparemment, ma tante m’a dit la vérité. Je ne l’intéresse pas de cette façon.
– Merci d’être venue. La situation est unique, mais Miss Milan m’a assuré que
vous seriez une superbe candidate. Rien qu’à vous regarder… je sais déjà qu’ils
vont me manger dans la main.

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Chapitre 2

– C omment ça, « rien qu’à me regarder » ? je demande en fronçant les


sourcils.
Aaron soupire derrière moi, puis il pose sa main en bas de mon dos… très bas.
Assez bas pour sentir la courbe de mes fesses à travers ma jupe. Ensuite, il
tapote mes fesses et il vient devant moi, croise les bras et s’assied sur le bureau
de son père, comme si de rien n’était.
Je suis sur le point de lui en coller une quand il explique la situation.
– Père vous a engagée parce que vous êtes magnifique, jeune, et que vous serez
canon dans une robe de soirée. Vous connaissez l’expression « femme trophée »,
n’est-ce pas ?
Il s’arrête pour me reluquer de nouveau, et j’ai envie de détester l’effet qu’il me
fait, mais je ne peux pas. C’est quelque chose, d’être ouvertement admirée par
un homme de son statut.
– Alors, je dois faire semblant d’être votre… quoi, Monsieur Shipley ? je
demande au père.
Warren regarde Kathleen, dont les yeux paraissent infiniment tristes, soudain.
– Mieux vaut que je vous laisse discuter de vos affaires, dit-elle d’une voix
tremblante.
Elle marche d’un pas si léger que je ne l’entends même pas sortir.
Apparemment, lorsqu’on travaille dans ce genre de maison, on apprend à ne pas
faire de bruit. Warren lève la main pour lui dire quelque chose, mais Aaron la
saisit et la repose sur le bureau.
– Ma chère Mia, les hommes que je fréquente font tous partie du club des Un
Pour Cent, comme moi-même. Ils ont plus d’argent que des milliers de gens n’en

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auront besoin au cours de leur vie et ils s’en servent pour contrôler de grosses
entreprises. Et moi, je fais semblant de jouer leur jeu.
Je suis légèrement confuse, car le seul club nommé Un Pour Cent que je
connaisse est une association de motards délinquants dans la région de Las
Vegas.
Je pose mes mains sur mes hanches et penche la tête sur le côté.
– Ça n’explique pas pourquoi je suis là.
Warren se racle la gorge et passe sa main sur sa barbe naissante. Il semble
incroyablement gêné par cette conversation.
– Vous êtes là pour incarner la pute de mon père, déclare froidement le sénateur.
Je recule comme si l’on venait de me gifler et je croise les bras.
– Je vous demande pardon ? Je ne couche avec mes clients que si j’en ai envie.
– Non, non, non, ma chère. Je ne veux pas ça… s’empresse de rectifier Warren,
qui a l’air aussi mal à l’aise que moi.
Il regarde Aaron, cherchant son aide, et celui-ci se lève en levant les yeux au
ciel.
– Mia, ces hommes ont tous une femme à leur bras, dont la plupart sont des
salopes chercheuses d’or. Elles ne sont là que pour être belles, prendre autant
d’argent qu’elles le peuvent et baiser avec les hommes où et quand ils le veulent.
– Bon sang, fiston, tu dois vraiment parler aussi crûment ?
Warren se lève et vient vers moi avec un regard légèrement honteux.
– Mia, je ne vais pas mal vous traiter, mais j’ai besoin de rester dans leurs
bonnes grâces pour faire avancer l’élaboration de mon nouveau programme. Ils
sont tous accompagnés de femmes jeunes et superbes, ce que je n’approuve pas.
Cependant, je dois jouer selon leurs règles si je veux que mon projet aboutisse,
car pour cela, j’ai besoin du soutien de plusieurs hommes haut placés. Sans eux,
mon programme tombera à l’eau.
– J’ai l’impression que vous avez beaucoup réfléchi à la question.
– J’y ai investi beaucoup de temps et d’argent en effet. Plus que je veux bien
l’admettre, confirme-t-il.
Aaron secoue de nouveau la tête.

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– Père est un peu le Batman des temps modernes. Il construit le siège d’un
organisme qui apportera des services médicaux à des pays du tiers-monde. Il va
commercialiser des vaccins à une fraction du prix habituel et, donc, il doit créer
de nouveaux échanges entre certains pays, mais aussi s’adresser aux différents
gouvernements pour obtenir l’immunité du personnel qu’il va envoyer auprès
des communautés locales. Le gouvernement des États-Unis va également devoir
passer des décrets pour autoriser l’entrée et la sortie de l’association du territoire.
Ce sera un peu un mélange de la Croix-Rouge, du Lions Club International et de
Médecins Sans Frontières.
– Vous voulez aider à sauver des gens dans des pays du tiers-monde ? Je ne
comprends pas pourquoi ce serait un problème. Est-ce que les membres du
gouvernement ne devraient pas se jeter sur l’occasion de le faire, surtout si ça ne
coûte rien aux contribuables ?
Warren pose ses mains sur mes joues et plonge son regard dans le mien. Ses
yeux marron sont chauds et pleins de gentillesse.
– C’est le cas de certains, Mia. Mais il y a de nombreuses barrières, plus que
vous ne pouvez l’imaginer.
Il laisse tomber ses mains et recule pour s’appuyer de nouveau contre le bureau.
– Pour faire tomber ces barrières, j’ai besoin du soutien de quelques hommes
puissants, dont certains demandent que ma famille leur accorde des faveurs, ce
que nous refusons.
Warren regarde Aaron qui soupire et baisse la tête. Warren ne semble pas prêt à
mettre en péril la carrière politique de son fils pour faire avancer son projet.
C’est alors que je décide que Warren Shipley est un homme bien. Quant à son
fils… on verra.
– Alors, que dois-je faire ? je demande.
Aaron vient vers moi et pose sa main chaude sur ma nuque pour la serrer
légèrement.
– Vous irez à divers événements avec mon père, vous aurez l’air jolie, vous
sourirez, vous serrerez mon père comme si vous étiez son nouveau jouet, et c’est
tout.
– Et vous ? je demande en me léchant les lèvres.

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Il suit le mouvement de ma langue avec une intensité qui me plaît. Si son père
n’était pas là, je suis sûre que je serais plaquée contre le mur le plus proche et
que sa bouche serait sur la mienne.
Un gémissement retentit au fond de sa gorge, que je ressens jusqu’à la pointe des
pieds. Il approche son visage du mien, si près que je sens son souffle sur ma joue
lorsqu’il chuchote dans mon oreille.
– Moi ? Eh bien, j’aurai le privilège de divertir le nouveau jouet de mon père en
privé, répond-il en haussant les sourcils.
Il recule et me fait un clin d’œil.
– On commence quand ? je demande.
*
* *
Le lendemain soir, après avoir dormi presque vingt-quatre heures, je me retrouve
à un gala de levée de fonds avec monsieur Shipley. Je regarde autour de moi
comme une gazelle qui a senti l’odeur d’un chasseur. Lorsque j’ai accompagné
Wes à ce genre d’événement, il était là pour me mettre à l’aise. Ce n’est pas le
cas, cette fois-ci, et je dois puiser dans ma confiance en moi pour ne pas perdre
de vue ce que je fais ici. Je balaie la pièce du regard et je repense aux soirées
guindées de Malibu, la différence, c’est que les invités qui m’entourent ce soir
sont clairement plus riches. Ma robe n’a pas de sequins cette fois-ci. Je porte un
modèle dessiné par Dolce & Gabanna spécialement pour monsieur Shipley. Elle
est entièrement ouverte depuis la nuque jusqu’aux fesses, mais elle ne montre
rien devant. Lorsqu’il m’a vue, Warren a rougi et n’a rien dit du placard rempli
de vêtements haute couture qui se trouve dans ma chambre. J’ai tout pris en
photo et je les ai envoyées à Hector, mon meilleur ami gay de Chicago. Sa
réponse disait quelque chose du genre « Chica , tu es la reine de l’univers. Que
dois-je faire pour avoir un billet pour le paradis ? ».
En observant la foule, je suis choquée par le nombre d’hommes de plus de
cinquante ans accompagnés de femmes assez jeunes pour être leurs filles, voire
leurs petites-filles. Je sors discrètement mon téléphone pour prendre des photos
de la salle de bal géante et de ses invités. Nous sommes à une levée de fonds
pour l’un des « amis » de Warren, qui a lui-même admis que très peu des

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membres du Un Pour Cent étaient réellement amis et que ces amitiés allaient
rarement au-delà du prochain accord commercial. En bref, si l’accord ne
rapproche pas les deux personnes de leur but ou qu’il ne leur rapporte pas la
montagne d’argent escomptée, l’amitié est jugée comment n’ayant plus aucune
valeur. Honnêtement, ça me dégoûte, mais je suis payée pour être là, alors… je
travaillerai sur ma mauvaise conscience plus tard.
À : Ma Salope Chérie
De : Mia Saunders
Devine le titre de la photo.
À : Mia Saunders
De : Ma Salope Chérie
Facile ! C’est la journée père-fille au Capitole 1 !
Je suis à deux doigts d’éclater de rire et je dois faire un tel effort pour me retenir
que je finis par m’étouffer sur mon champagne en vacillant sur mes talons
aiguilles. Bon sang, j’adore cette fille.
– Tout doux, dit un homme grisonnant en attrapant mon bras pour que je
retrouve mon équilibre. Vous vous étouffez sur de l’or liquide. Mais je suppose
qu’il y a de pires façons de partir qu’en s’étouffant sur du champagne à cinq
cents dollars la bouteille.
Il ricane tandis que je crache la gorgée encore dans ma bouche dans la plante
devant moi. Je tousse sèchement, et l’homme saisit un verre d’eau sur le plateau
d’un serveur. Je le bois lentement, rinçant le champagne qui est passé par le
mauvais trou.
– Je suis vraiment désolée, dis-je en me raclant la gorge puis en faisant la moue.
L’homme, qui doit avoir au moins soixante-cinq ou soixante-dix ans, secoue la
tête et tapote ma joue comme si j’étais son toutou préféré.
– Pas de souci, ma petite. Qui est ton papa ?
Bon sang, il est passé en un rien de temps du papi gâteau au vieux pervers.
– Je ne suis pas certaine de vous comprendre, je réponds en haussant les sourcils.
– Ne fais pas l’idiote. Qui s’occupe de toi ?
Il lèche ses lèvres gercées et respire la bouche ouverte, m’asphyxiant avec son
odeur de cigare et de whisky. Je déglutis pour me retenir de vomir.

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Quelqu’un se racle la gorge derrière lui.
– Tu sembles avoir trouvé quelque chose qui m’appartient, dit Warren Shipley
en lançant au vieux un regard glacial lorsqu’il remarque sa main posée sur mon
bras.
– Warren, je ne savais pas que tu avais enfin adopté un petit agneau, répond
l’autre en souriant, tout en me reluquant. Et quel joli petit animal ! Tu le prêtes ?
ajoute-t-il d’une voix mielleuse.
J’ai de plus en plus de mal à ravaler ma bile.
Warren éclate de rire suffisamment fort pour que toute la pièce entende.
– Je crains que non, Arthur. Je me fais un peu égoïste avec l’âge, mon vieil ami.
Arthur lâche mon bras et, instinctivement, je le frotte à l’endroit où il avait posé
sa main. Warren remarque mon geste, et sa mâchoire se crispe. Il avance vers
moi et me prend délicatement par la taille.
– Je te présente Mia, ma protégée. Mia, voici Arthur Broughton.
Warren pince légèrement ma taille, et je tends ma main à Arthur.
– C’est un plaisir, Monsieur Broughton.
Je me rapproche de Warren pour être plus convaincante, et ce dernier me serre
contre lui avant de m’embrasser sur la tempe.
– Mia, tu as l’air assoiffée. Va te chercher à boire, je te rejoins dans un instant.
Je hoche la tête, et il me met une tape sur les fesses. C’est léger, même si on ne
peut pas dire que ce soit amical, comme lorsque Mason, mon ancien client, me
mettait une fessée chaque fois que je passais devant lui. Au moins, Warren ne
me tripote pas comme cela semble être la norme pour ces vieillards.
Je me faufile parmi les vieux auxquels sont agrippées de belles jeunes femmes.
Dans ma tête, je visualise de petites menottes qui gardent ces pauvres femmes
ligotées au portefeuille de ces hommes. Beurk.
Le barman m’offre une coupe de champagne que je bois cul sec. Je repose la
coupe vide et j’en demande une autre.
– Doucement, ma belle, si tu t’affiches bourrée, tu ruineras l’image de mon père,
dit Aaron en s’installant sur le tabouret à côté du mien.
– Je ne comprends pas ce que je fais là, je réponds en secouant la tête et en
fronçant les sourcils.

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– Tu le fais déjà, pourtant. Tu es jolie, donc tu montres à ces vieux schnocks que
mon père est l’un d’entre eux. Tu le vois parler avec Arthur Broughton ?
Je grimace en entendant le nom de celui qui m’a empoignée par le bras.
– Arthur est propriétaire des ports par lesquels Père veut faire entrer et sortir les
médicaments. Tous les gérants de ports du globe sont dans sa poche, et Père a
besoin de lui pour amarrer ses navires.
– Mais pourquoi ? Ce qu’il fait est bien, c’est de l’aide humanitaire !
Aaron ricane, puis sourit.
– Oui, mais ça ne rapporte pas d’argent et c’est dangereux d’envoyer des
Américains dans ces pays, même pour monter des cliniques. Et quand je dis «
cliniques », ce sont surtout des bunkers. Mais ce n’est qu’une seule étape, et ça
n’arrivera que si Arthur accepte de laisser les bateaux entrer et sortir, sachant
qu’il perdra l’argent qu’il gagnerait avec d’autres bateaux. Ce n’est pas une
tâche facile. Père doit ensuite convaincre les entreprises de cargos, les médecins,
les missionnaires, les forces armées, et ainsi de suite. C’est un véritable projet
d’envergure.
Waouh ! Alors, Warren est vraiment un Batman des temps modernes. Il apporte
la médecine aux pays du tiers-monde et il prend des risques pour le bien de
l’humanité. Pour une fois, je suis fière de ce que je fais pour mon client.
– Alors, comment je peux aider ?
Aaron lève une main et caresse ma joue du bout du pouce.
– Détends-toi, tout le monde a vu son beau jouet tout neuf. Rien que par ta
présence, tu l’aides à faire partie des grands.
J’écarquille les yeux et le fusille du regard.
– Non pas que moi, je croie que tu es un jouet. Waouh, tu es susceptible !
Je lève les yeux au ciel.
– Désolée. Peut-être un peu, oui. Cette situation est différente de celles
auxquelles je suis habituée.
Il se rapproche de moi et je sens son parfum aux saveurs de pomme et de santal.
– À quoi es-tu habituée, alors ? demande-t-il d’une voix de séducteur.
Je lève une épaule et regarde par-dessus en battant des cils.
– C’est différent pour chaque client.

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– Ah oui ? Et si… tant que tu es là… je voulais profiter de cette différence… ça
pourrait t’intéresser ? Avec moi, pas mon père.
Je retiens mon souffle et penche la tête sur le côté pour étudier l’homme qui se
tient devant moi. Il n’est pas timide, c’est certain. Il me regarde avec un mélange
de désir, d’égoïsme et de possessivité qui fait naître des frissons de plaisir entre
mes jambes. Il pose sa main sur mon genou et dessine de petits cercles sur ma
peau nue. Mon excitation se transforme en une marmite d’énergie bouillante. Il
semblerait qu’Aaron Shipley aime ce petit jeu de séduction, en tout cas, il sait
s’y prendre, car je suis largement séduite.
Heureusement, Warren revient avant que je ne perde la tête et que je morde une
bouchée du délicieux spécimen devant moi.
– Champagne, s’exclame-t-il en souriant jusqu’aux oreilles. Nous avons quelque
chose à fêter ! annonce-t-il alors que le barman lui tend une coupe.
– Ah bon, Père ? Raconte-nous. L’attente… commence-t-il en me toisant du
regard, est terrible.
Warren passe la demi-heure qui suit à nous expliquer l’accord qu’il a conclu
avec Arthur Broughton. Il s’avère qu’Arthur a besoin d’une déduction fiscale et
de redorer l’image médiatique de son entreprise après que ses échanges avec
l’Asie ont été lourdement critiqués. Il ne peut pas laisser passer l’occasion de
faire savoir au public que ses ports servent à importer le matériel médical et les
médecins qui sauvent certaines des populations les plus pauvres du monde.
– Merci, Mia. Tu m’aides déjà à faire avancer mon projet.
Je secoue la tête en fronçant les sourcils.
– Je ne vois pas comment.
– Eh bien vois-tu, Arthur m’évitait parce qu’il pensait que je n’approuvais pas
l’accord qu’il a conclu avec un des concurrents de Shipley Inc., qui est d’ailleurs
parfaitement apocryphe.
Aaron hoche la tête, et je fais mine de savoir ce que veut dire apocryphe. Sans
doute veut-il dire que l’accord est douteux, ou quelque chose comme ça.
– Tu m’as donné l’occasion de commencer une conversation avec lui. Nous
avons d’abord parlé de toi, puis nous sommes passés aux affaires. Ça a marché
comme sur des roulettes, dit-il en souriant et en vidant sa coupe.

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Je ne peux rien dire de plus, ce scénario est en dehors de ma zone de confort. Il
va falloir que je me fie à mon instinct, tout simplement.
– Dans ce cas, je suis ravie d’avoir aidé ! dis-je en levant mon verre et en riant.
Je vide ma coupe à mon tour, puis Warren décide qu’il est temps de rentrer.
La soirée a été longue, les conversations ennuyeuses. Les semaines à venir vont
être aussi peu amusantes que la section « histoire » d’une bibliothèque. Je ne
vais avoir pour divertissement que des vieillards, des accords commerciaux et
des nanas chercheuses d’or. Il va falloir que je trouve un moyen d’être plus utile.
Plus tard dans la nuit, je réfléchis à la question en parcourant les couloirs de la
demeure, à la recherche de la cuisine, tard dans la nuit. Il y a des œuvres d’art de
toutes les époques tous les trois mètres et j’ai plus l’impression d’être dans un
musée que dans une maison. Il n’y a pas de photos de famille accrochées aux
murs ni de souvenirs de l’enfance d’Aaron. Ce ne sont que des antiquités et des
artefacts précieux sans la moindre valeur personnelle. Ce sont clairement des
reliques du passé qui ont été oubliées par les habitants de la maison ou qui ne
servent que comme démonstration d’opulence. Cela me rend triste, car ce sont de
véritables joyaux qui devraient être mis en avant, pas utilisés pour combler les
espaces dans une immense maison vide.
Au fond du couloir, je trouve une vaste cuisine avec un immense frigo aux
portes vitrées. Derrière l’une, du lait, du fromage, des fruits et des légumes, rien
d’anormal pour un frigo. Derrière les autres, des fleurs de toutes les sortes.
– Oh, je ne vous avais pas vue, dit une voix douce à mes côtés.
Je tourne la tête et découvre Kathleen, l’employée de maison, sur le pas de la
porte.
– Je n’arrivais pas à dormir, je réponds en souriant. Je ne me suis pas encore
habituée au décalage horaire.
Elle entre dans la cuisine, ouvre un placard et sort deux assiettes.
– Vous voulez un sandwich ?
– Avec plaisir. Ça fait deux jours que nous ne mangeons qu’au restaurant et je
rêve d’un bon vieux jambon-fromage. Par contre, je n’accepte que si tu me
tutoies.
– Ça marche, répond-elle.

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Elle sourit tendrement, mais sa joie n’atteint pas ses yeux. Elle ne cesse de me
regarder du coin de l’œil en préparant les sandwichs et je devine sans mal que
quelque chose la tracasse.
– Tu sais, tu peux me demander ce que tu veux, je répondrai sincèrement. J’ai
l’impression que tu ne sais pas pourquoi je suis ici.
Elle secoue la tête et joint ses mains sur la ceinture de sa robe de chambre.
– Je suis une escort, Warren a payé mes services.
Kathleen écarquille ses grands yeux bleus et elle pose une main sur son cœur en
se tenant au plan de travail.
– Je vois.
Je n’ai pas pu m’en empêcher. Il est évident qu’il se passe quelque chose entre
elle et Monsieur Shipley Senior.
– Ce n’est pas ce que tu penses… je commence, alors qu’elle recule jusqu’au
frigo.
– Peu importe ce que je pense. Je suis, euh… je ne suis qu’une employée, dit-elle
en fronçant les sourcils.
J’appuie une hanche contre le comptoir et j’attends qu’elle me regarde.
Lorsqu’elle lève la tête, ses yeux sont remplis de larmes.
– Je ne couche pas avec lui, Kathleen.
– Mais tu es une escort. Tu viens de dire que…
– Je suis son escort, et il m’a engagée pour l’accompagner à des soirées
mondaines, pour avoir l’air jolie à son bras. Pas pour dormir dans son lit, à
l’évidence il a déjà assez de compagnie comme ça, j’ajoute en souriant, la faisant
rougir.
– Je ne vois pas de quoi tu parles, dit Kathleen en resserrant les pans de sa robe
de chambre sur sa poitrine.
– Bien sûr que si.
En tout cas, c’est très clair à mes yeux. Les deux sandwichs qu’elle a préparés
sont encore sur la table, et l’un est bien plus gros que l’autre.
– Pour qui est le sandwich ?
– J’ai très faim, répond-elle en rougissant de plus belle.

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– Ouais, moi aussi j’ai souvent faim après une bonne partie de jambes en l’air.
Apporte son sandwich à ton homme. Ton secret sera bien gardé avec moi,
promis.
Je prends l’assiette avec le plus petit sandwich et je m’apprête à retourner dans
ma chambre, où la télé m’attend.
– Mia, il ne veut pas que ça se sache. Ça lui ferait du mal.
– Du mal ? Pourquoi ? je demande en me tournant vers elle.
– C’est moi qui ai élevé Aaron après la mort de sa mère, et il ne comprendrait
pas. Son père et moi nous sommes mis d’accord pour ne rien lui dire. Et puis,
nous ne venons pas du même milieu. Moi, je ne suis personne.
Je tends la main pour prendre la sienne, mais elle recule vivement.
– C’est rien, ça va. C’est moi qui l’ai choisi. Si je n’étais pas amoureuse de lui,
je serais déjà partie. Je préfère l’avoir dans l’obscurité de la nuit que pas du tout.
Bien évidemment, je ne suis pas du tout d’accord avec ce qu’elle dit, mais quand
j’ouvre la bouche pour répondre, elle se rapproche de moi et serre mon bras.
– Merci de t’inquiéter, mais tu ne nous connais pas. Nous apprécierons ta
discrétion à ce sujet.
Elle attend en silence tandis que je cherche mes mots.
– Bien, si c’est ce que vous voulez.
– Oui, merci. À demain matin. Monsieur Shipley m’a dit qu’il y avait un certain
nombre d’événements auxquels il voulait t’emmener. Je suis soulagée de savoir
pourquoi tu es là. Merci pour ton honnêteté, Mia. C’est un trait de caractère
rafraîchissant, dans ces contrées.
Elle m’offre ce sourire timide que je n’ai vu que deux fois depuis que je l’ai
rencontrée dans le bureau de Warren, puis elle part, me laissant dans la cuisine
avec mon sandwich et un nouveau projet. Bien sûr, il faut que je sache si mon
client partage les mêmes sentiments que la belle employée de maison. Il faut
aussi que je sache ce qu’Aaron pense de Kathleen.
J’ai le sentiment que le jeune Shipley ne va pas être une affaire facile, mais il
faut bien que quelqu’un s’y colle. Je ricane dans ma barbe en m’enfonçant de
nouveau dans le labyrinthe de couloirs pour regagner ma chambre. Demain est
un autre jour.

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1 . Bâtiment qui sert de Congrès aux États-Unis. (NdT, ainsi que pour toutes les
notes suivantes.)
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Chapitre 3

J e suis encore à moitié endormie lorsque je passe la porte de ce qui me semble


être la salle à manger. Eurêka, je l’ai trouvée ! Je regarde autour de moi et
pousse un grognement lorsque je vois Kathleen venir vers moi, l’air impeccable
dans sa jupe crayon, sa chemise en soie et ses talons aiguilles. Ses cheveux
blonds grisonnants sont attachés dans un chignon banane dont pas une mèche ne
dépasse, et elle ne porte qu’un soupçon de maquillage. Elle est superbe pour son
âge, et il n’est que sept heures du matin. Qui est aussi élégant à sept heures du
matin ?
Elle m’offre la chaise à gauche de Warren, et je m’y assieds avec toute la grâce
d’un éléphant, soufflant sur les cheveux qui me tombent devant les yeux. Warren
baisse le coin de son journal et me regarde en souriant.
– Bonjour Mia, tu as bien dormi ?
Il étudie mon débardeur rose bonbon et mon pantalon rayé de toutes les couleurs
qui ne me donnent pas plus que mes vingt-quatre ans. Je pourrais être sa petite
fille, et me voilà à jouer sa petite amie.
– En tout cas, je sais que toi oui, je dis d’une voix lourde de sous-entendus.
Il pose son journal sur ses cuisses et appuie ses coudes sur la table en chêne
massif.
– Il semblerait que tu sois désormais au courant d’une affaire très privée.
Souhaites-tu que nous en parlions ? demande-t-il d’une voix claire et calme.
Kathleen regarde ailleurs en me servant un café, puis elle remplit de nouveau la
tasse de Warren.
– Pas vraiment. Est-ce que toi, tu souhaites m’expliquer pourquoi tu as engagé
une escort pendant que ta copine te sert ton petit déjeuner ?

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Je suis tout à fait consciente que je dépasse les limites et je me demande si je
vais le regretter, je ne peux pas me permettre d’être renvoyée avant d’avoir assez
d’argent pour rembourser Blaine, cet enfoiré qui est aussi mon ex.
Warren grimace et se pince les lèvres si fort qu’elles en deviennent blanches.
– Tu ferais bien de ne pas oublier de rester à ta place. Mes affaires personnelles
ne te regardent pas.
Il n’a pas tort.
– Je suis désolée. Tu as raison, dis-je en baissant la tête et en prenant ma
fourchette, qui doit coûter plus cher que mon loyer.
J’enfourne la nourriture et je fais de mon mieux pour surveiller mes manières.
Mais dès que Kathleen quitte la pièce, je pose ma fourchette en argent et me
tourne vers Warren.
– Écoute, je suis désolée, j’admets, alors qu’il plie le Washington Post et qu’il le
pose sur la table. C’est juste que j’ai du mal à comprendre pourquoi je suis là
alors que tu as une très belle femme à tes côtés qui serait prête à faire tout ce que
tu dis.
Il plonge son regard dans le mien et réfléchit à ce que je viens de dire.
– Kathleen est avec nous depuis qu’Aaron est tout petit. Elle m’a aidé à l’élever
quand il a perdu sa mère. Ce n’est que récemment que nous sommes devenus
amants, soupire-t-il. Honnêtement, je ne sais même pas quoi penser de cette
situation. Ce serait mauvais pour mon image et pour les affaires d’avoir une
liaison avec une employée. Je ne sais pas non plus si Aaron l’accepterait. Il
aimait beaucoup sa mère, et sa mort a beaucoup affecté cette famille.
– Mais c’est Kathleen qui t’a aidée à la reconstruire, n’est-ce pas ?
– Oui, absolument. Les choses auraient été bien pires sans elle.
– Dans ce cas, d’une certaine manière, tu as une dette envers elle. Au fait, c’est
moi qui ai compris en lui parlant, hier soir. Ce n’est pas elle qui me l’a dit.
– Je suis avec Kathleen depuis plus d’un an et elle n’a rien dit à personne. Je
peux lui faire confiance.
– Alors, pourquoi ne pas lui confier ton cœur ? Rends cette histoire publique.
Est-ce qu’elle ne l’a pas mérité ? je demande alors qu’il gratte son menton. Peut-

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être que tu ne l’aimes pas autant qu’elle t’aime ? Est-ce que tu l’utilises
simplement pour tremper ta bite ?
Warren se lève d’un bond et jette sa serviette sur la table.
– Je ne tolérerai pas que tu me parles aussi crûment ni que tu m’accuses d’une
chose aussi odieuse. Le temps que je passe avec Kathy est spécial et… et…
attends… Tu viens de dire qu’elle m’aime ?
Je hoche la tête et il plonge ses mains dans ses poches, se balançant d’avant en
arrière sur ses talons.
– Vraiment ? Elle a vraiment dit qu’elle m’aimait ?
Furieux il y a quelques secondes, il est désormais déstabilisé. Je suis de plus en
plus douée, on dirait.
– Ouais, hier soir. Elle a dit qu’elle n’accepterait pas d’être ta femme de l’ombre
si elle n’était pas aussi amoureuse de toi.
Cette fois-ci, Warren se laisse tomber sur sa chaise.
– Nom de nom !
– Tu veux dire que tu ne le savais pas ?
Je ne suis là que depuis deux jours et j’ai déjà compris que cette femme était
dingue de lui. Comment se fait-il qu’il couche avec elle depuis plus d’un an sans
le savoir ? Peut-être qu’il est trop habitué aux hommes politiques qui ont
toujours des motivations cachées. Le monde serait bien plus beau si les gens
disaient ce qu’ils pensent.
Warren secoue la tête et couvre sa bouche.
– Alors, pendant tout ce temps…
– Ouaip. Ça fait longtemps que tu aurais pu te la taper.
Cette fois, j’obtiens un éclat de rire.
– Mia, ma chérie, tu es un sacré morceau sous ce joli papier cadeau.
– Un morceau ? J’ai eu droit à des qualificatifs bien pires !
Je souris quand il pose sa main sur la mienne.
– Merci. Je ne sais pas encore ce que je vais faire de cette information, mais je
sais que je dois poursuivre mon projet. Après l’avancée d’hier soir, je dois
continuer tant que la chance est de mon côté. Tu comprends, n’est-ce pas ? J’ai
besoin que tu fasses ce pour quoi je t’ai engagée.

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– Ça roule. Je ferai tout ce dont tu auras besoin.
– Bien. Regarde cette liste d’événements pour les prochaines semaines. Le reste
du temps, tu es libre de faire ce que tu veux. Je crois qu’Aaron se porte
volontaire pour te faire visiter Washington, si ça t’intéresse.
Je hoche vigoureusement la tête. Je ne sais pas quand je serai de retour dans la
capitale et je veux en profiter pour voir tous les monuments.
– Je suis surbooké jusqu’à vendredi. Nous irons à un dîner organisé par les
ambassadeurs des Nations unies au profit de différentes associations. Samedi, tu
iras boire le thé avec la nouvelle femme trophée d’Arthur. Il y aura environ dix
autres femmes avec qui j’ai besoin que tu deviennes amie. Si tu t’entends bien
avec elles, je serai invité à tous les événements de leurs maris, et il me faut
l’accès à ce cercle pour la phase suivante de mon projet. Tu acceptes le défi ?
Je pose ma main sur mon front pour le saluer.
– À vos ordres, capitaine.
– Un sacré morceau, répète-t-il. D’ici-là, amuse-toi avec mon fils. Il était
rarement à la maison ces derniers temps, mais depuis que tu es arrivée il y a
deux jours, je l’ai déjà vu deux fois. C’est étrange, tu ne trouves pas ?
– Étrange, en effet, je répète en finissant mon café. À vendredi alors !
– À vendredi, Mia.
*
* *
À : Mia Saunders
De : Samoan sexy
Pour ne jamais t’oublier.
Je ne comprends le message mystérieux de Taï que lorsqu’un second arrive sous
forme d’image. C’est une photo de son épaule droite, désormais couverte d’un
tatouage tout neuf représentant le symbole samoan pour l’amitié, celui que je lui
ai fait peindre par un artiste local. Taï l’a fait tatouer sur lui. Pour moi. Sur le
côté de son corps qu’il a dit ne garder que pour lui. C’est une des plus belles
choses que j’aie jamais vues.
Je fais défiler mes contacts et j’appuie sur le bouton vert de mon téléphone. La
ligne sonne trois fois avant qu’une voix féminine décroche.

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– Allô, vous êtes sur le portable de Taï, dit-elle d’une voix enjouée.
– Euh, salut, c’est Mia, est-ce que Taï est disponible ?
– Mia ! s’écrie la femme. Bébé, c’est Mia !
Bébé . Cette femme l’appelle Bébé, je croise les doigts.
– Qui est-ce, au fait ? je demande en espérant ne pas me tromper.
– C’est Amy, tu te souviens, tu nous as présentés au restaurant, l’autre jour ?
Mon envie de faire un high-five à quelqu’un est irrépressible, mais je suis seule.
Alors, je me contente de sauter en l’air et de faire une petite danse en silence.
Lorsque j’ai fini, je me concentre de nouveau sur le téléphone.
– Oui, bien sûr, comment ça se passe ? je demande.
Pour ce qui est des ragots et des petites histoires amoureuses des autres, je suis
comme toutes les filles.
– Oh, Mia, c’est génial. Je suis complètement… commence-t-elle à voix basse, il
est tellement… tu sais…
– Parfait ? je propose.
– Ouais. Mia… cette semaine a été… c’est un rêve éveillé. Merci, dit-elle d’une
voix tremblante comme si elle réprimait un sanglot.
Je souris et me tourne vers la fenêtre, face aux collines vertes qui s’étendent
autour de la maison.
– Ne me remercie pas. C’était le destin. Je suis contente que ça marche.
– Taï veut te parler. Ciao, déclare-t-elle alors que sa voix s’éloigne déjà.
– Frangine, je vois que tu as eu mon message, grogne une des voix que je préfère
sur terre.
– Taï, le tatouage… est magnifique.
– Tout comme toi et notre histoire.
Ses paroles me surprennent et je me sens toute chose, toute chaude, comme si
j’étais de nouveau dans ses bras.
– Ce n’est pas parce que notre relation a changé que je veux t’oublier. Tu seras
toujours la bienvenue ici, à Oahu. Tu fais partie de la famille. On est amis, Mia.
Jusqu’au bout. C’est ainsi que fonctionnent les Samoans. Compris ?
Je hoche la tête en souriant jusqu’aux oreilles, même s’il ne me voit pas.

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– Ouais, Taï. Je comprends. Et j’adore ça chez toi, ta culture hawaïenne et tes
valeurs traditionnelles. Maintenant dis-moi, comment ça se passe avec Amy ?
– Ça fait moins d’une semaine que tu es partie et tu veux déjà les ragots, hein ?
– Certaines choses ne changent jamais, je réponds en riant.
– Eh bien, pour l’instant tout va bien. Je pense que tu avais raison, Mia.
– Ah ouais ? je réponds en frissonnant de joie.
– Ouais. J’ai trouvé la femme de ma vie. Et Mia, c’est tellement plus que tout ce
dont j’ai pu rêver !
Ma poitrine se resserre et mon cœur se met à battre la chamade.
– Oh, Taï, je suis tellement heureuse pour toi. Tu le mérites.
– Toi aussi, frangine. Quand vas-tu essayer de trouver le tien ?
– Je ne sais pas, Taï. Je n’ai pas une mère devin qui prédit mon avenir, moi.
Nous éclatons de rire.
– Taï, est-ce qu’Amy est au courant, pour nous ? je demande en tirant sur une
mèche de cheveux pour la mettre dans ma bouche.
C’est une habitude dégoûtante qui revient quand je suis nerveuse. D’habitude, je
la maîtrise, mais pas maintenant. Nous savons tous les deux que la seule façon
pour nous de rester amis est qu’Amy soit au courant de notre relation et que ça
ne la dérange pas.
– Détends-toi, frangine, elle est au courant. Je lui ai dit lors de notre troisième
rencard, avant que les choses ne… dérapent. Elle sait tout.
– Tout ? La Jeep, l’océan, le mur ? je m’exclame, mortifiée et soudain bouillante
tandis que je sens mon cou et mes joues rougir.
– Bon sang, non, je ne suis pas bête. J’ai été honnête. Je lui ai dit qu’on avait eu
une histoire très intense, mais que c’était fini et que nous étions désormais amis
pour la vie. Elle comprend. Elle n’est pas jalouse. Ce que nous avons vécu ces
derniers jours est parfait. Mia… j’épouserai cette fille. Bientôt. Tu reviendras
sans doute à Hawaï l’an prochain.
– Je serai là, Taï. Je suis ravie pour toi. Tu l’as vraiment mérité.
– Merci frangine. Alors tu aimes le tatouage ? demande-t-il.
– Beaucoup, oui.

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D’ailleurs, je l’aime tellement que j’ai soudain une idée un peu folle, mais
géniale. Une chose que je n’ai encore jamais faite et que je garderai à vie.
– Merci Taï. Dis bravo à Amy et tiens-moi au courant quand tu fais ta demande
en mariage. Mais attends au moins un mois, ok ?
Il éclate de rire et j’ai un pincement au cœur, son rire me manque tellement.
– Ça marche. Prends soin de toi et donne-moi des nouvelles. Toutes les semaines
ou tous les quinze jours. Tu me le promets ?
– D’accord, d’accord, je te le promets.
– Si un de ces types te fait du mal, je prends le premier vol pour lui casser la
gueule. Je te protégerai, frangine. Si tu as besoin de moi, je suis là. Amy le sait et
elle est d’accord. Ce que tu fais, ton boulot, peut être dangereux, mais je
comprends. La famille d’abord.
– Oui, Taï. Je crois que personne ne le comprend aussi bien que toi. La famille
d’abord.
– Prends soin de ton père, frangine. Et tant que tu n’as pas trouvé l’amour de ta
vie, je suis là. Je serai le grand frère samoan que tu n’as jamais eu.
– Tu passes d’amant à grand frère ?
– Tu m’as compris, répond-il en riant. Promets-moi de faire attention.
– Je ferai attention. Je t’aime, Taï.
– Je t’aime aussi, frangine. Amis pour la vie.
– Amis pour la vie.
Je raccroche et soupire longuement, vidant tout l’air de mes poumons. Tout le
monde avance autour de moi. Tout le monde, sauf moi. J’ai encore six mois à
tenir avant d’en avoir fini avec Blaine pour que papa soit libre. Je n’aurais pas
choisi ce métier si je n’y avais pas été forcée, mais servir d’escort à des hommes
riches n’est pas si mal, finalement. Quand je repense au tout début, je me dis que
j’ai même eu pas mal de chance.
Weston Charles Channing le Troisième. Je ricane en me rappelant toutes les fois
que je me suis moquée de Wes et du chiffre à la fin de son nom. Il est beau à en
avoir le souffle coupé, il est détendu, il travaille dur et il prend le temps de
profiter de la vie. Mon mois avec lui était merveilleux et j’ai appris beaucoup de

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choses. J’ai appris à surfer, j’ai appris que les choses pouvaient être simples, et
surtout, j’ai découvert que tous les hommes ne sont pas les mêmes.
Par le passé, j’étais entièrement dévouée aux mecs avec qui j’étais, à tel point
que je m’oubliais. J’ai beaucoup souffert et j’ai fini par ne plus croire à l’amour.
Grâce à Wes, j’ai refait confiance à la gent masculine et il m’a aidée à voir que,
comme toutes les femmes dans ce monde, j’avais moi aussi le droit de rêver au
grand amour. C’est Wes qui m’a fait l’amour pour la première fois de ma vie, et
c’est un moment que je n’oublierai jamais, c’était la plus belle nuit de ma vie. Je
me suis enfin sentie entière et… aimée. Peu importe ce que me réserve l’avenir,
je n’oublierai jamais ce que j’ai ressenti ce soir-là.
Mon second client était Alec Dubois, mon cochon d’artiste français. Il était
superbe. De ses longs cheveux attachés en chignon jusqu’à sa barbe et sa
moustache. Il me suffit de penser à sa crinière épaisse pour frissonner de plaisir.
Quand j’y repense, j’ai passé quasiment un mois collée à lui, et ça ne m’a pas
gênée. Les œuvres qu’il a créées ont montré au monde entier un aspect de moi-
même que je n’avais jamais révélé à personne. La femme vulnérable, imparfaite,
dévergondée et perdue que la vie a faite de moi est clairement visible dans son
travail. Toute la collection Amour sur Toile me concerne et, pour la première
fois, je me suis sentie belle. Grâce à lui, je me suis vue sous un nouveau jour, et
ça m’a plu. Mieux encore, ça ne m’a pas gênée que le monde entier me voie, et
je m’efforce chaque jour d’être à la hauteur de la femme qu’il a peinte.
Ensuite, il y a eu Tony Fasano et Hector Chavez, mes mecs de Chicago. C’est
étrange, mais je me sens seule rien qu’en pensant à eux. Ce sont eux qui m’ont
appris la loyauté en amour et qui m’ont montré que peu importe la forme de
l’amour, peu importent les risques qu’il faut prendre pour le protéger, ça en vaut
la peine. C’est une leçon que je n’oublierai jamais.
Mason Murphy, mon joueur de base-ball canon et arrogant, s’est avéré avoir un
cœur d’or, il suffisait de creuser pour le découvrir. Le mois d’avril m’a apporté
le frère que je n’ai jamais eu. Il aime se faire passer pour quelqu’un qu’il n’est
pas, un peu comme moi, mais au fond, il veut les mêmes choses que nous tous.
De l’amitié, de l’affection, un endroit où il se sente bien et quelqu’un avec qui
partager son quotidien, des choses qu’il a trouvées avec Rachel, à présent. Elle

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sera tout cela, et plus encore. Avec Mason, j’ai compris qu’en essayant d’être
quelqu’un que je ne suis pas, je me fais du mal et je blesse les gens autour de
moi.
Puis il y a eu mon adorable Samoan sexy et plein d’amour. Mon Dieu, mes
cuisses se contractent en repensant à sa longue verge chaude et dure. Je n’ai
jamais connu d’homme aussi bien doté que lui, pourtant Wes et Alec n’ont pas à
rougir. Avec Taï, il était question de fun, d’amitié et de baise. J’ai joui davantage
en un mois avec lui que la plupart des femmes célibataires – et sans doute des
couples – en un an. Nous n’étions jamais rassasiés, comme si nous avions
quelque chose à nous prouver. Or, en fin de compte, cela a donné naissance à
une amitié que nous n’aurions jamais eue sans la connexion physique. Je sais
qu’il sera là pour moi jusqu’à la fin de ma vie. Taï offre son amour sans
condition et sans limites.
Tous ces souvenirs me confortent dans mon idée et je décide que si je ne le fais
pas maintenant, je ne le ferai jamais.
Je sors de ma chambre en courant et je dévale les escaliers, m’arrêtant dans le
hall sur une glissade. James lève la tête depuis le bureau du salon.
– Mademoiselle Saunders, vous souhaitez que je vous emmène quelque part ?
– Oui ! Vous avez le temps ?
– Bien sûr, dit-il en tendant la main devant lui pour m’inviter à le précéder.
Lorsque je suis installée à l’arrière de la berline, je sors mon téléphone, fais une
recherche Google et je trouve ce que je cherche.
– Où va-t-on ? demande-t-il en descendant la colline sur laquelle est perchée la
maison des Shipley.
– À un endroit qui s’appelle Black Bird Tattoo .
– La boutique de tatouage ? demande-t-il d’une voix surprise.
– Ouaip ! Et faites vite, s’il vous plaît, avant que je ne change d’avis.
()

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Chapitre 4

N ous sommes trois dans la boutique, installés dans des fauteuils en cuir noir,
et le bourdonnement des aiguilles résonne dans la pièce malgré la musique. Un
type se fait tatouer des éclairs sur le côté du crâne, dont il a rasé tous les cheveux
à l’exception d’un petit trait de duvet au milieu. Il a des piercings écarteurs dans
les oreilles et plus de métal sur le visage qu’il n’y en a sur la superbe moto sur
laquelle il est arrivé. Bon sang, Suzi me manque.
Je regarde de nouveau le type aux éclairs et je me demande ce qu’il compte faire
des trous dans ses oreilles quand il aura soixante-dix ans et que ses lobes
pendouilleront jusqu’à ses épaules. Je suppose qu’un skinhead de vingt ans ne
pense pas à ce genre de choses. Sans doute n’imagine-t-il pas qu’il sera encore
en vie dans cinquante ans, et à voir comment il gigote et tressaille nerveusement,
peut-être a-t-il raison.
Plus loin, le sosie de Barbie se fait tatouer un prénom d’homme sur les reins,
sans doute celui de son mec. Je ricane dans ma barbe, car tout le monde sait qu’il
suffit de graver le nom de son mec ou de sa nana sur son corps pour se faire
larguer brusquement. J’imagine qu’il y a des exceptions, mais elles doivent être
rares. Sans le vouloir, je bouge mon pied en riant et je grimace quand la
tatoueuse tient plus fort ma cheville.
La douleur durant les vingt premières minutes était atroce, mais la peau de mon
pied est désormais anesthésiée, et je trouve le picotement presque agréable
maintenant que j’y suis habituée. Chaque fois qu’elle remet de l’encre dans son
pistolet et qu’elle presse de nouveau l’aiguille sur ma peau, une petite décharge
réveille mes nerfs comme un feu d’artifice.

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– Mask est un prénom inhabituel, surtout pour une femme, dis-je à la petite
femme asiatique.
Elle sourit et son regard noir s’illumine, comme des étoiles dans la nuit noire. Sa
bouche est rouge vif et elle porte un petit anneau sur le côté de la lèvre
inférieure. Sa peau est comme de la porcelaine fragile et pâle, qui contraste avec
le noir de ses cheveux longs, attachés dans un chignon bas. Sans son piercing à
la lèvre et les tatouages sur ses avant-bras, je n’aurais pas été surprise
d’apprendre qu’elle travaille dans un bureau à Washington.
Elle recule et étudie son travail.
– C’est le diminutif de Maskatun. Mask est plus simple pour les Américains.
– Tu n’es pas américaine ?
– Si. Ma famille vient du Brunei, en Asie du Sud-Est, mais je suis américaine.
Ma famille et mes amis m’appellent par mon prénom, mais je dis aux touristes
qui viennent se faire tatouer de m’appeler Mask, répond-elle en souriant.
– Eh bien, je trouve ton prénom très beau, mais Mask est super-badass, donc je
vais t’appeler comme ça moi aussi.
– Merci, dit-elle en se redressant pour mieux inspecter son travail.
Elle tourne mon pied d’un côté et de l’autre sous sa lumière blanche. Le texte
que j’ai choisi s’étend sur le côté de mon pied, depuis un centimètre environ au-
dessus du talon jusqu’à l’orteil. Quand Mask m’a demandé ce que je voulais me
faire tatouer, j’ai su tout de suite, il ne restait plus qu’à choisir une police.
– Jette un œil au texte avant que je ne commence le pissenlit.
Je fais pivoter mon pied et je grimace en voyant ma peau à vif. C’est exactement
comme je l’avais imaginé, et c’est magnifique.
– J’adore !
– Cool. Donc, le pissenlit va partir de là, dit-elle en désignant mon talon, et il
remontera jusqu’au début de ton mollet.
Je hoche la tête.
– Et les graines de pollen s’envoleront en emportant des lettres avec elles.
– C’est ça !
Je recule dans le fauteuil et je laisse Mask faire son boulot. Le picotement
reprend dès qu’elle pose l’aiguille sur ma peau et la douleur se propage dans

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toute ma jambe. Je serre les dents et j’attends que les endorphines fassent effet et
que la souffrance se transforme en plaisir.
– J’ai fait le W et le A, dit Mask au bout de dix minutes.
Elle désigne mon pied, où des petites graines volent le long du texte. Deux
d’entre elles sont différentes, car l’une est enroulée autour d’un W, pour
représenter le temps que j’ai passé avec Wes, et l’autre tient un A pour Alec.
– Comment tu voulais le T et le H, déjà ?
– Si possible, j’aimerais qu’ils soient emmêlés avec la même graine.
Mask étudie mon pied sous la lumière, puis elle hoche la tête et se remet au
travail.
– J’ai fini le T solitaire et le M, aussi, dit-elle au bout d’un moment, et j’ai
rajouté des graines normales ici et ici. Tu as dit que tu voudrais peut-être ajouter
d’autres lettres plus tard, donc j’ai laissé de la place.
– Ouais, si l’année se passe comme je le pense, j’aurai d’autres lettres à tatouer.
– Le tatouage est bien et il n’a pas l’air incomplet, mais tu peux facilement faire
des ajouts, même si je préférerais que ce soit moi qui le fasse. J’aime que mes
tatouages restent les miens, tu comprends ?
– Bien sûr. Si j’ai besoin d’ajouter des lettres, je reviendrai vers la fin de l’année,
promis, je réponds en lui serrant la main.
– Eh bien, vas-y, tu peux regarder.
Le pissenlit est très réaliste et il encadre bien le texte pour le mettre en valeur. Le
vent fait voler les graines et cinq d’entre elles emportent une lettre avec elles.
Wes, Alec, Mason et Taï ont la leur tandis que Tony et Hector s’en partagent
une. De cette manière, les hommes que j’ai rencontrés seront avec moi tout au
long de ma vie. Ils m’aideront à parvenir à la fin de cette année, prouvant la
véracité de cette phrase qui est devenue mon propre slogan.
Fais confiance à la vie…
*
* *
Mon pied me fait affreusement souffrir lorsque je passe la porte de la maison et
que je commence à gravir les escaliers en boitant.

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– Mon Dieu, que s’est-il passé ? Tu t’es fait mal ? demande Kathleen en courant
vers moi.
Elle m’attire contre elle pour prendre sur elle une partie de mon poids. En haut,
elle m’aide à aller jusqu’à ma chambre, ce qui me prend un temps fou. Chaque
pas est plus douloureux que le précédent.
– Qu’est-ce qui ne va pas ? demande-t-elle en m’inspectant lorsque je suis enfin
allongée sur mon lit.
Soudain, son regard s’arrête sur mon pied, recouvert de pommade huileuse et
épaisse.
– Doux Jésus ! Il semblerait que tu ne te sois pas fait mal toute seule, n’est-ce
pas ?
Elle s’approche pour regarder le tatouage de plus près.
– C’est très beau et, à l’évidence, cette phrase te tient à cœur.
Je grimace en m’efforçant de sourire.
– Merci. Je ne sais pas ce qui m’a pris, j’avais cette idée en tête en me réveillant
ce matin. Comme je n’ai pas de sortie avec Warren pendant quelques jours,
c’était le meilleur moment pour le faire.
– Ce n’est pas faux. Voyons voir, je vais aller te chercher du thé et des gâteaux.
Elle soulève délicatement ma jambe pour glisser un coussin sous mon pied puis,
avec deux doigts, elle me fait me pencher en avant pour mettre un oreiller
derrière mon dos.
– C’est mieux ?
Je ris et lève la tête vers la jolie femme qui me chouchoute. N’importe quel
homme intelligent l’épouserait pour la faire sienne, or voilà que celui qu’elle
aime a embauché une escort ! Tout ça pour être bien vu d’un club de riches
vieillards ! Mon opinion de Warren se ternit momentanément, mais ce n’est pas
à moi de le juger.
– Tu sais, je ne suis pas malade, je me suis juste fait tatouer.
– C’est vrai, mais tu souffres, alors laisse-moi m’occuper de toi. Ça me changera
de m’occuper d’une femme plutôt que des deux ronchons qui pensent pouvoir
tout faire eux-mêmes.

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Elle me lance un clin d’œil et m’offre ce sourire tendre auquel je me suis
habituée. Kathleen est une femme douce, avec une volonté de fer et une
tendresse naturelle. J’aime le calme avec lequel elle semble aborder toutes les
situations. Pour moi, elle est la grâce incarnée. Peut-être pourrais-je prendre
exemple sur elle.
Kathleen ne revient pas les mains vides, mais chargée de vin plutôt que de thé,
de chips plutôt que de biscuits, d’une pile de magazines et de plusieurs tablettes
de chocolat.
– C’est quoi, tout ça ? je demande quand elle pose le plateau sur mon lit.
– J’ai rarement l’occasion de passer une soirée avec une fille, alors si ça ne te
gêne pas, j’aimerais apprendre à mieux te connaître.
– Avec plaisir !, je m’exclame en souriant. Sers-moi un verre, s’il te plaît !
Son regard s’illumine comme un diamant de dix carats.
– Ce sont de bonnes bouteilles en plus. Elles sortent tout droit de la cave de
monsieur Shipley.
– Tu es sûre qu’on a le droit ? Il ne va pas s’énerver s’il lui manque deux
bouteilles ?
– Je couche avec le boss, tu sais, il a du mal à me dire non. De toute façon, il m’a
dit que je pouvais prendre ce que je voulais, et ces bouteilles sont là depuis un
moment. Il n’aime pas le Zinfandel 1 autant que moi.
– Ah, je vois ! Comment ça se passe, au fait, quand on couche avec son patron ?
je demande en riant.
Certes, j’ai moi aussi couché avec certains des hommes qui payaient mon salaire,
mais je ne suis restée avec eux qu’un mois. Cela fait des années que Kathleen
travaille pour Warren.
Elle inspire lentement et s’assied sur le lit à côté de moi, nichée dans la
montagne d’oreillers. Elle boit une gorgée de vin et réfléchit quelques secondes.
– Ce n’est pas aussi sordide que ça doit te sembler. Warren et moi sommes amis
depuis trente ans. Il me plaisait bien avant que sa femme ne meure et quand elle
est décédée, eh bien… il a eu besoin de moi. Mais ce n’est qu’après de
nombreuses années que nous sommes devenus intimes. Maintenant, je dors avec
lui presque toutes les nuits.

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Kathleen a beau insinuer qu’ils ont une relation sérieuse, je sens qu’elle me
cache quelque chose.
– Alors pourquoi j’ai l’impression que tout n’est pas aussi beau que tu aimerais
me le faire croire ?
Elle hausse les épaules et soupire.
– Je suppose que je m’étais dit qu’après tout ce temps, on ne cacherait plus notre
couple, qu’il n’aurait plus honte de moi, admet-elle avec des yeux brillants.
– Je n’ai pas l’impression qu’il a honte, moi. Mais je dois t’avouer, maintenant
que j’ai été à ces cocktails de milliardaires, que tu dénoterais, c’est sûr.
Je regarde sa chemise blanche parfaitement repassée, son tablier à volants et sa
jupe crayon moulante. Elle est clairement au-dessus des jeunes pimbêches qui
accompagnent les amis de Warren. Des jeunes femmes comme moi.
– Je vois, dit-elle sur un ton plein de tristesse.
Je saisis son bras et je le serre jusqu’à ce qu’elle me regarde dans les yeux.
– Non, tu ne vois pas, justement, mais je vais te montrer.
Je soulève mes fesses et j’attrape mon téléphone dans la poche arrière de mon
jean pour lui montrer la photo que j’ai envoyée à Ginelle la semaine dernière,
pendant la soirée.
– Voilà ta concurrence, je dis en lui tendant mon portable.
– Mais ces femmes sont assez jeunes pour être leurs filles ! s’exclame-t-elle en
couvrant sa bouche. Voire leurs petites-filles !
– Exactement. C’est pour ça que je suis là.
Elle a soudain l’air horrifiée.
– Non, non, ce n’est pas ce que tu crois, je m’empresse de la rassurer. Les
raisons pour lesquelles il a besoin de moi sont très nobles, en fait.
Elle lève les yeux au ciel et me regarde avec un air qui dit clairement « ne me
prends pas pour une idiote ».
– Je sais que c’est bizarre, mais je comprends, maintenant. Il a besoin de sa
propre bimbo pour avoir l’air de faire partie du club. Il a vraiment de bonnes
raisons, tu sais. Il a un projet en tête et il a besoin que ces types le soutiennent.
Tu sais, il veut apporter des médicaments et des vaccins aux pays du tiers-
monde.

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Elle hoche la tête et semble se détendre un peu.
– Il m’a parlé de ce projet il y a quelques années, mais je pensais qu’il l’avait
laissé tomber. Encore une chose qu’il fait en sa mémoire, ajoute-t-elle d’un ton
glacial.
– Comment ça ?
J’écarquille les yeux en la regardant vider son verre cul sec.
– Ketty Shipley.
– Qui est Ketty Shipley ? je demande, confuse.
– L’épouse défunte de Warren.
– Ah, cette Ketty Shipley, je réponds avant de vider mon verre à mon tour.
Pourquoi sembles-tu agacée ?
Kathleen masse son front, puis elle retire l’épingle cachée dans ses cheveux. Une
cascade de grosses boucles rebondies tombe sur ses épaules et dans son dos, et
elle secoue la tête en se passant la main dans les cheveux et en poussant un
grognement.
– Ce n’est pas que je ne l’aimais pas, c’était même ma meilleure amie pendant
quelque temps. J’ai simplement du mal à supporter qu’elle soit morte depuis
vingt-cinq ans et que Warren soit encore amoureux d’elle. Comment peut-il me
donner son cœur s’il appartient encore à sa femme ?
Ses épaules s’affaissent, et je passe mon bras dans son dos pour l’attirer contre
moi.
– Honnêtement, ça ne peut pas être si désastreux que ça, si ?
– Tu penses que je suis aigrie et rancunière ? s’exclame-t-elle.
Elle se lève d’un bond et sort de ma chambre en courant, me laissant perplexe.
Quelques minutes s’écoulent et je finis par me demander si je ne l’ai pas vexée.
Je repasse notre conversation dans ma tête, mais je n’ai rien dit qui aurait pu
susciter une telle réaction, si ? Je suis en train d’y réfléchir lorsque la porte de
ma chambre s’ouvre brusquement et que Kathleen entre en poussant un chariot
de service, comme ceux qui servent à apporter le room service dans les hôtels.
– Qu’est-ce que tu fais ? je demande, encore plus confuse.
Elle approche jusqu’au lit et tapote le haut du chariot.
– Viens. Je vais te montrer quelque chose qui te prouvera que j’ai raison.

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– À propos de quoi ? je demande en m’asseyant sur le plateau supérieur.
J’ai à peine posé mes fesses dessus qu’elle me pousse déjà vers la porte.
– À propos du fait qu’il aime encore Ketty !
Je m’accroche au chariot en grimaçant.
– Si je te dis que je te crois, est-ce que t’arrêteras de jouer à Mario Kart avec moi
dans cette immense baraque ? Je suis morte de trouille. Si tu me pousses trop
fort, je vais finir dans les escaliers !
Elle s’arrête et me tapote dans le dos.
– Je promenais Aaron dessus quand il était petit. Il adorait ça. Il n’y a aucun
risque, ne t’en fais pas. De toute façon, Warren a une assurance béton. S’il
t’arrivait quoi que ce soit pendant que tu travailles pour lui, tu n’auras plus
jamais à travailler de ta vie.
Je ne peux pas dire que ça me rassure.
– Si je suis morte, c’est sûr !
– Détends-toi, on est arrivées.
Elle s’arrête au bout d’un très long couloir, devant une double porte en chêne
massif. Elle sort son trousseau de son tablier, sur lequel elle a tant de clés que si
elle devait toutes les faire refaire, le serrurier aurait les poches pleines pour vingt
ans.
D’un coup de poignet, elle déverrouille les portes et les ouvre. Je descends du
chariot en évitant de mettre du poids sur mon pied gauche, même si j’ai moins
mal grâce au vin.
Je fais quelques pas, puis je m’arrête pour regarder la pièce gigantesque qui fait
au moins deux cents mètres carrés. Elle semble prendre tout un côté de
l’immense demeure. Deux des murs sont recouverts de photos d’une jeune
femme aux cheveux noirs et aux yeux bleus, la montrant depuis ses années
adolescentes jusqu’à ce qu’elle ait environ trente ans. Sur certaines photos, elle
tient Aaron dans ses bras, qui ne doit pas avoir plus de trois ou quatre ans.
Je regarde le reste de l’espace où je découvre une coiffeuse avec une brosse
dorée, un peigne, du maquillage et des lotions, comme si leur propriétaire allait
venir se préparer pour sa soirée mondaine. De l’autre côté de la pièce se trouve
une grande armoire en verre, renfermant des boucles d’oreilles, des colliers, des

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bracelets et des bagues plus belles les unes que les autres. Chaque bijou doit
coûter une fortune.
J’avance dans la pièce où sont alignés des portants recouverts de vêtements de
femmes sur lesquels il n’y a pas le moindre grain de poussière, alors qu’ils sont
vieux de plus vingt ans.
Sur d’autres étagères, il y a des livres, des souvenirs et des photos d’Aaron petit,
toutes les choses qui rendraient cette maison chaleureuse se trouvent dans cette
pièce.
– C’est quoi cet endroit ? je demande à Kathleen, choquée.
Elle s’appuie à la coiffeuse et effleure la brosse dorée du bout des doigts.
– C’est exactement ce dont ça a l’air.
– Bon sang, on dirait un sanctuaire érigé en l’honneur d’une femme morte.
– Ketty Shipley continue de vivre ici alors qu’elle est morte depuis vingt-cinq
ans.

1 . Cépage californien.
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Chapitre 5

– Q ue faites-vous ici ? gronde la voix furieuse de Warren Shipley.


Je sursaute et me tourne brusquement vers lui.
– Euh, toutes mes excuses, Monsieur Shipley, bégaie Kathleen.
Je hausse les épaules et j’avance vers lui en coupant la parole à Kathleen.
– Désolée, Warren. J’ai été trop curieuse. C’est la seule porte de la maison qui
est fermée à clé, et j’ai voulu entrer. Mais je comprends maintenant, et Kathleen
me disait justement que je n’avais pas le droit d’entrer dans ton espace privé.
Je lui offre un sourire désolé en regardant Kathleen, puis je tapote le torse de
Warren comme si ce n’était qu’une broutille.
– Ne t’en fais pas, ton secret est sain et sauf avec moi, j’ajoute en me dirigeant
vers la porte. Euh, j’ai mal au pied, donc je vais aller me coucher.
À l’évidence, Warren s’est remis du choc de m’avoir trouvée dans ce sanctuaire
étrange, car il saisit ma main pour m’arrêter.
– Qu’est-ce qui t’est arrivé ?
– Rien, je réponds en levant le pied. Je me suis fait tatouer.
Il semblerait que cet homme soit facilement surpris. Il pousse un cri aigu et
soulève mon pied pour regarder l’encre. Je tremble de fatigue à force de garder
le pied en l’air quand il me prend dans ses bras pour me poser sur le chariot.
– Quelle chance qu’un chariot à roulettes soit là, n’est-ce pas ? dit-il en haussant
les sourcils.
– Euh, ouais, j’allais à la cuisine pour me chercher à manger et j’ai réalisé que je
n’arriverais pas à tout rapporter à cloche-pied. J’ai trouvé ce bolide et… voilà !
Je me suis dit que ce serait utile, et puis je peux m’appuyer dessus en le poussant

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avec le pied qui ne me fait pas mal, je conclus en lui offrant mon plus beau
sourire.
– Hmmm.
Il ne semble pas convaincu et je ne pense pas qu’il me croie, mais il ne me
contredit pas pour autant.
– Je suis désolée, Monsieur Shipley, je vais ramener Mia à sa chambre, dit
Kathleen.
– Très bien. Je t’attends dans ma chambre. Il faut qu’on parle, Chaton.
Lorsque nous nous sommes suffisamment éloignées, je penche la tête en arrière
pour la regarder à l’envers alors qu’elle pousse le chariot.
– Chaton ?
Elle esquisse un sourire minuscule mais plein de tendresse.
– Pas un mot. Je vais avoir des ennuis à cause de toi.
– À cause de moi ! C’est toi qui as voulu me montrer qu’il n’avait pas oublié sa
femme morte. C’est de ta faute s’il nous a surprises. Tu remarqueras que j’ai
essayé de sauver tes fesses.
Kathleen glousse doucement.
– Oh ma chérie, si je voulais sauver mes fesses, comme tu dis, je ne serais plus là
depuis longtemps, tu ne crois pas ? Je suis parfaitement heureuse que mes fesses
soient ici, merci, dit-elle d’une voix légèrement mécontente.
Ce sanctuaire prouve en effet que Warren n’a pas oublié sa femme. Peut-être y
a-t-il des gens qui ne se remettent jamais de leur premier amour. Bon sang,
j’espère que ce n’est pas vrai, parce que mon premier amour était catastrophique.
D’ailleurs, les suivants aussi. Avec un peu de chance, Dieu aura pitié de moi et il
m’enverra l’homme qu’il me faut. Un homme qui me ferait oublier tous les
autres et avec qui tout serait… simple.
Mon téléphone sonne dans ma poche arrière, vibrant fortement contre le chariot
métallique. Kathleen et moi sursautons, puis nous éclatons de rire. Nous avons
été surprises dans un lieu où nous n’avions pas le droit d’aller et, maintenant,
nous sursautons au moindre bruit alors qu’elle me promène dans ce palace sur un
chariot de service parce que je me suis fait tatouer sur un coup de tête. C’est
ridicule.

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Nous arrivons devant ma chambre. Je remercie Kathleen de m’avoir ramenée, je
referme la porte derrière moi et me laisse tomber sur le lit, téléphone à la main.
À : Mia Saunders
De : Wes Channing
J’ai rêvé de toi hier soir. On était dans ma piscine. Le ciel était noir et les étoiles
brillaient. Tu étais assise sur le bord, jambes écartées, et ma bouche était entre
tes cuisses. Tu t’en souviens ? Tu te souviens de la vitesse à laquelle je te faisais
fondre ? Comment je te faisais jouir avec ma bouche ? Mon Dieu, ça me
manque. Ton goût manque à mes lèvres. Comme du miel. Dis-moi, est-ce que tu
penses à moi en ce moment ?
À : Wes Channing
De : Mia Saunders
Oui .
À : Mia Saunders
De : Wes Channing
Prouve-le. Montre-moi .
Sainte Mère de tous les beaux gosses ! Je relis le message de Wes une demi-
douzaine de fois, jusqu’à ce que je me sente chaude et toute chose. Il veut que je
lui montre. Je n’ai jamais envoyé de messages coquins de ce genre, mais c’est
séduisant. Je suis excitée, à l’évidence lui aussi. Quel mal ça peut faire ? Une
petite voix dans ma tête me dit que cela ne fera que compliquer les choses
davantage. Elle frappe à la porte de mon inconscient comme un pic-vert sur le
tronc d’un arbre. Toc, toc… toc, toc… toc, toc. Or, toujours dans ma tête, l’idiote
que je suis dégaine un pistolet à billes pour dégommer l’oiseau.
Je me déshabille, ne conservant que mon soutien-gorge et mon tanga de chez
Aubade en dentelle rose. Ça va le rendre fou. Je tiens mon téléphone au niveau
de mon menton, je croise les jambes pour adopter une position naturelle et sexy,
et je prends la photo.
À : Wes Channing
De : Mia Saunders
Ça te va ?

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J’envoie la photo et je caresse mes cuisses du bout des doigts, remontant de plus
en plus haut. Je saisis mes seins avec plus de force que je n’en ai l’habitude, car
j’imagine que ce sont les mains de Wes, et son appétit pour mon corps n’est
jamais rassasié. D’ailleurs, souvent, quand il est fou de désir, il s’accroche à moi
comme si j’étais la dernière femme sur terre. Bon sang, j’adore ça. J’ai
l’impression d’être réellement désirée, comme si rien ne pouvait nous séparer.
Mon téléphone sonne et je me dépêche de le prendre. Jésus Marie Joseph .
À : Mia Saunders
De : Wes Channing
À cause de toi, je suis dur.
La photo qu’il a jointe ressemble à la mienne, sauf que Wes porte un maillot de
bain dont le tissu est tendu. Ses abdos sont aussi délicieux que jamais et je
donnerais n’importe quoi pour promener ma langue sur chacune des bosses
musclées, mais surtout sur le membre énorme qui forme une bosse dans son
short.
Je me sens mouiller, et des bouffées de chaleur parcourent mon corps. Je frotte
mes cuisses l’une contre l’autre, essayant de libérer la tension qui s’y accumule,
mais la friction ne fait que m’exciter davantage.
À : Wes Channing
De : Mia Saunders
J’aimerais que tu sois là. Je m’occuperais avec plaisir de ton gros problème.
À : Mia Saunders
De : Wes Channing
Ah oui ? Je crois qu’on va devoir utiliser notre imagination, à commencer par
tes mains. Baisse les bonnets de ton soutif et touche-toi les seins. Putain, ils sont
tellement sexy et tellement doux. Souviens-toi de la sensation quand j’en prenais
un dans ma bouche, comment je le mordais, juste assez fort pour te faire gigoter.
Pince tes tétons. Mouille tes doigts et dessine des cercles autour. Commence
doucement avant d’y aller plus fort, comme je le ferais.
Bon sang, ce type est à cinq mille kilomètres et il a le pouvoir de me faire jouir
avec un simple message. Perdue dans un nuage de désir que seul Wes peut créer
à distance, je baisse les balcons de mon soutif. Mes seins sont déjà lourds et

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gonflés, prêts à être vénérés. Je lèche mes doigts, ferme les yeux, et je lui obéis,
traçant des cercles autour de mes pointes roses. Puis je pince mes tétons et je tire
dessus, les allongeant avant de les presser plus fort encore. Un cri m’échappe
alors qu’une décharge de plaisir déferle dans mes veines jusque dans mon bas-
ventre. Mon tanga est trempé et ma chatte se contracte sur du vide, cherchant
désespérément à être comblée.
Un autre message arrive.
À : Mia Saunders
De : Wes Channing
Tu mouilles, ma belle ? Tu es prête à être baisée sauvagement ?
Je réponds aussi vite que je peux, tout en cherchant mon souffle.
À : Wes Channing
De : Mia Saunders
C’est de la torture.
À : Mia Saunders
De : Wes Channing
Je sais, Bébé, mais reste avec moi. Glisse ta main le long de ta petite taille fine.
Fais le tour de ton nombril et chatouille ta peau comme j’aimais le faire. Tu te
souviens ? Bien sûr que tu te souviens. Descends ta main là où je te manque le
plus, mais ne pénètre pas encore ce petit paradis. Je veux que tu joues avec ton
petit clito tout chaud. Je parie qu’il est dur comme fer, petit, tendu et gonflé. Si
j’étais là, je le lécherais jusqu’à te faire jouir. Ma langue dessinerait des cercles
autour de ton petit bouton de rose et je le sucerais tellement fort que tu
refermerais tes cuisses sur ma tête, m’empêchant de bouger. Maintenant,
touche-toi.
Complètement perdue dans le fantasme, je fais ce qu’il me dit. Je chatouille mon
ventre puis je fais tourner un doigt autour de mon nombril, imitant le trajet que
fait sa langue pour se rendre à l’endroit qu’il a baptisé le paradis. Mon souffle est
saccadé et haletant. De petits cheveux chatouillent mes seins qui s’érigent,
fourmillant de désir, rêvant d’être touchés, sucés et mordus. Lentement, je passe
ma main sous la dentelle recouvrant mon sexe trempé. Seul Wes a le pouvoir de
me mettre dans cet état. De simples mots dans un message me font fondre de

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plaisir, frémir d’être touchée, léchée et aimée. Je lui obéis et je joue avec mon
clitoris, titillant le bouton de chair comme le fait toujours Wes avant de le
dévorer.
Mon téléphone m’annonce l’arrivée d’un nouveau message.
À : Mia Saunders
De : Wes Channing
J’imagine ton goût et je caresse ma queue en pensant à toi, à ta chatte. Ton sexe
est chaud, sucré et juteux comme une pêche bien mûre. Souviens-toi comme je
couvrais toute ta chatte avec ma bouche pour te sucer.
Waouh. Ses mots embrasent un feu assez féroce pour couvrir les cinq mille
kilomètres qui nous séparent. Je continue de lire son message en pinçant mon
clito, en tirant dessus et en balançant mes hanches d’avant en arrière.
À : Mia Saunders
De : Wes Channing
Je te sucerais tellement fort que tu hurlerais de plaisir. Et, lorsque tu serais sur
le point de jouir, je recommencerais. Lorsque j’en aurais fini avec toi, ta chatte
me supplierait de te prendre. Est-ce que tu en es là ? Tu es prête pour ma queue
? Je parie que oui. Je connais ton minou vorace. Il veut être rempli par mon sexe
dur. Ne sois pas timide. Plonge deux doigts entre tes lèvres, ma belle. Fais
comme si c’était moi qui te pénétrais pour la première fois.
Je ne peux plus m’arrêter. Je suis une marionnette entre ses mains. J’enfonce
brusquement deux doigts en moi, comme il me l’a dit, et le picotement de la
pénétration soudaine m’arrache un cri. La douleur ne dure qu’une seconde, mais
cela suffit à tromper mon cerveau pour lui faire croire que c’est Wes qui m’a
pénétrée. Hélas, deux doigts ne sont rien à côté du gros sexe de Wes, mais pour
l’instant, ça fera l’affaire.
À : Mia Saunders
De : Wes Channing
Tes doigts sont bons, ma belle ? Pas aussi bons que ma queue, n’est-ce pas ?
Maintenant, commence les allers-retours. Prends ton autre main et titille ce clito
que j’aime tant mordiller. Touche-toi jusqu’à l’orgasme. Jouis pour moi, ma
belle.

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Je suis incapable de résister. Mes doigts agissent de façon automatique tandis
que mon cerveau se nourrit des images que Wes lui offre. Des frissons me
parcourent et une fine couche de sueur recouvre ma peau. Mes pores suffoquent
sous l’intensité du plaisir qui déferle dans mes veines. Mon bas-ventre se
contracte et se met à pulser alors que mon sang s’embrase et que des lumières de
toutes les couleurs jaillissent derrière mes paupières fermées. Mon orgasme
s’empare de moi et titille mes nerfs pour n’exploser que quelques secondes plus
tard. Encore quelques secousses, et mon bassin se soulève alors que mon dos se
cambre. La peau de mon pied hurle de douleur et je finis par revenir sur terre,
épuisée, réjouie.
À : Mia Saunders
De : Wes Channing
Tu dors ?
Je ris en lisant le dernier message de Wes.
À : Wes Channing
De : Mia Saunders
Désolée. C’était un sacré voyage en solitaire.
À : Mia Saunders
De : Wes Channing
J’étais là avec toi, ma belle. Tu n’étais pas seule. J’ai joui encore plus fort en
imaginant que tu te touchais en pensant à moi. Je n’ai pas joui aussi fort depuis
Chicago.
C’est tout ce qu’il faut pour percer la superbe bulle de joie qu’il a créée. Chicago
. C’est la dernière fois que nous avons été ensemble physiquement. C’était il y a
trois mois. Depuis, j’ai eu un plan cul avec Alec et j’ai passé un mois avec Taï.
Quant à lui, il a passé tout ce temps avec cette actrice pulpeuse que tous les
magazines people décrivent comme la plus belle femme du monde. Et c’est mon
Wes qui se la tape. Régulièrement. Ce n’est qu’une question de temps avant
qu’il m’oublie et qu’il passe à autre chose. Peut-être devrais-je lui faciliter les
choses et tourner la page à sa place.
Pour être tout à fait sincère, je ne sais pas si j’oublierai Wes un jour. J’ai
beaucoup trop de sentiments pour lui. Trop de choses ont été passées sous

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silence, et nous avons encore trop de choses à vivre. Notre relation pourrait être
magnifique, mais ni lui ni moi ne sommes certains de pouvoir tenir encore six
mois pour en faire l’expérience. J’ai beau n’avoir passé qu’un mois avec lui, j’ai
l’impression de le connaître depuis des années.
Je ne peux pas faire ça par SMS. Je soupire et j’appuie sur le bouton vert de mon
téléphone.
– Salut ma belle, répond Wes d’une voix endormie. Je pensais que tu éviterais ce
qui vient de se passer pendant au moins une semaine ou deux, dit-il en riant,
faisant sursauter ma libido déjà à vif.
Bon sang, cet homme n’a qu’à respirer pour que j’aie envie de lui sauter dessus.
– Wes, il faut qu’on parle. De nous. De ce qu’on se fait l’un l’autre…
Je n’en dis pas plus et Wes émet un soupir mêlé à un grognement, ce qui me fait
penser à toutes les fois où j’ai posé ma tête sur sa poitrine pour écouter les
battements de son cœur et son souffle. C’est un des endroits les plus paisibles sur
terre.
– Et si on n’en faisait pas tout un plat et qu’on disait que nous sommes deux
adultes qui tiennent l’un à l’autre et qui veulent se détendre ensemble ?
– C’est comme ça que tu veux te la jouer ?
– Je ne joue pas, Mia. Rien n’a changé. Tu sais ce que je veux et je sais ce que tu
veux. C’est simplement que ça ne veut pas dire qu’on ne peut pas se croiser de
temps en temps pour se rappeler combien on aime être ensemble.
Il n’a pas tort, je suppose.
– Ouais… mais je suis tellement fatiguée, Wes.
– Qu’est-ce qui se passe, ma belle ?
Je ne sais pourquoi, avec Wes, j’ai la capacité inouïe de me bercer d’illusions et
de croire que notre histoire n’est pas nécessairement vouée à l’échec. Pour
l’instant, je dois croire en lui et en notre histoire.
– La ville de Washington est bourrée de pimbêches chercheuses d’or et de vieux
mecs qui ont trop d’argent et beaucoup trop de pouvoir.
– C’est vrai, répond-il en riant. Mais où est le problème ? Le mec avec qui tu es
souhaite que tu sois davantage qu’une escort ?

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Je secoue la tête en faisant semblant de vomir, et il éclate de rire. Il suffit que
Wes rie pour que soudain tout me paraisse aller mieux.
– Warren est un mec bien. Je ne l’intéresse pas du tout de cette manière.
– J’ai du mal à le croire, ricane Wes.
– Je ne suis pas son genre.
– Mia, ma belle, tu es le genre de tous les mecs.
Je lève les yeux au ciel et j’enroule mes cheveux sur mon doigt en inspectant
mon tatouage.
– Peu importe. C’est juste que c’est bizarre d’être ici. Je n’y ai pas tout à fait ma
place.
– Comment ça ?
– Eh bien, il m’a engagée pour faire joli à ses côtés et pour se faire accepter par
les autres vieux riches. Ils ont tous une nana suspendue à leur bras. Mais lui, il a
une femme chez lui, avec qui il est depuis des années, et il le cache à tout le
monde !
– Hmmm. C’est bizarre. À ton avis, pourquoi il fait ça ?
– Je ne sais pas. Je ne suis pas certaine qu’il se soit remis du décès de sa femme.
Mais c’était il y a vingt-cinq ans. C’est bizarre. Ça fait des années qu’il a une
relation avec une employée et qu’il ne le dit à personne. Ça ne me plaît pas.
– Ouais, moi non plus. Peut-être que tu pourrais lui faire voir qu’il a tort d’agir
ainsi ? Tu es assez douée pour ce genre de chose.
– Peut-être. Je suppose que ce sera plus amusant que de rester dans ce palace,
avec rien d’autre à faire que d’aller se faire tatouer sur un coup de tête.
Wes reste silencieux si longtemps que je regarde l’écran de mon téléphone pour
m’assurer qu’il n’a pas raccroché ou que j’ai toujours de la batterie.
– Wes ?
– Désolé, ma belle, je t’imaginais avec un tatouage. Putain, tu m’as fait bander
de nouveau.
– Aaah… Peut-être que je peux t’aider à y remédier ? je propose en souriant
jusqu’aux oreilles.
– Ah bon ?

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– Oui. Ferme les yeux et imagine que je dépose des baisers sur ton torse,
descendant toujours plus bas vers ton bassin…
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Chapitre 6

– C hérie, tu n’as qu’à passer un moment avec ces dames pendant que je
parle affaires avec ces messieurs, dit Warren en me guidant à une table où sont
assises sept autres femmes.
Elles sont toutes faites sur le même modèle, avec de petites robes courtes, de
longs cheveux épais, et leurs oreilles, leur cou, leurs poignets et leurs doigts sont
couverts de diamants. Elles doivent passer leur temps dans des instituts de
beauté et n’ont aucun scrupule à le montrer.
– Bonjour, je m’appelle Mia, je dis en leur faisant un signe de la main, gênée.
Toutes, à l’exception de l’une d’entre elles, me fusillent du regard.
– Bonjour, je suis Christine Benoit, la seule à être mariée à mon homme. Les
autres sont moins sympas parce qu’elles n’aiment pas la compétition, n’est-ce
pas, Mesdames ?
Elle ricane et m’offre sa main, manquant m’aveugler avec son énorme alliance.
– Waouh, ça, c’est ce qu’on appelle un caillou ! je m’exclame, et son visage
s’illumine.
– Je sais ! Mon papa s’occupe super-bien de moi. Cinq carats, avec cinq autres
autour pour mettre en valeur ma princesse, dit-elle en désignant le diamant carré
qui m’éblouit.
Il va me falloir des lunettes de soleil si elle continue à le faire scintiller.
– Tais-toi, Christine. Ce n’est pas parce que le vieux Benoit t’a enfin passé la
bague au doigt qu’il faut que tu t’en vantes devant nous.
Je regarde la brune qui grimace et dont l’annulaire est dépourvu de bague. Peut-
être serait-elle plus attirante si elle était plus sympa… Je lève les yeux au ciel en
faisant mine de m’extasier devant le superbe diamant.

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– Elle est magnifique, Christine. Tu as dit que tu étais la femme de Monsieur
Benoit ? Vous habitez au Canada, n’est-ce pas ?
Un buzzer retentit dans ma tête. Ding ding ding ! Jackpot ! Benoit est un des
hommes auxquels Warren veut parler. Apparemment, ce type a des navires sur
toute la côte Est du Canada. Il possède aussi un port à Yarmouth, en Nouvelle-
Écosse, qui est l’endroit parfait pour faire partir des médicaments en Europe, où
ils seront chargés dans des camions qui les transporteront au Mali, un des pays
les plus pauvres d’Afrique.
C’est le destin qui m’envoie cette minuscule blonde, c’est l’occasion pour moi
d’aider Warren.
– Oui ! s’exclame-t-elle en même temps qu’un énorme sourire s’étend sur ses
lèvres botoxées. On habite au Canada. Mon mari est ici pour affaires. J’ai vu que
tu étais arrivée avec monsieur Shippley, dit-elle en me mettant un petit coup
d’épaule. C’est sans doute le plus séduisant de tous les hommes présents ici. À
part mon mari, bien sûr.
Elle fait un mouvement de tête en direction d’un homme qui doit tout juste
mesurer un mètre soixante-dix. Heureusement qu’elle est petite, à côté de moi, il
aurait l’air d’un nain. Il a une moustache grise et d’épais cheveux poivre et sel.
Au moins il a des cheveux, contrairement à cinquante pour cent de la population
masculine qui fréquente ce genre d’événement. J’étudie Monsieur Benoit, puis la
jeune femme devant moi.
– Sans indiscrétion, quel âge a ton mari ?
Ses yeux pétillent autant que son diamant. À l’évidence, ma question ne la
dérange pas le moins du monde.
– Il aura soixante-six ans cette année.
– Et toi, tu as quel âge ?
– Vingt-cinq.
Je digère cette information en sirotant la coupe de champagne que Warren m’a
donnée avant de me livrer à la meute.
– Ça ne te dérange pas qu’il y ait quarante et un ans de différence entre vous ?
– Mon Dieu, non. Il est tellement gentil avec moi. Il m’a recueillie alors que
j’étais à la rue et il m’a offert un toit, puis il m’a aidée à avoir le bac et il a payé

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mon inscription à la fac. Maintenant, j’ai une licence en marketing et je travaille
au siège de Benoit Shipping Inc. Je dirige les nouvelles campagnes de pub, on
partage le même bureau, et quand on est stressés, on se détend en jouant à cacher
Popol.
Cacher Popol.
– Tu viens de dire « cacher Popol » ?
Apparemment, elle se fiche de savoir qui entend cette conversation.
– Ouais, quand on est fatigués ou qu’on s’ennuie ou… qu’on veut juste baiser, il
me penche sur mon bureau ou sur le sien, et il me baise jusqu’à ce que j’en perde
la tête. Il est super-doué et il me fait jouir plus fort que tous les autres partenaires
que j’ai eus. Je crois que c’est à cause des pilules bleues qu’il prend. Il est dur
comme fer en permanence, et moi j’en suis ravie ! Et tu veux savoir un petit
secret ? demande-t-elle, tout excitée.
Un secret. Venant d’une femme qui baise un homme assez vieux pour être son
grand-père, qui emploie l’expression « cacher Popol », et qui a une vie sexuelle
super-remplie avec un vieux… oui, je crois que je veux connaître tous ses
secrets.
Christine se rapproche pour me chuchoter à l’oreille.
– On attend notre premier bébé.
Vous savez, dans les dessins animés, quand de la fumée sort des oreilles des
personnages ? C’est l’impression que j’ai en entendant que Christine est enceinte
d’un homme qui a presque trois fois son âge. J’ai soudain très chaud et
urgemment besoin de m’asseoir.
– Ça va, Mia ? Tu as l’air fiévreuse, dit-elle d’une voix inquiète lorsque je suis
assise dans un fauteuil.
– Peut-être que tu pourrais me montrer où sont les toilettes ?
Il faut que je parle à cette nana seule à seule. Son mari possède l’entreprise de
transport maritime dont Warren a besoin, et je viens de décider que ma mission
était de lui décrocher ce partenariat. Si je dois devenir amie avec Christine pour
y parvenir, alors je le ferai. Et puis, elle est plutôt sympa, pour une folle.
*
* *

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– Alors tu vois, ces vaccins et ces médicaments vont sauver des milliers de vies.
Christine retient son souffle et pose sa main sur son ventre plat.
– Mon Dieu. Il faut qu’on aide Warren ! s’exclame-t-elle.
– Eh bien, je me disais que tu pourrais peut-être en toucher un mot à Frances ? je
propose, ne voulant pas être trop directe.
– Oh, je vais faire bien mieux que ça ! répond-elle en sortant son téléphone de
son sac. Franny mon chérichou, dit-elle en gloussant. Bien sûr, tu sais bien que
je suis toujours prête pour ta grosse queue, Bébé.
L’idée qu’elle se fasse prendre par ce vieux me laisse un goût amer dans la
bouche, un peu comme lorsqu’on est sur le point de vomir.
– Oh je sais, mon chérichou, moi aussi j’ai envie de toi. Méga envie. Mais il faut
d’abord que je te parle de quelque chose.
J’attends à ses côtés tandis qu’elle répète à son mari ce que je lui ai expliqué du
projet de Warren et comment ils peuvent l’aider.
– Oui, chérichou, on en fera notre action caritative de l’année, et je peux faire
une campagne de pub pour l’annoncer aux investisseurs.
Elle ajoute quelques « hm-hm » et quelques « ouais », puis elle s’adosse au
lavabo et sa main descend de sa nuque à son sein, qu’elle prend fermement.
– Ouais, ils ont besoin d’être massés. J’ai envie que tu me prennes ici et
maintenant, tu peux descendre me lécher ? Le bébé m’excite à n’en plus finir. Je
sais que tu m’as déjà prise deux fois aujourd’hui, soupire-t-elle, mais il me faut
ta bouche cette fois-ci. Ok, Franny, s’exclame-t-elle en souriant jusqu’aux
oreilles. Je t’attends aux toilettes. Je mouille déjà, alors ne me fais pas attendre
sinon je commencerai sans toi.
Elle raccroche, pantelante.
– On va se charger des cargos pour Shipley, déclare-t-elle.
Je suis sur le point de sautiller sur place pour fêter ma victoire quand elle
reprend un sein dans chaque main.
– Tu aimes les plans à trois ? demande-t-elle. Franny adore qu’on invite une de
mes amies. Il a l’endurance pour nous baiser toutes les deux et ça ne me gêne
pas de le partager du moment que ce n’est pas dans notre lit, ça, c’est juste pour
nous.

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J’ouvre la bouche et la referme, le souffle coupé, ne sachant pas quoi dire.
J’essaie de digérer ce que je viens d’entendre, des dizaines d’images se pressent
dans ma tête. Christine vient de me proposer un plan à trois avec son mari. Son
vieux papi de mari, dans des toilettes pour femmes.
– Euh, non merci, je réponds en secouant la tête, mais j’ai hâte d’annoncer à
mon… euh… papa , que vous allez l’aider.
– Cool.
Elle passe ses index sous les bretelles de sa petite robe, qu’elle laisse tomber au
sol, la laissant vêtue d’un simple string rouge. Rien d’autre. C’est quoi, ce bordel
? Je me tourne pour lui laisser son intimité au moment où le bon vieux Frances
Benoit entre.
– Tu commences sans moi, mon cupcake ? demande-t-il en reluquant sa femme
et moi des pieds à la tête.
– Je peux pas attendre. Donne-moi ta queue, Papa. Je veux te sucer pendant que
tu me lèches.
– Bébé, je t’ai déjà dit de ne pas te déshabiller dans des lieux publics, dit-il d’une
voix réjouie. Je vais devoir te confisquer ton argent de poche.
– J’y peux rien, gémit-elle, j’ai trop envie de toi.
Voilà le signal pour moi de partir.
– Euh, je vais voir mon euh… Warren.
Je ne peux pas l’appeler de nouveau « papa », c’est trop bizarre. Je suis sur le
seuil de la porte quand j’entends Christine soupirer et gémir.
– Je vais te chevaucher tellement fort. Je t’aime, Franny. Je t’aime. J’adore
baiser avec toi.
– Vas-y, cupcake. C’est ça, grimpe-moi jusqu’à ce que tu jouisses assez fort pour
tenir jusqu’à ce soir. Bon sang, cette grossesse va me tuer, répond son mari.
À la place de Christine, je m’inquiéterais pour sa santé ; à son âge, le mélange de
Viagra, d’alcool et de sexe trois fois par jour peut être fatal.
Quand je sors des toilettes, Warren m’attend.
– Éloignons-nous d’ici, je dis en saisissant son poignet.
– Pourquoi ? Frances a dit qu’il voulait me parler à propos de l’utilisation de ses
bateaux pour transporter nos médicaments au Mali.

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– Je sais, j’ai tout prévu avec sa femme. Mais ils sont occupés, et si tu entres, ils
vont te proposer un plan à trois.
– Je vois. Alors, attendons-les au bar. Comme ça, tu me pourras me raconter ce
que tu lui as dit. Ça te va ?
Il m’offre son bras, en parfait gentleman, comme un grand-père le ferait avec sa
petite-fille. Il est classe, ce type. Au moins, j’ai pioché le bon. Cela dit, Frances
n’a pas l’air si horrible que ça, si on met de côté le fait qu’il a épousé et engrossé
une femme qui a le tiers de son âge. Je frissonne, et Warren s’arrête pour enlever
sa veste et la mettre sur mes épaules.
– Merci.
– Il n’y a pas de quoi. Maintenant raconte-moi ce qui s’est passé.
*
* *
Apparemment, le partenariat avec Benoit Inc est une sacrée victoire pour
Warren. Nous nous installons au bar et nous enchaînons les verres. Christine se
joint à nous, sirotant joyeusement son cocktail sans alcool, plutôt marrante,
maintenant que sa libido est calmée.
Il est environ deux heures du matin lorsque James nous aide à gravir les escaliers
de la maison en chantant si fort et si faux que, quand les lumières du hall
d’entrée s’allument, nous sursautons tous les deux. Kathleen est appuyée à la
rambarde, bras croisés, sourcils froncés.
– Vous avez passé une bonne soirée ? demande-t-elle.
En un claquement de doigts, Warren est à ses côtés. Il l’attire dans ses bras,
prend ses mains et se met à danser avec elle, la faisant valser d’un côté et de
l’autre avant de la pencher en arrière. Je les applaudis, puis je saisis la main de
James, qui prend pitié de moi et me fait tourbillonner dans le hall d’entrée aux
côtés de Warren et Kathleen. Nous dansons tous les quatre quelques minutes,
puis nos partenaires respectifs nous aident à monter au premier étage.
– Eh, Warren, mon pote… n’oublie de parler de notre victoire à Kathleen !
Il rit tandis que je me laisse aller contre James. Sans prévenir, ce dernier me
prend comme un sac à patates par-dessus son épaule.
– Pas mal ! je m’exclame en mettant une claque sur ses fesses fermes.

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Soudain, je me souviens que j’ai autre chose à dire.
– Attends ! je dis en lui remettant une fessée. Parle-lui du plan cul dans les
chiottes ! je m’exclame.
Warren éclate de rire si fort qu’il doit s’asseoir au milieu du couloir. J’ai envie
d’aller l’aider, mais je ne suis pas en position de force.
– Kathy, chérie, tu ne devineras jamais ce que le vieux Benoit et sa femme ont
fait ! dit-il.
– Je suis sûre que tu vas me raconter tout ça, dit-elle en lui tapotant l’épaule.
Mais d’abord, allons te mettre au lit.
– Tu sais que je ne te partagerai jamais avec personne, n’est-ce pas ? dit-il,
subitement sérieux.
James presse le pas et je tape de nouveau sa fesse, mais cette fois-ci il répond en
me rendant la pareille.
– Tu peux arrêter de bouger ? Tu es déjà assez lourde comme ça.
Je me redresse et j’essaie de voir son visage.
– Tu insinues que je suis grosse ?
– Pas du tout. Mais tu es ivre morte et tu n’es quand même pas un poids plume !
– Mais on a raté le meilleur ! je m’exclame en râlant comme une enfant. Il allait
lui dire qu’il l’aime !
Nous arrivons dans ma chambre plus vite que je ne le croyais possible. Évaluer
le temps n’est pas évident dans un tel état d’ébriété.
– Tout le monde sait qu’il aime Miss Kathleen.
– Mais le sanctuaire pour sa femme ? je rétorque.
– Il ne savait pas quoi faire des affaires de Ketty. Il a pensé qu’Aaron se
marierait peut-être, qu’il aurait des enfants et qu’il voudrait certaines de ses
affaires. Il ne voulait pas faire de mal à son fils, il est bien plus sentimental qu’il
n’y paraît.
James me laisse tomber sur mon lit, puis il ouvre le tiroir de ma commode et en
sort un débardeur et un pantalon en coton.
– Voilà ton pyjama, dit-il en les jetant sur le lit. Je t’en supplie, dis-moi que tu
n’as pas besoin d’aide.
Je souris jusqu’aux oreilles d’un air aguicheur.

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– Tu ne te proposes pas ?
– Absolument pas, non. Ma femme m’arracherait les tripes et les donnerait à nos
chiens, répond-il en riant.
– Oooh, tu as une femme ? je demande en me nichant dans mon oreiller.
– Oui, j’ai une femme qui est très jalouse et dont je suis dingue. Je ne la
tromperai jamais, dit James en enlevant mes bottines à talons. Ton tatouage est
cool, au fait. Heureusement que tes chaussures ne l’ont pas frotté, même s’il a
l’air presque guéri.
– C’est bien, je réponds en faisant allusion à sa femme et pas à mon tatouage.
Puis, comme n’importe quelle nana bourrée qui ne sait plus ce qu’elle dit, je lui
fais part d’informations que je ne lui confierais jamais en temps normal.
– Tu sais, moi j’ai un Wes, je dis en repensant soudain à notre petite baise à
distance.
– Tu as un Wes, répète-t-il d’une voix amusée. Je suppose que c’est un homme ?
– Il n’est pas vraiment à moi, mais il est plus à moi qu’à quiconque.
– Je vois. Ça a l’air compliqué.
S’il savait !
– James, je crois que je vais vomir !
Il pousse un grognement et m’aide à aller jusqu’aux toilettes, où je passe le reste
de la nuit à vomir violemment. À un moment donné, James s’en va et Kathleen
le remplace. Elle pose un gant tiède sur ma nuque et m’apaise avec des paroles
douces et des caresses sur le crâne et dans le dos. J’ai mal aux genoux à force
d’être agenouillée sur le carrelage. Je ne sais pas combien de temps je reste là.
Tout ce que je sais, c’est que j’ai envie de mourir.
Lorsque le jour se lève, j’ai la pire gueule de bois de toute ma vie. Mon peignoir
tombe sur une épaule et je n’ai pas la force de le remonter. Une entreprise de
maçonnerie a élu domicile dans ma boîte crânienne. Lorsque j’arrive dans la
salle à manger, je découvre que Warren n’a pas l’air en meilleure forme que moi.
Pour la première fois depuis que je suis là, il porte un pyjama plutôt qu’un
costume. Dans d’autres circonstances, je me serais moquée de lui, mais mon
humour m’a quittée la dernière fois que j’ai vomi de la bile.
– Tu as une sale tronche, je dis en le regardant d’un œil.

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L’autre est temporairement fermé, transpercé par un clou chaque fois que la
lumière le touche.
Les yeux rouges de Warren étudient mon pyjama froissé et mes cheveux en
bataille qui étaient autrefois un de mes meilleurs atouts. Pas aujourd’hui.
Aujourd’hui, je ne peux même pas y passer un peigne. Quand j’ai essayé, j’ai eu
l’impression que de minuscules gnomes me tiraient chaque cheveu, essayant de
les arracher un par un. Tant que je n’aurai pas versé un litre d’après-shampoing
dessus, c’est une no-go-zone 1 .
– Tu t’es vue ? rétorque Warren en appuyant deux doigts sur ses tempes. Bon
sang, combien de verres on a bus ?
– Trop. Beaucoup trop.
Kathleen entre dans la pièce avec une assiette remplie de bacon, de saucisses, de
biscuits et d’une sauce épaisse. C’est le petit déjeuner parfait pour les gueules de
bois. Je serais prête à m’agenouiller devant elle pour la remercier, mais j’ai trop
peur de vomir sur ses escarpins.
– Je t’adore, je dis en lui offrant le plus beau sourire dont je sois capable.
Elle tapote ma tête comme si j’étais un bon petit chien fidèle.
– Je sais. Tu me l’as dit plusieurs fois hier soir, juste après m’avoir juré que tu
n’avais pas eu de plan à trois avec Warren, le Canadien et… ah oui… la Barbie
en cloque.
Warren s’étouffe sur son café, et je pousse un grognement.
– Désolée. J’ai dépassé les bornes. De loin.
– Tu as aussi beaucoup parlé de James.
– Notre chauffeur ? demande Warren.
– Oui. Tu disais qu’il était canon, gentil, et qu’il avait une femme féroce dont il
était dingue, répond-elle en souriant discrètement.
J’enfourne un énorme morceau de biscuit et je pointe ma fourchette sur elle.
– Ça c’est vrai, c’est lui qui me l’a dit !
Tous les deux éclatent de rire, puis nous nous concentrons sur nos assiettes.
Warren et moi dévorons notre nourriture comme le font tous les abrutis qui ont
la gueule de bois. C’est de loin un des petits déjeuners les plus bizarres que j’aie

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connus. Après ça, je file sous la douche et je retourne me coucher pour me
débarrasser des restes de rhum qui coulent encore dans mes veines.

1 . Une zone interdite.


()

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Chapitre 7

Q uelque chose effleure ma cheville puis mon mollet, comme si quelqu’un


touchait ma peau du bout des doigts. Je roule sur le côté et le voilà, plus beau et
bronzé que jamais. La lumière illumine ses cheveux blonds en bataille et ses
yeux scintillent comme l’eau turquoise d’Hawaii. Ses iris me confient tout ce
qu’il n’ose pas dire tout haut. Je pourrais m’y perdre à tout jamais.
– Tu es là, je chuchote.
– Je suis toujours là, répond-il en promenant un doigt calleux sur ma poitrine.
Son doigt embrase mon corps.
En un seul geste, je me retrouve à cheval sur sa taille fine, et sa bouche s’écrase
sur la mienne. Il a le goût de la terre, de l’océan et de tout ce qui est beau sur
terre. Je mordille, suce et lèche sa peau comme si c’était la dernière fois.
– Wes, je susurre contre ses lèvres.
– Mia, répond-il.
Il est inutile d’en dire davantage. Nos corps se frottent l’un à l’autre
instinctivement. Nos mains se promènent sur nos chairs brûlantes. Tout à coup,
ma nuisette passe par-dessus ma tête, me laissant en culotte, déjà mouillée de
désir. Des bras musclés me soulèvent et je me retrouve à cheval sur sa tête. Sa
bouche n’est qu’à quelques centimètres de l’endroit où je souhaite tant le sentir.
Je n’attends pas longtemps. Les yeux fermés, Wes dégage la dentelle de mon
tanga et sa langue plonge sur mon clitoris pour le titiller. Bientôt, mon bassin se
soulève de son propre chef. Je m’agrippe à la tête de lit, et mes ongles se
plantent dans le bois tandis que je me cambre contre sa bouche et que je frotte
ma chair mouillée sur son visage. Wes aime que je perde le contrôle, il devient
encore plus affamé.

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– Plus fort ! je m’écrie.
– Tu te contenteras de ce que je te donne… et ce sera déjà trop pour toi, crois-
moi. Écarte les jambes, ma belle. Je veux te goûter en profondeur.
Il grogne et mord ma cuisse en tirant sur mon tanga pour l’enlever. Je lui obéis et
j’écarte davantage les jambes. Quelques instants plus tard, sa bouche revient sur
moi pour me déguster, me dévorer.
Chaque partie de jambes en l’air avec Wes est différente. Nous nous perdons tant
l’un dans l’autre qu’il n’y a plus qu’un corps constitué de deux âmes.
Quelque chose chatouille ma hanche en des mouvements circulaires. Je tressaille
et je retiens mon souffle alors que mon cerveau essaie de faire remonter quelque
chose à la surface.
Une main puissante glisse le long de mes côtes puis sur mon sein avant de saisir
ma nuque.
– Reviens-moi, Bébé. Je suis là.
Wes m’attire à lui tandis qu’il glisse entre mes jambes, remontant vers ma
bouche en frottant nos torses l’un contre l’autre. Mes tétons durcissent et il en
prend un dans la bouche, déclenchant une explosion de plaisir qui embrase mon
sang. Une nouvelle vague de désir tourbillonne dans mon bas-ventre, me
préparant pour une extase certaine. J’ai envie de lui et j’ai besoin qu’il remplisse
mon corps et mon âme de son essence.
Wes me penche en arrière, créant avec sa langue un chemin entre mes seins pour
s’attaquer à mon autre téton, qu’il lape jusqu’à ce qu’il ne soit plus qu’une
pointe dure et pourpre. Il aime les fortes poitrines et il n’oublie jamais de vénérer
la mienne, comme une déesse devant qui se prosterner.
Le temps passe et je regarde autour de moi, ne reconnaissant plus la pièce dont
les bords sont flous.
– Eh… je suis là. Reste avec moi. Laisse-moi t’aimer.
Je secoue la tête alors que quelque chose titille les bords de mon inconscient.
– Je ne sais pas comment faire, je chuchote, admettant ma plus grande peur alors
que les larmes me montent aux yeux.
– Je vais te montrer.

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Il aligne sa verge avec mon sexe et il me pénètre, centimètre par centimètre,
jusqu’à ce que je me cambre sur lui, mains sur sa poitrine.
– C’est ça, laisse-toi aller.
Je bascule mon bassin d’avant en arrière, puis je me soulève avant de le
reprendre en moi, encore et encore. Je le regarde fermer les yeux et je regrette
qu’il ne les garde pas ouverts. Son regard me lie à lui. Lorsque je ne vois pas ses
yeux, les choses changent.
J’accélère le rythme, me soulevant et me rabaissant sur lui. Il grogne, et je
gémis. La pièce tourbillonne autour de moi tandis que le plaisir atteint son
paroxysme. Je pantelle en le chevauchant sauvagement. Je crie et j’ouvre les
yeux. Tout est flou. Mon orgasme se prépare et je sais déjà qu’il sera si puisant
que je ne suis pas certaine d’en revenir, d’atterrir, de me réveiller…
Quelque chose me chatouille toujours et je comprends enfin que c’est une main
dans mon dos. Mais ce n’est pas celle de Wes, qui tient toujours mes hanches
pour s’enfoncer en moi. Je jouis en criant et en rebondissant sur sa queue tandis
qu’il inonde mon sexe avec son sperme.
– Tu me manques, je chuchote contre sa bouche avant de sucer ses lèvres.
Il ouvre brusquement les yeux.
– Ne t’en va pas. J’ai besoin de toi, dit-il, mais une autre voix atteint les
méandres de mon inconscient.
– Réveille-toi, Mia.
Je sens une main sur mon sein mais, encore une fois, ce n’est pas celle de Wes.
– Ne m’oublie pas, dit Wes en secouant la tête.
J’ouvre les yeux et je ne suis plus nue sur Wes. Non. Je suis nue, et une main
froide couvre mon sein pour le palper alors qu’une autre glisse sur mon ventre
jusqu’à la petite touffe de poil entre mes jambes.
– Mmm, j’aime ça. C’est très sexy, dit une voix grave.
Un corps pesant me cloue au lit. Je sens un parfum de pomme et de cuir alors
que j’essaie de reculer dans le matelas.
Aaron lève la tête pour me regarder avec des yeux noirs de désir.
– Tu es réveillée, grogne-t-il en souriant.
Il se lève et je saisis le drap pour couvrir ma poitrine.

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– Qu’est-ce que tu fais ici et pourquoi tu me touchais ? je m’écrie.
Avec un mouvement d’épaules, Aaron laisse glisser sa veste le long de ses bras,
puis il la plie et la pose sur le banc, au pied de mon lit. La partie rationnelle de
mon cerveau fonctionne mal après une nuit passée à boire et un rêve sexuel
impliquant Wes.
– Ne fais pas comme si ça ne te plaisait pas, ricane-t-il. Je t’ai entendue gémir, et
je t’ai vue lécher tes lèvres pulpeuses, répond-il en défaisant sa cravate. Tu
frottais tes cuisses comme si tu étais prête à être tringlée. Je dois admettre que
c’était sacrément excitant.
Il pose sa cravate sur sa veste, puis il déboutonne sa chemise.
Je cligne plusieurs fois des yeux, essayant de m’éclaircir l’esprit.
– Qu’est-ce que tu fais ?
Sa chemise est ouverte, révélant un torse ferme et des abdos sculptés. Si je
n’étais pas aussi perturbée de le trouver là, sans parler du fait que j’ai encore la
gueule de bois et que je suis toujours à moitié endormie, je réagirais beaucoup
plus vite.
Il pose un genou sur mon lit, et j’écarquille les yeux.
– J’avais rendez-vous avec Père, mais il est occupé. Il a besoin de quelques
minutes, dit-il en rampant sur mon lit. Je me suis dit que je serais un bon fiston
et que je viendrais jeter un œil sur notre invitée.
Il place les mains sur le matelas, de part et d’autre de mes hanches, m’empêchant
de bouger.
– Inutile de te dire combien j’étais ravi de te voir gigoter au lit, nue, clairement
en manque de quelqu’un pour soulager ta tension sexuelle.
Il promène un doigt sur mon bras, depuis mon épaule jusqu’à ma main. Je
frissonne, et ce n’est pas de plaisir.
– Aaron, dis-je d’une voix tremblante, je ne me sens pas bien. Ton père et moi
avons trop bu hier soir. J’ai besoin de dormir. Tu n’aurais pas dû entrer dans ma
chambre sans frapper.
Il s’approche encore, et son nez effleure mes cheveux comme pour les sentir.
Mes poils se hérissent et une alarme retentit dans ma tête.
– J’ai frappé, tu n’as pas répondu.

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– Parce que je dormais.
– Je sais, mais plus maintenant. Maintenant, tu es réveillée, et tu es à poil. Je
crois qu’on devrait en profiter, dit-il en plantant sa bouche sur mon cou. Mmm,
tu es sucrée. Comme du miel.
Comme du miel .
Je déglutis difficilement alors que mon estomac se contracte pour vomir. S’il ne
bouge pas, c’est sur lui que je vais cracher, et il le mériterait, d’ailleurs. Je le
repousse et sors du lit. Je parviens à peine à la poubelle du bureau dans laquelle
je régurgite tout mon petit déjeuner.
– Bon sang, tu es vraiment malade, dit-il d’une voix dégoûtée.
Il n’essaie même pas de m’aider alors que je m’étouffe à moitié. J’entends un
bruissement de tissu et je prie pour qu’il soit en train de se rhabiller.
– Kathleen ! hurle-t-il, et sa voix me fait l’effet d’un TGV lancé à toute vitesse
dans ma tête. Kathleen, viens ici ! Mia est malade !
Un bruit de talons retentit au loin et se rapproche.
– Mon Dieu, Mia, ma pauvre chérie, dit Kathleen en courant vers moi.
Elle pose ses mains froides sur mon dos, qui me réconfortent et m’apaisent, tout
le contraire des mains d’Aaron.
– Occupe-t’en, je serai avec mon père. À la prochaine, Mia, dit-il froidement en
tournant les talons.
Je vomis de nouveau et au bout de quelques minutes, quand je ne crache plus
que de la bile, Kathleen m’aide à me lever et à marcher jusqu’à la douche.
– Ma puce, j’ai peur que tu aies eu une intoxication par l’alcool. Je devrais peut-
être t’emmener aux urgences.
Je secoue la tête.
– Je n’ai pas de sécurité sociale.
En fait, peut-être est-ce le cas maintenant que je travaille pour Tante Millie, je
devrais vérifier. Mais quoi qu’il en soit, je n’irai pas à l’hôpital juste parce que
j’ai trop bu.
– Ça va aller. J’ai besoin de dormir, de boire de l’eau et de manger. Et surtout,
j’ai besoin de ne plus boire d’alcool pendant au moins dix ans.

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– D’accord, ma chérie. Allons te mettre au lit, répond Kathleen en souriant
timidement.
Elle m’aide à enfiler un legging et un t-shirt, et j’insiste pour mettre une
brassière de sport.
C’est la dernière fois que je dors nue dans cette maison.
– Que faisait Aaron dans ta chambre alors que tu étais nue et que tu vomissais
dans la poubelle ? demande Kathleen sur un ton doux et dénué de tout jugement.
Je déglutis et soupire.
– Je ne sais pas. Je crois que je lui plais. Mais, honnêtement, il s’est mal
comporté. Il me touchait pendant que je dormais, c’était bizarre.
Elle ouvre grand les yeux et je regrette immédiatement d’avoir parlé. Elle rougit
du décolleté jusqu’en haut du front et elle fronce les sourcils tandis que ses
lèvres deviennent blanches.
– Il t’a touchée pendant que tu dormais ?
– Euh ouais, mais c’est pas ce que tu crois.
Enfin, techniquement, c’est précisément ce qu’elle croit.
– C’est une agression sexuelle ! Son père va être fou, s’exclame-t-elle, furieuse.
Je secoue la tête et pose mes mains sur ses épaules.
– Ça va, je vais bien. Il a franchi les limites, c’est vrai, mais on flirtait toujours
quand on se voyait. Je vais m’en occuper. Tout va bien. Inutile d’en faire tout un
plat. Ça ne se reproduira plus.
– Mia… commence-t-elle sur un ton glacial.
– Non, Kathleen. Je gère. Je n’aurais pas dû t’en parler. Je m’en suis occupée,
inutile de t’inquiéter.
C’est un mensonge, mais je vais y remédier dès que je me sentirai mieux et que
j’aurai un moment pour parler avec le jeune Shipley.
Elle gonfle ses poumons, et ses épaules retombent.
– Tu en es sûre ? Warren ne tolérerait jamais qu’un homme touche une femme
sans y avoir été expressément invité.
– Je sais et je comprends. Je crois que ça avait été sous-entendu et qu’il s’est un
peu emballé, c’est tout. Il n’y a pas de mal. Je vais bien et je vais lui parler. Je

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m’en occupe, d’accord ? j’insiste en m’approchant de son visage pour qu’elle
voie que je suis sincère.
Elle hoche la tête et me prend dans ses bras.
– D’accord. Mais n’hésite pas si tu as besoin de quoi que ce soit. N’importe
quoi, Mia, dit-elle en tapotant mon dos comme si j’étais son enfant.
Je me demande si elle en a et je décide de lui poser la question quand les choses
seront moins tendues.
– Promis, je réponds en la serrant dans mes bras, profitant de ses caresses
maternelles.
Lorsqu’elle s’en va après avoir nettoyé la chambre, je reste assise sur mon lit et
je tiens ma tête dans mes mains. Jusqu’où aurait-il été ? Est-ce qu’il aurait
vraiment profité de moi ? Si je n’avais pas été malade, se serait-il arrêté ? Je
mets de côté ces pensées car cela ne m’apportera rien de bien. Quand j’en aurai
l’occasion, je parlerai à Aaron, je lui dirai que son comportement était
inapproprié et que, quoi qu’il y ait pu avoir entre nous, l’attirance a disparu pour
de bon et qu’elle ne reviendra jamais.
Maintenant, que faire du rêve de Wes ? C’est sans doute à cause de notre
échange coquin de la semaine dernière et de l’effet de l’alcool sur mon
inconscient, n’est-ce pas ? Le rêve semblait si réel que je sens encore les
papillons voleter dans mon ventre.
Je pousse un grognement et je sors mon téléphone pour appeler ma meilleure
amie.
– Waouh, tu es télépathe ou quoi ? grogne-t-elle.
– Qu’est-ce qui se passe ? je demande en sortant de mon brouillard pour la
première fois de la journée.
Gin n’est pas du genre à se plaindre, comme beaucoup de gens. Si elle n’est pas
contente, elle le dit et elle ne tourne pas autour du pot.
– Eh bien, j’étais assise, en train de me demander si je devais allumer cette
cigarette.
– Gin, Bébé, ça fait combien de temps maintenant ?
– Trois mois, deux semaines et deux jours, dit-elle d’une voix automatique,
comme si elle se concentrait justement sur chaque jour passé sans tabac.

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– Tu t’en sors si bien, ne craque pas. Tu es tellement heureuse depuis que tu ne
fumes plus, et souviens-toi de ce que tu m’as dit à propos des bonbons au beurre
de cacahuète ! Tu m’as dit que tu avais l’impression de les goûter pour la
première fois de ta vie, maintenant que tes papilles ne sont plus détruites par le
goudron.
Elle soupire longuement dans le téléphone.
– Ouais, le goût était dingue. J’arrive toujours pas à croire que ce soit aussi bon.
Qui n’est pas fan de ces trucs ? C’est le meilleur bonbon au monde.
– C’est vrai.
– Le tabac tue les papilles, tu sais, déclare-t-elle.
– Je sais. Et souviens-toi que les beaux mecs n’aiment pas se taper des nanas qui
fument.
C’est mon meilleur atout. Gin est quasi nymphomane et elle ne risquerait jamais
de mettre en péril ses chances avec un beau gosse.
Elle pousse un long grognement et j’entends un bruissement de gravier.
– C’était quoi ça ?
– C’était moi en train d’écraser la clope. J’arrive pas à croire que j’ai failli
manquer les beaux gosses. Tu es vraiment ma meilleure amie, Mia.
Je penche la tête sur le côté et je souris.
– Il faut bien que quelqu’un s’assure que tu continues de baiser.
– Je crois que c’est juste que tu me manques, que Maddy me manque.
– Qu’est-ce qui se passe ? je demande, soudain inquiète.
– Maintenant que Maddy est avec Matt, elle ne veut plus traîner avec moi. Toi,
tu es partie, et les filles du cabaret sont des pestes. Je ne sais pas… Je me suis
tellement éclatée à Hawaii avec vous deux, dit-elle d’une voix pleine de tristesse.
Tu es partie à Washington pour traîner avec un vieux, Maddy a retrouvé son mec
et moi, je suis coincée avec les connards qui bavent devant le spectacle.
– Tu te sens seule ?
Elle laisse un long silence avant de répondre.
– Ouais, je suppose. L’année a été longue. Quand tu es partie en Californie, j’ai
pensé que je finirais par t’y rejoindre, mais je ne sais pas. Parfois je me demande
si je quitterai Vegas un jour.

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– Bien sûr que si, si c’est ce que tu veux. Que penses-tu de ceci : à la fin de cette
année, où que j’aille, je passe te prendre et je t’embarque avec moi ?
– Même si tu choisis d’être avec un mec ?
J’éclate de rire.
– Oui. On n’est pas obligées de vivre dans la même maison, si ?
– Je n’ai aucune envie de partager ma salle de bains avec toi, espèce de crado.
J’ai du mal à imaginer que quelqu’un supporte de vivre avec toi.
C’est pour ça que je suis avec un mec qui a une femme de ménage. Judi
s’occupera de mon bordel.
– Merde…
– Quoi ? demande Gin d’une voix inquiète.
Je ferme les yeux en me demandant si je dois admettre ce qui vient de me
traverser l’esprit. En même temps, Ginelle est ma meilleure amie. C’est la seule
à qui je peux parler et qui me remettra sur le droit chemin.
– Quand tu as dit que j’étais crado…
– Je suis désolée, mais c’est vrai !
– Je sais, mais quand tu as dit ça, je me suis dit que Wes avait une femme de
ménage et que je n’avais pas à m’inquiéter pour la salle de bains.
Elle retient son souffle dans un cri aigu.
– Non, tu n’as pas fait ça ! Comment tu vas tenir le reste de l’année si tu penses
comme ça ?
Je grogne en me passant la main dans les cheveux.
– Je sais. Et ce n’est pas le pire.
– Quoiiii ? Allez, dis-moi tout.
– On a échangé des messages coquins la semaine dernière et, maintenant, j’ai
rêvé que je faisais l’amour avec lui.
– Ah ouais ? Des messages cochons ? Waouh. Tu peux m’envoyer la
conversation ?
Elle est sérieuse ? Je lui confie mes secrets les plus gênants et elle veut voir mes
messages ?
– Tu te fous de ma gueule ? Allô, tu es censée être ma meilleure amie !

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– Ah, ouais, pardon, je me suis laissé distraire. C’est chaud ! Bref, soyons
sérieuses. Tu as aimé le faire ?
– Ouais, mais c’est pas le problème.
– Non, mais c’était fun ?
– Ouais, je crois qu’on a tous les deux aimé ça.
– Et le rêve était bien ?
– Ouais, je réponds en riant.
Bien évidemment, c’était génial jusqu’à ce que je me réveille, mais je ne vais pas
en parler à Gin. Elle va péter un câble et vider son compte en banque pour venir
casser la gueule à cet enfoiré.
– Est-ce que tu as l’impression de lui devoir quelque chose ? De devoir lui être
fidèle ?
Je réfléchis à sa question tandis qu’elle en pose une autre.
– Est-ce qu’il va arrêter de voir son actrice ?
– Non. Pas que je sache, en tout cas.
Il me suffit d’entendre Gin mentionner Gina pour que mon cœur se brise un peu
plus. Une vague de colère déferle dans mes veines, faisant bouillir mon sang.
– Pour faire court, tu as passé de bons moments avec lui ?
– Ouais, je réponds, ne sachant pas à quelle conclusion elle souhaite parvenir.
– Est-ce qu’il faut vraiment que ce soit autre chose ? Tu as passé un bon moment
avec lui, c’est tout. C’est ce que tu as appris à Hawaii avec Taï, non ?
Ma meilleure amie n’a pas tort. Même Wes m’a dit de laisser les choses se faire
naturellement, de profiter de ce qu’on a et de se rappeler combien c’était bon
quand nous étions ensemble.
– Ouais, tu n’as pas tort. J’ai juste du mal à ne pas tout mélanger. Quand je suis
avec un mec, je suis avec lui à cent pour cent. Et quand je ne le suis pas, je ne le
suis pas. Mais avec Wes… il y a toujours quelque chose qui me hante.
– Parce que tu l’aimes, déclare Ginelle, comme si c’était un fait.
Je panique immédiatement, et l’air autour de moi se charge de tension. Incapable
de répondre, je choisis la fuite.
– Gin, Bébé, le patron m’appelle. Je t’aime, ma salope. Je t’appelle bientôt. Ciao
!

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Je me dépêche de raccrocher avant qu’elle ait pu répondre.
()

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Chapitre 8

J e réfléchis un long moment à propos de ce que Ginelle m’a dit au téléphone.


Est-ce que je suis amoureuse de Wes ? J’ai de très forts sentiments pour lui, c’est
certain. Plus forts que je ne suis prête à le lui avouer, mais je rechigne à appeler
ça de l’amour. Je n’ai aucun mal à dire à Alec, Mason, Tony, Hector, et même
Taï ; que je les aime, mais ce n’est pas le cas avec Wes. Pourquoi ? Qu’est-ce
qui me retient ? Je crois qu’au fond de moi, je sais que si je prononce ces mots,
mon espoir et mon envie de fidélité vont croître. Du coup, je ne pourrai plus
profiter de nouvelles expériences, finir l’année en passant chaque mois avec un
homme différent et payer la dette de papa.
Même s’il y a quelque chose de spécial entre Wes et moi, il est hors de question
que je le lui avoue. Donner un nom à notre histoire aurait pour effet de la
détruire ou de nous rapprocher davantage. Quoi qu’il en soit, mon destin serait
scellé. Avec encore six mois à tenir, je n’ai pas la liberté de prendre ce genre de
décision, à moins d’être prête à accepter que Wes paie la dette de mon père.
Wes a beau vouloir le faire, je sais que je le regretterais toute ma vie, car je lui
serais redevable. D’ailleurs, que se passerait-il si ça ne marchait pas entre nous ?
Il aurait alors payé un million de dollars, enfin, cinq cent mille jusqu’ici, pour
que ma famille et moi soyons libres. Je lui devrais cet argent et je n’aurais plus
aucun moyen de lui rembourser. Tante Millie m’a donné cette occasion de
réparer les erreurs de mon père et de déculpabiliser pour avoir présenté papa à
Blaine. J’ai saisi cette opportunité et, maintenant, je dois me tenir à ma décision.
Mia Saunders est escort. Je serai escort pendant six mois encore, je rembourserai
l’argent que mon père doit à mon connard d’ex et je m’assurerai que ma petite

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sœur est encore heureuse avec Matthew. Ce n’est qu’alors que je déciderai quoi
faire.
Rassurée et déterminée, j’ouvre mon dressing et j’étudie son contenu, m’arrêtant
sur une robe dorée à sequins. Elle sera parfaite pour le gigantesque événement
caritatif auquel nous nous rendons demain soir. Warren nous emmène à New
York où nous restons quelques jours afin qu’il puisse discuter de son projet avec
quelques milliardaires. Son entreprise a des bureaux à NYC, ce qui facilite
encore plus le voyage. Je suis déjà allée à New York avec Mason pour le travail
et je suis impatiente d’y retourner.
Il me reste un peu plus d’une semaine avec les Shipley avant de filer vers ma
nouvelle destination. D’ailleurs, cela me fait penser que je n’ai pas eu de
nouvelles de Tante Millie. Plutôt que d’attendre son coup de fil, je décide de
l’appeler moi-même, cette fois-ci. Je sors d’autres tenues du dressing et les pose
sur mon lit en attendant que ma tante décroche. Kathleen m’a dit de sortir les
vêtements que je souhaite prendre avec moi et qu’elle s’occupera de les mettre
dans mes valises. À l’entendre, on dirait qu’elle ne vient pas avec nous, mais je
ne comprends pas pourquoi. Il faut que j’en parle à Warren. Il s’ouvre de plus en
plus à moi depuis la cuite que nous avons prise ensemble, le soir où M. Benoit a
accepté de l’aider.
– Escorts Exquises, bureau de Miss Milan, Stéphanie à l’appareil. Que puis-je
faire pour vous ?
Je lève les yeux au ciel, réalisant soudain la supercherie absurde de toute cette
histoire, même si, bien évidemment, je lui suis reconnaissante de m’avoir donné
l’opportunité de gagner autant d’argent en si peu de temps.
– Bonjour Stéphanie, c’est Mia, la nièce de Millie. Est-ce qu’elle est là ?
– Millie ? Qui est-ce ?
Je soupire en frappant mon front avec la paume de ma main.
– Pardon, Millie est le surnom que j’ai donné à ma tante, Miss Milan.
– Ah d’accord ! C’est marrant. Laissez-moi l’appeler, dit-elle d’une voix joyeuse
qui m’irrite. Miss Milan est prête à vous parler, dit-elle en reprenant la ligne.
J’ai envie de répondre « Ben oui, normal, je suis sa nièce », mais je me retiens et
je me contente d’un « Merci Stéphanie ».

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– Y a pas de quoi ! lance-t-elle en gloussant avant de me transférer à ma tante.
– Mia, ma poupée, comment va ma nièce et mon escort préférée ?
Je hausse les sourcils.
– Je suis ta cliente préférée ?
– Oui ma chérie, bien évidemment. On gagne une fortune grâce à tes longs
séjours. Je regrette de ne pas les avoir prévus pour deux semaines à soixante-
quinze mille dollars au lieu d’un mois à cent mille.
– Ah bon ? je m’exclame en écarquillant les yeux.
– Oui. Non seulement tu es réservée jusqu’à la fin de l’année mais nous avons
désormais une liste d’attente avec six hommes qui veulent t’engager si tu as une
annulation.
Je cligne plusieurs fois des yeux, et il faut quelques secondes à mon cerveau
pour enregistrer ce qu’elle vient de dire.
– C’est dingue ! J’ai du mal à imaginer que qui que ce soit veuille de moi,
surtout pour cent mille dollars. C’est fou !
– Hmm, tu sais, ça prouve seulement à quel point il est difficile de trouver une
personne avec qui l’on s’entend bien. Surtout une personne qui peut aider les
affaires sans prendre trop de place et qui sera canon jusqu’au bout. La capitale
de notre pays te plaît ?
Je m’assieds à côté des vêtements que j’ai rassemblés et je promène ma main sur
les tissus soyeux qui ont été coupés et assemblés pour m’aller comme un gant.
Chaque tenue est superbe et me procure un sentiment de confiance que je n’ai
pas quand je suis vêtue d’un simple jean et d’un t-shirt.
– Oui, ça va. Warren est content, je crois.
– Oh, il l’est. Très content, même. Il t’a payée avec une semaine d’avance et il
t’a versé un bonus de vingt-cinq mille dollars. Tu as quelque chose à m’annoncer
?
– Quoi ? C’est quoi ce bordel ?
Je n’en reviens pas. Il n’a aucune raison d’envoyer vingt-cinq mille dollars
supplémentaires !
– On n’a pas couché ensemble. Je ne sais pas pourquoi il a envoyé ça. C’était
peut-être une erreur ?

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J’entends le bruit de ses ongles sur le clavier et je retiens mon souffle en
attendant sa réponse.
– Non. Ah voilà. C’est une prime.
– Une prime ? Je ne comprends pas.
– Ton contrat dit en effet que si un client est particulièrement content de ta
prestation, il a le droit de te verser une prime. D’habitude, c’est comme ça qu’on
garde une trace de l’argent qu’un client te paie quand tu as une relation sexuelle
avec lui, mais monsieur Shipley a écrit que cette prime t’est due parce que tu lui
as fait décrocher un contrat crucial et que tu l’as fait toute seule.
– Les Benoit, je chuchote.
– Qui sont les Benoit, ma chérie ?
– Ah, euh… je me suis bien entendue avec la jeune femme d’un de ces hommes.
Elle a convaincu son mari de faciliter les choses pour Warren. Je ne savais pas
que c’était important à ce point.
Je n’ai guère besoin de réfléchir pour savoir à quoi servira cet argent, ce sera
pour le mariage de ma petite sœur et de l’homme de ses rêves. Je veux qu’elle ait
tout ce qu’elle désire et je veux que ce soit payé par sa famille, pas par celle de
son mec. Les Rain sont très gentils et, à l’évidence, ils sont ravis que ma sœur
fasse bientôt partie de leur famille, mais c’est ma sœur, et tant qu’elle ne porte
pas d’alliance, elle est sous ma responsabilité.
– Bref, ma poupée, tu vas adorer ton prochain client.
– Je t’en supplie, dis-moi que c’est un beau gosse et que je vais dans un endroit
chaud !
– Oh, ma chérie, seule une photo lui fera justice. Je t’envoie ça par mail. Il
s’appelle Anton Santiago, mais écoute ça, il se fait appeler Latin Lover, ricane-t-
elle.
– Latin Lover ? Bon sang ! Pourquoi il se fait appeler comme ça ?
– Tu as téléchargé l’image ?
– Attends, je te mets sur haut-parleur.
Je lance l’application Gmail et j’ouvre son message. Une photo remplit tout
l’écran et j’en ai le souffle coupé.
– Jésus Marie Joseph . C’est mon client ? Ce n’est pas un…

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– Un célèbre artiste hip-hop ? Si ! répond-elle.
Mon cerveau ne parvient pas à enregistrer ses paroles, car je suis trop occupée à
lécher mentalement l’écran de mon téléphone.
La photo est celle d’un homme svelte, vêtu d’un jean noir trop large qui tombe
sur ses hanches, montrant le haut de son boxer. L’élastique rouge vif de celui-ci
porte l’inscription « M&S » pour la marque britannique Marks & Spencer.
Hector, mon meilleur ami gay, m’a appris les bases de la mode et je connais
désormais la plupart des marques. Évidemment, la couleur rouge sert à attirer
l’attention sur sa taille fine et ferme. Mes yeux remontent sur ses abdos brillants
de sueur jusqu’à ses pectoraux carrés, puis sur son cou tendu par l’effort de la
traction qu’il fait. Ses poignets sont entourés de bandes de protection comme
celles que portent les boxeurs.
Tout cela est délicieux, mais rien ne m’a préparée à son visage. Il est si beau
qu’il ferait pleurer les anges. Sa peau est cappuccino, ses cheveux sont noirs de
jais et ses yeux pâles sont un mélange de vert et de noisette, suffisamment clairs
pour ressortir autant que les miens. Je ne dis pas cela pour me vanter. Depuis que
je suis née, on me dit que mes yeux sont surprenants et, souvent dans la rue, les
inconnus s’arrêtent pour me dire combien mes yeux sont beaux. Je suis bien
placée pour dire que ce type, mon prochain client, Monsieur Latin Lover , a des
yeux merveilleux.
Un gros collier en or repose sur son torse avec un pendentif en forme de cœur
recouvert de diamants. Ce serait sans doute kitsch sur n’importe qui d’autre,
mais ça ne fait qu’accentuer son image de séducteur latin. Ses lèvres pulpeuses
sourient de manière séductrice et je sais déjà que je vais me faire plaisir le mois
prochain.
– Waouh.
Millie rit au bout du fil.
– Je me suis dit que ça te plairait. Est-ce que ça veut dire que je suis pardonnée
pour le vieux ? Même s’il est sympa ? demande-t-elle à propos de Warren, mon
client de soixante-cinq ans.
– Oui, absolument.
– Tant mieux. Je t’envoie les détails de ta mission. Tu iras à Miami, en Floride.

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Miami ? Génial !
– Tu as des questions ? demande-t-elle.
– Ah, oui, pourquoi il m’engage ?
Un silence inquiétant accueille ma réponse et je me laisse retomber sur le lit.
– Tante Millie…
– Il veut que tu incarnes le rôle principal de son nouveau clip qui va sortir dans
quelques mois.
– Un clip ? Une vidéo ? Dans laquelle il va falloir que je danse et que je joue ?
Jouer un rôle ne me dérange pas, au moins ça se rapproche du métier dans lequel
je m’étais lancée avant de devenir escort.
– Oui, poupée. Tu feras ce qu’il voudra. Je ne sais pas, j’imagine qu’il faudra
que tu sois sexy et que tu fasses semblant d’être folle de Monsieur Lover. Tu
danseras et… je ne sais pas, tu feras tout ce qu’aiment les jeunes de nos jours.
– Tante Millie, je ne sais pas danser ! je rétorque.
– Je suppose qu’ils t’apprendront ? C’est toi qu’il veut. Il t’a vue dans les œuvres
Amour sur Toile et, apparemment, il a acheté un des tableaux. Quand il a vu les
pubs pour les maillots de bain et les photos de toi avec Weston Channing et
Mason Murphy, il a décrété que tu étais la femme parfaite pour son clip.
Je secoue la tête et je vide mes poumons.
– Ok. On verra ce qui se passe, je suppose. Miami a l’air d’être une ville sympa.
– Je suis contente que tu le prennes comme ça, poupée. Il faut que j’y aille, un
client qui m’attend.
– D’accord. Une dernière chose… Maddy est fiancée !
– Je te demande pardon ? Je viens de lui envoyer un cadeau pour ses vingt ans !
C’est une carte cadeau Starbucks qui devrait subvenir à ses besoins en caféine
pour toute l’année. Comment ça, elle est fiancée ? demande-t-elle sur un ton
hostile.
Tante Millie ne croit pas au mariage, moi non plus d’ailleurs, après ce qu’ont
vécu mes parents et Millie.
– Elle dit qu’elle l’aime. Ils viennent d’emménager ensemble. J’ai rencontré son
mec et sa famille, et ils sont très sympas. Ils sont… normaux, même. C’est le
genre de famille parfaite qu’on voit à la télé.

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– C’est toujours eux les plus tordus, tu sais, répond-elle.
– Je sais, mais j’ai eu un bon pressentiment. Et puis, ils vont attendre de finir
leur licence pour se marier.
– Ouais, sauf si elle tombe enceinte avant. Et sa carrière scientifique, ainsi que
tout ce que tu as sacrifié pour payer ses études, tombera à l’eau. Pouf, disparu en
un clin d’œil, remplacé par une boule de chair rose, puante et pleine de morve,
qui passe son temps à chialer et qui fout en l’air tes projets d’avenir.
– Waouh, ne prends pas de pincettes, surtout, je réponds, essayant de redonner
un ton léger à la conversation.
– Elle est trop jeune pour s’engager auprès d’un étudiant débile et immature.
Je me pince les lèvres en cherchant le meilleur moyen de répondre.
– Je vais m’assurer qu’elle est sous contraceptif et qu’elle ne prend aucun risque.
Ils ont promis d’attendre deux ans pour se marier. Quant au fait qu’ils vivent
ensemble, je dois avouer que je suis soulagée.
– Si c’est une question d’argent, je lui enverrai ce dont elle a besoin pour finir
l’année.
– Ce n’est pas ça, Millie. Ce qui compte, c’est qu’elle est amoureuse et en
sécurité. La maison de papa est dans un quartier craignos et elle y vivait toute
seule. Ginelle passait devant tous les jours mais, comme tu l’as dit, Maddy est
jeune, belle et naïve. Je ne veux pas qu’il lui arrive du mal. Si le fait qu’elle
habite avec son mec peut la garder en sécurité, alors je suis pour.
J’entends Tante Millie inspirer lentement puis vider tout l’air de ses poumons.
– Très bien, si tu le dis. Je m’inquiète pour elle, c’est tout.
– Moi aussi, mais tout va bien. Je te tiendrai au courant de la suite.
– Je veux bien, oui.
– Je t’aime, Tante Millie.
– Je t’aime aussi, ma poupée chérie.
Eh bien, je ne m’attendais pas à ce que cette conversation soit aussi tendue.
Toutefois, l’info la plus croustillante concerne bien évidemment Latin Lover. Je
me promets de télécharger ses chansons sur mon iPod pour les écouter dans
l’avion et essayer de me plonger dans mon rôle. Le seul problème, dans cette
histoire, c’est que je ne sais absolument pas danser. Je ne comprends pas ce que

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veulent dire les artistes lorsqu’ils chantent des choses comme « Raise the Roof 1
» ou « Drop it Like it’s Hot 2 ». Je ne comprends pas non plus pourquoi c’est
sexy qu’une nana se mette par terre sur la piste. Est-elle à genoux ou assise ? Je
suppose que ça peut être excitant si elle mime une pipe, mais j’ai du mal à
imaginer que ce soit un mouvement de danse populaire.
Bref. Peut-être que je devrais regarder quelques clips, aussi, pour éviter de me
ridiculiser sur la piste de danse.
*
* *
Une fois mes affaires disposées sur le lit, je m’aventure à travers l’énorme
maison, à la recherche de Kathleen ou de Warren. Je trouve ce dernier dans son
bureau. Je frappe doucement à la porte en espérant ne pas trop le déranger.
– Entrez ! gronde-t-il.
Je pousse la porte et il lève la tête, cessant immédiatement ce qu’il est en train de
faire.
– Tu es prête à partir ? demande-t-il.
– Ouaip. Au fait, j’ai une question, si ça ne te dérange pas.
Il hausse les sourcils et me fait signe de m’asseoir dans la chaise face à son
bureau.
– Est-ce que Kathleen vient avec nous ?
Il secoue la tête.
– Non, pourquoi ?
Cette fois, ce sont mes sourcils qui se haussent.
– Je trouve un peu bizarre que tu n’emmènes pas ta véritable petite amie avec
toi.
Il pose son stylo et joint ses mains devant lui.
– Honnêtement, je n’ai jamais pensé que cela l’intéresserait.
– C’est quand, la dernière fois qu’elle a pris des vacances ?
Warren regarde par la fenêtre en réfléchissant à ma question.
– Je ne me souviens pas.
– Et c’est quand, la dernière fois que tu l’as emmenée dîner quelque part ?

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– Dîner ? Elle me fait à dîner tous les jours. Ça fait partie de son travail.
Pourquoi je l’emmènerais manger ailleurs ?
Je ferme les yeux et secoue lentement la tête en comptant jusqu’à dix.
– Warren, cela va sans doute te sembler direct, mais c’est pour ton bien, et tu es
capable de l’encaisser.
Il ferme légèrement les yeux pour m’étudier, son nez se retrousse.
– Tu ne traites pas Kathleen comme il se doit.
Son expression choquée me surprend, comment ne s’est-il jamais douté de cela ?
– Je ne suis pas d’accord, Kathleen gère ma maison, dort à mes côtés toutes les
nuits, achète les plus belles fleurs, les plats les plus…
– Mais tout ça, c’est pour toi !
Warren ouvre la bouche et la referme.
– Je suis désolée, je dis d’une voix plus douce en posant ma main sur la sienne.
Warren, tu la gardes enfermée dans cette maison comme une employée, pas
comme ta copine. Tu ne lui proposes pas de rencards, tu ne lui achètes pas de
fleurs…
Il ouvre la bouche pour intervenir, mais je ne lui en laisse pas l’occasion.
– Tu lui laisses acheter des fleurs pour ta maison. Ce n’est pas la même chose
que de se voir offrir un bouquet qui a été choisi par l’homme qu’on aime.
– Continue, dit-il en reculant dans son fauteuil. À l’évidence, tu as autre chose à
dire. Lance-toi.
– Elle t’aime. Elle ferait n’importe quoi pour toi, or tu la gardes enfermée ici
comme si tu avais honte d’elle.
– Elle a dit ça ? s’exclame-t-il en rougissant.
– Pas dans ces termes, non, mais c’est l’impression que j’ai eue. Elle t’accueille
tous les soirs, elle sert tes repas que tu ne manges pas avec elle, et tu attends
qu’elle dorme avec toi tous les soirs sans broncher ?
– Je… je… euh, je crains que tu ne me prennes de court… je ne sais quoi
répondre, dit-il en passant sa main dans ses cheveux poivre et sel.
– C’est simplement que j’ai vu comment tu la regardais. Tu l’aimes, n’est-ce pas
?

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– Bien sûr que je l’aime, répond-il sans hésiter. Cela fait des années que je
l’aime, je ne lui ferais jamais de mal.
– Alors pourquoi parades-tu avec une fille comme moi alors que tu as une
superbe femme qui serait ravie de mettre une jolie robe pour t’accompagner en
soirée et te soutenir en public ? Emmène-la dîner quelque part, Warren. Offre-lui
quelque chose. Achète-lui des fleurs, même si tu les ramasses dans ton jardin.
Parle d’elle à ton fils. Arrête de la planquer. Elle ne veut rien de plus que d’être
avec toi, vraiment être avec toi.
Warren hoche la tête et regarde par la fenêtre, l’esprit ailleurs. Je peux seulement
espérer qu’il réfléchira à ce que je viens de lui dire et qu’il fera quelque chose.
Je me lève et tourne les talons pour partir.
– Mia ?
Les poils de ma nuque se hérissent et je prie pour qu’il ne soit pas sur le point de
m’engueuler pour m’être mêlée de sa vie amoureuse.
Je me tourne vers lui et découvre un tendre sourire sur ses lèvres.
– Merci d’avoir eu le culot de remettre le vieillard que je suis à sa place.
– Y a pas de quoi, je réponds en souriant jusqu’aux oreilles.
– Lorsque tu verras Kathleen, dis-lui de venir me voir.
– Je suis sûre qu’elle en sera ravie.
Je lui lance un clin d’œil et je sors de son bureau en sautillant pour partir en
quête de la femme qu’il aime. Les choses sont sur le point de changer dans la
maison Shipley, et ce sera pour le mieux, c’est certain.

1 . Titre d’une chanson de Luther Campbell qui signifie « levez les mains en l’air
».
2 . Titre d’une chanson de Snoop Dogg et Pharrell Williams qui signifie «
baisse-toi et bouge tes fesses sur la piste de danse ».
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Chapitre 9

L a ville de New York remplit toutes mes attentes, et plus encore. Elle
fourmille de gens, brille de mille feux, regorge d’immeubles immenses qui
disparaissent dans les nuages. Cependant, ce que j’aime le plus, c’est la diversité
de la population. Il y a toutes les nationalités, toutes les couleurs de peau, toutes
les religions et toutes les ethnicités, le tout réuni dans ce melting-pot géant qu’on
appelle NYC. J’adore. J’adore chaque instant passé dans ce brouhaha, sur ce
bitume, au milieu des corps écrasés les uns contre les autres et qui se faufilent
comme des souris dans un labyrinthe, tout cela m’apparaît comme une
expérience essentielle. C’est un moment que je n’oublierai jamais. Il y a trop de
choses à vivre et à voir dans un endroit aussi plein d’énergie.
– Mia chérie, tu viens ? demande Kathleen alors que le portier tient ouverte la
porte de l’hôtel.
Le Four Seasons est réputé pour ses tarifs inabordables que seules les stars
peuvent se permettre. Je regarde au loin dans la rue, savourant cette vue
incroyable, et je me sens l’âme amoureuse. Peu importe que je profite du fric de
mon client, que je lui serve d’escort et que je sois perçue comme une pouffiasse
chercheuse d’or. Je m’en contrefiche. C’est grâce à ce boulot que j’ai la chance
de vivre ce moment.
– Ouais, je chuchote sans quitter des yeux le spectacle de tous ces buildings qui
s’élèvent jusqu’au ciel.
L’architecture unique de chaque immeuble lui donne une personnalité singulière
et lui permet de se démarquer.
– Viens, petit rat des villes, la vue depuis notre suite du cinquantième étage va te
couper le souffle.

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– On dort au cinquantième étage ?
– Oui, répond Kathleen en souriant.
– Il y a combien d’étages en tout ? je demande en penchant la tête pour essayer
de voir le sommet du building.
Il est loin d’être large, avec seulement quatre fenêtres sur sa façade, mais il
dégage une impression d’ancienneté et de puissance. Ses lignes sont douces et
les angles arrondis, et chaque étage est plus étroit que celui qui le précède, de
sorte que l’immeuble rétrécit au fur et à mesure qu’il s’érige dans le ciel.
– Cinquante-deux. Warren n’était pas content que nous n’ayons pas le
penthouse, donc ne lui en parle pas, s’il te plaît. Les deux derniers étages avaient
déjà été réservés par d’autres invités du gala, explique-t-elle en me tirant dans le
hall d’entrée.
Mes talons claquent bruyamment sur le sol en marbre noir, découpé de sorte à
former une sorte de toile d’araignée avec des joints étonnamment blancs.
J’aurais pensé qu’ils noirciraient à force d’être piétinés, surtout dans une ville où
règne un tel va-et-vient. Un portier nous guide vers l’ascenseur où Warren nous
attend. Nous arrivons vite dans notre suite et j’en ai le souffle coupé. Jamais je
n’ai vu de pièce aussi belle.
– L’appartement vous convient-il, Mademoiselle Saunders ? demande Warren en
riant.
Je ne trouve pas les mots pour lui répondre et je me contente de hocher la tête en
regardant tout autour de moi. Les couleurs dominantes sont le crème et le doré,
qui donnent à la pièce un air céleste et chaleureux. Comme si on pouvait s’y
asseoir pour rester un instant ou… toute une vie. Des fenêtres occupent presque
tous les murs, offrant une vue quasi panoramique sur toute la ville.
Dans un coin, un piano d’un noir brillant attend que quelqu’un s’y installe, et je
regrette de ne pas savoir jouer. Je peux chanter juste, comme la plupart des
acteurs, mais je ne dirais pas que j’ai un don pour la musique. Cela me résume
plutôt bien, finalement, touche-à-tout, médiocre pour beaucoup de choses,
talentueuse en rien du tout.
Kathleen fait le tour de la pièce, suspendue au bras de Warren, s’émerveillant
devant le moindre objet. Leur relation amoureuse voit enfin le jour après tant

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d’années, et Kathleen est rayonnante de joie.
Je ne sais pas où je me situe dans l’histoire, mais peu importe. Du moment qu’ils
sont tous les deux heureux, qu’ils vont de l’avant et que j’ai été payée, je suis
ravie. Bien évidemment, il va falloir gérer le gala de charité de demain soir ainsi
que les dîners suivants, est-ce que je dois continuer à jouer le rôle de la belle
plante accrochée à son bras ? Va-t-il inviter Kathleen ?
J’oublie toutes ces questions à l’instant où j’entre dans la salle de bains. Je
m’avance pour promener mon doigt sur la coiffeuse en marbre blanc et je
m’assieds sur la baignoire carrée qui est aussi large qu’un lit double. Deux
personnes pourraient y rentrer aisément et s’adonner à une belle partie de jambes
en l’air. Je lève la tête vers le miroir, où je découvre une jeune femme aux
sourcils froncés. Pas de jambes en l’air pour moi, hélas. Je soupire et regarde par
la baie vitrée qui monte du sol au plafond de la salle de bains. Je suppose que les
vitres sont sans tain afin qu’on puisse voir vers l’extérieur et pas vers l’intérieur,
sinon les habitants de l’immeuble en face passeraient leurs journées à mater des
célébrités à poil.
Quand je me lève, je réalise soudain combien je suis fatiguée, et pas seulement
par le voyage. Je suis lassée de ne pas savoir ce que je fais. Épuisée de vivre
avec des inconnus, même s’ils sont gentils et généreux.
Soudain, je comprends. Ma vie ne m’appartient pas. Ma petite sœur vit avec un
homme que je n’ai rencontré qu’une fois. Une fois ! Même papa ne le
permettrait pas. Et papa, bon sang ! J’ai abandonné mon père dans une maison
de convalescence alors qu’il est dans le coma. C’est quoi, mon problème ?
Certes, tout ce que je fais cette année est de sa faute, et je devrais lui en vouloir,
mais je connais mon père. Il n’aurait jamais souhaité ça pour moi. Il n’aurait
jamais voulu que je mette ainsi ma vie en suspens et que je laisse Maddy seule.
Et tout ça pour quoi ? Pour rembourser une brute avec qui j’ai baisé et que j’ai
cru aimer ? Non, il laisserait Blaine le tuer pour me protéger et m’éviter cette
vie. La vie d’escort.
Je secoue la tête et j’entre dans la chambre que Warren a désignée comme étant
la mienne. Je me laisse tomber en avant sur les oreillers blancs et je me rappelle
la fois où j’ai fait exactement la même chose dans une chambre semblable à

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celle-ci, à cinq mille kilomètres d’ici. C’était la chambre d’un homme qui ne
pourra jamais réellement m’aimer et qui me quittera tôt ou tard, j’en suis
convaincue. Il me fera souffrir, comme les autres, et il détruira le peu de foi qui
me reste dans le sexe masculin. Toutefois, pour être honnête, je crois que ce dont
j’ai le plus peur, c’est qu’il ne puisse pas rivaliser avec l’homme de mes rêves.
Un homme dévoué, fidèle, aimant. Un homme que j’ai passé mon adolescence à
chercher et que je n’ai jamais trouvé, même la vingtaine passée. À présent, je ne
sais plus ce que nous sommes l’un pour l’autre, à part des amis qui couchent
ensemble. En revanche, je sais que j’irai loin pour éviter de le découvrir.
Je connais mon objectif, et il est à ma portée. Je rembourse Blaine chaque mois,
protégeant ainsi mon père, Maddy et moi-même. Pour l’instant, nous sommes en
sécurité.
*
* *
Si un groupe terroriste voulait détruire l’économie des États-Unis, il n’aurait
qu’à lâcher une bombe dans le Bryant Park ce soir. Les principales œuvres de
charité du pays y sont rassemblées. Chacune a son stand sur l’allée de gravier
entourant la pelouse au-dessus de laquelle sont suspendues des dizaines de
guirlandes lumineuses. Des tables hautes et rondes sont recouvertes de nappes
argentées et des lanternes sont parsemées tous les dix mètres dans l’herbe. Les
représentants des plus grands groupes industriels et économiques sont présents,
et je crois même avoir repéré Gates parmi les célébrités ainsi qu’une horde de
membres du gouvernement. Des stars de cinéma sont éparpillées çà et là dans
leurs tenues scintillantes et leurs costumes trois-pièces et je dois lutter de tout
mon cœur pour ne pas leur demander un autographe.
J’admire le tout en écoutant la musique lorsque, soudain, je suis soulevée dans
les airs et plaquée contre un corps musclé et rigide. On me serre si fort que je
peine à respirer. L’odeur virile d’un parfum familier me parvient alors, et je
souris jusqu’aux oreilles.
– Lâche-moi, espèce de brute épaisse ! je m’exclame en riant alors qu’on me fait
glisser le long d’un torse sculpté pour me reposer par terre.

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Il prend mon visage dans ses mains et me regarde de ses yeux émeraude
pétillants de malice. Ses cheveux cuivrés scintillent sous la lumière des
guirlandes et je promène mes mains le long de ses bras.
– Je t’ai manqué, ma douce ? demande-t-il en m’embrassant sur le front, comme
un frère.
– Mace, je chuchote en souriant avant de l’attirer dans mes bras pour
m’accrocher à lui.
Voilà enfin un visage familier dans cet océan d’inconnus. Je me colle à lui
comme une sangsue, déterminée à ne plus jamais le lâcher.
Mason empoigne fermement mes deux mains et m’oblige à reculer pour me
scruter du regard.
– Tu as l’air fatiguée.
Je vide tout l’air de mes poumons, ne sachant pas si je suis soulagée ou inquiète
que seul cet homme, avec qui j’ai passé un mois et qui est devenu un de mes
amis les plus proches, remarque ma lassitude.
Ils ne te connaissent pas , se moque une petite voix dans ma tête.
– C’est une façon polie de me dire que j’ai une sale tête ? je réponds en boudant.
Les yeux de Mason me reluquent de la tête aux pieds, prenant note de ma petite
robe dorée qui moule mes courbes, à tel point que je n’ai pas pu mettre de sous-
vêtements. Une expression loin d’être fraternelle traverse son visage, mais elle
disparaît aussitôt.
– Je ne parlais pas de ta robe, ma douce. Ton corps est toujours cent pour cent
baisable.
Je le repousse en faisant mine de vomir.
– Où est Rachel ? je demande en regardant derrière lui, satisfaite de la voir
s’approcher.
Elle porte une petite robe blanche très chic, et le regard de Mason s’illumine en
la voyant approcher avec deux coupes de champagne dans les mains.
– Elle n’est jamais très loin de moi, ça, je peux te le garantir, gronde-t-il en
souriant.
– Sacré veinard !
Il me fait un clin d’œil et me prend par les épaules.

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– Je sais.
Quand Rachel arrive près de nous, son visage se détend et elle rougit
délicatement. Elle tend les flûtes à Mason et me prend dans ses bras.
– Mia, mon Dieu, que fais-tu ici ?
Je recule pour la tenir à bout de bras.
– Moi ? Et vous ? je demande en les regardant.
– On continue de travailler pour améliorer mon image. C’est le plus grand
événement caritatif de l’année, répond Mason en hochant les épaules avant
d’attirer Rachel à ses côtés. Ma chargée de relations presse pense que le fait
qu’on me voie à ce genre d’événement aidera à renforcer l’image de moi qu’on
vend aux investisseurs.
– Elle a raison. Merci, je dis en prenant la coupe que me tend Rachel.
Elle l’avait sans doute prise pour Mason, mais cela ne semble pas le gêner. Nous
passons un moment à discuter et à plaisanter tous les trois. Je n’ai pas la moindre
idée d’où se trouvent Warren et Kathleen, mais je suppose que ce dernier doit
être occupé à présenter sa véritable copine à tout le monde. Quant à moi, je ne
suis là que pour montrer que nous sommes en bons termes après notre « rupture
» et pour prouver que Warren n’a pas plusieurs copines à la fois. Je suppose que
ça fait de moi un accessoire dans l’histoire, mais toutes les chercheuses d’or le
sont et les hommes que j’ai rencontrés ce mois-ci le savent, à l’exception de
Monsieur Benoit et de sa femme de vingt-cinq ans, enceinte.
En parlant du loup, voici Christine Benoit qui me fait signe de la main, de l’autre
côté de la pelouse.
– On se retrouve dans une heure, ça vous dit ? Je dois aider mon client.
Rachel me prend de nouveau dans ses bras.
– Mia, je n’ai pas eu l’occasion de te remercier et de te dire combien tu comptes
à nos yeux. On… eh bien… on t’aime. Tu fais partie de la famille, d’accord ?
Tu fais partie de la famille .
Mason me prend également dans ses bras alors que Rachel essuie une larme.
– Elle a raison. Tu fais partie de la famille. Si tu veux venir nous voir un jour,
sache qu’il y aura toujours un billet d’avion à ta disposition, d’accord ?

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Il fait un pas en arrière et se baisse pour me regarder dans les yeux. Je hoche la
tête, émue.
– Je suis sérieux, insiste-t-il. Tu n’as qu’à nous écrire pour nous dire que tu veux
venir à Boston et je réserverai ton billet. Compris ?
Je souris, puis je l’embrasse sur la joue.
– Compris, frérot.
Je lui lance un clin d’œil et les regarde un instant en souriant. Ils forment
vraiment un beau couple. D’ailleurs, ils sont si beaux que je sors mon téléphone
pour capturer leurs sourires à jamais. Un jour, quand j’aurai mon propre chez-
moi, je ferai développer cette photo et je la mettrai au mur. Une photo pour
capturer le moment où ces gens m’ont dit que je faisais partie de leur famille et
qu’ils m’aimaient.
– À tout à l’heure, d’accord ?
Ils me répondent par un signe de la main, et je tourne les talons pour retrouver
Christine. Je me faufile parmi les costards et les robes de soirée en repensant aux
paroles de Rachel et Mason. Ils m’aiment, et nous formons une famille. Ces
deux personnes, que je n’ai connues que quelques semaines, m’adoptent dans
leur cercle, car ils le souhaitent.
Les amis sont la famille que l’on se choisit.
Comme Taï, Tony et Hector, Mason et Rachel m’accueillent dans leur famille.
Grâce à eux, la tâche qui m’attend pour le reste de l’année semble plus
supportable. Je les emmène tous avec moi, dans mon cœur et dans mon âme.
Peut-être étais-je censée les rencontrer grâce à ce voyage. Avant, il n’y avait que
papa, Maddy et Ginelle. Peut-être Tante Millie. Or, tous ces gens sont désormais
ceux que j’appelle lorsque j’ai besoin de parler. C’est à eux que je raconte ce qui
m’arrive, à eux que j’envoie des mails. Comme des membres de ma famille,
mais en mieux, car ils m’ont choisie .
Un sentiment de paix m’envahit alors que je laisse Christine me prendre dans ses
bras. La petite nymphomane blonde et en cloque sourit jusqu’aux oreilles. La
robe bustier moulante accentue son ventre légèrement rebondi sur lequel
reposent ses mains, et je les lui enlève pour la voir de profil.
– Waouh ! Je vois ton ventre !

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– C’est dingue ! Il est apparu il y a quelques jours et, maintenant, tout le monde
a la preuve que Franny et moi nous aimons. On saura le sexe dans une semaine !
En parlant de Frances Benoit, il apparaît aux côtés de sa femme et pose une main
sur son ventre.
– Comment vont ma jolie citrouille et mon petit marmiton ?
Les yeux de Christine s’illuminent comme cent bougies sur un gâteau
d’anniversaire. Son langage corporel ne ment pas, l’amour qu’elle a pour son
mari est flagrant. Elle le tient fort contre elle et caresse tendrement sa main.
C’est étrange de voir un homme de quarante ans son aîné dévorer son cou
comme un adolescent, mais après tout, qui suis-je pour les juger ?
– Je disais justement à Mia qu’on allait bientôt savoir si c’est une fille ou un
garçon.
Il hoche la tête et l’embrasse sur la tempe.
– Ah, Mia, de notre côté, tout est en place pour le projet.
– Déjà ? je m’exclame en écarquillant les yeux.
– Ouais, Franny et moi savons combien ce projet est important. On a passé
quelques nuits blanches la semaine dernière, et tout est prêt. Dès que les produits
et les gens seront prêts, ils pourront partir en bateau vers l’Angleterre.
– Je n’arrive pas à croire que vous ayez déjà tout préparé. Est-ce que Warren est
au courant ?
– On vient de lui dire, oui. Il te cherche, d’ailleurs. Est-ce que tout va bien entre
vous ? demande Frances.
– Très bien, oui. Merci de t’en inquiéter.
Je les félicite de nouveau pour leur bébé et le travail qu’ils ont fait et je balaie la
foule du regard, à la recherche de Warren. Cependant, je n’ai fait que quelques
pas lorsque mes yeux s’arrêtent sur la perfection masculine incarnée. Le sénateur
Aaron Shipley ne fait rien pour cacher qu’il me mate et je profite un instant
d’être flattée ainsi pendant qu’il traverse la foule pour venir à moi, un verre de
whisky à la main. À deux mètres de moi, il s’arrête pour le vider cul sec. Son
regard est vitreux et froid, l’homme séduisant que j’ai rencontré au début du
mois a disparu, remplacé par le prédateur qui m’a touchée dans mon sommeil.
Merde !

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– Ma belle et tendre Mia. On dirait que ton rencard t’a abandonnée pour une
autre.
Il pose une main sur ma hanche, et son poing se ferme. J’essaie de m’écarter,
mais son autre main saisit mon poignet. Je ne peux pas provoquer une scène en
le repoussant, c’est le sénateur de Californie et je ne suis personne. Je ne suis
qu’un visage sans nom qui est associé à son père depuis à peine deux semaines.
– Tu peux me lâcher ? je demande en essayant de libérer ma main, sans succès.
– Allez, Mia. Je viens d’apprendre que mon père se tape ma nounou depuis que
ma mère est morte. D’ailleurs, il avait sans doute commencé avant. Je ne suis
pas d’humeur pour tes petits jeux.
– Ce n’est pas vrai, ils se sont rapprochés au fil des années. Parle-lui, Aaron.
Laisse-lui te raconter comment ça s’est passé.
Il serre tant les lèvres qu’elles en deviennent blanches. Il nous guide à travers la
foule, appuyant si fort sur ma hanche que je sens déjà les bleus se former. Je
regarde par-dessus mon épaule et je croise le regard inquiet de Rachel, au loin.
Elle tapote l’épaule de Mason, mais il est occupé à parler à un groupe de gens
qui doivent être des fans. Parler au lanceur star des Boston Red Sox est une
sacrée chance, même quand on est milliardaire. Sans parler du fait que cela
pourrait offrir de nouvelles opportunités de sponsors ou de publicités à Mason.
Nous traversons l’allée avec les stands de charité et nous gravissons des
marches. Nous sommes sur le perron de la New York Library, plongé dans le
noir à cette heure-ci. Aaron m’emmène dans un coin sombre, derrière les
colonnes en pierre grise, ce n’est qu’alors que mon cerveau imbibé de
champagne réalise qu’il ne veut pas se promener pour discuter. Je tourne les
talons et tire brusquement sur mon bras pour me libérer de son étreinte.
– Qu’est-ce que tu fais, Aaron ? je m’écrie en levant les bras sur les côtés pour
désigner l’espace qui nous entoure.
Il n’y a absolument personne autour de nous et nous sommes à une soixantaine
de mètres des gens les plus proches. Bon sang, quelle imbécile de l’avoir laissé
m’emmener aussi loin !
– Tu te crois spéciale, n’est-ce pas ? crache-t-il.
Je secoue la tête en essayant de parler calmement.

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– Pas du tout. C’est tout le contraire, en fait.
Il fronce les sourcils et avance vers moi à grandes enjambées. Je lève les mains
devant moi, mais il ne s’arrête pas et je me retrouve adossée au mur bétonné,
dans un coin sombre. Quelques pas de plus et son torse est contre le mien. Je
cherche le meilleur moyen de réagir, mais le champagne ralentit mes réflexes.
– Aaron, ne fais pas ça.
Son nez effleure ma tempe et des frissons parcourent mon dos, faisant se hérisser
mes poils.
– Tais-toi !
J’essaie de le repousser, en vain. Aaron est loin d’être léger.
– Tu essaies de t’échapper, petite pute, ricane-t-il en bafouillant à moitié.
– Je ne suis pas une pute, Aaron, et tu le sais parfaitement.
Il mord mon cou avant de répondre.
– Je sais que mon père t’a engagée pour jouer sa pute devant ses amis pleins de
fric. Je sais que tu travailles pour un service d’escorts et que tu es payée au mois.
Il est temps de faire ce pour quoi mon père t’a payée.
Je commence à me débattre, mais j’ai peu de latitude. Je parviens à lui mettre un
coup de poing dans la bouche, fendant sa lèvre inférieure, mais il saisit mes
mains dans une des siennes et me pelote avec l’autre. Il me plaque si fort contre
le mur que je sens la peau de mon dos s’irriter et gonfler quand il se frotte contre
moi.
J’essaie de crier, mais il mord ma bouche. Le bruit horrible de sa braguette qui
s’ouvre glace mon sang. Je hurle plus fort, mais il cogne ma tête contre le béton.
J’y vois flou et ma tête se fait lourde. Je sens qu’il remonte ma robe jusque sur
ma taille, l’air frais chatouille ma chair nue. Des étoiles brillantes dansent devant
mes yeux. Ses doigts descendent sur mon ventre pour empoigner brusquement
mon sexe. De la bile remonte dans ma gorge et j’ai un haut-le-cœur.
– Je vais te prendre tellement fort. Je vais te tringler comme la pute que tu es,
espèce de salope ! gronde-t-il en crachant sur mon visage.
Ce n’est pas l’homme que j’ai rencontré quand je suis arrivée. Ce n’est pas
l’homme avec qui j’ai discuté et flirté. Non, cet homme est le même qui m’a

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touchée pendant que je dormais et qui n’a pas montré le moindre remords.
C’était la première preuve que quelque chose ne va pas chez le jeune sénateur.
Je sens son gland contre ma cuisse.
– Non, je chuchote en secouant la tête.
Je n’ai pour réponse qu’un sourire glaçant. Il remet sa main sur ma bouche alors
que je hurle de toutes mes forces. Je mords sa main, et il pousse un juron avant
de cogner de nouveau ma tête contre le mur. Cette fois-ci, mes jambes cèdent
sous moi et je sens que je vais perdre conscience. Peut-être serait-ce le mieux.
Mieux vaut ne pas savoir ce qu’il me fait plutôt que de tout vivre. Je me mets à
prier d’avoir la chance de m’évanouir.
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Chapitre 10

– J e vais te défoncer !
Ce sont les dernières paroles que j’entends, et elles sont pleines d’un profond
mépris. Je n’aurais jamais cru possible que ce jeune sénateur, que tout le monde
adore et qui est en route pour devenir un jour le président des États-Unis, soit
capable d’une telle haine.
J’attends qu’il mette ses paroles en action lorsque, tout à coup, une vague d’air
froid me saisit. Mon corps est libéré du poids qui l’écrasait contre le mur.
J’entends des grognements et le bruit de pieds traînés sur le sol, mais la douleur
qui s’acharne dans ma tête altère ma compréhension. Incapable de tenir debout,
mes genoux s’écrasent sur le sol froid.
– C’est moi qui vais te défoncer, espèce de pourriture ! hurle Mason.
Je lève la tête, confuse de le voir se jeter sur Aaron à la manière d’un lutteur,
sauf que les deux hommes sont en costume-cravate. Au loin, je vois Rachel
fendre la foule en courant, et le bruit de ses talons sur les marches manque me
faire exploser ma tête.
– Mon Dieu, Mason, où est Mia ? hurle-t-elle.
J’essaie de répondre, mais ma voix ne fonctionne pas. Les coups que ma tête a
subis m’ont ôté ma capacité à parler.
Mason frappe violemment Aaron au visage, une traînée de sang apparaît sur le
sol gris. Soudain, je sens que je vais vomir. J’ouvre la bouche alors que Mason
dit quelque chose, mais je ne comprends pas. Je m’étends sur le sol froid,
appuyant ma joue sur le béton, cherchant à soulager la douleur qui ankylose
chaque centimètre de ma peau. Un tourbillon d’acide fait rage dans mon estomac

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et mes entrailles se contractent violemment pour faire remonter le liquide dans
ma gorge. Je vomis, réussissant à peine à bouger ou à lever la tête.
– Mia, mon Dieu non, ma chérie.
C’est la voix de Rachel, je la sens me soulever sur ses genoux.
– Bébé, elle est à moitié nue et elle saigne.
Elle baisse ma robe, couvrant mes cuisses, et elle effleure du bout des doigts les
plaies de mon dos et la substance collante derrière ma tête. Apparemment, le
mur de la bibliothèque a eu raison de moi.
– Il faut l’emmener à l’hôpital, crie Rachel d’une voix tremblante.
Au loin, j’entends un rugissement suivi de coups. Des gouttes chaudes tombent
sur mes joues et l’une d’elle coule sur mes lèvres. Ce sont les larmes de Rachel.
– Tout ira bien, Mia. On va s’occuper de toi, chuchote-t-elle en se penchant pour
m’embrasser sur le front.
Je laisse alors les ténèbres m’engloutir.
*
* *
C’est une odeur âcre de désinfectant qui réveille mes sens. Je lèche mes lèvres et
ne rencontre qu’une sensation râpeuse. Avant même que je n’ouvre les yeux, une
paille tapote ma bouche, que j’entrouvre pour boire goulûment. Ma lèvre coupée,
déchirée par les dents d’Aaron, est un supplice. J’ouvre les yeux pour trouver
Rachel aux petits soins pour moi. Ma main est prise dans quelque chose de
chaud et je sens un poids contre moi. Je baisse les yeux et découvre une touffe
de cheveux cuivrés ainsi qu’une grosse main qui enserre la mienne. Les
phalanges sont déchirées et tachées de sang. Je bouge la main et plonge mes
doigts dans la masse soyeuse des cheveux de Mason.
Il lève lentement la tête et pose sur moi un regard sombre et triste. Je souris
autant que me le permet ma lèvre coupée, et il tient ma main pour embrasser ma
paume.
– Comment tu te sens, ma douce ?
Je cligne plusieurs fois des yeux en passant en revue ce que je ressens. Mes
genoux sont endoloris, mon dos semble en feu, mais le pire est ce martèlement
continu dans ma tête.

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– Est-ce qu’il m’a… ?
Je m’arrête, incapable de prononcer le mot.
Rachel caresse délicatement ma tête, dégageant les mèches de mon front, tout en
pleurant à chaudes larmes. La mâchoire de Mason se contracte, et il secoue la
tête.
– Non. Dieu merci. Si ça avait été le cas…
Son visage se durcit et son regard devient diabolique et glacial, jamais je ne l’ai
vu ainsi.
– … je l’aurais tué de mes propres mains. Mais je l’ai sacrément amoché, ne t’en
fais pas. Les flics l’ont arrêté. Il peut dire au revoir à sa putain de carrière, tu
peux me croire.
Je ferme les yeux et laisse les larmes couler.
– Bon sang, je regrette de n’avoir rien fait quand je l’ai trouvé en train de me
tripoter dans mon sommeil…
– QUOI ?!, s’exclame Mason.
Il rugit si fort que je dois appuyer mes doigts sur mes tempes pour éviter que ma
tête n’explose.
– Mace… chuchote Rachel en saisissant son bras. Sa tête, Bébé, lui rappelle-t-
elle. Les commotions cérébrales sont affreusement douloureuses. Elle souffre, ça
se voit sur son visage.
Mason se penche sur moi et dépose une série de baisers sur mon front. Je dois
admettre que c’est sacrément plaisant après la soirée que j’ai passée. Cependant,
mes larmes ne cesseront pas si facilement. Elles ruissellent sur mes joues qui
finissent par me démanger. Mason chuchote des mots doux dans mon oreille
pour me rassurer, me promettre qu’il va s’occuper de moi. Que, dans une
famille, on prend soin les uns des autres.
Pendant que Mason me réconforte, j’entends Rachel parler.
– Oui, elle va bien. Elle a eu une nuit difficile. Qui est-ce ? Ah oui, elle était
avec vous à Hawaii. Ouais, un sénateur l’a agressée, mais elle va bien
maintenant. Pardon ? Vous allez quoi ? Allô ?
– Oh non, c’était qui ? je demande à Rachel qui regarde l’écran de mon
téléphone.

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– Ça dit « Samoan Sexy ».
Je ferme les yeux et grogne.
– Tu viens de dire à Taï que je suis à l’hôpital parce qu’un sénateur m’a agressée
? je demande d’une voix tendue.
– Je n’aurais pas dû ?
Bon sang, elle n’a pas idée de l’ouragan qu’elle vient de libérer. Je tends la main
et elle me donne mon téléphone, mais je réfléchis encore au meilleur moyen de
convaincre mon Samoan de ne pas venir lorsque le bourdonnement s’accentue
dans ma tête. J’ai l’impression que je suis sur le point de m’évanouir et de
vomir. Je décide d’appeler Taï plus tard et j’éteins mon téléphone.
– Ne réponds plus, je t’en supplie. Ça ne peut qu’aggraver la situation.
– Pourquoi ? répond-elle en fronçant les sourcils.
– Peu importe, je m’en occuperai.
Je ferme les yeux, incapable de les maintenir ouverts plus longtemps.
On m’oblige à me réveiller plusieurs fois dans la nuit pour surveiller les
commotions que j’ai subies. Je finis par me réveiller toute seule alors qu’une
main immense tient la mienne. Une autre main est posée sur ma gorge et un
pouce est planté sur l’endroit où bat mon pouls. Je le sens avant de le voir, un
mélange de feu de bois et d’océan qui m’apaise immédiatement. Je n’ai pas
besoin d’ouvrir les yeux pour savoir qui est là.
– Je te sens, frangine, murmure-t-il en me caressant avec son pouce. Ouvre tes
jolis yeux pour moi.
Sa voix grave calme instantanément mes nerfs, et mes larmes se remettent à
couler lorsque j’ouvre enfin les yeux pour voir mon beau Samoan pour la
première fois depuis presque trois semaines. Ses yeux noirs sont féroces et
brûlants de rage.
– Personne ne veut me dire son nom. Qui a osé mettre les mains sur toi sans y
être invité ? demande-t-il d’une voix dangereusement calme.
Ce n’est pas une chose à laquelle je suis habituée, avec Taï Niko. Lorsqu’il
parle, tout le monde l’entend. C’est un homme immense, et sa voix porte loin.
Je respire lentement et grimace lorsqu’une vague de douleur remonte le long de
mon dos et dans mon crâne. Son regard semble devenir plus noir encore, ce que

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je ne pensais pas possible. Je serre sa main, cherchant à lui exprimer ce que je ne
sais lui dire avec des mots. Il ferme les yeux et se penche pour m’embrasser
tendrement.
– Personne ne fait de mal à mon ‘aiga . Ma famille.
Il se frappe le torse comme un gorille. Revoilà le mot, famille.
– Taï, quelle heure est-il ? Tu as pris l’avion juste après avoir appelé ?
Il hoche la tête et je baisse la mienne, honteuse. Tous ces hommes merveilleux,
qui s’occupent de moi… C’est trop d’émotions à encaisser, en plus de l’enfer
que j’ai vécu hier soir.
– Je veux que tu rentres à Hawaii avec moi. Amy et moi, nous nous occuperons
de toi. Tina sera ravie de te materner.
Tina est le mot samoan pour dire « mère ».
– Tu sais que je ne peux pas faire ça, Taï. Je dois travailler, je réponds en
appuyant sur mes tempes. Ça va être une catastrophe médiatique. Putain, qu’est-
ce que je vais faire ? Les Shipley sont connus, et Warren… mon Dieu, son fils…
je sanglote en me couvrant les yeux.
– Warren va s’assurer que son fils soit puni comme il se doit, gronde la voix de
Warren Shipley lui-même. Ma pauvre chérie… dit-il d’une voix tremblante en
venant à mes côtés, suivi de près par Kathleen qui pleure en silence. Je suis
horrifié par ce qu’il a fait. Nous serions venus plus tôt, mais nous étions coincés
par la police et la presse. Tout ça est de ma faute.
Je me racle la gorge pour chasser les émotions qui la bloquent, mais cela ne
marche pas.
– Non Warren, c’est lui le coupable.
– Je savais qu’il était instable lorsqu’il buvait. C’est pour ça qu’il ne boit que
rarement. Par le passé, il devenait violent lorsqu’il était ivre, mais je pensais que
c’était derrière lui. Je suppose qu’il a craqué quand je lui ai dit que Kathleen et
moi étions en couple. C’est comme si quelque chose s’était brisé en lui.
– Quelque chose va se briser, ça, je peux vous le garantir, grogne Taï.
Warren écarquille les yeux et le regarde des pieds à la tête tandis que Taï se lève
lentement. C’est la réaction normale face à Taï qui est aussi large et imposant
qu’il est beau.

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– C’est de tes amis, je suppose ?
Taï se frappe de nouveau le torse.
– Je suis sa famille.
Je souris et tapote la main de Taï, puis je tire sur son bras pour l’obliger à se
rasseoir. Il obéit en silence, concentré sur moi, comme si les autres personnes
dans la pièce n’étaient que des moucherons agaçants et sans importance. Mon
Dieu, j’adore cet homme.
– Bien évidemment, aussi désolé que je sois, nous sommes prêts à payer pour
tous tes soins, t’offrir la meilleure convalescence possible et te verser la somme
que tu jugeras appropriée pour ton temps et ta souffrance. Je suis profondément
désolé pour ce qui est arrivé, Mia, vraiment. Plus que tu peux imaginer, admet-il
en fronçant les sourcils et en baissant la tête, mais je dois penser aux vies des
gens que je m’efforce de sauver. Si le public apprenait ce qui s’est passé, non
seulement ce serait un suicide politique pour mon fils mais aussi pour les gens
que j’ai prévu d’aider…
Il secoue la tête, honteux, incapable de finir sa phrase.
– Bon sang, ils veulent cacher ça sous le tapis parce que c’est un homme
politique ? gronde Taï. Frangine, c’est hors de question. Il doit payer pour ce
qu’il a fait et…
– Taï, il y a davantage en jeu que tu ne sais. Et je t’expliquerai tout plus tard.
Quand nous serons seuls. Je te le promets.
Je plonge mon regard dans le sien pour l’implorer de m’écouter et de se calmer.
Il hausse un sourcil, mais il reste silencieux et serre ma main un peu plus fort.
J’inspire, j’expire et je prononce des paroles que je ne me serais jamais crue
capable de dire.
Je suis sur le point de laisser en liberté un violeur potentiel et je dois puiser au
plus profond de mes forces pour penser aux hommes, aux femmes et aux enfants
à travers le monde qui, sinon, ne connaîtront jamais la médecine moderne que
nous avons la chance d’avoir aux États-Unis. Sans Warren, ils resteront oubliés à
jamais. Si je porte plainte, Warren perdra tous ses investisseurs, notamment
Monsieur Benoit. Par ailleurs, la presse n’aurait pas à creuser bien profond pour
découvrir qui m’a engagée et pourquoi, et cela aurait un impact négatif sur la vie

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des Shipley, la mienne, mais aussi celle de Tante Millie, Wes, Alec, Tony,
Hector, Mason, les D’Amico, Taï, et tous ceux que j’ai rencontrés ces derniers
mois.
Consciente que je n’ai pas d’autre choix, je décide d’expliquer ma décision à
Warren d’une manière qui paraisse logique, mais qui ne m’empêchera pas de me
regarder dans une glace.
– Warren, je ne dirai rien et je ne porterai pas plainte, mais j’ai des conditions.
Il tient ma main et hoche la tête tandis que Kathleen continue de pleurer en
silence.
– Il doit suivre une cure de désintoxication pour son alcoolisme. Je me fiche que
ce soit dans un endroit privé et qu’il reste anonyme. Je me fiche qu’il prétexte de
s’absenter du travail pour une urgence familiale. Il a besoin d’aide, point à la
ligne. Il a également besoin d’être suivi par un professionnel pour apprendre à
gérer sa colère.
– C’est comme si c’était fait, répond Warren sans hésiter.
– Et je veux une lettre manuscrite et signée par lui qui stipule qu’il va se faire
aider. La lettre expliquera que s’il ne respecte pas mes conditions, je raconterai
tout à la presse. Je rendrai cette lettre publique, compris ?
Warren hoche la tête et s’avance pour m’embrasser sur le front.
– Mia… je suis désolé, ma chérie. Je suis tellement navré. Merci. Merci pour ta
générosité.
– Une dernière chose… L’argent.
– Tout ce que tu voudras. Des millions, tout. Peu importe.
Bon sang, cet homme est prêt à me donner des millions de dollars pour aider son
fils et sauver son projet. Cela dit, quand on est aussi riche que Warren Shipley,
quelques millions ne sont sans doute qu’une goutte d’eau. J’en ai presque la
nausée de savoir qu’il essaie de m’acheter, mais au fond de moi, je sais que c’est
quelqu’un de bien. Il cherche seulement à m’aider et à apaiser ma souffrance de
la seule manière qu’il peut.
– Pas un centime. Je ne veux rien du tout. Aucune somme n’achètera mon
silence. Je ne suis pas une prostituée. Je suis une femme qu’il a agressée. Il
devrait aller en prison, Warren, pour ce qu’il m’a fait. Mais pour toi, parce que

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tu vas aider les pauvres de ce monde, je suis prête à me taire. Je vais à l’encontre
de tout ce en quoi je crois pour m’assurer que ton projet verra le jour. J’espère
que je ne le regretterai pas.
Des larmes coulent sur ses joues et il s’empresse de les essuyer. Je tapote sa
joue, et ses yeux me disent qu’il comprend. Il sait ce que je sacrifie et pourquoi,
et il respecte l’importance de ma décision. Il recule pour laisser place à Kathleen
qui me prend dans ses bras et pleure à chaudes larmes. J’ai envie de hurler tant
j’ai mal au dos, mais, comme une guerrière sur un champ de bataille, je serre les
dents et je la laisse me serrer contre elle. Elle en a autant besoin que moi.
*
* *
Durant les jours qui suivent ma sortie de l’hôpital, je reste à New York où je me
fais chouchouter par Mason, Taï, Rachel et Kathleen. Warren garde ses
distances, même s’il me fait livrer des fleurs deux fois par jour. Il faut plusieurs
jours à Mason et Taï pour mettre leur colère de côté. Bizarrement, ces deux-là
s’entendent à merveille, plaisantant comme de vieux amis, se moquant l’un de
l’autre et des équipes qu’ils soutiennent ainsi que des différences entre le
continent et les îles.
Je finis par convaincre Taï de retourner auprès de sa famille et de sa copine.
Amy est très compréhensive et elle m’envoie des messages gentils ou drôles
pour me remonter le moral. Elle a l’air douce et je suis contente qu’elle soit là
pour accueillir Taï à son retour.
C’est notre dernier jour ensemble, et nous sommes assis sur le balcon du Four
Seasons , profitant de la vue.
– C’est dingue, tu ne trouves pas ? je demande en désignant la skyline 1 new-
yorkaise du bout du pied.
– Je préfère l’étendue de l’océan et les palmiers aux buildings et aux lumières,
mais je comprends que cela puisse plaire à certains. C’est trop bruyant, trop fou
et trop… tout pour moi.
Je réfléchis un moment à ce qu’il vient de dire. Trop tout. Il n’a pas tort.
J’ajuste mon pied, croisant mes chevilles, et le regard de Taï se rive sur mon
tatouage. Il sourit jusqu’aux oreilles, mais ce n’est pas son sourire sexy habituel.

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Sa main géante saisit ma cheville et il l’attire sur ses cuisses, m’obligeant à me
tourner sur ma chaise.
– Fais confiance au voyage ? dit-il en plongeant ses yeux dans les miens.
– Ouaip.
Du bout du doigt, il suit les lettres de mon mantra, puis le pissenlit et chaque
graine portant une initiale. Son pouce s’arrête sur le petit T et la chaleur de son
doigt brûle ma peau, embrasant le sang qui coule dans mes veines, remontant
jusqu’à cet endroit intime que Taï connaît si bien. Cependant, les yeux de Taï ne
véhiculent plus la même passion qu’ils avaient il y a un mois. Je suppose que ce
regard est désormais réservé à la petite blonde qui l’attend à Hawaï.
– Que veulent dire ces lettres ? demande-t-il.
J’envisage un instant de me la jouer cool en répondant quelque chose comme «
quelles lettres ? », mais Taï ne m’a jamais menti et je souhaite lui offrir le même
respect.
Je rapproche mon pied pour désigner chaque lettre.
– Elles symbolisent les hommes qui ont compté dans ma vie et dont je souhaite
me souvenir. Cela me rappelle que chaque expérience était faite pour être vécue
et que, pendant un certain temps, je me suis sentie véritablement aimée.
Les larmes me brûlent les yeux, mais je ne les laisse pas couler, je retiens mon
souffle avant de déglutir bruyamment.
– Le T est pour moi ? demande-t-il en suivant du doigt le contour de la lettre.
Sans voix, je me contente de hocher la tête, et il se baisse pour embrasser la
lettre.
– Ça me plaît, frangine. Comme ça, une partie de moi est toujours avec toi.
Sur ce, je me rapproche de lui pour embrasser l’unique tatouage qui décore son
épaule droite. C’est le symbole samoan pour l’amitié et il l’a fait faire pour me
représenter et se rappeler le mois que nous avons passé ensemble.
– Tu dois rentrer à la maison, Taï.
– Beaucoup de choses m’y attendent, répond-il.
– Je sais. Je t’aime, Taï. Merci d’être venu.
– Ne doute jamais que tu es aimée, frangine. La famille est celle que l’on
construit, et je serai toujours là pour toi.

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Taï repart ce soir-là sur le premier vol disponible pour Oahu, emportant avec lui
un autre morceau de mon cœur, mais laissant derrière lui la certitude qu’il sera là
pour moi si j’ai un jour besoin de lui.
*
* *
Je passe les jours suivants à Boston avec Mason et Rachel. Mon ami se comporte
comme si je venais de survivre à la peste et que j’aie besoin d’être dorlotée
chaque seconde de la journée. Ce n’est pas le cas, mais je profite néanmoins de
son attention. Le fait de passer du temps avec Mason, ses frères et ses
coéquipiers, est tout simplement génial. Une fois de plus, cela confirme à quel
point les hommes que j’ai rencontrés tiennent une place importante dans ma vie.
Je ne suis pas seule. J’ai des gens sur qui compter. Des gens qui me porteront,
me protégeront, se battront pour moi et, surtout, m’aimeront.
Je suis en train de faire mes valises lorsque je trouve mon papier à lettres. Je
décide d’envoyer un mot à Warren et Kathleen pour leur rappeler le temps que
nous avons passé ensemble. Je trouve une enveloppe dans un tiroir du bureau et
j’y inscris leur adresse.
Warren & Kathleen,
Je suis désolée de la manière dont les choses se terminent. Je sais que vous ne
souhaiteriez jamais à personne ce qui m’est arrivé, et je ne vous en veux pas.
Merci de m’avoir tenue informée du traitement que suit Aaron. Savoir qu’il se
fait aider rend ce qu’il m’a fait un peu plus facile à vivre. J’espère sincèrement
qu’il trouvera la paix dont il a tant besoin.
Christine Benoit m’a dit que le premier transport de médicaments vers
l’Angleterre était prévu pour le mois prochain. Je ne sais comment exprimer à
quel point la nouvelle me réjouit. L’idée que tant de gens pourront désormais
mener de longues et heureuses vies m’aide à supporter ce qui m’est arrivé.
Je veux que vous sachiez que j’ai beaucoup apprécié le temps que j’ai passé
avec vous deux. J’ai été inspirée de voir votre relation progresser en quelque
chose de durable.
Merci de m’avoir laissée faire partie de votre vie,
Mia.

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Je glisse la lettre dans l’enveloppe et demande à Rachel de la poster pour moi.
Cette fois-ci, je ne m’enfuis pas pendant la nuit et je les laisse m’emmener à
l’aéroport. C’est la moindre des choses après qu’ils se sont occupés de moi
pendant presque quinze jours.
Nous nous disons adieu et nous promettons encore une fois de rester en contact.
Pour l’instant, je n’ai aucun mal à prendre régulièrement des nouvelles de mes
nouveaux amis, sans doute parce que, jusque-là, je n’ai eu d’autres amies que
Maddy et Ginelle à la maison.
Je baisse mon siège en repensant au mois qui s’achève. J’ai été entremetteuse,
j’ai échangé des messages érotiques avec Wes, j’ai fait des rêves érotiques. J’ai
aidé à conclure des affaires et à sauver des populations du tiers-monde. J’ai
rencontré une nympho canadienne et j’ai été agressée. C’est ce qu’on appelle un
mois mouvementé. Et grâce à tout ça, j’ai appris trois choses qui sont désormais
omniprésentes dans mon esprit.
Premièrement, Wes est ma foutue kryptonite et je dois m’en protéger si je veux
tenir encore six mois. Deuxièmement, il ne faut jamais juger un livre à sa
couverture, même quand elle ressemble à un politicien beau gosse et plein aux
as. Troisièmement, les amis sont la famille que l’on choisit, et j’ai les meilleurs
amis et la plus belle famille au monde.
La vie est étrange, mais je la croque à pleines dents. Je l’apprécie chaque jour un
peu plus, en acceptant le bon, le mauvais et le moche, car cela fait partie du
processus. Comme le dit mon tatouage, il faut faire confiance au voyage.
Il s’avère que mon voyage m’emmène auprès d’un artiste hip-hop du nom
d’Anton Santiago, qui souhaite que je joue dans son clip. Or, je ne sais pas
danser. Le mois de juillet devrait être sacrément intéressant.

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1 . Horizon d’immeubles.
()

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JUILLET

Direction Miami, où Mia est engagée pour jouer dans le clip d’un artiste de hip-
hop ultra-populaire.
Anton Santiago a la beauté du diable, un corps de rêve, danse comme un dieu et
met toutes les femmes dans son lit.

Même si elle a été choisie pour jouer les séductrices, Mia va aussi pouvoir se
remettre doucement des évènements du mois précédent et créer avec Anton une
belle complicité amicale.
Mais une surprise de taille va venir agrémenter son séjour à Miami et orienter
son destin.

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Chapitre 1

Cheveux blonds. Yeux bleus. Jambes infinies. C’est une déesse. Doux Jésus.
L’univers se moque de moi. Je suis plantée devant ce mannequin que je reluque
de haut en bas. Je trouvais Rachel canon, mais elle est presque quelconque à côté
de cette fille.
La bombasse se tient devant une Porsche Boxster noire, et elle n’arrête pas de
gigoter, comme si elle était nerveuse. Ses doigts tapotent la pancarte sur laquelle
est écrit mon nom. Elle déplace son poids d’un talon de douze centimètres sur
l’autre et, si tant est que ce soit possible, elle semble encore plus féroce et
agacée. Cela fait peut-être un moment qu’elle attend dans cette chaleur
écrasante. Cela dit, elle ne semble pas en souffrir autant que moi. Elle est vêtue
d’un jean si moulant que je devine chaque courbe délicieuse de ses fesses. Son
débardeur révèle une poitrine de rêve que je ne peux m’empêcher de mater
d’autant plus que l’inscription « HUG ME AND DIE1 » est inscrite dessus en
grosses lettres noires. Elle porte au moins dix colliers de longueurs et formes
différentes, et ses cheveux de rockstar sont attachés en un mélange de boucles et
de mèches tombantes qui a l’air carrément chic.
Cela fait plusieurs longues minutes que je l’inspecte lorsqu’elle pose les yeux sur
moi. Elle soupire en gonflant les joues, jette la pancarte à l’intérieur de sa voiture
et vient vers moi. Elle étudie mes cheveux noirs bouclés, ma robe, puis mes
sandales.
— Ça ne va pas du tout, déclare-t-elle d’un air exaspéré. Allez viens, le temps
c’est de l’argent, ajoute-t-elle en tournant les talons.
Le coffre s’ouvre tout seul et j’y dépose ma valise.
— Je suis Mia, au fait.

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Je lui tends la main alors qu’elle met des lunettes de soleil aviateur ultra-cool.
Elle tourne la tête pour me regarder par-dessus les verres foncés.
— Je sais qui tu es, c’est moi qui t’ai choisie, répond-elle sur un ton blasé.
Elle fait démarrer la voiture et accélère sans attendre que je me sois attachée. Je
pars brusquement en avant et je dois m’accrocher au tableau de bord en cuir.
— J’ai fait quelque chose pour t’agacer ? je demande en la regardant.
Elle vide tout l’air de ses poumons et secoue la tête.
— Non, grogne-t-elle. Je suis désolée. C’est Anton qui m’a énervée. J’étais
occupée quand il m’a dit de venir te chercher. Apparemment, il avait besoin de
notre chauffeur pour se taper deux petites groupies à l’arrière du 4x4.
Super. Il semblerait que mon nouveau patron soit un véritable pervers. Pas déjà,
s’il vous plaît !
— Ça craint.
Elle tourne à droite pour s’insérer sur l’autoroute.
— On peut repartir à zéro ? demande-t-elle d’une voix sincèrement désolée. Je
suis Heather Renee, l’assistante personnelle d’Anton Santiago, l’artiste hip-hop
le plus branché du pays.
— Waouh, c’est vrai ?
Mince. Moi qui suis plus branchée rock alternatif que hip-hop, je n’avais pas
réalisé à quel point il était connu.
— Ouaip. Chacun de ses albums a été disque de platine. C’est le chouchou du
monde du hip-hop et, hélas, il en est parfaitement conscient, explique-t-elle.
Anton veut te rencontrer tout de suite, mais il va falloir que tu te changes.
Elle regarde ma robe verte légère qui, selon moi, met en valeur mes yeux et mes
cheveux.
— Pourquoi ? je demande en tirant sur ma robe, soudain gênée.
— Anton attend une bombe avec des courbes à n’en plus finir. Tu as les courbes,
c’est clair, mais cette robe est trop girl next door2. J’ai fait du shopping, et un
dressing plein de fringues t’attend à la maison. Mets-les. Il s’attend à ce que tu
sois canon à toute heure de la journée et de la nuit.
Je grimace et regarde dehors alors que nous descendons l’avenue Ocean Drive,
bordée de chaque côté par des bâtiments Art déco qui ont vue sur l’Atlantique.

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— Alors, il y a de l’eau des deux côtés ? je remarque lorsque nous traversons un
pont.
— Oui, de ce côté tu as le lagon de la baie de Biscayne, et de celui-là, tu as
l’océan Atlantique. Comme tu peux le voir, ajoute-t-elle en désignant le sommet
des immeubles, la plupart des bâtiments sont des hôtels, mais certaines
personnes très riches, comme Anton, peuvent se permettre d’y habiter toute
l’année.
Je baisse la vitre et laisse la brise souffler dans mes cheveux et rafraîchir ma
nuque. Je regarde la vue et remarque une palette de couleurs surprenante par
rapport à Las Vegas, où tout semble marron, ou Los Angeles, où tout est blanc,
gris ou beige. Ici, les couleurs sont éclatantes et vont de l’orange vif au bleu
turquoise, en passant par le rose et le jaune.
— Tu vois tous ces hôtels ?
Je hoche la tête et me penche pour mieux les voir.
— Ils s’allument de toutes les couleurs la nuit. Un peu comme à Vegas.
Vegas. Mon cœur bat la chamade, et je suis soudain accablée d’un profond mal
du pays. Il faut que j’appelle Maddy et Ginelle. Bon sang, Gin sera furieuse
lorsque je lui raconterai ce qui s’est passé à Washington. Peut-être que je peux
m’en tirer sans jamais le lui dire ? L’idée est séduisante.
— C’est cool ! J’ai grandi à Las Vegas ! Ça me fera plaisir de voir des
immeubles s’illuminer.
Je m’appuie contre le dossier et j’essaie de me débarrasser de la tension que j’ai
accumulée à Washington, puis à Boston lorsque j’ai fait mes adieux à Mason et
Rachel. Je sors mon téléphone et l’allume. Il m’annonce l’arrivée de plusieurs
messages, dont un de Rachel qui me demande de lui écrire quand je serai arrivée.
Il y a en a un autre de Taï qui veut savoir si mon nouveau client est un gentleman
ou s’il doit reprendre l’avion, et un autre de Ginelle qui me dit que…
Oh merde, non !
Mon estomac fait un saut périlleux tandis que je relis son message.
À : Mia Saunders
De : Ma Salope Chérie

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Tu t’es fait agresser ? T’étais à l’hôpital ? Tu m’expliques pourquoi c’est le
frère de Taï qui me l’apprend ? Si tu n’es pas déjà morte, je vais te tuer !
Je calme ma respiration et tape ma réponse.
À : Ma Salope Chérie
De : Mia Saunders
C’était rien de grave, vraiment. Ne t’en fais pas. Je t’appelle plus tard, quand
j’aurai rencontré Latin Lover.
À : Mia Saunders
De : Ma Salope Chérie
Latin Lover ? Sans blague ? C’est la nouvelle star du hip-hop ! Il est canon !
À : Ma Salope Chérie
De : Mia Saunders
À ce qu’on me dit, c’est un salaud.
À : Mia Saunders
De : Ma Salope Chérie
Tu me connais, plus c’est salaud, plus ça me plaît.
À : Ma Salope Chérie
De : Mia Saunders
T’es vraiment tordue !
À : Mia Saunders
De : Ma Salope Chérie
J’aimerais être le riz qui accompagne son burrito. Le churro qu’il mange en
dessert. La crème brûlée dont il ne laisse pas une miette.
À : Ma Salope Chérie
De : Mia Saunders
Arrête ! Espèce de traînée. Bon sang. À côté de toi, je suis une sainte.
À : Mia Saunders
De : Ma Salope Chérie
Au moins, si je vais en enfer, tu seras là pour m’accueillir !
J’éclate de rire, et Heather me demande si c’est pour le travail. Je mets mon
téléphone sur silencieux et le range dans mon sac.
— Désolée. Non, c’était ma meilleure amie. Elle prenait des nouvelles.

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Je soupire et repousse mes cheveux dans mon dos. Cette chaleur va me rendre
folle. Je me penche pour ajuster la ventilation et laisser la clim me rafraîchir.
Voilà qui est mieux. Apparemment, Heather ne se soucie pas de gaspiller l’air
frais en ayant également les vitres ouvertes.
— Vous êtes proches ? demande-t-elle en tournant pour entrer dans un parking
souterrain.
Je la regarde en fronçant les sourcils. Qu’est-ce qu’elle ne comprend pas dans
l’expression « meilleure amie » ?
— Ouais, comme des sœurs. On se connaît depuis toujours.
Elle soupire et met le frein à main.
— Tu as de la chance, moi je n’ai pas d’amis.
— Comment ça ? Tout le monde a des amis.
— Pas moi, répond-elle en secouant la tête. J’ai trop de travail pour pouvoir
entretenir des amitiés. Anton exige le meilleur, et même si je suis seulement son
assistante, je n’ai pas droit à l’erreur. J’ai un diplôme en management d’affaires,
j’espère qu’un jour, je prendrai les décisions stratégiques pour un artiste. Mais si
je veux que mes rêves se réalisent, il faut que je travaille dur.
— Je suppose, ouais.
Je lui emboîte le pas, et nous passons devant une rangée de voitures de luxe.
— Waouh, je chuchote en regardant la Mercedes, le Range Rover, la Cadillac, la
BMW, la Ferrari ainsi que plusieurs voitures de marques européennes que je n’ai
pas le temps d’admirer.
Or, je n’ai pas fini d’être surprise, car tout de suite après la dernière voiture,
j’arrive au paradis et mes pieds refusent d’avancer davantage. Je suis face à une
BMW HP2 Sport, bleue et blanche, avec un moteur 1170. Je crois que je viens
de mouiller ma culotte. Ensuite vient un MV Augusta F4 1000, la seule moto au
monde à avoir un moteur à cylindres en étoiles. Je lâche la poignée de ma valise
pour caresser le superbe siège de la troisième bécane, une Icone Sheene toute
noire, avec une finition chrome brillante. Je m’accroupis et la caresse du bout du
doigt, retraçant ses courbes et son design audacieux. Ce bolide coûte plus de cent
cinquante mille dollars. Jésus Marie Joseph !

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De l’air, il me faut de l’air ! Je retiens mon souffle dans un cri aigu, incapable
d’arracher mon regard de cette œuvre d’art. Viens mon p’tit. Viens voir maman.
Je pourrais vivre dans ce garage et passer mon temps à admirer les motos de mes
rêves.
— Euh, allô ? La Terre appelle Mia ! Qu’est-ce que tu fais, bon sang ?
La voix d’Heather me parvient, mais je ne réponds pas. Elle est comme un
moustique pénible qui revient sans cesse à la charge, peu importe le nombre de
fois qu’on essaie de le tuer entre ses mains.
Je me lève lentement, reprends mon souffle et j’admire une nouvelle fois le
paysage. Au fond de la rangée, je vois une KTM Super Duke peinte en orange et
noir. C’est sans doute la moins chère de toutes. En tout cas, elle est depuis
longtemps sur ma liste des motos que je pourrais peut-être m’acheter un jour.
— Elles sont à qui, toutes ces bécanes ?
— À Anton. C’est son immeuble. Son studio d’enregistrement est ici, ainsi que
son club de danse et de gym. Il vit dans le penthouse, bien évidemment. Tous
ceux qui travaillent dans son équipe ont leur appartement dans l’immeuble. Tu
as ton propre loft, toi aussi, c’est celui qu’on utilise quand des amis célèbres
viennent bosser sur un de ses morceaux.
— Il conduit les motos ?
Elle sourit jusqu’aux oreilles.
— Tu aimes ça, on dirait.
— On peut dire ça, ouais, je réponds alors que je n’ai toujours pas quitté des
yeux le plus beau spectacle de la planète.
— Peut-être qu’il t’emmènera faire un tour.
— Qu’il m’emmènera ?
Elle hoche la tête et m’offre un sourire digne d’un panneau publicitaire pour le
tout dernier parfum de luxe.
— C’est mort. Je ne monte pas à l’arrière, ma chérie. C’est moi qui conduis.
*
* *
Heather m’accorde un quart d’heure pour me refaire une beauté avant d’être
présentée à Anton. Je saute sous la douche pour me débarrasser de la sueur du

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voyage et lorsque je sors, je découvre la tenue qu’elle m’a choisie. Peut-être que
« tenue » est un mot trop ambitieux. Ce que je trouve sur le lit en sortant de la
salle de bains est un bout de tissu, un poom poom short en jean et des sandales à
talons dont les lanières m’arrivent jusqu’au genou en se croisant sur mon mollet.
J’enfile le short et je me mate dans le miroir. On voit clairement ma fesse
dépasser du tissu. Merde. Je me mets de face, le short est si court que la poche en
dépasse. Quant au top, il est plutôt mignon, un strap top de chez Aubade
imprimé léopard. Je ferme les yeux, je compte jusqu’à dix et je me motive.
Tu peux le faire, Mia.
Il y a un mois, tu te promenais en bikini avec Taï et une ribambelle de
mannequins. À côté de ça, ton short est une combinaison de ski. Tu n’es pas ici
pour ta morale impeccable et tes bonnes manières, tu es là pour être canon et
jouer dans un clip. Un clip de hip-hop.
Je pousse un grognement et j’attache mes cheveux en queue-de-cheval. J’ai
l’impression qu’il fait mille degrés, bon sang. Je respire lentement par le nez,
puis je me lève et je vais dans le salon où Heather m’attend, suspendue à son
téléphone. Elle me reluque de la pointe des pieds jusqu’à ma queue-de-cheval.
Quand ses yeux arrivent au niveau de ma tête, elle grimace. Elle vient vers moi,
toujours au téléphone, et elle enlève l’élastique de mes cheveux, les laissant
retomber en cascade sur mes épaules.
— Mieux, chuchote-t-elle.
Puis elle claque des doigts et se dirige vers la porte.
— Je rêve où tu viens de claquer des doigts pour m’appeler ?
La bonne entente que l’on vient de partager durant le trajet en voiture vole en
éclats.
— Désolée, articule-t-elle d’un air sincère. Oui, Anton, elle est avec moi, dit-elle
à voix haute, sur un ton agacé. On te retrouve au studio de danse. Oui, cinq
minutes, conclut-elle en raccrochant. Mia, je suis désolée. Il a le chic pour
m’énerver et il est de mauvais poil. Je ne voulais pas être impolie, je m’excuse.
Apparemment, une des danseuses est nulle. Elle ne saurait pas bouger même si
elle avait un essaim d’abeilles dans le froc.

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J’essaie de rire avec elle, mais je n’y parviens pas car, soudain, je panique. Il ne
sera pas content d’apprendre que je ne sais pas danser, moi non plus. Au moins,
il ne peut pas demander à être remboursé. Il doit me payer, que je sache danser
ou non. Je n’ai jamais prétendu que cela faisait partie de mes talents.
L’ascenseur s’ouvre sur une salle aux murs vitrés. Les lumières sont éteintes,
remplacées par un éclairage ultraviolet et des spots qui tombent en douche sur
les danseurs. Un homme en short de sport et en t-shirt tape en rythme dans ses
mains en annonçant des numéros qui, je crois, indiquent aux danseurs où placer
leurs pieds et leurs mains.
Heather m’invite à entrer, et nous restons debout sur le côté. C’est alors que je
vois Anton Santiago pour la première fois. J’observe son corps musclé et sec, et
ma bouche devient sèche. Je sens mon cœur battre dans mes oreilles tandis qu’il
marche lentement en avant. Le tempo accélère et Anton accentue le mouvement
de ses épaules et de son bassin en se déhanchant. Il est en sueur, et son t-shirt est
assombri entre ses pectoraux carrés et jusque sur ses abdos anguleux. Il est
canon, et son corps me crie de le tenir, de le toucher, de me mettre nue devant
lui.
Il fait une pirouette, imité par les danseurs, puis il se jette à plat ventre par terre.
Il fait une série de pompes en rythme, puis une autre sur une main. Les muscles
de ses bras sont délicieusement saillants. Encore une série, mais cette fois il fait
une vague avec son corps, rapprochant ses hanches du sol comme s’il lui faisait
l’amour. Doux Jésus ! Je n’ai qu’une envie, ramper et m’allonger sous lui pour
qu’il s’entraîne sur un être vivant au sang très chaud. En parlant de chaud, il fait
mille degrés ici ! J’évente mon visage en le regardant lorsqu’il se lève d’un bond
et qu’il répète le mouvement de son bassin sur les paroles les plus sexy que j’ai
entendues de toute ma vie.
— Ride it baby, ride3…
Ondulation.
— With me, I’ll go all night4…
Coup de bassin.
— Let me do you right5…
Ondulation.

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— And ride it baby ride6…
Coup de bassin.
Il prend son paquet dans sa main et le remonte en se cambrant. On dirait un dieu
métis qui vient de se taper la nana de ses rêves et qui vérifie l’état de son arme
avant de replonger dans une bataille menée par son sexe.
Tout à coup, la musique s’arrête.
— Ok, tout le monde, c’est tout pour aujourd’hui. Anton, on est bon, dit le mec
en short.
Anton ne dit pas un mot et se contente de hocher la tête. Deux filles accourent
vers lui avec de l’eau et une serviette.
— Oh, Anton, tu étais génial. Tu étais tellement sexy !
Il s’arrête quelques mètres devant moi sans me quitter des yeux. Vert sur vert.
Son regard est brûlant, le mien mort de faim.
— Laissez-moi.
— Mais je pensais qu’après la répétition on allait s’amuser ? dit l’une, cherchant
désespérément son attention.
Il fronce les sourcils.
— Anton n’aime pas les redites. Vete al carajo*7, crache-t-il en les balayant de
côté.
À voir leurs grimaces et leurs tristes mines, je crois qu’il vient de leur dire
d’aller se faire foutre.
— Lucita*.
Il se lèche les lèvres, et mon sexe se contracte. Oui, il suffit d’aussi peu.
— Maintenant que tu es là, que diable va-t-on faire de toi ?
Son accent portoricain me séduit immédiatement. Il me reluque de nouveau des
pieds à la tête, et mon sang s’embrase. La réaction est la même que s’il m’avait
touchée avec ses doigts plutôt qu’avec ses yeux.
Ses pupilles s’emplissent de désir. Nous restons là, regards verrouillés, livrés à
une bataille visuelle l’un avec l’autre. Mes narines se dilatent, mes yeux
s’ouvrent grand, et, enfin, j’arrive à parler.
— Tu pourrais me nourrir, je meurs de faim.

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Heather, plus près de moi que je ne le pensais, pouffe de rire, rompant la tension
entre le latin lover et moi. Maintenant que je l’ai sous les yeux, je comprends
d’où lui vient son nom.
— Désolée, Anton, s’excuse-t-elle en souriant lorsqu’il la fusille du regard.
— Mia, viens, on va te remplir, dit-il en me tendant la main.
J’imagine immédiatement des tas d’autres choses qui pourraient me remplir en
dehors de la nourriture. Je me lèche les babines et je souris.
— Allons-y.

1. Serre-moi dans tes bras et meurs. (NdT, ainsi que pour toutes les notes
suivantes.)
2. Archétype culturel et sexuel américain désignant une fille perçue comme étant
prude et naïve.
3. Chevauche-la, Bébé, chevauche-la…
4. Avec moi, j’irai toute la nuit…
5. Laisse-moi te donner du plaisir…
6. Et chevauche-la, Bébé, chevauche-la…
7. * Toutes les expressions suivies d’un astérisque sont en espagnol portoricain
dans le texte.

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Chapitre 2

Nous suivons Anton dans l’ascenseur jusqu’au penthouse. Les portes sont à
peine ouvertes qu’il sort dans l’appartement, nous laissant seules dans l’entrée.
— Tu sais quoi faire, H, lance-t-il par-dessus son épaule sans nous accorder un
regard.
Heather me guide dans la direction opposée à celle de son patron.
— Viens, ma belle. Je pense qu’on a mérité un verre. Un grand.
Les murs de la cuisine ouverte sont entièrement recouverts de placards blancs.
Chacun possède une poignée en fer forgé différente des autres, comme si elle
avait été faite sur-mesure. Un plan de travail immense s’étend d’un côté à l’autre
de la cuisine, accueillant de l’électroménager dernier cri. Dix tabourets sont
alignés devant le bar en granit noir, et j’en tire un pour m’y installer, tirant sur
mon short pour m’assurer que mes fesses ne pendent pas du siège. C’est un look
qui ne va à personne.
— Tu aimes la grenade ? demande Heather en sortant deux verres à martini du
placard.
— J’adore.
Elle sort du congélateur une énorme bouteille de vodka Grey Goose, un shaker
en métal et une brique de jus de fruits.
— Alors, qu’est-ce qu’Anton a prévu de me faire faire ? je demande tandis
qu’elle verse une bonne dose de vodka sur les glaçons puis un chouïa de jus.
— Tu veux dire en dehors de la chambre ? répond-elle sur un ton accusateur.
Je la regarde en écarquillant les yeux, bouche bée, choquée par son audace.
— Ne fais pas ta prude. J’ai vu la façon dont vous vous êtes reluqués dans le
studio, tout à l’heure. Je lui laisse jusqu’à ce soir minuit pour te mettre à poil.

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Elle pose le verre de martini plein à ras bord devant moi.
— À la nôtre, dit-elle avant d’en boire une longue gorgée.
Je l’imite, cherchant un peu de courage pour la remettre à sa place.
— Tu as vraiment une piètre opinion de moi, n’est-ce pas ?
— Tu ne baises pas avec tous tes clients ? Tu es pourtant escort.
Je repose brusquement mon verre, renversant le liquide rose sur le comptoir.
— Je baise avec qui je veux et quand je veux. Ça ne fait absolument pas partie
de mon contrat. Je suis une escort, pas une pute. Je propose ma compagnie et je
remplis un besoin, mais ça ne veut pas dire que je couche avec mes clients.
Bien sûr, j’ai couché avec certains d’entre eux, mais pas tous, et Heather n’a pas
à le savoir.
C’est moi qui décide où et avec qui. Point barre.
Des images de celui qui a voulu me violer se pressent dans mes pensées. Si je le
pouvais, j’enfermerais ces horribles souvenirs dans un placard sombre et j’en
jetterais la clé. Je refuse de me laisser contrôler. Un désir de vengeance envahit
ma poitrine et saisit ma gorge, nourri par la peur de ce qui s’est passé avec
Aaron.
— Maintenant, je sais pourquoi tu n’as pas d’amis. Tu critiques sans savoir, tu es
impolie et tu es une peste !
Heather recule jusqu’à se cogner contre le frigo en inox. Ses yeux sont brillants,
elle se racle la gorge et pose une main sur sa poitrine.
— Je suis désolée, Mia. C’était malvenu de ma part.
— Je ne te le fais pas dire !
J’ai mal à la mâchoire à force de serrer les dents. Je vide mon verre, le liquide
brûlant me détend les muscles.
— Excuse-moi, Mia. Je ne t’ai pas embauchée pour lui tenir compagnie au lit. Il
a plein de nanas pour ça. Toi, tu es là pour jour le rôle féminin principal de son
nouveau clip. Une séductrice qu’il désire, mais qu’il ne peut pas avoir.
Une séductrice. Eh bien, voilà un rôle que je n’ai encore jamais incarné. Cela
paraît ridicule, surtout après la conversation que nous venons d’avoir, mais je ne
peux me retenir d’éclater de rire. Je ris tellement fort que je m’étouffe à moitié,
grogne comme un cochon et pleure à chaudes larmes.

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Heather me regarde en haussant les sourcils.
— Euh, ok ! Eh bien, à l’avenir je réfléchirai à deux fois avant de te donner un
martini, dit-elle en me faisant un clin d’œil.
— Désolée. C’est juste que la journée a été bizarre. D’ailleurs, le mois dernier
était dingue. Ma vie est sens dessus dessous.
Je passe ma main dans mes cheveux et réalise à quel point ils sont longs. Peut-
être aurai-je le temps de faire un tour chez un coiffeur pendant mon séjour avec
le latin lover.
Malgré ce qu’elle a dit, Heather remplit à nouveau nos verres.
— On fait la paix ? Je n’ai vraiment pas envie que tu me détestes et j’ai
sincèrement mal compris ce que tu faisais.
Ses yeux bleus semblent soudain très ronds et très grands, lui donnant un air
parfaitement innocent. Je lui tends la main, elle la regarde quelques secondes
avant de la serrer lentement.
— Amies ?
— Amies, répond-elle en souriant.
— C’est rarement bon signe pour un homme lorsque deux femmes se serrent la
main autour de cocktails alcoolisés. Qu’est-ce que vous manigancez ?
Anton entre dans la pièce, vêtu d’un pantalon en lin blanc et d’une chemise verte
qu’il a laissée ouverte, révélant des abdos parfaits. Des pieds soignés dépassent
de son pantalon trop large, et je me surprends à vouloir les lécher. Ça en dit long
sur le spécimen magnifique qui se tient devant moi. Je le regarde se mouvoir
avec la grâce d’un guépard, malgré le poids de ses muscles gonflés. Anton n’est
pas petit, mais il n’est pas non plus très grand. Je suppose qu’il doit mesurer un
mètre quatre-vingts, quelques centimètres de plus que moi. Cependant, j’ai
tendance à préférer des hommes plus grands, comme Wes et Alec.
Wes et Alec. Mes sentiments pour ces deux hommes sont aussi forts que
différents. Pour l’un, ils vont de pair avec un rêve d’avenir, pour l’autre, avec un
désir inextinguible.
Anton avance vers Heather et passe un bras autour de ses épaules.
— Alors, H, c’est Lucita* qui va jouer la femme hors de portée dans mon clip
vidéo ? demande-t-il sans me quitter des yeux.

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Elle hoche la tête en silence et lève les yeux au ciel. Quant à Anton, il tripote sa
lèvre inférieure en me toisant du regard. Chaque centimètre de ma peau que
touchent ses yeux s’embrase comme si c’étaient ses doigts qui me caressaient.
Mon cœur bat la chamade. Bon sang, tout est excitant chez cet homme, son
visage, sa façon de bouger, de parler. Son accent portoricain, avec cette manière
de rouler les « r », est loin de me laisser insensible. Or, j’aimerais ne rien
ressentir après ce qui s’est passé avec Aaron. Monsieur latin lover doit être
surchargé en phéromones, car mon corps prend le dessus sur ma tête et mon
cœur.
— Tu es sacrément canon, Chérie. Tu sais bouger ?
— Euh, bouger dans quel sens ?
Il s’éloigne d’Heather et contourne le bar sur la pointe des pieds en faisant une
série de pirouettes. Il glisse vers moi en frappant dans ses mains, puis il se
déhanche et bombe le torse. Il s’arrête à quelques millimètres de mon visage et
je sens un parfum de savon et de noix de coco qui me rappelle la plage
ensoleillée d’Hawaï. Bon sang, je rêve d’être sur cette plage, de préférence sous
ce dieu du sexe.
— Bouger, muñeca*, chuchote-t-il.
Je sens la chaleur de son souffle contre mon visage, de petites bouffées d’air qui
titillent mes nerfs et réveillent mon désir après un long mois ensommeillé. Je
soutiens son regard et me rapproche encore de lui, appuyant ma joue contre la
sienne pour chuchoter dans son oreille.
— Que veut dire muñeca ? je susurre.
— Poupée, répond-il d’une voix rauque.
— Et Lucita ? je demande en effleurant sa barbe naissante du bout des lèvres.
Il pousse un grognement et effleure ma hanche avec sa main, de façon si légère
que je le remarque à peine.
— Petite lumière.
Petite lumière ? Je recule le visage, rompant l’intensité du moment et la brume
de désir qui nous enveloppait.
— Petite lumière ? je demande en gloussant. Pourquoi ?

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Du bout des doigts, il effleure mon épaule et descend jusqu’à mon poignet. Tout
d’abord, ma peau se couvre de chair de poule. Puis des frissons remontent le
long de mon bras en glaçant mon sang. Ma poitrine se contracte et mon ventre
fait un saut périlleux. Un voile noir couvre ma vue, et mon cœur bat la chamade
dans mes oreilles. Ma peau me semble trop étroite et chacun de mes nerfs me
crie de courir, de m’enfuir, de me recroqueviller sur moi-même.
— Je vais te tringler comme la pute que t’es, espèce de salope, gronde-t-il en
crachant sur mon visage.
Il m’écrase contre le mur de la bibliothèque. Le bruit horrible de sa braguette
glace mon sang. Je hurle plus fort, mais il mord ma bouche avant de cogner ma
tête contre le béton. Mon crâne est sur le point d’exploser et des étoiles
brillantes dansent devant mes yeux.
— Non !
— Non ! je crie en repoussant le corps qui se tient trop près de moi.
Je fais un bond en arrière et recule jusqu’à rencontrer le bord d’un canapé. Un
canapé ? Comment est-ce possible ? Je secoue lentement la tête pour me
débarrasser des images du passé qui m’empêchent de raisonner.
Bordel de merde ! C’était quoi, ça ?
Quatre yeux horrifiés m’observent alors que je reviens sur terre.
— Mia… chuchote Heather en se couvrant la bouche.
— Lucita*, je… perdóname*. Je suis désolé. Je t’ai fait mal ? demande Anton
d’une voix douce et effrayée.
Merde. Pourquoi j’ai eu ce flash-back ? Qu’est-ce qui l’a déclenché, bon sang ?
— Non, non, c’est moi qui suis désolée. Je crois que je suis fatiguée du voyage.
Je n’ai pas mangé et j’ai bu mon martini trop vite… ouais, je pense que c’est ça.
Ça doit être ça, non ?
— Allons te trouver à manger, dit Anton, l’air inquiet. Je ne tolère pas que les
besoins de mon équipe ne soient pas assouvis. Viens. H, allons dîner dans notre
resto préféré.
Il me tend la main et je lui donne la mienne. Je ressens les signes familiers du
désir, mais ils sont désormais mêlés à une légère angoisse. C’est. Quoi. Ce.

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Bordel. Ça ne te ressemble pas, Mia. Il faut que je comprenne ce qui se passe, et
vite. Mais comment faire ?
Pour l’instant, je me contente de suivre Anton et Heather, l’esprit confus et la
peur au ventre.
*
* *
Le dîner est fabuleux. Je savoure un plat de gnocchi al gorgonzola, une
spécialité de Il Gabbiano, le resto italien chic où nous sommes installés. Je ne
suis pas du tout habillée pour l’occasion, mais Anton et Heather ne le sont pas
non plus. Lorsque nous sommes entrés, suivis de près par plusieurs gardes du
corps, le manager s’est précipité sur nous. Il nous a immédiatement proposé une
table dans un coin calme avec une vue imprenable sur l’océan Atlantique. Anton
a commandé des amuse-bouche sans jamais cesser de sourire à la serveuse, et je
ne pense pas me tromper en disant que ses yeux verts ont séduit toutes les
femmes autour de nous. Heather et moi commandons les mêmes antipasti, mais
pour la suite, j’ai besoin d’un plat bourré d’un million de calories alors qu’elle
préfère une salade. Je commande donc mon plat préféré de tous les temps, des
gnocchis recouverts de sauce crémeuse.
Anton demande des pâtes aux crevettes et engloutit son assiette avec une vitesse
et une efficacité surprenantes, comme si les fruits de mer allaient replonger dans
l’océan. Lorsque je lui demande pourquoi il mange si vite, il fronce les sourcils,
s’essuie la bouche et concentre son regard au loin, laissant Heather changer
subtilement de sujet. Apparemment, elle sait quelque chose de ce sujet sensible.
Je la regarde du coin de l’œil et elle secoue la tête discrètement. Nous parlons
alors du clip vidéo et de la manière dont les choses vont se dérouler.
Je ne peux plus le repousser, il est temps de leur dire que lorsqu’il s’agit de
danser, j’ai toute la grâce d’un éléphant dans un magasin de porcelaine.
— Tu n’as aucune base ? demande Anton en fronçant les sourcils.
Je secoue la tête et me mords la lèvre. Il lève la main, frotte sa barbe et gonfle
ses poumons.
— Il va falloir y remédier. Tu es perfecta*… pour le rôle de la séductrice. H, tu
n’aurais pas pu choisir une meilleure candidate. Il faut résoudre ce problème.

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Il frotte ses mains l’une contre l’autre et regarde Heather avec un regard
complice.
— Tu penses ce que je pense ?
Heather tapote sa lèvre du bout du doigt et hausse les épaules.
— Si elle est disponible. Son contrat à la San Francisco Dance Company vient
de prendre fin, et ce pervers qui harcelait son groupe d’amies est parti. Peut-être
qu’elle pourrait régler les problèmes que tu as avec les danseuses. Je vais
l’appeler et lui demander si ça l’intéresse de sauver ta peau. Mais tu sais que ce
ne sera pas gratuit.
— Comme tout sur cette terre, non ? répond Anton en éclatant de rire. Je la
veux. J’en ai assez de supporter cet abruti, et ses chorégraphies contemporaines
sont les meilleures. Sans parler de son goût pour la fusion latine. Elle saura tout
de suite quoi faire pour que ce soit parfait. Je veux que tous les regards soient sur
Mia. Je veux qu’elle soit si sexy que tous les spectateurs en auront l’eau à la
bouche. Tous les hommes la désireront, mais aucun ne l’aura.
Un sourire machiavélique se dessine sur ses lèvres et il met une crevette entière
dans sa bouche, laissant tomber la queue dans son assiette. Il sourit jusqu’aux
oreilles, clairement emballé par sa nouvelle idée.
— Alors, euh, qui est cette chorégraphe ?
Heather boit une gorgée de vin blanc et s’essuie la bouche.
— Une danseuse contemporaine avec un talent incroyable. Elle était l’étoile de
la San Francisco Dance Company durant ces deux dernières années. C’est pour
ça qu’on n’a pas pu l’engager. Anton est tombé amoureux de son corps et de sa
façon de bouger quand on a vu son spectacle l’an dernier.
— Tu aimes aller voir des ballets ? j’interromps d’un air surpris.
— Oui, Lucita*, ça me calme. J’aime voir les autres danser et chanter.
— Bref, coupe Heather, on a découvert qu’elle enseignait exclusivement pour le
San Francisco Theatre. Elle ne quittera pas SF pour Miami, Anton.
Apparemment, elle doit rester auprès de ses sœurs. Mais si on lui offre assez
d’argent et qu’on ne traîne pas, peut-être qu’elle acceptera de venir tant que Mia
est là et qu’on filme. Ça pourrait vraiment donner du cachet à ce clip, dit-elle en

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se levant brusquement. Je vais l’appeler maintenant. Ils ont trois heures de
décalage, donc ce ne sera pas trop tard.
Sans un mot de plus, elle quitte la table et sort sur le balcon.
Je sirote mon vin en regardant l’océan, profitant de la brise qui s’enroule autour
de nous.
— Elle est sacrément efficace, ton assistante.
— Elle l’est. C’est pour ça que je la garde, répond Anton en souriant.
— Je peux être franche avec toi ?
Il recule dans sa chaise, pose une cheville sur son genou et tend les bras de
chaque côté de lui, comme pour montrer qu’il n’a rien à cacher.
— Bien sûr.
— Pourquoi tu lui parles toujours aussi sèchement ? Tu n’as pas peur qu’elle en
ait marre et qu’elle démissionne ?
Je ne suis là que depuis quelques heures et je me demande déjà comment elle
peut rester avec lui alors qu’il passe la moitié du temps à se comporter comme le
dernier des enfoirés. Il faut dire que l’autre moitié du temps, il a l’air détendu et
facile à vivre, comme s’il avait deux facettes radicalement différentes.
— Qu’est-ce qui te fait dire ça ? demande-t-il sur un ton suspicieux.
— Je ne sais pas. Peut-être la façon dont tu l’agresses au téléphone, marches
devant elle comme si elle était ton pion et aboies des ordres par-dessus ton
épaule en t’éloignant.
— Mais l’opinion d’Heather compte plus que tout, la sienne est la seule à
laquelle j’accorde de l’importance. J’ai une confiance en elle sans limites.
— Ça ne se voit pas.
Anton prend son verre de vin et le vide.
— Elle t’a dit qu’elle voulait démissionner ?
À l’évidence, l’idée qu’Heather le quitte le perturbe.
— Non ! Pas du tout, mais j’ai eu l’impression qu’elle souhaite être davantage
pour toi.
— Davantage ? Tu veux dire… qu’on soit en couple ?
Je secoue la tête. Est-il possible qu’il soit narcissique à ce point ? Je regarde ce
corps et ce visage qui pourraient faire pleurer les anges. Je suppose qu’il est en

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droit d’être arrogant.
— Pas que je sache, non. Je parlais du travail. Elle a mentionné qu’elle voulait
être manager pour un artiste. Il semblerait justement que tu n’aies pas de
manager en ce moment.
Anton porte sa main à sa bouche et caresse sa délicieuse lèvre avec son pouce.
— Je n’en ai pas, c’est vrai. D’habitude, je fais part de mes décisions à H et elle
s’occupe de tout mettre en place.
Voilà qui est intéressant.
— Donc, elle est déjà plus ou moins ta manager, sans les avantages et le prestige
du titre ? C’est pas cool pour elle.
Je tripote nonchalamment mes cheveux et je me tourne face à l’océan afin de lui
laisser de la place. La vue est superbe et j’ai un pincement au cœur en réalisant
combien ma maison me manque.
Ma maison.
Merde. Sans le vouloir, il semblerait que j’aie répondu à la question qui me
taraude depuis plusieurs mois.
Ma maison est en Californie.

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Chapitre 3

Les rayons du soleil pénètrent par les rideaux et m’aveuglent. C’est mon
troisième jour à Miami, et j’ai enfin l’impression d’avoir suffisamment dormi.
Hier, j’ai enchaîné les rendez-vous avec l’esthéticienne, la styliste et toute
l’équipe d’Anton. Cet après-midi, nous allons rencontrer la chorégraphe, qui a
demandé à être immédiatement présentée aux danseurs. J’espère que cela ne
signifie pas qu’elle sera trop dure. Je suis aussi angoissée qu’excitée à l’idée de
travailler avec une danseuse étoile, et je me demande si elle va réussir à me faire
bouger sans que j’aie l’air de Mister Bean.
Le fait que je ne sache pas danser a toujours été un sujet de discorde avec mon
agent. Je sais chanter juste, jouer n’importe quel rôle et, apparemment, être
modèle, mais je n’ai jamais été douée pour remuer mes fesses, enfin pas sur de la
musique. Ginelle, en revanche, n’a eu aucun mal à en faire son métier. Le public
du Burlesque Dolls1 Show l’adore. Elle a beau être minuscule, elle a de sacrées
formes et elle bouge mieux que quiconque.
Je suis soudain accablée de tristesse en pensant à Gin, qui aurait adoré être ici
pour rencontrer une célèbre chorégraphe de San Francisco. Quand je saurai qui
est cette femme dont Anton est complètement gaga, je l’appellerai pour le lui
dire.
Mon téléphone sonne dès que je l’allume. J’ai un message de Maddy qui me dit
que ses cours se passent bien et me remercie pour le dernier chèque que je lui ai
envoyé. Cela me perturbe toujours de ne plus avoir à payer ses courses ni ses
factures. Toutefois, je me force à respirer, à compter jusqu’à dix et à me détacher
un peu plus, comme je le fais chaque jour. Je ne raccrocherai jamais
complètement mes responsabilités lorsqu’il s’agit de ma petite sœur. Cependant,

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je dois me rappeler qu’elle est adulte, qu’elle vit avec son fiancé et que sa
carrière et ses objectifs sont fixés. Elle est heureuse, en bonne santé, en sécurité,
et elle est avec un homme qui semble se soucier de ses moindres envies. En tout
cas, il a intérêt à rester ainsi ou je le ligoterai pour l’épiler poil par poil.
Le message suivant me glace le sang. Mon Dieu, je vais tuer ma meilleure amie.
Je ne vois qu’un moyen pour qu’il ait appris la date de mon anniversaire :
quelqu’un le lui a dit, et ce quelqu’un, c’est Ginelle.
À : Mia Saunders
De : Wes Channing
Un petit oiseau m’a dit que c’était ton anniversaire la semaine prochaine, et que
tu étais à Miami. Réserve-moi un jour. Tu ne peux pas avoir envie de passer ton
anniversaire avec un étranger. Je viens te voir. Tiens-toi prête. On a plusieurs
mois à rattraper.
Je m’assieds dans le lit et j’appelle la vipère qui m’a dénoncée.
— A… allô ? répond une voix endormie. Mia, tout va bien ?
— Comment tu as pu faire ça ? je gronde.
— Il fallait que quelqu’un le fasse, marmonne-t-elle en bâillant.
— Tu es sérieuse ? Il fallait que quelqu’un le fasse ? C’est ça ta réponse ? Je suis
folle de rage ! je crie en chuchotant.
D’ailleurs, pourquoi je chuchote ? Il n’y a personne avec moi dans cette
chambre.
Ginelle pousse un grognement et bâille de nouveau.
— Mia, j’ai tiré au sort les mecs dont j’ai volé les numéros dans ton téléphone.
Je lève les yeux au ciel et ma mâchoire se contracte. En même temps, c’est tout
Ginelle, ça, je ne sais pas pourquoi je suis surprise.
— C’est tombé sur Wes. Tu ne peux pas être toute seule pour ton anniversaire.
Je viendrais bien, mais avec les vacances que j’ai prises en mai, je n’ai plus de
congés. Il est quelle heure, au fait ?
Je regarde le réveil sur la table de chevet. Huit heures du matin sur la côte Est.
— Il est cinq heures à Vegas, je réponds en ricanant. Bien fait pour toi ! À cause
de toi, je dois gérer l’arrivée de Wes.

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— Que tu le gères ? Hmm, je ferais bien plus que ça, à ta place. D’ailleurs,
pourquoi tu m’en veux ?
Elle n’a pas tort. Gin se mêle tout le temps de mes affaires et je ne me suis
jamais énervée contre elle. Peut-être que je ne suis pas prête à voir Wes alors que
je n’ai toujours pas digéré ce qui s’est passé avec Aaron. Et puis, c’est sans
parler du fait que je suis en train de tomber amoureuse de lui. Merde ! C’est ça,
le problème. Mon cerveau peut se débattre et lutter autant qu’il le souhaite, en
fin de compte, le résultat est le même. Je suis amoureuse de ce dieu du sexe
blond qui est aussi beau en maillot de bain qu’en costume ou à poil. Bien sûr, je
préfère la version nue. Je me lèche les lèvres en repensant à notre dernière
rencontre à Chicago. C’était intense, charnel, et je m’en souviendrai toute ma
vie.
— Allô, Mia ? Qu’est-ce qui se passe ? Tu es de mauvais poil depuis que ce
connard t’a tripotée à Washington.
— Gin ! Il m’a agressée !
— Je sais, ma chérie, dit-elle d’une voix plus douce. Excuse-moi. C’est
simplement que je ne veux pas que ce qu’a fait ce connard prenne le dessus sur
la personne que tu es. Personne n’a le droit d’avoir un tel pouvoir sur toi, tu te
souviens ? C’est ce que tu m’as dit après l’enfer que Blaine t’a fait traverser.
— Je ne sais pas, meuf. Anton est beau à mourir et…
— Meuf, ce que je ne donnerais pas pour être à ta place ! Ou plutôt non, pas à ta
place, parce que toi, tu fais la prude. « Tu nous vois, moi et mes nichons
énormes ? Viens les voir ! Ah non ! Tu ne peux pas les toucher ! » Moi, je serais
déjà à genoux devant ce demi-dieu au chocolat et je le sucerais comme une glace
au cappuccino.
— Ça, je n’en doute pas, espèce de traînée, je réponds en riant.
— Qui, moi ?
Je pousse un grognement et me laisse retomber sur le lit.
— Mais Gin, dès qu’il s’est approché, j’ai paniqué. J’ai été replongée le soir où
Aaron m’a agressée.
Je fronce les sourcils et je tripote une cuticule jusqu’à ce qu’elle saigne. La
douleur n’est rien à côté de l’angoisse que je ressens à l’idée d’être plus

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traumatisée que je ne le pensais.
— Hmm, je crois qu’il faut que tu t’accordes plus de temps. Il te met la pression
? demande-t-elle d’une voix sèche, déjà sur ses gardes.
— Non, non, non. Pas du tout. C’est juste qu’au début, on a pas mal flirté. Mais
maintenant, c’est comme si ma libido était entrée en hibernation.
— Peut-être que l’arrivée de Wes est justement ce qu’il te faut. Tu sais, pour
t’aider à retrouver ton groove.
— Peut-être. Mais tu me le paieras quand même, je réponds en m’efforçant
d’avoir l’air toujours en colère.
— Alors, tu me pardonnes de m’être mêlée de tes affaires ? demande-t-elle
d’une voix nerveuse.
— Ouais, pour l’instant. Mais, dorénavant, je t’interdis de contacter les mecs
pour qui j’ai bossé. Je suis sérieuse, Gin.
— Promis ! Parole de scout !
— Tu n’as jamais été scout ! je gronde en riant.
— Ouais je sais, mais ça sonnait bien, glousse-t-elle.
— Bref. Rendors-toi, ma salope, je dis en souriant.
Elle a beau ne pas me voir, je sais qu’elle devine que je lui ai pardonné d’avoir
contacté Wes.
— À vos ordres, capitaine. Je t’aime, pupute.
— Je t’aime encore plus, p’tite garce.
Je raccroche et je relis le message de Wes. Il sera là dans une dizaine de jours.
Mon anniversaire est le 14 juillet.
À : Wes Channing
De : Mia Saunders
Ginelle aurait dû se taire. Tu n’es vraiment pas obligé de venir. Je vais très bien.
J’aime savoir que tu penses à moi.
Aimer ?
Revoilà ce mot. L’amour. Est-ce que j’aime Wes ? Véritablement ? Je ne sais
pas. Sans doute. Peut-être. Quoi qu’il en soit, je ne peux guère me permettre d’y
penser alors que je suis avec un autre client.

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Un client qui, pour reprendre l’expression de Ginelle, est un véritable demi-dieu
au chocolat et un coureur. Cela dit, qui suis-je pour le juger ? J’ai couché avec
Wes, Alec, Taï, et me voilà, dans l’appartement d’un énième homme richissime,
à contempler ô combien il est baisable.
Je reprends mon téléphone et j’ouvre l’application Internet pour chercher la
définition du mot coureur.
Coureur
1. Personne ou animal qui court ou qui est apte à la course.
2. Personne qui fait des courses ou entreprend des démarches pour quelqu’un
d’autre.
Ce ne sont pas les définitions que je cherche. Plus bas sur la page, je vois un lien
vers le « Dictionnaire métropolitain » et je clique dessus.
Coureur
Homme qui cherche les aventures galantes et qui est doué pour séduire les
femmes en feignant d’avoir des sentiments, alors que seul le sexe l’intéresse.
Alors, le terme « coureur » ne serait employé que pour les hommes ? Je meurs
d’envie de répondre oui et de m’arrêter là, mais ma conscience ne m’autorise pas
à le faire. Je me retrouve donc sur la page d’Intellectopédia, qui ne m’a jamais
déçue jusque-là et qui ne va pas commencer maintenant.
Apparemment, un coureur peut faire référence à « un homme ou une femme qui
a des relations romantiques ou sexuelles avec le sexe opposé sans aucune
intention de se marier ou de s’engager dans une relation monogame ».
C’est tout ce que j’avais besoin de voir. C’est officiel. Mia Saunders, ma belle,
tu es une coureuse.
*
* *
Après avoir passé un temps fou sous une douche bouillante, jusqu’à ce que ma
peau soit rose, je me dirige vers l’ascenseur. Le message d’Heather me dit de
m’habiller de façon décontractée et de retrouver Anton sur le toit. Je ne vois pas
pour quelle raison on devrait aller sur le toit, mais c’est eux qui me paient, alors
je m’exécute sans broncher. Cela fait une heure que j’ai écrit à Wes et je n’ai
toujours pas de nouvelles. En même temps, je ne sais pas quelle réponse

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j’attends de lui. Va-t-il insister et se frayer un passage jusque dans mon cœur ?
Une part de moi le désire si fort que c’en est douloureux. Mais une autre part de
moi souhaite poursuivre notre relation telle qu’elle est, du moins pour l’instant.
Pas d’attentes, pas d’obligations l’un envers l’autre, de simples amis. Des amis
qui se font du bien.
Est-ce vraiment la relation que je souhaite avoir avec Wes ? Mon Wes ? Merde.
Depuis quand est-il devenu mon Wes ? Sans doute quelque part entre le moment
où j’ai admis que je tombais amoureuse de lui et celui où je me suis avoué que
ma maison était en Californie. D’ailleurs, elle n’est pas seulement en Californie,
mais à Malibu. Chez lui. C’est là que je me suis sentie le plus moi-même. Libre
d’être Mia.
Je ricane et j’appuie si fort sur le bouton de l’ascenseur que j’en ai mal au pouce.
Je le secoue et regarde les numéros s’afficher sur l’écran au-dessus de la porte.
Pourquoi maintenant ? Après avoir vécu une expérience traumatisante à
Washington et avoir pansé mes plaies chez Mace, je viens ici pour travailler avec
un mec canon qui n’a pas de scrupule à montrer qu’il me désire, et j’en suis là ?
Était-ce inévitable ? J’ai l’impression que mes émotions et mes peurs
bouillonnent en dessous de la surface, comme un volcan prêt à entrer en éruption
à tout moment.
La sonnette de l’ascenseur retentit et j’émerge dans un monde étrange. Des
plantes et des arbres m’accueillent, l’air est humide et presque irrespirable.
— Waouh… je chuchote en déglutissant.
— Lucita*, par ici ! crie Anton.
J’aperçois la forme d’un homme, une silhouette en blanc qui se déplace d’une
plante à une autre. J’approche et je vois qu’il est vêtu tout en blanc, depuis sa
chemise à ses baskets en toile, en passant par son pantalon en lin. Cependant,
toute sa tenue est maculée de taches de terre. Son énorme chapeau en paille de
style asiatique dépasse tout juste du pot derrière lequel il est accroupi. Je
m’arrête devant lui et le regarde arracher des mauvaises herbes.
— Qu’est-ce que tu fais ?
— Je jardine. Il y a des gants, là-bas. Tu as la main verte ? demande-t-il sur un
ton plein d’espoir.

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— Hélas, je crains que non. J’ai tendance à tuer la plupart de mes plantes.
Il se redresse et sa chemise colle à son torse, révélant ses muscles. Un frisson
d’excitation chatouille mon ventre, mais disparaît lorsqu’il fait un pas vers moi
et se retrouve à portée de bras.
— On va y remédier, d’accord ?
Je hausse les épaules et j’enfile les gants.
— Je n’ai jamais jardiné, en fait. À Las Vegas, on est adeptes du jardin zéro,
c’est-à-dire qu’on met du gravier plutôt que de la pelouse, des cactus plutôt que
des arbustes et des succulentes plutôt que des fleurs. Il ne faut pas grand-chose
pour les garder en vie.
— Ah, mais tu sais, le plaisir vient du fait de s’occuper d’autre chose que de soi-
même.
C’est une belle façon de voir les choses.
— Regarde, tu vois cette plante ?
Je suis son doigt jusqu’à la pousse verte qui ne ressemble pas aux autres.
— Cette mauvaise herbe finira par envahir tout ce pot de papaye. Et tu vois ça ?
Il me montre une fleur superbe que je n’ai jamais vue. Elle est d’un violet très
foncé en son centre, avec trois longs pétales d’un vert acidulé.
— Les mauvaises herbes vont infester tout le bac et tuer la beauté qui y réside.
Un peu comme les pensées négatives.
— Comment ça ?
Il m’offre un sourire doux, et ses yeux pétillent.
— Assieds-toi avec moi, Lucita*.
Je lui obéis et je pose mes fesses sur le bord d’un pot rempli de fleurs.
— Les pensées négatives se plantent dans le cerveau comme une graine.
Lorsqu’elles poussent, elles envahissent ton esprit et t’empêchent de voir
clairement la vérité et la beauté qui t’entourent, ou de voir la sincérité d’une
personne. En fin de compte, ces pensées prennent le dessus et tu ne peux plus
profiter de la joie que te procure cette personne. Comme cette mauvaise herbe.
Elle va grandir et infester tout le pot, jusqu’à ce que toute la beauté qu’il contient
soit détruite et qu’il ne reste plus que la seule chose que tu ne voulais pas. Dans
ce cas, la mauvaise herbe est la pensée négative.

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— Tu me surprends.
Je pose ma main sur son biceps et je le serre. Il répond en posant une main sur
mon genou, et je me fige. Une peur et une laideur sans nom éclatent à l’endroit
où sa main me touche et elles se propagent dans tout mon corps, saisissant ma
poitrine, m’empêchant de respirer. Ses yeux verts cherchent les miens, puis il les
ferme, clignant lentement avant de lâcher mon genou. Je peux de nouveau
respirer. Je tourne la tête, pose mes mains sur mes genoux et respire par le nez en
essayant d’être discrète. Bien sûr, cela ne marche pas, mais Anton a le tact de ne
rien dire.
Lorsque je redeviens moi-même, il me regarde en jouant des sourcils et il lèche
ses délicieuses babines.
— Je surprends la plupart des gens, tu sais, dit-il en souriant.
— Alors, le jardinage c’est ton hobby ?
— Si*. J’adore voir de belles choses grandir. Et j’aime manger ce que j’ai semé,
ajoute-t-il fièrement.
D’une certaine façon, son goût pour le jardinage donne un côté plus réel et terre
à terre à ce latin lover. Cependant, sa dernière phrase me fait repenser à sa façon
de manger, l’autre soir, et à sa réaction quand je lui en ai parlé.
— Est-ce que tu es passionné de nourriture, aussi ? je demande en trifouillant la
feuille d’un arbuste dont je ne connais pas le nom.
Anton se lève et marche lentement vers un autre buisson.
— La nourriture est un besoin. Personne ne devrait avoir à s’en passer.
— Tu parles comme quelqu’un qui n’a pas toujours mangé à sa faim.
Sa mâchoire se contracte et il pince ses lèvres. Bingo !
— Est-ce que tu vas me dire pourquoi tu te figes quand je te touche, même si
c’est amicalement ? Bien sûr, j’aimerais te toucher autrement qu’amicalement, si
tu le voulais bien.
Son regard est brûlant de désir, prouvant que l’attirance que j’ai pour lui est
réciproque.
Je me promène entre les rangées de fleurs et d’arbustes et j’ignore sa question.
— C’est quoi, ça ? je demande en désignant un arbuste aux petites feuilles vertes
et dont les fleurs jaunes ressemblent à des pompons.

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— C’est un cassier. Il fleurit toute l’année. C’est beau, mais ne le touche…
Il n’a pas le temps de finir sa phrase que je me pique sur une épine.
— Aïe !
Je secoue mon doigt, mais il l’attrape et le met dans sa bouche pour le sucer.
Trois choses se passent alors simultanément.
Tout d’abord, mon ventre s’enflamme, mon sang s’embrase et je mouille.
Ensuite, ce sentiment de peur et d’angoisse s’empare de tous mes nerfs et les
glace, me figeant sur place.
Enfin, un voile noir recouvre ma vision. Lorsque j’ouvre les yeux, je suis de
nouveau là-bas, contre ce putain de mur en béton.

1. Poupées.

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Chapitre 4

— Tu te crois spéciale, n’est-ce pas ? crache-t-il.


Je secoue la tête en essayant de parler calmement.
— Pas du tout. C’est tout le contraire, en fait.
Il fronce les sourcils et avance vers moi à grandes enjambées. Je lève les mains
devant moi, mais il ne s’arrête pas et je me retrouve adossée au mur bétonné
d’un coin sombre. Quelques pas de plus, et son torse est contre le mien. Je
cherche le meilleur moyen de réagir, mais le champagne ralentit mes réflexes.
— Aaron, ne fais pas ça.
Son nez effleure ma tempe et des frissons parcourent mon dos, faisant se hérisser
mes poils.
— Tais-toi.
Sa voix est froide. Dénuée d’émotion.
J’essaie de le repousser, en vain. Aaron est loin d’être léger. La peur m’envahit
et mon instinct hésite entre me battre ou m’enfuir.
— T’essaies de t’échapper, petite pute, ricane-t-il en bafouillant à moitié.
— Je ne suis pas une pute, Aaron, tu le sais parfaitement.
Je me débats contre lui et essaie de le pousser de toutes mes forces, mais cela ne
fait que l’énerver davantage. Il m’écrase contre le mur et mord mon cou. Fort.
Si fort que je hurle de douleur, mais il s’en fiche.
— Je sais que mon père t’a engagée pour jouer sa pute devant ses amis pleins
aux as. Je sais que tu travailles pour un service d’escorts et que t’es payée au
mois. Il est temps de faire ce pour quoi mon père t’a payée.
— Bon sang, Mia ! S’il te plaît ! Je suis là. C’est Anton. Anton ! Je ne vais pas te
faire de mal !

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Anton me tient fort contre lui, enserrant mes bras dans les siens pour
m’empêcher de bouger.
Ma panique et mon désespoir sont écrasants, et je puise dans mes forces pour me
tourner dans ses bras et hurler. Il me lâche comme si j’étais une grenade prête à
exploser. Je cours à la poubelle près du mur et je vomis violemment, parcourue
de spasmes. Dieu merci, je n’ai pas grand-chose à régurgiter car je n’ai pas
encore pris de petit déjeuner, c’est surtout du café et de la bile. Anton reste près
de moi tout en étant suffisamment loin pour ne pas m’angoisser de nouveau. Ses
bras sont croisés et son chapeau pend dans son dos, attaché à son cordon. Ses
yeux sont noirs et pleins de tristesse, peut-être même de pitié.
— Ne me regarde pas comme ça ! je grogne avant d’essuyer ma bouche sur le
revers de mon bras.
Je suis bonne pour repartir sous la douche. Mon front est en sueur et je me sens
sale. Je titube vers le banc et je m’assieds.
Anton me suit et s’accroupit devant moi, attendant patiemment que je lève la
tête.
— Tu peux me parler, tu sais, dit-il d’une voix inquiète et pleine de compassion.
— Tu vas me parler, toi ? je rétorque en libérant ma frustration. C’est quoi ton
problème avec la nourriture, Anton ?
Il retient son souffle et se pince la lèvre entre le pouce et l’index. Son regard
s’assombrit davantage, puis, après qu’il a vidé tout l’air de ses poumons, son
visage s’adoucit.
— J’ai grandi dans une famille pauvre. Très pauvre. On avait tellement peu
d’argent que, certains jours, on survivait avec de l’eau et des restes qu’on
trouvait dans les poubelles des restaurants du quartier. On ne trouve pas que du
soleil, des nanas en bikini et des plages sans fin à Porto Rico. Beaucoup
d’endroits ressemblent encore au tiers-monde. La côte Est de l’île est très
dangereuse, et c’est là que j’ai grandi.
— Tu as combien de frères et sœurs ?
— Deux. Un frère et une sœur. Mais mi papa* est mort quand on était très
jeunes. Mi mama* faisait de son mieux, mais nous nous sommes couchés trop
souvent le ventre vide. Nos ventres ont gargouillé de faim pendant des années.

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Mais c’est fini maintenant. J’envoie largement assez d’argent à mi mama* et elle
mène une vie paisible et heureuse. Elle ne manque de rien. Idem pour mis
hermanos*. Mes frères et sœurs, précise-t-il.
Je ferme les yeux et je compte jusqu’à dix. Je ne connais pas d’autre moyen pour
me calmer. Lorsque les battements de mon cœur ralentissent enfin, je rouvre les
yeux et je plonge mon regard dans le sien.
— Mon dernier client a un fils, un homme politique très haut placé, qui m’a
attaquée physiquement et a essayé de m’agresser sexuellement. Il était à deux
doigts de me violer. Il s’en est vraiment fallu de peu.
Les mots laissent un goût putride dans ma bouche.
— C’était quand ? demande-t-il d’une voix douce qui me laisse penser que je
peux me confier à lui, même si je ne le connais que depuis deux jours.
— Il y a environ trois semaines.
— Coño*, c’est si récent que ça ? Bon sang, Mia, est-ce que cet enfoiré est en
tôle, au moins ?
Voilà la clé du problème.
— Je n’ai pas porté plainte, je réponds en secouant la tête et en baissant les yeux,
honteuse.
Mon aveu me fait l’effet d’un coup de poignard dans les viscères. J’ai beau
savoir que j’ai agi pour le bien des plus démunis de ce monde, j’ai tout de même
du mal à accepter qu’Aaron s’en tire sans assumer la moindre conséquence.
Certes, j’ai imposé qu’il se fasse suivre et qu’il aille en cure de désintoxication,
mais il y a désormais un trou en moi qui ne peut être comblé que par le fait
qu’Aaron soit puni. Or, ce n’est pas le cas.
— Il y avait des circonstances atténuantes. J’ai fait ce que je devais faire. Il n’y
avait pas de bonne solution. Si j’avais porté plainte, des dizaines voire des
centaines de personnes auraient souffert.
Anton hoche la tête.
— Parfois, les décisions que nous devons prendre sont les plus difficiles. Tout le
monde ne peut pas le comprendre.
Il n’y a pas la moindre trace de jugement dans sa voix. Je viens de lui dire qu’un
homme monstrueux m’a agressée et a failli me violer et que j’ai accepté qu’il ne

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soit pas puni. Il ne sait rien des circonstances dont je parle, mais il ne remet pas
en question ma décision. Pourquoi je ne peux pas faire la même chose ?
Il s’assied à mes côtés et me tend ses mains, paumes vers le ciel, m’offrant son
soutien et son réconfort. Je suis encore craintive, mais je suis également
déterminée à surmonter ce blocage. Je pose mes mains dans les siennes et
j’attends. Est-ce que je ressens la même chose que lorsque je tiens la main de Taï
ou de Mason ? Non. Ces deux savent ce que j’ai traversé et, pour une raison que
je ne comprends pas, je n’ai pas été affectée de les toucher après mon agression.
Avec Anton, cette angoisse désormais familière picote ma main, et je serre la
sienne avant de la retirer.
— Merci, je chuchote.
— Pour quoi ? demande-t-il en haussant les sourcils.
— De ne pas me juger, je réponds d’une voix rauque et chargée d’émotion.
— Je ne mène pas ta vie, Mia. Je ne prétends pas savoir si une décision peut être
pire ou meilleure qu’une autre, car ce n’est pas moi qui dois la prendre et
l’assumer. C’est toi, et toi seule, qui dois vivre avec tes choix. Je vois que celui-
ci pèse lourdement sur tes épaules.
Je hoche la tête et presse mes paumes l’une contre l’autre jusqu’à ce que mes
phalanges soient blanches.
— Alors… est-ce qu’on peut être amis sans l’ombre d’autre chose ? je demande,
soudain inquiète que ma décision le vexe.
— Est-ce que tu es attirée par moi, Lucita* ?
Petite lumière. Quel idiot.
— Oui, je réponds franchement.
— Mais tu souhaites néanmoins te priver du plaisir d’un accouplement avec moi
?
Je souris jusqu’aux oreilles. Le plaisir d’un accouplement ? D’où il sort ces trucs
?
— Hélas, je ne crois pas qu’un nouveau partenaire soit salutaire pour moi, en ce
moment. Et puis, j’ai plus ou moins quelqu’un d’autre.
Ça y est, je l’ai admis.

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— Dommage. J’avais hâte de te coucher dans mon lit, répond-il en frappant ses
cuisses et en se levant.
— Je ne crois pas que tu manques de présence féminine, Anton.
— Ce n’est pas faux, répond-il en jouant des sourcils. Alors, on est amis ?
Il m’offre sa main comme pour conclure un accord.
— Amis.
Il remet son chapeau.
— Maintenant, en tant qu’amie, tu peux m’aider à désherber ces jardinières ?
— Avec plaisir.
Ce sera cathartique de faire du travail manuel au soleil, de transpirer pour libérer
les toxines et les émotions qui affleurent trop près de la surface.
— À une seule condition… j’ajoute en posant une main sur ma hanche et en
penchant la tête sur le côté.
Il m’offre un sourire à la fois diabolique et enfantin, ses yeux scintillent d’un tel
éclat que je regrette presque ma décision de ne pas « m’accoupler » avec lui.
— Que désires-tu, femme ? répond-il sur un ton lourd de sous-entendus.
— Je veux conduire une de tes motos.
Il éclate de rire.
— Tu aimes monter à moto ?
La surprise que je perçois dans sa voix est presque vexante.
— J’aime conduire les motos, je précise.
Son sourire me donne de l’espoir.
— Alors, j’ai hâte de remplir ma part du deal, répond-il. Les gants sont là-bas, et
tu trouveras aussi un chapeau et un seau, ajoute-t-il en désignant un grand panier
en osier.
— Cool !
*
* *
La chorégraphe s’appelle Maria De La Torre et elle tellement belle que j’en ai eu
le souffle coupé quand elle est arrivée. Ses cheveux sont aussi noirs que les
miens et, pour une danseuse, elle a des courbes à n’en plus finir. Elle est plus
musclée que moi et son corps mériterait d’être gravé dans le marbre. Elle parle

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anglais, mais passe à l’espagnol sans prévenir. Si je devais deviner, je dirais
qu’elle est grecque ou italienne, peut-être espagnole. Quoi qu’il en soit, elle a
des origines méditerranéennes, c’est certain. Lorsqu’elle se déplace, tous les
yeux la suivent. Elle a une fluidité et une grâce que les autres danseurs dans le
studio n’ont pas.
— La séductrice ? demande Maria en lisant une feuille. Une certaine Mia
Saunders ?
Elle observe l’assemblée, et toutes les têtes se tournent vers moi. Je marche vers
le devant du studio où tout le monde est assis. Je m’étais cachée au fond, ne
voulant pas déranger, la regardant appeler les danseurs un à un. Elle leur a fait
faire une série de chorégraphies, et elle en a carrément viré la moitié. Sur-le-
champ ! Devant tout le monde ! C’est brutal, mais ça a le mérite d’être efficace.
Ses yeux bleus me reluquent de la tête aux pieds.
— Tu n’es pas danseuse, dit-elle immédiatement.
Je me sens presque soulagée de ne pas avoir à me ridiculiser devant les autres.
— Non, je suis escort, je réponds en haussant les épaules et en posant mes mains
sur mes hanches.
Elle m’étudie en fronçant les sourcils, et un petit V apparaît sur son front.
— Tu accompagnes quelqu’un dans l’assemblée ?
Enfin, quelqu’un qui sait ce qu’est une escort et ne suppose pas que je suis une
prostituée !
— Anton et Heather m’ont embauchée pour ce rôle. Quant à savoir pourquoi…
mieux vaut leur demander.
Elle penche la tête d’un côté, puis de l’autre.
— Tourne sur toi-même.
Je m’exécute.
— Encore.
Je lui obéis de nouveau.
— Tu sais danser ?
— Professionnellement ?
Elle éclate de rire.

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— Non, je sais que tu ne danses pas professionnellement. Les corps ne mentent
pas. Mais je comprends, en voyant tes courbes et ta beauté, pourquoi tu as été
choisie pour être la séductrice. Je me demande seulement si tu danses pour le
plaisir ? Si tu fais de la salsa, du tango ou quelque chose comme ça ?
Je secoue la tête, soucieuse de sa réaction, même si elle est restée tout à fait
professionnelle depuis son arrivée.
— D’accord, alors il va falloir réfléchir à ton rôle et à la manière dont on va te
présenter aux caméras. Tu ne serais pas là pour ce clip si Anton n’y tenait pas.
On trouvera un moyen de contourner le problème.
Ça ne me semble pas si mal. Au moins, elle ne m’a pas virée de la production et
je me surprends à être heureuse et soulagée. Ç’aurait été beaucoup plus simple
qu’elle me renvoie et j’aurais quand même été payée, mais l’idée de décevoir
Anton, Heather ou Tante Millie me déplaît.
Maria fait travailler le reste des danseurs et il n’en reste plus qu’une poignée
lorsqu’Anton arrive.
— Mamacita*, dit-il en prenant Maria dans ses bras. Mama*, tu as l’air en forme
!
Il étudie les quelques danseurs qui s’étirent à la barre ou répètent une série de
pas.
— Tu as fait le ménage, à ce que je vois.
— Anton, tu savais que j’allais virer la plupart des danseurs. Tu n’as pas besoin
d’en avoir autant pour ce que j’ai en tête. J’ai écouté ta chanson de nombreuses
fois en venant. Avec ce que j’ai imaginé, c’est surtout d’elle dont tu as besoin,
dit-elle en me désignant.
Heather hausse les sourcils, mais reste silencieuse derrière Anton et Maria.
Quant à moi, je ne suis pas bien loin car je ne veux rien rater, mais je ne suis pas
non plus trop près pour ne pas les gêner.
— Allons dans un endroit privé, tu veux ? À moins que tu veuilles travailler ce
soir ?
Elle tapote sa lèvre avec son doigt et réfléchit.
— No, vamos a dejarles descansar. Con lo que he planeado esta semana, ya no
van a sentir sus pies1.

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Un sourire machiavélique s’étend sur ses lèvres et Anton secoue la tête en
souriant.
— Eres malvada. Me encanta2.
Il entraîne Maria vers la porte, mais il s’arrête pour se tourner vers moi.
— Lucita*, tu me suis partout, sauf si Maria, Heather ou moi-même te disons le
contraire. Entiendes* ?
Je hoche la tête et plonge mes mains dans les poches arrière de mon jean avant
de les suivre. Les yeux d’Anton quittent les miens pour admirer mes seins et
mater mes fesses lorsque je passe devant lui.
— Elle ne sait peut-être pas danser, mais elle sait séduire, glousse Maria.
— J’aurais aimé savoir ce qu’ils se sont dit en espagnol, je dis à Heather lorsque
je la rejoins.
Elle se recoiffe en marchant, donnant plus de volume à sa coiffure.
— Ah ! Eh ben, en gros, Maria a dit que les danseurs n’avaient pas à travailler ce
soir et qu’il valait mieux qu’ils se reposent. Elle a l’intention de les faire
travailler dur toute la semaine.
J’ouvre la bouche, mais aucun mot n’en sort.
— Anton lui a répondu qu’elle est maléfique et qu’il adore ça chez elle.
— Waouh, meuf, tu parles espagnol ?
— J’ai acheté des livres pour apprendre quand j’ai commencé à travailler pour
Anton il y a quatre ans, je sortais tout juste de la fac. Il ne m’a fallu que cinq
jours pour comprendre que si je voulais réussir dans ce milieu, il fallait que je
comprenne tout ce qu’il disait, tout le temps. Cela dit, le portoricain est différent
du mexicain et de l’espagnol européen, mais en général, j’arrive à suivre ce qu’il
dit. C’est un peu comme les petites différences d’usage qu’on a aux États-Unis.
— Hmm. Eh bien, c’est super-cool. Tu sais, ça se voit qu’Anton tient à toi.
Heather rougit et baisse les yeux avant de hausser les épaules.
— Peut-être que tu ne vois que ce que tu veux voir.
Je fronce les sourcils et saisis son coude pour l’arrêter.
— Vous venez ? demande Anton en retenant la porte de l’ascenseur.
— Euh, tu nous laisses une minute ? je demande.
— Ça marche, répond-il avant de reprendre en espagnol.

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Je me tourne vers Heather :
— Qu’est-ce qui se passe ? Tu te comportes bizarrement.
La jeune femme se mord la lèvre et s’adosse au mur.
— Maintenant que Maria est là, toutes les idées que j’avais eues pour le clip vont
passer à la trappe. J’avais convaincu le chorégraphe d’ajouter certaines de mes
suggestions, mais maintenant…
— Tu en as parlé à Anton ?
Elle secoue vivement la tête.
— Non, et il n’écouterait pas de toute manière. Maintenant qu’elle est là, tous les
regards sont sur elle et il n’y a qu’elle qu’on écoutera.
— Je croyais que tu voulais qu’elle participe. Tu étais tout excitée de l’appeler et
de lui demander de venir.
— Parce qu’elle est la meilleure et qu’Anton mérite ce qu’il y a de meilleur.
Je croise les bras tout en réfléchissant à ce qu’elle vient de dire. J’ai l’impression
qu’elle ne me dit pas tout.
— Est-ce que tu es amoureuse d’Anton ?
Heather écarquille les yeux et se penche en avant en posant ses mains sur ses
genoux, puis tout son corps se met à trembler. Elle éclate de rire si fort que
lorsqu’elle se lève, des larmes coulent sur ses joues.
Apparemment, je suis complètement à côté de la plaque.
— Alors, ça veut dire non ?
— Désolée, non, répond-elle en essuyant ses larmes et en inspirant pour
retrouver son souffle. Chérie, je ne tomberai jamais amoureuse de lui. Je cherche
un homme qui fera de moi sa priorité, pas une simple option. On sait toutes les
deux qu’Anton est un lover pour toutes les femmes, mais qu’il ne s’engagera
pour aucune.
Lover pour toutes, engagé auprès d’aucune. Elle ne pourrait pas mieux le
décrire. Anton n’a pas du tout l’air du genre à vouloir une copine sérieuse.
— Alors, pourquoi tu n’arrives pas à lui parler ?
— Je ne sais pas. Chaque fois que j’aborde la question de la direction artistique
d’un sujet en particulier, il m’arrête avant que j’aie pu dire quoi que ce soit. J’en
suis au stade de ma carrière où je dois avancer ou passer à autre chose.

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— Alors, qu’est-ce que tu vas faire ?
— Eh bien, de toi à moi… commence-t-elle avant de balayer le couloir des yeux
pour s’assurer que nous sommes seules, j’ai été repérée par un agent pour
m’occuper d’un groupe de musique. On m’offre le poste de manager artistique et
je serai le bras droit de leur agent. C’est pour un groupe de hip-hop du New
Jersey qui est de plus en plus connu. Avec le réseau que je me suis fait et les
idées dont je leur ai déjà fait part, ce mec veut vraiment m’embaucher. Il est prêt
à me payer le double de ce qu’Anton me paie.
— Waouh, Heather, c’est génial ! Qu’est-ce que tu attends ?
Elle se mord de nouveau la lèvre inférieure et baisse les yeux.
— Je ne sais pas, c’est difficile. Ça fait quatre ans que je suis avec Anton. Je n’ai
travaillé que pour lui. En plus, je n’ai pas vraiment de famille. Je suis fille
unique et mes parents sont morts quand j’étais petite. Ce sont mes grands-
parents qui m’ont élevée et ils sont décédés, eux aussi.
— D’accord, mais c’est quoi le rapport avec ta décision de travailler ailleurs ?
Avec un poste où tu feras ce que tu veux, où tu te serviras de ce que tu as appris
à la fac et où tu auras enfin la carrière pour laquelle tu as sacrifié ta vie privée ?
— C’est super-dur, Mia. Anton est ce qui se rapproche le plus d’une famille pour
moi. Même si je ne suis pas sa priorité, il reste la mienne. C’est mon meilleur
ami. Mon seul ami.
— Oh, ma chérie, je murmure en caressant son bras.
— C’est pas triste, ça ? Je suis fidèle à un homme qui se contrefiche de moi,
alors qu’il est tout ce que j’ai dans la vie ?
Je saisis son coude et je l’attire dans mes bras. Elle s’accroche à moi et je
découvre que son contact ne me fait pas paniquer, comme celui d’Anton. Les
larmes coulent sur ses joues et sur mon épaule, et je caresse sa tête en lui
répétant que tout va bien se passer. Ses sanglots finissent par se transformer en
rires, et je recule pour essuyer ses larmes.
— Tu es intelligente et belle, et Anton tient plus à toi que tu ne le penses. Parle-
lui, Heather.
Elle soupire et hoche la tête.
— Tu as raison. Je vais le faire. Merci, Mia.

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— Il faut que tu sois honnête avec toi-même et avec Anton. Il ne peut pas savoir
ce que tu ressens si tu ne lui dis pas. Ce qui est sûr, c’est qu’il ne changera pas, à
moins d’être au courant de tes envies et du fait que tu as d’autres opportunités.
— Tu crois qu’il va m’en vouloir ? demande-t-elle tandis qu’on marche vers
l’ascenseur.
J’appuie sur le bouton et j’entends le moteur se réveiller quelque part au-dessus
de nos têtes.
— Tu le connais mieux que moi. Je crois qu’il sera déçu que tu ne lui aies pas
parlé avant et que tu envisages de le quitter sans lui laisser l’occasion d’arranger
les choses. D’après ce que j’ai compris, tu es la seule qu’il écoute.
— Non, rétorque-t-elle en secouant la tête. Anton fait ce qu’il veut, quand il
veut.
— Tu es un peu dure et un chouïa injuste, tu ne crois pas ?
— Peut-être, admet-elle en levant les yeux au ciel.
— Allons voir ce que ce Don Juan manigance avec Madame Danse-avec-les-
stars, dis-je alors que les portes de l’ascenseur s’ouvrent sur le penthouse.
— Meuf, ne dis pas ça devant elle ou elle va te botter les fesses. On m’a dit
qu’elle avait un sacré caractère !
— Heather, ma belle, moi aussi. Moi. Aussi.

1. Non, laissons-les se reposer. Avec ce que j’ai prévu cette semaine, ils ne
sentiront bientôt plus leurs pieds.
2. Tu es diabolique ! Ça me plaît.

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Chapitre 5

Nous ne trouvons pas Anton et Maria assis à table en train de discuter. Non, ils
sont au milieu du salon, en pleine démonstration de danse.
— Ensuite, ton personnage fait ça, dit Maria avant d’entamer une série de pas
plus complexes les uns que les autres.
Son corps dessine une vague, puis elle se déhanche, se baisse pour toucher le sol
et remonte en ondulant de nouveau de la tête aux pieds.
— Et là, on revient à « ride it, baby, ride », conclut-elle en frappant bruyamment
son talon par terre.
Anton répète ses mouvements, à la différence près que lorsque c’est lui, nous
sommes toutes les trois envoûtées. Il n’est vêtu que d’un pantalon en lin et son
pendentif en forme de cœur incrusté de diamants pend sur son torse. Il est
superbe. Une véritable œuvre d’art.
Heather se racle la gorge, et Anton et Maria nous regardent.
— Vous avez besoin de nous ? demande-t-elle d’une voix timide qui m’agace.
Je ne vois pas comment elle peut être crédible auprès de ces deux stars si elle
parle ainsi.
— Ce qu’Heather veut dire, c’est qu’elle travaillait sur certaines idées avec
l’ancien chorégraphe et qu’elle aimerait vous en faire part, je dis en posant un
regard insistant sur Anton.
Il penche la tête sur le côté, l’air confus, et j’écarquille les yeux pour qu’il
comprenne. Ça prend deux secondes, mais j’y parviens.
— Ah bon, H ? Pourquoi tu n’as rien dit avant ? demande-t-il en s’essuyant le
visage avec une serviette.

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— Anton, j’ai essayé de t’en parler plusieurs fois et tu m’as dit de voir ça avec le
chorégraphe. Tu as dit que tu attendais de voir le résultat final.
— Mi amiga*, dit Maria, puisque tu m’as engagée pour être la nouvelle
chorégraphe, pourquoi tu ne me parlerais pas de tes idées pendant qu’on dîne ? ¿
Suena bien ?
— Je pourrais nous faire livrer à manger ? je propose.
— Mais c’est mon boulot, ça, répond Heather en soupirant.
— Pas ce soir, non. Est-ce que tout le monde aime les sushis ? je demande en me
trémoussant.
Maria m’observe, pousse un grognement et chuchote en espagnol.
— Dios Mio. ¡ Que trabajo tengo* !
— Qu’est-ce qu’elle a dit ? je demande à Heather en désignant Maria d’un doigt
accusateur.
Le regard de la chorégraphe brille d’un éclat machiavélique.
— Détends-toi, répond Heather en me tendant sa carte bleue, elle a juste dit
qu’elle avait du pain sur la planche, rien de méchant.
— Je t’ai à l’œil, toi, je dis en fusillant Maria du regard.
Anton et elle éclatent de rire en partant vers la cuisine.
— Tu veux boire un verre, Mia ? demande Anton.
— Ouais, sers-moi ce que tu veux, ça m’ira.
Je tourne les talons et me dirige vers le salon. Je sors mon téléphone, ouvre
l’appli Deliveroo et choisis le premier sushi-shop avec des centaines d’avis et
une moyenne de cinq étoiles. Cerise sur le gâteau, la livraison est gratuite.
Miam, je meurs de faim !
*
* *
Une troisième tournée de martinis nous attend sur la table, préparés par mes
soins.
— Non, non, non, tu ne comprends pas ! s’exclame Heather en se levant et en
marchant jusqu’au milieu de la pièce. Dans ma tête, c’est un mélange de « Billie
Jean » de Michael Jackson et de « Uptown Girl » de Billy Joel.

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Maria relit ses notes en marquant le rythme avec sa tête alors que la nouvelle
chanson d’Anton passe en boucle.
— Si, si, je comprends. Mia doit montrer son matos comme ça, déclare la
chorégraphe en marchant avec un déhanché séducteur, et Anton doit la suivre à
la manière de Michael Jackson, avec des pas rapides mais en intégrant son style
hip-hop latin fusion.
Anton se précipite derrière Maria et imite ses mouvements. Quand elle se
déhanche, je la regarde de près parce qu’elle joue mon rôle.
— Tu vois Mia, viens ici.
Je me lève, un peu joyeuse, et j’essuie mes doigts couverts de vodka sur mon
jean. Elle se tourne et me prend par les hanches comme si elle était un homme
qui dansait avec moi.
— Maintenant, fais comme si je n’étais pas là et déhanche-toi quand je te tape
sur le côté.
Nous faisons quelques pas.
— Maintenant, penche-toi lentement en avant et touche tes pieds, comme si tu
allais refaire ton lacet. Ensuite, tu remontes en caressant tes jambes puis ta taille
et tes seins.
— Tan caliente*, murmure Anton alors que je fais ce qu’elle dit.
Il saisit mes hanches et frotte son bassin contre mes fesses. Il ne bande pas, mais
je panique et me retrouve soudain en nage.
— An-ton ! je gronde.
Ma lèvre tremble et je sais que ma peur se lit dans mes yeux car il retire aussitôt
ses mains.
— Désolé, muñeca*, dit-il.
Je lui fais face et pose ma main sur son torse.
— Non, c’est moi qui suis désolée. On ne fait que s’entraîner. Ça s’arrangera.
Promis.
Je ferme les yeux en silence, en priant pour arriver à surmonter cette étape, et
vite. Mon travail en dépend.
De l’autre côté de la pièce, mon téléphone m’annonce l’arrivée d’un message.
Anton lève le menton, m’indiquant qu’il m’accorde une pause.

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À : Mia Saunders
De : Wes Channing
Il est hors de question que je rate ton anniversaire. Faudra t’y faire. Je serai à
Miami dans une semaine. Je peux employer la manière forte ou la manière
douce, c’est comme tu préfères, ma belle. Mais tu ne pourras pas m’éviter.
Je réalise soudain que je ne suis pas seule à découvrir ce message, car Heather le
lit par-dessus mon épaule sans s’en cacher.
— Qui est Wes ? Ton copain ?
Qui est Wes ? Voilà une excellente question. Mon ami, mon amant, mon copain,
l’homme de mes rêves ? D’une certaine manière, il est tout ça à la fois, et plus
encore.
— Un ami, c’est sûr, mais c’est aussi mon copain, je suppose. Plus ou moins. On
n’a pas encore défini notre relation. On prend notre temps. Tu sais comment
c’est.
— Moi ? Euh, non. Je suis la reine des coups d’un soir. Avec mon boulot, je n’ai
pas de place pour une relation, même si j’espère connaître ça un jour.
Anton nous rejoint et prend Heather par les épaules.
— Oh, allez, H. Il y avait ce mec qui était dingue de toi, il y a deux semaines. Tu
te souviens ? Il a pété un câble quand je suis entré chez toi sans frapper.
— Je m’en souviens très bien, Anton, tu n’as pas besoin de me le rappeler.
Il éclate de rire et se frappe la cuisse.
— Tu chevauchais ce pauvre homme comme si c’était la fin du monde et que la
terre allait exploser. Qu’est-ce qui lui est arrivé ?
— Toi ! C’est toi qui lui es arrivé, Anton ! Comme Reece, et David, et Jonathan.
Chaque fois que je me rapproche d’un mec, tu fous tout en l’air avec tes requêtes
absurdes et tes visites surprises. Tu leur fais peur avant que j’aie eu la chance de
savoir s’ils me plaisent ou non, conclut-elle en faisant la moue.
— Tu es sérieuse ? s’exclame Anton. Tu me tiens pour responsable de ta
malchance en amour ?
Elle croise les bras et le fusille du regard.
— Bien sûr que je suis sérieuse ! Quand la plus grande star de hip-hop du pays
entre chez moi sans frapper et m’appelle « bébé », ça ne laisse pas la meilleure

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impression sur mes prétendants. Pourquoi je supporte ça, bon sang ? soupire-t-
elle en se massant les tempes.
Les épaules d’Anton s’affaissent et il soulève le menton de la jeune femme.
— H, Bébé, parle-moi.
— Tu veux que je te parle ?! Eh bien, je vais te parler. On m’a proposé un autre
job, et je crois que je vais l’accepter. Ça te va, comme conversation ? hurle-t-
elle.
— Quoi ?! Il est hors de question que tu me quittes !
Merde. Maria et moi reculons toutes les deux simultanément jusqu’à nous
cogner contre le plan de travail.
— J’en ai assez que tu ne m’écoutes pas et de stagner à mon poste !
Maria et moi buvons une gorgée en regardant la dispute se dérouler sous nos
yeux.
— T’écouter ? Tu es la seule que j’écoute ! rétorque-t-il. Et qu’est-ce que tu
veux dire par « stagner » ? Tu veux plus d’argent ? C’est comme si c’était fait !
La grimace d’Heather est si pleine de douleur que, même moi, je me sens
coupable.
— Tout n’est pas question d’argent, Anton ! Bon sang, tu es tellement énervant !
Elle passe sa main dans ses cheveux et fait un demi-tour sur elle-même pour
regarder l’océan par la baie vitrée.
— Peut-être qu’il est temps que je passe à autre chose, déclare-t-elle froidement.
Anton fait deux pas vers elle et pose ses mains sur ses épaules.
— Non. Je ne te laisserai pas partir.
— Tu n’as pas forcément le choix. C’est de ma vie qu’il s’agit, chuchote-t-elle
alors que ses yeux se remplissent de larmes.
— Tu es tout pour moi, Heather. Je ne peux travailler avec personne d’autre.
— Et moi, je ne peux plus être ton assistante.
— Tu n’es pas mon assistante, bon sang, rétorque-t-il en grimaçant. Oui, tu
t’occupes de moi, mais tu t’occupes de tout ! Qu’est-ce que tu veux de moi ?
Demande-moi, H, je te le donnerai. Je n’attendrai jamais mon objectif si tu n’es
pas à mes côtés.
Maria me met un petit coup d’épaule.

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— Ils baisent ?
À les entendre, j’aurais supposé la même chose, mais je sais que ce n’est pas le
cas et je secoue la tête.
— Peut-être qu’ils devraient, constate-t-elle.
— Non, c’est plus une compétition entre frère et sœur. Un peu comme une
dispute entre meilleurs amis. Tu as des amis, toi ?
Un sourire immense s’étend sur son visage, la rendant encore plus belle. Quelle
garce ! J’ai envie de la détester, mais elle est beaucoup trop cool et, à l’évidence,
elle a un sacré caractère. Et puis, elle est parfaitement professionnelle en plus
d’être douée pour ce qu’elle fait.
— J’ai trois âmes sœurs et je ferais tout pour ces pestes. Elles me rendent loca*.
Un peu comme ces deux, sauf qu’eux ne se sont jamais dit combien ils comptent
l’un pour l’autre. Ce que nous avons sous les yeux, c’est la conséquence de cette
erreur.
Nous nous taisons pour observer la suite de la dispute. Hélas, elle finit bien trop
vite lorsqu’Heather s’en va en claquant la porte derrière elle. Mince, on a raté le
meilleur, apparemment.
— ¡ Puta madre, que terca1 !
Je regarde Maria du coin de l’œil.
— Je pense qu’il est temps pour nous de partir.
Elle hoche la tête.
— Mieux vaut le laisser se défouler et libérer sa colère.
Nous sortons de la cuisine et de l’appartement en silence. Nous séjournons
toutes les deux dans les appartements réservés aux invités et sortons de
l’ascenseur au même étage. Maria part d’un côté, moi de l’autre.
— Eh, Maria ? j’appelle en me retournant vers elle.
— Ouais ?
— Tu crois que je vais réussir à jouer ce rôle ?
— Bien sûr. Puisque c’est moi ta prof, répond-elle en me lançant un clin d’œil.
Elle ouvre sa porte et me fait un signe de la main.
*
* *

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Le moteur vrombit sous mes fesses tandis que je sors du garage pour
m’engouffrer dans les rues de Miami. Anton est devant moi, sur l’Icone Sheene
noire. Il est vêtu d’un jean, d’un t-shirt blanc et d’un blouson en cuir noir. Moi,
j’ai ressorti mon jean porte-bonheur usé partout où il faut, c’est-à-dire sur les
fesses. D’ailleurs, mon cul est délicieux dans ce slim, et j’en ai parfaitement
conscience. J’ai tressé mes cheveux et rangé la natte dans le blouson en cuir que
je porte par-dessus mon t-shirt rouge des White Stripes. Gin et moi étions allées
les voir en concert à Las Vegas, à l’époque, et « Seven Nation Army » reste une
de mes chansons préférées.
Je suis aux commandes de la KTP Super Duke orange et noire. Elle ronronne
entre mes cuisses, caressant ma chair mieux que n’importe quel amant. Il y a
quelque chose de magnifique et de libérateur lorsqu’on est sur une moto.
Anton me fait des signes de la main pour me guider à travers Miami et South
Beach. Aux feux rouges, il me raconte ce qu’il sait des différents quartiers.
— C’est ici que les touristes et les locaux viennent remuer leur culos*, dit-il en
désignant la rangée de boîtes de nuit de la Washington Avenue.
Nous descendons ensuite Collins Avenue où il me montre les divers hôtels et
restaurants.
Bien évidemment, nous empruntons Ocean Drive où s’érigent les immeubles Art
déco qu’Heather m’a montrés quand je suis arrivée. De l’autre côté de l’avenue,
une étendue de pelouse et de palmiers descend jusqu’à la plage qui borde
l’océan.
Nous nous arrêtons à Gelato-Go, un glacier du quartier dont Anton est fan. Nous
entrons dans le petit troquet et je suis satisfaite qu’Anton ne soit pas reconnu.
C’est sans doute parce qu’il garde ses lunettes de soleil. Quant à moi, je les
relève pour étudier les différents parfums qui s’offrent à moi.
— Alors, un gelato, c’est comme de la glace ?
— Oui, mais à l’italienne. Ce n’est pas fait avec de la crème, mais du lait. C’est
aussi moins baratté, donc il y a moins d’air et c’est plus dense. Je le préfère
parce que les goûts sont plus forts et c’est moins mauvais pour la santé.
Je ne sais pas quoi choisir. Le chocolat est très foncé, ce qui me laisse penser
qu’il sera trop amer, comme les cannoli au chocolat qui sont servis dans les

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restos italiens. Beurk. Je déteste ça.
Un homme grand et maigre, les cheveux coiffés en arrière, vient vers moi. Il
porte un t-shirt sur lequel est écrit le nom du café et une étiquette avec son nom :
« Fresh Francesco ».
— Bella signora, comment puis-je vous aider ? demande-t-il avec un fort accent
italien.
— Je ne sais pas, mon ami…
Je désigne Anton, qui ressemble plus à Terminator, dans cette tenue, qu’à son
alter ego, le latin lover.
— … dit que vos gelati sont divins. Comme je n’en ai jamais mangé… quel
parfum pourriez-vous me recommander ?
— Oh, signora, vous allez tout aimer, répond le serveur en souriant. Elles sont
faites quotidiennement, ici même, et il y a moins de sucre et de crème que dans
les glaces américaines. Vous pouvez en manger tous les jours, vous garderez
quand même votre superbe ligne ! s’exclame-t-il en riant.
Je désigne le bac de glace verte avec des éclats.
— Ça, c’est quoi ?
— Ah, très bon choix, c’est notre célèbre gelato à la pistache ! Les noix nous
arrivent tout droit de Sicile !
— Elle est très bonne, chuchote Anton dans mon oreille, mais le goût est très
fort. Je te conseillerais plutôt quelque chose de simple. Tu aimes le caramel ?
— Il y a des gens qui n’aiment pas ?
Il rit doucement, et cela me fait penser au rire d’un autre beau gosse qui sera là
demain.
— Je crois que quatre-vingt-dix-neuf pour cent de la population aiment le
caramel. Et ceux qui disent le contraire mentent.
Francesco attend patiemment que nous discutions du mérite de chaque parfum.
Anton me déconseille la fraise, car ce serait trop banal. Quitte à essayer quelque
chose pour la première fois, autant sortir le grand jeu.
— Fresh Fran, je vais prendre le caramel dulce de leche, s’il te plaît.
— Excellent choix ! répond-il avant de remplir un bol énorme.

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— J’aurais dû vous dire que je voulais la plus petite taille, je dis en écarquillant
les yeux lorsqu’il me tend la glace.
— Tout le monde en redemande. Je vous fais gagner du temps.
— Si vous le dites.
— Je le dis.
Au moment de commander la sienne, Anton demande le parfum pistache, ce qui
m’agace au plus haut point. Pourquoi me le déconseiller si c’est pour le choisir
dans la foulée ?
— Enfoiré !
— Quoi ? demande-t-il en relevant ses lunettes et en enfournant une cuillère.
Hmmm, je pourrais le regarder manger de la glace toute la journée. Il est
superbe. Soudain, j’ai trop chaud. J’enlève mon blouson pour le poser sur le
dossier de ma chaise et Anton en fait de même.
Nous passons un moment en silence, à déguster le meilleur gelato du monde.
Bien sûr, je n’ai pas de point de comparaison, mais je ne peux imaginer quelque
chose de meilleur. La texture est merveilleusement soyeuse, comme un mélange
entre une glace et un yaourt glacé. Je suis fan.
— Qu’est-ce que tu vas faire à propos d’Heather ? Elle est toujours en colère ?
— Elle est folle de rage, tu veux dire. Elle me parle à peine. Je suis à court
d’idées, mais je ne peux pas la laisser partir.
— Et si elle en avait besoin ?
Il fronce les sourcils et grimace.
— Je suis déjà célèbre. En travaillant avec moi, elle gagne plus en renommée
qu’avec un débutant.
— Et tu es prêt à lui donner le credo qu’elle veut ?
— Le credo ?
— Oui, tu sais, le respect. Le titre.
— C’est ça, le problème ? Elle ne veut plus être mon assistante ?
Bon sang, il n’est vraiment pas très perspicace.
— Heather est intelligente, je déclare, et il hoche la tête. Elle est belle, j’ajoute,
et il acquiesce. Mais elle est bien plus que ton assistante. Tu as dit toi-même
qu’elle gérait tout.

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— Ouais, et alors ? Où tu veux en venir ?
Je plonge une cuillerée de gelato dans ma bouche et je le laisse fondre sur ma
langue.
— Je crois qu’elle veut être ta directrice artistique, ou ton agent, je ne sais pas
comment vous dites dans votre milieu. Si elle gère tes concerts, ton équipe et
qu’elle s’occupe de toi, alors elle fait déjà le boulot sans bénéficier du salaire, du
respect et du titre. Et elle galère à tout faire toute seule. C’est peut-être elle qui a
besoin d’une assistante ! je m’exclame en éclatant de rire.
Il lève les mains et se frotte le visage, trahissant sa frustration.
— Tu as raison, Mia. Jesus, tienes razón*.
— Heather n’a pas de vie en dehors de toi. Tu sais, tu es son seul ami. Et sa
seule famille. Tu es son meilleur ami, Anton.
— Elle a dit ça ?
Je hoche la tête.
— Bon sang, mais Heather a toujours été ma meilleure amie, à moi aussi.
— Tu le lui as déjà dit ?
— J’ai supposé qu’elle le savait, dit-il d’un ton qui révèle combien le malheur de
son amie l’attriste.
— Ma meilleure amie sait que je l’aime, mais ça ne m’empêche pas de le lui dire
régulièrement, tu sais.
Il prend son pot de gelato et le jette à la poubelle alors qu’il n’est pas fini. Il me
regarde en fronçant les sourcils et me fait signe de le suivre.
— Allons-y. Tu dois répéter, et je dois parler à Heather.
Je m’imagine sauter en l’air et m’accroupir par terre comme les joueurs de
football américain après un touchdown. Je remonte sur la Super Duke et je passe
le trajet du retour à faire une danse de la victoire dans ma tête.

1. Quelle tête de mule !

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Chapitre 6

— Encore ! s’écrie Maria. Non. Arrête la musique, dit-elle en levant la


main.
Je suis debout dans un coin, attendant qu’elle me crie dessus à mon tour. J’ai
répété la même scène toute la journée. En réalité, je me contente surtout de
marcher de façon ultra-sexy, puis je m’arrête et me déhanche d’un côté et de
l’autre. Ensuite, je me baisse, je remonte, je remue mes seins et je me cambre.
Anton est censé faire sa chorégraphie derrière moi avec les danseurs. L’idée est
que certains de nos pas se répondent. Ce n’est rien à côté de ce que Maria fait
faire aux danseurs, et je suis épuisée. J’ai besoin d’une douche, d’un bon repas
et, surtout, d’une bonne nuit de sommeil. Demain, Anton m’a donné ma journée
pour mon anniversaire, ce qui signifie que Wes débarque.
Je suis à la fois excitée et angoissée que mon surfeur réalisateur arrive. Je meurs
tellement d’envie de le voir que c’en est douloureux, mais je ne veux pas qu’il
me brise le cœur lorsque je lui dirai que je veux que nous soyons exclusifs.
Cela implique qu’il dise adieu à Gina DeLuca. Finis les plans cul avec l’actrice
la plus belle du pays. Il me suffit de penser à elle pour être verte de jalousie. Or,
si Wes et moi voulons que ça marche entre nous, nous devons nous engager.
Merde. S’engager. Voilà un mot que je n’ai pas prononcé depuis longtemps
concernant un homme, parce que je me suis fait avoir à chaque fois.
— Mia, hermosa*, viens ici, dit Maria en désignant la croix noire dessinée par
terre.
C’est là que je dois m’arrêter et me déhancher contre Anton. La chorégraphe
s’est assurée que je connaisse le nombre précis de pas qu’il me faut pour y
arriver, ce que je dois faire de mes membres et où les autres danseurs seront

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placés par rapport à moi. Dans la chorégraphie qu’elle et Heather ont mise au
point, tous les danseurs me courent après, bougeant autour de moi pendant que je
marche, m’assieds ou m’adosse à un mur. J’ai plusieurs enchaînements à
connaître, mais j’ai déjà appris la plupart. Maria est infiniment gentille et
patiente. Chaque fois que je me trompe, les autres danseurs grimacent parce
qu’ils savent qu’ils doivent reprendre au début, mais cela ne semble poser aucun
problème à Maria, qui les fait recommencer encore et encore.
— Reprenons, me dit Maria en jouant le rôle d’Anton. Quant à vous, dit-elle aux
autres, je ne fais pas ça parce que Mia a besoin d’aide. Vous devez tous vous
améliorer. Je me fiche que vous soyez fatigués. Je me fiche que vous soyez
courbaturés et que vous ayez mal aux pieds. Vous voulez être dans le plus grand
clip de hip-hop de l’année ? C’est le prix à payer, déclare-t-elle en les fusillant
du regard. Trabajad*. Il faut bosser ! Maintenant, Mia, reprends au début.
Je retourne dans mon coin, gonfle mes poumons, ferme les yeux et visualise mon
objectif. C’est mon premier clip vidéo, et mon visage sera sur les écrans du
monde entier.
Tu gères, meuf. Fais-le pour Maria, pour les danseurs, pour Anton et… qu’est-
ce que je dis ? Fais-le pour toi !
La musique reprend, les lumières se tamisent et je me déhanche en balançant
mes épaules d’un côté et de l’autre. C’est très Jessica Rabbit en fait. Lorsque
j’entends le signal de la chanson, je traverse la piste de danse.
J’ai à peine fait cinq pas que, soudain, deux mains puissantes saisissent mes
hanches.
La basse est plus forte. Je ferme les yeux et je donne tout, cambrant mon dos,
laissant Anton se frotter contre moi. Je saisis sa nuque, et son parfum de noix de
coco m’enveloppe dans un cocon de plaisir et de détente.
Tout à coup, il me retourne vers lui. Son corps dessine une vague contre moi.
Nous nous cambrons tous les deux, mais Anton tombe par terre avec les autres
danseurs, comme si je l’avais assommé avec mon corps. Il se redresse sur les
genoux et met des coups de bassin vers moi, affirmant sa virilité.
Ride it baby, ride1… Coup de bassin.
With me, I’ll go all night2…

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Let me do you right3… Coup de bassin.
And ride it baby, ride4…
Ses mouvements sont parfaitement alignés avec la musique. Vers la fin de la
chanson, Anton fait un truc de Ninja où il rebondit du mur et atterrit sur ses
pieds devant moi. Il s’agenouille en relevant une jambe, m’attire à lui et m’étend
sur son genou en m’obligeant à me cambrer douloureusement. Puis il s’empare
de ma bouche et y dépose un baiser.
C’est alors que les ténèbres m’engloutissent… encore une fois.

Je commence à me débattre, mais j’ai peu de moyens. Je parviens à lui mettre un
coup de poing dans la bouche, fendant sa lèvre inférieure, mais il saisit mes
mains dans une des siennes et pelote mon corps avec l’autre. Des gouttes rouge
vif coulent sur son menton et ses dents prennent une couleur nauséabonde. Il
m’écrase contre le mur et je sens la peau de mon dos s’irriter tandis qu’il se
frotte à moi.
J’essaie de crier, mais il plaque sa bouche sur la mienne pour me mordre, et
mon cri n’est plus qu’un borborygme inaudible. Je m’efforce toujours de me
faire entendre quand j’entends sa ceinture et sa braguette s’ouvrir, dent après
dent, comme si cela se déroulait au ralenti. Je hurle plus fort, mais il frappe ma
tête contre le mur. J’y vois flou et ma tête paraît lourde. Je sens qu’il remonte
ma robe sur ma taille et l’air frais chatouille ma chair nue. Des tourbillons de
lumière dansent devant mes yeux. Je cligne des yeux plusieurs fois, essayant de
ne pas perdre connaissance. Je sens ses doigts descendre sur mon ventre pour
empoigner brusquement mon sexe. Un sanglot m’échappe alors que la bile
remonte dans ma gorge, me brûlant l’œsophage.
— Je vais te prendre tellement fort. Je vais te tringler comme la pute que t’es,
espèce de salope, gronde-t-il en crachant sur mon visage.
C’est cet homme qui m’a touchée pendant que je dormais et qui n’a pas montré
le moindre remords. Aaron Shipley, sénateur de Californie, est sur le point de
me violer. Ici, en public, alors qu’une fête immense bat son plein à quelques
dizaines de mètres.
Je sens son gland contre ma cuisse quand il se frotte contre moi.

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— Non, je chuchote en secouant la tête.
Je n’ai pour réponse qu’un sourire glaçant. Il remet sa main sur ma bouche
alors que je hurle de toutes mes forces. Je mords sa main et découvre un goût de
sel et de sang. Il pousse un juron et cogne de nouveau ma tête contre le mur.
Mes jambes cèdent et je m’affaisse lentement, comme si je ne pesais rien. Les
ténèbres s’apprêtent à m’engloutir, et ma dernière pensée est que cet homme va
me violer.

— Ne me touche pas ! je hurle aussi fort que je peux.
— Mia, non, non ! Lo siento*. Lo siento*. Je suis désolé. Lucita*, reviens-moi.
Merde !
Je reviens sur terre et découvre qu’Anton tient ma tête. J’ai un haut-le-cœur et
me dépêche de courir à la poubelle la plus proche pour y régurgiter mon repas.
Maria vient à moi et tient mes cheveux, chuchotant des mots doux à mon oreille.
Lorsque j’ai fini, une bouteille d’eau et une serviette apparaissent dans ma main.
J’avale plusieurs longues gorgées, mais elles me font l’effet de lames de rasoir.
Maria m’observe avec un regard sombre et glacial. Elle prend ma main et
m’emmène dans une petite pièce adjacente au studio de danse.
— Qui te fait du mal ? Je connais des gens très riches qui ne toléreront pas
qu’une femme souffre.
— Non, Maria, ce n’est pas ce que tu penses, je réponds en secouant la tête.
— Ah bon ? me défie-t-elle en penchant la tête sur le côté. Parce que j’ai
l’impression que quelqu’un t’a fait tellement de mal pour que tu aies encore des
flash-back. Sans parler du fait que tu te crispes chaque fois qu’un des danseurs
ou Anton te touche. Alors dis-moi, je me trompe ? J’ai tout imaginé ? Je sais à
quoi ressemble une femme battue, hermosa*, parce que j’en étais une. Pendant
des années. Je ne peux pas accepter que ça t’arrive et mes amis ne le toléreront
pas non plus. D’ailleurs, Anton non plus.
Je coiffe mes cheveux en arrière et j’inspire lentement en la regardant dans les
yeux.
— Anton est au courant. Personne ne peut rien y faire. Le problème est réglé.

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Je ne mens pas vraiment, car techniquement, le problème a été résolu. Ce que
j’ai du mal à accepter, c’est la façon dont la situation a été gérée.
— Explique-moi, Mia, parce que je suis folle de rage. Parle-moi. Même si ça te
fait du mal, même si tu pleures ou que tu as envie de frapper quelque chose. Il
faut que ça sorte. Tu ne peux pas garder ça enfoui. Crois-moi, je l’ai vécu, et j’en
suis sortie plus forte.
Son discours est comme une bénédiction et je sais qu’elle me dit la vérité. Elle
est convaincue que je peux aller mieux si je lui parle.
— Mon dernier client avait un fils qui m’a agressée, sexuellement et
physiquement, et j’ai passé plusieurs jours à l’hôpital.
Elle écarquille les yeux, ses pupilles noircissent.
— J’apprends à vivre avec ça, mais je ne réagis pas bien lorsqu’on me touche.
C’est bizarre. En réalité, je ne comprends pas.
Maria s’assied sur le bureau à côté de moi.
— Ce n’est pas bizarre. Ta confiance dans le sexe opposé a été trahie et il te
faudra du temps pour la retrouver. Si Anton est au courant, alors il n’aurait pas
dû t’embrasser et te tenir comme ça.
— Mais on y travaille, avec Anton. Quand on danse, ça ne me dérange pas,
même s’il me tient. Or, dès qu’il m’a mise sur lui, comme ça, et qu’il m’a
embrassée, je… je me suis retrouvée plongée dans les événements de cette nuit-
là.
Elle hoche la tête et me prend par la taille.
— Tout d’abord, Anton n’aurait pas dû faire ce qu’il a fait.
J’essaie de l’interrompre, mais elle lève la main pour me dire de me taire.
— Non, il connaît ton problème, et il t’a mise dans une position sexuelle dans
laquelle tu étais vulnérable. Ce n’était pas malin. Je vais lui toucher un mot à
propos de ses improvisations. Cette scène n’était pas prévue. D’ailleurs, ce
cabron* n’est pas censé obtenir la séductrice. Tout le but du clip est qu’elle est
hors de portée ! s’exclame-t-elle, indignée.
— Il s’est sans doute laissé happer par le moment, je réponds en souriant
timidement.

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— Ouais, ouais. Eh ben, il va avoir affaire à moi. Ça va aller, dit-elle en serrant
mon épaule. Il va te falloir du temps. Tu devrais en parler à un psy, même si
c’est déjà une bonne chose d’en parler à Anton, à moi et à d’autres proches.
Je pense à Ginelle et je me dis que je dois lui raconter ce qui s’est passé, au lieu
de balayer ça sous le tapis et de faire comme si de rien n’était. Elle doit tout
savoir, car j’aurai peut-être besoin de me confier à elle à l’avenir. Elle sera en
colère, c’est certain. Furieuse, même. Elle aura des envies de meurtre, mais elle
m’écoutera. Elle me laissera vider mon sac et elle m’aidera à tourner la page.
Voilà ce que je dois faire. Je l’appellerai dès ce soir.
— Bon, tu connais la chorégraphie, et tu es en congé demain. Pourquoi tu ne vas
pas te reposer chez toi ? Tu veux qu’on dîne ensemble, ce soir ?
— Je suis désolée, Maria, mais je suis crevée. J’ai envie de prendre un bain, de
me faire une tartine au beurre de cacahuète et de m’endormir devant la télé. Tu
as une idée de ce que tu nous fais faire ? Et c’est moi qui dis ça alors que je ne
fais rien à côté des autres danseurs !
La colère disparaît de ses yeux bleus, remplacée par une joie machiavélique.
— Ça fait du bien de travailler dur. Tu apprécieras encore plus le résultat final,
tu verras.
Elle prend mon bras et nous retournons dans le studio, où Anton fait les cent pas
devant la porte.
— Lucita* ! Je me suis laissé emporter. Lo siento*. Je t’en supplie, pardonne-
moi.
Il a l’air terriblement triste, comme s’il avait commis un crime horrible. Or, ce
n’est pas le cas. Certes, il a été un peu trop loin, mais c’était naturel étant donné
l’ambiance dans la pièce et la chorégraphie que nous faisions. Si j’étais normale,
ç’aurait été amusant. Je l’aurais sans doute initié, d’ailleurs.
— Anton, sérieusement, tout va bien.
Je marche vers lui avec les bras ouverts et il vient s’y blottir. Quand ses mains ne
sont pas sur moi, il m’est facile d’être en contact avec lui. C’est même
confortable.
— Tu peux me prendre dans tes bras, je lui dis.

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Il me serre fort contre lui et l’angoisse reparaît, comme toujours, mais je la
refoule. Anton est un mec bien, avec un grand cœur. Il a fait une bêtise qui n’en
serait pas une si je n’avais pas été victime d’une agression il y a peu de temps.
— Je suis désolé, Mia. Ça ne se reproduira plus, chuchote-t-il dans mon oreille
avant de me libérer.
Maria frappe dans ses mains pour attirer l’attention de tout le monde.
— C’est tout pour aujourd’hui ! Rentrez chez vous. Demain, vous êtes en congé,
puis on enchaînera avec deux jours de répétition pour que les chorégraphies
soient parfaites. Ensuite, on filme !
Les dix danseurs sifflent et poussent des cris de joie en se tapant dans les mains.
— Tu es sûre que ça va aller ? demande Anton au moment où Heather entre dans
le studio.
Elle remarque nos postures et fronce les sourcils, alors je lui souris. Elle s’arrête
à deux mètres de nous, croise les bras et fusille Anton du regard.
— On m’a dit que tu voulais me parler ?
— Tu parles d’un accueil chaleureux ! murmure le chanteur.
J’éclate de rire et je le prends une dernière fois dans mes bras.
— Tu veux dîner au resto ?
— Non, je vais manger chez moi ce soir. J’ai besoin de repos et d’un long bain
pour détendre mes muscles endoloris ! je crie pour que Maria l’entende.
Elle pouffe de rire, clairement ravie. Bon sang, cette nana est méga-cool. Je me
demande si elle a un mec ? Je pourrais lui présenter Alec, elle le kifferait.
Comme je l’ai kiffé de nombreuses fois.
Attention, plus d’Alec, Mia !
Je soupire et m’avance vers Heather.
— Vas-y doucement, ma belle. Anton n’est peut-être pas perspicace, mais il
t’aime comme une sœur. Laisse-lui le bénéfice du doute, d’accord ?
Je recule et la tiens à bout de bras, regardant ses yeux se remplir de larmes alors
qu’elle hoche la tête.
— Ok. Alors fonce ! je m’exclame en lui mettant une fessée.
— Aïe ! Espèce de garce ! s’écrie-t-elle en riant.
Je passe ma main dans mon dos pour lui faire un doigt d’honneur.

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— À demain, pouffiasse !
Derrière moi, je l’entends parler à Anton d’une voix outrée.
— Tu as entendu ?
Anton éclate de rire et j’entends un cri surpris. Je me retourne et je vois Anton
serrer Heather dans ses bras.
— Ne me quitte pas, H. J’ai besoin de toi.
— Tu n’as pas besoin de moi.
— Bien sûr que si ! Tu prends soin de moi !
J’attends un peu pour voir ce qu’elle répond.
— Ouais, tu sais quoi ? C’est vrai. Il est temps que tu t’en rendes compte et que
tu réagisses, sinon je m’en vais.
— Tu peux partir, mais je te courrai après. Personne ne me vole ma manager,
grogne-t-il.
— Ta manager ?
— Exactement. Si des gens veulent que je fasse un concert chez eux, ils
s’adressent à ma manager. S’ils veulent que j’assiste à des remises de prix, ils
s’adressent à ma manager. Et cette manager, chica*, c’est toi. Dorénavant,
Heather Renee est la manager du latin lover.
— Alors, j’ai droit à une augmentation ? demande-t-elle en faisant les cent pas
devant lui.
— Bien sûr, H. Que dis-tu de prendre quinze pour cent sur chacun de mes
concerts ?
Maria siffle en haussant les sourcils.
— Tu es sérieux ?
— Si tu me déniches du boulot, tu mérites d’être payée. Je me suis renseigné,
H. C’est parfaitement justifié. Et quand on voyage, tes frais sont pris en charge.
Ton nom apparaîtra sur les albums, tout ce que tu veux. Alors… on a un deal, ou
non ? demande-t-il en lui tendant la main.
Les yeux d’Heather sont plus grands que jamais. Elle ouvre la bouche et la
referme, comme si elle cherchait sa voix.
— Mais… mais… mais, c’est trop.

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— Non, pas du tout. Je ne veux pas te perdre, H. Maintenant, tu me serres la
main ou tu vas me laisser crever la gueule ouverte ?
Heather tend une main tremblante et Anton n’hésite pas à l’attirer dans ses bras.
— Je t’aime, H, n’en doute jamais. Tu es la femme la plus talentueuse que je
connaisse. C’est grâce à toi que je réussis, parce que ma sœur, mi hermana*, ma
meilleure amie, est là pour s’assurer que je vais bien. Parce que tu nous dégotes
les meilleurs contrats. Je suis désolé de ne pas l’avoir compris plus tôt.
Elle renifle dans son cou et autorise enfin les larmes à couler le long de ses
joues. De mon côté, je suis presque aussi émue qu’elle.
— H, il va falloir trouver une assistante parce que tu vas être trop occupée avec
tes nouvelles responsabilités. Oooh, on devrait embaucher une petite
Portoricaine sexy, non ?
— C’est mort ! Non ! Tu ne tiendras pas cinq secondes avant de te la taper. Je
vais embaucher un homme gay ! Fin de la discussion. Comme ça, rien ne nous
distraira !
— T’es pas drôle, bougonne Anton. Maintenant, est-ce que tu peux appeler le
bastardo* qui voulait que tu me trahisses et lui dire que tu as été promue et qu’il
aille se faire foutre ? Si je vois ce hijo de puta*, il est mort.
— Il est super-sympa, en fait, répond Heather.
Anton tourne brusquement la tête vers elle et la dévisage en montrant les dents.
— D’accord, d’accord ! Je vais lui dire que je ne suis pas intéressée.
Le regard d’Anton s’adoucit et il sourit.
Je sors du studio sur la pointe des pieds, satisfaite que tout soit redevenu normal,
du moins dans le monde d’Anton et Heather. Reste à voir comment les choses
vont se dérouler avec Weston.

1. Chevauche-la, Bébé, chevauche-la…


2. Avec moi, j’irai toute la nuit…
3. Laisse-moi te donner du plaisir…
4. Et chevauche-la, Bébé, chevauche-la…

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Chapitre 7

Je m’étudie dans le miroir et décide que cette tenue fera l’affaire. Le haut de ma
robe noire est moulant et coupé comme un marcel, et le bas fluide et évasé
m’arrive à quelques centimètres du genou. Elle est mignonne. Je me regarde de
dos puis de face une dernière fois. Je me sens sexy, jeune, branchée, mais surtout
je me sens moi-même. Au lieu de mettre des talons compensés, je reste pieds
nus. Wes sera bientôt là, et je ne sais pas ce qu’il a prévu. Allons-nous parler ?
Nous sauter dessus ? Est-ce que ce sera bizarre, étant donné que c’est la
première fois que nous nous revoyons depuis notre sauterie en mars ?
Sauterie ? Je me surprends à grimacer. Cela fait un peu trop « salope » à mon
goût, et Wes me gronderait sûrement s’il m’entendait. Il considère sans doute
que notre partie de jambes en l’air est logique, pour des amis qui se font du bien.
D’ailleurs, cela me fait penser à une conversation que nous avons eue il y a
longtemps.
— À quoi trinquons-nous ?
— À l’amitié ? répond-il en souriant avant de poser sa main chaude bien trop
haut sur ma cuisse pour que nous puissions parler d’amitié. Aux bons amis,
ajoute-t-il en regardant ma bouche.
— Des amis qui se veulent du bien ? je demande en haussant un sourcil.
Je croise les jambes et sa main remonte sur ma cuisse. Il plonge son regard dans
le mien et mon sang s’embrase.
— Bon sang, je l’espère, chuchote-t-il en approchant son visage.
C’était le début. Jamais je ne me serais doutée que notre histoire évoluerait ainsi.
Au cours du mois qui a suivi, notre amitié s’est intensifiée et je me suis laissée

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vivre pour la première fois de ma vie. Surtout… j’ai commencé à tomber
amoureuse.
La sonnette résonne dans tout l’appartement et interrompt mes pensées. J’inspire
profondément, je me tiens droite et j’ouvre la porte. Le voilà, bronzé, cool,
sublimissime. La perfection incarnée.
— Wes…
Je n’ai que le temps de dire son prénom. Il pose une main sur mon ventre et me
pousse en arrière. Il laisse tomber son sac, ferme la porte d’un coup de pied et
m’attire dans ses bras. Sa bouche s’empare de la mienne et sa langue au goût de
menthe plonge entre mes lèvres. Je retiens mon souffle tandis que nos langues se
caressent, cherchant à se souvenir. Nos mains se promènent sur le corps de
l’autre, se remémorant les moments passés.
Quelques secondes plus tard, je suis adossée à la porte, les jambes autour de sa
taille. Il empoigne mes fesses et j’enfouis mes mains dans ses cheveux, le tenant
fort contre moi, m’acharnant sur sa bouche comme si c’était ma première gorgée
d’eau après des jours dans le désert. Ses lèvres ont un goût de menthe et
d’alcool, de mojito. Je souris et mordille sa lèvre, lui arrachant un grognement. Il
presse son érection sur mon clitoris, et un cri m’échappe. Je romps le baiser et
cherche ma respiration alors que sa bouche parcourt mon cou, suçant, mordant,
léchant.
— Je ne me lasserai jamais de ton goût. Putain, tes seins…
Son grognement est étouffé lorsqu’il dévore ma poitrine après avoir baissé le
décolleté de ma robe.
— J’ai besoin de toi, je murmure d’un souffle rauque.
J’entends vaguement la dentelle de mon string se déchirer, il me griffe en
voulant l’enlever à toute vitesse. Il me plaque plus fort contre la porte et je gémis
lorsqu’il défait sa braguette et que je sens ses phalanges sur ma chair mouillée.
— Je vais te prendre de toutes mes forces, te refaire mienne.
Il mord ma lèvre et saisit ma fesse d’une main tandis que l’autre remonte dans
mon dos pour agripper mon épaule.
— Putain, Mia, grogne-t-il en plongeant son sexe en moi.
— Oh, oh, mon Dieu…

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Ma tête me semble légère tout en étant pleine d’un plaisir intense. Tout mon
corps se contracte, déjà prêt à jouir. C’est si rapide avec Wes. Chaque fois qu’il
se retire et me pénètre de nouveau, il m’écarte un peu plus et des frissons
électrisés parcourent mes veines.
— Je vais jouir… je le préviens.
— Déjà ? demande-t-il d’une voix rauque en léchant ma gorge. Putain, je sais
que j’ai manqué à ta chatte, elle me serre tellement fort. Tellement. Fort. Tu. Es.
Toute. À. Moi.
Sa déclaration, ainsi qu’un dernier aller-retour qui écrase mon clito, me font
franchir la ligne. Je me crispe et m’accroche à Wes en criant alors qu’il accélère
les va-et-vient jusqu’à ce qu’il jouisse aussi. Il s’enfonce profondément en moi
et y reste, laissant mon corps laper toute sa semence.
Quelques secondes plus tard, nos souffles se calment et je sors sa tête de là où il
l’a nichée dans le creux de mon cou. Je le regarde dans les yeux et il m’offre un
sourire langoureux.
— Salut, Bébé. Tu m’as manqué, je dis d’un ton légèrement timide.
Il glousse et frotte son front contre le mien.
— Ça, je l’avais compris. À l’évidence, je ne t’ai pas manqué autant que toi
puisque c’est moi qui t’ai attaquée le premier.
Je souris jusqu’aux oreilles et l’embrasse en déversant dans le baiser toute ma
joie de le retrouver et tous mes regrets d’avoir passé tant de temps loin de lui.
— Ouais, mais j’étais plus que partante, je dis en contractant mon sexe autour du
sien.
Je lui fais un clin d’œil en enlevant mes jambes de ses hanches et en grognant
lorsque notre lien est rompu.
— Tu veux boire quelque chose ? Faire une sieste ? Remettre le couvert ?
Il glousse, et ce bruit vibre en moi comme une grosse caisse de batterie. J’adore
l’entendre rire.
— Je me disais qu’on pouvait se doucher, manger, remettre le couvert et faire
une sieste.
— Maintenant que tu le dis, je suis affamée, je réponds en lissant ma jupe.

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Sans doute parce que j’étais trop nerveuse à l’idée de revoir Wes et que je n’ai
rien pu avaler.
— Et si je commandais à manger pendant que tu te douches ?
— Je pensais me doucher avec toi, Chérie, répond-il en fronçant les sourcils.
— Mais, dans ce cas, on n’arrivera jamais à la partie « repas » de ton plan.
Je penche la tête sur le côté et pose une main sur ma hanche. Il observe ma
posture, sourit et secoue la tête.
— La douche est par là ? il demande en désignant le fond de l’appartement.
— Ouaip. Je commande à manger. Va laver la crasse du voyage et, euh, tu
sais… je bégaie en désignant son entrejambe.
— Ma queue ? Tu veux qu’elle soit propre, Chérie ?
Il sourit à pleines dents, et c’est tellement sexy que ma chatte se contracte. Je
gigote et serre les cuisses, feignant de ne pas être affectée par cette discussion
cochonne.
— Tu peux avoir une bite sale, si tu veux, mais je ne vais pas la prendre dans ma
bouche après six heures de vol et une baise rapide contre la porte. Va te doucher,
comme ça, on pourra parler.
Il tourne les talons et file vers la salle de bains.
— Du moment que par « parler » tu entends que je passe mon temps entre tes
jambes avec « ça », dit-il en empoignant son paquet, et ça, ajoute-t-il en remuant
les doigts, ou encore ça, conclut-il en tapotant sa bouche, alors ça me va !
Je lève les yeux au ciel et l’ignore pour qu’il s’en aille, même s’il sait qu’il m’a
déjà excitée de nouveau. Cependant, je sens alors le mélange de nos essences
glisser à l’intérieur de mes cuisses. Merde. Il a déchiré ma culotte et je n’ai plus
de barrière, il me faut une serviette. Peut-être que je devrais le rejoindre sous la
douche ?
*
* *
Le ventre plein des meilleurs sushis de Miami, Wes et moi nous blottissons sur
le canapé pour profiter de la compagnie l’un et de l’autre. Il caresse
mécaniquement mes cheveux, que j’ai laissés sécher à l’air libre pendant que
nous mangions. Je ne me souviens pas d’avoir déjà été aussi à l’aise avec un

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homme pour qui j’ai des sentiments. Avec Wes, il n’y a pas d’exigences, pas de
stress, pas de mélodrame.
C’est agréable. Plus qu’agréable, d’ailleurs.
Sans prévenir, Wes se lève et prend ma main. Je me laisse faire parce que… je le
suivrais n’importe où. Il m’emmène dans la chambre et me tourne face à la
fenêtre donnant sur l’océan et le ciel teinté de rose, d’orange et de bleu dans
lequel le soleil se couche lentement. Je repense toujours au temps que nous
avons passé ensemble lorsque je me retrouve face aux vagues.
— Demain matin, on ira surfer, dit Wes en posant ses mains sur mon ventre et en
me ramenant contre son corps.
— Ce serait génial, je réponds en m’appuyant contre lui.
Il fredonne dans mon cou et glisse ses doigts sous les bretelles de ma robe que
j’ai remise sans soutif après la douche. Il baisse le tissu le long de mes bras pour
la faire tomber à mes pieds, puis il pose ses mains sur ma taille et remonte
lentement sur ma cage thoracique. Ma peau se couvre de chair de poule et je
frissonne. Ses larges mains s’emparent de mes seins et je ferme les yeux en
retenant mon souffle.
— Ils m’ont manqué. Tu as les plus beaux seins que j’aie jamais vus, chuchote-t-
il en déposant une série de baisers sur mon épaule. Les plus beaux que j’aie
touchés.
Il les palpe et les masse lentement, et bientôt j’avance et recule mon bassin sans
m’en rendre compte.
— Ils sont si sensibles quand on les touche.
— Seulement quand tu les touches, je marmonne en frottant ma tête contre ses
pectoraux.
— C’est vrai, ça ?
Je me concentre sur la sensation légère de ses doigts sur mes seins et mes tétons.
Une vague de chaleur envahit peu à peu mes veines, depuis la pointe dure de
mes seins jusqu’à mon ventre avant de se concentrer entre mes cuisses.
Lorsqu’il parle de nouveau, il me coupe le souffle en me rappelant une des plus
belles nuits de ma vie.

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— Règle numéro un, commence-t-il en me faisant sourire jusqu’aux oreilles,
nous allons baiser comme des lapins durant les trois prochains jours.
Trois jours ? Il pince fort mes tétons, mettant fin à toute forme de pensée. Je
pousse un cri essoufflé, folle de joie d’être dans ses bras après tout ce temps.
Toute ma peur et mes angoisses disparaissent lorsque je suis avec cet homme.
Ses caresses sont les seules dont j’ai besoin, dont je meurs d’envie. Mon
entrejambe se contracte sur du vide. J’ai besoin de l’y sentir, qu’il m’emmène au
septième ciel.
— Je me souviens de cette règle, je susurre en reculant contre lui, frottant mes
fesses à son érection.
Nous avons beau nous être envoyés en l’air tout à l’heure, nous avons plusieurs
mois à rattraper.
Wes ricane et réagit en pinçant de nouveau mes tétons. Des frissons d’électricité
s’engouffrent dans mes veines pour se précipiter dans mon clitoris pulsant et
désespéré.
— Règle numéro deux, poursuit-il, nous sommes exclusifs.
Cette fois-ci, j’éclate de rire, mais il se venge en griffant la peau sous mes seins.
Je gémis et tremble dans ses bras.
— Je me souviens aussi de celle-là. La dernière fois, c’était pour un mois. C’est
pour combien de temps, cette fois ?
Ma poitrine se serre et je me demande s’il ressent la tension qui envahit soudain
la pièce. Il ne sait pas encore que les choses ont changé pour moi.
— Indéfiniment, répond-il d’une voix rauque, faisant vibrer ma colonne
vertébrale.
Ses dents raclent mon épaule et il me mord au même endroit qu’Aaron. Je
m’attends à être propulsée dans ces souvenirs sordides, mais mon corps
frissonne de plaisir sous ses mains expertes.
— Ça veut dire que tu ne vois plus ton autre amie ?
Je ferme les yeux, attendant, retenant mon souffle, trop effrayée pour espérer que
mon vœu soit exaucé. Par le passé, jamais les hommes dont je tombais
amoureuse ne m’ont rendue heureuse. Jamais. Faut croire que c’est dans mes
gènes. Avec Wes, je n’ai qu’une envie, démolir cette peur de l’inconnu et faire

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de nouveau confiance à un homme. Déverrouiller mon cœur, le garder grand
ouvert et laisser Wes entrer.
— Je ne la vois plus depuis qu’on a baisé au téléphone.
C’était il y a un mois. Waouh, il est vraiment sérieux ! J’en ai la chair de poule.
— Règle numéro trois : nous dormons toujours dans le même lit. On ne veut pas
se tromper sur la nature de cette relation.
Je me frotte à sa queue jusqu’à ce qu’il grogne. Il saisit mes hanches et dessine
des cercles avec son sexe sur mes fesses.
— Mmm, je murmure. Et comment définirais-tu notre relation, maintenant ?
J’ai de plus en plus de mal à parler parce qu’il est dur comme fer et que mon
string est trempé. Wes recule le bassin, et le manque est si soudain que je suis à
deux doigts de pleurer. J’essaie de protester, mais il penche ma tête sur le côté et
se blottit dans le creux de mon cou.
— Ma belle… Toi et moi… c’est le paradis. Dorénavant, où que tu ailles, quoi
que tu doives faire d’ici la fin de l’année, ce paradis t’attendra et je t’y
accueillerai à bras ouverts.
Le paradis. C’est vrai. Le mois que nous avons passé ensemble, notre nuit à
Chicago, ainsi que tous nos appels et nos messages étaient divins. Avec lui, je
suis moi-même et je suis heureuse.
— Et la quatrième règle ? je demande, à bout de souffle.
Voilà la question cruciale. Il y a plus de six mois, il établissait ces règles pour la
première fois. La quatrième règle était que nous ne tomberions pas amoureux.
Mon cœur bat la chamade. Je me cambre comme un chat, et il caresse mes tétons
avec une dévotion que je n’ai pas connue depuis longtemps. Wes ne répond pas.
Un mélange d’inquiétude, de panique et de désespoir envahit mon âme et je me
retourne, m’accrochant à son cou, plongeant mes mains dans ses cheveux,
l’obligeant à baisser la tête pour me regarder. Un sourire plein de tendresse se
dessine sur son visage et je le serre plus fort encore.
— La règle numéro quatre ? Je l’ai enfreinte il y a six mois quand je suis tombé
amoureux de toi.
Les larmes me montent aux yeux et je n’y vois plus. Je déglutis, essayant de
défaire le nœud dans ma gorge.

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— Wes, je…
— Chérie, je sais que quelque chose a changé en toi, depuis ma visite en mars.
Je l’ai senti dans nos appels, nos messages, ce bazar avec Gi…
Je pose mon index sur ses lèvres pulpeuses. La dernière chose que je souhaite
entendre de cette bouche divine, alors que je suis sur le point de lui avouer mon
amour, c’est ce prénom.
— Pas maintenant, je chuchote d’une voix tremblante.
— Dis-moi ce que je veux entendre, Mia. Ce que j’ai besoin d’entendre. Je l’ai
mérité, non ?
Il a parfaitement raison et, enfin, après six mois de questionnement, de déni et de
doute, je suis prête. Pour la première fois de ma vie, je m’offre la possibilité
d’une belle histoire, pleine de gentillesse et de douceur, de rires et de passion.
Une histoire qui est tout à moi. Mon paradis.
Je plonge mon regard dans ses yeux verts et je caresse ses cheveux blonds
ébouriffés par notre partie de jambes en l’air. Je promène mes lèvres le long de
sa barbe naissante et je m’approche de son oreille, pour être sûre qu’il m’entende
même si je le chuchote tout bas.
— Je t’aime, Wes.
Il me serre fort dans ses bras – aussi fort que possible – et je sens la tension
déferler dans ses veines.
— Je ne te laisserai pas partir, cette fois, grogne-t-il.
— Je t’aime.
J’embrasse sa joue et il desserre un peu son étreinte.
— Je t’aime.
J’embrasse ses sourcils et il soupire.
— Je t’aime.
J’embrasse ses lèvres, et il ouvre la bouche.
Quelques secondes plus tard, je tombe sur le lit et il s’étend sur moi.
— Tu m’aimes ?
— Oui, je répète allègrement.
Son sourire est si grand que les larmes me montent aux yeux.

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— Je vais t’aimer si fort, ma belle, qu’après ce soir, je ne sais pas si tu pourras
marcher.
Je souris et pousse un cri strident lorsqu’il enlève ma culotte et saisit un téton
dans sa bouche. Lorsque je gigote et pantelle sous lui, déjà sur le point de jouir,
il descend sur mon ventre.
— Écarte-moi ces jambes, Bébé. Je veux goûter au paradis.
Je lui obéis, écartant mes cuisses, me révélant à lui tout entière. Lui offrant mon
amour, mon corps, lui prouvant que je suis toute à lui.
Ses yeux étincellent et il promène sa main sur mon sexe.
— Tu es tellement mouillée. Ton corps réagit si vite que je pourrais déjà te
prendre. Mais d’abord, je veux goûter ton élixir. Je rêve de mettre ma bouche sur
toi et de te sucer jusqu’à ce qu’il ne reste plus rien, puis de tout recommencer.
Accroche-toi aux draps, Chérie, parce que je suis assoiffé.
— Espèce de salaud, je dis avant qu’il n’écarte davantage mes cuisses et mes
lèvres pour poser sa bouche sur moi.
Un gémissement rauque lui échappe, puis il plonge sa langue en moi. Le plus
profondément possible. Ses mains empoignent mes fesses et il me soulève pour
m’appuyer sur sa bouche. Je hurle et m’accroche aux draps, prête à le laisser
faire, mais je jouis déjà au bout de deux secondes. Il s’assied et se lèche les
lèvres, puis il s’essuie la bouche sur son bras en me regardant. Il aligne sa queue
sur mon sexe et il s’enfouit profondément en moi.
Je sursaute, déjà crispée de la tête aux pieds après mon premier orgasme et déjà
en route pour un second.
— Bon sang, Wes, tu vas m’achever, je chuchote en passant mes jambes autour
de sa taille alors qu’il accélère ses allers-retours.
— Au contraire, ma belle. Je ne suis que le début, comme une renaissance.
Maintenant tais-toi. Je fais l’amour à ma femme.
Mon cœur fond en entendant ses paroles. Wes passe la soirée à me faire l’amour,
moi, sa femme. Au milieu de la nuit, je réussis néanmoins à le convaincre que sa
femme a besoin d’une bonne baise. Il me retourne à quatre pattes, me met une
fessée et s’enfouit en moi, s’acharnant de toutes ses forces jusqu’à ce que je
hurle de plaisir.

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Chapitre 8

Les vagues s’écrasent sur la planche et j’ai de l’eau salée plein les yeux et la
bouche, mais je ne pourrais être plus heureuse. Le corps musclé de Wes est loin
devant moi, allongé sur sa propre planche. Tout à coup, le voilà debout, fendant
les vagues. Je suis son exemple et, par miracle, je réussis moi aussi à surfer une
vague qui est, bien évidemment, beaucoup plus petite. Cependant, la sensation
n’en est pas moins fabuleuse.
Je plante mon surf dans le sable tandis que Wes reste debout sur le sien jusqu’à
ce qu’il n’ait qu’un petit bond à faire pour retrouver la terre ferme. Il vient
jusqu’à moi, passe sa main sur ma nuque et approche sa bouche de la mienne.
Nos langues et nos dents s’y mettent, et notre baiser devient indécent. Il lâche sa
planche pour libérer son autre main et empoigner mes fesses. Il pousse un
grognement, rompt le baiser et secoue la tête, éclaboussant des gouttelettes
partout, comme un chien qui s’ébroue. Il ouvre sa combinaison et la baisse sur
ses hanches, révélant son torse bronzé et parfait qui scintille au soleil. Je prends
mon temps pour le reluquer en rêvant de lui sauter dessus et je dois me rappeler
que ce demi-dieu est à moi. Mon Wes.
— Tu as l’air d’aimer ce que tu vois. Si tu veux te retrouver le cul dans le sable
et ma queue entre tes jambes, continue comme ça.
Je frissonne de la tête aux pieds en visualisant ce qu’il vient de dire. Je devrais
sans doute être choquée, mais je suis prête à tout pour l’obliger à tenir parole.
Il secoue la tête en souriant jusqu’aux oreilles.
— Alors, tu ne travailles pas aujourd’hui, n’est-ce pas ?
— Non, j’ai dit à Anton que j’avais besoin d’un autre jour de congé. En
revanche, je dois répéter demain parce qu’on filme le clip le jour d’après.

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— Dans ce cas, tu es toute à moi, dit Wes en me prenant par les épaules.
Plutôt que d’admettre combien sa déclaration est vraie, je me contente de
sourire, heureuse d’être blottie contre lui.
— On retourne à l’appartement ? je demande sans masquer mes intentions.
Je l’admets, je suis accro à nos parties de jambes en l’air. J’ai peut-être couché
avec Alec et Taï depuis la dernière fois que j’ai vu Wes, mais ce n’était pas la
même chose. Il n’était jamais question d’amour. Avec Wes… c’est autre chose.
C’est plus… et je ne peux plus m’en passer.
Il reprend sa planche, puis la mienne, prouvant que la galanterie existe encore, et
nous retournons au cabanon pour rendre nos surfs et nos combinaisons. J’enfile
mon short en jean, mon débardeur et mes Converse tandis que Wes met son
bermuda, ses chaussures bateau et son t-shirt. Je finis d’attacher mes cheveux en
chignon fouillis quand il prend ma main.
Nous montons dans la Jeep Wrangler sans toit qu’il a louée, et il démarre avant
de poser une main sur ma cuisse comme pour se rappeler que je suis encore là. Il
m’offre un sourire coquin et il se lance sur Ocean Drive. Je décide de profiter du
soleil et de la chaleur de Miami, mais surtout d’être jeune et amoureuse. La
sensation n’est pas nécessairement nouvelle, mais c’est la première fois depuis
longtemps que j’ai la foi et l’envie de me laisser envahir et bercer par ce
sentiment.
Je ne me demande où il m’emmène que lorsqu’il s’engage dans une allée menant
à une énorme propriété.
— Où sommes-nous ? je demande à Wes alors qu’il sort de la voiture et fait le
tour pour ouvrir ma portière.
J’accepte sa main, descends et remonte mes lunettes de soleil pour admirer les
jardins luxuriants et l’architecture ancienne du bâtiment.
— À la Villa Vizcaya. Ça fait longtemps que je voulais venir. J’ai fait beaucoup
de recherches sur cet endroit et je pense que ça pourrait être l’emplacement
parfait pour le nouveau scénario sur lequel je travaille.
Il prend ma main et nous entrons dans l’immense bâtisse. Nous nous équipons de
brochures et nous aventurons librement dans la demeure. J’ai du mal à en croire
mes yeux. Les collections d’art sont splendides et les chambres royales. Soudain,

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cela me frappe. Wes est richissime ! Je ne sais plus s’il est millionnaire ou
milliardaire, non pas que cela change quoi que ce soit. À mes yeux, il faut assez
d’argent pour subvenir à ses besoins et s’amuser un peu, inutile d’en avoir plus.
Je n’ai pas besoin de montagnes de billets pour être heureuse, juste assez pour
tirer mon père de ses ennuis et reprendre le cours normal de ma vie.
Wes reste silencieux un long moment, fasciné comme moi par l’opulence,
l’histoire et les détails de chaque pièce. Apparemment, la propriété appartenait à
une riche famille et le dernier héritier en a fait don à la région. Celle-ci perçoit
un revenu en la louant pour des soirées, des mariages ou encore le tournage de
films. Bien sûr, la villa est ouverte aux touristes, permettant au public de
s’émerveiller devant l’extrême richesse des anciens propriétaires. Il y règne une
atmosphère magique et presque irréelle, un peu comme celle que je m’attendrais
à trouver dans un château.
— Tu m’emmèneras dans un château ? je demande à Wes en parcourant un long
couloir décoré de tableaux de la Renaissance.
Il ferme les yeux un instant, puis il les rouvre, comme pour effacer quelque
chose de son imagination.
— Bien sûr. Il y en a de magnifiques en Allemagne. On devrait y aller en
vacances.
Mais bien sûr ! Comme si c’était aussi simple. Prévoyons un voyage. En
Allemagne. C’est ainsi que vit le pour cent le plus riche de la population ? Le
plus loin que je suis allée, c’est Hawaï ! Jamais je n’aurai assez d’argent pour
payer des billets d’avion pour l’Europe.
— Ce n’est pas trop cher ? je demande en essayant de masquer mon angoisse.
— Pas pour moi, répond-il en haussant les épaules. C’est une goutte d’eau dans
un océan, ma belle.
Une goutte d’eau. Aller en Allemagne est une goutte d’eau pour quelqu’un
d’aussi riche que Wes. Merde. Il faudra qu’on finisse par parler de sa fortune et
de ma pauvreté. Suzi est mon bien le plus précieux, et elle ne coûte même pas le
tiers d’une Honda Civic d’occasion.
J’inspire profondément et serre sa main plus fort. Bon. Soyons adultes. Je ne
dois pas laisser les questions d’argent s’immiscer entre nous. Wes sait ce qu’il

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peut se permettre ou non, et je ne veux pas émasculer mon mec. S’il veut aller en
Allemagne, soit. Nous parlerons de tout cela quand cette année touchera à sa fin.
Nous sortons par des portes-fenêtres et nous retrouvons face à une mer de
pelouse et de végétation luxuriante.
— Cette villa appartenait à James Deering, un homme d’affaires. Tu le connais
peut-être, de la Deering-McCormick-International Harvester1, dit Wes.
Cela ne me dit rien, mais je l’écoute et hoche la tête. À l’évidence, l’histoire de
ce lieu l’intéresse énormément et je dois admettre qu’il m’a happée moi aussi.
J’ai soudain l’impression d’être plongée dans les pages du livre Le jardin secret.
— Les jardins à l’italienne et la forêt ainsi que ces dépendances historiques font
partie de la villa. C’est magnifique, non ? demande-t-il tandis que nous
descendons les marches, main dans la main.
En tout cas, les jardins sont splendides. La région doit dépenser une fortune pour
les entretenir. Les arbres et les buissons sont impeccablement taillés, la pelouse
tondue, et les parterres de buissons bas sont sculptés pour dessiner une dentelle
fleurie.
— Le jardin et l’architecture ont été influencés par les styles vénitien et toscan
de la Renaissance italienne avec des éléments baroques. C’est Paul Chalfin2 qui
s’est chargé du design.
Je respire les nombreux parfums de fleurs et d’herbe fraîchement coupées.
Main dans la main, nous parcourons chaque allée et admirons chaque recoin,
jusqu’à ce que nous tombions sur une étrange fontaine. L’eau coule lentement
sur de grosses marches d’environ un mètre de hauteur qui sont couvertes de
mousse et bordées d’énormes pots de fleurs. Wes me place devant la cascade,
fait quelques pas en arrière et lève son téléphone. Je souris et il me prend en
photo.
— Je veux me souvenir de ce moment, Chérie, murmure-t-il en revenant
m’embrasser sous l’oreille.
Des frissons d’excitation picotent mes nerfs et me rendent toute chose,
m’empêchant de voir qu’il s’apprête à faire un selfie de nous.
— Je veux une copie ! je déclare tandis qu’il m’attire contre lui.

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Nous reprenons notre visite, collés l’un à l’autre de l’épaule à la hanche, tout est
parfait.
— Tu vois cette sculpture ? demande-t-il lorsque nous nous arrêtons devant une
structure rectangulaire.
— Difficile de ne pas la voir, Bébé, je rétorque en ricanant.
— Elle est dans une scène d’Iron Man 3 ! Prends-moi en photo !
Je ris et le prends en photo tandis qu’il gonfle ses biceps comme un super-héros.
— Quel geek ! je m’exclame en riant.
Il me reprend dans ses bras.
— Ouais, mais tu aimes ça !
Ses yeux verts pétillent et son visage n’est que joie et sérénité. Je pourrais
contempler ce visage toute ma vie.
— Parce que je t’aime, toi, je réponds.
Il retient son souffle.
— Tu n’imagines pas l’effet que me font ces mots. Bon sang, Mia, je ne sais pas
comment le décrire. J’ai tellement de chance. J’ai attendu ces paroles toute ma
vie.
— Tu ne me connais que depuis sept mois, je rétorque en frappant son torse.
Je parviens à lui échapper et je m’éloigne en me déhanchant de manière
exagérée, essayant de détendre l’atmosphère.
— Allez, viens. On a encore des milliers de kilomètres de pelouse à parcourir.
— Tu es incroyable, dit-il en me rattrapant.
— Pourtant, mieux vaut le croire, parce que je ne vais nulle part, je réponds en
lui mettant un petit coup de hanche.
— J’espère bien. Tu es à moi, maintenant.
Il m’attire dans ses bras pour m’embrasser. Le baiser n’est ni doux ni sauvage,
mais terriblement langoureux et clairement précurseur d’une partie de jambes en
l’air. Déjà haletante, je gémis dans sa bouche et empoigne ses cheveux pour le
serrer contre moi. J’ai envie de lui et je me fiche qu’on soit en public.
— Envie de toi… je chuchote entre deux coups de langue.
Il sourit jusqu’aux oreilles et saisit une poignée de mes cheveux.

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— Je sais, répond-il en reprenant ma main. Allez, comme tu l’as dit, on a encore
des milliers de kilomètres à parcourir, et j’ai envie de rentrer à l’appartement
pour te sauter dessus.
Je lui emboîte le pas, légèrement confuse et agacée que notre moment de
séduction touche à sa fin, tout en ayant hâte de recommencer lorsque nous
rentrerons à Miami.
— Où est la sortie ?
Il éclate de rire et mon cœur fond sur-le-champ. Le rire de Wes est sublime,
comme tout chez lui.
— Sois patiente, Chérie. L’attente rend les choses plus intenses. On a toute la
nuit.
— Ouais, mais l’un d’entre nous doit travailler demain. Et cette personne veut
être épuisée parce que son mec lui aura fait l’amour toute la nuit, pas parce
qu’elle aura passé la journée à parcourir un joli jardin.
— Tu es dure.
— C’est vrai, mais je préférerais que tu sois dur aussi, vois-tu. Allez, viens.
Épuise-moi, je dis en souriant.
Il me soulève dans ses bras et tourne sur lui-même, me faisant éclater de rire.
C’est amusant et insouciant. C’est Wes et moi.
*
* *
Il se jette sur moi dès que les portes de l’ascenseur se referment. Ses mains me
caressent, me pelotent et me griffent, et sa langue plonge dans ma bouche. La
main courante appuie dans mon dos et je grimace en gémissant. Wes parcourt
mon dos à tâtons, cherchant l’objet coupable, puis ses mains glissent sous mes
cuisses pour me soulever. Non seulement la barre ne perce plus mon dos, mais
son érection frotte mon sexe. C’est sauvage et délicieux, c’est ce qu’il me fallait.
Les portes s’ouvrent. Cela devrait mettre un terme à notre démonstration
d’affection bien trop publique, mais nous sommes déjà trop loin. Cependant, des
éclats de rire, en plus du fait que l’ascenseur ne bouge pas, parviennent à percer
le brouillard de désir qui m’enveloppe. Il rompt le baiser en même temps que

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moi, et nous tournons la tête. Anton tient la porte ouverte et Heather se couvre la
bouche, essayant de retenir ses éclats de rire.
— Lucita*… commence Anton d’une voix amusée avant de regarder Wes. Tu
dois être son mec. Je suis content que tu sois venu. Au moins toi, tu peux la
toucher, déclare-t-il.
Il observe notre position comme si elle n’avait rien de choquant. Cela dit,
connaissant Anton et son penchant pour les femmes, peut-être fait-il cela tous les
jours.
Derrière Anton, Heather me fait un signe de la main tandis que Wes pousse un
grognement guttural pour montrer son agacement. Je pouffe de rire et descends
le long de son corps pour poser mes pieds par terre. Toutefois, il ne me laisse pas
aller bien loin, sans doute pour cacher son énorme érection derrière mon corps.
Je fais une moue boudeuse, attristée de ne plus la sentir entre mes jambes.
Nous sortons à mon étage, et Wes étudie Anton d’un air douteux en lui tendant
la main.
— Mia ne m’a pas dit que tu venais, mais je suppose qu’après l’agression de ce
cabron* l’a agressée le mois dernier, tu avais besoin de voir ta nana. Respect,
mec, déclare Anton en mettant une tape dans le dos de Wes.
— Je te demande pardon ? Quel mec ? On a agressé Mia ?
Anton recule, comme s’il venait d’être giflé. Les choses sont sur le point de
déraper. J’essaie de lui faire des signes pour l’arrêter, mais je n’y parviens pas.
— Ah, t’en fais pas, mec, dit-il en prenant Wes par l’épaule. Son secret sera bien
gardé avec moi. Mais de pas pouvoir la toucher… putain mec, elle est
magnifique. Aucun homme ne pourrait s’en empêcher, même amicalement.
Enfin, tu sais de quoi je parle, ajoute-t-il en souriant et en désignant l’ascenseur.
Mais ce bastardo* qui l’a fait sans sa permission l’a mise à l’hosto. Tu devais
être fou de rage, non ?
Wes s’arrête brusquement et serre les poings en me regardant du coin de l’œil.
— Tu as été agressée ? Tu as été à l’hôpital ? À cause d’un putain de client ?
Mia ? Réponds-moi !
Je suis immobile, la respiration coupée tandis que les larmes me montent aux
yeux.

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— C’est pas aussi grave que tu crois, je chuchote.
— Est-ce que ce mec t’a touchée aussi sans ta permission ? demande-t-il en
désignant Anton.
J’écarquille les yeux et ouvre la bouche pour répondre, mais Wes se méprend sur
ce que je suis sur le point de dire et il plaque Anton contre le mur en le saisissant
à la gorge.
— Tu l’as touchée ? siffle-t-il.
Anton s’en remet vite et empoigne les bras de Wes. Je prie pour qu’il ne
commence pas une bagarre, mais ce n’est pas le cas. Anton ne bouge pas et
laisse Wes le tenir contre le mur.
— Je t’ai posé une question ! gronde Wes.
— Non, répond simplement le chanteur sans le quitter des yeux, comme pour le
défier de ne pas le croire.
Je pose mes mains dans le dos de Wes, ne sachant pas quoi faire, ne voulant pas
aggraver la situation.
— Wes, Bébé, Anton essaie justement de m’aider à me remettre de ce qui s’est
passé. Lâche-le, s’il te plaît. Il faut qu’on parle, toi et moi. Anton ne m’a pas fait
de mal.
— Pourquoi tu dis que tu ne peux pas la toucher, alors ? Pourquoi tu dirais ça ?
crache-t-il.
Anton fait preuve de la patience d’un saint, ce qui est étrange, car je sais qu’il
fait de la boxe et de la muscu plusieurs fois par semaine. Il pourrait sans doute
mettre une raclée à Wes s’il en avait envie.
— Mec, quand elle est arrivée, elle ne supportait même pas un simple câlin.
C’était grave.
Non, non, non, non, non. Le sol semble se dérober sous mes pieds, et je me
laisse sombrer par terre. Wes n’est pas censé savoir ! Je ne veux pas ruiner notre
histoire, elle est trop belle, trop importante. Maintenant, il saura que je suis
abîmée et qu’il peut faire mieux. Je n’ai pas eu assez de temps avec lui.
Heather crie quelque chose, mais je ne l’entends pas par-dessus le bruit de mes
pensées paniquées. On me soulève et je me retrouve dans les seuls bras que je
désire et dont j’ai besoin, ceux de Wes.

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— Ma chérie, je suis désolée. Ça va aller, Chérie. Ne t’en fais pas.
Je ne sais comment il entre chez moi et s’assied sur le canapé, me serrant fort
contre lui. Il me tient longtemps tandis que je pleure en tremblant. Il m’apaise en
caressant mes cheveux, en me chuchotant des mots doux. Alors que je suis
assoiffée, un verre apparaît de nulle part sur mes lèvres.
— On va vous laisser, amigo*. Je suis désolé. Je ne savais pas. ¡ Puñeta3 ! Lo
siento*.
— Si tu as besoin de quoi que ce soit, j’ai laissé nos cartes sur le plan de travail.
On prendra des nouvelles plus tard. Prends soin de notre nana, dit Heather d’une
voix douce.
Notre nana. Ils me considèrent comme leur nana, mais le seul à qui je veux
appartenir, c’est Wes. Je renifle dans son cou, respirant le parfum de l’océan,
regrettant de ne pas être chez lui à Malibu plutôt qu’à Miami, dans cet
appartement inconnu.
— Eh, ça va ? me demande-t-il en relevant ma tête pour essuyer mes dernières
larmes.
Je hoche la tête.
— Tu as faim ?
Je secoue la tête.
— Soif ?
Même réponse.
— De quoi as-tu besoin ?
— J’ai besoin que tu m’aimes.
— Mia, je t’aime depuis la seconde où tu as enlevé ton casque sur la plage. Bon
sang, peut-être que je t’aimais déjà quand maman m’a montré les photos de toi
sur le site d’Escorts Exquises. J’ai su tout de suite que je devais t’avoir. Et pas
seulement dans mon lit, même si tu sais que j’aime ça, dit-il en souriant
diaboliquement. Mia, ça a toujours été plus, avec toi. Tout m’appelle chez toi.
Ton corps me rend faible de désir. Ton amour de la vie et des découvertes me
donne envie de t’offrir le monde entier, juste pour te faire sourire. Je t’aime
aujourd’hui, je t’aimerai demain, et chaque jour après ça.
— Prouve-le.

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Il pousse un grognement et soupire.
— Chérie, il faut qu’on parle.
— Prouve-le, je le supplie.
Il passe sa main dans ses cheveux, puis sur son visage.
— Bon sang Mia, tu veux quoi, exactement ?
— Que tu me baises.
— Pas ce soir, non, répond-il en secouant la tête. Ce soir, je vais te vénérer.

1. Célèbre entreprise américaine de fabrication d’outillage agricole, fondée en


1902.
2. Célèbre artiste et décorateur d’intérieur new-yorkais, principalement connu
pour la Villa Vizcaya.
3. Putain ! Je suis désolé.

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Chapitre 9

Je regarde Wes faire les cent pas, s’arrêter, se tirer les cheveux, faire une
grimace, jurer, faire demi-tour et recommencer.
Soudain, il s’arrête, ferme les poings et se tourne vers moi.
— Je vais le tuer, putain. Je vais le ruiner. Sa carrière politique ? Finie ! Cette
pourriture mérite une branlée !
— Il s’en est déjà pris une, je réponds.
Je lève la tête lorsque je sens l’atmosphère se tendre encore plus. Les yeux de
Wes sont noirs de colère.
— Mason lui a cassé la gueule, je chuchote avant de déglutir pour me
débarrasser du nœud qui s’est formé dans ma gorge.
J’essaie de parler, mais il m’interrompt en me fusillant du regard.
— Mason ? Putain mais c’est qui, Mason ? siffle-t-il d’une voix si froide que je
cligne plusieurs fois des yeux.
— Euh… euh… Mason est un ancien client… un ami ! j’ajoute quand les yeux
de Wes s’assombrissent encore.
— J’arrive pas à le croire ! répète-t-il en se remettant à faire les cent pas. Ma
copine se fait attaquer par un connard et finit à l’hôpital, et on ne me dit rien ?
Putain, Mia ! C’est hallucinant !
Je suppose qu’il ne servirait à rien de lui rappeler que nous n’avions pas décrété
que nous étions en couple, à l’époque.
— Je ne sais pas quoi faire, déclare-t-il en s’arrêtant.
Je me lève d’un bond et saisis ses mains.
— Bébé, tu ne peux rien faire.
Il mord sa lèvre si fort que je crains qu’il se fasse saigner.

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— Je suis tellement en colère, Mia, murmure-t-il d’une voix pleine de
souffrance. Il faut que je fasse quelque chose.
— Non. Ce que tu dois faire, c’est m’aider. Aide-moi, Wes. C’est fini, j’ai
tourné la page.
Et c’est vrai. J’ai passé la dernière heure à lui raconter tout ce qui s’est passé
dans le détail, y compris la façon dont Aaron et moi avons flirté jusqu’à ce que
je le trouve dans ma chambre. Wes m’a tenu la main en restant assis patiemment
pendant que je lui racontais cette expérience horrible, caressant mon dos et
essuyant mes larmes. Ce n’est que lorsque j’ai eu fini qu’il a cessé de caresser
mon dos et qu’il s’est mis à faire les cent pas et à jurer.
Ensuite, la colère est arrivée.
Wes secoue la tête et se tire les cheveux pour la énième fois.
— Ce n’est pas fini. Chérie, la seule chose qui va réparer la situation, c’est que
je le démonte. Tu ne comprends pas ? Il a fait du mal à la femme que j’aime !
Beaucoup de mal, ajoute-t-il en tremblant des pieds à la tête. Il faut qu’il souffre
au moins autant que toi.
— Wes, comme je te l’ai dit, il doit aller voir un psy et il doit aller aux
alcooliques anonymes. Bébé, si la presse ou qui que ce soit l’apprend, Aaron ne
sera pas le seul à en pâtir. Des centaines, voire des milliers de personnes à
travers le monde, vont en faire les frais. Son père va devoir annuler son projet
parce que ses investisseurs ne soutiendront jamais un homme dont le fils est un
prédateur sexuel et un alcoolique. Essaie de comprendre, s’il te plaît.
Il recommence à faire les cent pas, mais je vois à la façon dont il courbe le dos
qu’il a compris. Je lui ai dit la même chose il y a un quart d’heure quand je lui ai
parlé du projet de Warren et que je lui ai expliqué que tout tomberait à l’eau si
les problèmes de son fils devenaient publics. Weston le sait car, dans les mêmes
circonstances, il retirerait son argent.
— Wes, cela aurait aussi de graves conséquences pour tous mes clients…
Il s’appuie sur le dossier su fauteuil et me regarde en fronçant les sourcils.
— Comment ça ?
— Eh bien, ça aurait des conséquences sur toi, sur Alec, Mason, Tony, Hector,
les D’Amicos, Taï, Anton… Je ne peux pas risquer un procès qui serait suivi par

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la presse nationale.
— Chérie, explique-moi. Qui sont tous ces gens ?
Bon sang, nous voilà arrivés à un moment crucial. C’est le genre de conversation
qui rend les couples plus forts ou les brise à jamais. Je n’ai pas le choix.
— Wes, tu sais que je suis escort. Les gens pensent que cela signifie que je suis
une prostituée de luxe, et dans certains cas, cela pourrait être perçu comme étant
vrai.
Il hausse les épaules et soupire longuement.
— Mon tarif fait que seuls des gens riches, haut placés ou célèbres peuvent se
permettre de s’offrir mes services.
— Je ne te suis pas, il faut que tu me racontes tout, dit-il d’une voix froide.
Il veut que je lui fasse un dessin ? Très bien, aucun problème.
— C’est toi qui l’auras voulu. Tu sais que j’ai travaillé pour Warren pour l’aider
sur son projet d’aide au tiers-monde. Avant lui, j’ai été embauchée par les
D’Amicos pour la campagne La beauté n’a pas de taille. Si la presse apprenait
que leur égérie est une escort, ça pourrait détruire tout ce qu’ils ont construit.
— Tu sais, j’ai vu les pubs, j’étais super-fier de toi, chérie. Tu étais canon.
Superbe, même.
Je souris jusqu’aux oreilles, ravie que Wes soit fier du travail que j’ai fait.
— Ensuite ? demande-t-il.
— Mason Murphy. Oui, le célèbre joueur des Boston Red Sox, j’ajoute, et Wes
écarquille les yeux. J’ai fait semblant d’être sa copine pour l’aider à redorer son
image. Ça a plutôt bien marché et, en fin de compte j’ai joué l’entremetteuse et,
maintenant, il est en couple avec sa chargée de relations presse.
Wes va au bar, de l’autre côté du salon. Il me montre la bouteille de gin et je
hoche la tête. Il va me falloir plus d’un verre pour supporter cette conversation.
À l’évidence, cette soirée est placée sous le signe de la confession. J’espère
seulement que Wes ne me crucifiera pas pour mes péchés.
Il me tend un verre et je bois une gorgée. Le liquide brûle ma gorge et réchauffe
agréablement mon ventre.
— Tu as couché avec lui ?

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Il s’assied dans le fauteuil en face du mien, de l’autre côté de la table basse en
verre. Je ne manque pas de remarquer la distance qu’il a mise entre nous, que ce
soit intentionnel ou pas, mais peu importe.
— Non, je réponds en secouant la tête. Non pas qu’il n’ait pas essayé, j’ajoute en
souriant, ce qui ne le fait pas rire du tout.
Bon, passons.
— Avant lui, il y a eu Tony Fasano.
— Le restaurateur ?
— Ouais.
— Pourquoi il t’a embauchée, lui ? demande-t-il d’une voix moins nerveuse.
— Pour être sa fiancée, je ricane alors que Wes grimace. Attends, le plus drôle
est la raison pour laquelle il avait besoin d’une fiancée.
Je souris jusqu’aux oreilles et cela doit soulager Wes, car j’ai droit à un
minuscule sourire en coin.
— Pourquoi ?
— Je n’arrive pas à croire que tu aies oublié ce dont on a parlé en mars quand tu
es venu. Ils n’étaient pas forcément démonstratifs et on a tous beaucoup trop bu,
je te l’accorde, mais tu ne te souviens vraiment de rien ?
Il hausse les épaules et fait non de la tête.
— Pas vraiment, non. Je me souviens de leurs visages, je sais qu’on a trop bu et
qu’ils étaient sympas. Mais je me souviens surtout de ta bouche, de t’avoir prise
contre un mur, sous la douche, et d’avoir baisé comme un lapin avec la plus
belle femme de la terre.
Je lui réponds par un sourire encore plus grand.
— Alors, pourquoi il avait besoin d’une fiancée ?
Je ramène mes pieds sous mes fesses et pose mon verre sur l’accoudoir du
canapé.
— Pour te le dire, je dois te faire visualiser la scène.
— Ok, je t’écoute, dit-il en buvant une gorgée de gin et en reculant dans son
fauteuil.
J’adore la façon dont sa pomme d’Adam monte et descend lorsqu’il déglutit. En
fait, j’aime tout chez Wes, surtout maintenant qu’on est ensemble. Avec un peu

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de chance, il ne me quittera pas après cette conversation.
— Lorsque je suis arrivée à Chicago, le concierge a posé mon sac dans une
chambre. Une chambre immense, bien plus grande que ce à quoi je m’attendais,
même si Tony vit dans un penthouse.
Wes ne dit rien et attend que je poursuive.
— Quand le mec m’a laissée seule avec ma valise, j’ai entendu le bruit d’une
douche. Tu n’imagines pas comment j’ai paniqué à l’idée que j’étais dans une
chambre et qu’un mec que je ne connaissais pas, un étranger, était en train de se
doucher dans la pièce d’à côté.
Une nana trouverait la situation amusante. Ce n’est pas le cas de Wes. Il
contracte sa mâchoire en attendant patiemment.
— Soudain, la porte s’ouvre, et un mec super-baraqué est là, couvert d’une
minuscule serviette nouée sur les hanches. Et c’est là que les choses deviennent
vraiment intéressantes…
J’essaie de faire durer le suspense, mais Wes a simplement l’air en colère.
— Permets-moi d’en douter, grogne-t-il.
Je lève les yeux au ciel.
— Eh ben, j’étais là, comme un poisson hors de l’eau, sans savoir quoi dire, et
là, un autre mec en serviette apparaît derrière lui. Et il le prend par la taille. Ils
étaient ensemble… sous la douche !
Wes sourit de toutes ses dents.
— Il est gay !
— Tu ne lis pas la presse people ?
Il se lèche les lèvres et secoue la tête.
— Jamais. Je la fuis comme la peste. Les infos sont rarement vraies et, en
général, cela finit simplement par faire du mal à la personne dont ils parlent.
— Tony est gay, je répète en levant les yeux au ciel, et il est en couple depuis
des années avec un avocat génial qui s’appelle Hector Chavez. D’ailleurs, durant
mon mois là-bas, je me suis surtout rapprochée d’Hector.
Je tapote ma cuisse du bout des doigts et je bois une gorgée.
— Avant Tony, il y a eu Alec.

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Une sensation de manque refait surface quand je pense à lui. J’ai donné un
morceau de mon cœur à Alec, en février, un morceau que je ne veux jamais
récupérer. La vérité est que j’aime mon Frenchie coquin et que j’ai adoré le
temps que j’ai passé dans son lit. Pas autant qu’avec Wes, mais il est clairement
dans mon top trois des meilleurs coups, avec Wes et Taï.
— Alec, c’était l’artiste, marmonne Wes.
Je ne me rappelle plus comment il le sait, peut-être lui en ai-je parlé quand on
était ensemble. Je me lèche les lèvres et bois une nouvelle gorgée de gin.
— Tu as couché avec lui, dit Wes d’un ton qui ne semble pas accusatoire.
Bon sang, j’espère que cela signifie qu’il ne m’en veut pas.
Je hoche la tête et il hausse les épaules en regardant le coucher de soleil par la
fenêtre.
— Mais ce n’était pas sérieux. Comme Gina, ajoute-t-il.
Le simple fait d’entendre le prénom de cette garce me rend folle de jalousie.
— Alec était spécial, et il compte beaucoup pour moi, je rétorque.
Mince, je n’avais pas prévu d’en dire autant. Wes penche la tête sur le côté et
s’avance en appuyant ses coudes sur ses genoux.
— Comment ça ? Comment était-il spécial ?
Les larmes me montent aux yeux et menacent de couler.
— Alec m’a aidée à me sentir belle.
— Et pas moi ? rétorque-t-il.
— Si, mais avec lui, j’ai compris que je pouvais révéler la véritable Mia. Celle
que j’étais avec toi, mais que le reste du monde ne voyait pas. Il m’a forcée à
enlever mon masque et à laisser les gens découvrir qui je suis. J’ai appris une
leçon importante avec Alec.
— Ah bon ? Quoi ?
— Que je peux m’aimer.
Wes ferme les yeux, inspire et expire en libérant toute sa tension.
— Mia, tu as toutes les raisons du monde de t’aimer.
— Mais je ne le croyais pas, je réponds en secouant la tête. Pas avant Alec. C’est
son art qui m’a aidée à le comprendre. Même si j’étais brisée et que je galérais
dans la vie, que j’étais devenue escort parce que mon père, un alcoolo accro aux

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jeux, n’a pas su rester sobre assez longtemps pour s’occuper de ses dettes, moi,
je déclare en me frappant la poitrine, Mia Saunders, serveuse à Las Vegas, je
mérite mieux. Je mérite d’être heureuse. Et d’être aimée.
— Et moi, je ne te donne pas ça ? chuchote-t-il d’une voix tremblante.
— Si, mais à l’époque, Alec me l’a donné aussi. Et d’une certaine façon, il
continue.
Le regard de Wes durcit et se remplit de tristesse.
— Il t’aime.
Je hoche la tête et ferme les yeux. Mince, j’ai répondu trop vite.
— Alec pense qu’on aime la personne avec qui on est, quelle que soit la durée de
la relation. Que ce soit une nuit, un mois ou un an. Il pense qu’on échange avec
cette personne un morceau de son cœur et qu’on l’emporte avec soi toute sa vie.
— Est-ce qu’il veut te récupérer ?
Tiens, voilà que mon beau surfeur, habituellement si détendu, est jaloux lui
aussi.
— Non, pas de cette manière, non. Alec doit aimer toutes les femmes avec qui il
est, sinon il n’est pas avec elles. Le monde entier doit être rempli de cœurs
brisés, parce qu’il aime sans cesse quelqu’un de nouveau.
— Ce n’est pas comme ça que je fonctionne, Mia. Quand je m’engage, c’est
avec une seule femme. Et je m’engage avec toi. Pour nous. Pour que ça marche,
tu dois t’engager, toi aussi. Et il faut qu’on mette tout ça derrière nous, Chérie.
Parce que c’est du passé. C’est révolu.
Je repense brièvement à Gina, mais je ne sais pas quand il était avec elle,
exactement. Tout ce que je sais, c’est ce qu’il m’a dit, qu’il ne recouchera plus
avec elle, et je le crois.
— Ça fait sept mois. Alors, tu n’as couché qu’avec un homme depuis qu’on a été
ensemble ?
Il semble incrédule, et il a raison de l’être.
Je ferme les yeux et me prépare au pire.
— Non. J’ai été avec Taï Niko, le mannequin à Hawaï.
— À Hawaï ? En mai ?
— Ouais.

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— C’était un coup d’un soir ?
— Non, j’admets d’une voix tremblante.
S’il y a bien une chose que je ne suis pas, c’est une menteuse. Il est hors de
question que je me lance dans cette relation en la construisant sur des
mensonges.
— Putain ! aboie-t-il.
Il se relève et refait les cent pas en se tirant les cheveux. Apparemment, c’est sa
réaction naturelle lorsqu’il n’est pas content.
— Tu ne comprends pas, Wes, c’était juste pour s’amuser ! Il est déjà avec
quelqu’un d’autre ! Quelqu’un qu’il a l’intention d’épouser ! je crie.
Il faut qu’il m’entende. Notre histoire est trop importante pour qu’on risque de
rester coincés sur ce point.
— Putain, Chérie, tu me tues, là. Tu as passé un mois au paradis à aimer
quelqu’un d’autre ?
Je sais qu’il emploie le mot paradis pour me torturer. Tous les coups sont permis,
apparemment.
— Et toi ? Tu as passé combien de mois à baiser Gina DeLuca, l’actrice chérie
de tout le pays et la femme la plus sexy sur terre ? Et je suis censée ne rien dire ?
Il fait plusieurs pas en arrière, comme s’il venait d’être percuté par un boulet de
canon, et il s’appuie sur le guéridon derrière lui.
— Mia ! Elle n’est rien pour moi ! Rien !
— J’ai du mal à te croire, Wes ! Ça fait des mois que tu te la tapes. Tu ne penses
pas que pour elle c’est du sérieux ?
— Non, répond-il en secouant la tête. Je te le jure.
— Tu parles. Répète-toi ça jusqu’à ce que tu en sois convaincu. Au moins, je
peux dire que j’ai tourné la page d’Alec et de Taï. Sincèrement. Parce que je
t’aime ! Je ne leur ai jamais dit ces mots avec la même intention. Je les aime
comme des amis qui tiennent à moi en retour, mais je n’ai jamais été amoureuse
d’eux. Il y a une énorme différence. Tu peux dire la même chose de Gina ?
Hein ?
Je hurle d’une voix stridente.

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À l’évidence, j’ai perdu la tête, car je me lève et je jette mon verre contre le mur.
Le pire, c’est qu’il ne se casse même pas et je n’en tire pas la moindre
satisfaction.
Ce foutu Anton, avec ses verres de riche !
Je grogne et me laisse retomber sur le canapé.
— C’est pour ça que je ne tombe jamais amoureuse, je dis en me tenant la tête.
Sans me prévenir, Wes me soulève et me prend sur ses genoux.
— Ne regrette jamais de m’aimer. C’est le plus grand mal que tu puisses me
faire. Est-ce que c’est tout ? demande-t-il en tenant mon visage. Tu m’as tout
dit ? Deux gars, une agression et une dizaine de nouveaux amis ?
Je hoche la tête.
— Ok, Chérie. Pour moi, il n’y a eu que Gina de temps en temps. On peut
surmonter ça, dit-il alors que mon cœur explose de joie.
Je me détends instantanément, comme un bébé à qui l’on chante une berceuse.
Tout semble si simple avec lui. On peut y arriver.
Les larmes me montent aux yeux, il les essuie avec ses pouces.
— Ne pleure pas, chérie. À partir de maintenant, il n’y a que toi et moi. On s’est
tout dit, c’est fait. Je sais ce que j’ai besoin de savoir, et Gina est partie. Partie. Il
ne reste plus que toi et moi. Maintenant, on peut construire notre relation.
Je hoche la tête et appuie mon front contre son torse, respirant ce parfum
d’océan que j’aime tant chez lui.
— Je t’aime.
— Chérie, je t’aime aussi. Toi et moi. Il n’y a que toi et moi.

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Chapitre 10

La sonnerie de mon téléphone me tire d’un rêve sublime. Wes et moi visitions
des châteaux en Allemagne, main dans la main, comme le jeune couple
amoureux que nous sommes.
Wes se penche au-dessus de moi pour saisir l’horrible objet, et il répond. Merde.
Non ! Mauvaise idée ! Ce pourrait être n’importe qui et si c’est un de mes
anciens clients, qu’on soit ami ou non, cela pourrait mal se passer. Très mal !
— Ouais, ouais, répond-il en bâillant. Ok, attendez une seconde, je vous la
passe. Chérie, c’est Miss Milan.
Je lève les yeux au ciel. Tante Millie. Je prends mon téléphone, mais je ne lui
parle pas tout de suite.
— C’est ma tante Millie, en fait. Elle s’appelle Millie, pas Milan.
— Ah bon ?
— Je pensais te l’avoir dit.
— Je crois que je m’en souviendrais, dit-il avant de m’embrasser sur le front. Je
vais nous faire un café avant que tu ailles au studio.
Je serre son bras et le saisis par la nuque pour l’embrasser tendrement.
— Tante Millie. Quelle raison peux-tu avoir de m’appeler aussi tôt ? Enfin, il
doit être super-tôt pour toi !
Je l’entends tapoter sur son clavier.
— Oui, je ne me suis pas encore couchée. Tu as ignoré tous mes appels et il faut
que je te donne les informations sur ton prochain client parce que je pars en
vacances demain. Je veux m’assurer que tout est fixé d’avance. Celui-ci est… je
ne sais pas. Il y a quelque chose qui cloche.
Tante Millie n’a jamais semblé douter d’un client, c’est la première fois.

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— Comment ça ? Qu’est-ce qui cloche ? C’est un pervers ?
— Non, non. D’ailleurs, il est trop clean sur le papier. Il a insisté pour te réserver
dès que tu serais libre et il appelle tous les quinze jours pour s’assurer que tu
n’as pas eu d’annulation. Ce qui n’est pas le cas, bien sûr.
— Ok, alors il veut vraiment m’embaucher. Est-ce qu’il a dit pourquoi ?
— Apparemment, il a besoin que tu sois la sœur qu’il n’a jamais connue. Il serait
question d’éviter qu’une entreprise tombe entre de mauvaises mains s’il ne
présente pas sa sœur aux investisseurs, ou quelque chose comme ça. Son nom est
apparu dans un document, mais il ne l’a jamais connue et l’écriture n’est pas très
nette. Ce pourrait être Mia Saunders, ou Mia Sanders, ou Mia Sonders, avec un
O, mais tu as la même date d’anniversaire que cette personne et tu t’appelles Mia
Saunders, donc il fallait que ce soit toi et personne d’autre.
— C’est bizarre, en effet. Tu as mené ton enquête sur lui ?
Millie soupire de façon exagérée et théâtrale, et je me sens coupable d’avoir posé
cette question.
— Tu crois vraiment que je mettrais ta sécurité en péril ?
Je suis sur le point d’éclater de rire, mais elle n’est pas au courant de ce qui s’est
passé avec Aaron, parce que je ne lui ai rien dit.
— Je sais que tu ne veux que le meilleur pour moi, Tante Millie. Désolée.
— Mon détective privé a tout vérifié. L’homme est jeune, tout juste trente ans, il
est déjà à la tête d’une des plus grandes entreprises du Texas.
— Waouh, ça rapporte gros le pétrole, non ?
— Ça, tu peux le dire. Je ne connais pas tous les détails, mais il a hâte de te
rencontrer. Et attend, tu vas adorer ça : c’est un véritable cow-boy, il habite dans
un ranch, et tout !
Tante Millie marque une pause, je me demande ce qu’elle va encore
m’annoncer.
— Je n’ai pas vu les vingt-cinq mille dollars arriver du latin lover. Faut croire
que tu ne t’amuses pas autant que je le pensais ?
— Millie, ça ne te regarde absolument pas, mais non. Et tu ne les verras pas
arriver.

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— Tu changeras peut-être d’avis quand tu verras la photo du cow-boy. Ça n’a
jamais été mon genre, mais il y a quelque chose chez lui qui me parle. Peut-être
que c’est pour ça que quelque chose me dérange, j’ai une impression de déjà-vu
avec ce type. Bref. Je réserve ton vol demain. Tu veux passer quelques jours à
Miami, Dallas, ou rentrer chez toi avant d’aller au Texas ?
Chez moi. Je souris jusqu’aux oreilles lorsque Wes entre dans la chambre avec
une tasse de café. Il s’arrête, penche la tête sur le côté et hausse un sourcil.
— Quoi ? chuchote-t-il.
— Millie, j’aimerais passer mes jours de repos à Malibu. Je partirai de LAX.
Wes fait un petit tour sur lui-même en guise de célébration, et je trouve cela
tellement adorable que j’ai envie de lui sauter dessus et de lui tailler une pipe.
— Ça roule, Poupée, j’arrange tout ça. Je suis contente que tu rentres quelques
jours. Déjeunons ensemble, tu veux ?
— Super. Je t’aime, Millie.
— Moi aussi, ma chérie.
Nous raccrochons et je me tourne vers mon mec.
— Je serai à Malibu pour six jours, la semaine prochaine. Je me demande où je
vais pouvoir dormir…
— Tu as un appartement, répond Wes avec un visage parfaitement neutre.
Je grimace en repensant à mon studio pour la première fois depuis des mois. Il
faut vraiment que je le vide et que je fasse stocker mes cartons. D’ailleurs, peut-
être que je devrais le faire la semaine prochaine. C’est absurde de payer un loyer
pour un endroit où je n’ai pas mis les pieds une seule fois depuis sept mois.
— Bébé, je pensais que…
Wes me saute dessus et me coupe la parole.
— Je t’ai eue ! s’exclame-t-il en m’embrassant de manière si torride que j’oublie
que je suis censée me préparer pour la répétition. Je n’arrive pas à croire que tu
m’aies cru, marmonne-t-il en déposant des baisers mouillés sur mon cou. Bien
sûr que je te veux avec moi. Ça fait des mois que mes parents me harcèlent pour
que je te récupère.
— Me récupérer ? Mais je n’ai jamais été à toi.
Il s’assied et pose ses mains sur mon ventre, soulevant lentement mon caraco.

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— Bien sûr que si, répond-il.
Je secoue la tête.
— Tu étais déjà à moi en janvier.
Je fais de nouveau non de la tête.
— Ah non ?
Au lieu de continuer son ascension pour s’emparer de mes seins déjà lourds de
désir, il fait l’inverse et me chatouille, plantant ses doigts entre mes côtes, me
faisant hurler de rire.
— Avoue que tu étais à moi ! ordonne-t-il.
Je secoue la tête et essaie de saisir ses mains. Je ne peux plus respirer. Bon sang,
il a raison. Je suis à lui depuis le premier jour.
— D’accord, d’accord, j’avoue.
Il secoue la tête.
— Ça ne suffit pas. Dis-le, ordonne-t-il en tenant mes bras au-dessus de ma tête.
Je dois inspirer et expirer une vingtaine de fois avant de reprendre mon souffle.
Je plonge mon regard dans le sien et je comprends combien ma réponse compte
à ses yeux.
— J’étais déjà à toi en janvier, Wes, je dis d’une voix émue. Je ne voulais pas le
croire et j’ai tout fait pour le nier. J’ai rangé mes sentiments dans une boîte que
j’ai mise au fond d’un placard pour que personne ne la trouve, pas même moi,
mais surtout pas toi.
Une larme solitaire coule sur ma joue, et Wes se penche pour la lécher.
— J’adore le goût de tes larmes. Et tu sais quoi ?
— Quoi ?
— J’étais à toi aussi, Chérie. Déjà à l’époque.
*
* *
La répétition d’hier a été violente. Bien sûr, le fait que Wes soit là, à regarder,
grogner et fusiller Anton du regard chaque fois qu’il posait une main sur moi,
n’a pas aidé. Dans ce clip, le rôle de la séductrice est d’exciter le mec, de le faire
crever de désir pour elle, et j’ai enfin la sensation d’incarner mon rôle à la
perfection. Grâce à Wes et son amour, je me sens bien dans ma peau et je peux

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supporter qu’un autre homme me touche. Pour faire court, je suis en feu,
brûlante et rayonnante.
Maria est folle de joie et de fierté.
— Oui, oui, coupé !
Les caméras cessent de filmer alors qu’Anton est à genoux devant moi. Il tient
mes hanches, et sa tête est sur mon ventre après qu’il a lentement frotté son nez
sur ma cuisse en porte-jarretelles et relevé ma minuscule robe avec ses dents. Il
se relève, comme si de rien n’était. Je ne sais pas comment il fait. Dès qu’il
entend le mot « coupez », c’est fini, il redevient mon ami Anton, détendu et
distant.
Maria a raison. Le fait d’en parler à Gin, puis à Wes, deux personnes qui me
connaissent vraiment, m’a aidée à tourner la page. J’ai compris que ce n’était pas
seulement le toucher d’un autre homme qui me faisait paniquer. Les flash-back
et l’angoisse qui refaisaient surface avec Anton étaient causés par ma culpabilité.
Or, j’ai enfin accepté la décision que j’ai prise. En fin de compte, le fait de
sauver de nombreux innocents m’a permis de me sauver moi-même. Je n’aurais
jamais pu vivre en sachant que des gens à qui je tiens, ainsi que des milliers de
personnes dans le besoin, ont souffert des conséquences de mon choix.
Je sors de scène pour retrouver la costumière et ma dernière tenue. Voilà la plus
grande épreuve de toutes. C’est un ami styliste d’Anton qui a dessiné et fabriqué
le… vêtement, si on peut l’appeler ainsi. Il s’agit surtout de morceaux de tissus
cousus légèrement afin d’être déchirés facilement. La maquilleuse et la
costumière s’affairent autour de moi tandis que Wes reste debout contre le mur,
muet comme une carpe.
Pour quelqu’un qui fait des films et gère des acteurs tous les jours, je pensais
qu’il comprendrait que je joue un rôle et qu’il ne se prendrait pas la tête. Je me
suis complètement trompée. Il est silencieux, stoïque et respectueux des
collègues de sa profession, mais je sais que cela lui coûte énormément. Il est
crispé, et ses yeux ne cessent d’inspecter chaque centimètre nu de ma peau
qu’Anton a touché.
— Tu sais, tu peux retourner à l’appartement si tu veux. On doit juste filmer la
dernière scène, puis on ira dîner avec tout le monde.

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J’essaie de le faire partir une nouvelle fois, même si je n’en ai pas vraiment
envie.
— Chérie, je suis là. Fais ton boulot, et on verra ce qu’on fait après, répond-il
d’une voix dénuée d’émotion.
— Je suis contente que tu sois resté. Ça rend les choses plus faciles, je réponds
en repoussant mes larmes.
Il vient vers moi, lève mon menton et m’embrasse doucement. La maquilleuse
grogne et pousse un juron derrière moi, je souris contre sa bouche.
— Tu vas me faire avoir des ennuis.
Il finit par sourire et il joue des sourcils.
— J’aime ça, justement. Je suis sûr qu’il y a des dizaines d’autres moyens de te
mettre dans le pétrin.
Je ricane et le repousse avant de lancer un regard désolé à la maquilleuse. Je
souffle un baiser à Wes, qui se lèche la bouche et tapote sa lèvre avec son pouce.
J’adore quand il fait ça, c’est tellement sexy.
— Concentre-toi, hermana*. La dernière scène est la plus difficile. Tu es prête ?
Wes sera fou quand il verra ce qu’on a prévu pour le final.
— Aussi prête que possible…
J’ai envie d’ajouter « pour une femme qui est sur le point de se retrouver à poil
devant des danseurs, des techniciens, Anton et mon mec ». J’envisage un instant
de dire à Wes ce qu’il est sur le point de voir, mais je décide de me taire. Si on
arrive à la filmer d’une traite, il n’aura d’autre choix que de l’accepter.
On sait tous qu’il est plus facile de demander pardon que la permission, et cette
situation en est la preuve.
La costumière m’accompagne sur la scène en ajustant le tissu, les paillettes et les
faux bijoux. Les pointes de mes seins sont décorées de strass qui sont collés pour
couvrir mon téton, mais rien d’autre. Un minuscule string fait de perles brillantes
et de paillettes couvre mon sexe intégralement épilé. Voilà autre chose que Wes
ne sait pas, car nous avons fait ça dans la salle de bains pendant l’heure du
déjeuner. Tous ces joyaux sont cachés sous ce voile de tissu qu’on ne peut guère
appeler une robe, surtout parce que je sais qu’elle disparaîtra dans quelques
secondes quand les caméras se seront remises à tourner.

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Je monte sur mon piédestal en prenant toutes les précautions possibles. La basse
de la chanson d’Anton se met à vibrer autour de nous, et les éclairs du
stroboscope m’éblouissent et m’obligent à cligner des yeux. Le ventilateur fait
voler mes cheveux bouclés derrière moi.
Wes est dans la pénombre, pile en face de moi. Je vois surtout son visage et ses
iris verts. Ses bras sont croisés et il ne me quitte pas des yeux. Les danseurs
apparaissent à mes côtés, et je fais rouler mes épaules tout en me déhanchant,
inspirant et expirant comme Maria me l’a appris pour donner l’illusion d’être
haletante et rendre les hommes fous de désir. Ce sont ses mots, pas les miens.
Anton commence au fond, derrière moi. Je sens bientôt ses mains caresser le
côté droit de mon corps. Je ferme les yeux. Lorsque je les rouvre, je rive mon
regard sur Wes et ses yeux brûlants de désir. Un désir charnel qui est si fort que
je sens mes tétons durcir, pincés par les strass collés. Je suis sur scène, entourée
par des dizaines de gens, et Wes parvient à m’enflammer par un simple regard.
Anton continue de virevolter autour de moi et de me toucher en faisant mine de
chanter et de me supplier. De temps en temps, il empoigne un morceau de ma
robe et l’arrache. Je tressaille comme on m’a dit de le faire, comme s’il arrachait
des morceaux de mon armure. Je suppose que c’est l’idée, en tout cas, Anton
enlève l’armure de la séductrice pour la faire sienne, enfin.
Les figurants dansent autour de moi comme des fantômes, vêtus de noir, avec
des vêtements déchirés qui laissent entrevoir leur peau pailletée. Le tempo de la
chanson augmente et les danseurs se rapprochent de moi, filmés par les quatre
caméras qui m’encerclent. À chaque coup de bassin d’Anton, face à moi, un
danseur me dépouille d’un morceau de ma robe, me laissant nue avec mes strass.
Anton tombe à genoux devant moi, c’est le moment le plus important du clip. Je
dois être confiante et puissante. Quand Anton lève les mains, comme pour
m’implorer d’être à lui, je prends sa joue dans une main et appuie l’autre sur son
torse.
Les caméras zooment sur nous et, en play-back, je dis les dernières paroles du
morceau, chantées par une femme.
— Forget me1.

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Les caméras reculent, je couvre mes seins avec un bras, le pousse en arrière et
pose mon autre main entre mes jambes. Je ferme les yeux, penche la tête sur le
côté puis vers le bas, et les lumières s’éteignent.
— Coupez, coupez. C’est dans la boîte ! crie le directeur de la photo.
Un peignoir apparaît sur mes épaules et je me retrouve dans les bras d’Anton.
— Lucita*, tu étais magnifique.
Il m’embrasse sur les joues, sur le front, les tempes. Enfin, tenant mon visage
dans ses deux mains, il plonge son regard dans le mien pour me prévenir de ce
qu’il s’apprête à faire. Il approche et m’embrasse tendrement sur la bouche. Ses
lèvres ne font que m’effleurer, mais cela suffit.
Ce qui compte, c’est que je n’ai pas ressenti la moindre peur, juste le réconfort
d’un ami qui me félicite. Je n’ai pas eu de flash-back. Il tient mes bras, mais il
les lâche soudain en souriant jusqu’aux oreilles.
— Je pense que tu as assez touché ma nana, hein, amigo ? dit Wes d’une voix
monocorde.
Je me retourne au moment où Anton prend Wes dans ses bras, le frappant dans le
dos comme s’ils étaient les meilleurs amis du monde.
— Tu lui fais du bien, amigo. Maintenant, on fait la fête !
Malgré l’avertissement de Wes, il me prend par les épaules et nous emmène vers
les loges. Anton vit dans l’instant présent et se contrefiche que Wes râle. C’est
ce qui le rend si spécial. Il profite de la vie, de ses amis et de son travail. Surtout,
il fait la fête autant qu’il le peut.
Heather et Maria nous rejoignent avec des coupes de champagne. Nous
trinquons, et je bois une gorgée, laissant le nectar pétillant enivrer mes papilles
et danser sur ma langue.
— Tu étais incroyable ! s’exclame Heather en me prenant dans ses bras.
— J’ai eu une super-prof, je réponds en regardant Maria.
J’ai du mal à contenir mon enthousiasme. Cette vidéo va être diffusée partout.
Le monde entier va me voir… et la sensation est indescriptible. Époustouflante.
Merveilleuse. Incroyable. Tout ça, et plus encore. Si j’ajoute à ça le fait que Wes
est là avec moi et que j’ai trois nouveaux amis… la vie est géniale !
*
* *

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* *
Le volume de la télé est au minimum, et j’écoute d’une oreille les dernières infos
de Miami. Je ferme ma dernière valise pleine des vêtements qu’Heather et Anton
m’ont achetés, prête à les rapporter en Californie pour les stocker dans un garage
avec le reste de mon appartement.
Je repense à la dernière semaine que j’ai passée ici. Comme le mois à Hawaï, je
me souviendrai de mon séjour à Miami comme un des plus beaux moments de
ma vie. La visite de Wes – et notre décision de former un couple – est bien
évidemment un des temps forts de mon séjour.
Il est parti le lendemain de la fin du tournage en disant qu’il ferait de son mieux
pour se libérer quand je serais là, mais qu’il aurait sans doute à travailler un peu
dans le bureau de chez lui. Pour moi, tout ce qui compte, c’est d’être avec lui et
de me reposer avant mon prochain boulot.
Je vais à Dallas, avec un magnat du pétrole. Je ne sais pas grand-chose de ce
qu’il attend de moi, sauf que je dois faire semblant d’être la sœur qu’il n’a
jamais connue. Apparemment, mon apparence n’est pas importante. La seule
chose qui compte, c’est que mon nom et ma date d’anniversaire soient les
mêmes que les siens. Je n’ai pas percuté tout de suite, mais Millie ne m’a pas dit
comment il s’appelle. Avec quelques recherches, j’ai découvert son nom,
Maxwell Cunningham, et qu’il détient cinquante et un pour cent de Cunningham
Oil & Gas, une des vingt-cinq plus grandes compagnies pétrolières du monde.
Internet m’a également appris qu’il a hérité de ses parts il y a un an, mais je n’ai
pas trouvé à qui appartiennent les parts restantes. Je sais que dans la plupart des
grandes entreprises, de plus petits pourcentages sont souvent détenus par des
investisseurs. Quoi qu’il en soit, il me paie pour être sa sœur, Mia Saunders.
C’est étrange, ça c’est sûr. Quand je clique sur sa photo, j’ai l’impression de
l’avoir déjà vu, je me demande si je l’ai croisé à un des dîners de riches auxquels
j’ai participé ces derniers mois.
Je saurai cela bien assez tôt.
Je m’assieds à table, devant mon papier à lettres habituel.
Anton,

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Comment suis-je censée te remercier de m’avoir aidée à me remettre d’un tel
traumatisme ? Ce n’est pas comme si je pouvais acheter une carte toute faite au
supermarché qui dit : « Eh, tu m’as évité de sombrer dans la dépression et
l’alcool. Merci mon pote ! » Ha ha.
Sincèrement, tu m’as appréhendée avec l’attention et le respect d’un véritable
ami. Tu m’as fait part de ta propre histoire et m’as permis de te raconter la
mienne. Cela m’a sauvée.
Je suis ravie que tu aies recadré ta relation professionnelle et amicale avec
Heather. C’est une personne magnifique, avec une dévotion professionnelle
incroyable. Tu ne pourras jamais lui donner le salaire qu’elle mérite, parce que
même toi tu n’as pas assez d’argent. Assure-toi seulement de la payer en
compliments et en amour pour le travail qu’elle fait si bien. Même les managers
les plus dures à cuire ont besoin d’une petite récompense de temps en temps.
Surtout quand cette manager est aussi ta meilleure amie.
Je n’oublierai jamais ce clip que j’ai tourné avec toi, mais ce dont je me
souviendrai le plus, c’est notre balade à moto. C’était d’un autre monde. Merci
de m’avoir prêté tes joujoux ;-)
Je sais que cette chanson va enflammer la terre entière. Je l’achèterai dès la
sortie.
Jusqu’à la prochaine fois,
Ta Lucita,
Mia
Heather
Je me sens chanceuse de t’avoir rencontrée. J’espère que tu sais qu’où que je
sois, tu as toujours une amie. Appelle-moi, écris-moi, emmerde-moi aussi
souvent que tu le souhaites, et j’en ferai de même. Pourquoi ? Parce que c’est ce
que font les amies ! J’ai hâte que tu me racontes tout ce que te fait subir Anton.
Je suis contente que vous ayez réglé vos problèmes. Les meilleurs amis, ceux qui
le restent toute leur vie, trouvent toujours un moyen de se réconcilier.
Bonne chance pour ton nouveau travail !
Ton amie,
Mia

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Je laisse les enveloppes sur la table avec la clé de l’appartement, je saisis les
poignées de mes valises et je ferme la porte derrière moi. Anton et Heather
pensent que nous allons nous retrouver ici dans deux heures, mais les adieux ne
sont toujours pas mon truc. Je préfère m’échapper seule vers ma nouvelle
destination, sans un regard en arrière, consciente que ma prochaine aventure est
au coin de la rue.
J’ai repris le contrôle de ma vie et je suis contente de mes décisions, de ce que je
fais et de ce qui se dessine pour mon avenir. Les possibilités qui s’offrent à moi
sont infinies, surtout quand je repense à mon surfeur réalisateur, en maillot de
bain, les pieds dans le sable, me faisant signe de le suivre dans les vagues.
Il est temps de rentrer à la maison… du moins pour le moment.

1. Oublie-moi.

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AOÛT

Mia a toujours été très douée pour prétendre être quelqu'un qu'elle n'est pas, et
cette faculté va bien lui servir pour sa prochaine mission.

Cette fois, c'est au Texas que Mia se retrouve, auprès d'un magnat du pétrole,
Maxwell Cunningham. Son père est décédé récemment et a laissé une bombe
dans son testament. Il a légué 49% de sa fortune à une jeune femme, la soeur de
Maxwell, dont il ce dernier n'a jamais entendu parler et qui répond au nom de...
Mia Saunders. Il est précisé que Maxwell a un an pour retrouver cette soeur, ou
il perdra son empire au profit d'un groupe d'investisseurs peu scrupuleux. Or, il a
trouvé Mia...

Mia arrive donc dans cette famille de cow-boys, prétendant être quelqu'un
qu'elle n'est pas et roulant dans la farine tous les gros bonnets qui tournent autour
de la fortune de Maxwell.

Elle va s'attacher plus que de raison à cette famille sympathique, qui l'accueille à
bras ouverts. Elle aura du mal à repartir...
Un mois riche en rebondissement étonnants.

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Chapitre 1

Je suis à peine sortie de l’aéroport que des bras me soulèvent et me font


tournoyer dans les airs. Des lèvres moites se posent sur les miennes et je baigne
dans le soleil, l’océan et le parfum de mon homme. Je ne saurais dire si je suis
détendue ou excitée. Je suce la lèvre inférieure de Wes comme une sangsue,
affamée, désespérée de le sentir tout entier sur moi.
Enveloppe-moi. C’est ma seule pensée tandis que Wes tourne ma tête d’un côté
puis de l’autre pour approfondir le baiser et marquer son territoire. C’est loin
d’être approprié si on considère qu’on est en public.
– Trouvez-vous une chambre ! s’exclame une voix d’adolescent, brisant nos
retrouvailles.
Mon nez caresse le sien, savourant son odeur, la manière dont ses cils s’agitent
comme les ailes d’un papillon, comme s’il avait lui aussi du mal à se faire à
l’idée que nous formons un couple. Wes et Mia.
– Salut, Bébé, je murmure d’une voix grave qui trahit combien il m’a manqué.
Sa main quitte ma nuque pour remonter dans mes cheveux.
– Ma meuf, chuchote-t-il d’un ton émerveillé, secouant la tête avant de
m’embrasser tendrement. Allez viens, rentrons à la maison. Miss Croft a préparé
un véritable banquet pour ton retour.
– Ah bon ? Tu as dit à Judi que je venais ?
– Bien sûr. Il fallait bien que je lui dise que ma petite amie venait passer la
semaine, histoire qu’elle soit prête !
– Que vous êtes attentionné, Monsieur Channing…
En entrant dans la limousine, je cambre les fesses. Son regard ne manque pas de
se river dessus, comme un chat sur une souris. Je les remue, puis je cherche son
regard.

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– … troisième du nom, j’ajoute avec un clin d’œil.
Il secoue la tête et me met une fessée qui claque comme une bulle de chewing-
gum. Elle va laisser une trace, celle-ci.
– Monte, Chérie. Le temps passe et je veux te prendre avant de te nourrir.
Il entre à son tour dans la limousine avec une grâce inégalée. Cet homme est
sublime. Il est grand et mince, avec de beaux abdos sculptés qui se devinent sous
son polo fin. Son bermuda et ses Vans révèlent qu’il est surfeur avant d’être un
riche réalisateur de films.
Le chauffeur vient juste de démarrer lorsque Wes remonte l’écran pour séparer
les deux habitacles. Je me demande un instant s’il va faire le premier pas, mais
c’est une question idiote. Nous sommes bien trop impatients après une semaine
de séparation. Il m’attire brusquement sur ses genoux et saisit mon cul tandis que
je m’installe à cheval sur lui.
– Tu vas réaliser mon fantasme et me laisser te prendre ici ?
Ses yeux verts sont brûlants de désir. Je secoue la tête et frotte mon entrejambe
contre son érection grandissante. Je balance mon bassin d’avant en arrière et je
continue jusqu’à ce que nous soyons tous les deux haletants.
– Non. C’est moi qui vais te prendre, je réponds en souriant.
Il remonte ma jupe et passe sa main dans ma culotte pour mieux empoigner mes
fesses.
– Chérie, fais ce que tu veux de moi. Prends ce que tu veux, je suis tout à toi. Du
moment que je suis en toi, je ferai tout ce que tu voudras.
Ses paroles m’excitent encore plus et mon clitoris se met à pulser. Je ne perds
pas de temps et me relève pour me débarrasser de ma culotte avant de
m’agenouiller à ses pieds pour m’occuper de son short. Bingo ! Sa queue jaillit,
je la saisis immédiatement. Wes ferme les yeux et grogne, laissant retomber la
tête contre le siège en cuir. Une goutte de liquide préséminal couronne son
gland, trop belle pour ne pas l’avaler.
– Putain ! gronde-t-il en serrant les dents et en baissant la tête au moment où je
la lèche.
Je lève les yeux et découvre mon homme sur le point de perdre le contrôle. Dans
quelques secondes, je sais qu’il me ramènera sur ses genoux pour me prendre. Je

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le sais, et il le sait. Wes a l’habitude de garder le contrôle. Je sais qu’une fois que
j’aurai posé mes lèvres sur sa verge, je n’aurai que quelques instants pour en
profiter. Je ne dis pas que Wes n’aime pas ma bouche, bien au contraire, mais
une pipe ne l’intéressera qu’une fois qu’il m’aura fait grimper au rideau.
Je tiens fermement la base de son sexe et suce son gland, le titillant avec ma
langue, avalant le liquide qui en sort. Quand il avance le bassin, je le prends dans
ma gorge et lorsqu’il touche le fond, je déglutis autour de lui. Comme prévu, il
craque. Il saisit ma nuque et fait quelques allers-retours.
– Baiser ta bouche, grogne-t-il. Oh oui, prends-la, gronde-t-il. C’est tellement
bon. Prends-moi encore dans ta gorge, Bébé.
Il met un grand coup de bassin et je détends ma mâchoire en respirant par le nez.
Une fois au fond de ma gorge, il s’immobilise.
– Tu me prends tellement profond. Putain Mia, je t’aime.
Il se retire entièrement et me saisit sous les aisselles pour me soulever sur ses
cuisses. Mes jambes sont écartées, ma chatte ouverte, et il s’aligne sur ma fente.
– Maintenant, prends ce qui est à toi, Chérie.
Je ne perds pas une seconde. Je le prends en moi, profondément, comme j’ai
imaginé le faire toute la semaine. Comme souvent, il glisse sa main entre nous
pour titiller mon clitoris et je retiens mon souffle. J’accélère le rythme, l’invitant
en moi jusqu’à ce que je ne sache bientôt plus où il commence et où je finis. Le
temps semble ralentir et nous ne sommes bientôt plus qu’une masse informe de
chaleur, de plaisir et de luxure. Wes tient mes épaules, m’enfonçant sur lui au
moment où il se soulève pour plonger en moi. Je gémis dans sa bouche et il
avale mon cri.
Mon orgasme jaillit soudain, sans prévenir, s’appropriant tous mes nerfs,
remplissant chaque pore de ma peau tandis que Wes continue de me marteler
avec sa verge épaisse. Lorsque je ne suis plus capable de le chevaucher, il se
penche en avant, passe sa main dans mon dos et, un genou par terre, il m’allonge
sur le sol. Je suis perdue dans mon euphorie et je sens déjà un nouvel orgasme se
préparer.
– Wes, Bébé…
C’est tout ce que je parviens à dire.

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Il répond en remontant mes genoux sur ma poitrine afin de s’enfoncer un peu
plus en moi. C’est à la fois impossible et réalisable. Un cri m’échappe et, cette
fois, il n’essaie pas de l’étouffer. Ses coups de bassin accélèrent.
– Mon Dieu, ce que ta chatte m’a manqué. J’adore ta chatte, Bébé. Je veux
mourir ici. Un jour, quand on aura quatre-vingt-dix ans, je mourrai en te baisant.
Comme ça.
Ses hanches dessinent un cercle et il s’appuie de tout son poids sur moi, me
pénétrant encore plus loin.
– Donne-le-moi, grogne-t-il.
– Je te l’ai déjà donné, je dis, lui rappelant que j’ai déjà joui.
Bon sang, cet homme est une machine. Il ralentit son rythme, prenant son temps,
alors que je le croyais en fin de course.
– Non, il m’en faut un autre. Je veux sentir ta chatte étrangler ma bite. Je veux
jouir quand tu es toute serrée. Ensemble, Chérie.
Il m’embrasse et mord ma lèvre et, conscient de ce dont j’ai besoin, cherche de
nouveau mon clitoris tout en poursuivant ses va-et-vient. Les parois de mon sexe
se contractent, puis mes cuisses, mes abdos et enfin mes pieds se crispent,
verrouillant sa queue en moi, comme il le voulait.
– C’est ça. Putain Mia, c’est tellement bon.
Il s’enfouit une dernière fois et s’immobilise, libérant sa semence en moi.
Lorsque ses derniers soubresauts s’éteignent, il se laisse tomber sur moi puis
roule sur le côté et m’emporte avec lui.
Un sourire niais apparaît sur son visage et il semble parfaitement paisible.
– Ça va mieux ? je demande en gloussant.
– Je vais toujours mieux quand je suis avec toi.
– Moi aussi.
*
* *
– Darling ! s’exclame Judi en ouvrant les bras.
Je cours jusqu’à elle et la serre contre moi.
– Je suis ravie de te voir, ma puce, dit-elle en étudiant mon visage.

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Son accent anglais est adorable et chacun de ses mots semble couvert d’un
nectar de fleur doux et délicieux.
– Je suis contente d’être là, Judi, je réponds en souriant.
Je lève le nez, une succulente odeur d’ail, d’oignons grillés et de poivrons verts
me met l’eau à la bouche.
– Qu’est-ce qu’on mange ? En tout cas, ça sent fabuleusement bon.
À part une barre aux céréales, je n’ai rien mangé durant le vol de six heures entre
Miami et Malibu, et j’ai besoin d’un bon repas après notre partie de jambes en
l’air. Jamais je ne pourrai suivre Wes et son appétit sexuel insatiable si je ne me
nourris pas comme il faut.
Le regard de Judi pétille tandis qu’elle retourne en cuisine.
– De bons plats qui réchauffent le cœur. Pour te rappeler que tu es à la maison,
dit-elle en regardant Wes d’un air exaspéré. Des côtelettes de porc, des légumes
grillés, un couscous au parmesan et du bon pain à l’ail. Ça te va ?
– Ça a l’air divin.
Elle aurait pu s’arrêter à « côtelettes de porc ». À Miami, nous mangions surtout
au restaurant et lorsque ce n’était pas le cas, nous nous faisions livrer à manger.
Anton et Heather n’ont pas le temps de faire les courses et ils sont si souvent en
déplacement qu’ils n’embauchent pas de cuisinier, même si Anton en aurait
largement les moyens. En tout cas, il devrait employer une nutritionniste pour
l’aider à rester en bonne santé. Il passe beaucoup de temps à entretenir son corps,
mais s’il mangeait des aliments moins riches, il n’aurait pas à le faire. Je me
promets d’en toucher un mot à Heather maintenant qu’elle est officiellement sa
manager, elle aura moins de temps pour se soucier de ce qu’il veut manger
matin, midi et soir.
– Viens, viens, dit-elle en tapotant le tabouret de bar. Dis-moi ce que tu as fait
depuis la dernière fois qu’on s’est vues.
Ce que j’ai fait ? Hmm. Elle devra se contenter d’une version censurée.
– Eh bien, j’ai pas mal voyagé. Je suis allée à Seattle, Chicago, Boston, New
York, Washington, Hawaï et Miami.
Elle hoche la tête tout en remuant la sauce dans la casserole.

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– Tu as fait des rencontres intéressantes ? demande-t-elle en me transperçant du
regard.
– J’ai rencontré beaucoup de gens, Judi. Je me suis fait pas mal d’amis.
– Et mon fiston, c’est ton ami ? demande-t-elle d’une voix qui trahit tout l’amour
que l’ancienne nounou de Wes lui voue encore.
Je pose mes coudes sur le bar et pose mon menton dans ma main en la regardant
dans les yeux.
– Je crois que tu sais que Wes est plus qu’un ami, Judi.
Elle hausse les sourcils et pose une main sur sa poitrine.
– Ah bon ? Je n’en sais rien du tout. Éclaire-moi, tu veux ?
Je tire sur une mèche de cheveux pour l’enrouler autour d’un doigt.
– Je suppose qu’on peut dire que Wes et moi avons trouvé un accord. Nous
sommes officiellement ensemble.
– Ensemble, répète-t-elle d’un ton accusateur qui me surprend.
Que s’est-il passé depuis que je suis arrivée et qu’elle m’a prise dans ses bras ?
– Est-ce que ça pose un problème ?
– Non, non, répond-elle en secouant la tête. Qu’est-ce qui te fait dire ça ?
– Ben, tu es un peu froide, tout à coup. J’ai dit quelque chose qu’il ne fallait pas
?
Elle se penche pour tapoter ma main sur le comptoir.
– Pas du tout, ma puce. C’est juste que quand tu es partie, mon fiston était très
triste, tu lui as beaucoup manqué. Et puis cette snob a commencé à venir de
temps et temps, et je me suis fait du souci.
Ah, je vois.
– Gina. Ça va, je suis au courant.
– Et tu t’en fiches ?
Je réfléchis quelques secondes à ma réponse. Peu de gens comprendront notre
relation. Bon sang, même moi j’ai du mal à suivre, surtout maintenant, alors
qu’elle est si nouvelle.
– Wes et moi avons toujours eu des sentiments l’un pour l’autre.
Elle hoche la tête comme si cela n’avait rien de surprenant.

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– Et même si on n’était pas en couple, on est restés en contact. Il était libre de
faire ce qu’il voulait, et moi aussi. Maintenant que nous avons enfin accepté ce
qui se passe entre nous, nous allons prendre le temps de l’appréhender chaque
jour un peu plus, pour voir ce qu’on en pense. Tu comprends ?
– Ce ne sont pas mes oignons, dit-elle en haussant les épaules. Mais j’aime voir
le sourire de mon fiston quand il entre dans une pièce avec toi. Il a passé toute la
semaine à préparer ton arrivée et à s’assurer que tu aurais de quoi t’habiller,
d’ailleurs les vêtements sont dans son placard, ajoute-t-elle avec un sourire lourd
de sous-entendus.
– Alors il m’a installée dans sa chambre ? je demande en riant.
– Oui, et demain matin, j’ai pour ordre de t’emmener à ton appartement, avec
deux déménageurs, pour faire tes cartons. Il veut que tu les apportes ici.
– Euh, quoi ? Il veut que je fasse mes cartons et que j’emménage ici ?
Définitivement ? Sans m’avoir prévenue ? Pas question.
– Je ne me suis pas exprimée clairement ? demande-t-elle en fronçant les
sourcils.
Je frappe le bar avec la paume de la main, assez fort pour qu’un fourmillement
remonte jusqu’à mon coude.
– Il semblerait que Lord Channing et moi devions discuter. Tu peux annuler tes
projets pour demain, ta matinée est libre.
Judi tapote de nouveau ma main.
– Ma puce, tu ne sais vraiment pas à qui tu as à faire, on dirait. Les déménageurs
seront bien là demain. On décolle d’ici à dix heures.
À mon tour de froncer les sourcils.
– Ok, ma chérie, crois ce que tu veux.
– Pourquoi tu ne me crois pas ? C’est mon appartement ! C’est moi qui décide,
et j’ai décidé que je n’emménageais pas ici !
Ce n’est pas que je n’aimerais pas qu’on me cuisine de délicieux dîners tous les
jours ni passer des heures sur un transat face à l’océan, ou encore dormir dans le
nuage merveilleux qu’est le lit de Wes… Mais il est hors de question que je le
fasse maintenant, simplement parce que mon nouveau mec l’a décidé.

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Judi arrête de remuer la sauce, baisse le feu et me regarde dans les yeux. Elle
appuie ses coudes sur le bar et se penche en avant.
– Mon poussin, je connais Wes depuis qu’il est tout petit. Il y a très peu de
choses qu’il n’obtient pas lorsqu’il a décidé que c’est ce qu’il veut. Je te
conseille de l’apprendre tout de suite. Si c’est toi qu’il veut, c’est toi qu’il aura,
ou bien il mourra dans la bataille.
Si je prends le temps d’y réfléchir, je dois avouer qu’être convoitée ainsi est plus
qu’agréable. Cependant, si Wes pense que je vais me laisser embarquer ici même
sans m’en avoir parlé, il se fourre le doigt dans l’œil.
– Eh bien, mon cher petit ami va devoir me poser lui-même la question, je dis
avec une détermination que je m’efforce de ressentir.
– Te demander quoi ?
Wes revient de son bureau où il est allé consulter ses mails.
– Judi me dit que tu veux qu’elle et deux déménageurs aillent chez moi demain
pour rapporter toutes mes affaires ici.
Je descends du tabouret, pose une main sur ma hanche et penche la tête sur le
côté, la pose sérieuse que j’ai peaufinée au fil des ans.
Wes fronce les sourcils et hausse les épaules.
– Tu n’as pas envie d’être avec moi ?
Bon sang, dit comme ça, je n’ai guère le choix.
– Si, bien sûr.
– Et tu voudrais vivre avec moi, un jour ?
– Ben, ouais, je réponds, ne comprenant pas où il veut en venir.
– Ok.
Il vient vers moi et pose ses mains sur le comptoir, de part et d’autre de mon
corps, me bloquant contre le bar. Il baisse la tête pour me regarder dans les yeux,
vert sur vert. Je sens son souffle sur mes lèvres, un frisson d’excitation parcourt
mon corps.
– Mia, Chérie, veux-tu que toutes tes affaires soient ici et que ma maison
devienne la tienne ?
Je me lèche les lèvres et me perds dans ses yeux. Il est canon. Non, sublime. Je
retiens mon souffle, envoûtée par son charme, lui attend patiemment que je lui

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donne ma réponse.
– D’accord, je veux bien emménager avec toi.
Il sourit jusqu’aux oreilles et mon cœur fond.
– Je t’aime.
Si c’est sa réponse à tout, il aura toujours gain de cause. Sans rire, je vais devoir
me préparer pour un avenir plein de « je t’aime » et accepter leur effet sur mon
cerveau.
– Je t’aime aussi, je réponds.
Il m’embrasse délicatement, puis il fait un pas en arrière et frappe dans ses
mains.
– Bon, tout est arrangé. Le dîner est prêt, Judi ? Tout est en ordre ?
Je me tourne vers elle, elle ricane en remplissant nos assiettes.
– Tout est parfait, fiston.
Elle me regarde et me lance un clin d’œil. J’ai envie de la détester d’avoir eu
raison, mais c’est impossible. L’amour qu’elle a pour Wes repose sur les
décennies qu’ils ont passées ensemble et, en fin de compte, elle le connaît mieux
que moi.
Pour l’instant. Mais… pas pour longtemps.

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Chapitre 2

Je ferme le cinquième carton avec du scotch, puis je jette mes fringues sur la
pile déjà existante. Dans la cuisine, Judi emballe les quelques ustensiles que je
possède en fredonnant joyeusement.
– J’ai fini ! déclare-t-elle, ce qui me fait grimacer. Eh bien, mon petit, pourquoi
es-tu d’humeur si ronchonne ?
Je penche la tête d’un côté puis de l’autre, cherchant à libérer la tension qui s’est
accumulée dans ma nuque, mais ça ne craque pas.
– Je ne sais pas. Je déteste déménager. Ça semble toujours si définitif, comme si
lorsque c’est fait, il n’y aurait pas de retour possible.
– Mais non, il ne faut pas penser comme ça, mon poussin. Tu seras très bien
avec nous et, bientôt, ce sera comme si tu avais toujours été là.
Super. Sauf que, bientôt, je vais devoir repartir pour rencontrer mon nouveau
client. Wes le sait, mais nous n’en avons pas parlé, or j’ai besoin de savoir que je
peux finir ce que j’ai commencé sans qu’il n’agite une liasse de billets sous mon
nez à chaque début de mois. Je n’ai surtout pas envie de vivre à ses crochets. Je
suis déterminée à ne jamais profiter de sa fortune, même s’il semble en aimer
l’idée.
À midi, nous avons déjà fini, trois heures ont suffi à mettre toute ma vie dans des
cartons.
– J’espère que tu as une bonne raison de m’appeler, grogne Ginelle quand je
l’appelle pour me plaindre, parce que j’ai en ligne de mire un client bourré aux
as.
Je m’étouffe à moitié au téléphone.
– Quoi ? rétorque-t-elle. Ne me juge pas, je ne rencontre pas un mec génial
toutes les trois semaines, moi ! Il faut bien que je prépare mes vieux jours.

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– Gin, tu es sérieuse ? C’est toi qui m’as dit que les clients pleins aux as
n’existaient pas et que ces pauvres types perdaient à petit feu leur maison, leur
femme et toutes leurs économies dans l’espoir de battre le casino. Ne te fais pas
avoir. Un vrai parieur serait dans un salon privé avec ses potes aussi riches que
lui. Il ne serait pas en train de faire le malin devant une danseuse de Vegas.
Ressaisis-toi et dis-moi plutôt ce qui ne va pas, tu veux ?
Elle éclate une bulle de chewing-gum et même si elle a failli me percer le
tympan, je préfère ça plutôt que l’entendre cracher sa fumée dans le téléphone.
– J’ai emménagé chez Wes, au fait.
Elle ne mâche plus son chewing-gum et la ligne devient silencieuse. Je regarde
l’écran, mais l’appel est toujours en cours.
– Gin ? Allô ?
– Tu as emménagé avec le Bachelor ? Tu te fous de ma gueule ! s’exclame-t-
elle.
– Ben, pas exactement. Enfin, plus ou moins, ouais. Peut-être. Euh… oui ? je
bégaie en rongeant un ongle.
– Tu as emménagé avec Malibu Ken ?
Je cligne des yeux et attends la suite.
– Monsieur « Règle numéro un » ?
Il vaut mieux que je me taise. Je connais Gin depuis toujours et je sais qu’il faut
lui laisser le temps de digérer.
– Le demi-dieu et sa planche de surf ? demande-t-elle d’une voix rêveuse. Le
scénariste ? Celui qui a changé le physique de son héroïne pour qu’elle
ressemble à ma meilleure amie ? Tu as emménagé chez lui ? Dans son château à
Malibu ?
– Ce n’est pas vraiment un château… je commence.
– Chut ! Tu es complètement folle ou quoi ? Tu as besoin de voir un médecin ?
– Je ne crois pas, non.
– D’accord. Alors, dis-moi une chose. Je suis désolée de te demander ça, ma
chérie, mais il le faut.
Je retiens mon souffle en attendant sa question.
– Est-ce que tu fais ça à cause du connard qui t’a agressée à Washington ?

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Je ferme les yeux et croise les bras comme pour me procurer un peu de
réconfort.
– Non, ma belle. Pas du tout. Tu sais que Wes est venu à Miami pour mon
anniversaire ?
– Ben oui, c’est moi qui l’ai envoyé.
– Et quand il était là, nous avons tous les deux admis nos sentiments l’un pour
l’autre. Je l’aime, Gin.
– Bon sang, Mia, pas encore ! s’exclame-t-elle. Tu aimes tout le monde. C’est
dans ton ADN. Tu rencontres un beau gosse, tu couches avec lui, tu tombes
amoureuse de lui. Ce n’est ni la première fois ni la dernière que tu te comportes
ainsi.
Ma meilleure amie n’a pas tort. Par le passé, c’était mon mode opératoire, en
effet. Mais plus maintenant, pas avec Wes.
– Sauf que je n’ai pas fait ça avec les autres mecs avec qui j’ai couché cette
année. Comment tu l’expliques ?
– Ben, si t’y réfléchis, ça fait un sur trois. Tu auras emménagé avec un tiers des
types avec qui t’as couché. Trente-trois pour cent.
Mince, j’ai appelé la mauvaise sœur, c’est à Maddy que j’aurais dû en parler.
Elle aurait été ravie pour moi. Elle a trouvé l’homme de sa vie et elle va
l’épouser, et les nanas comme elle veulent que tout le monde soit heureux et
amoureux autour d’elles.
– Mia… je… je ne veux pas que tu souffres de nouveau, c’est tout, dit-elle.
– Je sais, Gin. Je sais. Mais tu sais que je me pose des questions sur lui depuis
plusieurs mois. Si je n’avais pas eu à m’occuper des problèmes de papa, je serais
restée avec lui.
– Si tu n’avais pas eu à gérer les histoires de ton père, tu ne l’aurais jamais
rencontré !
Elle n’a pas tort.
– Elle est passée où, son autre pouffiasse ? demande-t-elle d’une voix
dédaigneuse.
– Elle est partie.

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– Partie. Comme ça. Pouf, disparue ? dit-elle pour me faire savoir qu’elle ne me
croit pas.
– C’est ce que dit Wes.
– Il n’est peut-être pas si stupide, en fin de compte.
Je pouffe de rire, ce qui détend un peu l’atmosphère.
– Sois heureuse pour moi, Gin, je chuchote.
– Ma chérie, tu sais bien que je le suis. Je le suis toujours, mais tu sais aussi que
ta meilleure amie doit te protéger même quand tu penses que ce n’est pas
nécessaire. C’est dans le mode d’emploi des meilleures amies, juste après la
section qui stipule qu’il faut consoler l’autre coûte que coûte, même quand elle
ne se souvient pas du type avec qui elle a couché la veille. Mon rôle est de
m’assurer que, quand tu te comportes comme une salope, tu ne t’en rendes pas
compte.
Il n’y a qu’elle pour sortir ce genre d’argument, mais son raisonnement a du
mérite. En fin de compte, l’essentiel, c’est qu’elle tient à moi.
– Merci de t’inquiéter et de t’occuper de moi… même si tu n’es qu’une traînée.
– Je vois ! Alors, on en revient à ça. Tu me le paieras, espèce d’obsédée du cul.
– Ah ! Au moins, je ne remue pas le mien pour gagner ma vie.
Elle fait mine de retenir son souffle en poussant un cri aigu.
– Au moins, je n’écarte pas les cuisses pour de l’argent, espèce de peste !
– Je t’aime, Gin.
– Je t’aime aussi, ma verrue. On se voit bientôt ?
– J’espère bien, p’tit cul plat.
Je me dépêche de raccrocher, parce que c’est la règle. J’ai gagné ! Je lève le
poing puis je fais une danse de victoire, remuant mes fesses comme Maria m’a
appris à le faire à Miami. Car oui, je sais vraiment danser maintenant !
*
* *
– Je ne veux pas que tu partes.
Wes avance le bassin et s’enfonçant profondément en moi. Je sens déjà son sexe
durcir de nouveau alors que nous venons de conclure une intense partie de
jambes en l’air.

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– On en a déjà parlé et tu étais d’accord.
Il fronce les sourcils et se retire un peu pour s’enfouir de nouveau. Notre sueur
s’est à peine évaporée qu’il se prépare déjà à remettre le couvert. Ce type est
insatiable, et moi je suis une veinarde.
– Je sais, mais je me suis dit que je pouvais peut-être te convaincre en employant
un autre moyen… un moyen plus agréable…
Il se relève pour prendre mon téton dans sa bouche. Ses coups de langue me font
onduler contre lui, cherchant à le prendre plus profondément en moi.
– Tu vois, tu commences déjà à comprendre, dit-il alors que nous gémissons tous
les deux.
Il sourit jusqu’aux oreilles et m’abaisse sur lui en soulevant ses hanches. Je pose
mes mains sur ses pectoraux et je me relève avant de m’empaler sur son sexe
dur.
– Argh, putain ! Préviens-moi, la prochaine fois. Tu vas me castrer avant qu’on
se soit amusés.
Il se redresse et pousse sur ses talons pour reculer contre la tête de lit et me
prendre dans ses bras. Il plie les jambes et le changement d’angle est divin. Je
pourrais mourir dans cette position. Je soupire et saisis sa nuque pour rapprocher
nos visages. Poitrine contre poitrine, langue sur langue, cœur contre cœur, nous
restons ainsi à nous dévorer l’un l’autre. Il bande en moi, mais nous ne bougeons
pas. Je l’embrasse en déversant tout mon amour dans ce baiser. Je veux qu’il
sache que notre histoire est bien réelle et que, où que j’aille, mon engagement
auprès de lui est sans faille.
– Tu vas quand même prendre l’avion demain, c’est ça ? grogne-t-il en mordant
ma lèvre.
Je hoche la tête et frotte mon front au sien. Nos bouches sont si proches l’une de
l’autre que nous respirons le même oxygène. C’est magique.
Comme il l’a dit… c’est le paradis. Soudain, je réalise que, si tout va bien, Wes
et moi pourrions vivre ainsi pour toujours. Nos vies seront pleines de partage,
d’amour, de bonheur. Hélas, avant de m’enfermer dans cette superbe bulle, je
dois faire quelque chose toute seule, pour papa et pour moi.

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– Wes, Chéri, tu sais qu’il le faut. Notre relation ne peut pas fonctionner si tu
rembourses la dette de mon père.
– Mais ce serait tellement simple si tu prenais mon argent ! Tu rembourserais
l’autre enfoiré et tu resterais ici, avec moi. Tu ne veux pas rester ici ? Faire table
rase et reprendre à zéro ?
– J’adorerais, Wes, mais je me connais. Je sais qu’au fond, j’aurai toujours le
sentiment de t’être redevable. Je n’aurai jamais les moyens de te rembourser
cinq cent mille euros et je ne peux pas me lancer dans cette relation en étant
endettée auprès de toi.
Ses épaules s’affaissent et il prend mon visage entre ses mains.
– Je déteste savoir que tu vas passer ton temps avec un autre homme. Un homme
qui aura le droit de te séduire et de s’enticher de toi.
– Ça n’arrivera pas.
– Ah non ? demande-t-il en fronçant les sourcils avec un air de défiance.
– Non.
– Mais ça m’est bien arrivé, à moi. Je suis tombé amoureux de toi dès que je t’ai
vue. Je parie que la moitié des mecs, si ce n’est tous, ont eu le béguin pour toi.
Qu’est-ce qui me dit que durant les cinq prochains mois, l’un d’eux ne va pas
être le mec le plus incroyable que tu aies rencontré de toute ta vie ? Et s’il décide
de te séduire ?
– C’est impossible.
– Mais c’est…
Je le fais taire en posant deux doigts sur ces lèvres que je meurs d’envie de
dévorer.
– Non. Ce n’est pas possible, parce que j’ai déjà été séduite. J’ai déjà rencontré
le mec le plus génial du monde et je suis déjà raide dingue de lui.
Un sourire enfantin s’étend sur ses lèvres et je me dis que c’est moi qui aurai le
privilège de regarder ce visage magnifique toute ma vie. Il est temps de lui
montrer combien je tiens à lui.
– Mon cœur t’appartient, je chuchote dans son oreille. Mon corps t’appartient
parce que je t’aime. Il va falloir que tu me fasses confiance.

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Il ferme les yeux, on dirait un ange. Ses cheveux dorés sont magnifiques. Je
dégage une petite mèche de son front et caresse sa tempe du bout du doigt, puis
sa mâchoire et son menton. Je relève sa tête et il ouvre les yeux.
– Je t’aime, Wes. Toi. Fais-moi confiance, s’il te plaît. Je vais faire ce qu’il faut,
mais je ne te trahirai pas. Crois-moi, je déclare, avant de l’embrasser en douceur.
Toutefois, ses lèvres deviennent vite plus fermes et sa langue plus désespérée. Il
ouvre plus grand la bouche et saisit ma nuque, prenant le contrôle du baiser. Nos
corps fusionnent et cela devient si charnel qu’il ne reste plus que le besoin
animal de s’accoupler.
– J’ai tout le temps envie de toi, grogne Wes.
Il plonge ses ongles dans mon épaule et relève le bassin, me transperçant à
chaque aller-retour. Un plaisir intense se déploie dans mes veines et
m’engourdit. Je picore ses lèvres et promène ma bouche sur sa joue pour y
déposer des baisers mouillés jusqu’à son oreille, puis je la suce pour le faire
gémir.
– Toujours envie de plus, je confirme alors que son corps se contracte.
Je me soulève en contractant ma chatte autant que possible, voulant nous
procurer le plus de plaisir possible. Lorsque je resserre les parois de mon sexe, sa
mâchoire se verrouille. J’adore le voir ainsi. Je veux lui offrir une telle extase
qu’il oubliera toutes les femmes qui sont venues avant moi.
Coup après coup, nous nous frappons l’un l’autre avec autant de plaisir que nous
pouvons le tolérer. Nous ne faisons pas l’amour. Ce n’est pas du sexe non plus.
C’est de la baise hardcore, pas tout à fait furieuse mais loin d’être mignonne. Il
susurre des cochonneries plutôt que des mots d’amour et je mouille de plus belle,
encore plus folle de désir pour lui.
– Je veux que ta chatte soit à vif.
Je me tiens à la tête de lit et me rassieds sur lui quand il se soulève. Il me prend
avec une telle force et une telle intensité que je perds ma capacité à parler. Une
litanie de borborygmes, de grognements et de gémissements m’échappe alors
que je chevauche Wes et me prépare à jouir pour la deuxième fois ce soir.
Wes mord mon téton et je pousse un cri strident. Je tiens sa tête contre mon sein,
comme une mère avec son nouveau-né, car je ne veux pas qu’il arrête de le

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sucer, de le mordre, d’envoyer ces décharges électriques dans mon clitoris
chaque fois qu’il tire dessus.
– J’en connais une qui aime qu’on s’occupe de ses seins, hein, Chérie ?
Je suis incapable de répondre, perdue dans cette sensation merveilleuse. Il
change de sein et titille l’autre, et je me mets à dessiner des cercles avec mon
bassin, si mouillée que j’entends le bruit de nos corps qui frappent l’un contre
l’autre. Sa queue glisse profondément en moi et me donne le vertige. C’est à la
fois l’enfer et le paradis. Les allers sont délicieux et les retours encore plus, car il
faut y ajouter la peur absurde que son corps quitte le mien, or je ne veux plus
jamais le laisser partir.
– Jouis, Chérie. Je veux sentir ta petite chatte me verrouiller en elle. J’adore sa
façon de ne jamais vouloir me laisser partir. T’en fais pas…
Il me transperce avec un puissant coup de bassin et je retiens mon souffle.
– … je vais tellement te remplir que tu me sentiras dégouliner entre tes jambes
pendant plusieurs jours. Juste pour prouver à qui appartient cette chatte. À moi.
Maintenant donne-la-moi ! ordonne-t-il.
Mon corps lui obéit instinctivement. Mes muscles se contractent et mes nerfs
sont parcourus d’étincelles. Chaque centimètre de ma peau est en feu, accablé
par cet amour puissant et plein de révérence. J’empoigne la gorge de Wes et
colle mes lèvres aux siennes pour l’embrasser de toutes mes forces. Son corps
devient dur comme de la pierre et il gémit, grogne et convulse sous moi. Je tiens
sa bouche contre la mienne, goûtant son désir, sa passion et son amour tandis
qu’il libère son essence en moi.
– Je t’aime, dit-il dans ma bouche.
– Je t’aime.
Il gémit, parcouru par le dernier sursaut de son orgasme.
– À moi.
– À moi.
Cela suffit à nous définir, à nous décrire. J’espère seulement qu’il finira par
accepter mon travail et ce que cela implique pour nous. Je ne pars pas, mais je ne
peux pas rester, pour l’instant. Bientôt, et je l’espère pour le reste de ma vie, ma

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place sera ici, dans ce lit, avec cet homme, à faire la même chose, dans dix ans,
dans cinquante ans et jusqu’à ce que je rende mon dernier souffle.
– Tu pars quand même, dit-il.
Il m’embrasse dans le cou en massant l’arrière de ma tête. Je ne pensais pas cela
possible, mais je suis encore plus détendue.
– Ouais, mais tu sais quoi ? je réponds en plongeant mes doigts dans ses
cheveux.
– Hmmm ? répond-il d’une voix triste.
– Je reviens dans trois semaines. Je promets de rentrer à la maison entre chaque
mission.
– À la maison ?
Il sourit jusqu’aux oreilles, sans chercher à cacher combien mes paroles le
rendent heureux.
– Oui. Ma maison est avec toi, j’acquiesce en l’embrassant sur le cœur. Mais tu
vas me manquer.
– Tu me manqueras encore plus.
J’ai beau en douter, j’adore l’entendre le dire. Personne ne m’a jamais dit ce
genre de chose auparavant et, maintenant, je comprends pourquoi les gens
partout sur la terre cherchent l’amour. Je comprends comment ils peuvent tout
sacrifier pour la personne qu’ils aiment. Le fait qu’il m’ait choisie et que je sois
son rayon de soleil après une journée pourrie me donne un sentiment de pouvoir
que rien ne peut fissurer. J’emporterai son amour partout et il brillera toujours
pour me guider à la maison.
À Wes.

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Chapitre 3

J’arrive à Dallas le cœur lourd, après avoir quitté Wes qui a passé son temps à
me proposer son argent pour que je reste à Malibu. Cette tête de mule n’accepte
pas que je veuille rembourser ma dette à Blaine par mes propres moyens. J’ai
besoin de savoir qu’au moins une fois dans ma vie, je suis maîtresse de mon
destin. C’est moi qui prends les décisions concernant ma vie. Bien évidemment,
je ne souhaite pas mettre en péril ma relation avec Wes, mais il doit comprendre
que, parfois, l’argent ne résout pas les problèmes. Nous sommes un jeune couple
qui apprend à se connaître.
Sans que je ne sache comment, il a réussi à me faire emménager chez lui. J’ai
accepté sans rien dire de mettre toutes mes affaires dans des cartons et de les
empiler dans un de ses cinq garages. Je n’ai gardé de ma vieille chambre que la
boîte contenant mes biens les plus précieux. Pour être honnête, j’aurais pu jeter
tout le reste, car seules mes affaires dans ce petit carton me tiennent à cœur. Je
ne lui ai pas demandé si je pouvais mettre un bibelot ici ou là car je n’ai pas
voulu gâcher le peu de temps que nous avions ensemble, mais j’imagine que je
laisserai ma marque chez lui peu à peu. Peut-être ai-je besoin de temps pour me
rendre compte que je viens d’emménager avec Weston tout en continuant à être
escort jusqu’à la fin de l’année. Sans doute n’a-t-il pas hâte non plus de l’avouer
à sa famille et à ses amis.
Je sors de l’aéroport la tête ailleurs et le cœur gros, perdue dans mes pensées. Je
me parle à moi-même lorsqu’une main empoigne mon bras pour m’arrêter. Je
lève la tête, encore et encore, jusqu’à ce que le bord d’un Stetson me bloque le
soleil, m’aidant à recouvrer la vue. Des yeux vert pâle trouvent les miens, vert
émeraude, comme les miens. D’ailleurs, ils sont exactement comme les miens.
C’est bizarre. Un joyeux sourire se dessine sur une mâchoire carrée couverte

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d’une barbe de trois jours, et des dents blanches scintillent lorsqu’il dit quelque
chose que je n’entends pas.
– Mia ? Tu es Mia, n’est-ce pas ?
Ma poitrine se resserre au son de cette voix qui m’est familière, comme un vieux
rêve dont on se souvient en se réveillant mais dont on n’arrive pas à recoller les
morceaux.
– Ça va, Chérie ?
Il saisit mon autre bras et je découvre des mains énormes. Ses ongles sont
propres et droits, comme s’il les avait coupés récemment.
Je fais un pas en arrière, mais il me retient plus fort.
– Je vais, euh… bien. Désolée, je marmonne en clignant plusieurs fois des yeux.
On se connaît ?
Il écarquille les yeux.
– Non, mais on devrait apprendre à bien se connaître, durant le prochain mois. Je
suis Maxwell Cunningham. Appelle-moi Max, déclare-t-il en me tendant son
énorme paluche.
Sa paume calleuse frotte la mienne. Les manches de son polo jaune et moulant
semblent comprimer ses biceps gonflés, comme si elles allaient exploser à tout
moment. Son jean bleu foncé est assorti d’une grosse ceinture en cuir avec une
boucle en argent d’au moins six centimètres de diamètre et une étoile dorée au
milieu. Il porte des santiags couleur rouille comme sa ceinture, qui sont
couvertes de poussière. J’observe sa tenue tandis qu’il étudie la mienne. Ses
yeux verts, si semblables aux miens, détaillent ma robe d’été légère et mes
sandales, puis mes cheveux lâches et bouclés qui volent dans le vent.
– Tu es superbe, chuchote-t-il d’une voix rauque, comme s’il avait parlé sans le
vouloir.
Son regard paraît hanté ou blessé, et j’ai une envie soudaine et inexplicable de le
serrer dans mes bras. Je regarde les gens nous contourner et je tiens ma jupe pour
occuper mes mains. L’air qui nous sépare semble chargé de tension et de non-
dits. Lorsqu’un homme dit à une femme qu’elle est belle, elle est censée
répondre, non ?
– Euh, merci.

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Il écarquille les yeux.
– Ah pardon, ce n’est pas ce que je voulais dire. Enfin si. C’est juste que tu es
jolie, super-jolie, et même si j’ai vu ta photo, je n’étais pas prêt à te voir en chair
et en os. Zut, je ne sais pas ce que je dis.
Il se frotte la nuque et regarde ses pieds en fronçant les sourcils.
– Monsieur, c’est votre véhicule ? demande un agent de sécurité en désignant le
pick-up Ford argenté.
– Ouais, il y a un problème ? répond Max.
– Si vous ne partez pas tout de suite, il va y en avoir un, oui. Vous gênez la
circulation, vous ne pouvez pas rester là.
– Ah zut, désolé. Viens, Mia, par ici.
Il prend ma valise et la jette à l’intérieur, puis il ouvre la portière passager et me
tend la main.
– Mia, ma belle, je ne te ferai jamais de mal, dit-il lorsque je regarde sa main
comme si elle était couverte d’araignées. Je suis un peu perturbé, mais une fois
au ranch, on t’installera dans ta chambre et Cyndi arrangera tout ça, ajoute-t-il en
souriant timidement.
Il m’offre toujours sa main et lorsque je l’accepte enfin, j’ai de nouveau cette
sensation étrange, comme un souvenir qui refuse de refaire surface.
– Qui est Cyndi ? je demande quand il s’installe au volant.
Un sourire gigantesque se dessine sur son visage et, cette fois, j’ai l’impression
de le connaître. Je suis sûre d’avoir déjà rencontré cet homme.
Il fait démarrer le véhicule, regarde dans le rétroviseur et se faufile entre deux
voitures.
– Ma femme.
*
* *
Cela fait deux heures que nous roulons lorsque Maxwell tourne enfin sur une
allée de gravier menant à une maison superbe. Elle comporte deux étages, elle
est jaune avec des volets bleus et elle est entourée d’une barrière en bois blanc.
Sur la pelouse, sous les yeux de sa mère qui se tient sur le porche qui entoure la
maison, une petite fille joue à la poupée sur une couverture multicolore. La

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femme est vêtue d’une longue robe bleu et vert qui me rappelle l’eau tropicale de
Miami et elle caresse d’une main son ventre rebondi. Vu sa taille, elle doit être
prête à accoucher d’une minute à l’autre. Ses cheveux châtains volent dans la
brise, elle dégage quelque chose d’irréel et de mystérieux.
Lorsque le pick-up s’arrête, elle fait coucou à Max, qui lui sourit en retour. C’est
le même sourire géant qu’il a affiché lorsqu’il a parlé d’elle tout à l’heure. Leur
fille s’appelle Isabel, ils attendent un garçon et Max est ravi de pouvoir donner
son nom de famille à un fils.
J’ai également découvert que Max est fils unique et que c’est son père, Jackson
Cunningham, qui l’a élevé. Il n’a appris que récemment, lors de son décès, que
cinquante-et-un pour cent des parts de l’entreprise familiale lui étaient légués, et
que les quarante-neuf restants sont censés aller à sa sœur. Une sœur qu’il n’a
jamais rencontrée et qui a le même anniversaire et le même nom que moi. Je ne
sais pas encore ce qu’il attend de moi, mais il m’a dit que cela s’éclaircirait au
cours du mois.
De mon côté, je suis ravie qu’il soit marié et que ce soit un mariage heureux. De
plus, étant donné que ma relation avec Wes est toute fraîche, c’est une aubaine
que je joue le rôle de la sœur et non de sa copine. Je n’aurai pas à lui tenir la
main, ni à faire semblant de le câliner, ni à l’embrasser.
Mon surfeur-réalisateur sera ravi. Une vague de tristesse s’abat sur moi en
pensant à lui. Cela ne fait même pas un jour que je l’ai quitté et la distance qui
nous sépare me semble encore plus grande. Durant les six derniers mois, je n’ai
eu aucun problème à vivre dans des lieux différents pendant plusieurs semaines
sans avoir de ses nouvelles. D’ailleurs en mai, nous n’avons pas échangé le
moindre message, car j’étais trop énervée par son histoire avec Gina et il était
trop fier pour m’appeler. Je serre les dents en repensant à l’actrice la plus sexy
d’Hollywood et au fait qu’elle avait mis le grappin sur mon homme.
Max ouvre ma portière et je sursaute, j’étais tellement perdue dans mes pensées
que je ne l’ai pas vu descendre.
– Chérie, viens rencontrer Mia. Bell, mon sucre d’orge, viens dire bonjour à
l’amie de Papa.

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Sa femme descend les marches en se dandinant, tenant la rampe d’une main
tandis que l’autre frotte son ventre. À peine est-elle à portée de bras qu’il pose
une main sur son ventre et l’autre sur sa nuque, baissant la tête pour la regarder
dans les yeux.
– Comment tu vas, Chérie ? Tout va bien ?
Elle sourit tendrement et hoche la tête en rougissant légèrement.
– Et notre fiston ?
– Parfait, Max. On va bien, c’est promis.
Elle l’embrasse et recule, puis elle dirige ses yeux bleu saphir sur moi en me
tendant la main.
– Je m’appelle Cyndi Cunningham. Bienvenue chez nous.
– Mia Saunders, je réponds en serrant sa main. Je suis ravie d’être ici, je dis en
baissant la tête pour voir la petite fille se cacher derrière les jambes de sa mère.
Et qui est cette jolie petite princesse ?
Maxwell gonfle le torse et semble déborder de fierté.
– Voici ma fille aînée, Isabel. Bell, chaton, dis bonjour.
Des lèvres rouges et charnues me sourient timidement tandis qu’une petite tête
blonde aux yeux verts comme ceux de son père sort des jambes de sa mère.
J’étudie ses yeux et ses cheveux et cette sensation de déjà-vu me tiraille de
nouveau. J’ai vu cette famille quelque part, c’est certain, seulement je ne sais
plus où.
– Salut, je suis Mia, je dis en lui faisant coucou.
Elle se balance d’un côté et de l’autre, toujours accrochée à sa mère. Sa robe est
couverte d’arcs-en-ciel, tout à fait digne d’une enfant de quatre ans.
– J’adore ta robe.
– Moi aussi, j’adore les arcs-en-ciel. Ils sont trop beaux.
– Je suis d’accord. Tu en as déjà vu en vrai ?
Je m’agenouille devant elle et elle hoche vigoureusement la tête.
– Moi aussi. Tu sais ce qu’on dit à leur propos, n’est-ce pas ?
Elle ouvre grand les yeux et fait non de la tête.
– Eh bien, il y a un conte irlandais qui dit qu’à la fin de chacun chaque arc-en-
ciel, il y a un chaudron rempli de pièces d’or, et que ce chaudron est gardé par

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un leprechaun. C’est un petit homme habillé en vert avec un grand chapeau !
– Peut-être qu’on en trouvera un pendant que tu es là ? elle demande d’une voix
pleine d’espoir.
– Ce serait une sacrée aventure. La prochaine fois qu’on voit un arc-en-ciel, on
cherchera. Toi et moi, d’accord ?
Isabel saisit ma main et Cyndi et Max nous regardent d’un air surpris.
– Je vais te montrer notre maison. Tu aimes les pancakes ? Oh ! Et les
Bisounours ? Tu préfères lequel ?
– Hmm, j’aime bien Grosveinard, je réponds en la suivant. Celui avec le trèfle
sur le ventre. Et j’adore les pancakes, surtout avec du sirop au chocolat.
Elle arrête de marcher, se tourne vers ses parents en croisant les bras et tape son
petit pied par terre.
– Pourquoi j’ai jamais de sirop au chocolat sur mes pancakes ? elle demande à
ses parents, outrée.
Cyndi et Max éclatent de rire en secouant la tête.
– On essaiera la recette de Mia demain matin, d’accord, chaton ? répond Cyndi
en caressant les cheveux de sa fille. Tu allais montrer sa chambre à Mia, tu te
souviens ?
Isabel tourne les talons en gloussant et monte les marches en courant.
– Viens, Mia !
– Elle a toujours autant d’énergie ? je demande à ses parents en la suivant en
trottinant.
– Oui ! s’exclament-ils à l’unisson.
– Alors, je vais beaucoup m’amuser ce mois-ci, j’en suis certaine !
Je me retourne vers eux pour m’assurer qu’ils suivent et je vois Max se masser la
nuque en regardant sa femme, qui fuit son regard.
– On est contents que tu sois là, Mia, dit-il d’une voix inquiétante.
J’ai l’étrange impression que je vais bientôt changer d’avis.
*
* *
Il fait nuit lorsque je sors mon téléphone pour appeler Wes.
– Salut, Chérie. Tu es dans ton lit ? répond-il sans préambule.

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– Oui, et toi ? je réponds en souriant et en me blottissant sous ma couette.
– Pas tout à fait, non, dit-il en bâillant.
– Pourtant tu as l’air fatigué.
Il fredonne un simple « hmmm » qui vibre jusque dans mon bas-ventre, comme
à chaque fois.
– Je le suis, oui. La journée a été longue. Tu me manques. Ça fait moins d’une
semaine et je me suis déjà habitué à dormir avec toi.
Je ris et tripote un fil qui pend de la couette.
– C’est surtout nos parties de jambes en l’air qui te manquent.
– Ce n’est peut-être pas faux, mais je crois que ce qui va me manquer le plus, ce
sont tes petits ronflements quand tu te tournes pour frotter ton nez et ta bouche
sur ton bras et que tu me baves dessus.
– Je ne bave pas !
Il rit de bon cœur et une tristesse m’envahit à l’idée que je ne vais pas le voir
pendant trois semaines, si tant est qu’il soit à Malibu à la fin du mois et pas sur
le tournage de son film.
– Non, tu ne baves pas, mais tu te colles à moi. Je pensais détester, mais il
s’avère que j’adore ça.
– Je t’aime, Wes.
– Je sais, soupire-t-il.
Je m’imagine blottie contre lui, ma tête sur son torse nu, son souffle chatouillant
mon crâne. Je me tourne et frotte mon visage sur la couette, savourant sa
douceur et son parfum de lavande.
– Alors, parle-moi de ton client. Tu sais pourquoi il veut que tu incarnes sa sœur
?
– Pas vraiment. Quand on était en voiture, il m’a dit que son père est décédé
récemment et qu’il a légué cinquante et un pour cent de l’entreprise à son fils, et
quarante-neuf à cette sœur dont il ne connaissait pas l’existence
– C’est bizarre.
– Ouais, je trouve aussi. Apparemment, toujours selon le testament, cette sœur a
le même nom et la même date de naissance que moi, ce qui est encore plus
bizarre. Cela dit, Mia est un prénom assez répandu, il y en avait deux autres dans

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mon école quand j’étais petite. Et Saunders est assez commun aussi, même si
Max, mon client, m’a dit que l’écriture n’était pas nette et que ça pourrait être un
« o », donc rien n’est sûr. Il a dit que c’était un sacré coup de chance qu’il m’ait
trouvée et que je puisse être embauchée pour le mois.
– Je trouve très étrange que tu aies la même date de naissance et le même nom et
qu’il t’ait trouvée. D’ailleurs, il a fait comment ?
Tiens, je ne me suis pas posé la question.
– Je ne sais pas, je vais lui demander.
– Que sais-tu d’autre à propos de ce type ?
Au ton de sa voix, je devine que Wes va mener sa propre enquête à propos de
Max. Je ne sais si je dois être ravie ou agacée. Millie a déjà enquêté sur lui et elle
a dit qu’il était super-riche mais totalement inoffensif.
– Wes… Ce type est parfaitement normal. Il a trente ans, c’est un cow-boy, il
habite dans un ranch avec tous les luxes inhérents à la vie d’un homme riche. Sa
femme est adorable et elle attend leur deuxième enfant, un fils, ce dont il est
ravi, leur fille Isabel a quatre ans et c’est une crème. Ils sont parfaitement
normaux.
– Alors, pourquoi une famille normale a-t-elle besoin d’embaucher une escort ?
Chérie, je te dis que c’est louche. Je comprends l’histoire du nom, mais il aurait
pu engager quelqu’un pour faire semblant d’être sa sœur s’il est juste question de
sauver son entreprise. Pourquoi toi ? Pourquoi quelqu’un qui a le même nom et
le même anniversaire ?
– Peut-être que ce n’est pas la bonne orthographe ? je tente.
Wes pousse un grognement où j’entends sa frustration.
– Ne t’arrache pas les cheveux !
Il éclate de rire.
– Comment tu sais que…
– Quand tu es frustré, tu te tires les cheveux. J’aime ta tignasse et j’aimerais
continuer à y passer ma main pendant au moins une bonne trentaine d’années,
donc arrête de t’acharner dessus ! Tu vas devenir chauve prématurément.
– D’accord, d’accord, répond-il en riant, mais je te ferai savoir que mon père a
encore de très beaux cheveux à son âge, donc je ne pense pas que tu doives

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t’inquiéter.
J’imagine Wes dans trente ans et je souris jusqu’aux oreilles.
– Ne t’en fais pas pour moi, d’accord ?
– Impossible. Tant que tu ne seras pas à la maison, endormie à mes côtés, je
m’inquiéterai. Ah, et où as-tu dit que le ranch se trouvait ?
Cette fois, c’est à mon tour de rire. Ce type ne perd pas le nord. Je lui donne
l’adresse et je l’entends taper sur son clavier.
– Sans blague, chuchote-t-il.
– Quoi ? je demande en m’asseyant dans le lit, soudain inquiète.
– Il habite à côté du ranch d’une amie à moi. Enfin, il appartient à son mari, mais
ils y vivent six mois par an. J’y étais pour leur mariage.
– C’est qui ?
– Aspen Bright-Reynolds.
Le nom me dit quelque chose, mais son visage ne me vient pas.
– Enfin, techniquement, elle s’appelle Aspen Jensen maintenant qu’elle a épousé
Hank Jensen. Le ranch est collé à celui des Cunningham. Attends, j’ai déjà
croisé Maxwell ! dit-il d’une voix étonnée. Tu devrais rencontrer Aspen, s’ils
sont en ville. Je vais l’appeler.
Le fait que mon mec parle d’une femme qu’il connaît si bien éveille ma jalousie.
– Tu la connais comment ?
– Elle est dans le milieu du cinéma. Elle est PDG de AIR Bright Enterprises. Tu
me crois riche, mais ce n’est rien à côté d’elle. Elle est dans le Top Trois des
femmes d’affaires les plus riches du monde, et elle a tout juste trente ans. Elle
vient d’avoir une fille et je sais qu’ils vont au ranch aussi souvent que possible
parce qu’Hank est un véritable cow-boy. Il a besoin de grands espaces. Je vais
lui passer un coup de fil et organiser une rencontre.
– Ok, peut-être, je ne sais pas. Tu ne seras pas là pour me présenter, ça pourrait
être bizarre.
– Quoi qu’il en soit, je vais essayer d’en savoir davantage sur les Cunningham.
– Bébé, sans rire, Millie l’a déjà fait et…
– Tu es ma copine, alors ce sont mes affaires, déclare-t-il. Ça me rassurera. Si tu
dois passer du temps loin de moi et de la maison, j’ai besoin de savoir que tu es

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en sécurité. ET puis, toute cette histoire me paraît vraiment louche. Tu peux
l’admettre, non ?
Honnêtement, j’ai à peine écouté ce qu’il a dit après « ma copine, mes affaires ».
Le fait qu’un homme tienne suffisamment à moi pour enquêter sur les gens pour
qui je travaille est une sacrée preuve d’amour, que je n’ai jamais connue jusque-
là. Rien que d’y penser, j’ai envie de prendre le premier avion pour Los Angeles
et de courir à Malibu pour me jeter sur lui. Hélas, je ne ferai rien de tout cela.
– Comme tu veux. Mais ne t’inquiète pas pour moi. Je vais raccrocher les étriers
et me coucher, je suis crevée.
– Waouh, tu es déjà une véritable cow-girl, ricane-t-il.
– Je t’aime.
– Rêve du paradis, susurre-t-il de cette voix rauque qui me manque déjà tant.
– Tu veux dire de tes bras ?
Il pousse un long soupir.
– Je t’appelle demain, d’accord ? je demande.
– Je t’aime. Prends soin de toi, répond-il.

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Chapitre 4

Nous roulons quarante-cinq minutes avant d’arriver au siège immense de


Cunningham Oil & Gas. Je ne sais pourquoi, je m’attendais à découvrir un
immeuble vieillot, mais cet endroit ressemble plus à une université qu’à un
quartier d’affaires. Avec des piliers blancs, des murs vitrés partout et des arbres
plantés le long des allées de gravier.
– Waouh. Combien de gens travaillent ici ?
Max reste concentré sur sa conduite, reculant lentement son pick-up pour se
garer devant la porte d’entrée, sur l’emplacement marqué « Maxwell
Cunningham, Président-Directeur Général ».
– Il y a environ douze mille employés sur ce campus.
– Un campus ? Je me disais bien que ça ressemblait à une fac.
– On fait du beau travail, ici, notamment de la recherche. Au total, l’entreprise
emploie soixante-quinze mille personnes.
– Sans rire ? Waouh. Alors, tu es responsable de tous ces gens ?
Il fronce les sourcils et ramène son chapeau vers l’avant.
– Ouais, mais ce n’est pas aussi cool que ça en a l’air. Ou plutôt, j’essaie de ne
pas prendre la grosse tête. Allez viens, je vais te faire visiter. Il y a beaucoup à
voir.
Il descend de la voiture et fait le tour jusqu’à moi.
– Tu sais, un gentleman est toujours censé ouvrir la porte pour sa demoiselle,
gronde-t-il en refermant ma portière.
– Cher frère, je réponds en posant mes poings sur mes hanches, je ne suis pas ta
demoiselle, je suis ta sœur, je réponds en plaisantant.
Il sourit jusqu’aux oreilles et j’ai l’impression qu’un sentiment de plénitude
l’envahit.

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– En effet, sucre d’orge. Viens, je connais des gens qui sont impatients de
rencontrer ma seule et unique sœurette mystère.
Il m’offre son bras et je le prends en relevant mes lunettes de soleil.
– C’est ton père qui a construit l’entreprise ?
– Non, non, elle est plus vieille que ça. C’est mon Papi qui l’a créée, un bon
vieux cow-boy à la John Wayne. Elle a prospéré au fil des générations et,
aujourd’hui, c’est une des plus grosses du pays. Quand j’étais petit, je rêvais
d’avoir mon ranch et de travailler ici. J’ai toujours été le bras droit de papa, et
maintenant qu’il n’est plus là, c’est moi qui tiens les rênes, conclut-il d’une voix
triste.
– Je suis désolée pour ton père, dis-je en caressant son bras. S’il était comme toi,
j’imagine qu’il manque à beaucoup de gens.
– Oui, je crois aussi. Tu sais, je ne comprends toujours pas pourquoi il m’a caché
que j’avais une sœur.
– Ta mère s’est remariée, alors ?
Il soupire en m’ouvrant la porte.
– Ma mère n’a jamais voulu épouser mon père, même s’il a tout fait pour la
convaincre. Papa lui a demandé de nombreuses fois, jusqu’au jour où je suis né,
mais elle a préféré disparaître. Elle a laissé un livre de naissance qu’elle avait
constitué pour moi, avec quelques photos d’elle et de mon père, et c’est tout. On
n’a plus jamais eu de nouvelles. En tout cas, c’est ce que papa m’a dit.
Ses épaules se crispent et sa mâchoire se contracte. À l’évidence, parler de sa
mère n’est pas son sujet préféré. Il pose une main dans le creux de mes reins et
me guide vers l’ascenseur qui nous emmène cinq étages au-dessus. La boîte a
beau employer des milliers de personnes, l’immeuble n’est pas très haut. Je
suppose qu’ils ne veulent pas gâcher le paysage avec des gratte-ciel qui
couperaient la lumière et la vue.
– Bonjour Diane, comment vas-tu ? dit Max à une petite dame assise à un bureau
devant de grandes portes en bois.
Ses cheveux blancs sont relevés dans un chignon haut et elle porte des lunettes
œil-de-chat roses. Elle sourit largement et tend sa main à Max, qui y dépose un

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baiser avant de la tapoter affectueusement. Cette dame a l’âge d’être grand-mère,
mais elle a l’œil vif et intelligent de sa jeunesse.
– Qui est cette belle jeune fille ? demande-t-elle en me détaillant de la tête aux
pieds comme si elle évaluait mon choix vestimentaire.
Elle ne paraît pas choquée, juste curieuse.
– Je te présente ma sœur, Mia.
Max semble si fier de dire cela que j’ai l’impression que ses bras musclés me
serrent contre lui, me faisant regretter de ne pas être réellement sa sœur.
N’importe qui aurait de la chance d’avoir un frère aussi attentionné et dévoué à
sa famille.
Diane se lève, et je réalise qu’elle est encore plus petite que je ne le pensais. Elle
m’offre un sourire qui illumine toute la pièce et m’attire dans ses bras.
– Je suis tellement heureuse de te rencontrer, Mia. Bienvenue dans la famille,
mon petit. J’espère te voir ici souvent, compris ? demande-t-elle en pinçant mes
joues.
– Euh… d’accord, je vais essayer.
– Merci, Diane. Tu peux la lâcher, maintenant, dit Max en me tirant par la main.
La vieille dame croise les bras en souriant joyeusement, comme si elle se faisait
elle-même un câlin. Nous nous éloignons et je crois l’entendre renifler. « Si
j’avais pensé voir cela un jour… » marmonne-t-elle.
Max ouvre la porte de son bureau immense qui est dans l’angle de l’immeuble,
dominant le reste du campus. Des centaines d’hectares de pelouse s’étendent à
nos pieds et on aperçoit divers bâtiments cachés dans les arbres.
– Nous faisons de notre mieux pour respecter l’environnement, mais ça
n’empêche pas les écologistes de nous détester. Je les comprends, quelque part,
mais cela ne change pas notre besoin de ressources naturelles, dit-il d’une voix
douce et calme.
– Tu as beaucoup d’ennuis à cause de l’activité de l’entreprise ?
– On en a toujours un peu, oui. On prend soin d’être transparents et
responsables, mais personne n’est parfait. Et puis, il y a aussi tous les conflits
d’intérêts avec les matériaux.
– Comment ça ?

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– Nous avons besoin d’or, de cuivre, d’étain, de tungstène et de tantale pour
notre production, et nous sommes soumis aux lois du marché mondial et aux
conflits entre les pays producteurs et ceux où nous avons des raffineries.
– C’est une entreprise mondiale ?
– Ouais. Nous faisons travailler soixante-quinze mille personnes, mais toutes ne
sont pas aux États-Unis. Les autres branches sont gérées par des cousins et des
gens extérieurs à la famille. Toutefois, il y a toujours un Cunningham à un poste
clé afin de garantir que nos intérêts soient protégés.
– Et les investisseurs ?
– Il en a beaucoup également, mais ils ne détiennent que des intérêts financiers,
pas des postes. Plus nous gagnons d’argent, plus ils en reçoivent. Hélas, c’est en
partie la raison pour laquelle tu es ici.
Je me tourne et m’installe dans un gros fauteuil en cuir.
– Explique-moi, je t’écoute.
Il soupire et s’assied dans le fauteuil en face de moi. Nous sommes séparés par
une table en verre dont le socle est une souche poncée et vernie, Ce qui ajoute
une touche rustique à la déco moderne du bureau. Ça me plaît, ça correspond
bien à l’homme qui travaille ici.
– Eh bien, dans son testament, Papa lègue quarante-neuf pour cent de
l’entreprise à ma sœur.
– Celle que tu n’as jamais rencontrée.
Il fuit mon regard.
– Euh… ouais, on peut dire ça comme ça. En gros, il laisse la moitié des parts à
cette femme et il m’a donné un an pour la trouver. Donc, ça fait des mois que je
la cherche. Ça va te paraître absurde et tu ne vas sans doute pas me croire, mais
j’ai entendu ton nom sur la chaîne people que regarde ma femme. C’était en lien
avec un homme que j’ai rencontré il y a quelques années, qui connaissait un
couple d’amis à nous, donc je me suis tourné vers eux.
– Et qui est cet ami ?
– Hank Jensen. C’est notre voisin, et sa femme…
– … s’appelle Aspen et elle est amie avec Weston Channing. C’est ça ?
La mélancolie que je ressentais chez lui disparaît soudain.

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– Oui, exactement ! Je l’ai rencontré à leur mariage, il y a quelques années. C’est
un mec sympa, il fait du cinéma, non ? Bref, j’ai vu ton nom à la télé, puis dans
un magazine au supermarché. Alors je… j’ai engagé un détective privé pour te
retrouver.
Alors, voilà toute la vérité. Il n’y a rien de louche, c’est juste un homme qui
cherche une sœur qui se trouve avoir le même nom que moi.
– Imagine ma surprise quand j’ai découvert que tu étais escort ! Je dois avouer
que j’ai été un peu choqué, grogne-t-il d’un ton agacé. D’ailleurs, pourquoi tu
fais ce boulot ?
– Attends une seconde, je dis en levant la main. N’essaie pas de changer de sujet.
Ton détective a découvert que j’étais escort, quoi d’autre ?
– Je sais que ton père est dans une maison de repos. Je sais que tu as enchaîné les
boulots de serveuse à Las Vegas puis en Californie, où tu as eu quelques jobs
d’actrice. J’ai vu quelques-unes de tes pubs, d’ailleurs, tu es super-douée !
Oooh, il a vu mes pubs, trop mignon.
– Merci ! Quoi d’autre ?
– Tu es apparue aux côtés de Weston Channing, mais un mois plus tard, tu
travaillais pour un artiste français. Ensuite, tu étais avec les Fasano, les proprios
de ces restaurants italiens. À ce propos, je regrette qu’il n’y en ait pas un ici,
leurs plats sont délicieux.
Je ris doucement en repensant au temps que j’ai passé avec Tony et Hector et
tout le clan Fasano.
– C’est une famille géniale. Je tiens beaucoup à eux. C’est tout ?
– Non, tu réapparais comme étant la copine du joueur des Red Sox. Je ne
comprends pas pourquoi tu sortirais avec un joueur de cette équipe pourrie, tu
devrais être avec quelqu’un des Texas Rangers ! Ça, c’est du base-ball.
– Tu es sérieux ? Tu connais toute l’histoire de ma vie et tu t’inquiètes de
l’équipe pour laquelle mon client jouait ?
J’ai du mal à ravaler mon angoisse, personne ne devrait en savoir autant sur ma
vie privée, surtout pas un autre client.
– Alors, ce n’était pas ton copain ? Pourtant, je t’ai vue l’embrasser dans les
magazines. Ce Weston aussi.

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Je pousse un grognement exaspéré.
– Ce sont tous des clients. Sauf Weston, lui c’est mon copain, mais il ne l’était
pas à l’époque. Ça ne fait pas longtemps qu’on est en couple, mais peu importe.
Qu’est-ce que tu attends de moi ?
Il se lèche les lèvres en se frottant la mâchoire.
– C’est simple. J’ai besoin que tu te fasses passer pour ma sœur afin que les
investisseurs ne puissent pas prendre possession de la moitié de mon entreprise.
– Mais ça marcherait comment ? Tu ne crois pas qu’ils vont finir par découvrir
la vérité ?
– Je ne pense pas, non. Tu n’imagines pas le choc que j’ai eu quand j’ai
découvert que la Mia Saunders que je voyais à la télé et dans les magazines avait
le même nom que dans le testament de mon père et la même date de naissance.
Pour l’instant, ton permis de conduire suffira. D’ici à ce que j’aie besoin des
actes de naissance et d’un test ADN pour le tribunal, j’espère avoir trouvé la
véritable Mia Saunders. Ma Mia. J’ai toujours rêvé d’avoir une grande famille,
mais Papa n’a jamais eu d’autres enfants. C’est pour ça que Cyndi et moi nous
sommes mariés jeunes et avons tout de suite commencé à fonder une famille.
Mon cœur se pince lorsque je l’entends dire « Ma Mia ». Je le comprends, car je
partage son désir d’avoir une vraie famille, avec une mère, un père, une sœur et
un frère. Si j’ai désormais de nombreuses personnes sur qui compter, il n’y a eu
que Maddy et papa pendant toutes ces années, et encore, quand il était assez
sobre pour se comporter comme un père. Je rêve désespérément d’une structure
familiale, moi aussi, ce lien du sang que j’ai avec Maddy est tout pour moi.
– Je ferai tout ce dont tu as besoin. Tu n’as qu’à me dire ce que tu veux.
– C’est aussi simple que ça ? Tu vas m’aider et faire semblant d’être ma sœur ?
La décision n’est pas si difficile à prendre. J’ai été copine, muse, fiancée,
modèle, croqueuse de diamants et séductrice. Pourquoi je ne pourrais pas être la
sœur d’un mec bien qui cherche simplement à protéger son entreprise ?
– Appelle ta prochaine fille comme moi, et nous avons un deal.
Je m’efforce d’être sérieuse en lui tendant la main.
– Tu es sérieuse ? C’est tout ce que tu veux en retour ?

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Ses yeux brillent de nouveau de cet éclat qui me donne l’impression de le
connaître. Je suis certaine d’avoir déjà vu ce regard.
– Tu donnerais vraiment mon prénom à ta fille ? je demande en laissant tomber
ma main.
– Si tu m’aides à sauver ma boîte, c’est la moindre des choses. Et puis, tu es ma
sœur, déclare-t-il avec tant de conviction que je pourrais presque le croire.
– Tu as l’air droit dans tes bottes. Ça me plaît. Mais je plaisantais, ne t’inquiète
pas. Tu ne me dois rien. Contente-toi d’offrir une belle vie à ta famille.
– Tu ne veux pas plus d’argent ? Tu pourrais me faire du chantage, tu sais. Nos
revenus sont de plusieurs milliards de dollars chaque année. Tu n’aurais plus
jamais à travailler.
– Une bonne action doit être faite bénévolement, sinon ce n’est pas une bonne
action. Tu as déjà payé pour me faire venir ici et j’ai envoyé l’argent à mon
créancier. Tout est en ordre.
Il me dévisage et ses yeux s’assombrissent brusquement.
– Un créancier ? L’argent que j’ai payé sert à rembourser une dette ? Pourtant,
mon détective n’a trouvé aucune dette à ton nom. Tes comptes ne débordaient
pas d’argent, mais je sais que tu as fait des chèques au nom d’une université, je
pensais que tu travaillais pour rembourser tes études. Cet argent était censé être
pour toi ! s’exclame-t-il en colère.
Eh bien, voilà une réaction à laquelle je ne m’attendais pas.
– Écoute, Max, mes dettes ne te concernent pas. D’ailleurs, elles ne devraient
même pas me concerner, moi non plus ! je réponds machinalement, le regrettant
immédiatement.
– Comment ça ? Tu rembourses la dette de quelqu’un d’autre ?
Il se lève, les mains sur les hanches. Un rayon de soleil frappe la boucle de sa
ceinture et rebondit dans mes yeux, m’aveuglant momentanément.
– Ça ne te regarde pas, je dis en fermant les yeux.
– Bien sûr que si, tu es ma sœur.
– Ta fausse sœur, je lui rappelle vertement.
Normalement, je me fais entendre lorsque je parle sur ce ton de mise en garde,
mais ce n’est pas le cas avec Max qui ne semble pas l’avoir remarqué. Il enlève

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brusquement son chapeau et le pose sur son bureau, puis il passe ses mains dans
ses cheveux. Les mèches retombent sur son front et sur ses joues et l’image que
j’ai devant moi me coupe le souffle. L’espace d’un instant, il ressemble comme
deux gouttes d’eau à Maddy, ma petite sœur.
– Max, je ne vais pas te parler de cette dette. Sache simplement que je m’en
occupe.
– Et la fac ? Si tu es ici, tu ne peux pas aussi être à la fac.
Je ferme les poings et les presse sur mes cuisses. Tout ça ne le regarde
absolument pas. La plupart de mes clients n’en savent pas autant et je ne connais
Max que depuis quelques heures. Wes est la seule personne à qui j’ai parlé aussi
rapidement de ma situation familiale, et au fond, je savais déjà qu’il n’était pas
qu’un simple client. Maintenant, il y a ce cow-boy géant qui fouine dans mes
affaires, apparemment il n’a pas l’intention d’arrêter tant qu’il n’aura pas eu de
réponses.
Je reprends mon souffle et me penche sur le bureau.
– Ça fait longtemps que j’ai arrêté l’école, Max. Les chèques que je fais pour la
fac ne sont pas pour moi.
– Ils sont pour qui ? demande-t-il en frottant sa mâchoire.
– Pour ma sœur, Madison. C’est moi qui paie ses études.
Son bras retombe sur le bureau et il s’y appuie de tout son poids.
– Tu as une sœur ? s’exclame-t-il, à bout de souffle.
– Eh ouais. Elle a cinq ans de moins que moi. Elle veut travailler dans les
sciences, je réponds fièrement.
Ma petite sœur est ma seule source de fierté. Tout ce que je fais, je le fais pour
elle, à cause d’elle. Je veux qu’elle ait tout ce qu’elle désire et j’ai toujours
réussi.
– Ton détective privé ne te l’a pas dit ? je m’exclame, moqueuse.
Nos regards se croisent et je découvre que le sien est torturé et débordant de
tristesse. Il déglutit plusieurs fois, ouvre la bouche et la referme.
– Une autre sœur, chuchote-t-il enfin. Madison. Deux sœurs. C’est tout ce dont
j’ai rêvé.
Il secoue la tête, ferme les yeux, et une larme coule sur sa joue.

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Qu’est-ce qui vient de se passer ?

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Chapitre 5

– Max, qu’est-ce qui ne va pas ?


Il se lève et marche jusqu’à la fenêtre en passant ses mains dans ses cheveux.
– Euh, rien, dit-il en se raclant la gorge.
Je ne comprends pas. Nous parlions tranquillement de pétrole, puis il s’est mêlé
de ma vie privée et, tout à coup, il semble au bord des larmes. Ça n’a pas de
sens. J’ai compris que sa famille lui tenait à cœur, mais rien de ce que j’ai dit
n’explique qu’un homme se mette brusquement à pleurer.
Je vais à lui et pose une main sur son épaule musclée. À l’évidence, Max n’est
pas du genre à passer ses journées devant la télé. Je crois plutôt que c’est
quelqu’un qui aime se servir de ses mains, et souvent.
– C’est à cause de ton père ?
Il fronce les sourcils et secoue la tête. Il semble torturé et dégage une tension
énorme. Tout à coup, il m’attire dans ses bras et plaque mon visage contre son
torse. Il tremble de la tête aux pieds et, pour un homme de sa taille, ce n’est pas
peu dire. Qu’est-ce que je suis censée faire ? Je m’accroche à lui et tente de le
rassurer.
– Ça va, Max. Tout ira bien. Il est en paix, maintenant.
Il me serre si fort que je n’arrive plus à respirer. Une autre approche s’impose.
– Calme-toi. Souviens-toi que tu as une femme magnifique, une fille adorable et
une famille qui t’aime.
Il respire lentement par le nez et relâche peu à peu son étreinte. Il tousse et fait
un pas en arrière avant de me tourner le dos. Il essuie ses joues et se racle la
gorge, et je fais mine d’étudier un tableau de l’autre côté de la pièce pour lui
laisser de l’espace.

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– Je suis désolé, Mia, dit-il au bout de quelques minutes. Je ne savais pas que
j’étais encore si triste. J’apprécierais que tu n’en parles à personne, ajoute-t-il en
baissant les yeux.
– Ne t’en fais pas, Max. On a tous notre fardeau à porter, c’est juste que ta peine
est plus récente.
Il relève la tête et se tient plus droit, reprenant le contrôle de ses émotions.
– Viens, laisse-moi te montrer le reste du campus.
– Après toi.
Nous passons devant Diane, qui sourit jusqu’aux oreilles, les mains jointes sur la
poitrine. Max m’offre son bras et elle semble plus joyeuse encore. Je glousse
doucement et m’appuie contre lui car je crois qu’il a besoin d’un peu de chaleur
humaine.
Nous passons les deux heures suivantes à aller d’un département à un autre. J’ai
l’étrange impression que chaque fois qu’il me présente, sa fierté croît un peu
plus et, bientôt, il semble convaincu de ce qu’il dit. Ce scénario me laisse
perplexe.
Maxwell m’emmène au département d’ingénierie où il me présente à une femme
mince aux cheveux châtains tressés. Ses lunettes accentuent son air cul serré et
elle me regarde avec une expression de dédain dès que nous passons la porte. Je
sais immédiatement qu’elle va poser problème à Max et sa nouvelle fausse sœur.
– Mia, voici ma cousine, Sofia Cunningham. Elle dirige notre département
d’ingénierie et elle siège au comité de parrainage.
Je lui tends la main et elle la regarde avec dégoût avant de la serrer si fort que je
grimace et fais un pas en arrière.
– Ravie de faire ta connaissance, je dis en m’efforçant d’avoir l’air sincère.
– Pareillement. Alors, Mia, tu es la sœur mystère dont personne n’était au
courant, crache-t-elle, frappant sa cible, Max, en plein cœur.
Elle ne m’effraie pas et j’apprécie Max, donc je la fusille du regard pour lui
montrer qu’elle ne m’impressionne pas.
– Où te cachais-tu pendant tout ce temps ?
– À Las Vegas, je réponds simplement.
– Ah oui ?

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Elle se déhanche et remonte ses lunettes sur son nez.
– C’est fou que, tout à coup, mon oncle meure et te lègue une moitié de
l’entreprise pour laquelle nous nous sacrifions tous depuis des années.
Je connais ce genre de nana et je sais que je ne dois surtout pas lui montrer le
moindre signe de faiblesse. Je dégage mes cheveux de mon visage, prends le
bras de Max et lui souris faussement.
– Faut croire que j’ai de la chance, n’est-ce pas ?
Elle soupire et nous fait signe de la suivre à une table, où elle désigne une
immense feuille sur laquelle est écrit… je ne sais quoi. Les maths et la géométrie
n’ont jamais été mon truc, ce pourrait être en grec, ce serait la même chose.
– Max, ces schémas doivent être revus pas le comité et l’avocat, et la compta
doit bientôt faire l’appel de fonds si on veut avancer sur la raffinerie en Asie.
Quand auras-tu le temps d’y jeter un œil ?
Max passe un bras sur mes épaules.
– Sofia, je viens de rencontrer ma sœur. On a passé la journée ensemble. Tu
peux peut-être me laisser deux jours avant de me casser les pieds avec le
boulot ? Je t’avais prévenue qu’une fois qu’elle serait là, j’allais être moins
disponible.
– Tu sais que je n’aime pas prendre du retard, dit-elle en faisant la moue. C’est
important, Max. Plus important qu’une inconnue, siffle-t-elle.
– Sofia, tu sais combien la famille compte pour moi, gronde-t-il, et je t’interdis
de parler ainsi de ma sœur. Elle fait désormais partie de la famille, comme toi,
même si on l’apprend sur le tard.
– Ouais, eh bien, on verra ce qui advient de cette histoire.
– Tu vas vérifier son CV ?
Elle hausse les sourcils.
– Peut-être bien, ouais. Tu en penserais quoi ?
Max appuie son avant-bras sur le bureau et approche son visage de celui de cette
peste.
– Il est solide comme du béton, cousine. Tu peux chercher tout ce que tu veux, tu
ne trouveras rien. Mais fais-toi plaisir. Je sais que tu veux mettre les mains sur
les quarante-neuf pour cent, mais le testament est inattaquable. Parles-en à

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l’avocate, si tu veux, dit-il en attrapant les schémas. J’y jetterai un œil quand
j’aurai le temps. Quand j’aurai fini la visite guidée avec ma sœur.
Il lui tourne le dos, pose une main sur mon épaule et me guide dans le couloir.
– Alors ? Ta cousine a toujours été une garce ? je demande sans malice.
La dernière chose que je souhaite, c’est l’énerver davantage, mais je ne devrais
pas m’inquiéter car il éclate de rire et me serre contre lui. Je déteste l’admettre,
mais j’aime sentir cette proximité avec un homme sans le stress d’une possible
relation sexuelle. Avec Maxwell, les choses ont l’air simples. C’est un homme
bien, et plus je passe du temps avec lui, plus j’apprécie sa compagnie. J’aime son
honnêteté et sa franchise.
Bien évidemment, cela me fait penser à mon autre cow-boy des temps modernes.
Je parie qu’il adorerait Max. Ils ont beaucoup en commun, en fait. Ils ont tous les
deux une très haute estime de leur famille et ils aiment les choses simples de la
vie, même s’ils ont les moyens de s’acheter tout ce qu’ils veulent. Ils travaillent
tous deux très dur, et, d’après ce que je sais, ils aiment passionnément leur
femme. Soudain, je repense aux bras de Wes lorsqu’il me tenait contre lui à
l’aéroport.

Il passe ses mains dans mon dos et dessine de petits cercles du bout des doigts.
– Je ne veux pas que tu partes, dit-il simplement, comme si je ne le savais pas
déjà.
Depuis que nous nous sommes avoué nos sentiments, je sens ses changements
d’humeur et j’arrive à deviner ce qu’il pense.
– Je reviens dans trois semaines, et on se parlera tous les soirs.
– Promis ?
Il semble si fragile que mon cœur bat la chamade. Je m’appuie contre lui et il
fredonne sa satisfaction, comme un chat qui ronronne. Je frotte mon nez sur sa
poitrine pour m’imprégner de son odeur et l’emporter avec moi jusqu’à Dallas.
– Je serai là dans à peine trois semaines. Sauf si tu me dis de te retrouver
ailleurs. Sinon je rentrerai à la maison.
Chaque fois que je désigne Malibu comme étant ma maison, un sourire heureux
se dessine sur ses lèvres.

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– J’adore que tu parles de notre maison.
Ses mains glissent dans mon dos et il m’attire contre lui pour me faire sentir son
sexe durci.
– Je sais. Et je sais aussi combien je vais te manquer.
Je gigote contre son érection et il grommelle des jurons. Il remonte ses mains
dans mes cheveux puis il les tire, m’obligeant à pencher la tête en arrière. Je
suis complètement à sa merci, et j’adore ça.

– C’est tellement simple de te parler, sœurette, dit Max en interrompant mes
rêveries.
Je regarde autour de nous pour voir si quelqu’un nous regarde, mais le hall est
vide. J’entends des murmures de voix derrière les portes que nous passons, les
cliquetis d’un clavier, le bruit d’une conversation téléphonique… Cependant, il
n’y a personne avec nous.
Dans ce cas, pourquoi m’a-t-il appelée sœurette ? Peut-être qu’il essaie de
s’habituer au surnom ? Cela dit, je dois avouer que j’aime bien qu’il m’appelle
ainsi, et sans doute n’est-ce pas très sain. S’il continue comme ça, je risque
d’oublier que je ne suis pas réellement sa sœur. Que tout ça n’est qu’un travail.
Je joue un rôle. Comme une actrice.
Toutefois, je ne lui fais pas part de ma réflexion et je lui mets un léger coup
d’épaule. Mais il est si grand que mon épaule n’atteint pas la sienne. Nous
traversons le bâtiment jusqu’à la cafétéria, qui n’a rien à voir avec celles que
l’on voit dans les films. Celle-ci a quatre restaurants, un snack-bar et de grandes
tables en bois.
Max désigne les restaurants l’un après l’autre. L’un est italien, l’autre américain,
le troisième est asiatique et le dernier Tex-Mex.
– Où préfères-tu manger ? Ils sont tous gratuits.
– Gratuits ?
Je ne sais pas lequel choisir. Cela dit, étant au Texas, je me dois de goûter le
Tex-Mex au moins une fois, donc je montre le restaurant avec le gros piment
rouge et le sombrero.

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– Ouais. Mes employés travaillent souvent douze à dix-huit heures par jour.
Certains passent même la nuit ici, ils dorment quelques heures dans ce qu’on
appelle le bunker avant de s’y remettre.
– Pourquoi tu leur demandes de travailler autant ? je demande en grimaçant.
Il me guide à travers le réfectoire, qui a tout d’un self normal sauf qu’il n’y a pas
de caisse. Nous nous asseyons à une table libre et je regarde le menu.
– Ce n’est pas voulu, mais tu dois comprendre que certains de nos projets sont
très urgents. Plus on met de temps à les mettre sur pied, plus le prix du baril de
pétrole peut être élevé, et ces coûts sont inévitablement répercutés sur le
consommateur au bout de la chaîne, c’est-à-dire toi et moi quand on fait notre
plein.
Je hoche la tête en étudiant le menu.
– Tout le monde travaille dur, mais nos employés sont très bien récompensés
pour leurs sacrifices. Par exemple, la nourriture dans les restaurants est gratuite.
Nous avons aussi une crèche, une salle de sport et une salle de jeux où ils
peuvent se détendre quand il y a trop de pression. Nous avons même un jardin
zen où ils peuvent se promener pour se sentir en lien avec la nature.
– Waouh, on dirait que vous faites tout pour les chouchouter.
Il sourit et fait signe à une serveuse de venir à nous.
– On essaie. Qu’ils soient cadres ou stagiaires, je veux que les membres de mon
équipe travaillent dur et qu’ils sachent qu’ils sont appréciés. Tu comprends ?
– En théorie, oui, mais je n’ai jamais eu d’employeur comme toi. Enfin, jusqu’à
maintenant. Millie s’occupe bien de moi.
– Millie ?
– Ah, pardon. Miss Milan. C’est ma tante, en fait.
– Du côté de ton père ? il demande aussitôt.
– Non, de ma mère, je réponds en trifouillant la salière.
Il pose un coude sur la table et appuie son menton dans sa main.
– Parle-moi d’elle.
En temps normal, si je n’étais pas si charmée par l’environnement décontracté et
la facilité avec laquelle je parle à Max, j’aurais trouvé sa curiosité étrange. Qui
s’intéresse aux tantes des autres ?

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– Ben, je suppose que je peux commencer par dire que je tiens mon physique
d’elle et de ma mère.
– C’est vrai, répond-il.
Je le regarde en fronçant les sourcils. Comment peut-il savoir que ce que je dis
est vrai ? Je n’ai pas le temps de le lui demander, cependant, car la serveuse nous
interrompt. Nous commandons tous les deux la même chose, une assiette mixte
de tostada1 et d’enchilada2 au fromage, à la différence près que Max commande
deux tacos supplémentaires, ce qui n’est pas anormal pour quelqu’un de sa taille.
Sa femme doit passer des heures à lui faire à manger.
– Alors, tu disais ? Tante Millie est la sœur de ta mère et elle dirige Escorts
Exquises ? C’est pour ça que tu fais ce boulot ?
– Ouais, il fallait que je gagne beaucoup d’argent, et vite.
– Est-ce que je peux demander pourquoi ?
– Je suppose, mais je ne comprends pas pourquoi ça t’intéresse autant.
Il tourne la tête et je crois le voir rougir.
– Disons simplement que je suis curieux. Je t’apprécie, Mia. Je sais déjà que tu
es quelqu’un de bien, et je veux que ton séjour chez nous te plaise. J’aimerais
que tu puisses rentrer chez toi en sachant que tu peux compter sur moi.
Le voyage initiatique que j’ai entamé cette année m’a appris à ne pas être
cynique à propos de ces choses-là. Max semble avoir la même nature que Taï. Il
est protecteur vis-à-vis des femmes, de toutes les femmes, et ce n’est pas par
machisme mais parce que cela lui tient vraiment à cœur. Max me donne la même
impression. J’inspire profondément et décide d’être sincère. Je vais tout lui dire,
et s’il me perçoit différemment, alors tant pis. Dans la vie, il faut prendre des
risques. Si je veux avoir des relations durables avec mes nouveaux amis, je dois
accepter de me livrer à eux.
– Mon père s’est attiré de gros ennuis. Il est ivre la plupart du temps, mais c’est
un joueur compulsif vingt-quatre heures sur vingt-quatre et sept jours sur sept.
D’habitude, il arrivait à rapporter juste assez d’argent pour payer le loyer. Pour
le reste, la nourriture, les factures, les vêtements, etc., il fallait se débrouiller.
– C’est-à-dire ? demande Maxwell avec un regard glacial.

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Je me concentre sur le thé glacé que m’apporte la serveuse et j’y mets une tonne
de sucre avec une tranche de citron.
– D’habitude, c’est moi qui travaillais. J’achetais les vêtements pour Maddy et
moi au Secours Populaire. Je faisais super-attention avec mes fringues, parce que
je savais que je devais les passer à Mads tôt ou tard. Mais tu sais quoi ? Elle ne
s’est jamais plainte. C’est de loin la meilleure de nous deux.
Je me sens soudain terriblement triste en pensant à elle. Je l’appellerai dès que
nous serons rentrés au ranch. Ça fait bien trop longtemps que je lui ai parlé. Il
faut vraiment que je lui annonce que j’ai emménagé avec Wes. Peut-être qu’elle
pourrait venir passer Noël avec nous ? Cela dit, je ne sais pas encore où je serai
pour les fêtes.
– Vous devez être très proches, dit-il d’une voix émue.
– Ouais, carrément. On s’est retrouvées toutes les deux quand maman est partie
et que papa est devenu alcoolique. Il ne s’est jamais remis de l’avoir perdue.
Max fronce les sourcils et je crois l’entendre grommeler « je sais ce que c’est »,
mais je n’y prête pas attention. Il ne connaît pas notre mère. En même temps, il a
dit qu’il ne connaissait pas la sienne, non plus.
Il y a un long silence durant lequel Max déchire sa serviette en papier, perdu
dans ses pensées. De mon côté, je me rappelle toutes les fois où Maddy et moi
aurions voulu la solidarité d’une mère, un modèle féminin sur lequel prendre
exemple en grandissant.
La serveuse apporte nos assiettes et nous passons plusieurs minutes à savourer la
nourriture en silence. Max finit par poser sa fourchette, avaler sa bouchée et
joindre ses mains sous son menton.
– Tu me parlerais de Madison ? demande-t-il d’une voix douce et triste.
S’il y a un sujet que je suis toujours ravie d’aborder, c’est bien celui de Maddy.
– Maddy, ou Mads, est magnifique. Elle a de longs cheveux blonds, elle est
grande et fine avec les mêmes yeux que les miens, et elle se transforme un peu
plus en femme de jour en jour.
– Elle n’est pas brune ?
Je trouve sa question bizarre, mais peu importe.

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– Non, tout le contraire, je dis en étudiant son visage. Tu sais, elle te ressemble
plus qu’à moi, en fait ! C’est elle que tu aurais dû engager pour jouer ta fausse
sœur, je glousse.
– Ton père est blond ?
– Non, il a les cheveux noirs lui aussi. Mads tient de notre grand-mère, je crois.
En tout cas, c’est ce que disait papa.
– Hmm, d’accord. Quoi d’autre ? Tu as dit qu’elle était à la fac ?
– Oui ! Elle veut faire un doctorat en sciences, je m’exclame en me tenant plus
droite.
Ma petite sœur va faire des miracles, et je suis on ne peut plus fière d’elle.
– Tu as l’air super-contente.
Je penche la tête sur le côté et le regarde déplacer sa nourriture dans son assiette
sans la manger.
– Pourquoi je ne le serais pas ? Je l’ai élevée pour qu’elle devienne une personne
géniale. Je suis sa mère, son père et sa sœur depuis quinze ans. Et je traverse le
pays de long en large pour payer ses études tout en sauvant la peau de mon père.
Il fronce les sourcils et prend un air sérieux.
– Explique-moi les problèmes qu’il a eus. Tu as dit qu’il ne pouvait pas
s’empêcher de jouer. C’est à cause de ça ?
J’enfourne une bouchée de tostada, savourant le croquant de la laitue et le
mélange d’asada3, de fromage, de guacamole et de haricots rouges. C’est
délicieux.
– Il doit une somme gigantesque à un horrible usurier. Bien évidemment, il ne
peut pas le rembourser, donc ils l’ont tabassé à mort. Ou presque puisqu’il est
dans le coma. Ils m’ont épinglée à l’hôpital et ils m’ont dit que si je ne les
remboursais pas, ils le tueraient et qu’ils s’en prendraient à Maddy et moi. Ils
appellent ça la dette du survivant, je dis en repoussant mes cheveux. Hélas, je
connais le connard qui lui a prêté cet argent. C’est mon ex et c’est un
psychopathe. Il n’aurait aucun scrupule à nous tuer si je ne lui rendais pas son
argent. Donc, je fais ce que je peux pour le rembourser.
– Tu lui dois combien ?

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Une personne normale garderait sans doute cette information pour elle, mais j’en
ai assez de supporter des secrets. Parfois, il faut se libérer de ce poids.
– Un million de dollars.
Il écarquille les yeux.
– Je sais, c’est dingue, non ?
Il vide tout l’air de ses poumons et recule sur la banquette.
– Tu es payée cent mille dollars pour le mois. Alors, tu le paies petit à petit ?
– Bingo ! je m’exclame en souriant, mais il ne partage pas mon humour.
– Tu lui dois encore combien ?
– En comptant ce mois-ci, je dis en avalant une autre bouchée, quatre cent mille.
– C’est pour ça que ton compte est vide. Tout ce qui te reste, tu le donnes à ta
sœur, c’est ça ?
– Exactement ! Tu es perspicace, Maximus !
– Maximus, répète-t-il en riant.
– Tu t’es vu ? Tu es immense ! C’est le surnom parfait pour toi.
– Mia, dit-il froidement en prenant ma main, j’aimerais rembourser ta dette. Le
million entier, comme ça, tu pourras récupérer ton argent. Tu ne devrais pas
avoir à payer les pots cassés à la place de ton père.
Je me lèche les lèvres, retire ma main et le regarde droit dans les yeux. Je ne
comprendrai jamais pourquoi les hommes comme Max pensent que leur argent
peut résoudre tous les problèmes. Ces derniers temps, j’ai l’impression que tous
ceux que je rencontre veulent jouer au chevalier blanc.
– Pourquoi tu ferais ça ? je dis d’une voix désinvolte, ce que Max ne prend pas
bien.
Tout son corps se crispe et il serre la mâchoire si fort que je me demande si elle
va tenir.
– Parce que je le peux, répond-il sans desserrer les dents.
Je recule dans ma chaise et plonge mon regard dans le sien pour m’assurer qu’il
comprenne que je suis des plus sérieuses.
– Je ne te laisserai jamais faire ça.
Il recule également et allonge le bras sur le dossier de la banquette.
– Tu devrais apprendre à accepter les cadeaux.

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Les cadeaux ? Ce type est complètement dingue !
– Tu as qu’à dire ça à mon copain plein aux as. J’ai une idée, vous devriez
monter un club. Le club des gens qui sont tellement riches qu’ils en deviennent
idiots. Je vais très bien, tu sais. Je vais continuer à tranquillement rembourser
cette dette, puis je vais m’installer de façon permanente à Malibu et applaudir
ma petite sœur quand on lui donnera sa licence, son master puis son doctorat. On
peut parler d’autre chose, maintenant ? Tu m’énerves, alors que je profitais
joyeusement de ce délicieux repas gratuit.
Max me regarde comme si un troisième œil me poussait sur le front.
– Comme tu voudras, sucre d’orge, répond-il en ricanant.
Sucre d’orge. Je le baptise Maximus et lui, il m’appelle « sucre d’orge » ?
Génial.

1. . Sorte de taco qui est plat et ouvert, sur lequel les ingrédients sont déposés en
couches. (NdT, ainsi que pour toutes les notes suivantes)
2. . Tortilla de maïs enroulée et frite.
3. . Grillade.

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Chapitre 6

Nous passons la semaine à apprendre à nous connaître et à parcourir les


bureaux pour s’assurer que tout le monde me voie. Toutefois, je passe le gros de
mon temps avec sa petite famille, ce qui est tout simplement merveilleux. Si
Maddy et Wes étaient là, je me serais sentie parfaitement chez moi. Nous
déjeunons tous les jours dans un des restaurants d’entreprise et je ne sais
toujours pas lequel est mon préféré.
Aujourd’hui, lorsque nous avons fini de déjeuner, Max m’a fait visiter l’autre
moitié du campus où siègent les départements de Ressources Humaines,
Juridique, de Relations Publiques et de Marketing. Je regrette de ne pas avoir de
podomètre, car je suis certaine que nous avons fait au moins dix mille pas dans
la journée.
Lorsque nous arrivons chez lui, je suis surprise de voir un autre géant avec un
enfant sur un bras. Son autre main est posée sur la taille d’une blonde
magnifique dont les cheveux raides lui tombent comme un rideau jusqu’aux
fesses. Elle est vêtue d’une jupe crayon noire, d’un chemisier en soie bleu et
d’une paire de claquettes. En dehors de son choix de chaussures, elle est bien
plus apprêtée que quiconque de mes connaissances, sans doute a-t-elle troqué ses
talons aiguilles contre ces chaussures de plage pour préserver ses pieds.
Nous gravissons les marches du perron et j’entends des bribes de conversation.
– … alors, pour vous remercier, nous aimerions vous inviter à dîner un de ces
quatre, dit la blonde.
– Eh bien, qui avons-nous là ? dit Max en regardant le couple en souriant.
L’homme se tourne vers nous et sourit de plus belle. Je m’arrête pour observer le
sublime spécimen masculin qui se tient devant moi. Avec ses cheveux châtain
clair, sa mâchoire carrée, ses dents blanches et parfaites, juste assez de barbe

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pour me mettre l’eau à la bouche et des biceps plus gros que mes cuisses, on
dirait un authentique Viking.
Ses yeux bleu vert pétillent tandis qu’il me reluque bien plus vite que la plupart
des hommes. Je suis loin d’être un mannequin, mais je ne me suis jamais plainte
de ne pas attirer l’attention des mecs. Or, celui-ci me regarde comme s’il
m’étudiait sans me mater.
Cela dit, il me suffit de regarder à côté de lui pour comprendre. Ses yeux sont
aussi bleus que l’eau à Oahu. Sa peau est pâle et semble douce comme de la soie,
sa bouche est rouge et charnue, ses pommettes sont hautes et son nez petit. Je
crois que c’est une des femmes les plus élégantes que j’aie jamais vues. Sans
parler de son corps. Inutile de se demander pourquoi il n’y a d’yeux que pour
elle. Il lui jette des coups d’œil toutes les trois secondes comme s’il était prêt à
lui sauter dessus. En fait, il l’admire comme Wes me regarde, comme s’il ne se
lassait jamais de la regarder. Le petit sourire que lui renvoie la blonde me dit
qu’elle apprécie son attention.
Il tient dans ses bras la petite fille la plus adorable au monde, en dehors d’Isabel
qui est vite devenue une très bonne amie. Ce matin, lorsque je me suis réveillée,
je l’ai trouvée dans mon lit, en train de jouer avec mes cheveux.
– Pourquoi tu as les cheveux noirs ? a-t-elle demandé.
J’ai ri et je me suis frotté les yeux avant de lui expliquer que ma maman avait les
cheveux noirs. Elle a formé un « o » avec sa bouche en faisant le lien dans sa
tête.
– Et mon papa a les cheveux jaunes, alors moi aussi !
J’ai éclaté de rire et je lui ai dit combien elle était intelligente, puis je l’ai
autorisée à jouer avec mes affaires pendant que je me préparais pour aller au
bureau avec Max.
– Voici Hank et Aspen Jensen, dit Max en désignant le demi-dieu et sa femme,
et leur fille Hannah, ajoute-t-il en chatouillant le ventre de la petite fille qui hurle
de rire. Je vous présente Mia Saunders, ma sœur.
Je leur serre la main et suis ravie lorsque Hank ne broie pas la mienne. J’aime les
mecs qui savent être fermes sans être brutaux.

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– Je suis ravie de faire votre connaissance. C’est drôle, mais vous connaissez
mon copain, Weston Channing.
Le regard d’Aspen s’illumine immédiatement. Elle est tellement belle ! Si elle
n’avait pas l’air si gentille, j’aurais appelé Gin pour me plaindre des femmes
parfaites comme elles qui mettent tous les mecs à genoux.
– C’est vrai ? J’adore Weston, s’exclame-t-elle en posant une main sur sa
poitrine.
– Comment ça ? grogne son mari. Je croyais que tu n’adorais que moi, mon
ange ?
Elle balaie sa remarque d’un geste de la main.
– Je ne savais pas qu’il voyait quelqu’un. Weston est si gentil, sans oublier qu’il
est canon !
Hank saisit Aspen par la taille et l’attire contre lui.
– Tu insinues que d’autres hommes que moi te plaisent, Chérie ?
Elle lève les yeux au ciel et tapote sa main.
– Weston et moi n’avons jamais eu le moindre rencard ni échangé le moindre
baiser. Nos déjeuners ont toujours été pour le travail et la seule fois que j’ai
dansé avec lui, c’était pour notre mariage. Détends-toi, mon grand.
Il remonte sa main le long de ses côtes, s’arrêtant juste sous son sein, et elle
retient son souffle lorsqu’il dépose une série de baisers dans son cou, peu gêné
d’être en public.
– Un véritable homme des cavernes, déclare-t-elle en levant les yeux au ciel.
Allez, va traîner avec Max et les enfants et laisse-nous entre filles.
Il hoche la tête et commence à s’éloigner avant de revenir pour saisir sa nuque et
s’emparer de sa bouche. Elle pousse un petit cri, puis elle fredonne de plaisir en
se liquéfiant sur place. Soudain, Wes me manque encore plus. Je ne sais si c’est
parce que notre amour est si jeune ou si c’est parce que j’ai désespérément
besoin d’être avec quelqu’un qui me connaît, mais j’ai l’impression que la
distance qui nous sépare grandit chaque jour.
Cyndi nous emmène dans la véranda située à l’arrière de la maison. Un énorme
ventilateur propulse de l’air frais en direction de nos fauteuils en osier couverts

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de gros coussins moelleux. Sur la table basse, il y a un plateau avec des verres et
une carafe pleine d’un liquide rose.
– De la limonade rose à la vodka, dit Cyndi en souriant.
Je la prends par les épaules et l’attire à moi.
– Continue comme ça et je ne repartirai jamais d’ici, je dis en souriant.
– Je l’espère, marmonne-t-elle avant de remplir deux verres.
Étrange.
Elle prend une autre carafe avec un smiley « pas content » dessiné au marqueur,
et remplit un troisième verre.
– Ça, c’est pour moi, dit-elle en frottant son ventre. Encore deux mois sans
alcool, râle-t-elle.
Waouh. Elle a encore deux mois à tenir et elle est déjà énorme. Cela dit, je ne
m’y connais pas assez pour savoir à quoi doit ressembler une femme dans son
septième mois de grossesse.
Je lui tapote le dos :
– Désolée, Cyndi.
– Je n’y penserai plus une fois qu’il sera là, répond-elle en haussant les sourcils.
Je bois une gorgée de la limonade citronnée à la vodka et je la laisse envoûter
mes papilles. C’est délicieux, rafraîchissant et apaisant.
Nous parlons de tout et de rien, la météo, les dernières tendances de la mode
auxquelles je ne connais strictement rien. Aspen admet que c’est son assistant
personnel qui choisit tous ses vêtements et qu’il péterait un câble s’il la voyait en
claquettes. Apparemment, il les déteste. Elle dit son nom plusieurs fois, mais
l’alcool commence déjà à assoupir mes neurones.
– Ma sœur est enceinte, elle aussi. Elle attend des jumeaux, s’exclame Aspen,
clairement heureuse de devenir tatie.
Je me lève d’un bond pour attraper mon téléphone, et Cyndi fronce les sourcils,
inquiète.
– Qu’est-ce qui se passe ?
– Rien, je réponds en secouant la tête. C’est juste que quand Aspen a parlé de sa
sœur, ça m’a rappelé que je dois appeler Maddy. Ça fait des jours que j’y pense
et je ne le fais jamais.

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– Qui est Maddy ? demande-t-elle en se frottant le ventre.
Depuis qu’elle est assise, elle ne cesse de frotter son ventre un peu partout. Je
n’ose pas lui demander pourquoi elle fait ça, j’ai peur de la mettre mal à l’aise.
Je suppose que je rejoindrai le club un jour, si Wes veut des enfants. Voilà
encore un sujet que mon nouveau copain et moi devrons aborder à l’avenir.
Cependant, j’ai hâte d’avoir toutes ces discussions. Je ne les ai jamais eues avec
mes ex alors que j’étais folle d’eux. Bon sang, ce que j’étais bête. J’ai désormais
un autre chemin tracé devant moi, jonché de couchers de soleil, de sessions de
surf et de grasses matinées avec mon beau gosse préféré.
– Ben, c’est ma sœur ! je réponds en gloussant parce qu’à l’évidence je ne tiens
vraiment plus l’alcool.
Elle pâlit brusquement et porte sa main à sa bouche tandis que ses yeux se
remplissent de larmes. Merde. Qu’est-ce que j’ai dit ?
– Tu as une sœur ? Ta mère a eu une autre fille ? demande-t-elle d’une voix
rauque alors que je hoche la tête. Max n’en a pas parlé, murmure-t-elle en
réprimant un sanglot.
Bon sang, mais qu’ont tous ces gens ? C’est comme si le mot « sœur » les
plongeait dans une dépression intense.
– Pourtant, je lui en ai parlé dès le premier jour, je réponds en attendant que
Maddy décroche.
Cyndi se lève si vite qu’elle perd l’équilibre, Aspen la retient en l’attrapant par la
taille.
– Ça va ?
– Il faut que j’aille voir Max. Bon sang, c’est pour ça qu’il est si bizarre.
Je regarde autour de nous, ne comprenant pas où est le problème.
– Si tu le dis.
Je ne vois vraiment pas pourquoi l’ambiance est si tendue, tout à coup.
– Allô ? Mia ? répond Maddy.
– Coucou, mon bébé, je dis en me tournant vers la baie vitrée.
Les collines s’étendent au loin, parsemées de fleurs orange. Au loin, je distingue
les contours d’un bâtiment rouge et, à ma droite, une grange, jaune comme la
maison, avec un « C » au-dessus des portes en bois. Quelques chevaux broutent

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dans le pré, et je vois des taches marron un peu plus loin, mais je ne sais pas de
quels animaux il s’agit. Il faudra que j’aille inspecter ça. Je ne suis jamais allée
dans une ferme. Peut-être que Max pourrait m’apprendre à monter à cheval ?
– Tu es où maintenant, sœurette ? demande Maddy.
– À Dallas, au Texas, dans un véritable ranch.
– Sans rire ? C’est trop cool ! Il y a des animaux ?
Je hoche la tête, même si elle ne peut pas me voir.
– Oui. Et des chevaux. Je vais voir si Max peut m’emmener faire une balade.
– Waouh, tu as trop de chance. Matt et moi avons passé la journée à nous
inscrire aux cours pour le semestre prochain.
Elle dit ça d’une voix légèrement triste, c’est si subtil que ça masque à peine la
joie naturelle que Maddy dégage toujours.
Je me retourne en réalisant soudain que je ne suis pas seule. Cyndi et Aspen me
regardent, mais surtout Cyndi, qui semble suspendue à tout ce que je dis, alors
qu’Aspen se contente de me sourire en sirotant sa limonade. C’est Hank qui va
être content si elle continue à boire à ce rythme.
Si Maddy s’inscrit pour les cours, cela signifie qu’elle ne fait pas grand-chose de
ses journées. Par le passé, nous passions beaucoup de temps ensemble, entre
deux semestres. Mais, maintenant, je n’ai plus ce luxe.
– Je suis désolée de ne pas pouvoir venir à Vegas, Maddy.
Je me laisse tomber sur un fauteuil et masse ma tempe pour me débarrasser du
stress qui commence à s’accumuler quand je réalise combien ma sœur me
manque.
Maddy renifle, je devine tout de suite qu’elle pleure.
– Ça va, j’ai Matt, maintenant… je suppose.
– Tu supposes ? Qu’est-ce qui a changé ? je demande, alors que mon instinct
maternel chasse d’un coup tout l’alcool que j’ai ingurgité.
– Rien, tout va bien. Super-bien. Mais… il a commencé à dire qu’il voulait
avancer la date du mariage.
Une énorme vague de peur, de tristesse et de colère s’abat sur moi comme un
seau d’eau glacée.
– Maddy, tu ne peux pas l’épouser aussi vite…

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Je déglutis, essayant de ravaler le nœud qui se forme dans ma gorge, de rester
calme et de ne pas être étouffante. Elle renifle de nouveau, mais cette fois-ci, je
sais qu’elle pleure à chaudes larmes. J’ai passé des années à essuyer ses larmes
et à la réconforter, je sais quand elle est face à un problème qu’elle ne sait pas
gérer. Dans ma tête, je rouspète une fois de plus contre notre père, car sans lui et
ses conneries, je serais encore aux côtés de ma sœur, à l’aider à affronter ses
ennuis.
– Je ne sais pas, Mia. J’ai envie d’être avec lui, mais ça va trop vite. On est
tellement jeunes… On vient juste d’emménager ensemble.
Essayant d’être sa sœur plutôt qu’une mère poule, je pose la question à un
million de dollars.
– Est-ce que tu es heureuse ?
– Mon Dieu, Mia, je suis tellement heureuse. Tout est parfait. J’adore habiter
avec lui. On s’entend à merveille. Tout est naturel, tu vois ce que je veux dire ?
– Oui, je vois.
C’est justement ce que je ressens avec Wes, mais ce n’est pas le moment
d’apprendre à Maddy mon changement de situation.
Cyndi approche et me regarde d’un air inquiet. Elle pose une main sur mon
genou, que je recouvre avec la mienne. Sa solidarité est plus que bienvenue. Bon
sang, j’espère que je peux convaincre Maddy d’attendre, de profiter d’être jeune
et amoureuse et de ne pas se précipiter.
– Je sais que je veux l’épouser et que c’est l’homme de ma vie, mais ça va un
peu trop vite pour moi.
Je hoche la tête et repousse une mèche de cheveux.
– Tu le lui as dit ?
Elle pousse un grognement et j’entends un bruit de tissu, comme si elle venait de
se laisser tomber sur son lit.
– Ouais, mais il est devenu tout triste. Il pense que je ne l’aime pas vraiment
parce que je n’ai pas voulu me marier en cachette avec lui. Il voulait qu’on aille
dans une de ces chapelles du Las Vegas Boulevard. Il voulait qu’on le garde
secret et qu’on fasse quand même un grand mariage quand on sera diplômés,
comme prévu.

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Non, non, non, non ! J’appuie si fort mes pouces sur mes tempes que je ne serais
pas surprise d’y voir des marques. Je fais un effort surhumain pour respirer
lentement et me calmer avant de parler.
– Et tu as dit quoi ?
Un long silence s’installe avant qu’elle ne me réponde.
– Je lui ai dit que je ne pourrais jamais me marier sans toi. Que tu aurais le cœur
brisé et que je préférais marcher sur des charbons ardents plutôt que de te faire
du mal. Je t’aime, Mia. Je ne pourrais jamais te faire ça. Je te l’ai promis.
Je soupire et j’empoigne mes cheveux par la racine pour que la douleur me
réveille un peu.
– Je t’aime aussi, sœurette. Mais tu ne dois pas toujours t’inquiéter de ce que je
vais en penser. Si c’est ce que tu veux faire, je te soutiendrai, même si je serai
triste de ne pas être là.
Des sanglots jaillissent à l’autre bout du fil et me brisent le cœur. Je veux être là
pour elle, la tenir dans mes bras, lui dire que tout ira bien et que je serai toujours
là pour elle.
– Non, ce n’est pas ça. Je veux que tu sois là, point barre. Et si Matt ne le
comprend pas, tant pis pour sa gueule.
– Tant pis pour sa gueule ? Mady, je n’arrive pas à croire que tu aies dit ça !
Mon adorable petite sœur qui n’a jamais juré de sa vie !
– C’est sorti tout seul, dit-elle en riant.
– Écoute, ma chérie, ne t’en fais pas. Matt et toi allez régler tout ça. Si vous êtes
faits pour durer, vous y parviendrez. Parfois, il faut accepter de ne pas être
d’accord. Dis-lui ce que tu ressens. Explique-lui que tu veux attendre et que tu
veux que vous restiez fiancés plus longtemps pour vous concentrer sur vos
études. Le reste viendra en temps voulu. S’il t’aime, et je sais que c’est le cas, il
comprendra. Cependant, ne le laisse pas te mettre la pression si tu ne te sens pas
prête, d’accord ?
Elle soupire et j’entends une porte s’ouvrir à l’autre bout du fil. Elle retient son
souffle et il y a un bruissement.
– Bébé, je suis désolé. Je suis désolé. Je n’aurais jamais dû te forcer à te marier
maintenant. C’est juste que je t’aime trop. Pardonne-moi. Pardonne-moi. Ne me

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quitte pas, supplie Matt.
– Il faut que j’y aille, Mia, chuchote Maddy.
– Rassure ton homme, ma belle. Je t’aime, je réponds en essuyant une larme
solitaire.
– Je t’aime encore plus, ajoute-t-elle avant de raccrocher.
Je pose mon téléphone et croise les bras, laissant les larmes couler librement.
Soudain, de gros bras musclés me serrent fort et je me retrouve plaquée contre
un torse dur comme fer.
– Elle me manque tellement…
Max me serre fort tandis que Cyndi caresse mon dos de haut en bas.
– Et si on la faisait venir ici ? dit Max avant de m’embrasser sur la tempe à la
manière d’un vrai frère.
Or, il n’est pas mon frère, et cette pensée me fait pleurer de plus belle. Je renifle
et respire son odeur de cuir.
– Tu ne peux pas faire ça. Je dois rester concentrée sur l’entreprise. Vous avez
déjà été si gentils, je ne peux pas accepter.
Il secoue la tête et sa femme imite son geste.
– Mais non, on adorerait l’avoir avec nous si elle a le temps.
Techniquement, elle est entre deux semestres.
– Elle ne viendrait pas, de toute manière, je dis en pensant à Matt. Elle vit avec
son fiancé et c’est tout nouveau, alors je doute qu’il la laissera aller chez un
étranger au Texas.
Max fronce les sourcils et sa femme détourne le regard.
– Mais je ne suis pas un étranger. Et ils peuvent venir tous les deux, on a
largement assez de place. Plus on est de fous, plus on rit, répond Max.
– Quoi ? je m’exclame en reculant. Non, tu ne peux pas faire ça. Tu ne les
connais même pas. De toute façon, pourquoi tu voudrais inviter ma sœur et son
fiancé ici ? Ça n’a pas de sens !
– Est-ce que ça te ferait plaisir ? Tu as dit qu’elle te manquait.
Je secoue la tête, espérant un moment de clarté, mais je reste tout aussi confuse.
– Ben, oui, mais je ne suis pas ici pour moi. Je suis ici pour toi, pour sauver tes
actions.

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Tout à coup, le Max adorable et terre à terre disparaît. Ses yeux se ferment
légèrement et il se pince si fort les lèvres qu’elles deviennent blanches.
– Mes actions ne valent rien sans l’amour de ma famille. Nous allons faire venir
ta sœur et son mec ici, point à la ligne. Cyndi, ma chérie, tu t’en occuperas ?
ordonne-t-il.
– Bien sûr. Mia et moi nous en chargerons demain. Allez, va boire un scotch
avec Hank pour te calmer. On va discuter toutes les deux, répond-elle comme si
je n’étais pas dans la pièce.
Le stress de la journée, le bon temps que j’ai passé avec Max, la limonade à la
vodka, ma conversation avec Maddy et maintenant ce délire m’ont épuisée. Je
n’ai plus qu’une envie, aller me coucher et dormir au moins dix heures.
Je tourne les talons et sors de la véranda à grandes enjambées, sans un mot.
– Mia ? dit Cyndi en me rattrapant au pied des escaliers qui mènent à l’étage.
– Demain. Pour l’instant, j’ai besoin d’espace et de sommeil. Tu veux bien me
l’accorder ou tu as besoin que ton mari te l’ordonne ? je rétorque.
Elle retient son souffle et elle paraît profondément blessée. Elle se lèche les
lèvres, hoche la tête et repart en se dandinant.
Je gravis les escaliers le cœur lourd. Je m’excuserai demain. Cyndi ne mérite
vraiment pas que je lui parle ainsi. C’est simplement que rien n’a de sens depuis
que je suis arrivée à Dallas. Entre le besoin constant de Max de me désigner
comme sa sœur, la manière dont il s’est décomposé plusieurs fois et les soucis de
cœur de Maddy, je suis lessivée. À présent, mon client, celui qui m’a engagée
pour faire un travail, veut faire venir ma sœur et son fiancé ici. Qui fait ce genre
de chose ?
Cela dit, si j’y réfléchis sérieusement, la plupart des hommes qui m’ont
embauchée auraient fait la même chose. Je n’aurais pas dû parler à Maddy
devant Cyndi et Max. J’ai oublié ma place. C’est juste que plus rien ne compte
quand je sens qu’elle ne va pas bien.
Le bonheur de Maddy a toujours été ma priorité. Maintenant, je suis entourée par
plein de gens qui tiennent à moi et se soucient de mes besoins. Je m’habitue à
peine à l’attention que m’accorde Weston, il va me falloir du temps pour
m’accoutumer à l’affection de mes amis.

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Mes amis. Voilà le cœur du problème. Max et Cyndi se comportent-ils comme
des amis ? Est-ce que Ginelle agirait de la même manière ? Elle remuerait ciel et
terre pour s’assurer que je suis heureuse. La situation est-elle la même ? Peut-
être. Je ne sais pas. Je n’en sais rien. On ne se connaît pas depuis longtemps. Y
a-t-il un délai à respecter avant que des nouveaux amis proposent de payer des
billets d’avion hors de prix ?
Je me frotte les yeux et me laisse tomber sur le lit. Pourquoi se soucient-ils
autant de quelqu’un qui ne fait pas partie de leur famille ? Je suis trop fatiguée
pour y réfléchir davantage. Il faut que je dorme. Je m’occuperai de la générosité
des Cunningham demain, et je m’excuserai auprès de Cyndi. Tout ira mieux et
j’y verrai plus clair à la lumière d’un nouveau jour.

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Chapitre 7

Apparemment, les Cunningham se fichent complètement de la vie privée des


autres. Lorsque je me réveille et que j’allume mon téléphone, des messages de
Wes et de Maddy m’attendent. Je les lis rapidement en me frottant les yeux, mais
je m’assieds d’un bond en lisant celui de Maddy.
À : Mia Saunders
De : Maddy
OMG ! Matt et moi sommes trop contents de venir au Texas ! Yiiiihaaaa ! On
arrive vendredi ! Ton amie Cyndi est trop sympa, au fait. Trop cool. On vient en
jet privé !
À : Mia Saunders
De : Maddy
Tu as eu mon dernier message ?
À : Mia Saunders
De : Maddy
Un jet privé ! Aaaah ! Trop cool !
Bon sang, à l’évidence, la gentille petite Cyndi ne perd pas de temps. Elle a dû
prendre le numéro de Maddy dans mon téléphone sans que je m’en rende
compte. Je regarde autour de moi et découvre que ma tenue d’hier est joliment
pliée sur la commode, et quand je baisse les yeux, je découvre que je porte un t-
shirt d’homme. Un énorme t-shirt. Mon Dieu, elle m’a changée ! J’ai encore plus
l’impression d’avoir été une garce, maintenant. Cela dit, elle m’a volé mon
téléphone, donc elle n’est pas sans reproche. Toutefois, cette adorable femme est
venue dans ma chambre, elle m’a trouvée endormie sur le lit, habillée et
chaussée, et elle s’est occupée de moi. Elle m’a même donné un des t-shirts de

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son mari. Mince, j’espère que Max ne l’a pas aidée, ce serait affreusement
gênant.
À : Mia Saunders
De : Wes Channing
Coucou, Chérie. Ta voix m’a manqué hier soir. Tout va bien ?
Je m’empresse d’appeler Wes. J’ai besoin d’entendre la voix de celui que j’aime
de tout mon cœur. Je m’assieds en tailleur et j’attends qu’il réponde. Je suis sur
le point de laisser un message quand sa voix essoufflée jaillit au bout du fil.
– Mia, ça va ?
Je ricane en me disant que je suis loin d’aller bien, mais que je ne suis pas en
danger. Sauf en danger de devenir folle.
– Ouais, désolée de ne pas t’avoir appelé hier soir. Je crois que je me suis
endormie avant que ma tête ne touche l’oreiller. La journée a été longue. Hyper-
longue.
– Ah ouais ? Dis-moi tout. J’ai un peu de temps et tu m’as manqué.
L’entendre dire que je lui ai manqué fait palpiter mon cœur et pulser mon sexe.
Plus que deux semaines et je pourrai y remédier. Pour l’instant, je me contente
de lui raconter ma journée et tout ce que je ne lui ai pas dit ces derniers jours. Je
lui avoue que Max s’est effondré au bureau, que Cyndi réagit de façon étrange
avec moi, comme si elle me cachait quelque chose, et que la cousine Sofia
n’était pas ravie que je débarque alors qu’elle était sur le point de récupérer
quarante-neuf pour cent de Cunningham Oil & Gas. Je lui explique ensuite la
situation avec Maddy et ce qui s’est passé hier, y compris la manière dont Cyndi
s’est occupée de moi tout en fouillant dans mes affaires et en contactant Maddy
sans mon autorisation.
Lorsque j’ai fini, j’attends plusieurs secondes, mais Wes ne dit rien.
– Bébé, tu es toujours là ?
– Ouais, je suis là. Mais je ne suis pas ravi de ce que tu me racontes. Je savais
que quelque chose était louche quand tu m’as parlé de ce boulot, mais mon
détective n’a trouvé que des bonnes choses à propos de ce type. C’est un père de
famille exemplaire et un homme d’affaires solide. Apparemment, les

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Cunningham n’ébruitent pas cette histoire de sœur, parce que mon type n’a rien
trouvé à ce sujet.
– Ah bon ? Je suppose que c’est normal tant qu’ils gèrent tout ça, je réponds en
remettant une mèche derrière mon oreille. Wes, c’est dur d’être ici. Plus je passe
du temps avec cette famille, plus je regrette de ne pas vraiment en faire partie.
– Chérie, je sais que ça te manque de ne pas avoir une famille, répond Wes. Mais
ne t’attache pas trop, d’accord ? Et puis, tu m’as moi, et Maddy. On est ta
famille. Tu auras toujours un point de chute chez moi et avec ma famille. Puis,
un jour, on officialisera tout ça, déclare-t-il.
Il dit cela comme si c’était un fait, mais ses paroles me font l’effet d’un
électrochoc et je me transforme instantanément en une boule de nerfs. Waouh ! Il
vient vraiment d’insinuer ce que je crois qu’il a insinué ?
– Wes… je gronde.
Je n’ai pas vraiment envie d’en parler, mais si je ne dis rien, je vais y penser sans
cesse.
– Je sais. Je sais que tu n’es pas prête pour le mariage, répond-il en riant. Mais
sache que je suis à fond dans cette relation. Ta place est avec moi et on forme
déjà une famille. D’accord ?
Une famille. Je me sens toute chose en me répétant ce qu’il vient de dire.
– D’accord, Bébé. Ça roule. Comment se passe le tournage ?
– Bien. Même si je travaille sur une scène de romance pour laquelle j’aurais bien
besoin d’aide, dit-il de sa voix grave qui m’excite. Tu connais des nanas brunes
avec des jambes infinies, des seins si gros que je bave rien que d’y penser et un
cul qui mérite sa propre scène ?
J’éclate de rire et j’enroule une mèche autour de mon index.
– Hmmm, j’ai quelqu’un en tête, oui, je susurre d’une voix sensuelle.
– Putain, Chérie, grogne-t-il, je suis déjà dur.
– Mmm, alors sors-la.
J’entends le bruit de sa braguette puis le bruissement de ses vêtements.
– Ok, siffle-t-il d’un ton désespéré qui me ravit.
Je m’adosse à la tête de lit et je m’assure qu’il entend chacune de mes
respirations.

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– Prends la base de ton sexe et imagine que c’est ma main. Serre-le juste assez
fort, mais pas trop quand même. Maintenant, je dis quand il pousse un
grognement, lèche ton pouce, et fais le tour de ton gland, comme si c’était ma
bouche et ma langue. Imagine que je lape ce petit carré de peau qui te rend
dingue.
– Putain, mais tu me rends déjà dingue. J’ai trop envie de toi, ma belle.
– Je te lèche de bas en haut, lentement mais fermement. Maintenant avec mon
autre main, je prends tes couilles et je les fais rouler dans ma paume avant de
t’avaler profondément dans ma gorge. Tu es si profond que j’arrive à peine à
respirer. Je suffoque sur ton sexe jusqu’à ce que tu aies pitié et que tu te retires.
Ton goût est délicieux. Un goût d’océan et d’homme. Mon homme. Oh Bébé, je
mouille tellement pour toi.
Je retiens mon souffle et Wes pantelle dans le téléphone. Je plonge une main
entre mes cuisses et sous la dentelle de mon tanga Aubade.
– Je suis trempée pour toi, Wes.
– Tu touches ton joli minou ?
– Hmm, ouais, je t’imagine te branler et ça m’excite trop, Bébé.
J’appuie sur mon clitoris et dessine des cercles rapides avec mon doigt. Bientôt,
j’avance et recule mon bassin, cherchant ce corps qui est à des milliers de
kilomètres.
– Tu es bientôt prêt ?
– Oh oui. Tu baises ta petite chatte avec tes doigts ? Fermement, comme je le
ferais ?
J’imagine ses doigts puissants disparaître en moi et je mouille de plus belle.
– Ouais, je gémis.
Je retiens mon souffle en plongeant deux doigts dans ma chatte mouillée. Je
laisse la base de ma main frotter mon clitoris au passage, déclenchant des
décharges électriques qui se précipitent dans mes veines.
– Je vais jouir…
– Moi aussi. Je me branle tellement fort en pensant à comment je vais te prendre
contre la porte d’entrée dans deux semaines. Je vais déchirer ta culotte et plonger
en toi. Je vais te baiser si fort que tu ne voudras plus jamais me quitter.

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– Wes, Wes, Wes… je gémis en soulevant mon bassin tandis que je me doigte,
imaginant ce qu’il me décrit.
Mon mec adore baiser contre les murs et les portes. J’appuie plus fort sur mon
clitoris et mon orgasme explose en moi. Tout mon corps se contracte et mon
sexe se referme sur mes doigts encore enfouis.
– Mon Dieu, oui ! Je t’aime, je chuchote.
– Putain, Bébé. C’est tellement bon. Tu es trop sexy. Putain, tu es à moi. Toute à
moi.
Je l’écoute s’exciter à l’idée de me baiser, tout en titillant lentement mon clitoris,
laissant les décharges de plaisir se dissiper peu à peu.
– Chérie… j’adore ta voix. C’est comme du sexe liquide au téléphone.
Je glousse et tiens fort mon téléphone sur mon oreille.
– J’ai aimé t’entendre jouir pour moi. Merci.
– Mmm, tout le plaisir est pour moi, Mia. Je vais être occupé ce soir, mais
appelle-moi quand même. Laisse-moi un message avant de te coucher pour me
dire que tu vas bien. Et n’oublie pas que je t’aime.
Je souris jusqu’aux oreilles. Cette intimité au téléphone avec Wes me donne un
nouveau souffle pour affronter les Cunningham trop bien intentionnés.
– Je t’aime aussi. Passe une bonne soirée.
– Toi aussi, Chérie. Appelle-moi si tu as besoin.
J’ai envie de lui dire que j’aurai toujours besoin de lui, mais c’est trop mielleux,
même pour moi. Au lieu de cela, j’attends qu’il raccroche en serrant mon
téléphone, comme si c’était la main de l’homme que j’aime.
*
* *
Plus tard dans la nuit, un rêve que j’ai déjà fait plusieurs fois refait surface. J’ai
environ quatre ans et je joue dans une aire de jeux d’un des casinos de Las
Vegas. Un jeune garçon avec une touffe de cheveux blonds me tient par la main.
– Papa dit que je dois te surveiller, parce qu’il a un rendez-vous super-
important avec ta maman.
Le garçon est plus âgé que moi, il a peut-être deux fois mon âge. Il a des
cheveux marrants et des grandes dents avec un trou entre celles de devant.

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– Tu as quel âge ?
– Quatre ans et demi, je réponds d’une voix très sérieuse.
Il grimpe sur un muret en pierres, puis il plie un genou et me tend la main pour
m’aider à monter. Je pose un pied en haut du mur et réalise que je tiens plutôt
bien.
– Moi, j’ai déjà dix ans. J’ai un âge à deux chiffres, répond-il fièrement, comme
si le fait de vieillir méritait des louanges.
Au lieu de prendre sa main, je grimpe seule en haut du mur, masquant ma joie
d’avoir réussi, faisant mine que c’était simple.
– Mon père dit que l’âge n’est qu’un chiffre et que les nombres qui comptent
sont juste ceux en rouge et noir sur les roues du casino de maman.
– La roulette ? demande-t-il en haussant les sourcils.
Je penche la tête sur le côté, incertaine. Tout ce que je sais, c’est que papa aime
ça. D’ailleurs, c’est là qu’il est maintenant, en train de jouer à ce jeu. Maman
fait son spectacle pour cet homme, et je sais que c’est important parce qu’elle a
mis sa robe toute brillante et ses plumes dans ses cheveux. Parfois, elle me laisse
jouer avec, mais je n’ai jamais le droit de jouer avec ses jolies robes. Elle dit
qu’elles coûtent trop cher et qu’elle a peur que je les abîme.
– Mon papa aime bien ta maman, dit le garçon en se balançant d’un barreau de
la cage à écureuil à un autre.
De mon côté, je n’arrive pas à atteindre les barreaux, même sur la pointe des
pieds.
– Tout le monde aime ma maman. C’est une actrice. Si les gens l’aiment pas,
alors c’est qu’elle fait mal son travail, je déclare d’une voix assurée, répétant ce
que maman m’a dit.
Le garçon hoche la tête et ses cheveux tombent dans ses yeux. Il les repousse
d’une main, alors je vois ses yeux d’un vert intense qui me dévisagent. Les gens
me disent tout le temps que j’ai les yeux d’un chat, mais je trouve que ceux du
garçon sont encore plus beaux. Un peu comme ceux de maman.
– En tout cas, mon papa dit qu’il veut épouser ta maman et former une famille.
Donc, tu serais ma sœur.
Je fronce les sourcils.

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– Il ne peut pas épouser ma maman parce qu’elle a déjà mon papa. Elle a une
bague, et tout.
– Ah bon ? Je ne crois pas que mon père le sache, dit le garçon avec un air
triste. J’ai trop envie d’avoir une maman, et la tienne est jolie et gentille.
Je secoue la tête.
– Elle est pas vraiment gentille. Elle est juste douée pour faire semblant.
– Elle est méchante avec toi ?
Je vais à la balançoire et m’assieds dessus.
– Non, mais elle ne m’aime pas autant que les mamans de mes amies.
Il se place derrière moi et tire la balançoire avant de me pousser pour m’aider à
démarrer. J’y arriverai toute seule, maintenant. Il s’assied sur la balançoire à
côté de la mienne, mais il ne la bouge pas.
– Alors, je ne veux pas qu’elle soit ma maman.
– Ouais. Peut-être que ton père pourrait en trouver une plus gentille ?
– C’est une bonne idée. Je crois que je vais l’aider à en trouver une super-douce
et super-jolie. Tu pourrais peut-être m’aider ?
Je souris jusqu’aux oreilles et je traîne mon pied par terre pour m’arrêter.
– Ça pourrait être rigolo.
Le garçon et moi passons l’heure qui suit à déambuler dans le casino, main dans
la main, pointant du doigt des femmes qui pourraient être sa maman. Hélas,
nous n’avons pas encore trouvé la bonne quand son papa et ma maman nous
retrouvent. Elle est en pleurs et quand elle s’agenouille devant moi, elle me
secoue et me gronde parce qu’on est partis de l’aire de jeux. L’homme à côté se
baisse pour regarder le garçon dans les yeux et il pose ses mains sur ses épaules
avant de le gronder, mais le garçon ne pleure pas. Il s’excuse, et son papa lui dit
combien il a eu peur et il le prend dans ses bras. Ma maman ne me fait pas de
câlin et le garçon me regarde d’un air triste en articulant « désolé ». Je regarde
l’homme prendre maman par la main pour l’attirer à lui et l’embrasser.
Il continue de l’embrasser jusqu’à ce qu’elle le repousse et lui dise d’arrêter. Il
lui demande de venir avec lui, de m’emmener et de s’enfuir. D’abandonner cette
vie et de partir avec lui. C’est alors que mon père arrive en montrant à maman
un pot plein de jetons. Il me soulève, me fait tourner dans les airs et me serre

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fort contre lui, comme toujours. Les câlins de mon papa sont les meilleurs.
Ensuite, il attire maman contre lui et lui dit qu’on va manger au restaurant ce
soir. Elle sourit et tourne le dos au garçon et à son papa, comme si elle ne les
connaissait pas.
Je regarde les épaules du monsieur s’affaisser et ses yeux se remplir de larmes.
Il pose sa main sur l’épaule du garçon, qui me fait au revoir de la main.
Je me réveille en sursaut alors que le rêve est si frais que j’entends encore les
tintements et le brouhaha du casino. Je vois encore les machines à sous et les
lumières vives qui clignotent. Je ferme les yeux et je me rallonge, retournant
mon oreiller du côté frais. D’habitude, j’arrive à contrôler mes rêves afin de les
poursuivre ou bien je pense à quelque chose et j’en rêve. Cette fois-ci, quand je
ferme les yeux, je plonge tête en avant dans un autre souvenir.
Maman et papa se disputent encore. Maddy est avec Tante Millie à la maison.
C’est son quatrième anniversaire et on est partis chercher ses cadeaux. Papa a
voulu passer voir maman au travail pour s’assurer qu’elle serait rentrée à temps
pour la fête. Maman trouve injuste de devoir partir plus tôt pour les quatre ans
d’une gamine. Elle dit que Maddy ne s’en souviendra pas, de toute façon, alors
à quoi bon ?
C’est alors qu’un homme les bouscule sur le trottoir. Il est avec un adolescent
qui retient maman par la taille pour l’empêcher de tomber. Elle se retourne,
prête à lui crier dessus alors qu’il a voulu l’aider. Je reconnais tout de suite le
garçon de l’aire de jeux. Le père, lui, n’a pas changé. Il a le même chapeau de
cow-boy que ce jour-là, il y a quelques années. Quand maman voit son visage,
elle pâlit brusquement, comme si elle avait vu un fantôme, et elle recule jusqu’à
papa, qui la rattrape.
– Meryl ? dit l’homme à maman. Mon Dieu, ça fait des années. Voici, voici…
– Maxwell, dit maman d’une voix rauque, ses mains tremblent comme des
feuilles.
Max. C’est ça. Il s’appelle Max. J’avais oublié. L’adolescent baisse le rebord de
son Stetson pour la saluer avant de plonger ses mains dans les poches de son
jean.

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Je vois ses cheveux blonds qui dépassent de son chapeau quand il lève les yeux
vers moi. Ses grands yeux vert pâle brillent de gentillesse.
– Bonjour, Mademoiselle, dit-il.
Je souris en me demandant s’il se souvient de moi, lui aussi, mais je suppose que
non.
– Qui est-ce ? demande papa.
– Euh, c’est un vieil ami. Jackson Cunningham et son fils… Maxwell.
C’est comme si sa voix se brisait de devoir dire le prénom de ce garçon. Papa
tend la main et se présente, et Jackson la serre sans jamais quitter maman des
yeux. Quant à elle, ses yeux sont rivés sur Maxwell. Ils semblent renfermer un
secret si grave que je devine qu’il nous détruirait tous s’il était révélé.
Nous restons tous les cinq sur le trottoir, gênés. Jackson dévisage ma mère qui a
l’air de vouloir disparaître sous terre. Papa finit par mettre fin à la situation en
prenant ma main et en annonçant que nous sommes en retard pour un
événement important.
– Euh, oui, il faut qu’on parte. C’était un plaisir de te revoir, Jackson. J’espère
que toi et Max, euh, ton fils, vous portez bien.
– Attends, Meryl, échangeons nos numéros !
Jackson tend la main, mais maman secoue la tête, évitant son bras, trottant
après papa et moi.
– Ne refais pas ça, Meryl, pas cette fois… supplie-t-il.
– C’est pour le mieux. C’est mieux pour toi.
Mon réveil sonne, mais je n’entends que la dernière phrase de ma mère, passant
en boucle dans les méandres de mon inconscient. Toutefois, ce n’est pas la
dernière fois que j’ai entendu ces paroles. C’était un des pires jours de ma vie.
– C’est pour le mieux. C’est mieux pour toi.
Je ferme fort les yeux, essayant de repousser le souvenir.
– C’est pour le mieux. C’est mieux pour toi.
Sa voix est douce, presque comme une chanson.
– C’est pour le mieux. C’est mieux pour toi.
Son parfum embaume encore ma chambre longtemps après qu’elle est partie.
– Mia, ma chérie…

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Je me souviens vaguement qu’elle tapote mon front pendant que je m’accroche à
mes rêves. Je n’ai que dix ans et ma couette de princesse est trop chaude, mais je
refuse de la quitter. Elle m’embrasse sur la tête et chuchote ces mêmes paroles.
– C’est pour le mieux. C’est mieux pour toi.
C’est le jour où ma mère est partie, pour ne jamais revenir. J’ai bloqué ce
souvenir pendant longtemps, persuadé que j’ai dû l’imaginer, comme j’ai refoulé
mes souvenirs du garçon et de son père. Ce n’étaient pas des rêves. Ce sont des
souvenirs, et ils rendent quelque chose très clair.
Maxwell Cunningham et son père connaissaient ma mère.

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Chapitre 8

– Max, il faut qu’on parle, je déclare en entrant dans la cuisine.


Cyndi est en train de remplir des assiettes de pancakes, de bacon et d’œufs
brouillés, et mon estomac gargouille bruyamment à la vue de toute cette
nourriture. Elle désigne une chaise vide et je m’y laisse tomber, accablée par le
poids de mes problèmes.
– Tiens, mange. Il faut qu’on t’explique une ou deux choses, en effet, grogne
Max.
Je n’ai pas le temps de répondre, Cyndi me coupe la parole.
– Je sais que tu dois être en colère contre moi, dit-elle en me servant une tasse de
café.
Elle y ajoute deux cuillerées de sucre et un nuage de lait et je trouve adorable
qu’elle se soit souvenue de mes goûts. Elle fait attention au moindre détail, ce
qui aide à mettre les gens à l’aise.
– Tout d’abord, sache que je suis désolée, annonce-t-elle.
– Non, tu ne l’es pas, je rétorque en observant sa réaction.
Elle lève les yeux au ciel, puis elle s’arrête et pose une main sur son ventre rond
tandis que l’autre, munie d’une spatule, reste suspendue en l’air.
– Tu as raison. Je ne suis pas désolée. Tu as besoin de voir ta sœur et nous avons
besoin de la rencontrer.
Ils ont besoin de la rencontrer.
– Pourquoi ? Ce qui se passe entre ma sœur et moi n’a rien à voir avec ton mari
et son entreprise.
Je regarde Max qui baisse la tête, occupé à éviter la conversation et à jouer avec
sa nourriture sans la manger. Le fait qu’il ne touche pas à son assiette est encore
un signe que quelque chose ne va pas. Ce type a un appétit d’ogre.

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– On tient beaucoup à toi, Mia, soupire Max. Tu ne pourrais pas simplement
l’accepter et lâcher l’affaire ?
Je secoue la tête en m’emparant d’une tranche de bacon. Sa texture craquante,
salée et huileuse envoûte mes papilles et me remonte instantanément le moral.
Le bacon doit être une des plus belles créations de Dieu. Je mâche en silence
pendant un moment, réfléchissant à la meilleure manière d’aborder la question.
Certes, Max et Cyndi se montrent extrêmement gentils. Cependant, ils ont agi
sans me consulter. C’est ma vie et ma famille, pas la leur. Il faut qu’ils
comprennent la gravité de ce qu’ils ont fait.
– Écoutez, Max, Cyndi…
La jeune femme pose sa spatule, éteint la gazinière et rejoint son mari qui passe
son bras autour de sa taille. Ils présentent un front uni, ce qui me dérange
légèrement sans que je ne sache pourquoi. Toutefois, j’ai quelque chose à dire et
je ne me laisserai pas distraire.
– Vous ne pouvez pas vous mêler de ma vie. Je suis ici pour faire un travail. Et
tu as payé une belle somme pour que je le fasse. Ce n’est pas parce que nous
sommes devenus amis que cela vous autorise à vous mêler de mes problèmes.
Max, tu es mon client. Je suis une employée, pas un membre de ta famille. Le
fait que tu fasses venir Maddy et son fiancé ici est tellement hors limites que…
Je secoue la tête, ne sachant comment finir ma phrase sans leur manquer de
respect.
– Vous avez franchi la limite, je dis d’une voix tremblante de colère.
Max inspire lentement et hoche la tête.
– Je parle au nom de ma femme et de moi-même lorsque je dis que nous
regrettons d’avoir envahi ta vie privée ainsi, mais on veut que tu saches que nos
intentions étaient bonnes.
– Ouais, l’enfer est pavé de bonnes intentions, je réponds froidement.
Je ramène un pied sur la chaise et mon genou sous mon menton.
– Je crois que tu oublies que je fais semblant d’être ta sœur pour t’aider à calmer
tes investisseurs, le temps que tu trouves la vraie. J’ai beau regretter que ce ne
soit pas le cas… je ne suis pas ta sœur. Tu n’as pas le droit de te comporter
comme mon grand frère.

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Les choses ne peuvent pas être plus claires, à présent. La mâchoire de Max se
contracte et il ferme les yeux. Cyndi se penche, l’embrasse sur la tempe et lui
chuchote quelque chose à l’oreille. Je crois l’entendre dire « dis-lui », mais je
n’en suis pas sûre.
Plusieurs minutes d’un silence pesant passent avant que Max ne rouvre les yeux.
– D’accord, Mia. C’est compris. Comme tu voudras.
– Max, Chéri…
Il lève la main pour couper la parole à sa femme et il secoue la tête en plongeant
son regard dans le mien.
– On peut oublier cette histoire ? demande-t-il d’une voix ferme.
Je hoche la tête et joue avec ma serviette, soudain gênée, comme si j’étais en
tort. La conversation prend fin de manière si abrupte que je n’ai même pas le
temps de leur parler de mes rêves, ou plutôt de mes souvenirs.
Max se lève brusquement en faisant grincer sa chaise sur le carrelage.
– Mieux vaut aller se préparer. Aujourd’hui est une journée à cravate.
– Cravate ?
– On rencontre les investisseurs. Il est temps de mettre ton masque de sœurette,
siffle-t-il d’un ton blessant.
Je pensais avoir érigé de bonnes barrières, ce matin, après avoir découvert qu’ils
m’ont trompée, mais apparemment elles ne sont pas assez solides. Or, mes
inquiétudes sont fondées, c’est lui qui a dépassé les bornes, pas moi. Alors,
pourquoi j’ai l’impression d’être une moins que rien ?
– Quand partons-nous ? je demande en mâchant une bouchée d’œufs.
– Dans quarante-cinq minutes. Cyndi, Chérie, je serai sur la terrasse. J’ai besoin
de prendre l’air, marmonne-t-il avant de tourner les talons.
Je finis mon petit déjeuner en me demandant comment je vais faire pour faire
retrouver à Max son humeur joviale habituelle. Toutefois, je ne trouve pas
d’idée. Bien évidemment, c’est maintenant que la tension entre nous est à son
comble que nous devons rencontrer le comité d’investisseurs et nous présenter
comme frère et sœur, et être suffisamment convaincants pour qu’ils nous croient.
*
* *

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Le trajet jusqu’à Cunningham Oil & Gas est suffocant. Max met de la musique
et ne dit pas un mot. De temps en temps, je le sens se détendre ou s’énerver de
nouveau, j’ai l’impression qu’il est sur le point de dire quelque chose, mais il
reste concentré sur la route et rien n’est dit. Cependant, lorsque nous arrivons au
siège, il ouvre quand même ma portière pour m’aider à descendre, c’est toujours
un parfait gentleman.
Le tailleur que j’ai revêtu me va comme un gant. Je me sens forte, puissante et
prête à affronter des requins. La jupe crayon gris foncé m’arrive juste sous le
genou et elle est fendue à l’arrière sans que ce soit indécent. Rien de trop
provocateur. Je l’ai assortie à un chemisier vert menthe qui met mes yeux en
lumière. La veste est courte et mes cheveux lâchés ressortent superbement sur le
gris. Je ne sais qui a choisi ces vêtements, mais la personne savait ce qu’elle
faisait.
Nous entrons dans le bâtiment et je remarque qu’aucune femme ne se prive pour
mater Max. Cela dit, il est vraiment canon dans son costume noir et sa chemise
blanche. Au lieu d’une cravate classique, il porte un polo de cuir noir avec une
étoile argentée qui ressemble au logo de l’entreprise. Il parfait son look avec un
Stetson aussi noir que son costard.
Je souris, lui prends la main et je l’entends retenir son souffle. Une décharge
électrique picote la paume de ma main.
– Tu sens ça ? je demande, désespérée de savoir s’il sent ce lien entre nous.
Ce n’est pas sexuel, comme les fourmillements que j’ai pu avoir avec les
hommes avec qui j’ai été intime. J’ai plutôt l’impression qu’il m’est naturel de
tenir la main de Max. Comme si l’univers nous avait rassemblés et que nous
étions censés être là, unis.
– Sucre d’orge, j’ai toujours senti ce lien. Depuis la première fois que je t’ai
rencontrée, quand on était petits.
Je ravale le sanglot qui menace de m’échapper.
– Tu savais ?
– Je me suis souvenu de toi dès l’instant que tu es descendue de cet avion. Mais
c’est plus que ça, c’est comme si un aimant m’attirait à toi. Comme si un

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morceau de moi m’avait toujours manqué. Un morceau que je n’ai jamais pu
voir ni toucher mais que j’ai senti toute ma vie.
Je secoue la tête et serre plus fort sa main.
– Je ne comprends pas. C’est comme si je te connaissais, or ce n’est pas le cas.
Max passe son bras sur mes épaules et m’attire contre lui. Un sentiment de paix
et de sérénité remplit immédiatement mon cœur et tout mon être.
– Ça va aller. On va essayer de comprendre tout ça. D’abord, il faut qu’on
affronte les investisseurs et qu’on tienne jusqu’à ce soir. C’est parti, ma belle.
Il me pousse vers l’ascenseur, mais je ne sais plus où donner de la tête. Je ferme
les yeux un instant et je revois ce petit garçon dont j’ai rêvé toutes ces années,
celui avec les mêmes yeux que les miens. Je m’empresse de l’oublier et je relève
la tête en contractant ma mâchoire. Je me tiens plus droite et me prépare pour la
bataille. Peu importe ce qui se passe entre Max et moi et le passé qui semble
nous unir, il faut penser au présent. L’avenir de son entreprise, celle que sa
famille détient depuis des générations dépend du fait que nous convainquions les
investisseurs que je suis sa sœur.
Je serre fort sa main tandis qu’il ouvre la porte vitrée de l’énorme salle de
réunion avec vue sur le campus et le parc verdoyant.
– C’est parti, je chuchote en retour, lui arrachant un sourire.
Max me guide vers une des deux chaises vides au milieu de la pièce. Toutes les
autres, environ une trentaine, sont occupées par des hommes et des femmes en
costume. Trois sièges après le mien, j’aperçois Sofia Cunningham qui ne fait
rien pour masquer son dédain pour moi. Cependant, je lisse ma jupe et me tiens
droite, déterminée à ne pas me laisser intimider. Quant à Max, il reste debout
derrière sa chaise et appuie ses mains sur le dossier.
– Mesdames et Messieurs, je vous ai convoqués aujourd’hui pour vous faire part
d’une nouvelle merveilleuse. Vous n’aurez pas oublié qu’il y a quelques mois, le
testament de mon père, Jackson Cunningham, nous prenait tous par surprise.
Nous avons découvert lors de son décès que quarante-neuf pour cent de
Cunningham Oil & Gas étaient légués à ma demi-sœur biologique, une femme
de cinq ans ma benjamine dont je ne connaissais pas l’existence.
Des murmures éclatent dans la pièce.

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– Silence, s’il vous plaît. Le testament nous informait du nom et de la date de
naissance de cette femme. Elle s’appelle Mia Saunders et elle est née un
quatorze juillet, cinq ans après mois. La personne à mes côtés est justement cette
femme. Chers collaborateurs, j’ai l’immense fierté de vous présenter ma sœur,
une femme que je n’ai rencontrée que récemment mais avec qui je sens déjà un
lien fort, Mademoiselle Mia Saunders. Lève-toi, sœurette.
Je me lève sous les regards de toute la salle alors que des chuchotements éclatent
de nouveau.
– Ils ne se ressemblent pas du tout.
– Ils ont les mêmes yeux.
– Elle est magnifique.
– La ressemblance est frappante.
– Elle ne peut pas être sa sœur, regarde-la.
– Ses cheveux sont noirs. Il est blond. Ils ne peuvent pas être frère et sœur.
– Silence ! rugit Max.
Les visages autour de la table ont l’air vexés, une main se lève.
– Sofia ? Tu as quelque chose à dire ?
La jeune femme pose délicatement ses mains devant elle sur la table en acajou,
incarnant l’employée modèle.
– En tant que membre de cette famille et investisseur, je dois te dire que tu ne
peux pas t’attendre à ce nous te croyions sur parole. Des millions de dollars sont
en jeu et des générations entières de Cunningham ont bâti cette entreprise.
Quelle preuve as-tu que cette femme et toi êtes liés par le sang ?
Je dévisage Max et je le vois serrer les poings, plongeant ses ongles dans le
dossier du fauteuil en cuir, y laissant des marques en forme de croissant de lune.
– Ne crois-tu pas que ma parole ainsi que mon honneur de PDG de cette boîte et
de chef de famille suffisent ?
Le regard de la jeune femme est noir de colère et son sourire diabolique prouve
que j’avais raison, elle ne baissera pas les bras tant qu’elle n’aura pas une preuve
solide et tangible sous les yeux. Cette femme veut sa part du gâteau. Une vague
de peur parcourt mes veines et je triture mes doigts en me demandant comment
Max va se débarrasser d’elle.

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Il penche la tête et dévisage sa cousine.
– Si tu as besoin d’une preuve, je suis ravi de te la fournir.
Il fait un signe de main et Diane, son adorable assistante, entre dans la salle avec
une télécommande. Elle est suivie par une femme à la peau noire vêtue d’un
tailleur si blanc que le contraste est frappant. Ses cheveux sont tressés finement
et rassemblés sur sa nuque avant de dévaler jusqu’à ses fesses. Elle est
magnifique.
– Merci, Diane, lui dit-il en souriant.
Elle sourit à son tour et va s’asseoir dans un coin de la salle, sur une des deux
chaises vides. La femme mystère la suit et s’assied à ses côtés en posant un
attaché-case à ses pieds. La semelle rouge écarlate de ses Louboutin brille
lorsqu’elle croise les jambes. Bon sang, cette femme aurait bien une ou deux
choses à m’apprendre en matière de choix vestimentaires.
Max appuie sur les boutons de la télécommande et une télévision LCD descend
le long du mur du fond. Il clique de nouveau et une copie de mon permis de
conduire apparaît à l’écran.
– Vous vouliez des preuves. Voici la première. Le permis de conduire de Mia
Saunders prouve que son nom et sa date de naissance sont identiques à ceux du
testament.
Je ne comprends pas, je croyais que Millie et Max avaient dit que l’écriture ne
pouvait confirmer l’orthographe. Il faudra que je vérifie ça plus tard.
– Est-ce que cela vous suffit ou il vous en faut plus ? demande-t-il en regardant
Sofia.
– N’importe qui peut obtenir un faux permis de conduire, rétorque-t-elle en
feignant de ne pas être prise de court.
– Très bien, dans ce cas voici la seconde preuve. Voici la carte de sécurité
sociale de Mia avec les mêmes informations. Je poursuis ?
– Je t’en prie, répond Sofia. Tu t’en sors pas mal, mais je n’ai rien vu qui ne
pourrait pas être réfuté devant un juge.
La preuve suivante me coupe le souffle. Les larmes me montent aux yeux et
menacent de couler. Je tapote le coin de mes paupières en scrutant l’écran,
perdue dans un océan de souvenirs.

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– Voilà une photo de mon père, de ma mère et de moi, à côté d’une photo de
Mia. Vous ne pouvez pas nier que la ressemblance est frappante, dit-il d’une
voix rauque.
Comment est-ce possible ? C’est bien une photo de ma mère plus jeune. Je la
reconnaîtrais n’importe où. Elle tient un petit garçon d’environ un an avec des
boucles blondes qui forment un halo autour de sa tête. Je secoue la tête et mes
larmes se mettent à couler sur mes joues.
Un brouhaha retentit autour de nous, mais cela n’empêche pas Sofia de
poursuivre sa bataille. Je dois reconnaître qu’elle est tenace.
– Beaucoup de gens se ressemblent, Max.
– C’est vrai, mais ce n’est pas fini, concède-t-il en se tournant vers la femme
mystère.
– Mesdames et Messieurs les membres du conseil d’administration, je m’appelle
Ree Cee Zayas et je suis l’avocate de feu Monsieur Jackson Cunningham et de
Monsieur Maxwell Cunningham, qui m’a engagée pour prouver la légitimité de
Mia Saunders et de son affiliation à la famille.
Elle parle d’une voix calme et sûre d’elle. Elle me plaît tout de suite, même si
j’angoisse d’entendre ce qu’elle a à dire.
– Si vous voulez bien vous tourner de nouveau vers l’écran, vous verrez une
copie du certificat de naissance de Maxwell Cunningham à côté de celui de Mia
Saunders. Comme vous pouvez le voir, la femme listée comme étant leur mère,
une certaine Meryl Colgrove, ainsi que son numéro de sécurité sociale, sont
identiques. Ce document serait irréfutable devant un juge. Cela prouve que
Maxwell Cunningham et Mia Saunders ont la même mère biologique.
La pièce est soudain plongée dans le silence. Il n’y a pas le moindre bruit. Une
marée d’émotions différentes s’abat sur moi et je ne peux plus respirer. Je
regarde l’écran en tremblant et en pleurant à chaudes larmes. Je ravale un
sanglot, mais Max l’entend et il s’agenouille à mes côtés, serrant mes mains dans
les siennes. Il les serre si fort que j’en ai mal, mais je m’en fiche.
Il porte nos mains à sa bouche et les embrasse plusieurs fois.
– J’aurais dû te dire la vérité, chuchote-t-il. Par… pardonne… moi, sanglote-t-il.
Je suis incapable de répondre.

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Les preuves semblent ne pas s’arrêter là, car Mme Zayas reprend la parole.
– Étant donné la gravité de ce droit de naissance et la valeur monétaire qui est en
jeu, j’ai pensé qu’il serait prudent de faire un test ADN. Un échantillon de
cheveux a été prélevé de la brosse de Mademoiselle Saunders et les résultats ont
été comparés à ceux de Monsieur Cunningham. Vous verrez à l’écran qu’ils sont
on ne peut plus parlants : Maxwell Cunningham et Mia Saunders ont des
marqueurs génétiques maternels identiques, prouvant qu’ils sont bien demi-frère
et sœur.
C’est la preuve de trop, pour moi et le reste des personnes présentes dans la
pièce. Je ne m’entends plus réfléchir par-dessus le brouhaha de conversations qui
éclatent autour de la table. Je reste assise sans bouger, essayant de rassembler
ces informations afin qu’elles soient compréhensibles. Sans succès. Je n’ai pas
d’explication évidente qui m’aiderait à comprendre comment les petits carrés
alignés sur l’écran viennent de changer ma vie à jamais. Je ne suis plus Mia
Sauders qui a élevé sa petite sœur seule, dont la mère est partie quand elle avait
dix ans et dont le père est un ivrogne bon à rien. Je ne suis plus cette femme
raide dingue d’un homme beaucoup trop bien pour elle. Je comprends tout à
coup que je suis plus que ça.
Moi, Mia Saunders, je suis la sœur biologique de Maxwell Cunningham, un
homme à la tête d’un empire et d’une famille dont je ne connais rien. Les
documents ne mentent pas. Max est mon demi-frère.
– Mia, Mia, sucre d’orge, dis quelque chose. N’importe quoi, supplie Max, à
genoux devant moi.
Je lève les yeux pour les plonger dans ces iris identiques aux miens. Ceux que
ma mère nous a donnés, à Maddy et moi, et aussi à lui.
– Tu es mon frère, je chuchote.
– Oui, répond-il en étudiant mon visage, comme s’il cherchait à lire dans mes
pensées.
– Mon véritable frère.
– Oui. Et toi, tu es ma petite sœur.
Il déglutit et se lèche les lèvres. Soudain, les ridules au coin de ses yeux
semblent plus prononcées, comme creusées par le poids de ce secret.

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– Mon Dieu. Je ne sais pas… Maddy ! je m’exclame en retenant mon souffle.
Les larmes continuent de couler sur mes joues et il prend mon visage dans ses
mains.
– Oui. Maintenant, tu comprends pourquoi il est si important qu’elle vienne. Elle
doit savoir la vérité.
Je ferme les yeux et pense à la manière dont cette nouvelle risque d’affecter ma
petite sœur. Je recule soudain ma chaise et Max doit poser les mains par terre
pour ne pas tomber. Je me lève et balaie la pièce du regard à la recherche de
l’issue la plus proche.
J’ai désespérément besoin de m’enfuir, et un picotement douloureux parcourt
mes nerfs quand je réalise la sévérité de la situation. Max m’a fait venir parce
qu’il savait pendant tout ce temps que j’étais sa sœur. Or, il a attendu d’être
devant une salle pleine d’inconnus pour me le dire.
J’ai rêvé d’être la véritable sœur de Max. J’y ai pensé de nombreuses fois depuis
mon arrivée, et maintenant ce serait vrai ? Mes pensées sont si chamboulées que
j’ai envie de crier. Je sors de la pièce en courant et je n’ai qu’une chose en tête.
Méfie-toi de ce que tu désires. Tes rêves pourraient devenir réalité et toute ta vie
serait sens dessus dessous.

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Chapitre 9

Je pose mes mains sur le capot froid du pick-up pour retrouver mon souffle.
Respire. Lentement. Inspire… Expire… Inspire… Expire. Encore. Je suis
occupée à me répéter ce mantra quand j’entends un bruit de pas sur le gravier
derrière moi et que des bottes de cow-boy apparaissent près de mes pieds. Max
ne parle pas tout de suite, ce que j’apprécie. Mon cœur finit par reprendre un
rythme normal, je me redresse pour lui faire face et m’adosser au capot.
Il est devant moi, le dos courbé, les sourcils froncés. Son regard, jumeau du
mien, est inquiet et plein de doutes.
– Mia, je…
Je lève la main pour faire taire ses excuses.
– Tu savais, et tu ne m’as rien dit.
Il gonfle ses poumons et joint les mains pour faire craquer ses phalanges.
– Je n’ai aucune excuse. Je voulais simplement apprendre à te connaître, passer
du temps avec toi et, peut-être, laisser la vérité voir le jour naturellement…
– Naturellement ? Dans une salle pleine d’inconnus ? Quand je ne peux pas
réagir ? À quoi tu pensais, Max ? je hurle. Comment as-tu pu vouloir me faire
tant de mal ?
Il lève les mains et vient vers moi, et cette fois-ci je ne peux pas reculer pour
m’enfuir.
– Mia, je ne te ferais jamais de mal volontairement. Les choses n’étaient pas
censées se dérouler ainsi. Je ne savais pas que Sofia allait poser toutes ces
questions, et tout est arrivé très vite. Tu es ma sœur. Je t’aime déjà.
Ses yeux vert pâle s’assombrissent et sa mâchoire tressaille.
– Mia, je préférerais mourir que de te blesser.

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Je ferme les yeux, frappée par son honnêteté. Il m’aime. Mon frère. J’ai un frère.
Bon sang, c’est complètement dingue et je ne pas la moindre idée de la manière
dont je dois réagir. Tout ce que je sais, c’est que je dois partir d’ici.
– Ramène-moi à la maison.
– À Las Vegas ? il demande d’une voix tremblante.
– Non ! Au ranch. J’ai besoin de temps. Et j’ai besoin de réfléchir au meilleur
moyen de le dire à Maddy.
Il hoche la tête et déverrouille son pick-up.
Il ouvre ma portière puis il s’installe au volant. Lorsque nous sommes à dix
minutes du ranch, il pose sa main sur mon genou.
– Je sais que tu t’en fiches pour l’instant et je sais que tu essaies de digérer toute
cette histoire, mais je suis super-content que tu sois ma sœur. Quand mon père
est mort, avant qu’on ne trouve son testament, j’étais complètement perdu.
Quand j’ai découvert que j’avais une sœur, quelqu’un de mon sang, j’ai eu un
nouveau but dans la vie. J’ai pu me concentrer sur quelque chose de bien. Quand
j’ai vu ta photo sur ce site… tu ressemblais comme deux gouttes d’eau à ma
mère… j’ai su que tout allait bien se passer. Que je ne serais plus seul.
– Pourtant, tu as Cyndi et Isabel, et bientôt tu auras un fils. Tu n’es jamais seul !
Je pose ma main sur son genou et je le serre.
– Oui, et mon avenir est avec eux. Mais il y a quelque chose de spécial à
partager un parent. Comme si on était les deux faces d’une même pièce. J’ai
toujours eu le sentiment qu’un morceau de moi me manquait, comme je te l’ai
dit. Quand je t’ai vue, je me suis souvenu qu’on s’était croisés il y a longtemps,
et j’ai su que c’était vrai.
Je regarde par la fenêtre.
– J’ai rêvé de toi toute ma vie. Enfin, je ne savais pas que c’était toi, mais je me
souviens d’un garçon qui a joué avec moi sur une aire de jeux et qu’on a passé
l’après-midi à lui chercher une nouvelle maman ! je m’exclame en riant.
– Ouais, j’ai beaucoup repensé à ce jour-là, en me demandant ce qui était arrivé
à cette dame dont papa semblait si amoureux. Je comprends, maintenant. Papa
courait après ta mère alors qu’elle ne voulait pas être rattrapée.
Je soupire et croise les bras.

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– Ouais, eh bien, mon père n’a pas réussi à l’avoir non plus. Tu ne sais pas où
elle est ?
Il secoue la tête et évite un obstacle sur la route.
– Je n’ai jamais essayé de la retrouver.
– Avec ton argent et tes contacts, ça devrait être assez facile, non ?
Il me regarde du coin de l’œil, mais ne quitte pas la route des yeux.
– Oui, mais le problème, ma belle, c’est que quand une femme abandonne son
bébé, qu’elle se remarie et qu’elle fuit sa nouvelle vie au bout de dix ans, elle ne
veut clairement pas d’une famille, sinon elle ne serait jamais partie. Parfois, les
gens ne veulent pas être retrouvés, sinon ils ne s’enfuiraient pas.
Je réfléchis quelques instants à sa théorie tandis que nous remontons l’allée de
son ranch. Il n’a pas tort, mais je repense à mon rêve d’hier soir et je me dis
qu’une alternative est possible.
– Tu n’as jamais pensé qu’elle voulait peut-être que quelqu’un lui coure après,
justement ?
Max coupe le moteur, enlève son chapeau et passe sa main dans ses cheveux.
– Tu sais, je n’ai jamais vu les choses ainsi. Tu en penses quoi, toi ? demande-t-
il en se tournant vers moi.
– Je crois que notre mère commettait beaucoup de fautes. Et quand les gens font
beaucoup d’erreurs, ils ne veulent pas que celles-ci tachent les quelques belles
choses qu’ils ont réussies. Peut-être qu’elle nous aimait plus que nous le
pensons.
– Si c’est le cas, on devrait peut-être envisager de la rechercher, répond Max en
fronçant les sourcils.
– Je suis d’accord.
Voilà une bonne décision de prise. Max emploiera ses ressources pour retrouver
notre mère. J’ai une ou deux questions à lui poser, moi aussi. La première étant
pourquoi elle ne nous a jamais dit que nous avions un frère.
*
* *
La portière de la limousine est à peine ouverte que la tête blonde de ma sœur
apparaît. J’en ai le souffle coupé. Madison Saunders, ma petite sœur, est canon

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dans son jean trois-quarts, ses sandales à talons compensés et son débardeur. Elle
tend son sac à Matt qui a tout juste le temps de le saisir alors qu’elle court vers
moi, bras ouverts, sourire aux lèvres. Je me prépare à être frappée par son poids
et lorsqu’elle se jette sur moi, c’est comme si un nuage d’amour m’avait
enveloppée pour remplir tout mon être de bonheur exquis.
Maddy pousse un cri de joie strident dans mon oreille. D’habitude, je l’aurais
fait tournoyer dans les airs, mais aujourd’hui je la serre si fort contre moi que
rien ne pourrait me l’arracher. Je suis soudain saisie d’une peur horrible à l’idée
de la lâcher. Cette belle jeune femme est tout pour moi et elle l’a toujours été.
J’ai beau être excitée de la voir, ma joie est assombrie par l’angoisse liée à la
véritable raison de sa présence.
Elle recule et fronce les sourcils en prenant mon visage dans les mains.
– Qu’est-ce qui ne va pas ? Pourquoi tu es triste ? demande-t-elle en essuyant les
larmes dont je n’avais pas conscience.
– Tu m’as manqué, c’est tout, je dis pour l’apaiser.
– Tu me mens et je n’aime pas ça, mais je t’interrogerai plus tard.
J’éclate de rire en reniflant.
– D’accord ma puce. Laisse-moi te regarder !
Je la tiens à bout de bras et elle s’illumine comme un rayon de soleil lors d’un
jour de pluie.
– La plus belle fille sur terre, mais…
– Seulement lorsqu’elle sourit, conclut Matt.
Il prend ma sœur par la taille et la ramène contre lui, l’arrachant à mes bras. Il
me le paiera.
– C’est ma phrase, ça ! je grogne en le fusillant du regard.
– Je sais, répond-il en riant et en jouant des sourcils. Maddy m’a répété ça un
million de fois. J’ai hâte de l’entendre dire ça à nos enfants, un jour.
Il frotte son nez contre celui de ma sœur et je suis tiraillée entre l’envie de
l’étrangler et de le serrer dans mes bras.
Derrière moi, quelqu’un se racle la gorge.
– Maddy, il y a… il y a des gens que j’aimerais te présenter.

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Je me tourne sur Maxwell et Cyndi dans les bras l’un de l’autre. Isabel est sur les
marches du perron derrière eux, occupée à les monter et à les descendre en
sautant à pieds joints. Max est bouche bée, les yeux écarquillés, tout comme
Cyndi qui ressemble à une biche prise dans les phares d’une voiture. Aucun des
deux ne dit mot.
– Euh, les mecs, allô ? je marmonne en claquant des doigts pour les tirer de leur
transe.
– Mon Dieu… chuchote Max.
– Waouh, siffle Cyndi.
– Je te promets qu’ils ne sont pas aussi bizarres en temps normal. Je te présente
Maxwell Cunningham et sa femme, Cyndi. Les amis, voici ma petite sœur,
Madison Saunders, et son fiancé, Matt Rains.
Maddy hausse les sourcils et Max et Cyndi continuent de la dévisager en silence.
Cyndi finit par se reprendre, mais ses paroles ne font rien pour mettre Maddy à
l’aise.
– Elle a l’air… Bon sang, elle te ressemble comme deux gouttes d’eau.
– C’est incroyable, murmure enfin Max en penchant la tête sur le côté.
Matt passe un bras autour de la taille de Maddy et ils font tous les deux un pas en
arrière.
– Qu’est-ce qui se passe ? On dirait que vous avez vu un fantôme, dit-il.
C’est exactement ce que j’étais en train de me dire. Cela dit, ce doit être étrange
de voir sa sœur pour la première fois. Surtout lorsqu’elle vous ressemble autant.
Max et Cyndi continuent d’inspecter Maddy et je m’inquiète qu’ils ne finissent
par cracher le morceau. Il faut que la nouvelle vienne de moi et de personne
d’autre.
Isabel finit par se faufiler entre les jambes de ses parents et elle lève la tête vers
les nouveaux arrivants.
– Waouh ! Tu es belle comme une princesse ! s’exclame-t-elle en tapotant la
jambe de Maddy.
Nous avons toujours aimé les enfants, mais ma sœur semble avoir un pouvoir
spécial sur eux, elle les attire comme un aimant. Elle s’accroupit devant Isabel,
qui saisit une mèche de ses cheveux et ouvre grand les yeux.

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– Ils sont jaunes comme les miens et ceux de papa !
J’étudie la petite fille et je suis frappée par sa ressemblance avec Maddy.
Soudain, je regarde Max d’un œil nouveau. Leurs cheveux dorés sont les mêmes,
et même leur teint et la forme de leurs visages sont identiques. En fait, ce sont
eux qui ont l’air d’être frère et sœur alors que Max et moi n’avons que quelques
vagues ressemblances.
Maddy regarde Max en souriant et je ne vois plus que leurs traits communs. Non
seulement les sourires de Maddy et d’Isabel sont jumeaux mais celui de Max est
une troisième copie conforme. C’est comme si je regardais leur ADN sous un
microscope. Maxwell, Maddy et Isabel ont le même sourire, mais ce n’est pas le
même que celui de ma mère et le mien. On m’a répété sans cesse que Meryl et
moi avions exactement le même sourire, et j’ai toujours pensé que Maddy
ressemblait à papa, mais en fait je ne me souviens pas d’une seule fois où je les
ai comparés tous les deux.
– Et tu t’appelles comment, toi ? demande Maddy en caressant la tête de la
petite.
– Isabel, mais Bell, aussi.
– Eh bien je trouve que tu es la plus jolie petite fille que je n’ai jamais vue, donc
si tu trouves que je suis une princesse, alors toi tu dois être la reine ! s’exclame
ma sœur en posant sa main sur sa poitrine. Peut-être qu’on pourra jouer pendant
que je suis là ? Après que j’ai fait connaissance avec tes parents et passé du
temps avec ma sœur ? Qu’est-ce que tu en penses ?
– Super ! s’écrie Isabel en tapant dans ses mains.
Soudain, sans prévenir, elle gravit les marches en courant.
– Je vais chercher ma couronne !
– Je suis ravie de rencontrer les amis de Mia, dit Maddy en offrant sa main à
Max. Et, encore une fois, merci de nous avoir envoyé un jet privé et une
limousine, c’était génial !
– Le plaisir est pour moi, Miss. Allez, entrez, entrez. Cyndi a préparé certains de
ses meilleurs plats. Du poulet pané, des gombos, des macaronis au fromage et
une bonne tarte à la noix de pécan.

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Cela fait deux semaines que je me régale des plats de Cyndi et j’en ai déjà l’eau
à la bouche.
– Sincèrement, Cyndi est la meilleure cuisinière que je connaisse. Venez.
– Après vous, répond Maddy.
Je prends la main de ma sœur et lui donne un petit coup d’épaule.
– Merci d’être venue. Tu m’as manqué.
– Je ne raterais jamais une occasion de te voir, tu le sais bien. Surtout quand je
peux prendre un jet privé ! s’exclame-t-elle. Mon Dieu, si tu nous avais vus ! On
nous a servi du champagne ! Et ils n’ont même pas demandé nos cartes
d’identité, chuchote-t-elle dans mon oreille pour que je sois la seule à entendre.
Comme toutes les sœurs, Maddy et moi avons l’habitude de nous confier des
secrets. Maintenant, Max fait partie de la famille, et c’est moi qui ai l’immense
responsabilité de l’annoncer à Maddy.
Jusqu’à présent, il n’y avait que papa, Maddy et moi, un trio d’âmes solitaires
abandonnées par leur femme et mère. Je sais désormais qu’il y a une nouvelle
pièce au puzzle, et les répercussions sur notre famille et notre identité sont
énormes. Je ne me suis même pas encore habituée à l’arrivée de Matt dans nos
vies. Je me demande si Maddy a pu s’y faire, avec tout le travail qu’elle a à la
fac.
Elle n’a pas une vie facile, pour une gamine de vingt ans. Son père est dans le
coma, sa sœur parcourt le pays en tant qu’escort, elle vient de se fiancer et
d’emménager avec son mec, et maintenant elle va devoir accepter d’avoir un
grand frère. Je ne sais pas si elle va y arriver. Maddy est plus fragile que moi et
c’est ce qui la rend si spéciale, même si elle me rappelle souvent qu’elle n’est
pas faite de sucre et qu’elle ne va pas voler en éclats dès qu’elle apprend une
mauvaise nouvelle. Toutefois, cela fait quinze ans que je m’occupe de la
protéger des horreurs de la vie, et je ne sais toujours pas si la nouvelle de Max
est bonne ou mauvaise.
Je me sens minable d’envisager que Max et sa famille soient une mauvaise
nouvelle pour nous, mais ce n’est vraiment pas simple. Un frère. Nous avons un
grand frère qui est né longtemps avant nous. Maman le savait et elle ne nous l’a
jamais dit. Je l’ai rencontré deux fois ! Elle a eu de nombreuses fois l’occasion

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de me le dire, et elle a préféré se taire. Je me demande si papa était au courant,
mais non, c’est impossible. Il nous l’aurait dit, sinon. Sa famille était trop
importante pour lui, je le sais, même s’il n’a pas toujours su le montrer.
Et le pauvre Max ? Maman l’a abandonné quand il était tout petit. Il était si
jeune qu’il ne se souvient même pas d’elle. Un peu comme Maddy qui n’a aucun
souvenir. Alors que moi, je me souviens de tout. Dans le moindre fichu détail.
Plus j’y pense et plus je suis énervée. Comment a-t-elle osé abandonner Max ?
Comment a-t-elle pu fuir à Las Vegas, épouser papa, nous avoir Maddy et moi,
puis répéter le schéma en disparaissant de nouveau ? Pourquoi a-t-elle autant de
facilité à laisser ses enfants derrière elle ?
Je regarde Maddy éclater de rire en écoutant Max, puis mon regard se pose sur
sa main dans celle de Matt. L’éclat qui brille dans ses yeux est incroyable. Quant
à son sourire… je ne suis pas poète, mais je pourrais écrire un sonnet sur sa
capacité à illuminer une pièce. Je ne pourrais jamais tourner le dos à l’amour et à
la confiance de Maddy. Or, notre mère l’a fait et pas une mais trois fois. Elle
nous a fait encore plus de mal en ne nous informant pas de l’existence des autres.
Max a trente ans, j’en ai vingt-cinq et Maddy vingt. Nous avons perdu plus de
vingt ans de complicité fraternelle que nous ne récupérerons jamais.
Je pense à toutes les vacances, les anniversaires, les fêtes de famille et les
cérémonies de remise de diplôme que nous avons manqués, et une colère noire
se met à bouillir en moi. Un monstre diabolique aux griffes acérées et à la soif de
vengeance insatiable grandit en moi et je dois faire un effort surhumain pour ne
pas le libérer. Meryl Colgrove-Saunders, ma mère, a commis les pires péchés
dont une femme soit capable.
Elle a brisé les cœurs de deux hommes qui n’ont plus jamais pu croire en
l’amour.
Elle a abandonné ses trois enfants.
Elle a ôté à ces enfants l’amour de leurs frère et sœurs.
Je regarde Maddy et Max interagir et je repense à toutes les fois où elle aurait dû
être là. Je veux la retrouver plus que jamais, j’en ai besoin, même. Cette fois, elle
devra admettre ses fautes, pour ses enfants, si ce n’est pour les hommes dont elle

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a brisé le cœur. Je n’ai plus aucune compassion pour elle. C’est de moi, Maddy
et Maxwell que j’ai pitié.
Je me suis souvent demandé, au fil des ans, pourquoi elle était partie, ce que
j’avais fait pour que sa vie à mes côtés soit si insupportable. Ce que papa avait
pu faire. Maintenant que je sais qu’elle a quitté Jackson et Maxwell aussi, une
haine violente prend racine dans mes entrailles et se déverse dans mes veines.
– Mia, reviens parmi nous, dit Maddy en me tendant une bière. On trinque.
– À quoi trinquons-nous ? demande Max en me regardant dans les yeux.
Son regard est à la fois joyeux et plein de tristesse, et je me demande si j’ai eu la
même expression durant les quinze dernières années.
– Rien n’est plus important que le présent. C’est pour ça qu’on appelle ça un
cadeau, je dis en levant ma bouteille.
– Je peux boire à ça, répond Max d’une voix pleine d’émotion que seules Cyndi
et moi pouvons comprendre.
– Et à l’avenir! Puisse-t-il être aussi joyeux que ce jour ! s’exclame Maddy.
– À l’avenir !
Puisse-t-il exaucer nos vœux les plus chers.

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Chapitre 10

C’est la dixième fois que j’essaie d’appeler Wes et que je tombe sur sa
messagerie. Le jour où j’ai appris que Max était mon demi-frère, il m’a écrit
qu’il partait en Asie pour retourner une scène parce qu’un des acteurs avait eu un
accident de voiture mortel et que certaines scènes devaient être filmées de
nouveau. Je suppose qu’il ne doit pas avoir de réseau, mais ça ne m’empêche pas
d’essayer de le joindre tous les jours depuis cinq jours.
Le fait que je ne puisse pas parler à Wes de cette nouvelle colossale est vraiment
difficile. J’ai appris à beaucoup compter sur lui, en si peu de temps. Peut-être
est-ce justement cela, le véritable amour, lorsque les membres d’un couple
s’appuient tant l’un sur l’autre que plus personne ne peut servir de
remplacement. Bien sûr, j’ai Ginelle à Las Vegas, mais je ne suis pas prête à lui
confier la nouvelle. Et puis, Maddy mérite de le savoir avant ma meilleure amie.
Or, je n’ai toujours pas trouvé le meilleur moyen de lui dire que Maxwell est
notre demi-frère. En revanche, j’ai volé sa brosse et j’ai demandé à Max de faire
un test ADN sur ses cheveux. Je veux une preuve tangible qu’il est son demi-
frère, même si je ne peux douter que c’est le cas.
Plus je passe de temps avec eux, plus c’est moi qui ai l’impression d’être
l’intruse. Non seulement ils se ressemblent comme deux gouttes d’eau mais ils
ont le même sourire facile, les mêmes gestes, la même façon de pencher la tête
sur le côté lorsqu’ils réfléchissent ou de passer leur main dans leurs cheveux. Ils
sont unis par un lien que je n’arrive pas à comprendre et que je ne souhaite pas
déchiffrer. Maddy a toujours été à moi, et maintenant je dois la partager.
Bien sûr, Max est génial. Il me traite déjà comme sa petite sœur, même s’il s’en
remet à moi pour ce qui concerne Maddy. Heureusement, il respecte notre
relation et tout ce que j’ai sacrifié durant toutes ces années, et il n’essaie pas

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d’empiéter sur notre complicité. Seulement, il me demande tous les jours quand
nous allons lui annoncer la nouvelle. Il ne nous reste que deux jours avant
qu’elle et Max repartent à Las Vegas et moi à Malibu. Je ne sais même pas si
Wes y sera, en fait, et je ne sais pas si cela me plaît d’être seule dans cette grande
maison. C’est censé être chez moi, mais je n’ai pas eu le temps de m’y faire.
Pour l’instant, c’est là que je vais me reposer entre deux clients.
Quelqu’un frappe à la porte de ma chambre.
– Entrez, je réponds en refermant mon journal intime.
Je souris lorsque Max montre sa tête, mais ce n’est que de courte durée, car je
réalise qu’il est suivi par Ree Cee Zayas, son avocate. Bon sang, me voilà en
legging et en débardeur, pieds nus, cheveux mouillés et sans maquillage, et elle
est vêtue d’un tailleur coquelicot assorti à son rouge à lèvres.
– Euh, qu’est-ce qui se passe ? je demande en regardant Max et Ree Cee tour à
tour.
– J’ai une information étonnante à propos du test ADN que Monsieur
Cunningham et vous-même avez demandé pour Madison Saunders, dit l’avocate.
Sa façon de parler me glace le sang et je suis saisie de panique.
– Quoi ? Qu’est-ce que c’est ? Elle va bien, n’est-ce pas ?
Je n’ai aucune notion de ce que peut révéler un test ADN en termes médicaux,
mais l’idée qu’il ait montré quelque chose d’étonnant ne peut pas être bon.
Max s’assied sur le lit à côté de moi et passe son bras sur mes épaules.
– Détends-toi, sucre d’orge. Maddy va parfaitement bien. Ce qui est choquant,
c’est ce que le test révèle à propos de ses gènes. J’ai fait venir Ree Cee pour
qu’elle te le dise directement et je voulais être là pour que tu saches que je suis
avec toi.
Je ravale le nœud dans ma gorge et je pose mes deux mains sur ma poitrine.
– Max, tu me fais peur…
Ses épaules s’affaissent et il prend mon visage dans ses mains avant de déposer
un baiser sur mon front.
– Ne t’en fais pas. Tout le monde va bien. Allez-y, Ree Cee, dites-lui ce que
vous avez trouvé.

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Un silence pesant s’abat sur la pièce et l’air se charge de tension, comme si un
brouillard épais nous enveloppait.
– C’est plus simple si je vous montre, dit-elle en alignant trois feuilles sur le lit
devant moi.
L’une des feuilles porte mon nom, la deuxième celui de Max et la dernière celui
de Maddy. Pour ce qui est du reste, je vois les mêmes petits carrés que sur
l’écran la semaine dernière.
– Vous voyez comment la manière dont beaucoup de vos marqueurs génétiques
s’alignent avec ceux de Monsieur Cunningham ?
Je hoche la tête et elle désigne ensuite la feuille de Max et de Maddy.
– Maintenant, regardez ceux-ci. Vous voyez ?
Les carrés et les lignes sont quasi-identiques, comme des copies conformes.
– Oui, je vois. Qu’est-ce que ça veut dire ? je demande en fronçant les sourcils.
– Maintenant, regardez votre feuille et celle de Madison.
Beaucoup des carrés s’alignent, mais il y en a tout un tas qui sont très différents,
comme Max et moi.
– Je ne comprends pas, je dis en haussant les épaules.
Max me frotte le dos tandis que Ree Cee soupire.
– Mademoiselle Saunders, ce test a été fait trois fois pour qu’on soit certain des
résultats. C’est Monsieur Cunningham qui les a demandés pour qu’on ne puisse
pas avoir de doute.
– Et ? Crachez le morceau, bon sang ! On sait déjà que Maddy est la sœur de
Max, alors qu’est-ce qui est si surprenant ?
Maxwell ferme les yeux, mais il ne dit pas un mot.
– Mademoiselle Saunders, ce test montre que les marqueurs génétiques de
Madison Saunders et Maxwell Cunningham sont cent pour cent les mêmes. Ils
ont la même mère et le même père. Quant à vous, vous avez la même mère
qu’eux, mais vous n’avez pas le même père.
La terre cesse de tourner autour de moi. Chaque muscle se fige en moi et mon
cœur ne bat plus. Je ne peux plus respirer. Ma vue devient floue et mes oreilles
se mettent à bourdonner.
– Bon sang, elle va s’évanouir, dit Max.

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C’est la dernière chose que j’entends avant que tout devienne noir autour de moi.
*
* *
Lorsque je reviens à moi, le côté gauche de mon corps est bouillant et ma main
droite est paralysée. Je cligne plusieurs fois des yeux, et je me souviens que je
suis dans ma chambre chez les Cunningham. Il fait plus sombre maintenant et
seule une petite lampe est allumée dans un coin. Un murmure lointain me
parvient, comme lorsqu’une brise porte un son de loin. Je tends l’oreille et je
réalise que cela vient de ma droite.
– Faites qu’elle aille bien. Je ne peux pas la perdre alors que je viens de la
retrouver. C’est impossible. Faites qu’elle aille bien, marmonne Max.
Je tourne la tête et je vois qu’il est penché sur le lit, le front appuyé sur nos
mains jointes. Il serre si fort la mienne que je crois que ma circulation est
bloquée. Je gigote les doigts et il lève brusquement la tête.
– Dieu merci ! s’exclame-t-il en venant vers la tête du lit pour déposer des
dizaines de baisers sur mon front. Tu nous as fichu une sacrée trouille, dit-il, les
larmes aux yeux. Ça fait une heure que tu t’es évanouie.
J’essaie de me tourner sur le côté, mais un poids m’en empêche. Je tourne la tête
et je trouve Maddy blottie contre moi, un bras sur ma taille. Sa tête est nichée
contre mes côtes et son souffle est lent et régulier.
– Qu’est-ce qui s’est passé ? je chuchote pour ne pas la réveiller.
Cela fait bien trop longtemps que je n’ai pas câliné ma sœur de cette manière.
– Tu t’es évanouie et tu es tombée dans un sommeil profond. J’ai fait venir un
voisin qui est médecin et il a dit que tu allais très bien et que tu dormais à poings
fermés. Il a dit que le corps peut parfois avoir cette réaction quand il est
confronté à une information que le cerveau n’arrive pas à accepter. Je suis
désolé, Mia. Je ne savais pas que cela aurait cet effet sur toi.
– Ne t’en fais pas, je vais très bien. J’ai très peu dormi ces derniers temps parce
que je pensais sans cesse à cette affaire. Et j’étais inquiète pour mon copain, ça
fait plusieurs jours que je n’ai pas eu de nouvelles et il est sur un tournage en
Asie. Je crois que l’annonce de ton avocate était la cerise sur le gâteau, c’est
tout.

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Max hoche la tête alors que Maddy ouvre les yeux.
– Eh, tu vas bien ? demande-t-elle en se redressant.
Je passe la main dans ses cheveux en étudiant son beau visage, ses yeux
identiques aux miens, son petit nez en trompette et ses lèvres rouges et
pulpeuses. Peu importent les tests ADN, elle reste ma sœur, même si ce n’est
qu’à moitié.
– Je vais bien, mais il faut qu’on te parle de quelque chose.
Je recule contre la tête de lit et trifouille les franges du plaid. Je parie que c’est
Cyndi qui l’a fait de ses propres mains, c’est vraiment le cliché de la femme
parfaite. Max s’assied au pied du lit et pose une main sur mon genou, un geste
réconfortant auquel je commence à m’habituer, venant de mon grand frère.
– Maddy, ma chérie, on a appris quelque chose à propos de nous et de notre
famille.
– Ah ?
– Il s’avère que notre mère a eu un enfant avant nous.
Elle recule brusquement et me regarde bouche bée.
– Je sais, crois-moi j’étais choquée moi aussi. Mais euh, ma puce, c’est Max…
Max est notre grand frère, je confesse d’une voix douce, essayant de faire appel
à la compassion en elle.
Elle écarquille les yeux, puis elle fait quelque chose à laquelle je ne m’attendais
pas du tout. Elle sourit.
– Tu es notre vrai frère ? demande-t-elle d’une voix pleine d’espoir.
– Oui ma belle, je le suis, répond-il en hochant la tête.
– Mais comment c’est possible ?
– J’ai découvert ça grâce au testament de mon père. Il laissait la moitié de
l’entreprise à une certaine Mia Saunders.
– Tu plaisantes ! s’écrie-t-elle en couvrant sa bouche.
– Pas du tout, répond Max en riant doucement. Bref. J’ai engagé un détective
pour trouver Mia Saunders et quand j’ai vu la photo de ta sœur, j’ai su qu’elle
devait être la mienne aussi. On s’était même rencontrés quand on était petits, un
jour où mon père était allé à Las Vegas.

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– Max a fait faire des tests ADN sur toi et moi, et ils ont confirmé qu’on était
tous les trois frères et sœurs.
Maddy se met à genoux sur le lit et pose ses mains sur ses cuisses. Elle semble
prendre la nouvelle bien mieux que ce à quoi je m’attendais.
– C’est trop cool ! s’écrie-t-elle en prenant Maxwell dans ses bras. J’ai toujours
voulu un frère !
Ouaip, bien mieux. Moi qui ai passé la semaine à angoisser à ce sujet ! Cela dit,
je ne lui ai pas encore tout révélé.
Je tapote Maddy dans le dos et Max libère son étreinte. Elle essuie quelques
larmes et sourit.
– Ma puce, ce n’est pas tout, et je ne sais pas trop comment te dire la suite.
Son sourire s’efface et elle penche la tête sur le côté.
– Tu peux me le dire, Mia. La nouvelle que tu viens de m’annoncer est déjà
géniale. Notre famille est plus grande, on n’est plus toutes seules. Maintenant, on
a un frère et une belle-sœur. Et une nièce et bientôt un neveu ! J’ai hâte de le dire
à Matt et papa. Ça va être une année superbe. Matt vous inclura dans le mariage,
et Isabel sera demoiselle d’honneur…
Je soupire et Max pose une main sur son épaule.
– Ma belle, ta sœur essaie de te dire quelque chose qui ne va pas être facile à
avaler. Tu sais que je suis ravi qu’on forme une famille, moi aussi.
Elle le regarde en souriant jusqu’aux oreilles. Bon sang, ça craint, pourquoi c’est
toujours à moi d’annoncer les mauvaises nouvelles ? Si seulement je pouvais
m’arrêter à l’annonce que Max est notre grand frère… Mais non, il faut aussi
que l’homme qu’elle a considéré comme son père toute sa vie ne soit pas son
père biologique. Ah, et que son véritable père soit mort, de sorte qu’elle ne
pourra jamais le rencontrer.
– Mads, l’avocate a trouvé autre chose dans ton ADN, je dis en essuyant mes
larmes.
Max me tend la main et me regarde d’un air triste. Il sait combien cela me coûte
d’annoncer ça à Maddy et il est là avec moi. Il déteste savoir que je souffre.
– Je peux ? demande-t-il.

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Soudain, je comprends que je ne suis plus seule. Cela ne fait qu’une semaine que
Max est mon frère, mais il est déjà prêt à prendre le relais lorsque les choses sont
trop difficiles pour moi.
– Maddy, ma puce, ce que Mia essaie de te dire, c’est que l’avocate a découvert
que toi et moi avons les mêmes parents.
Elle cligne des yeux plusieurs fois, mais ne bouge pas.
– Tu veux dire qu’on a tous les trois les mêmes parents ? Mais est-ce que ça ne
voudrait pas dire que papa est ton père aussi mais qu’il ne le sait pas ? elle
demande en haussant les sourcils.
Mon estomac se noue et ma poitrine se contracte tandis que je m’apprête à dire
quelque chose qui changera nos vies à jamais.
– Non, ma chérie. Papa n’est pas ton père, justement. Toi et Maxwell avez les
mêmes parents. Ça veut dire que Jackson Cunningham était ton véritable père.
Elle fond brusquement en larmes, secouée par de violents sanglots.
– Mais, mais papa… je ne comprends pas, dit-elle en secouant la tête et en
couvrant son visage.
Je l’attire dans mes bras et elle enfouit sa tête dans mon cou, comme elle l’a fait
des centaines de fois.
– Mais tu es quand même ma sœur, hoquète-t-elle.
– Oui ma puce, on est toujours sœurs, mais seulement à moitié.
– C’est pas à moitié pour moi ! sanglote-t-elle.
Je l’embrasse et lui caresse le dos en lui chuchotant que je l’aime, que je serai
toujours là, que rien ne changera entre nous, et je lui rappelle qu’on a désormais
un frère. Elle finit par cesser de trembler et sa respiration redevient lente et
régulière, signe qu’elle s’est endormie d’épuisement, comme souvent.
Max se lève et fait les cent pas dans ma chambre.
– Elle va s’en remettre ?
Il est tendu et sur les nerfs, comme un animal en cage prêt à passer à l’attaque. Il
ne nous connaît même pas et il semble déjà prêt à tout pour nous.
– Oui, ça va aller. Ça ne va pas être évident pour elle, ni pour moi d’ailleurs,
mais on est habituées à se remettre d’épreuves difficiles.
Il fronce les sourcils et me dévisage froidement.

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– C’est différent, maintenant, déclare-t-il. Vous avez la fortune de notre famille
et le réseau qui va avec.
– Mais on ne veut pas de ta fortune ou de ton réseau.
– Peu importe, puisque vous l’aurez. Les avocats sont déjà en train de te
transférer les quarante-neuf pour cent de l’entreprise.
– Quoi ? Tu plaisantes ?
Il s’arrête et me regarde en posant ses mains sur ses hanches.
– Rien n’a changé, Mia. Le testament est immuable. À l’évidence, mon père
n’était pas au courant pour Maddy, mais il t’a légué la moitié de l’entreprise.
– Je n’en veux pas !
– Tu ne veux pas faire partie de la famille ? répond-il, vexé.
– Si bien sûr, mais je n’ai pas besoin de ton entreprise pour être ta sœur. Et tu
fais quoi de Maddy ? C’est elle ta vraie sœur !
– Toi aussi ! À moitié ou à cent pour cent, c’est la même chose pour moi.
Je ferme les yeux et j’essaie de réfléchir, mais trop d’émotions se bousculent en
moi.
– Dans ce cas, je veux lui donner ma moitié.
– Quoi ? Tu vas donner l’équivalent de plusieurs milliards de dollars en action à
ta petite sœur ?
– C’est la seule personne qui compte, je rétorque.
– Ouais, et toi tu te tues au travail pour payer ses études, tu vas d’un coin du
pays à l’autre avec des étrangers pour payer la dette de ton père, mais tu refuses
de prendre l’argent qui te revient de façon légitime ? Tu as une façon étrange de
procéder, ma belle.
– Je le dirai moi-même à Ree Cee.
– Trop tard. Je lui ai déjà dit de diviser l’entreprise en trois parts égales. Maddy
et toi serez bientôt des femmes très riches Toutefois, il va falloir environ six
mois pour que tout soit en ordre.
– Mais Jackson n’était pas mon père. Pourquoi je devrais prendre une part de la
boîte ? Divisez-la entre vous !
– Ce n’est pas ce que papa voulait. Il savait qui tu étais et que tu n’étais pas sa
fille, et il voulait quand même que tu hérites de sa fortune. S’il avait su que

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Maddy était sa fille, je sais qu’il aurait tout divisé en trois. C’est le genre
d’homme qu’il était.
– Tu ne vas pas changer d’avis, n’est-ce pas ?
– Non, rétorque-t-il.
– Tu es toujours comme ça ?
– Comme quoi ?
– Autoritaire, têtu et incapable d’admettre que tu te trompes ? je réponds alors
qu’un sourire involontaire s’étend sur mes lèvres.
Il s’assied sur le lit et prend ma main.
– Quand il s’agit de ma famille, absolument.
*
* *
Les vibrations de mon téléphone me tirent d’un profond sommeil et je réponds
sans regarder qui m’appelle. C’est sans doute Millie. Je lui ai écrit pour lui
demander de m’envoyer les infos concernant mon prochain client et de
m’accorder quelques jours à Malibu. Elle a accepté, mais je n’ai pas pris la peine
de regarder qui était mon prochain employeur. Sans doute prend-elle de mes
nouvelles, étant donné que je pars demain. Maddy et Matt rentrent à Las Vegas
aujourd’hui dans le jet de Max. Elle semble accepter peu à peu qu’elle a un frère,
qu’elle est sur le point de devenir riche et que l’homme qui l’a élevée n’est pas
son père.
– Allô, allô, Mia Saunders ? demande une voix nasale.
– Euh, oui, je suis Mia Saunders, je réponds en me raclant la gorge. Qui est-ce ?
– Je m’appelle Wilma Brown, je travaille à la maison de convalescence où est
votre père, à Las Vegas.
Je m’assieds brusquement dans le lit, comme si on venait de me jeter un seau
d’eau sur la tête.
– Que se passe-t-il ? Est-ce que mon père va bien ?
– Mademoiselle Saunders, je crains que l’état de votre père ne se soit soudain
aggravé. Il a contracté un virus qui a attaqué son système nerveux et nous
n’avions pas de dossier médical puisque votre père n’a jamais été hospitalisé.

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Nous lui avons donné l’antibiotique le plus puissant pour lutter contre
l’infection.
Oh non, non, non. J’entends à sa voix que les nouvelles sont très mauvaises.
– Est-ce qu’il va s’en sortir ?
– Je suis désolée, Mademoiselle Saunders, mais il a fait une réaction allergique à
l’antibiotique et il a fait un œdème. On lui a donné l’antidote, mais il était
également allergique à ça et il a fait un arrêt cardiaque.
Son cœur s’est arrêté. Son cœur s’est arrêté. Son cœur… stop.
J’ai beau me le répéter plusieurs fois, je ne peux pas l’encaisser.
– Mademoiselle Saunders ? Il est en vie, mais son état est critique. Son pronostic
vital est engagé. Je suis désolée de vous le dire, mais ce pourrait être une
question d’heures ou de jours. Vous et votre famille devriez venir le voir aussitôt
que possible.
– Quoi ?
Il allait bien la dernière fois que je l’ai vu. Maddy m’a dit qu’il avait l’air en
forme et que les médecins ne comprenaient pas pourquoi il ne se réveillait pas.
– Il n’a peut-être pas beaucoup de temps. Vous devriez vite venir si vous voulez
lui faire vos adieux.
– Merci. Je vais prendre le prochain vol. Je vous en supplie, faites tout ce que
vous pouvez.
– Bien sûr. Au revoir, Mademoiselle Saunders.
Son état est critique. Son pronostic vital est engagé. Venez vite. Faire vos
adieux.
Je ferme les yeux et les mots défilent devant mes paupières fermées, comme ce
ruban au bas des bulletins d’information à la télévision.
Peu importe le nombre de fois que je me répète la conversation, le résultat est le
même. Mon père est en train de mourir.

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SEPTEMBRE

Revenir à Vegas devrait être une joie pour Mia, et pourtant tout va mal.
Elle n'a pas versé son dernier règlement à Blaine, elle doit de l'argent à son client
précédent qu'elle ne peut pas rembourser pour l'instant, et l'état de son père ne
s'améliore pas ! Pour couronner le tout, Wes a disparu depuis plus de trois
semaines. Personne n'a eu de ses nouvelles.
Mia est totalement dévastée.
Elle va prendre la seule décision qui s'impose. Son ex, celui qui a envoyé son
père à l'hôpital, va obtenir ce qu'il veut. En tout cas, c'est ce que Mia va lui
laisser croire.

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Chapitre 1

Des murs blancs, rien que des murs blancs à la peinture craquelée et jaunie et
des plafonds maculés de taches de rouille. Je cligne plusieurs fois des yeux et je
tourne la tête à gauche et à droite, d’avant en arrière. Cela fait une semaine que
j’ai une contracture énorme dans l’épaule.
« Je suis désolée, Mademoiselle, mais son état ne s’améliore pas. »
« Mia, nous sommes là pour toi. »
« On continue de prier pour un miracle. »
« Je crains que les chances de votre père ne soient très minces. »
« Surtout, prévenez votre famille. »
« Parlez-lui. Faites-lui vos adieux. »
Des bribes de condoléances et des réponses des médecins passent en boucle dans
ma tête comme un vieux disque rayé alors que je ne quitte pas des yeux le seul
homme qui m’a toujours aimée, depuis le tout premier jour, jusqu’à ce qu’il
m’apprenne à jouer au base-ball et qu’il m’encourage à l’école. Un jour, maman
est partie et papa s’est effondré. Or, il n’a jamais cessé de m’aimer, même quand
ses joues étaient écarlates, qu’il bafouillait et que ses yeux étaient vitreux. Moi,
je comptais sur son amour pour nous aider à avancer, et la plupart du temps, cela
suffisait.
Je prends sa main en espérant que ma chaleur se propage dans son corps et que
cela l’aide à lutter, à se battre pour ses filles. À se battre pour moi, la chair de sa
chair. J’ai passé les dix dernières années à me battre pour lui et pour Maddy,
maintenant c’est à lui d’assurer, d’être là. De tout faire pour nous revenir. Nous
ne sommes peut-être pas grand-chose, deux jeunes femmes qui essaient de

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trouver leur voie, mais nous sommes ses filles et j’ai besoin de croire que nous
méritons qu’il se batte. Sinon nous le perdrons… à jamais.
La nouvelle infirmière entre d’un pas léger et s’efforce de ne pas faire de bruit
en vérifiant les dernières données de son état. Elle me lance un sourire plein de
remords, puis elle s’en va. J’y suis habituée, car depuis une semaine je n’ai droit
qu’à des excuses, des mines renfrognées ou des condoléances maladroites. Je
regarde Maddy, roulée en boule sur la minuscule causeuse, profondément
endormie. Comme moi, elle a refusé de partir d’ici, sauf pour se doucher et se
changer. Si notre père doit rendre son dernier souffle, nous serons là… avec lui.
Nous n’avons toujours pas reparlé de ce que nous avons appris Dallas, et l’idée
que Maddy souffre pèse lourdement sur mon moral. Le fait que Jackson
Cunningham soit son père biologique a été un choc énorme pour toutes les deux
et le poids des non-dits a vite créé une barrière entre nous. Or, j’ai besoin de
Maddy plus que jamais et j’ai l’impression qu’elle m’échappe, ne sachant pas où
est sa place. Je déteste cette situation, et je déteste encore plus ma mère d’en être
la cause.
Le seul aspect positif de cette histoire, c’est Maxwell. Il nous a envoyées ici dans
son jet privé et nous appelle tous les jours. Il nous a même pris une chambre
dans un hôtel à quelques centaines de mètres de la maison de convalescence.
Notre nouveau frère pense à tout et s’assure que l’argent n’est pas un problème.
Tout à coup, nous avons les meilleurs médecins de la ville, et des hordes de gens
s’occupent de notre père à tour de rôle. Ils le surveillent de près pour s’assurer
qu’il n’est pas en état de mort cérébrale et pour l’aider à se remettre des
infections et des arrêts cardiaques qu’il a subis.
Certains médecins craignaient le pire et, jusqu’à l’arrivée de la nouvelle équipe,
la maison de convalescence semblait avoir fait une croix sur sa guérison, certains
de ne rien pouvoir faire de plus, nous conseillant de débrancher son assistance
respiratoire.
L’assistance respiratoire. Ils voulaient qu’on cesse de l’aider à respirer. Jamais je
ne pourrai faire ça. Si nos rôles étaient inversés, est-ce que papa baisserait les
bras ? Est-ce qu’il éteindrait les machines qui m’apportent l’oxygène dont j’ai
besoin pour vivre ? Jamais. Cet homme me ferait lui-même un massage

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cardiaque si cela pouvait m’accorder quelques minutes de plus. Je me dois de lui
donner les mêmes chances.
– Bonjour, Mademoiselle Saunders, dit Docteur Beau-Gosse en prenant le
dossier de papa.
Il passe quelques minutes à le lire et à l’annoter, et j’en profite pour me lever et
m’étirer. Je tends les bras au-dessus de la tête et me penche en avant, cherchant à
soulager la douleur dorsale qui m’est venue d’être restée toute une semaine dans
une chaise en plastique. Docteur BG secoue la tête en me regardant par-dessus
ses lunettes à bord noir. Ses cheveux bruns et brillants sont coupés court et
semblent mouillés. À en croire le parfum qui l’accompagne, il sort tout juste de
sa douche. Son odeur sucrée me rappelle combien j’ai besoin de me laver, moi
aussi. Cela fait deux jours que je ne suis pas partie de l’hôpital, et aucune
quantité de déodorant ne peut masquer la puanteur qui émane de mes aisselles.
– Salut, Doc. Quel est le diagnostic ? Il va mieux ?
J’essaie de ne pas paraître trop optimiste, car je lui pose la même question depuis
sept jours et, depuis sept jours, il secoue la tête et fronce les sourcils. Or
aujourd’hui, je sais qu’il y a du mieux car le jeune et beau toubib vient de mon
côté du lit et pose une main sur mon épaule. Il la serre et je me retiens de gémir
lorsqu’un chouia de la tension qui y réside se dissipe sous ses doigts. Je suis
tellement crispée que le moindre contact avec un autre humain est un moment
merveilleux.
– D’après son suivi respiratoire, à un moment donné dans la nuit, les poumons
de votre père se sont mis à lutter contre la machine. C’est une réponse positive
qui indique qu’il pourrait être prêt à respirer de nouveau seul. Cependant, je ne
veux pas mettre la charrue avant les bœufs.
C’est une minuscule bonne nouvelle, mais c’est un grain d’espoir énorme. Je me
jette dans ses bras et le serre contre moi, m’accrochant à lui désespérément
comme si ma vie en dépendait. Heureusement, cela ne semble pas le gêner. Il me
tient contre lui et nous restons ainsi en silence. Je prie Dieu pour qu’il donne au
médecin devant moi la capacité de sauver mon père, que celui-ci le mérite ou
non. Je dois croire que tout le monde mérite une deuxième chance. S’il s’en sort,

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je sais que papa sera d’accord. Peut-être que ce sera le sursaut dont il a besoin
pour comprendre que la vie mérite d’être vécue.
Un téléphone sonne, ruinant l’unique moment de bien-être que j’ai connu depuis
une semaine. Je sursaute et lève la tête vers Docteur BG.
– Je suis désolée, c’est juste que…
– Mia, ne vous excusez pas d’avoir besoin d’un câlin. Je sais que vous êtes forte,
mais tout le monde doit pouvoir s’appuyer sur quelqu’un. Continuons d’espérer
un miracle. Je reviendrai dans deux heures.
Je hoche la tête et me tourne vers Maddy, qui est au téléphone.
– Euh, ouais, elle est là, Tante Millie.
Elle me tend son téléphone et dégage ses mèches blondes de son visage. Elle
semble dans le même état que moi et je me demande si j’ai moi aussi l’air d’un
zombie. Sans doute.
– Allô ?
– Que se passe-t-il ? Tu ne réponds pas à mes appels, tu ne t’es pas présentée
pour ton vol, et tu ne t’es pas pointée à Tucson, dans l’Arizona, où t’attendait ton
neuvième client !
J’essaie de formuler une réponse, mais rien ne sort. Je devrais m’excuser, dire
quelque chose, mais je n’ai pas l’énergie de m’en préoccuper.
– Millie…
– Pas de Millie, non ! Tu es dans la merde, ma petite ! Tu devrais relire ton
contrat, car tu sembles avoir oublié que si tu fais faux bon à un client, non
seulement tu ne touches pas tes cent mille dollars de salaire mais tu lui dois cent
mille dollars pour la peine !
Je marche aussi vite que me le permettent mes jambes épuisées pour sortir de la
chambre de papa, puis dévale le couloir jusqu’au petit jardin de l’hôpital. Il est
encore tôt et j’y suis seule.
– Tu es en train de dire que maintenant je dois cent mille balles à un type qui est
déjà plein aux as ? je hurle dans le téléphone.
– Tu oses me crier dessus ? C’est toi qui t’es mise dans ce pétrin, ma belle.
– Je n’avais pas le choix ! Papa est sur son lit de mort.

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– Alors, tu disparais sans rien dire ? Mia, si j’avais pu prévenir le client, on
aurait évité cette situation. Tu as perdu deux cent mille dollars et tu n’avais pas
assez sur ton compte pour payer Blaine.
Oh non ! Mon corps se met à trembler et mes jambes n’ont plus la force de me
tenir debout.
– J’ai manqué mon paiement… je chuchote en me laissant tomber sur un banc.
– Oui ! Je vous ai appelées plusieurs fois par jour et ce n’est qu’aujourd’hui que
j’ai réussi à avoir Maddy.
– Mon téléphone est éteint. Ça fait une semaine qu’on est au chevet de papa et il
n’est toujours pas tiré d’affaire, Millie. Je ne peux pas le laisser.
Je passe une main tremblante dans mes cheveux et les tire à la racine pour
essayer de me réveiller.
– Je ne peux pas te dépanner, Mia. Je viens d’investir toutes mes économies dans
une nouvelle boîte et ce qui me reste sert à financer Escorts Exquises. Il va
falloir que tu parles à un de tes amis pleins aux as. Peut-être un de ceux qui ont
payé le bonus ?
Comme si c’était aussi simple. Jamais je ne pourrais demander deux cent mille
dollars à Wes ou Alec.
– Je vais trouver une solution.
– En tout cas, tu vas vite devoir la trouver. Sache aussi que ton prochain client
s’appelle Drew Hoffman.
Le nom me dit quelque chose, mais je mets plusieurs secondes à me rappeler où
je l’ai entendu.
– Le médecin des stars ? Celui qui présente cette émission de télé tous les jours ?
Qui a sa ligne de vitamines, de vêtements de sport et les DVD ? Tu plaisantes ?
– Lui-même, oui. Apparemment, il a vu la campagne La Beauté ne se mesure
pas et il veut que tu participes à son émission. Il veut créer une nouvelle section
qui s’appelle « Vivre en Beauté ». Mia, si ça marche, tu pourrais avoir une place
permanente dans l’émission à la prochaine saison. Tu n’aurais à attendre que
deux mois avant de pouvoir commencer. Sans vouloir te mettre la pression, bien
sûr, dit-elle avant de ricaner comme une sorcière.

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Si j’avais été à côté d’elle, il m’aurait fallu le self-control du dalaï-lama pour ne
pas l’étrangler.
Sans vouloir me mettre la pression, dit-elle, comme si ce n’était pas l’occasion
du siècle. J’appuie mes index sur mes tempes tandis que tout mon sang semble
se précipiter vers mon cœur pour le faire battre plus vite. Si je n’étais pas là avec
papa, ce serait une nouvelle géniale. L’attention des médias m’a ouvert une
minuscule porte dans le monde de la télévision. La presse m’a remarquée, et
quand le clip d’Anton sortira dans un mois, ce sera la cerise sur le gâteau. Je
n’en reviens pas de pouvoir travailler aux côtés du Docteur Hoffman. C’est
justement ce qu’il me faut pour que mes rêves se réalisent.
Bon sang, il faut vraiment que je parle à Wes pour avoir son avis et savoir s’il
connaît le célèbre médecin ou s’il a entendu des rumeurs à son propos. Bien
évidemment, je ne peux pas lui parler car il y a maintenant deux semaines que je
suis sans nouvelles de lui. Je ne sais ni où il est ni quand il sera de retour. Il a dit
à Judi qu’il devait partir deux ou trois semaines et lui a demandé de me dire qu’il
m’appellerait. C’est tout ce qu’elle a su me rapporter. Il a laissé un message sur
mon répondeur, qui était de si mauvaise qualité que je n’ai rien entendu. J’ai
compris qu’il rentrait bientôt et qu’il m’aimait, c’est tout.
Bien sûr, je dois maintenant me soucier de trouver deux cent mille dollars ou un
moyen de convaincre Blaine de m’accorder un délai.
– Avec un peu de chance, l’état de papa va vite s’améliorer. N’annule pas la
mission d’octobre avant d’avoir de mes nouvelles. Je vais essayer d’être plus
joignable, mais ce n’est pas facile, en ce moment. Puis il faudra que je te parle
de nos histoires de famille, des histoires qui ont à voir avec maman.
– Tu as eu des nouvelles de Meryl ? chuchote-t-elle.
Je secoue la tête en entendant sa question ridicule. Papa se bat pour sa survie et il
est hors de question que les décisions stupides et égoïstes de ma chère mère, la
sœur de Millie, occupent le devant de la scène.
– Non, mais j’ai appris des choses. Je t’appellerai quand papa ira un peu mieux,
d’accord ?
– Est-ce que… il… va s’en tirer ? soupire-t-elle.

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– Comme si tu en avais quelque chose à faire ! Tu l’as toujours détesté. Tu lui en
as toujours voulu de ne pas nous avoir emmenées en Californie quand maman
nous a abandonnés. Il a fait du mieux qu’il pouvait, tu sais.
– Le mieux aurait été de vous offrir une vraie vie ! Quand ma sœur était là, vous
étiez tous heureux. Il a complètement perdu ses moyens quand elle est partie,
rétorque-t-elle d’une voix glaciale.
Un sentiment protecteur vis-à-vis de mon père prend racine dans mes entrailles
et, qu’elle soit ma tante ou pas, je me dois de la remettre à sa place.
– Au moins il n’a pas foutu le camp, lui. C’est ta sœur qui s’est fait la malle. La
femme qui te manque tant a abandonné ses filles de dix et cinq ans, mais ça ne
compte pas, n’est-ce pas ? Après tout, ce n’était pas la première fois qu’elle
laissait une famille derrière elle. Pour autant qu’on sache, elle a des dizaines de
gamins à travers tout le pays.
J’entends Millie renifler et elle parle d’une voix tremblante.
– Ta mère n’a jamais été bien dans sa tête, ma poupée, et tu le sais. Au fond de
toi, tu sais qu’elle n’était pas faite pour avoir des enfants et mener une vie de
famille. Son esprit avait besoin d’être libre de tout, sinon elle se sentait
emprisonnée.
– Attends, tu lui trouves des excuses ?
– Mia, elle t’aimait.
– Tu appelles ça de l’amour ? Abandonner ses filles ! Elle n’a jamais su ce
qu’était l’amour.
Maintenant que j’ai Wes, j’en suis encore plus certaine. Quand on aime autant
une personne, on se soucie de son bonheur avant le sien. On fait des sacrifices.
C’est un échange, bien sûr, mais ça fait partie de la vie de famille, d’une vie à
deux.
– Maman ne savait pas ce qu’était l’amour, Millie, je répète.
– Ne dis pas ça. C’est juste que Meryl n’était pas toujours très bien dans sa tête.
Elle était comme ça depuis qu’elle était petite.
– J’en ai assez entendu. Fais-moi plaisir et cherche le nom Maxwell
Cunningham encore une fois, tu veux ?

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– Ton dernier client ? Je t’ai déjà dit que j’avais fait des recherches sur lui,
répond-elle d’un ton ennuyé.
– Fais-le, Millie. Jette un œil à son certificat de naissance.
La ligne se met à grésiller tandis que je me rapproche de la porte de l’hôpital.
J’ai vraiment besoin d’une dose de caféine.
– Mia, je ne comprends pas ce que tu dis. Son acte de naissance ?
– Ouais.
– Et qu’est-ce que je dois m’attendre à trouver ?
J’éclate de rire face à l’absurdité de la situation. Un groupe d’employés vêtus de
blouses blanches me regardent comme si j’étais folle, mais je m’en fiche.
– Tu vas découvrir que le nom de la mère de Maxwell Cunningham est Meryl
Colgrove.
– Quoi ? C’est une blague, c’est impossible. Il ment. Il t’a menti, dit-elle d’un
ton sincèrement surpris.
Au moins, elle n’a pas l’air d’avoir été au courant des péchés de sa sœur.
– Ouais. Meryl a abandonné son fils quand il avait un an. Trois ans plus tard, elle
a épousé papa, et elle m’a eue un an après.
Je n’avais pas l’intention de lui retracer notre arbre généalogique, mais elle
n’aurait pas dû prendre la défense de sa sœur, elle ne le mérite pas.
– C’est impossible. Je l’aurais su… chuchote-t-elle.
Lorsque j’arrive à la cafétéria, je vais tout droit à la machine à café. J’y mets
cinquante-cinq cents et je glisse un gobelet en carton sous le bec verseur. Le café
est infect, mais il a le mérite de me maintenir éveillée, du moins pour l’heure qui
suit. Ensuite, je referai ma marche de zombie jusqu’au self et j’en reprendrai un
autre. C’est un rituel que j’accomplis plusieurs fois par jour.
Je gonfle mes poumons et les vide en plaquant mon front sur la machine
lorsqu’elle vrombit et déverse ma potion magique, les vibrations font du bien à
ma tête endolorie.
– Crois-moi. Mais ce n’est pas le pire.
– Mia, non… sanglote-t-elle.
Pour être honnête, je me fiche qu’elle ne veuille pas savoir la vérité. J’ai eu plus
de mauvaises surprises ces deux dernières semaines que n’importe qui au cours

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d’une année, et Millie mérite de partager le poids de notre souffrance.
– Je viens de te dire que Maxwell Cunningham était le fils de ta sœur. Et que lui
et Maddy ont les deux mêmes parents biologiques. Tu sais ce que ça signifie,
hein ? Ça veut dire que ma mère a trompé mon père. Elle a eu une liaison avec
Jackson Cunningham dix ans après leur premier enfant et elle est tombée
enceinte de Maddy. Cette garce a élevé Maddy comme étant la fille de papa et
elle n’a jamais pris la peine de lui dire la vérité. Voilà le genre de femme qu’était
ta sœur. Va falloir t’y faire. En tout cas, c’est ce que j’ai fait.
Je raccroche, saisis mon café et le vide d’un trait. Le liquide est assez chaud pour
brûler ma langue et flinguer mes papilles, mais je m’en fiche. La douleur me sert
de divertissement et me permet d’oublier un instant l’état critique dans lequel se
trouve mon père.
Je sors un billet d’un dollar de ma poche et le glisse dans la machine. J’ajoute
dix cents et pose mon gobelet vide d’un côté, puis j’en ajoute un pour Maddy.
J’appuie sur le bouton et plaque mon front sur la machine.
– Doux Jésus, tu fais peur à voir, mon sucre d’orge.
La voix la plus merveilleuse, en dehors de celle de Wes, retentit à côté de moi et
des bras saisissent les miens pour me faire faire demi-tour.
– Max ! je m’écrie en m’agrippant à son dos.
Les larmes se mettent immédiatement à couler, comme une pluie torrentielle,
trempant la chemise de Max qui me serre plus fort contre lui. Pour la première
fois depuis l’appel que j’ai reçu à Dallas, je me sens en sécurité.
– Merci. Merci d’être venu, je sanglote.
Il me serre plus fort et m’enveloppe d’encore plus de chaleur, me réchauffant
jusqu’à la moelle.
– Rien ne pourrait m’empêcher d’être aux côtés de ma sœur dans ces moments
difficiles. Tu peux compter sur moi, sœurette.
C’est donc ce que je fais, pendant plusieurs minutes. Lorsqu’un sanglot
m’échappe, il me retient dans ses bras. Il me soutient quand mes genoux cèdent
et que je ne tiens plus debout, et lorsque je supplie Dieu de ne pas laisser mourir
mon père, il chuchote la même prière. Je n’ai jamais eu personne sur qui
compter, quelqu’un qui laisserait tout tomber pour être avec moi. Là, dans ses

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bras, Max laisse son empreinte sur mon âme. J’ai un frère, et maintenant que je
le sais, je ne veux jamais plus savoir ce que serait la vie sans lui.

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Chapitre 2

– Mia, mon sucre d’orge, tu dors debout. Il va falloir que tu te reposes, sinon
ton corps va te lâcher quand tu t’y attendras le moins.
Je fais un pas en arrière, essuie mes yeux de la manche de ma chemise, et je
respire lentement pour me calmer.
– Ça va. Sans rire, Max, je vais bien.
– C’est faux, dit Maddy en surgissant près de nous.
Elle désigne la machine à café en me regardant.
– Tu en as pris un pour moi ?
Je hoche la tête et la regarde préparer nos cafés, prenant même la peine d’y
mettre du lait et du sucre. Je le buvais noir par fainéantise alors que je n’aime
pas ça. J’ai perdu toute notion de goût, de toute façon, le monde qui m’entoure
n’est plus qu’en noir et blanc.
Maddy avance vers Max et se blottit dans ses bras, ce qui est une première. Il la
serre contre lui, l’air timide et hésitant, et caresse ses cheveux. Il ferme les yeux,
bouleversé. Je sais qu’il souhaite être proche de Maddy et moi, mais tout s’est
déroulé si vite, au Texas, qu’ils ont manqué de temps. Elle venait à peine
d’apprendre que Maxwell était son frère et qu’ils avaient les mêmes parents
lorsque j’ai reçu l’appel à propos de papa.
Maddy lève la tête et appuie son menton sur le torse de Max.
– Merci d’être venu, Max.
– Comme je l’ai dit à ta sœur, je ne pouvais pas ne pas être à vos côtés.
– Notre sœur, rétorque-t-elle d’une voix tremblante.
Max fronce les sourcils, l’air confus.
– Pardon, ma puce ?

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– Mia est notre sœur, répète Maddy. Tu as dit « ta sœur ». On est frère et sœurs.
Qu’on soit bien d’accord, peu importe ce que disent les tests ADN, Mia sera
toujours notre sœur à cent pour cent.
– Tu as parfaitement raison, Maddy. Ce n’est pas ce que je voulais dire. Je suis
désolé.
Il est désolé ? De quoi ?
– Max, ne t’excuse pas, c’est inutile. Maddy est juste fatiguée, on est un peu à
fleur de peau, tu sais.
– Pas du tout, rétorque Maddy. Je dis la vérité, comme tu m’as appris à le faire
quand j’étais petite. Tu m’as toujours dit de ne jamais me cacher derrière un
mensonge et de ne pas me taire quand il y a un sujet important à aborder. Max
doit comprendre que tu comptes plus pour moi que quiconque. Je me fiche de
savoir qui est mon père biologique. L’homme qui est dans cette chambre est mon
seul papa, et aucun test ADN n’y pourra rien changer, dit-elle en désignant le
fond du couloir.
Max respire lentement et traîne son pied sur le lino, laissant une marque noire
sur le sol alors que je cherche le meilleur moyen de gérer cet éclat. À l’évidence,
Maddy ne sait plus où est sa place et elle ressent le besoin de protéger sa relation
avec son père et moi.
– Maddy… Max, sa femme Cyndi, Isabel et le petit garçon qui va bientôt arriver
s’ajoutent tous au clan Saunders, d’accord ? Ne vois pas ça comme un
changement mais un ajout. Notre famille s’agrandit. Ce n’est pas parce qu’ils
sont des Cunningham que tu l’es aussi.
Ma sœur semble se calmer quand Max commet l’erreur fatale.
– Enfin, techniquement, tu es une Cunningham, c’est juste que tu ne le savais
pas.
Je regarde ma sœur lorsqu’elle réalise ce qu’il vient de dire. Elle se crispe des
pieds à la tête, sa poitrine se gonfle, et elle fusille Max du regard. Elle fait deux
pas vers lui et pointe son index vers son visage, cet index dont je déteste tant être
la cible, puis elle l’enfonce plusieurs fois dans son torse. Aïe. Je sais
d’expérience combien ce doigt fait mal.

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– Tu es fêlé ou quoi ? Je sais qu’on fait les choses différemment au Texas, mais
écoute-moi bien. Je suis, j’ai toujours été et je serai toujours Madison Saunders.
Capiche ? J’étais très bien dans ma peau avant, et je ne vais pas changer parce
qu’un test ADN dit autre chose. Je veux bien admettre que je suis choquée
d’avoir un frère et que ça me plaît, mais je ne te servirai pas de lot de consolation
pour avoir perdu Meryl Colgrove. Compris ?
– Ma belle… je murmure d’une voix si triste que je peine à la reconnaître.
Je passe mon bras autour de sa taille et ma petite sœur se jette dans mes bras et
enfouit son visage dans mon cou.
– Je suis Madison Saunders ! Pas une Cunningham, sanglote-t-elle le nez dans
mes cheveux.
– Ma chérie, personne n’essaie de te changer, ni toi ni ton nom. Tu seras toujours
ma sœur et tu seras toujours la fille de papa. C’est juste que, maintenant, nous
avons tout un pan de famille à découvrir. Rien ne va changer, Mads. Rien. C’est
toujours toi et moi contre le reste du monde, d’accord ? Je suis sérieuse ! j’insiste
quand elle continue de pleurer. Max n’est pas là pour changer quoi que ce soit,
n’est-ce pas, Max ?
Il se racle la gorge et pose une énorme main sur la tête de ma sœur.
– Ma puce, je vous aime déjà beaucoup, toutes les deux. Vous êtes mes petites
sœurs et je l’ai senti dès que je vous ai rencontrées. J’ai toujours voulu avoir des
sœurs, une famille. Maintenant je l’ai et je suis fou de joie. Cyndi, Isabel et le
petit Jack vont avoir des femmes géniales dans leur vie et je me sens
particulièrement chanceux. C’est tout. C’est pour ça que je suis là, pour vous
soutenir pendant que vous vous occupez de votre père.
Maddy finit par lever la tête et je prends son visage dans mes mains pour essuyer
ses larmes.
– Rien n’a changé, d’accord ?
– P… pourtant j… j’ai l’imp… l’impression que si, bégaie-t-elle avant d’essuyer
son nez sur sa manche.
Beurk. Nous sommes toutes les deux dégoûtantes.
– Je sais, ma chérie, mais ce n’est pas le cas, promis. Tu es toujours à la fac, tu
deviendras bientôt Madame Matthew Rains, et je serai toujours avec toi. C’est

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juste que, maintenant, tu as aussi un grand frère féroce et plein aux as qui vit
dans un ranch.
– Mais on est tous les trois pleins aux as, corrige Max, ce qui ne fait rien pour
arranger la situation.
Bon sang, est-ce qu’il ne sait pas se taire ? Les grands frères ne sont pas livrés
avec un bouton off ? Je n’avais pas encore eu l’occasion d’annoncer à Maddy
qu’elle héritait d’une part de Cunningham Oil & Gas quand l’hôpital m’a
appelée à propos de papa.
Elle fronce les sourcils et un petit V apparaît au-dessus de son nez. Quand elle
était petite, j’embrassais ce V en lui disant de ne pas plisser les sourcils parce
qu’elle resterait comme ça et qu’elle s’en voudrait toute sa vie.
– On n’est pas riches Max, loin de là, ricane-t-elle.
– Tu ne lui as rien dit ? demande-t-il en me regardant et en croisant les bras.
J’ai envie de disparaître. J’ai eu trop de choses à gérer aujourd’hui pour avoir
cette conversation maintenant. D’abord, Millie et maintenant Maddy et Max.
Stop !
– Me dire quoi ?
– Max, j’ai eu d’autres soucis. La dernière chose dont nous ayons besoin, c’est
de compliquer davantage la situation.
– Quelle complication ? demande Maddy.
– Ce n’est pas vraiment une complication. C’est plutôt un bonus, ajoute Max.
– Quel bonus ?
Je suis trop fatiguée pour annoncer son héritage à Maddy et Max a l’air ravi de
lui dire, alors pourquoi ne pas le laisser faire ? Je sirote mon café et laisse le
liquide crémeux me réchauffer en regardant Max expliquer à Maddy que nous
allons tous les trois posséder une part de Cunningham Oil & Gas. Je suis
contente de l’avoir convaincu de garder ses cinquante pour cent et de diviser
l’autre moitié entre Maddy et moi. Cet héritage lui revient de plein droit alors
que ma sœur et moi ne connaissions même pas l’existence de cette entreprise il y
a un mois. Nous aurons chacune vingt-cinq pour cent, ce qui nous rapporte une
somme plus que généreuse sans nous forcer à nous investir quotidiennement

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dans l’entreprise si nous n’en avons pas envie. Si ça ne m’intéresse pas, je
suppose que Maddy pourrait être tentée lorsqu’elle sera diplômée.
Une fois que Max lui a donné tous les détails, elle reste silencieuse, sans doute
choquée ou perdue dans ses pensées, je ne sais pas. Soudain, les lumières
semblent se rallumer et son visage s’illumine. Elle rougit légèrement et la
personnalité joyeuse de ma petite sœur refait surface.
– Je détiens vingt-cinq pour cent d’une des plus grosses entreprises pétrolières
du pays ?
– Absolument, ma p’tite dame, répond Max en souriant.
– Tu déconnes ! s’exclame-t-elle.
– Pas du tout. Cet héritage te revient de plein droit, dit-il fièrement.
– Alors, quand j’aurai fini la fac, si je veux, je peux venir bosser avec toi ?
J’étais sûre que cela plairait à mon petit rat de laboratoire.
– Bien sûr. J’adorerais que vous veniez toutes les deux travailler au siège de
Dallas.
Je fronce les sourcils et secoue la tête.
– Désolée, frérot, ma vie est en Californie.
– On verra, répond Max en souriant et en passant ses bras autour de nos épaules.
Mais pour l’instant, ma priorité est de vous faire manger. Vous avez grandement
besoin d’une douche, ajoute-t-il en reniflant mes cheveux, et d’au moins quatre
heures de sommeil.
Maddy et moi sommes sur le point de le contredire, mais nous passons devant la
chambre de papa et il nous empêche de nous arrêter.
– On ne peut pas laisser papa tout seul, dit Maddy.
– Ce ne sera pas le cas. J’ai croisé ton mec en arrivant, lui et sa mère venaient
prendre le relais, de toute façon. Ils vont rester avec lui pendant que vous vous
reposez. Point barre. Vous ne lui servez à rien dans cet état. Il serait fou de rage
de savoir que vous ne prenez pas soin de vous, j’en suis certain.
Je suis sur le point de glousser, mais je me retiens. Au fond de moi, je sais qu’il
a raison. Papa nous aimait, c’est juste qu’il était toujours trop ivre pour
remarquer que Maddy et moi n’avions pas mangé depuis plusieurs jours.

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Je me souviens d’une fois où nous sommes restées quarante-huit heures sans
manger. Maddy avait sept ans, moi douze, je n’avais évidemment pas l’âge de
travailler. Nous avions déjà vidé les placards de la cuisine et dévoré les boîtes de
conserve et de céréales, et au bout de deux jours le ventre vide, j’étais
désespérée. Je suis allée dans un casino plein à craquer avec un buffet à volonté
et j’ai rempli mon sac d’autant de morceaux de poulet et de petits fours que je le
pouvais. J’ai pris soin de rester près d’une famille avec des enfants pour que
personne ne remarque quoi que ce soit. Je suis sortie sans que l’on me voie et
Maddy et moi avons mangé mes victuailles pendant trois jours, jusqu’à ce que
papa rentre de sa beuverie et fasse de nouveau les courses. J’ai dû faire ça
plusieurs fois durant les années qui ont suivi, quand la situation était grave.
Ainsi, la réponse à la déclaration de Max serait un « non » ferme. Papa ne
remarquerait probablement pas que ses filles sont épuisées, affamées et
inquiètes. Max connaît Maddy depuis une semaine, moi depuis un mois, et il voit
déjà ce dont nous avons besoin.
Maddy et moi nous laissons guider de l’autre côté de la rue, dans la suite qu’il
nous a réservée il y a deux semaines et dans laquelle nous n’avons pas dormi une
seule fois. Nous n’y sommes venues que pour nous doucher, et encore, à en
croire l’odeur rance qui traîne dans la pièce, nous n’avons pas assez usé de la
salle de bains. Max allume la climatisation et s’assied sur le lit.
– Allez à la douche, tout de suite, ordonne-t-il avant de prendre le téléphone de
la chambre. Bonjour, je voudrais… euh, attendez une seconde. Vous aimez les
burgers ? nous demande-t-il.
J’ai l’eau à la bouche en imaginant un steak chaud et du fromage fondant. Cela
fait plusieurs jours que j’ai perdu l’appétit et le peu que j’ai mangé ne ressemble
en rien à un vrai repas. Je me suis nourrie de cafés et de Snickers. La belle-mère
parfaite de Maddy a eu beau nous apporter des plats faits maison tous les jours,
je n’ai pas pu en avaler une seule bouchée. Papa ne peut pas se nourrir, alors
pourquoi devrais-je manger ?
– Ce serait parfait, Max, merci, je réponds alors que Maddy hoche la tête.
Chaque chambre a sa propre salle de bains et nous nous douchons en même
temps. Lorsque je sors, un t-shirt d’homme et un boxer à carreaux m’attendent

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sur la coiffeuse. Je n’ai pas pensé une seconde à apporter de pyjama. Je retourne
dans le salon, où je trouve Maddy vêtue comme moi, un énorme burger entre les
mains.
– Sympa ton pyjama, je dis en riant.
– Il fallait bien que je vous donne quelque chose à mettre. Aucune de vous n’a
de tenue pour dormir. Vous mettiez quoi pour aller au lit ?
Je regarde par la fenêtre, essayant d’éviter sa question, mais comme toujours,
Maddy préfère la vérité.
– Max, on ne pouvait pas laisser papa toute une nuit.
– Tu veux dire que vous n’avez pas dormi dans un lit depuis que vous êtes
parties de chez moi ?
Ma très chère sœur n’entend pas le ton accusateur de Max et répond
tranquillement.
– C’est ça. La plupart des nuits, je pique du nez sur la causeuse et Mia s’endort
sur la chaise.
– Ça fait une semaine que tu dors sur une chaise en plastique ? Et toi, tu as dû te
contorsionner pour faire rentrer ta taille de girafe dans une causeuse. Bon sang,
je comprends pourquoi vous avez des têtes de zombie. Où sont vos mecs dans
toute cette histoire ? demande-t-il en fronçant les sourcils.
– Bonne question, je marmonne en mangeant une frite.
Waouh. Jamais je n’en ai mangé d’aussi bonne – parfaitement croustillante tout
en ayant suffisamment d’huile et de sel. J’en avale une dizaine, puis je m’attaque
au burger.
– Mia refusait de partir, et moi je refusais de laisser Mia toute seule. On doit se
serrer les coudes, n’est-ce pas, sœurette ? dit-elle comme si regarder son père
mourir était un passage obligatoire pour prouver combien on est proches.
Elle est mignonne. Je sais qu’elle veut que papa s’en sorte autant que moi, mais
qu’elle craint aussi sa réaction lorsqu’il apprendra qu’il n’est pas son père
biologique.
Max se lève et fait les cent pas en secouant la tête, l’air préoccupé.
– Bon. Je reste ici environ quinze jours, du moins jusqu’à ce qu’il soit tiré
d’affaire. Ensuite, il faudra que je rentre à la maison. Cyndi ne peut pas passer

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seule son dernier mois de grossesse. Cela dit, peut-être que je devrais les faire
venir ici tout de suite, comme ça, on serait tous ensemble, quoi qu’il arrive.
Je ne crois pas avoir déjà rencontré un homme aussi gentil et généreux. Certes,
j’ai connu des hommes incroyables au cours de cette année, des amis fabuleux,
des amants spectaculaires, et, dans certains cas, plus que tout cela réuni. Or, Max
est unique. L’amour qu’il voue à sa famille rivalise avec celui de Taï pour son
clan Niko à Hawaï. Ceux-là sont proches, mais la fureur que Max dégage
lorsqu’il s’occupe de Maddy et moi, comme s’il voulait le faire pour toujours,
est d’un tout autre niveau.
Nous passons les dix minutes suivantes à manger et Max pointe nos assiettes du
doigt chaque fois que l’une de nous marque une légère pause. Il veut que nous
les vidions et il n’arrêtera pas tant qu’il restera des miettes. Nous finissons par ne
plus pouvoir avaler la moindre bouchée et, appuyées l’une contre l’autre, nos
paupières deviennent soudain si lourdes que nous n’arrivons plus à les garder
ouvertes.
– Allez les filles, dit Max en secouant délicatement mon bras.
Je me blottis davantage contre Maddy et je frissonne lorsque sa chaleur disparaît.
Mes paupières sont encore trop lourdes pour les ouvrir. Il me faut quelques
minutes de repos, et je serai de nouveau d’aplomb.
Tout à coup, je ne pèse plus rien, comme si je volais vers une destination
inconnue. J’atterris sur un nuage doux et cotonneux et je suis emmitouflée dans
un duvet moelleux contre lequel je frotte ma joue, sans jamais ouvrir les yeux.
– Il me faut juste cinq minutes, puis j’y retourne, je marmonne.
Je sens quelque chose de chaud et humide sur mon front.
– Pas de souci, sucre d’orge. Comme tu voudras.
Max dit autre chose, mais je suis déjà trop loin pour le comprendre.
*
* *
Lorsque je me réveille, il ne fait pas tout à fait nuit. Je m’assieds dans le lit et je
regarde le lit à côté du mien, dans lequel Maddy dort à poings fermés. Je me lève
en silence, mais mes pieds ont à peine touché la moquette que j’ai la tête qui

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tourne. Je suis profondément épuisée. Je regarde le réveil et suis stupéfaite de
voir qu’il est dix-neuf heures.
Merde ! Ça fait huit heures qu’on dort. Papa !
L’image de mon père, de l’autre côté de la rue, en train de se battre pour rester
en vie, fait disparaître les derniers vestiges de sommeil. J’enfile un jean, un t-
shirt à col en V, des chaussettes propres et mes Converse. Cinq minutes après
avoir ouvert les yeux, je suis prête à partir. Je trouve un élastique sur la table de
chevet et j’attache mes cheveux avant de sortir de la chambre.
Je trouve Max dans le salon, assis sur le canapé face à la télé.
– Tu es réveillée.
– J’ai dormi huit heures, Max ! je grogne en allant récupérer la clé de la chambre
et mon portefeuille sur la table.
– Tu en avais besoin, répond-il simplement.
Bon sang, ce que j’ai envie de le frapper !
– Ce dont j’ai besoin, c’est d’être avec mon père. Et s’il se réveillait tout seul ?
Ou pire, et s’il…
– Détends-toi, dit Max en se levant. Je viens d’avoir Matt et Tiffany Rains au
téléphone et il n’y a eu aucun changement.
– Tu étais censé me réveiller au bout de quinze minutes ! je crie en saisissant la
poignée. Comment je peux te faire confiance si tu ne m’écoutes pas quand je te
demande quelque chose d’aussi simple ? j’ajoute avant de claquer la porte
derrière moi.
Cependant, comme nous sommes dans un hôtel, la porte se referme lentement et
ma colère en est décuplée.
– Mia ! appelle Max alors que je marche d’un pas rapide vers l’ascenseur.
J’appuie quinze fois sur le bouton, ce qui ne le fait pas arriver plus vite mais qui
a le mérite de me défouler un peu.
Max vient à moi lentement, précautionneusement.
– Mia, je suis désolé. Tu avais vraiment besoin de dormir. J’ai appelé Matt
toutes les demi-heures pour me tenir au courant, et s’il y avait eu le moindre
changement, on y aurait été en deux minutes. Je n’essaierai jamais de te
contrôler.

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Je lève les yeux au ciel et croise les bras.
– Ouais, si tu le dis, mais qu’est-ce que tu veux, je me fais du souci pour mon
père. Je ne sais pas où est mon mec, je n’ai pas eu de nouvelles de lui depuis
deux semaines.
– Ça fait deux semaines que tu es sans nouvelles de Weston ?
J’appuie ma main sur mon front, où ce mal de crâne omniprésent est en train de
reprendre racine. Max fronce les sourcils et serre mon bras.
– Je vais passer quelques coups de fil. S’il y a quelqu’un qui peut obtenir des
infos, c’est Aspen. Elle a un sacré réseau dans le milieu du cinéma. Ça te
soulagerait un peu ?
– Ouais, merci, je dis, alors que les portes de l’ascenseur s’ouvrent.
– Je vais attendre ici avec Maddy, dit-il.
– Oui, ne la réveille pas, elle a besoin de repos.
Il écarquille les yeux et un sourire diabolique s’étend sur ses lèvres.
– Et pas toi ? Ah ouais, je vois : tu as le droit de prendre les décisions pour
Maddy, mais quand j’essaie de t’aider, je passe pour un enfoiré ?
– C’est moi la grande sœur, je rétorque comme si ça répondait à tout.
– Et moi je suis le grand frère, répond-il en me souriant.
Pour la première fois en une semaine, je sens les coins de ma bouche s’étirer
vers mes oreilles.
– Ouais, eh bien, ton titre est tout nouveau. Il va falloir que tu le mérites,
Maximus.
Son regard pétille tandis qu’il empêche la porte de l’ascenseur de se refermer.
– J’en ai l’intention, sucre d’orge. Jusqu’à la fin de mes jours.
Il laisse les portes se refermer et me fait un signe de la main avant de retourner
vers la chambre. Son message est passé. Max est là pour de bon et il souhaite
ardemment que nous formions une grande et heureuse famille. Il a gagné deux
sœurs et il est du genre à tout donner. D’ailleurs, il a déjà fait beaucoup pour
nous, seulement je suis trop inquiète et refermée sur moi-même pour lui avouer
combien sa présence compte à mes yeux. Je ne sais comment lui dire qu’à la fin
de cette année, je compte faire des apparitions régulières dans sa vie, et j’ai hâte.

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Chapitre 3

– Le Père Noël est là ! annonce Ginelle en passant la porte de la chambre


d’hôpital.
Elle tient une plante dans un bras et un sac en papier dans l’autre. Elle pose les
succulentes à côté des deux bouquets de fleurs, puis elle va à la tête de lit pour
embrasser papa sur le front en prenant soin de ne pas débrancher ses tubes.
– Réveille-toi mon vieux. Tes filles ne rajeunissent pas en te regardant dormir.
C’est tout Gin, ça, douce et narquoise en même temps. Elle regarde un instant le
visage de mon père, comme si elle attendait qu’il lui obéisse et qu’il ouvre les
yeux, puis elle secoue la tête, se tourne vers moi et m’observe d’un air
réprobateur.
– Bon, tu as l’air un peu plus en forme. Enfin, tu as toujours une sale gueule,
mais tu sembles avoir dormi quelques heures et tu nous as tous fait à tous la
grâce d’une douche. Dieu merci !
Elle se penche et renifle mes cheveux pour enfoncer le clou.
– Ouaip, tu es fraîche comme la rosée du matin.
Je fais semblant de lui frapper la poitrine en souriant.
– Tais-toi, sale peste. Il y a quoi dans le sac ?
Elle bat des cils et pose son index sur sa joue.
– Quel sac ? dit-elle avant de s’asseoir lentement sur la causeuse.
Elle croise lentement les jambes et elle sort un à un les articles du sac de façon
théâtrale.
– Bon, comme ça fait une semaine que ton petit cul n’est pas sorti de cette
chambre, je me suis dit qu’il te fallait de quoi passer le temps. Donc, voici un jeu
de cartes, des mots croisés, des Sudoku…

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– Sudoku ? C’est quoi ce truc ?
Elle hausse les épaules.
– C’est un jeu avec des chiffres je crois.
– Tu m’as apporté un jeu avec des chiffres ? À moi ?
Elle sourit jusqu’aux oreilles et feuillette les pages du magazine.
– Je ne sais pas. Le caissier du supermarché était canon et on s’est mis à parler.
Je lui ai dit ce que cherchais et il m’a montré tous ces trucs, alors j’ai tout pris et
j’ai flirté avec lui, dit-elle en regardant par la fenêtre comme si elle y repensait.
Bref, il a dit que c’était son jeu préféré, qu’il adorait essayer de résoudre les
énigmes, bla-bla-bla. J’étais surtout occupée à regarder ses lèvres bouger et à
rêver qu’il les pose sur ma… dit-elle en désignant son entrejambe.
– Gin ! je m’écrie en regardant papa. Meuf, il t’entend, tu sais !
– Ah bon ? Tu crois ?
– Oui. Alors, ne parle pas de tes fantasmes avec le caissier.
Ma meilleure amie lève les yeux au ciel.
– Bref. Mads adorera.
Elle n’a pas tort. C’est Maddy, le génie de la famille.
– J’ai aussi des magazines de mode et, bien sûr, ton préféré…
Elle sort du sac le dernier numéro de Street Bike Magazine et le fait danser
devant mes yeux. La couverture montre une femme en tenue de lapin Playboy,
chevauchant la toute nouvelle Yamaha YZF-R1M. Je suis sûre que la bécane a la
toute dernière électronique embarquée de pointe. Le moteur crossplane doit
cracher au moins deux cents chevaux. Une vraie merveille technique ! Cette
superbe bête bleu roi doit peser pas loin de deux cents kilos, mais je donnerais
mon sein gauche pour la posséder. Enfin non, pas vraiment. Peut-être.
En tout cas, je me verrais bien l’emprunter pour une petite balade dans le vent.
J’ai les larmes aux yeux en réalisant ma chance d’avoir une meilleure amie aussi
incroyable. Tout émue, je ne peux que lui rétorquer :
– Merci Gin.
Elle décroise et recroise ses petites jambes musclées et recule dans la causeuse.
– Alors, quelles sont les dernières nouvelles ? Où est ton surfeur ? Pourquoi
n’est-il pas là ?

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Cette seule question suffit à faire retomber tout le poids du monde sur mes
épaules. J’ai appelé Judi, sa femme de ménage, et j’ai même parlé à Jeanine, sa
sœur, et à Claire, sa mère, mais personne n’a eu de nouvelles et tout le monde
s’inquiète. Elles ne trouvaient pas anormal qu’il ne les ait pas appelées, car cela
lui arrive de ne pas le faire pendant parfois un mois, mais le fait que je n’aie pas
eu de nouvelles non plus les a alarmées. Il était censé me retrouver à la maison
quand j’avais fini à Dallas, et j’avais espéré le voir avant de repartir pour
rencontrer mon neuvième client, mais je n’ai pas de nouvelles.
J’ai fini par appeler Jennifer, la femme du directeur. Son mari n’a pas pu partir
en tournage car elle est enceinte de neuf mois, c’est pour ça que Wes a dû partir
plus longtemps. Aux dernières nouvelles, un assistant leur a rapporté que les
choses se passaient bien mais qu’ils n’avaient ni réseau cellulaire ni Internet. Ils
étaient au fin fond d’une île d’Asie du Sud-Est avec une petite équipe de quinze
personnes, dont Gina DeLuca, ce qui m’a fait grincer des dents même s’il est
normal qu’elle soit là. Son personnage est pris dans un triangle amoureux, et
comme un des acteurs est décédé durant le tournage, ils doivent refilmer toutes
les scènes. Cependant, tout cela ne m’a pas appris quand ils seraient de retour ni
pourquoi Wes n’a pas trouvé un moyen de me joindre.
– Tout ce que je sais, c’est qu’il est en Asie et qu’ils retournent des parties du
film, mais je n’en sais pas plus.
– Il devrait être là, Mia. Son absence ne lui fait pas marquer des points auprès de
ta meilleure amie. Son absence n’arrange pas l’opinion que j’ai de lui.
Je soupire et me masse la nuque pour essayer de la détendre.
– Crois-moi, il serait là s’il était au courant de ce qui se passe. Son répondeur est
plein, ça ne sonne même pas, j’ai tout de suite un message me disant que sa boîte
vocale est saturée et qu’il faut rappeler ultérieurement.
– Tu crois qu’il s’est passé quelque chose ? demande-t-elle alors, et son regard
s’attendrit.
Je regarde par la fenêtre, puis mes yeux se posent sur mon père. Je déteste le dire
à voix haute, mais je dois avouer mon pressentiment à ma meilleure amie.
– Oui, Gin. Je crois qu’il s’est passé quelque chose de grave et que personne ne
le sait.

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– Tu penses qu’on devrait appeler la police ?
– C’est trop tôt pour le dire. J’ai posé la question à sa famille, ils ne veulent pas
que les médias soient alertés au cas où un flic vendrait la mèche. Honnêtement,
je me contrefiche que la terre entière le sache. Cependant, je ne connais pas
assez son métier pour savoir si c’est inhabituel. J’espère que je m’inquiète pour
rien et que tout va bien. Tout va bien, je répète comme pour m’en convaincre et
me débarrasser de la peur qui ne me quitte plus depuis plusieurs jours.
– Qu’est-ce que tu vas faire ? demande-t-elle en appuyant ses coudes sur ses
genoux.
Je sais que ce n’était pas son intention, mais sa question ne fait que souligner
combien je suis impuissante. L’homme que j’aime a disparu et cela va bientôt
faire trois semaines que personne n’a eu de ses nouvelles. Le pire, c’est que je
semble être la seule à m’inquiéter. Peut-être est-ce le signe que je m’inquiète
pour rien.
Je hausse les épaules et je recule dans ma chaise, appuyant ma tête contre le mur,
regardant le plafond blanc.
– Je ne sais pas. Max a appelé Aspen Reynolds, une amie à lui qui…
– Attends, quoi ? Reviens en arrière. Tu parles de THE Aspen Reynolds ? Aspen
Reynolds-Bright, d’AIR Bright Industries ? La superbe blonde qui est mariée à
un cow-boy canon ? Celle qui a la plus jolie petite fille au monde ? Hannah ?
– Euh, ouais. Je trouve un peu louche que tu en saches autant sur une nana que je
viens de rencontrer.
– Tu l’as rencontrée ? s’exclame Ginelle en se levant d’un bond et en posant une
main sur sa hanche.
Bon sang, je n’ai vraiment pas besoin d’un de ses caprices. Gin ne peut être
gérée qu’à petites doses et je n’ai pas la force mentale de lui faire face
aujourd’hui.
– J’arrive pas à le croire ! Tu es dans une situation où tu pourrais m’aider, moi,
ta meilleure amie, ta salope chérie, mais que dalle !
– Gin, explique-moi pourquoi tu fais tout un plat du fait que j’ai rencontré Aspen
Reynolds, je dis en appuyant mes index sur mes tempes.

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– Mon Dieu, c’est LA femme qu’il faut connaître dans l’industrie du
divertissement. Elle lance des mannequins, des actrices, dirige des magazines,
produit des spectacles énormes à Las Vegas…
– Elle produit des spectacles pour lesquels tu voudrais auditionner ? je demande
pour couper court à son mélodrame et en venir au fait.
– Tu dis ça comme si c’était un caprice. Tout le monde la connaît. C’est l’une
des femmes les plus riches de la planète et elle n’a que trente ans ! s’exclame-t-
elle d’une voix aiguë et tout excitée.
Je repense au jour où j’ai rencontré la belle blonde aux jambes infinies. Elle était
avenante, hyperbien fringuée, et elle avait des claquettes aux pieds. J’ai compris
qu’elle s’habillait comme nous tous mais qu’à la fin de la journée, elle voulait
être à l’aise. Elle vit dans un ranch près de Dallas, à côté de celui de Max. C’est
une belle baraque pour sa petite famille, c’est clair, mais c’est loin d’être le
palais de la reine d’Angleterre.
– Elle m’a paru normale, moi.
– Elle n’est pas normale. Elle est parfaite. C’est la femme de ma vie.
– Je croyais que c’était moi la femme de ta vie, je dis en faisant la moue.
La tension se dissipe quand Gin éclate de rire et qu’elle se laisse tomber dans le
fauteuil.
– Ok, c’est mon fantasme, si tu préfères. Tu crois que tu pourrais me présenter ?
– Bien sûr, si on va chez Max un jour et qu’ils sont chez eux, avec plaisir.
Elle frappe plusieurs fois dans ses mains et son regard se perd au loin, quelque
part derrière moi.
– Ce serait génial.
– T’es frappadingue, tu sais.
Elle sourit bêtement sans répondre.
*
* *
Le lendemain, mon téléphone sonne alors que j’enlève les fleurs mortes des
bouquets que papa a reçus. Les marguerites que Judi Croft a envoyées de la part
de Wes, qui n’est au courant de rien, sont encore toutes fraîches. Leurs petits
pétales blancs et leur cœur jaune me font penser aux belles journées ensoleillées

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que nous avons passées ensemble. J’espère qu’elles sont une métaphore de la
longévité de notre couple et de son amour.
Je regarde l’écran de mon téléphone qui affiche « Numéro Inconnu ».
– Allô ?
– Mia Saunders ? demande la femme.
– C’est moi, qui est à l’appareil ? je demande alors que les poils se hérissent sur
mes bras.
Je sens que quelque chose ne va pas, comme je l’ai senti lorsqu’on m’a appelée à
propos de papa.
– C’est Aspen Jensen, tu te souviens, on s’est vues chez…
– Oui, salut, désolée, je n’ai pas reconnu ta voix au téléphone. Qu’est-ce que je
peux faire pour toi ?
Un court silence précède sa réponse.
– Mia, je ne sais pas comment te dire ça, mais Max m’a demandé si je pouvais
essayer de savoir où était Weston.
Une terreur effroyable s’empare de moi et un poids terrible m’écrase,
m’empêchant de respirer.
– Je sais, il me l’a dit. J’apprécie que tu utilises ton réseau. Tu as trouvé quelque
chose ? je demande en sachant très bien que la réponse est oui et que ce qu’elle
s’apprête à me dire va être impossible à encaisser.
– Mia, ma belle, son équipe, toute son équipe est portée disparue. Enfin, pas
tous… Mon contact a découvert qu’alors qu’ils filmaient sur une petite île, trois
bateaux d’hommes armés ont débarqué. Apparemment, ils font partie d’une
cellule terroriste radicale et religieuse. Les hommes armés sont sortis en
proclamant qu’ils allaient purifier leur terre et faire un exemple des Américains.
Elle marque une pause, se racle la gorge et poursuit.
– Mia, ils ont tiré sur les membres de l’équipe, dont sept sont morts. Ils ont pris
tout leur équipement et ils ont capturé les six autres. Les deux survivants ont été
transportés par hélicoptère à l’hôpital, mais un seul a survécu à l’opération.
L’autre n’est pas encore tiré d’affaire. Mia, les six autres sont retenus en otage.
Ma belle… je suis désolée. Le gouvernement est impliqué. Le Président est
impliqué.

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Oh mon Dieu !
– Je ne comprends pas ! Tu dis qu’il est soit mort, soit entre la vie et la mort, soit
retenu en otage par des terroristes ?
Un nœud de la taille d’une balle de golf se loge dans ma gorge. Aspen perd sa
voix et je devine qu’elle pleure.
– Je suis désolée, je suis désolée…
La ligne devient silencieuse, puis une voix d’homme prend le relais.
– Mia, c’est Hank. Je sais que tu dois être morte de trouille, mais on ne sait pas
s’il fait partie des morts ou des otages. Il pourrait être en vie. On fait tout ce
qu’on peut pour obtenir l’information.
Je m’écroule par terre au moment où Max entre dans la chambre.
– Qu’est-ce qui se passe ? dit-il en me rattrapant et en me déposant sur la
causeuse.
– Maxwell Cunningham à l’appareil, à qui ai-je l’honneur ? aboie-t-il en
saisissant mon téléphone.
Il se tait un long moment et son corps semble se raidir sous mes yeux. Sa
mâchoire se contracte, il pousse un grognement.
– Que sait-on, exactement ? Je veux des infos. Je veux le nom des morts et de
ceux qui ont été hospitalisés. Je veux l’info tout de suite, Hank. Est-ce que toi ou
Aspen avez des contacts au gouvernement ?
Je regarde Max faire les cent pas, ses bottes de cow-boy frappent le lino, et je
réalise tout à coup que j’ai un contact au sein du gouvernement. Warren Shipley.
En plus, ce type me doit une énorme faveur, puisque je n’ai pas envoyé son fils
en prison après qu’il a essayé de me violer.
– Moi oui, je chuchote aussi fort que me le permet la balle de golf dans ma
gorge.
– Attends une seconde. Pardon, sœurette ? dit Max en couvrant le micro.
Je pousse de côté mon désir écrasant de me rouler en boule et de pleurer jusqu’à
l’évanouissement, et je me redresse.
– Euh, mon client de juin. Warren Shipley. Son fils est sénateur de Californie et
Warren connaît des gens haut placés étant donné qu’il conclut des deals avec les

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gouvernements du monde entier. Il connaît le Président. Il y a une photo d’eux
dans son bureau. Et il me doit gros.
Max m’étudie en fermant légèrement les yeux puis il grimace. Je ne vais pas lui
dire pourquoi un homme aussi important que Warren Shipley me doit une
faveur, ni maintenant ni jamais. J’ai tourné la page. Je me suis remise de ce qui
s’est passé et je vais bien, physiquement et mentalement. Du moins, ça allait
bien jusqu’à maintenant.
Le fait que je puisse faire quelque chose pour aider Wes, mon merveilleux Wes,
m’aidera à tenir jusqu’à ce que j’en sache davantage. Mon Dieu, Wes pourrait
être entre les mains d’hommes qui détestent les Américains, leur politique et
leurs croyances religieuses. Des monstres qui passent leurs journées à torturer et
à tuer ceux qui ne pensent pas comme eux. Pire que tout, Wes pourrait déjà être
mort ou en train de lutter pour sa survie dans un hôpital d’Asie.
Mon Dieu je vous en supplie, laissez-le vivre, s’il vous plaît. Faites qu’il puisse
revenir à moi.
*
* *
De retour à l’hôtel, je prends une longue douche et je m’assieds, toute
tremblante, pour appeler Warren. Il est content d’avoir de mes nouvelles jusqu’à
ce que je lui apprenne la raison de mon appel. Il me promet d’employer toutes
ses ressources, y compris son contact avec le Président, et de me rappeler aussi
vite que possible. Il m’informe qu’il connaît des gens aux Philippines qui
peuvent obtenir des informations sur les groupes terroristes. Apparemment, ces
gens l’ont justement aidé à les éviter le mois dernier quand il transportait des
médicaments en Asie.
Les heures suivantes semblent durer des jours entiers. J’ai l’impression de
m’enfoncer dans des sables mouvants. Les gens vont et viennent et se regroupent
autour de moi, mais je ne reconnais pas leur présence. Je hoche sans doute la tête
et je dois répondre par des oui et des non, mais je parcours longtemps l’hôpital
comme le zombie que je suis devenue. Ma peur est comme un courant électrique
qui parcourt mes nerfs. Il m’est impossible de l’atténuer. Je ne peux qu’attendre,
espérer, m’inquiéter. Ma peur pour Wes est comme un être vivant et effrayant

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qui contrôle toutes mes pensées, tous mes gestes. Je ne suis plus moi-même, je
suis cet être plein d’angoisse. Qui m’empêche de manger et d’avoir des
conversations simples avec les gens qui m’aiment. Elle envahit mon inconscient
et Mia n’y réside plus. Mon cerveau est entre les griffes de ce monstre lugubre et
féroce. J’imagine mon beau Wes recroquevillé dans un coin, nu, pétrifié, blessé,
souffrant terriblement, hurlant, suppliant d’être relâché. Il sait peut-être qu’il ne
sera jamais libéré et qu’il mourra dans sa cellule.
Je cours aux toilettes et j’y déverse le peu que j’ai mangé au petit déjeuner. Mon
estomac se soulève, essayant de se purifier, de se débarrasser du monstre qui
m’aveugle et accapare toutes mes pensées, m’empêchant de voir ce qui est beau.
De voir le beau visage de ma sœur. Le seul visage qui pouvait me consoler,
jusqu’à ce que je rencontre Wes.
– Wes ! je crie avant de vomir de nouveau. Reviens, bon sang ! Ne me laisse pas
ici. Tu m’as promis le paradis ! je hurle, oubliant que je suis dans la salle de
bains de mon père, qui se bat lui aussi pour vivre.
Les larmes coulent sur mes joues et la bile me brûle la gorge.
– Sucre d’orge, chuchote Max en s’agenouillant derrière moi.
Ses cuisses sont de part et d’autre de ma taille, me permettant de m’appuyer sur
lui.
– Tu n’es pas seule, Mia, dit-il en tenant mes cheveux. Je suis là, sœurette. Je
serai toujours là. Tu n’es pas seule, murmure-t-il dans mon oreille alors que mon
estomac se calme. Il me couvre avec son corps, comme avec une couverture,
m’enveloppant de sa chaleur, faisant fuir ce froid qui ne m’a pas quittée depuis
que je suis arrivée à Las Vegas. Il m’aide à me lever et m’appuie contre le
lavabo. Il mouille des serviettes en papier et essuie ma bouche, puis il en prend
d’autres et essuie mes yeux, mon front, mes joues.
– Je n’y arriverai pas sans lui, je chuchote.
Max ferme les yeux et appuie son front au mien.
– Je m’assurerai que tu tiennes. Maddy a besoin de toi. Ton père a besoin de toi.
Mia, j’ai besoin de toi.
– Mais Max, je l’aime, je sanglote.

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– Je sais, ma chérie. Je sais, et je deviendrais fou s’il arrivait quelque chose à
Cyndi, mais toi, tu ne peux pas. Pas maintenant. On ne sait pas encore ce qui se
passe. Attends un peu. Laisse le temps à ton ami de découvrir ce qu’il peut. On
avisera en fonction de ce qu’il nous apprendra. On avisera ensemble. D’accord ?
Je lèche mes lèvres et frotte mon front contre le sien. Je saisis sa nuque et plonge
ma tête dans son cou, laissant mes larmes couler librement. Il me tient dans ses
bras et me laisse pleurer et lui confier toutes mes peurs, ma peur d’avoir perdu
Wes, d’avoir perdu papa, de perdre Maddy quand elle se mariera et, maintenant
que je l’ai trouvé, de le perdre lui, un jour. Il me rassure, me répète que rien de
tout cela ne va arriver. Il me dit qu’on doit avoir foi en Dieu, qu’on doit croire en
la force de papa et de Wes et qu’on sortira de toute cette histoire le sourire aux
lèvres.
Je veux croire en ses promesses, plus que tout. Pour la première fois de ma vie,
je m’en remets à Dieu, à l’Univers, à quiconque voudra bien m’entendre, pour
m’aider à traverser cette épreuve et garder tous mes proches en vie et en bonne
santé.

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Chapitre 4

– Mon Dieu, je sais que je ne prie pas souvent et que je ne vais pas à l’église
autant que vous le souhaiteriez, je soupire. Pardon, c’est un mensonge et vous le
savez. Je ne vais jamais à l’église. Je ne me souviens pas de la dernière fois que
j’y ai mis les pieds.
Je ferme les yeux et presse mes lèvres sur mes mains jointes. Le soleil vient de
se coucher et Maddy et Matt sont partis dîner avant de passer la nuit avec papa.
Je suis censée me reposer, mais je n’arrive pas à dormir. Je pense à Wes sans
arrêt, l’imaginant mort de peur. Je rêve de prendre l’avion pour aller au dernier
endroit où il a été vu, mais je ne sais pas où c’est. Warren n’a pas rappelé depuis
maintenant douze heures, douze heures sans nouvelles. Pas la moindre
information ni le moindre espoir, rien.
C’est ce qui m’a poussée à m’agenouiller devant le lit, à joindre les mains et à
supplier un Dieu dans lequel je n’ai jamais vraiment cru.
– Laissez-moi reprendre au début, je peux, non ? je dis en secouant la tête. Vous
vous en fichez, vous savez bien que je ne suis pas parfaite. Alors voilà, je me
lance. L’homme que j’aime a disparu, mais je refuse de croire qu’il est mort. Je
pense que je le saurais s’il était mort, non ? Après tout, c’est vous qui choisissez
les âmes sœurs, si ma moitié n’était plus sur cette terre, je le sentirais.
J’attends une réponse, mais le silence me laisse vide. Si seulement il pouvait
m’envoyer un signe, un battement cardiaque supplémentaire, n’importe quoi qui
me laisserait penser que je suis sur la bonne voie, ce serait merveilleux.
Les secondes passent et j’attends, mais il ne se passe rien. Je pousse un
grognement et soupire.

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– Je vous explique : Wes compte plus pour moi que je n’ai osé le lui avouer. Si
vous me l’enlevez maintenant, je n’aurai jamais l’occasion de le lui dire.
J’inspire lentement en rassemblant le courage nécessaire pour confesser mes
sentiments à Wes, même si c’est par le biais d’une prière.
– Avec toi, j’ai l’impression qu’aimer est facile alors que j’en ai toujours
souffert. Lorsque je suis avec toi, j’ai l’impression d’être allongée sur la surface
du soleil sans jamais me brûler. Mon amour pour toi m’a changée, je ne suis plus
la même. J’arrive presque à croire que je mérite tout ce que tu m’as promis,
notre paradis.
Les larmes se mettent à couler sur mes joues.
– Je vous en supplie mon Dieu, ne m’enlevez pas mon paradis sans m’avoir
laissée en respirer l’air, en sentir la chaleur et plonger dans ses eaux claires et
lumineuses.
Je me balance d’avant en arrière en répétant ma prière, comme un mantra.
– S’il vous plaît. Je vous en supplie, ne m’enlevez pas Wes.
– Ne m’enlevez pas Wes.
– Ne m’enlevez pas Wes.
*
* *
Des sonneries me tirent d’un sommeil agité. Je me réveille par terre, à moitié
appuyée sur le lit. La dernière chose dont je me souvienne est d’avoir prié de ne
pas m’enlever l’homme que j’aime. Le temps me dira si Dieu a eu pitié de moi.
L’écran de mon téléphone clignote sur la table de chevet. Je déplie mes membres
ankylosés en grognant comme une vieille dame atteinte d’arthrose et je me lève.
Je tends les bras vers le plafond et m’étire, faisant craquer ma pauvre colonne
vertébrale torturée par dix jours passés assise dans une chaise en plastique.
Je prends mon téléphone et m’assieds sur le bord du lit.
Je me demande si ce sont des nouvelles de Wes.
Je baisse la tête et fronce les sourcils.
À : Mia Saunders
De : Blaine Enfoiré Pintero
Jolie, jolie Mia. Je n’ai pas été payé. Va falloir y remédier.

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J’appuie mes index sur mes tempes, mais cela ne soulage pas la pression qui
m’accable à l’idée qu’il faut désormais que je m’occupe de Blaine. La simple
vérité, c’est que je n’ai pas son argent et que je ne peux pas le faire apparaître
par magie. Jusqu’à maintenant, je l’ai payé tous les mois à l’heure, j’ai
remboursé six cent mille dollars sur le million que papa lui doit. Or, non
seulement j’ai perdu cent mille dollars parce que je n’ai pas travaillé en
septembre mais j’ai dû filer les cent mille dollars de Max à mon neuvième client
pour l’avoir planté, car il aurait pu traîner Millie en justice et elle aurait risqué de
tout perdre. Maintenant, c’est moi qui vais tout perdre… encore une fois.
Techniquement, je dois donc deux cent mille dollars à cet enfoiré de Blaine,
parce qu’il n’aura pas non plus son fric ce mois-ci. Putain !
Que vais-je faire ? Si Wes était là, il proposerait de rembourser la dette, et à ce
stade, je n’aurais d’autre choix que d’accepter en lui promettant de le rembourser
dès que je toucherai ma part de Cunningham Oil & Gas. Je pourrais aussi
demander l’argent à Max, je sais qu’il me le donnerait… mais je ne peux pas lui
faire ça alors que nous venons de nous rencontrer. « Salut, c’est moi, ta nouvelle
sœur. Merci pour les vingt-cinq pour cent de la boîte, mais est-ce que tu pourrais
me prêter deux cent mille dollars jusqu’à ce que je me remplisse les poches en
héritant de ton père ? »
Je me laisse tomber en arrière sur le lit et je relis le message. Il me faut plus de
temps.
À : Blaine Enfoiré Pintero
De : Mia Saunders
Papa va mal. J’ai raté deux mois de travail. Il me faut plus de temps. Accorde-
moi cinq mois et je te rembourserai avec des intérêts.
Je me dis que l’histoire des intérêts devrait le faire. Blaine est un homme
d’affaires avant tout, et l’argent est sa kryptonite.
À : Mia Saunders
De : Blaine Enfoiré Pintero
Parlons-en autour d’un dîner. Notre resto. Souviens-toi.
Mon stress se transforme instantanément en colère. Comment ose-t-il me
demander de dîner avec lui alors que mon père est sur son lit de mort et que mon

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mec a disparu ? Certes, il n’est pas au courant pour Wes, mais mince ! À quoi il
joue ? La dernière fois que j’étais à Las Vegas, il m’a invitée au restaurant, et
maintenant il recommence. C’est comme s’il avait oublié qu’il m’avait trompée
non pas avec une mais deux femmes en même temps, le soir où il m’a demandée
en mariage ! J’avais besoin de temps pour réfléchir à sa demande, car je n’étais
pas certaine de vouloir être entretenue. Blaine proposait de tout m’offrir, des
montagnes de bijoux, un penthouse avec vue sur le Las Vegas Boulevard, tout. Il
me disait que je n’aurais à m’inquiéter de rien, que je n’avais qu’à être belle et
m’occuper de mon homme. À l’époque, cela me semblait être une sacrée
proposition, d’autant plus qu’il proposait de payer les études de Maddy si
j’acceptais d’être sa femme.
J’étais jeune et il me fallait du temps pour réfléchir. Si c’était un moyen rapide
de sortir de l’enfer où je vivais, je ne pouvais pas être certaine que je n’allais pas
plonger dans un nouveau cauchemar. Je savais que Blaine n’était pas un simple
businessman. J’avais vu les réunions clandestines et noté ce besoin étrange de
toujours avoir des gardes du corps avec lui. Les gens que nous croisions et qui le
connaissaient ou avaient entendu parler de lui n’arrivaient pas à masquer leur
peur, et cela m’avait toujours dérangée. Ce n’est que plus tard, cependant,
lorsque je l’ai surpris en train de se taper sa secrétaire, la bouche sur la chatte de
sa sœur jumelle, que j’ai découvert ce qu’était son vrai travail. Il m’avait dit
qu’il prêtait de l’argent, mais ce n’était ni pour une banque ni pour une société
de courtage. Quand quelqu’un ne remboursait pas Blaine à l’heure et avec des
intérêts, il tombait maladroitement du haut d’un pont, les pieds dans un bloc de
béton, dans des eaux infestées de requins.
Voilà le genre d’homme qu’est Blaine Pintero, et c’est moi la veinarde qui doit
traiter avec lui parce qu’il a cassé la gueule de mon père il y a neuf mois et l’a
mis dans le coma.
À : Blaine Enfoiré Pintero
De : Mia Saunders
Je ne peux pas. Mon père est sur son lit de mort. Quelles sont tes conditions ?
À : Mia Saunders
De : Blaine Enfoiré Pintero

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Je ne négocie pas par SMS. Un dîner, dans notre resto. Ne me défie pas, tu le
regretteras.
Réfléchissons. Que peut-il me faire de plus ? Faire encore plus de mal à mon
père ? Je lui ai déjà donné six cent mille dollars, il peut donc bien attendre mes
prochains paiements. Je fais un calcul rapide dans ma tête et je réponds en
espérant qu’il mordra à l’hameçon. La nausée qui s’est emparée de mon estomac
ne fait rien pour arranger la situation. Il faut vraiment que je mange autre chose
qu’une biscotte si je dois affronter des connards comme Blaine.
À : Blaine Enfoiré Pintero
De : Mia Saunders
Non. Tu auras le prochain paiement à la fin d’octobre avec une majoration de
cinq pour cent. C’est tout ce que je peux te donner.
Je relis plusieurs fois mon message avant de l’envoyer, puis j’attends de voir le
petit symbole indiquant qu’il l’a lu. Pourvu qu’il accepte.
À : Mia Saunders
De : Blaine Enfoiré Pintero
Tu as raté deux versements. Désolé, jolie Mia, fais ce que je veux et dîne avec
moi vendredi soir, sinon tu le regretteras.
Putain ! Est-ce que les mauvaises nouvelles cesseront un jour de s’enchaîner ?
Une porte claque et je sursaute, surprise de voir Max.
– Eh, ton père va mieux ! s’exclame-t-il joyeusement, cherchant son souffle
après avoir couru jusqu’ici.
Je me lève d’un bond et me tiens au mur lorsqu’un vertige me saisit. De petites
étoiles apparaissent, je cligne plusieurs fois des yeux.
– Qu’est-ce qui s’est passé ?
Je saisis mon sac et nous sortons ensemble de la chambre d’hôtel.
– Je ne sais pas trop, je sais juste que le médecin a dit qu’il débranchait le
respirateur artificiel. Apparemment, il respire tout seul.
Je m’arrête brusquement en plein milieu d’un passage piéton, submergée par le
soulagement qui m’envahit.
– Viens, sœurette, dit Max en gloussant. Allons voir le toubib de ton père.

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Lorsque nous entrons dans la chambre, Maddy est blottie dans les bras de Matt.
Ses parents sont là et tous regardent le médecin appuyer sur les boutons des
machines. Docteur BG lève la tête lorsque j’entre.
– Ah, c’est parfait. Merci de l’avoir amenée aussi vite, Monsieur Cunningham,
dit-il à Max. Apparemment, Monsieur Saunders a commencé à respirer tout seul,
et ses efforts sont assez solides pour que nous puissions régler la machine au
minimum. Elle ne respirera pour lui que si son niveau d’oxygène tombe en deçà
d’un certain niveau.
– Est-ce que ça veut dire qu’il va mieux ? Le traitement fonctionne ?
– Nous ne pouvons en être sûrs, mais c’est bon signe, c’est certain. D’après mon
expérience, les patients qui respirent seuls guérissent plus vite. Le problème,
dans le cas de votre père, c’est qu’il était déjà dans le coma, un coma que nous
n’avons pu expliquer. Ses résultats ont toujours été bons, jusqu’à ce qu’il attrape
ce virus et qu’il fasse une réaction allergique aux antibiotiques. Cependant, le
risque était qu’il devienne dépendant à l’assistance respiratoire, donc c’est bon
signe s’il s’oxygène seul. Toutefois, ce genre de guérison est longue, nous allons
donc devoir être patients. Nous en saurons plus d’ici deux à trois jours, mais
pour l’instant, je dirais que ses chances se sont améliorées.
Il sourit à Maddy et moi, puis il referme le dossier de papa et s’en va.
– C’est bien, non ? demande Maddy en avançant vers moi, l’air craintif.
Ses lèvres tremblent, comme lorsqu’elle était petite et qu’elle essayait d’être
courageuse. Je la prends dans mes bras et nous nous serrons fort l’une contre
l’autre.
– Je crois, oui, ma chérie. Vraiment. Papa est fort. Il a traversé de sacrées
épreuves, c’est vrai, mais ses filles l’attendent à la sortie, ce n’est pas rien quand
même.
Max nous rejoint et nous encercle de ses grands bras.
– Bien sûr que ce n’est pas rien. Croyez-moi, Mesdemoiselles, vous êtes une très
bonne raison d’ouvrir les yeux.
– Je suis d’accord, dit Matt en souriant à ma sœur.
Il marque encore un point, celui-là. Il est resté aux côtés de ma sœur depuis le
début, n’acceptant de la quitter que lorsque les visites lui étaient interdites,

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revenant auprès d’elle dès qu’il le pouvait. Ses parents viennent deux heures par
jour, également. Les Rains sont des gens remarquables et Maddy sera choyée
toute sa vie, avec eux.
Tu as fait du bon boulot, Mia, je me félicite. C’est la seule chose que j’aie
réussie dans ma vie. J’ai élevé ma sœur pour qu’elle aille loin, qu’elle vise
toujours plus haut et qu’elle ne manque de rien. Elle est sur le chemin de la
réussite et je suis folle de joie pour elle. Maintenant, si un peu de son karma
pouvait briller sur moi et me ramener Wes et papa, ce serait super.
Sur ce, je sors mon téléphone de ma poche et réponds à la seule personne sur
terre que je ne veux surtout pas voir, quel qu’en soit le coût.
À : Blaine Enfoiré Pintero
De : Mia Saunders
Tu mangeras seul vendredi soir. Va falloir t’y faire.
Qu’il aille se faire voir !
*
* *
Quelques heures plus tard, je reçois enfin l’appel tant attendu.
– Allô, Warren ?
– Salut, Mia.
Sa voix n’est ni chaleureuse ni froide. Elle est pleine de tristesse. Mon Dieu,
non.
Je m’assieds sur la table basse et me prépare au pire. Max plonge son regard
dans le mien et pose une main sur mon genou. Je la lui prends et la tiens si fort
que mes phalanges blanchissent.
– Dis-moi, est-ce qu’il est mort ?
Les deux secondes de silence qui s’ensuivent semblent durer une éternité. Je
n’oublierai jamais à quel point je me suis sentie détruite. Brisée. Jamais plus je
ne veux ressentir cela.
– Non, ma chérie, il n’est pas mort, dit-il avant de se racler la gorge.
– Il est à l’hôpital ?
Warren soupire longuement et je devine sa réponse. Je le savais, bon sang. Il est
en vie, mais il ne me reviendra pas. L’homme que j’aime, celui avec lequel je

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veux passer ma vie et pour lequel j’ai mis sept mois à démolir les barrières qui
entouraient mon cœur, est détenu par un groupe de terroristes, pendant que je
suis ici, assise sur la table basse de la chambre d’hôtel où je vis pendant que mon
père se bat pour survivre à l’hôpital. Ma vie est sens dessus dessous et je ne sais
pas par où commencer pour la remettre en ordre.
– Écoute-moi, Mia, le Président et le secrétaire d’État sont sur le coup. Les
États-Unis ne négocient pas avec les terroristes, mais nous sommes en discussion
avec le gouvernement indonésien.
– C’est là qu’ils étaient quand ils ont été attaqués ?
– Non, ils filmaient dans une région reculée du Sri Lanka qui est considérée
comme dangereuse. Le nord de l’île n’a pas connu d’attaque terroriste depuis
2009 et l’armée n’a pas de base aussi loin.
– Qu’est-ce qu’ils faisaient là-bas si c’est dangereux ?
– Apparemment, les producteurs ont appris qu’il y avait des endroits
magnifiques là-bas, et ton mec voulait que la scène soit parfaite.
Bon sang, Wes. Il fallait qu’il veuille se dépasser dans son nouveau rôle de
directeur.
– Quel idiot, je marmonne.
– Quoi qu’il en soit, les otages incluent Weston et Gina DeLuca, l’actrice
principale du film.
– Gina DeLuca, je répète en serrant les dents.
– Ils sont détenus avec six autres hommes. C’est grave, Mia. Mais je dois encore
te dire quelque chose.
Je devine que ce qu’il est sur le point de m’annoncer risque de m’anéantir. Je
déglutis en serrant plus fort la main de Max, qui est chaude, ferme et pleine
d’amour.
– Une vidéo a été envoyée à l’armée et on nous l’a transférée.
– Qu’est-ce qu’il y a dans cette vidéo, Warren ?
Je frissonne, et mon ventre se noue si fort que je ne peux plus respirer.
– Dans la vidéo, ton copain est en train de parler. Il est à genoux, face à la
caméra, avec un autre membre de l’équipe de production. Ils le forcent à lire un
texte.

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Warren se tait et j’entends son souffle rauque au bout du fil. Mes larmes se
mettent à couler, comme si mon corps savait déjà que la situation est passée de
grave à horrifique. Max essaie d’essuyer mes larmes, mais je secoue la tête.
– Il dit qu’ils veulent montrer aux Occidentaux ce qui va leur arriver s’ils
souillent leur pays avec leur politique ignoble et leurs croyances répugnantes.
Ma chérie, pendant que Wes parlait, un homme masqué a levé une machette et a
décapité l’autre membre de son équipe.
– Mon Dieu, non. Bon sang, non ! je crie.
Max saisit le téléphone et le met sur haut-parleur.
– Qu’est-ce qu’il a dit ? grogne Max comme un ours prêt à protéger son petit.
– Ils ont décapité quelqu’un sous ses yeux ! je répète en sanglotant.
Les traits de Max se durcissent et il serre mon bras.
– Ressaisis-toi, Mia. Tu ne peux pas te permettre de craquer. Quoi d’autre,
Monsieur Shipley ? Vous pouvez parler librement, je suis Maxwell Cunningham,
son frère.
Warren tousse dans le téléphone, puis il nous explique que les terroristes ont pris
un bateau avec les huit otages et qu’ils se sont rendus en Indonésie où ils
peuvent se cacher plus facilement. Notre armée pense savoir où ils sont, et après
l’envoi de cette vidéo, des troupes vont se rendre dans les cinq endroits où ils
pourraient être. Ils sont en train de rassembler les forces spéciales et, lorsqu’ils
sauront où sont détenus les otages, ils passeront à l’action. Il se pourrait qu’on
doive attendre plusieurs jours avant de connaître le résultat de l’intervention.
Lorsque Warren raccroche, je suis stupéfaite et sans voix. Mon surfeur
décontracté et généreux, l’homme de mes rêves, a vu un de ses coéquipiers se
faire décapiter. Connaissant Wes, c’est un ami qu’il a perdu. Comment est-il
censé s’en remettre ? Je ferai tout mon possible pour l’aider et je serai à ses côtés
jusqu’au bout. S’il survit, j’embrasserai chacune de ses blessures physiques et
psychologiques. Je le guérirai avec des mots tendres, mon corps et plus d’amour
qu’il n’en a jamais reçu.
– Je t’aime, Wes, je dis à voix haute.
Même s’il est au bout du monde, peut-être qu’il m’entendra ou qu’il sentira mes
paroles, contre sa peau, dans son cœur, dans son âme.

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Chapitre 5

Cela fait deux semaines que je suis à Las Vegas et j’ai atteint un tout autre
niveau de zombie-attitude. Maddy et moi nous déplaçons sans nous toucher
comme ces petits robots qui lavent les sols automatiquement sans jamais se
tamponner. C’est comme si nous étions en mode pilote automatique. Peut-être
aurions-nous justement besoin de ce contact, mais aucune de nous deux n’arrive
à faire l’effort. Cela fait deux jours qu’ils ont débranché le respirateur de papa. Il
respire seul et son traitement le débarrasse enfin de l’infection. Les médecins
sont plutôt contents.
Maddy et moi le sommes aussi, mais le fait qu’il ait encore des tubes partout ne
nous ravit guère. Maddy et Matt reprennent les cours dans une semaine et il leur
faut revenir à la normale. C’est leur dernière année de licence et, comme
d’habitude, ma sœur s’évertue à prendre autant de cours qu’elle le peut.
Secrètement, j’adore le fait qu’elle s’impose une telle charge de travail, car cela
signifie qu’elle ne va pas passer le cap du mariage trop tôt.
En parlant de cela, il faut encore que je parle à Matt de la pression qu’il a mise à
ma sœur pour se marier. S’il l’aime, il va falloir qu’il attende, qu’il finisse ses
études et qu’il lui montre le genre d’homme qu’il peut être. Je me demande aussi
comment il va prendre l’intérêt de Maddy pour Cunningham Oil & Gas. Est-ce
qu’il refusera d’aller au Texas ? Sa famille est ici et ils sont très proches, la
quittera-t-il pour Maddy ? Je suppose que le temps me le dira.
Mon téléphone sonne dans la poche arrière de mon jean. C’est une vidéo
provenant d’un numéro masqué. J’ouvre le message et ce que je vois m’anéantit.
Je n’ai pas encore lancé la vidéo, mais je reconnaîtrais ce visage entre mille.

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Ginelle. Ses yeux sont bandés, elle saigne du nez et le sang coule dans sa bouche
et sur son menton.
Qu’est-ce que j’ai fait, bon sang ?
Sans un mot, je cours dehors, dans le patio, et je clique sur « marche ». La vidéo
démarre et la voix effrayée de Ginelle me fend le cœur. Les larmes coulent sous
le bandeau noir et sur ses joues. Sa lèvre inférieure est fendue, enflée et pourpre.
La caméra fait un zoom arrière et je découvre qu’elle est vêtue de son costume
de scène. Ses plumes et ses sequins sont déchirés et une main d’homme apparaît
dans le champ. Ses doigts charnus et boursoufflés caressent son décolleté, entre
ses seins. J’ai envie de crier, de hurler et de jeter mon téléphone, mais je ne le
peux pas. Gin est quelque part, souffrant aux mains d’un des molosses de Blaine.
Cet enculé s’en est pris à ma meilleure amie. Je n’aurais jamais pensé qu’il la
kidnapperait. Horrifiée, je le regarde saisir sa gorge et faire mine de l’étrangler.
– Mia ! crie-t-elle.
Je m’accroupis tandis que tout devient noir autour de moi. Le soleil n’existe
plus, le jardin a disparu. Il n’y a que moi, les ténèbres et la détresse de ma
meilleure amie.
– Dis-le, pouffiasse ! gronde la brute en serrant plus fort son cou.
Elle tousse et hoche la tête.
– Mia… euh… dîner à sept heures… ce soir. Tu sais où. Si t’appelles les flics,
ils…
Elle perd sa voix et l’homme la secoue violemment. Son nez saigne de plus belle
dans sa bouche et elle se lèche les lèvres avant de crier quand il empoigne ses
cheveux.
– Ils me tu… tueront s… si t… tu le dis à quelqu’un.
La caméra recule et elle chuchote.
– Pas ta faute. Je t’aime, Mia.
L’écran devient noir et la sonnerie de mon téléphone me fait sursauter.
À : Mia Saunders
De : Blaine Enfoiré Pintero
C’est une jolie petite poupée. Mon ami l’aime beaucoup. 19h pétantes. Sois là.
Je réponds en un temps record sans prendre le temps de me relire.

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À : Blaine Enfoiré Pintero
De : Mia Saunders
J’y serai. Je t’en supplie, ne lui fais pas de mal.
Il répond immédiatement, et son message me file la nausée.
À : Mia Saunders
De : Blaine Enfoiré Pintero
Ne me défie plus, sinon je le laisse se défouler sur elle. Fais-toi belle.
Je me laisse tomber par terre et une douleur affreuse explose dans mon coccyx,
mais ce n’est rien à côté de celle qui s’empare de mon cœur. Blaine et ses brutes
détiennent Ginelle, des terroristes ont pris Wes en otage et papa est dans le
coma. Ma vie s’est transformée en un mauvais film d’action dont je suis
l’héroïne sans ressources.
Je n’ai d’autre choix que d’obéir à Blaine. Il veut que nous nous retrouvions
dans « notre resto » et j’y serai. Quel enfoiré !
Il fait référence au Luna Rosa, le restaurant italien où il m’a emmenée pour notre
premier rencard. Nous étions assis dans le patio, face au lac de Las Vegas. Des
guirlandes blanches scintillaient dans les palmiers et donnaient à sa peau une
lueur irréelle. J’étais complètement dingue de lui à l’époque. Il était grand, il
avait quelques années de plus que moi, et ses cheveux noirs étaient parfaits. Il
aurait pu être mannequin, avec son corps et son visage. Ses yeux verts et jaunes
étaient irrésistibles, il envoûtait n’importe quelle nana d’un simple regard.
Blaine m’a ensorcelée dès la première fois que je l’ai servi dans le casino où je
travaillais, il y a sept ans. Ce soir-là, il est entré, il a commandé un whisky et il a
passé vingt minutes à m’observer en sirotant son verre. Ses yeux n’ont pas quitté
mes fesses et mes seins, et je me suis sentie désirable pour la première fois
depuis que Benny avait disparu.
Quand je lui ai donné son addition, il a payé et m’a donné un pourboire de cent
dollars avant de partir sans un mot ni un regard. Sur le moment, je me suis dit
que j’avais mal interprété ses signaux et que je ne devais pas lui plaire tant que
ça. Je me suis dit que j’avais été une bonne distraction en plus des écrans télé au-
dessus du bar. Je n’y ai plus pensé, ravie des cent dollars qui allaient payer une
autre semaine de courses pour ma sœur et moi.

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Lorsque je suis sortie attendre un taxi, à la fin de mon service, une chaussure
brillante est sortie d’une BMW aux vitres teintées, et Blaine a proposé de me
ramener. Sa voiture était canon, mais ce n’était rien à côté de son propriétaire.
Bien évidemment, l’idiote de vingt et un ans que j’étais est montée avec le bel
inconnu et l’a laissé la ramener chez elle. Il ne m’a pas sauté dessus le premier
soir. Il s’est comporté en parfait gentleman, m’escortant jusqu’à ma porte et
m’embrassant sur la joue avant de me demander s’il pouvait m’inviter au
restaurant le lendemain. J’ai accepté, et nous avons commencé la soirée au Luna
Rosa. Nous avons commandé des pizzas et du vin à cinquante dollars la
bouteille. J’ai trouvé ça super-cool parce qu’il aurait pu m’emmener dans un
restaurant gastronomique et me gaver de caviar pour essayer de m’épater, mais il
a préféré une simple pizzeria. Nous avons parlé, bu deux bouteilles de vin et
dégusté le meilleur tiramisu que j’aie jamais mangé.
Ainsi, une fois par mois, durant les deux années que nous sommes restés
ensemble, nous sommes retournés dîner dans « notre resto » pour nous gaver de
pizza et de vin. Ensuite, nous titubions jusqu’à sa voiture et un de ses gardes
nous ramenait au casino. Parfois, nous étions si excités dans l’ascenseur qu’il
était déjà en moi quand les portes s’ouvraient sur le penthouse, où il me prenait
contre le mur. Blaine se fichait que des gens nous voient, et j’adorais ça.
Je pensais l’aimer et je croyais qu’il m’aimait aussi.
J’étais si jeune, si bête et si entichée de lui que je gobais tout ce qu’il me disait,
me laissant vivre au jour le jour, mais plus maintenant. J’ai appris la leçon, et si
Blaine pense qu’il va marquer des points en m’invitant au Luna Rosa, il se
fourre le doigt dans l’œil.
*
* *
Je n’ai pas rapporté de tenue habillée de chez Max car nous sommes restés dans
son ranch, profitant simplement de son beau domaine. Ma poitrine se serre en
pensant à lui. Lorsque les médecins ont annoncé que papa allait mieux, il est
rentré à Dallas pour voir sa femme et sa fille. Cyndi accouche dans un mois, et il
doit s’assurer que la passation d’actions se déroule sans encombre et qu’il n’y a
pas de problème au bureau.

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Je n’ai jamais espéré être riche. Cependant, je ne peux m’empêcher de penser
que si la transition va plus vite et que j’accède à ma part plus rapidement, je
pourrai peut-être rembourser Blaine et mettre fin à ce cauchemar. Je repartirai à
Malibu, je ferai du surf et j’embrasserai l’homme auprès duquel je veux passer le
reste de ma vie. Hélas, Max m’a dit qu’il allait devoir utiliser nos tests ADN
comme preuve que nous sommes liés par le sang et que tout cela allait prendre
du temps – mais que ça en vaudra la peine.
Si je survis à cet enfer, peut-être découvrirai-je que Max avait raison. Pour
l’instant, j’ai du mal à voir la lumière au bout du tunnel. J’ai l’impression d’être
en plein ouragan, au volant d’une voiture sans phares, sans essuie-glaces et sans
freins.
*
* *
J’arrive au Luna Rosa à dix-neuf heures pétantes. Maddy m’a prêté une des
robes choisies par Hector à Chicago, que je lui avais donnée. Elle est plutôt
simple, couleur aubergine, avec un grand V dans le dos. La jupe m’arrive à mi-
cuisse et le tissu s’étire joliment sur mes seins. Si je n’étais pas aussi dégoûtée de
la mettre pour un tel enfoiré, je me serais sentie superbe, or, j’ai l’impression
d’être vêtue d’un sac-poubelle, même si je suis la seule à le penser. Une couche
épaisse de fond de teint cache mes cernes et une bonne dose de blush me donne
bonne mine. Heureusement, je fais partie des femmes qui n’ont pas besoin d’être
beaucoup maquillées pour attirer l’attention des hommes et je connais les goûts
de Blaine. Mes cheveux sont ramenés sur une épaule et rassemblés par un
élastique, car c’est une de ses coiffures préférées.
Je traverse la salle et je le vois dehors, sur le patio. Bien évidemment, il a choisi
l’endroit le plus romantique, la table où nous avons dîné la première fois. Il se
lève en me voyant et ses yeux m’inspectent des pieds à la tête, comme un
prédateur qui évalue sa proie.
– Tu essaies de marquer des points en choisissant cette table ? je demande en
m’asseyant, sourcils froncés.
De son côté, il sourit jusqu’aux oreilles.
– Je vois que tu n’as pas oublié. C’est bien, jolie Mia.

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Mon Dieu, je déteste l’entendre m’appeler ainsi. Il passait son temps à me dire
combien j’étais belle et que jamais aucune autre femme ne pourrait lui plaire
après moi. Bien sûr, c’était sans parler de sa secrétaire et de sa sœur jumelle. Qui
se tape deux sœurs, de toute façon ? C’est dégoûtant.
Je n’ai pas le temps de répondre, car le serveur apporte le vin, bon sang, je
reconnaîtrais l’étiquette n’importe où.
– Le cabernet sauvignon que vous avez demandé, signore. Un Cignale Colli
Della Toscana Centrale.
Il verse le liquide bordeaux dans le verre de Blaine, qui le prend, le fait
tournoyer, le renifle, puis boit une gorgée. Quel prétentieux !
– 2006 ? demande-t-il au serveur.
– Absolument, signore.
Blaine hoche la tête et le serveur remplit nos verres. Je saisis le mien et le vide
d’un trait. Mon ex regarde autour de nous et sourit avant de poser un bras sur la
rambarde qui domine les eaux calmes du lac de Las Vegas.
– J’aimerais un autre verre.
Il sourit de plus belle et me ressert. Cette fois-ci, je le sirote doucement en
attendant qu’il parle, mais il reste silencieux un long moment. Il se contente de
me regarder et de détailler mon apparence. Je finis par craquer, ne supportant
plus le silence.
– Où est Ginelle ?
Ses yeux de serpent s’assombrissent.
– On s’occupe d’elle, ne t’en fais pas, répond-il d’une voix doucereuse qui me
donne la nausée.
– Ah oui ? C’est comme ça que tu décris le fait de kidnapper une femme
innocente pour la tabasser ? Tu t’occupes d’elle ?
Je tiens si fort la table que je ne serais pas surprise que mes ongles y laissent leur
marque.
– Mia, tu sais aussi bien que moi que si je voulais tuer ton amie, elle serait déjà
morte. Maintenant, détends-toi pour qu’on puisse profiter de notre rencard.
Un rencard ? Ce malade pense que ce chantage est un rencard ? Je cligne
rapidement des yeux, essayant de dissiper ma rage. Je n’ai qu’une envie, saisir le

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couteau et le planter dans son cœur de glace. Hélas, cet enfoiré ne le sentirait
même pas puisqu’il est déjà mort à l’intérieur.
– Je ne comprends pas pourquoi tu as demandé que je vienne ici. Tu sais
parfaitement que je te rendrai ton argent. Je n’oserais jamais te rouler, je
chuchote en regardant autour de nous.
– Ma jolie, jolie Mia, tu ne sais donc pas que c’est toi que je veux rouler ? De
préférence par terre ou dans un lit ? répond-il en jouant des sourcils et en
souriant.
Je ravale la bile qui remonte dans ma gorge et menace de jaillir sur la table. Il fut
un temps où j’étais folle de ce type. Il est incroyablement beau, follement
charmeur, et c’est un super-coup. À présent, j’ai du mal à le regarder sans avoir
la nausée.
– Blaine, tu m’as pris quelque chose qui m’est très cher et tu veux parler de sexe
?
– Je ne veux pas en parler, non. Je préférerais le faire, si c’est ce que tu veux
savoir.
– Oublie ça tout de suite. Tu as perdu ce privilège en t’octroyant ta petite
sauterie, tu te souviens ? Ça n’arrivera plus jamais, je réponds d’une voix ferme.
Il secoue la tête et fait de nouveau tourbillonner son vin.
– Ces pétasses n’étaient rien pour moi. J’avais juste besoin de me détendre
puisque tu n’avais pas répondu oui à ma demande.
– En couchant avec deux autres femmes ?
– Bien sûr, Mia. Un homme a sa fierté. Tu avais blessé la mienne, répond-il
comme s’il était de son droit de coucher avec les premières venues.
– Alors, tu t’es tapé deux putes pour te donner l’impression d’être un homme ?
Son regard s’assombrit et sa voix devient glaciale.
– Tu n’insinues pas sérieusement que je ne suis pas un homme, si ?
– Pourquoi parle-t-on de ça, de toute manière ?
– Ce n’est pas évident ? demande-t-il.
– Pas pour moi, non.
Je ne suis là que pour une raison : Ginelle.

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Blaine pose les coudes sur la table et son menton dans la paume de sa main. Il
est la sérénité incarnée alors que je suis morte de peur et rongée par le stress.
– Je veux te récupérer. Dans mon lit. Dans ma vie. Je veux que tu sois ma
femme.
Ses paroles ont l’effet d’une bombe. Je regarde autour de nous pour savoir si les
autres ont survécu à l’impact, mais il n’y a que ma vie misérable qui semble
avoir été touchée. Inutile de dire que je ne m’y attendais pas. J’aurais été moins
surprise par le retour de Jésus, bon sang !
– Blaine, je chuchote d’une voix rauque, tu n’es pas sérieux ?
– Bien sûr que si. Et je suis prêt à négocier les termes de l’accord. Ici, et
maintenant.
– C’est un cauchemar, ça doit être un cauchemar ! Blaine, tu t’entends ? Tu
viens de me dire que tu veux reprendre où nous nous sommes arrêtés quand nous
avons rompu.
– Je sais ce que je veux, et c’est toi. Je pense avoir été clair. Maintenant, tais-toi
et écoute ce que j’ai à te proposer.
Je m’exécute, non pas parce qu’il me l’a ordonné mais parce que je suis
tellement choquée que je n’arrive pas à répondre. Cet homme est complètement
dingue. Il n’y a pas d’autre explication possible.
Le serveur nous apporte deux pizzas, une margherita et une royale, et j’en ai
l’eau à la bouche. Cela fait deux jours que je n’ai pas vraiment mangé. Les Rains
et Maxwell ont bien essayé de me faire grignoter quelque chose, mais je n’ai
plus d’appétit depuis que je sais que Weston croupit quelque part et que papa est
nourri par un tube. Ce soir, je vais manger, pour la simple raison que la soirée
sera finie plus vite.
– J’ai eu le temps de réfléchir à notre couple, depuis que tu es partie.
Depuis que je suis partie ? On a rompu ! J’ai déménagé dans un autre État ! Je
suis escort depuis neuf mois et cela faisait déjà six mois que j’habitais à Los
Angeles avant ça. Ça fait plus d’un an que nous ne sommes plus ensemble et il
parle comme si je l’avais quitté la semaine dernière. C’est insensé !
– Blaine, je suis partie depuis plus d’un an…

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– Peu importe le temps ou la distance, dit-il. Tu es là maintenant, et j’ai décidé
que tu étais la femme de ma vie.
– Tu es parvenu à cette conclusion monstrueuse avant ou après t’être tapé les
jumelles ?
– J’essaie d’avoir une conversation sincère avec toi, Mia, grogne-t-il. Tu ferais
bien de surveiller tes manières. Je ne vais te faire cette proposition qu’une fois.
– Pas de deal. Je ne suis pas intéressée par ce que tu vends.
Il recule dans la chaise et croise les bras.
– À mon avis, tu ne pourras pas refuser. Mais pour cela, il faut que tu m’écoutes.
Tous tes problèmes seraient réglés et tout redeviendrait normal. On serait
ensemble et on dirigerait tout ça, dit-il en ouvrant les bras pour désigner toute la
ville.
Quel prétentieux !
– Non, Blaine. Tu m’as déjà offert tout ça et je suis partie, tu te rappelles ? Je
pars, encore une fois, je déclare en me levant et en tournant les talons. C’était
une erreur. J’appelle les flics.
– Ta copine sera morte à l’aube, dit-il, juste assez fort pour que je sois la seule à
l’entendre.
Je me retourne, folle de rage. J’en ai la chair de poule en entendant le ton de sa
voix. Ce ton que j’ai entendu par le passé quand il aboyait des ordres au
téléphone, obligeant les gens à payer, faisant souffrir tous ceux qui osaient le
défier en cherchant les moyens les plus violents et les plus dégoûtants. Voilà
celui à qui j’ai affaire. Ce n’est pas l’ex que j’embrassais, que je câlinais et qui
me faisait l’amour. Lui, c’est l’homme dont je suis tombée amoureuse. Or, je
suis face à son alter ego et je suis dans son monde.
– Qu’est-ce que je dois faire pour que tu la libères ?
Je regarde autour de nous et découvre que la plupart des clients nous regardent
ouvertement, curieux de ce qu’ils prennent pour une querelle entre amoureux.
– J’étais nostalgique, tout à l’heure, d’être ici, face à toi. J’ai cru que tu étais
celle que je voulais pour le reste de mes jours. Maintenant que tu t’es ridiculisée,
dit-il alors que son regard s’assombrit, et que tu m’as fait honte, je ne me sens
plus d’humeur aussi généreuse.

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– Tu veux combien ? je réponds simplement.
– Les quatre cent mille dollars que tu me dois, ou toi, pour une nuit.

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Chapitre 6

Les yeux de Blaine, dans lesquels je plongeais chaque fois qu’il m’embrassait,
qu’il me touchait, qu’il me faisait l’amour, sont vitreux et d’un vert jaune
lumineux. La conversation que nous venons d’avoir, qui me donne envie de me
rouler en boule et de mourir, l’excite. Cet homme est un psychopathe.
– Alors, qu’est-ce que tu en dis ?
Je me lèche les lèvres et je bois une énorme gorgée de vin en regardant l’eau
calme du lac. Je pourrais mettre fin à tout ça en couchant avec lui. Je l’ai déjà
fait, et c’est un super-coup, il l’a toujours été. C’était un amant généreux,
affectueux, soucieux de mon plaisir. Je pourrais vider quelques bouteilles de vin
et me livrer à lui pour que tout soit fini.
– Si je passe la nuit avec toi, tu effaceras ma dette, tu libéreras Ginelle et tu
laisseras ma famille tranquille ? Y compris mon père ?
Un sourire arrogant s’étend sur ses lèvres. Si je pensais que cela change quoi que
ce soit, je le giflerais pour lui enlever cet air suffisant et je ferais en sorte que
tout le monde sache combien je le déteste. Il boit une gorgée et gémit
doucement. Un frisson parcourt mes veines et mon estomac se contracte.
J’adorais ce bruit, auparavant. Je faisais tout pour le faire gémir, notamment à
genoux, sa queue entre mes lèvres. Maintenant, c’est comme un signal avant une
explosion, comme cette petite lumière rouge dans les films, qui survole le
criminel avant que l’unité spéciale ne lui mette une balle entre les yeux.
– Oui. La dette de ton père sera effacée, ton amie sera relâchée et je vous
oublierai, toi et ta famille.
Il baisse les yeux sur mon décolleté, penche la tête sur le côté et se lèche les
lèvres.

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– J’ai hâte de goûter à nouveau à ta chatte. De t’entendre crier quand je lèche et
mordille ton clito. C’est le plus beau son au monde.
Il aspire de l’air entre ses dents et son regard s’embrase. Je parierais tout l’or du
monde qu’il bande déjà en imaginant les choses qu’il voudrait me faire. Le seul
problème, c’est que je n’ai pas la même réaction. Avant, ses cochonneries
m’excitaient, plus maintenant. J’ai toujours aimé qu’on me parle grossièrement,
ça m’a toujours fait mouiller et Blaine le savait. Le problème, c’est que ce n’est
pas le bon mec, pas la bonne voix.
Je secoue la tête pour oublier les images de Wes et de moi au lit, nus et riant aux
éclats, profitant l’un de l’autre d’une manière qui est nouvelle pour moi. Nos
parties de jambes en l’air rapides, contre un mur, à nous en faire perdre la tête.
Des heures à n’utiliser que nos bouches, à embrasser chaque millimètre de peau
de l’autre. Je peux sucer Wes sans fin, jusqu’à ce que j’aie mal à la bouche et
que Wes ne puisse plus bander. Alors, il s’occupe de moi et me donne tant
d’orgasmes avec sa bouche que je m’évanouis de fatigue. Nos nuits à Miami,
ensemble, lorsque nous faisions l’amour et nous murmurions nos sentiments l’un
pour l’autre et nous promettions d’être ensemble à jamais, toutes ces choses sont
là dans ma tête. Tout revient à lui, à l’homme que j’aime. Je ne pourrais jamais
trahir sa confiance.
La vie de Ginelle a beau être en jeu, je ne peux pas faire ça à Wes. Il doit y avoir
un autre moyen. Blaine attend patiemment, avec une arrogance répugnante,
faisant tourbillonner son vin, tenant son verre entre ses longs doigts, comme s’il
avait tout son temps.
Pourquoi je n’ai pas remarqué ses défauts avant de m’enticher aveuglément de
lui ?
– Blaine, il va me falloir un peu de temps pour y réfléchir, je dis en battant
rapidement des cils dans une tentative désespérée de l’adoucir.
– Non. Tu décides maintenant, ce soir, rétorque-t-il sèchement.
Son corps se raidit et il serre si fort le pied de son verre que je croise les doigts
pour qu’il se brise. Hélas, fantasmer sur les différents moyens de lui faire mal ne
m’aidera pas à lui offrir ce qu’il veut pour sauver ma meilleure amie.

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– Et si j’ajoutais un petit quelque chose à ma requête ? je dis en enroulant une
mèche autour de mon index. Un bonus ? En échange, tu m’accorderais un peu de
temps pour réfléchir.
Il penche la tête sur le côté et plonge son regard dans le mien.
– Et que serait ce bonus, jolie Mia ?
– Un baiser, je réponds sur un coup de tête.
S’il y avait une chose que Blaine aimait, et qu’il m’a répétée des milliers de fois,
c’était m’embrasser. Une fois, il m’a même dit qu’il pourrait survivre
uniquement sur mes baisers, au diable le pain et l’eau. C’est mon seul atout. Le
reste n’est que du bluff. Je pense que si je l’embrasse et parviens à être
convaincante, le challenge lui plaira. Blaine aime la chasse et le suspense,
l’impatience d’obtenir ce qu’il veut.
– Tu es dure en affaires, ma jolie Mia. Quelles sont tes conditions ?
– Deux semaines, et tu libères Ginelle ce soir, immédiatement.
Il fronce les sourcils et serre le poing.
– Et comment suis-je censé savoir que tu ne vas pas disparaître et me faire faux
bond ?
– Tu me retrouverais, je réponds en riant.
Son regard s’illumine.
– Et puis, ce n’est pas comme si je pouvais sortir papa de l’hôpital et m’enfuir
avec Maddy et tous les gens que j’aime. Tu oublies que je connais ton mode
opératoire, Blaine. Je sais parfaitement que je ne serais en sécurité nulle part. J’ai
tort ?
Il recule sur sa chaise et gratte son menton avant de frotter sa lèvre inférieure
avec son pouce, un geste qui me faisait instantanément mouiller, à l’époque. Ce
soir, ma culotte est aussi sèche que le Sahara. Son charme, sa belle gueule, son
corps musclé ne me font plus rien. Aujourd’hui, il n’y a plus qu’un surfeur, aux
décisions catastrophiques, qui puisse m’exciter. Mon cœur se déchire en
repensant à Wes, mais je m’oblige à respirer calmement pour ne pas craquer. Je
suis face au diable et je ne peux pas montrer la moindre faiblesse. J’aurai tout le
loisir de pleurer quand je serai rentrée à l’hôtel.
– Non, tu n’as pas tort. Une semaine.

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Une vague d’excitation et de soulagement se précipite dans mes veines. Il cède.
Tout ça pour un baiser. Je pourrais me lever et faire une danse de la victoire,
mais je me contente de la faire dans ma tête.
– Très bien.
Blaine sort son téléphone et je retiens mon souffle. Il appuie sur quelques
boutons et le porte à son oreille.
– La fille. Ramène-la chez elle. Libère-la, dit-il avant d’écouter. Non. Ne la
touche pas. D’aucune manière. Si j’apprends qu’elle est blessée, c’est ta vie qui
sera en jeu. Qu’elle soit rentrée dans l’heure, déclare-t-il avant de ranger son
téléphone. C’est fait. Ton amie sera bientôt chez elle.
Je hoche la tête et finis mon verre. Dieu merci.
Ginelle est en sécurité. Pour l’instant.
– Je savourerai mon baiser plus tard, quand je te ramènerai. Ensuite, tu auras une
semaine pour venir à moi. Ton amie va vite être libérée et nous allons profiter du
reste de notre dîner. Mange. Il te faut des forces pour prendre ta décision cette
semaine.
*
* *
Lorsque nous arrivons à l’hôtel, Blaine me raccompagne à ma chambre.
– Donne-moi la clé, dit-il en tendant la main.
– Maddy est à l’intérieur avec son fiancé, je réponds en secouant la tête.
– Tu n’as pas ta propre chambre ?
Il se rapproche et je recule jusqu’à être plaquée contre la porte. Ce n’est pas une
bonne posture. Il faut que je garde le contrôle, sinon il pourrait aller trop loin.
– Tu n’entreras pas. N’oublie pas notre deal, un seul baiser.
Il approche encore et pose ses mains de part et d’autre de ma tête, m’empêchant
de bouger. Ses yeux s’assombrissent, prenant une teinte plus dorée. J’adorais
voir ses yeux changer de couleur, avant, surtout quand il était excité. Maintenant,
ça ne me fait plus rien.
– Oh, jolie, jolie Mia. Je n’oublie jamais le moindre détail des négociations.
Sa tête n’est plus qu’à quelques centimètres de la mienne et je sens son souffle
chaud sur mes lèvres.

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Je ferme les yeux et je pense à Wes. Je me rappelle que je fais ça pour Ginelle,
pour mon père, pour ma sœur, et pour me donner du temps, le seul élément qui
n’a jamais joué en ma faveur depuis que j’ai commencé ce voyage il y a neuf
mois.
Les lèvres moites de Blaine touchent les miennes, brièvement.
Wes. Pardonne-moi.
Lentement, je pose mes mains sur sa taille et je caresse son torse dur. Il grogne et
mordille ma lèvre inférieure. Je réponds en mordant la sienne et en la tirant dans
la chaleur humide de ma bouche. Blaine a toujours aimé que l’on s’amuse avant
d’en venir aux choses sérieuses. Il se plaque contre moi et appuie son érection
sur ma hanche. Une de ses mains descend sur mon sein pour le palper. J’ouvre la
bouche pour m’y opposer, mais il plonge sa langue entre mes lèvres. Son baiser
n’a rien d’hésitant, c’est celui d’un amant qui sait quand il doit donner et quand
il doit prendre, comme un partenaire de danse familier. Sa main effleure ma
hanche avant de s’arrêter sur ma fesse pour m’attirer contre lui et se frotter à
moi. Je ne peux retenir le gémissement qui m’échappe. Cela fait plus d’un mois
que je n’ai pas pu relâcher ma tension sexuelle et même si je déteste chaque
seconde de ce baiser, ses gestes se fraient un passage jusqu’à mon cerveau, dans
la partie réservée au plaisir qu’occupe Wes.
Tout à coup, ce n’est pas Blaine que j’embrasse. C’est la bouche de Wes que je
dévore. Je lève les mains pour tenir son visage et caresser ses joues. Je lèche
mon homme, je le taquine et le titille, profitant du bien-être que m’apporte sa
langue. Mon imagination me fournit l’odeur de Wes, ce parfum viril d’océan qui
me rend folle, et j’avance le bassin contre le sien, plongeant ma langue aussi loin
que possible dans sa bouche, me frottant à lui, comme un serpent s’enroulant
autour de sa proie. Wes.
– Bon sang, tu m’as manqué, Bébé, je dis dans sa bouche.
Il gémit et une bouffée de chaleur s’empare de moi. Ses mains sont partout, sur
ma taille, sous ma robe, sur mes fesses. Il frotte son érection à mon clitoris et je
retiens mon souffle. Je lève la jambe, plongeant mon talon aiguille dans sa
cuisse, l’obligeant à se rapprocher de moi. Les yeux fermés, je me frotte à mon
mec, à ce corps qui m’a tant manqué.

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– Mia, tu vas me faire jouir. Laisse-moi entrer pour que je te baise comme il se
doit, sinon je vais te prendre contre cette porte.
Cette voix. Ce n’est pas celle de…
– Wes ? je dis en ouvrant les yeux et en clignant plusieurs fois pour revenir à la
réalité.
Blaine cesse d’embrasser ma gorge. Ma peau se couvre de sueur et la panique
me saisit alors que je cherche mon souffle.
– C’est qui Wes, putain ?
Oh. Mon. Dieu. Je viens de frotter mes parties intimes sur Blaine en imaginant
que c’était mon copain ! Mon estomac fait un saut périlleux en s’apprêtant à tout
régurgiter. La porte à côté de la nôtre s’ouvre et Max observe notre posture. Ses
yeux deviennent noirs de colère tandis qu’il prend ma surprise pour de la peur.
– Lâche-la tout de suite ! rugit-il en faisant valdinguer Blaine sur le mur d’en
face.
Merde. Merde. Merde. Je ravale ma bile alors que je réalise vraiment que j’étais
sur le point de baiser Blaine en rêvant de Wes. Mon Dieu, j’aurais tout foutu en
l’air ! Wes ne me l’aurait jamais pardonné. Mon estomac fait un nouveau tour
sur lui-même.
– C’est toi Wes ? ricane Blaine.
– C’est qui ce connard ? rétorque Max en me fusillant du regard.
– Euh… c’est mon ex… euh… Blaine Pintero.
Blaine ajuste sa veste et l’époussette avant de la reboutonner.
– Mia et moi avons un long passé.
– Ouais, eh bien c’est toi qui t’apprêtes à faire partie du passé, répond Max en
saisissant sa gorge avec une vitesse surprenante. C’est toi l’enfoiré qui lui fait du
chantage ?
– Du chantage ? C’est ce qu’on faisait, Mia ? J’ai pourtant eu l’impression que
notre tête-à-tête te plaisait beaucoup il y a quelques secondes. Elle était sur le
point d’exploser comme le feu d’artifice du 14-Juillet.
Mon Dieu. Je n’ai le temps de rien faire. Max prend de l’élan et son poing
s’écrase sur la mâchoire de Blaine.
– Écoute-moi, sac à merde. C’est de ma sœur dont tu parles !

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Il secoue Blaine contre le mur. Sa tête tombe un instant sur le côté, mais il cligne
des yeux et revient à lui. Bon sang, ça craint !
– Tu as un frère ? dit-il en écarquillant les yeux.
– Euh, ouais. Max, lâche-le.
– Si je te revois poser les mains sur elle, continue Max en m’ignorant, je te
pourchasserai et je te dépouillerai vivant !
Il plaque de nouveau Blaine contre le mur, dont la tête frappe la surface avec un
bruit sourd.
– Putain, mec ! Lâche-moi, espèce de bête de foire ! rugit Blaine alors que ses
dents se teintent de sang.
Mon Dieu, je vois déjà sa joue enfler. Cependant, je ne peux pas avoir pitié de
lui après ce qu’il a fait à Ginelle et papa.
– Max, sérieusement, je vais bien. Blaine et moi sommes parvenus à un
arrangement, ce soir. Je vais très bien.
– Il va te laisser tranquille ?
Blaine soupire et se tient droit tandis que je pousse Max vers ma porte.
– Euh, on peut dire ça, oui.
– Je veux l’entendre de la bouche de ce connard, grogne-t-il.
J’essaie de le faire entrer dans la chambre mais je n’y parviens pas. Il est si
grand qu’il faudrait un bulldozer pour le bouger lorsqu’il n’en a pas envie.
Blaine sort son mouchoir en tissu de sa poche et s’essuie la bouche.
– Pas de souci, mon grand. Mia et moi avons trouvé un arrangement. Mia, je te
laisse avec ton… euh… ton frère, dit-il en regardant Max d’un air dégoûté.
Souviens-toi. Une semaine.
Il tourne les talons, appuie sur le bouton de l’ascenseur et les portes s’ouvrent
immédiatement. Deux secondes plus tard, il est parti.
Je me laisse tomber contre la porte alors que Max se passe la main dans les
cheveux.
– À quoi tu joues ? Tu te frottais à lui comme une chatte en chaleur ! Tu fais
quoi de Weston ?
Je soupire et le pousse sur le côté pour entrer dans ma chambre. Il me laisse
passer et me suit. Je jette mon sac par terre et fonce sur le minibar pour en sortir

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une mini-bouteille de vodka. Je l’ouvre, la bois cul sec et jette la mignonnette à
la poubelle.
– Tu as bu ton verre, maintenant parle-moi, dit Max en s’asseyant sur
l’accoudoir du canapé et en croisant les bras, comme pour me montrer qu’il n’a
pas l’intention de bouger.
– Rien. Ce que tu as vu n’était pas censé arriver, je réponds en prenant une autre
bouteille de vodka. Qu’est-ce que tu fais ici, de toute façon ?
– C’est une très bonne question, ma belle. Vois-tu, je m’assurais que tout était
prêt pour l’arrivée de mon fils, chez moi, quand j’ai reçu un appel paniqué de
notre chère petite sœur. Elle disait qu’elle ne t’avait jamais vue aussi stressée et
qu’elle était morte de trouille. Comme je suis ton grand frère et que je suis le
seul à être là pour toi depuis que ton mec a disparu, je suis vite revenu.
– Tu ne devrais pas être là. Ta place est avec Cyndi et Isabel. Elles ont besoin de
toi.
Je marche lentement vers le canapé avec la sensation affreuse de traîner un bloc
de béton à chaque pied.
– Je retournerai auprès d’elles dès que je saurai ce qui se passe ici. Maddy sait
que c’est grave. Pourquoi tu ne m’as pas appelé, Mia ?
Sa voix est fatiguée et pleine de cette douceur que j’aime tant. Le ton de sa voix
dit qu’il tient à moi, qu’il m’aime et qu’il ferait n’importe quoi pour me protéger,
c’est justement ce dont j’ai besoin en ce moment.
– Les molosses de Blaine ont kidnappé Ginelle et ils l’ont violentée pour
m’atteindre.
– Pourquoi ? Je croyais que tout était réglé. Le mois dernier, tu m’as dit que tout
allait bien, que tu gérais la situation, répond-il d’un ton accusateur.
Je suis saisie de colère et je me lève d’un bond pour faire les cent pas, pleine
d’une énergie dévastatrice.
– C’était réglé ! je crie. Mais l’état de papa a empiré et je n’ai pas pu travailler ce
mois-ci.
– Et alors ?
– Et alors ? Mon contrat dit que si un homme m’a réservée et que je lui pose un
lapin, je lui dois cent mille dollars !

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– Bon sang, Mia !
Il semble aussi fâché que moi, or ce n’est pas à lui de s’occuper de ça. C’est moi
qui m’occupe de cette situation toute seule, depuis le début, et jusqu’à
maintenant tout allait bien.
– Donc, comme Millie a dû rembourser le client avec l’argent que tu m’as payé,
je n’ai pas remboursé Blaine. Le mois prochain, je vais travailler tout le mois
avant de pouvoir lui envoyer le versement, donc je suis en retard, et il veut me
prouver qu’il peut m’atteindre dès qu’il le veut. C’est un cauchemar ! je
m’exclame en sanglotant et en me laissant tomber dans un fauteuil.
Max se lève et s’assied sur la table basse devant moi, faisant craquer le bois sous
son poids.
– Combien tu lui dois ?
– Là, deux cent mille.
– C’est tout ? répond-il en fronçant les sourcils.
– Non, tu ne comprends pas, je lui dois deux cent mille tout de suite. Pour août et
septembre.
– Chérie, tu lui dois combien en tout ? demande-t-il d’une voix plus douce.
– Quatre cent mille.
– Et quel est l’accord que vous avez conclu ce soir ?
Je lève la tête et plante mes yeux dans les siens, dans ses iris qui sont la copie
conforme des miens.
– Ça ne va pas te plaire.
– Sucre d’orge, cette situation est loin de me plaire, mais dis-moi quand même.
Je prends ses mains dans les miennes alors que les larmes se remettent à couler
sur mes joues.
– Soit je lui donne les quatre cent mille dollars que je lui dois…
Je déglutis plusieurs fois pour ravaler le nœud qui m’empêche de parler et
d’admettre ce que j’ai envisagé de faire.
– … Soit ?
– Moi. Pour une nuit.
Max se penche en avant et appuie son front contre le mien.
– Ma chérie, il faudrait que je sois mort pour te laisser faire ça.

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Je ricane intérieurement car ce que Max ne sait pas, c’est que Blaine est
justement le genre d’homme qui pourrait le tuer sans avoir le moindre remords.
Mon téléphone sonne et vibre contre ma cuisse. Je ne le laisse jamais hors de ma
portée au cas où j’aurais des nouvelles de Wes. Je regarde l’écran et panique en
voyant que c’est Ginelle.
– Allô, Gin ?
Je suis soulagée de l’entendre, de savoir qu’elle va bien.
– Je suis rentrée, dit-elle avant de raccrocher.

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Chapitre 7

Les chauffeurs de taxi de Las Vegas sont géniaux ! Il suffit d’agiter sous leurs
yeux un billet de cent dollars pour qu’ils enfreignent toutes les règles du Code de
la route. L’idée que ma meilleure amie est chez elle après avoir été kidnappée,
tabassée et libérée en l’espace d’une journée m’a laissée morte de trouille.
Lorsque le taxi s’arrête devant chez Ginelle, je lui jette les billets de vingt dollars
que je garde toujours dans mon sac pour les urgences, en plus des cent dollars
que je lui ai promis, et je me précipite hors du véhicule pour gravir les marches
de son perron. Plutôt que de cogner à sa porte comme une malade comme j’en ai
envie, je sors mon porte-clés en forme de planche de surf auquel sont attachées
cinq clés. L’une ouvre la maison de Wes, une autre celle de papa, la troisième est
celle de chez Maddy, la quatrième démarre Suzi, ma moto, et la dernière est le
double de chez Ginelle. Cinq objets métalliques qui représentent les personnes
que j’aime le plus au monde, même si j’ai désormais une horde de nouveaux
amis auxquels je tiens tout autant.
Je déverrouille la porte et j’entre sur la pointe des pieds. La lampe sur le
guéridon du canapé est allumée, mais la pièce est silencieuse. Je passe devant
son canapé bordeaux qui est bien trop grand pour la pièce mais qui est le plus
confortable de l’univers. Lorsque je m’y assieds, il prend la forme de mes
cuisses, de mes fesses et de mon dos, comme s’il cherchait à m’engloutir ou à
me faire un câlin. La cuisine et le couloir sont plongés dans le noir et je marche
lentement vers les chambres. Gin en garde toujours une pour moi afin que j’aie
toujours un endroit où dormir, où qu’elle aille. Voilà le genre d’amie qu’elle est.
La lumière de sa chambre est allumée et je frappe doucement contre le bois.
– Gin, c’est Mia.

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– Va-t’en, marmonne-t-elle d’une voix tremblante.
J’ouvre la porte et la découvre assise dans un coin de la pièce, toujours vêtue de
sa tenue de travail. Une croûte de sang s’est formée autour de son nez, de sa
bouche et sur sa gorge. Les sequins roses de sa robe brillent sous la lumière vive
et je réalise qu’en plus du plafonnier, les lampes de chevet et la lumière de sa
salle de bains sont également allumées. Je marche lentement vers elle et
m’agenouille devant son corps tremblant. Je pose une main sur son genou, elle
sursaute en claquant des dents. Des larmes coulent à flots sur ses joues, laissant
d’épaisses traces de mascara sur sa peau boursoufflée. Son œil s’empourpre déjà
et je me demande si sa lèvre n’aurait pas besoin d’un point de suture.
Une rage inouïe m’envahit soudain, si bouillante que je crains d’effrayer mon
amie. Consciente qu’elle a besoin de moi, je serre les dents aussi fort que
possible et je prends sur moi. J’entre dans une colère noire en voyant son petit
corps couvert de bleus et ses vêtements déchirés. J’inspire lentement et je prends
ses mains dans les miennes.
– Viens, ma chérie, je vais m’occuper de toi.
Ginelle secoue vivement la tête.
– Non, il f… faut que tu… tu partes. S’ils rev… reviennent, ils te prendront t…
toi. Il a d… dit qu’il voulait te… te reprendre Mia. C’est t… toi qu’ils veulent,
bégaie-t-elle en serrant si fort mon bras que je sais que j’aurai la trace de ses
doigts demain. Cette f… fois, il n’arrête… tera pas tant qu’il ne… ne t’aura p…
pas.
Cette pauvre fille est terrorisée et tout est de ma faute. Ils ont fait mal à ma
meilleure amie à cause de moi. Dieu merci, elle va bien, je vais tout faire pour
que cela reste ainsi. Je l’attire dans mes bras, et après quelques secondes, ses
larmes se transforment en sanglots et son corps est parcouru de spasmes violents.
Pendant vingt minutes, je la laisse exorciser ses peurs et ses angoisses. Elle
n’oubliera jamais ce qui lui est arrivé et j’imagine qu’elle regardera par-dessus
son épaule pendant longtemps, vérifiant par trois fois qu’elle a bien verrouillé sa
porte. Je suppose qu’elle aura besoin de consulter un psy pour s’en remettre
réellement. Quoi qu’il lui faille, je m’assurerai qu’elle l’obtienne.

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– Viens, ma chérie, on va te nettoyer, je chuchote en caressant lentement ses
cheveux.
Elle hoche la tête et me permet de l’aider à se lever. Lorsque je vois sa tenue, je
manque m’effondrer. Le devant est déchiré jusqu’au nombril, couvrant à peine
ses seins. La jupe est coupée sur les cuisses, comme si cet enfoiré avait voulu
voir de plus près ses parties intimes. Je lui fais faire demi-tour et je la guide dans
la salle de bains en mordant si fort ma langue que je sens un goût de sang. Je me
retiens de hurler et de détruire tout sur mon passage alors que je rêve de
retrouver ces connards et de les mettre six pieds sous terre.
Je fais couler l’eau de la douche et je l’aide à se déshabiller. Elle couvre
immédiatement ses seins alors que je les ai vus des millions de fois. Gin n’a
jamais été pudique et moi non plus. On se connaît depuis toujours, mais si cela
l’aide de se cacher, je ne dirai rien. Je vérifie la température de l’eau, puis
j’enlève mon t-shirt et mon jean, restant en soutif-culotte, et je nous pousse
toutes les deux dans la cabine.
Je prends toutes les précautions du monde pour inspecter ses blessures, regrettant
de ne pas pouvoir porter plainte. Blaine a soudoyé la plupart des flics de la ville
et ces enfoirés nous riraient au nez. Je mets une bonne dose de savon sur sa fleur
de douche et, comme avec une enfant, je lui dis de lever un bras, puis l’autre, un
pied, puis l’autre. Je remets du savon sur la fleur et la lui donne.
– Lave-toi les fesses et le minou, Gin.
Elle hoche la tête et obéit méthodiquement, comme si elle était un robot sous
mes ordres. Je prends le shampoing pour laver ses longs cheveux blonds, frottant
lentement son crâne en espérant soulager un peu de sa tension. Lorsque j’atteins
sa nuque, elle soupire, et je vois enfin ses épaules retomber un peu. Un point
pour Mia !
Je répète les mêmes gestes avec l’après-shampoing, m’assurant de ne jamais
toucher le reste de son corps. Enfants, puis adolescentes, nous nous sommes
douchées ensemble des centaines de fois, mais après aujourd’hui, je veux qu’elle
sache que j’agis par amour. Je veux qu’elle sache que je respecte son intimité et
que je serai là autant qu’elle le désire et qu’elle en a besoin. Cette femme est

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comme une sœur et je l’aime plus que tout. Si j’avais pu être prise à sa place, je
me serai volontiers portée bénévole.
– Ma chérie, lave-toi délicatement le visage avec ça, d’accord ?
Je lui tends le savon et elle frotte ses mains dessus comme si elle les réchauffait.
Je reprends le savon et elle ferme les yeux avant de m’obéir.
Chaque fois qu’elle approche de sa lèvre, de sa joue ou de son œil, elle grimace
de douleur, et chacun de ses gémissements accroît ma détermination à punir
Blaine pour ce qu’il a fait. Je veux qu’il paie, bon sang, pour le mal qu’il a fait à
Gin mais aussi à mon père. Prendre ma meilleure amie pour me prouver qu’il
peut encore m’atteindre était le pas de trop. Je dois trouver un moyen de me
débarrasser de lui. Je ne peux pas vivre ainsi, terrorisée qu’il s’en prenne à tous
les êtres qui me sont chers chaque fois qu’ils sortent de chez eux.
Lorsqu’elle a fini de se laver le visage, je regarde les dernières gouttes de sang
disparaître dans le siphon. Je sors de la douche et la laisse seule quelques
secondes, le temps de me sécher et d’aller dans sa chambre pour prendre des
sous-vêtements secs et propres. Gin a des courbes généreuses pour une femme si
petite, mais ses soutifs restent trop étroits pour moi et j’enfile une brassière de
sport. J’ouvre un autre tiroir et prends deux pyjamas. J’aurai le feu aux planches,
mais peu importe. Je me dépêche de le mettre et retourne auprès de Gin pour ne
pas la laisser seule trop longtemps.
Je découvre en passant la porte qu’elle n’a pas bougé. Elle est immobile, laissant
l’eau couler dans son dos, le regard perdu sur le mur carrelé. Je passe le bras
dans la cabine et éteins l’eau, puis je saisis la grosse serviette moelleuse et
l’enveloppe dedans. Elle ne proteste pas tandis que je la sèche mais ses yeux
restent rivés par terre, de côté, comme si elle était perdue dans ses pensées.
– Tu veux parler ?
Elle secoue la tête, le premier geste qu’elle fait spontanément sans que je lui aie
ordonné de le faire.
– D’accord, tu n’es pas obligée.
Elle ferme les yeux et inspire profondément et lentement. De nouvelles larmes
coulent sur ses joues, mais je ne dis rien. Si elle veut discuter, elle prendra les
devants. Pour l’instant, je vais me contenter de m’occuper d’elle et d’être là pour

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elle. C’est le mieux que je puisse faire. Une fois que je l’ai habillée, je la guide
vers les toilettes et rabats le couvercle pour qu’elle s’y asseye. Du bout du doigt,
je lève sa tête vers moi pour inspecter son visage. La coupure sur sa lèvre est
importante, mais elle guérira sans point de suture.
– Je reviens tout de suite, je dis en tournant les talons.
Cependant, je n’ai pas fait un pas qu’elle me retient par le débardeur.
– Ne me quitte pas, chuchote-t-elle d’une voix tremblante.
Je pose mes mains sur les siennes et détends ses doigts pour qu’elle me lâche,
puis je plonge mon regard dans ses beaux yeux bleus.
– Gin, je ne te quitte pas. Je vais chercher ta trousse de secours dans le placard
pour soigner ton visage, d’accord ?
Ses pupilles sont dilatées, comme deux énormes trous noirs. Elle tremble de la
tête aux pieds, mais elle hoche la tête. Je sors de la salle de bains lentement, mais
dès qu’elle ne peut plus me voir, je cours dans le couloir et fouille dans le
placard à la recherche de la trousse à pharmacie. Je remets ce qui est tombé à
mes pieds dans l’armoire et je retourne auprès de Ginelle. Encore une fois, elle
n’a pas bougé et je la trouve perdue dans ses pensées. Lorsque je m’approche, sa
peau se couvre de chair de poule.
– Une dernière chose.
Je cours à son armoire et sors son sweat à capuche préféré. Il est rose fluo avec
des sequins noirs dans le dos en forme d’ailes d’ange. Je couvre ses cheveux
mouillés avec la capuche puis je l’aide à passer ses bras dans les manches avant
de zipper la fermeture Éclair. Elle soupire, cache ses mains dans ses manches et
croise les bras.
Je fais de mon mieux pour ne pas lui faire mal en désinfectant ses coupures et en
les couvrant de pansements lorsque c’est possible, puis je lui donne deux
Ibuprofène.
– Ça soulagera la douleur. Tu as faim ?
Elle secoue la tête et je l’aide à se lever. Je retire la couverture de son lit et je
l’aide à s’y installer. Je fais le tour de la maison pour éteindre la lumière et
fermer la porte à clé, et j’envoie un message à Max et Maddy pour leur dire où je

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suis. Je retourne dans la chambre et m’allonge sur le côté, derrière Gin. Je la
prends par la taille et me blottis contre elle, nichant mon visage dans son cou.
– Tu es en sécurité maintenant. Je suis là Gin, je suis désolée. Je suis tellement
désolée que ça te soit arrivé, mais je te promets, je te jure que ça ne se reproduira
jamais. Promis.
Elle plaque mes deux mains contre sa poitrine et me serre fort contre elle. Une
fois encore, les larmes se remettent à couler. Je la tiens, l’apaise, lui chuchote
combien je l’aime jusqu’à ce qu’elle s’endorme. Puis, épuisée, je me laisse
happer par le sommeil.
*
* *
Un doigt caresse mon bras, léger comme une plume. J’ouvre les yeux et me
retrouve face au visage que je veux voir plus que je ne souhaite respirer.
– Tu es là, je chuchote, craignant qu’il disparaisse si je cligne des yeux.
Wes promène ses doigts sur mes deux bras, affirmant sa présence.
– Bien sûr, ma belle. Où veux-tu que je sois ?
Il penche la tête sur le côté et un sourire farceur s’étend sur ses lèvres.
Magnifique. Je déglutis pour ravaler toutes les émotions qui jaillissent à la
surface.
– Je pensais t’avoir perdu.
Wes se baisse pour déposer une série de baisers sur ma gorge puis ma poitrine,
par-dessus mon top Aubade.
– Le seul endroit où je vais, ma belle, c’est entre tes cuisses. Écarte-les, grogne-
t-il en les saisissant fermement.
Je lui obéis aveuglément, sans réfléchir, et j’ouvre mes cuisses pour lui. Il
s’agenouille et pose son pouce en plein sur mon clitoris, comme s’il avait une
vision aux rayons X qui lui permette de voir à travers ma culotte. Son doigt
tourne autour du monticule de chair qu’il ne quitte pas des yeux, concentré sur
ce qu’il fait.
– Regarde ça. Tu trempes déjà ta culotte.
Je gémis et soulève mon bassin, folle de désir.

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– Bébé… je chuchote, à bout de souffle en faisant tourner mon bassin en rythme
avec son pouce.
– Tu crois que je peux te faire jouir sans toucher ta peau nue ? Te faire crier de
plaisir rien qu’avec mon pouce ?
Son regard est brûlant de désir. Il se lèche les lèvres et je meurs d’envie de
l’embrasser. Il se met à titiller mon bouton de rose et je me cambre.
– Tu peux, Mia ? Moi, je pense que oui.
Il se penche en avant, appuyant sur mes cuisses avec ses coudes pour
m’empêcher de bouger. Il effleure mon clitoris avec son nez et inhale
profondément.
– Putain, Bébé, tu sens tellement bon. Tu m’as manqué. Ça m’a manqué de ne
pas pouvoir enfouir ma tête entre tes jambes. C’est le plus bel endroit sur terre.
Il frotte son nez de gauche à droite et je sens la chaleur mouillée de sa bouche à
travers ma culotte. Soudain, il aplatit sa langue et suce la dentelle mouillée,
grognant de plaisir. Je meurs surtout d’envie qu’il arrache le tissu d’un coup sec
et qu’il me lèche sans barrière.
– Wes…
Je remue le bassin jusqu’à ce qu’il m’immobilise de nouveau.
– Ne bouge pas, ma belle. Je veux forcer ton corps à accepter tout le plaisir que
je te donne.
Il lèche et suce mes lèvres et mon clito à travers ma culotte. Je suis bientôt si
mouillée qu’il n’importe plus que je ne sois pas nue. Le coton frotte ma chair, et
mon corps se contracte. La pression s’accumule dans mon bas-ventre avant de se
propager dans ma poitrine, de s’envelopper autour de mon cœur et de se
précipiter à travers mon corps qui convulse. Le plaisir m’électrifie, mais Wes ne
s’arrête pas. Il me maintient en place et m’oblige à accepter son plaisir pendant
de longues secondes, jusqu’à ce qu’il n’en puisse plus et arrache ma culotte pour
plonger sa langue en moi. Il agit avec tant de force que je remonte vers la tête du
lit. Il pousse des grognements animaux qui sont si excitants qu’ils suffiraient à
me faire jouir à eux seuls.
Il gémit, lèche, suce et mordille jusqu’à ce que j’en perde la tête. J’avance et
recule mes hanches contre sa tête en m’accrochant à ses cheveux. Il écarte mes

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lèvres et me suce si fort et si longtemps que je ne cesse plus de jouir.
Il finit par reculer la tête et essuyer sa bouche, puis il soulève mon bassin et
plonge sa queue profondément en moi. Un cri strident m’échappe et je tremble
d’être si parfaitement et délicieusement comblée.
– Mais réveille-toi, espèce d’obsédée !
Ginelle me secoue de la même manière que Wes me secouait dans mon rêve,
sauf que lui s’y prenait avec son sexe divin.
Cette nouvelle sensation est étrange. J’ai l’impression que de petits doigts
maigres secouent ma poitrine, c’est particulièrement agaçant. J’ouvre les yeux et
cligne plusieurs fois, réalisant où je suis. Dans l’appartement de Ginelle.
Je balaie la pièce du regard. Wes est parti. Nulle part en vue. Mince, ce n’était
qu’un rêve. Un rêve merveilleux qui m’a laissée trempée entre les jambes, ce qui
est loin d’être idéal alors que je suis au lit avec ma meilleure amie.
– Qu’est-ce qui t’arrive, bon sang ? demande-t-elle d’une voix rauque.
– Gin, je suis désolée. Je t’ai réveillée ?
Je me redresse sur mes coudes et je dégage mes cheveux de mon visage. Gin est
agenouillée dans le lit, ses boucles blondes formant un halo autour de sa tête.
Elle m’étudie de son bon œil alors que l’autre est fermé, mais elle n’a jamais été
aussi belle.
– Ouais, tu m’as réveillée en te frottant à moi ! s’exclame-t-elle en gloussant.
Espèce de salope !
– Tu mens ! je rétorque en écarquillant les yeux.
– Pas du tout ! Tu ne faisais que parler et gigoter dans ton sommeil, dit-elle en se
redressant et en caressant sa taille et ses seins. « Oh, Wes, Bébé, oui », gémit-
elle en souriant.
Elle se ravise immédiatement et porte sa main sur sa bouche.
– Aïe, se plaint-elle avant de me mettre un coup de pied dans la cuisse. Ne me
fais pas rire. Tu ne vois pas que je suis dans un sale état ?
Je couvre mon visage avec mes deux mains.
– Je suis désolée, Gin. Ça fait des semaines que Wes et moi ne nous sommes pas
vus. Hier soir, j’ai dû rouler une pelle à Blaine et heureusement que Max m’a
interrompue avant que les choses ne dérapent.

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– Tu as roulé une pelle à Blaine, le connard qui m’a fait kidnapper ? gronde-t-
elle alors que son œil devient noir de colère.
– Non ! Enfin, oui, mais je peux tout t’expliquer. Écoute-moi, s’il te plaît.
Ginelle pince ses lèvres et grimace de douleur avant de croiser les bras.
– Tu as intérêt à avoir une bonne raison de m’avoir réveillée en te frottant à moi
comme une folle.
Je lui raconte les évènements de la veille depuis le moment où j’ai reçu la vidéo
d’elle à l’accord que j’ai conclu avec Blaine qui comprenait un baiser en
échange d’une semaine de réflexion et de sa libération. Elle semble bien plus
calme lorsqu’elle comprend que je l’ai fait pour elle. Cependant, elle s’inquiète
que je me sois autant laissée happer par le baiser. Cela m’inquiète, moi aussi,
mais pour de tout autres raisons.
Je ne veux bien évidemment pas coucher avec Blaine, et je n’ai aucune envie de
trahir Wes en baisant avec mon ex pour effacer ma dette. Toutefois, cela ne
m’aide pas à savoir comment je vais me sortir de ce pétrin.
– Alors, tu l’embrassais et tout à coup tu as imaginé Wes ?
– Ouais. C’était tellement réel. Blaine m’a embrassée, puis il s’est transformé en
Wes. Gin, si Max ne nous avait pas interrompus, je ne sais pas ce que j’aurais
fait.
– Tu étais à ce point perdue dans ton imagination ?
– Oui, je te promets, je sentais même son parfum et cette odeur d’océan qui le
suit partout.
Gin secoue la tête et sourit autant que le lui permet sa lèvre enflée.
– Tu es vraiment dingue de ce mec, hein ?
Je pense à Wes, à la souffrance qu’il doit endurer, et je ressens sa douleur dans
mes entrailles.
– Gin, je ne suis pas juste amoureuse de lui. C’est l’homme de ma vie.
Elle écarquille son œil ouvert.
– Tu veux dire que tu pourrais l’épouser ?
Le mariage… Je ne peux pas dire que j’en aie rêvé, étant donné que celui de mes
parents était un échec cuisant, tout comme celui de la plupart de mes amis

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d’enfance. Toutefois, en cet instant, assise sur le lit de ma meilleure amie, me
livrant à elle à cœur ouvert, je me surprends à hocher la tête.
– Je pense que oui, je chuchote.
– Waouh. T’es cuite, ma belle.
La triste vérité, c’est que Ginelle a raison. Si Wes ne s’en sort pas vivant, je
perdrai bien plus que l’homme que j’aime. Je perdrai aussi mon cœur et ma
raison.

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Chapitre 8

Lorsqu’elle apprend ce qui lui est arrivé, la patronne de Gin lui dit de prendre
tout le temps dont elle a besoin et Gin pose une semaine de congé. Toute la ville
connaît Blaine et sait qu’il contrôle les flics de Las Vegas. Ma meilleure amie et
moi ne sommes pas prêtes à nous séparer après le traumatisme d’hier, alors
Ginelle me suit à l’hôtel. On ne peut pas dire qu’elle aille bien, mais je vois
poindre le bout du nez de la femme fougueuse que je connais. Nous avons passé
la matinée à parler de Wes et de l’avenir de notre couple, pourvu qu’il me
revienne en un morceau. Elle a admis qu’elle s’était inquiétée qu’on emménage
ensemble aussi vite, mais qu’elle soutient notre relation maintenant qu’elle a vu
combien je suis gaga de lui. C’est aussi simple que ça.
Max est resté avec ma sœur pendant mon absence, et lorsque nous arrivons dans
la suite, ils sont assis dans le salon avec Matt, il y a assez de nourriture sur la
table basse pour nourrir toute une armée. Mon grand frère se lève lorsque nous
passons la porte et il me prend dans ses bras, me serrant si fort que j’en ai le
souffle coupé.
– Je me suis fait du souci pour toi, sucre d’orge. Je suis soulagé de te voir avec
ton amie.
Il me repose lentement et appuie son front contre le mien.
– Tu vas bien ? demande-t-il.
Je prends son visage dans mes mains et l’embrasse sur le front.
– Tout va bien, Maximus, je réponds en souriant.
Il se tourne vers Gin, qui se tient à l’écart, les bras croisés, se balançant
légèrement de gauche à droite.
– Coucou, ma belle, comment ça va ?

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Il lève la main vers son visage, mais elle bondit en arrière.
– Il ne devrait pas s’en tirer après ce qu’il a fait, gronde-t-il alors que ses yeux se
remplissent d’une colère noire.
– À qui le dis-tu, il a failli tuer papa. Cet homme et ses molosses sont des
monstres. Il faut juste que je trouve un moyen de mettre tout ça derrière nous.
Max est sur le point de répondre lorsque mon téléphone sonne. Je lève la tête et
découvre que tous les regards sont sur moi. Le raid est censé avoir eu lieu hier
soir en Indonésie. Je sors mon téléphone et vois le nom de Warren Shipley à
l’écran.
– Allô, Warren ?
– Oui, c’est moi, Mia. Il y a du nouveau, dit-il d’une voix calme et ferme. Tu es
assise ?
Je me précipite sur la chaise la plus proche et m’y laisse tomber, le téléphone
collé à l’oreille.
– D’accord, ouais, je suis prête. Ils l’ont trouvé ?
Mon cœur bat si fort que je le sens au bout de mes doigts et jusque dans mes
orteils. C’est comme si tout mon corps n’était qu’un énorme battement
cardiaque.
– Ils l’ont trouvé, mais ça a été un véritable bain de sang. Ils ont perdu beaucoup
de vies.
Je ferme les yeux et prie en silence pour tous ceux qui ne s’en sont pas sortis.
– Dis-moi ce qui s’est passé, et où est Wes ?
– Il est en sécurité. Ils le soignent dans un lieu gardé secret.
Tout à coup, l’enclume qui repose sur ma poitrine depuis dix jours disparaît.
Maintenant, il ne me reste plus qu’à le voir, à l’embrasser, à le tenir contre moi
pour le refaire mien… pour toujours.
Mon cerveau enregistre alors les paroles de Warren. Un lieu gardé secret ?
– Quoi ? Il faut que je le voie !
Il se racle la gorge.
– Tu ne peux pas, Mia. Pas encore. Ils soignent d’abord les blessures des
victimes, puis ils vont devoir s’entretenir avec chacun d’entre eux pour obtenir
des renseignements sur les terroristes. Toute information pourrait être cruciale.

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Ce groupe est particulièrement violent, ma puce. Tu n’imagines même pas ce
qu’ils ont fait aux femmes et aux enfants qui n’ont pas leur religion. Et c’est sans
parler de ce qu’ils ont fait aux dix-huit touristes qu’ils ont découverts lors des
raids.
– Des touristes ? Je croyais que c’était juste Wes et les membres de son équipe ?
Max s’assied à côté de moi et pose une main sur mon genou. Maddy s’assied de
l’autre côté et prend ma main pour y déposer un baiser. Je serre fort la sienne et
la porte à mon visage, réconfortée par sa chaleur et sa présence.
– Peu importe. Est-ce que tu sais comment il va ?
– Tout ce que je sais, c’est que quand le raid a frappé, ils ont commencé à
éliminer les otages. Apparemment, ils ont décidé que s’ils devaient mourir, ils
emporteraient les ignobles Américains et leur propagande avec eux. Ils se sont
servis d’un homme comme bouclier humain. Il était habillé comme eux et ils
l’ont forcé à tenir une arme non chargée et à sortir de la cabane où ils le
détenaient. Les snipers ne pouvaient pas deviner qu’il faisait partie des otages. Il
était à peine sorti, poussé par un type avec un flingue, qu’il a pris une balle dans
la poitrine.
– Mon Dieu.
– Ma puce, je ne souhaiterais pas à ma pire ennemie ce qu’ils ont fait à cette
actrice, dit Warren à voix basse.
Gina DeLuca. Mince. Je détestais cette femme, pour la seule et stupide raison
qu’elle avait couché avec Wes, il y a quelques mois. J’étais jalouse qu’elle
détienne l’objet de mes désirs. Toutefois, le pire que je lui ai souhaité, c’est
qu’une photo d’elle sans maquillage, en train de manger un hot dog, apparaisse
dans un magazine people. Je n’ai jamais voulu qu’elle souffre.
– Est-ce que… est-ce qu’elle va bien ?
Warren vide tout l’air de ses poumons.
– Physiquement et mentalement… non. Mais elle survivra.
Je cligne des yeux pour combattre les larmes, faisant de mon mieux pour rester
forte.
– Est-ce que d’autres s’en sont sortis ?
– Attends une seconde.

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Warren semble s’être éloigné du micro pour se moucher.
– Je vais bien, Kathy, je parle à Mia. Il faut que je finisse. Oui, un thé me ferait
du bien. Merci ma chérie, dit-il à Kathleen.
Kathleen est la femme qu’il a enfin admis aimer depuis des années. Ils sont
ensemble, et je suis heureuse de savoir que les deuxièmes chances existent en
amour.
– Désolé, Mia, même à mon âge, ce genre de sujet n’est jamais facile.
– J’imagine, oui, je dis en serrant la main de Maddy. Quand rentre-t-il, et quand
est-ce que je pourrai lui parler ?
– Mes sources me disent qu’il devrait rentrer dans deux semaines. Il est suivi
médicalement et psychologiquement. Leur malnutrition est sévère, ils ont très
peu dormi, ils ont été torturés, battus, et ils ont été témoins d’actes atroces.
Chaque parole de Warren me donne un peu plus la nausée et me donne encore
plus envie de le voir, de le toucher, de lui prouver mon amour.
– Warren, j’ai besoin de le voir. De lui parler.
– Dès que j’en saurai plus sur l’endroit où il est et quand tu peux le voir, je te le
dirai. Patiente encore quelques jours, d’accord ?
Je me lève d’un bond et fais les cent pas dans la chambre.
– Quelques jours ? Tu veux que j’attende quelques jours pour parler à l’homme
que j’aime, qui a disparu depuis plus de trois semaines ? Tu es complètement fou
? Warren, c’est ridicule. Après avoir été pris en otage par des terroristes, il est
détenu par son propre gouvernement ? Les États-Unis d’Amérique ?
Max pose une main sur mon épaule, prend mon téléphone et le met sur haut-
parleur.
– Shipley, c’est Max. Que faut-il faire pour que ma sœur puisse appeler son mec
?
– Il va falloir tirer des dizaines de ficelles, rouspète Warren.
– Dans ce cas, je dirais qu’il ne vous reste plus qu’à devenir marionnettiste. À ce
que me dit ma sœur, vous lui devez une énorme faveur.
– Mia, tu lui as dit ? s’exclame Warren d’une voix glaciale.
– Non ! je rétorque, outrée qu’il pense que je pourrais le dire à qui que ce soit,
même si Max n’est pas n’importe qui.

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Le regard de Max s’assombrit et ses pupilles se dilatent. Il semble réaliser que le
secret que je garde est suffisamment grave pour ruiner un homme aussi puissant
et riche que Warren. D’habitude, il s’agit d’actes qui méritent une incarcération.
Si Aaron ose rater ne serait-ce qu’une seule session de gestion de la colère, ou
une seule consultation avec son psy, j’ai le pouvoir de porter plainte contre lui et
il perdra son siège de sénateur de Californie. Un simple coup de fil suffirait à
foutre en l’air sa carrière. Cependant, je sais que cela affecterait Warren et je n’ai
aucune intention de mettre à mal le travail qu’il fait en offrant des soins
médicaux aux pays du tiers-monde. Maintenant que je sais le genre de choses qui
se passent dans ces pays, cela me semble encore plus important.
– Mia, je vais voir ce que je peux faire, mais je ne te promets rien.
– N’importe quoi serait génial. N’importe quoi, je t’en supplie.
Ma voix est rauque, pleine d’émotion, et ma prière s’accompagne d’une nouvelle
vague de larmes. Maddy passe son bras autour de moi et m’attire contre elle. Je
la serre contre moi, m’accrochant à une des seules choses stables dans ma vie,
l’amour de ma sœur.
– Si vous avez besoin d’argent ou d’aide matérielle, appelez-moi, dit Max. Faites
en sorte que ça se passe, quel que soit le coût, vous m’entendez ?
– Haut et fort, répond Warren.
Je suis trop épuisée pour répondre. Mon homme a été sauvé, comme tous ces
touristes, mais de nombreuses vies ont été perdues. Je ne peux pas lui parler
parce que le gouvernement l’a planqué dans un endroit secret, et ce pour deux
semaines. Comment vais-je survivre à quinze jours sans nouvelles ? La réponse
est simplement que je ne le pourrai pas.
– C’est bien. Demandez qu’il l’appelle, et vite, déclare Max.
Je lui souris derrière mes larmes. Mon frère pourrait déplacer des montagnes. Je
comprends comment il dirige un si grand empire. Il n’est pas seulement ferme et
juste, les gens sont forcés de l’écouter lorsqu’il parle. C’est un meneur naturel.
Je n’ai pas connu Jackson Cunningham, mais le fils qu’il a élevé est un sacré
phénomène.
*
* *

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Je me suis couchée tout de suite après le coup de fil de Warren. Ginelle s’est
installée dans le lit de Maddy, et ma sœur s’est blottie contre moi. Apparemment
elle s’est inquiétée toute la nuit, même si je lui ai écrit que j’étais chez Gin. Elle
voulait venir me voir, mais son fiancé l’a obligée à rester avec lui. Matt.
Je cligne plusieurs fois des yeux, je me lève en prenant soin de ne réveiller ni
Maddy ni Ginelle, je sors de la chambre sur la pointe des pieds, un jean et une
chemise à la main. Après une longue douche bouillante, rassurée que Wes soit
en vie, hors de ma portée mais en vie, je me sens beaucoup mieux. Papa respire
seul, les médicaments soignent ses réactions allergiques et les médecins pensent
que son pronostic est en bonne voie d’amélioration.
La seule chose qu’il me reste à gérer, c’est Blaine. Toutefois, je dois d’abord
avoir une petite discussion avec le fiancé de ma sœur. Je trouve Max assoupi sur
le canapé du salon. Les portes du balcon sont ouvertes et la brise pénètre dans la
pièce illuminée par le lever du soleil. Quant à Matt, il est sur le balcon, les pieds
posés sur la rambarde.
Je prends une bouteille d’eau dans le minibar, je le rejoins et je ferme la porte
derrière moi. Il tourne la tête, ses lunettes de soleil perchées sur son nez. Il est
vêtu d’une chemise à carreaux, d’un jean foncé et de Converse, le cliché d’un
étudiant de bonne famille.
– Comment va Maddy ? demande-t-il quand je m’assieds.
Je pose mes pieds à côté des siens, ébouriffe mes cheveux, et j’admire la vue sur
Las Vegas et les montagnes du désert qui l’entourent.
– Elle va bien. Elle dort encore.
Matt se détend visiblement et recule dans le fauteuil.
– Elle était très inquiète pour toi, hier soir.
– Je suis une grande fille, je réponds en riant.
– Mais ça ne fait jamais de mal de s’appuyer sur quelqu’un qui nous aime.
Je penche la tête sur le côté et rive mon regard sur lui.
– Tu veux dire, comme tu t’es appuyé sur ma sœur pour qu’elle accepte de
t’épouser tout de suite ?
– Ah, elle… elle te l’a dit ? répond-il en écarquillant les yeux.

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Il pose ses pieds par terre, appuie ses coudes sur ses genoux et baisse la tête.
Pauvre garçon. Il ne sait pas à qui il a affaire.
– Matt, il faut qu’on mette deux ou trois choses au clair. Je suis la principale
protectrice de Maddy depuis qu’elle a cinq ans. Je suis sa sœur, mais j’ai souvent
été son parent, aussi. On est très proches.
– Oui, je sais, mais je pensais que cette histoire resterait entre nous, que c’était
privé. J’ai fait une erreur, dit-il d’une voix sincèrement désolée.
– Une erreur que tu n’as pas l’intention de commettre de nouveau, j’espère.
– J’ai toujours envie de l’épouser, Mia. Aussitôt qu’elle le voudra bien, répond-il
en fronçant les sourcils.
– Je comprends, Matt. Tu sais, je ne lui ai pas dit de ne pas t’épouser.
Sincèrement, je trouve que vous allez très bien ensemble. Tu lui fais du bien et
tu m’as prouvé durant toute cette épreuve qu’elle pouvait compter sur toi. C’est
juste que Maddy a besoin de temps pour s’adapter. Cela ne fait que quelques
mois que vous êtes ensemble. Profitez l’un de l’autre, soyez un peu fous, traînez
avec vos amis et travaillez dur à la fac. À vouloir grandir trop vite, vous risquez
de rater le meilleur, la vie.
Je regarde mon pied. Les mots qui y sont tatoués sont devenus plus importants
que je ne l’avais imaginé. Les lettres, mêlées aux pétales volant dans le vent, me
rappellent que je dois prendre des nouvelles de mes amis, mais aussi ajouter de
nouvelles lettres. Même si ma vie me semble hors de contrôle, je dois prendre le
temps pour les personnes auxquelles je tiens : Alec, Mason, Rachel, Tony,
Hector, Angelina, Taï, Heather, Anton. Il me suffit de voir leur visage pour me
rappeler les moments que j’ai passés avec eux et sourire.
– Pourquoi tu étais si pressé de te marier, de toute façon ? je demande en
observant sa réaction.
Il a l’air… abattu, et je ne comprends pas pourquoi. Ses parents ne semblent pas
pressés qu’ils se marient, et même s’ils sont ravis, ils ont soutenu leur décision
d’emménager ensemble et d’attendre pour se marier, donc la pression ne peut
pas venir d’eux.
– Tu vas trouver ça bête, dit Matt en secouant la tête.
– Sans doute, mais dis-le-moi quand même, je réponds en riant.

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Il sourit, mais ce n’est que de courte durée.
– Il y a un groupe de mecs, à la fac. Des sportifs. Des grands mecs baraqués et
beaux gosses. Ils sont toujours en train de parler à Maddy, après les cours. Ils lui
demandent si elle peut réviser avec eux ou les aider avec leurs devoirs, l’air de
rien, ou ils proposent de la payer pour des cours particuliers.
– Est-ce qu’elle a accepté ?
– Mon Dieu non, elle ne ferait jamais ça, répond-il d’un air dégoûté.
Je connaissais sa réponse avant qu’il me la donne, mais je voulais l’entendre
quand même. Un point pour Matt.
– Continue.
– C’est juste qu’ils ne lâchent pas l’affaire. Ils sont doués et ils viennent de
familles riches. Ils pourraient lui offrir tout ce qu’elle veut, et ils sont sportifs.
Maddy adore le sport. Moi, je regarde les matchs juste pour lui faire plaisir.
– Tu regardes les matchs pour ma sœur ? je demande en gloussant.
J’éclate de rire. Bon sang, ce que ça fait du bien ! Il fallait forcément que Maddy
s’entiche du seul mec qui n’aime pas le sport. Ça prouve combien les contraires
s’attirent.
– Ben ouais, répond Matt en riant. Elle adore ça, elle dit que c’est ce que vous
faisiez ensemble, en famille, et comme je veux faire partie de la vôtre, je regarde
les matchs.
C’est adorable. Ma sœur a vraiment décroché le gros lot avec ce mec.
– Je ne comprends pas le problème. Tu es jaloux des sportifs ?
– Je ne sais, pas, peut-être. Moi, j’aime les plantes. Je vais travailler pour des
boîtes spécialisées en botanique ou en agriculture, ce genre de chose. Eux, ils
vont jouer pour des équipes pro ou diriger les entreprises de leurs parents, et ils
pourront lui offrir une vie que moi je ne pourrai jamais me permettre. Je suis
juste un geek avec la main verte. Et Maddy… mon Dieu, elle est magnifique.
Elle est gentille, généreuse et super-intelligente. Elle pourrait avoir n’importe qui
en claquant des doigts.
Ah, je comprends, maintenant : il doute de lui.
– C’est vrai, elle pourrait. Ma sœur est à couper le souffle. Mais tu sais quoi,
Matt ?

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Il lève vers moi ses yeux tristes.
– Quoi ?
– C’est toi qu’elle aime. C’est toi qu’elle veut épouser. Elle t’a donné quelque
chose de très spécial, et tu es le seul homme à qui elle a voulu l’offrir. Tu vois de
quoi je parle ?
Il sourit jusqu’aux oreilles et rougit en même temps. Bon sang, qu’il est chou ! Il
suffit de parler de sexe pour le faire rougir. Ce type est vraiment parfait pour ma
sœur.
– Je crois. J’ai juste pensé que si elle était ma femme alors je… je ne pourrais
pas… tu sais…
– La perdre ?
Il hoche la tête et je tapote son épaule.
– Tout ce que je peux te conseiller, Matt, c’est d’avoir confiance. De croire en
ton amour, de faire confiance à Maddy. Elle ne te trahirait jamais. Elle n’est pas
comme ça.
– Tu as raison. On en a parlé, et je lui ai dit la plupart de mes peurs. Elle a dit
que j’étais fou et que j’étais le mec le plus canon qu’elle connaissait, puis elle
m’a sauté dessus et elle m’a prouvé combien elle m’aimait.
Ah, il perd un point.
– Tu es dégueulasse ! Tu viens vraiment de me dire, à moi, la sœur de ta fiancée,
que vous vous êtes rabibochés sur l’oreiller ? Beurk !
– C’est trop tôt ? demande-t-il en riant.
– Bien trop tôt, oui ! Je ne pourrai jamais oublier ce que tu viens de me dire. Tu
es complètement tordu, mon gars. D’abord, tu me parles de plantes et maintenant
de sexe ? Mon Dieu, je ne sais pas comment Maddy te supporte, je gronde en
riant.
Nous passons l’heure qui suit à discuter, à apprendre à nous connaître et à rire. Il
me raconte les absurdités que lui et ma sœur font pour passer le temps, en
laissant de côté leur vie sexuelle. Je lui demande ce qu’il dirait de déménager au
Texas si Maddy voulait travailler pour Cunningham Oil & Gas, et il dit qu’il
s’en remettrait à sa décision et qu’il la suivrait n’importe où. Il comprend que,
jusqu’à Max, Maddy n’avait pas de famille, à part moi. Il veut qu’elle soit

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heureuse, et il apprécie Max et l’endroit où il vit. Apparemment, Maddy et lui
ont déjà parlé d’acheter du terrain à cultiver. Matt pourrait même ouvrir une
boutique de primeurs, ou quelque chose comme ça. Surtout, il est d’accord qu’il
vaut mieux attendre qu’ils soient diplômés pour se marier.
Je suis soulagée d’avoir parlé à Matt et de savoir qu’il ne la poussera plus à se
marier plus tôt que prévu. C’est un poids de moins sur mes épaules. Hélas, mon
dernier problème, en dehors d’avoir accès à mon mec, n’est pas des moindres,
puisque c’est Blaine Enfoiré Pintero.

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Chapitre 9

Nous sommes vendredi, et je n’ai toujours pas trouvé le moyen de calmer


Blaine. Je n’ai pas son argent et pas la moindre envie de passer sous les draps
avec lui. Papa va mieux, tout roule pour Maddy et Matt, Max est toujours en
ville et Ginelle est en sécurité. Pour l’instant. Quant à moi… c’est une tout autre
histoire. Plusieurs jours ont passé, et Wes ne m’a toujours pas appelée. Warren
ne m’a pas donné davantage d’informations, même si je l’ai appelé trois fois par
jour depuis qu’il m’a dit que Wes était en vie. Il a décidé d’ignorer mes coups de
fil et lorsque Kathleen a décroché, une fois, elle m’a dit qu’il faisait de son
mieux et qu’il ne baisserait pas les bras tant qu’il ne saurait pas où est Wes.
Cependant, elle m’a expliqué qu’il ne supportait plus d’entendre ma voix
désespérée, ce que je comprends. À sa place, je n’arriverais à rien si une folle
m’appelait toutes les cinq minutes.
C’est un véritable enfer. Je sais que l’homme que j’aime, une des seules
personnes pour qui je me sacrifierais volontiers, souffre mentalement et
physiquement, et je ne suis pas à ses côtés pour le soutenir. Je regarde tellement
mon téléphone que j’en ai des crampes à la nuque, chaque fois qu’il sonne, je
sursaute, immédiatement déçue lorsque je découvre que c’est Max, Maddy ou
Gin.
Hier soir, j’ai enfin craqué et j’ai appelé mes amis. Hector a pleuré lorsque je lui
ai raconté ce qui était arrivé à Wes, tandis que Tony s’est énervé et m’a demandé
si j’avais besoin d’argent, de billets d’avion ou de quoi que ce soit. C’est tout lui,
ça, il cherche toujours à tout réparer. Je leur ai promis que je gérais la situation et
que j’avais bon espoir qu’il rentre bientôt, ce qui, bien évidemment, est un
énorme mensonge. Ils m’ont obligée à leur promettre de les appeler la semaine

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prochaine, faute de quoi ils viendraient à ma recherche, et je sais qu’ils sont
sincères.
Mason était loin d’être aussi sympa qu’eux. Il était furieux et prêt à rater les
derniers matchs de la saison, même si les Red Sox sont en tête du classement et
qu’il est leur meilleur lanceur. Je repense à notre coup de fil en me préparant.
– Mia, c’est n’importe quoi. Tu attends que la situation soit critique pour
m’appeler ?
Sa voix s’éloigne du micro.
– Non, Rachel, je ne me calmerai pas. C’est pas cool. On est sa famille !
L’entendre dire que je fais partie de leur famille m’a fichu un sacré coup. C’est
vrai que je n’ai pas le droit de garder ce genre de chose pour moi. J’ai désormais
des gens qui tiennent à moi autant que je tiens à eux, et il est temps que je cesse
de compter autant sur moi-même et plus sur les autres.
Il revient au téléphone.
– J’arrive pas à croire que tu aies découvert que tu avais un frère. C’est
dingue !
– Ouais, et il est vraiment génial. Mais c’est pas tout ! Je suis désormais la
détentrice de vingt-cinq pour cent de Cunningham Oil & Gas.
– Quoi ? Tu déconnes ?
– Pas du tout. Apparemment, Jackson Cunningham savait que j’étais la sœur de
Max et il voulait me léguer une part de son empire. Ce qu’il ne savait pas, c’est
que Maddy est cent pour cent Cunningham. Ma mère l’a fait passer pour la fille
de mon père alors que c’était celle de Jackson.
– Bon sang, ta mère était complètement folle.
Je pense à Mason et à sa mère, qui est décédée d’un cancer du sein il y a
quelques années. Sa mère aurait fait n’importe quoi pour passer un jour de plus
avec ses enfants, et la mienne a abandonné non pas un, ni deux, mais trois
enfants qui avaient besoin d’elle. C’est impardonnable. Je me demande si Max a
eu le temps de demander à son détective d’essayer de retrouver notre mère. En
même temps, quand bien même il la retrouverait, qu’est-ce que je lui dirais ? Tu
crains ? Est-ce que je lui montrerais qu’on va très bien sans elle, juste pour me

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venger ? Enfin, Max et Maddy vont très bien. Moi ? J’ai dû devenir escort pour
payer la dette de l’homme qu’elle a quitté.
Avant de raccrocher, j’ai promis à Mace d’être plus présente dans leurs vies, de
leur rendre visite l’an prochain et de leur présenter Wes.
Ensuite, il y a eu Anton et Heather. Bien évidemment, l’approche d’Anton était
philosophique, comme toujours. Je jure que sous ses grosses chaînes en or, ce
Latin Lover n’est qu’un hippie. Heather, en revanche, s’est surtout inquiétée de
savoir comment je prenais la disparition de Wes. Je ne me suis pas étalée sur le
sujet car j’étais à deux doigts de fondre en larmes. Or, je dois rester forte pour
Wes et continuer à me battre.
Alec… était Alec. Sa voix et la sincérité de son amour m’ont remonté le moral.
Il m’a dit qu’il avait confiance dans ma capacité à survivre un autre jour. Il m’a
aussi dit que, si je le voulais, il m’emmènerait en France pour me faire l’amour
pendant des jours entiers et remplir mon corps et mon âme de lumière. Ce sont
ses paroles, pas les miennes. Bien sûr, il a dit tout ça en français, ce qui m’a fait
frissonner de la tête aux pieds à tel point que j’ai dû lui dire d’arrêter.
Heureusement, il comprend que certaines amours soient faites pour durer
toujours et que cela signifie que je ne peux plus batifoler avec des artistes
français.
J’ai attendu pour appeler Taï en dernier. Comme je m’y attendais, il n’a pas bien
pris la nouvelle. À tel point, d’ailleurs, que je ne lui ai pas parlé de Blaine, de ses
menaces et du kidnapping, parce qu’il aurait sauté dans le premier avion pour
Las Vegas avec une poignée d’amis, tous aussi costauds que lui, pour en finir
avec Blaine. Bien sûr, cela me faciliterait la vie, mais ils finiraient par souffrir
aussi. Les mecs comme Blaine sont trop présomptueux pour se battre eux-
mêmes, comme l’a prouvé son accrochage avec Max. Blaine n’a même pas
essayé de le frapper. Il ferait simplement appel à ses molosses, qui utiliseraient
des couteaux ou des flingues, et Blaine n’arrêterait pas tant que le clan Niko tout
entier ne serait pas enfoui six pieds sous terre. Il est hors de question que cela
arrive à mon Samoan sexy.
J’ai donc seulement parlé à Taï de papa et de Max, et cela a largement suffi à
l’inquiéter. Nous avons discuté jusque tard dans la nuit. Je me suis demandé ce

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que devait penser Amy de notre longue conversation, mais à un moment donné,
elle est venue lui souhaiter bonne nuit et il n’y avait pas d’angoisse ni de jalousie
dans sa voix. Quand j’en ai parlé à Taï, il a simplement répondu qu’elle était
cool et qu’elle comprenait que je faisais partie de sa famille.
Revoilà ce mot. Famille. Quand j’ai commencé cette aventure il y a neuf mois, je
n’associais que quatre personnes à ce mot : Maddy, Ginelle, papa et Tante
Millie. Maintenant, j’ai besoin de mes deux mains pour compter tous ceux que je
considère comme des frères ou des sœurs, et c’est sans parler de Max, Cyndi,
Isabel et du petit Jack qui est en route. J’ai du mal à réaliser combien ma vie a
changé au cours des neuf derniers mois.
Et puis, il y a Wes. Je regarde mon téléphone une dernière fois. Rien. Tant pis.
Je fronce les sourcils et, pour une fois, je fais un effort en m’habillant. Si je dois
supplier Blaine de m’accorder plus de temps, mieux vaut le faire avec classe.
Mon téléphone sonne et je regarde l’écran en espérant que ce soit Weston. Hélas,
je n’aime pas le nom qui s’affiche.

À : Mia Saunders
De : Blaine Enfoiré Pintero
J’espère que tu vas bien et que si tu n’as pas mon argent, tu es prête à accepter
les termes de mon contrat. On se voit dans notre resto dans une heure. Je
t’attendrai.

Bien sûr qu’il m’attendra, ce pervers. Je saisis mon sac à main en même temps
que Max empoigne ses clés.
– Quoi ? je demande.
Sa bouche est pincée et il semble plus tendu que jamais.
– Je t’emmène.
– Euh, non merci. Ça ira. Il ne va pas me faire de mal, Max. Il veut me baiser,
pas me tuer.
Sa mâchoire se resserre un peu plus.
– Il a kidnappé ta meilleure amie, Mia. La situation n’est pas à prendre à la
légère.

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Je soupire et pose une main sur son biceps, qu’il contracte par réflexe.
– Max, il ne va pas apprécier ta présence. Je sais à quoi, ou plutôt à qui j’ai à
faire. Je vaux trop pour lui d’un point de vue financier pour qu’il agisse de
manière impulsive. Tout ira bien, je mens en regardant mon frère dans les yeux.
Il n’y a pas plus imprévisible que Blaine. Je ne sais jamais ce qui va l’énerver, le
faire rire ni le rendre violent. Je ne peux qu’espérer avoir droit à son côté enjoué,
et profiter de son envie de coucher avec moi une dernière fois. Peut-être
pourrais-je même utiliser son amour de l’argent et lui en promettre plus,
beaucoup plus. Je peux aisément continuer de travailler pour Millie pour gagner
plus d’argent, en plus de ce que je vais toucher de Cunningham Oil & Gas. Je
sais que Max ne veut pas que cet argent arrive dans les poches d’un criminel,
mais je n’ai pas le choix si je veux espérer mener une vie normale.
– Fais-moi confiance, je gère, je dis en me redressant.
Max secoue la tête et ouvre la porte.
– Fais-moi confiance, à moi. Je te l’ai déjà dit et je le répète, chérie, je prends
soin de ma famille. Fin de l’histoire.
Je baisse la tête en le suivant dans l’ascenseur, puis dans sa voiture de location.
Nous ne prononçons pas un mot sur le chemin pour le Luna Rosa. Je ne sais pas
quoi lui dire, et il doit avoir des choses à dire que je préfère ne pas entendre.
Quand nous entrons dans le restaurant, comme d’habitude, Blaine est déjà assis à
notre table, sur la terrasse. Des parasols sont déployés pour protéger les clients
du soleil, et le lac donne une impression de fraîcheur qui n’existe pas dans le
centre de la ville. Il se lève lorsque nous avançons. Il est vêtu d’un costume
beige qui lui va superbement bien et d’une chemise corail. Ses yeux brillent
d’une lueur intérieure, comme les yeux d’un chat dans le noir.
Blaine tend la main à Max et hoche la tête en direction de la table à côté de la
nôtre.
– Je vois que tu as apporté des muscles, comme moi, je dis en souriant.
Ses molosses ouvrent leur veste pour montrer les canons de leurs Glocks 45.
Max recule ma chaise et je m’assieds, puis il éloigne la sienne afin de garder en
vue Blaine ainsi que ses gardes du corps. Bien joué, je regrette de ne pas y avoir
pensé moi-même. L’espace d’une seconde, je suis presque reconnaissante que

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Max m’ait forcée à le laisser venir, même si je préférerais qu’il ne se mêle pas de
cette histoire.
– Tu veux un verre ? demande Blaine en désignant la bouteille glacée de Pinot
Grigio.
J’en ai l’eau à la bouche et je hoche la tête. Il me sert un verre et regarde Max
avant de reposer la bouteille. Mon frère secoue la tête, il est trop occupé à avoir
l’air menaçant pour se soucier de boire du vin.
Je bois une gorgée et gémis doucement. Blaine a toujours eu un goût impeccable
en matière de vin. Il passe beaucoup de temps dans des dégustations et dans des
vignobles pour goûter les dernières cuvées de l’année.
– Et si on passait tout de suite aux affaires ? dit Blaine.
Je manque m’étouffer en entendant sa question. Je ne sais toujours pas comment
je vais me sortir de ce pétrin, mais tant que j’aurai un souffle de vie, je ne
baisserai pas les bras. Littéralement, puisque Blaine me tuera si je ne le satisfais
pas d’une manière ou d’une autre.
– Écoute Blaine, je sais que tu as dit que tu ne m’accordais pas plus de temps,
mais il se passe plein de choses dont tu n’es pas au courant, et…
Il me fusille du regard et me coupe la parole.
– J’espère que tu vas me dire que tu choisis la porte numéro deux, qui mène à ma
chambre, parce que les excuses sont comme les trous de balle. Tout le monde en
a un, mais peu de gens veulent s’en approcher.
J’inspire lentement tandis que les larmes me montent aux yeux.
– Alors, tu vas devoir me tuer.
Blaine retient son souffle et Max frappe son poing sur la table, faisant
s’entrechoquer les verres et renversant le mien que j’essaie de rattraper avant
qu’il ne se vide par terre.
– C’est n’importe quoi, gronde-t-il en se levant.
Mon frère est grand, mais il paraît vraiment gigantesque lorsqu’on est assis. Il
plonge sa main dans sa poche arrière et soudain la tension crépite entre nous.
Blaine se baisse tandis que ses molosses sortent leurs armes. Max se retrouve
avec un canon pressé sur la tempe et un autre derrière la tête.

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– Tu as intérêt à avoir une très bonne raison de fouiller dans ta poche arrière,
cow-boy, sinon mes hommes vont t’escorter dehors et s’occuper de toi, si tu vois
ce que je veux dire. Cette ville est à moi, Lucky Luke, et c’est moi qui paie le
salaire des flics. Réfléchis bien à ce que tu vas faire.
Max cligne des yeux et soutient le regard de Blaine.
– Je sortais une enveloppe. Le type derrière moi peut voir que je ne suis pas
armé.
– Il dit la vérité, boss, dit celui qui a l’air le plus débile.
Blaine hoche la tête, autorisant Max à continuer. Il se penche en avant, pose
l’enveloppe sur la table et la tapote avec son index.
– Voilà ton fric. Les quatre cent mille.
« Surprise » ne suffit pas à décrire ce que je ressens, tant mes émotions sont
nombreuses : il y a du soulagement, de la peur, de la fierté, de l’amour. Mais
aussi du dégoût. Je suis dégoûtée que mon frère, l’homme le plus adorable de la
terre, qui ne mérite rien de tout cela, paie ma dette. La dette de mon père. Une
dette non négligeable. Ce n’est pas comme si je lui avais demandé cinquante
dollars, c’est quatre cent mille dollars ! Presque un demi-million !
– Tu ne peux pas faire ça, je chuchote d’une voix rauque.
– C’est fait. Personne ne menace ma sœur et ne fait de mal à ma famille si je
peux y remédier, dit-il en me regardant.
– L’argent est traçable ? demande Blaine en regardant dans l’enveloppe.
Elle doit contenir un chèque, car elle est très mince, or même en billets de cent
dollars, quatre cent mille dollars doivent former une sacrée masse.
– Seulement jusqu’à moi. C’est de mon compte personnel. Si tu préfères du cash,
je peux te le faire livrer à l’accueil de ton casino. J’ai apporté le chèque pour te
montrer que je suis sérieux.
– Ça ne te gêne pas si je passe un coup de fil pour m’assurer que tu es solvable ?
– Pas du tout.
Blaine regarde un de ses gardes, qui prend le chèque et va à l’arrière de la
terrasse. Je regarde autour de moi pour la première fois et réalise qu’il n’y a
aucun autre client, or on est vendredi midi. Apparemment, Blaine s’est assuré
que notre petit tête-à-tête resterait privé. Je vide mon nouveau verre de vin et

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j’attends patiemment. Je ne sais pas quoi faire. Que dire pour améliorer une telle
situation ? Je pose une main hésitante sur celle de Max et je le regarde dans les
yeux, vert sur vert, en essayant désespérément de lui transmettre ce que je
ressens, de le remercier d’avoir sauvé ma vie, celle de Maddy, de Ginelle et de
papa.
– Merci, je murmure.
Il approche son front du mien et, dès que nous nous touchons, je ressens ce
fourmillement qui m’est désormais familier. Je me souviens que c’est arrivé dès
la première fois que nous nous sommes rencontrés, à l’aéroport, et que nous
nous sommes serré la main.
– Je recommencerai autant de fois qu’il le faudra. Cent fois, si cela te garde en
vie. Je t’aime, sœurette.
Sa voix est grave, pleine d’émotion.
– Je t’aime aussi, Maximus, je dis en le serrant dans mes bras. Je trouverai un
moyen de te rembourser.
– Chérie, tu vas bientôt être riche. Tu trouveras un moyen, ne t’en fais pas, dit-il
en riant.
Il recule et prend mon visage dans ses mains pour essuyer mes larmes avec ses
pouces.
– C’est OK, patron, dit la brute.
– C’est dommage, jolie Mia, dit Blaine en joignant les mains. J’avais hâte de
passer une nuit avec toi.
Je frissonne, et Max décide qu’il en a assez entendu.
– Il est temps de rentrer, Mia, me dit-il en prenant mon bras et en me soulevant.
J’aurai ton liquide d’ici dix-neuf heures ce soir. J’ai déjà prévenu la banque que
je pourrais en avoir besoin et elle s’en occupe.
– Splendide.
Blaine se lève, boutonne sa veste et tend la main. Max la regarde et finit par la
serrer. Mon Dieu, ce type est un saint. Il en faudrait des milliers comme lui aux
commandes de ce monde. La vie serait bien plus paisible.
Max pose sa main dans mon dos et me pousse en avant.
– Attends ! dit Blaine.

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Je me tourne et il avance lentement vers moi, comme un lion sur sa proie, prêt à
bondir. Je retiens mon souffle et attends qu’il pose ses mains froides sur mes
bras.
– Je crois que c’est la fin, n’est-ce pas ?
– Ma dette est réglée, je réponds.
Il caresse mes bras de bas en haut.
– Tu es libre, ma jolie, jolie Mia.
Blaine se penche, je sens Max se raidir des pieds à la tête tandis que mon ex
m’embrasse une joue, puis l’autre. Il pose ensuite une main sur ma joue et
caresse ma lèvre inférieure avec son pouce.
– J’ai toujours voulu ce qu’il y a de mieux pour toi. À ma façon. Prends soin de
toi.
Sur ce, il tourne les talons et sort du restaurant. Max me guide à sa voiture, mais
je l’arrête avant qu’il n’ouvre ma portière et je me jette dans ses bras, écrasant
mon visage sur son torse, le serrant aussi fort que possible, déversant tout ce que
je ressens dans cette étreinte.
Ma peur.
Ma peine.
Mon soulagement.
Ma gratitude.
Jamais je ne pourrai le rembourser, et je ne parle pas d’argent. Je n’aurai aucun
problème à lui rendre ces quatre cent mille dollars entre le travail et l’argent que
je toucherai de l’entreprise. Ce que je ne pourrai jamais lui rendre, c’est le
cadeau qu’il me fait en étant lui : sa présence quand j’ai besoin de lui, la manière
dont il s’occupe de moi. Tout ce que je sais, c’est que je vais passer le restant de
mes jours à être reconnaissante pour tout ce qu’est Maxwell Cunningham, et ce
jusqu’à mon dernier souffle. En si peu de temps, il compte déjà autant que ma
petite sœur et jamais je n’avais pensé que quelqu’un pourrait rivaliser avec
l’amour que j’ai pour elle.

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Chapitre 10

On dit que la liberté est un privilège et non un droit, or je ne me sens guère


privilégiée. D’ailleurs, je ne me sens pas véritablement libre non plus. Ma dette
envers Blaine est payée, mais mon cœur est encore emprisonné au fond d’un
donjon.
Mon père va bien et son pronostic vital est meilleur. Cependant, il est toujours
dans le coma. Max, mon sauveur, est rentré chez lui pour être avec sa femme,
Cyndi, dans l’espoir que bébé Jackson fera bientôt son apparition. Maddy et
Matt ont repris la fac et ont retrouvé le confort de leur appartement. Ginelle a
choisi de retourner travailler, armée d’un fond de teint suffisamment épais pour
masquer ses bleus. Ses projets ont changé depuis son agression. Je l’ai aidée à
trouver un psy pour parler de ce qui lui est arrivé, et elle m’a dit que quand je
rentrerais et serais bien installée chez Wes, elle aimerait me rejoindre en
Californie pour changer d’environnement et trouver un autre travail. Pour faire
simple, elle veut déguerpir de Las Vegas, et je la comprends. Il y a trop de
souvenirs ici. Je ferai tout ce que je peux pour l’aider à guérir, et si pour ça elle
doit vivre dans la maison d’ami de Wes, c’est ce qu’on fera.
Cela fait un moment que je pense au sens du mot maison. Bien que Las Vegas
ait été la mienne presque toute ma vie, je n’ai pas l’impression d’y être moi-
même. Malibu m’appelle, mais qui sera là-bas pour m’accueillir quand
j’atterrirai ? C’est comme si tout le monde continuait de vivre, sauf moi. Je suis
censée commencer dans l’émission du médecin des stars, le Docteur Hoffman,
dans une semaine, mais je ne me sens pas prête. Cependant, comme je n’ai pas
cent mille dollars à lui filer si je lui fais faux bond, je n’ai d’autre choix que d’y

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aller. Il m’a embauchée pour animer une nouvelle section tirée de ma maigre
célébrité, qu’il appellera « Vivre en beauté ».
Le seul problème, c’est que je ne vois plus ma vie en couleurs. Tout ce que je
vois est un dégradé de gris, de noir et de blanc. La beauté qui m’entoure a
disparu. Je ne ressens plus rien.
Allongée sur le lit de la chambre d’hôtel, je regarde le ciel sombre par la baie
vitrée, rempli de nuages, alors que le désert se prépare pour un orage d’été. Les
orages sont inhabituels à cette époque de l’année et cela colle parfaitement avec
mon humeur. Je m’assieds en tailleur, mon téléphone à la main. Le tonnerre
gronde au loin et je me mets à compter.
Un…
Deux…
Trois…
Quatre…
Boom ! Le tonnerre gronde de nouveau et un éclair illumine le ciel. J’ai entendu
quelque part que cinq secondes entre un éclair et le tonnerre équivalent à mille
cinq cents mètres. Un éclair aveuglant zèbre le ciel noir comme le flash d’un
appareil photo, disparaissant aussi vite qu’il est venu. Comme Wes.
Weston Channing, troisième du nom, est entré dans ma vie sur une vague.
Littéralement. Il a posé un pied sur le sable et je n’ai plus quitté ce demi-dieu des
yeux ; sa peau hâlée, ses cheveux en bataille, les gouttes d’eau salée qui
ruisselaient sur son torse divin. Ses yeux, de la couleur de l’herbe fraîchement
tondue, ont trouvé les miens, mais ce n’est pas son physique qui m’a attirée.
C’est sa confiance, son sourire en coin, sa démarche nonchalante, sa façon de
parler, de faire l’amour. C’est comme si son corps était fait pour être près du
mien, en contact avec le mien.
Peut-être est-ce l’inverse, c’est peut-être moi qui ai besoin d’être près de lui,
touchée par sa main, son cœur, son âme.
– Reviens-moi, s’il te plaît.
Mon téléphone sonne, me tirant brusquement de ma mélancolie. Je baisse les
yeux. Numéro inconnu.

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Une vague de chaleur fait irruption dans mes entrailles et se propage dans mon
corps, me donnant la chair de poule. Le téléphone sonne de nouveau et je
décroche.
– Allô ? je croasse d’une voix tremblante.
– Mia, susurre Wes, comme s’il lui fallait faire un effort surhumain pour dire
mon prénom.
– Wes !
Les larmes coulent sur mes joues et je me tais, ne sachant pas quoi dire. Les
battements de mon cœur résonnent dans mes oreilles et je tremble de la tête aux
pieds. Je serre si fort mon téléphone que j’ai mal à la main, mais peu importe.
– Chérie, ta voix… Bon sang, Bébé, je suis tellement heureux de t’entendre…
Il se racle la gorge et soupire profondément.
– Wes, dis-moi que tu vas bien.
– Ça va, répond-il en toussant, même si j’ai vu des jours meilleurs.
– J’ai besoin de te voir, de te toucher, de croire que tu es bien réel.
Sa respiration devient saccadée.
– Je sais. J’ai tellement besoin de te voir que c’en est douloureux, mais je ne
peux pas. Je dois… euh… rester ici encore un peu, aaaaargh.
– Quoi ? Qu’est-ce qu’il y a ? Tu es blessé ? je dis d’une voix si tremblante que
je ne sais pas s’il m’a comprise.
Je supporterais plus facilement un poignard dans le ventre que l’idée que Wes
souffre.
– Oui chérie, je suis blessé. J’ai pris une balle dans le cou. Mais ça va. Vraiment,
ça va aller, grogne-t-il.
Il y a un bruissement au bout du fil, mais je ne fais plus attention à rien en
réalisant ce qu’il vient de dire.
Il a pris une balle dans le cou. Le cou !
– Wes, Bébé, il faut que je te voie. Tout de suite. Tu es où ? Dis-moi où tu es, je
prendrai le prochain avion. J’ai des amis qui ont des jets privés. Mon frère
pourrait m’envoyer le sien, je dis en réfléchissant déjà à qui je vais appeler.
– Ton frère ? demande-t-il d’une voix confuse.

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– Oui, j’ai un frère. Un vrai frère, prouvé par ADN. Et… euh… il a payé la dette
de papa.
– Quoi ? C’est qui ?
Sa voix est rauque, mais je ne sais si c’est parce qu’il souffre ou parce qu’il est
surpris.
– Maxwell Cunningham.
Wes tousse et gémit.
– Bon sang, mais arrêtez avec ce tensiomètre. J’essaie de parler à ma fiancée.
Laissez-moi tranquille une minute.
Sa fiancée ? On verra ça plus tard. Il voulait sans doute s’assurer que la personne
qui le dérange sache que c’est un appel important, non ?
– Tu parles à qui ? je demande.
– À une affreuse infirmière ! s’exclame-t-il.
Cependant, je pense qu’il adresse sa critique à l’infirmière en question et,
connaissant Wes, je ne serais pas surprise qu’il lui sourie.
– Wes, mon chéri, où es-tu ?
– En Australie, je crois.
Qu’est-ce qu’il fout en Australie ?
– Aux dernières nouvelles, tu étais en Indonésie.
– Ouais, mais ils nous ont évacués par hélico. Ils préféraient nous emmener dans
un pays avec lequel nos relations sont pacifiques.
Je recule contre la tête de lit et regarde le ciel noir.
– Quand est-ce que je pourrai te voir ?
– Honnêtement, chérie, je ne sais pas, soupire-t-il. L’armée s’entretient avec les
otages aussi vite que possible tout en s’assurant qu’on est en sécurité et en bonne
santé. Tu sais que ton ami, Monsieur Shipley, était sur le dos de tout le monde, je
ne suis pas certain qu’il se soit fait des amis, plaisante-t-il avant de gémir.
Mon Dieu, si seulement j’étais avec lui, je pourrais lui faire oublier la douleur en
l’embrassant. Il faudra que j’appelle Warren pour lui dire combien j’apprécie
qu’il ait utilisé ses contacts.
– Bébé, j’ai envie de tenir ta main, de te regarder dormir, de sentir ta poitrine se
soulever. J’ai envie d’entendre battre ton cœur. J’ai besoin que tu rentres à la

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maison.
– Je meurs d’envie de te retrouver, moi aussi. Bientôt, c’est promis. Je ferai tout
ce que je peux pour sortir d’ici.
– Est-ce que tu peux m’appeler tous les jours jusqu’à ce que tu rentres ?
Il rit doucement, et mon cœur se remplit de joie.
– Ils ont donné un téléphone portable à chacun d’entre nous et ils nous ont dit de
l’utiliser autant qu’on veut.
Le poids qui m’écrasait disparaît presque entièrement. Le reste partira peu à peu.
– Alors comme ça… ta fiancée ? je dis d’une voix enjouée.
Il fredonne joyeusement et ma poitrine se gonfle. Mon Wes est de retour. Merci
mon Dieu.
– Il y a beaucoup de choses dont il faut qu’on parle, mais ouais, toi et moi, c’est
pour toujours. Je ne veux plus attendre d’avoir mon paradis. Je t’emmènerai à
l’autel de force s’il le faut, mais je refuse de vivre un autre jour en m’inquiétant
pour toi, à me demander ce qui te serait arrivé si j’étais mort là-bas.
– Arrête, Wes, ne dis pas ça, je murmure en pleurant de nouveau.
– Mia, on ne peut pas fuir la vie. On ne sait jamais combien de temps il nous
reste ou ce qui peut nous arriver. Ce que je sais, c’est que je veux que tu sois à
mes côtés. Pour de bon. Tu seras ma femme, point à la ligne.
J’éclate de rire alors que mon cœur explose d’allégresse.
– Et si je dis non ? je réponds pour le taquiner.
– Ce n’est pas une option, dit-il de sa voix basse qui me fait instantanément
mouiller.
– C’est oui, Wes. Mon Dieu, oui. Oui, je veux t’épouser !
Il fredonne et mes larmes se transforment désormais en larmes de joie. Mon mec
est un sacré phénomène. Il est enfermé dans un hôpital militaire, quelque part en
Australie, après avoir été pris en otage pendant presqu’un mois et avoir reçu une
balle dans la gorge, et il parle de mariage.
– J’étais morte de peur, j’admets à voix basse.
– Moi aussi. Il faut que tu comprennes que je me remets aussi de ce qui m’est
arrivé en assistant d’autres gens qui sont peut-être encore entre leurs mains. Il
faut que je les aide. Si je peux sauver ne serait-ce qu’une autre personne en étant

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là une semaine de plus, je le ferai, chérie. Nous aurons le reste de notre vie
ensemble.
– C’est vrai.
Après tout, s’il a survécu à un véritable enfer pendant un mois, je peux bien tenir
une semaine.
– Je t’aime, Mia.
Ces mots, dans sa bouche, sont l’antidote au poison qui m’étouffait depuis tout
ce temps.
– Je t’aime encore plus, Wes. Tellement plus.
Je déglutis plusieurs fois et essuie mon nez sur ma manche.
– L’affreuse infirmière doit changer mon pansement, dit-il en bâillant.
– D’accord. Tu pourras m’appeler quand tu te réveilles, demain ? je demande
d’une voix désespérée.
Il bâille de nouveau et marmonne quelque chose.
– Wes ! je m’exclame, morte de peur qu’il ne réponde pas.
– Ouais, Bébé, désolé, je crois qu’elle m’a drogué. Mes yeux se ferment plus vite
que je ne peux les ouvrir.
– Je t’aime, je répète.
– Mmm, moi aussi. Ma Mia, bafouille-t-il d’une voix soûle et à moitié endormie,
avant de raccrocher.
Les membres lourds, je me blottis sous la couette, mon téléphone à la main. Je
regarde l’orage en pensant à Wes. Je suis soulagée qu’il soit en sécurité et qu’on
s’occupe de lui, mais frustrée de ne pas pouvoir l’aider. Je pense aussi à l’idée
qu’on se marie et qu’on passe notre vie ensemble, tout commencera quand il sera
de retour à la maison.
J’ai tellement de choses à lui dire, et je veux tout savoir de sa captivité. Je veux
soulager ses maux invisibles avec autant de baisers qu’il le faudra. Je sais
d’expérience qu’il peut falloir longtemps pour se remettre d’un traumatisme, or
ce que j’ai vécu avec Aaron n’est rien comparé à ce que Wes a enduré. Je sais
qu’il a vu des amis, des gens auxquels il tenait, mourir sous ses yeux, et je suis
reconnaissante qu’il ait survécu. Ensemble, nous guérirons. Tous les deux.
*
* *

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* *
J’ai toujours adoré regarder dormir quelqu’un que j’aime. Plus jeune, c’était
Maddy. Elle s’endormait pendant que je lui lisais une histoire ou que je lui
caressais les cheveux en lui racontant ma journée. Alors, longtemps après qu’elle
s’était endormie, je la regardais. Je mémorisais la couleur exacte de ses cheveux
blonds, le trait de ses sourcils, la courbe de ses lèvres charnues. Même dans son
sommeil, ma petite sœur était angélique. Je tirais une satisfaction immense de
pouvoir offrir à ma sœur une nuit de sommeil paisible, et je renouvelais cet
objectif tous les jours. Quand j’étais avec Alec, je jouais avec ses cheveux
jusqu’à ce qu’il se réveille, me roule sur le dos et me prenne sauvagement,
laissant ses boucles cuivrées tomber sur mon visage tandis qu’il me faisait
l’amour. Je faisais la même chose avec Wes. Il avait l’air si paisible, et quand
son visage était tourné vers le plafond, il avait sans cesse un léger sourire sur les
lèvres, comme si ses rêves étaient toujours joyeux. Aucun homme n’est plus
beau qu’un homme qu’on aime de tout son cœur.
Maintenant, je regarde dormir papa. L’aide respiratoire a été débranchée et il n’a
plus de tubes autour du visage. Il est toujours sous perfusion et le tensiomètre
continue de le surveiller en permanence, mais en dehors de cela, il a simplement
l’air de faire la sieste. Je crois que c’est ce qui est le plus dur, je continue
d’attendre qu’il ouvre les yeux, et chacune de mes visites me déprime un peu
plus.
Les médecins avaient bon espoir qu’il sorte du coma malgré ses arrêts
cardiaques, ses réactions allergiques et ses infections, mais ce n’est pas encore le
cas. Mon seul soulagement est que, selon le neurologue, son cerveau est encore
actif, mais ils ne connaîtront pas l’étendue des dégâts tant qu’il ne sera pas
réveillé. Je n’ai de cesse de poser la même question : quand pensent-ils qu’il
ouvrira les yeux ? Leur réponse est toujours la même : lorsqu’il le voudra. En
vérité, ils ne le savent pas. Il n’existe pas de bouton magique ou de solution
miracle. J’ai essayé de cogner sur les barreaux de son lit, de mettre des écouteurs
dans ses oreilles avec du hard rock, espérant qu’il se réveille et me dise
d’éteindre cette musique affreuse, mais rien. Silence radio. Pas le moindre
mouvement. C’est dur à digérer.

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Je tiens sa main, toujours chaude mais sans vie. Le sang coule dans ses veines,
mais sa force et son énergie l’ont quitté. Je regarde ses cheveux trop longs, sa
barbe, sa moustache. Ginelle s’occupait de lui durant mon absence, mais il a
désormais besoin d’une bonne coupe, sans parler d’une bonne dose de soleil
pour remédier à sa pâleur.
Mon père est dans le coma depuis neuf mois, le temps qu’il faut à une femme
pour tomber enceinte et accoucher.
– Quand vas-tu te réveiller, Papa ? Il y a tant à dire, trop à dire. Je rentre à
Malibu demain. J’aimerais rester ici avec toi, mais nos vies ne peuvent pas rester
en suspens plus longtemps. Ta dette est remboursée, Papa, mais ça n’a pas été
sans sacrifices. Cependant, parfois, lorsque je regarde en arrière, je me dis que je
devrais te remercier. Sans ta dette, je n’aurais pas rencontré tous les gens
merveilleux qui font désormais partie de ma vie. Et puis, bien sûr, il y a Max,
mon frère.
Je me lève et fais les cent pas dans sa chambre d’hôpital.
– Maman a eu un enfant avant moi, Papa. Un garçon qui a cinq ans de plus que
moi. Il a trente ans, maintenant. Il s’appelle Maxwell et c’est le meilleur frère
que je pouvais espérer. Je suppose que tu as capté l’histoire des prénoms,
Maxwell, Mia, Madison, comme elle et tante Millie.
Je repense au fait que ma mère nous a tous abandonnés, et ma rancœur refait
surface. Je m’arrête et regarde par la fenêtre. Les nuages d’hier soir ont disparu,
laissant un ciel azur derrière eux. Je me rapproche de papa et je passe ma main
dans ses cheveux. Ils ont toujours été si soyeux et même maintenant, ça n’a pas
changé.
– Cette aventure m’a fait rencontrer un homme, Papa. L’homme de ma vie.
J’observe son visage, espérant y voir un éclat de vie, un léger sourire, n’importe
quoi, mais… non.
– Je vais y aller. Je ne sais pas quand je vais pouvoir revenir, mais Maddy et
Matt viendront. Il te plaira, tu sais, il fait du bien à Maddy. Il la traite comme la
reine qu’elle est. C’est à toi de jouer, Papa. Il faut que tu te battes. Bats-toi pour
nous. Bien sûr, si ton état change, je reviendrai immédiatement.
Je me penche pour l’embrasser sur le front.

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– Je suis contente que tu t’en sois tiré, que tout le monde soit tiré d’affaire.
Je vais au pied du lit et me retourne pour regarder de nouveau l’homme qui m’a
élevée. Il n’a jamais été parfait et n’a jamais prétendu l’être, mais il nous aimait,
même quand il se détestait au plus haut point.
– Tu sais, Papa, tu n’avais pas le droit d’emprunter tout cet argent, et il n’est pas
normal que j’aie eu à porter ce fardeau, mais je ne regrette pas les décisions que
j’ai prises cette année ni le voyage que j’ai entrepris. Si c’était à refaire, je ne
changerais rien. J’ai l’impression que j’ai appris à me connaître un peu plus
chaque mois. Peut-être que d’ici décembre j’en saurai encore plus. Si tu me le
demandais, si quiconque me le demandait… je recommencerais. Et mon voyage
n’est même pas encore fini.

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OCTOBRE

Mia revient à Malibu, la ville où elle a choisi de vivre. Sa dette est payée et son
ex n’est plus une menace. Finie la vie d'escorte. Son nouveau job ? Bosser pour
le docteur Hoffman, célèbre médecin qui anime une émission. Il voudrait confier
une rubrique à Mia : Vivre en beauté.
Dans cette ville où tout est faux, où la plupart des filles sont des poupées Barbie
siliconées, Mia va devoir trouver de belles personnes, des gens simples mais qui,
par de modeste actions,rend le monde autour d'eux agréable. En réalité, elle
trouvera bien plus, pour elle et pour l’homme qu’elle aime.

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À DRUE HOFFMAN

La route a été longue, mais heureusement,


tu m’as fait part de tes conseils dès le début,
au moment où j’en avais le plus besoin.
Merci de m’avoir offert ton savoir,
ton soutien et ton amitié.
J’espère que tu apprécieras ce mois
et la version Drew Hoffman masculine.

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Chapitre 1

Un silence pesant m’accueille lorsque je passe la porte de la maison de Wes.


Ma maison. Je ne sais pas à quoi je m’attendais. J’espérais sans doute que, pour
une fois, la vie se montrerait clémente avec moi, qu’elle me rendrait mon
homme et que celui-ci m’attendrait dans notre nid douillet. Car c’est bien notre
nid, Wes a insisté pour que je change ma façon de voir « le manoir de Malibu »,
comme dit Gin. Le seul choix qu’il m’a laissé est que nous trouvions une
nouvelle maison ensemble. Or je n’en ai pas envie, je préfère vivre dans un
endroit qui lui ressemble.
Wes a travaillé dur pour obtenir tout ce qu’il a. Il a beau être jeune, il n’est ni
vantard ni avare et la décoration modeste de sa maison en dit long sur sa
personne. Je traverse lentement les pièces sombres et sans vie, et je sens que
quelque chose a changé. Lorsque j’inspecte les bibelots de plus près, je note les
différences avec la dernière fois que j’étais là, il y a deux mois.
Je trouve sur la cheminée en marbre une petite sculpture de danseuse étoile, sa
longue jambe courbée en arrière et au-dessus de sa tête. Érigée sur une pointe,
elle tient sa cheville dans ses mains. Cette statuette appartenait à ma mère. Je me
souviens qu’elle se mettait sur la pointe du pied et se cambrait en arrière pour me
montrer comment faire ce pas. Elle était danseuse à Las Vegas, mais elle avait
commencé sa carrière comme danseuse classique et contemporaine. J’adorais la
regarder valser. Lorsqu’elle faisait le ménage, elle tourbillonnait sur une
musique qu’elle seule pouvait entendre. Ses longs cheveux noirs tombaient sur
sa taille et volaient autour d’elle comme une cape. Du haut de mes cinq ans, ma
mère était la plus belle femme de la terre et je l’aimais comme personne. Cet
amour s’est éteint depuis longtemps, mais j’ai gardé cette statuette. Aujourd’hui,
elle a trouvé une place sur la cheminée et même si j’ai envie de la voir voler en

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éclats sur le parquet, je n’en fais rien. Si je n’y tenais pas, l’aurais donnée au
Secours Populaire depuis longtemps. Parfois, les plus beaux souvenirs sont les
plus douloureux.
Je me retourne pour étudier le reste de la pièce. Sur le guéridon à côté d’un
canapé, je découvre un cadre avec une photo de Maddy. Je l’ai prise la veille de
sa première rentrée à la fac. Elle m’avait montré les salles qu’elle allait
fréquenter et les bibliographies qu’elle devait parcourir, et je l’avais suivie
comme un chiot égaré. Ma petite sœur, elle, me guidait par la main en sautillant
joyeusement, balançant nos bras d’avant en arrière. Son bonheur était exubérant
et je m’en étais délectée, consciente que ma puce, mon bébé, allait accomplir des
choses incroyables. J’étais on ne peut plus fière d’elle. Rien ne l’arrêterait ou ne
l’empêcherait de réussir.
J’arrive dans la cuisine et je trouve un collage de photos sur le frigo, tenu par des
magnets. Il y a celles que j’avais accrochées dans mon ancien appartement,
Maddy, Ginelle et papa, mais il y en a des nouvelles, aussi. De Wes et moi. Une
qu’un serveur a prise de nous lors d’un dîner, et un selfie que nous avons pris au
lit, sur lequel on ne voit que nos visages.
Je promène mon doigt sur le sourire de Wes, ce sourire confiant et sexy, alors
qu’il me tient contre lui dans son lit. Ma poitrine se contracte et je la masse pour
dissiper la douleur. Bientôt. Il va bientôt rentrer à la maison. Je ne peux pas
douter, je dois faire confiance à la vie. J’ai plus que jamais besoin de croire à
cette phrase qui est devenue mon mantra.
Je continue jusqu’à notre chambre et m’arrête net sur le seuil, les yeux et la
bouche grands ouverts, face à mon reflet. Face à moi.
C’est le portrait qu’Alec a peint de moi en février et qui me montre sur le balcon
du Space Needle de Seattle, lorsque j’admirais le panorama de la ville. Ce jour-
là, je m’étais sentie libérée du fardeau que mon père m’avait confié sans le
vouloir, de la pression de devenir quelqu’un d’autre tous les mois, selon le désir
de mes clients. Tout cela avait disparu et je n’étais plus que Mia, une jeune
femme face à la beauté qui s’étendait devant elle.
Je n’arrive pas à croire que Weston ait acheté le portrait de moi le plus cher. Peu
à peu, par bribes, j’ai fini par lui avouer ce qui s’était passé entre Alec et moi,

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pas en détail bien sûr, mais je voulais qu’il comprenne comment chaque œuvre
m’avait transformée et m’avait permis de voir plus clairement la vie, l’amour, et
qui j’étais réellement. Nous étions au lit, nus dans les bras l’un de l’autre, quand
je lui ai dit combien j’étais reconnaissante envers Alec pour cet apprentissage et
combien j’étais gênée d’avoir été payée.
Je sors mon téléphone et cherche son nom dans mes contacts.
– Ma jolie1, à quoi je dois l’immense plaisir d’entendre ta voix ? répond mon
Frenchie avec une sensualité qui me rappelle tous les bons moments que j’ai
passés avec lui, sous lui.
Je m’assieds en tailleur sur le lit, les yeux rivés sur le tableau.
– Je… euh… je n’arrive pas à croire…
Au lieu de finir ma phrase, je prends en photo le tableau pour la lui envoyer.
J’entends le message arriver de son côté.
– Mia, parle-moi, tu vas bien ? s’inquiète-t-il.
Ma voix est tremblante et ma gorge nouée quand je regarde en détail la beauté
suspendue au-dessus du lit de Wes, de mon lit avec Wes.
– Regarde tes messages.
– Je n’aime pas beaucoup ce genre d’appel, chérie.
– Fais-le, bon sang.
J’entends des clics à l’autre bout du fil.
– Ah, mais oui, tu te vois, c’est ça ?
Si seulement je pouvais plonger mes mains dans le téléphone pour l’étrangler…
– Tu ne comprends pas, Alec. Pourquoi je me vois dans la chambre de mon
copain ?
Alec pousse un petit cri.
– Ma jolie, tu as un petit ami ? Un boy-friend ? roucoule-t-il d’une voix qui me
fait presque oublier combien il m’agace. Tu t’es engagée auprès de quelqu’un ?
Félicitations !
– Alec, concentre-toi, tu veux ?
– Oh, chérie, je suis toujours concentré quand il s’agit de toi. Surtout quand tu es
nue. Je me souviens de la sensation de ta peau sur la mienne comme si c’était
hier. Toi aussi, oui ?

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– Alec, je ne t’ai pas appelé pour ressasser le bon vieux temps. J’exige des
réponses. Comment ce tableau a-t-il atterri ici dans ma chambre ?
– Tu es si impatiente, soupire-t-il. Peut-être que c’était censé être une surprise de
la part de ton amant ?
– C’est Wes qui l’a acheté ?
– Pas tout à fait.
Je me crispe et grince des dents, essayant de rester calme.
– Ce n’est pas le moment d’être évasif ! Crache le morceau, Frenchie.
– Je ne crache jamais ! s’offusque-t-il. C’est une habitude dégoûtante.
Je lève les yeux au ciel et me laisse tomber en arrière sur le lit.
– Alec…
– Ton amant n’a pas acheté ce tableau, explique-t-il enfin.
– Alors, comment a-t-il atterri ici ?
Il semble impossible d’obtenir des informations de la part de mon Frenchie
quand il n’a pas envie d’en donner.
– Ma jolie, soupire-t-il. Je vais être honnête avec toi, oui ?
– Oui, merci ! je grogne.
– Ton amant a appelé mon agent car il voulait acheter Adieu Amour. Mais j’ai
refusé de le vendre.
Tiens donc, il refusait de vendre une toile alors qu’il l’a créée spécifiquement
pour la partager avec le monde ?
– Pourquoi ? Je ne comprends pas.
– C’est comme ça. Je t’aime et je voulais m’assurer que ta beauté serait
appréciée par les bonnes personnes. J’avais des règles pour chaque toile, et il y
en a deux dont je n’arrivais pas à me séparer.
– Lesquelles ?
Il baisse d’un ton et pousse un grognement viril et sexy.
– J’aime nous voir faire l’amour, alors j’ai accroché Notre Amour dans ma villa,
en France. Je ne pouvais pas m’en séparer, dit-il.
Mon français est rouillé, mais je crois qu’il répète qu’il n’a pas voulu vendre
cette toile.
– Alec, c’est insensé, le but de l’exposition était de partager ton art !

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– Ah, mais je veux qu’il soit vu par les bons yeux. Chaque tableau a été vendu à
des individus qui ont été approuvés et à qui j’ai parlé personnellement.
Je secoue la tête, confuse. Je suis face à un magnifique portrait de moi en parlant
au téléphone avec Alec, et je suis toujours sans Wes. J’essaie de ne pas devenir
folle, mais c’est de plus en plus dur.
– Et ce tableau ? Comment est-il arrivé ici ?
– J’ai parlé à ton Weston. Il m’a dit qui il était, il m’a expliqué qu’il était au
courant de notre relation. Je m’attendais à du grabuge, mais il s’est comporté en
parfait gentleman. Il a dit qu’il avait vu des photos de l’exposition sur Internet et
qu’il voulait acheter mes œuvres.
– Comment ça ? Toutes ?
– Oui, répond Alec, comme si c’était parfaitement normal.
Moi, je trouve parfaitement anormal que mon surfeur veuille dépenser des
millions de dollars pour des tableaux… de moi ! À son retour, il va falloir que
nous parlions de sa façon de gérer son argent. Pourvu qu’il revienne.
Je me lève et parcours rapidement la maison, mais je ne vois pas d’autres images
de moi.
– Alors ?
– Je lui ai répondu non, explique Alec. Je lui ai dit qu’il ne pouvait avoir qu’une
seule œuvre, et que s’il choisissait bien, il l’aurait.
Waouh. Alec est vraiment bizarre. Il est complexe, étrange, aimant,
démonstratif, exigeant, superbe au lit, mais complètement bizarre. Cela dit, est-
ce que tous les artistes ne le sont pas ?
– Et ?
– Il a bien choisi. Il a choisi le tableau de toi.
La façon dont il dit cela me donne des frissons et je croise les bras autour de moi
puisque personne n’est là pour le faire.
– Tous les tableaux sont de moi, Alec.
– Non. Les autres représentent des moments dans ta vie, des émotions que tu as
accepté de montrer pour mon art. Cette image-là est la seule à montrer qui tu es
aujourd’hui, et il la voulait, alors je l’ai laissé t’emporter.
– Comment ça ?

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– Considère ça comme un cadeau pour toi et lui. Pour votre amour.
– Tu lui as donné un tableau à deux cent cinquante mille dollars ?
– En fait, celui-là en vaut cinq cent mille.
– Bon sang !
– Mia, je t’aime. J’avais prévu de te donner la moitié de son prix de vente, de
toute façon. De cette manière, tu as un magnifique souvenir de qui tu es. Je suis
content qu’il l’ait suspendu au-dessus de votre lit. Je n’aurais pas choisi de plus
bel endroit.
Je renifle, parce que les larmes me montent aux yeux.
– Je t’aime aussi, tu sais. À notre manière.
– Oui, je sais, ma jolie.
Il raccroche en choisissant ses mots.
– Adieu, Amour.
J’espère que ce n’est pas la dernière fois que je parle à mon Frenchie. Même s’il
semble nous avoir donné sa bénédiction, j’aimerais qu’il reste dans ma vie. Il fait
partie de mon voyage et je l’aimerai jusqu’au dernier jour. C’est simplement que
j’aime Wes davantage, je suis amoureuse de lui. Et j’ai besoin qu’il rentre à la
maison.

***

La nuit est plus fraîche qu’en août. Cela dit, il y a des semaines que j’ai froid. Je
lève la tête vers les étoiles et me demande si Wes les voit où il est. J’ai beau
m’être promis de le laisser me contacter, je sors mon téléphone pour l’appeler. Je
tombe directement sur sa messagerie et je m’efforce de respirer calmement et de
ne pas paniquer. Il doit dormir, tout simplement. Il a été recousu au niveau de la
gorge. Détends-toi, Mia. Tu lui as parlé hier !
– Salut… euh… c’est moi. Je voulais juste entendre ta voix. Je suis à la maison,
à Malibu, je dis en regardant l’océan. La maison est silencieuse, je ne sais pas où
est Judi.
Les vagues s’écrasent sur le sable et le vent se lève, me glaçant encore plus.

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– Je trouve génial que tu aies défait mon carton. Peut-être que c’est Judi, mais
j’espère que c’est toi qui l’as fait parce que tu voulais fusionner nos vies. Bon
sang, Wes, tu me manques tellement. Je ne veux pas dormir seule dans notre lit.
J’ai beau les repousser, quelques larmes coulent sur mes joues. Je ne sais
comment lui dire combien il me manque, combien j’ai besoin de lui, que je ne
peux pas être heureuse sans lui.
– Ne m’oublie pas, je chuchote avant de raccrocher.
Pour nous, ces paroles en disent autant que de nous dire que nous nous aimons.
Je regarde le ciel une fois de plus, puis j’emprunte le couloir jusqu’à mon
ancienne chambre. Je ne peux pas dormir dans notre lit sans lui.

***

Je me sens infiniment légère, comme si je ne pesais rien entre ses deux bras
musclés. Je me blottis plus près de la chaleur et respire son parfum familier. Les
seules nuits où je dors bien sont quand je rêve de lui. Au lieu de lutter, ce soir, je
m’autorise à y succomber. Je profite de l’avoir là, avec moi, et je laisse ma joie
pénétrer mes os et s’enrouler autour de mon cœur. J’imagine Wes me mettre au
lit. Dans notre lit. L’oreiller porte son odeur d’océan et ce parfum sucré qui
l’accompagne toujours.
– Tu me manques… je chuchote alors qu’une larme m’échappe.
Quelque chose d’infiniment doux caresse ma joue.
– Je suis là, avec toi, chuchote-t-il dans mon oreille.
Mes rêves sont à la fois les plus beaux et les plus cruels. Ils m’offrent tout ce que
je désire et me l’arrachent à l’aube.
J’ouvre les yeux, épuisée, et crois distinguer une silhouette. Sa silhouette.
– Ne me laisse pas. Reste.
Je cligne des yeux alors que mes paupières sont lourdes. La fenêtre est
entrouverte, laissant entrer la brise. Je m’enfonce davantage sous la couette et la
tire jusqu’au menton. Un bras entoure ma taille et je savoure mon rêve, profitant
d’être dans ses bras, de sentir son souffle sur mon cou.

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Il se plaque contre mon dos et je recule contre mon Wes imaginaire, faisant mine
de ne pas savoir qu’il n’est là que pour une nuit et pour que je dorme
paisiblement. Tout semble réel, sa façon de me tenir, de sentir mes cheveux,
d’effleurer mon cou et mon épaule du bout du nez. Je saisis sa main et passe son
bras entre mes seins, puis j’embrasse ses phalanges et respire son odeur. Je veux
tant m’imprégner de lui que lorsque je me réveillerai demain, je porterai encore
sa marque. Son souffle chatouille mes cheveux près de mon oreille. Mes larmes
coulent et je ferme les yeux pour empêcher ce mirage de disparaître. Au bout de
quelques minutes, sa chaleur et la tranquillité qui m’envahit étouffent ma peine
et mon angoisse.
J’entends sa voix dans les méandres de mon inconscient.
– Dors, ma chérie. Je suis là. Je ne te laisserai plus jamais partir.
– Tant mieux, je marmonne en le serrant plus fort, prête à me laisser emporter
par le marchand de sable.
Chaque partie du corps de Wes me touche d’une façon ou d’une autre, comme il
le ferait s’il était là, et je soupire avant de me laisser engloutir.
– Je ne t’ai pas oubliée, Mia, dit sa voix lointaine. Chaque jour, tu étais là, avec
moi. Si j’ai survécu, c’est grâce au souvenir de toi.

1. Tous les mots en italique dans ce dialogue avec Alec sont en français dans le
texte.

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Chapitre 2

Mon sang bout dans mes veines et un poids m’écrase dans le matelas. J’essaie
de remuer les jambes et réalise qu’elles sont bloquées. Une cuisse poilue
immobilise les miennes. Attendez. Quoi ? J’émerge enfin et me crispe des pieds
à la tête. Mon cœur se met à battre la chamade, frappant si fort dans ma poitrine
que je crains de réveiller la personne derrière moi, car il y a bien quelqu’un dans
mon lit. Ma peau devient moite, une vague d’angoisse s’empare de moi.
Lentement, très lentement, je bouge mes membres quasi paralysés par la peur et
je me prépare à frapper. Je serre les poings et je m’apprête à rouler sur le côté,
comme on me l’a appris au CP en cas d’incendie. Je répète l’enchaînement dans
ma tête.Frappe, roule, cours.
Un grognement masculin résonne dans mon dos et deux bras me serrent plus
fort.
– Je t’entends penser, murmure une voix rauque.
Je suis sur le point de frapper et de courir aussi vite que possible lorsque mon
cerveau reconnaît la voix. Une sensation nouvelle s’empare alors de moi et ma
peau se couvre de chair de poule. Des larmes brûlent mes yeux et je bouge la
tête. La pression sur mes cuisses s’allège suffisamment pour que je puisse me
retourner, et je me retrouve soudain face à celui que je voulais voir plus que tout
au monde.
Wes.
Mes larmes coulent déjà, il pose une main sur ma joue.
– Je t’ai manqué ? demande-t-il en souriant.
J’en perds la tête. Aussi rapide qu’un Ninja, je pousse sur le dos et m’installe au-
dessus de lui. Une partie très impressionnante de son corps semble ravie de me
dire bonjour, mais je m’en occuperai plus tard. Je dépose des baisers sur chaque

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centimètre de son visage, son front, ses joues, son menton et sa barbe qui me
chatouille. Je prends néanmoins soin d’éviter son cou recouvert d’un pansement.
Mon Dieu, je n’arrive pas à croire qu’il est là en chair et en os.
Je pose enfin mes lèvres sur les siennes, et il ouvre la bouche. Sa langue est
chaude, mouillée, et je réalise combien elle m’a manqué pendant deux mois. Je
prends son visage dans mes mains et nos langues commencent leur danse. Ses
mains caressent mon dos et il avance une cuisse dans mon entrejambe,
m’apaisant autant qu’il m’excite.
– Besoin d’être en toi, Mia. Répare-moi, grogne-t-il en reculant brièvement le
visage.
Sans rompre notre baiser, je me dresse sur mes genoux pour me débarrasser de
ma culotte. Ensuite, je me débats avec son boxer et le baisse le long de ses
jambes, finissant de l’enlever avec mes pieds. Sa verge est longue, épaisse et
dure comme du fer, prête à rentrer à la maison.
Je n’ai pas besoin de préliminaires, de caresses ni de paroles coquines. Il ne
s’agit pas de faire l’amour ni de baiser. Il s’agit de reprendre possession l’un de
l’autre. C’est animal et passionné.
Je me soulève de nouveau, étale son liquide préséminal sur son gland et grogne,
salivant à l’idée de le prendre dans ma bouche. Or, j’ai surtout besoin de cette
connexion intense et charnelle. Je m’assieds brusquement sur lui et crie lorsque
sa queue épaisse perce mes entrailles. Mon souffle est coupé tandis que ma
chatte se contracte et pulse autour de son érection. Je tombe en avant et pose ma
main à plat sur son cœur, plongeant mon regard dans ses grands yeux verts.
– Wes, tu es bien réel.
– Et toi, tu es la plus belle chose que j’aie jamais vue, soupire-t-il avec un regard
lourd de sous-entendus.
Ses yeux me disent combien je lui ai manqué, combien il me désire et que c’est
notre amour qui l’a ramené à la maison.
Il empoigne la chair de mes hanches assez fort pour y laisser des marques, mais
je m’en contrefiche, ça me prouve qu’il est bien là. Jamais je ne le laisserai
repartir. Il saisit ensuite mon débardeur et le passe au-dessus de ma tête.

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J’avance et recule le bassin et il retient sa respiration avant d’expirer, laissant
l’air siffler entre ses dents, puis il ferme les yeux.
– Ne ferme pas les yeux ! je dis d’une voix tremblante.
Il se lèche les lèvres et me soulève de sorte que sa verge soit à peine en moi, puis
je me laisse retomber sur lui. Nous retenons nos souffles et mon sexe se
contracte alors que le sien gonfle en moi.
– Pourquoi, Bébé ? demande-t-il, soulevant ses hanches pour atteindre avec sa
queue ce point qui me fait perdre la tête.
Je caresse son visage, effleurant chacun de ses traits, m’assurant qu’il est bien
réel. Lorsque j’atteins ses lèvres, il suce et mordille mes doigts, embrasant
encore le sang qui coule dans mes veines. Je bouge d’avant en arrière, de haut en
bas, Wes me laisse décider du rythme.
– Pourquoi ? répète-t-il en jouant avec mes tétons.
Je m’appuie sur son torse pour me soulever et me rabattre sur lui, frottant mon
clitoris sur l’os de son bassin.
– Putain, chérie, tu vas me faire jouir.
– C’est le but, je rétorque pour ne pas répondre à sa question.
Toutefois, Wes n’est pas dupe et il bloque mon bassin alors que je suis assise sur
lui, m’empêchant de bouger. Je suis immobilisée par son membre viril et je
gémis, émerveillée d’être si remplie, attristée de ne plus pouvoir le chevaucher
jusqu’à l’orgasme.
– Dis-moi.
Je lève les yeux au ciel et libère la tension qui m’accable depuis des semaines.
– Bébé, dans mes rêves, tes yeux sont toujours fermés, je réponds simplement.
Ma réponse est vague, pour masquer la vérité.
– Tu rêvais beaucoup de moi ?
Sa question me surprend et décuple la peur qui m’envahit, celle de me réveiller
seule, le cœur brisé. Je ne réponds pas tout de suite, mais il remue son sexe en
moi pour y dessiner un cercle, faisant pulser mon clitoris.
– Alors, chérie ?
Je hoche la tête et me mords la lèvre, savourant ses mouvements. Jamais plus je
ne le laisserai me quitter, point barre.

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– Tu as joui en pensant à moi ? il demande alors que ses pupilles s’assombrissent
et se dilatent.
Je soupire et me détends quand il m’autorise à bouger le bassin, cherchant cette
délicieuse libération.
J’inspire doucement et décide de lui répondre, même si j’ai honte. Il est rentré, et
je ferais n’importe quoi pour lui.
– Parfois. En général, tu disparaissais et je me réveillais seule dans un lit qui
n’était pas le mien.
Il empoigne ma taille et m’aide à me relever, puis il contrôle la vitesse à laquelle
je redescends sur lui. Sa verge épaisse écarte ma chair sensible, déclenchant une
nuée de frissons annonciateurs.
– Ne ferme pas les yeux, je répète.
– Je ne vais nulle part, Bébé.
Il se soulève et recule pour s’adosser à la tête de lit. Son pénis plonge encore
plus profondément en moi et m’arrache un cri. Je laisse tomber ma tête en arrière
et mes cheveux chatouillent mes fesses et ses cuisses. Une de ses mains
emprisonne ma taille et l’autre se pose sur les creux de mes reins, remontant
lentement, caressant mes omoplates avant de plonger dans mes cheveux et de les
empoigner, m’obligeant à lever la tête jusqu’à ce que nous soyons face à face,
yeux dans les yeux.
Il tire de nouveau mes cheveux et la douleur se transforme vite en plaisir. Je
gémis, la bouche contre la sienne.
– Ça, ma chérie, ce qu’on a, toi et moi, c’est ce qui m’a aidé à survivre. Je te dois
la vie.
Ses yeux se remplissent de larmes alors qu’il me dévisage intensément, comme
s’il pouvait voir au plus profond de mon âme. Je secoue la tête et effleure ses
lèvres avec les miennes.
– Non, Wes. C’est moi qui vis pour toi. Tu me permets de croire que je mérite
mieux et, Bébé, mon mieux, c’est toi… tu es tout pour moi.
Chacun tient le visage de l’autre et nos bouches fusionnent de nouveau, prenant
tout, donnant tout, s’aimant à la folie. L’amour que nous avions auparavant

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n’était rien comparé à ceci. Je sais que jamais je n’aimerai quelqu’un de tout
mon corps et de toute mon âme comme j’aime Weston Channing.
Il recule la tête et effleure mon visage du bout des doigts. Il est toujours en moi
mais ne bouge pas, comme s’il se contentait de ne former qu’un seul corps sans
rechercher de plaisir.
– Bientôt, je t’épouserai.
Son souffle est chaud contre mon oreille et ses paroles embrasent mon sang. Je
me contracte sur sa verge et lui arrache un grognement.
– Est-ce que c’est une demande ?
J’avance le bassin, lui rappelant que nous sommes connectés. Je soupire, me
soulève sur les genoux jusqu’à ce qu’il se retire presque entièrement, puis je
m’abaisse lentement.
Il soupire à son tour et joue avec mes tétons avant d’en prendre un dans la
bouche. Je tiens sa tête contre ma poitrine, excitée à n’en plus finir. Il le suce fort
avant de le libérer, couvert de salive, luisant dans la lumière du matin.
– Je ne te demande pas, parce que tu n’as pas la possibilité de dire non, dit-il
avant de s’attaquer à l’autre téton.
– Ah bon ? je demande en dessinant un cercle avec mon bassin.
– Ce corps est à moi, grogne-t-il.
Des décharges de plaisir se propagent partout en moi et me font mouiller de plus
belle lorsqu’il dépose des baisers jusque sur mon cœur.
– Ce cœur est à moi.
Il lèche ma peau avant de joindre les mains sur ma nuque.
– Cet amour est à nous, déclare-t-il en m’embrassant fougueusement.
Weston a raison. Cet amour est à nous. D’ailleurs, il passe l’heure qui suit à me
montrer à quoi ressemble notre amour, me faisant perdre la tête encore et encore.
*
* *
Wes s’endort après que nous avons fait l’amour, et je regarde sa poitrine se
soulever lentement. Je ne pensais pas que le simple fait de regarder l’homme que
j’aime dormir et respirer près de moi serait si apaisant. Il m’a fichu la trouille de
ma vie lorsque je me suis réveillée dans ses bras. Je passe ma main dans ses

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cheveux, soulagée qu’il soit en sécurité à la maison. Bien sûr, il doit encore se
remettre d’un grave traumatisme, mais au moins il est ici avec moi.
La porte de la chambre s’ouvre et Judi entre. Elle me voit, puis elle voit Wes.
Elle pousse un cri et sa pile de serviettes propres se met à trembler dans ses bras.
Je souris et son visage s’illumine alors que ses joues s’empourprent
délicatement. Elle pose le linge sur la commode, puis elle tourne les talons et
s’en va.
Je me lève sans faire de bruit et j’enfile le t-shirt de Wes, laissant son odeur
m’envelopper. Je sors sur la pointe des pieds et vais dans la cuisine, où je trouve
la nourrice de Wes en train de sortir diverses boîtes du placard.
– Judi ?
Je fais le tour du comptoir et elle s’immobilise. Tout à coup, elle court vers moi
et m’écrase dans ses bras.
– Mon fiston est à la maison ! Dieu merci ! s’exclame-t-elle tout en pleurant et
riant à la fois. On va pouvoir former une famille de nouveau.
Revoilà ce terme qui est devenu si important pour moi.
– Eh bien, si Wes a son mot à dire, il se peut que ça ne tarde pas, tu sais.
Elle recule sans lâcher mes bras et me dévisage en fronçant les sourcils.
– Comment ça ? Est-ce qu’il t’a demandé… ? demande-t-elle d’une voix tout
excitée.
– Il ne m’a pas demandé de l’épouser, non.
– Ah ?
Je secoue la tête, prête à lui dire ce qu’elle veut tant entendre.
– Il m’a annoncé qu’il allait m’épouser.
Elle sourit jusqu’aux oreilles, folle de joie pour celui qu’elle a vu grandir.
– Je t’avais dit que quand Wes avait pris une décision, rien ne pouvait l’arrêter.
Elle se tourne et sort une poêle d’un placard ainsi que tout un tas d’ustensiles.
– Qu’est-ce que tu fais ?
Je regarde la pendule sur le mur, il est tout juste midi passé.
– Je vous prépare un petit déjeuner de bienvenue comme jamais vous n’en avez
goûté, mon petit.

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Bien évidemment ! Il n’y a que Judi pour montrer sa joie en préparant une
assiette pleine d’amour et je mangerai tout jusqu’à la dernière miette. Mon
estomac grogne déjà à l’idée d’un repas maison. Il faut dire que je n’ai pas
vraiment mangé depuis que j’ai quitté le Texas il y a un mois.
Je me sers une tasse de café lorsque deux bras musclés saisissent ma taille.
– Hmmm, tu n’étais pas là quand je me suis réveillé. Je n’aime pas ça, dit-il
d’une voix très sérieuse.
C’est étrange, venant de mon surfeur habituellement si détendu.
J’éclate de rire et je m’appuie contre lui, sentant quelque chose de râpeux sur ma
tempe.
– Tiens, c’est nouveau ça, non ?
Avant, lorsque nous dormions dans le même lit, le premier à se réveiller laissait
l’autre se reposer. C’était notre habitude. Apparemment, les choses ont changé.
– Ne pose pas de questions auxquelles tu ne veux pas de réponse, gronde-t-il
sèchement.
Je suis certaine que le Wes détendu que j’ai connu est encore là, mais il semble
être enfoui sous cette version si différente.
– Aïe ! je m’exclame lorsque quelque chose me pique sur la tempe.
Je lève une main et mes doigts rencontrent un tissu dur.
– Putain ! siffle-t-il en saisissant mes hanches.
Je me tourne pour évaluer les dégâts et je découvre un grand pansement blanc
sur une partie de son cou, dont le centre se couvre de rouge.
– Mon Dieu, ta blessure ! Merde ! J’aurais dû faire plus attention.
C’est alors que je réalise tout ce qui a changé chez lui. Maintenant que mon
besoin de me reconnecter avec lui est assouvi, je peux le regarder d’un œil
critique. Son torse est traversé par plusieurs marques rouges et des bleus. Sur un
de ses avant-bras, je vois des cloques qui ressemblent à des brûlures et je les
étudie avec des doigts tremblants.
– Bébé… je chuchote d’une voix tremblante.
– Je vais bien. On est tous les deux à la maison, maintenant. On va pouvoir
tourner la page, répond-il d’un ton plein de colère.

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– Mais c’est faux, je dis en embrassant chaque blessure et chaque cicatrice que je
rencontre. Pourquoi ta blessure par balle n’a-t-elle pas mieux guéri ?
– Elle s’est rouverte quelques jours après l’opération, il fallait plus de points de
suture. Apparemment, il faut rester au lit tout le temps et éviter les mouvements
brusques pour que la cicatrice ne se rouvre pas.
Il sourit et je fronce les sourcils. J’ai failli devenir folle quand il n’était pas là, je
n’imagine même pas ce qu’il a dû ressentir. Wes a dû être un patient horrible.
Je poursuis l’inspection de son corps et je remarque que les cloques sur son bras
gauche sont en fait des papules rouges couvertes de croûtes. Je me baisse pour
les embrasser, mais il m’arrête et secoue la tête.
– Ne fais pas ça. Je ne veux pas que tu sois marquée par ce mal.
Sa mâchoire est contractée et ses yeux sont si noirs qu’on ne voit presque plus
ses superbes iris verts. J’ignore sa mise en garde et je regarde de près une des
marques. Il ferme les yeux et grince des dents.
– Tes yeux, Bébé, je lui rappelle.
Il sait que je ne me suis pas remise de son enlèvement, et le seul moyen d’y
parvenir est de le faire ensemble. Il faut que nous ouvrions nos blessures pour
nous en débarrasser et guérir.
Il plonge son regard dans le mien, et ses narines se dilatent. Sans le quitter des
yeux, je pose mes lèvres sur une des brûlures de cigarette. J’avais vu un des
gardes de Blaine infliger ce genre de punition à un type qui lui devait de l’argent.
Les terroristes ont torturé sa délicieuse peau hâlée de sorte qu’il ne pourra jamais
oublier où il était ni ce qu’il a subi. Je veux effacer ces souvenirs en les
remplaçant par quelque chose de beau. Je fais donc la seule chose que je peux,
j’embrasse chacune de ses marques pour reprendre possession de mon homme.
– Ce corps est à moi, je chuchote, lui rappelant ses propres paroles.
Je pose ensuite mes lèvres sur sa poitrine, au-dessus de son cœur. Il pousse un
grognement, mais ne me quitte pas des yeux.
– Ce cœur est à moi.
Je me lèche les lèvres, monte sur la pointe des pieds, et je passe mes mains dans
sa nuque en prenant soin de ne pas toucher son pansement.

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– Cet amour est à nous, je conclus avant de l’embrasser langoureusement,
profondément, déversant tout mon amour dans ce baiser.
– Vous allez vous bécoter toute la journée ou vous allez manger le festin que j’ai
préparé ? dit Judi, de l’autre côté de la cuisine, interrompant ce qui promettait
d’être une nouvelle partie de jambes en l’air.
Wes rit contre ma bouche, me serrant contre lui, tandis que son autre main palpe
ma fesse.
– On a toute l’éternité, Bébé. Mangeons. Tu es trop maigre, je dis en sentant ses
côtes lorsque je caresse son torse.
Il a perdu du poids, mais cela n’affecte pas la perfection de ses muscles ni ses
abdos d’acier. Les creux de ses hanches sont plus prononcés, formant une flèche
vers ce membre divin qui me fascine tant. Lorsque je caresse sa queue, je
découvre qu’il est déjà dur.
– Après ?
Il saisit mon autre fesse et se frotte contre mon clitoris. Mon Dieu, il lui suffit de
me toucher pour m’exciter.
– D’accord, ma belle, mais tu es à moi. Toute la journée, et toute la nuit.
Je ricane et relève mes cheveux en un chignon brouillon. Des mèches en
retombent tandis que les yeux de Wes remontent lentement le long de mes
jambes nues puis de ma poitrine, où son t-shirt est étiré sur mes seins sans
soutien-gorge. Il me dévore des yeux et je me retrouve à serrer les cuisses,
cherchant à libérer la pression qui s’y accumule. Je lui lance un clin d’œil.
– Espèce d’obsédé !
– Chérie, tu n’as pas idée, chuchote-t-il dans mon oreille. J’ai survécu grâce à
une seule pensée, celle de ton corps, de tes lèvres roses sur ma queue et de ta
chatte chaude et humide. Je suis plus obsédé que jamais par ton cul. J’en ai
besoin.
J’ai besoin de toi. Toujours.
– On pourrait peut-être sauter le petit dej ? je susurre en me collant à lui, déjà
mouillée et prête à le prendre en moi.
– C’est hors de question ! J’ai préparé un festin pour le retour de mon fiston.
Venez ici, vous deux ! gronde Judi.

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Wes et moi éclatons de rire, épuisés, heureux et plus excités que jamais.
– Très bien Judi, on va manger, ne t’en fais pas, répond Wes.
Je fais la moue, faisant mine de bouder lorsque je m’assieds à table, face à mon
assiette pleine de bacon, d’œufs brouillés, de pancakes et de fruits frais. Je suis
morte de faim pour la première fois depuis une éternité. Je regarde Wes gémir en
dévorant ses pancakes frais et suis encore plus affamée. Je mange si vite que
lorsque j’ai fini, je ne suis pas certaine de pouvoir me lever.
– Judi, tu t’es surpassée, déclare Wes en finissant sa dernière bouchée.
Il cligne des yeux, clairement épuisé. Il a traversé plus d’épreuves en un mois
que la plupart des gens n’en connaîtront au cours de leur vie.
– Que dis-tu d’une douche ? je propose.
Il ouvre grand ses yeux verts qui ont la couleur de l’herbe fraîchement coupée. Il
descend de son tabouret, prend ma main et m’aide à me lever.
– Après toi, ma chère.
– Tu veux juste mater mes fesses ! je réponds en riant et en me déhanchant, le
précédant jusqu’à notre chambre.
– Absolument !

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Chapitre 3

J’entre dans la cabine de douche et me mets sous le jet. Wes a un de ces


pommeaux qui s’élève très haut et coule comme de la pluie, en plus de deux jets
sur chaque mur. Je suppose que lorsqu’on est surfeur, les jets aident à soulager
les courbatures après une matinée passée dans l’eau froide de l’océan Pacifique.
Wes entre dans la salle de bains, baisse son pantalon de pyjama et ouvre la porte
vitrée. Je ne me prive pas de mater son corps. Il a enlevé le pansement sur son
cou et je vois une ligne de points de suture s’étendant depuis la jugulaire jusqu’à
la nuque. Je m’approche de lui, son érection appuie sur mon ventre. Je le sens se
contracter des pieds à la tête, mais il me laisse inspecter sa blessure.
– Comment tu as survécu à ça ? je demande, consciente que la plupart des
blessures au cou sont fatales.
– Gina, répond-il comme si c’était évident.
Je fronce les sourcils et réalise que je n’ai même pas demandé si elle était en vie.
– Elle s’en est sortie ?
Il hoche la tête et se crispe encore plus.
– Techniquement, oui.
C’est tout ce qu’il dit, et je ne lui en demande pas davantage. Wes est à la
maison. Il me racontera ce qui s’est passé quand il sera prêt. Je ne suis pas
experte, mais je sais qu’il peut être dangereux de forcer quelqu’un à parler. Je ne
voudrais surtout pas qu’il prenne ses distances si j’insistais trop, je préfère
l’étouffer avec un trop-plein d’amour, comme il l’a fait avec moi après ce qui
m’est arrivé avec Aaron. Je l’interrogerai plus tard.
– Tant mieux.
Il déglutit et empoigne ma taille, me ramenant contre son torse.

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– Quand ils m’ont tiré dessus, elle a agi très vite. Elle a couvert la plaie et elle a
mis assez de pression dessus pour que je ne perde pas trop de sang. Quand les
secours sont arrivés, j’ai été le premier dont ils se sont occupés.
– Ça fait mal ? je demande en effleurant la plaie.
– Oui. Chaque fois que je bouge ou que je déglutis.
Préférant changer de sujet pour continuer de fêter nos retrouvailles, je me penche
et l’embrasse tout autour de sa plaie avant de descendre sur son torse.
– Et si je te faisais penser à autre chose ?
Il sourit, et son regard se remplit de désir. Il se lèche les lèvres et je regarde avec
envie sa langue, mais une autre partie de son corps réclame toute mon attention.
J’embrasse sa poitrine et trace un trait avec ma langue jusqu’à son nombril, puis
je me mets à genoux. Wes saisit la serviette que j’ai suspendue sur la vitre et la
pose par terre. L’eau noircit immédiatement le tissu beige et il hoche la tête
quand je fronce les sourcils, confuse.
– Pour tes genoux. Je ne veux pas que tu aies mal.
Je souris et mets la serviette pliée sous mes genoux avant d’empoigner ses
hanches. Je m’avance et effleure son bas-ventre avec ma bouche ouverte. Il
appuie une main sur chaque mur tandis que j’empoigne la base de son sexe. Son
érection pointe vers mon visage, effleurant ma lèvre inférieure. Sans le quitter
des yeux, je mets un coup de langue sur son gland.
– Putain ! grogne-t-il en fermant les yeux.
– Ouvre les yeux, Wes, je le supplie d’un ton désespéré.
Il plonge une main dans mes cheveux et en saisit une poignée.
– Mia, ma chérie, je suis là. J’attends simplement que ma femme mette ses
superbes lèvres sur ma queue et qu’elle me fasse tout oublier.
J’ai toujours adoré que Wes me parle crûment, ça m’excite. Des frissons
parcourent mon corps depuis la pointe de mes doigts jusqu’à mon clitoris
pulsant, et je me dépêche d’avaler sa grosse verge avant qu’il n’en dise plus.
– Jésus Marie Joseph, c’est tellement bon, grogne-t-il alors que je me retire en le
léchant.
J’adore qu’il parle autant, je me sens puissante quand je sais que je donne autant
de plaisir à mon homme. Je le lèche de chaque côté et le taquine. Une litanie de

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jurons et de soupirs lui échappe alors que je palpe ses testicules et les fais rouler
dans ma main. Il continue de tirer sur mes cheveux, ce qu’il ne faisait pas avant.
C’est presque comme s’il avait peur que je le laisse sur sa faim. Ou alors, peut-
être qu’il veut simplement garder le contrôle.
Cependant, je le sens griffer ma nuque quand il avance et recule lentement dans
ma bouche. Je lève la tête et je n’aime pas ce que je vois. Ses yeux sont ouverts,
mais ils ne sont pas sur moi. Ils sont rivés sur le mur, perdus. Je recule, il
empoigne plus fort mes cheveux, me forçant à reprendre son sexe dans la
bouche. Je ne suis pas certaine qu’il soit ici, dans notre maison des Malibu Hills,
et encore moins dans la douche avec moi. Je secoue la tête et libère sa queue.
– Bébé, reviens-moi. Wes ! je crie quand il ne réagit pas.
Il sursaute et baisse la tête.
– Qu’est-ce qu’il y a ?
Il cligne plusieurs fois des yeux et caresse délicatement mon visage du bout des
doigts. Voilà qui est mieux, cela ressemble bien plus à l’homme que j’aime.
– Garde les yeux sur moi. Je veux que tu me regardes t’aimer.
Il me sourit, et c’est une des plus belles choses que j’aie vues depuis qu’il est
parti. Ce sourire me promet des promenades sur la plage, des sessions de surf
dans l’océan, des dîners gastronomiques et des câlins amoureux. Mon mec est là,
en vie, avec moi.
Je le prends de nouveau dans ma bouche et redouble d’efforts sans le quitter des
yeux. Il caresse mon visage et retient son souffle en sifflant, pantelant et
gémissant de plaisir.
– Bon sang, Mia, ta beauté me ravage. Je ne suis pas entier sans toi, dit-il quand
je fredonne en le suçant. Tu vas me faire jouir. Arrête, je vais te prendre contre
le mur de la douche, ordonne-t-il.
Ce n’est pas ce que je veux. Je l’ignore et le suce encore plus fort en râpant
légèrement sa verge avec mes dents. Il avance lentement les hanches, une main
sur le mur, l’autre sur mon visage, caressant mes lèvres étirées sur sa queue
épaisse.
– Tu vas m’avaler, Bébé ?

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Je hoche la tête et le prends profondément dans ma gorge en gémissant. Je sais
qu’il n’est pas loin et que les vibrations de mes cordes vocales le feront chavirer.
– Putain, mon Dieu, Mia !
Il éjacule brusquement et ne me quitte pas des yeux en se déversant en moi, me
laissant avaler chaque giclée de sa semence salée.
Lorsque le mouvement de ses hanches ralentit, je reste avec lui, laissant ma
langue glisser sur sa verge ramollie, le léchant en l’embrassant, jusqu’à ce qu’il
cesse enfin de bouger. Il passe ses mains sous mes aisselles et me soulève, me
serrant contre lui pour m’embrasser lentement, langoureusement.
Nous nous embrassons jusqu’à ce que l’eau tiédisse et que son pénis durcisse de
nouveau. Il plonge ses doigts entre mes jambes et gémit en constatant la facilité
avec laquelle mon corps l’accueille. Mon entrejambe est trempé et ça n’a rien à
voir avec la douche. Ce qui m’excite, c’est de l’avoir fait jouir, agenouillée
devant lui, soumise à son plaisir. J’adore tailler des pipes, mais j’aime surtout
avoir ce pouvoir sur un homme aussi fort.
– Viens. Il y a encore des parties de ton corps que je n’ai pas revues, dit-il en me
sortant de la douche et en m’enveloppant dans une serviette épaisse.
– Ah oui ?
– Oui. Maintenant, allonge-toi sur le lit et écarte les cuisses. Je veux enfouir ma
tête entre tes longues jambes et te regarder frémir quand je te fais jouir. Prépare-
toi, Mia, parce qu’une fois ne va pas me suffire.
Son regard brûlant me toise alors que je laisse tomber ma serviette. Je m’allonge,
écarte les jambes, et ses yeux deviennent noirs de désir. J’essaie de ne pas baver
lorsqu’il fait tomber à son tour sa serviette, mais je suis déjà prête à le reprendre
dans ma bouche alors que je viens de le sucer. Peut-être choisira-t-il un petit
soixante-neuf pour qu’on puisse tous les deux se dévorer.
Il pose un genou sur le matelas, puis un autre, et rampe entre mes jambes. Il
écarte les pétales de mon sexe et se baisse pour me lécher de bas en haut.
– Hmm. Tu sais ce que je vais te faire ce soir, Bébé ? demande-t-il d’une voix
lourde de désir.
J’attends, pantelante. Son pouce fait le tour de mon clitoris et je soulève les
hanches, cherchant plus de friction.

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– Je vais jouer avec ta chatte mouillée jusqu’à ce que tu t’évanouisses. Ensuite,
je vais me glisser en toi et m’endormir, la tête assez près de tes seins pour
pouvoir les lécher. Ça te va, chérie ?
– Putain Wes… je chuchote.
– C’est parti, dit-il en frappant fort ma cuisse avant de plonger la tête entre mes
jambes.
*
* *
Des cris atroces rompent le calme d’un des plus beaux rêves de ma vie. Wes et
moi étions sur une île tropicale, et notre seule occupation était de faire l’amour, à
longueur de temps. C’était sexy, coquin, et une bonne idée de lune de miel,
jusqu’à ce que les cris de l’homme allongé à côté de moi déchirent ce pays
joyeux et me projettent tout droit en enfer.
Wes se tord dans tous les sens sous la couette, agitant la tête de gauche à droite,
se cambrant au point de se décoller du matelas, sans jamais cesser de crier. Sa
peau est couverte de sueur. J’essaie de le toucher, mais je l’ai à peine effleuré
qu’il dégage ma main.
– Ne me touche pas, putain ! Lâchez-la ! hurle-t-il.
Bon sang, qu’est-ce qui se passe ? Je me lève et allume la lumière, mais ça ne le
réveille pas. Il est encore dans les griffes de son cauchemar. J’ai lu quelque part
qu’il ne faut pas toucher quelqu’un lorsqu’il s’agite dans son sommeil parce
qu’il pourrait vous blesser. Ne sachant pas quoi faire, je saisis le verre d’eau sur
ma table de chevet, je croise les doigts pour que tout se passe bien et je vide le
verre sur mon homme. Il ouvre grand les yeux et s’assied dans le lit en frappant
l’air autour de lui, les poings fermés, prêt à frapper. Je suis contente d’avoir lu
cet article, sinon je serais déjà par terre avec un œil au beurre noir.
– Mia, Mia ! hurle-t-il en regardant autour de lui, hagard, perdu, désespéré.
Je me rapproche suffisamment pour qu’il me voie.
– Oh, Dieu merci, tu vas bien.
Il m’empoigne par les hanches, me jette sur le lit et monte sur moi. Les draps et
la couette atterrissent par terre alors qu’il embrasse et mordille mon cou, puis
mes épaules et mes seins. Il n’enlève pas ma nuisette Aubade, baissant

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seulement les bretelles pour révéler ma poitrine. Il prend un téton dans sa
bouche, en même temps qu’il passe sa main entre mes jambes pour plonger deux
doigts en moi. Je suis encore gonflée de nos dernières parties de jambes en l’air
mais ça ne l’arrête pas. Il est perdu dans ses pensées et je suis son antidote.
Il baisse brusquement ma culotte et, moins d’une minute après l’avoir réveillé, je
suis clouée au matelas par sa grosse verge. Il agit comme une machine,
s’enfonçant en moi sans délicatesse, avec pour seul objectif d’oublier son
cauchemar atroce.
– Je t’aime, je t’aime, je t’aime, chante-t-il en me pilonnant. Ne pars pas.
Je contracte mon sexe au moment où son bassin écrase mon clitoris. Des frissons
de plaisir se fraient un passage douloureux dans mes veines. Je suis l’esclave du
corps de cet homme, et il est mon maître. Ses yeux sont fermés et il mord sa
lèvre inférieure en me baisant comme un animal. Il serre fort mes hanches,
écrasant nos corps l’un contre l’autre. Il commence bientôt à parler rapidement,
comme si je n’étais pas là pour l’entendre.
– Envie de toi.
– Besoin de toi.
– Reste.
– Ne pars pas.
– Je t’aime.
– Ma Mia.
Je passe mes bras dans son dos et entoure sa taille avec mes jambes, tenant mon
homme aussi fort que possible, cherchant à le protéger comme je peux.
Ses allers-retours ralentissent et il ouvre les yeux.
– Mia, tu es là. Ma Mia, susurre-t-il d’une voix pleine d’adoration.
– Wes, je suis là, avec toi.
Je le serre encore plus fort pour qu’il sente la chaleur de ma peau et la force des
membres qui l’entourent.
Des petites lignes se dessinent autour de ses yeux vitreux.
– Que ça parte. Il faut que ça parte, murmure-t-il d’un ton désespéré.
Je ferais n’importe quoi pour chasser ce dont il parle et remplacer le vide avec
tout mon amour, ma lumière, et tout ce qui fait que nous sommes nous.

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– Prends en moi ce dont tu as besoin, je chuchote en embrassant son front, ses
tempes et tout ce que je peux atteindre.
Il accélère peu à peu ses va-et-vient et, bientôt, je ne peux plus rien faire que
m’accrocher. Il passe les bras dans mon dos pour tenir mes épaules et créer un
effet de levier qui lui donne une puissance incroyable. Il accélère encore le
rythme et me perce si fort que j’en grince des dents. Cela dure longtemps et je ne
peux qu’attendre. Vers la fin, lorsqu’il est sur le point de jouir, il plonge sa main
entre nos deux corps et frotte mon clitoris avec son pouce jusqu’à ce que je
jouisse aussi. Le besoin qu’a Wes de me satisfaire me rappelle que l’homme que
j’aime est, pour l’instant, perdu. Et qu’avec mon aide, il reverra la lumière.
*
* *
Les jours qui suivent se ressemblent. Wes me fait l’amour la journée, quand il
est un peu plus lui-même, et il me baise la nuit, prenant dans mon corps ce dont
il a besoin pour repousser les cauchemars et revenir à la maison.
Épuisée après qu’il m’a prise sauvagement pour la quatrième nuit d’affilée, je
me tourne pour m’allonger sur sa poitrine. L’angoisse et la peur qui le
contrôlaient quand je l’ai réveillé de son cauchemar et durant notre baise
effrénée l’ont enfin quitté quand il a joui. Longtemps après, il me vénère avec de
doux baisers et des paroles d’amour pleines de remords. Il regrette de m’utiliser
à des fins égoïstes et il m’aime parce qu’il sait que je le laisserai recommencer
jusqu’à ce qu’il soit libéré du mal qui vit en lui.
Je comprends combien ce qu’il a vécu est atroce et que le répit qu’il trouve dans
mon corps ne suffit pas. Le monstre qui sévit dans sa tête et dans ses terreurs
nocturnes doit être éliminé, comme j’ai dû me débarrasser du mien après
l’agression d’Aaron. Je décide donc qu’il est temps de prendre le taureau par les
cornes.
– Bébé, tu dois parler à quelqu’un de ces cauchemars et de ta façon de les
affronter, je dis en l’embrassant sur le cœur.
– Tu es en colère parce que je me sers de ton corps ? Ce n’est pourtant pas mon
intention, tu sais. Bon sang, Mia, je ne sais pas… Il n’y a que toi pour l’arrêter,
dit-il en passant ses mains dans ses cheveux.

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– Wes, ne t’en fais pas, j’adore être celle qui te donne ce dont tu as besoin pour
guérir. Mais qu’est-ce que j’arrête, au juste ?
C’est la première fois que je lui pose la question depuis qu’il est rentré.
– Les souvenirs, dit-il en plongeant son regard dans le mien. Ils surgissent quand
je dors, et je n’arrive pas à m’en débarrasser.
– Jusqu’à ce que je te distraie. C’est ça ? je dis en souriant jusqu’aux oreilles et
en jouant des sourcils pour alléger la tension.
– Ouais, en gros, avoue-t-il en me regardant timidement.
Il soupire et caresse mon dos de bas en haut. Chaque nuit, après qu’il a utilisé
mon corps, il semble ressentir le besoin de renouer avec moi sur un plan
émotionnel et il passe un long moment à me chouchouter, je crois qu’il cherche à
s’assurer que je vais bien.
– Est-ce que tu veux bien m’en parler ?
Je retiens ma respiration et essaie de lui montrer que je suis assez forte pour
l’entendre.
– Chérie, je ne veux pas que tu aies ces images dans la tête, dit-il.
– Pourtant, je t’ai parlé d’Aaron.
Il est sur le point de dire que ce n’est pas pareil, mais je le devance.
– Je sais que ce sont des choses différentes, mais c’était traumatisant pour moi.
Ça m’a fait beaucoup de mal et tu souffres beaucoup, Bébé. Pour former une
équipe, on doit pouvoir supporter la douleur de l’autre. Je veux endosser un peu
de ta souffrance pour qu’elle ne pèse plus autant sur toi. Si on est deux à porter
le fardeau, il sera moins lourd. Commence par quelque chose de simple. Dis-moi
ce qui s’est passé quand on t’a tiré dessus.
Wes ferme les yeux et déglutit. Il met tant de temps à les rouvrir que je finis par
me demander s’il ne s’est pas endormi.
– On était enchaînés au mur, les bras au-dessus de la tête, attachés par des
cordes. Je n’ai jamais été aussi ankylosé à force de ne pas bouger. Ils passaient
des heures à nous mettre des coups de pied, à nous jeter des choses dessus ou à
nous cracher à la figure. En gros, ils nous ont fait le pire que tu puisses imaginer.
Ce jour-là, je savais qu’il se tramait quelque chose. Les terroristes ne faisaient
plus de blagues, ils ne jouaient plus avec les jouets que nous étions. Ils étaient

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étranges et ils parlaient d’une voix sèche, comme s’ils avaient peur. Peut-être
qu’ils savaient ce qui allait se passer. Tout à coup, on a entendu des tirs et des
hélicoptères. Je ne savais pas quoi penser.
Il inspire profondément et je dégage une mèche de son front. Il ne parle pas
pendant un moment et je crains qu’il ne veuille pas continuer. Je ne veux pas
insister, mais je sais qu’il a besoin de parler.
– Qu’est-ce qui s’est passé, après ?
Il ouvre les yeux, révélant un regard sombre.
– Deux des hommes sont tombés à genoux et se sont mis à prier, morts de peur.
Mais juste après, quand les tirs se sont rapprochés et que j’entendais des pas et
des ordres criés en anglais, un des hommes a levé son arme et s’est mis une balle
dans la tête. L’autre m’a regardé, dégoûté, et s’est mis à tirer dans tous les sens.
Gina a poussé un cri quand ses bras sont retombés le long de son corps. Une des
balles l’a touchée à la jambe, mais une autre a coupé la corde, libérant ses mains.
Le souffle de Wes semble se faire de plus en plus laborieux, alors je m’avance
pour embrasser son torse, son cou, son front, son nez.
– Je suis là, Bébé. Continue. Raconte-moi la suite.
Il saisit ma nuque et me regarde dans les yeux.
– Le type a marché vers moi et a crié quelque chose. Il a pointé son arme sur ma
tête et au moment où il a tiré, la porte a volé en éclats. Littéralement, elle a
disparu dans un nuage de fumée. Un autre tir a retenti alors que l’homme
regardait vers la porte, et son corps est tombé, un impact de balle entre les yeux.
Je le serre plus fort dans mes bras, secouée par ses tremblements, buvant ses
paroles.
– Gina a roulé sur le côté et a utilisé un chiffon sale qui était par terre pour
appuyer sur ma gorge tandis que les soldats américains sécurisaient la pièce. Ils
gueulaient des ordres dans leur talkie-walkie, je crois. Je ne sais pas trop, j’ai
perdu connaissance, mais je me souviens d’avoir été porté par l’un des soldats et
mis dans l’hélicoptère. Je n’oublierai jamais le bruit assourdissant des
explosions, des tirs, les cris et les pleurs. Mia, j’écris des films avec ce genre de
scène, mais les effets spéciaux ne sont rien à côté de la réalité. Il n’y a aucun
moyen de décrire la peur qui t’habite quand tu es prisonnier, comme ça. Même

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quand le militaire m’a porté, j’étais convaincu que j’allais mourir, que personne
ne pouvait survivre à ce qui s’était passé. Et Gina… bon sang !
Ses yeux se remplissent de larmes.
– Mon Dieu, Bébé, tu n’imagines pas ce qu’ils lui ont fait, sanglote-t-il. Elle ne
va jamais s’en remettre.
Ses larmes trempent ma peau tandis que je le serre fort contre moi. Il est assis et
je le chevauche, mes jambes dans son dos, comme si j’étais sa couverture de
survie. Je lui rappelle combien il est courageux et que tout ira bien, maintenant,
que nous allons nous en sortir. Mais il continue de pleurer. Il est presque anéanti,
mais je suis là pour l’en empêcher et je serai là pour le réparer, morceau par
morceau.
Il finit par sombrer dans un sommeil agité, me tenant contre lui sans jamais
desserrer son étreinte. Je suis son salut et, en fin de compte, cela ne me dérange
pas.

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Chapitre 4

– Arrête ça ! je m’exclame en gloussant dans le cou de Wes alors qu’il


tripote mes fesses.
– Je ne peux pas, grogne-t-il en riant, sans lâcher ma fesse. Tu es délicieuse avec
cette jupe. Bon sang, j’aurais dû t’emmener à plus de rendez-vous d’affaires, en
janvier. Tu as un côté secrétaire cochonne qui te va à ravir, déclare-t-il en
frottant son érection contre mes fesses.
J’ai choisi une jupe crayon noire, très simple, et une chemise en soie bleue. Judi
m’a assuré que c’était très professionnel et que cela plairait aux directeurs de
Century Productions. La seule chose qu’ils m’ont dite est de ne pas mettre de
vert, car les murs sont de cette couleur et que je disparaîtrais dans le décor.
Il s’avère qu’en fin de compte l’émission ne va pas payer mon tarif d’escort
comme je l’imaginais. Une boîte aussi célèbre ne peut pas risquer de verser de
l’argent à Escorts Exquises. Millie a donc rédigé un contrat officiel dans lequel
elle se déclare comme mon agent, et elle s’est assurée que je gagnerais cent mille
dollars comme avant, pour que je puisse payer Blaine. Bien sûr, je vais
désormais verser cet argent à mon frère, même s’il m’a regardée comme si
j’étais folle quand j’ai proposé de le rembourser tous les mois. Peu importe ce
qu’il dit, je lui rendrai son argent. Point barre.
J’avais rompu avec mon ancien agent quand j’avais commencé à travailler pour
Escorts Exquises. Je n’en reviens pas que Millie ait aussi bien géré cette
nouvelle affaire. Étant donné que mon dernier agent était incapable de me
trouver des jobs bien payés ou intéressants pour ma carrière, je n’ai pas été triste
de mettre fin à notre collaboration.
Je pose mes mains sur celles de Wes et m’autorise quelques secondes de
bonheur, puis je me tourne, l’embrasse sur la bouche, et je recule. Il me regarde

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d’un air amusé, puis il se jette sur moi et me saisit par la taille.
– Eh, ce n’est pas juste ! Tu es beaucoup plus fort que moi ! je râle en frappant
son torse.
– Va falloir t’y faire, rien ne m’empêchera de t’avoir. Tu ne l’as pas encore
compris ?
Il sourit et dépose une série de baisers depuis ma clavicule jusqu’à mon oreille.
– Humm, murmure-t-il.
– Wes… je grogne en penchant la tête en arrière, frissonnant de plaisir.
Sa bouche me fait des choses si délicieuses que j’en deviens idiote.
Apparemment, je perds l’usage de mon cerveau dès qu’il me touche.
– Bébé, il faut que j’y aille. C’est mon premier jour de travail.
Il lèche le lobe de mon oreille et palpe mes fesses.
– D’accord, d’accord, je sais que tu dois partir.
Je recule le visage et l’embrasse sur la bouche.
– Qu’est-ce que tu vas faire aujourd’hui ? je demande en cachant mon inquiétude
derrière un sourire timide.
Il hausse les épaules et écarte les bras, les laissant tomber sur ses cuisses.
– Je crois que je vais aller surfer ou faire un peu de muscu, dit-il en frappant son
torse. Il faut que je retrouve la forme.
Je pose une main sur sa joue et dégage une mèche rebelle.
– Tu as besoin d’une bonne coupe de cheveux, je dis en enroulant une mèche
autour de mon index.
– Alors, j’irai chez le coiffeur, répond-il.
– Eh, c’était juste une suggestion !
J’appuie mon menton sur son torse et le regarde dans les yeux.
Ils sont d’un superbe vert clair, comme d’habitude, mais les contours sont
assombris par la fatigue. Wes frotte mon dos de haut en bas, empoigne ma nuque
et approche mon visage du sien, jusqu’à ce que nos bouches soient à quelques
millimètres l’une de l’autre.
– Ne t’inquiète pas pour moi. Concentre-toi sur toi et le Dr Mamour.
– Il est marié à une top model, Wes, tu n’as rien à craindre, je dis en levant les
yeux au ciel.

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– Ouais, une jeune top model. Maigre comme un clou. Crois-moi, dès qu’il verra
tes formes, il regrettera d’avoir épousé une brindille alors qu’il aurait pu avoir un
double McFlurry au Daim.
– Tu viens de me comparer à un dessert ? je ricane.
– Tu es la chose la plus délicieuse que j’aie goûtée, la comparaison me semble
bonne.
Je secoue la tête et recule pour attraper mon sac à main.
– Sois sage. Tu vas me manquer, je dis en lui soufflant un baiser.
– Bébé, tu ne sais pas à quel point tu vas me manquer toi aussi, répond-il en me
faisant un signe de la main.
J’ouvre la porte et plonge sous le soleil d’automne californien, puis dans la
limousine qui m’attend. J’aurais préféré prendre Suzi, car cela fait longtemps
que je ne l’ai pas conduite, mais Wes a insisté. De toute façon, il m’aurait été
impossible de mettre une jupe crayon en moto.
Assise à l’arrière du véhicule, je vide tout l’air que je semble garder dans mes
poumons depuis des mois, et je repense aux derniers mots de Wes. « Bébé, tu ne
sais pas à quel point tu vas me manquer toi aussi. »
Une part de moi aurait aimé rester à la maison avec lui, enveloppée nuit et jour
dans son odeur. Seulement, cela ne va pas nous aider à avancer. Si Wes souffre,
j’ai moi aussi quelques soucis à gérer. Lorsqu’il fait ses terreurs nocturnes, après
qu’il a cherché du réconfort dans mon corps et qu’il s’est endormi, je reste
réveillée, à regarder son visage paisible aussi longtemps que possible, savourant
de l’avoir à la maison, en un morceau, à moi. Or, ce n’est pas tout à fait vrai.
Wes est bien en vie et en un morceau, physiquement. C’est une tout autre
histoire lorsqu’il s’agit de son esprit.
Après une semaine ensemble, je sais qu’il a besoin d’aide, et c’est à moi, sa
partenaire, de lui procurer ce dont il a besoin. Ce soir, j’appellerai des cabinets
de psychologues. Peut-être sa sœur, Jeanine, pour avoir son avis. Wes
n’apprécierait pas que je parle à sa mère de ses cauchemars ou du fait qu’il ne
veut pas retourner travailler. Cela inquiéterait Claire et elle en deviendrait
probablement étouffante. Or, Wes a trente ans et il n’a pas besoin de ça. Non, ce
dont il a besoin, c’est de se retrouver et de réaliser la chance qu’il a d’être en vie,

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tout en faisant le deuil de ce qu’il a perdu. Sans cela, il ne pourra pas revivre
normalement
Je suppose qu’avec le temps, il se remettra de sa colère vis-à-vis de son travail et
des horreurs qu’il a vues, comme les gens qui ont été tués sous ses yeux. Je
n’imagine pas l’impact que cela a dû avoir sur lui. Il a besoin de quelques mois
de repos. Il a plus d’argent qu’il ne lui en faut, et un congé sabbatique loin du
cinéma serait sans doute une bonne idée.
*
* *
Une blonde de vingt ans affreusement maigre me guide à travers les couloirs de
Century Productions.
– Vous devez être ici tous les jours à neuf heures, dit-elle en regardant sa montre
et en grimaçant.
D’accord, j’ai quelques minutes de retard… Le mec à l’entrée m’a donné de
mauvaises indications pour arriver au studio. J’ai beau être partie de la maison
avec une demi-heure d’avance, je n’ai pas réussi à arriver à l’heure.
– Ça marche. Maintenant que je sais où aller, je serai là plus tôt.
Celle qui s’est fièrement présentée comme l’assistante du Docteur Hoffman,
Shandi « avec un i », hoche la tête et poursuit son chemin. Ses talons frappent le
sol carrelé aussi vite que mon cœur bat dans ma poitrine. Ça fait des mois que je
ne me suis pas sentie aussi stressée. J’avais oublié que tout va à cent à l’heure à
Hollywood, il faut être rapide si on ne veut pas perdre pied.
– Les maquilleurs et les stylistes sont là, dit Shandi en désignant une pièce avec
des chaises et des miroirs éclairés par d’énormes ampoules blanches, le genre
qui met en valeur le moindre grain de beauté et le moindre défaut. Lorsque je me
tourne de nouveau vers elle, Shandi est en train de scruter ma tenue.
– Vos vêtements sont plutôt bien, mais il faudra vous coiffer. On n’est pas dans
un documentaire animalier ! On tirera vos cheveux en arrière et on vous fera des
boucles plus souples, ce sera plus élégant et plus professionnel.
Elle tapote son menton de son index parfaitement manucuré.
– La caméra va vous adorer. Presque autant que vous allez plaire à Drew, ajoute-
t-elle en fronçant les sourcils.

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Elle tourne les talons et se dirige vers une porte ornée d’une étoile dorée portant
le nom de Drew Hoffman. Elle frappe deux fois dessus et attend.
– Entre, Shandi, annonce une voix douce comme du miel.
– Mademoiselle Saunders est là. Vous avez dit que vous vouliez la rencontrer
avant qu’elle ne voie les scénaristes.
Shandi se transforme sous mes yeux. Sa grimace disparaît, laissant place à un
sourire rayonnant, et le dédain quitte ses yeux, remplacé par une joie amoureuse.
Elle rougit légèrement en parlant à l’homme que je ne vois pas.
– Oui, oui, chérie. Fais-la entrer.
Chérie ? Shandi ouvre plus grand la porte pour me laisser entrer.
L’homme qui m’accueille est exactement ce à quoi je m’attendais. Il doit avoir
au moins quinze ans de plus que moi, mais les années n’ôtent rien à sa beauté.
Ses cheveux noirs sont parsemés de blanc sur les tempes et ses yeux gris sont
perçants. Il mesure environ un mètre quatre-vingts, est plus musclé qu’à la télé,
mais peut-être est-ce parce qu’il porte généralement une blouse blanche.
Aujourd’hui, il est vêtu d’une chemise cintrée à la taille et d’un jean moulant
partout où il faut, je comprends d’ailleurs pourquoi toutes les femmes sont folles
de lui. Il est canon, c’est aussi simple que ça.
– Extraordinaire, déclare-t-il en me tendant la main.
Je lui donne la mienne et il la recouvre avec son autre paume. Qui fait encore ce
genre de choses, de nos jours ?
– Vous êtes bien plus belle en personne que sur vos photos.
Je penche la tête sur le côté et le regarde de haut en bas.
– Vous n’êtes pas mal, vous non plus, Docteur, je rétorque d’une voix suave.
Drew Hoffman est un beau gosse. Est-ce que j’ai envie de lui sauter dessus et de
le chevaucher jusqu’à l’aube ? Pas du tout. Toutefois, ce n’est pas parce que mon
cœur et ma libido appartiennent à Weston Channing que je suis aveugle et ne
suis pas affectée par les autres superbes spécimens masculins que je croise.
Il secoue la tête et dépose un baiser sur ma main.
– Je suis ravi de vous rencontrer, Mademoiselle Saunders. J’ai hâte de voir ce
que vous allez proposer pour votre segment. Les médias vous aiment déjà,
surtout après le clip viral du Latin Lover. Vous êtes une célébrité très prisée.

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– Euh, vous devez faire erreur, je ricane. Je ne suis pas célèbre. Je suis sortie
avec quelques stars et j’ai tourné dans un clip, mais c’est tout !
Il lâche enfin ma main et j’en suis soulagée, car cela commençait à être bizarre.
Il marche jusqu’à la table où sont éparpillés divers magazines people.
– Que dites-vous de ça, alors ?
Rien n’aurait pu me préparer à voir la dizaine de photos de moi sur les
couvertures. Il y en a une avec Tony, une autre avec Mason, d’autres encore sont
tirées du shooting que j’ai fait avec Angel pour la campagne La beauté ne se
mesure pas. Il y a une série me montrant au bras d’Alec lors du vernissage
d’Amour sur Toile, le photographe semble s’être concentré sur toutes les fois
qu’Alec avait une attention ou un geste pour moi. Il y a même une photo
suggérant que je suis la nouvelle maîtresse d’Anton Santiago et que je le trompe
avec mon nouveau mec, Weston Channing.
– Je ne sais pas quoi dire, je dis en repoussant les magazines, agacée.
Drew s’assied sur son canapé et ouvre grand les bras.
– Il n’y a rien à dire. Vous êtes la nouvelle It Girl, et j’ai l’intention d’en tirer
parti !
Je hausse les épaules et m’assieds face à lui pendant que Shandi nous sert à
boire, me donnant un café que je n’ai pas demandé mais dont je rêvais.
– Merci Shandi, tu peux nous laisser maintenant, dit Drew en lui faisant un signe
de la main.
Il boit une gorgée de son café en m’observant attentivement.
– Alors, de quoi allez-vous parler dans votre segment, ce vendredi ?
Je plisse les yeux et pose mes mains sur mes genoux.
– Comment ça ? Je n’ai pas reçu de script.
Il recule le visage en écarquillant les yeux.
– Vous voulez dire que votre agent ne vous a pas expliqué ?
– Euh… m’expliquer quoi ?
Il éclate de rire et se frappe la cuisse.
– Chérie, vous êtes censée écrire tout le segment de Vivre en beauté vous-même
! Tout vient de vous, de ce que vous trouvez beau. Avec votre travail pour La
beauté ne se mesure pas, Amour sur toile et votre clip, nos sondages montrent

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qu’un segment révélant ce que vous trouvez beau plaira énormément à notre
public.
– Vous plaisantez ?
– Pas du tout. Apparemment, il vous faut vite parler à votre agent et vous mettre
au travail. Je veux que vous me résumiez ce que vous allez faire dans votre vidéo
de quinze minutes mercredi prochain. Comme ça, nous pourrons en discuter et je
serai prêt à en parler vendredi, quand nous enregistrerons l’émission.
Je dois parler de Vivre en beauté pendant quinze minutes. Dans quoi Millie m’a-
t-elle fourrée, bon sang ? Je croyais que j’allais jouer un rôle, pas que j’étais le
rôle. Un frisson d’excitation parcourt mon corps. Vais-je y arriver ? Est-ce que je
peux trouver une idée qui soit intéressante pour des millions de personnes, et ce
toutes les semaines ? Je suppose que je vais vite le savoir. Peut-être que Wes
pourra m’aider ? Peut-être que ça l’aidera à retrouver sa passion ?
Soudain, j’ai hâte de commencer et d’en discuter avec mon homme afin d’épater
les producteurs et le Docteur Hoffman.
– Alors, qu’est-ce que je fais maintenant ? je demande.
– Eh bien, vous vous mettez au travail. Nous nous verrons mercredi pour notre
réunion de préproduction. Ne me décevez pas. C’est moi qui ai demandé à vous
avoir et je veux surprendre mon public.
Je me lève et me dirige vers la porte. Une main sur la poignée, je me tourne vers
lui en faisant voler mes cheveux derrière moi.
– Ne vous en faites pas, je ne vous décevrai pas. Vous ne voudrez plus jamais
me laisser partir.
– Prouvez-le, chérie, ricane-t-il.
Sans un regard, je sors de son bureau. Ce type a un ego surdimensionné et il me
regarde comme si j’étais un bout de viande, mais je ne crois pas qu’il tenterait
quoi que ce soit. Peut-être est-il quelqu’un de bien dans une enveloppe arrogante
et sexy. Mon signal d’alerte ne s’est pas déclenché, or après mon expérience
avec Aaron, je suis toujours sur le qui-vive.
*
* *
Dans la voiture pour rentrer, je sors mon téléphone pour appeler Millie.

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– Escorts Exquises, Stéphanie à l’appareil !
– Salut Stéphanie, c’est Mia. Tu peux me passer ma tante, s’il te plaît ?
– Oh, salut ! Je suis contente d’avoir de tes nouvelles, Miss Milan a dit que tu
arrêtais le métier d’escort. Tout va bien ?
Je dois me retenir de rire. J’ai arrêté ce métier, en effet, mais je n’avais jamais
prévu de le commencer ! Maintenant que je ne dois plus rien à Blaine, je peux
passer à de plus beaux projets. Depuis que Max a remboursé Blaine, Millie a
annulé mes contrats pour novembre et décembre. Pour l’instant, j’ai quatre
segments à faire pour l’émission du Docteur Hoffman, et avec un peu de chance,
ils renouvelleront mon contrat. Reste à voir si j’aime ce job et s’ils apprécient ce
que je peux leur offrir.
– Tout va bien. Je ne faisais ça que pour payer la dette de ma famille. Maintenant
que tout est réglé, je suis passée à autre chose et je suis rentrée à Malibu. Bref,
ma tante est disponible ?
– Ah, oui bien sûr. Prends soin de toi, Mia ! N’hésite pas à donner des nouvelles,
dit-elle avant de me transférer.
La ligne sonne plusieurs fois avant que ma tante ne décroche.
– Bonjour ma poupée. Comment te traite le monde de la silicone, de la chirurgie
plastique et des starlettes ?
– Aussi bien que possible, étant donné la situation. À tout hasard, aurais-tu
oublié de me dire quelque chose à propos de Vivre en beauté, chère tante ? je
demande d’un ton lourd de sous-entendus.
J’entends le bruit de ses doigts sur son clavier.
– Je ne sais pas. Ils ont envoyé le contrat, je l’ai relu, le département juridique l’a
relu, et tout avait l’air en ordre. Ne tourne pas autour du pot, quel est le problème
?
– Millie, tu ne m’as jamais dit que je devais écrire le segment moi-même !
Elle fredonne et continue de travailler en me parlant. Je l’imagine lire ses mails
ou associer des hommes seuls à des nanas bien trop belles pour eux.
– Je ne comprends pas le problème. Ne sois pas vague, chérie, va au but.
– Millie, je dois écrire le segment. Du début à la fin. Toutes les semaines !

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– Et alors ? Tu es intelligente, belle, et tu as l’esprit créatif. Ça devrait être un jeu
d’enfant pour toi.
Je grogne en entortillant une mèche sur mon doigt tout en regardant les voitures
nous doubler sur le périphérique bondé. Il y a six voies, mais ça n’empêche pas
les bouchons.
– J’aurais aimé savoir à quoi m’attendre.
– Ma puce, je t’ai envoyé une copie du contrat et tu l’as signé. Je suis désolée si
tu ne l’as pas lu, mais à l’avenir, ne signe plus les contrats sans en avoir lu toutes
les clauses.
Son accusation finit de m’agacer.
– Tu es mon agent et ma tante. Tu aurais dû me prévenir !
– Tu m’en veux parce que tu n’étais pas prête ? Poupée, je suis désolée de ne pas
t’avoir tout dit alors que je savais que tu étais sur les nerfs. Toutefois, je n’aurais
pas accepté ce contrat si je ne pensais pas que c’était ce qu’il y avait de mieux
pour toi. Tu es une bonne actrice, mais tu n’es pas la meilleure, soyons honnêtes.
Tu ne joues pas très bien avec les autres. Dans ce genre d’environnement, c’est
toi qui vas prendre les décisions. Tu dois les faire approuver par les directeurs,
surtout Hoffman, mais c’est tout !
Elle marque une pause comme si elle me laissait le temps d’encaisser ce qu’elle
vient de dire.
– Tu vas toucher vingt-cinq mille dollars par émission. C’est plus que tu ne
gagnais pour dix pubs de tampons ou de tests de grossesse. C’est très bon pour ta
carrière. Prends le taureau par les cornes et tires-en partie. C’est ta chance de
percer, Mia !
Millie a raison. C’est ma chance, en effet. C’est le moment pour moi de prouver
que je peux faire autre chose que du mannequinat, prétendre être quelqu’un que
je ne suis pas, ou être la moitié d’un autre. Ce boulot est l’occasion pour moi de
réussir seule. Il est temps pour Mia Saunders de se faire une place. On n’a
qu’une chance dans ce genre de milieu et il est hors de question que je la gâche.
– Tu sais quoi, Tante Millie ? Tu as raison.
– Bien sûr, glousse-t-elle. Chérie, j’ai toujours raison. Maintenant, mets-toi au
travail. Nous sommes vendredi, donc tu n’as que cinq jours pour trouver une

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idée. J’ai hâte de voir ça à la télé. Je vais l’enregistrer toutes les semaines !
Je suis soulagée que ma tante, la seule figure maternelle qui me reste, se soucie
assez de moi et de mon avenir pour me pousser à réussir. Ma tante Millie
Colgrove est une femme d’affaires sans merci qui opère de manière tout juste
légale, mais elle n’est pas sans cœur, et le sien bat pour moi.
– Merci de croire en moi, je chuchote.
– Oh ma poupée. Je suis on ne peut plus fière de toi. Tout se déroulera pour le
mieux, tu verras.
Bon sang, j’espère qu’elle a raison.
Tout se déroulera pour le mieux. Je réfléchis à cela lorsque le chauffeur s’arrête
devant chez nous et me laisse descendre. J’entre dans la maison, prête à raconter
tout ce qui s’est passé à Wes et entendre ce qu’il en pense, mais la scène que je
découvre me brise le cœur.
Wes. Mon Wes. Son bras est autour d’une brune que je ne connais que trop bien.
Elle le serre contre elle. Son visage est tourné vers moi et ses yeux sont fermés.
Wes est dos à moi. Je reste plantée là, sans mots, mon cœur battant fort dans mes
oreilles. Elle lève la tête et je vois ses larmes ruisseler sur ses joues.
La voilà. La femme que je ne voulais plus jamais revoir. Gina DeLuca est assise
sur mon canapé, dans ma nouvelle maison, dans les bras de mon mec. Merde.

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Chapitre 5

Ne sachant pas quoi faire, je me racle vigoureusement la gorge pour séparer le


couple enlacé. Wes voit mon visage et se lève d’un bond, puis il prend la main
de Gina et l’aide à se lever.
– Euh… Mia… euh… Je ne t’attendais pas de retour si tôt, dit-il en passant sa
main dans ses cheveux.
Mauvaise réponse, mon pote.
– Je vois ça, oui. Vous voulez que je vous laisse tout seuls peut-être ? je grogne
en serrant les dents.
Wes écarquille les yeux et regarde brièvement Gina.
– Mon Dieu, non ! s’exclame-t-il en levant les mains. Chérie, ce n’est pas ce que
tu crois !
– Ah non ? Parce qu’on dirait que l’homme que j’aime réconforte son ex pendant
que je suis au travail, je réponds en penchant la tête sur le côté.
– Bébé, non, tu n’y es pas du tout, dit-il en s’éloignant de Gina. Ne t’imagine pas
des choses.
Il vient à moi en ouvrant les bras, mais je recule avant qu’il ne m’attrape.
– Dépêche-toi de m’expliquer ce qui se passe avant que je ne pète un câble, je
gronde en croisant les bras.
– Mia, Wes et moi ne faisions rien de mal, je te le promets, dit une petite voix
anéantie.
Gina s’appuie sur le canapé, et c’est là que je la vois vraiment. Une de ses
jambes est dans un plâtre et des béquilles sont posées contre l’accoudoir. Quand
elle se lève, je remarque que son corps n’a plus la vivacité qu’elle avait avant.
Elle a l’air hagard et elle est affreusement maigre. Je la regarde de la racine de
ses cheveux désormais ternes et sans éclat jusqu’à la pointe de ses pieds, ce n’est

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pas la femme que j’ai rencontrée en janvier. Ce n’est que la coquille vide de
l’incroyable beauté qu’elle était.
Je cligne plusieurs fois des yeux, ne sachant comment répondre, lorsque Wes
passe un bras autour de mes épaules.
– Mia, Gina me rendait visite, c’est tout. Ça fait partie de sa… euh…
– De ma thérapie, finit-elle. Je suis surprise que tu ne lui aies pas dit, Weston,
dit-elle avec un regard morne et sans vie.
Je ne sais pourquoi, je suis contente qu’elle ne l’appelle pas par le surnom que
j’utilise. Cela m’aide à mettre une distance entre eux, et c’est primordial en cet
instant.
– Je ne me sens pas le droit de raconter ton histoire, répond Wes d’une voix
solennelle.
Gina coiffe ses cheveux en arrière, essuie ses yeux et me regarde.
– Ma psy dit que j’ai besoin de voir les survivants et de renouer avec les gens qui
ont vécu la même chose que moi. Elle pense que ça m’aidera à me rappeler que
je suis vivante. Comme ça, j’arriverai peut-être à reprendre le cours de ma vie.
C’est pour ça que je suis là, Mia, dit-elle d’une voix tremblante. Wes me
réconfortait. On a vécu un enfer là-bas, et, euh… je me sens en sécurité à côté de
lui, admet-elle en pleurant de nouveau. Je ne me sens plus en sécurité nulle part.
J’ai peur tout le temps, admet-elle d’une voix si faiblarde qu’elle me donne envie
de la prendre dans mes bras.
L’entendre parler ainsi de ses peurs me fait l’effet d’un seau d’eau glacée jeté au
visage.
– Je suis désolée. Je n’aurais pas dû imaginer le pire. Vous avez traversé de
terribles épreuves ensemble, c’est normal. Finissez votre conversation. Je ne suis
pas énervée. Je vous en prie, je dis en faisant signe à Wes de se rasseoir, prenez
votre temps. J’ai été jalouse un instant, mais je fais confiance à Wes et je crois
en notre amour. Il ne me tromperait jamais.
– Non, jamais, dit Wes avec un regard brillant.
Je m’avance pour l’embrasser rapidement et lui montrer que tout va bien entre
nous.
– Je vais me doucher et appeler Maddy et Ginelle.

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– D’accord, on aura fini à temps pour dîner, promet-il.
Je m’éloigne lorsque je pense à quelque chose, et je me tourne de nouveau vers
eux.
– Gina, je suis contente que tu aies survécu. Wes tient à toi, et je sais que vous
avez vécu le pire ensemble, donc n’hésite pas à venir aussi souvent que tu le
souhaites. Je veux que vous alliez bien tous les deux. Personne ne mérite de
vivre constamment dans la peur. Ce que je veux te dire, c’est que… j’espère te
revoir bientôt.
Il m’a fallu tout mon self-control et faire appel à toute ma maturité pour dire
cela, car avant toute cette horrible histoire, je ne voulais plus jamais voir Gina et
Wes ensemble. Or, je dois désormais ravaler ma fierté, car je veux aider Wes.
Peut-être qu’en aidant Gina, j’y parviendrai. En tout cas, cela vaut la peine
d’essayer. Pour Wes et son bien-être, je peux mettre de côté ma jalousie.
– Merci Mia, tu es quelqu’un de bien, répond Gina.
Je souris et hoche la tête, ne sachant quoi dire.
– Chérie ? dit Wes.
– Oui, Bébé ?
– Je t’aime chaque jour un peu plus.
Je ne fais pas qu’entendre ses paroles, je les ressens jusque dans mon cœur.
*
* *
Allongée sur le dos dans mon lit king-size, j’appelle Ginelle.
– Salut pétasse, répond-elle sans son ton animé et moqueur habituel.
Ma meilleure amie a vécu un cauchemar le mois dernier. Or, je ne sais pas
comment elle réagit au fait d’avoir été kidnappée par Blaine et ses sbires, parce
qu’elle ne m’en parle pas et garde tout pour elle.
– Qu’est-ce que tu fais ? je demande en espérant avoir une conversation normale.
Je rêve de retrouver la nana détendue et sarcastique avec laquelle j’ai grandi,
celle qui m’a toujours lancé des insultes pleines d’amour. C’est une façon
étrange de montrer son affection, mais nous avons toujours fonctionné ainsi et
cela me manque.

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Gin soupire. Oh non, non, non ! Je connais ce bruit, je l’ai entendu pendant des
années !
– Tu fumes ? je crie dans le téléphone en m’asseyant sur le lit. Je n’en reviens
pas, Gin, à quoi tu joues ? Tu arrêtes pendant presque huit mois et maintenant tu
as repris ? Tu es sérieuse ?
Je suis tellement triste de savoir qu’elle a ruiné tous ces mois d’efforts en un clin
d’œil.
– Calme-toi, connasse ! rétorque-t-elle. C’est une fausse clope, une vapoteuse.
C’est de la vapeur à la menthe pour simuler les menthols que j’adorais fumer.
– Mais pourquoi tu fumes ça ? Ce n’est pas le même geste ? Ça ne fout pas tout
en l’air ?
– Écoute Mia, j’en ai gros sur la patate, d’accord ? Je voulais une clope, mais au
lieu de ça, j’ai acheté cette merde pour m’aider à me détendre. Tu n’es pas là. Tu
ne sais pas ce que c’est de gérer tout ça toute seule.
Notre conversation prend soudain un ton bien différent.
– Je déteste mon boulot. Je déteste mon appart, et je déteste être à Las Vegas.
Tout me fait penser à lui. Chaque fois que je me retourne, je me demande s’il
sera là, sanglote-t-elle. J’ai peur qu’il me kidnappe de nouveau. J’ai dû
demander à mon chef de m’accompagner à ma voiture parce que j’étais
convaincue qu’il serait là. Tu sais ce que c’est, toi ? s’exclame-t-elle.
Non, je ne le sais pas. Mais si je le pouvais, j’échangerais nos places. Je suppose
que je dois être contente qu’elle m’en parle, au moins. Je suis accablée de
culpabilité, de rage et de tristesse en écoutant ma meilleure amie. J’aimerais la
serrer dans mes bras, lui dire que tout ira bien, mais la vérité c’est que je partage
ses peurs. Je n’aime pas qu’elle soit seule à Las Vegas. La bonne nouvelle, c’est
que j’en ai déjà parlé à Wes. Il a eu du mal à croire tout ce qui s’est passé
pendant que nous n’étions pas ensemble. Puis, j’ai fait quelque chose que je
m’étais promis de ne jamais faire, j’ai demandé une faveur à mon petit ami. Une
faveur professionnelle. Je m’étais juré de ne jamais faire ça avec mes clients.
Certes, je l’ai fait avec Warren, mais c’était différent. Sa dette envers moi est
désormais réglée, puisqu’il a accepté de contacter les gens les plus puissants du
pays pour m’aider à retrouver Wes.

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Pour en revenir à Ginelle, j’ai demandé à Wes s’il connaissait des spectacles à
Los Angeles qui seraient susceptibles de vouloir une danseuse avec son talent
unique. Il a passé quelques coups de fil et, dans deux semaines, si Gin le veut,
elle a la possibilité de faire avancer sa carrière.
– Eh, ma puce, calme-toi. Écoute-moi.
J’entends un bruissement, puis elle se mouche et soupire.
– D’accord. Je suis assise. Dis-moi tout.
– J’ai une proposition pour toi.
Elle glousse doucement et cela me réchauffe immédiatement le cœur.
– Tu vas me dégoter du boulot avec Tante Millie ? ricane-t-elle.
C’est une blague récurrente entre nous, car Gin a beau dire qu’elle voudrait être
escort, elle n’est vraiment pas le genre de femme capable de rester sagement
suspendue au bras d’un homme riche dans le simple but d’avoir l’air jolie. J’ai
eu de la chance avec mes clients, mais les circonstances étaient uniques.
D’autres que moi n’auront pas les mêmes opportunités, Millie a été très claire
sur ce point. Ginelle se farcirait des vieux clients pleins aux as qui s’attendraient
à une petite gâterie en fin de soirée. Gin a une grande gueule, mais elle n’est pas
faite pour ce genre de job, quel que soit le salaire.
– Non, pas du tout. Ça n’a rien à voir. Que dirais-tu de déménager à Malibu ? De
rester avec Wes et moi, le temps d’aller mieux ? je commence avant qu’elle ne
me coupe la parole.
– Je viendrais dès demain si je le pouvais, Mia, mais ça ne résout pas la question
du travail. Je ne vais pas partir là-bas dans l’espoir de trouver du boulot. Je
pourrais en avoir pour des mois et vous venez de vous retrouver. Wes a ses
propres problèmes à régler, tout comme moi. Tu veux vraiment une autre tarée
sous ton toit ?
– Oui, vraiment ! Mais tu ne m’as pas laissé finir. Un ami de Wes dirige un petit
théâtre, ici. Les danses sont très osées et il vient de perdre son chorégraphe. Qui
mieux qu’une véritable danseuse burlesque de Las Vegas pour montrer à ses
pimbêches maigrichonnes aux seins siliconés et aux lèvres gonflées au collagène
comment secouer leur boule sur scène ? Ça pourrait être génial !
Et hilarant !

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Ginelle ne dit rien pendant très longtemps et j’attends avec appréhension.
Lorsqu’elle parle enfin, sa voix est fluette.
– Tu m’as trouvé un job de chorégraphe ? Dans un théâtre à L.A. ? Mon Dieu !
s’exclame-t-elle pleine de joie.
– Gin, je ne sais pas vraiment ce que ça implique, mais le salaire est bien
meilleur que celui que tu as aujourd’hui, et tu n’aurais pas à payer de loyer. Tu
peux vivre dans la petite maison d’amis à côté de la nôtre et tu peux y rester
aussi longtemps que tu veux, toute ta vie si tu veux, j’ajoute.
– Wes et toi m’avez trouvé le job de mes rêves, vous m’offrez un toit pour aussi
longtemps que je le veux et l’occasion de vivre en Californie avec ma salope de
meilleure amie ?
Je réfléchis à sa question et me demande si j’ai oublié quelque chose, si je peux
lui proposer autre chose qui lui ferait saisir cette opportunité.
– Euh… en gros, ouais.
– T’es complètement barjot ?
– Je ne crois pas, non, je dis en riant légèrement.
– Alors, prépare mon lit, ma pupute, parce que ta meilleure amie débarque au
pays du tofu et des graines ! Nom de Dieu, je vais être la chorégraphe d’un
spectacle burlesque à L.A. ? Bon sang, qu’est-ce que je vais mettre ?
Terminée la nana désespérément triste, Gin est désormais complètement
hystérique, une version que je comprends et que j’aime plus que tout. Son
bonheur est contagieux et dissipe immédiatement mes peurs et ma tristesse.
– Vraiment ? je demande, pour être sûre d’avoir bien compris.
– Mais oui ! Je commence mes cartons ce soir ! Il y a tellement à faire ! Je dois
donner ma démission, faire mes valises, noter mes chorés, conduire jusqu’à
Malibu. Tu sais ce que ça signifie, Mia ?
– Je commence à le deviner, oui ! je ris, ravie d’avoir pris la bonne décision.
– Ça veut dire que ma vie entière vient de changer pour le mieux ! Et c’est toi et
Malibu Ken que je dois remercier. Passe-le-moi, je veux le remercier moi-même.
Je secoue la tête et m’allonge de nouveau sur le lit.
– Je ne peux pas, il est en train de parler à Gina.

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La ligne devient silencieuse. Je n’entends que son souffle haletant et je l’imagine
courir à travers son appartement, jetant une chose après l’autre par terre pour se
préparer à sa nouvelle vie.
– Je te demande pardon ? Que fait cette traînée dans ta maison, à parler à ton
homme alors que tu n’es pas là ?
– J’ai confiance en lui, je dis en entortillant une mèche sur mon doigt. Ils ont
vécu un enfer ensemble, Gin. Wes a à peine entamé sa guérison. Et Gina fait
peur à voir.
– Tant mieux ! dit-elle trop vite.
Ginelle est aussi protectrice de moi que je le suis d’elle, et selon elle, j’ai été
lésée par l’actrice. Techniquement, ce n’est pas le cas car Wes était libre de faire
ce qu’il voulait lorsqu’ils ont couché ensemble. D’ailleurs, à l’époque, je me
tapais Taï. Il a fallu qu’il couche avec Gina pour que je réalise que je voulais être
la seule femme à qui il ferait l’amour, qu’il embrasserait, avec qui il dormirait, et
tout le reste.
Il faut que Gin abandonne son désir de vengeance, surtout si elle doit vivre ici,
puisqu’elles risquent de se croiser.
– Ginelle, je ne plaisante pas, c’est très grave. Si elle avait perdu tout ce poids
parce qu’elle était anorexique ou qu’elle se droguait, et si la peur dans son regard
était due à la publication d’une photo d’elle sans maquillage, je serais ravie. Le
problème, c’est qu’ils ont subi de graves traumatismes, si graves que je ne sais
pas si je supporterais de tout entendre, mais je le dois pour aider Wes à guérir.
Ce qu’il a vu lui provoque des terreurs nocturnes. Si ça peut l’aider que Gina
aille mieux, alors je dois ravaler ma fierté, tu comprends ?
– Ils lui ont fait beaucoup de mal ? chuchote Gin d’une voix sérieuse.
– À mon avis… le mal est irréparable.
– Eh bien, tu es une meilleure personne que moi.
– Ça, on le savait déjà ! je ricane.
– Espèce de garce ! Je te pardonne parce que tu m’as obtenu le job de mes rêves
et que tu me laisses vivre avec toi à Malibu. Tu sais, je ne repartirai peut-être
jamais.
Je hausse les épaules et souris jusqu’aux oreilles.

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– Peut-être que c’est ce que je veux !
En vérité, il se peut en effet que je veuille qu’elle reste à jamais. Maddy et papa
sont à Las Vegas, Millie et Wes sont ici, et Max et sa famille sont au Texas. Les
autres personnes que j’aime sont éparpillées un peu partout, avoir Gin avec moi
me ferait un bien fou.
– Comment va papa ?
– Eh bien, ses fonctions vitales vont de mieux en mieux et les médecins ont bon
espoir qu’il se réveille. Ce n’est qu’une question de temps. Les scans montrent
que son activité cérébrale est normale. Le virus et ses réactions allergiques lui
ont fait moins de mal qu’ils ne le craignaient.
Je ferme les yeux et remercie le Ciel de ne pas m’avoir pris mon père. Il ne reste
plus qu’à attendre, maintenant.
– Et Maddy ?
– Oh, elle va super-bien. Elle a repris les cours, tout va bien avec Matt, et elle est
aussi parfaite que d’habitude.
– Tant mieux, c’est ce que je veux entendre.
– Tu sais, la dernière fois que je lui ai parlé, elle m’a dit qu’elle avait beaucoup
discuté avec Max à propos de Cunningham Oil & Gas et de leur département de
recherche. Apparemment, elle a changé certaines de ses options pour se
concentrer sur les sciences de la terre. Elle dit qu’elle envisage d’y aller après sa
licence et de travailler pour lui. Même Matt dit que c’est une bonne idée.
– Ah bon ? Et sa famille ? Ils ont l’air si proches.
– Apparemment, ses parents ont dit qu’ils seraient prêts à déménager au Texas,
eux aussi. Matt est leur seul enfant et ils approchent de la retraite. Max a dit à
Matt qu’il pouvait embaucher son père et même sa mère. Il a parlé de vouloir sa
famille près de lui.
Mais bien sûr. Max est un saint. Il m’a sauvée et il nous a accueillies, Maddy et
moi, ainsi que tous ceux qui nous entourent, à bras ouverts. J’adore mon frère,
mais il est fou. Peut-être est-ce pour ça qu’il est si heureux. Il traite tout le
monde avec respect, il aime sa famille plus que tout et il veut que tout le monde
autour de lui soit heureux. Je me demande quand il décidera de me mettre la
pression pour que j’aille au Texas, moi aussi. Je suppose que ça ne va pas tarder.

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Je ne serais pas surprise qu’il trouve l’argument en or pour convaincre Wes et
moi de déménager près de chez lui. Cependant, il faudrait que ce soit une pépite
pour y parvenir, car cette chaleur et cette humidité… mon Dieu, c’est
insupportable. Le fait que ma petite sœur habite là-bas est un sacré argument, et
il le sait. Convaincs la petite, et la grande suivra.
– Ouais, Max est vraiment épatant.
– Meuf, il est merveilleux.
– Tu kiffes mon frère ? je m’exclame, faussement offensée.
– Le soleil se lève-t-il à l’Est pour se coucher à l’Ouest ? Tu as vu ton frère ?
C’est un dieu en bottes de cow-boy !
– Doux Jésus !
– Exactement ! Sauf que si c’était moi, je crierais « oui Max, plus fort Max, vas-
y ! »
Ma meilleure amie crie au téléphone et grogne pour enfoncer le clou, me
donnant instantanément la nausée.
– T’es malade.
– Mais tu m’aimes.
– Je dois être folle, je devrais voir un médecin.
– Eh bien pendant que tu fais ça, moi je vais faire mes valises. On se voit dans
quinze jours, ma traînée ! s’écrie Ginelle avant de raccrocher.
Mince, elle a gagné. Je l’aurai la prochaine fois.

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Chapitre 6

Un cri strident me glace le sang et me tire d’un doux rêve. Comme d’habitude,
je sors du lit, j’allume la lumière et je regarde l’homme que j’aime se débattre en
hurlant, pris dans les griffes des démons qui sévissent dans les coins les plus
sombres de son esprit. Cela me fend le cœur, comme toutes les nuits. Il se
cambre et son torse trempé par la sueur scintille sous la lumière blanche, comme
si tout son être cherchait le salut. Avant de le réveiller, je ferme les yeux, inspire
profondément, et je laisse ses cris me mettre dans le bon état d’esprit. Je suis
forte et autoritaire, je suis l’outil qui le ramènera des méandres de son désespoir,
comme chaque nuit. Je serai cela et plus encore, jusqu’à ce qu’il trouve enfin la
paix. Il n’y a pas d’alternative. Wes retrouvera la sérénité qui le caractérisait.
– Wes ! je hurle, la tête haute.
Je suis debout, nue devant lui, quand il ouvre brusquement les yeux. Ses pupilles
sont presque entièrement noires. Il est à l’état d’animal, emporté par ses peurs.
– À moi !
Il grogne en me regardant et en se jetant sur moi.
L’instant d’après, il a saisi un téton dans sa bouche et je suis tiraillée entre la
douleur et le plaisir. Ses mains sont partout sur mes fesses alors qu’il frotte sa
queue sur moi.
– C’est ça. Tout ça est à toi et tu peux en faire ce que tu veux. Tout ce que tu as à
faire, c’est de me dire pourquoi tu m’aimes, je déclare en empoignant ses
cheveux et en le tenant fort contre mon sein.
J’ai décidé d’essayer une nouvelle méthode. Je veux qu’il se souvienne pourquoi
je suis là ; le ramener au présent pour que les souvenirs de sa captivité se
dissipent plus vite.
– J’aime te baiser !

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Il se colle à moi et me fait reculer jusqu’à me plaquer contre le mur. Il change de
sein tandis qu’il palpe l’autre avec sa main, tirant la pointe entre deux doigts, la
tordant jusqu’à déclencher des décharges de plaisir qui se propagent dans mon
sexe. Je retiens mon souffle et écarte davantage les jambes pour le sentir mieux.
– Mais dis-moi ce que tu aimes chez moi, et je te laisserai t’enfouir si
profondément en moi que j’en aurai le souffle coupé.
Wes lâche mon téton et je gémis de ne plus sentir sa bouche. Il essaie de
m’embrasser, mais je tourne la tête de côté pour éviter ce baiser que je désire
tant.
– Qu’est-ce que tu fais ? gronde-t-il, la colère prenant momentanément le dessus
sur son excitation.
Je lève une jambe et frotte mon sexe sur sa cuisse, couvrant sa peau et lui
prouvant mon désir.
– Tu m’aimes ? je demande une nouvelle fois.
Sa voix est sèche. Ferme. Chaque mot est prononcé en rythme avec les
battements de mon cœur fragile.
– Tu. Sais. Que Oui. Alors. Donne. Moi. Ce. Dont. J’ai. Besoin.
Je secoue la tête et baisse son boxer. Il finit de s’en débarrasser avec les pieds,
sans rompre le contact avec mes yeux. J’emploie toute la force de mes jambes
pour sauter et entourer sa taille avec mes cuisses, et il saisit mes fesses comme si
je ne pesais rien. Il inspire en me plaquant plus fort contre le mur, sa queue entre
mes cuisses. Nous sommes si près, et en même temps si loin. Il ne me prendrait
jamais sans ma permission, même pendant ses terreurs nocturnes. Quelque chose
en lui semble l’empêcher d’aller trop loin, et je lui en suis reconnaissante.
Je passe mes deux mains dans ses cheveux et je le tiens fermement.
– Réponds-moi, et tu auras ce que tu veux.
Je lèche son cou, et le goût salé de sueur et d’océan fait fourmiller de plaisir mes
papilles. Wes gémit et presse la base de sa verge sur mon clitoris, me frottant,
cherchant ce que je refuse de lui donner. Je recule la tête de sorte que nous
soyons nez à nez. Ses pupilles se rétractent lentement, laissant le vert de ses iris
remplir le néant. Je souris et effleure sa bouche avec la mienne, lui rappelant où
il est. Il soupire entre mes lèvres, acceptant mon baiser.

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– Dis-moi pourquoi tu m’aimes, je répète.
Une de ses mains lâche ma fesse pour s’enfouir dans mes cheveux et tenir ma
nuque. Il pose son pouce sur ma joue, un geste tendre et plein d’amour. Je suis
écrasée entre le mur et son corps et pas un millimètre ne nous sépare. En cet
instant, nous sommes connectés physiquement, mentalement et
émotionnellement.
– T’aimer m’est aussi naturel que respirer. J’ai besoin de toi pour vivre. Toi,
Mia, tu es mon souffle de vie.
Les larmes remplissent mes yeux tandis que j’appuie mon front sur le sien.
– Viens, Bébé. Prends ce dont tu as besoin.
– Je t’aime, dit-il en reculant son bassin pour s’enfoncer entièrement en moi,
brusquement. J’adore chaque centimètre de toi. Mais plus que tout, dit-il alors
qu’un cri m’échappe, j’aime être connecté à toi, la femme sans laquelle je ne
peux pas vivre.
– Je t’aime chaque jour un peu plus, je dis, répétant ses paroles.
Son pouce caresse ma joue en même temps que ses hanches poursuivent leur va-
et-vient effréné.
– Merci. Merci de me faire revenir toutes les nuits.
Il accélère le mouvement de son bassin, offrant à mon corps un bonheur exquis.
Je monte si haut, lorsque Wes me fait l’amour, que j’atteins les étoiles.
Mon corps crépite de plaisir, de douleur et d’amour. Je l’ai fait. Je l’ai ramené à
la maison. J’ai retourné la situation. Les parois de mon sexe se contractent,
agrippant sa verge alors qu’il frappe ce point en moi qui me fait hurler de plaisir.
Je me crispe sous lui, me cambre, collant ma poitrine à la sienne. Nos sueurs se
mélangent, nos corps fusionnent, nos âmes dansent ensemble. Des étoiles
scintillent devant mes yeux et la brise de l’océan chatouille ma peau par la
fenêtre ouverte. Wes grogne lorsqu’il éjacule et mord la peau tendre à la base de
mon cou. Son essence chaude jaillit en moi, provoquant mon propre orgasme. Je
jouis violemment et me referme sur lui, verrouillant sa queue en moi, le serrant
dans mes bras et entre mes jambes. J’aimerais ne jamais lâcher.
– Merci, chuchote Wes contre ma joue. Merci, mon amour.

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Il s’accroche à moi comme un homme désespéré, me tenant si fort que je peine à
respirer. Mon amour est son souffle, et il me suffit de l’aimer pour vivre.
*
* *
Le lendemain matin, lorsque je me réveille, Wes n’est pas là. Je me suis habituée
à me réveiller avec sa chaleur et son poids près de moi, me serrant contre lui.
Mais aujourd’hui, je crains ce qu’apporteront les premières lueurs. Comment
réagira-t-il, à tête reposée ? Je regarde l’heure et note qu’il est très tôt. Le soleil
se lève à peine. Je sors nue sur le balcon, sans me soucier qu’on me voie.
Une silhouette solitaire se dessine au loin, sur la plage qui s’étend au pied de
notre maison. J’aimerais commencer cette nouvelle journée avec lui, me
prélasser dans la pureté de notre amour, savourer notre victoire sur la pénombre.
Or, Wes est allé chercher la sérénité de l’océan, la beauté tranquille de Mère
Nature, et non la chaleur de mon corps et ma présence.
Le cœur lourd, je saisis mon bikini blanc, qui sert davantage à éveiller le désir
qu’à me couvrir, mais il est en haut de la pile de vêtements propres que Judi a
posés sur la commode. Après réflexion, j’attrape le t-shirt blanc que Wes portait
hier afin d’être plus décente. Si je dois parler à Wes et découvrir où il en est, je
ne veux pas tout gâcher en l’excitant.
Je traverse la plage. Il est au bord du rivage, les vagues chatouillent à peine ses
chevilles. Ses pieds sont ancrés dans le sable et il se tient bien droit. Il porte un
pantalon en lin beige qu’il a remonté jusqu’aux genoux, et rien d’autre. Je passe
plusieurs minutes à le regarder, plus émerveillée par sa beauté que par l’océan
qui s’étend devant lui. Ses longues mèches blond foncé s’agitent dans la brise et
son torse doré est éclatant sous les premiers rayons de la journée. À voir ses
épaules et sa posture rigides, je sais déjà qu’il n’est pas détendu.
J’approche lentement en prenant soin de me faire entendre. Il tourne la tête
lorsque j’arrive près de lui, et son expression anéantie disparaît immédiatement,
vaincue par la lumière et l’amour. Wes m’observe des pieds à la tête, s’arrêtant
sur mes longs cheveux qui volent dans la brise, et il m’offre la seule chose que
j’ai désirée depuis son retour, un large sourire plein de joie. J’en ai le souffle
coupé et, sans l’avoir prévu, je me mets à courir vers lui. À la dernière seconde,

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je saute et il m’attrape en plein vol pour me faire tourner autour de lui. Je fais
tout mon possible pour graver cet instant dans ma mémoire et dans mon cœur
afin de le revisiter chaque fois que je serai triste, inquiète, ou frustrée. Mon Wes,
l’homme dont je suis tombée amoureuse… est revenu.
J’effleure sa bouche et l’embrasse. Je n’attends pas qu’il me rende mon amour,
je prends ce dont j’ai besoin. Je glisse ma langue entre ses lèvres, caressant la
sienne amoureusement. Je lui offre tant de passion qu’il trébuche et tombe dans
le sable, m’entraînant avec lui de sorte que je chevauche son bassin. Je ne me
décourage pas et mordille sa lèvre inférieure jusqu’à ce que j’entende ce
grognement qui m’excite tant. Il titille ma lèvre et je retiens mon souffle. J’ai
l’impression que nous passons des heures ainsi, assis dans le sable, nous
embrassant comme des adolescents.
Sa bouche a un goût de menthe et d’océan. La peau de son visage est fraîche,
mais son torse est réchauffé par les rayons du soleil. Je le serre fort contre moi,
suce sa langue et grogne dans sa bouche.
Il recule la tête et nous cherchons tous les deux notre souffle.
– Waouh, tu es sacrément fougueuse ce matin. Je n’aurais pas dû te laisser au lit.
Je frotte mon nez au sien, puis je l’embrasse tendrement.
– Alors, pourquoi tu es parti ?
Sa réponse compte sans doute plus pour moi que pour lui.
Il chatouille mes cuisses et je ris dans sa bouche.
– Tu dormais profondément, je ne voulais pas te réveiller.
J’inspire lentement, essayant de calmer ma respiration.
– C’est la seule raison ?
Il prend mon visage dans ses mains.
– Hier soir a été très intense. Je crois que j’avais besoin de temps pour y
réfléchir.
Je l’aime plus que jamais d’avoir admis cela.
– Et alors ? je demande en le regardant dans les yeux.
Je mordille ma lèvre et il m’en empêche avec son pouce, prenant ensuite ma
chair rose entre ses lèvres pour la soigner avec des coups de langue.
– Je pense que tu me fais du bien.

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– J’espère bien ! je m’exclame en riant.
– Non, ma chérie, tu ne comprends pas. Hier soir était comme une épiphanie. Tu
m’as sorti de mon enfer, comme d’habitude, mais cette fois-ci, je contrôlais la
situation différemment. Je n’ordonnais pas à ton corps de m’obéir ou de me
laisser me perdre en toi. Au lieu de cela, tu m’as ramené de mon cauchemar et tu
m’as rappelé ce qui m’attendait dans la vie. Quand tu m’as demandé pourquoi je
t’aimais, des millions de raisons me sont venues en tête, me faisant oublier toute
l’horreur pour la remplacer par quelque chose de beau. Une chose réelle, vivante
et sincère, mon amour pour toi.
Des larmes s’accumulent au coin de mes yeux.
– Ça a l’air d’être une bonne chose.
Il glousse et frotte son nez sur ma joue. Je tiens sa nuque, le serrant contre moi.
– C’est une très bonne chose. Puis, après hier, et la façon dont tu as géré Gin…
Il secoue la tête et ne finit pas sa phrase.
– Dis-moi, ça va. Je peux l’entendre. Souviens-toi, je suis assez forte pour
partager ton fardeau. Ça l’allège.
Il soupire et approche sa bouche de mon oreille.
– Bébé, ils lui ont fait tellement de mal. Ils m’ont attaché et obligé à les regarder
la violer un par un. Ils étaient si nombreux. C’était une destruction diabolique.
Parfois, plusieurs la violaient en même temps, sanglote-t-il, alors que ses larmes
trempent mon dos. Ils la ligotaient à une poutre, debout, et ils étaient deux à
l’agresser en même temps. Elle criait si fort qu’ils scotchaient sa bouche, et son
visage se couvrait de larmes et de morve. Parfois, elle finissait par s’évanouir de
douleur, et je remerciais Dieu qu’elle ne soit plus consciente.
Wes hoquette et tousse dans mon cou. Ses larmes et ses émotions bloquent les
mots qu’il essaie désespérément de faire sortir.
– Mon Dieu… Mia, ils la laissaient accrochée pour qu’on la voie. Le sang
coulait sur ses jambes et formait une flaque à ses pieds. Parfois, j’espérais qu’ils
la tuent, pour qu’elle n’ait plus à vivre ça. Ils l’ont violée tous les jours. Jour
après jour, j’ai vu un morceau d’elle mourir. Je n’imagine pas de pire enfer, et
Gina l’a vécu.

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Il s’agrippe à ma taille, hanté par ses souvenirs. Je le serre aussi fort que
possible, voulant lui donner ma force et ôter sa souffrance. Je suis surprise de
sentir des larmes couler sur mes joues. Nous nous tenons l’un contre l’autre,
libérant toute notre désolation, notre peur et notre chagrin. Wes s’appuie
lourdement contre moi et je finis par me demander s’il dort. Sa respiration est
profonde et régulière. Certains de mes doigts sont ankylosés, d’autres
fourmillent de le tenir si fort, et je suis sûre que j’aurai la marque de ses ongles
sur mes côtes. Je lève une main pour la passer dans ses cheveux, et au bout de
quelques minutes, il pousse un grognement satisfait qui réveille instantanément
ma libido.
– Tu crois que tu peux te lever ? je demande.
– Je préférerais m’appuyer sur toi toute ma vie, rétorque-t-il.
Je ricane et l’embrasse sur le front.
– Tu peux, mais pas quand on est assis dans le sable. On peut continuer dans la
chambre ?
Son estomac gargouille, mettant en suspens mon projet de lui sauter dessus.
– Et si on continuait plutôt dans la cuisine ? Judi doit être en train de nous
préparer quelque chose de spectaculaire.
Il me suffit de penser aux fameux petits déjeuners de Judi pour saliver. Je me
lève à contrecœur et lui tends la main. Il la regarde un instant, lève les yeux vers
moi, puis, une fois debout, il m’attire dans ses bras.
– Tu m’épates.
– Comment ça ? je ricane.
– Je te raconte quelque chose d’affreux, une chose qui me ronge profondément,
et tu trouves un moyen de l’encaisser avec grâce. Je ne sais pas comment tu fais,
explique-t-il en secouant la tête.
– C’est facile. Je sais que je peux me reposer sur toi. Je crois que c’est ce qui fait
notre force. Tout le bien, le mal, et tout ce qui est laid peut devenir beau si on y
fait face ensemble. Seuls, nous n’avons aucune chance, mais ensemble, on peut
survivre à tout.
Il tire ma main et avance vers la maison.
– Je pense que tu as raison. Avec toi, Mia, tout est possible.
*

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*
* *
– Je ne suis pas sûr d’avoir compris. Tu dois trouver le thème du concept,
l’écrire et le filmer avant vendredi ? demande Wes en mordant dans une gaufre.
– Mmm, Judi, tu es une déesse. Ces gaufres sont dingues ! je m’écrie en me
léchant les doigts avant de reporter mon attention sur mon homme. Ouais, c’est
ça. C’est fou, non ?
Il passe sa main dans ses cheveux et boit une gorgée de café.
– Un peu, mais ce n’est pas impossible. Tu as une idée de ce que tu veux faire
pour le premier ?
Je prends une autre bouchée, la mâche et déglutis avant de répondre.
– Eh bien, étant donné que je n’ai pas trop de temps, je pensais faire le premier
épisode sur les mères au foyer.
– Comment ça ?
Je replie mon pied sous mes fesses et dessine des formes invisibles sur la table.
– Je ne sais pas encore, mais je pensais à ces mères qui mettent tout de côté pour
leurs enfants, leur carrière, leurs hobbies. C’est magnifique. La plupart sont
bénévoles dans les écoles, dans les associations de parents d’élèves, les scouts, et
elles conduisent les enfants à toutes leurs activités. Je trouve que c’est un boulot
un peu ingrat, en fait. Leurs enfants apprécient forcément, et je suppose que leurs
maris aussi, mais il y a un vrai stigmate accompagnant l’expression « mère au
foyer », tu vois ce que je veux dire ?
Je bois mon café avant de le reposer.
– Comment t’est venue cette idée ? demande Wes en trempant sa gaufre dans
une mare de sirop d’érable.
Un peu de gaufre, avec ton sirop, mon chéri ? Je me retiens de dire quoi que ce
soit, car Wes fait ce qu’il peut pour reprendre du poids.
– Eh ben, quand j’étais avec Max et Cyndi, dans leur ranch, j’ai observé Cyndi.
Elle faisait à manger, les courses, le ménage, elle s’occupait d’Isabel, le tout en
étant enceinte. En plus de ça, elle était super-douée pour les travaux manuels.
Elle ne se contentait pas de laisser sa fille devant la télé toute la journée, même

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si elle lui accordait une demi-heure par jour, mais elle passait du temps à
fabriquer des choses comme des serre-tête et des nœuds.
– Des serre-têtes et des nœuds ? Pour quoi faire ?
– Tu es sérieux ? Tu es si macho que ça ? je rétorque en levant les yeux au ciel.
– Ben ouais, glousse Wes en désignant son torse.
– Ok, tu n’as pas tort, je réponds en me léchant les babines et en dévorant des
yeux mon mec à moitié nu.
Miam.
– Ne me regarde pas comme ça, sinon tu ne finiras ni ton petit déj ni ton idée.
Continue.
– Bref, elle fabriquait des choses qu’une petite fille de l’âge d’Isabel aime porter,
et quand elle l’emmenait à la maternelle, elle les donnait aux parents de la part
de Bell. C’était super-cool ! C’est une activité qu’elle a faite avec sa fille, et en
plus elle a fait plaisir à quelqu’un en lui offrant un cadeau. Quand j’ai
accompagné Cyndi à l’école pour la récupérer, un jour, toutes les petites filles
portaient les nœuds ou les serre-tête d’Isabel.
– C’est super-cool, mais comment tu vas rendre ça assez intéressant pour donner
envie au public de le regarder ?
– Eh bien… je me suis dit que tu pouvais peut-être m’aider ?
Il regarde par la fenêtre en mordillant un coin de sa lèvre inférieure. Ce type est
vraiment magnifique. Je sais que les hommes n’aiment pas qu’on leur attribue
cet adjectif, mais Wes l’est vraiment. Il est viril et sexy, bien sûr, mais il est
magnifique, aussi. Je suppose que c’est mon amour pour lui qui me fait tout voir
en rose.
– Et si tu suivais une mère avec une caméra ?
– Comme dans une émission de téléréalité ?
Il hoche la tête et je le vois réfléchir à toute vitesse.
– Trouve une mère que tu connais et qui fait quelque chose que tu décrirais
comme étant beau. Pose-lui des questions, filme-la pendant sa journée pour
montrer tout ce qu’elle fait pour les autres et montre la beauté que tu as vue au
reste du monde. Le public du Docteur Hoffman va adorer, je parie qu’un bon

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pourcentage des spectatrices sont des mères au foyer. Les producteurs vont
adorer.
– Tu veux bien travailler avec moi ?
Je bats des cils et retiens mon souffle. C’est la deuxième phase de mon projet
pour le remettre sur pied. Bien évidemment, il ne s’agit pas d’un film pour
Hollywood, mais c’est le même domaine, au moins.
Wes sourit et pose sa main sur la mienne.
– Si ça te fait plaisir, alors je veux bien.
– Ça me fait extrêmement plaisir. C’est génial !
Je me lève et fais une petite danse de célébration.
– T’es folle, tu le sais ça ? dit-il en riant.
Je continue de sautiller quelques secondes, puis je m’assieds sur ses genoux.
– Heureusement je suis ton genre de folle.
– C’est vrai. Et je ne changerais pour rien au monde.

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Chapitre 7

Wes avait complètement raison. Le Docteur Drew Hoffman et ses cadres


coincés adorent mon idée, qu’ils trouvent vraiment unique. Heureusement,
d’ailleurs, car j’ai déjà filmé la mère que j’ai trouvée. Étrangement, ça a été le
plus difficile. Je ne connais personne à Los Angeles en dehors de Wes et de sa
famille, de mon ancien agent et de Tante Millie. Je n’avais donc pas la moindre
idée de comment m’y prendre pour trouver une mère au foyer. Après tout, ce
n’est pas comme si j’avais un enfant en bas âge, et Cyndi, ma nouvelle belle-
sœur, n’habite pas dans le coin.
Désespérée, je suis allée à la supérette du coin pour me remonter le moral avec
un festin de cupcakes et de gâteaux, et mon caddie a percuté celui d’une femme
avec un bébé attaché à sa poitrine et un enfant d’un ou deux ans en train de
hurler dans son chariot. Je me suis excusée, puis j’ai entrepris de la suivre
comme une psychopathe. Elle n’est pas super-jeune, trente-cinq ans, environ.
Ses cheveux bruns sont relevés dans une queue-de-cheval, elle porte un legging
noir un peu trop moulant sur les cuisses et des claquettes. Elle fait partie de
celles qui adorent avoir les orteils qui brillent et ses ongles sont couverts de
strass. Elle déambule dans le rayon jardin d’extérieur, et ses tongs claquent à
chaque pas.
Elle étudie les fleurs et les plantes, tâtant la terre, lorsqu’elle a un geste qui me
surprend. Elle sort sa bouteille d’eau de son sac à main géant, qui sert peut-être
aussi de sac à langer, et elle la vide dans les pots. Elle enlève les feuilles jaunes
des plantes avant de remplir sa bouteille à la fontaine, puis elle arrose les autres
pots.
– Qu’est-ce que vous faites ? je demande en faisant mine de sentir les
marguerites.

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Mes narines ne détectent aucun parfum, mais peu importe, c’est ma couverture.
– Il leur faut de l’eau, sinon elles vont mourir. Et si on n’enlève pas les feuilles
mortes de celle-ci, ça peut endommager toute la plante.
– Comment vous le savez ? Vous êtes jardinière, ou quelque chose comme ça ?
Elle secoue la tête et rougit légèrement.
– Non, je suis juste une mère au foyer.
Et nous avons une gagnante ! Ce sont les mots magiques que je rêvais
d’entendre.
– Ah, et vous avez la main verte ?
Je lui parle d’une façon si familière que je m’attends à ce qu’elle m’ignore et
tourne les talons, mais ce n’est pas le cas. Au contraire, elle semble ravie de
parler d’un sujet qui lui plaît.
– Certains disent que mon jardin est presqu’aussi beau que celui de Martha
Stewart1, dit-elle en rougissant.
Son ton est à la fois fier et modeste, un compromis qui ne court pas les rues,
dans cette ville.
– Ah oui ? J’adorerais le voir, je réponds.
Je décide de tenter ma chance et je passe la demi-heure qui suit à lui parler de
mon projet. Dans un mail, le Docteur Hoffman m’a détaillé le budget qui est
alloué à mon segment. Je pensais que c’était moi le budget, mais il s’avère que
j’ai environ dix mille dollars à dépenser pour mes besoins de garde-robe,
d’accessoires et autres. J’explique donc à la jeune mère que ma boîte de
production la paierait quelques milliers de dollars pour nous autoriser à la suivre
et à la filmer.
– Oh, c’est inutile de me payer ! Si ça peut aider d’autres mères à voir
l’importance d’élever ses enfants et d’être le cœur de son foyer, je suis ravie !
Waouh. Cependant, je sais que l’émission du Docteur rapporte une fortune à la
chaîne, et j’ai le sentiment que sa famille aurait bien besoin d’un petit coup de
pouce. Je m’assure donc que l’argent apparaîtra sur son compte peu de temps
après que nous aurons filmé l’émission.
*
* *

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Une des choses que je préfère, dans ce nouveau job, c’est que je peux emmener
mon mec au travail ! Je ne peux pas m’empêcher de sourire. C’est bien plus que
du bonheur, je suis si folle de joie que j’ai du mal à me contenir lorsque nous
arrivons à l’aube à la maison de Heidi et David Ryan. Wes m’a dit que si nous
voulions la capturer dans son élément, il fallait commencer la journée en même
temps qu’elle.
La maison est en stuc couleur terre cuite. Elle est à cinq mètres de la suivante,
qui est la copie conforme, mais couleur sable. Toutes les maisons de l’impasse
ont des tons de terre et d’ocre différents. Certaines sont à deux étages, d’autres
de plain-pied, mais il est évident qu’elles ont toutes été construites par le même
promoteur.
Nous sommes à Cerritos, une petite ville à environ trente-cinq minutes au sud de
Los Angeles lorsqu’il n’y a pas de bouchons. Je sors de la voiture au moment où
le jeune livreur de journaux jette le quotidien matinal depuis son vélo, visant
parfaitement le perron des Ryan. Je lève mon pouce vers lui et il sourit en
poursuivant sa tournée. Wes rit et me prend par les épaules.
– Allez viens, ma petite citadine.
– Je te rappelle que j’ai grandi dans le désert.
– Ils ne livrent pas les journaux à Vegas ?
– Pas chez moi ni dans mon quartier. On est sans doute tous trop pauvres. Chez
toi le journal apparaît comme par magie sur la table tous les matins. On a un
livreur à vélo ? je demande d’un ton plein d’espoir.
– Je ne crois pas, non. Il faut demander à Miss Croft, c’est elle qui gère ces
choses. Mais je n’ai jamais vu de gamin monter la colline à vélo, ricane-t-il.
Déçue, je hausse les épaules avant de frapper à la porte couleur chocolat. David
Ryan l’ouvre et nous regarde en fronçant les sourcils. Sa cravate pend autour de
son cou, sa chemise n’est pas rentrée dans son pantalon et il est pieds nus.
– Euh, je peux vous aider ?
– On est là pour l’émission. Je suis bien chez Heidi Ryan, n’est-ce pas ?
Zut, peut-être ne suis-je pas au bon endroit ?
Derrière moi, la main de Wes ne quitte pas le creux de mes reins, et derrière lui
se trouve Wayne, notre cameraman.

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Heureusement, Heidi fait son apparition car David ne semble pas comprendre ce
dont je parle.
– Mia ! Salut, entrez, entrez. Je pensais que vous viendriez plus tard !
David ouvre davantage la porte pour nous laisser entrer, et Wayne allume la
caméra.
– Pas encore, je gronde. Laisse-moi leur parler pour m’assurer qu’on n’empiète
pas trop sur leur intimité. N’oublions pas que nous sommes chez eux.
J’informe le couple de notre projet et je laisse Heidi en discuter seule à seule
avec son mari. Lorsqu’ils reviennent, quelques minutes plus tard, il semble se
tenir plus droit.
– Je suis désolé, dit-il. Heidi m’en a parlé hier soir, mais j’étais à l’ouest après
une longue journée au tribunal.
– Est-ce que ça vous dérange que l’on commence maintenant ? Tout ne sera pas
dans l’émission parce que la vidéo ne durera que quinze minutes, mais on
aimerait des images de Heidi et de son quotidien, si ça ne vous gêne pas.
Il fait non de la tête, sourit, et ses yeux bleus s’illuminent.
Wayne allume la caméra et nous entrons dans la cuisine, où trois enfants sont
assis autour d’une table pour six. Heidi cuit des œufs et du bacon en s’arrêtant de
temps à autre pour beurrer des tartines. Les enfants ne semblent pas surpris de
voir trois étrangers débarquer durant leur petit déjeuner.
– Wayne, filme-la aux fourneaux et en train de nourrir les enfants. Ensuite, on
les laissera déjeuner tranquillement, d’accord ? dit Wes.
Heidi tourbillonne en peignoir, servant le petit déjeuner, donnant son biberon au
bébé puis un biscuit sablé. Elle se déplace avec une grâce surprenante, comme
une danseuse étoile. Soudain, deux sachets en papier apparaissent sur la table,
l’un pour son mari, l’autre pour son fils aîné. Elle pose son cartable à côté de son
repas, et elle donne un thermos de café à David, qui laisse son assiette sur la
table pour aller finir de se préparer.
Lorsque père et fils sont partis, Heidi nettoie la cuisine et fait la vaisselle, et ce
n’est que lorsque tout est propre qu’elle mange une tranche de pain grillé, sans
beurre ni confiture. Elle prépare un festin pour sa famille, mais elle grignote du
pain et une gorgée de café.

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– Je dois préparer Lynndy et Lisa pour les emmener à l’aire de jeux. Elles ont
rendez-vous avec des copines.
Nous passons le reste de la journée à suivre Heidi et je découvre que sa vie est
épuisante. Je dois avouer qu’elle ne me donne pas envie de créer tout de suite ma
propre famille, mais de son côté Wes est admiratif devant son efficacité et son
altruisme. Il s’assure que Wayne capture les plus belles images, les moments de
tendresse entre elle et ses enfants ou elle et son mari, avec un enthousiasme
auquel je ne m’attendais pas.
Lorsque nous rentrons chez les Ryan après avoir récupéré le fils aîné à l’école,
Heidi s’assied pour faire ses devoirs avec lui. Mon Dieu, les maths au CE2 sont
un casse-tête ! Heureusement que Wes pourra s’occuper de ce genre de chose
avec nos enfants !
Oups. Est-ce que je viens d’envisager d’avoir des enfants avec mon surfeur
réalisateur, sans paniquer ? Waouh. Je suis dans le pétrin. Je n’avais jamais
pensé à avoir des enfants… tout court. Cependant, à en croire le regard joyeux
de Wes lorsqu’il tient le bébé, il a clairement l’intention d’avoir des enfants. Bon
sang, si je ne fais pas attention, je vais me retrouver mariée et en cloque avant la
fin de l’année.
Wes lève la tête alors que je le regarde jouer avec le bébé. Ses yeux ont la
couleur des plus belles émeraudes. Les bébés le rendent heureux, en effet.
Mince, je pourrais lui en faire un, rien que pour qu’il me regarde avec autant
d’amour et d’envie. Je secoue la tête et me concentre sur le travail. Ce genre de
conversation doit avoir lieu après les galipettes, quand on est d’humeur
romantique et amoureuse.
Lorsque les deux plus jeunes enfants sont au lit pour la sieste et que l’autre est
parti à vélo chez un copain, Heidi nous emmène dans son jardin. Lorsqu’elle
ouvre la porte, je suis bouche bée. Je suis face à un lieu magique, décoré de
petites statues d’ange, d’une fontaine et de fleurs par milliers. Mon Dieu… il y a
des fleurs partout, en terre, en pots, sous les arbres, de couleurs et de formes
variées.
– Waouh, chuchote Wes. C’est magnifique.
Heidi l’entend et sourit jusqu’aux oreilles.

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– Merci. Laissez-moi vous faire une visite guidée. Le jardin est en ovale pour
qu’on puisse en faire le tour. Il n’est pas immense mais… c’est ce qu’on peut se
permettre, et je l’adore.
Wayne nous filme côte à côte alors qu’elle m’explique ses méthodes et ses
choix. Elle me montre un grand panier contenant deux paires de gants et deux
sécateurs. J’enfile gaiement les miens, puis nous faisons le tour du jardin et nous
arrêtons devant des rosiers de couleurs différentes.
– C’est incroyable, Heidi, je dis en sentant les fleurs.
Elle me montre celles que je peux prendre et où les couper. Lorsque nous avons
deux douzaines de tiges, nous continuons jusqu’à un autre coin pour couper des
« vivaces », comme elle dit. Elle m’apprend que l’une, d’un violet éclatant, est
un Cleome Speciosa.
– C’est un nom sacrément compliqué pour une fleur si délicate.
– Les apparences sont souvent trompeuses !
Des couinements retentissent dans le babyphone glissé dans sa poche arrière et
nous nous arrêtons. Elle porte l’objet à son oreille et je retiens mon souffle, je ne
sais pas pourquoi. Comme il n’y a pas de nouveau bruit, elle remet le babyphone
dans sa poche et poursuit.
– Celles-ci sont des Clochettes d’Irlande, dit-elle en coupant quatre longues
tiges. Tu vois ce beau vert chartreuse ? Ce sera superbe avec les roses jaunes et
roses. Sens ça, ajoute-t-elle en l’approchant de mon nez.
Un parfum doux et frais titille mes sens.
– Hmm, ça sent la menthe !
Lorsque nous avons arpenté tout le jardin, nous rentrons avec nos paniers pleins
de ce que je considérais jusqu’à présent comme de l’herbe. Elle les pose sur la
table de la cuisine et nous apprend, à moi et au public, comment couper les
épines et les tiges pour que les fleurs durent le plus longtemps possible. Elle
ouvre ensuite un tiroir et en sort du papier kraft et des élastiques multicolores.
Elle enveloppe les fleurs dans le papier et fixe le bouquet avec l’élastique, puis
elle prend du ruban et recouvre les caoutchoucs.
– Qu’est-ce que tu vas faire avec ces fleurs ? je demande en me disant que je
pourrais peut-être les rapporter à Miss Croft.

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– Eh bien, chaque semaine, j’apporte quelques bouquets à la maison de
convalescence au bout de la rue. Il y a des patients là-bas qui n’ont pas de
famille, et un simple bouquet leur remonte énormément le moral.
Waouh. Je sens que je vais battre des records d’audience. J’ai rencontré des
personnes très bien, cette année, mais aucune n’est comme Heidi Ryan. À la fin
d’une longue journée, je me tourne vers elle alors qu’elle est dans les bras de son
mari, devant leur maison. Face à la caméra, il la serre contre lui et l’embrasse sur
la joue avant de lui demander ce qu’il y a à dîner. « Ce que tu décideras de
cuisiner ! » répond-elle en riant.
Tout sourires, je me tourne vers Wayne et m’adresse à la caméra.
– Merci, Heidi Ryan, de nous avoir ouvert la porte de ta maison et de nous avoir
donné un aperçu de votre vie de mère au foyer. Ton jardin est époustouflant. Tu
mérites vraiment le titre de Super-Maman. Ce que tu accomplis chez toi avec ta
famille, et dans ta communauté, est exemplaire. L’équipe du Docteur Hoffman et
moi-même te félicitons pour tout ton travail. Je suis Mia Saunders et je vous
retrouve la semaine prochaine pour un autre épisode de Vivre en Beauté.
*
* *
Je passe la journée suivante avec Wes et l’équipe de montage, à sélectionner les
meilleures images jusqu’à ce que nous ayons ce qu’il faut pour tenir quinze
minutes. Wes est génial. C’est lui qui dit au monteur de zoomer sur certains
plans, les mains potelées de Lynndy, le bébé, qui essaie d’attraper sa mère, la
manière dont David regarde sa femme comme s’il n’y avait qu’elle, ou encore
les yeux pleins de fierté de Heidi lorsqu’elle observe Lisa à l’aire de jeux.
Wes m’explique pourquoi ces petits moments sont des pépites et pourquoi ils
feront toute la différence. Lorsque nous visionnons la version finale, je découvre
qu’il a raison, même si je ne doutais pas de lui, après tout, son métier est d’écrire
des scripts et de faire des films. Un segment de quinze minutes pour une
émission télé est du gâteau pour lui, or il s’y attelle avec la même énergie qu’un
film à plusieurs millions de dollars. Je l’observe et l’admire, et je tombe un peu
plus amoureuse de lui à chaque seconde qui passe.

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Le bruit d’une porte qui claque nous fait tous sursauter. C’est Drew Hoffman qui
entre dans le studio de montage avec fracas, sans se soucier des trois personnes
qui sont concentrées sur l’écran. Une brindille blonde est collée à lui. Ses seins
énormes débordent de son débardeur en dentelle et je suis sûre qu’il suffirait
qu’elle se penche un peu trop pour qu’un téton fasse une apparition.
– Bonjour, Docteur Hoffman. On est en train de finir le segment pour le montrer
à votre équipe ce soir.
– C’est pour ça que je suis là, chérie.
La blonde plonge sa main dans les cheveux du Docteur et se lèche les lèvres.
– Ooh, j’aime ta nouvelle nana, elle est sexy. On dirait un gâteau d’anniversaire,
avec toutes ses courbes. On peut jouer avec elle, Doc, s’il te plaît ? ronronne la
jeune femme en secouant sa poitrine.
Wes se tourne brusquement sur sa chaise et se lève.
– Excusez-moi, on se connaît ?
Drew écarquille les yeux et sourit en le reconnaissant.
– Weston Channing, troisième du nom, le célèbre scénariste. Qu’est-ce qui vous
amène ici ?
Wes fait un mouvement de tête vers moi et passe un bras autour de ma taille.
– Vous avez embauché ma fiancée, dit-il.
Euh… sa fiancée ? Je regarde mon annulaire dépourvu de bague, ce que Wes
remarque en grimaçant.
– Votre fiancée ? Mia…
Il ouvre la bouche et la referme, comme s’il pesait ses mots.
– Génial ! s’exclame la blonde. Mon Dieu, j’adore vos films, vraiment ! Je les
adore ! Et vous êtes canon ! ajoute-t-elle en gigotant contre le Docteur, faisant
bondir ses nichons énormes.
Elle n’a pas le moindre gramme de graisse sur elle et je suis sûre qu’en la
secouant trop fort, j’entendrais ses os s’entrechoquer.
– Je m’appelle Brandy, au fait, mais ça s’écrit normalement – B-R-A-N-D-Y.
Normalement ? Parce qu’il y a d’autres moyens de l’écrire ? Je soupire et je
serre Wes plus fort contre moi. Il masque son rire en toussant dans sa main, il me
connaît trop bien.

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– Mon Dieu ! On devrait dîner ensemble tous les quatre, entre couples ! Ce serait
genre…
Elle enroule une mèche autour de son doigt et je réalise que ses cheveux sont des
rajouts. Je lève les yeux au ciel en attendant qu’elle finisse sa phrase.
– … je sais pas… ce serait ouf !
Heureusement, Brandy et le Docteur Hoffman sont trop occupés à mater Wes
pour m’entendre grogner.
– Je suis désolée mais, si vous voulez la vidéo ce soir, on doit se remettre au
boulot. Wes me file un coup de main parce qu’il a un peu de temps libre.
Hoffman ouvre la bouche et se crispe visiblement.
– C’est vrai, j’ai lu dans le journal que… c’est terrible ce qui vous est arrivé à
vous et cette actrice, dit-il en secouant la tête alors que mes poils se hérissent.
Vous avez survécu à un mois de captivité avec Gina DeLuca, c’est ça ? La
moitié de votre équipe a été tuée par des terroristes ? Des sauvages, si vous
voulez mon avis.
Il semble sincère, mais ça ne calme pas ma colère. Bon sang, les choses se
passaient si bien !
– Euh, ouais. Je suis content d’être rentré. Ravi de vous avoir rencontrés,
Docteur Hoffman, Brandy, dit Wes en leur serrant la main. Hélas, on doit se
remettre au travail, conclut-il en se rasseyant.
Le technicien lui donne un casque et il se concentre sur l’écran. Je fais un signe
de la main aux deux intrus et me rassieds avant de remettre un casque à mon
tour. J’entends le Docteur Hoffman dire quelque chose, puis la porte se referme,
nous laissant dans notre monde de mères au foyer.
Je pose la main sur le dos raide de Wes, sentant la tension émaner de lui par
vagues. Il tressaille tout d’abord, mais lorsque je le caresse et lui pose des
questions sur tel ou tel détail à l’écran, il se détend de nouveau. Lorsque nous
présentons la vidéo aux producteurs, ils l’adorent tout de suite. Nous retournons
dans le studio pour récupérer nos affaires, et nous traversons le labyrinthe de
Century Productions pour rentrer à la maison.
Je pensais que nous avions évité la catastrophe. Hélas, je me suis fourré le doigt
dans l’œil.

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1. Personnalité de la télé américaine qui a fait sa carrière en expliquant aux
femmes comment créer un beau foyer pour sa famille.

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Chapitre 8

Nous avions réussi à ne pas croiser la presse toute la semaine. La seule fois que
Wes a quitté la maison, c’était pour m’accompagner chez les Ryan, et on savait
qu’on n’y croiserait jamais de paparazzis. Hélas, quelqu’un chez Century
Productions – le Docteur, les producteurs ou Brandy « écrit normalement » – les
a alertés. Sans doute ont-ils pensé que ce serait bon pour leur image de capturer
Wes sortant de leurs bureaux avec la nouvelle associée d’Hoffman. Cela
explique pourquoi lui et sa femme sont devant la porte lorsque nous partons.
Nous avons à peine mis le nez dehors que nous sommes aveuglés par des
centaines de flashs.
J’ai déjà affronté des paparazzis quand j’étais avec Anton à Miami, mais
c’étaient des mecs bidonnants qui tenaient leur appareil avec leurs gros doigts et
qui prenaient un million de clichés par minute dans l’espoir de capturer la pire
photo du Latin Lover pour leur magazine people.
Wes et moi sommes face à une marée de photographes et de reporters.
– Weston, ça fait quoi d’être détenu par des terroristes ?
– Où êtes-vous blessé ?
– Vous avez ressenti quoi en voyant Trevor mourir devant vous ?
– Ils ont fait du mal à Gina, votre copine ?
– Qui est Mia Saunders pour vous ?
Le Docteur Hoffman approche de la foule avec sa femme qui, en l’espace d’une
seconde, a raccroché son rôle de bimbo stupide pour endosser celui de top model
superstar. Wes et moi sommes derrière eux, cherchant une issue de secours.
– Voilà, calmez-vous. Notre ami Monsieur Channing et sa fiancée,
Mademoiselle Saunders, méritent un peu de tranquillité après ce qu’ils ont vécu,
vous ne pensez pas ? Ayez un peu de décence, voyons.

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Fiancée ? Toute la foule répète le mot à haute voix. Ce n’est pas ainsi que j’avais
prévu d’annoncer à tout le monde que j’épousais Wes. Je n’ai même pas encore
de bague, bon sang !
– Docteur Hoffman, Docteur Hoffman, est-ce que Monsieur Channing et Mia
parlent de leur traumatisme dans votre émission ? demande un journaliste.
Le Docteur sourit jusqu’aux oreilles. Quel enfoiré, il adore l’attention des
médias et je suis certaine que c’est lui qui a tout organisé.
–Mia est employée par mon émission. Elle va désormais présenter un segment
spécial tous les vendredis. Vous devriez regarder parce que c’est génial,
notamment parce que son fiancé l’a aidée à le réaliser.
– C’est vrai, Monsieur Channing ? Vous reprenez déjà le travail alors que la
plupart des membres de votre équipe ont été tués ?
Ça suffit. Je saisis la main de Wes et plonge dans la horde de photographes, les
poussant de part et d’autre en courant aussi vite que possible. Des paparazzis
nous suivent et j’ai du mal à voir où je vais. Je fonce néanmoins vers le parking
où Suzi m’attend, je saute dessus, démarre et fais vrombir le moteur. Wes me
met mon casque et s’accroche à ma taille.
– Ne rentre pas à la maison. Roule, Bébé. Roule aussi longtemps que possible.
Ce type est l’homme de ma vie.
*
* *
La nuit suivante, Weston me réveille avec un cri strident. Lorsque j’allume la
lumière, je le trouve haletant, les yeux noirs, les narines dilatées, grognant
comme un animal. Il me dévisage comme si j’étais son prochain repas et qu’il
n’avait pas mangé depuis des jours, voire des semaines.
– Wes…
J’enlève ma nuisette et la laisse tomber à mes pieds. Je ne mets plus de culotte
depuis qu’il fait ses cauchemars, puisqu’il les déchire avec une telle violence que
ma peau en est irritée. Dans ces moments, l’homme que j’aime n’est pas lui-
même.
Il n’avait pas fait de mauvais rêves depuis deux jours et je me doutais que cela
reviendrait, mais j’espérais avoir un peu plus de répit.

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– Besoin de toi, grogne-t-il.
– Pourquoi ?
Je titille mes tétons, pour lui plus que pour moi, même si, bien sûr, ce n’est pas
désagréable. Mes cheveux sont lâches et tombent en cascade dans mon dos et sur
mes épaules, comme il les aime. Sa mâchoire est serrée et je crois entendre un
fredonnement dans sa gorge, comme un signal d’alarme.
– À moi, râle-t-il.
– Non, mauvaise réponse. Dis-moi pourquoi tu m’aimes.
– Je t’aime, dit-il rapidement.
Wes me dit qu’il m’aime des dizaines de façons différentes, doucement,
tendrement, d’une voix désespérée ou passionnée, mais jamais froidement. Je ne
peux pas accepter ça. Ce monstre enragé n’est pas l’homme que j’aime, c’est sa
réplique. L’homme de ma vie est encore enfermé dans une cabane en Asie.
– Non. Pourquoi tu m’aimes ? je répète en faisant le tour du lit pour m’approcher
de lui sous son regard noir.
– Parce que tu fais tout disparaître ?
Cette fois, son ton désespéré m’anéantit, c’est déjà un progrès. La sueur coule
sur son front, sur son cou et sur son torse jusque sur ses abdos finement sculptés.
– Qu’est-ce que je fais disparaître ? Après tout, tu ne souffres pas en ce moment,
n’est-ce pas ? Pas ici, dans notre lit.
Il secoue la tête en fronçant les sourcils.
– Wes ? J’ai l’air blessée ?
Il faut qu’il voie la vérité, qu’il se reconnecte avec la réalité. Il promène son
regard sur ma peau nue. Ses yeux sont pleins de désir mais aussi de
reconnaissance, comme s’il revenait lentement à moi. J’ai fait mon boulot, je l’ai
ramené à la maison.
– Non. Tu as l’air parfaitement baisable, grogne-t-il.
Sa vulgarité me fait frissonner et mon sang s’embrase, mais je dois rester forte et
atteindre mon but avant de lui sauter dessus.
– Et pourquoi tu veux me baiser ?
– Parce que tu représentes tout ce qui est bon et beau dans ce monde. Près de toi,
j’arrive à respirer, dit-il d’une voix rauque.

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Ma poitrine se resserre et mes larmes menacent de couler, mais je reste ferme.
Pour lui. Pour moi. Pour nous.
– Et pourquoi peux-tu respirer près de moi ? Est-ce que c’est parce que tu es en
sécurité à la maison ? Dans notre lit ?
Mes paroles semblent résonner en lui, car il cligne plusieurs fois des yeux et ses
iris redeviennent verts.
– Mia, ma chérie, viens ici, susurre-t-il avec ce ton que j’adore.
Je me déhanche avant de m’agenouiller sur le lit et de ramper jusqu’à lui,
remontant le long de ses jambes pour le chevaucher.
– C’est pour moi, ça ? je demande en prenant sa queue dure dans la main.
– Tu sais bien que oui, dit-il en souriant.
Un sourire ? Déjà ? Tu as fait du bon boulot, Mia. Bravo.
– Et que veux-tu que j’en fasse ? je demande en prenant une voix niaise.
Je me lèche les lèvres, hésitant à prendre son sexe dans ma bouche ou entre mes
cuisses.
Je m’attendais à une réponse sur le même ton, mais il reste silencieux et passe
ses mains dans mes cheveux. Ensuite, il pose une main sur ma joue et caresse ma
tempe en plongeant son regard dans le mien.
– Tu vas m’aimer. De la manière que tu veux et aussi longtemps que tu le veux,
jusqu’à ce que tout disparaisse. Car c’est ce que tu fais, Mia. Tu es tout pour
moi. Tu enlèves tous mes souvenirs horribles et tu les remplaces par des
moments joyeux.
– Fais-moi l’amour, je chuchote.
– Bon sang, j’ai cru que tu ne me le demanderais jamais.
Je ris alors qu’il plaque sa bouche sur la mienne, et mes rires se transforment en
gémissements, puis en cris de plaisir qui durent jusque tard dans la nuit.
*
* *
Bzzz. Bzzz. Bzzz.
Je dégage ce que je prends pour un moustique et je me blottis contre Wes.
Bzzz. Bzzz. Bzzz.

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Bon sang. J’ouvre lentement les yeux et regarde l’heure. Il est cinq heures du
matin ! Wes et moi n’avons dormi que deux heures depuis la fin de notre
marathon de sexe. Le téléphone finira par cesser de sonner, non ?
Non.
Bzzz. Bzzz. Bzzz.
Les gens normaux mettent leur téléphone en silencieux, la nuit, ou bien ils le
mettent à charger dans une autre pièce. Quelle idiote, il n’y a que moi pour
dormir avec cet engin à côté de la tête. On dirait un essaim d’abeilles, bon sang.
Je m’étire autant que possible et je tends le bras pour ne pas avoir à me lever. Je
saisis mon portable et je le prends avec moi sous la couette.
Wes me serre fort contre lui, comme toujours après ses cauchemars. C’est
comme si mon corps était un bouclier pour lui, et plus j’essaie de m’éloigner,
plus il resserre son étreinte. Cependant, comme je ne veux pas dormir sans lui, je
me suis habituée à sentir sa chaleur contre moi.
– Allô ? je marmonne dans le micro.
– Mia, sucre d’orge, il est là ! s’exclame la voix hystérique de Max. Il est
tellement grand ! Mon fils est une brute ! Regarde ton téléphone, ma chérie, je
t’ai envoyé des photos.
Je ris en me frottant les yeux et j’ouvre les douze photos de Max. Wes bouge à
côté de moi et il enlève la couette de ma tête avant de coller son visage au mien
et de regarder mon téléphone. Sa barbe naissante gratte ma joue et je fredonne en
regardant chaque photo.
– C’est Max ? demande Wes.
Ma gorge se noue, assaillie d’émotions quand je regarde le bébé Jackson.
Cependant, ce n’est pas l’adorable petit géant potelé qui m’émeut. C’est
l’étiquette qui est collée sur son berceau de la maternité. Maxwell et Cyndi nous
font un merveilleux cadeau, à ma sœur et moi, un cadeau qui nous unira à ce
petit être toute sa vie.
Prénom : Jackson
Deuxième Prénom : Saunders
Nom de famille : Cunningham
Poids : 4,850 kg

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Taille : 57,15 cm
– Max… je chuchote.
Wes retrace les lettres de l’étiquette sur l’écran et m’embrasse sur la joue.
– Ton frère est un bon gars, murmure-t-il alors que je regarde toujours l’écran.
– Le meilleur, je réponds avant de ramener le téléphone sur mon oreille.
– Tu l’as vu ? Tu as vu ta surprise ? demande Max avec tant de fierté et d’amour
que je pleure de plus belle.
Je me lèche les lèvres et essuie mon nez sur le drap, heureusement Miss Croft les
change régulièrement, même si c’est surtout parce qu’elle sait qu’on passe notre
temps à faire l’amour.
– Max, je ne sais pas quoi dire.
– Oh, sœurette, tu n’as rien à dire, à part qu’il est parfait.
Je regarde la petite tête de Jackson et la touffe blonde qui forme un halo au-
dessus de lui.
– Il l’est, Max. Il est parfait. Quant à son nom… merci.
Max soupire dans le téléphone.
– Mia, tu ne peux pas savoir combien je suis heureux que Maddy et toi soyez
dans ma vie. J’étais si perdu après la mort de mon père… j’ai découvert que
j’avais deux sœurs et… donner votre nom à notre fils était un des moyens que
nous avons trouvé pour vous montrer que vous êtes dans nos vies pour de bon.
Vous êtes mes sœurs et Saunders fait partie de vous. Je veux que rien ne nous
sépare. C’est ma façon de vous le montrer.
– Je t’aime, Max. Tu es le meilleur grand frère du monde, et Jackson Saunders
Cunningham est un nom génial. Il est fort et beau comme son père, et j’ai hâte de
le voir.
– Oui et bien à ce propos, Cyndi et moi avons pensé que vous pourriez peut-être
venir au ranch pour Thanksgiving ? Si… tu ne travailles pas ?
Thanksgiving. Les fêtes de fin d’année. Je n’y avais pas pensé, mais c’est vrai
que ça approche. Quelles seront les exigences de l’émission ? S’ils me gardent
en novembre, et c’est un grand si, je pourrais peut-être boucler mon segment en
deux jours afin d’avoir le temps d’aller au Texas pour un vrai Thanksgiving en

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famille. Cela dit, Wes voudra peut-être qu’on le passe avec sa famille ? Mince,
je ne sais pas, ce sont des décisions qu’on prend à deux, non ?
– Euh, ça a l’air chouette, mais je ne te fais aucune promesse, d’accord ? Il faut
que j’en discute avec Wes et que je voie ce qui va se passer avec l’émission. Je
peux prendre le temps d’y réfléchir ?
Max éclate d’un rire tonitruant qui résonne dans le téléphone.
– Bien sûr, sucre d’orge. Il faut que tu en parles à ton mec et à Maddy, je
suppose qu’elle devra voir ça avec la famille de Matt aussi, mais ce sont des
gens bien, peut-être que je vais les inviter aussi.
– Eh, doucement, frérot, tu viens d’avoir un bébé. Cyndi n’a peut-être pas envie
d’une maison pleine de gens un mois à peine après avoir accouché.
Cela me semble important, mais je n’ai pas la moindre idée de ce qu’implique un
nouveau-né. Pourtant, dans les séries ou les films, les premiers mois ont l’air
épuisants.
– C’est elle qui l’a proposé ! répond-il.
– Alors, dis-toi que c’est la grossesse qui parlait. Profite de Jack et continue de
m’envoyer des photos, surtout. Je veux que ma boîte mail déborde de clichés du
plus beau bébé au monde.
– Tu peux y compter ! répond Max d’un ton joyeux.
Si seulement je pouvais voir combien il est heureux et le prendre dans mes bras
pour le féliciter en direct. Je déteste être aussi loin de lui !
– Passe le bonjour à Cyndi et félicite-la de ma part ! Ce garçon est énorme !
Presque cinq kilos, la vache !
– Eh, c’est de famille. Papa a dit que je pesais cinq kilos, moi aussi. Toi et ton
mec feriez mieux de faire gaffe, dit-il en riant.
– Tu es affreux, je retire tout ce que j’ai dit de bien sur toi.
– Mais non, tu ne le penses pas. Je suis content que la surprise te plaise. Je
t’aime, sœurette.
Revoilà les larmes, zut !
– Je t’aime aussi, Maximus ! Prends soin de toi.
– Ça marche. Rendors-toi. Qu’est-ce que tu fais au téléphone à cette heure-ci, de
toute façon ?

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Je n’ai pas le temps de répondre, car il raccroche. Mince, d’abord c’est Gin, et
maintenant c’est Max qui remporte la bataille téléphonique ? Je ne suis pas en
forme, on dirait.
Je soupire alors que deux bras musclés me retournent, et je me blottis contre
Wes qui caresse mes cheveux en fredonnant.
– Ta famille va bien ?
– Ouaip. Cyndi va bien, le bébé a un nom génial, et je suis tatie pour la deuxième
fois.
– Alors, tu ressens quoi ? marmonne Wes.
Sa voix me paraît très lointaine, tout à coup. La fatigue a fini par prendre le
dessus, on dirait. J’ai beau vouloir crier ma joie au monde entier, je glisse
rapidement dans un sommeil profond.
– C’est… c’est parfait.

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Chapitre 9

Une assistante m’ouvre la porte du bureau de Leona Markham, producteur


exécutif de l’émission. Elle paraît jeune, mais je sais que pour avoir un poste
aussi important que le sien, elle doit avoir au moins quarante ans, or je lui en
donnerais à peine trente. Ses cheveux sont épais, bruns, bouclés, et ils tombent
sur ses épaules, mettant en lumière ses yeux noisette. Sa jupe blanche est si
moulante qu’elle la colle comme une seconde peau. Depuis la pointe de ses
Louboutin à celle de ses cheveux brillants, il est évident que cette femme prend
le temps de s’occuper de son corps, et il le lui rend bien. La vache, elle est
superbe. Avec un peu de chance, je serai comme elle à son âge.
Je m’assieds tandis qu’elle observe ma tenue. Je porte une jupe droite, un
débardeur en soie et des sandales à talons compensés. Comme on n’enregistre
pas aujourd’hui, j’ai laissé les escarpins à la maison. D’ailleurs, Wes et moi
venons tout juste de finir le montage du dernier segment de Vivre en Beauté, qui
traite d’une caserne à l’est de Los Angeles qui recueille des chiots abandonnés
pour les dresser à aider les handicapés mentaux, physiques et les blessés de
guerre. Les pompiers s’en occupent à tour de rôle et leur enseignent à ramasser
des objets, ouvrir les portes, chercher de l’aide, prévenir en cas de danger ou
d’obstacle, mais surtout, à donner de l’amour. En deux jours, ils m’ont montré
comment leurs chiens changent la vie des gens chez qui ils sont placés. C’est
donnant-donnant pour tout le monde.
– *Mademoiselle Saunders, commence-t-elle.
– Appelez-moi Mia, je vous en prie, je dis en souriant.
– Merci, Mia. Dans ce cas, appelez-moi Leona.
Je hoche la tête et attends de savoir ce que je fais là. Avant qu’elle ait dit quoi
que ce soit d’autre, la porte s’ouvre avec fracas et le Docteur Hoffman entre,

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accompagné de Shandi, son assistante. Les entrées bruyantes semblent être sa
spécialité.
– Je suis désolé d’être en retard, Shandi et moi passions en revue les notes de
Mia et de Monsieur Channing à propos des pompiers et de leurs chiots.
Je lève les yeux au ciel en entendant l’arrogance avec laquelle il prononce le
nom de Wes. Bien évidemment, Leona observait ma réaction, pas celle du
Docteur. Elle sourit en coin et je ris timidement.
– Mia, chérie, le segment…
Il porte sa main à sa bouche et baise la pointe de ses doigts, comme le ferait une
mama italienne.
– … est superbe. Brillantissime. Je savais, je savais que tu avais ta place dans
l’émission. J’avais tort, Leona ?
Elle se rassied derrière son énorme bureau, appuie ses coudes dessus et joint ses
mains sous son menton.
– Non, tu avais raison. D’ailleurs, c’est pour ça que nous vous avons convoquée
aujourd’hui, Mia.
Avant de poursuivre, elle appuie sur deux boutons de son téléphone.
– Miss Milan, vous êtes là ?
La voix de ma tante émerge du haut-parleur.
– Je suis là. Merci de m’avoir appelée. Alors, que me vaut ce plaisir ?
Cette fois-ci, je baisse la tête et respire profondément pour ne pas ricaner. Je ne
suis pas habituée à entendre ma tante parler de façon aussi professionnelle.
– Je voulais vous parler, à toutes les deux, ainsi qu’au Docteur Hoffman, car
nous avons une proposition à vous faire.
Wes m’avait prévenue que cela pourrait arriver. Je retiens mon souffle, essayant
de ne pas me faire de faux espoirs. Bon sang, j’espère que ce n’est pas un faux
espoir ! Je me tiens plus droite et j’attends.
– Au cas où vous ne le sauriez pas, l’émission n’a jamais eu autant de succès.
Après le premier segment de Mia, notre audience avait augmenté de vingt-cinq
pour cent. Nous nous sommes dit que c’était dû au contenu, bien sûr, mais peut-
être aussi parce que vous et Monsieur Channing étiez dans les médias. La
curiosité de la presse à propos de sa captivité et le suspense autour de la sortie de

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son film auraient pu expliquer le succès de la première émission de Vivre en
Beauté. Toutefois, la seconde émission a rajouté dix pour cent à l’audience
quotidienne, ça fait cinq millions de spectateurs supplémentaires.
– Humm, alors qu’est-ce que ça veut dire, concrètement ?
Je ne veux pas avoir l’air bête, mais ce pourrait être beaucoup, ou bien ça
pourrait vouloir dire qu’ils n’ont pas autant de spectateurs qu’ils l’espéraient.
Leona recule dans son fauteuil et ouvre grand les yeux en secouant la tête.
– Ça veut dire que quand vous êtes à la télé, Mia, quinze millions de spectateurs
vous regardent, alors qu’il n’y en a que neuf ou dix millions quand ce n’est que
le Docteur Hoffman.
– Waouh !
Le Docteur me regarde en souriant jusqu’aux oreilles et s’assied dans le fauteuil
à côté de moi. Il claque des doigts et désigne une commode couverte de
bouteilles d’alcool. Shandi s’éloigne immédiatement pour lui préparer un verre.
Sans le vouloir, je grogne en secouant la tête.
– Quoi ? demande-t-il sans comprendre.
– Vous vous adressez à votre assistante en claquant des doigts ? C’est honteux !
je réponds avant de croiser le regard de Leona. Pardon, j’aurais dû me taire.
– Non, vous avez raison, répond-elle en riant. C’est honteux, en effet. Hélas, ça
fait partie de son charme, heureusement pour lui.
Drew rouspète sans perdre son sourire tandis que Shandi lui tend un rhum-Coca.
– Merci, ma chère, lui dit-il.
La pauvre fille a l’air ravie.
Pressée de retrouver mon homme dans la salle de montage, où il m’apprend le
nécessaire pour savoir créer une belle histoire, je frappe mes mains sur mes
cuisses pour attirer leur attention.
– Il y avait autre chose ?
– Vous êtes pressée ? demande Leona en souriant.
Je pourrais mentir, mais Wes m’apprend également qu’on gagne toujours à être
honnête.
– Oui, un peu. Wes attend dans le studio. On doit finir le segment pour vendredi.

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– Je suis certaine qu’il aura autant de succès que les autres. Vous êtes toujours
là, Miss Milan ?
– Absolument, répond ma tante. Vous avez de la chance que j’aie de la paperasse
à faire pendant que vous discutez gentiment entre vous. Peut-on en venir au but,
s’il vous plaît ? J’ai beaucoup de travail.
Elle parle de manière directe et j’aime beaucoup ça, chez ma tante. Quand elle
est en mode affaires, elle ne mâche pas ses mots et ne perd pas une seconde.
– Eh bien, dit Leona en souriant, venons-en au fait. Votre audience et celle de
l’émission augmentent de façon exponentielle, et évidemment, nous voulons que
ça continue. Donc, Century Productions et le Docteur Hoffman sont décidés à
vous offrir une plus grande place dans l’émission. Vous continuerez vos
segments hebdomadaires, mais à partir de novembre, nous aimerions que vous
soyez plus présente.
– Comment ça ? demande Millie.
– Eh bien, nous pensions d’abord que Mia pourrait apparaître aux côtés du
Docteur, car elle attire un public plus jeune. Je ne dis pas que tu es vieux, Drew,
mais tu as vingt ans de plus qu’elle. Cela redonnerait un coup de jeune à
l’émission que Mia donne son avis sur certains sujets, ou si elle interviewait de
jeunes artistes et des célébrités.
– Doc, ça ne vous pose pas de problème ? Si ce que Leona dit est vrai, vous me
laisseriez une place dans l’émission alors que vous n’en avez jamais cédé
auparavant. Vous êtes sûr que c’est ce que vous voulez ?
J’ai beau vouloir bondir de joie comme une gamine hystérique, je ne dois pas
oublier que je travaillerai avec quelqu’un qui est seul à la télé depuis longtemps.
Peut-être que ça ne lui plaît pas, et si c’est le cas, ça ne marchera pas, il passera
son temps à me mettre des bâtons dans les roues.
Drew se penche et prend ma main dans les siennes. Est-ce déplacé ? Oui,
complètement. Est-ce typique de son personnage ? Absolument.
– Mia, chérie, c’était mon idée.
Je regarde Leona qui hoche la tête.
– Pourquoi ? je demande, confuse.
Il tapote ma main et recule dans sa chaise.

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– Eh bien, je ne rajeunis pas. Je ne suis pas un vieillard, mais il y a encore des
choses que je voudrais accomplir. J’aimerais par exemple passer plus de temps
avec ma femme. Après tout, vous l’avez vue, vous ne pouvez pas m’en vouloir,
dit-il en jouant des sourcils. Et puis, ça fait trop longtemps que j’ai quitté le
milieu médical. Je reçois toujours ma clientèle de célébrités, mais je sens que je
suis rouillé. Si d’ici six mois, vous pouvez endosser plus de responsabilités dans
l’émission, je pourrais être consulté sur des cas spéciaux, étendre ma clientèle, et
cætera. Tout le monde serait gagnant, et vu la star que vous êtes en train de
devenir… il n’y a pas de limite à votre succès, ma belle.
Bon sang, je déteste que ce type m’appelle ainsi. Je sais que c’est censé être un
compliment, mais chez lui, ça sonne toujours libidineux.
– Si, et c’est un grand « si », Mia est intéressée, il va nous falloir des chiffres. Je
veux que ses horaires, ses déplacements et son salaire me soient détaillés. Il ne
reste plus qu’une semaine en octobre, dit Millie que l’on entend toujours tapoter
sur son clavier. Mia avait commencé à prendre des engagements pour novembre
et décembre, donc si vous voulez qu’elle ait le temps d’y réfléchir, il va me
falloir votre proposition d’ici demain.
Je fronce les sourcils et dévisage le téléphone, comme s’il pouvait clarifier les
conneries que Millie vient de dire. Je sais que je n’ai aucun engagement avec
elle, parce que je lui ai dit qu’après ce mois-ci, je ne serais plus escort. Je
trouverai bien un moyen de rembourser Max. On vient de me proposer une place
dans une émission quotidienne, c’est le job de mes rêves ! Je ferme les poings
sous la table, espérant que Millie sait ce qu’elle fait et qu’elle ne va pas tout
foutre en l’air. Je dois lui faire confiance. Elle m’a aidée à arriver où je suis, je
n’ai aucune raison de penser qu’elle n’a pas mes intérêts en tête.
Leona penche la tête sur le côté, comme si elle réfléchissait.
– Très bien. Je vais demander à mon équipe de s’y mettre tout de suite. Vous
aurez la proposition d’ici demain en fin de journée.
– Excellent. Alors s’il n’y a rien d’autre, je vais vous dire au revoir. Mia, ma
poupée, je t’appelle ce soir.
– Merci Ta… euh… Miss Milan.
Ils n’ont pas besoin de connaître notre petit secret.

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– Je peux retourner au travail ? je demande dès que ma tante a raccroché.
Leona se lève en souriant et me tend la main.
– J’espère que je pourrai bientôt vous féliciter de faire officiellement partie de la
famille Century Productions.
Je souris jusqu’aux oreilles en lui serrant la main. Arrivée à la porte, je me
tourne vers les trois paires d’yeux qui m’observent.
– Vous savez, cette année a été la plus étrange et la plus surprenante de ma vie.
Mais ce n’est qu’ici, aujourd’hui, que j’ai l’impression d’être au bon endroit
d’un point de vue professionnel. Je crois que je suis à ma place. Merci de
m’avoir aidée à trouver ma voie.
Leona range une boucle derrière son oreille et hausse un sourcil.
– Alors maintenant, la question est de savoir si tu penses que ta place est avec
nous, dans cette émission ?
Je vois sa mâchoire se contracter et je devine que ma réponse est importante.
– Pour l’instant, oui, je le crois. J’ai hâte de me mettre au travail !
Je hausse les épaules, ouvre et referme la porte derrière moi, puis je sautille vers
l’ascenseur qui me ramène vers Wes et le segment sur lequel nous travaillons
ensemble. Il va être fou de joie quand je vais lui annoncer la bonne nouvelle. Je
reste à Malibu, j’ai une offre d’emploi et, un jour, j’épouserai l’homme de mes
rêves. En dix mois, je suis passée de rien à tout. C’est incroyable.
*
* *
Wes est on ne peut plus heureux pour moi. Nous fêtons cela en buvant trop de
champagne, en faisant l’amour sur la plage où nous commençons chaque journée
par une session de surf, et en titubant dans notre grand lit, couverts de sable et de
sel.
Durant la nuit, Wes fait un cauchemar, seulement cette fois-ci, sa réaction est
différente.
Je le sens se réveiller brusquement, mais il ne crie pas. Néanmoins, je connais la
routine par cœur, alors je me prépare à me lever pour le faire doucement revenir
à la réalité et l’aimer de toute mon âme, jusqu’à ce que sa tête ne soit remplie
que par nous et notre amour.

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Cependant, ce soir, il m’empêche de sortir du lit en me tenant par la taille de
toutes ses forces. Je sens son érection contre mes fesses et, sans réfléchir, je me
frotte contre lui. Il siffle et je sens son souffle sur mon oreille.
– Chérie, je vais bien, dit-il d’une voix ferme.
– Tu m’aimes ? je demande, comme d’habitude.
Cela a toujours marché, mais quelque chose a changé, c’est comme si le script de
notre routine avait été réécrit. Wes baisse le bras et empoigne mon sexe. Je
mouille immédiatement lorsqu’il plonge deux doigts en mois et je gémis.
– Bébé… tu m’aimes ?
Il mord mon épaule, et ma bretelle tombe sur mon bras.
– Oui. J’aime chaque foutu millimètre de ton corps. J’aime te baiser. Je t’aime,
putain, grogne-t-il en enfonçant un troisième doigt en moi.
Je me cambre et tends le bras pour saisir sa nuque.
– Où es-tu, Bébé ? je demande, déjà perdue dans un brouillard de désir.
– En toi, répond-il en léchant ma gorge.
Son autre main saisit ma gorge et, tout à coup, il enfonce mon visage dans le
matelas et retire ses doigts. Je pousse un grognement frustré, car s’il répond à
mes questions, son ton et sa façon de faire ne sont pas habituels. Il empoigne
mes hanches et me soulève pour me mettre à genoux, les fesses en l’air. Il
enfouit brusquement sa grosse verge en moi et un cri de douleur m’échappe, car
même s’il n’a pas complètement ignoré les préliminaires, je suis loin d’être
prête.
– Je vais te baiser toute la nuit, chérie. J’en ai besoin. J’ai besoin de ta chatte. Il
fait si sec, l’air est si sec, je n’arrive pas à respirer, dit-il en accélérant ses va-et-
vient brutaux. Tu es mon oasis dans ce trou à rats, murmure-t-il en mordant mon
dos si fort que je crie de nouveau.
Mon sexe est écartelé, mais son gland touche ce point qui m’excite. Chacun de
ses allers-retours l’aide à combattre ses démons et me rapproche un peu plus de
l’orgasme.
– Sors-moi d’ici, chérie. Emmène-moi avec toi, supplie-t-il.
C’est trop, la pression, les picotements, la précision avec laquelle il frappe ce
point… Je ne peux pas empêcher la réaction de mon corps. Je jouis à contrecœur

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et ma chatte se contracte autour de lui. Cependant, il ne s’arrête pas et il n’atteint
pas l’orgasme. Il continue de me baiser et me fait jouir encore et encore,
obnubilé par son besoin de me procurer du plaisir, sans jamais trouver le sien.
Après mon quatrième orgasme, je m’écroule sur le matelas, mais il serre mes
hanches plus fort.
– Non ! J’ai besoin de toi ! J’ai besoin que tu fasses tous disparaître, sanglote-t-
il.
Je puise en moi pour trouver une énergie que je ne pensais pas avoir, et je recule
les fesses contre lui, m’empalant sur sa queue. Il essaie de rabattre mon buste sur
le matelas, mais je l’en empêche. Il tombe sur les fesses et j’en profite pour me
tourner vers lui et le chevaucher. Mes genoux sont sur ses cuisses et mes mains
sur ses biceps, le clouant au lit. Heureusement, il est fatigué et me laisse faire.
Les larmes coulent sur ses joues et il secoue la tête de gauche à droite. Sa peau
est couverte de sueur.
– Regarde-moi ! je gronde en collant mon visage contre le sien.
Il écarquille les yeux et, comme je le suspectais, ses pupilles sont noires et
dilatées. Il est coincé dans son souvenir.
– Wes ! je crie. Reviens-moi, j’ordonne en l’embrassant sur la bouche pour lui
donner mon amour et la stabilité dont il a besoin.
Peu à peu, il participe davantage et, enfin, ses doigts plongent dans mes cheveux
pour tenir ma tête. Nos bouches ne sont qu’à quelques millimètres l’une de
l’autre.
– Mia… tu es mon paradis, chuchote-t-il.
– Wes…
Je l’embrasse, déversant tout mon amour dans mon baiser.
– Ne m’oublie pas, Wes. Bébé, ne nous oublie pas, je gémis alors qu’il ouvre
grand les yeux.
Je ne vois plus que des cercles verts, vibrants comme de l’herbe fraîchement
coupée.
– Rien ne me ferait t’oublier, Mia… nous oublier. Tu es toute ma vie. La seule
raison que j’ai de me battre, c’est toi… mon paradis à moi.
– Bébé, je t’aime, je sanglote.

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– Mon Dieu, Mia, te dire que je t’aime ne suffit pas.
Il décide alors de me dire avec ses lèvres ce qu’il ne sait pas communiquer avec
ses mots.
Merci. Il embrasse mon front.
Merci. Il embrasse mes pommettes.
Merci. Il embrasse mon cou.
Merci. Il embrasse ma bouche.
Il répète ces gestes jusqu’à ce que tout disparaisse autour de nous. Nous sommes
comme sur une île, en sécurité, blottis dans un nid fait de notre amour. Rien ne
peut briser notre paradis. Rien.

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Chapitre 10

L’immeuble immense est affreusement prétentieux. Des hommes et des


femmes d’affaires, vêtus de tenues qui coûtent sans doute plus cher que ma
moto, se précipitent dans les ascenseurs. Wes tient ma main si fort que je dois
l’obliger à me lâcher pour ne pas bloquer la circulation dans mes doigts. Nos
paumes sont moites et collantes. Nous traversons le hall jusqu’aux ascenseurs où
j’étudie l’annuaire avant d’appuyer sur le bouton pour le septième étage.
– Qu’est-ce qu’on fait là ? soupire Wes en s’adossant à la paroi.
– Tu sais bien, chéri. Le moment est venu, je dis en me blottissant contre lui.
– Mais je vais très bien, grogne-t-il.
Je penche la tête sur le côté et me déhanche en le regardant dans les yeux.
– Ah bon ? Tu veux vraiment qu’on en reparle ? Hier soir, c’est moi qui avais
une main sur la gorge et qui étais plaquée sur le matelas pendant que l’homme
que j’aime faisait ce qu’il voulait de ma chatte.
Les narines de Wes se dilatent et il grince des dents.
– Tu sais que je ne te ferai jamais de mal.
Je me rapproche de lui et prends son visage dans mes mains, l’obligeant à me
regarder.
– Pas volontairement, non. Mais ce n’est pas toujours à côté de toi que je me
réveille. Parfois, c’est l’homme qui se bat pour survivre, qui a regardé une
femme à qui il tient se faire violer tous les jours. L’homme qui, depuis un mois,
utilise le sexe comme un pansement pour recouvrir le trou sans fond qu’est
devenu son cœur. Bébé…
Wes me serre dans ses bras.
– Je fais ça pour toi. Parce que je ne supporte pas l’idée de te faire du mal. Je ne
veux plus jamais revivre ce qui s’est passé hier soir. C’est ignoble. Je ne sais

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même pas comment tu fais pour me regarder, et encore moins pour être à mes
côtés. Je suis tellement égoïste, bon sang. Je ferai tout ce que je peux pour que tu
restes. Ne me quitte pas Mia, s’il te plaît.
J’expire tout l’air de mes poumons et l’embrasse sur le cou.
– Je ne te quitterai jamais.
La sonnette de l’ascenseur retentit et les portes s’ouvrent. Nous sortons main
dans la main, ensemble mais blessés. Hier soir était la fois de trop. Nous ouvrons
la porte en verre dépoli sur laquelle on peut lire « Anita Shofner, Psychologue ».
La réceptionniste lève la tête et son visage s’illumine.
– Euh, nous avons rendez-vous avec le Docteur Shofner.
Elle sourit et me donne une feuille.
– Tenez, remplissez ça. Le Docteur sera avec vous dans… environ quinze
minutes, dit-elle en regardant la pendule qui affiche quinze heures quarante-cinq.
En général les sessions finissent cinq minutes avant l’heure.
Je hoche la tête et guide Wes vers un fauteuil, où je l’aide à remplir le relevé
d’informations, même s’il est parfaitement capable de le faire seul. La tension
qu’il dégage est palpable. Je frotte son bras alors qu’il agite son genou, plus
anxieux que jamais. Je l’ai connu dans des environnements très différents, mais
jamais il n’a eu l’air aussi mal à l’aise.
– Eh, ça va aller. Je serai là avec toi. Si après quinze minutes, tu es toujours mal
à l’aise, on partira, d’accord ?
Il inspire et expire lentement.
– D’accord. Ça va. C’est juste que… J’ai l’impression que parler de ce que j’ai
vécu va faire ressurgir les souvenirs de manière encore plus violente.
– C’est peut-être le cas, mais au final, ça devrait t’aider à tourner la page et à
guérir. Comme ça, tout ça sera dans le passé, et plus dans le présent.
Je ne sais pas vraiment ce que je dis, car je ne sais pas ce qu’une psy spécialisée
en syndromes de stress post-traumatique peut faire pour lui. Toutefois, tous ceux
à qui j’en ai parlé me l’ont conseillée en disant qu’il fallait qu’il se fasse aider. Je
pensais que c’était une bonne idée de lui rappeler toutes les nuits où nous nous
aimons et où je suis là pour lui, mais peut-être que ça fait partie du problème.

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Tout ce que je sais, c’est que ce qui s’est passé hier soir était grave. Je ne veux
pas avoir peur de m’endormir à côté de l’homme que j’aime.
La porte s’ouvre, et je suis surprise de voir Gina DeLuca sortir du cabinet. Elle
ne nous a pas encore remarqués, mais quand Wes la voit, il ferme les poings,
écrasant ma main dans la sienne. Gina parle à voix basse en s’essuyant les yeux
avec un mouchoir. La femme avec elle caresse son épaule avant de la prendre
dans ses bras. Une psy qui console et fait des câlins à ses patients ? C’est ce qu’il
me fallait pour savoir que nous sommes au bon endroit. Elle travaille avec amour
et compassion, et c’est ce dont mon mec a besoin.
Gina se retourne et s’arrête brusquement. Ses yeux brillants s’illuminent et elle
sourit jusqu’aux oreilles.
– Weston, tu es venu.
Elle secoue la tête et ouvre les bras. Il va vers elle comme s’il était en pilote
automatique et la serre contre lui. Je suis saisie d’une vague d’irritation en le
voyant la toucher, et je ferme les poings à mon tour, luttant contre la jalousie
ridicule qui s’empare de moi chaque fois que je croise l’actrice. Je sais que c’est
absurde, mais je n’y peux rien.
Wes recule, et Gina me fait un signe de la main.
– Alors tu as enfin écouté mes conseils et décidé de voir le Docteur Shofner ?
C’est super. Elle fait des miracles pour moi. Appelle-moi plus tard dans la
semaine si tu veux parler de…
Ses épaules s’affaissent et son air joyeux disparaît.
– … de ce sur quoi elle veut que tu travailles. Non pas que tu aies besoin d’aide
mais, euh…
Elle tripote ses mains nerveusement.
– Bref. Bonne chance. J’espère qu’elle t’aidera autant qu’elle m’a aidée.
Elle tourne les talons et part à grandes enjambées vers la porte. Ma jalousie est
vraiment déplacée, cette femme est brisée dans tous les sens du terme et elle a
besoin de Wes parce qu’il est son ami. Ils ne partagent rien d’autre qu’un
traumatisme.
Wes me regarde du coin de l’œil, d’un air triste et plein de remords.
– Tu ne pouvais pas l’ignorer, Wes. Allons voir ce fameux docteur, d’accord ?

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Il ferme les yeux et hoche la tête. Nous nous tournons vers la psy, qui tient la
porte ouverte.
– Vous devez être Weston Channing et Mia Saunders. Entrez, je vous en prie.
Nous entrons dans son bureau et sommes accueillis par un parfum de bougie à la
vanille. Un mur entier est couvert d’ouvrages médicaux, mais aussi de romans et
d’œuvres classiques.
Durant les mois que j’ai passés chez Alec et Warren, j’ai eu beaucoup de temps
pour lire. Ils étaient tous deux d’avides lecteurs, et je me suis découvert une
passion pour les classiques. Je n’avais jamais pris le temps de lire Les grandes
espérances, de Dickens, ou encore Roméo et Juliette, or grâce à eux j’ai pu
m’échapper à une époque où les choses auraient dû être plus simples, mais ne
l’étaient pas. Finalement, quel que soit le siècle, tout tourne autour de l’amour et
de la peur de l’inconnu.
Le bureau du docteur est dans le fond de la pièce. Il est énorme, en merisier,
avec des pieds arrondis et des bords sculptés. Il a l’air si lourd que je ne serais
pas surprise qu’il faille plus de deux hommes pour le soulever. À droite, il y a
une table basse entourée par deux fauteuils et un canapé blanc et doré. Le tout
est douillet et accueillant.
– Asseyez-vous, je vous en prie, dit le Docteur Shofner en désignant le canapé.
Wes m’y guide et, une fois que je suis installée, il s’assied à côté de moi. Quand
je dis « à côté », je veux dire qu’il est pratiquement sur moi. Il serre ma main et
la pose sur ses cuisses avant de la recouvrir avec son autre paume. Le docteur
remarque son geste, mais elle ne dit rien. Wes n’est vraiment pas dans son
assiette.
La psy choisit un des fauteuils bordeaux, croise les jambes et appuie son menton
sur ses phalanges. Ses cheveux blond vénitien sont relevés dans un chignon
élégant et elle porte des lunettes en écaille de tortue. Son pantalon de tailleur
bleu foncé est large, et elle l’a assorti à un chemisier beige avec un col bénitier.
Elle a l’air professionnelle mais amicale. Un pendentif en forme de cœur pend de
son bracelet doré et je m’imagine que c’est un cadeau de quelqu’un qu’elle aime,
un mari ou un enfant peut-être. Je regarde autour de moi et, d’où je suis,
j’aperçois en effet une photo de famille sur le guéridon à côté de son fauteuil.

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Encore un point pour elle, sa réputation, l’aide qu’elle apporte à Gina et le fait
qu’elle ait une famille me laissent penser qu’elle peut guérir Wes de son
traumatisme.
– J’ai cru comprendre que vous étiez ici parce que vous avez du mal à vous
remettre d’une expérience tragique, dit-elle en nous regardant tour à tour.
Je hoche la tête, mais Wes ne bouge pas d’un iota.
– Et ce traumatisme affecte votre couple ? demande-t-elle.
– Oui, je déclare fermement.
Les épaules de Wes se crispent lorsqu’il parle.
– J’ai failli violer Mia hier soir. J’étais coincé dans mon rêve. Je ne veux plus
jamais faire ça ou risquer de lui faire du mal. Je l’aime. On a prévu de se marier.
Vous pouvez me guérir ? s’empresse-t-il de demander avant d’attendre la
réponse du docteur.
– Eh bien, j’espère pouvoir aider…
– Il ne m’a forcée à rien et il ne m’a pas fait de mal, je précise. J’ai surtout été
surprise que ses terreurs nocturnes ne prennent plus la même forme. Je ne sais
plus trop comment le ramener.
Le docteur lève les mains, paumes tournées vers nous.
– Waouh, doucement. Terreurs nocturnes, routines, viol, mariage… Ralentissons
un peu. Monsieur Channing… Weston… je peux vous appeler Weston ?
Wes hoche la tête.
– D’accord, Weston. Je sais qui vous êtes. Je lis la presse et je crois savoir ce que
vous avez subi.
Bien évidemment, Gina lui a déjà raconté ce qui s’est passé.
– Vous avez vécu une expérience que personne ne devrait connaître. Vous avez
survécu à votre captivité, mais elle ne doit pas définir qui vous êtes.
Elle recule dans son fauteuil et soupire lentement.
– Maintenant, ce qu’il nous faut faire, c’est parler de votre expérience. Vous
devez la revivre en me la racontant, même si c’est difficile. Nous pouvons faire
cela seuls ou avec Mia. C’est vous qui décidez.
Wes me regarde, puis il baisse les yeux.

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– Pour aujourd’hui, elle reste. Mais peut-être que la prochaine fois, quand on…
euh… parlera des détails, on pourrait faire ça seuls. C’est possible ?
Il adresse sa question à la psy, mais c’est moi qu’il regarde.
Après tout ce qui s’est passé, il cherche encore mon approbation. Il ne comprend
pas que je veux seulement qu’il aille mieux. Je souris et serre sa main plus fort.
– D’accord, alors puisque Mia est là aujourd’hui, pourquoi ne parlerions-nous
pas de ce qui s’est passé cette nuit.
Je suis sur le point de dire qu’il ne faut pas en faire tout un plat, mais Wes pose
un doigt sur ma bouche.
– Chérie, ce qui s’est passé est inadmissible. J’ai peur de dormir à côté de toi,
cette nuit. C’est pour ça que j’ai accepté de venir ici. Je suis prêt à tout.
Je baisse donc la tête et écoute cet homme fort, l’amour de ma vie, parler à une
inconnue de notre nuit cauchemardesque.
– J’ai souvent des terreurs nocturnes et Mia a trouvé un moyen de me ramener à
la réalité.
– Et quel est ce moyen ? demande Shofner en prenant des notes dans son
calepin.
Wes rougit et ouvre la bouche avant de la refermer. Sa timidité est adorable. Il
lève une main et frotte sa nuque en secouant la tête.
– On fait l’amour, je réponds pour lui éviter toute gêne supplémentaire.
– Et comment est-ce que ça le ramène à la réalité ?
– Je ne sais pas, exactement. Au début, il est très en colère. Il est en nage et ses
pupilles sont complètement dilatées. En général, il sursaute en criant, et je dois le
réveiller en allumant la lumière, parce qu’il se débat dans le lit.
Le docteur note tout et attend patiemment que je poursuive. Je regarde Wes pour
m’assurer qu’il ne veut pas prendre le relais, mais il me fait signe de continuer.
– Parfois, je devine qu’il est encore là-bas.
– Là-bas ?
J’enroule une mèche autour de mon doigt, réfléchissant à ma réponse.
– Dans la cabane, enchaîné au mur, assis dans mes excréments, déclare-t-il.
Je recule dans le canapé, espérant qu’il va prendre la suite.

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– Puis, c’est comme si j’entendais les questions de Mia à travers un épais
brouillard, ou de très loin.
Il fronce les sourcils et regarde ses pieds, concentré sur ses chaussures bateau.
– Quelles questions ?
Il hausse les épaules, mais ne lève pas la tête.
– Si je l’aime, où je suis, ce genre de choses. D’habitude, ça m’aide à revenir. Le
truc, c’est que je suis… euh… vous voyez…
Il désigne son entrejambe, gêné, alors qu’il devrait être fier de son sexe et de
toutes les choses merveilleuses qu’il me fait !
– Dur ? Prêt à copuler ? propose le docteur sans le moindre sous-entendu dans sa
voix.
– Oui ! s’exclame-t-il avant de fermer les yeux. Je veux dire, oui, répète-t-il à
voix basse. Mon Dieu, c’est tellement gênant.
– Pas du tout, Wes, je murmure en frottant son épaule.
– Ça ne l’est vraiment pas, Weston. C’est une réponse naturelle à la peur. Après
ce que vous avez traversé, parce que vous avez eu si peur de mourir, il est
normal que vous cherchiez du réconfort et de l’amour auprès de votre partenaire.
Je n’y vois pas de problème. En revanche, quelque chose a dû changer, sinon
vous ne seriez pas ici.
Wes hoche la tête et ferme si fort la bouche que ses lèvres deviennent blanches.
Il lâche ma main, se lève et fait les cent pas derrière le canapé en regardant par la
fenêtre.
– J’aurais pu lui faire mal. Je l’ai empoignée à la gorge et je l’ai saisie entre les
jambes. C’est ce qu’ils ont fait, eux ! Ils ont fait ça à Gina ! s’exclame-t-il en se
tirant les cheveux. Et j’ai essayé de le faire à Mia ! Mon Dieu, qu’est-ce qui ne
va pas chez moi ?
Le docteur est debout et auprès de lui avant que je n’aie réalisé ce qu’il venait de
dire. Elle lui chuchote quelque chose et le ramène sur le canapé.
– Weston, parfois, quand on est coincé dans une terreur nocturne, l’esprit recrée
des événements extraordinaires pour les réécrire. Ce qui s’est passé cette nuit est
peut-être le moyen qu’a trouvé votre cerveau pour supporter ce que vous avez vu
là-bas. Mia, pensez-vous que Weston essayait de vous faire du mal ?

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Je secoue vigoureusement la tête.
– Non, pas du tout. Dès que j’ai crié son prénom, il a semblé se réveiller, mais je
crains qu’on ait régressé hier soir. On espère de tout cœur que vous pourrez
l’aider à aller mieux.
Je me rapproche de Weston, qui a l’air misérable, recroquevillé dans son coin du
canapé. Dès que j’arrive à ses côtés, il passe son bras autour de mes épaules et
enfouit son visage dans mon cou.
– Mon Dieu, j’ai tellement de chance de t’avoir. Mia, Bébé…
Je caresse sa joue et regarde le Docteur Shofner dans les yeux.
– Je sais. On va s’en sortir. Ensemble.
*
* *
Durant la dernière semaine d’octobre, Wes consulte le Docteur Shofner trois fois
par semaine – c’est lui qui l’a voulu. Elle lui a dit qu’il aurait besoin d’un suivi
sérieux pour entamer sa guérison. L’autre nouveauté, ce sont les petits cachets
blancs qu’il prend tous les soirs avant de se coucher et qui l’aident à dormir.
Apparemment, Wes a demandé à sa psy de lui prescrire quelque chose qui
l’assommerait.
Nos baises nocturnes me manquent, mais pas leur cause. Par ailleurs, nous
pouvons désormais dormir six ou sept heures d’affilée et après une semaine de
sommeil paisible sans que j’aie à m’inquiéter d’être agressée, Wes et moi
sommes transformés pour le mieux. Le monde semble à notre portée, et nous
allons en profiter. Enfin.
Nous nous levons tôt le matin, faisons l’amour, puis nous allons surfer. Ensuite,
je vais au travail ou bien dans la chambre d’amis qui est devenue mon bureau, et
Wes file à la salle de sport, reste à la plage ou bouquine dans le salon. Il ne parle
toujours pas de son film presque fini ni de la possibilité qu’il écrive de nouveaux
scénarios. Selon lui, nous pouvons vivre toute notre vie sans nous soucier
d’avoir assez d’argent, et nous vivrons quand même très confortablement.
Toutefois, moi, ça ne me suffit pas, ce n’est pas l’argent qui m’inquiète, mais
Wes et sa passion. Lui et sa psy devront en parler tôt ou tard, mais pour l’instant,
il n’y a que sa guérison qui compte.

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Un des seuls effets indésirables d’avoir Wes à la maison est que je trouve
souvent Gina sur le canapé ou sur la terrasse avec lui. Ces jours-là, Judi fronce
les sourcils dès que j’ai passé la porte, comme si j’autorisais mon homme à
foutre en l’air notre couple. Ce qu’elle ne comprend pas, c’est que rien ne peut
nous séparer. Est-ce que j’aime voir Gina DeLuca, la femme avec qui il a couché
pendant plusieurs mois ? Non. Mais le docteur m’a expliqué qu’ils doivent se
voir pour s’aider à guérir. Donc, je serre les dents et je ne dis rien. Je
supporterais n’importe quoi, du moment que ça aide Wes à aller mieux.
C’est la fin du mois et une nouvelle aventure m’attend. Je vais apparaître auprès
du Docteur Hoffman deux fois par semaine, en plus du segment que je présente
le vendredi. Néanmoins, le plus excitant, c’est bien évidemment que Ginelle
arrive aujourd’hui, et j’ai hâte ! Je suis la plus chanceuse au monde de pouvoir
habiter à quelques mètres de ma meilleure amie.
J’entends la voiture s’arrêter devant la maison et je me lève d’un bond, quittant
la terrasse en courant. J’entends Wes expliquer à Gina ma réaction bizarre.
– Sa meilleure amie de Las Vegas va emménager dans notre maison d’amis, dit-
il quand je glisse sur le parquet en voulant m’arrêter alors que je suis en
chaussettes… de Noël.
J’ouvre la porte en grand et découvre ma meilleure amie sur le perron, le poing
levé, prête à frapper.
– Qu’est-ce que tu fous là, espèce de cochonne ? je m’exclame en ouvrant grand
les bras.
– Mon Dieu, tu schlingues ! s’exclame-t-elle en reniflant mes cheveux et en me
serrant aussi fort que possible. Tu n’as jamais entendu parler d’une douche ?
Elle recule, pose ses mains sur mes joues et m’observe en souriant.
– Tu as l’air… en forme, pour une traînée. Bon sang, ton gros cul m’a manqué.
Tu sais à quel point c’est dur d’attirer l’attention d’un mec sur mon petit cul
ferme quand tu n’es pas à côté de moi pour servir de faire-valoir ? dit Gin, les
yeux brillants.
– Pauvre de toi ! Je te défends de chialer !
Je l’attire encore une fois dans mes bras, prête à l’insulter de nouveau, quand
j’entends Wes se racler la gorge. Je me tourne en souriant jusqu’aux oreilles et

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lui présente Gin.
– Wes, Bébé, voici ma meilleure amie, Ginelle. Gin, je te présente Weston
Channing, troisième du nom, j’ajoute en ricanant.
– Je suis ravi de te rencontrer enfin, dit-il en lui tendant la main.
Ginelle ne dit rien. Elle est bouche bée, les yeux grands ouverts.
– Waouh, je viens de mouiller ma culotte. Zut, je n’en ai pas mis. Je viens de
mouiller ma culotte invisible !
Je ferme les yeux, mortifiée. Wes éclate de rire, puis il saisit le bras de Ginelle et
l’accueille avec un câlin. Elle se met tout de suite à se frotter à lui, et avec
n’importe qui d’autre, je serais furieuse, mais comme elle le fait pour m’agacer,
je fais mine de ne rien remarquer.
– Ok, ok, le câlin a assez duré, je gronde en tirant Gin par le bras.
Elle s’accroche à la chemise de Wes comme une sangsue.
– Trouve-t’en un, tu veux ? je siffle.
– T’es vraiment une amie minable. Tu te tapes Malibu Ken et tu n’as pas une
petite poupée pour moi ? marmonne-t-elle en croisant les bras.
C’est alors que Gina fait son apparition, son sac dans la main. Gin voit son corps
magnifique, ses dents parfaites, ses vêtements, et elle la désigne en me regardant.
– C’est qui ça ? Barbie Brune ?
J’éclate de rire, mais je m’arrête en voyant Gina froncer les sourcils. Elle ne
mérite pas ça.
– Ginelle, je te présente Gina DeLuca, l’amie de Wes.
Gin écarquille les yeux et je devine tout de suite que ça va mal se passer.
– Tu veux dire cette salope…
Je plaque ma main sur sa bouche, mais elle continue de déblatérer des injures,
défendant mon honneur en se débattant contre moi. Je pèse quelques kilos de
plus qu’elle, je suis plus grande et j’ai passé des années à la maîtriser.
– Euh, c’était cool de vous voir, mais Gin est fatiguée. La route était longue. Je
vais lui montrer sa chambre.
Je la traîne vers la porte et, dès que nous sommes dehors, elle me pousse en
arrière.

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– À quoi tu joues ? Cette garce est là, à jouer la bonne copine, alors qu’il se la
tapait il y a à peine quelques mois ? J’arrive pas à croire que tu la laisses entrer
chez toi. T’es folle, ou quoi ?
Je soupire et la tire jusque chez elle.
– Non, je ne suis pas folle, et je vais tout t’expliquer, mais il va nous falloir une
bonne dose d’alcool.
J’ouvre le bar que j’ai demandé à Judi de remplir.
– Ta nouvelle maison te plaît ? je demande à Gin, dont le regard s’illumine en
voyant toutes les bouteilles.
Elle balaie la pièce du regard, découvrant le studio qui a une petite cuisine, un
salon, une chambre séparée et une salle de bains. C’est parfait pour une femme
qui cherche à reprendre sa vie en main.
– C’est plus grand que ce que j’avais à Las Vegas, tu es sûre que tu veux que
j’habite ici ? Tu sais que ce qui vient de se passer pourrait se reproduire à tout
moment ?
Elle secoue la tête pour me faire savoir qu’elle n’est pas désolée du tout, mais
Gin s’excuse rarement de qui elle est.
– Je sais, et je t’aime comme tu es. Mais il faut qu’on parle pour que tu saches
comment gérer certaines situations.
Je lui tends une vodka-cranberry et nous nous asseyons sur le canapé. Je lui
raconte tout ce que je sais, et, lorsque j’ai tout dit, nous bâillons toutes les deux.
Je ne m’attendais pas à ce que ce soit aussi cathartique. En même temps, je me
suis confiée à quelqu’un qui m’a connue toute ma vie et qui ne me juge jamais.
Gin est toujours là pour moi, et maintenant, je suis là pour elle. Peut-être
pourrai-je la convaincre de voir Anita Shofner, elle aussi ? Je lui en parlerai plus
tard.
– Alors, ça va aller ici ?
– Mia, j’avais vraiment besoin de changement. Il était temps de laisser tout ça
derrière moi, le boulot merdique, ce sentiment d’inutilité, la distance avec toi,
cette ville dans laquelle j’ai toujours vécu. Le temps de l’aventure était venu. Je
suis prête à découvrir ce qui va m’arriver ici, en Californie.

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– Eh bien, si j’ai appris une chose, cette année, c’est qu’il faut faire confiance à
la vie, je dis en désignant mon pied.
Elle sourit en regardant le tatouage qui est devenu mon slogan personnel.
– Il y a des salons de tatouage dans le coin ? demande-t-elle en jouant des
sourcils.
– Oui, je crois bien !
Je hoche la tête, lui propose mon bras et attends qu’elle le prenne. J’ai oublié ma
fatigue dès qu’elle a mentionné l’idée de se faire tatouer. Je n’en reviens pas
qu’elle soit ici, avec moi, prête à commencer une nouvelle vie. Cette fois, je
serai là pour l’aider.
– Alors, montre-moi le chemin, dit-elle en désignant la porte.
– Eh bien oui, cette fois, c’est moi qui te guide.
Je le pense. J’ai passé dix mois à faire ce qu’on me disait, à aller ici et là, à
prétendre être quelqu’un que je n’étais pas, et j’en ai assez de suivre les autres.
Dorénavant, mon destin est entre mes mains.

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NOVEMBRE

Le mois de Thanksgiving ne va pas réserver que de bonnes choses à Mia.


Wes a survécu à l’enfer et ils se sont retrouvés, plus amoureux que jamais.
Son nouveau travail à Century Production l’envoie à New York pour interviewer
des stars, ce qui n’est pas compliqué puisqu’elle s’est fait, ces derniers mois, un
nombre incroyable d’amis célèbres. Elle contacte Mason Murphy, le joueur de
base-ball, et Anton Santiago, le chanteur de hip-hop.
Et enfin, elle passe un dîner de Thanksgiving en famille, avec tout ceux qu’elle
aime, même s’il y a toujours une place vide autour de la table… celle de son
père.

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Chapitre 1

Tête levée vers le ciel, je regarde, fascinée, les flocons tomber. Chacun est
unique et fragile. Je sors la langue pour en attraper un dans ma bouche où il fond
immédiatement. Je suis hypnotisée, envoûtée. Je cligne plusieurs fois des yeux,
puis je souffle, propulsant un nuage blanc devant moi. J’ouvre grand les bras et
tourne sur moi-même, laissant la neige recouvrir mon visage et les paumes de
mes mains.
– Quand tu auras fini de t’amuser, on pourra rentrer à l’hôtel ? s’écrie Wes en
riant. Je me les gèle !
Il vient derrière moi et enfouit son nez glacé dans mon cou chaud.
– C’est tellement cool ! À Las Vegas, je n’ai vu de la neige qu’une ou deux fois
et il n’y en a jamais à Los Angeles.
Il me serre contre lui et m’embrasse dans la nuque.
– Mes couilles sont gelées et ma queue ressemble à une stalactite prête à se
décrocher, mais sinon… oui, c’est cool.
Je glousse en me tournant vers lui :
– Pourtant, tu sais combien j’aime la glace. Merci d’être venu avec moi, Wes.
Sincèrement, je n’étais pas encore prête à m’éloigner de toi.
Il dégaine ce sourire qui me donne envie de lui sauter dessus. Mon Dieu, ce type
est canon, même lorsqu’il est emmitouflé dans un énorme blouson de ski et qu’il
porte un bonnet en laine.
– Il faudrait être fou pour refuser de passer deux semaines à New York avec une
femme magnifique.
Il approche son visage du mien, frotte son nez contre le mien et m’embrasse sur
la bouche.

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Bon sang, quel beau parleur ! Quand l’émission m’a annoncé que je devais aller
à New York pendant quinze jours pour filmer et interviewer des célébrités pour
la « Spécial Thanksgiving », ça ne l’a pas du tout intéressé. Il m’a même dit qu’il
évitait toujours la côte Est en hiver. J’imagine que l’océan Atlantique n’est pas
assez chaud ou que les vagues ne sont pas satisfaisantes pour un surfeur comme
lui.
Je m’étais donc faite à l’idée que j’allais passer deux semaines sans Wes, alors
qu’être séparée de lui si tôt après son retour me donnait la nausée. Toutefois, je
n’ai pas voulu en faire toute une affaire et je n’ai rien dit. Il va chaque jour un
peu mieux et sa thérapie se passe bien, je ne voulais surtout pas qu’il pense que
je ne le crois pas capable de rester seul pendant deux semaines.
Cependant, lorsque j’ai décidé d’interviewer Mason Murphy, mon ami qui est le
lanceur star des Red Sox, et Anton Santiago, le Latin Lover, Wes a soudain
changé d’avis. Un soir de la semaine dernière, il m’a avoué qu’il avait
longuement discuté des hommes présents dans ma vie avec sa psy, Anita
Shofner. Il sait que je parle régulièrement à Mason, Taï, Anton, Alec, Hector et
Maxwell. Bien sûr, ça ne le dérange pas que je parle aux deux derniers, car Max
est mon frère et Hector est gay. Néanmoins, il m’a avoué qu’il était un peu
jaloux des autres hommes. Il a rencontré Anton à Miami et comprend qu’il m’a
aidée à traverser une période difficile, mais il connaît sa réputation d’homme à
femmes et ne lui fait pas confiance. Même Mason, qui est pourtant
complètement amoureux de Rachel, sa chargée de relations presse, le dérange.
Bien évidemment, je me suis gardée de râler, ce qui n’aurait fait qu’attiser sa
jalousie et l’aurait décidé à m’accompagner deux semaines à New York. Je sais
que c’est mal, mais quand il m’a demandé ce que j’allais faire avec mes amis
après les avoir interviewés, j’ai haussé les épaules en répondant que je ferais ce
qu’ils voudraient. Cinq minutes plus tard, Wes faisait sa valise.
*
* *
– Quand est-ce qu’on retrouve tes amis ? demande Wes d’une voix légèrement
irritée.

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Je ne comprends pas qu’il réagisse ainsi à l’idée de revoir Anton et de rencontrer
Mason. Mon homme a toujours été bien dans sa peau. Or, après le cauchemar
qu’il a vécu en Indonésie, il n’est toujours pas redevenu le surfeur décontracté
qu’il était quand je l’ai rencontré. Sa psy m’a assuré qu’il lui faudrait du temps et
que je devais continuer de lui donner autre chose sur quoi se concentrer, c’est-à-
dire nous.
– Ce soir, Anton nous invite à dîner chez lui. Mace et Rachel n’arriveront que
dans quelques jours.
Ce que je n’ai pas dit à Wes, c’est qu’Anton avait proposé de nous héberger dans
son penthouse de Manhattan, mais je savais que Wes ne serait pas emballé. Il a
apprécié Anton quand on était à Miami, mais à l’époque, nous admettions tout
juste les sentiments que nous éprouvions l’un pour l’autre. Nous étions trop
préoccupés par nous pour nous soucier des autres.
Nous prenons notre temps pour défaire nos valises, puis nous nous douchons et
nous faisons l’amour. Je sens la tension le quitter quand il se déverse en moi, des
mots doux sur les lèvres.
Je reste allongée sur lui, haletante. Nous sommes nus et je suis étendue sur lui
après une délicieuse partie de jambes en l’air. Je l’ai chevauché de toutes mes
forces et je ne serais pas surprise d’en avoir pour preuve la trace de ses doigts sur
mes hanches. Je le sens prendre ma main et la porter à sa bouche pour embrasser
chacun de mes doigts. Puis, ce coquin glisse lentement quelque chose sur mon
annulaire.
– Quand est-ce qu’on se marie ? demande-t-il soudain.
Je cligne des yeux et repousse mes cheveux de mon visage. Je pose mes mains
sur son cœur, l’une sur l’autre, pour le sentir battre.
– Est-ce que c’est une demande ?
Il m’étudie d’un air sérieux puis il désigne ma main d’un mouvement de tête. Je
baisse les yeux et découvre un anneau de diamants encerclant mon doigt.
– On en a déjà parlé, Mia. Je ne te le demanderai jamais puisque tu n’as pas la
possibilité de dire non, déclare-t-il d’une voix ferme.
Je me redresse, assise sur lui, et je concentre toute mon attention sur la plus belle
bague que j’aie vue de toute ma vie. Elle n’est pas bling-bling, comme beaucoup

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de bagues de fiançailles, mais elle est brillante tout en étant simple. Un nombre
époustouflant de diamants scintillants ornent un anneau fin en or blanc. Elle ne
me gênera pas, et je peux même conduire Suzi sans me soucier de l’accrocher à
mes gants. Elle est parfaite.
– Alors, tu ne vas vraiment pas me poser la question ? je demande d’une voix
émue, les larmes aux yeux.
Wes s’assied dans le lit, passe un bras dans mon dos et pousse sur ses talons
pour reculer jusqu’à la tête de lit en m’emportant. Il plonge sa main dans mes
cheveux et me regarde droit dans les yeux.
– C’est vraiment nécessaire ?
– Nécessaire ? Non. Mais ce serait agréable, j’admets, alors qu’une larme coule
sur ma joue.
Il soupire et frotte son front contre le mien.
– J’espère que je ne vais pas le regretter, chuchote-t-il d’une voix tremblante.
Mia, mon amour, ma vie, veux-tu m’épouser ?
Je le regarde dans les yeux, je sens bien qu’il a peur que je dise non. Comme si
j’en étais capable.
– Au lieu d’une bague, est-ce que je peux avoir une autre moto de fiançailles ?
Wes cligne des yeux, interloqué, puis il penche la tête en arrière et éclate de rire.
J’embrasse sa poitrine et remonte jusqu’à son cou et son oreille.
– Oui, bébé, je veux t’épouser.
– Je te rendrai heureuse, Mia, dit-il en me serrant plus fort.
J’insiste, d’un ton sérieux et plein d’espoir :
– Alors, tu vas m’acheter une moto ?
Il secoue la tête et m’embrasse sauvagement.
– Quand ? grogne-t-il avant de diriger son attention sur mes seins.
– Euh, l’année prochaine ? je réponds en empoignant ses cheveux pour le
plaquer contre ma poitrine.
– Hmm. D’accord, chuchote-t-il en suçant un téton, allons-y pour le premier
janvier.
– Oh, oui, je gémis. Attends… quoi ?
*
* *

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* *
Je frappe à la porte du penthouse d’Anton, surprise qu’elle ne soit pas déjà
ouverte alors que la réception les a prévenus de notre arrivée. Wes est à mes
côtés, me serrant fort contre lui. Je suis sur le point de frapper de nouveau
lorsqu’elle s’ouvre sur Heather.
– Vous êtes là ! s’exclame-t-elle en sautillant sur place.
Elle porte des bottines à talons, ouvertes sur les orteils, qui la rendent encore
plus grande. Ses cheveux blonds, striés de mèches roses, sont dignes d’une
rockstar. Elle est vêtue d’une chemise rose fuchsia sur laquelle est écrit Pink is
the new black en grosses lettres blanches sur la poitrine. La chemise est ample et
rentrée dans un jean skinny avec une ceinture cloutée. Elle a le look d’une bad
girl ultra-branchée.
Je crois qu’il faut vraiment que je passe plus de temps en compagnie de filles.
Cela fait deux semaines que Ginelle me tanne pour aller faire du shopping avec
elle, on ira dès que je rentrerai.
Heather m’arrache à Wes pour m’attirer dans ses bras et me balance de gauche à
droite avant de me tenir à bout de bras pour m’observer.
– Meuf, je ne t’ai pas acheté des fringues à Miami ? Pourquoi tu ne les mets pas
? dit-elle en grimaçant.
Je pousse un grognement et secoue la tête.
– Je suis à l’aise comme ça !
J’ai mis le t-shirt à manches longues que j’ai acheté au concert de Lorde auquel
j’ai emmené Maddy l’an dernier. La voix de cette nana est incroyable et le t-shirt
est cool. Je l’ai mis avec mon jean préféré, moulant et déchiré sur les cuisses, et
des bottines trop cool que Cyndi m’a offertes. Elles sont en cuir noir avec un
motif sur les orteils et un bout plutôt carré. Ce qui me plaît le plus, cependant,
c’est la boucle argentée sur la cheville.
Elle en a aussi envoyé une paire à Maddy, je crois que c’est pour qu’on n’oublie
pas la famille qui nous attend au Texas.
– Hmm, cela dit, tes pompes sont pas mal, déclare Heather alors que Wes se
racle la gorge.
– Oh, pardon. Heather, tu te souviens de mon copain, Wes ?

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– Chérie, tu veux dire ton fiancé, non ? ricane-t-il en me faisant un clin d’œil.
Heather ouvre grand les yeux, comme si elle venait d’être électrocutée.
– Tu déconnes ! Vous allez vous marier ? C’est génial !
Elle nous prend tous les deux dans ses bras et manque nous étrangler.
– Oh, Anton va être ravi. Il adore les mariages.
– Ah bon ? Lui qui ne se mariera sans doute jamais ?
– Ouais, mais il s’est fiancé plein de fois !
Nous la suivons à travers le vaste penthouse jusqu’à la cuisine, où Anton se
déhanche devant les fourneaux, en rythme sur une musique qu’il est seul à
entendre. L’odeur qui embaume la pièce est divine.
– J’ai entendu parler de mariage ? dit-il en se tournant vers nous, une spatule en
bois à la main. Lucita ! Toi ? Dis-moi que ce n’est pas vrai ! s’exclame-t-il en
croisant les mains sur son cœur et en se laissant aller contre le plan de travail.
J’éclate de rire, mais je ne peux pas en dire autant de Wes, qui passe un bras
autour de mes épaules.
– C’est pourtant vrai. Montre-leur ta bague. On se marie le premier janvier, dit-il
d’une voix fière et virile.
– Aussi tôt ? Waouh, tu ne perds pas de temps, dit Anton en écarquillant les
yeux.
– On n’a pas choisi de date, je réponds en regardant Wes d’un air confus.
– Il me semble que si, juste avant de venir, tu ne te souviens pas ?
– Tu sais bien que toute décision prise post-coït ne compte pas ! je rétorque en
faisant la moue.
Wes sourit jusqu’aux oreilles :
– Trop tard, tu as dit oui. Maintenant, il ne reste plus qu’à décider du lieu.
Il plonge sa main dans mes cheveux pour masser ma nuque et libérer la tension
du voyage et de l’annonce de nos fiançailles prochaines. Je ne l’ai même pas dit
à Gin ou Maddy, bon sang ! Elles vont péter un câble si la presse l’apprend avant
que j’aie eu le temps de les appeler.
– On en parle plus tard, d’accord ?
Je me hausse sur la pointe des pieds pour l’embrasser une fois, puis une
deuxième, pour qu’il sache que je ne cherche pas à le faire taire. Il pose une

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main sur ma joue. Il semble inquiet, mais c’est surtout lié à l’endroit où nous
sommes et aux gens avec qui nous allons passer la soirée.
– D’accord, chérie. Plus tard. Demain, répond-il fermement.
– Ça marche. Alors, Anton, quoi de neuf ? Je veux tout savoir ! Ton dernier
album est génial, au fait !
– Oui, Lucita, l’album est oufissime. Tu as aimé la chanson où je chante avec
une nana ?
– Grave ! Et toi Heather, ton rôle de manager te plaît ?
La dernière fois que je les ai vus, elle venait d’avoir sa promotion. Anton ne
s’était pas rendu compte qu’il profitait de son assistante. Il a fallu qu’il soit sur le
point de perdre sa meilleure amie pour lui proposer plus. Aux dernières
nouvelles, tout allait bien.
Toutefois, elle n’a pas le temps de répondre car, comme d’habitude, Anton prend
les devants. Ce type a toujours besoin d’être le centre de l’attention.
Heureusement, son métier de chanteur lui permet d’être admiré au quotidien.
– H est asombrosa*1… comment dit-on ? Incroyable ! Tu n’imagines même pas
les concerts qu’elle déniche et les sponsors qu’elle me trouve. C’est génial. La
promouvoir au poste de manager est la meilleure décision de ma vie. Je suis
content d’y avoir pensé.
– Toi ?
Heather et moi avons réagi en même temps avant d’éclater de rire.
– D’accord, d’accord. Peut-être que ce n’était pas mon idée, mais j’étais
d’accord.
Je lève les yeux au ciel et Heather croise les bras.
– Bref, comme tu veux, Anton. Et si tu nous disais ce que tu nous fais à manger
? je demande en faisant le tour du bar.
Je m’arrête à ses côtés et lui donne un coup de bassin, mais il ne bouge pas,
concentré sur sa sauce.
– Ah, c’est une recette de familia*. Arroz con pollo*.
– Je comprends le mot poulet, mais c’est quoi le reste ?
– En gros, c’est du riz et du poulet.
– Dis donc, tu sors le grand jeu ! je réponds d’un ton moqueur.

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Anton me regarde et dégage mes cheveux de mon épaule avant de caresser ma
joue avec son pouce.
– Pour toi, Lucita, rien n’est trop beau, dit-il d’une voix sérieuse alors que ses
yeux révèlent qu’il se moque de moi.
– Je dois comprendre que tu me dragues avec du riz et du poulet ?
– Eh, on ne rigole pas avec ça. Tout le monde aime le riz et le poulet, si ?
– Si, Anton. Wes, tu veux boire quelque chose ? je demande en me tournant vers
lui.
Il est en train de fusiller Anton du regard, et je ne comprends pas pourquoi.
– Wes ? Tu veux boire quelque chose ?
Heather fait le tour du bar et ouvre le frigo.
– Il y a du champagne au frais. Je pensais faire des martinis, mais on a vos
fiançailles à fêter. Mon Dieu, tu dois être morte de trouille, non ? demande-t-elle
en sortant des flûtes à champagne d’un placard.
Je gonfle mes poumons puis les vide en regardant ma nouvelle bague.
– Eh bien non, au contraire, je suis plus heureuse que je n’espérais l’être dans ma
vie, je réponds en regardant Wes.
Soudain, la tension qui l’animait disparaît et ses épaules se détendent
visiblement. Il pose un coude sur le bar et appuie sa tête dans la paume de sa
main.
Je prends sa main de l’autre côté du bar.
– Quelle femme ne serait pas folle de joie ?
Il m’embrasse sur les phalanges et, immédiatement, des frissons jaillissent dans
le creux de mes reins pour remonter le long de ma colonne vertébrale. Il dessine
des cercles dans ma paume avec son pouce et les frissons se transforment en
bouffées de chaleur qui se précipitent dans mon bas-ventre, faisant pulser mon
clitoris. Je dois réprimer un juron lorsqu’il griffe ma paume avec son ongle, ce
n’est ni le lieu ni le moment de s’allumer. On doit tenir toute la soirée avant de
pouvoir se prouver notre amour. Mais c’est ce qu’on fera en rentrant. C’est sûr.
Je décide néanmoins de le prendre à son propre jeu et de le rendre fou avant la
fin de la soirée. Je tire sa main vers moi et promène mon index sur la peau
sensible de son bras, dessinant des huit depuis son poignet jusqu’à son coude.

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Son regard s’illumine, il sourit malicieusement, et je me demande si mon projet
de séduction ne va pas se retourner contre moi. Cependant, je pense que ça en
vaut la peine.
– Allez, Anton, mets ta sauce à feu doux et viens trinquer avec nous, dit Heather
en distribuant le champagne.
Le Latin Lover tourne les boutons de la gazinière, fait demi-tour sur ses talons
comme Michael Jackson dans ses clips, puis il se cambre, tend une jambe et
vient vers nous en se déhanchant.
– Quel crooner ! je m’exclame en faisant mine de tousser, ce qui provoque un
éclat de rire chez mon homme.
Enfin, il se détend un peu ! Après tout, je porte sa bague, je suis scotchée à lui et
je crois qu’il réalise qu’Anton est un peu ringard, en fait. Un ringard canon,
certes, mais un ringard tout de même. Heureusement, sa musique est tellement
bonne que je pense que ses fans ne l’aimeraient pas moins, même s’ils savaient à
quel point.
Anton lève son verre et nous l’imitons.
– À Lucita et son hombre*. Puissiez-vous toujours rayonner autant
qu’aujourd’hui et vous perdre à jamais dans votre amor*. Salud* !
Je souris et, pour la première fois, Wes regarde Anton en souriant aussi. Anton
nous observe, Wes puis moi, puis il hoche la tête et vide son verre d’un trait.
– Segunda ronda* ! s’exclame-t-il aussitôt.
Wes serre mon épaule et je tourne la tête vers lui.
– Je suis content qu’on soit là, admet-il.
Je ferme les yeux, inspire et appuie mon front contre le sien.
– Moi aussi. Ce sont de bons amis et ils ne veulent que le meilleur pour moi. Et
le meilleur, c’est toi.
Il lève ma tête pour m’embrasser sur la bouche.
– C’est ce que je vois, oui. Mon cerveau est encore… tu sais… tordu, chuchote-
t-il pour que je sois seule à l’entendre.
Anton est déjà retourné à ses fourneaux et Heather est partie mettre de la
musique.

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– Je sais, je dis en caressant sa joue, mais tu n’as pas à t’inquiéter. Il n’y aura
jamais d’autre homme que toi. Je te le jure.
Il hoche la tête et approche son visage du mien. Je sens son souffle sur mes
lèvres et je peux presque goûter les notes de champagne sur son haleine.
– Et je vais m’en assurer, murmure-t-il.
Il s’empare de ma bouche et m’embrasse longuement, langoureusement. C’est
loin d’être approprié et nous nous séparons lorsque les deux idiots de l’autre côté
du bar se mettent à applaudir, à siffler et à crier. La soirée va être longue.

*1. Dans ce passage, les mots suivis d’un astérisque sont en espagnol dans le
texte.

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Chapitre 2

– Non ! Ne la touche pas ! Gina ! Gina !


Je m’assieds dans le lit en frottant mes yeux lourds de sommeil et de champagne.
À côté de moi, Wes se débat contre les fantômes qui le hantent, enroulé dans les
draps trempés de sueur, le front et le torse brillants. Cela doit faire un moment
qu’il est dans les griffes de cette terreur nocturne. D’habitude, il me suffit de le
toucher pour qu’il se calme ou se réveille. Cela faisait presque une semaine que
ce n’était pas arrivé. Sa thérapie se passe très bien, mais il ne s’est pas rendu à sa
dernière session puisque nous sommes partis pour New York.
Tout à coup, je m’en veux d’avoir été aussi égoïste.
Je voulais qu’il vienne avec moi, alors que ce dont il a réellement besoin pour
poursuivre sa guérison, c’est sans doute le confort et la sécurité de sa maison.
Après tout, cela ne fait que quelques semaines qu’il a été libéré, et il a besoin de
temps pour mettre ce cauchemar derrière lui. Eh merde !
Je sors du lit alors qu’il se remet à crier.
– Gina… non. Non, mon Dieu, non ! Mia ! Mia ! C’est ma femme ! Lâche-la,
espèce de malade ! crie-t-il en arquant son dos.
– Wes ! Reviens-moi, s’il te plaît ! je dis en allumant la lumière.
Je ne prends pas le risque de le toucher, car la seule fois où j’ai essayé, un
mouvement brusque m’a valu un vilain bleu sur les côtes.
– Si tu touches ma Mia… je te tuerai. Je te tuerai ! Elle est à moi ! rugit-il.
Je saisis la bouteille d’eau sur ma table de chevet, l’ouvre, envoie une prière à
Dieu pour que tout se passe bien et la vide sur le torse de l’homme que j’aime. Il
agite les bras, secoué de spasmes, et j’ai beau m’être préparée, je recule juste à
temps.

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– Mia !
Ses pupilles sont entièrement dilatées et ses lèvres retroussées, comme un chien
qui montre les crocs.
– Ça va ? grogne-t-il d’un ton colérique.
Je ne peux pas savoir s’il est encore entre les griffes de son cauchemar ou s’il
veut vraiment savoir si je vais bien.
– Je vais bien, ne t’en fais pas. Tu m’aimes ?
Je pose la même question à chaque fois.
– Plus que tout au monde, répond-il instantanément.
Il commence à se lever, mais je tends la main pour l’arrêter. Je ne sais pas encore
à qui j’ai affaire. Mon Wes ? Le Wes captif ? La victime ? Le Wes dangereux ?
– Qui je suis ? je demande pour m’assurer qu’il est bien réveillé.
– Tu es Mia Saunders, bientôt Mia Channing, dit-il d’une voix à la fois douce et
pleine de tristesse.
Je ne peux m’empêcher de sourire.
– Ça sonne plutôt bien.
– Carrément ! Viens là, répond-il alors que ses pupilles se rétractent peu à peu.
Je retrouve ce regard vert dont je suis tombée amoureuse il y a bientôt un an,
mais je reste sur mes gardes.
– Pourquoi tu m’aimes ?
Il sourit et frotte sa mâchoire.
– Parce que sans toi, je ne suis pas moi. Et je ne veux jamais être moi sans toi.
Je ferme les yeux et rampe sur le lit jusqu’à lui, pour me blottir dans ses bras.
– Bébé, dis-moi ce qui s’est passé.
– Plus tard, chuchote-t-il.
Il passe un bras dans mon dos et suce mon téton à travers ma chemise de nuit.
J’ai été surprise de découvrir très récemment que Wes aimait la lingerie. Je
pensais qu’il était du genre à la préférer par terre, puisqu’il a tendance à l’enlever
dès que je l’ai mise.
Je me cambre contre lui, savourant la façon dont la dentelle gratte mon téton,
c’est divin.

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Il trouve bientôt le bas de ma nuisette et la retire. Mes seins sont lourds et
gonflés et il les lèche, les suce et les mordille. Il joue avec mes tétons, jusqu’à ce
qu’ils soient rouges comme des cerises.
– J’adore tes seins, dit-il.
– Ils t’adorent aussi, je réponds, pantelante.
Je frotte mon bassin contre la superbe érection qui s’érige entre mes cuisses.
Wes est nu sous moi et c’est magnifique. Après que nous avons fait l’amour,
lorsque nous sommes rentrés de chez Anton et Heather, il n’a pas remis son
caleçon. Il s’est tourné sur le côté alors que je mettais ma nuisette – sans culotte
– et que je me couchais à ses côtés. Il a passé une jambe sur ma hanche, puis il
s’est endormi.
– Prends-moi en toi, chérie. Je veux te sentir.
– Avec plaisir, je chuchote avant de sucer sa lèvre inférieure.
Je saisis sa verge épaisse et la place à l’entrée de mon sexe chaud et mouillé. Je
ferme les yeux et le prends en moi, profitant de le sentir s’enfoncer, centimètre
par centimètre. Lorsque je suis complètement assise sur lui, nous soupirons tous
les deux, un de ces soupirs qui font disparaître tout le reste la vie, les mauvais
rêves et tout ce que nous avons à faire ces prochains jours. Tout s’évapore
lorsque nos corps se rencontrent. C’est le paradis. Il pose une main sur ma
hanche et je le laisse me guider de haut en bas au rythme qu’il désire. Avec Wes,
chaque fois est incroyable. Le plaisir qu’il me procure est sans comparaison et,
parfois, je crois que je ne m’y habituerai jamais. Peu importe ce que l’avenir
nous réserve, je ne cesserai jamais de vouloir être avec cet homme.
Je suis ses gestes et accélère un peu, me levant lentement avant de me rasseoir
sur lui brusquement. Il soulève bientôt le bassin pour rencontrer le mien, et sa
verge me transperce douloureusement et délicieusement.
– Tu es tellement profond… je gémis dans sa bouche en l’embrassant.
– Je veux te baiser, Mia. Dur. Pour faire fuir tous ces démons.
Il ferme les yeux et plante ses ongles dans mes hanches.
– Chassons-les ensemble, bébé.
Je me soulève et contracte mon sexe afin qu’il n’ait d’autre choix que de se
concentrer sur la femme nue qui le chevauche.

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– Bon sang, tu es trop bonne pour moi, dit-il en passant les mains sous mes
aisselles.
Mince, je sais que lorsqu’il fait ça, c’est pour avoir un meilleur appui. Je sens
que je vais avoir du mal à marcher demain. Toutefois, l’orgasme qu’il va me
donner en vaut largement la peine.
En effet, je me suis à peine soulevée qu’il me rabat sur lui, me déchirant avec
son gland. Je pousse un cri alors que je me sens écartelée, mais il adopte un
rythme effréné et s’enfouit en moi sans relâche. Il puise en moi ce dont il a
besoin pour lutter contre les démons qui le hantent, et je suis à ses côtés. Chaque
aller, chaque retour et chaque respiration ramènent mon homme à mes côtés, au
présent, à cet endroit où notre amour règne en roi et où les démons n’ont qu’à se
cacher dans l’ombre pour mourir.
Mon corps se tend quand les va-et-vient de Wes deviennent plus intenses. Sa
mâchoire se contracte et il ferme les yeux, mais il est hors de question que je le
laisse sombrer sans moi.
– Wes… je gronde.
Il continue de se réfugier en moi et mes nerfs crépitent dans tout mon corps. Or,
j’ai besoin qu’il soit là, avec moi. Toujours.
– Wes, bébé, je râle d’une voix faible.
Je suis à deux doigts de me laisser engloutir par la vague de désir qui s’apprête à
s’abattre sur moi.
– Wes ! je sanglote.
Enfin, il ouvre les paupières. Ses yeux verts sont brûlants.
– Jouis ! ordonne-t-il.
Un seul mot. Pour la première fois de ma vie, je jouis sur demande, décollant
comme une fusée, verrouillant son sexe pulsant en moi. Deux allers-retours plus
tard, Wes atteint le septième ciel avec moi et nos cris se mêlent.
Tout ira bien. Je le sais. Tant que nous ferons fuir ensemble les démons de
l’autre, tout ira bien.
*
* *

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Je sors de la salle de bains et titube vers le lit, épuisée, mais curieuse de savoir ce
qui s’est passé. La psy de Wes lui a dit qu’il devait raconter ses terreurs
nocturnes et ses souvenirs, sinon les cauchemars pourraient empirer.
Je m’allonge sur lui, pose mon menton sur sa poitrine et joins mes mains sur son
cœur.
– Alors… que s’est-il passé dans ce rêve ?
Il soupire et passe sa main dans ses cheveux blonds. Le look « saut-du-lit » lui
va à ravir. S’il ne venait pas de mettre hors-service mon vagin pour au moins
douze heures, je serais déjà en train de remettre le couvert.
– Crois-moi, tu ne veux pas savoir. Je ne veux pas que tu aies ces horreurs en
tête, Mia.
– C’était un flash-back ? je demande, ignorant sa réponse.
Il secoue la tête et marque une pause en mordant sa lèvre inférieure.
– Plus ou moins, je suppose, oui. J’étais là-bas, dans la cabane. Mais les choses
étaient différentes. Au début, ils ont pris Gina, comme ils avaient l’habitude de
le faire.
Je frissonne, consciente de ce que les extrémistes ont fait à son ex. Son viol
quotidien a fait du mal à tous ceux qui ont dû le regarder, comme Wes.
– Qu’est-ce qui était différent ? je demande d’une voix douce.
Il retient son souffle, cligne plusieurs fois des yeux et dégage la mèche qui est
retombée sur mon front.
– Elle est devenue toi, dit-il enfin.
– Comment ça ?
Il fronce les sourcils et continue de jouer avec mes cheveux. Il étudie mon visage
avec une intensité sans précédent, comme s’il faisait l’inventaire de chacun de
mes traits.
– Au début, les cheveux étaient différents. C’était ceux de Gina, ils n’étaient pas
aussi noirs et soyeux que les tiens. Puis la bouche a changé.
Du bout du doigt, il suit les courbes de mes lèvres, et je réponds en embrassant
ses doigts.
– Le nez s’est allongé devant moi, poursuit-il en effleurant la pointe de mon nez,
mais je refusais toujours de croire…

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– De croire quoi ?
– Je pouvais me convaincre que c’était elle jusqu’à ce que les yeux deviennent
vert clair et pâles. Une couleur que je n’ai vue que chez une seule personne…
toi.
– Oh, Wes, mon Dieu… je ravale le nœud qui se forme dans ma gorge. Ce
n’était pas moi…
Il ferme les yeux et pointe son index sur son cœur.
– Je le sais, là. Mais ici, dans ma tête, les détails se mélangent. Ce soir, c’était
pire que tout. C’était d’abord le souvenir de ce qui s’est passé là-bas, puis Gina
est devenue toi. Et Mia… je n’aurais pas survécu si ça avait été toi. Je le
supporte à peine maintenant, mais si c’était toi que j’avais dû voir torturer nuit et
jour ? Ça me tue… rien que d’y penser.
Je pose une main sur son visage.
– Wes, je suis ici. Je n’étais pas là-bas. Tu as survécu à un terrible traumatisme.
Tu as vu quelqu’un à qui tu tiens subir une des pires choses qui puissent arriver.
Mais ce n’était pas moi. Si seulement je pouvais te le faire sentir, dans la nuit,
pour t’arracher à ces cauchemars.
– C’est ce que tu fais, répond-il en me serrant contre lui. Ce que tu fais m’aide
beaucoup. Ça va de mieux en mieux, je te le promets.
– Alors, le fait que je t’ai traîné ici n’aggrave pas la situation ? je demande, les
larmes aux yeux.
Il sourit et me fait glisser contre lui pour que l’on soit nez à nez. Il m’embrasse,
lentement, profondément, langoureusement, une main sur ma nuque pour
m’empêcher de reculer.
– Tu es la seule chose qui m’empêche de devenir fou. Sans toi, sans notre amour,
j’aurais pris un chemin très différent, Mia, un chemin sombre et sans retour. Tu
me donnes une raison de me battre, de vivre, Mia. Tu me donnes une raison
d’espérer. Être avec toi n’est pas une épreuve. Je ne serais pas venu à New York
si je pensais qu’être loin de toi serait une bonne idée.
Je me blottis contre sa poitrine et l’embrasse sur le cœur.
– Et si tu n’étais pas venu, je n’aurais pas cette jolie bague au doigt.

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Je remue la main pour qu’il la voie et pour faire briller les diamants au clair de
lune. Elle est sublime, et mon cœur bat la chamade chaque fois que je l’admire.
Le style est parfait pour moi, la preuve que mon homme me connaît bien.
– Je voulais te demander en mariage aussitôt que possible. Tu sais, j’ai acheté
cette bague quand je suis parti de Miami.
– Miami ? Mais c’était il y a des mois !
– Oui, mais on n’a eu que très peu de temps avant que tu partes au Texas, puis je
suis parti en mission. La mission de l’enfer. Après ça, il fallait que je guérisse. Je
ne voulais pas que tu penses que ma demande était le résultat du stress post-
traumatique, ou que c’était une fuite en avant. Je veux que tu sois certaine que je
suis prêt à m’engager auprès de toi pour la vie.
– Je t’aime, Weston Charles Channing, Troisième du nom, je dis en souriant.
– Troisième du nom, répète-t-il d’un ton moqueur.
Je le fais taire en m’emparant de sa bouche.
*
* *
Le téléphone sonne trois fois avant qu’elle ne décroche, essoufflée.
– Allô.
– Gin, qu’est-ce qui se passe, pourquoi tu es essoufflée ?
Je regarde l’heure, il est onze heures du matin ici, donc huit heures à Malibu.
Wes et moi avons décidé de rester à l’hôtel aujourd’hui et de regarder des films
en commandant au room service. Nous avons tous deux rendez-vous pour des
massages au spa de l’hôtel dans une heure, donc j’ai pensé que c’était le moment
parfait pour annoncer la bonne nouvelle aux deux femmes de ma vie. J’ai déjà
appelé Maddy et elle était hystérique. Elle a parlé d’un double mariage quand
elle aura fini sa licence, et je n’ai eu d’autre choix que de la laisser croire que
j’étais d’accord. Elle était beaucoup trop excitée pour entendre raison. Toutefois,
j’ai omis de lui dire que Wes pensait m’épouser le jour de l’an, je préfère le lui
dire de vive voix, autour d’un verre, ou de plusieurs.
– Euh, pour rien. Ohhhh… euh… hmmm. Arrête, dit-elle à quelqu’un d’autre.
– Espèce de petite salope ! Tu es avec un mec ? je glousse en faisant mine d’être
offusquée.

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Si les rôles étaient inversés, elle serait bien plus moqueuse que moi.
– Euh, non, il n’y a pas de mec ici, non. Moi ? Pfff, répond-elle d’une voix
exagérée. Putain, oui, c’est ça, chuchote-t-elle.
Je sais qu’elle a éloigné son téléphone, mais à l’évidence ce n’est pas suffisant.
– Tu es en train de baiser ? Maintenant ?
Beurk. Il y a des choses que je ne veux pas partager, même avec ma meilleure
amie, et ça, ça en fait partie.
– Mia, bébé, c’est pas le bon moment. Vraiment, vraiment pas, râle-t-elle.
– Ah bon ? D’accord ! Je voulais juste te dire que Wes m’avait demandée en
mariage. On se marie le premier janvier, mais on ne sait pas encore où. Bonne
baise !
Je raccroche et je compte à rebours.
Cinq.
Quatre.
Trois.
Deux.
Le téléphone sonne et Ma Salope Chérie s’affiche à l’écran. J’attends quatre
sonneries, juste pour l’énerver.
– Tu as déjà fini ? Eh bien, il doit pas être terrible, je me dépêche de dire dès que
je décroche.
Elle est haletante, mais j’entends qu’elle se déplace dans la maison.
– C’est toi qui m’as appelée, tu te souviens ? À huit heures du mat ! Alors que je
me faisais sucer le minou pour la première fois depuis des semaines, et tu
m’annonces ça ? Tu crains ! Tu le sais, ça ? s’exclame-t-elle d’une voix irritée.
Je ricane, me laisse tomber sur le lit et regarde ma bague scintiller au soleil. Elle
est magnifique, je crois que je ne m’en lasserai jamais.
– Tu as fini de râler ?
– Eh bien… maintenant que mon superbe orgasme est en suspens à cause de la
garce qu’est ma meilleure amie, ouais, j’ai fini. Reprends au début et raconte-
moi tout. Si tu oublies le moindre détail, je vais remplacer ton shampoing par de
la crème dépilatoire. On verra si Wes t’aime autant si tu es chauve.

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J’éclate de rire et lui raconte tout. Je n’ai pas dit à Maddy que nous venions de
clore une superbe partie de jambes en l’air, mais je n’épargne pas Gin. Ma
meilleure amie ne vit que pour ce genre d’histoire.
– Waouh. Alors, tu vas vraiment l’épouser le jour de l’an ?
Je hausse les épaules même si elle ne peut pas me voir.
– Je ne suis pas sûre. Je crois que je m’en fiche un peu. Mais Wes semble tenir
au fait de commencer l’année en étant marié. Moi je trouve ça plutôt amusant,
parce que quand je l’ai rencontré en janvier dernier, c’était tout le contraire.
– Mais pour toi aussi, tu te souviens ?
– Ouais, tu n’as pas tort. J’ai l’impression que c’était il y a dix ans, pas dix mois
! Tu me trouves folle de passer le cap si vite ?
– Attends une seconde.
Elle se déplace dans la petite maison d’amis, j’entends une porte s’ouvrir et se
refermer. Au loin, le bruit des vagues m’indique qu’elle est sur la terrasse qui
surplombe la plage et l’océan.
Ça ne fait que deux jours que je suis partie, et notre maison me manque déjà.
C’est dingue que je me sente déjà chez moi dans le mini-palais de Wes.
– Je ne suis pas experte en amour, Mia, mais je suis experte en toi. Tu as eu des
mecs vraiment affreux par le passé.
– Beurk, n’en parle pas, je t’en supplie !
– Ben si, justement, parce que ça t’a aidée à devenir la personne que tu es
aujourd’hui. Sans parler de Blaine l’enfoiré, ceux dont tu es tombée amoureuse
t’ont brisé le cœur.
– C’est vrai, j’admets en triturant un ongle.
– Mais aucun ne t’a détruite. Or, quand Wes était captif en Indonésie ? Là, tu
étais vraiment six pieds sous terre.
Il me suffit d’y penser pour que ma tristesse et ma douleur reviennent. Plus
jamais je ne veux vivre cela.
– Ouais, je marmonne.
Ginelle inspire lentement et je me demande si elle s’est remise à fumer, mais je
n’ai pas le courage de le lui demander.

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– Alors, la question est : est-ce que tu t’imagines vivre sans lui ? Mieux encore,
est-ce que tu penses que tu peux trouver mieux ?
– Absolument pas, je réponds instantanément.
Pourtant, j’ai toujours cru que j’étais amoureuse de l’amour, et que c’est ce qui
m’avait aidée à me relever après mes séparations. Cependant, rien ne pourra
jamais remplacer Wes.
– C’est l’homme de ma vie, Gin.
– Alors, je crois que tu as ta réponse.
– Est-ce que j’ai ton soutien, aussi ?
Je retiens mon souffle. Je n’ai pas besoin de son approbation, mais comme elle
l’a si bien dit, elle me connaît très bien. Et elle n’aurait aucun mal à me dire que
je suis sur le point de faire une énorme erreur si c’était ce qu’elle pensait.
– Bébé, je te soutiens dans tout ce que tu fais. Ça ne me plaît pas toujours, mais
je te soutiens. En revanche, avec Wes… c’est l’homme de ta vie. Je le vois en
toi, mais, surtout, je le vois en lui, dans ses yeux, chaque fois qu’il te regarde,
quand il pense que personne ne le voit. Il est fou de toi, Mia.
– Merci, Gin. Ça compte énormément pour moi.
– Et pour moi, tu sais ce qui compte énormément ? s’exclame-t-elle en
retrouvant son ton moqueur.
– Quoi ?
– Un orgasme en suspens. Tao va devoir recommencer à zéro, le pauvre. Cela
dit, ce demi-dieu a le don de me faire mouiller d’un simple regard.
– Tu déconnes ?! Tu te tapes le frère de Taï ? Comment ça ? Depuis quand ?
– On est restés en contact depuis le mois de mai. Il savait que tu partais à New
York, alors il a décidé de venir. Il reste deux semaines avec moi, pour découvrir
le soleil et les plages du continent. Cela dit, il faudrait qu’on sorte de la chambre
pour profiter du soleil.
– Espèce de salope !
– Je sais ! Je suis tellement excitée ! Meuf… il me fait perdre connaissance
chaque fois qu’il…
– Stop ! Je t’en supplie, épargne-moi les détails !
– Boh, t’es pas drôle !

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– Va le retrouver, meuf. Profite de ton dieu samoan.
Je regarde autour de moi pour m’assurer que Wes est toujours sous la douche et
je suis satisfaite d’entendre l’eau couler.
– Je sais d’expérience qu’ils savent s’y prendre. Amuse-toi bien, meuf !
Je sautille de joie, ravie que ma meilleure amie passe quinze jours avec un mec
génial qui vient d’une bonne famille.
– T’en fais pas pour moi, frangine. Je t’aime, même avec ta sale tronche, dit-elle
avant de raccrocher pour que je ne puisse pas répondre.
Mince ! Elle a encore gagné.

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Chapitre 3

Wes et moi descendons dans le hall d’entrée de l’hôtel, où Mason et Rachel


nous retrouvent pour aller déjeuner. Je passe un pilier en marbre et souris
jusqu’aux oreilles en apercevant mon ami, le bras autour de sa nana. Il se tourne
vers nous, et mon cœur bat la chamade lorsque nos regards se croisent. La
dernière fois que je l’ai vu, il m’aidait à guérir d’une lourde agression.
Je m’immobilise, alors que Mason court vers moi. Il me soulève dans ses bras et
me fait tourner dans les airs. Je plie les jambes, craignant de frapper quelqu’un
au passage. Lorsqu’il me repose, il prend mon visage dans ses mains et
m’embrasse sur le front.
– Bon sang, tu as l’air en forme, ma douce. Laisse-moi te regarder.
Il me tient à bout de bras et me toise des pieds à la tête. Je suis loin d’être une
fashionista, mais j’ai fait un effort pour mon homme. J’ai mis un jean bleu foncé,
un pull à grosses mailles vert foncé, des cuissardes en daim beige, un foulard en
soie multicolore et un trench en cuir marron.
– Tu es canon !
Je lui donne un petit coup de poing dans l’épaule.
– Mia, s’écrie Rachel en venant à nos côtés, je suis contente de te voir ! Mason a
passé la semaine à parler de toi et à dire combien il était excité de rencontrer ton
mec.
Je la regarde en souriant et dégage ses cheveux blonds de son épaule.
– Tu es superbe, Rachel. L’amour te va bien !
Elle sourit jusqu’aux oreilles et Mace passe un bras autour de sa taille.
– Oui, je suis d’accord, répond-il.

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Wes n’a pas interrompu nos retrouvailles, mais je sens sa chaleur dans mon dos,
très près. Je me penche en arrière et, sans me soucier de perdre l’équilibre, je
tends le bras. Je le savais, il est là, prêt à me donner la main et à me rattraper si
je tombe. Je souris et lève la tête lorsqu’il me prend dans ses bras. Il m’offre un
sourire en coin et un clin d’œil qui, dans notre langage secret, signifie « oui, tu
sais que je suis là pour t’empêcher de tomber, et je le serai toujours ».
– Mason Murphy, Rachel Denton, je vous présente mon mec, Weston Channing.
Wes tend la main pour serrer celle de Mason, puis de Rachel.
– Mia, on en a déjà parlé, tu veux dire ton fiancé, je crois ?
Il penche la tête sur le côté et effleure ma tempe avec son nez avant de
l’embrasser.
– Tu vas te marier ? s’écrie Rachel.
– Oui ! je m’exclame en haussant les épaules.
Elle sautille de joie en enlevant son gant pour me montrer sa main gauche.
– Moi aussi !
J’ouvre la bouche, mais je perds l’usage de la parole et me mets moi aussi à
sautiller, heureuse comme une enfant qui apprend qu’elle va à Disneyland, puis
je prends Rachel dans mes bras, toujours en sautant.
– Montre-moi ta bague ! s’exclame-t-elle en prenant ma main. Elle est
magnifique ! dit-elle en la faisant tourner. Elle est discrète, superbe.
Elle lève les yeux au ciel et regarde Mason, qui gonfle le torse et sourit
jusqu’aux oreilles.
– Laisse-moi voir la tienne.
– Ah ! Tu ne peux pas la rater, on la voit depuis la lune, dit-elle sèchement en
réprimant un sourire.
Elle tend sa main et j’ouvre grand les yeux en voyant l’énorme diamant carré.
– Waouh ! C’est combien de carats, ça ? je m’exclame sans quitter la bague des
yeux.
– Celui du milieu fait quatre carats, les deux sur le côté en font un chacun. Ça
fait six carats, rétorque Mason, ne pouvant s’empêcher de faire le malin, comme
la première fois que je l’ai rencontré.
Je fronce les sourcils et secoue la tête en le regardant.

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– Quoi ? Qu’est-ce que tu veux, le base-ball me rend heureux, mais pas autant
que ma nana, dit-il en tirant Rachel à ses côtés. Tu mérites plus.
Toutefois, je sais que Rachel s’en moque. Elle n’est pas du genre à se soucier
des choses matérielles. Certes, elle s’habille super-bien et elle pourrait
facilement traîner avec la jet-set new-yorkaise, mais au fond, c’est une nana qui
a les pieds sur terre et qui veut juste être avec l’homme qu’elle aime.
Wes pose une main sur mon épaule et me plaque contre lui, effleurant mon
oreille avec sa bouche. Son souffle me chatouille et un frisson descend le long de
mon échine. On vient de faire l’amour et je suis déjà en manque. Est-ce que ça
sera toujours comme ça ? J’espère que oui !
– Mia, si tu veux un gros diamant, je serais ravi de te l’offrir, mais je ne pensais
pas que…
Je lui coupe la parole en me tournant vers lui pour prendre son visage dans mes
mains. Il retient son souffle, surpris, j’en profite pour plonger ma langue dans sa
bouche, une fois, puis deux, avant de reculer et de le regarder dans les yeux.
– J’aime ma bague plus que tout. Plus que Suzi, même. Cela dit, je n’en dirai
peut-être pas autant quand tu m’auras acheté ma propre Ducati, ou bien peut-être
la MV Agusta FCC, mais elle coûte cent quarante mille dollars, c’est dingue. Or,
la Ducati n’en coûte que quarante mille. Ça reste une sacrée somme, mais…
Wes pose deux doigts sur ma bouche et sourit bêtement.
– Je propose à ma nana une bague à un demi-million de dollars et elle préfère
une moto. Bon sang, tu es vraiment la femme parfaite.
– Parfaite pour toi ! je réponds en l’embrassant brièvement.
– Ok, gardez vos papouilles pour plus tard, ricane Mace. Nous sommes affamés.
Vous avez une idée de resto ?
Je tourne la tête et le fusille du regard.
– Dis donc, je suis en train d’embrasser mon fiancé. Ça te pose un problème ?
Mason lève les mains en l’air en faisant mine d’être agacé.
– Allez viens, Rach, on va se trouver à manger !
*
* *

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Étonnamment, lorsque Wes et Mace commencent à parler de sport, mon homme
se détend peu à peu. L’autre jour, il m’a demandé s’il s’était passé quelque chose
entre Mason et moi, et il a semblé rassuré lorsque je lui ai répondu que non. Il
n’était pas jaloux, avant, et je ne suis pas certaine que ce nouveau trait de
caractère me plaise. Il faudra que j’en parle à sa psy quand nous serons de retour
à Malibu. Mon futur mari a énormément de qualités, et cette jalousie nouvelle
n’en fait pas partie.
Peut-être est-ce parce que c’est désormais « officiel » entre nous et qu’il pense
pouvoir marquer son territoire ? Je ne sais pas, mais je note que chaque preuve
d’affection qu’a Mace pour Rachel semble soulager Wes un peu plus. Toutefois,
il devrait savoir qu’il n’a pas à s’inquiéter, parce que je suis avec lui et qu’il peut
me faire confiance.
D’ailleurs, je me demande bien pourquoi il veut qu’on se marie aussi vite. Si
c’est parce qu’il est jaloux, il est hors de question que je le laisse faire.
– Alors, quand avez-vous prévu de vous marier ? je demande à Rachel.
Son regard s’illumine et elle se penche en avant sur la table. Nous avons trouvé
un pub chaleureux près de l’hôtel, qui propose un large choix de cidres et de
bières, ce qui plaît aux garçons, ainsi qu’un bon menu.
– On pensait se marier à la fin de l’année prochaine. La saison de base-ball finit
début octobre, donc peut-être la troisième ou quatrième semaine d’octobre,
n’est-ce pas chéri ? dit-elle posant une main sur le bras de Mace.
Il attend d’avoir fini de dévorer un énorme onion ring*1 pour répondre.
– Comme tu veux. J’y serai, vêtu de ce que tu m’auras ordonné de mettre.
Ça ne m’étonne pas que Mason ait prévu de ne s’occuper de rien. Cela dit,
maintenant que j’y pense, la dernière chose dont j’aie envie, c’est de tout
organiser.
– Ça va être gigantesque, dit Rachel en levant les yeux au ciel. On a une famille
énorme, tous les deux, et bien sûr il y a tous les membres de l’équipe et des
autres équipes avec qui il est ami. La dernière fois qu’on a compté, on en était à
quatre cent cinquante.
– Quatre cent cinquante quoi ?
– Invités.

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– Waouh ! Je ne crois même pas avoir rencontré autant de gens de toute ma vie !
Elle hausse les épaules.
– Ça fait partie du business, je suppose. Plus on est de fous, plus on rit, n’est-ce
pas ? Ça va être génial. C’est moi qui m’occupe de tout. D’ailleurs, laisse-moi
prendre mon agenda, vous pensez vous marier quand, vous ? demande-t-elle, en
sortant une petite tablette de son sac. Je croise les doigts pour que Mace n’ait pas
de match, mais hélas, on ne peut rien promettre.
– On n’a pas encore fixé de date, je réponds.
– Excuse-moi, Rachel, tu viens de demander quand on pensait se marier ?
demande Wes.
– Oui.
– Le premier janvier. Le jour de l’an, répond-il d’une voix ferme.
– Waouh, si tôt ! Alors, tout est prêt, ma douce ? demande Mason en se tournant
vers moi.
Wes le fusille du regard en entendant le surnom dont il m’a affublé dès le
premier jour où l’on s’est rencontrés.
– Wes veut qu’on se marie le jour de l’an, je soupire, mais je n’ai pas dit que
j’étais d’accord.
– C’est faux ! répond-il en secouant la tête.
– Je dois vraiment encore te rappeler que toute réponse donnée en plein orgasme
ne compte pas ?
Mason frappe la table en éclatant de rire et Rachel glousse en se couvrant la
bouche.
– Chérie, tu sais que je vais gagner cette bataille.
D’ailleurs on devrait sans doute commencer les préparatifs. Ma mère va vouloir
sortir le grand jeu, et sept semaines ne lui laissent pas beaucoup de temps.
– Sept semaines, je répète. Attends, le grand jeu ?
Je secoue la tête. Je n’ai aucune envie de sortir le grand jeu. Aucune. Hors de
question !
– Oh non, on dirait que Mia va vomir. Ça va, ma douce ? demande Mace alors
que des alarmes retentissent dans ma tête.
Tout à coup, j’ai beaucoup trop chaud et je n’arrive pas à respirer.

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– Chaud. Il fait chaud ici, non ? je siffle en tirant sur mon foulard.
Mon cœur bat très fort et je masse ma poitrine qui semble être devenue trop
étroite. C’est comme si un éléphant était assis sur moi. J’ai l’impression de
respirer avec une paille, mes poumons manquent d’oxygène.
– Mia, calme-toi. Chérie, regarde-moi. Tu fais une crise d’angoisse. Regarde-
moi ! gronde Wes.
Je le regarde dans les yeux et vois son inquiétude.
– Respire avec moi. Inspire… et maintenant expire lentement.
Je calque ma respiration sur la sienne jusqu’à ce que je retrouve mon souffle.
– Là, voilà. Tiens, bois un peu d’eau, dit-il.
J’avale quelques gorgées d’eau glacée et me calme peu à peu.
– Qu’est-ce qui s’est passé, Mia ?
Mason est derrière moi, caressant lentement mon dos de haut en bas.
– Détends-toi, ma douce. Ces histoires de mariage peuvent être stressantes, mais
au final tout ce qui compte, c’est toi et mon nouveau pote. Le reste n’est pas
important.
Je ferme les yeux et Wes prend mon visage entre ses mains.
– Chérie, tu ne veux pas d’un grand mariage ?
– Je n’ai jamais voulu ça, je chuchote en faisant non de la tête.
– D’accord, alors on fera une petite cérémonie. On peut même s’enfuir et faire ça
en secret, si tu veux.
– Non, ta mère serait super-triste, je ne veux pas lui faire ça.
– Alors, pourquoi pas une petite fête plus intime ? demande Rachel. Est-ce qu’il
y a un endroit qui vous fait penser l’un à l’autre ?
Nous sourions tous les deux et répondons en même temps.
– La plage !
– Oh, c’est trop mignon ! s’exclame-t-elle en frappant dans ses mains.
– C’est cool les mecs, intervient Mason, mais il ne va pas faire un peu froid à la
plage, en janvier ?
– Eh bien, en fait, non, répond Wes. À Malibu, la météo est souvent superbe en
janvier. Il peut faire vingt, voire vingt-cinq degrés, parfois. Ce serait parfait.

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Notre plage. Je m’imagine épouser l’homme que j’aime à quelques pas de la
plage où nous surfons, marchons, nous embrassons et regardons le coucher du
soleil.
– Wes, c’est parfait. Marions-nous sur notre plage !
– Et la réception ? demande-t-il.
J’ai une idée qui va me faire marquer des points avec ma future belle-mère.
– Et si on la faisait au domaine de tes parents ?
Son regard s’illumine et il sourit.
– Ma mère va adorer. On se marie sur notre plage, pour nous, et on fait la
réception dans la maison où j’ai grandi. Bon sang, soupire-t-il en posant une
main sur ma joue, je t’aime chaque jour un peu plus.
– Cool, je murmure.
Il éclate de rire et m’embrasse tendrement.
– Eh bien voilà ! C’est réglé ! Je sais que tu veux une petite fête, mais est-ce
qu’on peut venir quand même ? Mason sera libre en janvier et on adorerait voir
Malibu !
– Bien sûr ! Plus on est de fous, plus on rit, je répète en souriant.
– Ah bon ? demande Wes, n’ayant pas saisi mon ironie.
– Non, pas du tout. Je peux dresser une liste de vingt personnes max que
j’aimerais inviter. Tu crois que tu peux aussi ?
– Je ne sais pas, parlons-en plus tard. Je ferai ma liste ce soir.
Ce soir. Il va faire sa liste d’invités ce soir. Ce type est déterminé à m’épouser
dans sept semaines. Reste à savoir pourquoi.
*
* *
Notre déjeuner avec Mason et Rachel se transforme en dîner. Nous avons tant de
choses à nous raconter que nous passons l’après-midi au pub, à boire des bières,
à grignoter et à parler de tout et de rien, de leur mariage ultra-sophistiqué à la
maison qu’ils achètent et de nos familles respectives. J’ai prévenu Mason de ne
pas parler de la prise d’otage ni du fait que je l’ai appelé régulièrement en
octobre pour lui parler de la situation avec Wes. Mason était la personne idéale
pour m’écouter à ce sujet : c’est un avis masculin objectif, et il n’est ni du genre

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à en tenir rigueur à Wes ni à lui en parler. Mace et moi sommes amis. Nous nous
sommes liés d’affection quand j’ai passé le mois d’avril avec lui, puis quand il
m’a secourue la dernière fois que j’étais à New York, en juin. Notre relation
ressemble à celle que j’ai avec mon frère Maxwell. D’ailleurs, cela me fait
penser que je dois le prévenir de notre mariage, lui aussi. Cela dit, nous allons
chez lui pour Thanksgiving, dans deux semaines. Avant tout, je dois m’occuper
de Wes et de son besoin de se marier tout de suite.
*
* *
– Tu sais, j’aime bien Mason et Rachel. Ce sont des gens bien et ils forment un
beau couple, aussi, dit Wes en enlevant sa chemise.
Je me laisse distraire en voyant son torse nu, ses abdos musclés méritent d’être
admirés comme il se doit. Face à eux, je suis en transe comme devant un tableau
de Monet ou de Van Gogh.
– Tu as perdu ta langue ? demande Wes en souriant.
Je secoue la tête. Non. Pas maintenant. Ne te laisse pas déconcentrer, Mia. Il te
faut des réponses.
– Wes, je peux te poser une question ? je demande alors qu’il enlève son jean.
Bats-toi, Mia. Lutte ! Tu peux le faire. Ne laisse pas ce beau gosse te distraire.
C’est important ! Je me lèche les lèvres en matant mon délicieux fiancé. Bon
sang, toutes ces heures de surf font des miracles sur son corps.
– Bien sûr, chérie.
Il s’assied à côté de moi, saisit ma cheville et promène sa main sur mon mollet,
de bas en haut. Ce n’est pas une caresse sexuelle, mais mon corps ne sait pas
faire la différence. Il m’a à peine touchée que des fourmillements recouvrent
mon corps des pieds à la tête.
Réfléchis, Mia. D’accord. Je ferme les yeux et tente de me souvenir ce que je
voulais dire.
– Chérie, tu me fais peur, qu’est-ce qu’il y a ? demande Wes, inquiet.
Il saisit mon menton et lève ma tête vers lui.
– Pourquoi tu tiens à ce qu’on se marie aussi vite ?

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Ses épaules retombent, puis il appuie ses coudes sur ses genoux et prend sa tête
dans ses mains.
– Wes, bébé, qu’y a-t-il ?
Je me rapproche de lui et lui caresse le dos.
– Ce n’est pas qu’on ne peut pas attendre. Je sais qu’on pourrait prendre le
temps, mais bon sang Mia, quand j’étais enfermé… la seule chose qui me
donnait un peu d’espoir était de penser à toi. Tu étais ma lumière au bout du
tunnel. Il fallait que je survive. Il le fallait, parce que je voulais être là pour toi,
plus que tout au monde.
– Wes… je murmure d’une voix tremblante.
Je m’agenouille derrière lui et passe mes bras autour de lui.
– Alors tu vois, ce n’est pas qu’on doit se dépêcher, c’est juste que je ne veux
pas perdre la moindre seconde sans que tu sois à moi. Quand les choses allaient
mal, la seule chose qui me faisait tenir était de m’imaginer te passer la bague au
doigt. J’ai imaginé des centaines de manières de te demander en mariage, mais
en fin de compte, j’ai su que le bon moment était ici, au lit, où il n’y a que toi et
moi et où nous sommes loin de la thérapie, du stress de mon travail, de la
famille.
J’embrasse son dos, laissant ses paroles me pénétrer. Il ne veut pas perdre une
minute sans moi. Il n’est pas question de jalousie ou de fuite en avant, il s’agit
d’engagement. D’être avec moi. D’être avec lui. De former une famille.
– Ok. Alors c’est réglé. On se marie sur notre plage, à Malibu, et on ira chez tes
parents pour la réception. Tu veux qu’on dresse la liste des invités ?
Il se tourne brusquement, me pousse en arrière et s’allonge sur moi entre mes
cuisses.
– On fera les listes après.
– Après quoi ? je demande en jouant des sourcils.
– Après que j’aurai fait grimper ma fiancée aux rideaux.
Ses paroles embrasent le sang dans mes veines, et mon bas-ventre se contracte.
– Ça peut le faire, je dis en souriant, levant la tête pour l’embrasser.
– Non Mia, c’est toi que je vais me faire, répond-il en suçant ma lèvre inférieure.
Je pousse un grognement et l’entoure de mes jambes, le rapprochant de moi.

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– Alors vas-y, je chuchote.
– Avec plaisir, grogne-t-il.
– Quel plaisir ? Le tien ou le mien ? je demande en riant.
– Le nôtre, ma chérie. Toujours le nôtre.

*1. Beignets de rondelles d’oignon.

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Chapitre 4

Une semaine plus tard, l’équipe de tournage arrive au penthouse d’Anton, à


l’aube, où je vais l’interviewer avec Mason Murphy. Apparemment, lui et
Heather ont fait la fête avec des gens de l’industrie musicale. Heather est
réveillée, bien évidemment, parée de son look rockstar glamour habituel et
d’assez de maquillage pour cacher ses cernes, mais le Latin Lover n’est pas
encore réveillé.
De mon côté, je porte une jupe crayon noire à fines rayures que je trouve très
sexy, des bottes noires qui m’arrivent au genou et un chemisier en soie blanche
qui se ferme avec un ruban sur le cou. J’ai complété mon look avec un gros
bracelet rouge et un collier assorti. Ce doit être assez sexy, car Wes m’a presque
sauté dessus quand je suis sortie de la chambre, ce matin.
Il m’a fallu tout mon self-control pour ne pas le laisser me prendre sur-le-champ,
contre le mur de notre suite. Cependant, je suis déterminée à me débarrasser de
ces entretiens rapidement et à passer du temps avec mes amis pour vite retrouver
mon godemiché privé.
J’essaie de mettre de côté les images de Wes et moi nous roulant nus par terre
pour me concentrer sur mon travail. Je ferme les yeux, inspire lentement et
compte jusqu’à dix. Quand j’ouvre de nouveau les yeux, je me sens plus apte à
accomplir mon travail.
L’équipe du Docteur Hoffman s’affaire autour de moi, préparant le salon pour le
tournage. La déco chez Anton ne laisse aucun doute sur ses origines et il semble
avoir particulièrement soigné celle de cette pièce. J’ai choisi de l’interviewer ici
parce que cela reflète le plus l’homme que je connais, le véritable Anton, pas le

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Latin Lover. Cette pièce révèle la richesse et la diversité colorée de la culture
portoricaine très chère à Anton.
Il y a des tableaux peints par des artistes du quartier où il a grandi et des statues
sculptées dans le bois de sa ville natale. Les couvertures qui couvrent les canapés
en cuir bordeaux sont faites à la main par sa mère, et les meubles invitent les
gens à s’asseoir et à se reposer un moment. C’est tout Anton. Avec ses amis et sa
famille, il fait tout ce qu’il peut pour leur offrir l’accueil et le confort de sa
maison.
Kathy, mon assistante de production, vient vers moi. Elle a de longs cheveux
noirs qui lui arrivent jusqu’aux fesses et que je n’ai jamais vus lâchés car ils sont
toujours tressés. Je l’aime beaucoup. Ses lunettes à la Woody Allen glissent
toujours sur son nez aquilin et elle est sans cesse en train de les remonter
lorsqu’elle parle à quelqu’un. Sans cesse. Je me demande si ce sont de vraies
lunettes ou si elles ne servent qu’à parfaire son look de hipster. Quoi qu’il en
soit, je préfère ne rien dire, parce qu’elle est géniale et travailler avec elle est un
plaisir. D’après ce que Wes m’a dit, les assistants de production qui ne sont ni
agaçants ni jaloux de ne pas être sous les projecteurs sont rares. Il pense
également que Kathy est une vieille âme pleine de sagesse dans un corps de
jeune femme. Je ne sais pas encore où elle souhaite emmener sa carrière, mais
pour l’instant, je suis ravie qu’elle reste à mes côtés pour la durée de Vivre en
Beauté.
– Mademoiselle Saunders…
Je lève les yeux au ciel, car je lui ai dit des dizaines de fois de m’appeler Mia,
mais elle refuse, apparemment elle trouve cela irrespectueux.
– Monsieur Murphy est là avec Mademoiselle Denton. Ils sont tous les deux au
maquillage, ce qui a surpris Mademoiselle Denton, explique Kathy en remontant
ses lunettes alors qu’elles ne semblent pas tomber.
– Je sais, je réponds en souriant jusqu’aux oreilles. Ne dites rien, surtout. Elle ne
sait pas que Mason a prévu d’annoncer qu’ils sont fiancés. Apparemment,
personne n’est au courant et il veut que le monde entier le sache.
Le regard de Kathy s’illumine.

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– J’adore ! Le Docteur Hoffman va être fou de joie. Quant à Leona… elle
pourrait se jeter à vos pieds ! glousse-t-elle avant de couvrir sa bouche et de
regarder autour d’elle, de peur que quelqu’un ne l’ait entendue.
– Kathy, il n’y a que toi et moi ici. Et, tu as raison, Leona va être hystérique
quand elle le verra. Parfois, ça aide d’avoir des amis haut placés, tu ne penses
pas ? je dis en cognant mon épaule contre la sienne, la faisant rougir. Est-ce que
les plateaux sont prêts ? Comme Anton ne va pas être prêt avant plusieurs
heures, j’aimerais commencer par Mason.
Elle hoche la tête et tapote sur sa tablette.
– Je vais vérifier, mais tout devrait être prêt quand ils sortiront du maquillage.
Je traverse le penthouse en jetant un œil aux différents endroits où nous avons
décidé de filmer. Wes et moi souhaitons boucler autant de sujets que possible
afin d’en avoir suffisamment pour un mois, ce qui nous permettrait de passer les
fêtes de fin d’année en famille.
Max nous a fait comprendre que si ses deux sœurs n’étaient pas chez lui pour
Thanksgiving, il serait très vexé. Bien évidemment, il est bien trop viril pour le
dire ouvertement, donc il s’est contenté de déclarer que notre présence
marquerait la fin d’une année parfaite. Pleine de ses hormones postnatales, c’est
Cyndi qui nous a avoué que son mari serait effondré si Maddy et moi ne
pouvions pas venir. De toute façon, j’ai hâte de rencontrer Jackson, mon premier
neveu, et je n’oublie pas que mon frère a payé quatre cent mille dollars pour
nous sauver, ma meilleure amie et moi. La moindre des choses est de fêter
Thanksgiving avec lui.
Je trouve Mace et Rachel assis face au miroir, dans une des luxueuses salles de
bains du loft. Elle est énorme. Je n’en reviens pas qu’Anton ait un appartement
aussi grand pour Heather et lui.
– Salut, alors on vous fait beaux pour la caméra ?
Rachel fronce les sourcils et m’étudie.
– Oui, mais pourquoi me maquille-t-on, moi ?
– C’est simplement au cas où on te filmerait en train de parler à Mason, ou au
cas où on te poserait une ou deux questions.
J’avance derrière Mason, prête à changer de sujet.

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– Dis donc, frérot, t’es beau gosse quand tu veux ! je dis en lui donnant un coup
de poing dans l’épaule.
– Aïe ! grogne-t-il en se massant le bras. Je t’aime aussi, Mia. Tu vois comment
elle me traite, Rach ? Elle n’a vraiment aucun respect. Je devrais révéler à la
presse quelque chose de dégueulasse à propos du mois que j’ai passé avec elle.
Un truc du genre…
Il se gratte le menton, faisant mine d’y réfléchir, puis il claque dans ses doigts et
désigne mon reflet dans le miroir.
– … qu’elle s’est curé le nez et qu’elle a essuyé son doigt sur mon mur.
– Beurk ! C’est affreux, je m’exclame en écarquillant les yeux. Tu ne ferais pas
ça !
– Absolument, alors ne me tente pas et arrête de me taper ! dit-il en se frottant de
nouveau le bras.
– Chochotte !
– Ça suffit, tous les deux. Un peu de sérieux, gronde Rachel, essayant d’être
autoritaire alors qu’elle fait la moue pour qu’on lui mette du rouge à lèvres. Mia,
les questions sont prêtes ? Je voudrais y jeter un œil.
Mince ! Il n’est pas facile de cacher ce genre de choses à la chargée de relations
presse de la star qu’on est sur le point d’interroger ! Je regarde Mason, qui
hausse les sourcils.
– Euh, ouais, mais…
J’essaie de trouver une raison de ne pas lui montrer, tout en changeant de sujet.
– Rach, bébé, je les ai déjà validées.
– Quoi ? C’est mon job !
– Bébé…
Il la regarde tendrement et lui prend la main.
– C’est Mia. Elle ne va rien demander d’indiscret, et tu t’occupais de cet enfoiré
des boissons Power Up, tu te souviens ?
– Oh ! Ce mec était vraiment une perte de temps. Tu sais qu’il voulait que tu sois
gratos le porte-parole de leur deuxième série ? Et c’était même pas pour une
œuvre caritative ! s’indigne-t-elle. Ils pensaient qu’ils étaient assez puissants
pour ne pas avoir à te payer pour chaque pub. Quel porc ! chuchote-t-elle.

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Je profite de leur conversation pour m’éclipser.
– À tout de suite, les enfants. Les mecs, vous en avez pour combien de temps, à
votre avis ?
– Environ cinq minutes, répond un des maquilleurs en coiffant Mason.
– Moi aussi, ajoute celui qui met du blush à Rachel.
– Parfait.
– Suivez-moi, me dit Kathy, on va vous mettre votre micro.
*
* *
– Bonjour, et bienvenue à Dites Merci, un sujet très spécial de Vivre en Beauté.
Aujourd’hui, notre invité n’est nul autre que le joueur de base-ball professionnel,
Mason Murphy !
Je me tourne vers la causeuse en cuir blanc sur laquelle il est assis, aussi détendu
que s’il était chez lui.
– Mason, merci d’être avec nous aujourd’hui.
– Tu sais bien que je ferais n’importe quoi pour toi, ma douce, répond-il avec un
clin d’œil.
Je souris en reculant dans mon fauteuil.
– Toujours aussi charmeur, à ce que je vois.
– Seulement avec toi, puisque tu as brisé mon cœur.
Voilà quelque chose que je n’avais pas prévu, mais il est vrai qu’aux yeux du
public, je suis sortie avec Mason pendant un mois, en avril.
– Tu es affreux, tu sais bien que c’est faux !
– Mais non, nous sommes de bons amis, admet-il à la caméra.
– Exactement. Et puisqu’on est amis, j’aimerais faire découvrir à tes fans et aux
fans du Docteur Hoffman un côté de toi qu’ils ne connaissent pas déjà. Ça te
tente ?
– C’est parti, répond-il calmement.
Il allonge les bras sur le dossier du canapé et croise les jambes en posant une
cheville sur le genou opposé. Sa posture indique qu’il est détendu et confortable,
et c’est justement le côté que je veux montrer au monde entier.
– Ok. Alors, ma première question c’est : qu’as-tu prévu pour Thanksgiving ?

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Il frotte sa joue et sourit.
– Je vais passer du temps avec ma famille. Les fêtes comptent beaucoup pour
mes frères et mon père, alors on fait notre maximum pour les passer ensemble.
– Ça a l’air chouette.
– Ça l’est, mais ce qui est encore mieux, cette année, c’est que je vais emmener
ma fiancée.
Je sais que mon regard s’illumine comme un sapin de Noël, comme le sien
lorsqu’il tourne la tête vers Rachel, dont les yeux sont rivés au sol.
– Est-ce que tu nous annonces tes fiançailles ? je demande, comme si j’apprenais
la nouvelle.
– Oui, ma p’tite dame, répond Mason en hochant la tête. Tu devrais le savoir,
puisque c’est toi qui as arrangé le coup ! dit-il en riant.
– C’est vrai, mais tu es resté très secret à ce sujet depuis que toi et moi sommes
sortis ensemble en avril. Les gens vont être surpris, j’entends presque tous ces
cœurs se briser à travers le pays.
– Je crois qu’il est temps que le monde entier sache que je suis prêt à m’engager.
– Eh bien, chers spectateurs, vous l’aurez appris ici. Mais ce n’est pas la fin des
surprises, puisque Mason va nous faire l’honneur de nous présenter sa fiancée.
Ce sera après une courte page de pub, restez avec nous !
– Coupez ! s’écrie le directeur.
Je bondis debout en souriant.
– C’est génial ! je m’exclame en cherchant Rachel pour voir sa réaction.
– Rach, viens ici, viens t’asseoir, dit Mason.
Rachel observait la scène sur le côté, l’air soucieux. Je devine qu’elle n’aime pas
ce qui se passe et je sens son angoisse. Cependant, Mace et moi étions d’accord
sur le fait qu’il était grand temps que le public comprenne que nous sommes de
bons amis, et il en avait assez de garder leur relation secrète. Bien évidemment,
des rumeurs circulent sur le fait qu’ils sont ensemble et des photos d’eux ont été
publiées dans les magazines people, mais ils n’ont jamais rien confirmé.
– Qu’est-ce que tu fais ?
Elle saisit la main de Mason et il l’attire sur la causeuse à côté de lui.

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– J’en ai marre de faire semblant. Dans un an, tu seras ma femme et je veux que
le monde entier le sache. Je ne veux plus qu’on se cache ou qu’on nie la vérité.
J’en ai assez. Une nouvelle année va bientôt commencer, et je veux que la saison
prochaine, toutes les femmes sachent que je suis à toi. Mieux encore, je veux
qu’elles sachent que tout ça, dit-il en désignant Rachel des pieds à la tête, est à
moi.
– Je ne sais pas, dit-elle en secouant la tête et en se mordant la lèvre, clairement
inquiète.
Il sourit et passe un bras autour de sa taille, l’attirant contre lui pour l’embrasser
sur la joue.
– Eh bien moi je sais. C’est parti, Mia.
– Ça roule, Mace.
Le cameraman rallume sa machine et le directeur compte à rebours, de cinq
jusqu’à un, sur sa main.
– Nous sommes de retour pour Dites Merci, la spéciale Thanksgiving du Docteur
Hoffman. Je suis ici avec Mason Murphy, qui a récemment été élu meilleur
lanceur de l’histoire du base-ball et qui a quelque chose à nous annoncer. Mason,
peux-tu nous présenter la superbe femme qui est assise à tes côtés ?
Le cameraman se tourne vers mes amis.
– Bien sûr. Voici ma fiancée, Rachel Denton. Elle est ma chargée de relations
presse et elle travaille pour mon équipe de communication. Je suis sûr qu’elle est
furax contre nous d’avoir manigancé cette révélation dans son dos, mais je m’en
fiche !
J’éclate de rire.
– Ne nous en veux pas, Rachel. Mason voulait te faire la surprise.
Elle sourit et rougit délicatement.
– Alors, Mason, tout le pays sait que tu es resté célibataire longtemps, qu’est-ce
que ça fait d’avoir trouvé la perle rare ?
– Tu sais, Mia, je suis reconnaissant. Rachel est parfaite et elle me complète, et
j’ai hâte qu’elle soit ma femme.
Je me lèche les lèvres et regarde Mason séduire le monde entier.

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– Mason, maintenant que tu as brisé le cœur de toutes les femmes du pays,
revenons au sujet de l’émission. Nous cherchons à savoir ce pour quoi nos amis
célèbres sont reconnaissants. Tu as déjà mentionné ta fiancée, quoi d’autre ?
Mason recule dans le fauteuil et sourit d’un air pensif.
– Je suis reconnaissant d’avoir de bons amis, des fans géniaux et pour le sport en
général. Je ne serais pas ici aujourd’hui sans mon amour pour le base-ball. Mais
surtout, je suis reconnaissant pour la famille que j’ai, mon père, mes frères et ma
nièce. En dehors de Rachel, ils sont tout pour moi.
– Merci, Mason, d’avoir annoncé tes fiançailles ici, aux fans de l’émission. Je
vous souhaite tout le bonheur du monde.
– Et toi ? ajoute-t-il alors que les caméras continuent de filmer.
Je balaie la pièce du regard avant de remarquer le sourire narquois de Mason.
– Pardon ?
Rachel sourit d’un air satisfait. Ces deux sont vraiment faits l’un pour l’autre.
– Dis-moi si je me trompe, mais je crois que ce n’est pas n’importe quelle bague
à ton doigt, si ? demande Rachel d’une voix doucereuse.
– Mais oui, Mia, n’aurais-tu pas une nouvelle à annoncer, toi aussi ? ajoute
Mason.
Mon Dieu ! Quel enfoiré ! Je me mets à transpirer et je sens des gouttes de sueur
couler dans mon dos. Soudain, les projecteurs me donnent l’impression d’être
dans une salle d’interrogatoire.
– Euh…
Je souris en regardant ma bague et je me sens incapable de nier la meilleure
chose qui me soit arrivée. Je suis en train de réfléchir à ma réponse, prête à
arrêter la caméra pour refilmer la scène, quand je lève la tête, comme attirée par
une force invisible. L’air semble se charger de tension et je trouve les yeux de
celui avec qui je vais passer ma vie.
Comme si c’était prévu, Wes apparaît debout à côté de Mason et me tend les
mains. Je lui donne les miennes, et il m’attire dans ses bras. Je n’ai pas le temps
de dire quoi que ce soit, car il pose une main sur ma joue et m’embrasse
tendrement
– Bonjour ma chérie, dit Wes.

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Ses yeux sont rieurs. Il est vêtu d’un pantalon de costume noir, d’une chemise
blanche, d’une veste grise, et il est canon.
– Euh… tout le monde… je commence en inspirant et en regardant la caméra…
voici Weston Channing, mon fiancé, j’annonce en souriant.
Wes est radieux lorsqu’il prend ma main avant de faire coucou à la caméra. Je
crois que j’ai perdu le contrôle de ma propre émission.
– Voilà qui est intéressant, dit Mace. Alors dis-nous, Mia, de quoi es-tu
reconnaissante, cette année ?
Je n’arrive pas à quitter des yeux l’homme que j’aime.
– Wes, je soupire. Je suis reconnaissante pour tant de choses, ma sœur, mon
frère, mon père, ma meilleure amie et tous les nouveaux amis qui m’aiment. En
fait, je crois que ce que je dois remercier cette année, c’est l’amour. Sous toutes
ses formes.
– Je t’aime, Mia Saunders, et j’ai hâte que tu sois ma femme, dit Wes en
regardant la caméra.
Les paparazzis qui campent devant notre maison de Malibu ou devant les
bureaux de Century Production, et qui sont prêts à tout pour avoir des infos sur
le kidnapping de Wes, sur son film en suspens, sur Gina DeLuca et tout le reste,
vont être dégoûtés que la nouvelle soit annoncée dans mon émission plutôt que
dans leurs magazines.
D’ailleurs, cela me fait penser que comme le sujet sera diffusé vendredi, mieux
vaut annoncer la nouvelle à ses parents dès aujourd’hui.
Wes me tourne vers la caméra et je reviens sur terre, faisant de mon mieux pour
réciter mon dialogue de fin, de telle sorte qu’on n’ait pas à refilmer la scène.
– Je remercie encore une fois notre invité, Mason Murphy, et sa fiancée, Rachel,
de nous avoir fait part de leur heureuse nouvelle. Je crois pouvoir dire au nom du
Docteur Hoffman que vous êtes les bienvenus dans notre émission chaque fois
que vous avez une annonce à faire, je dis en souriant. Chers spectateurs,
n’oubliez pas d’être reconnaissants de toutes les bonnes choses qui vous arrivent.
Moi, je n’oublie jamais, je dis en prenant mon homme dans mes bras.
J’appuie mon front contre le sien et le directeur crie « coupez » juste avant que
Wes ne s’empare de ma bouche.

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L’homme de ma vie a déclaré qu’il m’aimait à la télé, devant tout le pays.
Comment suis-je censée faire mieux que ça ?

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Chapitre 5

– Qu’est-ce que tu fais ici et qu’est-ce que tu viens de faire ? je gronde en me


collant contre Wes.
Même en colère, je ne peux m’empêcher de plaquer mon corps contre le sien,
plus large, plus sexy et bien plus musclé que le mien.
– Mia, détends-toi répond-il en riant. Mason m’a parlé de votre projet
d’annoncer au monde entier qu’il épousait la femme de sa vie, et je me suis dit…
moi aussi, j’en ai envie ! On n’a aucune raison de garder la nouvelle secrète.
Je mords ma lèvre inférieure et plonge mon regard dans le sien.
– Mais, mais… et les paparazzis ? Ça fait des semaines qu’ils te harcèlent. Ça ne
va pas leur donner encore plus de raisons de te courir après ?
J’ai peur que Wes n’ait fait une énorme erreur. Je peux rectifier le tir en
refilmant la fin du sujet, même si sa déclaration ferait exploser nos records
d’audience. La santé et le bien-être de Wes ne méritent pas d’être mis en danger
pour quelques millions de spectateurs supplémentaires.
– Mia, justement, ça aura l’effet inverse. Ça va leur donner une nouvelle joyeuse
à décortiquer plutôt que le cauchemar que j’ai vécu en Indonésie. Gina arrive
tout juste à survivre, et tu sais pourquoi ?
Il me suffit d’entendre son nom pour que mes poils se hérissent. Cependant, je
serre les dents et fais comme si ça ne m’affectait pas le moins du monde.
– Non, pourquoi ?
– Parce qu’elle n’a pas la possibilité de se blottir dans les bras de la personne
qu’elle aime tous les soirs. Moi oui, et je veux que la terre entière le sache. Je
veux donner aux paparazzis une histoire plus forte et plus belle. Je n’ai aucun

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problème à passer la journée à répondre à des milliers de questions concernant
mon amour pour toi.
Je soupire, réalisant de nouveau combien il a changé en dix mois. En janvier, il
ne pensait qu’à son travail et au film qu’il préparait, mais maintenant il ne
semble plus y avoir que moi.
– Si tu crois que ça peut t’aider à guérir, alors je suis à fond derrière toi, main
dans la main, je réponds.
– Tant mieux, répond-il en souriant, parce qu’on a une interview avec le
magazine People, cet après-midi.
J’écarquille les yeux.
– Je ne vais pas parler seulement de nous, s’empresse-t-il de préciser. Je veux
aussi parler un peu de ce qui s’est passé là-bas et de ma thérapie. Peut-être que
ça peut aider d’autres gens qui souffrent de stress post-traumatique et leur faire
comprendre que ce qu’ils ont subi ne les définit pas, que c’est seulement quelque
chose qui leur est arrivé.
Une mèche tombe sur ses yeux et je la repousse en arrière, repensant à notre
séparation forcée. Mon Dieu, je ne sais pas ce que j’aurais fait s’il n’était pas
rentré. Je ne serais pas ici sans lui, c’est clair, et je ne serais pas aussi heureuse.
Je me surprends chaque jour à constater combien j’aime ma vie et à quel point
ma situation a changé depuis janvier.
Je me mets sur la pointe des pieds pour l’embrasser et déverse tout mon amour
dans mon baiser. Je suis fière de tout ce qu’il fait pour guérir, de notre relation
féerique et de notre amour. Parfois, je l’aime si fort que je ne sais l’exprimer.
Mais là, devant toute l’équipe, devant Mason et Rachel et tous les autres, je
l’embrasse de tout mon cœur. Il grogne dans ma bouche et me penche
légèrement en arrière, suscitant les applaudissements de toute la pièce.
– Bon sang, Lucita, la fête a commencé sans moi ou quoi ? Je suis censé faire la
queue ? Tu distribues des besos ? Si oui, je veux être le suivant !
La grosse voix d’Anton me surprend et je romps le baiser, riant contre les lèvres
de Wes, qui fronce les sourcils avant de sourire également, me montrant qu’il
s’est fait à l’incorrigible Anton et à son penchant démesuré pour la gent
féminine.

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– La fête a commencé il y a deux heures, donc tu es en retard, oui. Qu’est-ce que
tu as fait hier soir ?
Il dégaine ce sourire sexy qui fait mouiller toutes les femmes.
– Je crois que la véritable question est qui je me suis fait hier soir ? répond-il en
jouant des sourcils.
Je soupire en secouant la tête.
– Allez, on va commencer. Kathy va te mettre un micro.
– Pas de beso, alors ? dit-il en faisant la moue.
– Absolument pas, grogne Wes. Et si tu veux garder ta bouche intacte, garde tes
commentaires pour toi, tu veux ?
Anton joint les mains sur sa poitrine, penche la tête en arrière et éclate de rire
comme une hyène.
– Désolé, amigo, ne le prends pas mal. J’aime que tu sois aussi protecteur avec
notre Mia.
– Tu veux dire ma Mia, Anton. Fais gaffe à ce que tu dis si tu ne veux pas avoir
d’ennuis, aboie-t-il d’une voix sèche.
Bon sang, il n’a aucune raison de se mettre dans un tel état.
– Wes, détends-toi… Anton plaisante, bon sang !
Je n’arrive pas à me faire à cette jalousie. Je déteste le voir douter de tous les
mecs avec qui je discute, comme s’ils voulaient tous me sauter dessus. Hier soir,
il s’est énervé contre un serveur qui, selon lui, avait maté mes seins. Comme si
c’était anormal ! J’ai une poitrine énorme, je suis tellement habituée à ce que les
mecs la regardent que je le remarque davantage quand un homme ne parle pas à
mes nichons.
– Weston, amigo, je suis content pour toi et Mia. Je suis fou de joie de voir
qu’elle a trouvé l’amour de sa vie, et je vois que tu es fou d’elle. Je l’adore, mais
c’est une amiga, rien de plus. Ta fiancée fait ressortir mon côté stupide, tu
comprends, si ?
Wes soupire lentement et je le vois se détendre. Il ferme les yeux et baisse un
peu la tête.
– Je suis désolé, Anton. Je ne sais pas ce qui m’arrive. Même ses amis me
rendent jaloux. Pardonne-moi, tu veux ?

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Wes est sincère et je sais qu’Anton lui pardonnera immédiatement, il n’est pas
du genre rancunier.
– Ah, no problemo. Maintenant, muñeca, où tu me veux pour cette interview ?
– Euh, commençons dans la pièce avec tout l’art portoricain.
– Ça roule, on se retrouve là-bas.
J’attends qu’Anton soit parti et je saisis Wes par la main pour l’emmener au fond
du penthouse, dans le salon d’Anton. J’ouvre la porte et le laisse entrer avant
moi.
Des milliers d’émotions se disputent la première place dans mon cœur, et je ne
connais qu’une façon de m’en débarrasser rapidement. Entre sa déclaration
d’amour télévisée et sa jalousie d’homme de Cro-Magnon, mon corps picote
d’excitation, de joie, de colère, de peur, d’angoisse, et de tout un tas d’autres
choses.
J’ai à peine fermé la porte derrière nous que je me jette sur lui. Il ouvre la
bouche pour dire quelque chose, mais je plonge ma langue dans sa bouche. Enfin
! Je gémis lorsqu’il empoigne mes fesses et je suce sa lèvre inférieure en le
poussant en arrière pour le faire asseoir sur un banc molletonné. Je ne sais s’il
sert de repose-pieds ou de siège devant la cheminée mais peu importe, je sais à
quoi je vais l’utiliser. Connaissant Anton, il me féliciterait.
– Oh, doucement chérie, qu’est-ce qui se passe ? Je croyais que tu allais
m’engueuler parce que je me suis comporté comme un enfoiré avec ton ami ? Je
suis désolé, je ne sais pas ce qui m’a pris.
Je m’en contrefiche. Honnêtement, la seule chose qui m’intéresse est de défaire
sa ceinture. Je remonte ma jupe et Wes ouvre puis referme la bouche, les yeux
rivés entre mes jambes. Je porte des bas noirs et un string en dentelle assorti.
– Je n’ai pas beaucoup de temps, mais j’ai envie de toi. J’en ai besoin, ici,
maintenant. Alors, dégaine.
Il me regarde comme un donut au chocolat à côté de sa tasse de café.
– Bon sang, j’épouse la femme parfaite.
Il défait sa ceinture et sa braguette, puis il baisse juste assez son boxer pour
révéler son érection. Il la caresse jusqu’à ce qu’une goutte de liquide préséminal
jaillisse sur son gland et que sa verge atteigne sa taille maximale. Je

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m’agenouille sur le banc, à côté de lui, et me penche pour lécher son sexe et le
prendre dans ma bouche.
– Putain, oui, grogne-t-il.
Je suis sur le point de me mettre dans une meilleure position lorsqu’une bouffée
de chaleur explose sur ma fesse une fois, deux fois, trois fois.
– Je t’interdis de me sucer, grogne-t-il en empoignant mes cheveux pour reculer
ma tête.
Mince, le styliste va être furax.
Je gémis en admirant sa verge si dure et si prête pour moi. Wes pose ses mains à
plat sur le banc, derrière lui, et il me toise du regard.
– Chevauche-moi. Prends-moi jusqu’à la base, prends-moi complètement en toi.
Je suis ravie de lui obéir. Je pousse mon string de côté et positionne son gland
entre mes lèvres. Lentement, je m’assois sur lui, centimètre par centimètre, étirée
et comblée par sa verge épaisse. Lorsqu’il est entièrement en moi, que mes
fesses sont contre la peau douce de ses couilles et que je sens sa braguette
ouverte sur ma peau, je me penche en arrière.
– Je veux te voir prendre ce dont tu as besoin, chérie. Maintenant bouge, dit-il
d’une voix grave et rauque.
J’appuie mes mains sur ses genoux et j’utilise la force de mes jambes et de mes
pieds, par terre, pour me lever et me rasseoir sur lui. Tête baissée, je regarde sa
verge disparaître en moi, et ça m’excite encore plus. Plus je regarde, plus je
mouille, et plus mes mouvements sont brusques. Wes grogne à chaque va-et-
vient et j’oublie tout, je n’ai conscience que de sa chair glissant dans la mienne,
remplissant mon corps. Chaque aller est un plaisir paradisiaque, et chaque retour
un supplice.
– Regarde ça, c’est magnifique. Tu te masturbes sur ma queue et ça me fait
bander encore plus ! Je vais éjaculer si fort et si loin en toi que tu me sentiras
pendant des jours, gronde-t-il en saisissant mes hanches.
Je gémis en l’entendant, folle de plaisir, et je me mets à faire des bruits animaux,
gutturaux, comme le sifflement d’un chat enragé.
– Oh oui, tu es à deux doigts de jouir, je l’entends, murmure Wes. Si je pouvais
être dans deux endroits à la fois, je sucerais ton clito si fort que toute la ville

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t’entendrait hurler.
Il porte son pouce à ma bouche et me regarde dans les yeux.
– Lèche-le.
Je fais ce qu’il me dit, prenant son doigt salé dans ma bouche, tournant ma
langue dessus avant de le mordre. Il sourit et j’en perds la tête. Je me soulève et
me rassois aussi fort que possible avant de me frotter contre lui, dessinant des
cercles avec mes hanches, obnubilée par mon besoin d’atteindre le septième ciel.
Wes retient son souffle en sifflant. Il est enfoui profondément en moi, comme si
sa queue me transperçait jusqu’au cœur, et c’est exquis.
– Tu veux que je déclenche ton orgasme ? Que je te fasse hurler ?
Son désir transforme son visage, et ses yeux sont presque noirs. Sa bouche est
rouge, enflée et mouillée. Je secoue la tête, car si je meurs d’envie de hurler, je
ne le peux pas alors que la pièce d’à côté est pleine de gens. Cela dit, ils doivent
déjà savoir ce qu’on fait et, étonnamment, ça rend les choses encore plus
excitantes.
– Très bien, chérie, je sais ce dont tu as besoin.
Il pose son pouce sur mon clito et le frotte de bas en haut aussi vite que possible.
Je serre ses hanches entre mes cuisses alors qu’un orgasme gigantesque s’abat
sur moi. Un cri m’échappe, mais il l’avale en m’embrassant, dévorant mon éclat
de voix comme s’il était dans son droit, et il l’est. J’ai à peine joui qu’il me
relève et échange nos places. Je suis désormais dos à lui, à genoux sur le banc. Il
baisse mon string, écarte mes fesses et me prend par-derrière.
– Wes !
L’intrusion est intense. Mes genoux étant rapprochés, je suis beaucoup plus
serrée et le sexe de Wes et épais. Il se penche sur mon dos et chuchote dans mon
oreille.
– Si tu ne veux pas que le monde entier sache ce qui se passe dans cette pièce, je
te suggère de ne pas faire de bruit.
– Mais je ne peux pas !
Je remue les fesses pour l’obliger à bouger. Je viens de jouir, mais cette nouvelle
position est délicieuse. J’ai encore envie de lui. J’ai toujours envie de lui.
Il mordille mon cou et mon épaule.

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–D’accord, très bien, dit-il sans bouger pour autant.
J’entends un cliquètement métallique, et Wes me tend sa ceinture en cuir.
– Mords-la, dit-il en la tenant devant ma tête.
Je viens tout juste de fermer la bouche, sa ceinture entre les dents, qu’il se retire
jusqu’au gland et s’arrête.
– Je ne vais pas y aller de main morte, Mia.
Quand Wes me prévient qu’il va être brusque, il ne plaisante pas. J’ai tout juste
le temps de serrer la mâchoire, et de m’agripper au banc, que mon corps tout
entier est projeté en avant, propulsé par la force de son coup de bassin. Je pousse
un grognement, mais je ne crie pas.
– Oh oui, c’est parfait, dit-il en empoignant mes fesses.
Il les frappe plusieurs fois, jusqu’à ce que je mouille tellement que des gouttes
coulent entre mes cuisses. Mon cul est en feu, mais ça ne fait que m’exciter
davantage. Je perds la tête, comme toujours avec Wes, perdue dans un brouillard
de désir intense et envoûtant. Il saisit une hanche dans une main et une épaule
dans l’autre et il accélère encore plus. Quelque part, au loin, j’entends des coups
à la porte, mais je m’en fiche, et Wes aussi. Tout ce qui compte, c’est la queue
de mon homme qui me frappe et me fait voir des étoiles.
Je mords sa ceinture alors que chacune de mes cellules se met à picoter,
électrifiée. Quand Wes est sur le point d’éjaculer, il passe une main entre mes
jambes et pose deux doigts sur mon clitoris, me faisant jouir pour la deuxième
fois. Je me contracte sur lui, le pressant de toutes mes forces, et il plaque mon
dos contre sa poitrine. Enfoui aussi profond que possible, il remue son sexe en
moi et je le vide de sa semence. C’est magnifique.
Je cherche mon souffle pendant que Wes me caresse tendrement, me ramenant à
la réalité avec une douceur infinie, comme toujours après qu’on a fait l’amour.
J’adore.
– C’était une super-idée, mais on a frappé deux fois à la porte. J’ai entendu
Anton l’ouvrir, passer la tête dedans et la refermer aussitôt avant d’annoncer une
pause de vingt minutes, dit-il en riant contre ma nuque trempée.
Merde, je vais devoir changer de chemise.

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– Tu me rends folle, je dis quand ma respiration s’est calmée. Tu vas devoir
cesser de me surprendre avec tes déclarations romantiques et ta jalousie mal
placée parce que ça m’excite vraiment trop. Il faut bien que l’un de nous soit
responsable.
Je le pousse pour qu’il recule, même si je pourrais rester comme ça pendant des
heures. Hélas, j’ai un travail à faire.
Wes se retire en riant, puis il me dit de ne pas bouger. Un chiffon apparaît
comme par magie entre mes jambes et il m’essuie délicatement.
– Voilà, tu es aussi propre que possible, étant donné la situation.
Je me relève, remonte mon string et baisse ma jupe. Je sens que mes cheveux
sont décoiffés à l’arrière, là où il les a empoignés. Mes fesses sont en feu et mon
entrejambe est gonflé et douloureux lorsque je serre les cuisses.
– Merde, je viens de prendre mon pied et je suis censée tourner un sujet. Il y a
une vingtaine de personnes qui m’attendent derrière cette porte. Qu’est-ce que je
fous, bon sang ? je m’exclame en passant ma main dans mes cheveux, essayant
de me recoiffer.
Wes sourit, remonte sa braguette et reprend sa ceinture. Du bout du doigt, il suit
la marque de mes dents.
– C’est la chose la plus excitante que j’ai vue de toute ma vie. Je vais la porter
tous les jours, annonce-t-il d’un ton satisfait.
Quant à moi, je suis loin d’être ravie.
– Tu n’étais pas obligé de me prendre ici ! je m’exclame. Bon sang, je pourrais
perdre mon job !
– Mia, c’est toi qui as commencé, et tu ne vas pas te faire virer, dit-il en
remettant sa ceinture. Tu leur rapportes beaucoup trop d’argent, et tu as quelque
chose que tous les autres sujets de l’émission n’ont pas.
Je pose une main sur ma taille, me déhanche et le fusille du regard.
– Ah bon ? Quoi ?
– Moi, répond-il en souriant.
Depuis qu’il est revenu, ses sourires sont de plus en plus fréquents, ce qui me
laisse croire qu’il guérit peu à peu.
– Et en quoi ça m’aide ? je demande alors que je connais la réponse.

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– Tu plaisantes ? ricane-t-il. Mes films ont été récompensés plusieurs fois.
N’oublie pas que je t’aide pour le montage.
Je fais mine d’y réfléchir un instant, comme si je ne savais pas que son talent me
rend très convoitée dans le milieu audiovisuel, et auprès du Docteur Hoffman.
D’ailleurs, notre duo a tant de succès que d’autres chaînes s’intéressent à nous.
On m’a même proposé d’avoir ma propre émission. Wes et moi étudions les
différentes options qui s’offrent à nous, pesant le pour et le contre de chacune,
cherchant celle qui s’adapte le mieux à notre train de vie. Cela dit, je suis liée au
Docteur Hoffman jusqu’à la fin de l’année et pour une partie de l’année
prochaine, donc nous avons le temps d’y réfléchir.
– Dis, ça va les chevilles ? je ricane.
– Tu ne paies rien pour attendre, répond-il en secouant la tête.
– Promis ? je rétorque en riant.
– Promis. Mais ce sera quand tu t’y attendras le moins.
– Tu veux dire comme maintenant ?
Il éclate de rire et m’attire contre lui avant de m’embrasser.
– Allez viens. On va affronter l’équipe. Je pense leur payer ma tournée de bières
et de pizzas quand le tournage sera fini.
– Ça devrait aider !
J’apprends à connaître mon équipe peu à peu, ils ont tous l’air cool du genre à
vouloir regarder un bon match de base-ball en buvant une bière et en racontant
des blagues. L’idée de Wes est parfaite.
*
* *
– Bienvenue, Anton Santiago, connu sous le nom du Latin Lover. Une des
raisons pour lesquelles le public me connaît, c’est que j’ai joué un rôle dans un
de tes clips, cette année. Je crois comprendre, d’ailleurs, que ce morceau a bien
fonctionné, n’est-ce pas ?
– Absolument. Et pour une fois, les hommes ont adoré autant que les femmes
parce qu’ils t’ont vue dans un rôle de tentatrice.
Je ne peux m’empêcher de rougir. Comme souvent, Anton préfère mettre les
autres en avant plutôt que lui-même.

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– Merci, je dois admettre que mon fiancé a adoré, lui aussi, je réponds en lançant
un clin d’œil à Wes pour lui prouver que je suis prête à montrer mon amour en
public.
Anton éclate de rire.
– Je sais qu’on t’a posé cette question des dizaines de fois, mais pourquoi Latin
Lover ?
Il regarde la caméra et dégaine la moue qui fera baver toutes les spectatrices.
– J’adore les femmes, quelles que soient leur taille et leur allure, et je suis
d’origine portoricaine, alors il suffit de mettre les deux ensemble et perfecto,
Latin Lover !
Anton recule dans le canapé, tel un roi, ce qui lui va à ravir. Il est vêtu d’une
chemise blanche, presque entièrement déboutonnée, d’un pantalon ample en
coton et de mocassins en cuir marron. Une chaîne en or scintille sous la lumière,
attirant l’attention sur son torse musclé. Je regarde ses yeux verts qui ressortent
sur sa peau cacao, et je comprends pourquoi les femmes se jettent à ses pieds.
Anton est canon. Toutefois, il a beau être beau gosse et sculpté comme une
statue grecque, j’espère qu’il trouvera un jour le véritable amour.
– Maintenant que tu es célèbre et que tu as fait fortune, pour quoi ou à qui veux-
tu dire merci, en cette fin d’année ?
Il penche la tête en arrière et regarde le plafond.
– Je suis content d’avoir un toit au-dessus de ma tête et le ventre plein. Je suis
reconnaissant pour l’amitié et le soutien de ma manager, Heather Renee, pour
l’amour de mi mama et de mis hermanos. Et, bien sûr, je veux aussi dire merci à
tous mes fans. Mais tu sais, je veux te remercier toi, Mia, pour m’avoir évité de
perdre une personne qui m’est chère. Je suis reconnaissant de t’avoir rencontrée
et d’être ton ami.
Je ne peux retenir les larmes qui me montent aux yeux. Bien évidemment, c’est
le moment que choisit le cameraman pour faire un gros plan sur moi. Je n’y suis
pas préparée et quand je regarde l’objectif, une larme coule sur ma joue.
– C’était Anton Santiago, le Latin Lover, mon ami et le vôtre. Merci de nous
avoir rejoints aujourd’hui, Anton. J’ai adoré discuter avec toi pour Dites Merci.

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Je te souhaite encore plein de succès, que ce soit pour la musique ou pour tes
projets personnels.
Je me tourne vers le directeur et le reste de l’équipe.
– La séquence d’Anton est bouclée ! j’annonce en souriant.
Il ne nous reste plus qu’une séquence à tourner, et Wes et moi partirons pour
Dallas, où nous passerons Thanksgiving avec mon frère, sa famille, ma sœur et
son fiancé.

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Chapitre 6

– Est-ce que tu vas me dire ce qu’on fait, à se les geler dans les rues de
Manhattan, suivis par une équipe de tournage ?
Wes balance nos bras tandis que nous marchons main dans la main. La vie est
belle. J’ai de nombreuses raisons d’être heureuse, et l’homme que je vais
épouser est en tête de liste.
New York vrombit autour de nous. Des flocons volent dans les airs et fondent
dès qu’ils touchent le sol. Il neige rarement à Las Vegas, et lorsque c’est le cas,
il ne fait jamais assez froid pour que la neige recouvre le sol. Ici, j’ai
l’impression d’être dans une carte postale.
– Je veux essayer quelque chose. Fais-moi confiance, ça devrait être marrant.
– Chérie, tu es la seule en qui j’ai confiance.
Il passe un bras dans mon dos et m’attire contre lui. Je sens la chaleur de son
corps réchauffer le mien tandis que nous continuons de marcher, en route pour
une destination inconnue. La ville est tout simplement magnifique. En dépit de la
météo, il y a des gens partout, allant d’une porte à une autre, rentrant ou sortant
de taxis jaunes qui apparaissent comme par magie dès que quelqu’un s’approche
du bord d’un trottoir. Des dizaines d’odeurs différentes embaument l’air,
provenant des nombreux stands de streetfood. Lorsque nous arrivons au
Rockefeller Center, au cœur de Manhattan, je m’arrête devant la patinoire de
plein air.
– On va s’arrêter là un moment, je dis en souriant à Wes, qui secoue la tête.
Mes trois collègues préparent le matériel pendant que je balaie la patinoire des
yeux. Sur un côté, je vois un homme aider sa petite fille à lacer ses patins et je
vais vers eux.

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– Bonjour Monsieur, excusez-moi, je m’appelle Mia Saunders, et je fais des
interviews pour l’émission du Docteur Hoffman. Je cherche à savoir de quoi les
gens sont reconnaissants cette année.
L’homme se place devant sa fille, dans un geste automatique et protecteur.
– Oui, et alors ?
Je désigne les cameramen, l’ingé son et Wes derrière moi.
– Eh bien, je me demandais si vous me laisseriez vous interroger. Je n’aurai
qu’une ou deux questions, j’essaie de filmer le quotidien des Américains pour le
montrer au monde entier. Ce serait un beau cadeau pour votre petite fille de
passer à la télé.
Je souris à la petite fille brune aux yeux marron. Elle porte un bonnet rouge dont
dépassent de longs cheveux et ses joues sont rougies par le froid.
– Tu voudrais être à la télé, Anna ? demande-t-il en lui mettant un doigt sous son
menton pour lever sa tête vers lui.
– Oui papa !
– Super ! je m’exclame en frappant dans mes mains. Dans ce cas, si vous
pouviez venir ici, où nous avons installé la caméra, ce serait plus pratique !
La petite fille ne doit pas avoir plus de six ans et son père la prend dans ses bras
pour lui éviter de marcher en patins.
– Alors, Monsieur…
– Pickering. Shaun Pickering.
Je mémorise son nom pour ne pas faire de bourde devant la caméra. Je ne veux
pas les déranger trop longtemps, donc mieux vaut que je ne me trompe pas.
– Ok tout le monde, on est prêts ?
L’ingé son me donne un micro et une oreillette. Je finis de me préparer et pousse
mes cheveux de part et d’autre de mon visage pour me protéger du froid – selon
Wes mon bonnet me va très bien – et ajuste mon caban vert.
– C’est parti ? je demande à Shaun.
Il hoche la tête et fait sauter sa fille sur sa hanche.
– Quand vous voulez.
Le cameraman compte à rebours depuis cinq.

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– Je suis ici avec Shaun Pickering et sa fille, Anna, en plein cœur de Manhattan,
au Rockfeller Center, où ils se préparent à aller patiner, un des passe-temps
préférés de nombreux New-Yorkais. Merci, Shaun, de nous permettre
d’interrompre votre journée.
– Je suis ravi de participer, répond-il en souriant.
– Ce que j’aimerais savoir, Shaun, avec l’approche de Thanksgiving, de quoi
êtes-vous reconnaissant ?
Il regarde la caméra et serre fort sa fille dans ses bras.
– Je suis reconnaissant d’avoir Anna. Elle est tout ce qui me reste de ma défunte
femme.
Je ne sais pas bien quoi répondre. Quelle est la bonne réponse à la perte d’un être
cher ? « Toutes mes condoléances » ? Il a entendu ça des dizaines de fois.
Le cameraman continue de filmer, et Shaun me fait l’immense service de
combler le blanc.
– Être un père célibataire n’est pas facile, mais cette petite fille, dit-il en frottant
son nez contre celui d’Anna, me donne envie de me surpasser chaque jour.
Anna glousse et colle sa joue à celle de son père.
– Tu es tout froid, papa !
– Et toi, Mademoiselle Anna, pour quoi es-tu reconnaissante ?
Elle tourne ses grands yeux vers l’objectif et le cameraman se rapproche.
– Pour mon papa ! C’est le meilleur papa du monde entier. Et il va m’emmener
faire du patin et manger un hot-dog et il va m’acheter un soda même si Mamie
dit que c’est pas bon !
Elle éclate de rire encore une fois, j’ai envie de la prendre dans mes bras pour
l’embrasser.
– Dis donc, on dirait que tu as vraiment un super-papa.
– Le meilleur !
– Eh bien voilà, tout le monde. Merci à Shaun Pickering et à sa fille, Anna, de
nous avoir dit merci !
Je m’arrête, souris à la caméra et attends qu’il me fasse signe que c’est dans la
boîte.

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– Vous avez été géniaux. Merci. Je suis ravie que vous nous ayez parlé, je dis en
tendant la main au cameraman. Tu les as ?
Il me tend deux cartes Visa d’un montant de cent dollars.
– Voici un petit cadeau, j’espère que vous trouverez quelque chose qui vous fera
plaisir.
– On ne l’a pas fait pour l’argent, dit Shaun en étudiant les cartes.
–Je sais, mais je vous suis reconnaissante de votre contribution. Profitez bien ! je
m’exclame en souriant.
Des bras m’entourent par-derrière et je m’appuie contre le corps chaud de Wes,
qui frotte son nez glacé juste derrière mon oreille, me faisant sursauter.
– C’était une super-idée, Mia. Et le cadeau est une belle attention.
– Eh bien, c’est agréable d’être surpris de temps en temps. Et puis, on n’a pas eu
à payer pour interviewer Mason et Anton, alors j’ai décidé d’utiliser une partie
du budget pour acheter des cartes cadeau Visa. Je les donnerai aux gens qu’on
filmera, avec un peu de chance, ça égaiera leur journée.
Il me fait faire demi-tour et me serre plus fort contre lui.
– J’adore, Mia. Je t’aime.
Waouh. Wes semble avoir décidé de me dire qu’il m’aime plus souvent, et je ne
crois pas m’en lasser.
– Merci ! Maintenant, allons à notre prochain lieu de tournage. Je me disais que
l’Empire State Building serait marrant !
– J’ai compris ce que tu fais, ça y est, dit Wes en riant.
– Je visite la ville tout en travaillant. Pas mal, non ?
Il me plaque fort contre lui et m’embrasse langoureusement, longuement,
délicieusement.
*
* *
Main dans la main, Wes et moi arrivons avec l’équipe en haut de l’Empire State
Building où je trouve un couple qui doit avoir environ quatre-vingts ans. Ils
acceptent joyeusement de me laisser les interroger et quand tout est prêt et qu’ils
sont debout, dos à la skyline new-yorkaise, nous démarrons.

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– Je suis maintenant avec Xavier et Maria Figueroa, en haut de l’Empire State
Building, un des endroits les plus connus du monde. Dites-moi, tous les deux, de
quoi êtes-vous reconnaissants ?
L’homme porte la main de sa femme à sa bouche et l’embrasse.
– Je suis reconnaissant d’avoir ma femme, Maria. Cela fait soixante ans que
nous sommes mariés. Elle m’a donné quatre fils dont je suis fier, elle a tenu la
maison seule pendant seize ans quand j’étais dans l’armée et que j’ai combattu
au Vietnam, et elle est restée à mes côtés pour le meilleur et pour le pire.
Il tourne la tête vers elle et pose une main tremblante sur sa joue.
– Tu es la femme de ma vie.
Il l’embrasse tendrement, provoquant quelques larmes sur les joues de sa femme.
Quand ils se tournent de nouveau vers la caméra, il lui donne un mouchoir en
tissu qu’elle a sans doute repassé pour lui, et elle essuie ses yeux en me souriant.
– Maria, ça ne va pas être facile de faire mieux, mais pouvez-vous me dire
pourquoi vous êtes ici, en haut de l’Empire State Building, en cette belle journée
ensoleillée et enneigée ?
Elle lisse ses cheveux rassemblés dans un chignon, et elle regarde au loin, au-
delà de l’horizon.
– Nous venons ici tous les ans, une fois par an, le même jour.
– Et pourquoi ça ?
– C’est ici que Xavier m’a demandée en mariage, il y a plus de soixante ans. On
habite en dehors de la ville, et tous les mois de novembre, en ce jour, nous
venons dire merci. À l’un et à l’autre, et à la ville, pour nous avoir donné un si
beau cadre de vie. Nous ne sommes pas riches, mais ce qui nous manque en
confort moderne, nous le compensons en amour. N’est-ce pas, mon chéri ?
Elle se colle contre son mari qui passe son bras autour de sa taille.
– Absolument, mon amour.
*
* *
– Alors, on est allés au Rockfeller Center et à l’Empire State Building, où va-t-
on maintenant ? demande Wes quand nous montons dans notre minibus.

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Je souris jusqu’aux oreilles et pose mes mains sur le dossier du siège devant moi.
Je suis tellement excitée que je ne tiens pas en place.
– Ellis Island et la Statue de la Liberté, bien sûr !
– Quelle touriste ! s’exclame Wes en levant les yeux au ciel.
Il prend ma main et l’embrasse, comme Xavier a embrassé celle de Maria.
– Absolument, et je n’en ai pas honte ! Je suis déjà venue ici, mais les
circonstances n’étaient pas géniales.
Le souvenir d’Aaron et de ce qu’il m’a fait me font frissonner de dégoût. Wes le
sent et secoue la tête.
– Plus jamais. Je te protégerai jusqu’à ma mort, Mia.
– Je sais. Je sais, dis-je en serrant sa main. Ne t’en fais pas. Ce voyage est génial.
Je me suis fiancée à l’homme de mes rêves, dis-je en me frottant à lui pour
détendre l’atmosphère, on a traîné avec mes super-amis, et je suis ici avec toi, à
filmer des gens tout en visitant la ville. Quoi de mieux ?
– Tu as raison, soupire-t-il. C’est plutôt génial, je suis content d’être venu avec
toi.
– Moi aussi.
*
* *
Le minibus s’arrête sur le parking du ferry qui va à Liberty Island. Nous
achetons nos tickets et passons la sécurité, ce qui prend plus de temps que je ne
le pensais. Nous allons devoir finir nos interviews demain, or il ne nous reste
plus que deux jours à New York et je voulais les passer seule avec mon mec.
Hélas, ça semble compromis. Il est déjà quinze heures et il va bientôt faire nuit,
ce qui n’est pas idéal si l’on veut de beaux arrière-plans. Le but de la séquence
est qu’elle soit belle aussi, de faire voyager les spectateurs qui n’auront peut-être
jamais la chance de voir New York. Jusqu’ici, ça marchait plutôt bien.
Sur le ferry, je décide de faire d’une pierre deux coups. Je remarque une femme
blonde avec de magnifiques yeux bleus, debout sur le pont. Le vent fait voler ses
cheveux dans tous les sens et elle regarde au loin, silencieuse, pensive. Je lui
demande si elle accepterait de me parler et elle me répond avec un fort accent
écossais qu’elle en serait ravie. Il s’avère qu’elle écrit des romans d’amour et

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qu’elle est venue pour une conférence. Elle avait un jour de libre, alors elle a
décidé d’en profiter et de visiter New York.
Je prends le micro et m’appuie contre la rambarde alors que le ferry traverse les
eaux d’Upper Bay.
– Les amis, je suis en direction de Liberty Island pour la première fois de ma vie,
et j’ai rencontré cette charmante jeune femme. Janine Marr vient d’Écosse dans
notre superbe pays pour le travail. Comment se passe votre première visite ? je
lui demande.
– À merveille. J’adore les Américains et cette façon dont les gens sont toujours
pressés d’arriver à destination, comme si la personne qu’ils allaient retrouver
était la plus merveilleuse du monde.
Je souris en regardant la caméra. Je ne peux pas dire que je partage son
enthousiasme pour la vie pressée des gens, mais j’aime son attitude positive.
– C’est une façon de voir les choses, oui. Je sais que vous rentrez en Écosse
demain et que vous ne fêtez pas Thanksgiving là-bas, mais si c’était le cas, pour
quoi souhaiteriez-vous dire merci ?
Janine regarde autour d’elle, s’arrêtant sur la statue, la skyline, puis la baie de
New York.
– Je suis reconnaissante pour le monde qui nous entoure. Notre terre. Regardez-
la, où qu’on soit, que ce soit à New York ou dans les collines verdoyantes qui
entourent ma maison, en Écosse, la beauté est partout où l’on regarde.
Lorsque je finis de parler avec Janine, je prends sa carte de visite pour jeter un
œil à ses romans, et je lui donne une carte cadeau. Il est temps de débarquer,
mais avant que les touristes ne disparaissent en direction de la Statue de la
Liberté, j’arrête les Martins, une famille canadienne qui est à New York pour la
première fois.
– Merci, Jacob et Amanda Lee Martin, de me permettre de vous filmer, vous et
vos enfants, avant que vous ne rendiez visite à cette superbe dame. Tout d’abord,
est-ce que vous pouvez dire à nos spectateurs d’où vous venez ?
Amanda tient sa fille d’environ deux ans sur sa hanche tandis que son mari
plaque les jumeaux contre lui.
– On vient d’Ottawa, au Canada, dit-elle fièrement.

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– Est-ce que votre voyage vous plaît, jusqu’à maintenant ?
– Absolument, même s’il n’est pas facile de visiter une ville aussi grande avec
nos deux garnements et notre petite fille, répond Jacob en riant.
– Je n’en doute pas ! Il y a plein de choses à voir, c’est clair. Vous êtes prêts à
découvrir notre superbe statue, les garçons ?
Ils lèvent un petit poing en l’air en poussant un cri synchronisé.
– Alors, c’est parfait. Dites-moi Amanda, de quoi êtes-vous reconnaissante, cette
année ?
Ses yeux caramel se remplissent d’émotion, et elle sourit.
– Pour ma famille. Ils sont tout ce dont j’ai besoin.
Je souris et tends le micro à son mari.
– Et vous, Jacob ?
– La même chose, dit-il en haussant les épaules. Je suis comblé par ma femme et
nos enfants.
Je sais ce que nos spectateurs voudront savoir, alors je m’accroupis devant les
jumeaux.
– Et toi ?
– Les bonbons ! s’exclame-t-il d’une voix aiguë.
– C’est une très bonne réponse, je dis en riant. Et toi ?
– Mon vélo. J’adore mon vélo. Il est trop cool et il a un éclair sur le devant, dit-il
simplement, faisant rire tous les adultes.
Je me relève et j’approche le micro de la petite fille aux superbes joues potelées.
– Et toi, ma puce. À qui ou à quoi tu veux dire merci ?
Au lieu de répondre, elle fourre son éléphant rose dans mon visage, devant la
caméra.
– Tu veux dire merci à ton éléphant ?
Elle hoche la tête avant d’enfouir son visage dans le cou de sa mère.
– Eh bien, merci au clan Martin de nous avoir dit merci !
Les Martin sont plus que reconnaissants pour les cinq cents dollars en carte Visa.
Ils me confient que ce voyage était un rêve, mais que leurs économies en ont pris
un sacré coup. Cet argent va leur permettre de préparer leur prochain voyage de
rêve.

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Je décide de faire la dernière interview dans le grand hall d’Ellis Island. J’y
trouve un homme âgé, debout à côté de deux autres hommes, dont l’un tient la
main d’un garçon de huit ou neuf ans.
– Excusez-moi, est-ce que cela vous dérangerait que je vous interroge pour une
séquence télévisée ? Il s’agit de dire ce pour quoi on est reconnaissant à
Thanksgiving.
L’un d’eux parle en allemand au plus âgé, qui hoche la tête.
– Oui, vous pouvez nous poser des questions, nous dit-il, et je traduirai à mon
opa, mon grand-père.
Je passe quelques minutes à discuter avec eux et je découvre qu’ils représentent
quatre générations de Kappmeier. Robert Kappmeier a plus de quatre-vingt-dix
ans, mais il ne les fait pas. Son fils, Richard, a l’air en très bonne santé aussi et
ne fait pas ses soixante ans non plus. Il y a ensuite Erik, quarante ans, et son fils,
Nolan, huit ans. Quand j’apprends pourquoi ils sont ici, je ne peux retenir mes
larmes. Wes caresse mon dos tandis que je fais de mon mieux pour réparer mon
maquillage.
– Je suis donc à Ellis Island avec quatre générations de Kappmeier. Merci de
vous être arrêtés pour me parler.
Je parle d’abord au plus âgé, Robert.
– Je vous remercie d’accepter de me parler, Monsieur Kappmeier.
Il hoche la tête. Apparemment, après avoir pris sa retraite, il a décidé de ne
parler que dans sa langue maternelle, même s’il parle bien l’anglais.
– D’après ce que votre fils et votre petit-fils m’ont dit, vous êtes arrivé à Ellis
Island pour la première fois en 1949, à peine cinq ans avant qu’elle ne ferme en
1954.
Il répond en allemand et son fils traduit.
– Oui, c’était le plus beau jour de ma vie.
– Et pourquoi ça ?
– Parce que j’étais libre. L’Allemagne venait de survivre à la défaite des nazis, et
le pays était déchiré. Beaucoup de membres de ma famille avaient été faits
prisonniers. J’avais promis à ma mère, qui avait perdu mon père dans la guerre,
que je trouverais un moyen d’être libre. Alors, j’ai quitté mon pays, ma maison,

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et je me suis construit une nouvelle vie ici, où j’étais en sécurité, où je pouvais
travailler, aimer et fonder ma propre famille.
– Est-ce que vous diriez que vous êtes reconnaissants envers les États-Unis pour
l’opportunité que vous avez eue ?
Il hoche la tête et prend ma main pour me rapprocher de son arrière-petit-fils,
Nolan.
– Je suis reconnaissant pour ma liberté, celle de Richard, mon fils, pour la liberté
d’Erik, mon petit-fils, et celle de Nolan, mon arrière-petit-fils. Voyez-vous, en
tant qu’Américains, ils seront toujours libres.
Je les remercie de nous avoir raconté leur histoire et je leur donne les cartes
cadeaux, qu’ils souhaitent offrir à une œuvre caritative.
Je regarde la caméra, les larmes aux yeux, et je décide que c’est la fin de la
séquence.
– Aujourd’hui, vous avez donc entendu les gens de New York. Des familles, des
pères célibataires, des touristes, et plusieurs générations d’Américains. Ils ont dit
merci à leurs femmes, leurs maris, leurs enfants, leurs parents, au monde et,
enfin, à la liberté que nous offre notre beau pays. J’aimerais que nous prenions
quelques secondes pour remercier tous les vétérans, car c’est grâce à eux que
nous sommes libres de dire merci à tout ceux qu’on aime aujourd’hui. J’aimerais
que chacun d’entre vous remercie un proche, lui fasse part de sa joie ou de son
amour. Mais surtout, je voudrais que vous soyez reconnaissants pour tout ce que
vous avez. Il ne me reste plus qu’à vous dire merci d’avoir regardé cette
séquence. Et jusqu’à la semaine prochaine, vivez en beauté !
Le cameraman a tout juste levé le pouce pour me dire que c’est dans la boîte que
Wes m’empoigne par la taille et m’attire contre lui.
– Je suis tellement fier de toi, ma chérie. Cette séquence va toucher beaucoup de
gens.
Je me blottis contre lui, gravant ce moment dans ma mémoire pour ne pas
oublier les sentiments d’unité, d’amour et de compassion qui me comblent.
Aujourd’hui, je suis fière de moi.
– Il faut fêter ça ! dit Wes en m’embrassant dans le cou avant de mordiller le
lobe de mon oreille.

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Une bouffée de chaleur m’envahit et picote entre mes jambes.
– Qu’est-ce que tu as en tête ? je demande en haussant un sourcil.
– Toi, moi, une bouteille de champagne, des fraises, de la chantilly et un lit
douillet.
– J’étais déjà partante à toi et moi, je réponds en souriant.

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Chapitre 7

Nous venons à peine de couper le moteur de notre voiture de location qu’une


petite fille aux cheveux blonds dévale les marches du perron, les bras grands
ouverts, son père derrière elle.
– Isabel, laisse ta tante sortir de la voiture, ma puce ! s’exclame mon frère.
Aussi excitée qu’elle, je bondis hors du véhicule pour attraper la fillette en plein
vol.
– Tante Mia ! s’écrie-t-elle.
L’entendre m’appeler ainsi officiellement, consciente que nous sommes liées par
le sang, est une des choses que je préfère. Je serre ma nièce dans mes bras, la
laissant s’accrocher à moi comme un koala. Elle pose ses petites mains à plat sur
mes joues.
– C’est moi qui suis la reine ! crie-t-elle.
– Ça marche, ma chérie, je réponds en riant. Tu veux dire bonjour à ton oncle
Wes ?
Elle écarquille les yeux.
– J’ai un Tonton Wes ? demande-t-elle d’un air joyeux et excité.
Je la fais sauter dans mes bras pour la tenir sur une hanche.
– Ouaip !
Wes vient vers nous et serre sa petite main.
– Bonjour Isabel, je m’appelle Weston.
– Beurk, c’est bête comme prénom, dit-elle en souriant en coin.
– Bell ! gronde Max.
Je secoue la tête et le regarde en fronçant les sourcils. Isabel n’est qu’une enfant,
sa remarque est innocente.

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– Tu sais ce qui est encore plus bête ? répond Wes en riant.
Elle ferme la bouche et lève les yeux vers le ciel.
– Hmm, les hot-dogs ?
Wes et moi éclatons de rire alors que Max couvre sa bouche pour ne pas
l’encourager en riant.
– Quoi ? s’exclame-t-elle d’un air indigné. Papa dit que ça veut dire « chien
chaud ». Mais ça n’a rien à voir avec un chien, c’est une saucisse !
Je dois avouer que sa remarque est tout à fait logique.
– Tu n’as pas tort, concède Wes, mais je voulais dire que ce qui est bête, c’est
qu’il y a un numéro dans mon nom !
Isabel ouvre la bouche et écarquille les yeux.
– Tu plaisantes !
– Pas du tout ! Mon vrai nom est Weston Charles Channing le Troisième,
répond-il en levant trois doigts.
– Waouh. C’est… trop cool ! Papa, je peux avoir un numéro dans mon nom ? Je
voudrais le cinq.
Cette fois, Max s’autorise à rire.
– Chérie, tu as déjà un prénom, et non, on ne peut pas y ajouter de chiffre. Tu
veux le cinq parce que tu auras cinq ans en avril, tu peux attendre jusque-là ?
– Non papa, je ne pense pas, c’est trop long.
Elle fait une moue boudeuse et je l’embrasse sur la joue, respirant son odeur de
sirop d’érable et de Crayola.
– Rentre, Bell, et dis à maman que ta tante et ton oncle sont là, d’accord ?
Elle agite les jambes et je l’ai à peine posée qu’elle court à toute vitesse dans la
maison. Les enfants sont-ils vraiment obligés de courir partout ?
J’avance vers mon frère et me jette dans ses bras, le serrant contre moi aussi fort
que possible. Il sent la lessive et le cuir, un parfum familier et réconfortant.
– Je suis content de te revoir, sucre d’orge. Ça compte beaucoup pour moi de
t’avoir pour Thanksgiving, dit-il d’une voix rauque.
Je le sais, car Maxwell Cunningham est un père de famille avant tout. Il est plein
aux as, mais il dirait que c’est l’amour de sa famille qui fait sa richesse, pas les
millions sur son compte en banque.

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– Maxwell Cunningham, je veux te présenter mon fiancé, Weston Channing.
Max sourit jusqu’aux oreilles et tend la main à Wes. Mon homme l’a à peine
prise que Max le plaque contre lui, comme le font les mecs, et ils se tapent dans
le dos.
– Je suis vraiment ravi de te rencontrer, frangin. Mia était morte d’angoisse
quand tu as disparu. Tu dois être content d’être de retour aux États-Unis et de
retrouver notre nana.
Je ne l’aurais jamais cru sans le voir, mais Wes rougit. Il secoue la tête, passe
d’un pied sur l’autre et hoche la tête, gêné. Je remarque également qu’il ne
reprend pas Max d’avoir dit « notre nana » comme il l’a fait avec Anton. Voilà
qui est intéressant.
– Ouais, c’est génial d’être de retour. Je pensais à elle tous les jours, dit Wes en
passant un bras autour de ma taille.
– Parfois, on doit traverser un enfer pour se rendre compte de notre chance. C’est
ton cas, et j’en suis vraiment navré, mais je suis content que tu sois de retour au
pays des hommes libres et courageux. Bienvenue sur mon ranch, dit mon frère.
Wes regarde autour de lui et son regard s’illumine.
– C’est magnifique. Toutes ces terres sont à toi ? demande-t-il en désignant les
arbres au loin.
– Certaines appartiennent à Cunningham Oil & Gas, mais j’ai largement ce qu’il
me faut. Tu vois la grange, là-bas, avec le « J » ? Ça, c’est le ranch des Jensen.
Tu connais Aspen, bien sûr.
– Bon sang, j’avais oublié ! J’étais ici pour leur mariage, il y a deux ans. Mec, on
a dû se rencontrer, dit-il à Max, qui rit en hochant la tête.
– Ouais, sans doute. Allez, entrez. Cyndi à hâte de te rencontrer, dit-il en
montant les marches, mais Wes l’arrête.
– Et le terrain, là-bas ? demande Wes en arrêtant Max.
– Celui-là est à moi, aussi. J’ai vendu à Hank et Aspen les prés qui longent leur
ranch quand ils se sont mariés, et ils ont promis de ne pas les vendre et de ne
jamais construire dessus. J’ai aussi quelques hectares autour de chez moi. Il y a
quelques vieilles maisons dessus, mais je ne sais pas s’il vaut mieux que je les
démolisse ou que je les garde pour la famille.

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Wes hoche la tête et empoigne l’épaule de Max.
– Tu devrais les garder pour la famille, dit-il.
– Je crois que tu as raison, répond Max avec un regard complice. Elles ont
besoin d’être retapées, ajoute-t-il.
Je ne sais plus de quoi ils parlent et je les double, ennuyée par leur conversation.
J’entends quand même Wes dire, avant d’ouvrir la porte :
– Le travail ne me fait pas peur.
Peut-être que ça devrait m’inquiéter, mais honnêtement, j’ai trop hâte de
rencontrer mon neveu pour m’intéresser à des champs.
– Allez les mecs, je veux voir bébé Jack !
*
* *
C’est officiel. Il n’y a rien de plus beau que de tenir un bébé de quelques
semaines. Le plus cool, c’est que ses yeux ont l’air d’être verts comme les
miens, ceux de Maddy et ceux de Max.
– Je crois qu’il pourrait être brun, je dis en regardant ses bouclettes brunes.
– Tu crois ? répond Cyndi en caressant sa tête.
Jack sent la présence de sa mère et se met à téter dans le vide en remuant la tête.
– Eh bien, quelqu’un a faim, on dirait, chantonne-t-elle en prenant Jack.
Elle prend un plaid sur le canapé, couvre son épaule et son bras, gigote, puis
j’entends le bébé téter. Waouh, elle est rapide.
– Ça fait mal ? je demande.
– Je ne vais pas te mentir, Mia, ça fait un mal de chien les premiers jours. Tes
tétons gonflent et se mettent à saigner, mais heureusement, la connexion que tu
ressens avec ton bébé t’aide à supporter la torture.
– Torture ? je répète en déglutissant.
– Je te promets que ça en vaut la peine, me rassure-t-elle en souriant. À ce
propos, je dois te féliciter, apparemment, dit-elle en regardant ma main gauche.
– Max ne t’avait rien dit ?
– Bien sûr que si, tu plaisantes ! Il a attendu deux secondes pour me le dire. En
gros, il avait à peine raccroché qu’il criait la nouvelle à travers la maison. Il a
réveillé Jack et Isabel de leurs siestes.

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Je regarde autour de nous pour m’assurer que nous sommes seules.
– Si papa ne se réveille pas, je vais demander à Max de m’accompagner à
l’autel.
Les yeux de Cyndi se remplissent de larmes.
– Il va être fou de joie, dit-elle.
– Oh non, ne pleure pas ! je m’exclame.
– Chérie, ce sont les hormones. Je pleure pour un rien. Hier, je regardais la télé
et il y avait une pub pour un médicament contre les brûlures d’estomac. Il m’a
suffi de repenser à celles que j’ai subies quand j’étais enceinte pour fondre en
larmes. Mais je vais bien, ne t’en fais pas.
Waouh. La grossesse chamboule vraiment, on dirait. Je me demande comment je
le vivrais, moi ? J’imagine Weston tenir notre fils ou notre fille et je décide que
oui, je supporterais n’importe quoi pour avoir le bébé de Wes dans mes bras.
– Vous allez vous arrêter là ou vous voulez d’autres enfants ? je demande alors
qu’elle enlève le plaid et repose Jackson sur le canapé sans le réveiller.
– Non, je crois qu’on en aura encore deux.
– Deux ? ! Vous voulez quatre enfants ! je m’exclame en ouvrant grand les yeux.
– Max en veut six ! répond-elle en souriant, mais nous sommes parvenus à un
compromis. Il veut une grande famille autour de lui. Il dit que ça lui donne
l’impression de ne pas travailler pour rien, et il adore être accueilli par des cris
d’enfants quand il rentre à la maison le soir. Il a l’intention de leur donner ton
nom et celui de Maddy aussi, et je suis d’accord.
– Cyndi, vous avez déjà fait ça en donnant Saunders comme deuxième prénom à
Jackson. Vous n’avez pas à donner nos prénoms à vos enfants. Vraiment.
– On veut que nos enfants connaissent leurs tantes et qu’ils sachent que leurs
prénoms sont ceux de gens bien. Qui de mieux que leurs tantes ?
Des centaines d’autres personnes me viennent en tête, mais il ne sert à rien de
rentrer en désaccord avec elle. J’ai très vite appris que quand Max et Cyndi ont
décidé quelque chose, ils ne reculent devient rien ni personne. Ils veulent une
famille et ils feront tout pour elle. C’est une autre raison pour laquelle je suis
reconnaissante à cette année qui vient de s’écouler.

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J’entends une voiture s’arrêter dans la cour puis les pas d’Isabel dans le couloir,
annonçant l’arrivée de Maddy et Matt.
*
* *
Wes et moi marchons main dans la main à travers les bois de mon frère.
– Max est un mec génial, dit Wes en ouvrant la voie pour contourner un tronc
couché.
Je souris en lui serrant la main.
– Je suis d’accord, il est incroyable.
– Et ta sœur… waouh. C’est comme rencontrer l’exact opposé de toi, et en
même temps vous êtes les mêmes, dit-il en fronçant les sourcils.
– Maddy n’est qu’amour. Elle a l’esprit libre, mais plutôt que d’être une hippie
comme la plupart des gens qui pensent comme elle, elle est intelligente et c’est
un rat de bibliothèque qui ne se laisse jamais abattre. Je crois que c’est ce qui
attire Matt. Il est plus réservé et conservateur, mais sa famille est très gentille et
ils sont à fond derrière Maddy et lui.
– C’est bien, répond Wes en hochant la tête. Ça doit être agréable de savoir que
tu n’as plus à t’occuper d’elle.
– Je ne sais pas. On pourrait le penser, mais j’ai passé ma vie à m’occuper de ma
sœur, à m’assurer que tout était aussi parfait que possible. D’une certaine façon,
c’était mon but. Maintenant, elle est major de sa promo à la fac et elle s’apprête
à avoir sa licence. Max a déjà payé les prochaines années de fac pour qu’elle
puisse aller en master et en doctorat, les Rains paient leur appartement pour
qu’ils n’aient pas à travailler et qu’ils puissent se concentrer sur les cours, et
maintenant qu’elle a de l’argent – encore une fois grâce à Max – elle n’a plus
vraiment besoin de moi.
Wes s’arrête brusquement. Nous sommes au milieu d’un petit pré, à un kilomètre
du ranch de Maxwell que j’aperçois tout juste à travers les arbres.
– Est-ce que tu te sens inutile ? demande-t-il.
– Pas tout à fait. Inutile n’est pas le mot. Je dirais plutôt qu’elle n’a plus besoin
de moi, et je n’en ai pas l’habitude.

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– Je n’irais pas jusqu’à dire qu’elle n’a pas besoin de toi, répond Wes. J’ai su dès
son arrivée que tu étais son point de repère. Même si elle connaissait tous les
gens dans la pièce en dehors de moi, c’est vers toi qu’elle est allée. C’est à côté
de toi qu’elle s’est assise pour dîner et tout au long de la soirée. Mia, tu es bien
plus que sa sœur – tu es le centre de son univers – de la même façon que tu es le
mien.
Waouh. Ce que je peux aimer cet homme, il sait toujours quoi dire pour me
remonter le moral.
– Je sais qu’elle grandit et que les choses doivent changer. C’est juste difficile.
Je suis responsable d’elle depuis qu’elle a cinq ans.
La mâchoire de Wes se contracte et son regard devient glacial.
– Tu n’aurais jamais dû être responsable de ta sœur. Tu n’avais que dix ans. Ta
mère et ton père ont pris de mauvaises décisions, Mia. Et même si Madison et toi
vous en sortez bien, tu n’aurais pas dû avoir à faire une croix sur ton enfance
pour ça. Ce n’est pas comme ça qu’on va élever nos enfants.
Tiens, c’est le moment parfait pour aborder le sujet.
– Alors tu veux des enfants ? je demande en essayant d’avoir l’air nonchalant.
J’aimerais avoir un enfant, ou même deux, mais ce n’est pas vital pour moi,
comme ça peut l’être pour Cyndi ou d’autres femmes que je connais.
– Bien sûr, pas toi ? demande Wes en levant soudain la tête.
Je vide tout l’air de mes poumons, réalisant soudain que je retenais ma
respiration.
– Avec toi, si.
Il vient vers moi et passe ses bras autour de ma taille.
– En fait, je n’y avais jamais vraiment pensé avant d’être avec toi. Ça en dit long
sur notre relation.
Il sourit jusqu’aux oreilles, mon cœur bat plus fort et j’ai subitement envie de lui.
– Moi non plus. Du moins, pas de façon sérieuse. Quand j’étais pris en otage et
que je pensais à ma vie, je t’imaginais sans cesse avec un ventre rond, ou berçant
notre fils dans tes bras, ou encore tenant la main de notre fille. Ça m’a donné de
l’espoir, dit-il avant de se racler la gorge. J’étais obsédé par ce futur avec toi et
terrifié de ne jamais le vivre. C’est pour ça que je veux t’épouser tout de suite. Je

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veux qu’on profite de chaque jour qui nous est offert et qu’on affronte ensemble
toute nouvelle épreuve.
Je passe ma main dans ses cheveux blond foncé.
– Ça me plaît, je dis en me levant sur la pointe des pieds pour l’embrasser.
Nous sommes au milieu d’un pré et nous nous embrassons comme si c’était la
dernière fois. Le baiser est féroce, passionné, sauvage. Nous nous enflammons
peu à peu et il n’y a rien ni personne pour nous arrêter. Wes promène ses mains
partout, caressant mon dos puis mes fesses. Il me soulève comme si je ne pesais
rien et j’entoure sa taille avec mes jambes tout en plongeant ma langue loin dans
sa bouche. Lorsque j’ouvre les yeux, je découvre que Wes nous ramène vers les
arbres.
Quelques secondes plus tard, nous sommes cachés par les arbres et je suis
adossée à un tronc énorme, bien plus large que nos corps. Wes repose mes pieds
par terre et se dépêche de défaire ma braguette.
– Ici ?
Je regarde autour de nous, m’assurant que personne ne peut nous voir.
Wes s’agenouille pour enlever mes baskets et baisser mon jean et mon string, me
laissant en pull et en manteau. Il rapproche son visage de mon entrejambe et
inspire.
– Bon sang, j’adore ta façon d’enfler quand tu es excitée.
Il lève les yeux vers moi et tire la langue pour laper mon clito. Je gémis en
empoignant ses cheveux.
– T’es complètement fou, je chuchote.
– Et toi, tu es délicieuse. Maintenant appuie-toi à l’arbre et profite.
Il écarte mes lèvres avec ses pouces et me lèche de bas en haut. Une minute plus
tard, j’appuie déjà sa tête contre moi, me frottant à lui éhontément, cherchant
désespérément à atteindre ce point qui me fera chavirer. Il palpe ma cuisse avant
de la soulever et de la poser sur son épaule pour lui donner un meilleur accès.
– Mon Dieu, Wes, je vais jouir.
Il accélère les mouvements de sa langue, la plongeant aussi loin que possible. Je
fourmille des pieds à la tête, sur le point de jouir.
– Bébé, je gronde.

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Il pousse un grognement, m’écarte davantage et suce mon clitoris. C’est tout ce
qu’il fallait. Chacun de mes pores explose et crépite de plaisir tandis qu’une
vague de chaleur déferle en moi. Mon orgasme embrase mon sang, mais soudain
ses lèvres disparaissent.
– Non ! je m’écrie d’une voix désespérée.
Je suis loin d’en avoir fini avec lui ! Cependant, je n’avais aucune raison de
m’inquiéter. Je ne sais comment, il a réussi à défaire sa braguette, extirper sa
grosse verge de son pantalon, et il m’empale contre l’arbre, d’un seul coup de
bassin puissant. Il me soulève et je croise les chevilles dans son dos, voulant le
rapprocher encore plus de moi. Il passe une main derrière ma tête pour me
protéger de l’écorce.
– Je vais te prendre et te refaire jouir. Je veux avaler ton orgasme quand il quitte
tes lèvres, murmure-t-il d’une voix rauque contre ma bouche.
Il y plonge sa langue et je sens mon excitation sur lui, à la fois sucrée et salée. Il
s’attaque ensuite à mon cou, qu’il mord et suce, et un grognement m’échappe.
– Je t’aime, Wes. Je t’aime tellement que c’en est douloureux.
Il joue avec mon corps contre cet arbre comme un bûcheron qui coupe du bois.
Toutefois, c’est ma chatte qu’il transperce avec sa queue, comme une hache qui
s’abat sur un tronc de manière brutale, sans répit, sans pitié.
– Jouis, ordonne-t-il en serrant les dents et en accélérant ses va-et-vient.
– Chérie, il faut que tu bouges, je supplie.
Il dessine des cercles avec ses hanches et quand je gémis, indiquant qu’il a
touché le bon endroit, il sourit d’un air presque machiavélique. Il se retire
jusqu’au gland, lentement, puis il s’enfonce en moi, percutant ce point sensible
qui me fait hurler de plaisir.
Les allers-retours de Wes sont si rapides que je ne suis plus son rythme. Il frappe
mon point G chaque fois sans s’arrêter, jusqu’à ce que mon corps se liquéfie et
que je hurle en regardant le ciel.
Wes jouit juste après moi, déversant sa semence chaude en moi, et je sens le
poids de son corps m’écraser contre l’écorce. Épuisés, rassasiés, nous restons
ainsi un long moment, connectés contre un arbre géant dans un bois du Texas.

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Chapitre 8

Nous nous nettoyons comme nous pouvons, puis Wes prend ma main et nous
rentrons chez mon frère.
– Je vais acheter cette propriété à Max. On va s’approprier cette maison, la
rénover ou bien la démolir pour y construire la maison de tes rêves, dit Wes.
Mon cerveau est encore embué par le plaisir exquis qu’il vient de vivre, plaquée
contre un arbre, et les paroles de Wes mettent un moment à lui parvenir.
– Pardon, je dis en m’arrêtant. Je suis désolée de ne pas te suivre alors que tu
viens de me faire grimper au tronc de cet arbre. Qu’est-ce que tu as dit ?
Wes se lèche les lèvres, comme s’il pouvait encore me goûter, et sans doute est-
ce le cas. De mon côté, j’ai la marque de l’écorce sur mon dos, et quand je bouge
les épaules, je sens mon pull frotter ma peau irritée.
– Je vais demander à Max si je peux lui acheter cette parcelle, à côté de la
sienne. Il a des centaines d’hectares et il m’a dit que celle-ci et une autre, plus
loin, étaient des fermes, et qu’elles sont toutes les deux inoccupées.
J’essaie toujours de comprendre ce qu’il dit.
– On n’a même pas vu la maison et on a à peine vu le terrain, comment tu sais
que tu veux y vivre ?
Wes regarde autour de lui, les bois que nous venons de quitter, le champ qui
s’étend jusqu’au ranch de Maxwell, et il hausse les épaules.
– Peu importe l’état de la maison. On peut construire autre chose si elle ne nous
plaît pas. Ce que je dis, c’est que je veux une maison de famille, loin du bling-
bling de Los Angeles.
– Attends une minute, tu veux dire que tu veux qu’on quitte Malibu ? Mais tu
adores la plage ! Moi aussi ! je m’exclame en imaginant qu’on va quitter notre

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petit cocon.
– C’est vrai, mais on a de l’argent. Beaucoup. Plus qu’on en a besoin. Vu la
tournure que prend ta carrière, tu vas vouloir un endroit où t’échapper quand la
vie californienne deviendra trop prenante. Et puis, tu l’as dit toi-même, Madison
va déménager ici quand elle aura fini la fac.
– Oui, et à ce propos, elle m’a parlé de venir ici dès la fin de sa licence. Max va
l’inscrire à la fac pour qu’elle commence tout de suite à travailler à Cunningham
Oil & Gas. La famille de Matt va venir s’installer dans le coin, aussi.
Le visage de Wes s’illumine. Apparemment, plus on en parle, plus il est emballé.
– C’est parfait ! Ils pourront prendre la propriété de l’autre côté de chez Max.
Matt a dit que lui et sa famille voulaient une ferme. Ils pourront travailler leur
terrain et le nôtre. Mia, comme ça, on aura une maison secondaire, on pourra
venir tous les mois. Tu verras Isabel et Jackson grandir et tu verras régulièrement
ton frère et ta sœur. C’est gagnant-gagnant !
Jamais je n’aurais osé rêver d’un tel scénario. Mon amour pour cet homme est
sans limite.
– Tu ferais ça pour moi ? je demande d’une voix émue.
Il secoue la tête.
– Non, je ferais ça pour nous. Tu ne veux pas être loin de ta sœur, et moi je ne
veux pas être loin de ma famille. De cette manière, on aura un vrai chez-nous
dans les deux endroits. On prévoira de venir ici une fois par mois, et quand on ne
tourne pas, on viendra plusieurs semaines d’affilée. Je suis sûr que ça ne gênera
pas Cyndi de jeter un œil sur la maison quand on n’est pas là.
Il ne l’avait pas vu venir, mais il m’attrape néanmoins quand je saute dans ses
bras, l’entourant avec mes jambes.
– Je t’aime, je t’aime, je t’aime, je t’aime, je t’aime ! je m’exclame en ponctuant
mes mots de baisers sur ses joues, son front, son menton, ses yeux. J’ai hâte de
t’épouser ! je crie en m’emparant de sa bouche.
Heureusement, Wes apprécie ma folie et éclate de rire, jusqu’à ce qu’il soit trop
occupé avec ma bouche.
*
* *

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– Oui ! Je ne plaisante pas. Non, Maman. On veut une petite cérémonie intime
sur notre plage de Malibu et une réception chez vous.
Wes éclate de rire et se passe la main dans les cheveux. Depuis qu’il a appelé sa
mère pour lui annoncer qu’on allait se marier rapidement, il n’a pas arrêté de
sourire.
– Je sais, c’est dans six semaines. Je vais engager quelqu’un pour tout organiser.
Non, Maman, tu n’as pas à… Maman, je ne t’ai pas appelée pour te demander de
t’en occuper.
Qu’il parle pour lui ! Il est hors de question que j’organise ce mariage ! Si ça ne
tenait qu’à moi, on se dirait oui sur la plage et, tout de suite après, on baiserait
comme des lapins dans notre lit. Je n’ai pas besoin d’un gâteau et de tout le
tralala. Je veux juste Wes, c’est la seule chose dont j’ai besoin.
Wes se tourne et me regarde. Je suis assise sur le lit, jambes en tailleur, penchée
en avant, les coudes sur les genoux, menton dans les mains. Je le regarde faire
les cent pas en souriant jusqu’aux oreilles.
– Je sais que c’est dingue, mais maman, je suis fou amoureux. Non, ce n’est pas
trop de pression pour moi, promis. Je vais très bien. Justement, ça va m’aider à
aller mieux. Épouser la femme que j’aime va m’aider à guérir, j’en suis certain.
Wes est persuadé que je suis la raison pour laquelle il va aussi bien après sa prise
d’otage. Moi, je pense plutôt que c’est grâce à sa psy, même s’il doit encore
travailler sur certaines choses, comme cette jalousie et ce besoin pressant de
tracer tout notre avenir maintenant. La bonne nouvelle, c’est qu’il n’a pas eu de
cauchemar depuis plus d’une semaine. Il dort mieux que jamais, ici, au Texas. À
la maison, il se réveille en sursaut, marche sur la plage et écoute l’océan jusqu’à
ce qu’il soit assez fatigué pour retourner se coucher. Je l’ai trouvé trop souvent à
faire les cent pas sur la plage, mais pas ici. Chez mon frère, avec tout mon clan
sous le même toit, il dort comme un bébé. Peut-être a-t-il raison de vouloir venir
vivre au calme. En tout cas, la sérénité de ce lieu semble lui faire du bien.
– D’accord, tu peux t’occuper de la réception, si tu insistes, dit Wes en s’arrêtant
et en me regardant. Mia, quelles couleurs veux-tu ?
– Je ne sais pas, je réponds en fronçant les sourcils. Il faut des couleurs ? Pour
quoi faire ?

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– Maman dit que tu dois choisir deux couleurs pour qu’elle sache quelles
décorations acheter.
– Elle peut faire comme elle veut, je réponds.
– Maman, non. Mia n’est pas ce genre de fille. Vraiment, tu peux choisir ce que
tu veux, elle s’en fiche. Maman… gronde Wes en reprenant ses cent pas.
L’entendre discuter avec sa mère de quelque chose qui, apparemment, relève de
ma responsabilité me déplaît.
– Vert pâle et crème ! je m’exclame.
– Attends, maman, dit Wes. Quelles couleurs, ma chérie ?
Timidement, je le regarde en triturant mes doigts.
– Je pense qu’un thème vert anis et crème pourrait être joli.
Wes sourit jusqu’aux oreilles. Bon sang, il est tellement facile à satisfaire.
– Mia dit vert anis et crème. Ouais, des fleurs simples. Ce que tu veux. Oui, ce
que tu veux, répète-t-il en désignant son téléphone et en faisant une grimace,
comme si sa mère était folle. Mia et moi nous nous occupons de la cérémonie.
Oui, je m’occupe des chaises, de la tonnelle et de tout le reste. Occupe-toi juste
de la réception, maman. Combien de gens ?
Je fais vite le compte dans ma tête : Maddy, Matt, Maxwell, Cyndi et les enfants,
Ginelle, Taï et Amy, Anthony et Hector, Mason et Rachel, Warren et Kathleen,
Alec, Anton et Heather, Tante Millie, mon père s’il se réveille, et peut-être une
ou deux autres personnes.
– Disons vingt-cinq pour moi.
– Vingt-cinq. Attends, maman, dit-il en plaquant le téléphone contre son torse.
C’est tout ? Juste pour la cérémonie, n’est-ce pas ?
– Non, vingt-cinq en tout.
Wes cligne des yeux.
– Maman, on veut un petit mariage. Mia n’invite que vingt-cinq personnes, donc
tu vas devoir limiter mes invités à la famille uniquement. Oui, je suis sérieux.
Je pousse un grognement dans ma tête. Je n’ai même pas encore regardé les
robes de mariée, et ma famille restreinte me donne l’air d’une looser auprès de
ma future belle-mère.

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– Comment ça qui ? On en parlera plus tard, maman. Arrange-toi pour que je
n’aie que trente invités à la cérémonie et invite qui tu veux à la réception, mais
on veut que ce soit simple. Mia et moi ne voulons pas d’un mariage glamour. On
veut un bon repas, de l’alcool, une piste de danse, et on sera les plus heureux du
monde, n’est-ce pas, Mia ?
Je souris jusqu’aux oreilles, ravie que mon homme me connaisse si bien.
– C’est ça ! je m’exclame en lui soufflant un baiser.
– Bon, je dois y aller. Joyeux Thanksgiving à toi et papa et à la famille. Dis à
tout le monde que je les aime et qu’on sera bientôt de retour. Oui, on sera là pour
Noël. Je t’aime aussi.
Wes raccroche et jette le téléphone sur le lit avant de me plaquer sur le matelas.
– Tu as de la chance que je t’aime autant, parce que c’était une torture.
– Parler à ta mère était une torture ?
– Non, mais lui parler de l’organisation du mariage alors que ni toi ni moi
n’avons la moindre préférence, c’était un enfer. Tu me le revaudras, déclare-t-il
en frottant son bassin contre le mien.
Je passe mes jambes autour de sa taille pour le rapprocher de moi.
– Mmm, mais comment diable vais-je pouvoir te rendre la pareille ? je demande
en enroulant une mèche de ses cheveux sur mon doigt.
– Sois mon esclave sexuelle jusqu’à la fin de tes jours, répond-il du tac au tac.
– Vilain garçon, je rétorque en souriant. Je crois qu’on devrait pouvoir trouver
un compromis.
– Non, je te veux à vie.
Je plonge mes mains dans ses cheveux et l’embrasse.
– Hmmm, je pense que ça peut le faire.
– Non, c’est toi que je vais me faire.
– Encore cette fichue blague ! je m’exclame en riant.
– C’est un classique, mais elle est tellement bonne, chuchote-t-il en mordillant
mon cou.
– Tu veux dire comme une branlette ?
Il relève la tête en souriant.

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– Quelle comparaison parfaite. Une branlette est aussi un classique qui est très
bon. Est-ce que je peux en avoir une maintenant ?
Je plonge ma main entre nous, mais j’ai à peine défait le bouton de son jean que
quelqu’un frappe à la porte, nous faisant sursauter.
– Cyndi dit qu’il est l’heure de passer à table ! Tout le monde descend ! dit Max
à travers la porte.
Au moins, il a la décence de ne pas ouvrir, je ne me rappelle pas si j’ai fermé à
clé ou non.
Un peu plus loin dans le couloir, je l’entends frapper à la porte de ma sœur.
– À table !
Wes m’aide à me lever.
– Ah, Maman dit que Thanksgiving aura lieu chez elle l’an prochain.
– Dans ce cas, c’est toi qui l’annonceras à Max. De préférence quand je ne suis
pas là.
– Tu n’es qu’une poule mouillée !
Il prend ma main et nous descendons à la salle à manger pour notre premier
Thanksgiving de couple. Le premier Thanksgiving de toute ma vie.
Le seul problème, c’est que papa me manque. Il adorerait être assis à une grande
table avec sa famille. Maddy et moi n’avons jamais eu ça durant notre enfance,
même si, à sa façon, il a essayé. Je me souviens de plusieurs années où il a
acheté du poulet frit au KFC, mais c’était seulement quand il n’était pas trop
bourré et qu’il n’oubliait la fête tout entière.
Cependant, ça n’empêche qu’il me manque.
*
* *
Cyndi et Max se sont surpassés. Je ne sais pas comment ils ont fait, avec un
nouveau-né. Dans la salle à manger, la table pour seize personnes est dressée
pour six adultes et une enfant. Jackson dort dans son couffin, en tête de table, à
côté de Max. Un air de Chopin flotte dans la pièce, je ne connais le compositeur
que parce que c’est mon préféré, même si Wes m’en fait découvrir de nouveaux.
Il aime écouter de la musique classique quand nous sommes en voiture ou quand
nous sommes sur la terrasse, face à l’océan.

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Les chaises sont rapprochées d’un côté de l’immense table, laissant assez de
place pour tous les plats, qui ont l’air plus délicieux les uns que les autres. Les
assiettes, les verres en cristal et les couverts en argent brillent à la lumière des
chandeliers. Tout est magnifique. Je n’ai jamais vu une telle table, et jamais je
n’ai imaginé avoir le privilège de m’y asseoir.
Tout le monde entre dans la pièce et se tient debout derrière sa chaise.
– Disons le bénédicité, dit Max en tendant les mains à sa gauche et à sa droite.
Mon frère s’en charge, et nous finissons avec une minute de silence pour
remercier ceux qui ne sont plus avec nous et leur dire combien nous les aimons.
Je pense de nouveau à mon père, dans le coma, dans un lit d’hôpital à Las
Vegas. Seul. Le jour de Thanksgiving. Même si nous ne célébrions que rarement
la fête, nous étions quand même ensemble. Mais qui est avec lui, maintenant ?
Personne. Je sens ma poitrine se contracter.
– Ça va ? chuchote Wes en reculant ma chaise pour m’inviter à m’asseoir.
Je remarque que chaque homme recule la chaise de sa femme. Max recule même
celle d’Isabel avant de s’asseoir à son tour.
– Je vais bien. Je suis juste triste que mon père ne soit pas là. Il adorerait.
– C’est clair, dit Maddy en souriant.
Lorsque nous sommes tous assis, les plats se mettent à circuler. Il y a de la
dinde, de la farce faite maison, de la purée de pommes de terre, du maïs, de la
sauce, un gratin de flageolets, des cranberries, du pain fait maison, et plus
encore. Je n’ai pris qu’un peu de chaque plat et je n’ai déjà plus de place dans
mon assiette.
– Tout le monde mange comme ça à Thanksgiving ? je demande en observant
mon assiette.
– C’est clair ! ricane Maddy en me montrant la sienne. Je n’ai plus de place !
s’exclame-t-elle en riant.
Max, Cyndi, Matt et Wes s’interrompent et nous dévisagent.
– Quoi ? C’est beaucoup pour un seul repas, non ? je demande.
Je vois la mâchoire de Wes se contracter et Max se couvre la bouche.
– Quand avez-vous eu un repas de Thanksgiving, Maddy et toi, avec une dinde
et tout le reste ?

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Je regarde la montagne de nourriture qui couvre la table. Jamais on ne pourra
manger tout ça. Cela dit, je veux bien essayer.
– Euh, je ne sais pas. Maddy ?
Elle secoue la tête.
– On n’a jamais mangé de dinde rôtie, je crois. Enfin, on en a mangé au casino,
et j’ai déjà cuisiné des filets, mais pas comme ça. Ça me fait penser au buffet du
Caesar Palace. Bon sang, ils savaient fêter Thanksgiving, eux. Tu te souviens de
l’année où on s’y était faufilées ? s’exclame-t-elle en gloussant.
Je souris en me rappelant qu’on avait décidé qu’il était hors de question qu’on ne
mange pas correctement pour Thanksgiving. On était parties de la maison, et on
avait marché trois kilomètres jusqu’à l’hôtel. Il y avait tellement de gens que
personne n’avait remarqué les deux petites filles remplir leurs assiettes et sortir
avec. Cela dit, peut-être qu’ils s’en fichaient, du moment qu’on mangeait.
– C’est le meilleur repas de Thanksgiving qu’on ait eu, je réponds en riant.
Enfin, jusqu’à maintenant, j’ajoute en dévorant une bouchée de dinde couverte
de sauce. Hmm, c’est délicieux !
Max croise les bras et nous regarde, sidéré.
– Tu veux dire que vous n’avez jamais fait de repas, assises comme ça, autour
d’une table ? Alors que vous avez vingt-cinq et vingt et un ans ?
J’y pense un instant, mais en réalité, ne l’ayant jamais connu, ça ne nous a
jamais manqué.
– La farce est exquise, Cyndi ! je m’exclame pour changer de sujet.
Son visage s’illumine.
– Merci. Mais attends de goûter le gratin de flageolets de Max. Il ne cuisine pas
grand-chose, mais ça, il sait faire !
Je lui suis reconnaissante de m’avoir aidée à changer de sujet et j’articule un «
merci » en la regardant. Elle hoche la tête et se remet à manger. Un silence
pesant s’ensuit et je décide d’y remédier. Après tout, c’est notre premier
Thanksgiving ensemble, je voudrais que tout le monde soit heureux.
– Ah ! Wes et moi avons une nouvelle à annoncer !
– Tu es enceinte ! s’exclame Maddy en écarquillant les yeux.
– Mon Dieu, non ! je réponds.

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Wes rit et passe sa main autour de ma taille tandis que je me lève.
– Ne t’en fais pas, on a prévu des mini-Channing, mais on aimerait d’abord se
marier, répond-il à ma sœur.
– Oui, bon, bref. Ce que j’allais dire, c’est qu’on a fixé une date. Le premier
janvier. Le jour de l’an.
– De cette année ? s’exclame Maddy.
Un sourire énorme s’étend sur mon visage. Je ne peux pas m’en empêcher. Je me
marie dans…
– Six semaines !
– Waouh, mais c’est tellement tôt, tu es sûre que tu n’es pas enceinte ?
Elle fronce les sourcils et Matt aussi, même si c’est pour des raisons différentes.
Si Maddy est étonnée que je sois prête à m’engager auprès d’un homme, et ce
aussi vite, Matt est sans doute dégoûté parce que je lui ai dit d’attendre deux ans
avant d’épouser ma sœur. Je comprends que ma déclaration le perturbe, mais il
s’efforce néanmoins de sourire. C’est vraiment un mec bien.
– Eh bien ! Où vous mariez-vous ? demande Max d’un air ravi.
– Il y aura une petite cérémonie sur la plage au pied de notre maison de Malibu,
avec une cinquantaine de personnes, et une réception plus grande au domaine
des parents de Wes. Ils s’occupent de la réception, et nous de la cérémonie. Vous
pouvez tous venir ?
– Comme si je pouvais rater ça ! Je suis la demoiselle d’honneur, n’est-ce pas ?
– Bien sûr. Et j’adorerais qu’Isabel sème les pétales jusqu’à l’autel. Ça te
plairait, ma puce ? je lui demande alors qu’elle enfourne une fourchette de purée
dans sa bouche.
– Je devrai faire quoi ?
– Eh bien, tu mettras une jolie robe et une couronne, tu sèmeras des pétales sur la
plage, et Tante Mia marchera dessus, j’explique.
– J’aurai une couronne ?
Je savais que c’était une bonne idée.
– Un diadème, sans doute.
– C’est comme une couronne avec des diamants ? demande-t-elle d’un ton
sérieux.

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– Oui, ma puce.
Elle gonfle ses poumons et écarquille les yeux en rougissant.
– Je vais être la reine des fleurs ! Sur une plage ! Maman ! Maman ! Maman !
Jackson se réveille et se met à pleurer. Max le prend dans ses bras et le rendort
immédiatement en lui donnant sa tétine et en le berçant. Wouah, c’est dur d’être
un bébé !
– Oui, Isabel, tu seras la reine des fleurs. Maintenant est-ce que tu peux parler
doucement pour ne pas réveiller ton frère ? dit Cyndi avec ce ton maternel que
j’espère avoir un jour, moi aussi.
– C’est génial ! Levons nos verres, dit Max. À mes deux sœurs, à qui je souhaite
d’être aussi heureuses dans leurs mariages que je l’ai été dans le mien pendant
toutes ces années…
– Et au tout nouveau membre de la famille ! j’ajoute en désignant Jack.
– Et à la famille, qui est enfin telle que je l’ai toujours voulue, poursuit Max.
– Salud ! Cheers ! s’exclame tout le monde jusqu’à ce qu’un tintement retentisse
dans la poche arrière de mon jean.
Mince, j’ai oublié d’éteindre mon téléphone. Je regarde l’écran, prête à rejeter
l’appel, quand je reconnais le numéro de Las Vegas.
– Désolé tout le monde, je dis avant de répondre.
J’appuie mon doigt sur mon oreille et je sors de la pièce, me sentant pâlir
brusquement. Mes jambes se mettent à trembler pendant que l’infirmière
m’informe de l’état de santé de mon père. Lorsque je raccroche, je vide tout l’air
de mes poumons et je retourne dans la salle à manger. Je pose mes mains sur le
dossier de ma chaise, pour m’aider à tenir debout.
Instinctivement, Maddy se lève.
– Qu’est-ce qui se passe ? C’est papa ?
Elle plonge son regard inquiet dans le mien. Je ne sais pas comment répondre,
ma langue me semble gonflée et ma bouche trop sèche.
– Mon Dieu, c’est papa. Est-ce qu’il… ?
Elle n’a pas besoin de finir sa question, tout le monde sait ce qu’elle veut dire.
Wes se lève et me prend par la taille. Je m’appuie contre lui et je secoue la tête,
comme pour reprendre mes esprits.

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– Il est réveillé. Il est sorti du coma et il demande à nous voir.

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Chapitre 9

– Bon sang, frangine, il faut toujours que tu repartes à Las Vegas dès que
j’arrive à te faire venir au Texas ! ricane Max pendant que je jette mes vêtements
dans ma valise.
Quand je dis jeter, je veux vraiment dire que je ne prends même pas le temps de
les plier. Il va falloir que je m’asseye sur ma valise pour la fermer, mais peu
importe. La seule chose qui m’intéresse, c’est d’arriver à l’aéroport aussi vite
que possible.
– Tu as réussi à avoir un avion ? je demande.
Mes mains tremblent et Wes les tient contre son torse, laissant sa chaleur
m’envahir.
– Ça va aller, Mia. Ton père est réveillé et il demande à te voir. C’est une bonne
nouvelle, ok ? dit-il en plongeant son regard dans le mien.
Je me concentre sur lui alors que tout s’effondre autour de moi. Il faut juste que
j’arrive à Vegas, que je vois papa de mes propres yeux, et tout ira bien.
– L’avion de Cunningham & Oil est prêt à décoller dès que vous êtes à bord.
Maintenant, Mia, tu es sûre que tu ne veux pas que je vienne ?
Je me tourne et serre Max fort contre dans mes bras pour lui faire sentir combien
cette journée a été importante pour moi.
– Oui, merci. Merci pour tout, pour le meilleur Thanksgiving de ma vie, d’être le
meilleur frère que je puisse souhaiter, et d’être là, tout simplement, je dis d’une
voix tremblante. Maddy et moi devons faire ça toutes les deux. Et puis, j’ai Wes,
et elle a Matt.
– Mais je suis ton frère. Je veux te protéger, répond-il en gonflant le torse.

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– Max, je vais prendre soin d’elle, dit Wes en le prenant par l’épaule. Et je vais
m’assurer que Matt s’occupe de Madison, même si je ne pense pas qu’il ait
besoin qu’on le lui dise. Tout va bien se passer. Je te tiens au courant, d’accord ?
dit-il en tendant la main.
Max hoche la tête, saisit la main de Wes et passe son bras dans son dos.
– Je suis content que tu épouses ma sœur. Je sais que je suis un peu trop
protecteur, mais je viens juste de les trouver, alors il est hors de question que je
les perde.
– Je comprends, mec. N’oublie pas que je veux qu’on reparle de ce terrain, après
le mariage.
– Il est à toi, répond immédiatement Max. Je ferais tout pour que ma sœur vive
ici, même si ce n’est qu’une partie de l’année. Je vais parler à Matt de l’autre
terrain. C’est un homme fier et sa famille l’est aussi, je pense qu’ils vont vouloir
l’acheter. Je leur proposerai de cultiver tes terres et les miennes en plus des leurs,
ça devrait les convaincre.
Wes sourit et lui tend de nouveau la main.
– Ça me semble parfait. On en reparle plus tard ?
– Avec plaisir, partenaire.
En sortant de notre chambre, nous croisons Matt et Maddy dans le couloir.
– Je suis désolée, Max, mais c’est papa, dit Maddy d’une voix rauque.
– Vas-y, ma chérie. Il est temps d’aller voir ton père.
En haut du perron, nous embrassons Max, Cyndi, Isabel et le petit Jackson.
– À très vite.
– Très vite, oui, répond Max. C’est promis.
Nous montons dans la voiture qui nous emmène à l’aéroport et nous leur disons
au revoir de la main.
On arrive, papa. Tiens bon.
*
* *
Maddy et moi parcourons le couloir blanc main dans la main. Nous sommes
venues ici des centaines de fois, mais celle-ci est différente. Je serre sa main, et
elle serre la mienne en retour.

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– Ce ne sera toujours que toi et moi, sœurette, je chuchote, lui rappelant ce que
je lui disais quand nous étions petites.
Chaque fois que nous avions peur, que nous n’avions plus à manger, qu’on nous
coupait l’électricité ou que notre père était assoupi sur le canapé alors qu’il
fallait nous emmener à l’école, je lui disais ces mots.
– Pour toujours et à jamais, répète-t-elle, comme elle le faisait chaque fois.
Je souris jusqu’aux oreilles. Le fait que j’épouse Wes, et elle Matt, ne change
rien à notre relation. Rien ne pourrait la changer. Nous sommes liées par le sang,
par nos années de lutte côte à côte, de soutien l’une de l’autre, et d’amour l’une
pour l’autre quand le reste du monde se fichait de nous. Papa nous aimait, bien
sûr, mais pas assez pour arrêter de boire et nous montrer à quoi ressemblait une
vie normale. Nous avons dû le découvrir seules, et maintenant… nous avons de
belles vies.
Nous arrivons devant sa porte entrouverte et nous entrons ensemble. Mon père
est assis dans le lit. Son menton et sa mâchoire sont couverts d’une barbe épaisse
et ses cheveux poivre et sel sont luisants et coiffés en arrière, comme s’il s’était
douché. Une infirmière a dû l’aider à faire sa toilette. Ses yeux marron se fixent
sur nous et des larmes coulent sur ses joues.
– Mes b… bébés, renifle-t-il en ouvrant les mains.
Peut-être n’a-t-il pas assez de muscles pour ouvrir les bras.
– Venez donner de l’amour à votre vieux père, dit-il d’une voix rauque.
– Papa ! s’écrie Maddy en courant à ses côtés.
– Papa, je dis d’une voix calme en regardant ma sœur le serrer dans ses bras.
J’ai passé onze mois à prier chaque jour pour qu’il se réveille, et enfin le voilà,
en vie, réveillé.
– Mia, v… viens ici, dit-il en tapotant le lit à côté de lui.
Maddy est déjà allongée sur le matelas, blottie contre son père. Sauf qu’il n’est
pas son vrai père, c’est ce que je me rappelle soudain. Arrête Mia, ce n’est pas le
moment de rouvrir ces blessures.
Je marche jusqu’à lui, m’assieds à ses côtés et caresse son front, sa tempe, sa
joue, puis sa barbe. Sa peau est légèrement rose, lui donnant un air sain que je

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n’ai pas vu chez lui depuis des lustres. Waouh, c’est la première fois depuis des
années que je vois mon père sobre. Il est magnifique.
– Tu as l’air en forme, papa.
Il lève une main tremblante et la pose sur ma nuque. Je me blottis contre lui, et,
enfin, je libère tout. Tous ces mois d’inquiétude, la peur qu’il ne se réveille pas,
la crainte de ne peut-être plus jamais voir le seul parent qu’il me reste, tout. Les
larmes jaillissent et nous nous tenons les uns les autres en pleurant. Maddy et
moi tournons la tête vers notre père et je prends la main de ma sœur pour la
poser sur son cœur.
– Mon Dieu, je v… vous aime, les f… filles. Plus q… que tout. Je vais vous
mon… montrer. Je serai un b… bon p… père. J’vous jure.
Il ne nous a jamais promis une telle chose. Par le passé, il se réveillait avec la
gueule de bois, s’excusait en nous disant qu’il n’y pouvait rien, c’était tout. Une
fois, il m’a dit qu’il buvait pour ne plus être triste et qu’il jouait pour oublier sa
colère envers notre mère. Je ferme les yeux en espérant qu’il pense ce qu’il dit,
cette fois-ci. En ce qui me concerne, c’est sa dernière chance de se rattraper.
Nous restons blotties contre notre père pendant longtemps, jusqu’à ce que nous
n’ayons plus de larmes à verser. Il ne reste plus de notre réunion que des
reniflements et de longs soupirs.
– Euh, bonjour ? dit papa.
Je tourne la tête et vois Wes dans l’encadrement de la porte. Je souris jusqu’aux
oreilles, comme chaque fois que je le vois.
– Il est à toi, Mia ? marmonne papa.
– Ouais, il est complètement à moi, je réponds en me levant.
J’essuie mes larmes et prends mon mec dans mes bras.
– J’aime te voir sourire comme ça, ma chérie, dit Wes en m’embrassant.
Il prend mon visage dans ses mains et essuie mes dernières larmes avec ses
pouces.
– Viens par là. Je veux te présenter mon père, je m’exclame en prenant sa main
pour l’emmener au chevet de mon père. Weston Channing, je te présente mon
père, Michael Saunders. Papa, voici mon fiancé, Wes.
– Ton fiancé ? demande papa en fronçant les sourcils.

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Je suis sur le point de répondre, lorsque Matt entre dans la chambre. Maddy se
lève d’un bond et court vers lui. Il l’attrape en plein vol et la fait tourner autour
de lui.
– Chéri, papa est réveillé ! s’exclame-t-elle en sautillant.
– Chéri ! s’étouffe mon père. Ma p… petite fille a un co… copain ? Mon Dieu.
– Euh papa, il s’est passé beaucoup de choses depuis que tu t’es blessé.
– Blessé ? Ces enf… foirés m’ont sauté de… dessus.
Il appuie sa tête dans l’oreiller et ferme les yeux. La machine qui mesure son
rythme cardiaque se met à biper, me laissant penser que sa tension est montée
d’un coup, mais je n’y connais pas grand-chose. Une infirmière déboule dans la
chambre et regarde mon père en fronçant les sourcils.
– Je vais devoir vous demander de sortir, tous.
– Mais… ça fait si longtemps qu’il est dans le coma, je réponds en désignant
mon père.
L’infirmière secoue la tête, appuie sur les boutons de la machine et me regarde
d’un air très sérieux.
– Parlons dehors. Vous devez partir. Vous pourrez revenir demain matin, quand
il sera reposé.
Mes épaules retombent, mais je me ressaisis et, me sentant audacieuse, je
contourne l’infirmière pour embrasser mon père sur le front.
– Repose-toi, on revient demain matin. On a plein de choses à te raconter.
Maddy lui dit au revoir à son tour et nous rejoignons l’infirmière dehors. Elle
nous informe que personne n’a encore appris à mon père combien de temps il est
resté dans le coma. Les médecins veulent examiner de nouveau ses capacités
mentales et commencer tout de suite sa rééducation. Elle nous rappelle qu’il a
encore un long chemin à parcourir et qu’il doit être patient, et lorsqu’elle nous a
assuré que nous verrons son médecin demain matin, nous acceptons de partir.
Wes et moi prenons une chambre à l’hôtel de l’autre côté de la rue, et Maddy et
Matt regagnent leur appartement.
*
* *

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– Salut vieille meuf, ça roule ? Comment va ton père ? demande Ginelle en
décrochant.
Je refuse de parler à qui que ce soit d’autre que Gin. Wes a appelé Max pour le
tenir au courant, je sais qu’il est mort d’inquiétude, mais on va bien. Il n’y a rien
à dire pour le moment, et je ne veux pas parler de mes sentiments avec mon
frère. Il nous connaît, mais il ne sait pas comment je gère ce genre de situation. Il
ne connaît pas les détails de notre enfance, et je ne suis pas d’humeur à en parler
maintenant.
Quant aux autres appels que j’ai eus, ils venaient tous d’amis qui me souhaitaient
un joyeux Thanksgiving, ce qui est nouveau pour moi.
– Bien, a priori, je réponds en me blottissant sous la couette. On en saura plus
quand on verra son médecin, demain. L’infirmière dit qu’il ne sait pas qu’il est
resté dans le coma pendant onze mois. Quand on lui a présenté Wes et Matt, sa
tension a augmenté brusquement et elle nous a mis dehors.
– Et toi, comment tu vas ?
– Ouf, eh bien… c’est bizarre. Avant de le voir réveillé, j’étais en colère contre
lui. Plus que jamais. Et tu sais, je pense que ma colère est justifiée. Mais quand il
m’a tendu les bras, c’est comme si j’étais redevenue cette petite fille qui voulait
l’amour de son père plus que tout au monde.
Une larme coule sur ma joue et s’écrase sur mon oreiller. Mon nez commence à
couler et je l’essuie sur le drap.
– Ça me semble normal, bébé. Ton père restera toujours ton père. Ce n’était
peut-être pas le meilleur, mais au moins il n’est pas parti, lui.
– En même temps, est-ce que c’est vraiment le cas ? Il disparaissait chaque fois
qu’il buvait sa bouteille de whisky. Chaque gorgée le transformait en une
personne différente, quelqu’un qui oubliait qu’il avait deux filles à nourrir, à
habiller et à emmener à l’école. Et sa dernière connerie ? Un million de dollars ?
C’est comme s’il demandait à mourir !
Ginelle pousse un grognement et soupire.
– Peut-être qu’il l’a fait exprès.
Ses paroles me font l’effet d’une décharge électrique, crépitant dans mon corps,
faisant tressaillir tous mes muscles.

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– Merde, tu as peut-être raison. Il était peut-être stupide quand il s’agit de jeux
d’argent, mais pas au point de devoir de l’argent à un mec comme Blaine
Pintero, et surtout pas un million.
– Parfois, quand on en a marre de la vie, on choisit l’issue la plus simple. Ton
père savait que Blaine s’en prendrait à lui.
– Ouais, c’est vrai.
Je secoue la tête, choquée de ne pas en avoir pris conscience plus tôt.
– L’eau est bonne ? demande Ginelle, passant du coq à l’âne.
– Hmmm, comme les larmes des dieux, Ku’u lei, dit une grosse voix d’homme.
Je connais ce mot, Ku’u lei. Ça veut dire, « ma chérie » en hawaïen. J’ai entendu
le père de Taï le dire à sa mère, et Tao vient de le dire à ma meilleure amie. Le
mystère s’épaissit ! Contente de changer de sujet, je saute sur l’occasion.
– Et toi, comment était ton Thanksgiving ? Tu as mangé de la grosse dinde ? je
demande d’un ton lourd de sous-entendus.
– Meuf, tu n’as pas idée ! gémit Ginelle. Sans rire, Mia, je ne sais pas comment
je vais faire quand il sera parti. Je vais devoir faire le stock de piles pour mon
vibro, c’est clair. Maintenant, je comprends pourquoi tu as passé un mois à
baiser avec son frère. Les Niko sont… bon sang, ma chatte ne sera plus jamais la
même. Il lui suffit de me regarder avec ses grands yeux noirs pour que mes
cuisses s’ouvrent comme la mer Rouge devant Moïse.
– Tu es tordue, tu le sais, ça ? je demande en riant.
– Et rassasiée. Tout le temps. Quand je pense qu’il a fini et qu’il est prêt à ranger
la bête, il la ressort, déjà toute trempée d’envie.
– Arrête ! Épargne-moi les détails !
– Tu veux dire comme quand il a utilisé sa main pour…
– La la laaa, la la laaa, la la laaa la laaa !
Je chantonne « Jingle Bells » jusqu’à ce qu’elle se taise.
– Tu es juste jalouse.
– Pas le moins du monde, non.
Je repense à la façon dont Wes m’a prise contre l’arbre et je frissonne de la tête
aux pieds.

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– Mais c’est vrai, ricane-t-elle, parce que tu as ton surfeur réalisateur pour te
brouter le minou ! Comment va Wes, au fait ? Ses cauchemars ? demande-t-elle
en chuchotant.
– Ça fait plus d’une semaine qu’il n’en a pas eu, c’est un progrès énorme.
Maintenant, il s’est mis en tête qu’il allait acheter du terrain à Max et construire
une maison à côté de leur ranch, pour qu’on ait une maison secondaire.
– Trop cool ! Alors, vous allez devenir des cow-boys ?
Je me retourne et m’enfonce davantage dans la couette.
– C’est clair que ce serait cool de voir Max et Cyndi régulièrement et de voir
grandir ma nièce et mon neveu.
– Tu as toujours voulu sentir une appartenance à un lieu, et maintenant ce sera le
cas.
– Et papa ?
– Comment ça, et papa ? Il doit trouver son propre chemin, Mia. Tu ne peux pas
prendre les décisions à sa place. Tu es une adulte qui est sur le point d’épouser
l’homme de ses rêves. Maddy aussi. Vous êtes toutes les deux casées. Ton père
doit décider ce qu’il veut faire de sa vie et se débrouiller pour y arriver. Espérons
simplement qu’il aura appris la leçon et qu’il restera sobre. Pour lui, et pas
seulement pour Maddy et toi, même si tu sais combien je suis sceptique.
– Je sais, je sais. Il dit qu’il veut se rattraper. Qu’il veut être un homme meilleur.
– Ouais, je le croirai quand je le verrai. D’ici là, on ne peut qu’espérer pour le
mieux. Je crois que c’est comme ça que tu dois aborder la situation, toi aussi.
– Je crois que tu as raison. C’est un adulte, et pour une fois il va falloir qu’il
s’occupe de lui-même. Ma vie ne peut plus tourner autour de lui ni de personne
d’autre, dorénavant.
– Voilà ce que je veux entendre ! Enfin, ce que je veux vraiment entendre c’est
un gros Samoan tatoué hurler de plaisir, histoire que je puisse dormir un peu. Je
ne fais que dire à l’Incroyable Hulk que j’ai besoin de mon sommeil réparateur,
mais il n’écoute jamais.
– Ok, ma salope, va fricoter avec Tao. Dis-lui Aloha de ma part.
– Ça roule. Je t’aime, on s’appelle plus tard, vilaine.
– Je t’aime encore plus, grosse cochonne.

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Chapitre 10

Lorsque j’arrive à l’aube, le lendemain matin, papa est assis dans son lit. Wes,
mon sauveur, est resté à l’hôtel pour continuer le montage de la « spéciale
Thanksgiving » du Docteur Hoffman. Heureusement, j’ai de l’avance, ce qui
tombe au mieux, maintenant que je dois m’occuper de mon père.
– Coucou mon bé… bé, viens t’asseoir, dit-il en tapotant le matelas à côté de lui.
Sa voix et ses gestes sont encore hésitants, et d’après le médecin, cela pourrait
mettre un moment avant de s’arranger. Je vais à lui et m’assieds sur le lit. Je
prends sa main, l’embrasse, sentant sa peau fine comme du papier à cigarette
sous mes lèvres ? Cependant, son teint est plus beau que lorsqu’il était plein
comme une barrique.
– J’ai parlé à ton médecin, ce matin. Il dit que tu sais que tu es resté dans le
coma pendant onze mois.
Papa hoche la tête solennellement. Je n’arrive pas à imaginer ce qu’il doit
ressentir de savoir qu’il a perdu presque un an de sa vie.
– Qu’est-ce qui s’est passé, papa ? Comment les choses ont-elles autant dérapé
avec Blaine ?
Il ferme les yeux et serre ma main.
– Mia, j’ai été très é… égoïste.
Je ne peux qu’être d’accord avec lui, mais ça ne répond pas à ma question.
– Comment ça ?
– J’en a… avais marre, dit-il en haussant les épaules. De ma vie, de ma d…
dette. Je me sentais v… vide.
Chaque mot est pesant, comme s’il me préparait à une dure réalité. Je penche la
tête sur le côté et le regarde dans les yeux.

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– Papa, est-ce que tu as fait exprès de perdre autant d’argent ? je demande en
repensant à ma conversation avec Ginelle.
– Pas tout à f… fait. Peut-être. Je ne sais p… pas. J’étais t… tellement f…
fatigué. J’en avais as… sez de me demander p… pourquoi elle était p… partie.
As… sez d’être un iv… ivrogne. Assez d’être le p… pire père pour vous. Assez.
Alors je me f… fichais de devoir cet a… argent à Blaine. Je savais q… qu’il
s’occuperait de moi. L’assurance s’oc… cuperait de vous, dit-il en fermant les
yeux. Mieux q… que ce que je p… pouvais vous of… frir de mon vivant.
Je retiens un sanglot et je me lève, reculant jusqu’à ce que je sois dos au mur.
– Tu veux dire que tu voulais mourir ?
Il n’a qu’à me regarder pour me dire la vérité.
– Je ne v… voulais plus vivre de cette f… façon.
– Bon sang, papa, je n’arrive pas à…
Je gonfle mes poumons et me penche en avant, les mains sur les genoux,
essayant de respirer calmement.
– Tu n’as pas idée de ce que j’ai dû faire pour rembourser ta dette !
Il hausse les sourcils.
– Quoi ? La dette est p… payée ?
Je ferme les yeux et me redresse pour m’adosser de nouveau au mur.
– Blaine et ses mecs allaient te tuer et s’en prendre à Maddy et moi ! Ils
appellent ça la dette du survivant. Tu ne pensais quand même pas qu’ils allaient
te laisser mourir sans chercher à récupérer leur fric, si ?
Papa écarquille les yeux et son visage s’effondre.
– Non, dit-il en secouant la tête. Ils n’ont jamais dit ça. J’ai… j’ai juste…
– Tu quoi ? je crie. Tu t’es dit que tu te livrerais à eux et que tout serait pardonné
?
– Oui, exactement, admet-il en me regardant faire les cent pas.
– Tu es incroyable.
Je tremble des pieds à la tête et je me tire les cheveux, essayant de libérer la
tension qui m’accable.
– J’ai été escort pour Tante Millie pour payer ta dette ! je crache.
Mon père pâlit brusquement.

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– Tu t’es p… prostituée pour m… moi ?
Une larme coule sur sa joue et il semble sur le point de s’effondrer.
– Mon Dieu, non. Non. Pas ma f… fille, sanglote-t-il dans ses mains.
Je cours vers lui et saisis ses bras.
– Papa, ce n’était pas comme ça. Je ne couchais pas avec eux. Je jouais juste le
rôle qu’ils me donnaient pendant un mois. Je gagnais cent mille dollars par mois
et j’ai remboursé Blaine petit à petit.
Je devrais lui dire ce qui s’est passé avec Blaine en septembre et la manière dont
Max m’a sauvée, mais je ne pense pas qu’il soit encore assez fort pour entendre
ça.
– Je suis t… tellement désolé. Pour t… tout. Je ne pourrai j… jamais me ra…
rattraper. Jamais, pleure-t-il en tremblant comme une feuille.
Je caresse son dos de bas en haut en sentant ses os.
– Tu peux commencer par rester en vie, papa. Par être notre père. Par rester
sobre, j’ajoute en priant pour qu’il ne pète pas un plomb comme il en avait
l’habitude quand j’abordais le sujet de son alcoolisme.
Il me tient longtemps dans ses bras, murmurant des excuses contre mes cheveux,
me disant combien il est fier de moi, combien il m’aime. En fin de compte, c’est
tout ce que j’attends de mon père, son amour, son acceptation, sa fierté. Or, je
réalise soudain que j’ai déjà toutes ces choses. Certes, c’était un père minable
quand j’étais petite, mais nous avons encore de longues années devant nous et je
veux les passer à créer de nouveaux souvenirs.
Mon téléphone sonne dans ma poche arrière. Je laisse la sonnerie retentir, mais
dès que la messagerie prend le relais, il sonne de nouveau. À l’évidence,
quelqu’un essaie vraiment de me joindre.
– Désolé, papa, je dis en reculant pour sortir mon téléphone de ma poche,
souriant quand je vois Maximus s’afficher à l’écran.
– Bonjour frangin !
– Tu étais censée m’appeler aujourd’hui, gronde-t-il.
– Tu n’as pas une femme, ma nièce et mon neveu à embêter ? je dis en riant.
Je regarde mon père, dont la mine est confuse et choquée.
– Combien de fois je dois te dire que je m’occupe de ce qui est à moi ?

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– Si tu le dis, je rouspète en levant les yeux au ciel. Je vais bien, tu peux dormir
tranquille. Occupe-toi du petit Jack et embrasse Isabel de ma part.
– Tu vas bien ?
– Très bien, oui, je réponds en regardant mon père. Papa va entamer sa guérison
et j’épouse l’homme de mes rêves, la vie est belle.
– Très bien, sucre d’orge, glousse Max. Prends soin de toi et je t’appelle demain
ou après-demain.
Pour Max, cela signifie qu’il m’appellera aux aurores, demain matin.
– Je t’aime, sœurette.
Je raccroche et me tourne vers mon père.
– C’était qui ?
– Mon frère, Max, je réponds automatiquement, oubliant que mon père ne sait
rien.
Il ne sait pas qui est Maxwell Cunningham ni que Maddy n’est pas sa fille
biologique.
– Merde, je chuchote.
– Quel frère ?
Je ferme les yeux et me rassieds sur le lit.
– Papa, c’est une longue histoire un peu compliquée, mais elle finit bien. Mais ce
n’est sans doute pas quelque chose que tu dois entendre maintenant. Tu viens
tout juste de te réveiller.
Je me déteste d’avoir lâché le morceau.
– J… jeune f… fille, tu vas tout de suite d… dire à ton père qui est ce… ce frère
et comment tu l’as t… trouvé. Tu as c… contacté ta m… mère ?
– Non, papa.
Maddy arrive peu de temps après que j’ai commencé à raconter à mon père
comment j’ai rencontré Maxwell Cunningham en étant embauchée pour jouer le
rôle de la sœur qu’il n’avait jamais connue, alors qu’il savait déjà qu’on avait la
même mère. J’explique ensuite que quand il a appris l’existence de Maddy, les
tests sanguins ont montré qu’il était bien notre frère à toutes les deux.
– Alors, c’est tout ? V… votre mère était en c… couple avant de… de me
rencontrer, elle a eu un… un fils et elle l’a ab… abandonné ? C’est tout ?

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Maddy se mord la lèvre et regarde par la fenêtre, les larmes aux yeux.
– Qu’est-ce q… que vous me… me cachez ?
– Je crois que ça suffit pour aujourd’hui, papa.
Peut-être qu’on devrait faire une pause.
Papa secoue vigoureusement la tête.
– Non. On va révéler t… tous les secrets m… maintenant, ici, gronde-t-il en
enfonçant son index dans le matelas de l’hôpital.
Mes épaules retombent et les larmes de Maddy se mettent à couler.
Arrache le pansement d’un coup sec, Mia. Fais-le pour être libérée de tout ce
poids.
– Mia… Maddy… gronde papa.
Madison semble sur le point de s’effondrer. Je fais le tour du lit et la prends dans
mes bras. Elle s’appuie contre moi, cache son visage et fond en larmes.
– Mon Dieu, qu’est-ce qui se p… passe ?
– Papa, quand on a fait les tests sanguins, les résultats ont montré que Maddy et
Maxwell Cunningham ont la même mère et le même père.
Il ferme les yeux et se frotte le front.
– Alors, c’est vrai. Gé… génétiquement, je ne s… suis pas ton p… père.
Maddy sanglote de plus belle et secoue la tête.
– Ma puce, viens ici, dit-il en ouvrant les bras.
Elle s’y laisse tomber et sanglote contre sa poitrine.
– M… mais, c’est t… toi mon p… père ! pleure-t-elle.
Je ferais n’importe quoi pour ôter cette douleur à ma petite sœur.
– Oui, répond-il en caressant ses cheveux blonds, si différents des siens. Et je le
se… serai toujours. Aucun test ne p… peut m’enlever mes f… filles. J’ai
toujours soupçonné que v… votre m… mère me trom… pait. Parfois, j’ai cru la
v… voir un p… peu trop près d’un grand cow-boy b… blond. Je ne sais p… plus
comment il s’ap… pelait.
– Jackson Cunningham. Il venait à Vegas quand j’étais petite. Elle voyait son
fils, et moi je voyais le frère dont je ne connaissais pas l’existence. Elle est
tombée enceinte de Maddy, et les visites ont cessé.
Papa embrasse la tête de Maddy.

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– Ouais, après Maddy, elle a co… commencé à se comporter de façon b…
bizarre. Enfin, encore p… plus bizarre que d… d’habitude. Comme si elle ne
te… tenait pas en place. Elle ch… changeait toujours de travail, allait d’un c…
casino à un autre, se plaignait touj… ours de quelque ch… chose. Puis c’était
V… Vegas le problème. Et puis c’était m… moi. V… vous con… naissez la
suite.
Elle est partie. Je m’en souviens très bien, oui.
*
* *
Wes et moi passons la fin du mois de novembre avec mon père. Physiquement, il
va de mieux en mieux, mais mentalement… c’est une autre histoire. Pendant
deux semaines, je l’informe autant que possible de ce qui s’est passé dans nos
vies, de ce que j’ai fait chaque mois, et je finis par admettre ce qui s’est passé
quand il a contracté le virus et subi la réaction allergique qui a failli le tuer. Il dit
qu’il n’avait pas la moindre idée de ce qui se passait autour de lui, qu’un jour il
avait mal partout et il fermait les yeux contre le macadam, espérant mourir, et
que l’instant d’après il les rouvrait dans une chambre d’hôpital blanche. Il ne se
rappelle rien des onze mois qui se sont écoulés entre ces deux événements.
Sa thérapeute m’explique que c’est normal et qu’il pourrait se souvenir plus tard
des choses qu’on a pu lui dire et des voix qu’il a entendues, mais que
globalement, il est sain de corps et d’esprit. Maintenant, il doit travailler dur
pour réussir sa rééducation, suivre une thérapie de façon sérieuse pour vaincre
ses addictions et s’inscrire à la section locale des Alcooliques Anonymes. Pour
l’instant, la psy lui impose une visite et deux coups de fil par semaine jusqu’à ce
qu’il se sente prêt à être indépendant.
Wes prend en charge les soins de mon père, demandant à deux infirmières de
s’occuper de lui douze heures chacune afin qu’il ne soit jamais seul et qu’il
puisse se rendre à ses rendez-vous. Maddy abandonne une de ses options pour
avoir plus de temps pour lui rendre visite chaque jour. De mon côté, j’ai beau me
sentir un peu coupable, je n’oublie pas que j’ai donné toute une année de ma vie
pour lui. Il est temps de rentrer à la maison, à Malibu, où Wes et moi allons
préparer notre mariage et profiter de tout ce qui nous rend heureux.
*

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*
* *
Assise sur la terrasse à l’arrière de la maison, face à l’océan, j’imagine le jour de
notre mariage. Je sais où nous allons mettre les chaises, où ira l’autel et où je
vais dire « oui » à l’homme que j’aime. Je bois une gorgée de chardonnay frais
et je croise les jambes sous la couverture en laine que Miss Croft m’a donnée,
même s’il ne fait pas vraiment froid à Malibu.
Mon téléphone sonne et je grimace. J’aurais dû le jeter dans le sable et profiter
de ce moment de calme. Wes est en train de surfer et je profite du spectacle. Je
suis vraiment veinarde.
Je réponds au téléphone sans regarder l’écran, trop concentrée sur mon mec.
– Allô ?
– Mademoiselle Saunders, c’est Shandi, l’assistante du Docteur Hoffman.
Elle s’annonce toujours comme « l’assistante du Docteur Hoffman », comme si
je ne le savais pas déjà alors que ça fait deux mois que je travaille pour lui.
– Oui Shandi, bonjour. Qu’est-ce que je peux faire pour vous ?
– Le Docteur Hoffman a votre prochaine mission.
– Ah ? Comment ça ? D’habitude, c’est moi qui choisis le sujet, je réponds en
fronçant les sourcils.
– Pas cette fois, répond-elle d’un ton sec. Il veut que vous alliez à Aspen, au
Colorado, pour interviewer les artistes locaux. Un homme nous a contactés et a
proposé beaucoup d’argent à l’émission pour faire un sujet sur sa femme.
– Qui est sa femme ?
– Une artiste qui peint des tableaux de montagnes et d’arbres, je ne sais pas.
Votre assistante vous donnera les détails. Drew a pensé que vous pouviez en
profiter pour faire un sujet sur la beauté de l’art pour la semaine prochaine.
– La semaine prochaine ? Vous plaisantez, je viens juste de rentrer.
Shandi pousse un grognement exaspéré.
– Ce n’est pas de notre faute si vous avez passé les fêtes à traverser le pays avec
votre famille. Maintenant, il est temps de se remettre au travail. Dois-je dire à
Drew que cela pose un problème ? Je suis sûre qu’il connaît un tas de brunes à
forte poitrine qui seraient ravies de vous remplacer…
– Non ! Non, ça va. Je vais le faire. Est-ce que je peux avoir la même équipe

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qu’à New York ?
– Vous voulez la gothique, Kathy ?
La gothique ? Cette fille a les cheveux noirs et des lunettes à bords noirs et elle
est automatiquement cataloguée comme étant gothique. Parfois, je déteste
vraiment Hollywood. Mais peut-être n’est-ce que l’assistante de Drew.
– Oui, je voudrais Kathy Rowlinski. D’ailleurs, est-ce qu’il serait possible que
Century fasse d’elle mon assistante de production officielle ?
– Il faudra que vous en parliez à Drew ou à Leona.
– Très bien. Merci, Shandi, pour votre appel. J’ai hâte de recevoir les détails de
ce sujet.
Je raccroche en grognant et je tends le bras pour jeter mon téléphone sur la
plage, comme j’aurais dû le faire tout à l’heure. La main de Wes apparaît de
nulle part et l’attrape en plein vol.
– Tu as perdu quelque chose, Chérie ? demande-t-il en riant.
Il gravit la petite dune, puis les marches qui mènent à la maison. Sa combinaison
est ouverte sur son torse et retombe sur ses hanches. Arrivé en haut, il ouvre le
robinet et se rince les pieds. Sans réfléchir, tout habillée, je vais à lui, repère une
des gouttes d’eau salée qui dévale son torse et la lèche depuis le V merveilleux
de ses hanches à ses pectoraux carrés, puis sur la bouche. Je me colle à lui,
laissant l’eau glacée de l’océan tremper mes vêtements. Je m’en fiche. J’ai
besoin d’être contre lui et de noyer mon esprit dans tout ce qui fait qu’il est lui.
Il me soulève en palpant mes fesses et me porte à travers la maison, jusque dans
notre chambre, où nous fêtons notre retour à Malibu de la plus belle façon qui
soit.
*
* *
Wes joue avec une mèche de mes cheveux alors que je suis étendue, haletante,
sur son torse.
– Elle a dit combien ce type avait payé ? Ça a dû être une sacrée somme.
Je secoue la tête et appuie mon menton sur mes mains.
– C’est bizarre, mais on m’a dit que le Colorado est magnifique, et en particulier
Aspen. Je n’y suis jamais allée, et toi ?

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– Aspen ? Tu demandes à un garçon élevé dans une famille riche et mondaine
d’Hollywood s’il est déjà allé à Aspen ? Hmmm…
– Quoi ?
Je secoue la tête, ne comprenant pas sa blague.
– Mia, Aspen est la ville secondaire de tous les gens riches et célèbres. Mes
parents ont un chalet là-bas. Un chalet immense.
– Ah bon ?
Je crois que je ne saisirai jamais l’étendue de la fortune de l’homme que
j’épouse.
– Oui, répond-il en riant. C’est un chalet pour seize personnes et il y a des lits
supplémentaires, au cas où… non pas que ma famille s’en soit déjà servie.
– Waouh. Pourquoi vous avez un chalet aussi grand ?
– Maman dit qu’elle pensait déjà aux petits-enfants qu’elle aurait et à leurs
familles. Ils l’ont acheté à bon prix quand ils venaient de se marier et ils le
louent presque toute l’année. D’habitude, on y va une semaine par an pour skier,
respirer l’air frais des montagnes et passer du temps en famille.
– Ok. Tu crois qu’on pourrait s’y installer, avec mon équipe de tournage ?
– Ouais, maman ne le loue jamais en décembre au cas où un membre de la
famille voudrait y aller.
– Super ! On peut dire à Maddy et Matt de venir ? Ils seront en vacances. Ooooh,
je me demande si Max viendrait ?
– Pour toi ? ricane-t-il.
– Qu’est-ce que c’est censé vouloir dire ? je réponds en lui pinçant doucement le
téton.
– Mia, Max est aussi gaga de toi que de sa femme et ses enfants. Je ne connais
personne qui tienne autant que lui à sa famille. Tu n’as qu’à sous-entendre que tu
veux quelque chose et il déplacera des montagnes pour te l’offrir. C’est dans sa
nature. Je parie que son père était comme ça.
– Maddy l’est aussi, tu sais.
Ça me rappelle combien il a été dur pour mon père d’accepter ce dont il s’était
douté, que Maddy n’était pas sa fille biologique.
– Ouais, ils ont ça en commun, c’est vrai, répond Wes.

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Je hoche la tête et la repose sur son torse.
– Tu penses que ta famille envisagerait de venir à Aspen pour quelques jours à
Noël ? On pourrait inviter Jeanine et son mari, Max et son clan, Maddy, Matt, et
ses parents, et Ginelle ?
– Chérie, tu n’as pas encore compris que, comme ton frère, il te suffit de me
demander ce que tu veux et je ferai tout pour te le donner ? répond-il de façon on
ne peut plus sérieuse.
Je l’embrasse doucement, tendrement, avec assez de passion pour fêter une
deuxième fois notre retour à la maison.
– Je rêve d’un Noël sous la neige, je dis en souriant avant de lécher son téton.
Il me roule sur le dos et s’installe entre mes jambes.
– Vive le vent, vive le vent, vive le vent d’hiver, chante-t-il en mordillant mon
cou.
– On dirait que Noël arrive tôt, cette année, je gémis lorsqu’il s’empare de mon
téton et le suce.
Il lève la tête et ne me quitte pas des yeux en descendant sur mon ventre puis
entre mes jambes.
– Mia, avec toi, c’est Noël tous les jours.
J’aurais aimé trouver une réponse cocasse et lubrique, mais je n’en ai pas le
temps. Wes pose sa bouche entre mes cuisses, plonge sa langue et ses doigts
entre mes lèvres déjà mouillées, et je perds ma capacité à réfléchir.
La dernière chose qui traverse mon esprit, avant que je me laisse aller à notre
passion, c’est que chaque année, chaque Noël et chaque jour de ma vie vont être
aussi beaux que celui-ci, du moment que Wes est là à mes côtés.
Rien ne peut m’arrêter. J’ai enfin tout ce que je désire. Je suis heureuse, j’ai une
famille et des amis. Ma sœur n’a plus besoin de moi. J’ai un frère. Mon père est
en voie de guérison, et j’ai un mec qui m’adore et qui veut passer le reste de ses
jours à me le prouver. Quant à moi, je vais consacrer ma vie à lui prouver la
même chose.

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DÉCEMBRE

Je ne savais pas à quoi m'attendre quand les producteurs de Dr. Hoffman


décidèrent de m'expédier vers les belles montagnes d'Aspen, dans le Colorado.
La ville d'Aspen est connue pour être un paradis hivernal pour les américains
ultra-riches, mais je ne connaissais que le désert. Mon point fort, c'était un
surfer-réalisateur dont la famille possédait un chalet sur ces collines enneigées.
Avec lui à mes côtés, je profiterais de l'expérience.

Le boulot m'avait été confié dans des circonstances inhabituelles. Un homme des
montagnes anonyme avait payé une sacrée somme pour persuader les
producteurs de mon show de m'envoyer faire un reportage sur les artisans
locaux. Avec ma parka et mes bottes Ugg, je laissai le soleil de la Californie
dans mon rétroviseur et partis au pays de la neige.

Avec ma nouvelle famille, j'étais prête à célébrer le meilleur mois que l'année
avait à offrir... jusqu'à ce qu'une femme qui avait complètement changé ma vie
toutes ces années plus tôt apparaisse comme une ombre dans l'air glacé, brisant
mon âme une nouvelle fois.

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Chapitre 1

Écrasée par la pile de couvertures et clouée au matelas par le bras de Wes,


j’essaie de sortir du lit. Hier, nous avons pris l’avion pour Aspen, dans le
Colorado, et sommes arrivés aux aurores aujourd’hui. Wes m’a fait visiter
rapidement son chalet familial qui, au passage, est plus grand que notre maison
de Malibu, puis nous nous sommes écroulés dans sa chambre.
J’ai désormais les yeux grands ouverts, et à en croire la lumière qui inonde la
pièce à travers les rideaux, il doit être près de midi. Je dégage le bras de Wes et
me glisse le long du matelas, essayant de ne pas le réveiller. Je sors du lit et me
fige, frigorifiée. Mon petit ensemble débardeur-culotte ne va pas suffire, la
chambre est gelée ! Sur la pointe des pieds, je vais jusqu’au boîtier du thermostat
et je monte la température à vingt-trois degrés. Voyons si le chauffage
fonctionne !
Je trouve la salle de bains, puis repère ma valise. J’en sors un legging noir, un
pull-over qui appartient à Wes et mes pantoufles ultradouces et chaudes. Miss
Croft m’avait assuré que j’en aurais besoin, elle ne s’est pas trompée, il faudra
que je pense à la remercier.
Déjà réchauffée, je sors de notre chambre pour nous faire du café. Je suis au
milieu des escaliers lorsque je m’arrête brusquement, estomaquée. En face de
moi, les baies vitrées offrent une vue sublime sur la montagne. Tout est blanc et
parsemé de rochers et d’arbres. C’est époustouflant. Hypnotisée, je marche
jusqu’à la fenêtre, tourne la clé pour l’ouvrir et je laisse l’air glacial fouetter mon
visage et vivifier mon esprit. Ma respiration crée d’épais nuages de vapeur
blanche tandis que j’admire, émerveillée, le travail du Créateur.

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Lorsque je regarde l’océan Pacifique qui s’étend au-delà de notre plage, à
Malibu, je me sens apaisée et j’ai la sensation d’être chez moi. Mais la scène qui
s’étend devant mes yeux est majestueuse et irréelle, comme si je regardais une
photo, pas la réalité.
Soudain, deux bras musclés m’entourent par-derrière et me tirent à lui, dans la
chaleur de la maison.
– C’est magnifique, tu ne trouves pas ? demande Wes en nichant sa mâchoire
barbue dans mon cou.
– Si, c’est splendide.
Wes m’embrasse dans le cou, et le contraste de sa chaleur sur ma peau froide me
fait tressaillir.
– Je suis content que ça te plaise, vu qu’on va habiter là pendant vingt jours.
– Je ne me plaindrai pas, promis.
– Tu dis ça maintenant, mais j’espère que tu aimeras toujours autant la neige
dans deux jours, quand on devra dégager la voiture à la pelle.
Je retrousse mon nez en grimaçant. Wes adore quand je fais ça et il me regarde
en souriant avant de m’embrasser sur la joue.
– Que dirais-tu d’un petit déjeuner ? demande-t-il.
Mon estomac répond à ma place en grognant.
– Euh, je crois que mon ventre est d’accord.
– Ça marche. Ne reste pas dehors trop longtemps ou tes fesses vont geler,
répond-il en souriant.
– Avec un peu de chance, il n’y a que le gras qui gèlera ! je m’écrie en me
tournant pour lui donner une fessée.
Wes avait raison. Deux minutes plus tard, je suis congelée, alors je rentre aider
mon homme à préparer le petit déjeuner. Au passage, je trouve un plaid en laine
sur un des fauteuils et je m’enroule dedans. Je trouve Wes en train de sortir
diverses poêles des placards pour cuire le bacon et les œufs. Il m’a dit qu’il avait
appelé le gardien pour lui demander d’acheter les produits de base, histoire
qu’on ait de quoi petit-déjeuner avant de devoir aller faire des courses.
Je me charge de préparer le café pendant que Wes s’occupe de la nourriture.
– Qu’est-ce que tu veux faire aujourd’hui ? demande-t-il en jouant des sourcils.

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– Pas ça, je réponds en levant les yeux au ciel.
Il me dévisage en levant les sourcils.
– Bon si, d’accord, ça aussi, mais j’aimerais aller faire un tour en ville.
Découvrir les environs, faire des courses et voir où les gens du coin achètent
leurs tableaux. Ça m’aidera à savoir comment présenter ce reportage. L’équipe
de tournage arrive dans deux jours, donc il faut qu’on soit prêts à passer la
semaine avec eux.
Wes hoche la tête et retourne aux fourneaux. Lorsque nous avons fini de manger,
nous nous douchons, ce qui me fait penser qu’en fait, j’ai carrément envie de ça,
puis nous prenons la voiture pour aller en ville.
*
* *
Je ne m’attendais pas à une telle beauté. Excitée comme une puce, je descends
de la voiture et tourne sur moi-même. La ville est nichée au fond d’une vallée,
entourée par la chaîne de montagnes. Des gens entrent et sortent des magasins,
vêtus de couleurs vives qui contrastent avec le décor blanc de la nature.
– Je comprends maintenant, je chuchote, les yeux écarquillés.
– Tu comprends quoi ? demande Wes en prenant ma main.
J’ai beau porter un épais gant en cuir et laine, je sens sa chaleur se diffuser dans
mon corps.
– Pourquoi cet endroit est si prisé. C’est stupéfiant. J’ai été à Lake Tahoe et j’ai
déjà vu des montagnes enneigées, j’ai même fait du ski, mais ce n’était rien,
comparé à ça.
Je soupire longuement, essayant de tout emmagasiner, consciente que c’est
impossible. Peut-être que je finirai par m’habituer et que je parviendrai à graver
ce paysage à jamais dans ma mémoire, afin de m’y replonger chaque fois que je
mourrai de chaud sous le soleil californien.
– Oui, je vois ce que tu veux dire, dit Wes. Je suis venu ici des dizaines de fois,
alors ce sera chouette de voir la ville à travers tes yeux de novice.
Je souris et serre sa main.
– On commence par quoi ?
Il m’attire à ses côtés et passe son bras autour de mes épaules.

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– Allons boire un café chaud ici, dit-il en désignant le Colorado Coffee, puis on
marchera un peu. Ça te va ma belle ?
– Tout me va quand c’est avec toi, je réponds en m’appuyant contre lui. Merci
d’être venu, au fait.
Wes sourit jusqu’aux oreilles et le soleil scintille sur ses dents blanches. Ses
yeux sont étincelants de joie, et je fonds sur place en le voyant aussi détendu et
bien dans sa peau.
Quelque chose en Wes parle directement à mon âme, ce qui est à la fois
merveilleux et terrifiant. Heureusement, la joie est plus forte que la peur. J’ai du
mal à croire que, dans trois semaines, je serai Madame Weston Channing.
Nous marchons dans la rue, Wes me montre différents endroits où sortir, manger
ou boire des cocktails. Nous descendons tout Main Street, et j’aperçois un joli
bâtiment rose et ancien, nommé Main Street Bakery*1 & Café.
– Tu as déjà mangé là-bas ? je demande en désignant la vieille boutique.
Il est en train de répondre lorsqu’une femme en sort. Elle est aussi grande que
moi, mince et vêtue d’un long blouson en cuir marron attaché à la taille, super-
cool. Un foulard rose fuchsia attire l’attention sur son cou et vole dans la brise.
Ses cheveux noir de jais, qui tombent en grosses boucles sur ses épaules, ne me
sont pas inconnus. Je la fixe, essayant désespérément de voir son visage, mais
elle baisse la tête pour chercher quelque chose dans son sac à main.
– Et ils ont des œufs Bénédictine… dit la voix de Wes, soudain lointaine.
Toute mon attention est concentrée sur cette femme, de l’autre côté de la rue. Un
picotement étrange parcourt mon corps et me perturbe. Sa silhouette et ses
cheveux me font penser à quelqu’un, et mon cerveau tourne à vive allure. Je me
rapproche du bord du trottoir alors qu’elle sort ses lunettes de soleil de son sac.
Nos regards se croisent avant qu’elle ne les mette, et un cri d’effroi m’échappe.
Je recule et me cogne contre Wes.
– Ça ne peut pas être elle… je bégaie, accablée.
De colère.
De frustration.
De désespoir.
D’impuissance.

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Un sentiment d’abandon profond ravage mon cœur comme un train lancé à vive
allure.
– Qu’est-ce qu’il y a, Mia ? Ma chérie, on dirait que tu as vu un fantôme !
Je cligne plusieurs fois des yeux et regarde Wes, face à moi, et ses mains posées
sur mes bras.
– Je… Je… Ça ne peut pas être elle, je répète en secouant la tête et en regardant
derrière lui.
Or, la femme est partie, elle a disparu, comme si elle n’avait jamais été là.
– Mais… mais… elle était là ! je m’écrie en balayant la rue des yeux.
Elle s’est volatilisée.
– Qui ? Qui as-tu cru voir ? demande Wes, inquiet.
Je ravale la balle de golf qui s’est logée dans ma gorge et, les larmes aux yeux, je
regarde ceux de l’homme qui a choisi d’unir sa vie à la mienne. Il ne
m’abandonnera jamais, lui, et cette prise de conscience me redonne un peu de
force.
– Meryl Colgrove.
Wes fronce les sourcils.
– Bébé, je ne te suis pas. Qui est Meryl Colgrove ?
– Ma mère.
*
* *
Wes et moi fouillons les rues pendant un bon quart d’heure, regardant dans les
vitrines et dans les boutiques, mais c’est peine perdue. La femme a disparu. Wes
m’aide à regagner la voiture de location, et nous rentrons au chalet. Je ne dis rien
pendant tout le trajet, trop confuse pour parler.
– Ça ne peut pas être elle. C’est comme si elle était sortie de nulle part, le destin
ne peut pas être aussi cruel ! Quelles sont les chances que Meryl Colgrove
débarque dans la ville où je séjourne pour tourner le prochain sujet de Vivre en
Beauté ?
Et si elle habitait là ? C’est impossible. J’ai dû l’imaginer. Ça fait quinze ans que
je n’ai pas vu ma mère. Les chances que je lui tombe dessus à Aspen, dans le

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Colorado, sont infimes. C’est simplement quelqu’un qui lui ressemble, en tout
cas, qui ressemble à celle dont je me souviens.
Mes pensées se bousculent, confuses et incohérentes.
Quand nous arrivons au chalet, je suis convaincue qu’il est impossible que la
femme que j’ai vue soit ma mère. J’ai simplement vu quelqu’un qui lui
ressemble, c’est tout. Fin de l’histoire. Je n’ai pas à m’inquiéter.
Cependant, mon mec n’est pas du même avis. À peine rentré, il fonce sur le bar
et sort deux verres et une bouteille.
– Tu veux quelque chose à boire ? demande-t-il.
– Avec plaisir.
Je m’assieds sur un des tabourets. Wes boit une bonne gorgée de tequila, je
regarde sa pomme d’Adam monter et descendre lorsqu’il déglutit.
– Qu’est-ce que t’en penses ? C’était elle ? demande-t-il calmement en appuyant
ses coudes sur le bar.
Je sens qu’il est tendu, son regard plein de doutes me dit qu’il ne sait pas
comment aborder le sujet. Après tout, je lui ai rarement parlé de ma mère.
– Je ne sais pas. Elle lui ressemblait énormément.
Wes hoche la tête.
– Qu’est-ce qu’on fait là, Mia ?
– Je ne sais pas, bébé, je réponds en haussant les épaules. C’est bizarre. C’est
Shandi, l’assistante du Docteur Hoffman, qui nous a demandé de venir et qui
s’est occupée de tout.
– Quand est-ce qu’on est censés rencontrer ce type ? Celui qui a fait un don à
l’émission.
Je dois avouer que tout ça est très étrange. Cependant, j’y suis habituée, après
l’année que j’ai passée. Tout a semblé être le fruit du hasard et je me suis laissé
porter, allant là où j’étais demandée. Pour l’instant, cela a joué en ma faveur. J’ai
rencontré l’homme de ma vie, plein de nouveaux amis et mon frère Maxwell.
J’ai sauvé mon père et j’ai commencé une nouvelle carrière que j’adore. Tout n’a
pas été rose, mais en fin de compte, j’en suis sortie gagnante.
Je descends du tabouret, fais le tour du bar et prends mon homme dans mes bras.

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– Il s’appelle Kent Banks. Crois-le ou non, j’ai trouvé ça étrange aussi, alors j’ai
appelé Max. Tu sais ce qu’il a fait ? je dis en souriant.
Mon frère est terriblement protecteur vis-à-vis de Maddy et moi. Quand il a su
qu’un inconnu avait payé une grosse somme pour que je réalise un reportage sur
des artisans locaux, il a trouvé ça louche.
Wes sourit et m’attire contre lui.
– Il a lâché les chiens ?
– Si tu veux dire son détective privé, alors oui. Tu sais bien que Max est parano.
– Est-ce que je t’ai déjà dit combien j’aime ton frère ? Il est génial, dit Wes en
regardant au loin.
Je glousse et appuie mon front sur son torse, respirant son après-rasage. Je
frémis des pieds à la tête et mon entrejambe se contracte, rien qu’à l’idée d’être
de nouveau nue avec lui.
– Je suis d’accord.
– Qu’est-ce qu’il a trouvé ?
Il me serre plus fort et masse le creux de mes reins, me débarrassant des
dernières courbatures du voyage, je grogne quand il malaxe un point
particulièrement douloureux.
– Euh, il a dit que c’était un vétéran à la retraite. Qu’il a un diplôme d’architecte
et qu’il gagne une fortune en dessinant des chalets qui sont construits partout
dans le monde. Il a l’air réglo. Max allait creuser davantage, mais il n’était pas
inquiet. Surtout quand je lui ai dit que tu serais avec moi.
Les mains de Wes remontent dans mon dos pour plonger dans mes cheveux, puis
il saisit ma nuque et me fait lever la tête pour me regarder dans les yeux.
– Je ne laisserai jamais rien t’arriver. Tu es ma vie, mon tout. Je ne veux jamais
exister dans un monde sans toi.
– Moi non plus, je chuchote.
Il baisse la tête et capture ma bouche brièvement, dans un baiser aussi léger
qu’une plume.
– Je te protégerai toujours, de n’importe quoi et de n’importe qui, murmure-t-il
en reculant son visage. Qu’il s’agisse du boulot, de ta famille ou des fantômes

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qui refont surface, dorénavant et pour toujours, nous affrontons tout ensemble,
Mia.
Je hoche la tête.
– D’accord, bébé. On affronte tout ensemble.
J’appuie mon front sur le sien, et ce simple geste apaise mon inquiétude, mes
doutes et mes peurs.
– Je peux t’embrasser, maintenant ? gronde-t-il à voix basse, comme s’il perdait
le contrôle.
C’est justement ce dont j’ai envie, ou plutôt, ce dont j’ai besoin.
– S’il te plaît, oui.

*1. Pâtisserie. (NdT, ainsi que pour toutes les notes suivantes)

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Chapitre 2

Lorsque les locaux veulent traîner entre amis, se détendre et boire une bière en
mangeant des chicken wings, ils vont à la Taverne de Zane. En tout cas, c’est ce
que dit le site Internet du bar, et Wes est d’accord. Quand il était à la fac, lui et
les mecs de sa fraternité allaient dans ce pub après une longue journée sur les
pistes et, souvent, ils finissaient la soirée dans les bras d’une nana dont le seul
but était de rencontrer un mec riche et canon. À l’époque, Wes aimait faire la
fête.
Nous descendons main dans la main les marches raides qui mènent au pied de la
façade aux portes vertes. Un grand panneau rectangulaire, peint en lettres dorées
sur fond noir, occupe toute la longueur du mur et indique que nous sommes bien
à la Taverne de Zane.
Je trouve illogique de descendre des marches pour entrer dans un bâtiment dans
un coin où il neige énormément. J’aurais trouvé plus judicieux de monter pour
atteindre la porte d’entrée, ce qui permettrait d’éviter la neige. Cela dit, peut-être
est-ce un moyen pour que les clients restent à l’intérieur et continuent à dépenser
leur argent.
Wes m’ouvre la porte et m’emboîte le pas. Le lieu me rappelle tout de suite le
pub de Declan, à Chicago, où Hector et Tony m’ont amenée pour la Saint-
Patrick. C’est grâce à ce jour-là, entre autres, que Wes et moi sommes ensemble.
Il m’a fait la surprise de m’y retrouver, ce soir-là, et nous avons passé une nuit
torride et inoubliable avant qu’il ne reparte, ne laissant derrière lui que son
parfum viril et une odeur de sexe. Au fond de moi, je savais déjà qu’il y avait
quelque chose de puissant entre nous, mais je refusais de l’admettre. J’ai tout fait
pour garder mes distances. J’ai même passé une nuit avec Alec en avril, quand

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j’ai appris que Wes se tapait Gina DeLuca, la star de son film. Puis j’ai passé un
mois à coucher avec Taï, mon Samoan, pour l’oublier, mais ça n’a pas marché.
Au contraire, ça m’a plutôt aidée à voir ce que je voulais vraiment.
Wes pose sa main chaude dans mon dos et me guide à l’intérieur. Il y a plusieurs
écrans dans le pub et tous montrent le même match de football américain.
D’aussi loin, je n’arrive pas à voir qui joue, mais les maillots des clients et leur
concentration me disent que c’est un match important.
Wes m’aide à enlever mon blouson de ski et le met sur le dossier de mon
tabouret de bar.
– Alors, à quelle heure arrive ce type ? demande Wes en regardant sa montre.
À l’époque où tout le monde regarde l’heure sur son téléphone, j’aime le côté un
peu vieux jeu et traditionnel de Wes.
– À dix-neuf heures, je crois.
– Alors buvons une bière, on a vingt minutes à attendre.
– J’ai bien besoin d’un verre, c’est clair, je soupire en appuyant mes coudes sur
le bar brillant.
– Chérie, il ne se passera rien tant que je serai là. Tu es en sécurité avec moi. Si
ce type est louche, je le remettrai à sa place, fin de l’histoire. Ne t’inquiète pas.
Profite juste de boire un verre avec ton mec, d’accord ?
– Tu as raison, merci.
Je pose ma main sur la sienne et me penche pour embrasser la bande de peau nue
sur son poignet.
– Qu’est-ce que tu veux boire ?
J’étudie la longue liste de bières pression.
– J’aimerais bien du cidre, s’ils en ont.
– Eh, Weston Channing ! s’exclame le barman en venant vers nous. Comment tu
vas, frangin ?
L’homme doit avoir la trentaine. Il porte une moustache et une longue barbe
rousse, et il sourit jusqu’aux oreilles. Ses yeux sont noisette avec des reflets
roux, comme ses cheveux. Il est vêtu d’une chemise à carreaux rouge et noir,
ouverte sur un t-shirt blanc, et un jean déchiré rentré dans des bottes à lacets. Il a

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le look d’un homme qui passe ses journées à couper du bois, et ça lui va à
merveille.
Wes lui serre la main, la sienne semble minuscule dans la paume de l’autre. Mon
mec est loin d’être petit, mais à côté du barman, il ne fait absolument pas le
poids. Mon frère non plus, d’ailleurs, c’est pour dire.
– Alex Corvin ! Comment tu vas, frangin ? s’exclame Wes en posant son autre
main sur leurs mains jointes.
J’adore quand les hommes font ça !
Le barman secoue la tête, et sa barbe suit le mouvement. Je ne connais personne
qui soit fait pour porter la barbe, mais ce type s’en sort à merveille. Je dois
admettre qu’il est sexy, le look bûcheron me plaît bien. D’ailleurs, je parie que
ça plaît à la plupart des femmes. Il faut que je le prenne en photo et que je
l’envoie à Gin. Elle aura forcément une remarque cochonne à faire, et j’ai bien
besoin de rire.
– Alex, je te présente ma fiancée, Mia Saunders, dit Wes en passant son bras
dans mon dos. Mia, voici Alex. On était à la fac ensemble.
Je lui tends la main qui disparaît carrément dans la sienne. Waouh.
– C’est un plaisir de te rencontrer, Mia. Bon sang, Wes, tu t’en es trouvé une
jolie, hein ?
– Tu aurais préféré qu’il s’en trouve une moche ? je demande.
Wes et Alex éclatent tous les deux de rire, Alex caresse sa barbe.
– En tout cas, j’ai trouvé la bonne, c’est clair, répond Wes en m’embrassant sur
la tempe.
Alex appuie ses coudes sur le bar et me regarde avec un air conspirateur.
– S’il ne te traite pas bien, ou que tu as besoin d’un homme digne de ce nom, tu
sais où me trouver, n’est-ce pas ? dit-il d’une voix suave et séductrice.
Wes pousse Alex en arrière en posant sa main sur son front.
– Allez dégage ! s’exclame-t-il en riant. Plus sérieusement, Alex, la dernière fois
que je t’ai vu, tu travaillais à Wall Street et tu étais rasé de près et en costard. Et
maintenant, te voilà, dans notre bar habituel, à servir des bières et des burgers ?
Alex essuie le comptoir devant nous.
– Laissez-moi vous servir à boire et je reviens vous expliquer.

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Il me sert un cidre et une Guinness pour Wes, puis il va servir d’autres clients
avant de revenir à nous.
– Donc, voilà l’histoire, commence-t-il en croisant ses énormes bras et en jouant
avec sa barbe. Je gagnais une fortune à Wall Street…
Lorsque Wes boit une gorgée de Guinness, un peu de mousse blanche se colle
sur sa lèvre et je la regarde comme si elle détenait la clé de l’univers. Je me
penche pour l’essuyer avec mon pouce, puis je lèche mon doigt et le regard de
Wes s’assombrit.
– Ne commence pas, gronde-t-il.
Je me ressaisis et me concentre sur Alex, qui a cessé de parler.
– Continue, mec, dit Wes.
– T’es sûr ? Elle a l’air plutôt partante. J’ai un bureau en bois massif à l’arrière,
si ça devient trop dur, lance-t-il en souriant.
Une bouffée de chaleur m’envahit, je sens que je rougis jusqu’aux oreilles.
– Non, ça va, t’en fais pas. Je m’occuperai d’elle à la maison, dit Wes en me
faisant un clin d’œil.
Un clin d’œil. À moi ! Cet enfoiré ne paie rien pour attendre. Comme si j’étais la
seule à être excitée en permanence ! J’appuie le verre de cidre froid sur ma joue,
savourant sa fraîcheur.
– Il s’avère que je déteste travailler avec les chiffres, sauf quand ils sont sur
l’addition d’un client. J’adore être en contact avec les gens, faire de nouvelles
rencontres et offrir un bel endroit à mes clients. La tension et le stress allaient me
tuer, alors je suis parti.
– T’es parti ? s’exclame Wes en s’étouffant sur sa bière. Mais tu ne gagnais pas
des millions ?
– Si. En tout cas, j’avais assez d’argent pour reprendre ce bar à son propriétaire
et m’acheter une baraque. Maintenant, je profite du grand air tous les jours. Et
j’adore ma vie.
– Et les amours ?
Les épaules d’Alex retombent immédiatement, sur un homme de cette taille,
c’est sacrément impressionnant.
– Un jour, peut-être.

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Wes pose une main sur le bras de son pote.
– Je suis content pour toi.
Alex me regarde, sourit et penche la tête sur le côté.
– Et je suis très content pour toi, dit-il.
– Je ne me plains pas, dit Wes en m’attirant contre lui.
*
* *
Quand nous avons fini nos verres, Wes commande une nouvelle tournée et je ne
vois pas le temps passer. Soudain, quelqu’un tapote mon épaule.
– Euh… vous êtes Mia Saunders ? demande une grosse voix.
Je me tourne sur mon tabouret et je lève la tête… très haut. Je découvre un
visage brut et beau, d’épais cheveux bruns qui retombent sur ses yeux. Sa
mâchoire carrée est rasée de près et son menton a une fossette en son milieu,
comme celles qui donnent envie aux femmes d’y mettre le pouce pour le tenir en
l’embrassant. En tout cas, si j’avais trente ans de plus, je n’aurais rien contre
embrasser cet homme. Il est vêtu d’un t-shirt blanc à manches longues, sous une
chemise laissée ouverte. En fait, ce look doit être à la mode dans ce coin, parce
qu’Alex est habillé pareil alors qu’il a vingt-cinq ans de moins.
– Bien sûr que vous êtes Mia, ajoute-t-il.
Il semble prendre note de mes cheveux, de mon visage, de mon corps, avant de
s’arrêter plus longtemps sur mes yeux, me faisant frissonner.
Wes se lève et se place devant moi et, cette fois, j’apprécie son geste protecteur.
Cet homme me regarde comme s’il me connaissait, et c’est très déconcertant.
– Vous êtes Kent ? demande Wes.
– Kent Banks, répond l’autre en lui tendant la main. C’est à cause de moi que
vous êtes là.
Wes lui serre la main et se présente, et j’en fais de même.
– Vous avez le temps de discuter ? dit-il en désignant une table avec une
banquette.
J’attrape mon verre de cidre.
– Bien sûr, merci.

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Autour de nous, les supporters s’agitent, la fin du match approche. Ils ne
semblent pas avoir d’équipe préférée, car chaque action est accompagnée
d’applaudissement ou de sifflements. J’y suis habituée, étant donné que j’ai
travaillé dans des bars presque toute ma vie. Le bruit ne me dérange pas et je sais
en faire abstraction.
– Alors, Monsieur Banks. Auriez-vous l’amabilité de me dire pourquoi vous
avez payé une fortune pour me faire venir ici, moi, en particulier, pour faire une
émission sur les artistes locaux, dont votre femme ?
– Je n’ai pas payé un centime, répond Kent en fronçant les sourcils et en croisant
les bras.
Je regarde Wes qui semble aussi confus que moi.
– Mon patron m’a dit que vous aviez fait un don très généreux pour que je
vienne faire un sujet sur votre femme.
– C’est faux, répond-il en secouant la tête.
– Alors, il doit y avoir un malentendu. Vous n’avez pas demandé que je vienne ?
je demande, incertaine.
Si ce n’est pas le cas, pourquoi suis-je à Aspen, et pourquoi m’a-t-il donné
rendez-vous dans un bar pour discuter avant l’interview ?
– J’ai demandé que vous veniez, oui, mais pas dans les conditions que vous
décrivez.
Wes prend ma main pour m’arrêter lorsque j’ouvre la bouche pour le contredire.
Cette histoire est insensée et il ne fait rien pour éclairer la situation. Je déteste ça,
j’ai l’impression d’être stupide.
– Monsieur Banks, ce que ma fiancée et moi essayons de comprendre, c’est
pourquoi vous lui avez demandé de venir. Pourquoi elle, en particulier.
Kent joue avec le dessous de verre en carton.
– J’ai pensé que ce serait une bonne pub pour ma femme. Son travail est génial,
et vous faites des émissions sur les gens qui créent de la beauté. Je suppose que
ça vous vient naturellement, parce que vous êtes superbe. Ma femme a vu votre
émission et ça l’a… excitée.
Il balaie la pièce du regard et je devine qu’il ne me dit pas tout. À Las Vegas, on
apprend à lire les mensonges sur les visages des gens. Et Kent Banks ne dit pas

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toute la vérité.
– Excitée ? je demande.
– Oui. Elle n’est pas facile à apprivoiser et quand elle vous a vue à l’écran, j’ai…
euh… su qu’il fallait que je vous fasse venir.
– Pourquoi moi ?
Il me regarde intensément. C’est affreusement gênant et j’ai l’impression que ce
qu’il voit ne lui plaît pas. Je n’aime pas ça, j’ai confiance en moi, d’habitude,
mais je me sens… petite, sous son regard perçant.
– Je n’ai pas demandé que ce soit vous, ç’aurait pu être n’importe qui.
Il s’efforce d’avoir l’air nonchalant, mais je ne suis pas dupe. On m’a raconté
des tonnes de mensonges, que ce soit mon père, Blaine, ou d’autres, et ce type
fait exprès de rester vague. C’est juste que je ne sais pas pourquoi.
– Parlez-moi de vous.
Avant d’appeler Shandi pour lui hurler dessus, j’ai besoin d’en savoir plus sur le
type qui m’a fait venir ici. J’ai de plus en plus l’impression que cette garce m’a
fait un sale coup. Elle voulait sans doute m’éloigner de L.A. pour avoir le
Docteur Hoffman pour elle toute seule. Cette meuf est tarée. Elle sait que je suis
folle amoureuse de Wes et que Drew est dingue de sa femme, mais elle fait tout
pour saboter mon travail.
Et puis, il y a ce bûcheron et les histoires qu’il invente. Ça sonne faux. Et mon
père m’a toujours dit que si quelque chose sonne faux, il faut creuser davantage.
Kent ne m’a pas fait venir ici pour rien.
Il fait signe à la serveuse de venir et commande une bière.
– Je suis un vétéran de l’armée. À la fin de mon service militaire, j’ai obtenu
mon diplôme d’architecte et j’ai utilisé mes contacts au gouvernement pour
décrocher de gros contrats. Ça fait quinze ans que je fais ça, et ça m’a offert la
vie dont je rêvais. Une vie avec la femme que j’aime, plus d’argent qu’il n’en
faut, une maison magnifique et du terrain. C’est le rêve américain, et c’est tout
ce que j’ai toujours voulu.
– Vous avez des enfants ? je demande.
– Non. J’en ai toujours voulu, mais… non.
– Pourquoi pas ?

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– Le bon moment n’est jamais arrivé. J’étais dans l’armée jusqu’à trente-cinq
ans. J’ai rencontré ma femme quand j’en avais quarante, elle ne voulait pas
d’enfants.
Je bois une longue gorgée de cidre.
– Votre femme est artiste ici ?
– Oui, elle a une galerie sur Main Street qui s’appelle 4M.
– 4M comme le chiffre et la lettre ? je demande pour savoir où aller demain.
– C’est ça.
– Qu’est-ce que ça veut dire ? Le 4 et le M ?
Il secoue la tête et son visage s’assombrit.
– Je ne sais pas vraiment. Elle m’a dit que ça représentait quelque chose qu’elle
avait dû laisser derrière elle, il y a longtemps.
Wes finit sa Guinness et repose son verre sur la table.
– Écoutez, Monsieur Banks. On ne peut pas dire que tout ça ait été très plaisant.
Je suis sûr que vous êtes sympa, mais Mia ne devrait pas être là dans des
circonstances douteuses.
– Qu’est-ce que ça veut dire ? répond Kent d’un ton défensif.
– Ça veut dire que je ne vais pas laisser ma future femme se faire balader par son
assistante mal renseignée. Mia, chérie, je suis sûr que si tu appelles Hoffman, il
pourra clarifier la situation et nous rentrerons à Malibu avant Noël.
– Malibu ? C’est là que vous habitez ? demande Ken, surpris.
– Ouais, je réponds en pensant à l’occasion ratée de passer Noël sous la neige.
Je n’ai pas envie de partir.
– Eh bien, vous avez fait un sacré chemin pour repartir bredouilles, non ? Ma
femme a beaucoup de talent, et je suis sûr que si vous allez à sa galerie, vous
trouverez ce que vous avez toujours cherché. Un morceau de vous-même, dit-il.
Après tout, l’art ouvre l’âme et laisse entrer la lumière là où il n’existait que
pénombre.
– Vous insinuez que mon âme est sombre ? je rétorque.
– Pas du tout, non, pourquoi vous penseriez ça ?
– Bon, je crois que nous allons partir. Merci de nous avoir rencontrés, Monsieur
Banks. Tout ça semble… je ne sais pas… étrange, je dis en secouant la tête.

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Il se lève, plonge ses mains dans ses poches et me dévisage. J’en ai encore la
chair de poule. C’est comme si je lui faisais penser à quelqu’un qu’il a connu.
– J’espère que vous déciderez de rester, Mia. J’ai le sentiment que vous allez
trouver quelque chose que vous ne pensiez pas chercher.
– Quoi, vous êtes voyant, aussi ?
– Non, je suis juste un vieux sage, répond-il en souriant.
– Vieux ? Vous ne pouvez pas avoir plus de cinquante ans, si ?
– J’ai cinquante-cinq ans.
– Ce n’est quand même pas vieux. Votre cœur est encore jeune.
– Tout le monde est guidé par son cœur, d’une façon ou d’une autre.
Il a vraiment une façon étrange de parler, pour un vétéran-architecte.
– J’espère que vous resterez. Ce serait une bénédiction que vous rendiez visite
aux galeries.
Une bénédiction ? Quel étrange choix de mot !
– On verra, dit Wes en m’aidant à mettre mon blouson.
– En effet, je pense que beaucoup d’yeux vont s’ouvrir durant les prochains
jours.
– D’accord, si vous le dites, je dis en levant les yeux au ciel.
Wes prend mon bras et je me tourne pour saluer le bûcheron géant. Il lève la
main et l’agite lentement, comme s’il ne voulait pas nous dire au revoir.
Nous allons à la voiture et Wes ouvre ma portière. Une fois au volant, il se
tourne vers moi en fronçant les sourcils.
– Ce type est louche.
– Ouais, mais il a l’air inoffensif. Je vais appeler Shandi pour l’engueuler de
nous avoir envoyés ici. C’est pas cool de sa part.
– Non, c’est clair. Qu’est-ce que tu veux faire ? L’équipe de tournage arrive
demain soir, et la famille arrive dimanche pour les fêtes. Tu veux annuler et
rentrer à la maison ? Passer Noël sur la plage ? demande-t-il en jouant des
sourcils.
Je fais la moue et le regarde avec des yeux de cocker.
– Noël sous la neige ?
– Noël sous la neige, je répète en souriant jusqu’aux oreilles.

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– D’accord, bébé. Alors, ce sera un Noël tout blanc. Tu veux quand même
tourner le sujet ?
Je pourrais facilement refuser. D’habitude, c’est moi qui choisis mes sujets, mais
ce n’est pas une mauvaise idée de filmer les artistes locaux. Les fans de
l’émission apprécieront, surtout pendant les fêtes, quand les gens se sentent
d’humeur à faire plein de choses manuelles.
– Je pense qu’on devrait le faire.
– C’est vrai que ce serait facile. Il suffit d’aller dans les galeries, d’interviewer
les artistes et de montrer les superbes environs. C’est parfait pour la saison.
– C’est vrai. Et puis, je suis curieuse maintenant de rencontrer la femme de ce
type, pas toi ?
– Pas vraiment, non, répond-il en secouant la tête. J’ai l’impression qu’on est sur
le point de se faire ratatiner.
– Ratatiner ?
– Ouais, comme si quelque chose allait nous tomber dessus, répond-il en
frappant sur le tableau de bord, comme s’il écrasait un moustique.
– T’es bargeot ! je m’exclame en riant.
– Eh, c’est moi qui te dis ça normalement, pas l’inverse.
– Plus maintenant, je t’ai passé le trophée du plus grand fou de Malibu !
Il lève les mains en l’air, comme s’il tenait une récompense.
– Je voudrais dédier ce prix à ma superbe femme, Mia, dont la folie ne connaît
aucune limite et qui me rend fou, surtout quand elle me lèche, me suce, me prend
dans sa…
– Rends-moi mon trophée ! je m’exclame en faisant mine d’attraper le prix
invisible.
Nous passons le reste du trajet à rire et à dire n’importe quoi, et lorsque nous
arrivons enfin au chalet, nous sommes tous les deux un peu bargeots.

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Chapitre 3

Wes s’agite dans son sommeil en marmonnant de façon inintelligible. Je tends


le bras pour poser la main sur son torse, il se calme instantanément. Une simple
caresse suffit. Cela en dit long sur la puissance du lien qui nous unit.
– Mia, ma Mia, soupire-t-il.
Il continue de murmurer des phrases sans queue ni tête. Par la fenêtre, je vois le
soleil se lever. J’ai laissé les rideaux ouverts pour que le mur de montagnes
immaculées soit la première chose que je vois en ouvrant les yeux. La vue est
tellement différente de celles auxquelles je suis habituée. J’apprécie que la
nature nous ait donné une telle variété de paysages à admirer. Je me demande
comment ce doit être au printemps, tout vert et luxuriant. Certainement superbe.
Il faudra que je parle à Wes de revenir quand il fera plus chaud.
– S’il te plaît, Mia… S’il te plaît.
Sa voix n’est guère plus qu’un chuchotement, mais cette fois-ci, j’entends tout.
S’il te plaît quoi ? Je m’assieds dans le lit et regarde mon homme. Son torse est
nu, exposant ses muscles sculptés. Il a repris le poids qu’il a perdu pendant sa
captivité en utilisant la salle de muscu à la maison et l’océan pour se raffermir. Il
me suffit de le regarder pour qu’une vague de désir déferle dans mes veines et
embrase mon sang. Je mouille déjà en le matant et, incapable de me retenir, je
promène mon index sur son torse.
Wes gémit et tourne la tête comme si, dans son sommeil, il essayait de se
rapprocher de moi. Je dégage la couette et découvre que sa verge est déjà dure.
Je salive en regardant le superbe pénis qui m’appartient, qu’aucune autre femme
ne touchera, ne sucera, ne baisera jamais. Il est à moi, et en échange, Wes me
possède corps et âme. On ne peut pas dire que ce soit équitable, car je suis loin

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d’avoir la même valeur que lui. Or ici, maintenant, je peux lui faire n’importe
quoi et il succombera, pleinement, entièrement, sans hésitation.
L’idée d’exercer une telle influence sur les désirs d’un autre et de lui donner du
plaisir comme bon me semble est enivrante.
Je dégage complètement la couette et chevauche ses jambes, puis je me penche
jusqu’à ce que mon visage soit juste au-dessus de son sexe. Son odeur virile me
fait tourner la tête et je ferme les poings. Wes. Il n’y a qu’un homme qui sente
comme ça, et mon corps le reconnaîtrait n’importe où, nous sommes connectés
de façon viscérale et primitive.
Du bout de la langue, j’effleure sa verge épaisse. Son goût riche et salé ravit mes
papilles, une bouffée de chaleur m’envahit et se niche entre mes cuisses. Mon
bassin avance dans le vide et ma chatte se contracte, désespérée de sentir le sexe
de Wes enfoui en elle… mais pas encore.
J’expire, libérant les flammes de mon désir sur sa queue. Il remue légèrement,
pousse un grognement, et je vois son sexe durcir davantage. J’adore regarder le
corps masculin, voir comment l’excitation se précipite dans le membre le plus
délicieux des hommes avec une violence qui n’a d’égale nulle part. Je n’ai
jamais pensé qu’un pénis était beau, auparavant, mais celui de Wes l’est
réellement. Au repos, il est doux, pend sur quelques centimètres, et est couvert
d’une fine couche de poils soigneusement entretenus. En érection, il me fait
perdre la tête. D’ailleurs, je suis convaincue qu’il n’existe que pour me donner
du plaisir. Sa verge est longue, épaisse et dure comme fer dès qu’il pense à me
prendre. C’est ce qui me plaît le plus, je crois. Parfois, les hommes prennent du
temps à bander, pas Wes. Le moindre soupçon d’une escapade suffit à le
préparer. Son appétit sexuel rivalise avec le mien. Nous sommes parfaits l’un
pour l’autre.
Je pose ma langue à plat sur sa verge et je commence à la base pour le lécher
jusqu’à la pointe. Son corps se contracte et ses abdos se transforment en briques
carrées. Ses mains plongent sur ma tête, et je ne m’arrête pas. Qu’il soit réveillé
ou non, mon homme adore sentir ma bouche sur lui. Je ne pourrais plus
m’arrêter même si je le voulais, et je ne le veux pas.

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Je suce son gland et lève la tête. Les paupières de Wes s’entrouvrent et il me
regarde en clignant lentement des yeux. Ma langue tourne autour du sommet de
son sexe et je déguste la goutte qui en jaillit, son goût salé me fait gémir.
– Tu es une déesse. Je ne renoncerai jamais à un amour comme le tien, grogne-t-
il.
Je fredonne contre sa queue, puis je le prends aussi profondément que possible.
Ce que je ne peux prendre dans ma bouche, je l’enserre dans ma main. Sa tête
retombe en arrière, mais ses doigts se referment sur mes cheveux. Je sais qu’il
veut soulever son bassin mais qu’il se retient, et je l’aime encore plus pour sa
volonté herculéenne. Si nos rôles étaient inversés, je serais déjà en train de
frotter mon sexe contre son visage, d’ailleurs il adore ça.
La douleur lancinante entre mes jambes contrôle mes gestes et je m’allonge
contre ses jambes pour me frotter à sa cuisse. Lorsque mon sexe mouillé touche
sa cuisse, Wes soupire en sifflant.
– Bébé, tourne-toi et mets ta chatte sur mon visage. Tout de suite.
Je secoue la tête et le lèche plusieurs fois avant de répondre.
– Pour toi, pas pour moi.
Il agrippe mes cheveux et soulève ma tête.
– Si c’est pour moi, alors tourne-toi et donne-moi ta chatte. Je veux sentir ton
miel sur ma langue quand je jouis. Maintenant. Tourne-toi.
Je suis trop excitée pour refuser. Je me tourne et place mes genoux de part et
d’autre de sa tête, sur les oreillers, et je suis à peine installé que Wes glisse
lentement ses doigts dans mon antre mouillé.
– Doux Jésus, tu as déjà joui ? susurre-t-il.
Je secoue la tête.
– Bon sang Mia, tu es trempée. Quand tu as autant envie, prends ce qui est à toi.
Maintenant dis-moi, de quoi as-tu envie ? demande-t-il alors que sa bouche est à
quelques millimètres de mon sexe.
– De jouir, je chuchote.
– Tes désirs sont des ordres.
Il pose une main sur mon dos et la promène jusqu’à ma nuque.
– Mais avec ma queue dans ta gorge, ajoute-t-il en appuyant sur ma tête.

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Je n’attends pas une seconde de plus, je remonte le long de son sexe en y
déposant des baisers mouillés. Son gland dégouline de liquide préséminal et un
cri m’échappe, car il choisit ce moment pour capturer mon clitoris dans sa
bouche et le sucer. Il pousse ma tête pour que je l’avale et il soulève le bassin
pour s’enfoncer dans ma gorge en même temps qu’il plonge ses doigts en moi.
Je décolle comme une fusée, tressautant sous l’effet de mon orgasme. Un plaisir
intense jaillit dans mes veines, depuis mon clitoris jusque dans tout mon corps.
Ses doigts me maintiennent en l’air et je m’étouffe sur son sexe. Wes le réalise,
alors il empoigne mes cheveux pour soulever ma tête. Une nouvelle décharge
électrique se précipite dans mes veines, mêlée au picotement de mes cheveux
tirés et aux allers-retours furieux de ses doigts. Il continue de me sucer et je sens
une seconde tournée de plaisir s’accumuler dans mon bas-ventre.
– Mia, ta bouche, ma chérie. Suce-moi, et je te renvoie au septième ciel.
Je secoue la tête, comme pour me réveiller d’un rêve, et je me mets au travail.
Chaque coup de langue sur son érection est assorti d’un coup de langue sur ma
chatte. Chaque fois que je le suce, il suce mon clito. Je le prends profondément
dans ma gorge et il synchronise les mouvements de sa langue avec les allers-
retours de ma bouche. Ses doigts saisissent mes fesses et m’écartent davantage,
puis sa langue trace les contours de mon sexe avant de redescendre sur mes
lèvres trempées. Je me frotte à son visage, cherchant à assouvir mon plaisir, et il
ne me déçoit pas.
Je tiens fermement la base de son sexe, arrêtant brusquement son orgasme.
– Putain ! gronde-t-il.
Je me dépêche de me retirer de sa bouche et, avant qu’il ne puisse me punir,
j’aligne mon sexe sur sa queue et m’assieds brusquement sur lui, nous arrachant
à tous les deux un cri rauque. Il saisit mes hanches et me tient alors que je le
chevauche, façon cow-girl inversée. Les sensations sont brutales dans cette
position. Chaque aller semble m’empaler et c’est à la fois délicieux et
insoutenable. Je me penche en avant et appuie mes mains sur ses tibias pour une
meilleure prise.
– Mon Dieu, susurre-t-il.

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Il serre plus fort mes hanches et quand je tends les mains vers ses pieds et me
penche encore plus, sa queue se loge si profondément en moi que je peine à
respirer.
– Bon sang, gronde-t-il en serrant les dents.
Je reste immobile quelques instants, laissant mon corps s’ajuster à cette nouvelle
intrusion. J’ai l’impression que si je me penchais en arrière, je le sentirais jusque
dans mon ventre. Je me soulève sur mes genoux pour aller et venir sur sa verge,
explorant cette sensation. Chacune de mes terminaisons nerveuses crépite quand
son épaisseur me pénètre et me transperce, frappant mon point le plus sensible.
– Wes, je gémis en accélérant.
– C’est ça, bébé, prends-moi bien profond. Plus fort. Tu peux aller plus vite,
gronde-t-il.
Je vois ses orteils se recroqueviller et, alors que je m’habitue à la position, une
de ses mains quitte mes hanches et son doigt dessine des cercles autour de mon
antre interdit. Hypnotisée par son geste, mon bassin bouge également en rond,
remuant sa queue en moi. Lorsque je me soulève, son pouce commence à se
frayer un passage. Lorsque je redescends, son pouce s’enfonce.
– Mon Dieu, je ne sais pas si je peux supporter…
J’essaie de me soulever, mais Wes m’en empêche.
– Tu prendras tout ce que j’ai à te donner, Mia.
Son pouce suit les va-et-vient de mon bassin, et l’intensité de la stimulation est
envoûtante.
– Un jour, je prendrai tout. Tout ce que tu as à donner, pour le garder en sécurité,
le protéger avec toute mon âme.
Sa voix est pleine d’émotion, ou de désir, ou peut-être les deux, je ne sais pas.
Tout ce que je sais, c’est qu’il me remplit, me complète et fait chavirer mon
univers.
– Mon Dieu, je t’aime, je dis en me soulevant et en me rabaissant violemment.
Je penche la tête en arrière et je jouis alors qu’il est enfoui en moi. Son pouce
continue de bouger, poussant mon orgasme vers des sommets si hauts que j’en
perds ma capacité à respirer.
– Oh, ta chatte est tellement serrée, elle m’étrangle, dit-il en libérant mes fesses.

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Il saisit de nouveau mes hanches et me pénètre plusieurs fois jusqu’à ce que, le
bassin en l’air, il éjacule en moi avec un long gémissement émerveillé. C’est
trop. Trop de sensations. Trop d’amour. Tout simplement trop. À tel point que
j’en perds connaissance.
*
* *
Lorsque je me réveille, les mains de Wes sont dans mes cheveux et ma tête
repose sur son torse. Précautionneusement, je tends les orteils et sens des
courbatures dans mon ventre, mon dos et mes parties intimes. En fait, j’ai
l’impression d’avoir monté un cheval à cru et d’en être tombée.
– Ah, te revoilà. Je t’ai perdue une minute, on dirait.
– Je suis restée inconsciente longtemps ? je marmonne contre son torse, ne
voulant plus solliciter mes muscles.
– Juste assez longtemps pour te retirer de ma bite, te retourner et te blottir contre
moi. Je n’arrive pas à croire que tu aies perdu connaissance.
– Ouais, eh ben, c’était intense, je dis en embrassant son torse.
Wes continue de caresser mes cheveux et mon dos.
– Oui, c’est vrai. Qu’est-ce qui t’a donné envie d’essayer cette position ?
– Je ne sais pas, c’est la première fois. Tu m’as rendue tellement folle qu’il
fallait que je te prenne, et c’était plus rapide que de me retourner.
– C’est vrai, acquiesce Wes. En tout cas, ça marche. J’aime voir tes fesses
monter et descendre sur moi et ma queue disparaître en toi. Ça me plaît, bébé.
– Espèce de pervers ! je gronde en souriant avant de mordre son pec et de
l’embrasser.
– Eh, continue comme ça et je ferai en sorte que tu ne puisses plus marcher,
prévient-il.
Je lève la tête et le regarde en jouant des sourcils.
– T’es sérieux ?
Je promène ma main sur mon torse.
– Tu crois que ce sera toujours aussi bon ?
Je n’ai jamais été avec un homme qui me rendait aussi folle de désir. J’ai tout le
temps envie de Wes. Nuit et jour, qu’on soit en sueur après le sport, couverts de

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sable, salés après une session de surf, peu importe. Ça n’est pas très normal.
Wes lève mon menton pour me regarder dans les yeux.
– Je crois que quand on s’aime, c’est toujours aussi bon. Nos corps deviennent
une manifestation physique de notre engagement émotionnel. Ce qui compte,
c’est d’être ensemble, d’être connectés physiquement et mentalement pour ne
faire qu’un.
Je souris et remonte vers son visage pour l’embrasser langoureusement.
– Je veux ça avec toi, pour toujours.
– Bébé, notre amour est éternel. Je reconnais ma moitié quand je la vois. Rien ne
m’empêchera de te faire mienne à jamais. Dans deux semaines, tu seras à moi
légalement, mais ça ne veut pas dire que tu n’es pas déjà à moi ici, dit-il en
désignant son cœur.
Les larmes me montent aux yeux en l’entendant me déclarer son amour et me
faire part de sa confiance en l’avenir de notre couple.
– C’est vrai. Je suis à toi, Wes. Pour toujours.
Je me blottis contre lui et pense à notre avenir. Nous n’en avons pas énormément
parlé, en fait.
– Comment tu vois notre avenir, Wes ? je demande, à la fois nerveuse et excitée.
La plupart des couples parlent de leurs souhaits bien avant de décider de se
marier. Et dans deux semaines, on ne pourra plus faire marche arrière. Ce n’est
pas que je panique, car je sais que suis faite pour vivre aux côtés de cet homme.
Je serai sa femme, je suis déjà son amie, mais quoi d’autre ?
– Tu veux savoir où je nous vois dans cinq ans ?
– Ouais, plus ou moins. Qu’attends-tu du futur, et comment tu m’y vois ?
Il me serre plus fort contre lui et sa chaleur envahit mon cœur.
– Eh bien, je pense que durant l’année qui vient, grâce au Docteur Hoffman, tu
vas devenir plus célèbre et convoitée que tu ne le penses.
Je lève la tête et le regarde, étonnée.
– Je suis sérieux ! Je crois que le public s’est entiché de toi et que les patrons de
Century Productions sont en train de réaliser quel joyau ils ont entre les mains.
Ils ne te laisseront pas partir facilement. Il faudra donc qu’on s’occupe de ça.
Je repose ma tête contre ses pectoraux pour l’écouter parler.

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– J’ai hâte de faire tout ce que font les couples mariés normaux, les barbecues en
été, les repas entre amis, cuisiner ensemble, surfer… Tu travailleras et moi je…
eh bien, je ne sais pas ce que je vais faire, soupire-t-il.
Sans le regarder, je lui pose la question que nous évitons tous les deux depuis
qu’il est rentré d’Indonésie.
– Et le film ?
Il plonge ses ongles dans ma peau. Ça ne dure qu’une seconde, mais c’est assez
pour me faire savoir combien ça lui pèse.
– C’est difficile. Je ne sais pas quelle est la meilleure chose à faire. D’un côté,
est-ce qu’on doit oublier le projet pour de bon, par respect pour ceux qui sont
morts là-bas ? D’un autre, ils sont morts en faisant ce film. Est-ce que c’est
irrespectueux de ne pas le montrer au public ? Les bénéfices du film pourraient
être reversés aux familles pour qu’ils n’aient plus jamais de soucis d’argent. Je
sais que beaucoup d’entre eux avaient des enfants. Ils avaient sans doute des
assurances vie, et la maison de production a dû les dédommager, mais rien ne
remplace la mort d’un être cher. On ne peut pas les oublier. Je ne les oublierai
jamais, dit-il d’une voix tremblante.
Une larme coule sur sa joue. Je déplace mon poids sur lui et le chevauche, puis
je me penche pour prendre son visage dans mes mains et essuyer ses larmes. Je
les embrasse et les aspire, les prenant dans mon corps pour partager le poids de
son fardeau.
– Tu veux mon avis ?
– Ouais, dit-il en se raclant la gorge.
– Finis le film, si tu peux. Fais don des bénéfices, y compris des tiens, aux
familles, ou crée une association qui aidera les gens. Je crois qu’une partie du
problème est due au fait que tu ne veux pas tirer profit d’un film qui a contribué
à la mort de tes amis, je me trompe ?
Wes ferme les yeux, et de nouvelles larmes coulent tandis qu’il hoche la tête.
– D’accord, alors dans ce cas, fais en sorte qu’ils ne soient pas morts en vain.
Son souffle est lourd. Je sais que la conversation n’est pas facile pour lui, mais il
ne me repousse pas. Il ne me prend pas sauvagement pour lâcher prise. Au

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contraire, il accepte la douleur et n’a pas peur de la montrer. C’est un signe qu’il
progresse et qu’il est sur la voie de la guérison.
– Ça me plaît. Je vais créer une fondation. Je vais en parler aux directeurs et aux
investisseurs, pour savoir ce qu’ils en pensent. Tout le monde attend mon avis, et
honnêtement, je ne savais pas comment aborder la situation.
Je souris et caresse ses lèvres du bout des doigts.
– Tu n’as pas eu tort de te cacher dans ton coin, le temps d’aller un peu mieux.
Mais tu aurais tort de te cacher à jamais et de ne pas rendre hommage à ceux que
tu as perdus. Je crois que tu sais ce que tu dois faire.
Wes hoche la tête et pose une main sur ma joue.
– Tu es ma seule lumière dans cette nuit sans fin. Tu le sais, n’est-ce pas ?
– Alors, j’éclairerai ta route. Tous les jours et à jamais.
– Cette lumière me ramène à toi, Mia, dit-il d’une voix douce.
– Et je serai toujours là. Maintenant, dis-moi.Qu’est-ce que tu vas faire après
t’être occupé du film ? Tu vas continuer ?
Il secoue vigoureusement la tête.
– Non. Du moins, pas tout de suite. Je veux revenir à ce qui me plaît, ce qui me
fait du bien.
– L’écriture ? je demande en souriant.
– L’écriture, répond-il, et son regard s’illumine. J’ai quelques idées. Mais elles
n’ont rien à voir avec la guerre et les conflits.
Je me rallonge sur lui et niche ma tête dans son cou.
– Ah bon ? Raconte-moi.
– L’histoire parle d’une fille, dit-il en me serrant contre lui.
– Quel genre de fille ?
– Une fille superbe, avec un corps de rêve et un cœur en or.
– M-hmm… et ?
Wes promène sa main dans mon dos, comme s’il peignait un tableau.
– Elle accepte un boulot d’escort.
Je souris.
– Ah, et qu’est-ce qui se passe ensuite ?
– Elle rencontre un tas d’hommes, déclare-t-il froidement.

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– Ah oui ?
– Oui. Mais il n’y en a qu’un seul dont elle tombe amoureuse. Tu comprends,
c’est le coup de foudre.
– Ah bon. Avec une escort, c’est pas plutôt le coup de langue ?
Il empoigne mes fesses et les serre. Je le sens durcir sous moi.
– Non. Tu vois, cette femme est spéciale. Elle n’est pas seulement superbe avec
un corps de rêve et un cœur en or, elle a un don.
– Quel genre de don ?
– C’est un don qui n’est pas physique. En fait, elle fait le don de son amour. Et
quand l’un des hommes qu’elle rencontre reçoit ce cadeau, il est heureux pour le
reste de ses jours.
Je lève la tête pour l’embrasser sur la joue.
– Et à qui offre-t-elle ce cadeau ?
– Tu ne l’as pas encore compris ?
– Euh… non, je réponds, confuse.
Wes rit et m’embrasse sur la tempe.
– Elle donne un peu de son amour à tous ceux à qui elle tient, et ils tombent tous
un peu amoureux d’elle.
– Mais qu’en est-il de son grand amour ? je demande en gloussant. Comment
peut-il être l’amour de sa vie si elle donne un peu d’elle-même à tout le monde ?
– Parce qu’il n’y a qu’un homme qui lui fait don de tout son amour. Il est prêt à
accepter que des morceaux d’elle soient avec d’autres hommes qui la chérissent.
Car, en fin de compte, grâce à l’amour qu’elle a répandu autour d’elle, le monde
est plus beau et devient meilleur.
Je trouve son idée un peu triste. J’aime peut-être beaucoup de gens, en tout cas
plus que quand j’ai commencé cette aventure, mais je ne dirais pas que l’amour
que j’ai donné aux autres est déduit de celui que j’ai pour Wes.
– Quoi ? Tu penses que ce n’est pas vrai ?
– D’une certaine façon, peut-être. L’idée que chacun d’entre nous a une quantité
d’amour limité à offrir est intéressante, mais je ne pense pas que ça marche ainsi.
Je crois plutôt que l’amour continue de grandir dans le cœur de chaque personne
à qui on l’offre. C’est comme planter une graine. Plus on l’arrose et on la nourrit,

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plus l’arbre sera beau. Les branches de cet arbre vont s’étendre et, à l’automne,
les feuilles tomberont, mais de nouvelles feuilles pousseront au printemps.
Comme l’amour.
– Dans ce cas, peut-être que je devrais appeler l’histoire The Tree of Love.
Je souris et tourne la tête pour l’embrasser.
– Voilà une histoire qui me plaît.

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Chapitre 4

Wes s’arrête au pied des escaliers qui mènent à la Aspen Grove Fine Arts
Gallery. Kathy, Wes, et moi descendons de voiture alors que le cameraman,
l’ingénieur son et le technicien lumière se garent à côté et déchargent leur
équipement.
– C’est le premier de quatre arrêts. J’ai pris rendez-vous avec une sculptrice du
coin et le directeur de la galerie. Ils étaient ravis que l’interview se fasse ici, dit
Kathy tandis que nous gravissons les marches.
Nous sommes accueillis par Brice, le directeur, qui nous offre une visite guidée
de la galerie, expliquant les œuvres des différents artistes. Une femme arrive
bientôt, grande et mince, avec des yeux bleu clair et des cheveux cuivrés et
bouclés qui tombent sur ses épaules sous un béret vert sapin. Elle porte un pull à
grosses mailles couleur crème, une grosse écharpe de toutes les couleurs, un
legging noir à motifs blancs, et des bottes qui lui arrivent aux genoux.
Lorsqu’elle tend le bras pour me serrer la main, la cinquantaine de bracelets
qu’elle porte au poignet tinte bruyamment.
– Bonjour, je suis Esmeralda McKinney, la sculptrice. Merci d’être venus ! dit-
elle en souriant jusqu’aux oreilles.
– Je suis ravie d’être là. Et si vous nous montriez vos œuvres ? Si ça vous
convient, mes collègues nous filmeront pendant que je vous pose des questions.
Son visage s’illumine, comme si un rayon de soleil pénétrait dans la pièce pour
ne frapper que son visage.
– Avec plaisir !
Elle m’emmène auprès d’un socle en plastique transparent sur lequel est posé un
buste de femme entièrement fait de lamelles de métal.

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– Voici une de mes œuvres. Elle s’appelle Emportée par le vent.
Elle effleure du bout des doigts les languettes de métal qui semblent voler dans
le vent, comme si la brise coiffait les cheveux du personnage en arrière.
Je suis immédiatement capturée par la sculpture. Les lignes des yeux, des lèvres
et du nez sont étonnamment précises pour des bandes de métal moulues.
– C’est incroyablement détaillé. Comment commencez-vous une pièce comme
celle-ci ?
– Eh bien, je prends des panneaux de métal plats et je les découpe en morceaux
de tailles inégales. Une partie de l’intérêt de ce travail vient du fait que c’est
l’assemblage des morceaux qui, au fur et à mesure que je les chauffe, crée un
tout cohérent.
Je pose une main sur le bord du piédestal, n’osant pas toucher la sculpture elle-
même.
– Vous voulez dire que quand vous commencez le projet, vous ne savez pas ce
que la pièce va devenir ?
– C’est ça. Je suppose que c’est un peu comme un écrivain qui s’assied devant sa
page vierge et qui attend que l’histoire lui vienne. Je laisse les morceaux de
métal me dicter mon œuvre. Quand je les positionne, une forme se présente et je
me laisse guider. La pièce devient ce qu’elle est destinée à être. Comme la vie.
On ne peut pas prévoir tout ce qui est beau. Parfois la beauté apparaît devant
vous, seule, de son propre gré.
Ce que dit Esmeralda est intéressant, je dois reconnaître que, ces derniers temps,
j’ai remarqué que la beauté apparaît parfois de façon totalement inattendue et
inespérée.
*
* *
Nous nous arrêtons ensuite à la Baldwin Gallery qui est tenue par Jonalyn
Baldwin, une photographe locale. C’est une grande salle rectangulaire aux murs
blancs, sur lesquels sont accrochées des photos de toutes les tailles. Au centre de
la pièce, des panneaux grillagés offrent davantage de photos aux visiteurs.
Une petite femme asiatique avec de longs cheveux noirs soyeux, attachés en
queue-de-cheval, nous accueille à l’entrée.

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– Bonjour, vous devez être Mia Saunders. Je suis Jonalyn Baldwin. Bienvenues
dans ma galerie !
Sa peau est superbement hâlée, des taches de rousseur recouvrent son nez et ses
pommettes. Elle est vêtue d’une tunique bordeaux et d’un legging assorti, et une
grosse chaîne en or brille sur sa gorge. Son style est simple et chic.
– Merci de nous recevoir, Jonalyn. On a hâte de découvrir vos œuvres.
– Dans ce cas, suivez-moi, je vous en prie.
Nous la suivons devant une énorme photo représentant la moitié d’un visage de
femme. Cependant, la photo est déformée, comme si elle avait été prise à travers
une vitre cassée.
– Pouvez-vous me parler de cette œuvre ? je demande, émerveillée encore une
fois par les détails de l’image.
– Vous voyez ces lignes, ici ? C’est là que j’ai fait la mise au point.
Je me rapproche un peu et me concentre sur les traits noirs.
– La femme que vous voyez était habillée pour sortir. Je lui ai demandé de
s’appuyer sur le présentoir à bijoux et de regarder à travers la vitrine. Je me suis
placée derrière l’endroit où le verre était cassé et j’ai capturé sa beauté avec une
perspective différente. Comme vous pouvez le voir, cette femme est superbe,
mais on ne sait pas qui elle est et on ne connaît pas son histoire. Peut-être que la
beauté que vous voyez est un masque.
Je me concentre sur l’image et essaie de comprendre son point de vue. Je penche
la tête sur le côté pour regarder la photo sous un angle différent. À l’œil nu,
quand je me concentre, je vois que la femme a des lèvres rouges et parfaites, les
ongles assortis et une peau sublime. Cependant, à travers le verre brisé, je vois
les imperfections que je n’aurais pas vues sans cet écran.
– Cette pièce s’appelle Beauté révélée, dit Jonalyn d’une voix fière.
Fascinée, je suis Jonalyn à travers la galerie. Sa façon de capturer les images et
de les transformer est du pur génie. Une série me touche particulièrement et je
demande au cameraman de zoomer sur les deux photos côte à côte. L’une
montre une femme SDF appuyée contre un immeuble. Sa jambe est pliée au
genou et son pied est posé sur le mur derrière elle. À ses pieds, il y a un sac-
poubelle blanc, qui contient sans doute tout ce qu’elle possède. Ses longs

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cheveux bruns sont sales et emmêlés, sans doute ne les a-t-elle pas lavés depuis
longtemps. Elle regarde sur le côté et ses yeux renferment une profonde tristesse.
Elle semble ne plus avoir le moindre espoir.
La photo suivante est prise à travers une brique de verre. On y voit la même
femme, mais on peine à croire qu’il s’agit de la même personne. Ses traits sont
adoucis et au lieu d’avoir l’air sales, ses cheveux semblent foncés et bouclés. Le
sac à ses pieds est comme une boule de lumière blanche qui illumine toute sa
silhouette et la fait rayonner.
– Quand on atténue la dureté de la réalité, ce qu’on trouve dessous est… spécial,
dit Jonalyn en croisant les bras.
Je lève la main vers la photo, poussée à m’en approcher de plus près.
– Votre façon de voir les choses est incroyable.
– C’est ainsi que nous devrions tous voir les choses. Une belle femme peut
sembler parfaite, mais quand on la regarde à travers un nouveau prisme, on
découvre ses défauts. Or, tout le monde a des imperfections. Et ici, poursuit-elle
en désignant la femme triste, vous voyez qu’on peut prendre une SDF qui est
sale et endurcie par la vie, et trouver en elle un côté tendre et beau. La vie et les
expériences changent notre apparence, mais jamais la personne qu’on est à
l’intérieur.
Je passe un long moment à parler à Jonalyn. Wes vient derrière moi alors que
nous discutons dans un petit salon. Il pose ses mains sur mes épaules et les
masse avant de se pencher en avant.
– Mia, si tu veux voir toutes les galeries aujourd’hui, il faut qu’on y aille. Il
commence à neiger.
Je lève la tête ver lui et lui souris. Il m’embrasse sur le front et j’entends le
cliquetis d’un objectif qui se ferme et se rouvre. Jonalyn rougit en baissant
l’appareil photo qui ne quitte pas ses mains.
– Pardon, c’est une seconde nature chez moi. Je ne peux pas m’empêcher
d’immortaliser la beauté que je vois.
– Mais vous n’avez pas de verre pour déformer votre photo, je réponds en
souriant.

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– Ce n’était pas nécessaire, dit-elle en me faisant un clin d’œil. N’importe quel
filtre aurait montré la sincérité de ce moment. Je vous enverrai la photo par e-
mail pour que vous voyiez par vous-même.
Wes prend ma main et m’aide à me lever.
– Ce serait super. J’ai adoré parler avec vous de votre art et de votre point de vue
unique. Je vous promets de lui faire honneur dans l’émission.
– Je n’en doute pas. Merci, Mia, dit-elle en prenant mes mains dans les siennes.
La classe.
*
* *
Plutôt que d’aller à la galerie suivante, Wes nous emmène déjeuner au Red
Onion, un bar historique.
– Le lieu existe depuis 1892, ils servent la meilleure soupe à l’oignon du pays et
de délicieux beignets de crabe, s’exclame Wes, qui sautille pratiquement sur
place en m’ouvrant la porte.
Le restaurant est plein à craquer. Les murs pourpres lui donnent un air
chaleureux qui invite les clients à s’y installer et à y rester un moment. Je me
sens immédiatement chez moi.
Wes a appelé à l’avance pour réserver une table pour six. Je n’ai qu’un ingénieur
lumière, un ingénieur son et un cameraman avec moi, ce qui est peu, mais j’ai
travaillé avec eux quand j’étais à New York, et leur travail était impeccable.
Lorsque nous sommes installés et que nous avons commandé, je trouve le
courage de parler à Kathy.
– Alors, Kathy, tu penses que ça se passe bien ? je demande en jouant avec la
paille dans mon verre.
Elle remonte ses lunettes avant de me répondre.
– Très bien. Votre enthousiasme pour ce que disait Jonalyn était évident, ce sera
super à l’écran.
– Je suis d’accord. Son art est unique et ça a mis en lumière une autre facette de
la beauté. Je pense que notre public va adorer. Mais je ne parlais pas de Jonalyn
quand je te demandais comment ça se passait.
Kathy fronce les sourcils, confuse.

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– Je ne suis pas certaine de comprendre, Mademoiselle Saunders.
– Attention, dans deux semaines ce sera Madame Channing ! s’écrie Wes en
passant un bras dans mon dos.
Cette fois, Kathy sourit jusqu’aux oreilles.
– Vous vous mariez ?
– Oui ! je réponds en hochant la tête. On se marie à Malibu, le jour de l’an.
Elle joint les mains sur sa poitrine et soupire joyeusement.
– C’est génial. Vous avez l’air faits l’un pour l’autre.
Wes resserre son étreinte, ravi du compliment, et frotte son nez contre mon
menton.
– Je ne peux qu’être d’accord avec toi, Kathy, répond-il en m’embrassant sur la
joue, l’oreille et dans le cou.
Je glousse en le repoussant, pressée d’en revenir à ma conversation avec Kathy.
– Kathy, je vais aller droit au but, et tu as très peu de temps pour prendre ta
décision.
– D’accord, je vous écoute, dit-elle d’un air inquiet.
– Je voudrais que tu sois mon assistante.
– Euh, je ne le suis pas déjà ?
Je soupire en prenant mon verre et bois une grosse gorgée de thé glacé avant de
hocher la tête.
– Si, tu l’es. Je veux dire que je voudrais que tu le sois de façon permanente.
Son visage s’illumine et elle sourit timidement.
– Tant que je travaille pour le Docteur Hoffman, je veux que tu sois mon
assistante de production. Je veux que tu m’aides avec les sujets, que tu les
prépares avec moi et ainsi de suite. Tu sais comment marchent ce milieu et ce
métier, alors que moi je sais seulement ce que je veux faire et comment
l’exprimer devant une caméra. J’ai besoin de quelqu’un en qui je peux avoir
confiance pour m’assurer que les sujets atteignent tout leur potentiel et qu’ils
racontent au public la bonne histoire.
Kathy hoche la tête avant que j’aie fini d’expliquer.
– Waouh, c’est une chance en or, dit-elle avant de froncer les sourcils, mais
j’habite à New York !

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– Oui, je sais. Au début, on peut travailler à distance, comme maintenant, mais
pas longtemps. L’émission te donnera une enveloppe pour financer ton
déménagement. Il faudrait que tu viennes en Californie en janvier et que tu te
trouves un logement.
Kathy secoue la tête.
– Je ne comprends pas, pourquoi moi ? Je ne suis personne !
– Personne ! Grâce à toi, tout se déroule sans un couac. Tu me comprends et tu
sais ce que je cherche à accomplir. Tu cernes facilement les gens et tu crées des
liens avec les gens qu’on filme. À mes yeux, tu es la candidate parfaite.
– Mais l’assistante du Docteur Hoffman me déteste…
– Je m’occupe de Shandi, je dis en lui coupant la parole. Ce n’est pas elle qui
prend les décisions, c’est son boss et Leona, et je leur en ai déjà parlé. Ils m’ont
donné carte blanche pour choisir qui je veux, et c’est toi que j’ai choisie. Bien
sûr, je comprends que tu aies besoin de temps pour…
– Inutile. Je veux le job, déclare-t-elle d’une voix ferme et confiante.
– Même si tu dois déménager ?
– Les hivers sont affreux à New York, et ma famille est éparpillée dans tout le
pays. Et puis, c’est ma chance d’être dans une émission quotidienne et de
prendre des décisions importantes. En plus, je travaillerai avec quelqu’un que
j’apprécie sincèrement. Je déteste me faire trimballer partout. J’aimerais
m’installer quelque part pour de bon. Ce travail avec vous et Monsieur Channing
est le temps fort de ma carrière, dit-elle d’une voix tout excitée.
En fait, je ne l’ai jamais vue aussi enthousiaste.
Le serveur apporte les amuse-bouches et Wes se jette sur une bouchée au crabe.
Il l’engloutit si vite que je m’inquiète qu’il s’étouffe.
– Quoi ? dit-il la bouche pleine.
J’éclate de rire.
– Bref. Je n’ai qu’une seule condition, Kathy.
Elle recule les épaules, lève le menton et me regarde droit dans les yeux. J’ai du
mal à rester sérieuse en la voyant si inquiète, mais je parviens à me concentrer.
– Tu dois accepter de m’appeler Mia et de me tutoyer. Il faut arrêter avec ce
Mademoiselle Saunders, c’est ridicule.

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Toute la table éclate de rire, et j’informe le reste de l’équipe que j’ai l’intention
de rendre leur présence permanente également. Tout le monde semble ravi de
travailler ensemble.
*
* *
Après le déjeuner, nous nous rendons dans la troisième galerie pour rencontrer
« Bob le Bûcheron ». Il sculpte le bois, assis dans un rocking-chair qu’il a
fabriqué lui-même. La galerie l’a placé dans un coin, près des fenêtres, pour que
l’artiste de soixante-dix ans puisse s’y installer et travailler en étant entouré des
visiteurs.
La galerie est une immense attraction pour les touristes, et depuis qu’ils ont
donné à Bob le Bûcheron un endroit pour sculpter, leurs ventes ont augmenté de
trente pour cent. Assis dans son fauteuil à bascule, il taille des petites pièces
uniques que les touristes peuvent acheter sur place dès qu’il les a finies.
En l’interviewant, j’apprends qu’il a été envoyé deux fois au Vietnam en 1965.
Pendant les longues heures où il attendait de partir au combat, il découpait des
branches et les sculptait avec son couteau de poche. Il donnait les figurines à ses
frères d’armes qui les rapportaient à leurs familles afin qu’elles sachent qu’ils
pensaient à elles. Il a pris sa retraite dans les années soixante-dix après trois
blessures. Il a été touché deux fois à la jambe et une fois à la hanche, et il n’a pas
guéri aussi bien qu’il l’espérait.
Bien plus à l’aise dans son fauteuil, Bob a décidé de faire de son passe-temps
son gagne-pain. Heureux de discuter avec sa famille, ses amis et le public, et
bien incapable de travailler sept heures par jour dans un bureau, il a trouvé une
façon de vivre de sa passion.
Des conflits et des guerres font rage un peu partout dans le monde, mais son
histoire me redonne espoir, même si elle n’est pas facile à entendre. Bob a été
blessé en protégeant notre liberté mais, assis dans la galerie, il ne regrette pas un
seul jour de son service militaire. Peut-être d’autres vétérans y puiseront-ils un
peu d’optimisme.
Il m’explique aussi qu’il donne à chacune de ses rencontres un souvenir. Ainsi,
pendant que nous discutons, il sculpte un petit cœur entouré de vagues.

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– Votre cadeau de mariage, dit Bob en me le donnant.
– Comment vous avez su ? je m’exclame, surprise.
– Oh, à mon âge, on sait reconnaître une femme amoureuse. Et la lumière qui
fait scintiller cette bague a failli m’aveugler !
Nous éclatons de rire, et le propriétaire de la galerie emballe mon cadeau avant
de le tendre à Wes.
– Merci de m’avoir fait part de votre histoire, je lui dis en le prenant dans mes
bras. Je sais que, comme moi, les spectateurs ne l’oublieront jamais.
– C’est pour les gens comme vous que le risque en vaut la peine, répond-il quand
Wes me prend par la taille et me guide dehors.
*
* *
Le risque en vaut la peine.
Je suis encore émerveillée par l’histoire de Bob lorsque nous arrivons à la galerie
4M. Bob a dit que c’était pour des gens comme moi que le risque de mourir à la
guerre valait la peine d’être pris. Les soldats se sacrifient d’une façon que les
civils ne pourront jamais comprendre. Tout le monde n’est pas capable de
risquer sa vie quotidiennement pour trois cents millions de gens qu’il ne connaît
même pas. Or, pour Bob, chaque vie en vaut la peine.
Ses paroles me font penser que dans la vie, toutes les choses qui ont de la valeur
méritent de prendre des risques. Toutefois, tout le monde n’en est pas capable.
C’est assez triste, en fait.
Lorsque nous entrons dans la galerie 4M, une odeur de citron, de menthe et de
jasmin m’envoûte. Je m’arrête à deux pas de la porte et laisse le parfum familier
m’envelopper. Je ne l’ai pas senti depuis des années, quinze ans, pour être
précise.
Mon cœur bat la chamade et ma bouche devient sèche. De l’autre côté de la
salle, je vois une femme assez grande, avec des cheveux bouclés qui lui arrivent
aux épaules. Elle est vêtue de noir et elle est en train d’ajuster un tableau sur le
mur en face de moi. Je ne peux plus bouger. Elle est de dos, mais je reconnais
immédiatement sa silhouette et les gestes fluides de ses bras, comme une

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danseuse. La présence de cette femme est dévastatrice. J’ai l’impression de voir
un fantôme.
Elle se tourne, joint les mains sur sa poitrine et se rapproche. Elle ferme
légèrement ses yeux vert pâle et elle prend les lunettes qui sont accrochées au
décolleté de sa chemise. Elle les met et se fige, comme si elle était clouée au
plancher. Comme elle, je ne bouge pas d’un iota en l’observant devant moi. Elle
a beaucoup changé en quinze ans, mais pas assez pour être méconnaissable.
– Mia, murmure-t-elle.
Wes passe un bras dans mon dos et me serre contre lui. Quant à moi, je prends sa
main et l’écrase dans la mienne.
– Bonjour Madame… commence Wes.
– Banks, répond-elle.
Je grimace et resserre mon étreinte. Wes ne lâche pas ma main, ce dont je lui
suis infiniment reconnaissante. Sans cette connexion, je me serais sans doute
évanouie ou enfuie en criant.
– Madame Banks, je suis Weston Channing, et nous sommes ici pour vous parler
de votre art et de la galerie. Il semblerait que Mia et vous vous connaissiez déjà.
Comme vous pouvez le voir, elle est sous le choc, alors si vous aviez l’amabilité
de m’expliquer ce qui se passe, je vous en serais infiniment reconnaissant.
Mon Wes. L’éternel gardien de la paix. Ce qu’il ne sait pas, c’est que rien ne
peut arranger la situation. Une explication ne suffit pas pour effacer quinze ans
d’abandon et de tristesse. Je le sais. Ça fait des années que j’essaie de
comprendre pourquoi la femme qui m’a donné la vie m’a anéantie à l’âge de dix
ans.
– Mia, je te reconnaîtrais n’importe où, dit-elle d’une voix tremblante.
Sa voix est différente, plus calme. Elle se lèche les lèvres. Horrifiée, je regarde
cette femme, que je pensais avoir perdue à jamais, se tenir devant moi, plus en
forme que jamais. Elle n’a pas le droit d’être aussi en forme.
– Ma chérie, ça fait si longtemps… dit-elle.
Ses paroles me font l’effet d’un poignard empoisonné qui découpe mes parties
les plus tendres et vulnérables. Sa voix est pleine d’émotions qui semblent plus
sincères que tout ce que j’ai pu entendre de sa bouche. Cependant, ça ne suffit

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pas à percer le mur de marbre qui entoure mon cœur pour le protéger de cette
femme.
Ne sachant pas quoi faire, je dis les deux seuls mots que j’arrive à prononcer.
– Bonjour, mère.

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Chapitre 5

Wes serre si fort ma main qu’il me fait mal, je la retire et vacille. Il me prend
alors dans ses bras.
Kathy entre dans la galerie à ce moment-là, secouant son blouson pour enlever
les flocons de neige.
– Bonjour, je suis Kathy, dit-elle en tendant la main à ma mère. Voici Mia
Saunders et son fiancé, Weston Channing. Merci de nous recevoir. Je suis
désolée si nous sommes un peu en retard…
– Fiancé ? s’exclame ma mère en étudiant mon futur époux. Euh…
félicitations…
Je ne la laisse pas finir. Je lance, glaciale :
– Est-ce un hasard si j’entre dans cette galerie pour interviewer la femme qui
m’a détruite il y a quinze ans ?
Elle inspire brusquement, comme Kathy, et la pièce devient silencieuse. Mon
assistante passe d’un pied sur l’autre, regardant ma mère, puis moi, puis Wes.
– Je suppose qu’on a fini pour la journée ?
– Kathy, rentre au chalet avec le reste de l’équipe. Je crois qu’on a assez
d’images avec les trois artistes. Servez-vous de ce que vous voulez pour dîner.
Mia et moi arrivons bientôt.
Kathy vient vers moi et me prend la main.
– Je serai là ce soir si tu as besoin d’une amie, Mia.
Elle utilise enfin mon prénom ! Ses paroles comptent plus pour moi qu’elle ne
peut l’imaginer, mais je ne parviens qu’à hocher la tête alors qu’elle emboîte le
pas aux mecs pour rentrer au chalet.

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Nous restons tous les trois debout dans l’entrée. Ma mère se lèche de nouveau
les lèvres et regarde autour d’elle, cherchant probablement quelqu’un pour la
sauver de ce cauchemar. Car c’est bel et bien un cauchemar. Je m’étais faite à
l’idée de ne plus jamais la revoir et de ne jamais savoir pourquoi et comment elle
a abandonné ses enfants.
– Et si on allait s’asseoir là-bas pour parler ? demande-t-elle d’une voix
tremblante en désignant un canapé et des fauteuils.
Je vais vers elle d’un pas ferme, je plonge mon regard dans le sien, et ses yeux se
remplissent de larmes. Dans un moment de faiblesse, je lève la main et la gifle
aussi fort que possible. Je réalise soudain que des larmes coulent sur mes joues.
Elle sanglote et se tient la joue. De grosses larmes dévalent son visage, comme
autant de mensonges dont je ne suis pas dupe.
– Je su… suppose que je… je l’ai mérité, bégaie-t-elle.
– Tu mérites bien pire. Tellement pire.
Elle se racle la gorge et coiffe ses cheveux en arrière.
– S’il te plaît, Mia, j’aimerais t’expliquer.
– T’expliquer ? je m’exclame. Tu voudrais t’expliquer ? je hurle. Expliquer quoi,
maman ? Comment tu as pu abandonner ta fille de dix ans ? Ou peut-être
comment tu as abandonné ta fille de cinq ans ? Non, attends… je dis en
m’approchant encore d’elle.
Je lève de nouveau la main, mais Wes attrape mon bras et me plaque contre son
torse pour nous faire reculer.
– Tu ne comprends pas ! crie-t-elle. Je ne voulais pas partir.
– Tu n’as pas idée de l’enfer que tu nous as fait subir. Après ton départ, papa est
devenu alcoolique. À dix ans, j’ai dû m’occuper de lui et de ma petite sœur !
Elle écarquille les yeux.
– Eh oui, tu n’avais pas prévu ça, hein ? Tu nous as tous abandonnés, et papa a
sombré. La moitié du temps, il ne savait même pas qu’il avait des enfants.
Maddy et moi avons passé des jours entiers sans manger. Des jours !
Wes resserre son étreinte, je ne sais pas si c’est pour me soutenir ou pour éviter
que je ne me jette sur elle. Quoi qu’il en soit, cela m’aide à ne pas craquer
complètement.

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– J’ai dû voler de quoi manger dans les casinos et faire les poubelles pour ne pas
mourir de faim ! Tu n’as pas idée des dégâts que tu as causés.
Ma mère pleure à chaudes larmes et tombe à genoux.
– Mon Dieu, Mia, mon bébé, je suis désolée. Je suis tellement désolée. Je
pensais faire ce qu’il y avait de mieux. Je ne savais pas, sanglote-t-elle.
– Tu es désolée ? je répète en secouant la tête. Désolée d’être partie ou de ne pas
l’avoir fait plus tôt ? je demande d’un ton amer.
– Non, je n’ai jamais voulu partir. Mais il le fallait. C’était pour le mieux. Pour
vous protéger ! dit-elle en se couvrant le visage.
– Nous protéger ? Si tu voulais nous protéger, il fallait t’assurer que tes enfants
aient de quoi manger, de l’eau chaude et des vêtements propres, je gronde.
– Mon Dieu ! Je ne pensais pas qu’il prendrait mon départ aussi mal. J’aimais
Michael. Je voulais qu’il tourne la page…
J’éclate de rire et me jette de nouveau sur elle, mais Wes me retient.
– Chérie… commence-t-il d’une voix douce et ferme. Je comprends que tu sois
en colère, mais la violence physique n’est pas une solution. Dis-lui ce que tu dois
lui dire, et on partira.
Je le regarde dans les yeux et je hoche la tête avant de m’accroupir devant elle.
– Tu étais tout pour mon père. Tu étais son soleil, sa lune, l’air qu’il respirait.
Maddy et moi n’étions que de pâles imitations.
– Non, non, non, non, répète-t-elle en secouant la tête. Ce n’était pas censé se
passer comme ça.
– Ah oui, et tu t’attendais à quoi ? Tu pensais qu’il réagirait comme Jackson
Cunningham ?
Elle relève la tête.
– Tu as trouvé Jackson ? s’exclame-t-elle.
– Jackson est mort, je réponds froidement.
Elle recule comme si je l’avais giflée.
– Quoi ?
– Il est mort il y a quelques années, mais non sans laisser une petite énigme.
Imagine ma surprise quand mon frère, Maxwell Cunningham, est venu me
trouver.

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– Max… chuchote-t-elle.
La tristesse déforme son visage.
– Oui, je suis au courant pour Maxwell… mon frère. Et on sait aussi que Maddy
est la fille de Jackson.
– C’est faux ! rétorque-t-elle en fronçant les sourcils.
– Tu crois qu’on n’a pas vérifié ? Madison n’est pas la fille biologique de
Michael Saunders. Elle est celle de Jackson. On a le test de paternité pour le
prouver. Tu penses que je vais croire que tu es surprise de l’apprendre ? Tu as
trompé mon père plus d’une fois. Je me souviens d’avoir rencontré Maxwell
quand on était petits.
Elle secoue la tête et appuie sur ses tempes avec ses doigts.
– Non, non, non, non. Je ne comprends pas. Je ne me souviens de rien, pleure-t-
elle.
– N’importe quoi ! je hurle, si fort que ma mère se recroqueville.
Wes passe ses bras sous les miens et m’aide à me relever.
La porte claque derrière nous et Kent Banks entre, se précipitant sur ma mère
quand il la voit par terre.
– Qu’est-ce qui se passe ici ? grogne-t-il.
– C’est à vous de me le dire, non ? C’est vous qui nous avez fait venir ! Vous
saviez que c’était ma mère !
Il lève la tête et plonge ses yeux dans les miens, le regard froid et menaçant.
– Oui, je savais que tu étais sa fille. Elle me l’a confié quand elle t’a vue à la
télé. Elle m’a parlé de toi, de ta sœur et de ton frère. Je pensais faire une bonne
chose, que j’allais réunir la famille…
Je ricane.
– Vous êtes malade ? Elle nous a abandonnés ! Ma sœur et moi ne savions même
pas que nous avions un frère jusqu’à il y quelques mois. Ça aurait été sympa de
l’apprendre par notre mère !
– Sortez d’ici, gronde Kent.
Entendant le ton de sa voix, Wes me pousse derrière lui.
– Je ne suis pas sûr que ma fiancée ait fini de parler à sa mère.

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Ma mère marmonne quelque chose à voix basse en se blottissant contre Kent,
qui la soulève dans ses bras.
– Je crois que vous en avez dit assez. Il y a beaucoup de choses que vous ne
savez pas. Je vous appelle plus tard.
– Ne vous fatiguez pas. Je n’ai plus rien à dire à cette pâle imitation d’être
humain.
Sur ce, je tourne les talons et sors de la galerie, suivie de près par Wes. Je
marche dans la rue, furieuse, incapable de m’arrêter, entourée d’un nuage de
vapeur qui s’épaissit à chaque souffle.
Lorsque je ralentis et m’arrête enfin, je ne sais pas où je suis ni ce que je fais.
Tout ce que je sais, c’est que j’ai froid et que je suis seule. Un sanglot
m’échappe et je perds l’équilibre lorsque deux bras solides me rattrapent.
– Je suis là, ma chérie. Je suis là. Rentrons au chalet.
– Je ne veux voir personne.
Je pleure contre lui, ma poitrine se serre, écrasée par une douleur accablante.
– Tu ne verras personne, je te le promets. Laisse-moi m’occuper de toi,
chuchote-t-il en me soutenant jusqu’à la voiture.
Je ne vois pas le temps passer ni le paysage défiler. Lorsque j’émerge de
nouveau, on me porte à l’étage et on me déshabille. On me dépose dans un
nuage tout chaud et, quelques secondes plus tard, un corps bouillant se plaque
contre mon dos et des bras m’entourent. Je me blottis contre Wes, m’accroche à
lui, à notre vie, à tout ce qui me met en sécurité. Il me serre fort contre lui et,
enveloppée dans son amour et dans ses bras, je ferme les yeux.
*
* *
Lorsque je me réveille le lendemain matin, je suis toujours dans les bras de Wes.
Il ne m’a pas lâchée de la nuit. Je cligne plusieurs fois des yeux et regarde son
visage près du mien. Son souffle est lent et paisible. Je lève une main et promène
mon doigt sur son nez. Il remue et ouvre lentement les paupières. Il sourit
tendrement et s’avance pour m’embrasser sur le nez.
– Comment tu vas ? demande-t-il.

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Je pourrais mentir et lui dire que je vais bien, mais il saurait que je ne dis pas la
vérité. Et puis, j’en ai assez de cacher ma souffrance. La seule personne qui
mérite ce traitement est ma mère. Bien sûr, ça ne change pas le fait que j’aurais
aimé que les choses se passent autrement.
Petite, les filles ont besoin d’une mère, de quelqu’un qui embrasse leurs bobos,
les réconforte quand un garçon leur a brisé le cœur, leur apprend à devenir une
femme et, surtout, leur apprend à devenir une mère et à aimer un autre être plus
que soi-même.
– Ça ne va pas fort, Wes.
Il me faut faire un effort surhumain pour l’admettre, mais je peux le faire pour
lui, pour le seul être sur terre qui m’aime plus qu’il ne s’aime lui-même.
– Ouais, c’est ce que je pensais. Qu’est-ce qui se passe là-dedans ? demande-t-il
en désignant mon front.
Je ferme les yeux et savoure son geste simple. Car pour moi, c’est plus qu’un
geste, c’est une connexion tangible à laquelle m’accrocher quand tout autour de
moi semble s’effondrer.
– La voir dans sa galerie, heureuse et en bonne santé…
Je secoue la tête et prends sa main pour la porter à ma bouche.
– Tu as du mal à encaisser qu’elle a tourné la page. Qu’elle a mené une belle vie
pendant que toi, Maddy et Max avez souffert. Surtout Maddy et toi. Je
comprends, bébé.
J’embrasse chacune de ses phalanges.
– Pourquoi c’est si douloureux ? je demande, et les larmes se remettent à couler.
– Parce que peu importe le mal qu’elle t’a fait, elle reste ta mère. Et tu l’aimes.
– On ne peut pas aimer un fantôme.
– Justement, si. Tu l’aimes, je le vois sur ton visage. Et tu sais quoi ?
– Quoi ? je demande en reniflant, essayant de retenir mes larmes.
– C’est normal de l’aimer. Même si elle t’a fait souffrir.
Les larmes coulent à flots maintenant, je ne peux plus les retenir. Je ne peux plus
être la Mia forte que je suis pour tout le monde.
– Ah bon ? Une femme qui nous a abandonnées, ma sœur et moi, quand j’avais
dix ans.

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– Ton père est fautif aussi, ma chérie. Si tu désignes les coupables, ton père a sa
part de responsabilité.
– Mais c’est elle qui l’a détruit. Tu aurais dû le voir avant qu’elle ne parte.
C’était un papa poule et un mari aimant et attentionné. Il la vénérait. Tout ça
pour quoi ? Elle est partie sans même lui dire au revoir. Elle a détruit notre
famille. Et celle de Max, aussi.
Wes baisse la tête.
– Je ne crois pas que ce soit vrai. Max est un des hommes les plus aimants que je
connaisse. Son amour n’a pas de limites. Il vous a accueillies à bras ouverts,
Maddy et toi, et il lui a fallu à peine cinq minutes pour faire de vous sa famille.
Ça en dit long sur le genre d’homme qu’était Jackson Cunningham. Il a donné
tout ce qu’il pouvait à son fils même s’il n’avait pas de mère. Il l’aimait et il lui a
appris à aimer en retour. Max détient ce savoir en lui, il aime sa femme, ses
enfants et ses sœurs. Il n’avait peut-être pas de mère, mais sa vie n’a pas été
détruite pour autant.
Je réfléchis à ce que dit Wes et réalise que, bien évidemment, il a raison. Jackson
Cunningham aimait peut-être énormément ma mère et il a sans doute eu le cœur
brisé, mais il a continué sa vie. Il s’est occupé de son fils, lui a appris à aimer et
à être un homme. Un homme bien. Le meilleur. Il lui a montré l’importance de la
famille.
– Il faut que je parle à Max et Maddy.
– Ils seront là dans deux jours. Tu veux vraiment les appeler et les inquiéter
maintenant ?
– Max sera fou de rage si je ne l’appelle pas.
– C’est vrai, répond Wes en souriant. Qu’est-ce que tu vas lui dire ?
– Je ne sais pas. La vérité, je suppose. Il mérite de savoir. Ce sera à lui de
décider quoi faire.
– Et ta mère ?
– Quoi, ma mère ?
– Tu vas lui reparler ? Quelque chose clochait, hier soir. Elle avait l’air surprise
de te voir, et désolée aussi. Et elle n’a pas arrêté de dire que tu ne connaissais
pas toute l’histoire.

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– Probablement parce qu’elle n’a pas envie d’être confrontée à ce qu’elle a fait.
– Peut-être, je ne sais pas, soupire Wes. Elle s’est effondrée assez vite. Elle a
vraiment semblé anéantie.
– Qui sait ? Elle essaie sans doute de se convaincre qu’elle avait une bonne
raison de nous abandonner. Tous les trois. Je te le dis tout de suite, je ne me
laisserai pas duper. Il n’y a rien qu’elle puisse dire qui me pousserait à lui
pardonner. Rien.
*
* *
Le téléphone sonne quatre fois, ce qui est inhabituel pour Max, car il fait partie
des gens qui le gardent tout le temps dans leur poche, et je sais qu’il ne travaille
pas.
Enfin, à la cinquième sonnerie, il décroche, et j’entends les cris du bébé.
– Attends, attends… ton neveu a décidé de réveiller tout le quartier. Il s’est fait
dessus jusque dans le cou. Le cou, sœurette. Comment il a réussi à faire ça, tu
peux m’expliquer ? crie Max.
J’en déduis que je suis sur haut-parleur et j’attends quelques secondes que Max
passe le bébé à Cyndi. Quel enfoiré ! Je souris pour la première fois depuis que
j’ai vu notre mère, hier.
– Il s’est souillé jusqu’au cou ! répète-t-il.
– Et alors, qu’est-ce que tu veux que je fasse ? Lave ton fils ! rétorque Cyndi, et
j’éclate de rire.
– Cyndi, amour de ma vie, je te donne un million de dollars pour laver notre fils,
supplie Max.
– Ton argent est mon argent, tu l’as oublié ? répond-elle d’un ton irrité.
C’est en train de virer en dispute de couple et je n’ai aucune envie d’en être
témoin.
– Euh… et si vous me rappeliez, les gars ? je demande.
– Mia chérie, c’est toi ? répond Cyndi.
– Ouais, salut ! Désolée de vous interrompre. J’avais besoin de parler à Max de
quelque chose de… d’assez important, mais il n’a qu’à me rappeler quand il se
sera occupé de Jack.

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– Non, non, très bien, Max, soupire-t-elle. Je m’occupe de notre fils, mais tu es
de corvée de couche pendant quarante-huit heures !
J’entends des bruissements et des crépitements dans le téléphone, et je n’entends
plus que Max.
– Sucre d’orge. Ça a intérêt à être important. Changer la couche d’un garçon
comme Jack est horrible. Chaque fois que je dois le changer, j’ai l’impression
qu’un animal a rampé dans sa couche pour mourir. C’est affreux.
Je ne veux pas le faire attendre et je suis trop stressée pour être patiente, alors je
vais droit au but.
– J’ai retrouvé notre mère.
Il reste silencieux une bonne minute.
– Tu lui as parlé ?
– Si par parler, tu veux dire lui crier dessus, l’accuser et la gifler, alors oui, on
peut dire que j’ai parlé à notre mère.
– Tu l’as trouvée où ?
J’éclate de rire, non pas parce que c’est drôle mais parce que la situation est
vraiment digne d’un feuilleton télé.
– Écoute ça, c’est une des artistes qu’on m’a demandé d’interviewer dans le
Colorado.
– Elle est dans le Colorado ?
– Oui, ici même, à Aspen.
– Jésus Marie Joseph.
– Oui, exactement.
– Est-ce que ça va ? demande-t-il d’une voix inquiète.
J’envisage de lui mentir et de lui dire que je vais très bien, mais je ne peux pas
faire ça. Il mérite mieux. Il mérite que je sois honnête.
– Non, pas vraiment. Je ne sais pas trop comment gérer la situation. Ça fait
quinze ans que ça dure.
– Pour moi ça fait trente, ajoute-t-il d’une voix lugubre.
– Oh, Max, je suis désolée. Il faut qu’on gère la situation ensemble. On en
parlera quand tu arriveras ce week-end. On décidera quoi faire.

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– Tu crois que je vais te laisser affronter ce tsunami toute seule ? Je serai là
demain au plus tard. Je vais faire nos valises et venir plus tôt.
– Max, sans rire, ça peut attendre, je mens.
– Tu souffres ? demande-t-il.
Je soupire.
– Max, tu sais bien que oui. C’est un sacré choc.
– Alors, j’arrive. C’est aussi simple que ça. Maintenant, laisse-moi en parler à
ma femme. On a des valises à préparer. Nos chambres sont libres, ou il nous faut
un hôtel ?
Je me sens immédiatement soulagée.
– Je t’aime, Max. Je t’aime vraiment.
– Chérie, tu sais que je t’aime aussi. C’est une affaire de famille, et si l’un
d’entre nous est blessé, c’est aux autres de le soutenir. Alors, est-ce que ma
chambre sera prête ou je dois réserver un hôtel, sucre d’orge ?
Je ravale le nœud plein d’émotions qui m’empêche de respirer.
– Tout est prêt pour toi et ta famille. Wes a même commandé un landau pour
Jack, et on a un lit parapluie pour Isabel.
– C’est parfait. Mia, ne t’inquiète plus. Je serai là demain. Les affaires de famille
se gèrent ensemble, d’accord sœurette ?
– Les affaires de famille se gèrent ensemble. Pigé, Maximus.
– D’accord, dit-il en riant. Appelle Maddy et demande-lui si elle veut venir plus
tôt aussi. Si c’est le cas, je demanderai au pilote de s’arrêter à Vegas avant de
venir au Colorado.
J’aurais dû me douter que Max serait la voix de la raison dans toute cette
histoire. Je suis ses instructions et j’appelle ma sœur pour lui dire ce qui se
passe. Elle est aussi choquée que moi, et elle et Matt acceptent de rater deux
jours de cours pour venir plus tôt.
Ensuite, je pars à la recherche de la seule personne grâce à qui je ne deviens pas
folle : mon surfeur-réalisateur devenu homme des montagnes. Je le trouve dans
la cuisine, en train de préparer le petit déjeuner.
– Qu’est-ce que tu veux faire aujourd’hui ? demande-t-il en déposant les
pancakes dans une assiette.

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– Allons skier, je réponds.
Je ressens un besoin urgent de sentir l’air fouetter mon visage quand je vais
dévaler les pistes à toute vitesse. J’ai besoin de me rappeler que je suis en vie,
que ce n’est qu’un mauvais moment à passer. Ma famille est en route, et
ensemble, nous allons affronter celle qui nous a brisés de façon irrémédiable.

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Chapitre 6

–Tu vas me dire pourquoi on arpente les bois enneigés autour du chalet ? je
demande en tirant sur mon bonnet pour qu’il couvre mieux mes oreilles.
J’ai attaché mes cheveux sur la nuque et sur le côté, sans quoi ça ferait
longtemps que le bonnet serait tombé. Les cheveux comme les miens
n’apprécient pas les tentatives de domptage.
Wes sourit jusqu’aux oreilles et prend ma main. Dans son autre main, il tient la
corde d’une luge en bois sur laquelle est posé un sac de sport.
– À quelle heure tu as dit que Max et Maddy seraient là ? demande-t-il.
– Ce soir, vers dix-huit heures. Pourquoi ? je réponds en enjambant un tronc.
– Eh bien, s’ils viennent fêter Noël, tu ne crois pas qu’on devrait avoir un sapin
digne de ce nom ?
Il lâche ma main et la corde et gravit une petite butte en courant.
Un sapin. Un vrai sapin de Noël. Je ne sais pas si Maddy et moi en avons déjà eu
un. Ce n’est pas quelque chose dont se soucie une famille qui n’a pas assez
d’argent, donc on n’a jamais osé demander. On était plus inquiètes de manger
que d’avoir un sapin. Bon sang, quand elle a eu cinq ans, c’est moi qui ai dû dire
à Maddy que le Père Noël n’existait pas. Car il n’y aurait aucun cadeau sous
notre sapin invisible. Maddy et moi avions pris l’habitude de fabriquer les
cadeaux que nous nous offrions. Puis, quand on a grandi, on faisait un petit
effort et on achetait un cadeau ou deux, mais jamais rien d’extravagant.
– Pourquoi tu me regardes comme ça ? demande Wes en penchant la tête sur le
côté, inquiet.
– Je n’ai jamais eu de sapin de Noël, je réponds en haussant les épaules.

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– Tu n’as jamais eu de sapin ? s’exclame-t-il. Fais-moi penser à gifler ton père
quand il sera de nouveau sur pied, grogne-t-il.
Il descend la petite butte en courant, saisit ma main et remonte au sommet en me
tirant derrière lui.
– Tu vois ceux-là ? il demande en désignant la forêt au loin. Ils feraient des
sapins de Noël parfaits.
De l’autre côté d’une petite clairière, une dizaine de sapins sont alignés.
– Et comment tu suggères qu’on le sorte du sol ?
– On le coupe, ma chérie, répond Wes en riant. Allez, viens.
Il reprend la corde de la luge et nous descendons la colline jusqu’aux arbres qui
font au moins deux mètres.
– Je ne sais pas. Je n’aime pas l’idée de tuer un arbre pour la déco. Peut-être
qu’on devrait en acheter un en plastique ?
– C’est hors de question. C’est notre premier Noël en famille. Tes premières
fêtes avec ton frère et ma famille. On va faire en sorte que ce soit spécial, et pour
ça, il nous faut un arbre digne de ce nom. Maintenant choisis-en un.
Wes n’a pas tort. Nous allons créer de merveilleux souvenirs en tant que couple,
avec nos familles respectives. Cette idée se fraie un chemin dans ma tête et me
fait oublier mes doutes écologiques et mes scrupules à tuer un arbre dans une
forêt qui en compte des milliers.
Je passe plusieurs minutes à faire le tour de chaque arbre et, après en avoir
éliminé une bonne dizaine, je trouve le sapin parfait. Il est géant, vert, et il sent
la terre. Ses branches sont suffisamment régulières pour qu’il soit magnifique
une fois décoré, et je reste un moment à le regarder et à l’imaginer tout éclairé et
scintillant.
Wes arrive derrière moi et passe ses bras autour de moi.
– Celui-ci ?
Je souris en hochant la tête.
– Celui-ci.
Wes se penche pour m’embrasser sur la joue et, avant qu’il ait pu reculer,
j’attrape son visage pour l’embrasser sur la bouche. C’est un long baiser mouillé.
Sa langue vient danser avec la mienne, il lèche ma bouche, rallumant une

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flamme en moi qui, exceptionnellement, s’était éteinte en voyant ma mère.
Lorsque nous nous séparons, un feu fait rage dans mes veines.
– Je t’aime, je dis contre ses lèvres, le faisant sourire.
– Je t’aime encore plus. Maintenant, coupons cet arbre.
– Comment ? je demande en regardant la luge.
Wes se penche pour ouvrir le sac dont il sort une hache. Il enlève la protection
en plastique qui recouvre la lame.
– Tu vas vraiment faire ça.
Il fronce les sourcils.
– Quoi ? Tu ne m’en crois pas capable ?
– Oh, je suis sûre que si. Mais ça semble être beaucoup de travail.
– Mia, ma chérie, les belles choses sont rarement gratuites, dans la vie.
Sur ce, il recule le bras et abat la hache sur le tronc. L’arbre tremble et des
paquets de neige et d’aiguilles de pin en tombent.
Pendant que Wes coupe notre sapin de Noël, je sors mon téléphone et le prends
en photo pour l’envoyer à Ginelle.

À : Ma Salope Chérie
De : Mia Saunders
À ton avis, il mesure combien ?

Quelques secondes plus tard, mon téléphone sonne.

À : Mia Saunders
De : Ma Salope Chérie
Ça dépend, si le bûcheron est samoan, je dirais 15.

À : Ma Salope Chérie
De : Mia Saunders
15 quoi ?

À : Mia Saunders
De : Ma Salope Chérie

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15 centimètres, abrutie. En tout cas, c’est la taille de sa bûche. La neige a
congelé ton cerveau ?

À : Ma Salope Chérie
De : Mia Saunders
T’es qu’une garce.

À : Mia Saunders
De : Ma Salope Chérie
C’est celle qui dit qui est. C’est toi qui m’as tendu la perche.

J’éclate de rire en grognant comme un cochon et je secoue la tête. Sacrée
Ginelle, quel caractère ! Ça me fait penser que je ne lui ai pas encore dit que
j’avais retrouvé ma mère. Elle va être furax et elle aura des tas d’injures à
proférer. Sans doute est-ce pour ça que je ne l’ai pas encore appelée. Je le ferai
mais… après. Elle m’en voudra de ne pas lui avoir dit tout de suite, mais elle me
le pardonnera vite et elle me comprendra. Gin m’aime, quoi qu’il arrive. C’est
une meilleure amie en or. Elle me connaît par cœur et elle m’aime malgré mes
défauts, comme je l’aime malgré les siens.
– Qu’est-ce qui te fait rire ? demande Wes.
Son souffle est rapide et des gouttes de sueur luisent sur son front.
– Rien, c’est juste Gin, je réponds en secouant la tête.
– Elle va bien ?
Je souris jusqu’aux oreilles, consciente de qui occupe ses journées. D’ailleurs, je
me demande ce qui va se passer quand Tao repartira à Hawaï. Est-ce qu’elle
voudra le suivre ? Connaissant Ginelle, elle ne voudra pas quitter Malibu si tôt
après qu’on lui a trouvé un boulot et offert un logement, mais ça ne veut pas dire
qu’elle n’aura pas envie de suivre Tao. Il faudra que je n’oublie pas de lui en
parler… Ginelle est avec Tao, tu te souviens ?
– Qui est Tao, déjà ?
– Le frère de Taï, mon ami. Elle l’a rencontré à Hawaï.
Wes reprend sa hache et l’abat dans le grand creux qu’il a déjà ouvert.

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– Tu veux dire ton cinquième client, dit-il froidement.
– Oui, Taï Niko, mon ami, je réponds.
Il connaît la vérité sur Taï et moi, mais il sait aussi que nous sommes restés de
bons amis.
– Celui que tu t’es tapé pendant un mois alors que je me languissais de toi ?
La hache fend l’air et des copeaux de bois volent partout.
– C’est injuste, et tu le sais. Tu étais avec Gina, à l’époque, si je me souviens
bien.
– Ouais. Et c’était la pire décision de ma vie, répond-il en grimaçant.
Je ne vais pas le contredire. Gina reste un sujet épineux pour moi, mais je me
suis remise de leur relation. Bon d’accord, c’est un mensonge. J’ai accepté ce
qu’ils sont l’un pour l’autre, aujourd’hui, et Wes va devoir en faire de même
avec Taï, car ce géant est un de mes meilleurs amis.
– Tu dis ça maintenant mais… Bref, j’ai accepté Gina, et tu dois accepter Taï. Il
sera là au mariage.
Il fend le tronc et recule, les yeux grands ouverts.
– Quoi ? Tu ne me l’as pas dit, dit-il en serrant si fort le manche que ses
phalanges blanchissent.
– Lui et sa fiancée, Amy, font partie de mes vingt-cinq invités. On va aussi à leur
mariage à Hawaï, cet été.
– C’est lui qui se marie cet été ?
– Oui, Wes, je soupire. C’est lui. Mon ami Taï. Celui qui a sauté dans un avion
en juin et m’a aidée à me remettre après mon agression.
– Ç’aurait dû être moi, ça ! s’exclame-t-il en frappant si fort le tronc qu’il cède
enfin et s’écroule.
– T’as fini, maintenant ? je demande, les mains sur les hanches et la tête penchée
de côté.
– Je n’aime pas que d’autres hommes se soient occupés de toi. D’accord ?
– Je sais. Je comprends. Je n’aime pas que tu aies été avec Gina. Mais c’est du
passé. Et ça ne change rien au fait que ces gens comptent pour moi. Tu sais très
bien qu’il n’y a plus que de l’amitié entre nous.
– Tu dis que sa fiancée va venir ? demande Wes d’une voix douce.

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Je marche vers lui et pose ma main sur son épaule alors qu’il se concentre sur
l’arbre couché.
– Oui bébé, sa fiancée. Amy. Elle est charmante. Elle est au courant de notre
passé, elle aussi, et elle ne nous en tient pas rigueur. Taï et moi n’avons été
ensemble qu’un seul mois dans toute notre vie. Depuis le jour où j’ai pris
l’avion, à la fin du mois de mai, nous ne sommes plus qu’amis. Je t’épouse dans
deux semaines. Elle épouse Taï dans six mois. On est amis. On tient l’un à
l’autre. C’est tout.
Je fais de mon mieux pour lui exprimer les sentiments sincères que j’ai pour Taï.
Je ne veux pas que Wes soit jaloux d’un autre homme de ma vie.
– Je suis désolé. C’est juste… L’idée que tu aies été avec un autre me rend fou.
C’est injuste, mais tu as raison. On a chacun notre passé, et tu as été infiniment
patiente pendant que j’aidais Gina à se remettre de son traumatisme. Je suis
désolé. Tu me pardonnes ? demande-t-il en me prenant par la taille.
– Je te pardonnerai toujours. Et je te montrerai à quel point quand on aura
rapporté cet arbre au chalet et qu’on se décongèlera sous une douche fumante.
T’en penses quoi ?
Il agit si vite que je me retrouve dans ses bras, les pieds à dix centimètres du sol.
– Tu proposes qu’on se réconcilie sur l’oreiller ? dit-il en me reposant et en
souriant.
– Absolument !
– Alors j’accepte ! Maintenant, tiens la luge pendant que j’y pose notre premier
sapin de Noël.
*
* *
Wes et moi passons une bonne heure à traîner le sapin au chalet et à le hisser
jusqu’à la terrasse, où il le secoue pendant de longues minutes. Apparemment,
c’est nécessaire pour en déloger les habitants potentiels, les aiguilles et la neige.
Puis il sort le souffleur à feuilles pour le sécher. Je trouve tout le processus
fascinant.
Ensuite, nous passons encore une heure sous la douche, à nous réconcilier. C’est
bien plus amusant que la chasse à l’arbre, mais je ne le dis pas à Wes.

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À présent, assise sur le canapé, j’ouvre les cartons de décorations de Noël, de
guirlandes lumineuses et autres. J’ai du mal à croire que les Channing ne
viennent pas souvent ici. Wes a allumé la cheminée et je l’ai décorée avec des
guirlandes en faux poinsettias, suspendues de chaque côté de chandeliers en
argent qui, apparemment, étaient le cadeau de mariage de sa grand-mère à ses
parents. Ensemble, Wes et moi chargeons l’arbre de guirlandes et d’ornements.
Parmi les boules achetées en magasin, je trouve une boîte de décorations faites à
la main sur lesquelles sont écrits les prénoms de Wes et de Jeanine.
Wes sourit quand je lui montre un rond en plâtre avec l’empreinte de sa main.
Chaque doigt est peint d’une couleur différente et parsemé de paillettes.
Derrière, sa mère a indiqué qu’il avait cinq ans quand il l’a fait.
– Quand on était petits et qu’on était ici, maman nous occupait en nous faisant
fabriquer des décorations qu’elle laissait là pour la prochaine fois qu’on passerait
les fêtes à Aspen. C’était une tradition géniale, dit-il en souriant.
– On n’a qu’à faire ça avec Isabel.
Wes s’assied sur le canapé à côté de moi.
– Et on fera la même chose avec nos enfants, un jour.
Les enfants. On en a déjà parlé, mais à part se dire qu’on en voulait tous les
deux, on ne peut pas dire qu’on ait été très loin dans la discussion.
– Quand est-ce que tu veux commencer une famille, Wes ? je demande, un peu
nerveuse.
Il prend ma main et embrasse tendrement chaque phalange.
– Ça dépend quand tu veux faire une pause dans ta carrière. Si ça ne tenait qu’à
moi, on commencerait tout de suite. Je vais avoir trente et un ans cette année.
Mais tu n’as que vingt-cinq ans et tu as ta carrière devant toi. Non pas que tu aies
besoin de travailler, ajoute-t-il.
– Et si on prenait une année pour nous, et qu’on en reparle dans un an ?
– Ça me va, chérie.
Waouh, ce type est vraiment génial.
– Eh ben, c’était simple, je dis en riant.
– Pourquoi ça ne le serait pas ? Dans un mariage, il n’est pas question que l’un
des deux ait tout ce qu’il veut. Mes parents ont toujours trouvé des compromis.

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Je crois que c’est ça, la clé. L’honnêteté aussi. Si je meurs d’envie d’avoir des
enfants, on en parlera pour être sûrs qu’on est tous les deux prêts. Je crois que
c’est le meilleur moyen d’aborder toutes les situations. Pas toi ?
J’y réfléchis en faisant tourner une boule dorée dans ma main.
– Ouais, je crois que tu as raison. Si on est sincères et prêts à faire des
compromis, on devrait bien s’en sortir.
Il sourit et m’embrasse sur la joue.
– On s’en sortira mieux que bien ! Tant que je suis marié à toi, la femme de ma
vie, il n’y a rien qu’on ne puisse résoudre ensemble.
Je me sens infiniment heureuse et sereine en entendant ces mots. Je me tourne
vers lui pour l’embrasser, et nous passons quelques minutes à nous peloter sur le
canapé. Je suis assise à cheval sur lui, ses mains sont sur mes seins, sous mon
pull, lorsqu’une sonnerie retentit dans le salon.
– Qu’est-ce que c’est ? je demande en me figeant.
– La porte d’entrée. Ta famille est là, répond-il en m’embrassant dans le cou.
– Ma famille est là, je répète, encore sur un nuage.
Soudain, je réalise. Ma famille est là !
– Youpi ! je m’écrie en me levant d’un bond. Ma famille est là ! Ils sont là !
Je cours à la porte en chaussettes de Noël et en glissant sur le parquet.
J’ouvre grand la porte et découvre le visage grognon de Max.
– Bon sang, sucre d’orge, il fait un froid de canard ! Il fallait que tu choisisses la
montagne pour notre premier Noël ?
Je me jette sur lui et l’embrasse sur la joue en le prenant dans mes bras.
– D’accord, ça va, je te pardonne, dit-il en souriant.
– Maddy, je chuchote en voyant ma sœur.
– Mia !
Elle passe ses longs bras autour de moi et me serre si fort que je n’arrive plus à
respirer.
– Tu m’as tellement manqué ! dit-elle. Je n’arrive pas à réaliser qu’on soit dans
le Colorado. C’est tellement cool !
– C’est cool, mais on se les gèle, dit Matt en me prenant à son tour dans ses bras.
Merci de nous accueillir, Mia.

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– Merci d’être venu, Matt.
Max ressort pour aller à la voiture et il remonte les marches avec un siège auto
couvert d’un plaid bleu. Il me le tend et je découvre qu’il pèse une tonne. Que
donnent-ils à manger à mon neveu, bon sang ? Le plaid bouge, je le soulève pour
regarder dessous. Jackson sourit en mâchouillant sa main. Je le porte dans le
salon et le pose par terre, près du sapin, puis j’enlève le plaid pour qu’il puisse
regarder les lumières.
Lorsque tout le monde est installé et que nous avons tous un mug chaud entre les
mains, nous finissons de décorer le sapin tous ensemble. Comme je m’y
attendais, Maddy est ravie. Ses yeux sont gigantesques lorsqu’elle regarde le
résultat fini. Je passe un bras autour de sa taille et appuie ma tête sur son épaule.
– C’est magnifique, non ?
– Oui, c’est superbe, Mia. Vraiment. Merci. Pour ça, pour nous avoir tous réunis.
C’est… je ne sais pas. C’est énorme.
– C’est énorme, je suis d’accord. Et on va en profiter tous ensemble.
Max se glisse entre nous et nous appuyons nos têtes sur ses larges épaules. C’est
justement ce qu’il aime, être entouré de sa famille.
– Demain, on parlera d’elle, mais pas aujourd’hui, je déclare. Aujourd’hui, on
célèbre notre famille, on dîne ensemble et on savoure la magie de Noël.
– Je suis d’accord, dit Maddy.
– Je ferai tout ce que vous voulez, les filles. En famille, on prend soin les uns des
autres, répond Max en nous serrant contre lui.
Je soupire en admirant mon premier sapin de Noël avec ma sœur et mon frère.
Le sujet de ma mère a beau occuper un coin de nos têtes, ce moment est à nous.
Nous formons une famille, quoi qu’il arrive. Nous sommes plus forts grâce aux
épreuves que nous avons traversées. Les moments comme ceux-ci sont
nouveaux et merveilleux, et j’emporterai ces souvenirs avec moi jusqu’à ma
mort.

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Chapitre 7

Nous avons fini de prendre le petit déjeuner, et Wes et Cindy sont en train de
ranger la cuisine, Matt s’amuse avec Isabel, qui l’appelle déjà Tonton Matt.
Maddy me dit qu’il adore ça. Matt est fils unique, donc il est ravi d’avoir une
nièce et un neveu, et je l’apprécie encore plus d’être conscient de la valeur d’une
famille. J’espère néanmoins que ça ne lui met pas des idées en tête avec ma
sœur.
Max, Maddy et moi nous asseyons sur le canapé face à la cheminée. Maddy
replie ses jambes sous ses fesses et je croise les miennes. Quant à Max, il est on
ne peut plus sérieux. Ses jambes sont pliées en angle droit, ses coudes sont posés
sur ses genoux et ses mains sont jointes.
– Ok, les filles. Il faut qu’on décide de la manière dont on va gérer la situation.
Parlons franchement. Mia, raconte-nous ce qui s’est passé à la galerie.
Je leur raconte tout ce dont je me souviens, y compris de la gifle que je lui ai
donnée et dont je ne suis absolument pas fière, ainsi que sa tentative de me
convaincre qu’elle ne savait pas que Maddy était la fille de Jackson. Je leur dis
qu’elle prétend ne se souvenir de rien, y compris des fois où elle m’a emmenée
au casino pour poursuivre sa relation extraconjugale avec le père de Max. Je leur
dis qu’elle a même osé insinuer qu’elle nous a abandonnés pour nous protéger et
qu’elle m’a répété que je ne connaissais pas toute l’histoire, comme si elle savait
quelque chose qui rendrait acceptable son abandon, alors que rien ne peut
l’excuser.
– Eh bien, pour ma part, j’aimerais la revoir. J’aimerais lui dire ce que j’ai sur le
cœur. Je crois que ce serait bien qu’on y aille tous ensemble. Qu’on l’écoute et
qu’on s’assure qu’elle nous entend. Qu’en pensez-vous ?

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– Tu crois vraiment que ça l’intéresse ? je demande en fronçant les sourcils.
– Je ne sais pas et je m’en fiche, répond-il en haussant les épaules. Ce n’est pas
d’elle qu’il est question, mais de nous, de ce qu’on a traversé. On a le droit de la
regarder dans les yeux et de lui dire tout le mal qu’elle nous a fait. Maddy ?
Maddy prend ma main et je serre la sienne dans ma paume, lui offrant mon
soutien, ma solidarité de sœur. Nous avons toujours fonctionné ainsi. Cependant,
nous avons un frère à présent, et nous devons lui faire une place à nos côtés.
Nous ne sommes plus toutes les deux, il y a Max et sa famille. Et puis il y a Wes,
Matt… ils ont tous une place dans cette réunion.
– J’ai peur, soupire ma sœur. Je ne sais pas quoi dire à quelqu’un dont je ne me
souviens pas.
– Ça se comprend, dit Max en hochant la tête. Mia, tu crois que tu lui as dit tout
ce que tu avais à dire ?
– Je ne sais pas.
– Que pensez-vous de venir toutes les deux avec moi pour me soutenir pendant
que je dirai ses quatre vérités à notre mère ? dit-il d’un ton légèrement stressé.
Max n’aime pas demander de l’aide aux autres, et en temps normal, il l’évite
autant que possible. Néanmoins, sa demande me fait paniquer et ma gorge se
noue.
– Max… je chuchote.
Il secoue la tête.
– Je sais qu’elle vous a abandonnées et qu’elle vous a fait du mal. Elle m’a fait la
même chose. Elle n’est même pas restée assez longtemps pour voir ma première
dent. Bon sang, elle avait déguerpi avant même que j’aie ma première coupe de
cheveux. J’aimerais la voir. J’aimerais mettre un visage sur un nom. Et j’aurais
bien besoin du soutien de mes deux sœurs.
Je me lève et marche jusqu’à lui pour m’asseoir à ses côtés. Je passe un bras
dans son dos et le serre contre moi.
– Je suis désolée. J’étais égoïste. Il ne s’agit pas que de moi, il s’agit de nous
trois. Elle t’a blessé aussi. Et tu as raison, on doit y aller ensemble, soudés. Parce
qu’on est une famille maintenant, n’est-ce pas ?
– Exactement !

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Maddy longe le canapé et se blottit contre lui.
– Je veux être là pour toi. Tant que tu es là pour moi, je suis là pour toi,
d’accord ? dit-elle avec des yeux brillants.
– Alors, c’est réglé. Je vais appeler Kent Banks et prévoir un rendez-vous.
Max hoche la tête et nous restons assis en silence, accaparés par nos pensées, les
yeux perdus dans les flammes.
*
* *
Kent Banks avait hâte de nous rencontrer. Au téléphone, il nous a dit qu’il y
avait des choses que nous devions savoir avant qu’il accepte un face-à-face avec
notre mère. C’est ainsi que nous nous retrouvons à La Taverne de Zane. Wes et
Matt sont assis au bar, en train d’échanger des plaisanteries avec Alex, assez
près pour garder un œil sur nous mais assez loin pour nous laisser une certaine
intimité. J’ai déjà rencontré Kent. Il est un peu étrange, mais il semble inoffensif,
même s’il est extrêmement protecteur avec sa femme. Techniquement, ils ne
sont même pas mariés. Je me demande s’il sait qu’elle n’a jamais pris la peine de
divorcer de mon père.
Mon père. Je soupire en pensant à lui. Encore une déception. Il ignore mes coups
de fil depuis que je suis partie de Las Vegas et qu’on l’a installé chez lui avec
deux infirmières. Elles nous ont dit qu’il répondait bien à son traitement mais
que, mentalement, il est vite retombé dans ses vieilles habitudes. J’avais espéré
qu’il resterait fort et qu’il sortirait enfin de sa spirale dépressive, peut-être était-
ce naïf de ma part. À ce stade, je prie seulement pour qu’il continue de voir sa
psy et qu’il ne se remette pas à boire. J’ai fait tout mon possible pour lui cette
année, et bien plus qu’il ne le mérite. C’est à lui de jouer, maintenant.
Toute cette aventure m’a appris une leçon d’une valeur inestimable. L’amour
n’est pas toujours bienveillant. Parfois, il peut être impitoyable, brutal et lâche.
Ça ne veut pas dire qu’il disparaît pour autant. C’est ce que j’apprends à
accepter, et Wes m’aide à guérir de la blessure laissée par la femme qui m’a
donné la vie.
Une bouffée d’air glacial fouette mon visage lorsque Kent passe la porte. Il nous
repère tout de suite et s’assied sur la banquette vide. Aucun de nous n’a voulu

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s’asseoir avec lui, donc Maddy et moi nous serrons d’un côté et Max a fait en
sorte d’occuper toute la banquette qui fait l’angle avec la nôtre, laissant la
dernière pour Kent. Si ce dernier remarque notre tactique, il n’en dit rien.
Il frotte ses mains l’une contre l’autre pour les réchauffer et nous regarde en
souriant.
– Merci d’être venus.
Max, celui qui tient le plus à voir notre mère, parle le premier.
– Je suis Maxwell Cunningham, dit-il en lui tendant la main. Vous avez
rencontré ma sœur, Mia Saunders, et voici notre petite sœur, Madison Saunders.
Maddy et moi lui sourions.
– Je suis sûr que vous ne voulez pas perdre de temps, donc je vais commencer
par le début, dit Kent d’une voix calme.
Max hoche la tête et lui fait signe de continuer.
– Quand j’ai rencontré Meryl, elle était perdue. Elle traversait la campagne dans
une voiture qui était sur le point de rendre l’âme. Elle était sale, elle ne s’était
pas douchée depuis des jours, voire des semaines. J’ai appris plus tard qu’elle
n’avait pas de vêtements pour pouvoir se changer, et c’est à peu près tout. J’ai
supposé qu’elle fuyait un homme violent et, à l’époque, elle n’a pas dit le
contraire. Elle m’a laissé penser le pire.
Je lève les yeux au ciel en soupirant bruyamment, outrée, mais Kent poursuit
sans s’arrêter.
– Je l’ai rencontrée à la bibliothèque. J’étais là pour récupérer un livre dont
j’avais besoin pour mes études, et elle était là pour se réchauffer.
Maddy serre ma main sous la table. Je ne suis pas surprise qu’elle soit attristée
d’entendre qu’une autre personne a souffert comme nous. Mais je trouve ça
déplacé. Notre mère avait une maison où habiter. C’est elle qui a choisi de la
quitter. Elle n’aura aucune compassion de ma part.
– J’ai commencé à la voir de façon régulière à la bibliothèque. J’ai réalisé au
bout d’une semaine qu’elle ne s’était pas changée. Ses cheveux étaient encore
plus gras et, honnêtement, elle sentait mauvais. Mais il y avait quelque chose
dans son regard… une étincelle quand elle plongeait ses yeux dans les miens.
Elle me captivait. Un jour, je lui ai demandé de rentrer avec moi et je lui ai

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proposé de l’aider par rapport à ce qu’elle fuyait. Encore une fois, elle ne m’a
pas contredit. Je l’ai lavée, je l’ai nourrie et je lui ai offert un toit. Les jours sont
devenus des semaines, et j’aimais sa compagnie. Elle m’aidait avec mes études,
elle faisait le ménage, elle nous faisait à manger et elle avait un talent pour l’art.
– Où voulez-vous en venir, Monsieur Banks ? Tout ça ne nous dit rien, si ce
n’est qu’elle vous a menti comme à nous. Elle n’était pas SDF par malheur, elle
l’était par choix. Son mari, mon père, n’a jamais levé la main sur elle. Jamais.
Elle l’a détruit, et elle vous détruira aussi, je dis d’un ton plein de rancœur.
Kent secoue la tête.
– Non, s’il vous plaît. Écoutez-moi. Il y a des choses que vous ne savez pas.
Max se penche en avant et le fusille du regard.
– Alors, venez-en au fait.
– Au bout de deux mois, j’ai commencé à remarquer qu’elle faisait des choses
étranges et irrationnelles. Je rentrai et je trouvai le sol de la cuisine couvert de
farine, et elle en train de danser dedans comme une ballerine. Les gens normaux
ne font pas ce genre de chose. Or, Meryl les faisait régulièrement. Une autre fois,
elle avait versé du liquide vaisselle sur le parquet du salon et elle s’amusait à
glisser dessus à plat ventre.
– Ouaip, c’est tout elle. Elle faisait ça tout le temps. Elle nous donnait des glaces
pour dîner, elle nous emmenait danser sous la pluie en hiver ou au beau milieu
d’un orage. Papa travaillait beaucoup à l’époque, pour lui offrir tout ce qu’elle
voulait, donc il n’a pas tout vu. Quand il rentrait, elle partait souvent au casino
pour danser dans un spectacle. Ils étaient comme des navires qui se croisaient
dans la nuit, sans jamais faire escale en même temps.
– Alors, vous avez vu son comportement étrange. Il était plus qu’étrange,
d’ailleurs. C’était comme si, tout à coup, elle perdait la tête. Parfois, elle était si
joyeuse que je me demandais si elle se droguait, ou bien elle était au fond d’un
gouffre et elle n’arrivait même pas à se lever.
– C’est peu dire, Monsieur Banks.
Je me souviens d’un million de fois où, petite, ma mère se comportait comme
une folle et oubliait son rôle de mère. Mais on n’y prêtait guère attention, parce
qu’on l’aimait.

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– C’est quoi, le rapport avec elle maintenant ? demande Max.
– Tout. J’ai mis un moment à la convaincre, mais elle a fini par accepter de se
faire examiner. Est-ce que vous saviez que votre mère était sévèrement
bipolaire ? demande Kent.
Nous restons tous silencieux un moment.
– Bipolaire ? Vous voulez dire qu’elle était déprimée ? répond Max.
Kent secoue lentement la tête.
– Elle souffre de dépression, oui, mais c’est plus que ça. Elle a des sautes
d’humeur. Son humeur change si vite et de façon si radicale qu’elle a besoin
d’un traitement très lourd pour compenser. Sous traitement, elle va très bien.
Elle arrive à garder un emploi, et on a découvert qu’elle était une artiste
talentueuse capable de mener une vie tranquille et paisible. Ici, à Aspen, avec
moi. Son humeur est toujours changeante, et elle souffre toujours de dépression
et de folie heureuse, mais les cycles sont bien moins sévères et moins fréquents
sous traitement.
Kent respire lentement, comme pour rassembler ses idées, comme s’il savait que
ce qu’il allait dire n’allait pas être bien perçu.
– La femme qu’elle était avant, qu’elle était quand je l’ai rencontrée, n’aurait
jamais été capable d’élever un enfant sans médicaments. Sa maladie était grave
et elle avait clairement été ignorée toute sa vie. Je ne suis pas surpris qu’elle ait
fait ce qu’elle a fait.
Je pose sur lui un regard meurtrier.
– Je ne dis pas que ce qu’elle vous a fait était juste, s’empresse-t-il de dire. Ce
que je dis, c’est que sans traitement et dans un de ses moments de folie, elle
aurait pu trouver parfaitement logique d’aller dehors, en hiver, pour danser avec
ses enfants. La folie crée sa propre logique, ses propres moyens de justifier la
nécessité d’une action. Or, lorsque les moments de délire joyeux prenaient fin et
que la dépression reprenait le dessus, elle aurait trouvé ses enfants trempés,
gelés, affamés, et elle aurait conclu qu’elle était une mauvaise mère et un danger
pour ses enfants. Je peux vous jurer qu’elle traîne le poids de ses erreurs chaque
jour.
Il secoue la tête, aucun de nous ne réagit.

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Pour ma part, je ne sais pas quoi dire. Tant de pensées se pressent dans ma tête,
tant d’émotions dans ma poitrine. Mes sentiments influencent mon jugement et
me rongent de l’intérieur. J’ai besoin de temps.
– Même si l’autre jour l’a chamboulée, poursuit Kent, elle veut vous voir. Elle
ne sait pas que Maddy et Max sont là, mais j’imagine qu’elle n’en sera que plus
ravie. Elle veut s’expliquer, s’excuser. Vous êtes adultes, maintenant. Vous ne
pouvez pas oublier le passé, mais peut-être que vous le comprendrez. Elle est
avant tout ma femme. Cela fait presque quatorze ans que…
– Vous avez conscience que vous n’êtes pas officiellement mariés ? je rétorque.
Elle n’a jamais divorcé de mon père.
– Je sais que notre mariage n’est pas légal, mais la loi m’importe peu. Ça fait
quatorze ans que je protège cette femme, et je continuerai de le faire jusqu’à
mon dernier jour. Alors, si tout ce que vous voulez, c’est la détruire, je pense
qu’il vaut mieux en rester là, dit-il en posant ses mains à plat sur la table.
Max se lève et lui tend la main.
– Laissez-moi parler avec mes sœurs. On vous appellera plus tard dans la soirée.
Kent se lève et lui serre la main avant de fermer son blouson.
– J’ai hâte que vous m’appeliez. Je sais que vous souffrez et que ce que je vous
ai dit est un choc. Ça m’a surpris, aussi, mais la vie est ainsi parfois. Ce qui nous
définit, c’est notre façon de supporter les blessures.
Sur ce, il tourne les talons et s’en va sans regarder derrière lui.
Max se rassied en soupirant.
– Alors, qu’est-ce que vous en pensez ?
Je hausse les sourcils.
– Wes, bébé, une tournée de tequila, s’il te plaît ?
– Je gère ! répond-il en passant commande auprès d’Alex.
– La dernière fois que tu as bu trop de tequila, ricane Maddy, tu as fini par hurler
toute la nuit dans les bras de ton Samoan géant en oubliant que j’étais dans la
pièce d’à côté.
Je repense à ma nuit avec Taï, digne d’un film porno, et je lui mets un coup de
coude.
– Ne t’avise pas de répéter ça quand Wes peut t’entendre, je gronde.

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Max sourit, mais ferme les yeux.
– C’est une image dont je me serais bien passé, dit-il. J’apprécie la distraction,
mais qu’est-ce que vous pensez de ce que le bûcheron a dit sur notre mère ?
Je soupire et serre Maddy contre moi, pour avoir son soutien et lui offrir le mien.
– Honnêtement, je ne sais pas. Ça semble assez logique. Tout ce qu’il a dit sur
son comportement étrange est vrai. Les hauts de maman pouvaient atteindre les
étoiles, mais les bas… étaient plus fréquents et moins faciles à supporter. On ne
savait jamais à quoi s’attendre. Globalement, quand elle n’était ni folle de joie ni
sévèrement déprimée, elle changeait de travail, elle accumulait les dettes, elle
oubliait de nous récupérer à l’école et elle cramait ses plats parce qu’elle oubliait
qu’elle avait mis quelque chose au four. Ce dont je me souviens colle avec ce
qu’il a décrit.
– Est-ce que ça change ce que tu penses d’elle ?
Bon sang, c’est bien la question à un million de dollars.
– Peut-être un peu. Ce qui est sûr, c’est que ça m’aide à comprendre pourquoi
elle était comme elle était. Ça n’explique quand même pas pourquoi elle est
partie du jour au lendemain, pourquoi elle n’a pas parlé de ses problèmes à un
médecin, pourquoi elle ne s’est pas fait aider. Quand elle nous a abandonnées,
elle avait trente ans passés. Comment une telle maladie peut-elle passer
inaperçue aussi longtemps ? Je déteste de le dire, mais ça semble un peu facile,
non ?
– Peut-être que si elle n’était pas bien dans sa tête, elle pensait nous sauver en
partant ? Peut-être que, au fond d’elle-même, elle se doutait que quelque chose
n’allait pas ?
– Ça n’explique pas pourquoi elle m’a laissé quand j’étais bébé pour rester dix
ans avec votre père, répond Max d’un ton lugubre.
– Non, c’est vrai. À moins que ton père ait vu quelque chose que mon père a
ignoré ? Peut-être qu’il l’a poussée à se faire aider et que ça ne lui a pas plu.
– Je suppose qu’on ne saura pas tant qu’on ne lui aura pas parlé. Est-ce que
j’appelle Kent pour fixer un rendez-vous ? J’aimerais le faire avant Noël, avant
que le reste de la famille n’arrive. Au fait, la famille de Matt vient ? Max
demande à Maddy.

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Elle secoue la tête.
– Non. Comme Matt est avec moi et qu’on est tous ensemble, ils sont partis faire
la croisière dont ils rêvent depuis longtemps. Ils n’ont jamais voulu que Matt
reste seul, et maintenant qu’il ne l’est plus, ils nous ont demandé si ça nous
gênait qu’ils partent en vacances. Je leur ai dit d’en profiter. L’année prochaine,
en revanche, ils veulent faire Noël chez eux, si ça ne pose pas problème, dit-elle
en nous regardant timidement.
Je souris et prends son menton entre mes doigts pour qu’elle me regarde.
– Eh, ta famille avec Matt est aussi importante que celle de Wes et de Cyndi,
d’accord ? On fera de notre mieux pour passer les fêtes ensemble et pour que ce
soit équitable. En tout cas, il y a assez de place pour nous tous, ici. Et vu les
projets de Wes et de Max pour les deux ranchs, il y aura largement la place au
Texas, aussi.
– Quels projets ? demande-t-elle en écarquillant les yeux.
– Wes veut acheter une des fermes à côté de notre maison, dit Max en souriant.
– Tu vas déménager au Texas ? s’exclame Maddy en gigotant sur son siège, tout
excitée.
– Euh… Non. Oui. Plus ou moins. Max, tu crains ! Wes veut une maison de
vacances. Et quel meilleur endroit qu’à côté de chez Max ? Et dans deux ans, si
tout se passe bien, Matt et toi y serez aussi.
– Mon Dieu ! C’est génialissime ! Je vais vivre à côté de ma sœur et de mon
frère !
Wes s’approche de nous avec un plateau couvert de shots de tequila, pas une
tournée, un plateau. Il le pose, attrape une chaise et s’assied en bout de table
alors que Matt s’installe à côté de Max.
– J’ai cru comprendre qu’il fallait boire ? dit-il. Vous êtes prêts ?
Wes sourit, et je fonds en le regardant. J’adore ce sourire. Il me fait penser à des
grasses matinées au lit, le dimanche, et à des balades sur la plage. À des journées
entières passées à aimer et être aimée en retour. C’est ainsi que sera ma vie avec
Wes, et j’ai hâte.
Nous prenons tous un verre et le levons pour trinquer.
– À l’avenir !

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– Aux possibilités sans fin, ajoute Maddy en souriant.
– À la famille, conclut Max.
Nous vidons nos verres et commandons à manger. Heureusement, Matt se
propose d’arrêter de boire pour nous ramener. Max, Maddy et moi continuons
les shots pour nous remettre du choc que nous venons de subir. Après tout, que
reste-t-il à faire à part vivre le moment présent ? C’est donc ce que nous faisons.
Toute la nuit.
*
* *
Le rendez-vous avec notre mère est fixé deux jours avant Noël. Un lourd silence
pèse sur nous durant le trajet en voiture. Heureusement, il se trouve que leur
immense chalet n’est qu’à cinq minutes de celui de Wes. Nous arrivons
rapidement en haut de l’allée de gravier qui y conduit.
Kent ouvre la porte et nous emmène dans un immense salon. Il y a de grandes
fenêtres donnant sur la vue superbe, mais pas un mur de baies vitrées comme
chez Wes. Ici, les ouvertures sur l’extérieur sont rondes, comme dans un bateau,
mais bien plus grandes. Dans la cuisine moderne, une porte-fenêtre donne sur
une terrasse en bois. La cuisine est éclairée par des suspensions en verre bleu qui
surplombent le plan de travail et illuminent d’un voile azur la cuisine toute
blanche. Tout est ultramoderne, tout en étant chaleureux. Dans le salon, blanc
aussi, des tissus colorés attirent le regard.
L’objet le plus beau, au cœur de la pièce, est un tableau accroché au-dessus de la
grande cheminée. Il montre la vue qui entoure le chalet, mais au printemps,
quand tout est vert et plein de couleurs vives. L’artiste qui l’a peint a clairement
un grand talent et une attention incroyable pour les détails.
Notre mère est assise tout au bout d’un canapé gigantesque. Elle est vêtue de
leggings noirs et d’un pull blanc à grosses mailles. Ses cheveux sont terriblement
noirs et semblent presque bleus, à distance.
– Venez, asseyez-vous, dit Kent en désignant les fauteuils et les canapés.
Nous faisons tous les trois le tour du canapé et nous asseyons ensemble en face
de Meryl, laissant Kent prendre place aux côtés de sa femme. Elle lui prend

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immédiatement la main et la serre si fort que je vois ses doigts pâlir, comme s’il
était la seule chose qui l’empêchait de devenir folle. Peut-être est-ce le cas.
– Mia, merci d’être venue. Maxwell, Madison…
Sa voix tremble et ses larmes se mettent à couler.
– Je suis contente de vous voir. Je ne pensais pas que ce jour viendrait…
Un sanglot l’interrompt, et Kent lui passe un mouchoir.
– Vous avez l’air si… Mon Dieu, vous êtes si beaux, dit-elle d’une voix
émerveillée.
Je regarde Maddy pour voir comment elle va. Ses joues sont rouges. Quant à
moi, je n’ai plus de larmes à verser. J’ai passé des années à pleurer cette femme,
et encore des journées, plus récemment. Je me sens asséchée… vidée.
– C’est bien qu’on rencontre enfin la femme qui nous a mis au monde, dit Max
en passant son bras autour de ma sœur. Je dois dire que, pour Maddy et moi,
c’est comme si c’était la première fois.
Notre mère hoche la tête, et de nouvelles larmes ruissellent sur son visage.
– Je sais que je ne peux rien dire pour enlever le mal que je vous ai fait…
Je serre les dents et me retiens de parler pour éviter que la conversation ne
tourne autour de moi. Après tout, elle nous a tous abandonnés.
– Mais je vais mieux maintenant et je comprends les dégâts que j’ai causés. Je
sais, Mia, que tu es très en colère contre moi, et si j’avais su que mon départ
serait pire que ma présence, je ne serais jamais partie.
– Pourquoi tu es partie ?
C’est la seule question que je meurs de lui poser depuis quinze ans.
Elle se lèche les lèvres et se tient plus droite.
– À l’époque, je n’avais pas les idées claires. Trop de fois, je me suis retrouvée
debout dans la cuisine, à ne pas savoir ce que je faisais. Je recevais de plus en
plus d’appels de l’école me demandant pourquoi je n’étais pas venue vous
chercher. Je manquais le travail sans m’en rendre compte. Un jour, j’ai ouvert les
yeux, j’étais en chemise de nuit, pieds nus, au milieu de la nationale qui mène
dans le désert. Votre père travaillait de nuit et je n’avais pas de poste fixe au
casino. Vous étiez toutes les deux seules à la maison. Je n’avais pas la moindre
idée d’où j’étais.

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– C’est affreux, dit Maddy.
Ma sœur est toujours la première à vouloir réparer tous les maux du monde.
– Ça l’était, répond Meryl en hochant la tête. Et ces trous de mémoire finissaient
toujours de façon dangereuse. Je ne savais pas comment les faire cesser. La
goutte d’eau a été le jour où j’étais si déprimée que j’ai bu toute la bouteille de
whisky de votre père. J’étais convaincue qu’il me trompait.
Je ricane sèchement et elle lève la tête en rougissant.
– Je sais que c’est moi qui le trompais. Enfin, je ne le savais pas vraiment. La
plupart du temps, je ne savais pas où j’étais ni quelle heure il était. Bref… ce
dernier soir, j’ai bu le whisky, je vous ai mises dans la voiture et j’ai pris le
volant.
La mâchoire de Max se contracte, je l’entends pratiquement grincer des dents.
– Je ne sais comment, j’ai quitté la route et je me suis mise à rouler dans le
désert. Un bon Samaritain a vu ma voiture et a appelé les flics avant de me
suivre. Au bout d’un moment, il a vu la voiture s’arrêter. Je m’étais endormie au
volant. Les flics sont arrivés, ils vous ont prises et ils m’ont mise en cellule de
dégrisement. Votre père est venu me chercher, j’étais censée être jugée pour
mise en danger de mineurs et peut-être aller en prison, mais…
– Tu es partie, je termine pour enfoncer le couteau dans la plaie.
– Je ne savais pas que j’étais malade. Personne ne savait.

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Chapitre 8

–Et pour moi ? demande Max.


Tiens donc, je me posais la même question.
– Tu m’as abandonné cinq ans avant de rencontrer Michael Saunders.
Meryl inspire lentement et s’essuie le nez.
– Tu as raison, c’est vrai. Jackson était un homme bien. Il voulait prendre soin de
moi, fonder une famille. À l’époque, je pensais encore que j’allais devenir une
danseuse célèbre. Il faut garder à l’esprit qu’à ce moment-là, ma maladie était
débridée, déchaînée. Mes pensées étaient complètement chamboulées. Je pensais
que Jackson voulait me mettre dans une cage dorée, me piéger en me faisant des
enfants.
– Te piéger ? ricane sèchement Max.
– Tu ne comprends pas, sanglote-t-elle. Je suis tombée enceinte de toi tout de
suite après avoir rencontré ton père. Ma maladie était sans limites. Je ne faisais
confiance à personne. J’aimais Jackson, mais je n’étais pas amoureuse de lui.
J’étais chaque jour un peu plus confuse que la veille. Je ne savais pas ce qui
m’arrivait. La psy que j’ai vue ici m’a dit que c’était sans doute le baby blues,
aggravé par mon instabilité mentale. Quand les hormones d’une femme montent
aussi haut et retombent aussi bas, et qu’elle est bipolaire, les conséquences
peuvent être désastreuses.
– Ouais, « désastreux » résume bien la situation, dit Max.
– Ça ne veut pas dire que je ne tenais pas à toi, que je ne t’aimais pas, Maxwell.
Je t’aimais. Je t’aime encore aujourd’hui, énormément ! Mais je ne savais pas
m’occuper de toi. J’avais des pensées horribles à propos de Jackson, à propos de
me tuer, et toi aussi. J’ai fait la seule chose que je pouvais faire…

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Elle pleure à chaudes larmes.
– Partir, conclut Max.
Ce mot me dégoûte, et ma colère monte de plus en plus, emportant tout sur son
passage.
– Je savais que Jackson avait de l’argent, du pouvoir et du soutien. Je savais
qu’il s’occuperait de toi jusqu’à ce que j’aie de nouveau les idées claires. Mais
ça n’est jamais arrivé. Et quand j’ai rencontré Michael, il était si doux et
aimant… Il s’est occupé de moi. Il me vénérait, sanglote-t-elle. Au début, nous
étions tous les deux un peu fous et différents, et ça me plaisait. C’était nous deux
contre le reste du monde. Puis, sur un coup de tête, dans un de mes moments de
joie extrême, on s’est mariés dans une chapelle de Las Vegas. Peu de temps
après, je suis tombée enceinte de Mia. Et… vous connaissez la suite.
Elle renifle et essuie ses larmes avec son mouchoir.
– Pourquoi tu ne nous as jamais contactés ? demande Maddy d’une petite voix
triste.
– Oh, bébé, je le voulais. Chaque jour. Mais j’avais peur. De ce que vous diriez,
de ce que Michael dirait. D’aller en prison. Et puis, j’ai eu peur de perdre Kent,
le seul homme qui a vu que je n’allais pas bien et qui m’a aidée.
– Vous ne saviez pas qu’elle avait trois enfants ? je demande à Kent.
– Non, répond-il en secouant la tête. Meryl s’est effondrée quand elle t’a vue à
l’émission du Docteur Hoffman, et elle m’a tout raconté. Elle m’a dit toute la
vérité. J’ai fini par contacter l’émission en leur disant que j’étais ton beau-père,
que je savais où était ta mère, que tu ne l’avais pas vue depuis quinze ans, que je
voulais ressouder la famille.
Je soupire, vidant tout l’air de mes poumons. Cette foutue Shandi. Elle aurait pu
me prévenir de ce qui allait me tomber dessus. J’ai hâte de mettre mes mains sur
son petit cou tout maigre.
– Qu’est-ce que tu espères obtenir de tout ça ? je demande froidement, mon
regard glacial rivé sur la femme assise en face de moi.
La bête qui sévit en moi se contrefiche qu’elle souffre. Ça fait des années que
nous souffrons tous les trois pendant qu’elle vit au milieu d’une forêt, à peindre

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joyeusement, telle une femme au foyer sans souci et sans responsabilités. Or,
elle avait des responsabilités.
Elle frotte ses mains sur ses cuisses.
– Euh… Je n’y avais pas vraiment pensé. Je voulais surtout ôter le poids qui
m’écrase depuis quinze ans. Et je te promets que je ne savais pas pour ton père,
Madison. Je buvais beaucoup, à l’époque, pour apaiser ma tristesse. Jackson
venait en ville pour les affaires et il essayait souvent de me ramener au Texas,
mais je refusais. Je lui disais que j’avais épousé quelqu’un d’autre, que j’avais eu
Mia. Il aimait beaucoup Mia, dit-elle en me souriant tendrement. Ses visites se
sont perdues dans un flou alcoolisé, je me souviens de très peu de choses.
Maddy hoche la tête et joue avec sa bague de fiançailles, la faisant tourner sur
son doigt.
– Je suppose que j’aurais dû m’en douter. De vous voir côte à côte… c’est fou
combien vous ressemblez à Jackson. Il aurait été fier de te connaître, Madison.
Maddy hoche la tête, puis elle s’effondre. Max la prend dans ses bras et elle
enfouit sa tête dans son cou pour sangloter.
– Tu vois ça ? je demande en les désignant.
Meryl écarquille ses yeux apeurés.
– C’est ce que tu as laissé derrière toi. Je ne sais pas comment nous sommes
censés nous remettre de ce qui nous est arrivé… à nous.
Meryl se mord la lèvre.
– Je le vois. Je suppose que mon plus grand espoir est de reprendre à zéro. Je ne
serai jamais la mère que vous vouliez et que vous méritez, mais je suis votre
mère et j’aimerais essayer d’apprendre à vous connaître. Si vous m’y autorisez.
Je hausse les épaules, ne sachant quoi répondre. Je l’ai détestée pendant si
longtemps et j’ai nourri une telle rancœur contre elle que j’ai du mal à accepter
ces nouvelles informations. Je comprends qu’elle est malade. D’un point de vue
théorique, je comprends que beaucoup de ce qu’elle a fait n’est pas de sa faute.
Mais ça ne change pas les années de souffrance qu’il me faudrait mettre de côté
pour trouver la compassion nécessaire pour entretenir une relation avec elle.
– En ce qui me concerne, j’aimerais essayer, dit Max d’une voix grave et rauque.
Meryl cligne des yeux et sourit.

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Ça ne m’étonne pas de Max, Monsieur Famille. Ses proches sont tout pour lui et
il aime les gens encore plus vite qu’il leur pardonne. C’est son plus bel atout et
sa faille la plus vulnérable, mais je regrette de ne pas être davantage comme lui.
– Ma femme, Cyndi, et moi avons deux enfants. Isabel a cinq ans et Jackson a
tout juste deux mois. Ce serait bien qu’ils apprennent à connaître leur grand-
mère.
Meryl porte ses doigts à sa bouche et pleure à chaudes larmes.
– Des petits-enfants, mon Dieu, Kent, on a des petits-enfants ! s’exclame-t-elle,
pleine de joie.
Je ferme les yeux, attendant la réponse de Maddy.
– Moi aussi, j’aimerais essayer. Mais ce ne sera pas facile. Je ne te connais pas
vraiment. Et… euh… mon fiancé et moi vivons à Las Vegas. Mia est à Malibu et
Max au Texas.
La voix de Meryl tremble lorsqu’elle répond.
– Ce n’est pas grave. On pourra commencer par des emails et des coups de fil. Et
un jour, peut-être que Kent et moi pourrions venir vous voir. Ma galerie marche
bien et j’ai assez d’économies pour venir en avion.
– Si tu veux voir tes petits-enfants, Meryl, dit Kent en lui massant l’épaule, je me
ferai un plaisir de t’offrir ton billet. On a tout notre temps pour réparer nos torts.
Argh, j’ai envie de les détester tous les deux. Kent semble être un homme gentil,
patient et attentionné. Il serait un super grand-père pour les enfants de Max.
Tous les regards sont donc fixés sur moi. Je ferme les yeux, pour éviter qu’on
me juge. J’ai passé de nombreuses années à l’aimer et encore plus à me
morfondre de son absence… avant de finir par la détester.
– Mia ? demande notre mère. Et toi ? Y a-t-il encore une part de toi à qui je
manque et qui aimerait que les choses changent ?
Je ferme les poings et plante mes ongles dans mes paumes.
– Tu m’as manqué tous les jours, pendant des années. Chaque fois qu’un garçon
me faisait du mal, ma mère me manquait. Chaque jour où papa oubliait de nous
nourrir, ma mère me manquait. Chaque verre qu’il buvait pour tout oublier, ma
mère me manquait. Toutes ces années d’épreuves ! J’ai dû être l’infirmière de
mon père et la mère de Maddy. À cause de toi, j’ai volé, je me suis endormie le

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ventre vide tant de fois que j’ai cessé de compter, et j’ai menti à chaque médecin
et conseiller d’orientation à propos de notre situation.
– Je suis tellement, tellement désolée… chuchote Meryl.
– Je n’en doute pas. Et moi, je suis désolée d’avoir dû voler alors que j’étais à
peine ado. Je suis désolée qu’à douze ans, j’aie dû faire notre lessive dans l’évier
avec du liquide vaisselle. Je suis désolée que ma sœur et moi n’ayons jamais
connu de vrais Noëls, de vrais anniversaires où notre mère nous gâtait comme
toutes nos amies. Mais par-dessus tout, Mère, je suis désolée que nous n’ayons
pas mérité que tu te fasses aider et que papa n’ait pas été assez fort pour prendre
les choses en main et t’aider. Pas seulement pour toi et lui, mais pour nous. Pour
Maddy et moi. Je ne sais même pas comment t’expliquer le choc que ça a été de
découvrir que j’avais un frère aîné de cinq ans. Vingt-cinq ans, Mère ! J’aurais
pu avoir Max depuis vingt-cinq ans. Tu ne sais pas combien nos vies auraient été
embellies si on avait su qu’il existait ? Il est tout pour nous, maintenant ! Et
toi… tu nous l’as caché. Que tu aies été malade ou non, tu savais que tu avais un
fils et tu ne nous en as jamais parlé. Rien que pour ça, je ne sais pas si je pourrai
te pardonner. Un jour, peut-être. Mais pas aujourd’hui, ça c’est clair.
Sur ce, je me lève, tremblant des pieds à la tête.
– Je vous attends dans la voiture, je dis à Max qui est déjà debout aux côtés de
Maddy.
Il veut probablement m’empêcher de la gifler de nouveau. Dieu sait que j’en ai
envie. Mais ça n’apaiserait pas la douleur qui paralyse mon cœur. Ça ne
réparerait pas le trou énorme qu’elle y a laissé depuis toutes ces années. Seul le
temps guérira ces plaies.
– Je suis désolée ! sanglote-t-elle derrière moi.
Je ne me retourne pas. Au lieu de ça, je répare les fissures dans les parois qui
entourent mon cœur et qui se sont ouvertes en voyant ma mère. Je les referme
avec de la chaux et du ciment, les recouvre de plâtre et croise les bras pour me
protéger. Elle ne fera pas tomber ce mur. Pas encore.
En fin de compte, en dépit de sa maladie, j’avais besoin qu’elle tienne plus à moi
qu’à elle-même. Je suppose qu’avec un problème aussi grave que le sien, ce
n’était pas facile. Cependant, j’ai besoin de gens forts dans ma vie, prêts à

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prendre des risques pour les autres. Aujourd’hui, je ne suis pas prête à faire de la
place à la femme qui m’a abandonnée.
*
* *
Je suis secouée de spasmes en traversant le chalet pour aller dans ma chambre.
Lorsque j’y arrive, j’enlève tous mes vêtements, excepté mon débardeur et mon
shorty Aubade, je soulève la couette et je me couche. Je saisis l’oreiller de Wes,
plonge mon visage dans son parfum et, tout à coup, un corps chaud se plaque
contre le mien et des bras lourds m’enserrent.
– Tu veux parler ? demande Wes.
Je prends sa main et la porte à ma bouche pour embrasser ses phalanges.
– Pas vraiment.
– Tu veux baiser ? demande-t-il en plaisantant.
L’ancien Wes revient un peu plus chaque jour, et j’en suis infiniment
reconnaissante.
– Pas vraiment, je réponds en soupirant.
Il niche son visage dans mon cou et y frotte son nez.
– Pas vraiment ? Ça va être ta réponse aujourd’hui ?
– Peut-être.
– Chérie, il faut que tu parles. Dis-moi ce qui se passe dans cette superbe tête,
dit-il en massant mon crâne.
Son massage est divin et c’est justement ce dont j’ai besoin pour soulager une
partie du stress qui bouillonne en moi depuis que j’ai revu Meryl.
– Je suis une mauvaise personne.
Ses doigts cessent un instant leurs mouvements avant de reprendre.
– Pas du tout. Dis-moi qui t’a mis cette idée en tête pour que je lui casse la
figure.
– Eh bien, tu n’as pas à aller loin puisque c’est moi.
Il plonge ses doigts dans mes cheveux et les caresse sur toute leur longueur.
– D’accord, alors explique-moi pourquoi la femme que j’aime, la femme que
j’adore, que je vénère, a une si piètre opinion d’elle-même ?

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Mon Dieu, je l’aime tellement. Même dans des moments comme celui-là, où
j’aurais tendance à me cacher et fuir toute connexion intime, il est le seul à se
frayer un passage. Pendant le trajet du retour, Max et Maddy ont tous les deux
essayé de me parler et de comprendre ce que je ressentais, et je les ai repoussés.
D’ailleurs, j’ai même été assez méchante avec eux en leur disant de me laisser
dans ma merde et de me foutre la paix. Je n’en suis pas particulièrement fière.
J’embrasse de nouveau ses phalanges, pressant mes lèvres sur ses mains que je
connais par cœur.
– Max et Maddy sont tous les deux d’accord pour faire une place à Meryl dans
leur vie.
– Et pourquoi ça fait de toi une mauvaise personne ?
– Parce que moi, je ne veux pas. Je suis furax. Je suis même plus en colère
qu’avant. Je comprends qu’elle ne contrôle pas toujours ses pensées, mais qu’en
est-il des moments où c’était le cas ? Qu’a-t-elle fait quand elle était lucide ? Elle
aurait pu nous contacter, s’assurer que ses enfants allaient bien. Elle aurait pu
divorcer de papa pour qu’il puisse tourner la page. Son départ a laissé un énorme
vide dans notre maison et rien ne pourra jamais le remplir. Pire que ça, je crois
qu’elle se fiche de ce qu’on a vécu après son départ.
– Tu as le droit d’être en colère, chérie. Bon sang, je suis en colère pour toi !
Mais un jour, ta colère finira par se calmer, et là, qui sait ?
– Elle ne nous a jamais parlé de Maxwell ! À mes yeux, c’est impardonnable. Si
Jackson Cunningham n’avait pas mis mon nom dans son testament, je n’aurais
jamais su qu’il existait. Il n’y aurait pas eu de réunion de famille, de nièce et de
neveu. Pas plus de ranch au Texas.
Wes grogne dans mon cou et m’embrasse.
– Je comprends, et tu as raison. Je pense qu’elle aurait pu trouver un moyen de
vous le faire savoir. Et si elle est sous traitement depuis qu’elle a rencontré Kent,
ça veut dire qu’elle a eu les idées claires pendant presque toutes ces années
depuis qu’elle est partie. Pourquoi ne vous a-t-elle pas contactés ?
Je raconte à Wes qu’elle a été arrêtée au volant en état d’ivresse et qu’elle
risquait de faire de la prison, mais sans rire, le risque que l’État du Nevada mette
une femme bipolaire en prison est quasi nul. Je connais plein de gens qui se sont

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fait arrêter au volant en état d’ivresse et qui n’ont pas fait de taule. Certes, étant
donné qu’elle avait deux enfants à l’arrière, elle aurait certainement été
condamnée et elle ne nous aurait sans doute pas vus pendant un moment, mais
au moins on aurait su où elle était. On aurait su pour Max. Papa ne serait pas
devenu alcoolique.
– Écoute, Mia, tu ne peux pas t’en vouloir de ressentir ce que tu ressens. Tu as
vu plus de choses et subi plus d’épreuves à cause de son abandon. Tu dois
prendre le temps d’encaisser toutes ces informations, dit-il en me massant de
nouveau. Ne te prends pas la tête, d’accord ? Tu as eu beaucoup de choses à
gérer. Comme nous tous ces derniers mois.
Je hoche la tête, me tourne vers lui et appuie mon front contre son torse. Il sent
la colle et les biscuits au chocolat.
– Pourquoi tu sens comme une classe de maternelle ? je demande en respirant de
nouveau son odeur.
– Cyndi, Matt et moi avons fait des décorations avec Isabel. Est-ce que ça
t’intéresserait de faire ta première déco de sapin ? demande-t-il en souriant.
Je lève la tête pour embrasser son sourire.
– Tu veux dire, créer de nouveaux souvenirs ?
– Un peu oui. Et les meilleurs, répond-il en hochant la tête et en souriant de plus
belle.
– Est-ce que tu me préparerais une tasse de chocolat chaud ? je demande en
faisant ma moue irrésistible.
Wes a récemment découvert ma passion pour le chocolat chaud avec des
chamallows. J’en ai trouvé une boîte dans le placard quand je préparais le café,
ce matin.
– Je ferai tout ce que tu veux si ça te redonne le sourire et te fait ressentir la
magie de Noël.
– Je t’aime. Tu le sais, n’est-ce pas ?
Il caresse mes cheveux.
– Je ne pense pas que j’arriverais à gérer tout ça sans toi. Avec toi, tout est plus
simple. Je pourrais affronter n’importe quelle épreuve du moment que tu es à
mes côtés.

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Il m’embrasse le bout du nez.
– C’est ainsi que ça doit être. Tu ne crois pas que tu m’as sauvé quand je suis
rentré d’Indonésie ? demande-t-il. Mia, mon Dieu, je serais sans doute devenu
fou si tu ne t’étais pas donnée autant à moi. Ce que j’ai pu te faire, bon sang. Ce
que tu m’as laissé te faire… ça m’épate. C’est toi, et toi seule, qui m’as ramené
dans le monde des vivants. Je te dois tout.
– Tu ne me dois rien. Rappelle-toi, je donne, tu donnes. Tant qu’on est
ensemble, on a tout ce dont on a besoin, je réponds en frottant mon nez contre le
sien. Maintenant, tout ce dont j’ai besoin, c’est d’une tasse de chocolat chaud
fumant, de mes chaussettes de Noël, de chants de Noël, de rires d’enfants et de
ma famille. Tu es prêt à me donner tout ça ?
Rapide comme l’éclair, Wes m’assied au bord du lit. Il ouvre un tiroir et sort un
jogging qu’il me jette, puis il trouve des chaussettes rouges à pois blancs qui
m’arrivent aux genoux. Les orteils sont marron et il y a des yeux sur la cheville
et un petit pompon rouge, c’est censé ressembler à Rudolph. Elles sont
immettables avec des chaussures, mais c’est Ginelle qui me les a offertes et je
les adore.
Wes m’aide à mettre les chaussettes et il me donne un de ses t-shirts à manches
longues, à mettre par-dessus mon débardeur.
– Tu es belle comme un cœur, dit-il en souriant.
J’éclate de rire en regardant mon look. Je ne sais pas comment il peut m’aimer
dans cette tenue, mais j’en suis ravie. Il prend ma main et nous retrouvons les
autres dans le salon.
Maddy est blottie contre Matt sur le canapé, devant le feu. Cyndi joue avec le
bébé, d’un côté, et Isabel est concentrée sur une décoration qu’elle fabrique avec
l’aide de son papa. Tous les regards se tournent vers moi quand j’entre dans la
pièce.
Il est temps de m’ouvrir aux gens qui m’aiment et de prier pour qu’ils me
comprennent.
– Bon. J’ai fini de me morfondre. J’en veux toujours à notre mère. Je ne suis pas
prête à lui faire une place dans ma vie, mais j’ai besoin de vous. Donc je

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m’excuse platement et espère que vous voudrez bien pardonner mon humeur
boudeuse et méchante.
– Eh, frangine, dit Max en souriant, tu veux fabriquer un ornement ? Bell en a
préparé un pour sa Tatie Mia.
Je regarde Maddy et elle sourit jusqu’aux oreilles.
– La plus belle fille du monde, je dis, émue, fière et reconnaissante qu’elle et
Max tournent aussi facilement la page.
– Mais seulement quand elle sourit ! s’écrie Isabel depuis la table. Je la connais
celle-là, mon papa me le dit tout le temps.
Je vais jusqu’à ma nièce et me baisse pour l’embrasser sur la tête.
– Ah oui ? je dis en regardant Max.
– Ouaip, répond-il. C’est une femme très sage qui me l’a appris.
L’idée que mon frère s’inspire de moi et en fasse part à sa fille me réchauffe le
cœur comme aucun chocolat chaud n’aurait pu le faire.
Quelques secondes plus tard, des chants de Noël animent la pièce et une tasse
fumante apparaît devant moi.
– Pour ma reine, dit Wes en me faisant un clin d’œil.
– Oh, les reines ! crie Isabel. J’ai une couronne que tu peux décorer, Tatie. Tiens,
celle-ci est pour toi, celle-là pour Maddy, et ça, c’est pour ma maman. On peut
toutes être des reines et des princesses à Noël ! s’exclame-t-elle en riant.
Je souris et prends la petite couronne en mousse. Isabel est entourée de stylos à
paillettes, de colle, de strass et de sequins, tout ce qu’il faut pour fabriquer ses
propres décorations. La petite fille est aux anges. Quant à moi, je n’ai pas la
moindre idée de ce que je suis censée faire, alors je m’installe à côté de ma nièce
de cinq ans et la laisse m’apprendre comment faire.
Mise à part la question de ma mère, ce sont déjà les plus belles fêtes de ma vie,
et elles n’en seront que meilleures demain, quand la famille de Wes arrivera.
Nous avons préparé un sacré festin de veille de Noël. Cyndi va nous faire une
superbe dinde et de la farce maison, car j’ai décidé il y a longtemps que je
préférais mourir plutôt que d’avoir mes mains dans la carcasse d’un animal. J’ai
beau aimer le goût, l’idée de le faire me file la nausée. En revanche, Maddy et

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moi allons tout donner sur les desserts. À nous deux, il n’y a rien que nous ne
sachions faire.
Sans doute, ce talent nous vient-il de notre ballerine à la farine.
Ce doit être le seul trait de caractère que notre mère nous ait légué. J’ai beau lui
ressembler physiquement, je ne suis en rien comme elle. Mes proches pourront
toujours compter sur moi, quelles que soient les circonstances.

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Chapitre 9

–Petit Papa Noël, il est descendu du ciel, avec ses jouets par milliers, et
j’espère qu’il ne m’a pas oubliée !
Isabel chante à tue-tête dans le couloir en frappant à chaque porte, et je grogne
en m’asseyant dans le lit.
– Je ne veux jamais d’enfants.
Wes rit, me rallonge et se blottit contre mon dos. Il est délicieusement chaud et il
tapote mes fesses avec une érection non négligeable.
Je souris d’un air machiavélique et sors du lit.
– Non ! C’est hors de question ! On garde ça pour demain soir. J’ai une tenue
spéciale que je meurs d’envie de mettre pour toi le jour de Noël.
– Et en quoi ça m’empêche de te prendre maintenant ? demande-t-il en fronçant
les sourcils.
Je vais d’une commode à l’autre pour préparer les vêtements que j’ai prévu de
mettre aujourd’hui. Un jean slim bleu foncé, mes Ugg caramel et un pull crème
avec un col en V. C’est simple et assez mignon pour accueillir ma future belle-
famille pour notre premier Noël ensemble.
– Parce que je veux qu’on s’économise. Allez, lève-toi maintenant. Il faut se
doucher et commencer à cuisiner. Ta famille va arriver dans quelques heures et
je veux que la maison soit parfaite.
Wes sort du lit en râlant, vêtu d’un boxer et d’une superbe érection. Bon sang,
cet homme est le sexe incarné. Quand il me surprend en train de le mater, il
soupèse son paquet, et je crois qu’une goutte de bave coule sur mon menton.
– Un p’tit coup rapide sous la douche ? dit-il en enlevant mon t-shirt.
– Ouais, un p’tit coup rapide sous la douche.

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Il ricane et me pousse dans la salle de bains.
*
* *
Musique de Noël : check.
Décorations : check.
Bonbons et chocolats sur la table : check.
Gâteaux au four : check.
– Comment se porte notre dinde ? je demande à Cyndi qui est en train de la
recouvrir de jus de viande.
– Elle sera prête pile à l’heure, dans deux heures. On mettra le gratin de pommes
de terre, les flageolets et les petits pains au four un peu plus tard.
Je regarde le sapin et j’arrange un ornement d’un côté ou de l’autre pour que tout
soit impeccable.
– Chérie, détends-toi. Maman va adorer, dit Wes en me surprenant dans ma
maniaquerie.
Mon Dieu, j’espère qu’il a raison. Claire Channing a beau être une authentique
reine dans les cercles friqués de Los Angeles, c’est aussi une véritable mère. Elle
s’est assurée que ses enfants grandissent avec une morale, des valeurs et une
éthique professionnelle béton. Claire est aussi une cuisinière formidable, c’est
pour ça que Cyndi est en charge de la plupart des plats, et pas moi. Cependant,
j’ai l’intention de la conquérir avec mes super-desserts.
– Je veux juste que tout soit parfait, je chuchote.
Wes passe ses bras autour de moi, par-derrière, et appuie son menton sur mon
épaule. Nous regardons tous les deux le sapin qui est, je dois l’avouer, digne
d’un catalogue de décoration. Il comporte le parfait mélange d’ornements
achetés et faits maison par le clan Channing au fil des années.
– Mia, c’est parfait. La seule chose qui intéresse ma mère, c’est d’être avec sa
famille. Tout ça… dit-il en désignant le sapin, les décorations et les chocolats, ce
n’est que du bonus.
Je respire lentement.
– Si tu le dis. Je veux juste qu’elle sache que je suis capable de t’offrir une belle
vie, que nos fêtes de fin d’année seront toujours passées en famille et en beauté.

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Il éclate de rire et m’embrasse dans le cou.
– T’en fais pas, tu as fait du super-boulot.
Je m’accroche à ses bras et me crispe lorsque j’entends la porte d’entrée s’ouvrir
et le bruit de pas dans le hall d’entrée.
– Ils sont là ! dit-il en souriant et en m’embrassant sur la joue avant de courir
derrière Isabel qui se précipite dans le couloir pour accueillir sa famille.
J’attends quelques minutes, affreusement nerveuse, arrangeant les décorations de
la table basse une dernière fois avant qu’ils n’entrent.
Charles entre le premier, les bras grands ouverts pour me faire un câlin.
– Mia, joyeux Noël. Où est l’alcool ? Il va nous en falloir beaucoup après cet
atterrissage. Je te jure que ce pilote a eu son permis dans une pochette-surprise,
vu la façon dont il a géré les turbulences. C’était affreux.
Dans la cuisine, Max lui montre une bouteille de vin et une de bière.
– J’ai ce qu’il faut, Monsieur Channing ! s’exclame-t-il.
– Alors j’arrive, dit Charles en m’embrassant sur chaque joue.
Il part retrouver mon frère à qui je laisse le soin de se présenter. Max n’a pas
besoin de moi pour ça.
Claire entre ensuite en dégageant ses cheveux blonds de son visage.
– Mia, je suis ravie de te revoir.
Elle vient à moi et me prend dans ses bras. Ses cheveux sont froids contre mon
nez et je détecte un parfum de pêche, d’abricot, de rose et de musc. J’apprendrai
plus tard qu’il s’agit de Trésor, de Lancôme. Elle entre dans le salon et
écarquille les yeux. Elle fait lentement le tour de la pièce, effleurant ici et là des
nœuds rouges, des guirlandes, des ornements sur la cheminée, puis elle s’arrête
devant le sapin et caresse délicatement une décoration faite maison.
– C’est incroyable. Le chalet n’a pas eu l’air aussi festif depuis des années.
Comment as-tu trouvé le temps de faire tout ça ? demande-t-elle.
Mon stress se dissipe tandis que je lui raconte comment Wes m’a emmenée
couper mon premier sapin.
– Ton premier ? Ça ne peut pas être ton premier, si ?
Je me mords la lèvre et tourne la tête, ne sachant jamais comment aborder mon
enfance démunie. Maddy arrive à ma rescousse, passant un bras autour de mes

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épaules avant de tendre la main à Claire.
– Notre famille n’était pas très attachée aux fêtes de fin d’année. Mais nous, si.
Je suis Madison Saunders, la sœur de Mia. Je n’ai entendu que de belles choses à
votre sujet, Madame Channing.
Je serre ma sœur contre moi, reconnaissante qu’elle m’ait sauvée. Je n’aime pas
parler de tout ce qu’on n’a pas eu durant notre enfance, surtout avec quelqu’un
qui n’a manqué de rien. Je sais que je ne devrais pas, mais je me sens nulle,
même si je n’ai pas eu le choix.
Claire et Maddy discutent un peu, jusqu’à ce que la mère de Wes regarde la
cheminée de plus près, effleurant les chandeliers en argent du bout des doigts.
– Mon Dieu, c’est ici qu’ils étaient ? s’exclame-t-elle. Charles, tu t’en souviens ?
Le père de Wes rejoint sa femme et passe un bras dans son dos.
– Le cadeau de mariage de mes parents. Je me demandais pourquoi ça faisait si
longtemps que je ne les avais pas vus. Je me rappelle, maintenant, qu’on les a
apportés ici pour fêter notre premier Noël à quatre. Tu te souviens ?
Elle porte sa main à son front.
– Oh oui, je m’en souviens maintenant. On a passé des années à les chercher.
Dire qu’ils ont toujours été ici !
– Je les ai trouvés avec d’autres décorations dans un carton de grille-pain, je dis
en souriant.
– Eh bien, ça explique tout, répond Claire en levant les yeux au ciel. Qui se
douterait que des chandeliers en argent seraient dans une vieille boîte de grille-
pain ? dit-elle en riant et en lui mettant une petite tape sur l’épaule.
– Tu crois que c’est moi qui ai fait ça ? s’exclame-t-il en riant d’un ton coupable.
– Qui d’autre ? Les enfants étaient bébés, glousse-t-elle en regardant de nouveau
les chandeliers. Quoi qu’il en soit, on est ravis que tu les aies retrouvés.
– Si j’étais vous, je les sortirais toute l’année. Si vous y tenez tant et qu’ils vous
rappellent de bons souvenirs avec les gens que vous aimez, pourquoi ne pas les
avoir tous les jours sous les yeux ? je dis en haussant les épaules.
Je rougis immédiatement en réalisant ce que je viens de dire. Mince. Mia, mets
ton filtre, bon sang !
– Enfin… si vous le voulez, j’ajoute.

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– Tu sais quoi ? Tu as raison, dit Claire. Quand on s’en ira, on les prendra avec
nous et on les mettra sur la cheminée de la maison, Charlie.
– Comme tu veux, ma chère, répond-il en l’embrassant sur la tempe.
Ouf ! Désastre évité !
Claire se tourne vers moi et prend mon bras.
– Bien vu, Mia. Maintenant, est-ce que tu pourrais trouver un verre de vin pour
une vieille dame ? Ce vol était un cauchemar.
Elle fronce les sourcils, mais même sa grimace est raffinée et jolie.
Wes avait raison. Je m’inquiétais parce que je voulais les impressionner, et j’ai
réussi, mais ils ne sont pas là pour ça. Ils veulent seulement apprendre à
connaître notre famille, tout comme nous voulons découvrir la leur.
*
* *
Quelques heures et quelques verres plus tard, le dîner est servi. Max et Cyndi se
sont surpassés. Chaque plat est encore meilleur que le précédent. La dinde est
juteuse et la sauce sublime. Je crois avoir pris quatre kilos rien qu’en dinde et en
farce. La table est joyeuse et bruyante, exactement comme je l’aime. Maddy est
à côté de moi, Wes de l’autre. Ensemble, nous savourons d’être entourées par
ceux qui nous sont chers.
– On a une famille maintenant, je chuchote à Maddy.
– Je n’ai jamais imaginé qu’on aurait quelque chose de si beau. Je ne le prendrai
jamais pour acquis, répond-elle.
– Moi non plus, je dis en serrant sa main.
– Eh, c’est quoi ces messes basses ? demande Wes d’un ton enjoué.
– Rien, je réponds en secouant la tête. Cette soirée est magnifique, c’est tout.
Il se penche vers moi et m’embrasse tendrement, en effleurant à peine mes
lèvres. Avec Wes, chaque baiser a sa propre signification, et celui-ci est le plus
beau de tous, car c’est la veille de Noël et nous avons réuni nos familles pour la
toute première fois.
Peter, le mari de Jeanine, se racle bruyamment la gorge en se levant, son verre de
vin à la main. Il tapote légèrement son couteau sur le cristal, et tous les regards
se rivent sur lui.

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– Nous avons une annonce à faire, dit-il en posant une main sur l’épaule de sa
femme.
Les yeux de Claire se remplissent immédiatement de larmes et Jeanine sourit
jusqu’aux oreilles.
– Vas-y, dit-elle à son mari d’une voix tremblante.
– On attend un bébé ! s’exclame Peter.
Wes et Claire sont debout avant même qu’il n’ait dit le mot « bébé » et ils se
précipitent de l’autre côté de la table.
– Génial ! dit Maddy en levant sa coupe de champagne.
Nous trinquons toutes les deux et vidons nos verres.
– Félicitations, c’est super, je leur dis.
Wes prend sa sœur dans ses bras et la serre fort contre lui.
– Mia et moi sommes ravis pour vous.
Je réalise alors toute la signification de ce « Mia et moi ». Wes et moi ne
sommes pas seulement ensemble. Nous formons désormais un nous, une équipe
soudée. Et quand nous serons mariés, la semaine prochaine, on nous appellera
« les Channing ». Je n’ai jamais été une « Les » auparavant, et en regardant Wes
prendre sa famille dans ses bras et caresser le ventre encore plat de sa sœur, je
comprends que je fais partie d’un tout, d’une famille aimante, et c’est ce qui
compte le plus. Je comprends maintenant.
Aujourd’hui, avec Max et son clan, Maddy et son mec, et la famille de Wes, je
réalise que je ne suis plus seule au monde, plus une ou deux personnes sur qui
compter. Je nage désormais dans un océan de possibilités dans lequel tous ceux
qui m’entourent sont prêts à m’aider et à me jeter une bouée quand les eaux de la
vie seront trop agitées.
Je suis heureuse. Véritablement, merveilleusement et superbement heureuse.
*
* *
Nous sommes tous assis au pied du sapin de Noël, en train de regarder Isabel
perdre la tête face à la montagne de cadeaux que le Père Noël lui a apportés. Elle
a aussi un cadeau de Maddy et moi, de Clair, et de Jeanine. Elles étaient ravies
de faire du shopping pour une petite fille et elles se sont un peu lâchées.

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– Heureusement que tu as un jet privé, Max, je ricane en regardant Isabel bondir
de joie en découvrant un énième accessoire Barbie.
– Tu as raison, frangine, soupire Max. On va emplir la soute rien qu’avec ses
cadeaux.
Nous sursautons lorsque ma nièce pousse un cri strident.
– Papa ! J’ai eu une vraie couronne de princesse ! s’écrie-t-elle en courant dans
les bras de son père.
– Waouh, elle est super-jolie, Bell, dit Max. Attends une seconde, laisse-moi
voir ça, ajoute-t-il en prenant le diadème pour l’étudier à la lumière des fenêtres.
Qui te l’a offert, ma puce ?
Je secoue la tête, parce que moi je lui ai offert la Barbie groupe de rock. Maddy
désigne le chevalet et les aquarelles, et Claire et Jeanine pointent du doigt des
cadeaux qui n’ont pas encore été ouverts.
– Laisse-moi voir, ma belle, je dis.
Elle me tend le diadème en sautillant sur place dans son pyjama rose fuchsia. Il
est incrusté d’une variété de cristaux et quand je regarde à l’intérieur, je vois
l’inscription Swarovski. Doux Jésus ! C’est un vrai diadème en cristal. Le genre
que portent les femmes riches pour leur mariage ou des galas privés.
– Qu’est-ce qu’il y avait écrit sur le paquet, Isabel ?
Elle hausse les épaules et met le diadème sur sa tête, puis elle tape dans ses
mains et tourne sur elle-même comme une véritable princesse.
Wes s’assied sur l’accoudoir et me tend une tasse de café. Il est à croquer dans
son pantalon de pyjama rouge à carreaux verts et son t-shirt blanc. Si je ne
l’avais pas dévoré hier soir, je baverais. Les courbatures entre mes jambes me
rappellent la force avec laquelle je l’ai chevauché, mais ça ne change pas mes
projets pour ce soir. Il m’a peut-être convaincue de renoncer à mon vœu
d’abstinence, mais c’est moi qui aurai le dernier mot ce soir.
– Je vois que tu as eu ma couronne ! Elle te va à ravir, Bell, dit-il à notre nièce.
Max et moi tournons la tête vers lui en écarquillant les yeux. Maddy ricane en
secouant la tête et Claire sourit tendrement.
– Quoi ? dit Wes, ignorant clairement pourquoi son cadeau est ridicule.
– Tu as acheté à une petite fille de cinq ans un diadème Swarovski ? je demande.

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Il regarde Max puis moi, tour à tour.
– Ben, oui. Elle adore être une princesse. Les princesses ont besoin d’une vraie
couronne, et celles dans les magasins de jouets étaient hideuses. On voyait
encore la colle dessus. Celle-ci, dit-il en désignant la tête de Bell, a été faite par
un artisan et le vendeur m’a assuré qu’elle était incassable.
– Tu es incroyable, je glousse en secouant la tête.
Je parie que cette couronne coûte plus cher qu’un aller-retour pour Paris.
– Regarde-la, dit-il en haussant les épaules. Elle l’adore. Tu es juste jalouse
parce que je lui ai offert un cadeau plus cool que toi.
– C’est ça, bébé, je suis juste jalouse, je réponds en tapotant sa cuisse.
Il sourit, s’agenouille par terre et fouille dans la pile de papiers cadeaux. Il
trouve le reste des paquets qu’il a achetés et les distribue à chacun. Je pensais
que les cadeaux que j’ai achetés étaient de la part de nous deux, mais
apparemment il s’est occupé des siens. Note à moi-même : parler des cadeaux de
Noël avec mon mari l’an prochain.
– Ne sois pas jalouse. Je t’ai acheté quelque chose qui brille, à toi aussi.
Je lève la main pour montrer ma bague de fiançailles.
– J’ai déjà quelque chose qui brille.
– Ce n’était pas ton cadeau de Noël. Ouvre-le.
Le petit paquet est emballé dans du papier rouge et doré. Je l’ouvre et découvre
un petit écrin carré. Je regarde Wes en fronçant les sourcils, car il sait que je ne
suis pas du genre à vouloir plein de bijoux.
– Fais-moi confiance, dit-il en effleurant ma joue du bout du doigt avant de
passer une mèche derrière mon oreille.
J’ouvre la boîte et y trouve un cœur doré que la chaîne traverse en biais. Le
centre est ajouré pour laisser voir la peau à travers. Il est tout simplement
ravissant.
– Tourne-le et lis l’inscription.
Mon cœur t’appartient.
La gravure délicate suit les contours du cœur. C’est simple, mais la signification
est très profonde. Je déglutis tandis que mon vrai cœur se met à battre la
chamade.

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– Ça te plaît ?
Je ferme les yeux en m’efforçant de ne pas pleurer. Je ne veux pas que les autres
me voient tout émue, alors je me lève, prends son visage dans mes mains et
l’embrasse sur la bouche. Le baiser dure longtemps, et j’en oublie que nous
sommes devant toute notre famille. Cela dit, autant qu’ils s’y habituent, parce
que Wes et moi avons toute notre vie pour montrer notre affection en public.
Dans des moments comme celui-ci, je ne peux simplement pas me retenir.
– Gardez-en pour le mariage ! marmonne Max.
Je romps le baiser et plonge mon regard dans les yeux brillants de Wes.
– Ça lui plaît, chuchote-t-il.
J’essaie de prendre le dessus sur mes émotions et demande à Isabel de m’aider à
trouver le cadeau de Wes.
Je le lui tends et il sourit en regardant le paquet guère plus grand que celui qu’il
m’a offert. Il déchire le papier aussi vite qu’Isabel, ce qui m’apprend combien il
aime recevoir des cadeaux. À l’avenir, je le gâterai aussi souvent que possible.
Il ouvre la boîte, découvrant une montre en or blanc avec un bracelet en cuir
marron.
– Mia, elle est magnifique, dit-il en rougissant.
– Retourne-la.
Derrière, il y trouve deux lignes.
Parce que tu ne m’as pas oubliée…
Je suis à toi, Mia.
Il déglutit lentement, et je ne sais pas quoi penser.
– Je n’ai reçu qu’un seul autre cadeau qui soit plus beau que celui-ci, dit-il en
levant la tête vers moi. Ton amour.
Je souris et l’embrasse de nouveau.
*
* *
Bien plus tard dans la soirée, je sors de la salle de bains, vêtue du dernier cadeau
de Noël de Wes. Mes seins sont superbes dans un soutien-gorge en velours rouge
bordé de petites plumes blanches, et mes fesses sont à peine cachées par une
minuscule jupe rouge assortie. J’ai mis des bas rouges qui m’arrivent aux

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cuisses, et j’ai parfait le tout avec des talons aiguilles noirs qui ne sont pas faits
pour marcher. Ils sont faits pour baiser. Mes boucles noires tombent dans mon
dos, chatouillant le creux de mes reins, et j’ai mis un chapeau de père Noël pour
compléter le look.
Je m’appuie contre l’embrasure de la porte et la lumière de la salle de bains
éclaire le lit, où Wes est allongé, le sexe déjà dur et perlant. Bon sang, j’ai envie
de le lécher jusqu’à la dernière goutte. Le prendre en moi et lui montrer combien
cette journée a compté pour moi. Combien il a changé ma vie. Je veux qu’il
sente à chaque baiser, à chaque caresse, ce que je ressens pour lui.
Je garde la tête froide, lève le bras au-dessus de ma tête et me cambre de la
manière la plus provocatrice qui soit.
– As-tu été sage cette année, mon garçon ? je demande d’une voix grave et
suave.
– Putain… grogne-t-il.
– C’est un non, alors ?
Il tend les bras et ferme les poings, comme s’il ne pouvait pas se retenir.
– Dépêche-toi de venir ici et laisse-moi ouvrir mon cadeau ! gronde-t-il en
empoignant sa queue.
Je monte sur le matelas et rampe jusqu’à lui.
Il en perd la tête… et moi aussi.
Mon mec est loin d’être sage, et j’adore ça !

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Chapitre 10

Ma chère Mia,
Je suis désolé de ne pas avoir répondu à tes appels, ce mois-ci. Je ne veux pas
que mes problèmes affectent ta vie plus que ce n’est déjà le cas.
Mia, je suis un homme brisé. Je savais déjà que j’étais alcoolique. Je
comprenais que le chemin que j’empruntais était malsain et qu’il finirait peut-
être par me tuer. L’an dernier, à la même époque, je m’en fichais. J’avais déjà
perdu votre mère. Je vous avais perdues aussi, toi et Maddy, en vous repoussant.
Mettre fin à tout ça aurait été simple. Je sais, maintenant, que c’était lâche.
Madison et toi n’auriez jamais dû avoir à supporter ce que je vous ai fait
endurer. L’idée que tu aies dû travailler pour Millie pour me sauver et payer ma
dette me rend malade. Je ne veux plus jamais être un fardeau pour toi ou ta
sœur. Donc pour l’instant, je prends le temps de comprendre ce que je dois faire.
Comment je peux changer, et si j’en suis capable.
Je te recontacterai quand j’aurai fait le point. Vis ta vie pour toi, maintenant. Ne
t’inquiète pas pour moi. Je te demanderais bien de garder un œil sur ta sœur,
mais c’est idiot de ma part. Tu as été un meilleur parent pour elle que ta mère
ou moi ne l’avons jamais été.
Mia, j’espère que cet homme et ta vie en Californie te rendront heureuse. Je te le
souhaite. Tu mérites une vie joyeuse, plus que quiconque.
Je t’aime plus que tu ne le sais,
Papa.

Les larmes ruissellent sur mes joues tandis que je relis la lettre que j’ai reçue il y
a deux jours. Tant de sentiments conflictuels se bousculent en moi. Après tant

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d’années à m’occuper de papa, je suis censée arrêter ? Oublier que j’ai un père ?
Peut-être est-ce la grande idée, justement. En tout cas, c’est ce qu’il dit dans sa
lettre. Je dois vivre ma vie. Continuer sans m’inquiéter pour lui. La dernière fois
que j’ai fait ça, il a fini avec la dette d’un million de dollars qui m’a fait atterrir
dans le bureau de Tante Millie. Je ne suis plus cette fille, je ne pourrai plus
jamais l’être.
Demain, je vais épouser Weston Channing, troisième du nom. Il n’y aura plus de
Mia Saunders. À sa place, il y aura une femme mariée, une femme meilleure,
parce qu’elle aura l’amour de Wes avec elle pour gérer toutes les épreuves.
Plus je repense à sa lettre, plus je suis en colère. Comment ose-t-il me dire
adieu ? Je n’en reviens pas. Je me marie demain. Je savais qu’il ne serait pas
facile pour lui de voyager, mais je pensais qu’il ferait l’effort. Nous avions parlé
du fait qu’il ne serait peut-être pas apte à voyager si tôt après sa sortie d’hôpital,
et il m’avait juré que rien ne l’empêcherait de voir sa fille se marier. Wes allait
lui envoyer son jet privé et payer des infirmières pour l’accompagner afin que
mon père soit présent à mon mariage. C’est le seul jour de ma vie où j’ai besoin
de sa présence. Je voulais qu’il vive pour moi un jour dans sa vie, et il n’en est
pas capable. Et puis j’ai reçu sa lettre.
Installée sur le balcon de notre chambre, je regarde les vagues s’écraser sur la
plage. Ici et là, des gens s’affairent pour préparer l’événement de demain. Une
petite estrade en bois a été construite sous une tonnelle. Comme la plage
appartient à Wes, un petit sentier de galets a été dessiné dans le sable et, demain,
des fleurs inonderont le lieu que nous avons choisi pour nous marier. Plus tard,
nous mettrons un banc à l’endroit où nous nous sommes dit oui.
– Salut, ma salope, qu’est-ce que tu fais ?
Je sursaute sur ma chaise.
– Bon sang ! Tu pourrais annoncer ta présence, la prochaine fois ?
Ginelle s’assied dans le fauteuil en face du mien et pose ses pieds sur la
rambarde du balcon.
– Pourquoi tu es à cran ? demande-t-elle avant de baisser ses lunettes de soleil
pour me regarder par-dessus ses verres. T’as les jetons ?
Je ricane en reculant dans ma chaise.

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– Meuf, c’est à une nana de Vegas que tu dis ça ? Pas du tout !
– Si tu le dis. Mon Dieu, c’est quoi, ces Ugg ? Personne ne t’a jamais dit que
c’était moche ? Quelle fille aime se balader comme si elle s’apprêtait à marcher
dans un mètre de neige ? Je ne vois pas l’intérêt.
– Moi ! je m’exclame en inspectant ma botte.
C’est vrai qu’elles sont moches. Si elles n’étaient pas si confortables, je les
aurais jetées. Hélas, j’avais à peine mis mon pied dedans que j’étais conquise.
C’est comme marcher sur un nuage.
– Alors, tu vas me dire pourquoi tu faisais la tronche ? Quand je suis arrivée, tu
avais la tête de quelqu’un qui sent une mauvaise odeur et qui n’en trouve pas la
source.
Je soupire et lui tends la lettre. Elle la déplie et la lit rapidement. Au fur et à
mesure qu’elle avance dans sa lecture, ses lèvres deviennent blanches de colère.
– Je ne peux pas croire qu’il te fasse ça juste avant ton mariage ! Après tout ce
que… C’est décidé, gronde-t-elle en secouant la tête. Je vais le tuer moi-même.
Il n’a pas le droit de te faire ça après tout ce que tu as sacrifié pour lui.
Elle se lève et pose les mains sur ses hanches.
– Tu sais quoi ? Je vais l’appeler. Je vais lui dire que c’est un lâche, un bon-à-
rien…
Je l’arrête en lui prenant la main.
– Ça n’arrangera rien. Ça n’aura pour résultat que de le faire culpabiliser, et il
pourrait se remettre à boire pour oublier ses problèmes. Cela dit, je crois que
c’était inévitable. Le ton de sa lettre ne laisse pas beaucoup d’espoir. Mais tu sais
quoi, Gin ?
Elle soupire et se rassied.
– Je ne peux plus m’inquiéter pour lui. C’est fini. Bien sûr, j’aimerai toujours
mon père. Quoi qu’il fasse, bien ou mal, ça ne changera pas mon amour pour lui.
Mais je n’ai pas de place dans mon cœur, aujourd’hui, pour le laisser m’affecter.
Ni lui ni ma mère. Est-ce que ça fait mal ? Bon sang, ouais. C’est atroce. Mais
demain est un nouveau jour.
Je pense au sourire de Wes, à sa façon de me toucher, de me regarder.

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– Avec Wes, tout devient beau. Même moi. Je vais me concentrer sur ça et vivre
ma vie en me noyant dans la beauté de Wes et de notre vie ensemble.
Gin hoche la tête.
– Avant tout, que ce soit clair, tu as toujours été belle. Tu es canon, une véritable
bombasse. Deuxièmement, je respecte ta décision. Je ne la comprends pas, parce
que personnellement, j’ai envie de mettre à ton vieux un coup de pied entre les
jambes, mais je sais que tu as besoin de tourner la page. Il est temps. Il est temps
pour nous tous d’avancer.
Elle regarde au loin, ses beaux yeux bleus se perdent dans l’océan.
Je peux profiter de cette vue tous les jours. J’ai une chance incroyable et il faut
que je cesse de me morfondre et que je commence à apprécier tout ce que j’ai.
Cependant, d’abord, je dois revenir sur ce que dit Ginelle.
– Est-ce que je dois comprendre que tu avances… à Hawaï ?
Elle sourit tristement et tourne la tête vers moi.
– Non, hélas non. Je vais rester ici un moment. Si ça ne vous gêne pas que je
squatte votre maison, bien sûr.
– Pas du tout ! Reste aussi longtemps que tu veux. Pour toujours, même. Je t’ai
déjà dit que je veux que tu sois là. J’ai besoin de toi. Si je m’installe ici, je veux
que ma meilleure amie soit avec moi. Mais je dois t’avouer que je suis un peu
surprise. Tao et toi, vous vous entendiez bien, non ?
– Ouais, répond-elle en hochant la tête. Il est tout ce dont je rêve chez un
homme. Mais ce n’est pas moi qu’il veut. Enfin… il veut certaines parties de
moi, ajoute-t-elle en souriant d’un air machiavélique.
– Qu’est-ce que tu veux dire ? je dis en lui frappant le bras.
Elle hausse les épaules et croise les bras, comme si elle se mettait sur la
défensive.
– Il aime passer du temps avec moi, plaisanter, et la baise est spectaculaire…
– Ça a l’air parfait, je dis pour éviter qu’elle me donne les détails.
Quand il s’agit de sexe, ma meilleure amie n’est pas pudique… du tout. Elle
aime donner autant de détails que possible et, parfois, je suis contente de les
entendre. Mais pas la veille de mon mariage. J’aimerais que ce jour soit sacré, si
possible.

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– Il veut une femme et une mère pour ses futurs enfants. Une femme dont il peut
s’occuper, pas une femme qui veut travailler. J’ai passé des années à
m’entraîner. J’ai encore quelques bonnes années à danser avant de devoir arrêter.
Et après ça, j’ai toujours rêvé que j’ouvrirais une école de danse pour les petits.
Comme ça, si un jour je veux des enfants, je pourrai les emmener au studio avec
moi. Ma prof faisait ça quand j’étais petite. Ses gamins étaient dans un parc dans
un coin de la salle. Je trouvais ça super-cool. J’ai grandi avec ses enfants et j’ai
dansé avec eux dans des récitals plus tard. C’est trop demander, tu crois ?
– Non, pas du tout. Si c’est ton rêve, alors tu dois te battre pour qu’il se réalise, à
moins qu’une opportunité encore plus alléchante ne se présente. Tu as parlé à
Tao de tes projets ?
– Ouais, et il a dit que sa femme ne travaillerait jamais, sauf dans le spectacle
familial.
– Ben, ils sont danseurs après tout, peut-être que tu pourrais…
Elle lève les yeux au ciel et me regarde comme si je venais d’annoncer que Brad
Pitt était à la porte et se proposait de lui faire des enfants.
– Ouais, mauvaise idée, je soupire. Ce n’est pas vraiment ton style de danse.
– Pas vraiment, non.
– Mais… Tao est ton type de mec. Est-ce qu’il mérite que tu abandonnes un rêve
pour un autre ?
Elle ferme les yeux et inspire lentement.
– Est-ce que je suis affreuse de dire que non ? Du moins, pas maintenant, à
vingt-cinq ans. Dans deux ou trois ans, je verrai peut-être les choses
différemment. Mais d’ici-là…
– Il aura tourné la page. Je comprends. Alors, la rupture a été nette ?
– Absolument pas, non. Mais j’espère qu’il comprendra le message.
– Tu veux dire avant qu’il ne reprenne l’avion pour venir te chercher ?
– Exactement ! s’exclame-t-elle. Maintenant, va me faire un sandwich, tu veux ?
Cette nana est folle. Je pousse un grognement et pose mes pieds sur la rambarde.
– C’est ma dernière soirée avant d’être mariée !
– Eh, c’est pas ma faute s’il t’a passé la bague au doigt. C’est toi, la responsable.
Maintenant, lève-toi et va me faire à manger, dit-elle en saisissant ma main et en

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m’obligeant à me lever. Et arrête de te morfondre. Les prochaines vingt-quatre
heures sont censées être les plus joyeuses de ta vie, et, en tant que demoiselle
d’honneur, je vais m’assurer que ce soit le cas.
Elle froisse la lettre de mon père et la jette par-dessus le balcon sur la plage. Je
ne me penche même pas pour voir où elle a atterri.
– Tu as conscience que c’est Maddy ma demoiselle d’honneur, n’est-ce pas ?
Elle plaque ses mains sur ses oreilles et se met à chanter.
– La la la laaaaa la la la laaaaa.
Boh, Maddy s’occupera d’elle.
*
* *
Les couvertures se soulèvent si lentement que je n’aurais rien remarqué si le
matelas ne s’était pas aussi enfoncé sous son poids. Je m’efforce de ne pas
changer ma respiration pour qu’il ne sache pas que je suis réveillée. Le parfum
de mon homme et de l’océan envahit mes sens, réveillant mon désir pour lui. Je
feins néanmoins de dormir, curieuse de savoir ce qu’il a prévu dans cette attaque
surprise.
Quelque chose de frais touche mon cou et descend le long de mon dos, et je ne
peux pas m’empêcher de frissonner.
– Je sais que tu ne dors pas, chérie, grogne Wes avant de mordre ma fesse à
travers ma culotte en coton.
Je n’attendais pas la visite de mon fiancé, car nous nous sommes mis d’accord
pour ne pas nous voir la veille de notre mariage. C’est Claire Channing qui m’en
a parlé et la tradition m’a paru plutôt mignonne.
Et voilà que mon mec enfreint les règles.
– On n’est même pas mariés, et tu romps déjà les traditions ?
Il saisit ma culotte et la baisse sur mes cuisses. Je reste allongée sur le ventre,
visage tourné vers le côté, attendant son geste suivant. S’il veut enfreindre le
règlement, c’est à lui de faire tout le travail. Comme ça, je pourrai dire que je
n’étais qu’une victime sans défense.
– Comme si tu y tenais vraiment, ricane-t-il en frottant cette chose froide sur mes
fesses nues avant de la glisser entre mes cuisses.

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– Oh !
Je sursaute lorsque la chose effleure mon clitoris, mais elle disparaît, me laissant
avec un manque terrible.
– Des roses et le miel de tes cuisses, grogne Wes. Bébé, j’en ai l’eau à la bouche.
Je roule sur le côté pour le voir. Wes frotte une rose rouge sous son nez et,
lorsque nos regards se croisent, il sort la langue pour lécher le bord d’un pétale.
– C’est délicieux, mais ça ne suffit pas, dit-il, et son regard s’enflamme.
Je le regarde me chevaucher et mon pouls accélère.
– Wes, tu n’es pas censé être là, je gronde sans conviction.
Des bouffées de chaleur explosent dans mon bas-ventre et se propagent dans le
reste de mon corps. Wes me regarde comme si j’étais une fontaine de jouvence
et qu’il mourait de soif. Il n’a clairement pas l’intention de bouger, sauf pour
enfouir sa grosse verge en moi. Je le sais, il le sait, alors pourquoi je lutte ?
Ah oui, sa mère. Elle a suggéré que pour avoir un mariage heureux, il faut
s’abstenir la veille des noces. Il ne faut pas que l’époux voie sa femme avant
qu’elle ne vienne vers lui à l’autel. Ce sont des superstitions idiotes, mais elles
m’ont paru logiques quand elle m’en a parlé. Or maintenant, face à Wes,
consciente de ce qu’il veut me faire… ces superstitions ne m’intéressent plus.
Wes me survole avec un air féroce. Il lève un bras pour enlever son t-shirt et
m’offrir son torse délicieux. Je ne peux pas lutter face à ses abdos sculptés et ses
pecs en béton. Ma seule envie est d’y promener ma langue, pour sentir toutes ses
bosses et ses creux, et une fois que ma bouche est sur lui… je suis foutue.
Tu as la volonté d’une guerrière, je gronde dans ma tête. J’ai entendu cette
phrase dans une publicité, ou quelque chose que j’ai vu à la télé.
– Est-ce que tu vas me refuser ce qui est à moi ? dit Wes en posant ses mains sur
le haut de mon marcel.
Ses mains se referment et, d’un geste brusque, il le déchire en plein milieu.
Doux Jésus. Tu as la volonté d’une guerrière.
Il se penche en avant tandis que je fais non de la tête. Les mots ne me viennent
pas. Sa bouche chaude se referme sur un téton et il le suce aussi fort que
possible.
Tu as la volonté d’une guerrière…

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– Wes… je chuchote.
– Dis-moi que tu n’as pas envie de moi et je partirai.
Il s’attaque à l’autre téton avec des coups de langue féroces. Pendant qu’il
s’occupe de l’un avec sa bouche, ses doigts pincent, frottent et tirent l’autre de
sorte que, bientôt, mon bassin avance et recule sans que je le lui aie ordonné,
cherchant quelque chose pour soulager ce manque infernal.
– Euh… je ne peux pas, je soupire en tenant sa tête contre moi et en me
cambrant dans sa bouche.
– C’est ma nana, ça, dit-il en suçant fort, comme s’il voulait prendre tout mon
sein dans sa bouche.
Je l’encourage en gémissant et en le maintenant en place, le suppliant de
continuer.
Wes place un genou entre mes cuisses et les écarte pour s’y installer. Je suis
habituée à cette technique. Après tout ce temps, je les connais toutes. Ce soir, il
semble vouloir être près de moi, aussi près que possible. Il plaque son corps
contre le mien de sorte que toute ma peau soit en contact avec la sienne.
Sans prévenir, il soulève son bassin et s’enfouit complètement en moi. Je gémis
et mon sexe se contracte brusquement.
– Mon Dieu ! je m’écrie quand il se retire pour m’empaler de nouveau.
– Je vais t’aimer comme ça pour l’éternité, Mia.
Il recule le bassin et l’avance de nouveau.
– Chaque jour de ma vie.
Encore un aller-retour.
– Tu seras aimée pour toujours… promet Wes avant d’accélérer.
Je m’accroche à lui et chuchote mes promesses d’amour éternel contre sa gorge,
ses lèvres, son torse, et tout ce que je peux atteindre jusqu’à ce que la pression
devienne trop importante. Des pulsations explosent dans le bas de mon dos et
des décharges électriques parcourent mes veines, électrisant tous mes pores, me
faisant frémir des pieds à la tête. Il s’enfouit en moi une fois, deux fois, trois
fois, et je me laisse emporter par la vague. Au-dessus de moi, le corps de Wes
est comme une machine de muscles bandés dont le seul but est de me procurer
autant de plaisir que possible. Il accélère toujours les va-et-vient jusqu’à me faire

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crier de nouveau, et il avale mes cris dans un baiser langoureux et passionné. Je
mords sa lèvre, et son corps se crispe. Il s’accroche à moi, comme s’il allait être
emporté, lui aussi, par les eaux tumultueuses du plaisir. Quelques coups de
bassin supplémentaires et il reste enfoncé en moi, écrasant mon clitoris
ultrasensible, déclenchant une dernière décharge de désir dans mes veines.
Des minutes passent et nous restons l’un contre l’autre, à bout de souffle. Je suis
presque inquiète de constater combien il me désire. Quand sa mère a suggéré
l’idée, tout à l’heure, il a accepté sans résister. Peut-être n’a-t-il jamais eu
l’intention de s’y tenir. Je soulève son visage et le regarde dans les yeux.
– Est-ce que ça va ?
– Je suis avec toi. Bien sûr que ça va.
Bonne réponse, je me dis avant de l’embrasser langoureusement.
– Il y a une raison particulière à ton envie de rompre avec la tradition ?
Il éclate de rire.
– En fait, j’ai respecté la tradition.
– Comment ça ?
– Il y a une tradition qui dit que si tu veux passer la nouvelle année avec la
personne que tu aimes, tu dois l’embrasser lorsque la pendule annonce minuit.
Je regarde l’heure, le radio-réveil indique 0h15.
– Mais il est minuit passé.
– Oh, mais je t’embrassais à minuit. Quand le douzième coup a sonné, tu criais
au moment de ton deuxième orgasme, que j’ai avalé tout entier.
– Tu es fou, je dis en le poussant tendrement.
Il se décale pour être allongé à côté de moi et il promène ses doigts sur mon
corps, comme s’il voulait graver ce moment dans sa mémoire.
– Tu es prête pour aujourd’hui ?
– Je n’ai jamais été aussi prête.
Il sourit jusqu’aux oreilles et semble si heureux que mon cœur fond un peu. Je
me blottis contre lui.
– C’est pour ça que tu es là ? Pour t’assurer que je ne vais pas m’enfuir comme
Julia Roberts dans Just Married (ou presque) ?

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– Non, j’ai confiance en notre amour. C’est juste que je n’ai pas ressenti le
besoin d’être loin de toi. On a passé assez de nuits loin l’un de l’autre, tu ne crois
pas ?
– Tu as raison. C’est notre tradition à nous, de nous embrasser à minuit le soir du
nouvel an et de passer la veille de notre mariage dans les bras l’un de l’autre.
– Il n’y a nulle part où je préférerais être. Maintenant, dors. On a une grosse
journée demain.
Il me fait un clin d’œil et m’embrasse sur le front.

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Épilogue

WESTON

Lorsque vous plongez votre regard dans les yeux de la personne avec qui vous
allez passer le reste de votre vie, ça vous frappe. C’est la dernière femme que
vous allez embrasser. La dernière avec qui vous vous coucherez. La seule femme
qui vous suivra pour le restant de vos jours sur cette terre. Il y a quelque chose
de définitif dans cette idée, mais ça ne semble pas être une finalité pour autant.
C’est plutôt un soulagement. Comme si vous aviez marché un million de jours
en allant droit devant vous et que, soudain, vous réalisiez que vous avez atteint
votre but. Mon but, c’est ça, cette fin heureuse. Pour nous deux.
Mia. Quand elle est apparue sur le porche au bras de son frère, tout a disparu. Le
bruit des vagues, les invités qui, comme moi, admirent la femme en blanc qui
descend les escaliers pour emprunter le chemin de galets… ma sœur, à mes
côtés, disparaît aussi, tout comme le prêtre.
Il n’y a plus que Mia. Il n’y aura jamais plus que Mia. Elle est ma raison
d’exister. Sans elle, je ne serais pas là aujourd’hui.
Ses pas sont mesurés, en rythme avec cette musique que je n’entends plus. Un
pied devant l’autre. Sa robe est simple et élégante, comme elle. Elle a de petites
bretelles fines et un décolleté orné de cristaux qui plonge entre ses seins. J’adore
sa silhouette en forme de huit et ses courbes somptueuses. La robe est cintrée sur
sa taille fine puis elle est évasée, volant légèrement dans la brise de janvier. La
météo de Malibu est clémente et nous offre un soleil parfait pour le jour le plus
important de nos vies.

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Ses épaules, ses bras, ses jambes et ses pieds sont nus. Les seules touches de
couleur sont ses ongles de pieds roses, ses lèvres délicieusement rouges et, bien
sûr, ses yeux.
Mes amis plaisantent en disant que c’est le corps de Mia qui m’a fait perdre la
tête, mais ce n’est pas vrai. Ce sont ses yeux vert pâle et brillants comme des
émeraudes.
Ces yeux m’ont tenu en laisse dès le premier jour, dès la première fois qu’elle a
enlevé son casque de moto et que le soleil a illuminé ces iris merveilleux. J’ai su
tout de suite qu’elle serait ma fin. Ce que je ne savais pas, en revanche, c’est
qu’elle était aussi le début et le milieu. Je n’ai plus voulu connaître un seul jour
sans Mia. Elle rend les jours sombres plus clairs, les jours difficiles plus doux et
les beaux jours encore plus merveilleux. Il n’y a rien que je ne ferais pas pour la
femme qui marche vers moi, prête à me prendre pour époux. Je ne peux
qu’espérer que je lui suffirai, maintenant et chaque jour jusqu’à mon dernier.
– Weston Channing, troisième du nom, voulez-vous prendre pour épouse…
Mia articule « troisième du nom » en même temps que le prêtre, et je ris, faisant
mine de tousser lorsque le prêtre me regarde.
– Sois sage, je chuchote dans son oreille.
Elle me fait un clin d’œil.
Je la regarde droit dans les yeux et le pense du fond du cœur lorsque je dis « je le
veux ».
Elle m’offre un de ses larges sourires dont elle seule a le secret.
– Et vous, Mia Saunders, voulez-vous prendre pour époux…
Je n’entends plus rien jusqu’à ce que ses lèvres pulpeuses bougent.
– Je le veux, dit-elle avant de se lécher la lèvre et de la mordre.
Comme nous nous le sommes promis, nous échangeons de simples alliances en
or blanc, sans diamant ni fioriture. Mia n’est pas du genre à vouloir crouler sous
les bijoux. Ma nana aime plutôt vivre avec le vent dans les cheveux quand
l’aiguille du compteur atteint des niveaux dangereux. Et comme je suis le genre
de mec qui aime donner à sa femme ce qu’elle veut, et qu’il n’y a rien que je
désire plus que son bonheur, son vrai cadeau de mariage l’attend dans l’allée
devant la maison.

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Je me suis lâché et j’ai acheté la MV Agusta FCC qui la fait baver depuis des
mois. Je l’admets, j’ai fouillé l’historique de son navigateur. Cette femme est
dingue. On pourrait s’attendre à voir des liens pour Victoria Secret et Gucci,
mais non… La majorité de ses recherches concernent des destinations de lune de
miel et des sites de motos.
Je souris tandis que le prêtre poursuit son bla-bla. Je meurs d’impatience en lui
tenant les mains, attendant le moment qui nous unira pour la vie.
– Vous pouvez embrasser la mariée.
Il vient à peine de prononcer ces mots que je prends le visage de Mia dans mes
mains pour dévorer sa bouche. Elle a un goût de menthe et de champagne, et
c’est délicieux. Je penche sa tête sur le côté et plonge ma langue dans sa bouche,
entamant une danse avec la sienne. Un gémissement lui échappe tandis qu’elle
fond contre moi, agrippant mes épaules pour me serrer contre elle. Je vis pour
ses moments où elle s’accroche à moi. Ça prouve que chacun de nos baisers
compte autant pour elle que pour moi.
Je ne veux jamais la lâcher, et ce qu’il y a de merveilleux dans le fait d’épouser
la femme que j’aime, c’est que je n’aurai jamais à le faire.
Durant cette dernière année, aux côtés de Mia et grâce à elle, j’ai moi aussi
appris à faire confiance à la vie. Toutefois, quand on y pense, les aventures ne
finissent jamais vraiment. Chaque jour pourrait être le début d’une autre. D’une
nouvelle vie. Avec Mia, notre famille et les amis qu’elle et moi nous sommes
faits cette année… notre aventure vient tout juste de commencer.

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Où sont-ils maintenant ?

Alec Dubois – L’artiste à la renommée internationale et la bouche si sexy vit


désormais en France, où ses tableaux continuent de s’arracher à prix d’or. Alec
partage son temps entre deux femmes fatales qui prétendent toutes deux être
enceintes de lui.

Hector et Tony Fasano – Les deux se portent très bien et vivent le rêve
américain. Ils se sont mariés peu de temps après Wes et Mia et ils ont engagé
une jeune étudiante pour être mère porteuse pour eux. Elle leur a fait don de
deux ovules pour que chacun ait un enfant biologique. Ils ont financé ses études,
et elle travaille désormais pour eux au siège de leur entreprise. La marque de
surgelés Fasano a dépassé toutes les attentes et a pris la première place dans le
classement des plats congelés. Chaque Fasano est désormais multimillionnaire, y
compris Mama Fasano.

Mason et Rachel Murphy – Mason et Rachel se sont mariés comme prévu lors
d’un mariage gargantuesque que People Magazine a décrit comme le « mariage
du siècle ». Mia était un des témoins de Mason, canon dans un tailleur noir.
Mace et Rachel ont trois enfants qui occupent leur mère pendant que son mari
continue de battre des records dans le monde du base-ball. Un jour, lui et sa
femme ont l’intention d’acheter une équipe.

Taï et Amy Niko – Leur mariage hawaïen était somptueux, avec des danses
traditionnelles et des danses de feu. Depuis, Amy n’a pas cessé d’accoucher de

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mini-Taï et, après quatre garçons, Amy a enfin eu une petite fille blonde aux
yeux bleus qu’ils ont appelée Natia, ce qui veut dire trésor caché en samoan.

Warren et Kathleen Shipley – Le couple coule des jours heureux à parcourir le


monde. Le projet de Warren a été acclamé de nombreuses fois au fil des ans,
apportant des ressources vitales aux pays du tiers-monde et aux peuples déchirés
par la guerre. La Croix-Rouge américaine lui a décerné le prix d’Humanitaire de
l’Année.

Aaron Shipley – Il a été destitué de la Chambre des représentants et déclaré


coupable de corruption devant le Sénat, peu de temps après ses soucis avec Mia.
Son père lui ayant coupé les vivres, Aaron a détourné de larges sommes d’argent
de ses sponsors en promettant des faveurs aux dirigeants de grandes entreprises,
en échange de leur voix au Sénat. Il est actuellement emprisonné au centre
pénitentiaire de Bakersfield, en Californie.

Anton Santiago et Heather Renée – Ils ont passé les dix dernières années à la
tête de tous les classements hip-hop du pays. Ils sont désormais à la tête de leur
label de musique, Lov-us Productions, actuellement le plus couru de l’industrie
musicale. Leurs jours et leurs nuits sont occupés par leur travail et la petite fille
qu’ils ont eue ensemble et qu’ils ont appelée Fate1. Ils sont toujours meilleurs
amis, ce qui les a poussés à décider d’avoir un enfant ensemble avant qu’ils ne
soient trop vieux. Les deux sont heureux de vivre ensemble avec leur fille, tout
en poursuivant les rencontres.
Maxwell et Cyndi Cunningham – Ils vivent toujours dans le même ranch au
Texas avec leurs cinq enfants. Au grand désespoir de Max, Jackson est le seul
garçon, et Cyndi a refusé d’en avoir d’autres. Une de leurs filles a pour
deuxième prénom Mia, et une autre Madison. Ils ont donné à leur quatrième et
dernière fille le nom de la mère de Cyndi. Max est occupé à diriger Cunningham
Oil & Gas aux côtés de sa petite sœur.
Blaine Pintero – Lui et son équipe de brutes ont été condamnés dix fois à
perpétuité pour avoir posé une bombe qui a tué dix personnes. Les victimes

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étaient toutes des trafiquants de drogue, des proxénètes, des comptables
coupables de blanchiment d’argent et des assassins recherchés par la police.
Finalement, c’était plutôt gagnant-gagnant.
Michael Saunder – Il ne s’est jamais remis du départ de sa femme, qui a fini par
divorcer après quinze ans. Il est resté à Las Vegas et travaille comme agent
d’entretien dans un bowling. Il ne parie plus et n’emprunte plus d’argent, mais il
sombre régulièrement dans l’alcoolisme. Mia et Madison ont très peu de contact
avec leur père.

Docteur Drew Hoffman – Il est encore le médecin des stars à Hollywood, il


s’est marié et a divorcé six fois.

Kathy Rowlinski – Elle a gravi les échelons, et elle est désormais PDG de
Century Productions. Elle a une villa immense à Beverly Hills et elle a épousé
son assistant.

Kent et Meryl Banks – Leur vie n’a pas changé. Kent dessine des plans pour
des chalets modernes qui sont construits partout dans le monde tandis que sa
femme (désormais légale) continue de peindre et de diriger sa galerie. Ils vont
régulièrement au Texas pour chouchouter leurs petits-enfants.

Millie Colgrove « Miss Milan » – Elle continue à la tête d’Escorts Exquises.


Elle a une clientèle d’élite, et ses employées sont superbes et réputées pour être
discrètes. Millie « fréquente » un gentleman distingué qui était venu la voir à la
recherche d’une femme plus mature. Plutôt que d’engager une escort, il a tout
fait pour séduire Millie. Cela fait plusieurs années qu’ils sont ensemble, mais
Millie refuse de le désigner autrement que comme son ami, craignant de porter
malheur à leur relation en lui mettant une étiquette.

Ginelle, alias « ma salope chérie » – Elle dirige une école de danse élitiste à
Los Angeles, dont les élèves sont des célébrités ou des acteurs en devenir qui ont
besoin d’apprendre à danser. Elle a connu plusieurs relations, bonnes et

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mauvaises, jusqu’à ce qu’elle rencontre un homme qu’elle n’a pas pu fuir. Sa vie
sera toujours mouvementée, mais elle est plus heureuse qu’elle ne l’a jamais été.

Madison et Matt Rains – Madison a terminé son doctorat et elle est désormais à
la tête du département de recherche scientifique de Cunningham Oil & Gas. Matt
et ses parents gèrent la ferme Channing, Cunningham and Rains. Madison et son
mari ont un fils nommé Mitchell, et ils attendent leur deuxième garçon. Ils n’ont
pas encore choisi de nom, car ils se disputent sur le choix d’un autre prénom en
« M ». Maddy veut poursuivre la tradition, et Matt veut rompre avec pour en
commencer une nouvelle.

Wes et Mia Channing – Nos héros et héroïne mènent une vie heureuse à
Malibu durant l’année scolaire et passent la plupart des vacances au Texas. Ils
ont deux enfants, Marshall Jackson et Madilyn Claire. Ensemble, ils écrivent,
produisent et dirigent leurs propres films. Le dernier qu’ils ont écrit et produit,
Calendar Girl, est resté premier au box-office pendant six semaines et a rapporté
trois cents millions de dollars dès la première semaine. Ils passent leurs journées
à surfer, jouer avec leurs enfants, travailler sur leur dernier projet et faire l’amour
au rythme des vagues. Ils font confiance à la vie qui les a réunis et poursuivent
l’aventure côte à côte, main dans la main.

FIN
Pour l’instant…

1. Destin.

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À propos de l'auteure

Audrey Carlan vit dans la belle California Valley ensoleillée, à deux heures de
la ville et de la plage, au milieu des montagnes et des vignes merveilleuses. Elle
est mariée à l’amour de sa vie depuis plus de dix ans et elle a deux jeunes
enfants qui méritent tous les jours leur titre de « monstres en folie ». Lorsqu’elle
n’écrit pas des histoires d’amour érotiques, qu’elle ne fait pas du yoga ou qu’elle
ne sirote pas un verre de vin avec ses « âmes sœurs » – trois voix uniques et
incroyablement différentes dans sa vie –, on la trouve plongée dans un livre. Plus
précisément un roman chaud et plein d’amour !
Elle apprécie tous vos retours, alors n’hésitez pas à la contacter aux adresses ci-
dessous.




E-mail : carlan.audrey@gmail.com
Facebook : facebook.com/AudreyCarlan
Site web : www.audreycarlan.com

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www.calendargirl-serie.com

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