Intro

(… attendre 15-20s en fixant des membres du public)

Certains se demandent surement ce que je suis en train
de faire, d’autres se disent certainement que je suis un
imbécile puisque je n’ai que 10 minutes de temps de
parole. Ne vous inquiétez pas ! Ceci est fait par un
professionnel, tout va bien se passer. Pourtant,
pourtant, vous venez d’assister à la plus grande
performance de cet après-midi, le silence ! Total et
complet (faire la blague du Sixièmausorus Rex s'il y en
a).
Pq ce sujet / Constat d’une société façonnée par le
bruit
Drôle de sujet de plaidoirie me direz-vous, la lutte
contre les nuisances sonores. Cependant, cependant, la
plus simple des réflexions peut arriver à nous faire dire
qu’il y a un problème de bruit dans nos sociétés. Nous
pouvons tous aujourd’hui constater que nous avons
besoin d’être stimulé auditivement, tout au long de nos
journées, et moi le premier. Il s’agit du son de la
notification, de la musique pendant l’activité sportive
ou de la stimulation qui nous fait dormir, pour ma part
des documentaires plus ou moins consensuels dont je
tairais les sujets. Nous pouvons facilement dire que ces
stimulations auditives sont omniprésentes dans nos
sociétés contemporaines et que celles-ci nous suivent
tout au long de notre vie. Tout cela pour dire que nous
sommes aujourd’hui une société du son, et que cela
n’est pas une bonne nouvelle.
Effet du trop de bruit
En effet, il existe de nombreuses conséquences à
l’exposition ponctuelle ou prolongée de l’être humain
aux nuisances sonores, et elles peuvent être très grave.
Vous vous doutez bien qu’il y a des effets néfastes sur
le système auditif de l’Homme, mais pas seulement ! Je
vais vous exposer, dans un ordre croissant les effets
extra auditifs des nuisances sonores. Le plus bas degré
est une sensation d’inconfort qui se manifeste par une
perturbation, une gêne, des troubles du sommeil. Puis
vient la production d’hormones de stress par le corps
humain et ensuite le développement de facteur de
risque, c’est-à-dire une augmentation de la pression
artérielle, du cholestérol, de l’obésité ou de la
coagulation sanguine. Mais cela peut être encore plus
sévère avec le développement de maladies graves tel
que l’insomnie ou des pathologies cardiologiques
(hypertension, infarctus, accidents cardiaques). Vient
donc la dernière conséquence, la mort. Vous me direz «
mais Mathieu le bruit ne tue pas ! » (Imitation débile).
Et bien si ! On estime d’ailleurs que le seul bruit des
transports serait responsable de plus de 10 000 cas de
mortalité prématurée et de 43 000 hospitalisations par
an dans le monde. Et ce n’est que le bruit des
transports…
Intérêt philosophique du silence
Mais je ne pense pas que les conséquences
physiologiques soient le seul aspect péjoratif des
nuisances sonores de nos sociétés. Dans la lignée de
cette idée, Euripide nous dit que «  le silence est la
réponse des sages », c’est-à-dire que l’absence de ces
nuisances humaines permet à l’Homme un bien être
d’ordre intellectuel, où l’être humain est dorénavant en
capacité de poursuivre pleinement sa réflexion
personnelle qui est nécessaire au sein de nos sociétés
démocratiques. Madame Gay nous répète
constamment la citation de Kant que « philosopher
c’est penser par soi-même ». Je soutient pour ma part
qu’une réflexion requiert ce contexte silencieux afin de
parvenir à un résultat satisfaisant du point de vue
intellectuel.
Ccl il faut tout faire pour réduire l’exposition de
l’Homme pq je m’engage
Je me porte donc, devant vous, cet après-midi pour
vous dire qu’il faut installer une réelle politique de lutte
contre le bruit, en France. Cela peut-être par la
réduction des seuils de tolérances des nuisances
sonores, que est aujourd’hui règlementé par le code de
l’environnement à un niveau de pression acoustique
moyen de 102 dB(A). Pour comparaison, il s’agit du
niveau de bruit que vous pouvez retrouver dans les
boites de nuits. Il est aussi possible d’accorder des
aides financières à l’isolation des bâtiments pollués
phonétiquement, ce qui pourrait en outre avoir un
intérêt écologique et économique, ou encore des
sanctions pour les entreprises dont les autorités
constatent qu’elles ne protègent pas leurs salariés. On
peut citer l’exemple d’une entreprise de BTP, Bâtiment
et travaux publics, qui ne fournirait pas les protections
nécessaires à un ouvrier dont le métier l’amène à se
servir d’un marteau-piqueur, qui est très bruyant et
donc nocif pour le travailleur. Je pense qu’il existe aussi
d’autres mesures pouvant être mises en place
facilement et rapidement telles que la mise à
disposition gratuitement de protections auditives
individuelles, l’enregistrement et l’affichage des
niveaux sonores ou encore création de zones calmes
dans des milieux où l’on sait que les individus subissent
une forte pression auditive.
De surcroit, on peut constater de vraies inégalités
d’exposition au bruit. Entendez moi bien, ce ne sera pas
Bernard Arnault dans son grand bureau qui sera exposé
! Mais bien les éboueurs, travailleurs du bâtiment,
ouvriers ou encore les professeurs avec leurs élèves, je
ne vous oublie pas Madame, qui seront exposés ! Des
professions qui sont compliquées, éprouvantes, mal
payées et mal reconnues…
Exemple de mon grand-père : justifier le choix du
plaidoyer, surdité, mal dans la vie de tous les jours
Cependant, je sais bien que je n’ai pas convaincu tout le
monde quant au choix de la cause que je défends
devant vous aujourd’hui. Je vais donc vous prendre un
exemple qui me tient à cœur pour vous prouver qu’il
s’agit d’un combat aussi important que ceux présentés
précédemment, l’exemple de mon grand-père. Plus de
30 ans dans une usine de décollage à Cluses, de nuit,
avec les conditions de protections auditives de
l’époque. Au pays on dirait nada, en français rien,
walou diraient d’autres. Il fut dans le bruit permanent
des machines pendant longtemps, un environnement
qui lui fut extrêmement nocif. Aujourd’hui, il est
quasiment sourd, équipé d’appareils auditifs censés lui
redonner l’audition mais dont je tiens aujourd’hui à
fortement remettre en cause l’efficacité puisqu’il
n’entend, bah toujours rien. Et bien que cela l’aide à ne
plus entendre ma grand-mère, cet handicap lui est
extrêmement préjudiciable dans la vie de tous les jours.
Payer à la caisse d’un commerce, parler avec sa famille
ou encore s’engager correctement dans une
association lui est devenu aujourd’hui extrêmement
difficile. Aller lui dire que le bruit auquel il a été exposé
ne lui détruit pas la vie ! Comme un aveugle, il a perdu
un de ses 5 sens, et pourtant personne ne s’engage
dans ce combat. Et bien moi je le fais, le ferez-vous ? …