Vous êtes sur la page 1sur 16

Entretien et analyse des données verbales

L’entretien clinique est un outil pour organiser la rencontre avec les mille et une façons
d’être au monde.

Les notions théorico-clinique permettent un enrichissement continu. Le respect du travail de


chacun et l’humilité conduisent à un positionnement toujours dynamique du
psychologue face aux connaissances qui forment les outils de sa pratique.

L’entretien est un outil indispensable et irremplaçable pour accéder aux informations


subjectives des individus (biographie, représentation personnelle).

La clinique se réfère au domaine des soins : psychologue clinicien, psychiatre,


psychothérapeute.

Les objectifs peuvent être multiples : diagnostic, recherche, thérapeutique.

Les techniques se réfèrent à des règles stables.

Les approches sont différentes selon les modèles théoriques :

• Le modèle psychanalytique tient compte des mouvements inconscients,


pulsionnels. la psychanalyse est une méthode d’investigation du fonctionnement
psychique et une méthode thérapeutique (pour faire ressortir le refoulé pathogène)
par la cure analytique ;
• Le modèle phénoménologique et humaniste se réfère à l’ici et maintenant, à
l’expérience vécue du sujet dans le présent, avec une situation en face-à-face ;
• L’approche systémique tient compte des phénomènes conscients et interactifs au
sein du groupe avec les entretiens familiaux notamment ;
• Le modèle cognitif s’intéresse aux représentations connectées aux comportements
et aux symptômes sur le plan conscient et inconscient.

Ces différentes approches ne sont pas contradictoires mais complémentaires car elles
proposent des niveaux de compréhension et d’intervention différents. Différents
éléments sont mobilisés à partir des attitudes, des mouvements psychiques, des affects, des
représentations, des comportements du clinicien et du sujet (identification, transfert,
empathie, défenses, demandes…).

Il existe différentes manières d’aborder les dimensions relationnelles selon l’âge, la


personnalité, la psychopathologie, ce qui permet l’ajustement et l’aménagement de
l’approche clinique de l’entretien.

La pratique de l’entretien demande l’acquisition de connaissances nouvelles et un


questionnement sur la pratique elle-même.

Le psychologue lors de l’entretien fonctionne avec son propre appareil psychique. Cela
nécessite la pratique régulière d’un minimum de travail sur soi, d’analyse, de maitrise
de ses propres mouvements psychiques.

I. Spécificité de l’entretien clinique

La psychologie clinique consiste en l’investigation systématique et complète des cas


individuels. L’entretien psychologique est le lieu où s’observe une partie de la vie du
patient qui se développe en relation avec nous et face à nous. La psychologie clinique est
une psychologie rigoureuse et humaniste où le sujet/objet est l’homme total en situation et
en évolution. Le principe majeur est la singularité.

La méthode clinique comprend l’observation, l’entretien clinique et les tests.

La psychologie clinique est issue de l’activité pratique comprend :

• Le domaine de la psychopathologie (étende à des toutes formes de confits


individuels, de souffrance, de dysfonctionnement des adultes et des enfants) ;
• La méthode clinique, naturaliste (la totalité de la situation envisagées, la
singularité de l’individu, l’aspect concret des situations, la dynamique, la genèse, le
sens, l’observateur partie prenant de l’observation).

L’entretien est une situation avec une faible contrainte pour faciliter et recueillir la production
d’une personne. L’entretien met en présence le sujet en contact avec le psychologue dans
une liberté d’organiser les situations proposées.

La technique utilisée permet d’enrichir la connaissance d’un individu ou d’une problématique


et de proposer une interprétation ou une explication.

Les approches théorico-cliniques sont façonnées et nourries par les pratiques. Et leurs
pratiques reflètent et intègrent également les spécificités de chaque école.

L’objectif de l’entretien est de recueillir un maximum d’informations sur le sujet,


comprises qu’en référence au sujet lui-même.

L’entretien est un instrument ou une technique centrale de la méthode clinique.


L’entretien est un procédé d’investigation et de recherche scientifique en psychologie,
comportant ses propres règles et savoir-faire. L’entretien permet de développer et vérifier les
connaissances scientifiques tout en l’appliquant.

L’entretien psychologique est un processus continu d’interaction. Par l’application de


connaissances scientifiques, le psychologue emmène la vie quotidienne de la personne
humaine au niveau de la connaissance et de l’élaboration scientifique.

Le code de déontologie souligne que « le respect de la personne, dans sa dimension


psychique est un droit inaliénable. Sa reconnaissance fonde l’action des
psychologues ». La position éthique est indissociable de l’attitude clinique. Le respect de la
personnalité du sujet, de ses appartenances sociales, culturelles et professionnelles, de ses
aménagements défensifs, de ce qui est dit ou pas.

L’entretien est le principal acte professionnel du psychologue. Les échanges langagiers


est un échange de sens et de pensées au-delà des mots et de l’intentionnalité.

L’entretien est une situation de communication asymétrique entre une personne en


souffrance et un professionnel de la relation.

La particularité de l’entretien psychologique est d’être centrée sur l’exploration d’un état
clinique, d’une relation d’aide ou de soin. La relation clinique est fondée sur la
coopération. Toute interaction est issue d’un contrat de communication implicite autour d’un
respect de certains principes. C’est une rencontre entre deux esprits. L’activité inférentielle
se réfère au psychologue impliqué comme professionnel avec un savoir-faire
communicationnel, un savoir théorique sur les processus mentaux et un
raisonnement clinique. Cette forme particulière de conversation à de multiples finalités et
une liberté d’effets.

L’objectif est la compréhension et l’élaboration de la prise en charge.

Les différents buts et effets sont de faciliter, permettre la parole, organiser les éléments.
L’échange symbolique permet la co-construction d’une nouvelle réalité, d’un nouveau sens.

La spécificité de la pensée psychologique et la réflexion sont basées sur le référentiel


théorique et fondées sur le travail sur soi avec la maitrise de lui-même comme un instrument
(le psychologue travaille avec ce qui se mobilise en lui). Cette réflexion n’apporte pas de
solution immédiate, mais donne un nouveau sens co-construit par le travail menée dans,
par et sur la relation clinique.

L’asymétrie est due à la position du clinicien.

La culture et l’expérience du psychologue ont une importance.

Entretien clinique non-directifs (Carle Rogers)

L’entretien clinique non-directif est une technique d’intervention sans interprétation et avec
optimisme. Le psychologue est présent comme un interlocuteur savant et bienveillant et
absent dans sa problématique personnelle, afin de laisser parler le client ou faciliter sa
parole (liberté de parole).

La neutralité bienveillante (Freud) est très importante dans l’entretien.

L’entretien clinique est une situation paradoxale par asymétrie.

Le but des relances est de faciliter la parole interrompue par les silences et porte sur le
sens de ce qui est dit.

L’interprétation est une intervention systématique théorique du clinicien pour organiser


et comprendre le discours du patient. L’interprétation fournit un système conceptuel, une
matrice symbolique, un code pour cerner, structurer, comprendre et contrôler son malaise.

L’asymétrie correspond à la démarche professionnelle face à une personne en situation de


souffrance avec une demande de solution. Le psychologue se met techniquement et
déontologiquement au service d’autrui (soin, conseil, aide).

Selon Rogers (1942), la position clinique correspond à la centration sur le client,


l’empathie, la non-directivité, la neutralité bienveillante.

Différents contextes amènent à différents objectifs : diagnostic, thérapeutique, recherche.

Carl Rogers, psychologue humaniste américain, postulait l’incroyable pouvoir de guérison


de la relation. La personne s’appuie exclusivement sur la relation thérapeutique avec des
attitudes issues de la non-directivité. Etre en relation, c’est permettre au patient de se
déployer en tant qu’expert de sa propre vie. Un thérapeute efficace est une personne
capable d’être ouvertement elle-même au niveau le plus profond qu’il soit.
Selon Rogers, l’importance est le degré de possession d’attitudes personnelles dans la
relation. Les trois grands principes d’efficacité sont :

• Le vrai, l’authentique;
• La compréhension empathique;
• Le regard positif inconditionnel, l’affection non possessive (vis-à-vis du client).

Notion de tendance actualisante

Rogers construit la notion de tendance actualisante qui est l’élan ou capacité inné des
êtres humains à grandir, à se développer et à mûrir. Cette notion permet d’avoir une
confiance fondamentale en la capacité du client à se développer de manière autonome.
Cette tendance actualisante définie toutes les relations d’aide centrées sur la personne. Il
n’y a pas besoin de diriger le client. Le mieux est de le suivre.

L’écoute empathique tend à maintenir les gens centrés sur leur expériencing.

Apports théoriques

Hippocrate a élaboré les prémices de la déontologie clinique occidentale. Le thérapeute


ou médecin doit remplir l’objectif de soin dans le respect de l’intimité des personnes
avec une attitude de respect et de non-jugement.

Socrate pratiquait la maïeutique, l’art d’accoucher les âmes. Par l’utilisation de


questionnements successifs, cela consister à faire émerger une vérité déjà présente chez le
sujet sans en avoir conscience. L’utilisation de la parole crée des mouvement d’introspection
pour accéder aux connaissances de son interlocuteur.

Les théories de l’apprentissage et du béhaviorisme se fondent sur l’observation du


comportement total en situation. Le comportementalisme méthodologique considère que des
processus de pensées ou cognitions sous-tendent les comportements.

La psychanalyse (Freud) se base sur l’autoanalyse et englobe l’action du clinicien dans le


devenir du processus thérapeutique. La relation professionnelle est fondée sur l’écoute et la
parole. La psychanalyse se réfère à la dimension inconsciente des comportements, aux
processus intersubjectifs (transfert et contre-transfert, refoulement, résistance, projection,
identification, défense…).

Georges Devereux fonde l’ethnopsychanalyse et l’ethnopsychiatrie avec une


conflictualisation des théories et une observation participante.

Relation clinique et influence

Le psychologue est un clinicien de l’interaction pour aider le sujet à résoudre ses


problèmes. Le contexte interactif et intersubjectif est basé sur les échanges langagiers dans
une relation d’influence explicite ou implicite, pour arriver à un nouveau sens co-
construit.

Les échanges langagiers correspondent à un échange de sens et de pensées au-delà des


mots et d’intentionnalités. Le processus de communication est une rencontre entre deux
esprits qui s’influencent mutuellement. Tout acte de connaissances nous transforme,
questionne nos fondements identitaires, avec plus ou moins d’intensité. Tout échange
intersubjectif, toute nouvelle rencontre avec une autre subjectivité nous modifie. C’est
changer en échangeant avec l’autres sans me perdre et sans me dénaturer. Le processus
d’influence correspond à modifier la pensée, le comportement, le sentiment par l’intervention
du psychologue chez le patient.

Le psychologue a une activité d’écoute et une compétence d’éprouver et d’observer.

La relation d’influence est double :

• Une influence explicite lors de modifications apportées lors de TCC, de consignes,


de synthèse, de prescription de tâche à accomplir ;
• Une influence implicite lors que le patient découvre lui-même la modification à
faire.

Tobie Nathan a proposé le concept de l’influence qui guérit (1994). Selon Tobie Nathan,
la psychothérapie est une procédure d’influence destinée à modifier radicalement et
profondément, durablement une personne, une famille ou une situation à partir d’une
intention thérapeutique.

Quelle serait l’efficacité ou la fonctionnalité d’une relation clinique ou thérapeutique


n’exerçant aucune influence ?

Selon Rogers, cette présence écoutante et empathique est une influence. Le but de la
thérapie est d’aider le client à se centrer sur son expériencing interne, à en faire davantage
l’expérience, de l’accepter et de lui faire confiance.

La pragmatique linguistique correspond à l’activité inférentielle du psychologue.

La dimension discursive au sein de la relation clinique faire référence aux réponses aux
relances aux stratégies développées par le sujet pour s’ajuster au thème proposé par le
clinicien, pour s’ajuster à l’interaction. C’est le discours-réponse.

Les travaux de Sandifer (1970) montrent que les psychologues ont une évaluation
diagnostique dès les premières minutes de l’entretien et ensuite ils recherchent les éléments
cliniques en accord avec leurs hypothèses et les modèles théoriques (Bateson, 1982 et
Wilson, 1985).

Le sujet s’ajuste toujours au référentiel théorique du psychologue après quelques mois


de psychothérapie. La structuration des symptômes et la formulation des troubles et leur
évolution dépendent du référentiel théorique du psychologue.

II. Objectifs et finalités de l’entretien clinique

L’entretien est la principale modalité technique du psychologue pour rencontrer la


personne.

Différents facteurs interviennent :

• L’objectif: diagnostique, thérapeutique, de soutien, recherche d’orientation (4


types) ;
• Les modèles théoriques et la formation du clinicien;
• La personnalité et l’âge du sujet;
• Les aspects de l’interaction;
• La demande (sujet, famille, institution, chercheur) ;
• Le moment et les conditions de l’entretien.

Chaque entretien est unique : l’entretien est toujours inédit du fait de la singularité de
toute situation intersubjective.

L’entretien comprend une conversation et une relation clinique. Ceci implique différents
effets :

• Facilite et permet la parole,


• Organise les éléments (lecture clinique, écoute, restitution) ;
• La co-construction d’une nouvelle réalité et un nouveau sens (comme tout échange
symbolique).

Dans l’entretien, le patient est centré sur l’expérience présente et le thérapeute est dans une
position sémiologique (pour lui le discours est source d’indice et de symptômes). L’entretien
produit des connaissances indirectement.

Les outils de l’entretien sont l’investigation et l’intervention.

L’entretien d’investigation ou diagnostique (ou entretien d’évaluation)

L’entretien d’investigation consiste à :

• identifier une pathologie;


• spécifier les particularités du fonctionnement psychique d’un sujet dans
l’articulation avec son histoire.

Le diagnostic concerne la maladie. L’investigation se réfère au sujet. L’investigation


concerne l’appréhension des troubles dans son histoire actuelle et passée et dans sa
structure.

L’objectif est de produire des connaissances pour permettre une prise de décision (avec un
recueil pour élaborer des données). L’organisation des données cliniques (organiser le
contenu de l’entretien) se réalise en accord avec le référentiel théorique.

Le travail peut se faire en équipe pluridisciplinaire.

L’objectif de l’investigation est de réussir à éclaircir quel est le vrai problème amené derrière
ce qui est manifeste.

Certaines théories en psychologie clinique font abstraction de la question diagnostique


comme l’existentialisme, la phénoménologie, l’ethnopsychiatrie, la systémique et la
psychanalyse.

L’entretien thérapeutique

L’entretien thérapeutique vise un soin psychologique.

L’objectif est la modification de la position psychologique du patient ou sa famille par


rapport à une situation ou des désordres psychopathologiques qui produisent de la
souffrance.
Les sous-objectifs sont définis par le référentiel théorique du psychologue.

Un symptôme a une signification (individuelle ou collective) vécue par le patient comme


troublant son fonctionnement psychologique, relationnel ou affectif, intellectuel ou
physiologique.

Chaque théorie donne sa propre interprétation du symptôme. Les propositions


thérapeutiques seront différentes selon la théorie du psychologue.

L’indication d’une thérapie dépend de l’état clinique et de la demande du patient. Ceci peut
conduire à la prise en charge thérapeutique différente (adapté à la pathologie selon son
efficacité et le caractère éthique et déontologique).

La visée thérapeutique consiste à replacer le symptôme dans une dynamique signifiante


pour le patient.

Les critères de choix du modèle de référence sont la formation initiale et personnelle,


l’institution, le problème psychopathologique spécifique.

Le psychologue recherche dans les modèles théoriques, l’approche compréhensive la plus


adéquate, la plus congruente avec les faits observés. La formation éclectique donne une
démarche interactive et complémentariste. Dans la formation initiale, l’étudiant doit connaitre
l’ensemble des modèles.

Il existe une multiplicité d’approches thérapeutiques : TCC, Dynamique psychanalytique,


Humaniste-existentielle, Ethnopsychiatrique, Systémique.

• Le référentiel psychanalytique

Selon l’approche psychanalytique, le surgissement de l’intentionnalité inconsciente se


repère dans les propos du patient.

Les troubles relèvent de conflits infantiles non résolus. L’entretien consiste à emmener le
patient à laisser émerger et reconnaitre, consciemment, les contenus inconscients, pour
pouvoir les élaborer et en libérer son fonctionnement actuel. Les contenus inconscients font
référence aux mécanismes de défense, aux conflits intrapsychiques, au transfert/contre-
transfert, à la résistance…

La relation clinique consiste en une attention flottante et des associations libres pour
permettre l’émergence du contenu inconscient (latent) au-delà du discours manifeste.

• Le référentiel cognitivo-comportemental

L’approche cognitivo-comportementale consiste en l’observation des connexions entre


les émotions, les pensées et les comportements.

L’objectif est de changer les affects et les comportements actuels en modifiant les
pensées (cognitions) et de désapprendre les comportements inadéquates sources de
souffrance afin de les remplacer par de nouveaux modèles comportementaux plus adaptés
dans la vie actuelle du sujet.

L’entretien est très structuré : type directif et didactique.


• Le référentiel ethnopsychiatrique

L’objectif est de modifier des contenus culturels dysfonctionnels au sein d’un groupe
par conflictualisation des référentiels théoriques en psychologique.

• Le référentiel humaniste-existentiel

Ce référentiel se réfère à l’approche non-directive et centrée sur la personne de Rogers et


de la gestalt-thérapie de Perls.

Le principe est la capacité inhérente à la personne humaine de cerner ses difficultés et


d’y trouver ses propres solutions et d’apporter les changements les plus adaptés.

L’intervention thérapeutique consiste à accompagner la personne en proposant une relation


clinique étayant sa propre exploration personnelle et l’expérimentation de ses états internes
au cours de l’entretien clinique.

Les éléments essentiels de l’entretien thérapeutique sont :

• L’empathie ;
• L’alliance thérapeutique ;
• la mise en ses des troubles ;
• L’importance déontologique (pas d’efficacité thérapeutique sans réflexion éthique).

L’entretien de soutien (ou d’accompagnement)

Le seul principe est la co-construction de sens avec le patient.

L’objectif est l’étayage psychologique du sujet souffrant face à une situation de vie
ponctuellement ou réactionnellement difficile.

Il existe différentes formes : solliciter le patient pour le rencontrer, se tenir à disposition sous
forme de permanence.

La co-construction d’un nouveau sens avec le sujet entraine des modifications qui vont
conduire à des changements.

L’entretien clinique de recherche

Il y a un paradoxe d’utiliser la méthode clinique comme une méthode de recherche. La


technique d’entretien est utilisée tout en adoptant une attitude clinique dans la relation avec
le sujet.

Les principes de la recherche sont :

• Définition des thèmes par la recherche ;


• Poser des hypothèses ;
• Tester les hypothèses auprès de la population d’intérêt.

L’objectif est d’accéder à des connaissances générales à partir d’une collection d’entretiens
particuliers.
L’orientation de l’entretien est à l’initiative du chercheur afin de vérifier les hypothèses,
d’approfondir des thèmes et d’explorer.

Certaines contraintes sont imposées au chercheur : la définition de la population, le guide


d’entretien qui regroupe les thèmes et la conception des interventions (relances) dans
l’entretien. Le guide d’entretien consiste en un filtre des thèmes abordés dans l’entretien.

La méthodologie doit décrire exhaustivement tous les observables pris en compte et


expliciter les critères de catégorisation et de recensement des indices. Un observables doit
être classée dans une seule catégorie.

Conclusion

Chaque entretien clinique est toujours unique et inédit. C’est le principal moyen
professionnel et technique pour rencontrer les personnes dans la singularité de toute
situation intersubjective.

Il existe 4 types d’entretien cliniques : diagnostique, thérapeutique, de soutien et de


recherche, avec des objectifs et de référentiels théoriques différents.

L’entretien clinique est un moyen d’expression et un lieu d’écoute pour la co-construction


d’un nouveau sens. La modification de la situation, de la personne ou du groupe conduit à la
métamorphose des pensées, des comportements et des affects.

III. Attitudes relationnelles professionnelles

La collaboration permet la co-construction d’un nouveau sens.

Les attitudes relationnelles issues de la non-directivité font partie des compétences


professionnelles.

L’écoute clinique avec l’empathie, la non-directivité, la réassurance et le caractère


chaleureux permet une élaboration des données recueillies.

Le thérapeute efficace selon Rogers (2007) est capable d’être ouvertement lui-même
au niveau le plus profond qu’il soit. Il semble que rien d’autre ne soit important.

Cela passe par l’utilisation de l’expression par le thérapeute de ses sentiments


immédiats sans que le client n’en ressente le poids dans une sorte d’affirmation exprimée
sur un mode de réflexion intérieure (sans question, ni exigence) en tant que personne. Le
thérapeute fait appel à son expériencing du moment, réservoir toujours présent afin
d’amorcer, d’approfondir, de poursuivre l’interaction même avec une personne non motivée
ou silencieuse ou rationnalisante.

Le positionnement clinique doit être basé sur la coopération.

Les 3 attitudes relationnelles de la non-directivité est l’écoute, l’empathie et la réassurance.


On peut rajouter aussi d’autres notions : le respect, la congruence, l’authenticité et l’éthique.

L’écoute clinique active


L’écoute professionnelle fait intervenir les compétences relationnelles et cliniques pour
favoriser et encourager l’expression langagière du patient. L’écoute professionnelle est une
activité cognitive du clinicien en temps réel.

Les relances facilitent la parole interrompue par des silences et donne un sens par
l’intervention théorique du clinicien.

Chiland (2008) précise que « s’il veut que le patient puisse tout dire, il doit pouvoir tout
entendre ». En effet, l’écoute ne doit pas être entravée, parasitée par les sentiments
personnels du clinicien. Un recul critique est nécessaire à toute écoute clinique.

Le clinicien doit élaborer les circonstances d’apparition de ses sentiments pour lui-même et
les représentations personnelles que ses sentiments pourraient provoquer en situations
professionnelles.

L’écoute professionnelle est le moyen en permanence d’une rencontre unique, sorte de


double écoute active d’un mouvement intérieur/extérieur pour accueillir les 1001 façons
d’être au monde dans un dialogue qui admet l’imprévu avec le plus profond respect de
l’altérité du patient.

L’élaboration des mouvements internes chez le clinicien se fait par le regard tourné vers
l’intérieur avec la mobilisation de ce matériel en deçà des mots (ressentis, émotions,
réactions corporelles) déverrouillé par les paroles du patient.

Ceci au bénéfice d’une construction commune.

Discerner son implication personnelle se réalise par une préparation par un travail en
amont (formation professionnelles) et par un travail en aval (supervision, analyse de la
pratique) dans une formation permanente et continue (afin de tenir à jour ses
connaissances).

L’empathie

L’empathie est la perception la plus congruente possible du cadre de référence d’autrui, de


ses valeurs personnelles et de sa subjectivité. Le mode de connaissance du patient est
privilégié par le clinicien. L’empathie est la capacité à se représenter le ressenti de son
patient, de ses émotions, sans les éprouver.

Selon Rogers (1962), l’empathie est une disposition psychologique particulière,


intellectuelle, non affective. L’empathie est une capacité de dédoublement émotionnel
(Proïa-Lelouey, 2004).

L’empathie permet d’analyser les expériences se déroulant en lui grâce à ce processus


d’identification /désidentification et donne accès au monde intérieur du sujet sans s’y
perdre.

L’attitude clinique au cours de l’entretien

Les éléments essentiels de l’attitude clinique sont :

• La non-directivité (centration sur le patient, confiance, respect, compréhension) ;


• Le respect (attitude déontologique et éthique du respect des droits fondamentaux
des personnes, de leur dignité, de leur liberté, de la protection, du secret
professionnel ainsi que le respect culturel, de la personnalité et des mécanismes de
défense) ;
• La neutralité bienveillante (pas de jugement, critique, désapprobation, mise en
confiance du sujet) ;
• L’empathie (comprendre le monde intérieur du sujet par une appréhension intuitive
« comme si »).

Les 3 modalités relationnelles de conduite de l’entretien

Les 3 modalités de l’entretien sont :

• Directif dont l’objectif est la pertinence de l’information, le contrôle et la vérification


(question, test psychométrique, questionnaire, échelles d’évaluation des troubles) ;
• Semi-directif (discours semi-spontané mais orienté par des questions sur des
thématiques) ;
• Non-directif (recueil du discours libre développé par le patient à sa convenance,
sans l’orienter, avec des relances ouvertes).

Selon Rogers, il existe 3 grands principes d’efficacité :

• La congruence: sentiment d’authenticité du thérapeute perçu par le patient ;


• La considération positive inconditionnelle ou neutralité bienveillante (pas de
jugement) ;
• La compréhension empathique: réceptivité aux sentiments vécus par autrui et
capacité verbale à communiquer cette compréhension.

Rogers considère qu’il existe chez tout individu une orientation positive, tendance naturelle
d’épanouissement et de communication avec autrui et une capacité de réactualisation. Ainsi
selon Rogers, le client est compétent.

IV. Mise en place et gestion de la relation interpersonnelle

L’entretien psychologique est « une situation d’observation d’une partie de la vie du


patient qui se développe en relation avec nous et face à nous » (Bleger, 1964). L’entretien
est un outil pour se faire une représentation cohérente des motivations de la personne.

Demande et motivation

La demande contient les intentionnalités et la théorisation de la personne. La dimension


de coopération est un préalable conditionnant le travail du psychologue.

Lorsque la demande ne concerne pas le patient directement, le psychologue recentre


l’entretien sur le consultant pour que le patient se réapproprier la demande d’aide en l’aidant
à élaborer et formuler la demande.

Lorsque la demande n’émane pas du patient (décision de justice ou médicale), le


psychologue doit situer son positionnement et son écoute par rapport à la demande de ce
tiers et peut bénéficier de la liberté de choix quant à la poursuite des entretiens.

Lorsque la demande est ambiguë voir confuse et générale, l’entretien permet l’élaboration
des dysfonctionnent du patient et la reformulation propre au patient de la problématique
psychopathologique.
La motivation préexistante à l’entretien est importante. Cela détermine sa prise en charge,
le soin et la relation au psychologue.

Le cadre

• L’investigation psychologique donne un « arrêt sur image » de la vie mentale et


affective de l’usager.
• L’intervention psychologique permet d’intervenir dans la vie du patient.

Il existe 3 formes : l’accompagnement, le consulting, la psychothérapie.

Le cadre est ce qui initie le contrat de communication, fixe et garantit le déroulement des
entretiens, rappelle le contexte, explique le dispositif théorique et technique du psychologue
clinicien.

L’objectif est de permettre au psychologue et au patient de définir leurs places respectives


et le mode de relation entretenue ensemble.

L’établissement et la gestion du cadre peut se faire sur deux styles :

• Souple: négociation d’un contrat d’échange ;


• Ferme: cadre clairement délimité.

Mais le cadre ne doit jamais être rigide.

Le cadre respecte la déontologie professionnelle, la confidentialité des entretiens, le respect


de l’anonymat de la personne.

Les objectifs cliniques

Si la demande est indirecte, l’objectif est extérieur. Le psychologue doit savoir qui cherche,
ce que l’on cherche et si l’on est bien d’accord pour chercher ensemble.

Si la demande est directe, il n’est pas non plus certain que l’objectif soit clair pour le patient.

Remarque : ne jamais commencer l’anamnèse avant de définir les objectifs.

Les objectifs peuvent être repris à tout moment si nécessaire pour le patient, de les
modifier ou d’en ajouter d’autres.

Le psychologue doit être à l’écoute de ce qui est réellement dit (Poussin, 2003).

La relation entre le psychologue et le patient comportent :

• Des modalités implicites: coopération, confiance, respect du cadre ;


• Des modalités explicites: consignes formulée, formulation du cadre et de l’objectif.

Clore l’entretien clinique

L’entretien doit se clore dans la gestion et le respect de la personne.


A partir des émotions et des pensées exprimées pendant l’entretien, l’entretien se termine
par la reprise des différents éléments, l’explication et l’interprétation par le psychologue afin
de rassurer.

La fin d’un entretien est le moment pour faire des propositions thérapeutique.

La clôture est un moment particulièrement fertile où l’on peut observer des éléments
cliniques importants (par exemple, une réaction à la séparation, évaluer la sortie…).

Les écrits cliniques

Le psychologue prend des notes au cours de l’entretien pour faire un compte-rendu. L’écrit
comporte deux parties :

• Une description (faits d’observation clinique) ;


• Une interprétation.

« Un fait observé, un sens dégagé sont toujours une construction. L’énoncé d’une
observation est déjà une interprétation » (Pedinelli, Fernandez, 2005, 2009).

Quelques difficultés

• Gestion de la distance relationnelle professionnelle

La gestion de la distance peut être délicate :

• Trop distant (difficulté d’établir une alliance thérapeutique ce qui entraine un


désintérêt, une agressivité pour le patient) ;
• Un excès de proximité (peu compréhensible pour le patient).
• La neutralité bienveillante

La neutralité se comprend comme :

• Neutre quant aux valeurs religieuses, morales, sociales;


• Neutre au regard des manifestations transférentielles;
• Neutre quant au discours du patient.

Attention à ne pas confondre :

• neutralité et impassibilité, indifférence, froideur ;


• cure psychanalytique et entretien clinique, dont le silence est un mode opératoire.

Le concept de neutralité contenante de Bion consiste en :

• Une neutralité pour éviter l’interférence avec ses propres sentiments ;


• Une contenance pour aider à mettre en mot et en récit ses éprouvés.

Ce n’est pas seulement comprendre le sujet qui est important mais surtout l’aider à se
comprendre.

• La gestion du cadre théorique et technique

La gestion du cadre théorique et technique est centrale.


La relation professionnelle clinique est entravée et inadéquate dans certains dispositifs
thérapeutiques (injonction thérapeutique ou dispositif judiciaire). Cela nécessite l’instauration
d’une relation clinique solide sans être rigide et une traduction concrète de ses
aptitudes relationnelles en situation professionnelles.

• Difficulté liées à l’activité inférentielle

V. Réalisations langagières du travail du psychologue

La co-construction du sens signifie que le sens n’est jamais le résultat de la seule activité
du locuteur, mais c’est l’action conjointe des interlocuteurs.

Selon la notion de dialogisme de F. Jacques (concept issu de Bakhtine), la parole réalise


la pensée dans l’interdiscursivité, c’est-à-dire l’activité conjointe des locuteurs.

Dans le dialogisme fondamental, toute pensée est une pensée construite conjointement
par les interlocuteurs. Le discours du sujet permet l’expression d’un rapport intersubjectif
singulier.

Théorie de la pragmatique linguistique

La pragmatique linguistique est l’analyse linguistique et psychosociale des situations de


communication. Deux domaines sont concernés : la psychiatrie et la psychologie sociale.

Les éléments de psychopathologie se manifestent à travers le discours du patient.

La pragmatique permet d’expliquer toutes les situations de communication où


l’interprétation des énoncés dépend du contexte et nécessite des inférences chez le locuteur
et l’auditeur.

La catégorisation des relances dans l’entretien clinique permet de repérer l’influence à


l’œuvre, c’est-à-dire la dimension discursive au sein de la relation clinique.

Rôle des relances verbales

L’objectif des relances est de développer le discours du patient. La dimension peut être
affective, informative ou évaluative.

La relance est une activité discursive du clinicien, d’un point de vue général, elle a une
fonction interrogative, directe ou indirecte.

Le patient fait des calculs sur les implicites des relances du clinicien et donne une réponse
en fonction de ce calcul.

La fonction interrogative peut avoir plusieurs formes, plus ou moins marquée.

La force illocutoire correspond à la force de frappe d’un énoncé.

S’intéresser à la forme linguistique des relances permet de mieux comprendre les actes
implicites et leur impact.

L’interrogation est interprétée par le sujet :


• Mise en relief de la non-exhaustivité (incomplétude) du discours ;
• Expression d’opposition, de désaccord (+++ si l’interrogation à une forte puissance).

Les relances forment le seul discours du clinicien disponible pour le patient, ce qui conduit le
patient à une interprétation. Une grille de lecteur du discours du patient permet de
sélectionner les informations pertinentes.

L’espace discursif

L’espace discursif est formé par les questions et les réponses. Le clinicien a une part
importante dans la construction de cet espace (qui est souvent négligé au profit de
l’interprétation).

La narration à propos de la maladie du patient se co-construit à partir de 3 éléments :

• La chronologie;
• Les éléments clefs;
• L’interprétation de l’évènement (négociation du sens attribué à cet évènement par
les deux protagonistes).

Catégorisation des relances

Les objets des relances sont les faits ou les attitudes du patient. Il existe deux registres de
représentation : la modalité et la référence.

Le registre référentiel consiste à dire comment sont les choses : objets et faits. Les
relances permettent de mieux les identifier, obtenir des informations ou interroger les actions
du sujet.

Le registre modal consiste à traduire l’état du locuteur : état psychologique du locuteur.


Les relances concernent les sentiments et les croyances du sujet.

Trois types d’actes sont possibles :

• La réitération (reprendre les propos) ;


• L’assertion (proposer ses propres énoncés) ;
• L’interrogation (questionner les faits ou les sentiments).

L’impact des relances

Le psychologue doit être attentif à l’impact des relances. L’objectif des relances est de
permettre au patient de s’exprimer.

Une relance entrainant une réaction de rejet est efficace si elle permet au patient de rectifier
ou d’argumenter sa position.

Acquiescer est différent d’accepter ! Parfois le patient répond positivement à des questions
pour s’en débarrasser (thème embarrassant).

Il existe différentes réactions du patient :

• La validation: acceptation de la relance par le patient


La validation peut se faire de manière directe (par des indicateurs langagiers) ou de manière
indirecte (par enrichissement du discours).

• L’indécidabilité: aucun élément ne permet d’évaluer l’effet de l’intervention

Le silence peut signifier l’acceptation, le refus ou l’opposition. L’attention doit alors être
portée sur les indices non verbaux (froncement de sourcils, changement de postures).

Cela peut aussi signifier l’incompréhension

Le débrayage conversationnel correspond à la production du discours sans répondre à


l’intervention du clinicien. D’où une impression d’incohérence (thématique ou pragmatique).

Remarque : le débrayage conversationnel est fréquent dans la schizophrénie, l’atteinte


cérébrale, l’aphasie ou le syndrome de Ganser.

Les réponses à côté révèlent un état clinique altéré ou une dissimulation. Dans ce cas, on
fera attention à la dimension de la coopération.

Le débrayage concerne souvent un thème gênant, douloureux pour le sujet qui préfère une
fuite discursive plutôt qu’un refus.

• La non-validation: rejet de la proposition/suggestion du clinicien

Dans la non-validation, le sujet développe son discours en expliquant les motifs. Ce


n’est pas un simple refus ais une véritable contre-argumentation.

Selon Sironi (2001), « tous les procédés techniques doivent tendre à l’explication des
pensées… l’entretien clinique est le lieu de création, d’ajustements, de tâtonnements ».

Notes personnelles issues des cours de Sbedico reçus à l’IED-Université Paris 8

Vous aimerez peut-être aussi