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L’entretien clinique est un outil pour organiser la rencontre avec les mille et une façons
d’être au monde.
Ces différentes approches ne sont pas contradictoires mais complémentaires car elles
proposent des niveaux de compréhension et d’intervention différents. Différents
éléments sont mobilisés à partir des attitudes, des mouvements psychiques, des affects, des
représentations, des comportements du clinicien et du sujet (identification, transfert,
empathie, défenses, demandes…).
Le psychologue lors de l’entretien fonctionne avec son propre appareil psychique. Cela
nécessite la pratique régulière d’un minimum de travail sur soi, d’analyse, de maitrise
de ses propres mouvements psychiques.
L’entretien est une situation avec une faible contrainte pour faciliter et recueillir la production
d’une personne. L’entretien met en présence le sujet en contact avec le psychologue dans
une liberté d’organiser les situations proposées.
Les approches théorico-cliniques sont façonnées et nourries par les pratiques. Et leurs
pratiques reflètent et intègrent également les spécificités de chaque école.
La particularité de l’entretien psychologique est d’être centrée sur l’exploration d’un état
clinique, d’une relation d’aide ou de soin. La relation clinique est fondée sur la
coopération. Toute interaction est issue d’un contrat de communication implicite autour d’un
respect de certains principes. C’est une rencontre entre deux esprits. L’activité inférentielle
se réfère au psychologue impliqué comme professionnel avec un savoir-faire
communicationnel, un savoir théorique sur les processus mentaux et un
raisonnement clinique. Cette forme particulière de conversation à de multiples finalités et
une liberté d’effets.
Les différents buts et effets sont de faciliter, permettre la parole, organiser les éléments.
L’échange symbolique permet la co-construction d’une nouvelle réalité, d’un nouveau sens.
L’entretien clinique non-directif est une technique d’intervention sans interprétation et avec
optimisme. Le psychologue est présent comme un interlocuteur savant et bienveillant et
absent dans sa problématique personnelle, afin de laisser parler le client ou faciliter sa
parole (liberté de parole).
Le but des relances est de faciliter la parole interrompue par les silences et porte sur le
sens de ce qui est dit.
• Le vrai, l’authentique;
• La compréhension empathique;
• Le regard positif inconditionnel, l’affection non possessive (vis-à-vis du client).
Rogers construit la notion de tendance actualisante qui est l’élan ou capacité inné des
êtres humains à grandir, à se développer et à mûrir. Cette notion permet d’avoir une
confiance fondamentale en la capacité du client à se développer de manière autonome.
Cette tendance actualisante définie toutes les relations d’aide centrées sur la personne. Il
n’y a pas besoin de diriger le client. Le mieux est de le suivre.
L’écoute empathique tend à maintenir les gens centrés sur leur expériencing.
Apports théoriques
Tobie Nathan a proposé le concept de l’influence qui guérit (1994). Selon Tobie Nathan,
la psychothérapie est une procédure d’influence destinée à modifier radicalement et
profondément, durablement une personne, une famille ou une situation à partir d’une
intention thérapeutique.
Selon Rogers, cette présence écoutante et empathique est une influence. Le but de la
thérapie est d’aider le client à se centrer sur son expériencing interne, à en faire davantage
l’expérience, de l’accepter et de lui faire confiance.
La dimension discursive au sein de la relation clinique faire référence aux réponses aux
relances aux stratégies développées par le sujet pour s’ajuster au thème proposé par le
clinicien, pour s’ajuster à l’interaction. C’est le discours-réponse.
Les travaux de Sandifer (1970) montrent que les psychologues ont une évaluation
diagnostique dès les premières minutes de l’entretien et ensuite ils recherchent les éléments
cliniques en accord avec leurs hypothèses et les modèles théoriques (Bateson, 1982 et
Wilson, 1985).
Chaque entretien est unique : l’entretien est toujours inédit du fait de la singularité de
toute situation intersubjective.
L’entretien comprend une conversation et une relation clinique. Ceci implique différents
effets :
Dans l’entretien, le patient est centré sur l’expérience présente et le thérapeute est dans une
position sémiologique (pour lui le discours est source d’indice et de symptômes). L’entretien
produit des connaissances indirectement.
L’objectif est de produire des connaissances pour permettre une prise de décision (avec un
recueil pour élaborer des données). L’organisation des données cliniques (organiser le
contenu de l’entretien) se réalise en accord avec le référentiel théorique.
L’objectif de l’investigation est de réussir à éclaircir quel est le vrai problème amené derrière
ce qui est manifeste.
L’entretien thérapeutique
L’indication d’une thérapie dépend de l’état clinique et de la demande du patient. Ceci peut
conduire à la prise en charge thérapeutique différente (adapté à la pathologie selon son
efficacité et le caractère éthique et déontologique).
• Le référentiel psychanalytique
Les troubles relèvent de conflits infantiles non résolus. L’entretien consiste à emmener le
patient à laisser émerger et reconnaitre, consciemment, les contenus inconscients, pour
pouvoir les élaborer et en libérer son fonctionnement actuel. Les contenus inconscients font
référence aux mécanismes de défense, aux conflits intrapsychiques, au transfert/contre-
transfert, à la résistance…
La relation clinique consiste en une attention flottante et des associations libres pour
permettre l’émergence du contenu inconscient (latent) au-delà du discours manifeste.
• Le référentiel cognitivo-comportemental
L’objectif est de changer les affects et les comportements actuels en modifiant les
pensées (cognitions) et de désapprendre les comportements inadéquates sources de
souffrance afin de les remplacer par de nouveaux modèles comportementaux plus adaptés
dans la vie actuelle du sujet.
L’objectif est de modifier des contenus culturels dysfonctionnels au sein d’un groupe
par conflictualisation des référentiels théoriques en psychologique.
• Le référentiel humaniste-existentiel
• L’empathie ;
• L’alliance thérapeutique ;
• la mise en ses des troubles ;
• L’importance déontologique (pas d’efficacité thérapeutique sans réflexion éthique).
L’objectif est l’étayage psychologique du sujet souffrant face à une situation de vie
ponctuellement ou réactionnellement difficile.
Il existe différentes formes : solliciter le patient pour le rencontrer, se tenir à disposition sous
forme de permanence.
La co-construction d’un nouveau sens avec le sujet entraine des modifications qui vont
conduire à des changements.
L’objectif est d’accéder à des connaissances générales à partir d’une collection d’entretiens
particuliers.
L’orientation de l’entretien est à l’initiative du chercheur afin de vérifier les hypothèses,
d’approfondir des thèmes et d’explorer.
Conclusion
Chaque entretien clinique est toujours unique et inédit. C’est le principal moyen
professionnel et technique pour rencontrer les personnes dans la singularité de toute
situation intersubjective.
Le thérapeute efficace selon Rogers (2007) est capable d’être ouvertement lui-même
au niveau le plus profond qu’il soit. Il semble que rien d’autre ne soit important.
Les relances facilitent la parole interrompue par des silences et donne un sens par
l’intervention théorique du clinicien.
Chiland (2008) précise que « s’il veut que le patient puisse tout dire, il doit pouvoir tout
entendre ». En effet, l’écoute ne doit pas être entravée, parasitée par les sentiments
personnels du clinicien. Un recul critique est nécessaire à toute écoute clinique.
Le clinicien doit élaborer les circonstances d’apparition de ses sentiments pour lui-même et
les représentations personnelles que ses sentiments pourraient provoquer en situations
professionnelles.
L’élaboration des mouvements internes chez le clinicien se fait par le regard tourné vers
l’intérieur avec la mobilisation de ce matériel en deçà des mots (ressentis, émotions,
réactions corporelles) déverrouillé par les paroles du patient.
Discerner son implication personnelle se réalise par une préparation par un travail en
amont (formation professionnelles) et par un travail en aval (supervision, analyse de la
pratique) dans une formation permanente et continue (afin de tenir à jour ses
connaissances).
L’empathie
Rogers considère qu’il existe chez tout individu une orientation positive, tendance naturelle
d’épanouissement et de communication avec autrui et une capacité de réactualisation. Ainsi
selon Rogers, le client est compétent.
Demande et motivation
Lorsque la demande est ambiguë voir confuse et générale, l’entretien permet l’élaboration
des dysfonctionnent du patient et la reformulation propre au patient de la problématique
psychopathologique.
La motivation préexistante à l’entretien est importante. Cela détermine sa prise en charge,
le soin et la relation au psychologue.
Le cadre
Le cadre est ce qui initie le contrat de communication, fixe et garantit le déroulement des
entretiens, rappelle le contexte, explique le dispositif théorique et technique du psychologue
clinicien.
Si la demande est indirecte, l’objectif est extérieur. Le psychologue doit savoir qui cherche,
ce que l’on cherche et si l’on est bien d’accord pour chercher ensemble.
Si la demande est directe, il n’est pas non plus certain que l’objectif soit clair pour le patient.
Les objectifs peuvent être repris à tout moment si nécessaire pour le patient, de les
modifier ou d’en ajouter d’autres.
Le psychologue doit être à l’écoute de ce qui est réellement dit (Poussin, 2003).
La fin d’un entretien est le moment pour faire des propositions thérapeutique.
La clôture est un moment particulièrement fertile où l’on peut observer des éléments
cliniques importants (par exemple, une réaction à la séparation, évaluer la sortie…).
Le psychologue prend des notes au cours de l’entretien pour faire un compte-rendu. L’écrit
comporte deux parties :
« Un fait observé, un sens dégagé sont toujours une construction. L’énoncé d’une
observation est déjà une interprétation » (Pedinelli, Fernandez, 2005, 2009).
Quelques difficultés
Ce n’est pas seulement comprendre le sujet qui est important mais surtout l’aider à se
comprendre.
La co-construction du sens signifie que le sens n’est jamais le résultat de la seule activité
du locuteur, mais c’est l’action conjointe des interlocuteurs.
Dans le dialogisme fondamental, toute pensée est une pensée construite conjointement
par les interlocuteurs. Le discours du sujet permet l’expression d’un rapport intersubjectif
singulier.
L’objectif des relances est de développer le discours du patient. La dimension peut être
affective, informative ou évaluative.
La relance est une activité discursive du clinicien, d’un point de vue général, elle a une
fonction interrogative, directe ou indirecte.
Le patient fait des calculs sur les implicites des relances du clinicien et donne une réponse
en fonction de ce calcul.
S’intéresser à la forme linguistique des relances permet de mieux comprendre les actes
implicites et leur impact.
Les relances forment le seul discours du clinicien disponible pour le patient, ce qui conduit le
patient à une interprétation. Une grille de lecteur du discours du patient permet de
sélectionner les informations pertinentes.
L’espace discursif
L’espace discursif est formé par les questions et les réponses. Le clinicien a une part
importante dans la construction de cet espace (qui est souvent négligé au profit de
l’interprétation).
• La chronologie;
• Les éléments clefs;
• L’interprétation de l’évènement (négociation du sens attribué à cet évènement par
les deux protagonistes).
Les objets des relances sont les faits ou les attitudes du patient. Il existe deux registres de
représentation : la modalité et la référence.
Le registre référentiel consiste à dire comment sont les choses : objets et faits. Les
relances permettent de mieux les identifier, obtenir des informations ou interroger les actions
du sujet.
Le psychologue doit être attentif à l’impact des relances. L’objectif des relances est de
permettre au patient de s’exprimer.
Une relance entrainant une réaction de rejet est efficace si elle permet au patient de rectifier
ou d’argumenter sa position.
Acquiescer est différent d’accepter ! Parfois le patient répond positivement à des questions
pour s’en débarrasser (thème embarrassant).
Le silence peut signifier l’acceptation, le refus ou l’opposition. L’attention doit alors être
portée sur les indices non verbaux (froncement de sourcils, changement de postures).
Les réponses à côté révèlent un état clinique altéré ou une dissimulation. Dans ce cas, on
fera attention à la dimension de la coopération.
Le débrayage concerne souvent un thème gênant, douloureux pour le sujet qui préfère une
fuite discursive plutôt qu’un refus.
Selon Sironi (2001), « tous les procédés techniques doivent tendre à l’explication des
pensées… l’entretien clinique est le lieu de création, d’ajustements, de tâtonnements ».