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Le Livre Blanc
de la Street Food
Octobre 2012
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« La Street Food est une vraie alternative à la malbouffe, un puissant moteur d’intégration dans la
société. La Street Food, c’est l’avenir ! » (Thierry Marx)
Manger dans la rue est une pratique universelle et ancestrale qui témoigne de l’imagination que les
hommes ont toujours su déployer, pour se nourrir simplement et rapidement.
Forme vivante de la culture populaire et caractéristique essentielle de l’identité locale, la street food
est l’exacte opposé d’une nourriture mondialisée, uniformisée et importée.
Dans son essence populaire et sa proximité aux gens, la cuisine de rue crée du lien entre les
populations et leur territoire. Elle anime les rues, les quartiers, les villages… elle nourrit les employés
des zones périphériques, elle réveille les marchés et génère des moments de partage entre les gens,
de la convivialité, de la sociabilité… Véritable lien social, elle représente aussi la possibilité d’une
valorisation des produits de terroirs et des patrimoines culinaires. Ce que le fast food urbain,
standardisé et d’inspiration internationale, n’avait pas souvent contribué à promouvoir.
Et pourtant, alors qu’elle est reconnue partout dans le monde et souvent en pleine expansion, la
Street Food peine à trouver sa place en France. Entre l’héritage d’une gastronomie formelle et la
réticence des politiques, son développement stagne. Les initiatives se heurtent à des freins
importants, qui ralentissent les vraies entreprises et profitent aux activités sauvages non maitrisées.
Pour s’assurer d’un développement structuré de la street food, respectueux de l’hygiène et des lois, il
était urgent d’agir.
Car l’enjeu est de taille : la street food pourrait représenter, à l’horizon de 2 ans, un potentiel de
création de plus de 50 000 emplois en France. Un développement économique et social majeur
favorisé par la mutation du marché de la restauration et la progression spectaculaire de la vente à
emporter. Une opportunité commerciale qui pourrait profiter à de nouveaux entrepreneurs
individuels, mais aussi élargir et compléter l’activité de commerces alimentaires et de restaurants
existants. Une opportunité de service qui pourrait profiter à des millions de mangeurs en quête
d’une offre alternative, abordable et proche.
C’est avec la volonté d’aider au développement de cette activité, que l’association « Street Food en
Mouvement », présidée par Thierry Marx, a été créée. Elle s’est notamment donnée pour objectifs
de définir et d’officialiser avec l’appui des pouvoirs publics, une charte globale de qualité de la Street
Food.
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Imaginons…
En ce début de soirée, le marché couvert est animé et, d’un pas tranquille, des groupes de
gens convergent vers le bâtiment habituellement clos.
En entrant, en place des étals habituels, on aperçoit un alignement de petites échoppes d’où
s’échappent des odeurs délicieuses…
Pour quelques euros, on peut se régaler d’une soupe paysanne faite de légumes de saison,
un peu plus loin, de quelques brochettes de viandes grillées, ailleurs, d’une belle part de
tarte du jour. Dans une autre allée, on découvre un pâté chaud en croûte, à quelques mètres
de là, une poêlée de crevettes cuites à l’instant, puis une petite salade de fruits frais.
Les stands rivalisent d’imagination pour susciter nos envies : tartine de foie gras, petite
omelette aux champignons, brochettes d’abats aux épices, croquets aux amandes… chacune
propose une ou deux spécialités, nous obligeant, selon notre appétit, à inventer un nouvel
itinéraire gourmand.
Au bar, des groupes se forment et partagent un verre en toute convivialité. Ici, des jeunes et
des vieux, des voisins et des nouveaux venus se rencontrent autour d’une saveur originale
en échangeant leurs impressions.
Là, des hommes et des femmes s’activent et gagnent leur vie, eux qui cherchaient encore du
travail il y a seulement quelques mois.
Le charcutier a repris du service. Le fromager, le primeur, le poissonnier, inspirés par
l’exemple, se mobilisent pour valoriser leurs produits.
Création d’emplois, possibilité de se nourrir à petit budget, valorisation de produits et
recettes de terroirs, espace de rencontres et d’intégration… La cuisine de rue est en
mouvement !
Il règne sous la halle comme un air de fête, une ambiance populaire, une envie de bien
vivre… Monsieur le Maire est content, il a même pris l’habitude de venir y manger plusieurs
soirs par semaine.
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1 - Le goût de la rue
Manger dans la rue est une pratique universelle et ancestrale qui témoigne de
l’imagination que les hommes ont toujours su déployer, pour se nourrir simplement et
rapidement. Disponibilité des aliments, créativité culinaire, activité économique…
Inlassablement, la cuisine de rue, s’invente entre le plaisir gourmand et la nécessité vitale.
Street food
Cette cuisine de rue, de places, de marchés, de plages, de trottoirs… se regroupe aujourd’hui sous
l’appellation plus internationale de « street food ». Elle désigne tous les aliments et les boissons prêts
à être consommés, préparés ou vendus par des vendeurs et des marchands ambulants, spécialement
installés dans les rues et dans les lieux publics.
On distingue plusieurs formats : les kiosques fixes, la vente pédestre, les triporteurs, les chariots,
mini camions, camions…
D’une manière générale, l’offre est assez courte pour chaque vendeur, avec une cuisine qui peut être
réalisée sur place ou non.
Les emplacements dédiés à cette vente, regroupent le plus souvent plusieurs commerces.
2 – La France en mouvement
Il y a bien les vendeurs de maïs et de marrons chauds, les baraques à frites du nord ou les
camions à pizza du Sud… Mais la street food n’existe pas vraiment aujourd’hui en France.
Et pourtant elle fait partie intégrante de notre patrimoine…
Saveurs médiévales
Dans les villes de la fin du Moyen Age, beaucoup de gens mangeaient dans la rue ou à l’étal du
marché. Les « crieries de Paris » évoquent dès le XIIème siècle, le cri de ces petits métiers ambulants,
marchands trop modestes pour pouvoir ouvrir une boutique.
Les colporteurs vendent produits fermiers et produits cuisinés. Cela sent la purée de pois, les fèves,
les sauces à l’ail et les volailles rôties. On y achète rissoles, petits pâtés, galettes, darioles et tartes au
fromage chaudes… Les oubloyeurs et les pâtissiers transportent avec eux leur four mobile, les
tripières vendent à même la chaussée des abats qui cuisent dans des bassines… A paris, les pâtés
sont réputés et certaines rues se spécialisent : ici rôtisseurs d’oies, là vendeurs de saucisses…
Tendance
Les initiatives de street food se multiplient sur tout le territoire.
Et si les pionniers rencontrent un succès commercial, il est aussi très médiatique : la presse et les
blogs culinaires s’en font volontiers l’écho. Les émissions télévisées et les salons spécialisés
s’emparent du phénomène. Les évènements culturels consacrent le nomadisme alimentaire, avec
par exemple, un camion semi-remorque dans Paris à l’occasion de la semaine « tous au restaurant »
ou avec « les grandes carrioles de la friche », un projet qui réunit des chefs de cuisine et des artistes
pour revisiter la cuisine de rue, dans le cadre de Marseille Provence 2013, capitale de la culture.
Le sujet intéresse, les consommateurs sont demandeurs : la street food est dans l’air du temps.
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L’école de la rue
La cuisine et la restauration, sont souvent des secteurs vers lesquels se tournent des personnes en
rupture d’activité ou de faible qualification. Mais ouvrir un restaurant traditionnel suppose un lourd
investissement immobilier. La cuisine de rue est une réelle opportunité pour ces jeunes
entrepreneurs : équiper un food truck demande un budget de 50 000 € seulement.
Mais la street food n’est pas un outil miracle pour faire fortune car elle suppose le plus souvent, une
entreprise de petite taille, avec une offre très restreinte, voire mono-produit.
De cette contrainte nait la richesse des expériences : concevoir l’offre, lui donner son identité, savoir
peser et calculer avec rigueur, anticiper les approvisionnements, servir et fidéliser la clientèle… et ne
pas compter son temps ! Les courageux sont vite récompensés de leurs efforts (un camion pizza
devient rentable à partir de 80 pizzas par jours), mais la street food reste un modèle micro
économique, à moins de multiplier les points de vente et de centraliser la fabrication. Contrairement
à la restauration classique, la cuisine de rue doit s’envisager, moins comme une carrière, que comme
un temps intermédiaire entre formation et activité professionnelle : une phase tremplin pour
apprendre un métier, se faire connaitre et se donner les moyens d’ouvrir son propre établissement.
Une opportunité bien intégrée par un nombre croissant de jeunes entrepreneurs, comme
d’entreprises existantes, qui se montrent très intéressés par l’énorme potentiel de ce nouveau
marché.
Activité économique qui repose sur des données nouvelles, la street food est l’expression d’une
mobilité géographique, temporelle et mentale !
*Sources Gira Conseil et données marché
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Un lien social
La restauration, a toujours été un moteur d’intégration sociale. Hier, les bretons, les auvergnats, les
basques… et plus récemment les familles venues du Maghreb ou d’Asie le savent bien : la cuisine
rassemble ! Elle amène à se rencontrer, à se découvrir… et la restauration, en offrant la possibilité
d’une activité économique pour les nouveaux arrivants, contribue aussi efficacement à la
reconnaissance et à l’intégration de la nouvelle culture.
Dans son essence populaire et sa proximité aux gens, la cuisine de rue crée du lien entre les
populations et leur territoire. Elle anime les rues, les quartiers, les villages… Elle nourrit les employés
des zones périphériques, et soutient le développement économique de ces quartiers, elle réveille les
marchés et génère des moments de partage entre les gens, de la convivialité, de la sociabilité… Elle
permet un brassage des classes et des générations. Ce que le fast food urbain, standardisé et
d’inspiration internationale, n’avait pas souvent contribué à promouvoir.
La valorisation du patrimoine
La street food n’est pas contrainte à la médiocrité, non plus que de se limiter à des produits
exotiques ou de mauvaise qualité. C’est même l’inverse : elle est une véritable alternative à la
malbouffe. Voilà la possibilité de ventes additionnelles pour les restaurants traditionnels, qui signent
de leur savoir-faire quelques-unes de leurs recettes désormais accessibles au plus grand nombre.
Voilà aussi l’opportunité pour les détaillants de compléter leur activité de vente de produits bruts,
par une offre, tellement légitime, de produits élaborés : charcutier, boulanger, primeur, boucher,
poissonnier… Voilà enfin l’occasion pour les filières agricoles de promouvoir leurs produits et d’en
suggérer une nouvelle consommation : la reconquête des produits tripiers, le repositionnement du
fromage, la découverte des fruits et légumes… Et pourquoi pas des écoles de street cuisine ? Une
manière simple, concrète et originale de promouvoir les terroirs de France et de valoriser leur
production. Proche des consommateurs et au plus de près de leurs envies, la street food peut se faire
l’ambassadrice du bien manger.
* (Etude SurveyMonkey réalisée en septembre 2012, pour Street Food en Mouvement)
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Lois et réglementations
La street food n’a pas aujourd’hui de statut légal bien défini et son activité dépend surtout du bon
vouloir des collectivités locales, avec souvent une réticence compréhensible des responsables
politiques pour une activité mal connue et inquiétante, à la croisée des chemins de la vente
ambulante, des activités foraines et de la restauration. Gestion de la sécurité ? Respect de l’harmonie
du paysage urbain ? Evaluation des redevances ?... autant de questions à débattre pour donner à la
street food un cadre légal.
Il y a aujourd’hui nécessité à mettre la loi en phase avec l’évolution des modes de consommation
alimentaire des français et de clarifier les droits et les devoirs des acteurs de la restauration de rue.
Une opportunité pour le législateur et l’administrateur de collectivité d’inscrire leur politique dans
l’attente du plus grand nombre, tout en contribuant à la hausse du pouvoir d’achat alimentaire et à
la création d’emplois.
Hygiène et sécurité
La cuisine de rue n’est pas une alimentation au rabais. Elle doit faire preuve d’excellence sur les plans
de l’hygiène et de la sécurité. Au regard de l’inquiétude compréhensible des consommateurs
concernant les conditions de préparation et de conservation des aliments dans la rue, il est
nécessaire de définir un cadre strict de fonctionnement qui intègre normes matérielles, formations
des personnels et contrôles à respecter.
Un travail concret en concertation avec la DGCCRF, les services vétérinaires, les filières de formation
professionnelles et les fabricants de matériel est nécessaire à mettre en place pour déboucher sur
des textes légaux, des cahiers de bonnes pratiques, des principes de certification.