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Sociologie des pratiques culturelles : quels sont les facteurs de diffé-

renciation des pratiques culturelles ?

Objectifs d’apprentissage :

L’élève apprend :
- la distinction entre la définition de la culture au sens sociologique et son acception au sens courant ;
- que les pratiques culturelles recouvrent une diversité d’activités de consommation et de participa-
tion à des domaines intellectuels et artistiques ;
- que les pratiques culturelles sont associées à des goûts et des préférences socialement différenciés
(selon la catégorie socioprofessionnelle, sexe, niveau de diplôme, âge et génération, lieu d’habitat) et
qu’elles participent à la définition de styles de vie ;
- que le numérique est susceptible de modifier l’accès et les usages des pratiques culturelles ;
- que la pluralité des influences socialisatrices peut être à l’origine de situations de dissonances cultu-
relles ;
- à interpréter les données statistiques relatives au public des spectacles vivants et à l’évolution de
leur fréquentation

Première partie :

A- Définition de la culture

Doc 1 : Quelle définition de la culture ?


La notion de culture est d’un usage courant, mais sa définition semble toujours destinée à nous
échapper. Son développement, en tout cas, est étroitement lié à celui des sciences de l’homme. En
1952, deux anthropologues américains, Alfred Krœber et Clyde Kluckhohn, dans un effort de clarifica-
tion, publièrent une compilation des différentes tentatives de définition de la notion de culture – ou
de notions proches – dans les sciences sociales : ils n’en trouvèrent pas moins de 164. Leur variation
tenait non seulement à la nature de la définition envisagée (par le contenu, la fonction, les proprié-
tés), mais aux usages plus ou moins larges du mot. Selon A. Krœber et C. Kluckhohn, il en existe au
moins deux. L’un, hérité de la philosophie des Lumières, nomme « culture » le patrimoine lettré ac-
cumulé depuis l’Antiquité sur lequel les nations occidentales assurent avoir fondé leur civilisation.
L’autre, plus spécifiquement anthropologique, nomme culture « la totalité des connaissances, des
croyances, des arts, des valeurs, lois, coutumes et de toutes les autres capacités et habitudes ac-
quises par l’homme en tant que membre de la société », selon la définition, jugée canonique, donnée
par Edward B. Tylor en 1871.
Ces deux sens du mot culture continuent de coexister tant bien que mal à travers nos usages quoti-
diens. Mais depuis que, au début du XIXe siècle, le projet de développer une science de l’homme a
pris forme, les mêmes contraintes s’exercent sur ceux qui en ont la charge : comprendre à la fois
l’unité et la diversité du genre humain…
« Que faire de la culture ? » Nicolas Journet 2002

Q1 : Quel est pour vous la signification du mot culture ? A quoi pouvez-vous le rattacher ?
Q2 : Que comprenez vous de la définition de la culture de Tylor écrite dans le texte ?
Q3 : Rappelez la définition de la socialisation vue en seconde. Que constatez-vous ?
Q4 : Que conclure sur la définition de la culture ? En existe-t-il plusieurs ?
Doc 2 : Quand le Big Mac n’est pas synonyme de malbouffe mais de statut social

Gregg Segal livre une série de clichés révélant le régime alimentaire d’enfants du monde entier.
« Dis-moi ce que tu manges, je te dirai qui tu es… et d’où tu viens » Poncif mais vrai.
Photos : « Daily Bread » by Gregg Segal
Çà et là, des fruits, des légumes, des plats en sauce fraîchement cuisinés, des hotdogs, des hambur-
gers et des pizzas, des emballages de chips et de biscuits en tous genres… un patchwork de nourri-
ture coloré qui en dit long sur les habitudes alimentaires et le niveau de développement de chaque
pays. Ces deux dernières années, Gregg Segal, sociologue déguisé en photographe, a voyagé autour
du monde, demandant à des enfants de tenir un journal de ce qu’ils mangent en une semaine. Une
fois terminée, il les prend en photo, allongés aux côtés des aliments qu’ils consomment le plus au
quotidien.
Sous ses aspects pop et acidulés, la série de photos « Daily Bread » en dit plus que n’importe quelle
enquête nutritionnelle et illustre l’infiltration progressive de la malbouffe dans les pays en voie de
développement, à commencer par l’Inde où acheter un sandwich chez McDo révèle la classe so-
ciale à laquelle appartient celui qui le déguste : « Sentant un changement radical dans les attitudes
occidentales sur l'alimentation et les effets de la malbouffe, les entreprises de restauration rapide
ont commencé à investir massivement dans les marchés étrangers, là où la sensibilisation du public
n'est pas aussi prégnante et où le Big Mac n’est pas considéré comme de la malbouffe mais comme
un symbole statutaire », explique le photographe dans un compte-rendu publié sur le maga-
zine Time.
À Bombay, « Anchal a pourtant un régime alimentaire plus sain que de nombreux enfants de la classe
moyenne qui peuvent se permettre de manger au restaurant », explique-t-il plus loin. Là-bas, une
pizza Domino's de taille moyenne coûte environ 13 dollars, soit trois fois ce que gagne le père d’An-
chal en une journée, rapporte le photographe. Une schizophrénie alimentaire qui atteint de plus de
pays hybridés entre malbouffe pour les plus riches et alimentation traditionnelle et souvent nette-
ment plus saine pour les plus pauvres.
Et si Gregg Segal ne prend que des enfants en photo, c’est bien pour illustrer les habitudes alimen-
taires qui se forgent lorsque nous sommes jeunes et nous collent à la peau le restant de notre vie. À
la clé, souvent, et surtout aux Etats-Unis où l’obésité morbide atteint des sommets (un enfant sur
40 était obèse il y a quarante an, 10 sur 40 le sont aujourd’hui), des problèmes de santé chroniques
comme le diabète, les maladies cardiaques et le cancer du côlon.
« En 2015, l'Université de Cambridge a mené une étude exhaustive, identifiant les pays avec les ré-
gimes les plus sains dans le monde. Neuf des dix premiers pays se trouvent en Afrique, où les lé-
gumes, les fruits, les noix, les légumineuses et les céréales sont des aliments de base. Un contraste
frappant avec les États-Unis où près de 60% des calories proviennent d'aliments ultra-transformés »,
rapporte le photographe. Un constat auquel il oppose les régions et communautés où les repas cuisi-
nés et faits maison constituent le fondement de la culture et de la cellule familiale.

Q1 : Répertoriez les différents aliments que vous avez consommé depuis une semaine.
Q2 : Analysez désormais les aliments consommés par les deux enfants (Brésil et Allemagne). Que
constatez-vous ? Duquel de ces deux pays votre alimentation se rapproche ? Pourquoi à votre avis ?
Q3 : Quelle distinction peut-on donc faire entre le mode de consommation des pays développés et
ceux des pays en développement ?
Q4 : Comment peut-on l’expliquer ?
Q5 : Qu’a donc voulu démontrer Gregg Segal à travers cette série de photos d’enfants ?

Doc 3 : Le franc-manger populaire et le modèle alimentaire bourgeois


On pourrait, à propos des classes populaires, parler de franc-manger comme on parle de franc-
parler. Le repas est placé sous le signe de l'abondance (qui n'exclut pas les restrictions et les
limites) et, surtout, de la liberté : on fait des plats « élastiques », qui « abondent », comme les
soupes ou les sauces, les pâtes ou les pommes de terre (presque toujours associées aux
légumes) et qui, servies à la louche ou à la cuiller, évitent d'avoir à trop mesurer et compter –
à l'opposé de tout ce qui se découpe, comme les rôtis. Cette impression d'abondance, qui est
de règle dans les occasions extraordinaires et qui vaut, dans les limites du possible, pour les
hommes, dont on remplit l'assiette deux fois (privilège qui marque l'accès du garçon au statut
d'homme), a souvent pour contrepartie, dans les occasions ordinaires, les restrictions que
s'imposent les femmes (en prenant une part pour deux, ou en mangeant les restes de la veille),
l'accès des jeunes filles au statut de femme se marquant au fait qu'elles commencent à se
priver. Il relève du statut d'homme de manger et de bien manger (et aussi de bien boire). »
Au « franc-manger » populaire, la bourgeoisie oppose le souci de manger dans les formes. Les
formes, ce sont d'abord des rythmes, qui impliquent des attentes, des retards, des retenues ; on
n'a jamais l'air de se précipiter sur les plats, on attend que le dernier à se servir ait commencé
à manger, on se sert et se ressert discrètement. On mange dans l'ordre, et toute coexistence de
mets que l'ordre sépare, rôti et poisson, fromage et dessert, est exclue : par exemple, avant de
servir le dessert, on enlève tout ce qui reste sur la table, jusqu'à la salière, et on balaie les
miettes. Cette manière d'introduire la rigueur de la règle jusque dans le quotidien [...] est
l'expression d'un habitus d'ordre, de tenue et de retenue qui ne saurait être abdiqué. A travers
toutes les formes et tous les formalismes qui se trouvent imposés à l'appétit immédiat, ce qui
est exigé – et inculqué -, ce n'est pas seulement une disposition à discipliner la consommation
alimentaire par une mise en forme qui est aussi une censure douée, indirecte, invisible (en tout
opposée à l'imposition brutale de privations) et qui est partie intégrante d'un art de vivre, le
fait de manger dans les formes étant par exemple une manière de rendre hommage aux hôtes
et à la maîtresse de maison, dont on respecte les soins et le travail en respectant l'ordonnance
rigoureuse du repas. C'est aussi une manière de nier la consommation dans sa signification et
sa fonction primaire, essentiellement communes, en faisant du repas une cérémonie sociale,
une affirmation de tenue éthique et de raffinement esthétique.
Pierre Bourdieu, « La distinction », 1979, Editions de Minuit
Q1 : Montrez toutes les distinctions entre le modèle alimentaire populaire et le modèle alimentaire
bourgeois (Vous pouvez faire un tableau).
Q2 : Que signifie cette notion de franc manger populaire que l’on a repris de l’idée de franc-parler ?
Q3 : Comment est donc perçu un repas dans le milieu populaire ? Dans le milieu bourgeois ?
Q4 : De quoi dépend donc la façon de manger ?

B- Les pratiques culturelles

Réflexion :
Q1 : Donnez des exemples de pratiques culturelles.
Q2 : Essayez de proposer ensuite une définition de pratiques culturelles.

Activité :
Questions sur le tableau 1
1- Intégrez les données entourées dans des phrases.
2- Quelle est la part des individus de 15 ans et plus qui ne pratiquent pas la musique ou le chant en
amateur ?
3- Parmi les pratiques culturelles envisagées dans le tableau (intitulés en gras), listez les trois les plus
répandues en 2018.
4- Quelles sont les pratiques culturelles minoritaires au sein de la population (moins de 50% des 15
ans et plus concernés)
5- Mesurez avec un calcul approprié l'évolution de la part des personnes de 15 ans et plus écoutant
de la musique (hors radio) entre 1973 et 2018. Intégrez le résultat dans une phrase.
6- Même question pour l'écoute de la radio.
7- Quelles sont les pratiques culturelles en déclin depuis 1973 ? Quelles sont celles qui progressent
au sein de la population ? Quelles sont celles qui sont stables ? (Vous pouvez répondre dans un ta-
bleau).
8- Dans l'ensemble, quelles évolutions des pratiques culturelles se dégagent depuis 1973 ?

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