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MÉMOIRE DE RECHERCHE

de Mathématiques Pures
intitulé
arXiv:0704.1399v1 [math.FA] 11 Apr 2007

“LA FORMULE DE LIE - TROTTER


POUR LES
SEMI-GROUPES FORTEMENT CONTINUS”

par Ludovic Dan LEMLE


sous la direction de Gilles CASSIER

SOUTENU À L’UNIVERSITÉ CLAUDE BERNARD LYON 1

Le 4 juillet 2001
2

Remerciements.
Tout d’abord, je veux profiter de cette occasion pour présenter mes remer-
ciements à Monsieur Gilles Cassier de l’Université Claude Benard Lyon 1 pour
le choix du sujet de ce mémoire, ses suggestions et son aide constante. J’ai été très
enchanté de cette collaboration avec Monsieur Gilles Cassier.
De même, je veux exprimer ma reconnaissance à Monsieur Dan Timotin
de l’Institut de Mathématiques de l’Académie Roumaine de Bucharest pour ses
excellents conseils pendant son sejour à Lyon.
En même temps, il convient d’exprimer ma gratitude à Monsieur Dumitru
Gaşpar et à Monsieur Nicolae Suciu de l’Université de l’Ouest de Timişoara,
qui m’ont donné l’occasion d’étudier dans une très grande université européenne.
Finalement, je veux exprimer toute ma reconnaissance pour l’hospitalité et
l’amabilité avec lesquelles j’ai été accueilli par toutes les personnes que j’ai eu le
plaisir de connaı̂tre pendant mon stage à l’Université Claude Bernard Lyon 1.

Ludovic Dan LEMLE


Facultatea de Inginerie
Str. Revoluţiei Nr. 5
COD 2750 Hunedoara
ROMÂNIA
tel: +4 02 54 20 75 43
e-mail: lemledan@fih.utt.ro
Table des matières

1 Introduction 5
1.1 Préliminaires . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 5
1.2 Les opérateurs dissipatifs . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 13
1.3 Semi-groupes uniformément continus . . . . . . . . . . . . . . . . . 17
1.4 Notes . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 30

2 Semi-groupes de classe C0 31
2.1 Définitions. Propriétés élémentaires . . . . . . . . . . . . . . . . . . 31
2.2 Propriétés générales des C0 -semi-groupes . . . . . . . . . . . . . . . 41
2.3 Le théorème de Hille - Yosida . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 52
2.4 La représentation de Bromwich . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 63
2.5 Conditions suffisantes d’appartenances à GI(M, 0) . . . . . . . . . . 70
2.6 Propriétés spectrales des C0 -semi-groupes . . . . . . . . . . . . . . . 78
2.7 Notes . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 85

3 C0 -semigroupes avec propriétés spéciales 87


3.1 C0 -semi-groupes différentiables . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 87
3.2 C0 -semi-groupes analytiques . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 98
3.3 C0 -semi-groupes de contractions . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 107
3.4 Notes . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 111

4 La formule de Lie - Trotter 113


4.1 Le cas des semi-groupes uniformément continus . . . . . . . . . . . 113
4.2 Propriétés de convergence des C0 -semi-groupes . . . . . . . . . . . . 117
4.3 Formule de Lie - Trotter pour les C0 -semi-groupes . . . . . . . . . . 127
4.4 Notes . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 132

3
4 TABLE DES MATIÈRES
Chapitre 1

Introduction

1.1 Préliminaires
Dans la suite, nous noterons par E un espace de Banach sur le corps des
nombres complexes C et par B(E) l’algèbre de Banach des opérateurs linéaires
bornés dans E. Nous désignerons par I l’unité de B(E).
Pour un opérateur linéaire A : D(A) ⊂ E −→ E nous noterons par:

Im A = {Ax |x ∈ D(A)}

l’image de A et par:
Ker A = {x ∈ D(A) |Ax = 0 }

le noyau de A.
L’opérateur A : D(A) ⊂ E −→ Im A est surjectif. Si Ker A = {0}, alors A est
injectif. Pour un opérateur bijectif, on peut définir l’opérateur inverse:
 
A−1 : D A−1 ⊂ E −→ E

par A−1 y = x si Ax = y. Evidemment D (A−1 ) = Im A. Dans la suite nous


noterons par GL(E) l’ensemble des éléments inversibles de B(E). L’ensemble GL(E)
est un ensemble ouvert dans B(E) ([Is’81, Theorem 4.1.13, pag. 145]).
Soit A : D(A) ⊂ E −→ E un opérateur linéaire. Pour tout n ∈ N, nous définissons:

An : D(An ) −→ E

par:
 
A0 = I , A1 = A , ..., An = A An−1 ,

5
6 CHAPITRE 1. INTRODUCTION

où:
n o
D(An ) = x ∈ D(An−1 ) An−1 x ∈ D(A)

quel que soit n ∈ N.

Lemme 1.1.1 Soit f : [a, b] → E une fonction continue. Alors:


a+t
1 Z
lim f (s) ds = f (a) .
t→0 t
a

Preuve Nous avons:


a+t a+t
Z Z
1 1
f (s) ds − f (a) = [f (s) − f (a)] ds ≤ sup kf (s) − f (a)k .
t t

s∈[a,a+t]
a a

L’égalité de l’énoncé résulte de la continuité de l’application f .

Lemme 1.1.2 Si A ∈ B(E) et kAk < 1, alors I − A ∈ GL(E) et:



X
(I − A)−1 = An .
n=0

Preuve Soit Yn = I + A + A2 + . . . + An . Alors:

kAkn+1
kYn+p − Yn k ≤ −→ 0 pour n → ∞.
1 − kAk

Par conséquent, (Yn )n∈N est une suite Cauchy. Mais B(E) est une algèbre de
Banach. La suite (Yn )n∈N est donc convergente. Notons Y ∈ B(E) sa limite.
De l’égalité (I − A)Yn = I − An+1 , il résulte que limn→∞ (I − A)Yn = I, d’où
(I − A)Y = I.
Nous obtenons Y (I − A) = I de façon analogue.

Finalement, on voit que I − A ∈ GL(E) et que (I − A)−1 =
P
An .
n=0


P
Remarque 1.1.3 Si kI − Ak < 1, alors A ∈ GL(E) et A−1 = (I − A)n .
n=0

Définition 1.1.4 L’ensemble:


n o
ρ(A) = λ ∈ C (λI − A)−1 est inversible dans ∈ B(E)

s’appelle l’ensemble résolvant de A ∈ B(E).

Proposition 1.1.5 Soit A ∈ B(E). Alors ρ(A) est un ensemble ouvert.


1.1. PRÉLIMINAIRES 7

Preuve Définissons l’application:

φ : C −→ B(E)

par:
φ(λ) = λI − A .

Evidemment, φ est continue. Si λ ∈ ρ(A), alors λI − A ∈ GL(E) et par suite


ρ(A) = φ−1 (GL(E)). Comme GL(E) est un ensemble ouvert, on voit que ρ(A) est
ouvert.

Définition 1.1.6 L’application:

R( . ; A) : ρ(A) −→ B(E)

R(λ; A) = (λI − A)−1

s’appelle la résolvante de A.

Proposition 1.1.7 La résolvante d’un opérateur linéaire A ∈ B(E), a les pro-


priétés suivantes:
i) si λ, µ ∈ ρ(A), alors:

R(λ; A) − R(µ; A) = (µ − λ)R(λ; A)R(µ; A) ;

ii) R( . ; A) est une application analytique sur ρ(A);


iii) si λ ∈ C et |λ| > kAk, alors λ ∈ ρ(A) et nous avons:

X An
R(λ; A) = n+1
;
n=0 λ

iv) Nous avons:


dn
n
R(λ; A) = (−1)n n!R(λ; A)n+1


quels que soient n ∈ N et λ ∈ ρ(A).

Preuve i) Nous avons successivement:

R(λ; A) − R(µ; A) = (λI − A)−1 − (µI − A)−1 =


= (λI − A)−1 (µI − A − λI + A) (µI − A)−1 =
= (µ − λ) R(λ; A)R(µ; A)
8 CHAPITRE 1. INTRODUCTION

quels que soient λ, µ ∈ ρ(A).


 
ii) Soit λ0 ∈ ρ(A). Notons D λ0 ; kR(λ10 ;A)k le disque ouvert de centre λ0 et de
 
1
rayon kR(λ;A)k
. Alors, pour λ ∈ D λ0 ; kR(λ10 ;A)k , nous avons:

λI − A = [I − (λ0 − λ)R(λ0 ; A)] (λ0 I − A) .

Mais:
k(λ0 − λ)R(λ0 ; A)k = |λ0 − λ|kR(λ0 ; A)k < 1 .

Compte tenu du lemme 1.1.2, il résulte que:

I − (λ0 − λ)R(λ0 ; A) ∈ GL(E) ,

d’où λI − A ∈ GL(E) et:

(λI − A)−1 = (λ0 I − A)−1 [I − (λ0 − λ)R(λ0 ; A)]−1 =



X
= R(λ0 ; A) (λ0 − λ)n R(λ0 ; A)n =
n=0

X
= (−1)n (λ − λ0 )n R(λ0 ; A)n+1 .
n=0

Donc R( . ; A) est analytique sur ρ(A).


iii) Soit λ ∈ C tel que |λ| > kAk. Alors kλ−1 Ak < 1, d’où I − λ−1 A ∈ GL(E). De
plus:
∞  ∞

−1
−1 X −1
n X An
I −λ A = λ A = n
.
n=0 n=0 λ

Par conséquent:

−1 −1

−1
−1 X An
R(λ; A) = (λI − A) =λ I −λ A = n+1
.
n=0 λ

L’assertion (iv) s’obtient par récurrence. Pour n = 1, nous avons:


d d
R(λ; A) = (λI − A)−1 = −(λI − A)−2 = R(λ; A)2 .
dλ dλ
Supposons que pour k ∈ N, on ait:

dk
k
R(λ; A) = (−1)k k!R(λ; A)k+1 .

Montrons que:

dk+1
R(λ; A) = (−1)k+1 (k + 1)!R(λ; A)k+2 .
dλk+1
1.1. PRÉLIMINAIRES 9

Nous avons:
!
dk+1 d dk
R(λ; A) = R(λ; A) =
dλk+1 dλ dλk
d h i
= (−1)k k!(λI − A)−k−1 =

= (−1)k k!(−k − 1)(λI − A)−k−2 = (−1)k+1 (k + 1)!R(λ; A)k+2

et par conséquent:
dn
R(λ; A) = (−1)n n!R(λ; A)n+1 , (∀)n ∈ N∗ .
dλn

Remarque 1.1.8 Compte tenu de la proposition 1.1.7 (iii), il résulte que:

{λ ∈ C ||λ| > kAk } ⊂ ρ(A).

Définition 1.1.9 L’ensemble σ(A) = C − ρ(A) s’appelle le spectre de A ∈ B(E).

Proposition 1.1.10 Soit A ∈ B(E). Alors:


i) σ(A) 6= ∅;
ii) σ(A) est un ensemble compact.

Preuve i) Supposons que σ(A) = ∅. Alors ρ(A) = C. Par conséquent, l’application


λ 7−→ (λI − A)−1 est définie sur C. De plus, pour |λ| > kAk, nous avons:

X An
R(λ; A) = n+1
, (∀)λ ∈ ρ(A).
n=0 λ

Il s’ensuit que:
lim R(λ; A) = 0.
|λ|→∞

Donc il existe M > 0 tel que kR(λ; A)k < M, (∀)λ ∈ C. Le théorème de Liouville
([DS’67, pag. 231]) implique que R(.; A) est constante sur C et que cette constante
ne peut être que 0. Donc (λI − A)−1 = 0 pour tout λ ∈ C, ce qui est absurde.
Par conséquent σ(A) 6= ∅.
ii) Compte tenu de la proposition 1.1.7 (iii), nous obtenons que:

σ(A) ⊂ {λ ∈ C ||λ| ≤ kAk } .

L’ensemble σ(A) est donc borné. Comme nous avons vu que σ(A) est un ensemble
fermé, il est donc compact.
10 CHAPITRE 1. INTRODUCTION

Définition 1.1.11 Pour un opérateur linéaire A ∈ B(E), le nombre

r(A) = sup |λ|


λ∈σ(A)

s’appelle le rayon spectral de A.

Remarque 1.1.12 Evidemment, pour un opérateur A ∈ B(E), σ(A) est contenu


dans l’intérieur du cercle de centre O et de rayon r(A). De plus, on peut montrer
que
1
r(A) = lim kAn k n
n→∞

et on voit que r(A) ≤ kAk.

Par la suite, nous présenterons quelques problèmes concernant la théorie spec-


trale pour un opérateur linéaire fermé A : D(A) ⊂ E −→ E.

Définition 1.1.13 L’ensemble:

ρ(A) = {λ ∈ C |λI − A : D(A) −→ E est opérateur bijectif }

s’appele l’ensemble résolvant de A.

Remarque 1.1.14 Il résulte du théorème du graphe fermé ([DS’67, Theorem


II.2.4, pag. 57]) que l’opérateur:

(λI − A)−1 : E −→ E

est continu dans E.

Définition 1.1.15 L’application:

R( . ; A) : ρ(A) −→ B(E)

R(λ; A) = (λI − A)−1 , (∀)λ ∈ ρ(A)

s’appelle la résolvante de A.

Proposition 1.1.16 Soit A : D(A) ⊂ E −→ E, un opérateur linéaire fermé.


Alors:
i) ρ(A) est un ensemble ouvert et R( . ; A) est une application analytique sur ρ(A);
ii) si λ, µ ∈ ρ(A), alors:

R(λ; A) − R(µ; A) = (µ − λ)R(λ; A)R(µ; A) ;


1.1. PRÉLIMINAIRES 11

iii) Nous avons:


dn
R(λ; A) = (−1)n n!R(λ; A)n+1
dλn
quels que soient n ∈ N et λ ∈ ρ(A).

Preuve Elle est analogue à celle de la proposition 1.1.7.

Définition 1.1.17 L’ensemble σ(A) = C − ρ(A) s’appelle le spectre de A.

Remarque 1.1.18 σ(A) est un ensemble fermé.

Remarque 1.1.19 Il existe des opérateurs fermés qui ont un spectre non borné.

Exemple 1.1.20 Prenons E = C[0,1] et considérons l’opérateur:

1
D : C[0,1] −→ E

défini par:

Df = f

Dans ce cas, nous avons σ(D) = C.

Définition 1.1.21 Soit D ⊂ C un ensemble ouvert. Une application analytique:

D ∋ λ 7−→ Rλ ∈ B(E)

qui vérifie la propriété:

Rλ − Rµ = (µ − λ)Rλ Rµ , (∀)λ, µ ∈ D,

s’appelle une pseudo-résolvante.

Théorème 1.1.22 Soit D ∋ λ 7−→ Rλ ∈ B(E) une pseudo-résolvante. Alors:


i) Rλ Rµ = Rµ Rλ , (∀)λ, µ ∈ D;
ii) KerRλ et ImRλ ne dépendent pas de λ ∈ D;
iii) Rλ est la résolvante d’un opérateur linéaire A fermé et défini sur un sous
espace dense si et seulement si KerRλ = {0} et ImRλ = E.
12 CHAPITRE 1. INTRODUCTION

Preuve i) Soient λ, µ ∈ D. Alors, nous avons:

Rλ − Rµ = (µ − λ)Rλ Rµ

et:
Rµ − Rλ = (λ − µ)Rµ Rλ ,
d’où:
0 = (µ − λ)Rλ Rµ + (λ − µ)Rµ Rλ .
Par suite, on a Rλ Rµ = Rµ Rλ .
ii) Soient µ ∈ D et x ∈ Ker Rµ . Alors Rµ x = 0. Si λ ∈ D, on a:

Rλ x − Rµ x = (µ − λ)Rλ Rµ x .

Donc Rλ x = 0. Par conséquent x ∈ Ker Rλ . Il s’ensuit que Ker Rλ ne dépend pas


de λ ∈ D.
Soient µ ∈ D et y ∈ Im Rµ . Alors il existe x ∈ E tel que Rµ x = y. Si λ ∈ D,
nous avons:
Rλ x − Rµ x = (µ − λ)Rλ Rµ x .
Donc:
Rλ x − y = (µ − λ)Rλ y ,
ou bien:
y = Rλ (x + (λ − µ)y) .
Donc il existe u = x + (λ − µ)y ∈ E tel que y = Rλ u. Par conséquent y ∈ Im Rλ .
Il s’ensuit que Im Rλ ne dépend pas de λ ∈ D.
iii) =⇒ Si Rλ est une résolvante pour un opérateur linéaire A fermé et défini sur
un sous espace dense, alors Rλ est une application bijective, d’où Ker Rλ = {0}
 
et Rλ = (λI − A)−1 . Par suite, Rλ −1 = λI − A et D Rλ −1 = D(A) = E. Par
 
conséquent Im Rλ = D Rλ −1 = E.
⇐= Soient D ∋ λ 7−→ Rλ ∈ B(E) une pseudo-résolvante et λ ∈ D tel que Ker Rλ =
{0}. Alors pour y ∈ Im Rλ , il existe un seul xλ ∈ E tel que y = Rλ xλ . Mais pour
λ, µ ∈ D, on a:
Rλ y − Rµ y = (µ − λ)Rλ Rµ y .
D’autre part:

Rλ y − Rµ y = Rλ Rµ xµ − Rµ Rλ xλ =
= Rλ Rµ xµ − Rλ Rµ xλ = Rλ Rµ (xµ − xλ ) .
1.2. LES OPÉRATEURS DISSIPATIFS 13

Donc xµ − xλ = (µ − λ)y, d’où λy − xλ = µy − xµ . Par conséquent, l’opérateur:

A : Im Rλ −→ E

Ay = λy − xλ = λy − Rλ −1 y

est correctement défini (valeur indépendante de λ). De même D(A) = Im Rλ = E.


Puis que Rλ ∈ B(E), il résulte du théorème du graphe fermé ([DS’67, Theorem
II.2.4, pag. 57]) que Rλ−1 est un opérateur fermé. Donc A = λI − Rλ −1 est un
opérateur fermé. De plus, on a:

Rλ −1 y = xλ = λy − Ay = (λI − A)y .

Par conséquent Rλ = (λI − A)−1 est la résolvante de A.

1.2 Les opérateurs dissipatifs


Dans la suite, nous notons par E ∗ l’espace dual du E et par k . k∗ sa norme.
Pour tout x ∈ E, nous désignerons par J (x) l’ensemble:
n o
x∗ ∈ E ∗ hx, x∗ i = kxk2 = kx∗ k2∗

.

Définition 1.2.1 On dit que l’opérateur linéaire A : D(A) ⊂ E −→ E est dissi-


patif si pour tout x ∈ D(A), il existe x∗ ∈ J (x) tel que RehAx, x∗ i ≤ 0.

Dans la proposition suivante nous présentons une caractérisation très utile pour
les opérateurs dissipatifs.

Proposition 1.2.2 Un opérateur linéaire A : D(A) ⊂ E −→ E est dissipatif si et


seulement si pour tout α > 0 on a:

k(αI − A)xk ≥ αkxk , (∀)x ∈ D(A).

Preuve =⇒ Supposons que A : D(A) ⊂ E −→ E est un opérateur dissipatif. Pour


tout x ∈ D(A), il existe x∗ ∈ J (x) tel que RehAx, x∗ i ≤ 0. Si α > 0, alors nous
14 CHAPITRE 1. INTRODUCTION

avons:

k(αI − A)xk kxk = k(αI − A)xk kx∗ k∗ ≥


≥ |h(αI − A)x, x∗ i| ≥ Reh(αI − A)x, x∗ i =
= Rehαx, x∗ i − RehAx, x∗ i ≥ αkxk2 ,

d’où il résulte l’inégalité de l’énoncé.


⇐= Soit A : D(A) ⊂ E −→ E tel que pour tout α > 0 et x ∈ D(A) on ait:

k(αI − A)xk ≥ αkxk .

Soit yα∗ ∈ J ((αI − A)x). On a donc:

h(αI − A)x, yα∗ i = k(αI − A)xk2 = kyα∗ k2∗ ,

d’où:
kyα∗ k∗ = k(αI − A)xk ≥ αkxk .

Nous définissons:
yα∗
zα∗ =
kyα∗ k∗
et désignons par B1 (E ∗) la boule unité de E ∗ et par ∂B1 (E ∗ ) sa frontière. Il est
évident que zα∗ ∈ ∂B1 (E ∗ ). De plus:
1
αkxk ≤ k(αI − A)xk = ∗
h(αI − A)x, yα∗ i =
kyα k∗
= h(αI − A)x, zα∗ i

et par conséquent:

αkxk ≤ Reh(αI − A)x, zα∗ i = Rehαx, zα∗ i − RehAx, zα∗ i ≤


≤ α |hx, zα∗ i| − RehAx, zα∗ i ≤ αkxk kzα∗ k∗ − RehAx, zα∗ i =
= αkxk − RehAx, zα∗ i .

Il s’ensuit que:
RehAx, zα∗ i ≤ 0 ,

d’où:
−RehAx, zα∗ i ≤ |hAx, zα∗ i| ≤ kAxk kzα∗ k∗ = kAxk

et par conséquent:
αkxk ≤ αRehx, zα∗ i + kAxk .
1.2. LES OPÉRATEURS DISSIPATIFS 15

Donc:
1
Rehx, zα∗ i ≥ kxk −kAxk .
α
D’autre part, en appliquant le théorème d’Alaoglu ([DS’67, Theorem V.4.2, pag.
424]), on voit que la boule unité B1 (E ∗ ) est faiblement compacte. Par conséquent,
 
il existe une sous suite zβ∗ ⊂ (zα∗ )α>0 et il existe z ∗ ∈ B1 (E ∗ ) tel que:
β>0

zβ∗ −→ z ∗ si β → ∞

pour la topologie faible. Comme on a

RehAx, zβ∗ i ≤ 0

et
1
Rehx, zβ∗ i ≥ kxk − kAxk ,
β
on obtient par passage à limite en β → ∞:

RehAx, z ∗ i ≤ 0

et:
Rehx, z ∗ i ≥ kxk .

Mais comme:
Rehx, z ∗ i ≤ |hx, z ∗ i| ≤ kxkkz ∗ k∗ ≤ kxk ,

il s’ensuit que:
hx, z ∗ i = kxk .

Si nous prenons x∗ = kxkz ∗ , il vient:

hx, x∗ i = hx, kxkz ∗ i = kxkhx, z ∗ i = kxk2 .

Il en résulte que x∗ ∈ J (x). Finalement, on voit que RehAx, x∗ i ≤ 0, d’où l’on


tire que l’opérateur A est dissipatif.

Proposition 1.2.3 Soit A : D(A) ⊂ E −→ E un opérateur dissipatif. S’il existe


α0 > 0 tel que Im (α0 I − A) = E, alors pour tout α > 0 on a Im (αI − A) = E.

Preuve Soient A : D(A) ⊂ E −→ E un opérateur dissipatif et α0 > 0 tel que


Im (α0 I − A) = E. Compte tenu de la proposition 1.2.2, on voit que:

k(α0 I − A)xk ≥ α0 kxk , (∀)x ∈ D(A)


16 CHAPITRE 1. INTRODUCTION

et comme Im (α0 I − A) = E, il en résulte que α0 I − A ∈ GL(E) et α0 appartient


donc bien à ρ(A). Soit (xn )n∈N ⊂ D(A) tel que xn −→ x et Axn −→ y si n → ∞.
Il est clair que:
(α0 I − A)xn −→ α0 x − y si n → ∞
et par conséquent:

xn = R(α0 ; A)(α0 I − A)xn −→ R(α0 ; A)(α0 x − y) si n → ∞.

Par suite, nous obtenons:

R(α0 ; A)(α0 x − y) = x .

Comme Im R(α0 ; A) ⊂ D(A), on voit que x ∈ D(A). De plus:

(α0 I − A)x = α0 x − y ,

d’où il résulte que Ax = y. Par conséquent, A est un opérateur fermé.


Nous désignerons par A l’ensemble:

{α ∈]0, ∞) |Im(αI − A) = E } .

Soit α ∈ A. Comme A est un opérateur dissipatif, on voit que:

k(αI − A)xk ≥ αkxk , (∀)x ∈ D(A),

d’où il résulte que α ∈ ρ(A). Puisque ρ(A) est un ensemble ouvert, il existe un
voisinage V de α contenu dans ρ(A). Comme V∩]0, ∞) ⊂ A, on voit que A est un
ensemble ouvert.
Soit (αn )n∈N ⊂ A tel que αn −→ α si n → ∞. Comme Im (αn I − A) = E,
(∀)n ∈ N, on observe que pour tout y ∈ E, il existe xn ∈ D(A) tel que:

(αn I − A)xn = y , (∀)n ∈ N,

et par suite, il existe C > 0 tel que:


1
kxn k ≤ kyk ≤ C , (∀)n ∈ N.
αn
Par conséquent:

αn kxn − xm k ≤ k(αm I − A)(xn − xm )k =


= k(αm I − A)xn − (αm I − A)xm k = kαm xn − Axn − yk =
= kαm xn − αn xn + αn xn − Axn − yk =
= k(αm − αn )xn + y − yk = |αm − αn |kxn k ≤ C|αm − αn | ,
1.3. SEMI-GROUPES UNIFORMÉMENT CONTINUS 17

d’où il résulte que (xn )n∈N est une suite de Cauchy. Puisque E est un espace de
Banach, il s’ensuit que (xn )n∈N converge vers un point x ∈ E. Alors, on en déduit
que:
Axn −→ αx − y si n → ∞

et comme A est un opérateur fermé, on obtient x ∈ D(A) et αx − Ax = y. Par


suite, Im (αI − A) = E et α ∈ A. Donc A est fermé dans ]0, ∞) et comme il
existe α0 ∈ A, nous déduisons que A =]0, ∞).

1.3 Semi-groupes uniformément continus


Dans la suite nous présenterons quelques problèmes concernant les semi-
groupes uniformément continus d’opérateurs linéaires bornés sur un espace de Ba-
nach E.

Définition 1.3.1 On appelle semi-groupe uniformément continu d’opérateurs li-


néaires bornés sur E une famille {T (t)}t≥0 ⊂ B(E) vérifiant les propriétés sui-
vantes:
i) T (0) = I;
ii) T (t + s) = T (t)T (s) , (∀)t, s ≥ 0;
iii) limtց0 kT (t) − Ik = 0.

Définition 1.3.2 On appelle générateur infinitésimal du semi-groupe uniformément


continu {T (t)}t≥0 l’opérateur linéaire:

A : E −→ E ,
T (t) − I
A = lim .
tց0 t
n o
Lemme 1.3.3 Soit A ∈ B(E). Alors etA est un semi-groupe uniformément
t≥0
continu d’opérateurs linéaires bornés sur E dont le générateur infinitésimal est A.

Preuve Soit A ∈ B(E) et [0, ∞) ∋ t 7−→ T (t) ∈ B(E) une application définie par:

X tk Ak
T (t) = etA = .
k=0 k!
18 CHAPITRE 1. INTRODUCTION

La série du membre de droite de l’égalité est convergente pour la topologie de la


norme de B(E). De plus, il est évident que T (0) = I et T (t + s) = T (t)T (s) quels
que soient t, s ≥ 0.
Compte tenu de l’inégalité:

kT (t) − Ik ≤ etkAk − 1 , (∀)t ≥ 0,

il résulte:
lim kT (t) − Ik = 0 .
tց0

Donc la famille {T (t)}t≥0 ⊂ B(E) est un semi-groupe uniformément continu.


D’autre part, puisque:
!
T (t) − I 
1 tA  1 X ∞ k k


t A

− A = e − I − tA = −I − tA =
t t t
k=0 k!
∞ k k
! ∞ k
1
X t A
1X t kAkk
= I + tA + − I − tA ≤ =
t
k=2 k! t k=2 k!

∞ k
!
1 X t kAkk 1 
= 1 + tkAk + − 1 − tkAk = etkAk − 1 − tkAk =
t k=2 k! t
etkAk − 1
= kAk − kAk −→ 0 si t ց 0,
tkAk

nous obtenons:
T (t) − I
lim =A .
tց0 t
Le semi-groupe {T (t)}t≥0 admet donc pour générateur infinitésimal l’opérateur
A.

Lemme 1.3.4 Etant donné un opérateur A ∈ B(E), il existe un unique semi-


groupe uniformément continu {T (t)}t≥0 tel que:

T (t) = etA , (∀)t ≥ 0.

Preuve Si {S(t)}t≥0 est un autre semi-groupe uniformément continu engendré par


A, nous avons:
T (t) − I
lim =A
tց0 t
et:
S(t) − I
lim =A .
tց0 t
1.3. SEMI-GROUPES UNIFORMÉMENT CONTINUS 19

Par conséquent:
T (t) − S(t)

lim =0 .
tց0 t

Pour a ∈]0, ∞), nous considérons l’intervalle Ia = [0, a[. Comme {T (t)}t≥0 et
{S(t)}t≥0 sont des semi-groupes uniformément continus, nous voyons que les ap-
plications:
t 7−→ kT (t)k

et:
t 7−→ kS(t)k

sont continues. Il existe ca ∈ [1, ∞) tel que:

sup {kT (t)k, kS(t)k} ≤ ca .


t∈Ia

Si ε > 0, il existe t0 ∈ Ia , t0 > 0, tel que:



T (t) − S(t) ε



≤ , (∀)t ∈]0, t0 [.
t ac2a
t
Soit t ∈ Ia arbitrairement fixé et n ∈ N tel que n
∈]0, t0 [. Alors:
     
t t
T (t) − S(t) = T n − S n=
   
n n
  
t t t t
= T n S 0 − T (n − 1) S 1 +

n n
   
n n
  
t t t t
+ T (n − 1) S 1 − T (n − 2) S 2 +

n  n 
n  n
t t t t
+ T (n − 2) S 2 −···−T 0 S n =
n n n n
n−1
X        
t t t t
= T (n − k) S k − T (n − k − 1) S (k + 1) =
k=0 n n n n
n−1        
X t t t t
= T (n − k − 1) T −S S k
k=0 n n n n

quel que soit t ∈ Ia .


De l’inégalité:    
T t − S t
n n ε

t
≤ ,

n

ac2a
nous obtenons:    
t t ε t
T − S ≤

n
n ac2a n
20 CHAPITRE 1. INTRODUCTION

et par suite:
n−1
X ε t
kT (t) − S(t)k ≤ ca ca < ε , (∀)t ∈ Ia .
k=0 ac2a n

Puisque ε > 0 est arbitraire, il en résulte que T (t) = S(t), pour tout t ∈ Ia . Mais,
comme a ∈]0, ∞) est aussi arbitraire, il s’ensuit que T (t) = S(t), (∀)t ∈ [0, ∞).
Présentons maintenant la condition nécessaire et suffisante pour qu’un opérateur
soit le générateur infinitésimal d’un semi-groupe uniformément continu.

Théorème 1.3.5 Un opérateur A : E −→ E est le générateur infinitésimal d’un


semi-groupe uniformément continu si et seulement si A est un opérateur linéaire
borné.

Preuve =⇒ Soit A : E −→ E le générateur infinitésimal d’un semi-groupe uni-


formément continu {T (t)}t≥0 ⊂ B(E). Alors:

lim kT (t) − Ik = 0 .
tց0

Rt
L’application [0, ∞) ∋ t 7→ T (t) ∈ B(E) est continue et par suite T (s) ds ∈ B(E).
0
Avec le lemme 1.1.1, on voit que:

Zt
1
lim T (s) ds = T (0) = I .
tց0 t
0

Il existe donc τ > 0 tel que:




1
T (t) dt − I <1 .
τ


0

1 Rτ
Compte tenu de la remarque 1.1.3, l’élément τ
T (t)dt est inversible, d’où il s’ensuit
0

que T (t) dt est inversible. Nous avons:
0

τ τ
 

T (h) − I Z 1 Z
T (t) dt = T (t + h) dt − T (t) dt =
h h
0 0 0
τZ+h Zh
1 1
= T (u) du − T (u) du .
h τ
h
0
1.3. SEMI-GROUPES UNIFORMÉMENT CONTINUS 21

Avec le lemme 1.1.1, nous obtenons:



T (h) − I
lim T (t) dt =
hց0 h
0

τZ+h 0+h

Z
1 1
= lim  T (u) du − T (u) du =
hց0 h h
τ 0
= T (τ ) − T (0) = T (τ ) − I ,

d’où:  −1

T (h) − I
lim = [T (τ ) − I]  T (t) dt .
hց0 h
0

Par conséquent, le générateur infinitésimal du semi-groupe uniformément continue


{T (t)}t≥0 est l’opérateur:
 −1

A = [T (τ ) − I]  T (t) dt ∈ B(E) .
0

⇐= Cette implication est évidente compte tenu du lemme 1.3.3 et du lemme 1.3.4.

Corollaire 1.3.6 Soient {T (t)}t≥0 un semi-groupe uniformément continu et A


son générateur infinitésimal. Alors:
i) il existe ω ≥ 0 tel que kT (t)k ≤ eωt , (∀)t ≥ 0;
ii) l’application [0, ∞) ∋ t 7−→ T (t) ∈ B(E) est différentiable pour la topologie de
la norme et:
dT (t)
= AT (t) = T (t)A , (∀)t ≥ 0.
dt

Preuve i) Nous avons:



kT (t)k = etA ≤ etkAk , (∀)t ≥ 0.

Pour ω = kAk, nous obtenons l’inégalité:

kT (t)k ≤ eωt , (∀)t ≥ 0.

L’assertion (ii) provient des égalités suivantes:

T (t) − I T (t) − T (0)


A = lim = lim ,
tց0 t tց0 t−0
22 CHAPITRE 1. INTRODUCTION

nous en déduisons que l’application considérée est dérivable au point t = 0.


Soient t > 0 et h > 0. Alors:

T (t + h) − T (t)

− AT (t) ≤
h

T (h) − I T (h) − I
− A etkAk

≤ − A kT (t)k ≤ ,
h h

d’où:
T (t + h) − T (t)

lim − AT (t) =0 .
hց0 h
Par conséquent, l’application considérée dans l’énoncé est dérivable à droite et on
a:
d+ T (t)
= AT (t) , (∀)t > 0.
dt
Soient t > 0 et h < 0 tel que t + h > 0. Alors:

T (t + h) − T (t)

− AT (t) ≤
h

I − T (−h)

≤ − AT (−h) kT (t + h)k ≤
h

T (−h) − I
− AT (−h) e(t+h)kAk ,


−h

d’où il vient:
T (t + h) − T (t)
lim = AT (t) .
hր0 h
Par conséquent l’application considérée dans l’énoncé est dérivable à gauche et
nous avons:
d− T (t)
= AT (t) , (∀)t > 0.
dt
Finalement on voit que l’application considérée dans l’énoncé est dérivable sur
[0, ∞) et nous avons:
dT (t)
= AT (t) , (∀)t ≥ 0.
dt
On vérifie que AT (t) = T (t)A , (∀)t ≥ 0.
Maintenant abordons quelques problèmes de théorie spectrale pour un semi-
groupe uniformément continu {T (t)}t≥0 ayant pour le générateur infinitésimal
l’opérateur A ∈ B(E).

Théorème 1.3.7 Soient {T (t)}t≥0 un semi-groupe uniformément continu et A


son générateur infinitésimal. Si λ ∈ C tel que Reλ > kAk, alors l’application:

Rλ : E −→ E ,
1.3. SEMI-GROUPES UNIFORMÉMENT CONTINUS 23

Z∞
Rλ x = e−λt T (t)x dt
0

définit un opérateur linéaire borné, λ ∈ ρ(A) et Rλ x = R(λ; A)x , pour tout x ∈ E.

Preuve Soit λ ∈ C avec Reλ > kAk. Avec le corollaire 1.3.6 (i), on voit que:

kT (t)k ≤ ekAkt , (∀)t ≥ 0.

De même, nous avons:



−λt
≤ e−(Reλ−kAk)t kxk ,

e T (t)x (∀)x ∈ E,

et:
Z∞
1
e−(Reλ−kAk)t dt = .
Reλ − kAk
0
L’application Rλ est donc bornée et il est clair que Rλ est linéaire.
Pour x ∈ E, nous avons:
Z∞ Z∞
−λt d
Rλ Ax = e T (t)Ax dt = e−λt T (t)x dt =
dt
0 0
Z∞
= −x + λ e−λt T (t)x dt = −x + λRλ x ,
0

d’où x = Rλ (λI − A)x, pour tout x ∈ E. Par conséquent Rλ (λI − A) = I.


De même, nous avons:
Z∞ Z∞
−λt
ARλ x = A e T (t)x dt = e−λt AT (t)x dt =
0 0
Z∞
= e−λt T (t)Ax dt = Rλ Ax , (∀)x ∈ E.
0

Par suite, on a ARλ x = Rλ Ax = −x + λRλ x, pour tout x ∈ E. Il en résulte que


(λI − A)Rλ = I.
Par conséquent λ ∈ ρ(A) et Rλ = R(λ; A).

Définition 1.3.8 L’opérateur Rλ : E −→ E défini par:


Z∞
Rλ x = e−λt T (t)x dt , λ ∈ C avec Reλ > kAk,
0

s’appelle la transformée de Laplace du semi-groupe uniformément continu {T (t)}t≥0


ayant pour générateur infinitésimal l’opérateur A.
24 CHAPITRE 1. INTRODUCTION

Remarque 1.3.9 On a:

{λ ∈ C |Reλ > kAk } ⊂ ρ(A)

et:
σ(A) ⊂ {λ ∈ C |Reλ ≤ kAk } .
De même, nous obtenons:
1
kR(λ; A)k ≤
Reλ − kAk
pour tout λ ∈ C avec Reλ > kAk.

Pour obtenir des représentations de type Riesz-Dunford et de type Bromwich,


on a besoin d’une classe spéciale de contours de Jordan.

Définition 1.3.10 Un contour de Jordan lisse et fermé qui entoure σ(A), s’appelle
un contour de Jordan A-spectral s’il est homotope avec un cercle Cr de centre O
et de rayon r > kAk.

Théorème 1.3.11 (Riesz-Dunford) Soit A le générateur infinitésimal d’un semi-


groupe uniformément continu {T (t)}t≥0 . Si ΓA est un contour de Jordan A-
spectral, alors nous avons:
Z
1
T (t) = eλt R(λ; A) dλ , (∀)t ≥ 0.
2πi
ΓA

Preuve Soit ΓA un contour de Jordan A-spectral. Alors ΓA est homotope avec


un cercle Cr de centre O et de rayon r > kAk. Par conséquent, on a:
Z Z
1 λt 1
e R(λ; A) dλ = eλt R(λ; A) dλ , (∀)t ≥ 0.
2πi 2πi
ΓA Cr

Compt tenu de la proposition 1.1.7 (iii), on voit que:



X An
R(λ; A) = n+1
,
n=0 λ

uniformément par rapport à λ sur les sous-ensembles compacts de {λ ∈ C| |λ| >


kAk}, particulièrement sur le cercle Cr . On a:

An
Z Z
1 1 X
eλt R(λ; A) dλ = eλt n+1
dλ =
2πi 2πi n=0 λ
Cr Cr
∞ Z λt
X 1 e
= dλAn .
n=0 2πi λn+1
Cr
1.3. SEMI-GROUPES UNIFORMÉMENT CONTINUS 25

Appliquons la formule de Cauchy ([DS’67, pag. 228]) avec la fonction f (λ) = eλt ,
nous obtenons:
eλt tn
Z
1
dλ = , (∀)n ∈ N .
2πi λn+1 n!
Cr

Par conséquent:

tn An
Z
1 X
eλt R(λ; A) dλ = = etA = T (t) , (∀)t ≥ 0.
2πi n=0 n!
ΓA

Théorème 1.3.12 (Bromwich) Soient {T (t)}t≥0 un semi-groupe uniformément


continu et A son générateur infinitésimal. Si a > kAk, alors nous avons:
a+i∞
Z
1
T (t) = ezt R(z; A) dz
2πi
a−i∞

et l’intégrale est uniformément convergente par rapport à t sur les intervalles com-
pacts de ]0, ∞).

Preuve Soit a > kAk, pour R > 2a nous considérons le contour de Jordan lisse
et fermé

ΓR = ΓR ∪ Γ”R

où

ΓR = {a + iτ |τ ∈ [−R, R]}

et   
π 3π
Γ”R = a + R(cos ϕ + i sin ϕ) ϕ
∈ , .
2 2

Remarquons que pour z ∈ ΓR on a:

|z| = |a + iτ | > a > kAk .

De même, si z ∈ Γ”R , alors nous avons:

|z| = |a + (cos ϕ + i sin ϕ)| = |a − [−R(cos ϕ + i sin ϕ)]| ≥


≥ ||a| − | − R(cos ϕ + i sin ϕ)|| = |a − R| = R − a > kAk .

Par conséquent, z ∈ ΓR implique z ∈ ρ(A). De plus, on voit que ΓR est homotope


au cercle C de centre O et de rayon R − a. Il s’ensuit donc que ΓR est un contour
de Jordan A-spectral et avec le théorème de Riesz-Dunford nous obtenons:
1 Z zt
T (t) = e R(z; A) dz , (∀)t ≥ 0,
2πi
ΓR
26 CHAPITRE 1. INTRODUCTION

pour tout R > 2a. Il en résulte:



T (t) = It (R) + It” (R) , (∀)t ≥ 0,

pour tout R > 2a, où nous avons noté


Z
′ 1
It (R) = ezt R(z; A) dz
2πi ′
ΓR

et Z
1
It” (R) = ezt R(z; A) dz .
2πi
Γ”R

Montrons que Z
1
lim ezt R(z; A) dz = 0 , (∀)t ≥ 0.
R→∞ 2πi
Γ”R

Compte tenu de la proposition 1.1.7 (iii), on voit que:



An X
R(z; A) = n+1
,
n=0 z

la série de la partie droite de l’égalité étant uniformément convergente par rapport


à z sur les sous-ensembles compacts de {z ∈ C| |z| > kAk}, particulièrement sur
Γ”R . Il s’ensuit que:
 

X  1
Z
ezt n 
I ” (R) = 
=
A dz 
n=0
 2πi z n+1
Γ”R
   

ezt  ezt
Z Z
 1  1 X  n
=  dz  I+  dz A , (∀)t ≥ 0,
 2πi z 
n=1 2πi
 z n+1 
Γ”R Γ”R

pour tout R > 2a. Notons


 
Z zt
 1 e 
At (R) =  dz 
I
 2πi z
Γ”R

et  
∞ 
ezt
Z
X 1  n
Bt (R) = 
 2πi n+1
dz 
A .
n=1 z
Γ”R

Pour l’intégrale At (R), avec la paramétrisation suivante


 
π 3π
z = a + R(cos ϕ + i sin ϕ) , ϕ∈ , ,
2 2
1.3. SEMI-GROUPES UNIFORMÉMENT CONTINUS 27

on obtient:
 3π

Z2
 1 et(a+R cos ϕ+i sin ϕ) 
At (R) = 
 2πi R(− sin ϕ + i cos ϕ) dϕ
I =
π
z
2
 3π

Z2
 R ta 1 
= 
 2π e etR cos ϕ eitR sin ϕ (cos ϕ + i sin ϕ) dϕ
I .
π
z
2

Il en résulte que:

Z2
R ta

tR cos ϕ itR sin ϕ 1
kAt (R)k ≤ e e e | cos ϕ + i sin ϕ| dϕ ≤
2π π
|z|
2

Z2
R ta 1
≤ e etR cos ϕ dϕ =
2π π R−a
2

Z2
1 R ta
= e etR cos ϕ dϕ
2π R − a π
2

parce que z ∈ Γ”R implique

|z| = |a + R(cos ϕ + i sin ϕ)| > R − a

donc
1 1
< .
|z| R−a
De l’inégalité R > 2a, on obtient 2R − 2a > R, d’où
R
<2 .
R−a
Par conséquent:

Z2
1
kAt (R)k ≤ eta etR cos ϕ dϕ , (∀)t ≥ 0,
π π
2

pour tout R > 2a. Soient 0 ≤ t1 < t2 et t ∈ [t1 , t2 ]. Pour tout R > 2a et tout
h i
π 3π
ϕ∈ ,
2 2
on a
etR cos ϕ ≤ 1 .

Comme
lim etR cos ϕ = 0 ,
R→∞
28 CHAPITRE 1. INTRODUCTION

avec le théorème de la convergence bornée de Lebesgue il résulte que



Z2
lim etR cos ϕ dϕ = 0
R→∞
π
2

et par conséquent
lim At (R) = 0
R→∞

uniformément par rapport à t ∈ [t1 , t2 ].


Soit maintenant l’intégrale
 
∞  1
Z zt
X e  n
Bt (R) =  dz A .
n=1
 2πi z n+1 
Γ”R

Pour tout t ∈ [t1 , t2 ] et tout R > 2a on a:


 
π 3π
etR cos ϕ ≤ 1 , (∀)ϕ ∈ , .
2 2
On voit que:


Z zt Z2
e Reta R
dz ≤ n+1 etR cos ϕ dϕ ≤ πeta .

” z n+1 (R − a) π
(R − a)n+1
ΓR 2

Puisque R > 2a > a + kAk, il vient:



!n
∞ Z ∞
kAkn X ezt eta R X kAk
kBt (R)k ≤ dz ≤
n=1 2π

” z n+1 2 R − a n=1 R − a
ΓR

et comme
kAk
<1 ,
R−a
il en résulte que:
kAk R 1
kBt (R)k ≤ eta ,
2 R − a R − a − kAk
quel que soit R > 2a. Donc

lim Bt (R) = 0 ,
R→∞

uniformément par rapport à t ∈ [t1 , t2 ]. Il s’ensuit donc que

lim It” (R) = 0 ,


R→∞
1.3. SEMI-GROUPES UNIFORMÉMENT CONTINUS 29

uniformément par rapport à t ∈ [t1 , t2 ].


Par conséquent:
ReZλ+i∞
1 Z zt 1
T (t) = lim e R(z; A) dz = ezt R(z; A) dz ,
R→∞ 2πi 2πi
” ΓR Re λ−i∞

uniformément par rapport à t sur les intervalles compacts de ]0, ∞).


Nous finissons cette section avec le théorème spectral pour les semi-groupes
uniformément continus.

Théorème 1.3.13 (spectral mapping) Soit A le générateur infinitésimal du


semi-groupe uniformément continu {T (t)}t≥0 . Alors:

etσ(A) = σ (T (t)) , (∀)t ≥ 0.

Preuve Montrons que etσ(A) ⊂ σ (T (t)) , (∀)t ≥ 0.


Soit ξ ∈ σ(A). Pour λ ∈ ρ(A), l’application:

eξt − eλt
gξ (λ) =
ξ−λ

est analytique dans un voisinage de σ(A). Compte tenu du théorème 1.3.11, on


voit que:
eξt I − eAt = (ξI − A)gξ (A) .
h i−1
Si eξt ∈ ρ (T (t)), alors il existe Q = eξt I − T (t) ∈ B(E). Par conséquent:

I = (ξI − A)gξ (A)Q ,

d’où il résulte que ξ ∈ ρ(A), ce qui est absurde. Donc eξt ∈ σ (T (t)) et par suite
etσ(A) ⊂ σ (T (t)).
Montrons que σ (T (t)) ⊂ etσ(A) .
Soit µ ∈ σ (T (t)). Supposons par absurde que µ 6∈ etσ(A) . Alors pour λ ∈ ρ(A),
l’application:
 −1
h(λ) = µ − eλt

est définie sur un voisinage du σ(A). Donc:


 
h(A) µI − etA = I
30 CHAPITRE 1. INTRODUCTION

et il en résulte que µ ∈ ρ (T (t)) et cela est absurde. Par suite µ ∈ etσ(A) , d’où
σ (T (t)) ⊂ etσ(A) . Finalement on voit que:

etσ(A) = σ (T (t)) , (∀)t ≥ 0 .

1.4 Notes
Les notions préséntées dans cet chapitre se trouvent en majorité des travaux concernant les semi-
groupes d’opérateurs linéaires. Pour les propriétés de la pseudo-résolvante, on peut consulter
[Pa’83-1, pag. 36].
De même, on peut trouver les opérateurs dissipatifs dans [Pa’83-1, pag. 13], [Da’80,
pag. 52] et [Ah’91, pag. 30]. Une jolie généralisation pour ces opérateurs est donnée dans
[CHADP’87, pag. 61].
Le théorème 1.3.5 a été montré pour la première fois indépendemment par Yosida dans
[Yo’36] et par Nathan dans [Na’35]. Nous avons consulté aussi les preuves données par Pazy
dans [Pa’83-1, pag. 2], Ahmed dans [Ah’91, pag. 4] et Davies dans [Da’80, pag. 19]. Compte
tenu du ce théorème, on peut introduire la transformée de Laplace pour un semi-groupe uni-
formément continu et on peut montrer le théorème 1.3.11 et le théorème 1.3.13 comme des
applications du calcul fonctionnel de Dunford ([DS’67, pag. 568]). Pour le théorème 1.3.12 on
peut consulter [Pa’83-1, pag. 25].
Chapitre 2

Semi-groupes de classe C0

2.1 Définitions. Propriétés élémentaires


Dans le cadre de ce paragraphe, nous introduisons une classe plus générale
que la classe des semi-groupes uniformément continus et nous étudions leurs pro-
priétés élémentaires.

Définition 2.1.1 On appelle C0 -semi-groupe (ou semi-groupe fortement continu)


d’opérateurs linéaires bornés sur E une famille {T (t)}t≥0 ⊂ B(E) vérifiant les
propriétés suivantes:
i) T (0) = I;
ii) T (t + s) = T (t)T (s) , (∀)t, s ≥ 0;
iii) limtց0 T (t)x = x , (∀)x ∈ E.

Définition 2.1.2 On appelle générateur infinitésimal d’un C0 -semi-groupe {T (t)}t≥0 ,


un opérateur A défini sur l’ensemble:
( )
T (t)x − x
D(A) = x ∈ E
lim existe
tց0 t
par:
T (t)x − x
Ax = lim , (∀)x ∈ D(A).
tց0 t
Remarque 2.1.3 Il est clair que le générateur infinitésimal d’un C0 -semi-groupe
est un opérateur linéaire.

Remarque 2.1.4 Puisque:

kT (t)x − xk ≤ kT (t) − Ik kxk

31
32 CHAPITRE 2. SEMI-GROUPES DE CLASSE C0

pour tout x ∈ E et tout t ≥ 0, il en résulte que les semi-groupes uniformément


continus sont C0 -semi-groupes. Mais il existe des C0 -semi-groupes qui ne sont pas
uniformément continus, comme nous pouvons le voir dans les exemples suivants.

Exemple 2.1.5 Soit:

C[0, ∞) = { f : [0, ∞) → R| f est uniformément continue et bornée} .

Avec la norme kf kC[0,∞) = supα∈[0,∞) |f (α)|, l’espace C[0, ∞) devient un espace de


Banach. Définissons:

(T (t)f ) (α) = f (t + α) , (∀)t ≥ 0 et α ∈ [0, ∞).

Evidemment T (t) est un opérateur linéaire, et, en plus, on a:


i) (T (0)f ) (α) = f (0 + α) = f (α). Donc T (0) = I;
ii) (T (t + s)f ) (α) = f (t + s + α) = (T (t)f ) (s + α) = (T (t)T (s)f ) (α), (∀)f ∈
C[0, ∞). Donc T (t + s) = T (t)T (s), (∀)t, s ≥ 0;
n o
iii) limtց0 kT (t)f − f kC[0,∞) = limtց0 supα∈[0,∞) |f (t + α) − f (α)| = 0, (∀)f ∈
C[0, ∞).
De même, nous avons:

kT (t)f kC[0,∞) = sup |(T (t)f ) (α)| = sup |f (t + α)| =


α∈[0,∞) α∈[0,∞)

= sup |f (β)| ≤ sup |f (β)| = kf kC[0,∞) , (∀)t ≥ 0.


β∈[t,∞) β∈[0,∞)

Donc kT (t)k = 1, (∀)t ≥ 0. Par conséquent {T (t)}t≥0 est un C0 -semi-groupe


d’opérateurs linéaires bornés sur C[0, ∞), nommé le C0 -semi-groupe de translation
à droite.
Soit A : D(A) ⊂ C[0, ∞) −→ C[0, ∞) le générateur infinitésimal du C0 -semi-groupe
{T (t)}t≥0 . Si f ∈ D(A), alors nous avons:

T (t)f (α) − f (α) f (α + t) − f (α)


Af (α) = lim = lim = f ′ (α) ,
tց0 t tց0 t
uniformément par rapport à α. Par conséquent:

D(A) ⊂ {f ∈ C[0, ∞) |f ′ ∈ C[0, ∞) } .

Si f ∈ C[0, ∞) tel que f ′ ∈ C[0, ∞), alors:



T (t)f −f

(T (t)f ) (α) − f (α)



−f = sup −f (α) .
t
C[0,∞) α∈[0,∞) t
2.1. DÉFINITIONS. PROPRIÉTÉS ÉLÉMENTAIRES 33

Mais:

(T (t)f ) (α) − f (α) f (α + t) − f (α)
′ ′
− f (α) = −f (α) =
t t
α+t
Z
1 ′ 1 ′ ′
= f (τ )|α+t −f (α) = [f (τ ) − f (α)] dτ ≤
α
t t α

α+t
Z
1
≤ |f ′ (τ ) − f ′ (α)| dτ −→ 0
t α

uniformément par rapport à α pour t ց 0. Par suite:



T (t)f
−f ′

−f −→ 0 si t ց 0,
t
C[0,∞)

d’où f ∈ D(A) et:

{f ∈ C[0, ∞) |f ′ ∈ C[0, ∞)} ⊂ D(A) .

Par conséquent D(A) = {f ∈ C[0, ∞) |f ′ ∈ C[0, ∞)} et Af = f ′ . Comme cet


opérateur est non borné, compte tenu du théorème 1.3.5, il ne peut pas engendrer
un semi-groupe uniformément continu.

Exemple 2.1.6 Considérons l’espace Lp ]0, ∞), 1 ≤ p < ∞, avec la norme:


∞ 1
Z p
kf kp = |f (α)|p dα .
 
0

Avec cette norme, Lp ]0, ∞), 1 ≤ p < ∞, est un espace de Banach. Définissons:

(T (t)f ) (α) = f (t + α) , (∀)t ≥ 0 et α ∈]0, ∞).

Nous avons:
∞ 1 ∞ 1
Z p Z p
kT (t)f kp = |(T (t)f ) (α)|p dα = |f (α + t)|p dα =
   
0 0
∞ 1 ∞ 1
Z p Z p
= |f (β)|p dβ ≤ |f (β)|p dβ = kf kp .
   
t 0

Donc kT (t)k = 1, (∀)t ≥ 0.


Il est évident que T (0) = I et T (t + s) = T (t)T (s), (∀)t, s ≥ 0.
34 CHAPITRE 2. SEMI-GROUPES DE CLASSE C0

De plus, on a:
∞ 1
Z p
lim kT (t)f − f kp = lim |(T (t)f ) (α) − f (α)|p dα =
tց0 tց0  
0
∞ 1
Z p
= lim |f (α + t) − f (α)|p dα =0 .
tց0  
0

Par suite {T (t)}t≥0 est un C0 -semi-groupe d’opérateurs linéaires bornés sur Lp ]0, ∞).
Soit A : D(A) ⊂ Lp ]0, ∞) −→ Lp ]0, ∞) le générateur infinitésimal du C0 -semi-
groupe {T (t)}t≥0 . Si f ∈ D(A), alors nous avons:

T (t)f (α) − f (α) f (α + t) − f (α)


Af (α) = lim = lim = f ′ (α)
tց0 t tց0 t
uniformément par rapport à α. Par conséquent:

D(A) ⊂ {f ∈ Lp ]0, ∞) |f ′ ∈ Lp ]0, ∞)} .

Si f ∈ Lp ]0, ∞) tel que f ′ ∈ Lp ]0, ∞), alors on a:


 ∞ p 1
T (t)f −f Z (T (t)f ) (α) − f (α) p

− f ′ =
− f ′ (α) dα .
t
p
 t 
0

Mais:

(T (t)f ) (α) − f (α) f (α + t) − f (α)
′ ′
− f (α) = − f (α) =
t t
 α+t
1  α+t   α+t Z
1 ′ 1 ′ ′
= f (τ )
t
− f (α)τ
= [f (τ ) − f (α)] dτ −→
0
α t α t
α

uniformément par rapport à α si t ց 0. Alors:



T (t)f
−f

−f −→ 0 si t ց 0
t
p

et on voit que:
{f ∈ Lp ]0, ∞) |f ′ ∈ Lp ]0, ∞)} ⊂ D(A) .

Par conséquent:
D(A) = {f ∈ Lp ]0, ∞) |f ′ ∈ Lp ]0, ∞)}

et Af = f ′ .
2.1. DÉFINITIONS. PROPRIÉTÉS ÉLÉMENTAIRES 35

Théorème 2.1.7 Soit {T (t)}t≥0 ⊂ B(E) une famille ayant les propriétés:
i) T (0) = I;
ii) T (t + s) = T (t)T (s) , (∀)t, s ≥ 0.
Les affirmations suivantes sont équivalentes:
iii’) limtց0 T (t) = I dans la topologie forte;
iii”) limtց0 T (t) = I dans la topologie faible.

Preuve iii′ ) =⇒ iii′′ ) Cette implication est évidente.


iii′′ ) =⇒ iii′ ) Supposons que:
lim T (t) = I
tց0

dans la topologie faible. Alors, pour tout x ∈ E et tout x∗ ∈ E ∗ on a:

limhT (t)x, x∗ i = hx, x∗ i .


tց0

Si t0 > 0, alors pour tout h > 0, nous obtenons:

|hT (t0 + h)x, x∗ i − hT (t0 )x, x∗ i| =


= |hT (t0 )T (h)x, x∗ i − hT (t0 )x, x∗ i| =
= |hT (t0 )[T (h)x − x], x∗ i| −→ 0 si h ց 0,

quel que soit x ∈ E et x∗ ∈ E ∗ . Par suite, l’application:

[0, ∞) ∋ t 7−→ T (t) ∈ B(E)

est faiblement continue à droite sur [0, ∞) et on voit qu’elle est faiblement continue
sur ]0, ∞). En particulier, elle est faiblement mesurable sur ]0, ∞). Pour x ∈ E
arbitrairement fixé, considérons l’application:

[0, ∞) ∋ t 7−→ T (t)x ∈ E

et désignons par:
Im T ( . )x = {T (t)x|t ∈ [0, ∞)}

son image. Supposons que l’ensemble:

Kx = {T (q)x|q ∈ Q∗+ } ⊂ Im T ( . )x

n’est pas dense dans Im T ( . )x. Alors, il existe t0 ∈ [0, ∞) tel que T (t0 )x ∈
Im T ( . )x et:
d (T (t0 )x, Kx ) > 0 .
36 CHAPITRE 2. SEMI-GROUPES DE CLASSE C0

En appliquant un corollaire du théorème de Hahn-Banach ([DS’67, Corollary


II.3.13, pag. 64]), on voit qu’il existe x∗0 ∈ E ∗ tel que:

hkn , x∗0 i = 0 , (∀)kn ∈ Kx

et:
hT (t0 )x, x∗0 i = 1 .
Soit tn ∈ Q∗+ tel que limn→∞ tn = t0 . Alors, compte tenu de la continuité faible de
l’application considérée, il vient:

0 = lim hT (tn ) x, x∗0 i = hT (t0 )x, x∗0 i = 1 ,


n→∞

ce qui est absurde. Il s’ensuit que:

Kx = Im T ( . )x ,

pour tout x ∈ E. Par conséquent, l’application considérée a une image séparable.


En appliquant le théorème de Pettis ([Hi’48, Theorem 3.2.2, pag. 36]), il vient
que cette application est fortement mesurable sur ]0, ∞). Alors, il résulte que pour
tout xn ∈ E avec kxk ≤ 1, l’application:

kT ( . )k = sup kT ( . )xn k < ∞


n∈N

est mesurable sur ]0, ∞). Montrons que l’application kT ( . )k est bornée sur les
intevalles [α, β] ⊂]0, ∞). Compte tenu du théorème de Banach-Steinhaus ([DS’67,
Theorem II.1.11, pag. 52]), il est suffisant de montrer que kT ( . )xk est bornée sur
les intervalles [α, β], pour tout x ∈ E. Soient α, β ∈]0, ∞). Supposons qu’il existe
x0 ∈ E tel que pour tout M > 0 on puisse trouver s ∈ [α; β] tel que:

kT (s)x0 k > M .

Donc il existe tn ∈ [α, β], n ∈ N, tel que:

lim tn = τ ∈ [α, β]
n→∞

et:
kT (tn )x0 k > n , (∀)n ∈ N.
D’autre part, l’application kT ( . )x0 k est mesurable sur ]0, ∞). Donc il existe une
τ
constante K > 0 et un ensemble mesurable F ⊂ [0, τ ] avec m(F) > 2
tel que:

sup kT (t)x0 k ≤ K .
t∈F
2.1. DÉFINITIONS. PROPRIÉTÉS ÉLÉMENTAIRES 37

Si nous considérons:
En = {tn − η|η ∈ F ∩ [0, tn ]} ,

on voit que En est un ensemble mesurable et pour n suffisamment grand, nous


obtenons:
τ
m(En ) ≥ .
2
Alors, pour tout η ∈ F ∩ [0, tn ], n ∈ N, nous avons:

n ≤ kT (tn )x0 k ≤ kT (tn − η)k kT (η)x0 k ≤ kT (tn − η)kK ,

d’où:
n
kT (t)k ≥ , (∀)t ∈ En .
K
Si nous notons:
\ [
E = lim sup En = Ek ,
n∈N n≥0 k≥n

alors on voit que:


τ
m(E) ≥
2
et:
kT (t)k = ∞ , (∀)t ∈ E

ce qui est absurde. Par conséquent, il existe M > 0 tel que:

kT (t)k ≤ M , (∀)t ∈ [α, β].

Soient α, β, t, t0 ∈]0, ∞) tel que:

0 < α < t < β < t0

et ε > 0 tel que β < t0 − ε. Alors pour tout x ∈ E, l’application:

[α, β] ∋ t 7−→ T (t0 )x = T (t)T (t0 − t)x ∈ E

ne dépend pas de t, donc elle est Bôchner intégrable par rapport à t ∈ [α, β] et
pour tout x ∈ E on a:

(β − α) [T (t0 ± ε)x − T (t0 )x] dt =



= T (t) [T (t0 ± ε − t)x − T (t0 − t)x] dt ,
α
38 CHAPITRE 2. SEMI-GROUPES DE CLASSE C0

d’où:

|β − α|kT (t0 ± ε)x − T (t0 )xk ≤



≤ kT (t)k kT (t0 ± ε − t)x − T (t0 − t)xk dt ≤
α
0 −α
tZ

≤ M kT (τ ± ε)x − T (τ )xk dτ −→ 0 si ε ց 0 ,
t0 −β

compte tenu de [Hi’48, théorème 3.6.3, pag.46]. Il s’ensuit que l’application:

[0, ∞) ∋ t 7−→ T (t) ∈ B(E)

est fortement continue sur ]0, ∞).


En particulier, pour x ∈ E arbitrairement fixé, l’ensemble:

X = {T (t)x|t ∈ [0, 1]}

est séparable. Donc il contient une partie dénombrable dense:

X0 = {T (tn )x|tn ∈]0, 1[, n ∈ N} .

Par conséquent, il existe une suite (xn )n∈N ⊂ X0 tel que:

lim kxn − xk = lim kT (tn )x − xk = 0 .


n→∞ n→∞

Comme:

kT (t)x − xk ≤
≤ kT (t)x − T (t + tn )xk + kT (t + tn )x − T (tn )xk + kT (tn )x − xk ≤
≤ kT (t)k kx − T (tn )xk + kT (t + tn )x − T (tn )xk + kT (tn )x − xk ≤
!
≤ sup kT (t)k + 1 + kT (t + tn )x − T (tn )xk ,
t∈[0,1]

il vient:
lim T (t)x = x , (∀)x ∈ E
tց0

et par conséquent:
lim T (t) = I
tց0

dans la topologie forte.


Dans la suite, nous considérons la topologie forte pour étudier les propriétés
des C0 -semi-groupes.
2.1. DÉFINITIONS. PROPRIÉTÉS ÉLÉMENTAIRES 39

Théorème 2.1.8 Soit {T (t)}t≥0 un C0 -semi-groupe d’opérateurs linéaires bornés.


Alors:
i) il existe τ > 0 et M ≥ 1 tel que:

kT (t)k ≤ M , (∀)t ∈ [0, τ ];

ii) il existe ω ∈ R et M ≥ 1 tel que:

kT (t)k ≤ Meωt , (∀)t ≥ 0.

Preuve i) Supposons que pour tout τ > 0 et tout M ≥ 1, il existe t ∈ [0, τ ] tel que
h i
1
kT (t)k > M. Pour τ = n
et M = n ∈ N∗ , il existe tn ∈ 0, n1 tel que kT (tn )k >
n. Donc la suite (kT (tn )k)n∈N∗ est non bornée. Si la suite (kT (tn )xk)n∈N∗ était
bornée pour tout x ∈ E, alors compte tenu du théorème de Banach-Steinhaus
([DS’67, Theorem II.1.11, pag. 52]), il en résulterait que (kT (tn )k)n∈N∗ serait
bornée, mais cela contredit l’affirmation précédente. Donc il existe x0 ∈ E tel que
(kT (tn )x0 k)n∈N∗ soit non bornée. D’autre part, compte tenu de la définition 2.1.1
(iii), il résulte que limn→∞ kT (tn )x0 k = x0 et cela est contradictoire.
h i
t
ii) Pour h > 0 et t > h, nous noterons m = h
∈ N∗ . Compte tenu du théorème
de division avec reste, il existe r ∈ [0, h) tel que t = mh + r. Alors:

kT (t)k = kT (mh)T (r)k ≤ kT (h)km kT (r)k ≤


t
≤ M m M ≤ Me h ln M .

1
L’inégalité de l’énoncé en résulte en prenant ω = h
ln M.

Corollaire 2.1.9 Si {T (t)}t≥0 est un C0 -semi-groupe, alors l’application:

[0, ∞) ∋ t 7−→ T (t)x ∈ E

est continue sur [0, ∞), quel que soit x ∈ E.

Preuve Soient t0 , h ∈ [0, ∞) et x ∈ E.


Si t0 < h, nous avons:

kT (t0 + h)x − T (t0 )xk ≤ kT (t0 )k kT (h)x − xk ≤


≤ Meωt0 kT (h)x − xk .
40 CHAPITRE 2. SEMI-GROUPES DE CLASSE C0

Si t0 > h, nous obtenons:

kT (t0 − h)x − T (t0 )xk ≤ kT (t0 − h)k kT (h)x − xk ≤


≤ Meω(t0 −h) kT (h)x − xk .

La continuité forte en t0 de l’application considérée dans l’énoncé est évidente.

Définition 2.1.10 On dit que le C0 -semi-groupe {T (t)}t≥0 est uniformément borné


s’il existe M ≥ 1 tel que:

kT (t)k ≤ M , (∀)t ≥ 0.

Théorème 2.1.11 Soit {T (t)}t≥0 un C0 -semi-groupe pour lequel il existe ω ∈ R


et M ≥ 1 tel que:
kT (t)k ≤ Meωt , (∀)t ≥ 0.

Alors la famille {S(t)}t≥0 ⊂ B(E), où:

S(t) = e−ωt T (t) , (∀)t ≥ 0,

est un C0 -semi-groupe ayant la propriété:

kS(t)k ≤ M , (∀)t ≥ 0.

De plus, si A est le générateur infinitésimal du C0 -semi-groupe {T (t)}t≥0 , alors le


C0 -semi-groupe {S(t)}t≥0 a pour générateur infinitésimal l’opérateur B = A − ωI.

Preuve Dans les conditions du théorème, il est évident que {S(t)}t≥0 est un C0 -
semi-groupe et:

kS(t)k = eωt T (t) ≤ e−ωt Meωt = M , (∀)t ≥ 0.

Donc {S(t)}t≥0 est un C0 -semi-groupe uniformément borné. Soit A le générateur


infinitésimal du C0 -semi-groupe {T (t)}t≥0 . Si B est le générateur infinitésimal du
C0 -semi-groupe {S(t)}t≥0 , alors pour tout x ∈ D(A), nous avons:

S(h)x − x e−ωh T (h)x − x


lim = lim =
hց0

h 
hց0 h
e−ωh − 1 T (h)x T (h)x − x
= lim + lim =
hց0 h hց0 h
= −ωx + Ax = (A − ωI)x ,
2.2. PROPRIÉTÉS GÉNÉRALES DES C0 -SEMI-GROUPES 41

d’où il résulte que x ∈ D(B) et Bx = (A − ωI)x. Soit x ∈ D(A). Alors, nous


obtenons:
T (h)x − x eωh S(h)x − x
lim = lim =
hց0

h  hց0 h
eωh − 1 S(h) S(h)x − x
= lim + lim =
hց0 h hց0 h
= (ωI + B)x ,

d’où il vient que x ∈ D(A) et Ax = (ωI + B)x. Par conséquent D(A) = D(B) et
B = A − ωI.

Remarque 2.1.12 Soit {T (t)}t≥0 un C0 -semi-groupe pour lequel il existe ω ∈ R


et M ≥ 1 tel que:
kT (t)k ≤ Meωt , (∀)t ≥ 0.

Si ω < 0, alors nous obtenons:

kT (t)k ≤ Meωt ≤ M , (∀)t ≥ 0.

Par conséquent on peut considérer que ω ≥ 0.

Nous noterons par SG(M, ω) l’ensemble des C0 -semi-groupes {T (t)}t≥0 ⊂ B(E)


pour lesquels il existe ω ≥ 0 et M ≥ 1 tel que:

kT (t)k ≤ Meωt , (∀)t ≥ 0 .

Avec le théorème 2.1.11 nous voyons que le passage entre la classe SG(M, ω) avec
ω > 0 et la classe SG(M, 0) est très simple.

2.2 Propriétés générales des C0-semi-groupes


Proposition 2.2.1 Soient {T (t)}t≥0 ∈ SG(M, ω) et A son générateur infinitési-
mal. Si x ∈ D(A), alors T (t)x ∈ D(A) et on a l’égalité:

T (t)Ax = AT (t)x , (∀)t ≥ 0.


42 CHAPITRE 2. SEMI-GROUPES DE CLASSE C0

Preuve Soit x ∈ D(A). Alors pour tout t ≥ 0, nous avons:

T (h)x − x
T (t)Ax = T (t) lim =
hց0 h
T (h)T (t)x − T (t)x
= lim .
hց0 h
Donc T (t)x ∈ D(A) et on a T (t)Ax = AT (t)x , (∀)t ≥ 0.

Remarque 2.2.2 On voit que:

T (t)D(A) ⊆ D(A) , (∀)t ≥ 0.

Théorème 2.2.3 Soient {T (t)}t≥0 ∈ SG(M, ω) et A son générateur infinitésimal.


Alors l’application:
[0, ∞) ∋ t 7−→ T (t)x ∈ E

est dérivable sur [0, ∞), pour tout x ∈ D(A) et nous avons:
d
i) dt
T (t)x = T (t)Ax = AT (t)x , (∀)t ≥ 0;
Rt
ii) T (t)x − x = T (s)Ax ds , (∀)t ≥ 0.
0

Preuve i) Soient x ∈ D(A) , t ≥ 0 et h > 0. Alors:



T (t + h)x − T (t)x T (h)x − x

− T (t)Ax ≤ kT (t)k − Ax ≤
h h

T (h)x − x
≤ Meωt − Ax .
h

Par conséquent:
T (t + h)x − T (t)x
lim = T (t)Ax ,
hց0 h
d’où:
d+
T (t)x = T (t)Ax , (∀)t ≥ 0.
dt
Si t − h > 0, alors nous avons:

T (t − h)x − T (t)x

− T (t)Ax ≤
−h

T (h)x − x

≤ kT (t − h)k − Ax + Ax − T (h)Ax ≤
h
!
ω(t−h) T (h)x − x


≤ Me − Ax + kT (h)Ax − Axk .
h
2.2. PROPRIÉTÉS GÉNÉRALES DES C0 -SEMI-GROUPES 43

Par suite:
T (t − h)x − T (t)x
lim = T (t)Ax
hց0 −h
et:
d−
T (t)x = T (t)Ax , (∀)t ≥ 0.
dt
Il s’ensuit que l’application considérée dans l’énoncé est dérivable sur [0, ∞), quel
que soit x ∈ D(A). De plus, on a l’égalité:
d
T (t)x = T (t)Ax = AT (t)x , (∀)t ≥ 0.
dt
ii) Si x ∈ D(A), alors nous avons:
d
T (s)x = T (s)Ax , (∀)s ∈ [0, t] , t ≥ 0,
ds
d’où:
Zt Zt
d
T (s)Ax ds = T (s) ds = T (t)x − x , (∀)t ≥ 0.
ds
0 0
On peut obtenir une formule de représentation de type Taylor pour les C0 -
semi-groupes avec la généralisation du théorème 2.2.3 (ii).

Théorème 2.2.4 (Taylor) Soient {T (t)}t≥0 ∈ SG(M, ω) et A son générateur


infinitésimal. Alors:
n−1
X i Zt
t i 1
T (t)x = Ax+ (t − u)n−1 T (u)An x du
i=0 i! (n − 1)!
0

quels que soient x ∈ D(An ), t ≥ 0 et n ∈ N∗ .

Preuve Compte tenu du théorème 2.2.3 (ii), pour x ∈ D(A) et t ≥ 0 on a:


Zt
T (t)x = x + T (u)Ax du .
0

Supposons que pour t ≥ 0 et x ∈ D(Ak ) nous ayons:


k−1
X i Zt
t i 1
T (t)x = Ax+ (t − u)k−1T (u)Ak x du .
i=0 i! (k − 1)!
0

Si x ∈ D(Ak+1 ), alors x ∈ D(Ak ) et Ak x ∈ D(A). Il en résulte que:


k−1
X i Zt
t i 1
T (t)x = Ax+ (t − s)k−1 T (s)An x ds .
i=0 i! (k − 1)!
0
44 CHAPITRE 2. SEMI-GROUPES DE CLASSE C0

Mais:
Zs
T (s)x = x + T (u)Ax du .
0
Il vient:
Zs
k−1 k k−1 k k−1
(t − s) T (s)A x = (t − s) A x + (t − s) T (u)Ak+1x du
0

et par conséquent:
Zt
(t − s)k−1 T (s)Ak x ds =
0
Zt Zt Zs
k−1 k k−1
= (t − s) A x ds + (t − s) T (u)Ak+1x du ds =
0 0 0
Zt Z t
tk k
= A x+ (t − s)k−1T (u)Ak+1x ds du =
k
0 u
Zt
tk k (t − u)k
= A x+ T (u)Ak+1x du .
k k
0

Nous en déduisons que:


 
k−1
X i Zt
t i 1 tk
 Ak x +
1
T (t)x = Ax+ (t − u)k T (u)Ak+1x du =
i=0 i! (k − 1)! k k
0
k Zt
X ti i 1
= Ax+ (t − u)k T (u)Ak+1x du ,
i=0 k! k!
0

d’où il résulte l’égalité considérée dans l’énoncé.

Lemme 2.2.5 Soit {T (t)}t≥0 un C0 -semi-groupe. Alors:


t+h
Z
1
lim T (s)x ds = T (t)x
hց0 h
t

quels que soient x ∈ E et t ≥ 0.

Preuve L’égalité de l’énoncé résulte de l’évaluation:


t+h t+h
Z Z
1 1

T (s)x ds − T (t)x =
(T (s) − T (t)) x ds ≤
h h
t t
≤ sup kT (s)x − T (t)xk
s∈[t,t+h]

et de la continuité de l’application [0, ∞) ∋ t 7−→ T (t)x ∈ E.


2.2. PROPRIÉTÉS GÉNÉRALES DES C0 -SEMI-GROUPES 45

Proposition 2.2.6 Soient {T (t)}t≥0 ∈ SG(M, ω) et A son générateur infinitésimal.


Rt
Si x ∈ E, alors T (s)x ds ∈ D(A) et on a l’égalité:
0

Zt
A T (s)x ds = T (t)x − x , (∀)t ≥ 0.
0

Preuve Soient x ∈ E et h > 0. Alors:


Zt Zt Zt
T (h) − I 1 1
T (s)x ds = T (s + h)x ds − T (s)x ds =
h h h
0 0 0
t+h
Z Zt
1 1
= T (u)x du − T (s)x ds =
h h
h 0
t+h
Z Zh Zt
1 1 1
= T (u)x du − T (u)x du − T (u)x du =
h h h
0 0 0
t+h
Z Zh
1 1
= T (u)x du − T (u)x du .
h h
t 0

Par pasage à limite pour h ց 0 et compte tenu du lemme 2.2.5, nous obtenons:
Zt
A T (s)x ds = T (t)x − x , (∀)t ≥ 0
0

et:
Zt
T (s)x ds ∈ D(A).
0

Théorème 2.2.7 Soient {T (t)}t≥0 ∈ SG(M, ω) et A son générateur infinitésimal.


Alors:
i) D(A) = E;
ii) A est un opérateur fermé.

Preuve i) Soient x ∈ E et tn > 0 , n ∈ N, tel que limn→∞ tn = 0. Alors:


tn
1 Z
xn = T (s)x ds ∈ D(A) , (∀)n ∈ N,
tn
0

d’où:
Ztn
1
lim
n→∞
xn = lim
n→∞ t
T (s)x ds = T (0)x = x .
n
0
46 CHAPITRE 2. SEMI-GROUPES DE CLASSE C0

Par conséquent D(A) = E.


ii) Soit (xn )n∈N ⊂ D(A) tel que limn→∞ xn = x et limn→∞ Axn = y. Alors:

kT (s)Axn − T (s)yk ≤ kT (s)k kAxn − yk ≤ Meωt kAxn − yk

quel que soit s ∈ [0, t]. Par suite T (s)Axn −→ T (s)y, pour n → ∞, uniformément
par rapport à s ∈ [0, t].
D’autre part, puisque xn ∈ D(A), nous avons:
Zt
T (t)xn − xn = T (s)Axn ds ,
0

d’où:
Zt
lim [T (t)xn − xn ] = lim T (s)Axn ds ,
n→∞ n→∞
0

ou bien:
Zt
T (t)x − x = T (s)y ds .
0

Finalement, on voit que:


Zt
T (t)x − x 1
lim = lim T (s)y ds = y .
tց0 t tց0 t
0

Par suite x ∈ D(A) et Ax = y, d’où il résulte que A est un opérateur fermé.


Nous montrons maintenant un résultat qui concerne l’unicité de l’engendrement
pour les C0 -semi-groupes.

Théorème 2.2.8 (l’unicité de l’engendrement) Soient deux C0 -semi-groupes


{T (t)}t≥0 et {S(t)}t≥0 ayant pour générateur infinitésimal le même opérateur A.
Alors:
T (t) = S(t) , (∀)t ≥ 0.

Preuve Soient t > 0 et x ∈ D(A). Définissons l’application:

[0, t] ∋ s 7−→ U(s)x = T (t − s)S(s)x ∈ D(A).

Alors:
d d d
U(s)x = T (t − s)S(s)x + T (t − s) S(s)x =
ds ds ds
= −AT (t − s)S(s)x + T (t − s)AS(s)x = 0
2.2. PROPRIÉTÉS GÉNÉRALES DES C0 -SEMI-GROUPES 47

quel que soit x ∈ D(A). Par suite U(0)x = U(t)x, pour tout x ∈ D(A), d’où:

T (t)x = S(t)x , (∀)x ∈ D(A) et t ≥ 0.

Puisque D(A) = E et T (t), S(t) ∈ B(E), pour tout t ≥ 0, il résulte que:

T (t)x = S(t)x , (∀)t ≥ 0 et x ∈ E ,

ou bien:
T (t) = S(t) , (∀)t ≥ 0.

Théorème 2.2.9 Soient {T (t)}t≥0 un C0 -semi-groupe, A son générateur infinité-


simal et F ∈ B(E). Alors T (t)F = F T (t) pour tout t ≥ 0 si et seulement si:

F D(A) ⊆ D(A)

et:
F Ax = AF x , (∀)x ∈ D(A).

Preuve =⇒ Soit F ∈ B(E) tel que:

T (t)F = F T (t) , (∀)t ≥ 0

et x ∈ D(A). Alors, nous avons:


T (t)F x − F x F T (t)x − F x
lim = lim =
tց0 t tց0 t
T (t)x − x
= lim F .
tց0 t
Par conséquent F x ∈ D(A) et on a AF x = F Ax, pour tout x ∈ D(A).
⇐= Soit F ∈ B(E) tel que:
F D(A) ⊆ D(A)

et
AF x = F Ax , (∀)x ∈ D(A).

Pour tout t ≥ 0 et tout x ∈ D(A), définissons l’application:

[0, t] ∋ s 7−→ U(s)x = T (t − s)F T (s)x ∈ D(A) .

Alors nous avons:


d d d
U(s)x = T (t − s)F T (s)x + T (t − s) F T (s)x =
ds ds ds
= −AT (t − s)F T (s)x + T (t − s)F AT (s)x = 0 ,
48 CHAPITRE 2. SEMI-GROUPES DE CLASSE C0

compte tenu de la commutativité. Par conséquent:

U(0)x = U(t)x , (∀)x ∈ D(A),

d’où on obtient:
T (t)F x = F T (t)x ,

pour tout t ≥ 0 et tout x ∈ D(A). Comme D(A) = E et T (t)F, F T (t) ∈ B(E)


pour tout t ≥ 0, nous obtenons:

T (t)F x = F T (t)x ,

pour tout t ≥ 0 et tout x ∈ E.


Nous finissons cette section avec une généralisation du théorème 2.2.7.

Théorème 2.2.10 Soient {T (t)}t≥0 ∈ SG(M, ω) et A son générateur infinitésimal.


Alors:
i) D(Ap ) = E, quel que soit p ∈ N∗ ;
ii) Ap est un opérateur fermé, quel que soit p ∈ N∗ ;
iii) l’application:
k . kD(Ap ) : D(Ap ) −→ R+ ,
p
X
i
kxk D(Ap ) = A x
i=0

est une norme avec laquelle D(A ) devient un espace de Banach, pour tout p ∈ N∗ .
p

Preuve i) Pour p = 1, compte tenu du théorème 2.2.7(i), il résulte que D(A) = E.


Soit:

C0∞ = {ϕ :]0, ∞) → E |ϕ indéfiniment dérivable avec un support compact} .

Notons:  ∞ 
Z 

F= ϕ(t)T (t)x dt x ∈ E , ϕ ∈ C0∞ .
 
0

Nous montrons que F ⊂ D(Ap ) , (∀)p ∈ N.


Pour y ∈ F et h > 0, nous obtenons:
∞ 
Z Z∞
T (h) − I 1
y = ϕ(t)T (t + h)x dt − ϕ(t)T (t)x dt =
h h
0 0
Z∞
ϕ(u − h) − ϕ(u)
= T (u)x du .
h
0
2.2. PROPRIÉTÉS GÉNÉRALES DES C0 -SEMI-GROUPES 49

Puisque:
ϕ(u − h) − ϕ(u)
T (u)x −→ −ϕ(u)(1) T (u)x si h ց 0,
h
uniformément par rapport à u ∈ supp ϕ, en passant à limite pour h ց 0, nous
obtenons:
Z∞
Ay = − ϕ(u)(1) T (u)x du .
0

Donc y ∈ D(A). Il en résulte que F ⊂ D(A) et par récurrence on peut montrer


que F ⊂ D(Ap ) et:
Z∞
p
A y = (−1) p
ϕ(t)(p) T (t)x dt
0

quel que soit p ∈ N .
Nous montrons maintenant que F est dense dans E.
Supposons que F n’est pas dense dans E. Alors il existe x0 ∈ E tel que d(x0 , F ) > 0.
En appliquant un corollaire du théorème de Hahn-Banach ([DS’67, Corollary
II.3.13, pag. 64]), on voit qu’il existe x∗0 ∈ E ∗ tel que hx0 , x∗0 i = 1 et hy, x∗0 i = 0,
pour tout y ∈ F . Alors:
Z∞ *Z∞ +
ϕ(t)hT (t)x, x∗0 i dt = ϕ(t)T (t)x dt, x∗0 =0 , (∀)ϕ ∈ C0∞ et x ∈ E.
0 0

Par conséquent, pour tout x ∈ E, nous avons:

hT (t)x, x∗0 i = 0 , (∀)t ∈ [0, ∞),

parce que dans le cas contraire, on peut trouver ϕ ∈ C0∞ tel que:
Z∞
ϕ(t)hT (t)x, x∗0 i dt 6= 0
0

ce qui est contradictoire. Il s’ensuit que pour tout x ∈ E, on a:

hT (t)x, x∗0 i = 0 , (∀)t ∈ [0, ∞),

d’où:
hx, x∗0 i = hT (0)x, x∗0 i = 0 , (∀)x ∈ E,

ce qui est absurde. Finalement, on voit que F est dense dans E et donc D(An ) = E.
ii) Compte tenu du théorème 2.2.7(ii), on voit que:

A : D(A) ⊂ E −→ E
50 CHAPITRE 2. SEMI-GROUPES DE CLASSE C0

est un opérateur fermé. Supposons que:

Ak : D(Ak ) ⊂ E −→ E

est un opérateur fermé et montrons que:

Ak+1 : D(Ak+1 ) ⊂ E −→ E

est un opérateur fermé.


Soit (xn )n∈N ⊂ D(Ak+1) tel que:

lim xn = x
n→∞

et:
lim Ak+1 xn = y .
n→∞

Mais xn ∈ D(Ak+1) est équivalent avec xn ∈ D(Ak ) et Ak xn ∈ D(A). Alors xn ∈


D(Ak ), limn→∞ xn = x, comme Ak est un opérateur fermé, ceci implique x ∈ D(Ak )
et limn→∞ Ak xn = Ak x. Comme Ak xn ∈ D(A), limn→∞ Ak xn = Ak x et A est un
   
opérateur fermé, il s’ensuit que Ak x ∈ D(A) et limn→∞ A Ak xn = A Ak x . Nous
avons obtenu donc que x ∈ D(Ak+1), Ak x ∈ D(A) et limn→∞ Ak+1 xn = Ak+1 x,
d’où il résulte que x ∈ D(Ak+1) et Ak+1 x = y. Par conséquent Ak+1 est un
opérateur fermé, d’où on obtient (ii).
iii) Pour p = 1 on peut vérifier facilement les propriétés de norme de l’application:

k . kD(A) : D(A) −→ R+ ,

kxkD(A) = kxk + kAxk .

Donc D(A) est un espace normé.


Soit (xn )n∈N∗ ⊂ D(A) tel que kxm − xn kD(A) −→ 0 pour m, n → ∞. Alors:

kxm − xn k + kAxm − Axn k −→ 0 pour m, n → ∞.

Donc:
kxm − xn k −→ 0 et kAxm − Axn k −→ 0 pour m, n → ∞.

Puis que E est un espace de Banach, il résulte que les suites (xn )n∈N et (Axn )n∈N
sont convergentes. Donc xn −→ x et Axn −→ y pour n → ∞. Comme A est un
opérateur fermé, il résulte que x ∈ D(A) et y = Ax. Par conséquent:

kxn − xkD(A) = kxn − xk + kAxn − Axk −→ 0 pour n → ∞.


2.2. PROPRIÉTÉS GÉNÉRALES DES C0 -SEMI-GROUPES 51

Donc la suite (xn )n∈N est convergente par rapport à la norme k . kD(A) . Il s’ensuit
que D(A) est un espace de Banach avec la norme k . kD(A) .
Supposons que l’application:

k . kD(Ak ) : D(Ak ) −→ R+ ,
k
X
i
kxkD(Ak ) = A x
i=0
k
est une norme avec laquelle D(A ) est un espace de Banach. Montrons que:

k . kD(Ak+1 ) : D(Ak+1) −→ R+ ,
k+1
X
i
kxkD(Ak+1 ) = A x
i=0
k+1
est une norme avec laquelle D(A ) devient un espace de Banach. On peut vérifier
facilement les propriétés de norme de l’application k . kD(Ak+1 ) . Donc D(Ak+1) est
un espace normé. Soit (xn )n∈N ⊂ D(Ak+1 ) tel que:

kxm − xn kD(Ak+1) −→ 0 si m, n → ∞.

Alors nous avons:


k+1
X
i
− Ai xn −→ 0 si m, n → ∞,

A xm
i=0

d’où il s’ensuit que:



i
− Ai xn −→ 0 si m, n → ∞,

A xm

pour tout i ∈ {0, 1, . . . , k + 1}. Mais E est un espace de Banach. Donc pour
tout i ∈ {0, 1, . . . , k + 1}, les suites (Ai xn )n∈N sont convergentes et comme les
opérateurs Ai sont fermés pour tout i ∈ {1, 2, . . . , k + 1}, on voit que:

i
− Ai x −→ 0 si n → ∞,

A xn

pour tout i ∈ {0, 1, . . . , k + 1}. Par conséquent:


k+1
X
i
− Ai x −→ 0 si n → ∞,

A xn
i=0

d’où:
kxm − xkD(Ak+1 ) −→ 0 si n → ∞.
52 CHAPITRE 2. SEMI-GROUPES DE CLASSE C0

Finalement, on voit que D(Ak+1) est un espace de Banach et l’affirmation de


l’énoncé en résulte.

2.3 Le théorème de Hille - Yosida


Dans ce paragraphe nous présentons un résultat très important concernant
les semi-groupes de classe C0 . Il s’agit du célèbre théorème de Hille-Yosida qui
donne une caractérisation pour les opérateurs qui sont générateurs de C0 -semi-
groupes. Nous avons besoin de quelques résultats intermédiaires. Dans la suite,
pour ω ≥ 0 nous désignerons par Λω l’ensemble {λ ∈ C |Reλ > ω }.

Théorème 2.3.1 Soient {T (t)}t≥0 ∈ SG(M, ω) et A son générateur infinitésimal.


Si λ ∈ Λω , alors l’application:

Rλ : E −→ E,
Z∞
Rλ x = e−λt T (t)x dt
0

définit un opérateur linéaire borné sur E, λ ∈ ρ(A) et Rλ x = R(λ; A)x , pour tout
x ∈ E.

Preuve Soit λ ∈ Λω . Puisque {T (t)}t≥0 ∈ SG(M, ω), nous avons:

kT (t)k ≤ Meωt , (∀)t ≥ 0

et on voit que:

−λt
≤ e−Reλt kT (t)k kxk ≤ Me−(Reλ−ω)t kxk ,

e T (t)x (∀)x ∈ E.

Définissons l’application:
Rλ : E −→ E ,

par:
Z∞
Rλ x = e−λt T (t)x dt .
0
2.3. LE THÉORÈME DE HILLE - YOSIDA 53

Il est clair que Rλ est un opérateur linéaire. De plus, on a:


Z∞
−λt
M
kRλ xk ≤ e T (t)x dt ≤ kxk , (∀)x ∈ E,
Reλ − ω
0

d’où il résulte que Rλ est un opérateur linéaire borné.


Si x ∈ E, alors nous avons:
Z∞ Z∞
T (h)Rλ x − Rλ x 1 −λt 1 −λt
= e T (t + h)x dt − e T (t)x dt =
h h h
0 0
Z∞ Z∞
1 −λ(s−h) 1 −λt
= e T (s)x ds − e T (t)x dt =
h h
h 0
Z∞ Z∞
eλh −λs 1 −λt
= e T (s)x ds − e T (t)x dt =
h h
h 0
 
Z∞ Zh ∞
eλh  −λs −λs 1 Z −λt
= e T (s)x ds − e T (s)x ds −
 e T (t)x dt =
h h
0 0 0
Z∞ Z∞
eλh − 1 −λs eλh −λs
= e T (s)x ds − e T (s)x ds .
h h
0 0

Par passage à limite, on obtient:


T (h)Rλ x − Rλ x
lim = λRλ x − x .
hց0 h
Il en résulte que Rλ x ∈ D(A) et

ARλ x = λRλ x − x , (∀)x ∈ E,

ou bien
(λI − A)Rλ x = x , (∀)x ∈ E.

Si x ∈ D(A), alors nous obtenons:


Z∞ Z∞
−λt d
Rλ Ax = e T (t)Ax dt = e−λt T (t)x dt =
dt
0 0
h i ∞ Z∞
e−λt T (t)x + λ e−λt T (t)x dt = x + λRλ x ,

=
0
0

d’où:
Rλ (λI − A)x = x , (∀)x ∈ D(A).

Finalement, on voit que λ ∈ ρ(A) et Rλ x = R(λ; A)x , pour tout x ∈ E.


54 CHAPITRE 2. SEMI-GROUPES DE CLASSE C0

Remarque 2.3.2 On voit que pour tout λ ∈ Λω on a:

Im R(λ; A) = Im Rλ ⊆ D(A)

et:
R(λ; A)D(A) = Rλ D(A) ⊆ D(A) .

Définition 2.3.3 L’opérateur:

Rλ : E −→ E
Z∞
Rλ x = e−λt T (t)x dt , λ ∈ Λω ,
0

s’appelle la transformée de Laplace du semi-groupe {T (t)}t≥0 ∈ SG(M, ω).

Remarque 2.3.4 Soient {T (t)}t≥0 ∈ SG(M, ω) et A son générateur infinitésimal.


Alors nous avons:
{λ ∈ C |Reλ > ω } ⊂ ρ(A).

et:
σ(A) ⊂ {λ ∈ C |Reλ ≤ ω } .

Théorème 2.3.5 Soient {T (t)}t≥0 ∈ SG(M, ω) et A son générateur infinitésimal.


Pour tout λ ∈ Λω on a:
M
kR(λ; A)n k ≤ , (∀)n ∈ N∗ .
(Reλ − ω)n
Preuve Soit {T (t)}t≥0 ∈ SG(M, ω) . Alors:

kT (t)k ≤ Meωt , (∀)t ≥ 0.

Compte tenu du théorème 2.3.1, si λ ∈ Λω , nous avons λ ∈ ρ(A) et:


Z∞
R(λ; A)x = Rλ x = e−λt T (t)x dt , (∀)x ∈ E.
0

De plus:
M
kR(λ; A)k ≤ .
Reλ − ω
Il est clair que:
Z∞
d
R(λ; A)x = − te−λt T (t)x dt , (∀)x ∈ E

0
2.3. LE THÉORÈME DE HILLE - YOSIDA 55

et par récurrence on peut montrer que:


Z∞
dn
n
R(λ; A)x = (−1)n tn e−λt T (t)x dt , (∀)x ∈ E et n ∈ N∗ .

0

D’autre part, avec la proposition 1.1.16 (iii) nous obtenons:


dn
n
R(λ; A)x = (−1)n n!R(λ; A)n+1 x , (∀)x ∈ E et n ∈ N∗ .

Par suite, on a:
Z∞
n+1
n
(−1) n!R(λ; A) x = (−1) n
tn e−λt T (t)x dt , (∀)x ∈ E et n ∈ N∗ ,
0

d’où il résulte que:


Z∞
n 1
R(λ; A) x = tn−1 e−λt T (t)x dt , (∀)x ∈ E et n ∈ N∗ .
(n − 1)!
0

De plus:

n Mkxk Z n−1 −(Reλ−ω)t
kR(λ; A) xk ≤ t e dt =
(n − 1)!
0
Z∞
Mkxk n − 1 Mkxk
= tn−2 e−(Reλ−ω)t dt = · · · =
(n − 1)! Reλ − ω (Reλ − ω)n
0

quels que soient x ∈ E et n ∈ N∗ . Par conséquent:


M
kR(λ; A)n k ≤ , (∀)n ∈ N∗ .
(Reλ − ω)n
Lemme 2.3.6 Soit A : D(A) ⊂ E −→ E un opérateur linéaire vérifiant les pro-
priétés suivantes:
i) A est un opérateur fermé et D(A) = E;
ii) il existe ω ≥ 0 et M ≥ 1 tel que Λω ⊂ ρ(A) et pour λ ∈ Λω , on a:
M
kR(λ; A)n k ≤ , (∀)n ∈ N∗ .
(Reλ − ω)n
Alors pour tout λ ∈ Λω , nous avons:

lim λR(λ; A)x = x , (∀)x ∈ E.


Reλ→∞

De plus λAR(λ; A) ∈ B(E) et:

lim λAR(λ; A)x = Ax , (∀)x ∈ D(A).


Reλ→∞
56 CHAPITRE 2. SEMI-GROUPES DE CLASSE C0

Preuve Soient x ∈ D(A) et λ ∈ C tel que Reλ > ω. Alors R(λ; A)(λI − A)x = x.
Si Reλ → ∞, nous avons:

kλR(λ; A)x − xk = kR(λ; A)Axk ≤ kR(λ; A)k kAxk ≤


M
≤ kAxk −→ 0 ,
Reλ − ω
d’où il résulte que:

lim λR(λ; A)x = x , (∀)x ∈ D(A).


Reλ→∞

Soit x ∈ E, puisque D(A) = E, il existe une suite (xn )n∈N ⊂ D(A) telle que
xn −→ x si n → ∞. Nous avons:

kλR(λ; A)x − xk ≤
≤ kλR(λ; A)x − λR(λ; A)xn k + kλR(λ; A)xn − xn k + kxn − xk ≤
≤ kλR(λ; A)k kx − xn k + kλR(λ; A)xn − xn k + kxn − xk ≤
|λ|M M
≤ kx − xn k + kAxn k + kxn − xk =
Reλ − ω Reλ − ω
|λ|M + Reλ − ω M
= kxn − xk + kAxn k .
Reλ − ω Reλ − ω
Mais xn −→ x si n → ∞. Donc pour tout ε > 0 , il existe nε ∈ N tel que:
Reλ − ω
kxnε − xk < ε .
|λ|M + Reλ − ω
Par conséquent:
M
kλR(λ; A)x − xk < ε + kAxnε k ,
Reλ − ω
d’où:
lim sup kλR(λ; A)x − xk < ε , (∀)x ∈ E,
Reλ→∞
ou bien:
lim λR(λ; A)x = x , (∀)x ∈ E.
Reλ→∞

De plus:

λAR(λ; A) = λ [λI − (λI − A)] R(λ; A) = λ [λR(λ; A) − I] = λ2 R(λ; A) − λI.

Par suite, on a:

kλAR(λ; A)xk = kλ [λR(λ; A) − I] xk ≤


≤ |λ| kλR(λ; A)x − xk ≤ |λ| (kλR(λ; A)xk + kxk) ≤
!
|λ|M
≤ |λ| + 1 kxk , (∀)x ∈ E
Reλ − ω
2.3. LE THÉORÈME DE HILLE - YOSIDA 57

et on voit que λAR(λ; A) ∈ B(E).


Si x ∈ D(A), alors nous avons:

λR(λ; A)Ax = λ2 R(λ; A) − λI = λAR(λ; A) ,

d’où il résulte que:

lim λAR(λ; A)x = lim λR(λ; A)Ax = Ax , (∀)x ∈ D(A).


Reλ→∞ Re→∞

Remarque 2.3.7 On peut dire que les opérateurs bornés λAR(λ; A) sont des
approximations pour l’opérateur non borné A. C’est le motif pour lequel on intro-
duit la définition suivante.

Définition 2.3.8 La famille {Aλ }λ∈Λω ⊂ B(E), où Aλ = λAR(λ; A), pour tout
λ ∈ Λω , s’appelle l’approximation généralisée de Yosida de l’opérateur A.

Remarque 2.3.9 Evidemment, pour λ ∈ Λω , on voit que Aλ est le générateur


n o
infinitésimal d’un semi-groupe uniformément continu etAλ . Nous utiliserons
t≥0
cette famille pour montrer l’existence d’un C0 -semi-groupe engendré par A.

Lemme 2.3.10 Soit A : D(A) ⊂ E −→ E un opérateur linéaire vérifiant les


propriétés suivantes:
i) A est un opérateur fermé et D(A) = E;
ii) il existe ω ≥ 0 et M ≥ 1 tel que Λω ⊂ ρ(A) et pour λ ∈ Λω , on a:
M
kR(λ; A)n k ≤ , (∀)n ∈ N∗ .
(Reλ − ω)n
Si {Aλ }λ∈Λω est l’approximation généralisée de Yosida de l’opérateur A, alors pour
tous α, β ∈ Λω nous avons:

≤ M 2 teωt kAα x − Aβ xk
tAα
x − etAβ x

e , (∀)x ∈ E et t ≥ 0.

Preuve Soient α, β ∈ Λω , v ∈ [0, 1] et x ∈ E. Alors:


d  vtAα (1−v)tAβ 
e e x = tAα evtAα e(1−v)tAβ x − tevtAα Aβ e(1−v)tAβ x .
dv
On peut facilement vérifier que Aα , Aβ , evtAα et e(1−v)tAβ commutent quels que
soient α, β ∈ Λω et t ≥ 0. Nous obtenons:
Z1
d  vtAα (1−v)tAβ 
e e x dv =
dv
0
Z1  
= tevtAα Aα e(1−v)tAβ x − tevtAα Aβ e(1−v)tAβ x dv ,
0
58 CHAPITRE 2. SEMI-GROUPES DE CLASSE C0

d’où:
1 Z1  
vtAα (1−v)tAβ
tevtAα e(1−v)tAβ Aα x − tevtAα e(1−v)tAβ Aβ x dv

e e x = ,
0
0

ou bien:
Z1
etAα
x−e tAβ
x = t evtAα e(1−v)tAβ (Aα x − Aβ x) dv
0

quels que soient t ≥ 0 et x ∈ E. Nous en déduisons que:

Z1
t evtAα e(1−v)tAβ kAα x − Aβ xk
tAα
x − etAβ x

e ≤ dv .
0

D’autre part, nous avons:



tAα t(α2 R(α;A)−αI ) −αtI α2 tR(α;A)
e = e
= e e ≤


∞ ∞ tk |α|2k k
X tk α2k R(α; A)k X R(α; A)
e−Reαt ≤ e−Reαt

≤ ≤

k=0
k!
k=o
k!
  k
∞ ∞ t|α|2
X tk |α|2k M X Reα−ω
≤ e−Reαt = Me−Reαt =
k=0 k!(Reα − ω)
k k!
k=0
t|α|2 2
ω Reα+Im α
t
= Me−Reαt e Reα−ω = Me Reα−ω ,

quel que soient α ∈ Λω et t ≥ 0. Soit r > 1 tel que:

ωReα + Im2 α
< ωr .
Reα − ω
Alors, nous avons:
ωReα + Im2 α < ωrReα − ω 2 r ,

d’où:
ωReα < ωrReα − ω 2 r ,

ou bien:
ω 2 r < ω(r − 1)Reα .

Il en découle:
r
ω . Reα >
r−1
r
Par conséquent, pour tout r > 1 et tout α ∈ Λω tel que Reα > r−1
ω, on obtient:

tAα
e ≤ Merωt , (∀)t ≥ 0
2.3. LE THÉORÈME DE HILLE - YOSIDA 59

et par passage à limite pour r ց 1, nous obtenons:



tAα
e ≤ Meωt , (∀)t ≥ 0,

pour tout α ∈ Λω . Il vient:

Z1
tAα
x − etAβ x Meωvt Meω(1−v)t kAα x − Aβ xk dv =

e ≤ t
0
= M 2 teωt kAα x − Aβ xk

quels que soient x ∈ E et t ≥ 0.


Maintenant nous présentons une variante du célèbre théorème de Hille - Yosida
pour les semi-groupes de classe SG(M, ω).

Théorème 2.3.11 (Hille - Yosida) Un opérateur linéaire:

A : D(A) ⊂ E −→ E

est le générateur infinitésimal d’un semi-groupe {T (t)}t≥0 ∈ SG(M, ω) si et seule-


ment si:
i) A est un opérateur fermé et D(A) = E;
ii) il existe ω ≥ 0 et M ≥ 1 tel que Λω ⊂ ρ(A) et pour λ ∈ Λω , on a:
M
kR(λ; A)n k ≤ , (∀)n ∈ N∗ .
(Reλ − ω)n
Preuve =⇒ On obtient cette implication en tenant compte du théorème 2.2.7 et
du théorème 2.3.5.
⇐= Supposons que l’opérateur A : D(A) ⊂ E −→ E posséde les propriétés (i)
et (ii). Soit {Aλ }λ∈Λω , l’approximation généralisée de Yosida de l’opérateur A.
Compte tenu du lemme 2.3.6, il résulte que Aλ ∈ B(E) et:

lim Aλ x = Ax , (∀)x ∈ D(A).


Reλ→∞
n o
Pour λ ∈ Λω , soit {Tλ (t)}t≥0 = etAλ le semi-groupe uniformément continu
t≥0
engendré par Aλ . Avec le lemme 2.3.10, on a:

kTα (t)x − Tβ (t)xk ≤ M 2 teωt kAα x − Aβ xk , (∀)α, β ∈ Λω , x ∈ D(A) et t ≥ 0.

Soient [D(A)] l’espace de Banach D(A) avec la norme k . kD(A) , et B([D(A)], E)


l’espace des opérateurs linéaires bornés définis sur [D(A)] avec valeur dans E, doté
60 CHAPITRE 2. SEMI-GROUPES DE CLASSE C0

de la topologie forte. Notons par C ([0, ∞); B([D(A)], E)) l’espace des fonctions
continues définies sur [0, ∞) à valeurs dans B([D(A)], E) doté de la topologie de
la convergence uniforme sur les intervalles compacts de [0, ∞). Si [a, b] ⊂ [0, ∞),
alors pour tout x ∈ D(A) nous avons:

sup kTα (t)x − Tβ (t)xk ≤ M 2 beωb (kAα x − Axk + kAβ x − Axk) −→ 0


t∈[a,b]
 
si Reα, Reβ → ∞, d’où il résulte que {Tλ (t)}t≥0 est une suite de Cauchy
λ∈Λω
dans C ([0, ∞); B([D(A)], E)). Donc, il existe un unique T0 ∈ C ([0, ∞); B(D(A), E))
tel que Tλ (t)x −→ T0 (t)x, si Reλ → ∞, quel que soit x ∈ D(A), pour la topologie
de la convergence uniforme sur les intervalles compacts de [0, ∞). Puisque:

kTλ (t)k ≤ Meωt , (∀)t ≥ 0,

on obtient:
kT0 (t)xk ≤ Meωt kxk , (∀)t ≥ 0 et x ∈ D(A)

Considérons l’application linéaire:

Θ0 : D(A) −→ C ([a, b]; E)

Θ0 x = T0 ( . )x

quel que soit [a, b] ⊂ [0, ∞). Comme nous avons:

kΘ0 xkC([a,b];E) = sup kT0 (t)xk ≤ Meωb kxk ≤ Meωb kxkD(A) , (∀)x ∈ D(A),
t∈[a,b]

on voit que Θ0 est une application continue et puisque D(A) = E, elle se prolonge
de façon unique en une application linéaire continue:

Θ : E −→ C ([a, b]; E)

telle que:
Θ|D(A) = Θ0

et:
kΘxkC([a,b];E) ≤ Meωb kxk

quel que soit x ∈ E. Par conséquent, il existe un seul opérateur T ∈ C ([a, b]; B(E))
tel que:
Θx = T ( . )x , (∀)x ∈ E.
2.3. LE THÉORÈME DE HILLE - YOSIDA 61

On peut répéter ce procédé pour tous les intervalles compacts de [0, ∞) et on voit
qu’il existe un seul opérateur, noté aussi par T ∈ C ([0, ∞); B(E)), tel que pour
tout x ∈ E on ait:
Tλ (t)x −→ T (t)x si Reλ → ∞,

uniformément par rapport à t sur les intervalles compacts de [0, ∞). De plus:

kT (t)k ≤ Meωt , (∀)t ≥ 0.

Il est évident que:

T (0)x = lim Tλ (0)x = x , (∀)x ∈ E


Reλ→∞

et:
   
lim T (t)x = lim lim Tλ (t)x = lim lim Tλ (t)x = x , (∀)x ∈ E.
tց0 tց0 Reλ→∞ Reλ→∞ tց0

Soient t, s ∈ [0, ∞) et x ∈ E. Alors, nous avons:

kT (t + s)x − T (t)T (s)xk ≤ kT (t + s)x − Tλ (t + s)xk +


+ kTλ (t + s)x − Tλ (t)T (s)xk + kTλ (t)T (s)x − T (t)T (s)xk ≤
≤ kT (t + s)x − Tλ (t + s)xk + kTλ (t)k kTλ (s)x − T (s)xk +
+ kTλ (t) (T (s)x) − T (t) (T (s)x)k .

Puisque Tλ (t) −→ T (t), si Reλ → ∞, pour la topologie forte de B(E), il s’ensuit


que T (t + s)x = T (t)T (s)x, pour tout x ∈ E.
Par conséquent {T (t)}t≥0 ∈ SG(M, ω).
Montrons que A est le générateur infinitésimal du semi-groupe {T (t)}t≥0 .
Pour tout x ∈ D(A) on a:

kTλ (s)Aλ x − T (s)Axk ≤


≤ kTλ (s)k kAλ x − Axk + kTλ (s)Ax − T (s)Axk ≤
≤ Meωt kAλ x − Axk + kTλ (s)Ax − T (s)Axk −→ 0

si Reλ → ∞, uniformément par rapport à s ∈ [0, t], d’où:

Zt Zt
T (t)x − x = lim [Tλ (t)x − x] = lim Tλ (s)Aλ x ds = T (t)Ax ds
Reλ→∞ Reλ→∞
0 0
62 CHAPITRE 2. SEMI-GROUPES DE CLASSE C0

quels que soient x ∈ D(A) et t ≥ 0.


Soit B le générateur infinitésimal du C0 -semigroupe {T (t)}t≥0 . Si x ∈ D(A), alors:
Zt
T (t)x − x 1
lim = lim T (s)Ax ds = Ax
tց0 t tց0 t
0

et nous voyons que x ∈ D(B). Par conséquent D(A) ⊂ D(B) et B|D(A) = A.


D’autre part, nous avons l’inégalité:

kT (t)k ≤ Meωt , (∀)t ≥ 0.

Si λ ∈ Λω , alors λ ∈ ρ(A) ∩ ρ(B). Soit x ∈ D(B), on a donc (λI − B) x ∈ E


et comme l’opérateur λI − A : D(A) −→ E est bijectif, il existe x′ ∈ D(A) tel
que (λI − A) x′ = (λI − B) x. Puisque B|D(A) = A, il vient que (λI − B) x′ =
(λI − B) x et comme λ ∈ ρ(B), il en résulte que x′ = x. Par suite x ∈ D(A) et
donc D(B) ⊂ D(A).
Finalement on voit que D(A) = D(B) et A = B.
Nous avons montré donc que A est le générateur infinitésimal du C0 -semi-groupe
{T (t)}t≥0 et compte tenu du théorème de l’unicité de l’engendrement, il résulte
que {T (t)}t≥0 est l’unique C0 -semi-groupe engendré par A.

Corollaire 2.3.12 Soient {T (t)}t≥0 ∈ SG(M, ω) , A son générateur infinitésimal


et {Aλ }λ∈Λω l’approximation généralisée de Yosida de l’opérateur A. Alors:

T (t)x = lim etAλ x , (∀)x ∈ E,


Reλ→∞

uniformément par rapport à t sur les intervalles compacts de [0, ∞).

Preuve Elle résulte du théorème de Hille-Yosida.


Dans la suite nous noterons par GI(E) l’ensemble des opérateurs linéaires qui
sont des générateurs infinitésimaux de C0 -semi-groupes sur l’espace de Banach E.
De même, pour ω ≥ 0 et M ≥ 1, nous noterons par GI(M, ω) l’ensemble des
générateurs infinitésimaux A ∈ GI(E) pour lesquels:
M
kR(λ; A)n k ≤ (∀)λ ∈ Λω et n ∈ N∗ .
(Reλ − ω)n
2.4. LA REPRÉSENTATION DE BROMWICH 63

2.4 La représentation de Bromwich


Dans la section 1.3, avec le théorème 1.3.12 nous avons vu que pour les
semi-groupes uniformément continus on peut obtenir une représentation par la
transformée de Laplace inverse. Dans ce paragraphe nous montrerons qu’il existe
une représentation du même type pour les C0 -semi-groupes. Nous commençons
avec quelques propriétés sur l’approximation généralisée de Yosida.

Lemme 2.4.1 Soient {T (t)}t≥0 ∈ SG(M, ω) , A son générateur infinitésimal et


{Aµ }µ∈Λω l’approximation généralisée de Yosida de l’opérateur A. Alors pour tout
µ ∈ Λω , il existe Ω > ω tel que ΛΩ ⊂ ρ(Aµ ) et pour tout λ ∈ ΛΩ on a:

M
kR(λ; Aµ )k ≤ .
Reλ − Ω

De plus, pour ε > 0, il existe une constante C > 0 (qui dépend de M et ε) tel que:

C
kR(λ; Aµ )xk ≤ (kxk + kAxk) , (∀)x ∈ D(A),
|λ|
|µ|
quels que soient λ, µ ∈ C, avec Reλ > Ω + ε et Reµ > ω + 2
.

Preuve Soit µ ∈ Λω arbitrairement fixé. Nous avons vu que Aµ est le générateur


n o
infinitésimal du semi-groupe uniformément continu etAµ . En ce cas, nous
t≥0
avons:
2
ω Reµ+Im µ
tAµ t
e ≤ Me Reµ−ω , (∀)t ≥ 0.

Si nous notons:
ωReµ + Im2 µ
Ω= ,
Reµ − ω
alors il est clair que:
ω 2 + Im2 µ
Ω=ω+ >ω
Reµ − ω
et que ΛΩ = {λ ∈ C |Reλ > Ω} ⊂ ρ(Aµ ). De plus, pour tout λ ∈ ΛΩ , nous avons:

M
kR(λ; Aµ )k ≤ .
Reλ − Ω

Si nous considérons λ ∈ C tel que Reλ > Ω + ε, où ε > 0, alors on voit que:

M
kR(λ; Aµ )k ≤ .
ε
64 CHAPITRE 2. SEMI-GROUPES DE CLASSE C0

|µ|
D’autre part, pour x ∈ D(A) et µ ∈ Λω tel que Reµ > ω + 2
, nous obtenons:

kAµ xk = kµR(µ; A)Axk ≤ |µ|kR(µ; A)kkAxk ≤


M
≤ |µ| kAxk ≤ 2MkAxk .
Reµ − ω
De l’égalité:
(λI − Aµ )R(λ; Aµ ) = I ,

il vient:
1 1
R(λ; Aµ ) = I + R(λ; Aµ )Aµ
λ λ
et par conséquent:
1
kR(λ; Aµ )xk ≤ (kxk + kR(λ; Aµ )kkAµ xk) ≤
|λ|
!
1 2M 2
≤ kxk + kAxk ≤
|λ| ε
C
≤ (kxk + kAxk) , (∀)x ∈ D(A),
|λ|
où la constante C ne dépend que de M et de ε.

Lemme 2.4.2 Soient {T (t)}t≥0 ∈ SG(M, ω) , A son générateur infinitésimal,


{Aµ }µ∈Λω l’approximation généralisée de Yosida de l’opérateur A et λ ∈ C tel que
Reλ > ω + ε, arbitrairement fixé pour ε > 0. Alors:

lim R(λ; Aµ )x = R(λ; A)x , (∀)x ∈ E,


Reµ→∞

uniformément par rapport à Imλ ∈ [−k, k], où k > 0.

Preuve Compte tenu du lemme 2.4.1, pour µ ∈ Λω , il existe Ω > ω tel que
ΛΩ ⊂ ρ(Aµ ). Nous avons:
ωReµ + Im2 µ
Ω= .
Reµ − ω
Donc l’inégalité Reλ > Ω est équivalente avec:
ω 2 + Imµ
Reλ > ω + .
Reµ − ω
ω 2 +Imµ
Soit ε > 0. Si µ ∈ Λω tel que Reµ−ω
< ε, alors Reλ > ω + ε implique Reλ > Ω.
Par suite, λ ∈ ρ(Aµ ). Donc il existe R(λ; Aµ ) et avec le lemme 2.4.1 on voit que:
M
kR(λ; Aµ )k ≤ .
Reλ − ω
2.4. LA REPRÉSENTATION DE BROMWICH 65

D’autre part, nous avons:


!
λµ λ2 λ2
Re = Re λ − = Reλ − Re >
λ+µ λ+µ λ+µ
λ2
> ω + ε − Re .
λ+µ
λ 2
Etant donné k > 0 tel que |Imλ| ≤ k, il existe µ ∈ Λω tel que Re λ+µ < 2ε . Il
 
λµ λµ λµ
s’ensuit que Re λ+µ > ω + 2ε . Par conséquent, λ+µ
∈ ρ(A) et donc R λ+µ
;A
existe bien. Nous avons:
!
1 λµ
(λI − Aµ )(µI − A)R ;A =
λ+µ λ+µ
!
1 h 2
i λµ
= λI − µ R(µ; A) + µI (µI − A)R ;A =
λ+µ λ+µ
! !
µ2 λµ
= µI − A − I R ;A =
λ+µ λ+µ
! !
λµ λµ
= I −A R ;A = I .
λ+µ λ+µ
Par un calcul analogue, on peut obtenir:
!
1 λµ
(µI − A)R ; A (λI − Aµ ) = I .
λ+µ λ+µ
Il s’ensuit que:
!
1 λµ
R(λ; Aµ ) = (µI − A)R ;A .
λ+µ λ+µ
Par conséquent:
!
1 λµ
R(λ; Aµ ) − R(λ; A) = (µI − A)R ; A − R(λ; A) =
λ+µ λ+µ
" ! #
1 λµ
= (µI − A)R ; A − (λ + µ)R(λ; A) =
λ+µ λ+µ
!"
1 λµ
= (µI − A)R ; A (µI − A)(λI − A) −
λ+µ λ+µ
!#
λµ
− (λ + µ) I − A R(µ; A)R(λ; A) =
λ+µ
!
1 λµ
= (µI − A)R ; A A2 R(µ; A)R(λ; A) =
λ+µ λ+µ
!
1 λµ
= R ; A R(λ; A)A2 .
λ+µ λ+µ
66 CHAPITRE 2. SEMI-GROUPES DE CLASSE C0

Mais:
M
kR(λ; A)k ≤
ε
et: !

λµ
2M
R ;A ≤ .
λ+µ ε
Si x ∈ D(A2 ), alors on voit que:

kR(λ; Aµ )x − R(λ; A)xk ≤


!
1 λµ
≤ R ; A kR(λ; A)kkA2 xk ≤
|λ + µ| λ+µ
1 2M M 2 1 2M 2 2
≤ kA xk ≤ kA xk .
|µ| ε ε Reµ ε2

Il s’ensuit que:

lim R(λ; Aµ )x = R(λ; A)x , (∀)x ∈ D(A2 ),


Reµ→∞

uniformément par rapport à Imλ ∈ [−k, k], où k > 0. Avec le théorème 2.2.10, on
sait que D(A2 ) = E. Comme R(λ; A) et R(λ; Aµ ) sont uniformément bornés, on
obtient:
lim R(λ; Aµ )x = R(λ; A)x , (∀)x ∈ E,
Reµ→∞

uniformément par rapport à Imλ ∈ [−k, k], où k > 0.

Théorème 2.4.3 Soit A le générateur infinitésimal du semi-groupe {T (t)}t≥0 ∈


SG(M, ω) et λ ∈ Λω . Alors pour tout x ∈ D(A) on a:

Zt Reλ−i∞
Z
dz
T (s)x ds = ezt R(z; A)x
z
0 Reλ−i∞

et l’intégrale de la partie droite de l’égalité est uniformément convergente par


rapport à t sur les intervalles compacts de ]0, ∞).

Preuve Soit {Aµ }µ∈Λω l’approximation généralisée de Yosida de l’opérateur A.


|µ|
Soit µ ∈ Λω tel que Re µ > ω + 2
. Avec le lemme 2.4.1, nous déduissons qu’il
ωReµ+Im2 µ
existe Ω = Reµ−ω
> ω tel que ΛΩ = {λ ∈ C|Re λ > Ω} ⊂ ρ(Aµ ). Soit λ ∈ ΛΩ .
En utilisant le théorème 1.3.12, pour R > 2Re λ on peut considérer le contour de
Jordan Aµ -spectral
′ ”
Γ1R = Γ1R ∪ Γ1R ,
2.4. LA REPRÉSENTATION DE BROMWICH 67

où

Γ1R = {Re λ + iτ |τ ∈ [−R, R]}

et   
” π 3π
Γ1R = Re λ + R(cos ϕ + i sin ϕ) ϕ ∈ , .
2 2
n o
Pour le semi-groupe uniformément continu etAµ engendré par Aµ il en résulte:
t≥0

ReZλ+iR ReZλ+i∞
tAµ 1 zt 1
e = lim e R(z; Aµ ) dz = ezt R(z; Aµ ) dz ,
R→∞ 2πi 2πi
Re λ−iR Re λ−i∞

uniformément par rapport à t sur les intervalles compacts de [0, ∞). Pour R >
2Re λ et x ∈ D(A) nous notons
ReZλ+iR
1
IR (s) = ezs R(z; Aµ )x dz .
2πi
Re λ−iR

Soient 0 < a < b. Pour tout t ∈ [a, b] nous obtenons:

Zt Zt ReZλ+iR
1
IR (s) ds = ezs R(z; Aµ )x dz ds =
2πi
0 0 Re λ−iR
ReZλ+iRZt
1
= ezs dsR(z; Aµ )x dz =
2πi
Re λ−iR 0
ReZλ+iR ReZλ+iR
1 zt dz 1 dz
= e R(z; Aµ )x − R(z; Aµ )x .
2πi z 2πi z
Re λ−iR Re λ−iR

Montrons que pour l’intégrale


ReZλ+iR
1 dz
I(R) = R(z; Aµ )x ,
2πi z
Re λ−iR

on a
lim I(R) = 0 .
R→∞

Soit le contour de Jordan lisse et fermé


′ ”
Γ2R = Γ2R ∪ Γ2R ,

où

Γ2R = {Re λ + iτ |τ ∈ [−R, R]}
68 CHAPITRE 2. SEMI-GROUPES DE CLASSE C0

et   
” π π
Γ2R
= ∈ − ,
Re λ + R(cos ϕ + i sin ϕ) ϕ .
2 2
Avec le théorème de Cauchy ([DS’67, pag. 225]), on voit que

1 Z dz
R(z; Aµ )x =0 ,
2πi 2 z
ΓR

ou bien Z Z
1 dz 1 dz
R(z; Aµ )x + R(z; Aµ )x =0 .
2πi ′
z 2πi ”
z
Γ2R Γ2R


Soit z ∈ Γ2 . Compte tenu du lemme 2.4.1, il existe C > 0 tel que
C
kR(z; Aµ )xk ≤ (kxk + kAxk) .
|z|

De plus, pour z ∈ Γ2” R on a:

|z| = |Re λ + R(cos ϕ + isinϕ)| = |Re λ − [−R(cos ϕ + i sin ϕ)]| ≥


≥ | |Re λ| − | − R(cos ϕ + i sin ϕ)| | = |Re λ − R| = R − Re λ ,

d’où il résulte
1 1
≤ .
|z| R − Re λ
Par conséquent, on a:



1
Z
dz 1 Z |dz|
R(z; Aµ )x ≤ kR(z; Aµ )xk ≤
2πi


z 2π ” |z|
Γ2R Γ2R

1 Z
C 1 C kxk + kAxk Z
≤ (kxk + kAxk) |dz| ≤ |dz| =
2π ”
|z| |z| 2π (R − Re λ)2 ”
Γ2R Γ2R

C R
= (kxk + kAxk) .
2 (R − Re λ)2

Il s’ensuit donc que:


1 Z dz
lim R(z; Aµ )x =0 .
R→∞ 2πi z

Γ2R

Par suite, on a:
1 Z dz
lim R(z; Aµ )x =0
R→∞ 2πi z

Γ2R
2.4. LA REPRÉSENTATION DE BROMWICH 69

ou bien
lim I(R) = 0 .
R→∞

Alors nous avons:


Zt ReZλ+iR
1 dz
lim IR (s) ds = lim ezt R(z; Aµ )x
R→∞ R→∞ 2πi z
0 Re λ−iR

d’où
Zt ReZλ+i∞
1 dz
IR (s) ds = ezt R(z; Aµ )x .
2πi z
0 Re λ−i∞

Avec le corollaire 2.3.12 et le lemme 2.4.2, on obtient:

Zt Zt
T (s)x ds = lim esAµ x ds =
Reµ→∞
0 0
ReZλ+i∞
1 dz
= lim ezt R(z; Aµ )x =
Reµ→∞ 2πi z
Re λ−i∞
ReZλ+i∞
1 dz
= ezt R(z; A)x
2πi z
Re λ−i∞

et comme:
ωReµ + Im2 µ
lim Ω = lim =ω ,
Reµ→∞ Reµ→∞ Reµ − ω
nous obtenons le résultat désiré.

Théorème 2.4.4 (Bromwich) Soit A le générateur infinitésimal d’un semi-groupe


{T (t)}t≥0 ∈ SG(M, ω) et λ ∈ Λω . Alors:

Reλ+i∞
Z
1
T (t)x = ezt R(z; A)x dz , (∀)x ∈ D(A2 )
2πi
Reλ−i∞

et pour tout δ > 0, l’intégrale est uniformément convergente par rapport à t ∈


h i
δ, 1δ .

Preuve Si x ∈ D(A2 ), alors Ax ∈ D(A). Compte tenu du théorème 2.4.3, on voit


que:
Zt Reλ+i∞
Z
1 dz
T (s)Ax ds = ezt R(z; A)Ax .
2πi z
0 Reλ−i∞
70 CHAPITRE 2. SEMI-GROUPES DE CLASSE C0

D’où il résulte que:


Reλ+i∞
Z
1 dz
T (s)x − x = ezt R(z; A)Ax .
2πi z
Reλ−i∞

De l’égalité:
R(z; A)(zI − A) = I ,

nous déduisons:
1 1
R(z; A)A = R(z; A) − I
z z
et par suite:
Reλ+i∞
Z Reλ+i∞
Z
1 zt 1 dz
T (s)x − x = e R(z; A)x dz − ezt x .
2πi 2πi z
Reλ−i∞ Reλ−i∞

Compte tenu que:


Reλ+i∞
Z
1 dz
ezt x =x
2πi z
Reλ−i∞

et que pour tout δ > 0, l’intégrale est uniformément convergente par rapport à
h i
t ∈ δ, 1δ , nous obtenons l’égalité de l’énoncé.

2.5 Conditions suffisantes d’appartenances à GI(M, 0)


Nous présentons dans la suite deux conditions suffisantes pour qu’un opérateur
soit le générateur infinitésimal d’un C0 -semi-groupe uniformément borné.

Théorème 2.5.1 Soit A un opérateur linéaire fermé défini sur un sous espace
dense de E et vérifiant les propriétés suivantes:
i h
i) il existe δ ∈ 0, π2 tel que:
 
π
ρ(A) ⊃ Σδ = λ ∈ C | arg z| < + δ ∪ {0};
2
ii) il existe une constante K > 1 tel que:
K
kR(λ; A)k ≤ , (∀)λ ∈ Σδ − {0}.
|λ|
2.5. CONDITIONS SUFFISANTES D’APPARTENANCES À GI(M, 0) 71

Alors A est le générateur infinitésimal d’un semi-groupe {T (t)}t≥0 pour lequel il


existe M > 1 tel que kT (t)k ≤ M, pour tout t ≥ 0.
i h
π π
De plus, pour tout ν ∈ ,
2 2
+ δ et Γν = Γ(1) (2)
ν ∪ Γν , où:

Γ(1)
ν = {r(cos ν − i sin ν)| r ∈ [0, ∞)}

et:
Γ(2)
ν = { r(cos ν + i sin ν)| r ∈ [0, ∞)} ,

on a:
1 Z zt
T (t) = e R(z; A) dz
2πi
Γν

et l’intégrale est uniformément convergente par rapport à t > 0.


i h i h
Preuve Soit δ ∈ 0, π2 . Pour ν ∈ π π
,
2 2
+ δ considérons le chemin d’intégration
Γν = Γ(1) (2)
ν ∪ Γν , où:

Γ(1)
ν = {r(cos ν − i sin ν)| r ∈ [0, ∞)}

et:
Γ(2)
ν = { r(cos ν + i sin ν)| r ∈ [0, ∞)} .

Soit:
1 Z zt
U(t) = e R(z; A) dz .
2πi
Γν

Compte tenu du (ii), on voit que l’intégrale est uniformément convergente par
rapport à t > 0. Pour R > 0, nous définissons le contour de Jordan lisse et fermé
(1) (2) (3)
Γν = ΓR,ν ∪ ΓR,ν ∪ ΓR,ν où

(1)
ΓR,ν = {r(cos ν − i sin ν)| r ∈ [0, R]} ,

(2)
ΓR,ν = { R(cos ν + i sin ν)| θ ∈ [−ν, ν]} ,

et
(3)
ΓR,ν = {r(cos ν + i sin ν)| r ∈ [0, R]} .

D’aprés le théorème de Cauchy ([DS’67, pag. 225]), on a


Z
ezt R(z; A) dz = 0 .
ΓR,ν
72 CHAPITRE 2. SEMI-GROUPES DE CLASSE C0

(1) (2) (3)


Par conséquent, on peut changer le chemin d’intégration Γν par Γt = Γt ∪Γt ∪Γt
où   
(1) 1
Γt = r(cos ν − i sin ν) r ∈ ,∞ ,
t
 
(2) 1
Γt = (cos θ + i sin θ) | θ ∈ [−ν, ν]
t
et   
(3) 1
Γt = r(cos ν + i sin ν) r ∈ ,∞ .
t
Alors:
Z Z Z
1 zt 1 zt 1
U(t) = e R(z; A) dz + e R(z; A) dz + ezt R(z; A) dz
2πi 2πi 2πi
(1) (2) (3)
Γt Γt Γt

et si nous notons Z
1
U1 (t) = ezt R(z; A) dz ,
2πi
(1)
Γt
Z
1
U2 (t) = ezt R(z; A) dz
2πi
(2)
Γt

et Z
1
U3 (t) = ezt R(z; A) dz ,
2πi
(3)
Γt

il vient:
kU(t)k ≤ kU1 (t)k + kU2 (t)k + kU3 (t)k .
i h
π π
Comme ν ∈ ,
2 2
+ δ , on en déduit que cos ν < 0. Avec le changement de variable
 
1
z = r(cos ν − i sin ν) , r ∈ ,∞ ,
t
nous avons:


Z
1 zt

kU1 (t)k = e R(z; A) dz =
2πi


(1)
t Γ


Z∞
1
= ert(cos ν−i sin ν) R(r(cos ν − i sin ν); A)(cos ν − isinν) dr ≤
2πi 1



t
Z∞ Z∞
K K K 1
≤ ert cos ν dr = e−rt(− cos ν) dr .
2π 1 r 2π 1 r
t t
2.5. CONDITIONS SUFFISANTES D’APPARTENANCES À GI(M, 0) 73

Pour
s = rt(− cos ν) , s ∈ [− cos ν, ∞),

il vient ds = −t cos νdr. Donc:


Z∞ Z∞
K −s −t cos ν 1 K e−s
kU1 (t)k ≤ e ds = ds ≤
2π s −t cos ν 2π s
− cos ν − cos ν
Z∞  
K 1 K 1 ′
≤ 2
ds = =M .
2π s 2π − cos ν
− cos ν

De façon analogue, nous obtenons:




Z
1 zt

kU3 (t)k = e R(z; A) dz =
2πi


(3)
Γ t


Z∞
1
= ert(cos ν+i sin ν) R(r(cos ν + i sin ν); A)(cos ν + isinν) dr ≤
2πi 1



t
Z∞
K K ′
≤ ert cos ν dr ≤ M .
2π 1 r
t

De même, pour l’intégrale U2 (t), avec le changement de variable


1
z = (cos θ + i sin θ) , θ ∈ [−ν, ν],
t
on a
1
dz = (− sin θ + i cos θ) dθ
t
et


Z
1 zt
kU2 (t)k = e R(z; A) dz =
2πi


(2)
Γ t

Zν  
1 t 1t (cos θ+i sin θ) 1 1
= e R (cos θ + i sin θ); A (−sinθ + i cos θ) dθ ≤
2πi

t t
−ν
Zν Zν Zν
1 K 1 K Ke
≤ ecos θ 1 dθ = cos θ
e dθ ≤ dθ = M ” .
2π t
t 2π 2π
−ν −ν −ν

Par conséquent, il existe M ≥ 1 tel que:

kU(t)k ≤ M , (∀)t ≥ 0.
74 CHAPITRE 2. SEMI-GROUPES DE CLASSE C0

Nous allons maintenant montrer que pour tout λ ∈ Λ0 = {λ ∈ C |Reλ > 0 }, on a:


Z∞
R(λ; A) = e−λt U(t) dt .
0

Nous avons successivement:


Zτ Zτ Z
−λt 1
e U(t) dt = e−(λ−z)t R(z; A) dzdt =
2πi
0 0 Γν
Z Zτ
e(z−λ)τ − 1
Z
1 (z−λ)t 1
= e dtR(z; A) dz = R(z; A) dz =
2πi 2πi z−λ
Γν 0 Γν
Z (z−λ)τ Z
1 e 1 R(z; A)
= R(z; A) dz + dz =
2πi z−λ 2πi λ−z
Γν Γν
Z (z−λ)τ
1 e
= R(z; A) dz + (λI − A)−1 =
2πi z−λ
Γν

1 Z e(z−λ)τ
= R(z; A) dz + R(λ; A) .
2πi z−λ
Γν

Par conséquent:
τ

Z 1 Z (z−λ)τ

e−λt U(t) dt − R(λ; A) e

= R(z; A) dz ≤



2πi
z−λ

0 Γν

|e(z−λ)τ | e(Rez−Reλ)τ K
Z Z
1 1
≤ kR(z; A)k |dz| ≤ |dz| =
2π |z − λ| 2π |z − λ| |z|
Γν Γν
Z
K −τ Reλ 1 1
= e eτ Re |dz| .
2π |z − λ| |z|
Γν

Soit
K Z τ Rez |dz|
Cτ = e .
2π |z||z − λ|
Γν

Pour z ∈ Γν on a |z| = r et

|z − λ| ≥ | |z| − |λ| | = |r − |λ| | .

Donc:
Z∞ Z∞
K τ Rez 1 1 K τ Rez 1
Cτ ≤ e dr = e dr < ∞ .
2π |r − |λ|| r 2π r|r − |λ||
0 0
2.5. CONDITIONS SUFFISANTES D’APPARTENANCES À GI(M, 0) 75

Si nous notons
C = sup Cτ ,
τ ≥0

alors nous obtenons:


τ
Z

e−λt U(t) dt − R(λ; A) ≤ Ce−τ Reλ .


0

En passant à limite pour τ → ∞, on obtient


Z∞
R(λ; A) = e−λt U(t) dt
0

pour tout λ ∈ Λ0 . Comme kU(t)k ≤ M, pour tout t ≥ 0, par récurrence on peut


obtenir:
Z∞
dn−1
R(λ; A) = (−1)n−1 tn−1 e−λt U(t) dt , (∀)n ∈ N∗ .
dλn−1
0

Mais avec la proposition 1.1.16 (iii), on voit que:


dn−1
R(λ; A) = (−1)n−1 (n − 1)!R(λ; A)n , (∀)n ∈ N∗ .
dλn−1
Par conséquent, nous obtenons:

Z∞
1
kR(λ; A)n k = tn−1 −λt
e U(t) dt ≤
(n − 1)!


0
Z∞
M
≤ tn−1 e−Reλt dt =
(n − 1)!
0
Z∞
M n−1 M
= tn−2 e−Reλt dt = · · · =
(n − 1)! Reλ (Reλ)n
0

pour tout n ∈ N∗ . Avec le théorème de Hille-Yosida, on voit que l’opérateur A est


le générateur infinitésimal d’un semi-groupe {T (t)}t≥0 ∈ SG(M, 0).
Soit x ∈ D(A2 ) et λ ∈ Λ0 . Compte tenu du théorème 2.4.4, nous avons:
Reλ+i∞
Z
1
T (t)x = eλt R(λ; A)x dλ
2πi
Reλ−i∞

et compte tenu du (ii) et du théorème de Cauchy, on peut remplacer le contour


d’intégration par Γν . Donc:
Z
1
T (t)x = eλt R(λ; A)x dλ , (∀)x ∈ D(A2 ).
2πi
Γν
76 CHAPITRE 2. SEMI-GROUPES DE CLASSE C0
R
Comme D(A2 ) = E et l’intégrale eλt R(λ; A)dλ est uniformément convergente,
Γν
nous obtenons:
Z
1
T (t)x = eλt R(λ; A)x dλ , (∀)x ∈ E,
2πi
Γν

d’où il résulte l’affirmation de l’énoncé.

Théorème 2.5.2 Soit A un opérateur linéaire fermé défini sur un sous espace
dense de E et vérifiant les propriétés suivantes:
i) σ(A) ⊂ {z ∈ C|Rez ≤ 0};
ii) pour tout x ∈ E et tout x∗ ∈ E ∗ on a:
γ+i∞
Z D E
2
R(λ; A) x, x∗ |dλ|

sup γ <∞ .
γ>0
γ−i∞

Alors A est le générateur infinitésimal d’un semi-groupe {T (t)}t≥0 ∈ SG(M, 0).

Preuve Pour γ > 0 arbitrairement fixé, l’application:


D E
{z ∈ C|Rez > 0} ∋ z 7−→ R(z + γ; A)2 x, x∗ ∈ C

se trouve dans l’espace de Hardy H 1 . Par conséquent elle admet un représentation


par une intégrale de Cauchy et en particulier pour α > 0 et γ ∈]0, α[, on a:
γ+i∞
hR(λ; A)2 x, x∗ i
Z
D
2 ∗
E 1
R(α; A) x, x = dλ .
2πi α−λ
γ−i∞

De plus, par récurrence on voit que:


* + γ+i∞
dn hR(λ; A)2 x, x∗ i
Z
n!
R(α; A)2x, x∗ = (−1) n
dλ ,
dαn 2πi (α − λ)n+1
γ−i∞

pour tout n ∈ N∗ . D’autre part, avec la proposition 1.1.16 (iii) il vient:

dn
R(α; A) = (−1)n n!R(α; A)n+1 , (∀)n ∈ N∗
dαn
Par itération nous obtenons:
γ+i∞
hR(λ; A)2 x, x∗ i
Z
D
n+1 ∗
E 1
R(α; A) x, x = dλ ,
2nπi (α − λ)n
γ−i∞
2.5. CONDITIONS SUFFISANTES D’APPARTENANCES À GI(M, 0) 77

pour tout n ∈ N∗ et tout γ ∈]0, α[. Il s’ensuit que pour tout n ∈ N∗ on a:


D E
n+1
x, x∗

R(α; A) ≤
γ+i∞
Z
1 1 D E
R(λ; A)2 x, x∗

≤ |dλ| ≤
2nπ (α − γ)n
γ−i∞
1 C 1
≤ , (∀)γ ∈]0, α[,
2nπ γ (α − γ)n

où la constante C ne dépend que de x ∈ E et de x∗ ∈ E ∗ . Si nous prenons:


α
γ= ,
n+1
alors on voit que:
D E 1 C 1
R(α; A)n+1 x, x∗ ≤

α
 n =
2nπ n+1 α − α
n+1
 −(n+1)
C 1 1 C 1 1 1
=  n+1 = 1− ≤
2π αn+1 n πα n+1 2 n+1
n+1
Ce 1
≤ .
π αn+1
En appliquant le théorème de Banach-Steinhaus ([DS’67, Theorem II.1.11, pag.
52]), on obtient pour tout α > 0:

M
kR(α; A)m k ≤ , (∀)m ∈ {2, 3, . . .}.
αm
Prouvons que cette inégalité reste valable pour m = 1. On a:

Zβ Zα
2
R(τ ; A) dτ = − R(τ ; A)2 dτ =
α β

d
= R(τ ; A) dτ = R(α; A) − R(β; A) , (∀)α, β > 0.

β

Comme pour m = 2 nous avons:


M
R(β; A)2

≤ ,
β2
on en déduit que la limite existe et on pose

R0 x := lim R(β; A)x , (∀)x ∈ E.


β→∞
78 CHAPITRE 2. SEMI-GROUPES DE CLASSE C0

D’autre part, si x ∈ D(A), alors nous avons:

R(β; A)x = R(β; A)2 (βI − A)x −→ 0 si β → ∞.

Comme D(A) = E, il s’ensuit que R0 = 0 et on voit que:

Z∞
R(α; A) = R(τ ; A)2 dτ .
α

Par conséquent:
M
kR(α; A)m k ≤ , (∀)m ∈ N∗ .
αm
En appliquant le théorème de Hille-Yosida, on obtient le résultat désiré.

2.6 Propriétés spectrales des C0-semi-groupes


Nous terminons ce chapitre avec quelques propriétés spectrales pour les C0 -
semi-groupes.

Lemme 2.6.1 Soient {T (t)}t≥0 ∈ SG(M, ω) et A son générateur infinitésimal.


Alors pour tout λ ∈ Λω et t > 0, l’application:

Bλ (t) : E −→ E

Zt
Bλ (t)x = eλ(t−s) T (s)x ds
0

définit un opérateur linéaire borné sur E vérifiant les propriétés suivantes:

(λI − A)Bλ (t)x = eλt x − T (t)x , (∀)x ∈ E

et:
Bλ (t)(λI − A)x = eλt x − T (t)x , (∀)x ∈ D(A).

De plus Bλ (t)T (t) = T (t)Bλ (t).


2.6. PROPRIÉTÉS SPECTRALES DES C0 -SEMI-GROUPES 79

Preuve Pour tout x ∈ E nous avons successivement:


t
Z Zt
λ(t−s)
kBλ (t)xk = e
T (s)x ds ≤ eReλ(t−s) kT (s)kkxk ds ≤

0 0
Zt
≤ MeReλt kxk e−(Reλ−ω)s ds < ∞ .
0

Comme la linéarité est évidente, il en résulte que Bλ (t) ∈ B(E), quels que soient
λ ∈ Λω et t > 0.
Si x ∈ E et h > 0, alors nous obtenons:

Zt
T (h) − I T (h) − I
Bλ (t)x = eλ(t−s) T (s)x ds =
h h
0
Zt Zt
1 1
= eλ(t−s) T (h + s)x ds − eλ(t−s) T (s)x ds =
h h
0 0
t+h
Z Zt
1 1
= eλ(t−τ +h) T (τ )x dτ − eλ(t−s) T (s)x ds =
h h
h 0
λh t+h
Z Zt
e λ(t−τ ) 1
= e T (τ )x dτ − eλ(t−s) T (s)x ds =
h h
h 0
 t+h 
Zh
eλh
Z
=  eλ(t−τ ) T (τ )x dτ − eλ(t−τ ) T (τ )x dτ  −
h
0 0
Zt
1
− eλ(t−s) T (s)x ds =
h
0
t+h Zt
eλh eλh
Z
λ(t−τ )
= e T (τ )x dτ − eλ(t−τ ) T (τ )x dτ +
h h
0 0
λh Zt Zt
e 1
+ eλ(t−τ ) T (τ )x dτ − eλ(t−s) T (s)x ds −
h h
0 0
λh Zh
e
− eλ(t−τ ) T (τ )x dτ =
h
0
λh t+h t
e Z
λ(t−τ ) eλh − 1 Z λ(t−s)
= e T (τ )x dτ + e T (s)x ds −
h h
t 0
λh Zh
e
− eλ(t−τ ) T (τ )x dτ =
h
0
80 CHAPITRE 2. SEMI-GROUPES DE CLASSE C0

t+h Zh
eλh eλh − 1 eλh
Z
λ(t−τ )
= e T (τ )x dτ + Bλ (t)x − eλ(t−τ ) T (τ )x dτ .
h h h
t 0

En passant à limite, on a:

T (h)Bλ (t)x − Bλ (t)x


lim = T (t)x + λBλ (t)x − eλt x ,
hց0 h
d’où Bλ (t)x ∈ D(A) et:

(λI − A)Bλ (t)x = eλt x − T (t)x , (∀)x ∈ E.

Si x ∈ D(A), alors nous avons:

Zt
Bλ (t)Ax = eλ(t−s) T (s)Ax ds =
0
Zt
d
= eλ(t−s) T (s)x ds = T (t)x − eλt x + λBλ (t)x ,
ds
0

d’où l’on tire:

Bλ (t)(λI − A)x = eλt x − T (t)x , (∀)x ∈ D(A).

De plus, nous obtenons que:

Bλ (t)D(A) ⊆ D(A)

et:
(λI − A)Bλ (t)x = Bλ (t)(λI − A)x , (∀)x ∈ D(A) ,

d’où:
ABλ (t)x = Bλ (t)Ax , (∀)x ∈ D(A).

Compte tenu du théorème 2.2.9, on voit que:

Bλ (t)T (t) = T (t)Bλ (t) , (∀)t ≥ 0.

Théorème 2.6.2 (spectral mapping) Soient {T (t)}t≥0 ∈ SG(M, ω) et A son


générateur infinitésimal. Alors:
n o
etσ(A) = eλt λ ∈ σ(A) ⊆ σ(T (t)) ,

(∀)t ≥ 0.
2.6. PROPRIÉTÉS SPECTRALES DES C0 -SEMI-GROUPES 81

Preuve Soit λ ∈ C tel que eλt ∈ ρ(T (t)).


 −1
Alors on peut considérer l’opérateur Q = eλt I − T (t) ∈ B(E). Compte tenu
du lemme 2.6.1 (i), on a:

(λI − A)Bλ (t)x = eλt x − T (t)x , (∀)x ∈ E

et:
Bλ (t)(λI − A)x = eλt x − T (t)x , (∀)x ∈ D(A).

Par multiplication avec Q à droite dans la première égalité et à gauche dans la


seconde, nous obtenons:

(λI − A)Bλ (t)Qx = x , (∀)x ∈ E

et:
QBλ (t)(λI − A)x = x , (∀)x ∈ D(A).

Mais, avec le lemme 2.6.1, il en résulte que:


   
eλt I − T (t) Bλ (t) = Bλ (t) eλt I − T (t) ,

et nous voyons que QBλ (t) = Bλ (t)Q. Par conséquent:

(λI − A)Bλ (t)Qx = x , (∀)x ∈ E

et:
Bλ (t)Q(λI − A)x = x , (∀)x ∈ D(A).

Il s’ensuit que λ ∈ ρ(A) et finalement on voit que:

ρ(T (t)) ⊂ etρ(A) , (∀)t ≥ 0,

ou bien:
etσ(A) ⊆ σ(T (t)) , (∀)t ≥ 0.

Remarque 2.6.3 Nous avons vu que pour les semi-groupes uniformément conti-
nus on a l’égalité:
etσ(A) = σ(T (t)) , (∀)t ≥ 0.

Mais il existe des C0 -semi-groupes pour lesquels l’inclusion du théorème 2.6.2 est
stricte.
82 CHAPITRE 2. SEMI-GROUPES DE CLASSE C0

Définition 2.6.4 On dit que le C0 -semi-groupe {T (t)}t≥0 est nilpotent s’il existe
t0 > 0 tel que T (t) = 0, pour tout t > t0 .

Proposition 2.6.5 Soient {T (t)}t≥0 ∈ SG(M, ω) un semi-groupe nilpotent et A


son générateur infinitésimal. Alors σ(A) = ∅.

Preuve Comme le C0 -semi-groupe {T (t)}t≥0 est nilpotent, il existe t0 > 0 tel que
T (t) = 0, (∀)t > t0 . Pour tout λ ∈ C et tout x ∈ E, on a:

−λt
≤ e−Reλt Meωt kxk ,

e T (t)x (∀)t ∈ [0, t0 ]

et comme:
Z∞
e−λt T (t)x dt = 0 ,
t0

on peut définir la transformée de Laplace:

Rλ : E −→ E

Z∞ Zt0
−λt
Rλ x = e T (t)x dt = e−λt T (t)x dt
0 0

pour tout λ ∈ C. Avec le théorème 2.3.1, il vient λ ∈ ρ(A) et Rλ x = R(λ; A)x,


pour tout x ∈ E. Donc ρ(A) = C, c’est-à-dire σ(A) = ∅.

Remarque 2.6.6 Pour un semi-groupe nilpotent {T (t)}t≥0 ∈ SG(M, ω) ayant


pour générateur infinitésimal l’opérateur A, l’inclusion du théorème 2.6.2 est stricte.

Théorème 2.6.7 Soient {T (t)}t≥0 ∈ SG(M, ω) et A son générateur infinitésimal.


Alors: ( )
1
σ(R(λ; A)) = ζ ∈ σ(A) ∪ {0}
λ−ζ
quel que soit λ ∈ Λω .

Preuve Soient λ ∈ Λω et µ ∈ ρ(A), µ 6= λ. Définissons:

S : E −→ E

par:
S = (λ − µ)(λI − A)R(µ; A).
2.6. PROPRIÉTÉS SPECTRALES DES C0 -SEMI-GROUPES 83

Comme S est un opérateur fermé, avec le théorème du graphe fermé, on voit que
S ∈ B(E). De plus, pour tout x ∈ E nous avons:

SR(λ; A)x = (λ − µ)(λI − A)R(µ; A)R(λ; A)x =


= (λ − µ)(λI − A)R(λ; A)R(µ; A)x = (λ − µ)R(µ; A)x

et:

R(λ; A)Sx = R(λ; A)(λ − µ)(λI − A)R(µ; A)x =


= (λ − µ)R(λ; A)(λI − A)R(µ; A)x = (λ − µ)R(µ; A)x .

Par conséquent SR(λ; A) = R(λ; A)S.


De même, pour x ∈ E on a:
" #
1
S I − R(λ; A) x =
λ−µ
" #
1
= (λ − µ)(λI − A)R(µ; A) I − R(λ; A) x =
λ−µ
= [(λI − A)R(µ; A) − (λ − µ)R(µ; A)] x =
= (λI − A − λI + µI)R(µ; A)x =
= (µI − A)R(µ; A)x = x .

De façon analogue, pour tout x ∈ E on peut montrer que:


" #
1
I − R(λ; A) Sx = x .
λ−µ

Par conséquent:
1
∈ ρ(R(λ; A)) ,
λ−µ
d’où: ( )
1
µ ∈ ρ(A) ⊂ ρ(R(λ; A)) .
λ − µ
Il s’ensuit que: ( )
1
σ(R(λ; A)) ⊂ ζ ∈ σ(A) .
λ−ζ
1
Réciproquement, soit λ ∈ Λω et µ ∈ C, µ 6= λ, tel que λ−µ
∈ ρ(R(λ; A)). Alors il
 
1
existe R λ−µ
; R(λ; A) ∈ B(E) et pour tout x ∈ D(A) nous avons:
! " #−1
1 1
R(λ; A)R ; R(λ; A) x = R(λ; A) I − R(λ; A) x=
λ−µ λ−µ
84 CHAPITRE 2. SEMI-GROUPES DE CLASSE C0
" #−1
h i
−1 −1 1
= R(λ; A) I − R(λ; A) x=
λ−µ
(" # )−1
1
= I − R(λ; A) R(λ; A)−1 x=
λ−µ
" #−1 ( " #)−1
1 1
= R(λ; A)−1 − I x = R(λ; A) −1
I − R(λ; A) x=
λ−µ λ−µ
" #−1 !
1 1
= I − R(λ; A) R(λ; A)x = R ; R(λ; A) R(λ; A)x .
λ−µ λ−µ
Posons: !
1
Q = R(λ; A)R ; R(λ; A) .
λ−µ
Pour tout x ∈ D(A), nous avons:
!
1
(µI − A)Qx = (µI − λI + λI − A)R(λ; A)R ; R(λ; A) x =
λ−µ
!
1
= [(λI − A)R(λ; A) − (λ − µ)R(λ; A)] R ; R(λ; A) x =
λ−µ
!
1
= [I − (λ − µ)R(λ; A)] R ; R(λ; A) x =
λ−µ
" # !
1 1
= (λ − µ) I − R(λ; A) R ; R(λ; A) x = (λ − µ)x ,
λ−µ λ−µ
d’où il résulte que:
1
(µI − A)Qx = x , (∀)x ∈ D(A).
λ−µ
De même, nous obtenons:
!
1
Q(µI − A)x = R(λ; A)R ; R(λ; A) (µI − A)x =
λ−µ
!
1
= R ; R(λ; A) R(λ; A)(µI − λI + λI − A)x =
λ−µ
!
1
= R ; R(λ; A) [R(λ; A)(λI − A) − R(λ; A)(λ − µ)] x =
λ−µ
!
1
= R ; R(λ; A) [I − (λ − µ)R(λ; A)] x =
λ−µ
!" #
1 1
= (λ − µ)R ; R(λ; A) I − R(λ; A) x = (λ − µ)x ,
λ−µ λ−µ
d’où:
1
Q(µI − A)x = x , (∀)x ∈ D(A).
λ−µ
2.7. NOTES 85

Par conséquent µ ∈ ρ(A). Il s’ensuit que:


( )
1
ρ(R(λ; A)) ⊂ µ ∈ ρ(A) ,
λ − µ
ou bien:
( )
1
ζ ∈ σ(A) ⊂ σ(R(λ; A)) , (∀)λ ∈ C avec Reλ > ω.
λ −ζ
Finalement, nous voyons que:
( )
1
σ(R(λ; A)) = ζ ∈ σ(A) , (∀)λ ∈ Λω .
λ−ζ
Si 0 ∈ ρ(R(λ; A)), alors il existe (0I − R(λ; A))−1 ∈ B(E), d’où A ∈ B(E) ce qui
est absurde. Par conséquent 0 ∈ σ(R(λ; A)).

2.7 Notes
Les notions et les résultats de ce chapitre se trouvent dans les monographies concernant les C0 -
semi-groupes d’opérateurs linéaires bornés. Le théorème 2.1.7 se trouve dans [Hi’48, pag.184],
mais une preuve élégante utilisant le théorème de Krein-Šmulian se trouve dans [Da’80, pag.
15]. De même, dans [Pa’83-1, pag. 43] on peut trouver une caractérisation du générateur
infinitésimal d’un C0 -semi-groupe pour la topologie faible.
Pour le théorème de l’unicité de l’engendrement nous avons utilisé [Pa’83-1, pag. 6] et le
théorème 2.2.9 se trouve dans [Da’80, pag. 11].
Le résultat le plus important de ce chapitre est le théorème de Hille-Yosida. Il a été montré
pour la première fois indépendamment par Hille dans [Hi’48] et par Yosida dans [Yo’48] pour les
C0 -semi-groupes de contractions. Quelques années plus tard, Feller dans [Fe’53], Miyadera dans
[Mi’52] et Phillips dans [Ph’52] donnent une preuve pour le cas général d’un C0 -semi-groupe.
Nous avons utilisé les idées du livre de Pazy [Pa’83-1, pag. 8] pour obtenir une preuve dans le
cas le plus général, en utilisant l’approximation généralisée de Yosida que nous avons introduit
dans la définition 2.3.8.
Pour obtenir le représentation de Bromwich d’un C0 -semi-groupe, nous avons utilisé aussi
les idées de Pazy de [Pa’83-1, pag. 29]. Une variante du lemme 2.4.1 se trouve dans [Le’00-2].
Pour le théorème 2.5.1 on peut consulter [Pa’83-1, pag. 30] ou bien [Ah’91, pag. 76]. Le
téorème 2.5.2 a été montré par Gomilko dans [Go’99].
Pour les propriétés spectrales des C0 -semi-groupes on peut consulter [Pa’83-1, pag. 44] où
on peut trouver aussi des autres résultats sur cette problème. Finalement, pour le théorème 2.6.7
on pourra consulter [Da’80, pag. 39].
86 CHAPITRE 2. SEMI-GROUPES DE CLASSE C0
Chapitre 3

C0-semigroupes avec propriétés


spéciales

3.1 C0-semi-groupes différentiables


Par la suite, nous étudierons les propriétés des C0 -semi-groupes pour lesquels
l’application ]0, ∞) ∋ t 7−→ T (t)x ∈ E est différentiable, quel que soit x ∈ E.

Définition 3.1.1 On dit que {T (t)}t≥0 est un C0 -semi-groupe différentiable (et


notons {T (t)}t≥0 ∈ SGD(M, ω)) si l’application:

]0, ∞) ∋ t 7−→ T (t)x ∈ E

est différentiable, quel que soit x ∈ E.

Théorème 3.1.2 Soient {T (t)}t≥0 ∈ SG(M, ω) et A son générateur infinitésimal.


Les affirmations suivantes sont équivalentes:
i) {T (t)}t≥0 ∈ SGD(M, ω) ;
ii) Im T (t) ⊂ D(A) , (∀)t > 0.

Preuve i) =⇒ ii) Soient x ∈ E et t, h > 0. Puisque l’application:

]0, ∞) ∋ t 7−→ T (t)x ∈ E

est différentiable, la limite du rapport

T (t + h)x − T (t)x
,
h
87
88 CHAPITRE 3. C0 -SEMIGROUPES AVEC PROPRIÉTÉS SPÉCIALES

lorsque h ց 0, existe et est égale par définition avec AT (t)x. Par conséquent,
T (t)x ∈ D(A).
ii) =⇒ i) Considérons x ∈ E et t, h > 0. Comme T (t)x ∈ D(A), nous avons:
d+ T (t)x T (t + h)x − T (t)x
= lim = AT (t)x .
dt hց0 h
D’autre part, pour h ∈]0, t[ et δ ∈]0, t − h[ on a:

T (t − h)x − T (t)x

− AT (t)x =
−h

T (t − δ)T (δ)x − T (t − h − δ)T (δ)x

= − AT (δ)T (t − δ)x =
h
 
t−δ
Z t−δ
Z
1 d
 
=  T (τ )T (δ)x dτ − AT (δ)T (t − δ)x dτ  =
h dτ
t−h−δ t−h−δ

t−δ
1 Z

= [AT (δ)T (τ ) − AT (δ)T (t − δ)] x dτ ≤
h
t−h−δ
t−δ
Z
1
≤ kAT (δ)k kT (τ ) − T (t − δ)k dτ kxk =
h
t−h−δ
1
= kAT (δ)k h kT (c) − T (t − δ)k kxk =
h
= kAT (δ)k kT (c) − T (t − δ)k kxk ,

où c ∈ [t − h − δ, t − δ]. Par conséquent:


d− T (t)x T (t − h)x − T (t)x
= lim = AT (t)x .
dt hց0 −h
Donc {T (t)}t≥0 est un C0 -semi-groupe différentiable.

Proposition 3.1.3 Soit {T (t)}t≥0 ∈ SGD(M, ω) . Alors l’application:

]0, ∞) ∋ t 7−→ T (t) ∈ B(E)

est continue pour la topologie de la convergence uniforme.

Preuve Soient x ∈ E et t1 , t2 ∈]0, ∞) tel que t1 < t2 . Compte tenu du théorème


3.1.2, nous obtenons:
t t
Z 2 Z 2
d
kT (t1 )x − T (t2 )xk = T (s)x ds = AT (t1 )T (s − t1 )x ds ≤
ds


t1 t1
Zt2
≤ kAT (t1 )k Me(s−t1 )ω kxk ds .
t1
3.1. C0 -SEMI-GROUPES DIFFÉRENTIABLES 89

Par suite, nous avons:


Zt2
kT (t1 ) − T (t2 )k ≤ kAT (t1 )k M e(s−t1 )ω ds ,
t1

d’où résulte la continuité uniforme de l’application considérée dans l’énoncé.

Théorème 3.1.4 Soient {T (t)}t≥0 ∈ SGD(M, ω) et A son générateur infinitési-


mal. Alors:
i) pour tout n ∈ N∗ et tout x ∈ E, on a T (t)x ∈ D(An ) et:
  n
n t
A T (t)x = AT x , (∀)t > 0;
n
ii) pour tout n ∈ N∗ l’application:

]0, ∞) ∋ t 7−→ T (t) : E → D(An )

est n fois différentiable pour la topologie de la convergence uniforme et:


dn
T (t)(n) = T (t) = An T (t) ∈ B(E) , (∀)t > 0;
dtn
iii) pour tout n ∈ N∗ l’application:

]0, ∞) ∋ t 7−→ T (t)(n) ∈ B(E)

est continue pour la topologie de la convergence uniforme.

Preuve Prouvons les affirmations de l’énoncé par récurrence.


i) Avec le théorème 3.1.2, on voit que pour tout x ∈ E on a T (t)x ∈ D(A) et:
  1
t
AT (t)x = AT x , (∀)t > 0.
1
Supposons que pour tout x ∈ E on ait T (t)x ∈ D(Ak ) et:
  k
t
Ak T (t)x = AT x , (∀)t > 0.
k
Soient x ∈ E et δ ∈]0, t[. On voit que T (t − δ)T (δ)x ∈ D(A) et:

AT (t)x = AT (t − δ)T (δ)x = T (t − δ)AT (δ)x ∈ D(Ak ) .

Par conséquent T (t)x ∈ D(Ak+1), (∀)t > 0. De plus:


h i h i
Ak+1 T (t)x = A Ak T (t − δ)T (δ) x = A T (t − δ)Ak T (δ) x =
" !#k
δ
= AT (t − δ) AT x .
k
90 CHAPITRE 3. C0 -SEMIGROUPES AVEC PROPRIÉTÉS SPÉCIALES

kt
Si δ = k+1
, il vient:
  k+1
t
Ak+1 T (t)x = AT x .
k+1
Finalement, nous obtenons (i).
ii) Pour n = 1, compte tenu du théorème 3.1.2 et de la proposition 3.1.3, il résulte
que l’application:
]0, ∞) ∋ t 7−→ T (t) : E → D(A)

est différentiable pour la topologie de la convergence uniforme et:

T (t)′ = AT (t) , (∀)t > 0.

Comme A est un opérateur fermé et T (t) ∈ B(E), il résulte que AT (t) est un
opérateur fermé défini sur E. Avec le théorème du graphe fermé ([DS’67, Theorem
II.2.4, pag. 57]), on voit que AT (t) ∈ B(E), (∀)t > 0. Supposons que l’application:

]0, ∞) ∋ t 7−→ T (t) : E → D(Ak )

est k fois différentiable pour la topologie de la convergence uniforme et:

T (t)(k) = Ak T (t) ∈ B(E) , (∀)t > 0.


 
De plus, avec la preuve précédente, on voit que T (t)x ∈ D Ak+1 , pour tout t > 0.
Soient x ∈ E, kxk ≤ 1 et t > 0. Si h > 0 et δ ∈]0, t[, on a:

T (t + h)(k) x − T (t)(k) x

k+1

− A T (t)x =

h

Ak T (δ)T (t + h − δ)x − Ak T (δ)T (t − δ)x
k+1
= − A T (δ)T (t − δ)x =
h

k 1
A T (δ) [T (t + h − δ) − T (t − δ)] x − Ak+1 T (δ)T (t − δ)x =

=
h
t+h−δ
Z t+h−δ
Z

k 1 d k+1 1

= A T (δ) T (τ )x dτ − A T (δ) T (t − δ)x dτ =

h dτ h

t−δ t−δ

t+h−δ
Z t+h−δ
Z

k 1 k+1 1
= A T (δ) AT (τ )x dτ − A T (δ) T (t − δ)x dτ =

h h

t−δ t−δ

t+h−δ
Z
1
Ak+1 T (δ) [T (τ ) − T (t − δ)] x dτ ≤

=
h
t−δ
3.1. C0 -SEMI-GROUPES DIFFÉRENTIABLES 91

k+1 t+h−δ
A T (δ) Z
≤ kT (τ ) − T (t − δ)k kxk dτ =
h
t−δ

k+1
= A T (δ) kT (c) − T (t − δ)k kxk ,

où c ∈ [t − δ, t + h − δ]. Il s’ensuit que:



T (t + h)(k) − T (t)(k)



− Ak+1 T (t) ≤ Ak+1 T (δ) kT (c) − T (t − δ)k ,
h

où c ∈ [t − δ, t + h − δ]. Par conséquent:

T (t + h)(k) − T (t)(k)
lim = Ak+1 T (t) , (∀)t > 0.
hց0 h
Si h > 0 tel que t − h > 0 et δ ∈]0, t − h[, alors nous avons:

T (t − h)(k) x − T (t)(k) x

k+1
− A T (t)x =

−h

Ak T (δ)T (t − δ)x − Ak T (δ)T (t − h − δ)x
− Ak+1 T (δ)T (t − δ)x

= =
h

k 1
A T (δ) [T (t − δ) − T (t − h − δ)] x − Ak+1 T (δ)T (t − δ)x =

=
h
t−δ
Z t−δ
Z

k 1 d k+1 1

= A T (δ) T (τ )x dτ − A T (δ) T (t − δ)x dτ =

h dτ h

t−h−δ t−h−δ

t−δ
Z t−δ
Z

k 1 k+1 1
= A T (δ) AT (τ )x dτ − A T (δ) T (t − δ)x dτ =

h h

t−h−δ t−h−δ

t−δ
Z
1
k+1
=
A T (δ) [T (τ ) − T (t − δ)] x dτ ≤
h
t−h−δ

T (δ) Zt−δ
k+1
A
≤ kT (τ ) − T (t − δ)k kxk dτ =
h
t−h−δ

k+1
= A T (δ) kT (c) − T (t − δ)k kxk ,

où c ∈ [t − h − δ, t − δ]. Il vient:



T (t − h)(k) − T (t)(k)


− Ak+1 T (t) ≤ Ak+1 T (δ) kT (c) − T (t − δ)k

,

−h

où c ∈ [t − h − δ, t − δ]. Par conséquent:

T (t − h)(k) − T (t)(k)
lim = Ak+1 T (t) , (∀)t > 0.
hց0 −h
92 CHAPITRE 3. C0 -SEMIGROUPES AVEC PROPRIÉTÉS SPÉCIALES

Il s’ensuit que T (t)(k) est différentiable pour la topologie de la convergence uniforme


et:
 ′
T (t)(k) = T (t)(k+1) = Ak+1 T (t) , (∀)t > 0.
 
Comme A est un opérateur fermé et Ak T (t) ∈ B(E), il résulte que A Ak T (t)
est un opérateur fermé défini sur E. Avec le théorème du graphe fermé ([DS’67,
Theorem II.2.4, pag. 57]), on voit que T (t)(k+1) = Ak+1 T (t) ∈ B(E), (∀)t > 0.
Finalement, on a obtenu (ii).
iii) Soient x ∈ E avec kxk ≤ 1 et t > 0. Pour h > 0 et δ ∈]0, t[ nous obtenons:

′ ′
T (t + h) x − T (t) x = kAT (t + h)x − AT (t)xk ≤
≤ kAT (δ)k kT (t + h − δ) − T (t − δ)k kxk ,

d’où il résulte:


− T (t)′ ≤ kAT (δ)k kT (t + h − δ) − T (t − δ)k

T (t + h) .

De façon analogue, pour h > 0 et δ ∈]0, t − h[ nous obtenons:



′ ′
T (t − h) x − T (t) x = kAT (t − h)x − AT (t)xk ≤

≤ kAT (δ)k kT (t − h − δ) − T (t − δ)k kxk ,

d’où:


− T (t)′ ≤ kAT (δ)k kT (t − h − δ) − T (t − δ)k

T (t − h) .

Il est clair que l’application:

]0, ∞) ∋ t 7−→ T (t)′ ∈ B(E)

est continue pour la topologie de la convergence uniforme. Supposons que l’application:

]0, ∞) ∋ t 7−→ T (t)(k) ∈ B(E)

est continue pour la topologie de la convergence uniforme. Si h > 0 et δ ∈]0, t[,


alors nous avons:

(k+1)
x − T (t)(k+1) x = Ak+1 T (t + h)x − Ak+1 T (t)x

T (t + h) ≤

k+1
≤ A T (δ) kT (t + h − δ) − T (t − δ)k kxk ,

d’où il s’ensuit que:



(k+1)
− T (t)(k+1) ≤ Ak+1 T (δ) kT (t + h − δ) − T (t − δ)k

T (t + h) .
3.1. C0 -SEMI-GROUPES DIFFÉRENTIABLES 93

D’autre part, pour h > 0 et δ ∈]0, t − h[ nous obtenons:



(k+1)
x − T (t)(k+1) x = Ak+1 T (t − h)x − Ak+1 T (t)x

T (t − h) ≤

k+1
≤ A T (δ) kT (t − h − δ) − T (t − δ)k kxk

et on voit que:

(k+1)
− T (t)(k+1) ≤ Ak+1 T (δ) kT (t − h − δ) − T (t − δ)k

T (t − h) .

Donc l’application:
]0, ∞) ∋ t 7−→ T (t)(k+1) ∈ B(E)

est continue pour la topologie de la convergence uniforme. La propriété (iii) en


découle immédiatement.

Remarque 3.1.5 Si {T (t)}t≥0 ∈ SGD(M, ω) , alors l’application:

]0, ∞) ∋ t 7−→ T (t) ∈ B(E)


est de classe C]0,∞) .

Remarque 3.1.6 Si {T (t)}t≥0 ∈ SGD(M, ω) , alors pour tout n ∈ N∗ on a:


  n
t
T (t)(n) = An T (t) = AT , (∀)t > 0.
n

Nous finissons cette section avec le théorème spectral pour les C0 -semi-groupes
différentiables. Soit {T (t)}t≥0 ∈ SG(M, ω) . Pour tout λ ∈ C et tout t > 0, nous
avons défini l’opérateur linéaire borné:

Bλ (t) : E −→ E

Zt
Bλ (t)x = eλ(t−s) T (s)x ds
0

et nous avons étudié ses propriétés avec le lemme 2.6.1. Si le C0 -semi-groupe


{T (t)}t≥0 est différentiable, on peut montrer le résultat suivant.

Lemme 3.1.7 Soient {T (t)}t≥0 ∈ SGD(M, ω) et A son générateur infinitésimal.


Alors:
94 CHAPITRE 3. C0 -SEMIGROUPES AVEC PROPRIÉTÉS SPÉCIALES

i) pour tout λ ∈ C et tout t > 0, l’opérateur Bλ (t) ∈ B(E) est indéfiniment


dérivable et:
 
(n) T (t)(i)  n
X
Bλ (t) n
= λ Bλ (t) + i+1
, (∀)n ∈ N∗ ;
i=0 λ

ii) pour tout λ ∈ C et tout t > 0 on a:

Bλ (t)(n) T (t)(n) = T (t)(n) Bλ (t)(n) , (∀)n ∈ N∗ .

Preuve Montrons les affirmations de l’énoncé par récurrence.


i) Soient x ∈ E, λ ∈ C et t > 0. Alors:
!
′ T (t)x
Bλ (t) x = λ Bλ (t)x + .
λ
Supposons que:
 
k (i)
X T (t) x 
Bλ (t)(k) x = λk Bλ (t)x + .
i=0 λi+1

Alors:
 
(k+1)

(k)
′
k T (t)(i+1) x  k
X
Bλ (t) x = Bλ (t) x = λ λBλ (t)x + T (t)x +
 =
i=0 λi+1
 
k+1 (i)
X T (t) x 
= λk+1 Bλ (t)x +
i=0 λi+1

et nous obtenons (i).


ii) Soient λ ∈ C et t > 0. Compte tenu du théorème 3.1.4, pour x ∈ E, on voit
que T (t)x ∈ D(An ) et:
 
 
nt t t t
An T (t)x = An T x = An T 
 + + ···+ x =

n n
| n {z n}

n fois
        n
t t t t
= An T T ···T x = AT x=
| n n{z n} n
n fois
   n  
t nt
= T A x=T An = T (t)An x , (∀)n ∈ N∗ ,
n n
parce que le semi-groupe commute avec son générateur infinitésimal. De même,
avec le lemme 2.6.1 il résulte que:

Bλ (t)T (t) = T (t)Bλ (t) .


3.1. C0 -SEMI-GROUPES DIFFÉRENTIABLES 95

Alors pour x ∈ E, nous avons:


 
T (t)(i) 
n
X
Bλ (t)(n) T (t)x = λn Bλ (t) + i+1
T (t)x =
i=0 λ
n
!
n Ai T (t)T (t)
X
= λ Bλ (t)T (t) + x=
i=0 λi+1
n
!
n T (t)Ai T (t)
X
= λ T (t)Bλ (t) + x=
i=0 λi+1
 
T (t)(i) n
X
= T (t)λn Bλ (t) + i+1
x = T (t)Bλ (t)(n) x , (∀)n ∈ N∗ .
i=0 λ

D’autre part, pour x ∈ D(A), nous avons:

Bλ (t)(λI − A)x = (λI − A)Bλ (t)x ,

d’où il résulte:
Bλ (t)Ax = ABλ (t)x .
Supposons que pour x ∈ D(Ak ) nous avons:

Bλ (t)Ak x = Ak Bλ (t)x .

Si x ∈ D(Ak+1 ), il vient:

Bλ (t)Ak+1 x = Bλ (t)Ak (Ax) = Ak Bλ (t)Ax = Ak ABλ (t)x = Ak+1 Bλ (t)x.

Il s’ensuit donc que:


Bλ (t)An x = An Bλ (t)x ,
pour tout x ∈ D(An ) et tout n ∈ N∗ . De même, si x ∈ D(An ), on a:
 
(n) n n T (t)(i)  n
n
X
Bλ (t) A x = λ Bλ (t) + i+1
A x=
i=0 λ
n
!
n nAi T (t)An
X
= λ Bλ (t)A + x=
i=0 λi+1
n
!
An Ai T (t)
X
= λn An Bλ (t) + x=
i=0 λi+1
 
T (t)(i) 
n
X
= An λn Bλ (t) + i+1
x = An Bλ (t)x , (∀)n ∈ N∗ .
i=0 λ
Finalement, pour x ∈ E nous obtenons:

Bλ (t)(n) T (t)(n) x = Bλ (t)(n) An T (t)x = An Bλ (t)(n) T (t)x =


= An T (t)Bλ (t)(n) x = T (t)(n) Bλ (t)(n) x , (∀)n ∈ N∗ .
96 CHAPITRE 3. C0 -SEMIGROUPES AVEC PROPRIÉTÉS SPÉCIALES

Théorème 3.1.8 (spectral mapping) Soient {T (t)}t≥0 ∈ SGD(M, ω) et A


son générateur infinitésimal. Alors pour tout n ∈ N∗ on a:
 (n) n o  
etσ(A) = λn eλt λ ∈ σ(A) ⊆ σ T (t)(n)

, (∀)t > 0.

Preuve Pour λ ∈ C et t > 0, nous considérons l’opérateur:

Bλ (t) : E −→ E

Zt
Bλ (t)x = eλ(t−s) T (s)x ds .
0

Avec le lemme 3.1.7, on déduit que l’opérateur Bλ (t) ∈ B(E) est indéfiniment
dérivable et:
 
(n) T (t)(i) 
n
X
Bλ (t) n
= λ Bλ (t) + i+1
, (∀)n ∈ N∗ .
i=0 λ

Compte tenu du lemme 2.6.1, il résulte que:

(λI − A)Bλ (t)x = eλt x − T (t)x , (∀)x ∈ E

et que:
Bλ (t)(λI − A)x = eλt x − T (t)x , (∀)x ∈ D(A).

Pour tout n ∈ N∗ il s’ensuit que:

(λI − A)Bλ (t)(n) x = λn eλt x − T (t)(n) x , (∀)x ∈ E

et:
Bλ (t)(n) (λI − A)x = λn eλt x − T (t)(n) x , (∀)x ∈ D(A).
 
Si λ ∈ C est tel que λn eλt ∈ ρ T (t)(n) , alors on peut considérer:
 −1
Q = λn eλt I − T (t)(n) ∈ B(E) ,

pour tout n ∈ N∗ . Par conséquent:

(λI − A)Bλ (t)(n) Qx = x , (∀)x ∈ E

et:
QBλ (t)(n) (λI − A)x = x , (∀)x ∈ D(A),
3.1. C0 -SEMI-GROUPES DIFFÉRENTIABLES 97

pour tout n ∈ N∗ . Mais, avec le lemme 3.1.7, il résulte:

Bλ (t)(n) T (t)(n) = T (t)(n) Bλ (t)(n) , (∀)n ∈ N∗ .

Donc:

λn eλT Bλ (t)(n) − Bλ (t)(n) T (t)(n) = λn eλt Bλ (t)(n) − T (t)(n) Bλ (t)(n)

et:
   
Bλ (t)(n) λn eλt I − T (t)(n) = λn eλt I − T (t)(n) Bλ (t)(n) ,

pour tout n ∈ N∗ . Par suite:

Bλ (t)(n) Q = QBλ (t)(n) , (∀)n ∈ N∗

et nous voyons que:

(λI − A)Bλ (t)(n) Qx = x , (∀)x ∈ E

et:
Bλ (t)(n) Q(λI − A)x = x , (∀)x ∈ D(A) ,

d’où on obtient que λ ∈ ρ(A). Nous en déduisons que λ ∈ σ(A) implique λn eλt ∈
 
σ T (t)(n) pour tout n ∈ N∗ . Par conséquent:
n o  
λn eλt λ ∈ σ(A) ⊂ σ T (t)(n)

,

ou bien:
 (n)   
eλt λ
∈ σ(A) ⊂ σ T (t)(n)

et finalement:
 (n)  
etσ(A) ⊂ σ T (t)(n) ,

pour tout n ∈ N∗ et tout t > 0.


98 CHAPITRE 3. C0 -SEMIGROUPES AVEC PROPRIÉTÉS SPÉCIALES

3.2 C0-semi-groupes analytiques


Par la suite nous étudions la possibilité d’étendre l’intervalle ]0, ∞) à une
région du plan complexe, sans abandonner les propriétés de C0 -semi-groupe. Nous
désignerons par ∆ l’ensemble:

{z ∈ C|Re z > 0 et ϕ1 < arg z < ϕ2 , ϕ1 < 0 < ϕ2 }

Définition 3.2.1 On appelle C0 -semi-groupe analytique une famille {T (z)}z∈∆ ⊂


B(E) vérifiant les propriétés suivantes:
i) T (0) = I;
ii) T (z1 + z2 ) = T (z1 )T (z2 ), (∀)z1 , z2 ∈ ∆;
iii) limz→0 T (z)x = x, (∀)x ∈ E, z ∈ ∆;
iv) l’application:
∆ ∋ z 7−→ T (z) ∈ B(E)

est analytique dans le secteur ∆.

Comme la multiplication par eωt n’a aucun effet sur la possibilité ou l’impossibilité
d’extension à un semi-groupe analytique, il est suffit de considérer seulement les C0 -
semi-groupes uniformément bornés. Le théorème suivant donne une caractérisation
pour les C0 -semi-groupes analytiques uniformément bornés.

Théorème 3.2.2 Soient {T (t)}t≥0 ∈ SG(M, 0) et A son générateur infinitésimal


tel que 0 ∈ ρ(A). Les affirmations suivantes sont équivalentes:
i) il existe δ > 0 tel que {T (t)}t≥0 peut être étendu à un semi-groupe analytique
dans le secteur:

∆δ = {z ∈ C|Re z > 0 et | arg z| < δ} , δ>0

et {T (z)}z∈∆δ′ est uniformément borné dans tout sous secteur fermé ∆δ′ ⊂ ∆δ , où
δ ′ ∈]0, δ[;
ii) il existe une constante C > 0 telle que pour tout γ > 0 et tout η 6= 0 on ait:
C
kR(γ + iη; A)k ≤ ;
|η|
i h
iii) il existe δ ∈ 0, π2 et K > 1 tel que:
 
π
ρ(A) ⊃ Σδ = λ ∈ C | arg λ| < + δ ∪ {0}
2
3.2. C0 -SEMI-GROUPES ANALYTIQUES 99

et:
K
kR(λ; A)k ≤ , (∀)λ ∈ Σδ − {0};
|λ|
iv) l’application:
]0, ∞) ∋ t 7−→ T (t) ∈ B(E)
est différentiable et il existe une constante L > 0 tel que:
L
kAT (t)k ≤ , (∀)t > 0.
t
i h
Preuve i) =⇒ ii) Soit δ ∈ 0, π2 . Si δ ′ ∈]0, δ[, il existe C ′ > 0 tel que:

kT (z)k ≤ C ′

pour tout z ∈ ∆δ′ . Comme l’application:

∆δ ∋ z 7−→ T (z) ∈ B(E)

est analytique dans le sous secteur ∆δ′ , avec le théorème de Cauchy ([DS’67, pag.
225]), on voit que Z
T (z) dz = 0 ,
Γ
quel que soit le contour de Jordan lisse et fermé Γ ⊂ ∆δ′ . Par conséquent, dans
l’intégrale
Z∞
R(γ + iη; A)x = e−(γ+iη)t T (t)x dt , γ > 0,
0
on peut changer le chemin d’intégration par:

Γθ = {r(cos θ + i sin θ)| 0 < r < ∞, |θ| ≤ δ ′ } .

Si η > 0, alors pour le chemin

Γ−δ′ = {r(cos δ ′ − i sin δ ′ )| 0 < r < ∞} ,

nous obtenons:

Z

kR(γ + iη; A)xk = e−(γ+iη)t T (t)x dt =


0

Z
′ ′

e−(γ+iη)r(cos δ −i sin δ ) T (r(cos δ ′ − i sin δ ′ ))x d(r(cos δ ′ ′

=

− i sin δ )) ≤
Γ ′
−δ

Z∞
−(γ+iη)r(cos δ′ −i sin δ′ )
≤ e kT (r(cos δ ′ − i sin δ ′ )k kxk| cos δ ′ − i sin δ ′ | dr ≤
0
Z∞
′ ′ C ′ kxk C′
≤ C kxk e−r(γ cos δ +η sin δ ) dr =

≤ kxk .
γ cos δ ′ + η sin δ ′ η sin δ ′
0
100 CHAPITRE 3. C0 -SEMIGROUPES AVEC PROPRIÉTÉS SPÉCIALES

Si nous notons:
C′
C= ,
sin δ ′
alors on obtient:
C
kR(γ + iη; A)k ≤ .
η
Soit maintenant η < 0. Alors pour le chemin

Γδ′ = {r(cos δ ′ + i sin δ ′ )| 0 < r < ∞} ,

nous avons:

Z

kR(γ + iη; A)xk = e−(γ+iη)t T (t)x dt =


0

Z
′ ′

e−(γ+iη)r(cos δ +i sin δ ) T (r(cos δ ′ + i sin δ ′ ))x d(r(cos δ ′ ′

= + i sin δ )) ≤

Γ ′
δ
Z∞
−(γ+iη)r(cos δ′ +i sin δ′ )
≤ e kT (r(cos δ ′ + i sin δ ′ )k kxk| cos δ ′ + i sin δ ′ | dr ≤
0
Z∞
′ ′ ′ C ′ kxk C′ C
≤ C kxk e−r(γ cos δ −η sin δ ) dr = ′ ′
≤ ′
kxk = kxk .
γ cos δ − η sin δ −η sin δ −η
0

Par conséquent:
C
kR(γ + iη; A)k ≤ .
−η
Finalement on voit que:
C
kR(γ + iη; A)k ≤ .
|η|
ii) =⇒ iii) Comme {T (t)}t≥0 ∈ SG(M, 0), avec le théorème de Hille-Yosida on
voit que:
M
kR(λ; A)k ≤
Reλ
pour tout λ ∈ Λ0 . Compte tenu du (ii), il existe C > 0 tel que:
C
kR(λ; A)k ≤
|Imλ|
pour tout λ ∈ Λ0 avec Imλ 6= 0. Compte tenu des inégalités:

ReλkR(λ; A)k ≤ M

et:
|Imλ|kR(λ; A)k ≤ C ,
3.2. C0 -SEMI-GROUPES ANALYTIQUES 101

nous obtenons:
Re2 λkR(λ; A)k2 ≤ M 2

et:
Im2 λkR(λ; A)k2 ≤ C 2 ,

d’où il résulte que:


 
Re2 λ + Im2 λ kR(λ; A)k2 ≤ M 2 + C 2 .

Par conséquent, il existe une constante K1 = M 2 + C 2 > 1 tel que:
K1
kR(λ; A)k ≤ , (∀)λ ∈ Λ0 .
|λ|
Considérons λ ∈ C avec Reλ ≤ 0. Soit γ > 0 suffisamment petit et η 6= 0. Comme
l’application R( . ; A) est analytique sur ρ(A), pour tout λ = Reλ + iη ∈ ρ(A) avec
Reλ ≤ 0, nous obtenons:

X(Reλ − γ)n
R(λ; A) = R(γ + iη; A)(n) .
n=0 n!

Avec la proposition 1.1.16 (iii), on voit que:

R(γ + iη; A)(n) = (−1)n n!R(γ + iη; A)n+1 .

Alors il vient:

X
R(λ; A) = (−1)n (Reλ − γ)n R(γ + iη; A)n+1
n=0

et cette série est uniformément convergente pour:

kR(γ + iη; A)k |Reλ − γ| ≤ α < 1 .

Compte tenu de la propriété (ii), elle est convergente pour la topologie de la norme
si λ = Reλ + iη ∈ ρ(A) est tel que sa partie réelle vérifie Reλ ≤ 0 et
α|η| |η|
|Reλ − γ| ≤ < .
C C
α|η|
C’est-à-dire qu’il existe un voisinage Vε , ε = C
, de γ + iη ∈ Λ0 contenu dans
ρ(A) lorsque γ > 0 est suffisamment petit. Dans ce voisinage Vε , il existe λ ∈ C
i h
tel que Reλ ≤ 0 et λ ∈ ρ(A). Si nous définissons δ ∈ 0, π2 tel que:

|Reλ| |Reλ| α
tan δ = = = , α ∈]0, 1[,
|Imλ| |η| C
102 CHAPITRE 3. C0 -SEMIGROUPES AVEC PROPRIÉTÉS SPÉCIALES

où:
α
δ = arctan , α ∈]0, 1[,
C
alors on voit que:  
π
ζ∈ C | arg ζ| < +δ ⊂ ρ(A) .
2
n o i h
π
+ δ ∪ {0}, où δ ∈ 0, π2 .

Nous désignerons par Σδ l’ensemble λ ∈ C | arg λ| < 2
Si λ ∈ Σδ − {0} et Reλ ≤ 0, alors nous avons:

X
+ iη; A)n+1 |Reλ − γ|n ≤

kR(λ; A)k ≤ R(γ
n=0

X C n+1 αn |η|n 1 C
≤ = .
n=0 |η| 1 − α |Imλ|
n+1 C n

Comme:
|Reλ| 1
< ,
|Imλ| C
il vient:
|Reλ|2 1
2
< 2 ,
|Imλ| C
d’où:
|Reλ|2 1
2 2 +1 < +1 .
|Im λ| C2
Par conséquent
|Reλ|2 + |Imλ|2 1 + C2
< ,
|Imλ|2 C2
ou
|λ|2 1 + C2
< ,
|Imλ|2 C2
Il s’ensuit donc que: √
1 1 + C2
< .
|Imλ| C|λ|
Par suite: √
1 + C2
kR(λ; A)k ≤ , (∀)λ ∈ Σδ − {0}
(1 − α)|λ|
et si nous notons √
1 + C2
K2 = >1 ,
1−α
alors il vient:
K2
kR(λ; A)k ≤ , (∀)λ ∈ Σδ − {0}.
|λ|
3.2. C0 -SEMI-GROUPES ANALYTIQUES 103

Finalement, on obtient qu’il existe K > 1 tel que:


K
kR(λ; A)k ≤ , (∀)λ ∈ Σδ − {0}.
|λ|
i h
iii) =⇒ iv) Supposons qu’il existe δ ∈ 0, π2 et K > 1 tel que:
 
π
Σδ = λ ∈ C | arg λ| < + δ ∪ {0}
2
et
K
kR(λ; A)k ≤ , (∀)λ ∈ Σδ − {0}.
|λ|
Compte tenu du théorème 2.5.1, on voit que l’opérateur A est le générateur in-
finitésimal d’un semi-groupe {T (t)}t≥0 pour lequel il existe M > 1 tel que

kT (t)k ≤ M , (∀)t ≥ 0.
i h
π π
De plus, pour ν ∈ ,
2 2
+ δ on considère le chemin

Γν = Γ(1) (2)
ν ∪ Γν ,

où
Γ(1)
ν = {r(cos ν − i sin ν)| 0 < r < ∞}

et
Γ(2)
ν = { r(cos ν + i sin ν)| 0 < r < ∞} ,

tel que Z
1
T (t) = ezt R(z; A) dz , (∀)t ≥ 0,
2πi
Γν

l’intégrale étant uniformément convergente par rapport à t > 0.


Soit
ϕ : [0, ∞) × Σδ −→ B(E) ,

ϕ(t, z) = ezt R(z; A) .

Il est clair que l’application ϕ est différentiable par rapport à t > 0 et:

∂ϕ(z, t)
= zezt R(z; A) .
∂t
De plus:
∂ϕ(z, t)
= zezt R(z; A) ≤ K ezt

, (∀)t > 0.
∂t
104 CHAPITRE 3. C0 -SEMIGROUPES AVEC PROPRIÉTÉS SPÉCIALES

Avec le théorème de dérivation de Lebesgue, on voit que l’application

]0, ∞) ∋ t 7→ T (t) ∈ B(E) ,


Z
1
T (t) = ezt R(z; A) dz , (∀)t ≥ 0,
2πi
Γν
est différentiable et on a:
1 Z zt
T (t)′ = ze R(z; A) dz , (∀)t ≥ 0.
2πi
Γν
i h
π π
Comme ν ∈ ,
2 2
+ δ , il vient cos ν < 0 et compte tenu que:


Z Z
1 1
kT (t)′k = zezt R(z; A) dz + zt
ze R(z; A) dz ≤
2πi 2πi


(1) (2)
Γν Γν
Z∞ Z∞
1 rt cos ν 1
≤ re kR(z; A)k dr + rert cos ν kR(z; A)k dr ≤
2π 2π
0 0
Z∞  
K K 1
≤ e−rt(− cos ν) dr = , (∀)t > 0,
π π −t cos ν
0
M
on déduit qu’il existe L = π(− cos ν)
> 0 tel que:
L
kAT (t)k = kT (t)′ k ≤
, (∀)t > 0.
t
iv) =⇒ i) Soit t0 > 0. Avec la formule de Taylor et compte tenu de la remarque
3.1.6, on a:
∞ t
(t − t0 )k (k)
X 1 Z
T (t) = T (t0 ) + (t − u)n−1T (n) (u) du =
k=0 k! (n − 1)!
t0
∞ Zt
(t − t0 )k k
X 1
= A T (t0 ) + (t − u)n−1 An T (u) du ,
k=0 k! (n − 1)!
t0

pour tout n ∈ N .
Compte tenu du (iv) et de la remarque 3.1.6, on voit que:

Zt Zt   n
1 n−1 n 1 u
(t − u) A T (u) du ≤ (t − u)n−1 AT ( du ≤
(n − 1)! (n − 1)!

n
t0 t0
Zt  n  n Zt
1 Ln 1 Ln
≤ (t − u)n−1 du ≤ (t − u)n−1 du =
(n − 1)! u (n − 1)! t0
t0 t0
 n t−t
Z 0  n
1 Ln 1 Ln
= sn−1 du = (t − t0 )n .
(n − 1)! t0 n! t0
0
3.2. C0 -SEMI-GROUPES ANALYTIQUES 105

Avec la formule de Stirling


√ un
n! = nn 2πne−n+ 12n , un ∈]0, 1[,

on obtient
n!en ≥ nn .

Par conséquent:

Zt
1 (t − t0 )n n n
 n
1 n−1 n t − t0
(t − u) A T (u) du ≤ n
L n!e = Le ,
(n − 1)!

n! t0 t0
t0

pour t ≥ t0 > 0 et n ∈ N∗ suffisamment grand.


t0
Il en résulte que la série de Taylor est convergente vers T (t) si t − t0 < Le
et on a:

X (t − t0 )n n
T (t) = A T (t0 ) .
n=0 n!

Il s’ensuit donc que pour z ∈ C vérifiant


t0
Re z > 0 et |z − t0 | < ,
Le
on peut définir une fonction analytique

X (z − t0 )n n
T (z) = A T (t0 ) .
n=0 n!

La série de la partie droite de cette égalité est uniformément convergente par


rapport à z ∈ C vérifiant les conditions Re z > 0 et
t0
|z − t0 | < α ,
Le
où α ∈]0, 1[.
Soit z ∈ C tel que Re z = t0 >. On voit que:
Re z
|Im z| = |z − t0 | < ,
Le
d’où:
|Im z| 1
<
|Re z| Le
ou encore  
1
| arg z| ≤ arctan .
Le
106 CHAPITRE 3. C0 -SEMIGROUPES AVEC PROPRIÉTÉS SPÉCIALES

En prenant
 
1
δ = arctan ,
Le
nous obtenons que l’application

∆δ ∋ z 7→ T (z) ∈ B(E)

est analytique dans le secteur

∆δ = {z ∈ C| Re z > 0 et | arg z| < δ} .

t0
De plus, si nous considérons z ∈ C avec les propriétés Re z > 0 et |z − t0 | ≤ α Le ,
α ∈]0, 1[, alors nous déduisons que:

X|z − t0 |n
kT (z)k ≤ kT (t0 )k + kAn T (t0 )k ≤
n=1 n!
∞ n 
t0 n Ln n
  
X α
≤ kT (t0 )k + ≤
n=1 n! Le t0

X α
≤ M+ αn = M + .
n=1 1−α

Par conséquent, si nous notons


 
′ 1
δ = arctan α , α ∈]0, 1[,
Le

nous voyons que l’application

∆δ ∋ z 7→ T (z) ∈ B(E)

est uniformément bornée dans le sous secteur


∆δ′ = {z ∈ C| Re z > 0 et | arg z| ≤ δ } ⊂ ∆δ .

Il est évident que T (0) = I parce que {T (t)}t≥0 ∈ SG(M, 0). De plus, pour tout
t > 0 et tout z ∈ ∆δ , il résulte que:

X (z − t0 )n n
T (t)T (z) = A T (t0 + t) =
n=0 n!

X [(z + t) − (t0 + t)]n n
= A T (t0 + t) = T (t + z) .
n=0 n!
3.3. C0 -SEMI-GROUPES DE CONTRACTIONS 107

Alors, pour tous z1 , z2 ∈ ∆δ , nous obtenons:



(z2 − t0 )n n
X
T (z1 )T (z2 ) = T (z1 ) A T (t0 ) =
n=0 n!
∞ ∞
X (z2 − t0 )n n X (z2 − t0 )n n
= A T (z1 )T (t0 ) = A T (z1 + t0 ) =
n=0 n! n=0 n!

X [(z2 + z1 ) − (z1 + t0 )]n n
= A T (z1 + t0 ) = T (z1 + z2 ) .
n=0 n!
Soit
[
E0 = T (t)E .
0<t<∞

Nous prouvons que cet ensemble est dense dans E. Soient x ∈ E et tn > 0, n ∈ N,
tel que limn→∞ tn = 0. Alors pour xn = T (tn )x ∈ E0 , n ∈ N, nous obtenons:

lim xn = n→∞
n→∞
lim T (tn )x = x .

Par conséquent, E0 = E.
De plus, nous avons vu que {T (z)}z∈∆ ′
est uniformément borné dans tout sous
δ
secteur fermé ∆δ′ . De même, pour x ∈ E on obtient T (t)x ∈ E0 et:

lim T (z)T (t)x = lim T (z + t) = T (t)x .


z→0 z→0

Compte tenu du théorème de Banach-Steinhaus ([DS’67, Theorem II.1.11, pag.


52]), il en résulte que

lim T (z)x = x , (∀)x ∈ E, z ∈ ∆δ .


z→0

Finalement, on voit que {T (z)}z∈∆δ est un C0 -semi-groupe analytique qui étend le


semi-groupe {T (t)}t≥0 ∈ SG(M, 0).

3.3 C0-semi-groupes de contractions


Dans la suite nous présentons quelques problèmes concernant la classe du
C0 -semi-groupes {T (t)}t≥0 vérifiant la propriété kT (t)k ≤ 1, pour tout t ≥ 0.

Définition 3.3.1 On dit que {T (t)}t≥0 est un C0 -semi-groupe de contractions sur


l’espace de Banch E si {T (t)}t≥0 ∈ SG(1, 0).
108 CHAPITRE 3. C0 -SEMIGROUPES AVEC PROPRIÉTÉS SPÉCIALES

Lemme 3.3.2 Soit {T (t)}t≥0 ∈ SG(M, ω). Alors, l’application:

||| . ||| : E −→ R+

|||x||| = sup e−ωt kT (t)xk , (∀)x ∈ E,


t≥0

est une norme sur E équivalente avec la norme initiale k . k.

Preuve Soit x ∈ E. Pour tout t ≥ 0, on a:

e−ωt kT (t)xk ≤ e−ωt kT (t)kkxk ≤ Mkxk .

En passant à la borne supérieure par rapport à t, on voit que:

|||x||| ≤ Mkxk , (∀)x ∈ E.

D’autre part, nous avons:

|||x||| = sup e−ωt kT (t)xk ≥ e−ω0 kT (0)xk = kxk , (∀)x ∈ E,


t≥0

d’où il résulte que:

kxk ≤ |||x||| ≤ Mkxk , (∀)x ∈ E.

Par conséquent les normes ||| . ||| et k . k sont équivalentes.

Théorème 3.3.3 Soient {T (t)}t≥0 ∈ SG(M, ω), A son générateur infinitésimal


et:
S(t) = e−ωt T (t) , (∀)t ≥ 0.

Alors:
i) {S(t)}t≥0 ∈ SG(1, 0);
ii) le C0 -semi-groupe {S(t)}t≥0 a pour générateur infinitésimal l’opérateur B =
A − ωI.

Preuve i) Il est clair que la famille {S(t)}t≥0 est un C0 -semi-groupe. De plus,


pour tout t ≥ 0, on a:

|||S(t)x||| = sup e−ωs kT (s)e−ωt T (t)xk =


s≥0
−ωτ
= sup e kT (τ )xk ≤ sup e−ωτ kT (τ )xk = |||x||| , (∀)x ∈ E,
τ ≥t τ ≥0
3.3. C0 -SEMI-GROUPES DE CONTRACTIONS 109

d’où on obtient:

|||S(t)x||| ≤ |||x||| , (∀)x ∈ E et t ≥ 0.

Il s’ensuit que:
kS(t)k ≤ 1 , (∀)t ≥ 0

et, par conséquent, {S(t)}t≥0 ∈ SG(1, 0).


ii) Elle est analogue à celle du théorème 2.1.11.
Pour les C0 -semi-groupes de contractions, on peut formuler la version suivante
du théorème de Hille-Yosida.

Théorème 3.3.4 Un opérateur linéaire:

A : D(A) ⊂ E −→ E

est le générateur infinitésimal d’un semi-groupe {T (t)}t≥0 ∈ SG(1, 0) si et seule-


ment si:
i) A est un opérateur fermé et D(A) = E;
ii) Λ0 = {λ ∈ C |Reλ > 0 } ⊂ ρ(A) et pour λ ∈ Λ0 , on a:
1
kR(λ; A)n k ≤ , (∀)n ∈ N∗ .
(Reλ)n
Preuve i) =⇒ ii) Comme {T (t)}t≥0 ∈ SG(1, 0), nous avons:

kT (t)k ≤ 1 , (∀)t ≥ 0.

Par suite, on peut prendre M = 1 et ω = 0. Avec le théorème de Hille-Yosida, il


résulte que:
(i) A est un opérateur fermé et D(A) = E;
(ii) Λ0 = {λ ∈ C |Reλ > 0 } ⊂ ρ(A) et pour λ ∈ Λ0 , on a:
1
kR(λ; A)n k ≤ , (∀)n ∈ N∗ .
(Reλ)n
ii) =⇒ i) Soit
A : D(A) ⊂ E −→ E

un opérateur linéaire vérifiant les propriétés (i) et (ii) de l’énoncé. Avec le théorème
de Hille-Yosida, il en résulte que A est le générateur infinitésimal d’un C0 -semi-
groupe {T (t)}t≥0 pour lequel il existe M = 1 et ω = 0 tel que:

kT (t)k ≤ 1 , (∀)t ≥ 0.
110 CHAPITRE 3. C0 -SEMIGROUPES AVEC PROPRIÉTÉS SPÉCIALES

Donc A est le générateur infinitésimal d’un semi-groupe de contractions.


Une autre caractérisation très intéressante des C0 -semi-groupes de contractions
est donnée par le fameux théorème de Lumer-Phillips, dans lequel interviennent
les opérateurs m-dissipatifs.

Définition 3.3.5 On appelle opérateur m-dissipatif un opérateur linéaire A :


D(A) ⊂ E −→ E vérifiant les propriétés suivantes:
i) A est opérateur dissipatif;
ii) il existe α0 > 0 tel que Im (α0 I − A) = E.

Théorème 3.3.6 (Lumer - Phillips) Soit A : D(A) ⊂ E −→ E un opérateur


linéaire tel que D(A) = E.
L’opérateur A est le générateur infinitésimal d’un semi-groupe {T (t)}t≥0 ∈ SG(1, 0)
si et seulement si A est un opérateur m-dissipatif.

Preuve =⇒ Soit A : D(A) ⊂ E −→ E le générateur infinitésimal d’un semi-groupe


{T (t)}t≥0 ∈ SG(1, 0). Si x ∈ D(A) et x∗ ∈ J (x), alors pour tout t ≥ 0 on voit
que:

RehT (t)x − x, x∗ i = RehT (t)x, x∗ i − Rehx, x∗ i ≤


≤ |hT (t)x, x∗ i| − Rehx, x∗ i ≤ kT (t)xkkx∗ k∗ − kxk2 ≤
≤ kxk2 − kxk2 = 0 ,

d’où:
1
RehT (t)x − x, x∗ i ≤ 0 , (∀)t ≥ 0.
t
En passant à limite pour t ց 0, il vient:

RehAx, x∗ i ≤ 0

pour tout x ∈ E et tout x∗ ∈ J (x). Il s’ensuit donc que A est un opérateur


dissipatif.
D’autre part, avec le théorème 3.3.4 , on voit que ]0, ∞) ⊂ ρ(A). Donc αI − A ∈
GL(E), (∀)α ∈]0, ∞). Par suite, Im (αI − A) = E pour tout α > 0 et finalement
on voit que A est un opérateur m-dissipatif.
ii) Soit A : D(A) ⊂ E −→ E un opérateur m-dissipatif tel que D(A) = E. Alors, il
existe α0 ∈]0, ∞) tel que Im (α0 I − A) = E. En appliquant la proposition 1.2.3,
3.4. NOTES 111

on voit que Im (αI − A) = E, pour tout α ∈]0, ∞). Il s’ensuit que ]0, ∞) ⊂ ρ(A).
Comme A est un opérateur dissipatif, compte tenu de la proposition 1.2.2, il vient:

k(αI − A)xk ≥ αkxk , (∀)x ∈ D(A),

d’où:
1
kR(α; A)k ≤
α
pour tout α ∈]0, ∞). Avec le théorème 3.3.4, on voit que A est le générateur
infinitésimal d’un semi-groupe {T (t)}t≥0 ∈ SG(1, 0).
n o
Proposition 3.3.7 Soit A ∈ B(E) tel que kAk ≤ 1. Alors et(A−I) est un
t≥0
semi-groupe uniformément continu de contractions.
n o
Preuve Il est évident que et(A−I) est un semi-groupe uniformément continu.
t≥0
De plus:

≤ etA e−t ≤ etkAk e−t ≤ 1 ,
t(A−I)
e (∀)t ≥ 0.

3.4 Notes
Pour les propriétés des C0 -semi-groupes différentiables nous avons consulté [Pa’83-1, pag. 51],
[Ah’91, pag. 73] et [Da’80, pag. 28]. Le théorème 3.1.8 se trouve dans [Le’00-1].
Les propriétés des C0 -semi-groupes analytiques uniformément bornés se trouvent dans [Pa’83-1,
pag. 60], [Ah’91, pag. 81] ou [Da’80, pag.59]. Une introduction très intéressante des C0 -
semi-groupes analytiques, par la construction d’un calcul fonctionnel adéquat, est donné dans
[CHADP’87, pag. 121].
Le théorème 3.3.6 a été montré par Lummer et Phillips dans [LP’61].
112 CHAPITRE 3. C0 -SEMIGROUPES AVEC PROPRIÉTÉS SPÉCIALES
Chapitre 4

La formule de Lie - Trotter

4.1 Le cas des semi-groupes uniformément con-


tinus
Dans cette section nous présentons la formule du produit de Lie-Trotter pour
les semi-groupes uniformément continus.

Théorème 4.1.1 Soient A le générateur infinitésimal d’un semi-groupe uniformé-


 
ment continu {T (t)}t≥0 et {An (t)}t≥0 ⊂ B(E) tel que:
n∈N

lim kAn (t)k = 0 ,


n→∞

uniformément par rapport à t sur les intervalles compacts de [0, ∞). Alors:
 n
t
T (t) = lim I + (A + An (t)) ,
n→∞ n
uniformément par rapport à t sur les intervalles compacts de [0, ∞).

Preuve Soient 0 ≤ a < b. Si nous notons:


t
Vn (t) = I + (A + An (t)) ,
n
alors, pour tout 0 ≤ k ≤ n, on a:
 k

k

t

Vn (t) = I + (A + An (t)) ≤
n
 k  n
t t
≤ 1 + (kAk + kAn (t)k) ≤ 1 + (kAk + kAn (t)k) =
n n

113
114 CHAPITRE 4. LA FORMULE DE LIE - TROTTER

n
X ti (kAk + kAn (t)k)i X n
ti (kAk + kAn (t)k)i
= ≤ ≤
i=0 ni i=0 i!

X ti (kAk + kAn (t)k)i
≤ = et(kAk+kAn (t)k) ≤ M ,
i=0 i!
cette dernière quantité etant uniformément bornée par rapport à t ∈ [a, b]. De
même, pour:
t
Un (t) = e n A , (∀)t ≥ 0,
nous obtenons:
Unn (t) = etA = T (t) , (∀)t ≥ 0
et pour tout 0 ≤ k ≤ n, nous avons:
kt nt
≤ e n kAk ≤ e n kAk ≤ etkAk ≤ N
k
Un (t) ,

uniformément par rapport à t ∈ [a, b]. Il vient:

Vnn (t) − Unn (t) = Vnn (t)Un0 (t) − Vnn−1 (t)Un1 (t) +
+ Vnn−1 (t)Un1 (t) − Vnn−2 (t)Un2 (t) +
+ Vnn−2 (t)Un2 (t) − · · · − Vn0 (t)Unn (t) =
n−1
Xh i
= Vnn−i (t)Uni (t) − Vnn−i−1 (t)Uni+1 (t) =
i=0
n−1
X
= Vnn−i−1 (t) [Vn (t) − Un (t)] Uni (t) .
i=0

Comme:
t t t
A + An (t) − e n A =
Vn (t) − Un (t) = I +
n n
t t t 1 t2 2
= I + A + An (t) − I − A − A −··· ,
n n n 2! n2
il résulte que:
t 1 t2
kVn (t) − Un (t)k ≤ kAn (t)k + kAk2 + · · · .
n 2! n2
Par conséquent:
n−1
!
X t 1 t2
kVnn (t) − Unn (t)k ≤ M kAn (t)k + kAk2 + · · · N =
i=0 n 2! n2
!
2
1t
= MN tkAn (t)k + kAk2 + · · · −→ 0 si n → ∞,
2! n
uniformément par rapport à t sur les intervalles compacts de [0, ∞), ce qui achève
la preuve.
4.1. LE CAS DES SEMI-GROUPES UNIFORMÉMENT CONTINUS 115

Théorème 4.1.2 (la formule exponentielle) Soit A le générateur infinitési-


mal d’un semi-groupe uniformément continu {T (t)}t≥0 . Alors:
 n  −n   n
t t n n
T (t) = lim I+ A = lim I− A = lim R ;A ,
n→∞ n n→∞ n n→∞ t t
uniformément par rapport à t sur les intervalles compacts de [0, ∞).

Preuve La première égalité résulte du théorème 4.1.1 pour An (t) = 0, quels que
soient n ∈ N et t ≥ 0.
Soient 0 ≤ a < b. On a:
t
<1 A

n
pour n suffisamment grand et t ∈ [a, b]. Avec le lemme 1.1.2, il vient:
t
I− A ∈ GL(E)
n
et: −1 ∞
ti Ai

t X t
I− A = i
= I + (A + An (t)) ,
n i=0 n n
où:
t 2 t2 3
An (t) = A + 2A + ···
n n
et:
lim kAn (t)k = 0 ,
n→∞

uniformément par rapport à t ∈ [a, b]. Avec le théorème 4.1.1, on voit que:
 n  −n
t t
T (t) = n→∞
lim I + (A + An (t)) lim I − A
= n→∞ ,
n n
uniformément par rapport à t sur les intervalles compacts de [0, ∞).
La troisième égalité en résulte compte tenu que:
 −n "  −1 #n   n
t n n n n
I− A = I −A = R ;A .
n t t t t

Théorème 4.1.3 (la formule de Lie-Trotter) Soit A1 le générateur infinité-


simal du semi-groupe uniformément continu {T1 (t)}t≥0 et A2 le générateur in-
finitésimal du semi-groupe uniformément continu {T2 (t)}t≥0 , alors l’opérateur:

A : E −→ E ,

Ax = A1 x + A2 x
116 CHAPITRE 4. LA FORMULE DE LIE - TROTTER

est le générateur infinitésimal d’un semi-groupe {T (t)}t≥0 uniformément continu,


tel que:
t n
    
t
T (t) = lim T1 T2 ,
n→∞ n n
uniformément par rapport à t sur les intervalles compacts de [0, ∞).

Preuve Nous avons successivement:


   
t t t t
T1 T2 = e n A1 e n A2 =
"
n n #" #
t 1 t2 2 1 t3 3 t 1 t2 2 1 t3 3
= I + A1 + A + A + · · · I + A2 + A + A +··· =
n 2! n2 1 3! n3 1 n 2! n2 2 3! n3 2
t2 1 2
 
t 1 2
= I + (A1 + A2 ) + 2 A + A1 A2 + A2 + · · · =
n n 2! 1 2!
   
t t 1 2 1 2
= I+ (A1 + A2 ) + A + A1 A2 + A2 + · · · =
n n 2! 1 2!
t
= I + [A + An (t)] ,
n
où l’opérateur:
t2
   
t 1 2 1 1 3 1 2 1 1
An (t) = A1 + A1 A2 + A22 + 2 A1 + A1 A2 + A1 A22 + A32 + · · ·
n 2! 2! n 3! 2! 2! 3!
a la propriété:

t 1 2 1 2
kAn (t)k ≤ A1 + A1 A2 + A2 +
n 2! 2!
2
t 1 3 1 2
1 2 1 3
+ A + A A2 + A1 A2 + A2 + · · · −→ 0 si n → ∞ ,
n2 3! 1 2! 1 2! 3!
uniformément par rapport à t sur les intervalles compacts de [0, ∞). Avec le
théorème 4.1.1, on voit que:
    n
t t
T (t) = lim T1 T2 ,
n→∞ n n
uniformément par rapport à t sur les intervalles compacts de [0, ∞).

Remarque 4.1.4 Si A, B ∈ B(E), alors on a:


 t t
n
et(A+B) = lim e n A e n B ,
n→∞

uniformément par rapport à t sur les intervalles compacts de [0, ∞).


4.2. PROPRIÉTÉS DE CONVERGENCE DES C0 -SEMI-GROUPES 117

4.2 Propriétés de convergence des C0-semi-groupes


Dans cette section on introduit la topologie de la résolvante sur l’ensemble
GI(E) des générateurs infinitésimaux et on montre le théorème de Trotter - Kato.

Définition 4.2.1 On dit que la suite (An )n∈N∗ ⊂ GI(E) est convergente vers A ∈
T
GI(E) pour la topologie forte de la résolvante si pour tout λ ∈ ρ(An ) ∩ ρ(A),
n∈N∗
on a:
R(λ; An )x −→ R(λ; A)x , si n → ∞ , (∀)x ∈ E.

De même, on dit que la suite (An )n∈N∗ ⊂ GI(E) est convergente vers A ∈ GI(E)
T
pour la topologie uniforme de la résolvante si pour tout λ ∈ ρ(An ) ∩ ρ(A), on
n∈N∗
a:
kR(λ; An ) − R(λ; A)k −→ 0 , si n → ∞.

Par la suite, nous supposerons que GI(E) est doté de la topologie forte de la
résolvante.

Lemme 4.2.2 Soient {T (t)}t≥0 , {S(t)}t≥0 ∈ SG(M, ω) et A, respectivement


B, leur générateurs infinitésimaux. Alors pour tout λ ∈ Λω et tout x ∈ E on a
l’égalité:
Zt
R(λ; B) [T (t) − S(t)] R(λ; A)x = S(t − s) [R(λ; A) − R(λ; B)] T (s)x ds
0

quel que soit t ≥ 0.

Preuve Soient x ∈ E et λ ∈ Λω . Alors R(λ; A)x ∈ D(A) et R(λ; B)x ∈ D(B).


L’application:

[0, t] ∋ s −→ S(t − s)R(λ; B)T (s)R(λ; A)x ∈ E

est différentiable et pour s ∈ [0, t] et x ∈ E nous avons:


d
S(t − s) [R(λ; B)T (s)R(λ; A)x] =
ds
= S(t − s)(−B)R(λ; B)T (s)R(λ; A)x + S(t − s)R(λ; B)T (s)AR(λ; A)x =
= S(t − s)(λI − B − λI)R(λ; B)T (s)R(λ; A)x +
+ S(t − s)R(λ; B)T (s)(−λI + A + λI)R(λ; A)x =
= S(t − s)T (s)R(λ; A)x − λS(t − s)R(λ; B)T (s)R(λ; A)x −
118 CHAPITRE 4. LA FORMULE DE LIE - TROTTER

− S(t − s)R(λ; B)T (s)x + λS(t − s)R(λ; B)T (s)R(λ; A)x =


= S(t − s) [T (s)R(λ; A)x − R(λ; B)T (s)x] =
= S(t − s) [R(λ; A) − R(λ; B)] T (s)x

puisque la résolvante R(λ; A) commute avec T (t), (∀)t ≥ 0. Par conséquent:


Zt
S(t − s)R(λ; B)T (s)R(λ; A)x|t0 = S(t − s) [R(λ; A) − R(λ; B)] T (s)x ds ,
0
ou encore:

R(λ; B)T (t)R(λ; A)x − S(t)R(λ; B)R(λ; A)x =


Zt
= S(t − s) [R(λ; A) − R(λ; B)] T (s)x ds , (∀)x ∈ E.
0

Comme S(t)R(λ; B) = R(λ; B)S(t) pour tout t ≥ 0, on obtient finalement:


Zt
R(λ; B) [T (t) − S(t)] R(λ; A)x = S(t − s) [R(λ; A) − R(λ; B)] T (s)x ds
0

pour tout x ∈ E.
Le théorème suivant présente une très jolie correspondance entre les C0 -semi-
groupes d’opérateurs linéaires bornés et leur générateurs infinitésimaux.
 
Théorème 4.2.3 Soient {Tn (t)}t≥0 ⊂ SG(M, ω) ayant pour générateurs
n∈N∗
infinitésimaux les opérateurs (An )n∈N∗ ⊂ GI(M, ω) et {T (t)}t≥0 ∈ SG(M, ω) ayant
pour générateur infinitésimal l’opérateur A ∈ GI(M, ω).
Les affirmations suivantes sont équivalentes:
i) An −→ A, si n → ∞, pour la topologie forte de la résolvante;
ii) pour tout t0 ∈]0, ∞) on a l’égalité:
( )
lim sup kTn (t)x − T (t)xk = 0 , (∀)x ∈ E.
n→∞ t∈[0,t0 ]

Preuve i) =⇒ ii) Supposons que An −→ A, si n → ∞, pour la topologie forte de


la résolvante. Pour tout λ ∈ Λω , nous avons:

R(λ; An )x −→ R(λ; A)x , si n → ∞ , (∀)x ∈ E.

Soient t0 ∈]0, ∞), x ∈ E et λ ∈ Λω arbitrairement fixées. Puisque la résolvante


commute avec le semi-groupe associé, il résulte que:

[Tn (t) − T (t)] R(λ; A)x = Tn (t) [R(λ; A) − R(λ; An )] x +


+ R(λ; An ) [Tn (t) − T (t)] x + [R(λ; An ) − R(λ; A)] T (t)x.
4.2. PROPRIÉTÉS DE CONVERGENCE DES C0 -SEMI-GROUPES 119

Montrons que cette expression tend vers zero si n → ∞.


 
Comme {Tn (t)}t≥0 ⊂ SG(M, ω), il est clair que:
n∈N∗

kTn (t)k ≤ Meωt0 , (∀)t ∈ [0, t0 ].

Compte tennu de (i), on voit que le premier terme converge vers zero si n → ∞,
uniformément par rapport à t ∈ [0, t0 ].
De même, la continuité de l’application t 7→ T (t)x sur l’intervalle compact [0, t0 ],
conduit au fait que l’ensemble {T (t)x |t ∈ [0, t0 ]} est compact, comme l’image d’un
compact par une fonction continue. On en déduit facilement que le troisième terme
est fortement convergent vers zero lorsque n → ∞ et cette convergence est uniforme
par rapport à t ∈ [0, t0 ].
Pour le deuxième terme, compte tenu du lemme 4.2.2, on a:
Zt
R(λ; An ) [T (t) − Tn (t)] R(λ; A)x = Tn (t − s) [R(λ; A) − R(λ; An )] T (s)x ds,
0

pour tout t ∈ [0, t0 ]. Si pour s ∈ [0, t0 ], on pose

ft,n (s)x = Tn (t − s) [R(λ; A) − R(λ; An )] T (s)x , 0 ≤ s ≤ t ≤ t0 ,

alors on voit que:

kft,n (s)xk = kTn (t − s) [R(λ; A) − R(λ; An )] T (s)xk ≤


≤ kTn (t − s)k kR(λ; A) − R(λ; An )k kT (s)k kxk ≤
≤ Meω(t−s) (kR(λ; A)k + kR(λ; An )k) Meωs kxk ≤
 
M M
≤ Meωt + Meωt kxk =
Re λ − ω Re λ − ω
2M 3
= e2ωt kxk .
Re λ − ω
De plus, compte tenu des inégalités:

kft,n (s)xk = kTn (t − s) [R(λ; A) − R(λ; An )] T (s)xk ≤


≤ kTn (t − s)k kR(λ; A) − R(λ; An )k kT (s)k kxk ≤
≤ Meω(t−s) kR(λ; A) − R(λ; An )k Meωs kxk ≤
≤ M 2 eωt kR(λ; A) − R(λ; An )k kxk ,

nous obtenons
lim kft,n (s)xk = 0 ,
n→∞
120 CHAPITRE 4. LA FORMULE DE LIE - TROTTER

quels que soient s ∈ [0, t] et t ∈ [0, t0 ]. Avec le théorème de la convergence dominée


de Lebesgue ([DS’67, Theorem III.3.7, pag. 124]) il résulte que:
Zt Zt
lim
n→∞
kft,n (s)xk ds = lim kft,n (s)xk ds ,
n→∞
0 0

pour tout t ∈ [0, t0 ]. Il s’ensuit donc que:

lim kR(λ; An ) [T (t) − Tn (t)] R(λ; A)xk = 0 , (∀)x ∈ E,


n→∞

uniformément par rapport à t ∈ [0, t0 ]. Si nous notons y = R(λ; A)x ∈ D(A), on


voit que:
lim kR(λ; An ) [T (t) − Tn (t)] yk = 0 , (∀)y ∈ D(A),
n→∞

uniformément par rapport à t ∈ [0, t0 ]. Par conséquent, si x ∈ D(A), le deuxième


terme tend vers zero pour n → ∞, uniformément par rapport à t ∈ [0, t0 ].
Il s’ensuit que:
( )
lim
n→∞
sup k[Tn (t) − T (t)] R(λ; A)xk = 0 , (∀)x ∈ D(A),
t∈[0,t0 ]

d’où il résulte immédiatement:


( )
lim sup k[Tn (t) − T (t)] yk = 0 , (∀)y ∈ R(λ; A)D(A).
n→∞ t∈[0,t0 ]

Comme R(λ; A)D(A) = D (A2 ), compte tenu du théorème 2.2.10 on voit que
R(λ; A)D(A) = E. Nous obtenons finalement:
( )

n→∞
lim sup kTn (t)x − T (t)xk = 0 , (∀)x ∈ E.
t∈[0,t0 ]

ii) =⇒ i) En appliquant le théorème 2.3.1, nous obtenons pour λ ∈ Λω :


Z∞
[R(λ; An ) − R(λ; A)] x = e−λt [Tn (t) − T (t)] x dt , (∀)x ∈ E,
0

d’où il résulte:
Z∞
k[R(λ; An ) − R(λ; A)] xk ≤ e−Reλt k[Tn (t) − T (t)] xk dt , (∀)x ∈ E.
0

Mais:
k[Tn (t) − T (t)] xk ≤ 2Meωt kxk
4.2. PROPRIÉTÉS DE CONVERGENCE DES C0 -SEMI-GROUPES 121

quels que soient x ∈ E, t ≥ 0 et n ∈ N∗ . Dans ce cas, en posant:

fn (t) = eλt [Tn (t) − T (t)] x , (∀)t ≥ 0

on voit que:
kfn (t)k ≤ 2Me−(Reλ−ω)t kxk , (∀)t ≥ 0.

De plus, compte tenu de l’inégalité:

kfn (t)k ≤ e−Reλt k[Tn (t) − T (t)] xk ,

nous obtenons:
lim kfn (t)k = 0 , (∀)t ≥ 0.
n→∞

Avec le théorème de la convergence dominée de Lebesgue ([DS’67, Theorem


III.3.7, pag. 124]), il vient:

lim k[R(λ; An ) − R(λ; A)] xk = 0


n→∞

pour tout x ∈ E et tout λ ∈ Λω . Donc An −→ A, si n → ∞, pour la topologie


forte de la résolvante.
Une version intéressante du théorème 4.2.3 est le théorème suivant.
 
Théorème 4.2.4 Soient {Tα (t)}t≥0 ⊂ SG(M, ω) ayant pour générateurs in-
α>0
finitésimaux les opérateurs (Aα )α>0 ⊂ GI(M, ω) et {T (t)}t≥0 ∈ SG(M, ω) ayant
pour générateur infinitésimal l’opérateur A ∈ GI(M, ω).
Les affirmations suivantes sont équivalentes:
i) pour tout x ∈ D(A), il existe xα ∈ D(Aα ) tel que:

lim xα = x
αց0

et:
lim Aα xα = Ax;
αց0

ii) pour tout λ ∈ Λω , on a:

lim R(λ; Aα )x = R(λ; A)x , (∀)x ∈ E;


αց0

iii) pour tout t0 ∈]0, ∞), nous avons:


( )
lim sup kTα (t)x − T (t)xk = 0 , (∀)x ∈ E.
αց0 t∈[0,t0 ]
122 CHAPITRE 4. LA FORMULE DE LIE - TROTTER

Preuve i) =⇒ ii) Soient λ ∈ Λω et x ∈ D(A). Alors il existe xα ∈ D(Aα ), α > 0


tel que
lim xα = x
αց0

et:
lim Aα xα = Ax .
αց0

Nous définissons
y = (λI − A)x ∈ (λI − A)D(A)

et
yα = (λI − Aα )xα ∈ (λI − Aα )D(Aα ) , α > 0.

Il résulte que x = R(λ; A)y et xα = R(λ; Aα )yα . Compte tenu des égalités du (i),
nous obtenons:
lim R(λ; Aα )yα = R(λ; A)y
αց0

et:
lim Aα R(λ; Aα )yα = AR(λ; A)y .
αց0

On voit que cette dernière égalité devient:

lim (λI − λI + Aα )R(λ; Aα )yα = (λI − λI + A)R(λ; A)y


αց0

ou bien

lim λR(λ; Aα )yα − lim (λI − Aα )R(λ; Aα )yα =


αց0 αց0
= λR(λ; A)y − (λI − A)R(λ; A)y .

Il vient:
λR(λ; A)y − lim yα = λR(λ; A)y − y ,
αց0

d’où:
lim yα = y .
αց0

D’autre part, pour tout α > 0 on a:


M
kR(λ; Aα )k ≤
Reλ − ω
et pour y ∈ (λI − A)D(A) on voit que:

R(λ; Aα )y = R(λ; Aα )(y − yα + yα ) = R(λ; Aα )(y − yα ) + R(λ; Aα )yα .


4.2. PROPRIÉTÉS DE CONVERGENCE DES C0 -SEMI-GROUPES 123

Par suite:

kR(λ; Aα )y − R(λ; A)yk ≤


≤ kR(λ; Aα )(y − yα )k + kR(λ; Aα )yα − R(λ; A)yk ≤
M
≤ ky − yα k + kR(λ; Aα )yα − R(λ; A)yk ,
Reλ − ω
d’où il vient:
lim R(λ; Aα )y = R(λ; A)y ,
αց0

pour tout y ∈ (λI − A)D(A). Comme (λI − A)D(A) = E, on voit que:

lim R(λ; Aα )x = R(λ; A)x , (∀)x ∈ E.


αց0

ii) =⇒ i) Soient λ ∈ Λω et x ∈ E tel que:

lim R(λ; Aα )x = R(λ; A)x .


αց0

Si nous définissons:
yα = R(λ; Aα )x ∈ D(Aα )

et:
y = R(λ; A)x ∈ D(A) ,

nous obtenons:
lim yα = y .
αց0

De plus:

lim Aα yα = lim Aα R(λ; Aα )x = lim [λR(λ; Aα )x − x] =


αց0 αց0 αց0
= λR(λ; A)x − x = AR(λ; A)x = Ay .

ii) ⇐⇒ iii) Cette équivalence s’obtient avec une preuve analogue à celle du
théorème 4.2.3.
 
Corollaire 4.2.5 Soient {Tα (t)}t≥0 ⊂ SG(M, ω) ayant pour générateurs in-
α>0
finitésimaux les opérateurs (Aα )α>0 ⊂ GI(M, ω) et {T (t)}t≥0 ∈ SG(M, ω) ayant
pour générateur infinitésimal l’opérateur A ∈ GI(M, ω). Supposons que pour
tout x ∈ D(A), il existe δ > 0 tel que pour tout α ∈]0, δ[ on ait x ∈ D(Aα ) et
limαց0 Aα x = Ax. Alors, pour tout t0 ∈]0, ∞) nous avons:
( )
lim sup kTα (t)x − T (t)xk = 0 , (∀)x ∈ E.
αց0 t∈[0,t0 ]
124 CHAPITRE 4. LA FORMULE DE LIE - TROTTER

Preuve Dans le théorème 4.2.4, nous pouvons prendre xα = x, (∀)α ∈]0, δ[.
Le théorème suivant montre que sous certaines conditions, GI(M, ω) est une
sous-classe fermée dans GI(E).

Théorème 4.2.6 Soient (An )n∈N∗ ⊂ GI(M, ω) et λ0 ∈ Λω tel que:


i) (R(λ0 ; An ))n∈N∗ est fortement convergente vers Rλ0 ∈ B(E);
ii) Im Rλ0 = E.
Alors il existe un unique opérateur A ∈ GI(M, ω) tel que Rλ0 = R(λ0 ; A).

Preuve Nous notons:


n o

S = λ ∈ Λω (R(λ; An ))n∈N∗ est fortement convergente .

Montrons que S = Λω .
Prouvons que S est ensemble ouvert dans Λω . Soit µ ∈ S. Pour tout n ∈ N∗ ,
l’application:
ρ(An ) ∋ λ 7−→ R(λ; An ) ∈ B(E)

est analytique et nous avons:



(λ − µ)k dk
X
R(λ; An ) = R(µ; An ) =
k=0 k! dµk

X (λ − µ)k
= (−1)k k!R(µ; An )k+1 =
k=0 k!

X
= (µ − λ)k R(µ; An )k+1 .
k=0

Comme An ∈ GI(M, ω) implique:



k M
(∀)k ∈ N∗ ,

R(µ; An ) ≤ ,
(Reµ − ω)k
on voit que:
∞ ∞
!k
X M X |µ − λ|
|µ − λ|k R(µ; A)k+1

kR(λ; An )k ≤ ≤ .
k=0 Reµ − ω k=0 Reµ − ω
La série de la partie droite de cette inégalité est convergente sur l’ensemble:
n o
V = λ ∈ Λω |µ − λ|(Reµ − ω)−1 < 1 .

Il en résulte que la série:



X
R(λ; An ) = (µ − λ)k R(µ; An )k+1
k=0
4.2. PROPRIÉTÉS DE CONVERGENCE DES C0 -SEMI-GROUPES 125

est uniformément convergente sur les compacts


n o
Vν = λ ∈ Λω |µ − λ|(Reµ − ω)−1 ≤ ν < 1 ⊂ V .

Comme ∞
M X
kR(λ; A)k ≤ νk ,
Re µ − ω k=0
on voit que la suite (R(λ; An ))n∈N∗ est fortement convergente pour tout λ ∈ Vν .
Donc il existe un voisinage de µ contenu dans S. Par conséquent S est ensemble
ouvert dans Λω .
Maintenant, nous allons montrer que S est un ensemble relativement fermé dans
Λω . Soient (λm )m∈N ⊂ S et λ ∈ Λω tel que

λ = lim λm .
m→∞

Pour tout ν ∈]0, 1[, il existe λm,ν ∈ S tel que:

|λm,ν − λ| (Re λm,ν − ω)−1 ≤ ν < 1 .

Compte tenu de la première partie de la preuve, on voit que la série



X
R(λ; An ) = (λm,ν − λ)k R(λm,ν ; An )k+1
k=0

est uniformément convergente et que la suite (R(λ; An ))n ∈ N∗ est fortement


convergente. Par conséquent, λ ∈ S et S est un ensemble relativement fermé dans
Λω . Comme λ0 ∈ S, nous voyons que S = Λω par connexité.
Pour λ ∈ Λω , définissons l’opérateur Rλ ∈ B(E) par:

Rλ x = lim R(λ; An )x , (∀)x ∈ E.


n→∞

Soient λ , µ ∈ Λω arbitraires. On a:

(Rλ − Rµ ) x = lim [R(λ; An ) − R(µ; An )] x =


n→∞
= lim (µ − λ)R(λ; An )R(µ; An )x =
n→∞
= (µ − λ)Rλ Rµ x , (∀)x ∈ E.

Par conséquent Rλ est une pseudo-résolvante, quel que soit λ ∈ Λω . Comme il


existe λ0 ∈ Λω tel que Im Rλ0 = E, compte tenu du théorème 1.1.22 (ii), on
déduit que Im Rλ = E, quel que soit λ ∈ Λω . Avec l’inégalité:
M
kR(λ; An )m k ≤ , (∀)λ ∈ Λω et m ∈ N∗ ,
(Reλ − ω)m
126 CHAPITRE 4. LA FORMULE DE LIE - TROTTER

on voit que pour tout compact K ⊂ Λω , il existe MK > 0 tel que

sup kR(λ; An )k ≤ MK ,
λ∈K

quel que soit n ∈ N∗ . Avec le lemme de Montel ([GS’99, pag. 220]), on déduit
qu’il existe une sous-suite (R(λ; Ank ))k∈N∗ telle que

Rλ x = lim R(λ; Ank )x , (∀)x ∈ E,


k→∞

uniformément par rapport à λ sur les compacts de Λω . Comme R(λ; Ank ) est un
opérateur injectif pour tout k ∈ N∗ , avec le théorème de Hurwitz ([GS’99, pag.
193]) nous obtenons que Rλ est un opérateur injectif, donc Ker R(λ; An ) = {0}.
En appliquant le théorème 1.1.22 (iii), on voit que pour tout λ ∈ Λω , il existe un
opérateur linéaire A : D(A) −→ E, A = λI − Rλ−1 fermé et défini sur un sous
espace dense tel que Rλ = R(λ; A), (∀)λ ∈ Λω . De plus:
M
kR(λ; A)m k ≤ .
(Reλ − ω)m
et le théorème de Hille - Yosida implique alors que A ∈ GI(M, ω).
Maintenant, nous avons toutes les conditions pour formuler un autre résultat
important concernant les C0 -semi-groupes.
 
Théorème 4.2.7 (Trotter - Kato) Soit {Tn (t)}t≥0 ⊂ SG(M, ω) ayant
n∈N∗
pour générateurs infinitésimaux les opérateurs (An )n∈N∗ ⊂ GI(M, ω).
S’il existe λ0 ∈ Λω tel que:
i) (R(λ0 ; An ))n∈N∗ est fortement convergente vers Rλ0 ∈ B(E);
ii) Im Rλ0 = E,
alors il existe un unique opérateur A ∈ GI(M, ω) tel que Rλ = R(λ; A), (∀)λ ∈
Λω . De plus, si {T (t)}t≥0 est le C0 -semi-groupe engendré par A, alors pour tout
t0 ∈]0, ∞) on a:
( )
lim sup kTn (t)x − T (t)xk = 0 , (∀)x ∈ E.
n→∞ t∈[0,t0 ]

Preuve Les affirmations du théorème résultent du théorème 4.2.3 et du théorème


4.2.6.
4.3. FORMULE DE LIE - TROTTER POUR LES C0 -SEMI-GROUPES 127

4.3 Formule de Lie - Trotter pour les C0-semi-


groupes
Dans la suite, nous montrons le théorème de représentation générale, la for-
mule exponentielle et la formule de Lie-Trotter pour les semi-groupes fortement
continus. Nous commençons par un résultat technique.

Lemme 4.3.1 Soient T ∈ B(E) et M, N ≥ 1 tel que:



(∀)k ∈ N∗ .
k
T ≤ MN k ,

Alors, pour tout n ∈ N, nous avons:


q
n(T −I) n−1 (N −1)n
x − T n x n2 (N − 1)2 + nNkT x − xk

e ≤ MN e

pour tout x ∈ E.

Preuve Soient k, n ∈ N tel que k ≥ n. Alors, nous avons:



k−1  
k X
T x − T n x i+1 i

= T x−T x ≤

i=n
k−1
X k−1
X
i
≤ T kT x − xk ≤ kT x − xk MN i ≤
i=n i=n
k−1
X
≤ MkT x − xk N k−1 = (k − n)MN k−1 kT x − xk ≤
i=n
n+k−1
≤ |k − n|MN kT x − xk , (∀)x ∈ E.

Compte tenu de la symétrie, il est clair que cette inégalité reste valable si nous
considérons n > k. Par suite, on voit que:

k
T x − T n x ≤ |k − n|MN n+k−1 kT x − xk ,

(∀)x ∈ E et n, k ∈ N.

Si t ≥ 0 et n ∈ N, alors nous avons:





t(T −I)

−t X tk  k 
e x − T n x = e T x − T n x ≤
k=0 k!

∞ ∞
X tk k X (tN)k
≤ e−t T x − T n x ≤ MN n−1 e−t kT x − xk

|k − n| .
k=0 k! k=0 k!
128 CHAPITRE 4. LA FORMULE DE LIE - TROTTER

Avec l’inégalité de Cauchy-Schwartz, il vient:


s  s 
∞ k ∞
X (tN) X (tN)k (tN)k
|k − n| =   |k − n| ≤
k=0 k! k=0 k! k!
v v
u∞ ∞
u
uX (tN)k u X (tN)k q
≤ t t (k − n)2 = etN (n − Nt)2 + Nt .
k=0 k! k=0 k!

Il s’ensuit que:
q
t(T −I)
x − T n x ≤ MN n−1 e(N −1)t (n − Nt)2 + NtkT x − xk

e

quel que soit x ∈ E. Finalement, en prenant t = n, nous obtenons l’inégalité


considérée dans l’énoncé.

Théorème 4.3.2 (de représentation générale) Soit {F (t)}t≥0 ⊂ B(E) une famille
d’opérateurs linéaires bornés avec F (0) = I. Supposons qu’il existe ω ≥ 0 et M ≥ 1
tel que:

k
≤ Mekωt (∀)k ∈ N∗ ,

F (t) ,

pour tout t ≥ 0.
Si A est le générateur infinitésimal d’un C0 -semi-groupe {T (t)}t≥0 tel que:

F (t)x − x
lim = Ax , (∀)x ∈ D(A),
tց0 t
alors nous avons:
  n
t
T (t)x = lim F x , (∀)x ∈ E,
n→∞ n
uniformément par rapport à t sur les intervalles compacts de [0, ∞).

Preuve Soient 0 ≤ a < b. Pour t ∈ [a, b], définissons:


   
n t
An = F −I , (∀)n ∈ N∗ .
t n
Il est clair que An ∈ B(E), (∀)n ∈ N∗ , d’où il résulte que pour tout n ∈ N∗ , An
n o
est le générateur infinitésimal du semi-groupe uniformément continu etAn et,
t≥0
de plus, nous avons:

lim An x = Ax ,
n→∞
(∀)x ∈ D(A).
4.3. FORMULE DE LIE - TROTTER POUR LES C0 -SEMI-GROUPES 129

Avec le corollaire 4.2.5, nous voyons que:

lim etAn x = T (t)x , (∀)x ∈ E,


n→∞

uniformément par rapport à t ∈ [a, b]. Compte tenu du lemme 4.3.1, si x ∈ D(A),
il vient:
  n   n
tAn t n[F ( t )−I ] t
e x− F x = e n x− F x ≤

n
 t  r

n
 
ω nt (n−1) e
ωn
−1 n
2

ω nt
 2
ω nt t
≤ Me e n e − 1 + ne F x − x =
n
 t  r  
t
ω nt (n−1)+ eω n −1 n  t 2 t t F

n
x − x
= Me n2 eω n − 1 + neω n t
=
n n


t s  
t
t2 t F n x − x
ωn
ω nt (n−1)+ e t −1 t  t 2
= Me n t2 eω n − 1 + eω n t ,
n n

d’où:   n
tAn t
e
x − F −→ 0 si n → ∞,
x
n
pour tout x ∈ D(A), uniformément par rapport à t ∈ [a, b]. De plus, pour tout
x ∈ D(A), nous avons:
  n

T (t)x − F
t
x ≤
n   n
t
T (t)x − etAn x + tAn

≤ e x − F x −→ 0 si n → ∞,
n
d’où l’on déduit que:
  n
t
T (t)x = lim F x , (∀)x ∈ D(A),
n→∞ n
uniformément par rapport à t sur les intervalles compacts de [0, ∞).
 n
t
≤ Meωt , on voit que:

Comme D(A) = E et F n

  n
t
T (t)x = lim F x , (∀)x ∈ E,
n→∞ n
uniformément par rapport à t sur les intervalles compacts de [0, ∞).

Théorème 4.3.3 (la formule exponentielle) Soient {T (t)}t≥0 ∈ SG(M, ω) et


A son générateur infinitésimal. Alors:
 −n   n
t n n
T (t)x = lim I− A x = lim R ;A x , (∀)x ∈ E,
n→∞ n n→∞ t t
uniformément par rapport à t sur les intevalles compacts de [0, ∞).
130 CHAPITRE 4. LA FORMULE DE LIE - TROTTER
i h
Preuve Pour A ∈ GI(M, ω) et t ∈ 0, ω1 , nous définissons:
 
−1 1 1
F (t) = (I − tA) = R ;A .
t t
Compte tenu du théorème de Hille-Yosida, on voit que:
 k  k
1 1 1 M M
F (t)k

= R ;A ≤  k = .
t t t 1
−ω (1 − ωt)k
t

Comme:
1 kωt
≤ e 1−ωt ,
(1 − ωt) k

il vient:

F (t)k ≤ Me2kωt

i i
1
pour t ∈ 0, 2ω . D’autre part, avec le lemme 2.3.6 nous obtenons:

F (t)x − x 1
lim = lim [F (t) − I] x = lim AF (t)x =
tց0 t tց0 t tց0
   
1 1
= lim A R ; A x = Ax , (∀)x ∈ D(A).
tց0 t t
Compte tenu du théorème de représentation générale, on voit que:
  n  −n
t t
T (t)x = lim F x = lim I − A x=

n→∞

n
n
n→∞ n
n n
= n→∞
lim R ;A x , (∀)x ∈ E,
t t
uniformément par rapport à t sur les intervalles compactes de [0, ∞).

Théorème 4.3.4 (la formule de Lie-Trotter) Soient A1 ∈ GI(M1 , ω1 ) le générateur


infinitésimal du semi-groupe {T1 (t)}t≥0 ∈ SG(M1 , ω1 ), respectivement A2 ∈ GI(M2 , ω2 )
le générateur infinitésimal du semi-groupe {T2 (t)}t≥0 ∈ SG(M2 , ω2 ). Supposons
qu’il existe ω ≥ 0 et M ≥ 1 tel que:

k
≤ Mekωt (∀)k ∈ N∗ .

[T1 (t)T2 (t)] ,

Si l’opérateur
A : D(A) ⊂ E −→ E,

défini par:

Ax = A1 x + A2 x , (∀)x ∈ D(A) = D(A1 ) ∩ D(A2 ),


4.3. FORMULE DE LIE - TROTTER POUR LES C0 -SEMI-GROUPES 131

est le générateur infinitésimal d’un C0 -semi-groupe {T (t)}t≥0 , alors:


    n
t t
T (t)x = lim T1 T2 x , (∀)x ∈ E,
n→∞ n n
uniformément par rapport à t sur les intervalles compacts de [0, ∞).

Preuve Soit:
F : [0, ∞) −→ B(E)

F (t) = T1 (t)T2 (t) , (∀)t ≥ 0.

Il est évident que F (0) = I. De plus, pour x ∈ D(A), nous avons:

F (t)x − x T1 (t)T2 (t)x − x


lim = lim =
tց0 t tց0 t
T1 (t)T2 (t)x − T1 (t)x T1 (t)x − x
= lim + lim =
tց0 t tց0 t
T2 (t)x − x
= lim T1 (t) + A1 x = A1 x + A2 x = Ax .
tց0 t
Avec le théorème de représentation générale, on voit que:
  n     n
t t t
T (t)x = lim F x = lim T1 T2 x , (∀)x ∈ E,
n→∞ n n→∞ n n
uniformément par rapport à t sur les intervalles compacts de [0, ∞).

Remarque 4.3.5 Si A ∈ GI(M, ω), compte tenu de la formule exponentielle, on


peut définir:
 −n   n
t n n
etA x = lim I− A x = lim R ;A x , (∀)x ∈ E,
n→∞ n n→∞ t t
uniformément par rapport à t sur les intervalles compacts de [0, ∞). Avec cette
notation, dans les hypothèses du théorème 4.3.4, nous obtenons pour la formule
de Lie-Trotter l’expression:
h t t
in
etA x = lim e n A1 e n A2 x , (∀)x ∈ E,
n→∞

uniformément par rapport à t sur les intervalles compacts de [0, ∞).


132 CHAPITRE 4. LA FORMULE DE LIE - TROTTER

4.4 Notes
Pour les résultats de la section 4.1 on peut consulter [Ka’82, pag. 35].
Les propriétés de convergence pour les C0 -semi-groupes ont été étudiées par Trotter dans
[Tr’58]. Pour les théorèmes 4.2.3, 4.2.6, 4.2.7 on peut consulter [Pa’83-1, pag. 84] ou [Ah’91,
pag. 131] et pour le théorème 4.2.4 nous avons utilisé [Da’80, pag. 80].
Le théorème 4.3.4 a été montré par Trotter dans [Tr’59] et a été étudié par Chernoff dans
[Ce’68]. Les résultats que nous avons présentés se trouvent dans [Pa’83-1, pag. 89]. Dans
[Da’80, pag. 90], on peut trouver ces problèmes pour les C0 -semi-groupes de contractions.
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