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Fiche récapitulatif HDA français

Antigone de Jean Anouilh

« J’ai réécrit le mythe à ma façon, avec


la résonance de la tragédie que nous étions en train de vivre », Jean Anouilh

Thème : Arts, mythes et religions


Problématique : Comment et pourquoi Jean Anouilh reprend-‐il le mythe d’Antigone durant la
Seconde GM ?

Introduction

1. Contextualisation : l’œuvre et l’auteur

Jean Anouilh est né à en 1910. Il commence par faire des études de droit mais se consacre
totalement au théâtre après l’écriture de sa première pièce, en 1932. Durant la seconde guerre
mondiale, Jean Anouilh continue d'écrire. Il ne prend position ni pour la Résistance, ni pour la
collaboration. Ce non-‐engagement lui sera reproché. Il se lance dans l'adaptation de mythes antiques
et obtient un nouveau succès avec Eurydice (1942). En 1944 est créée Antigone. Cette pièce connaît
un immense succès public mais engendre une polémique. Certains reprochent à Anouilh de défendre
l'ordre établi en faisant la part belle à Créon. Ses défenseurs mettent au contraire en avant la liberté
d’Antigone.
À la Libération, Anouilh continue d'écrire en alternant pièces "noires", "roses", "brillantes",
"grinçantes", "costumées", "secrètes" et "farceuses", suivant leur degré de pessimisme, de férocité
et d’hypocrisie. Il meurt en 1987.

Problématique : Comment et pourquoi Jean Anouilh reprend-‐il le mythe d’Antigone durant la


Seconde GM ?

Plan :
Après une brève description de l’œuvre, nous verrons ce qu’est la tragédie pour ensuite évoquer
comment Anouilh a modernisé la pièce au XXème siècle. Enfin, nous nous attacherons à faire le lien
entre Antigone et la Seconde GM.

Description de l’œuvre
Sa forme :
Cette pièce de théâtre n’est pas découpée en actes ou en scènes comme dans le théâtre classique.
Pourtant, elle respecte les règles des trois unités : unité de temps (24h), de lieu ( le palais de Créon à
Thèbes), et d’action ( Antigone sera-‐t-‐elle sauvée ou non ?). Le dialogue le plus important, entre
Antigone et Créon, est au milieu de la pièce (correspondant au traditionnel acte III, scène 3). Ainsi,
Antigone d’Anouilh est bien une réécriture de la pièce de Sophocle voire une parodie : le chœur de
Sophocle est repris chez Anouilh par le personnage du Prologue, qui nous présente les comédiens-‐
personnages et annonce d’ores et déjà l’issue tragique de la pièce avant qu’elle ait commencé ; en
effet, le plus important n’est pas la fin mais le pourquoi de cette fin.

Bref résumé de l’histoire


Antigone est la fille d'Œdipe et de Jocaste, souverains de Thèbes. Après le suicide de Jocaste et l'exil
d'Œdipe, les deux frères d'Antigone, Étéocle et Polynice se sont entretués pour le trône de Thèbes.
Créon, frère de Jocaste et − à ce titre − nouveau roi, a décidé de n'offrir de sépulture qu'à Étéocle et
non à Polynice, qualifié de voyou et de traître. Il avertit par un édit que quiconque osera enterrer le
corps du renégat sera puni de mort. Personne n'ose braver l'interdit et le cadavre de Polynice est
abandonné à la chaleur et aux charognards. Seule Antigone refuse cette situation. Malgré
l'interdiction de son oncle, elle se rend plusieurs fois auprès du corps de son frère et tente de le
recouvrir avec de la terre. Ismène, sa sœur, informée de sa décision, refuse de la suivre, craignant sa
propre mort.

Analyse de l’œuvre (réponse à la problématique en trois points)

1er axe : Qu’est-‐ce qu’une tragédie ?


Initialement, la tragédie présente un personnage dont le rang social est élevé (roi, fille de roi,…) qui
se retrouve face à un dilemme tragique : expérimenter sa liberté jusqu’au bout au risque de mourir
ou obéir aux règles et donc, rester en vie, mais ne pas être libre. Antigone, par exemple, doit choisir
entre expérimenter sa liberté en recouvrant le corps de son frère, ce qui entraînera sa mort ou obéir
aux règles en laissant son frère sans sépulture, ce qui lui permettra de rester vivante mais qui
entraînera la mort de ses convictions, de ses idéaux.
Dans la tragédie, tout est sous le signe de la fatalité (=ce qui ne peut être autrement). Les
personnages ne peuvent modifiés le cours de leur destin.

2eme axe : La modernisation du mythe d’Antigone


-‐ L’anachronisme : rend l’action et les personnages plus proches du spectateur contemporain «
cigarettes », « une petite brute tout juste bonne à aller plus vite que les autres avec ses voitures, à
dépenser l’argent dans les bars ».
-‐ La désacralisation du héros : Œdipe, archétype du héros tragique, est représenté comme un
vieillard bafoué par ses fils. L’affrontement entre Etéocle et Polynice est réduit à une histoire de
voyous. Antigone semble davantage se sacrifier pour elle-‐même que pour ses frères et l’orgueil
remplace l’héroïsme. Créon, enfin, a des ambitions modestes pour un roi de tragédie : « J’ai mes
deux pieds sur terre, mes deux mains enfoncées dans mes poches et, puisque je suis roi, j’ai résolu,
avec moins d’ambition que mon père, de m’employer tout simplement à rendre l’ordre de ce monde
un peu moins absurde, si c’est possible. ». L’utilisation du registre courant ou familier montre que les
personnages ont du mal à se dégager d’une humanité ordinaire.
-‐ L’absence de transcendance : au contraire de la pièce antique, l’absence de dieu se fait sentir tant
chez Antigone (qui n’agit plus par conviction car elle a accepté l’image d’imposteur et de voyou que
Créon propose sur son frère) que chez Créon ( qui refuse la sépulture à Polynice non par impiété mais
simplement par politique, excluant toute préoccupation religieuse).

3eme axe : La figure d’Antigone et la Seconde GM


Le personnage d’Antigone représente la Résistance s'opposant aux lois édictées par Créon / Pétain et
qu'elle juge injustes. Elle refuse la facilité et préfère se rebeller, ne voulant pas céder à une
prétendue fatalité. Anouilh s’inspire du geste de Paul Collette, un résistant français qui avait tiré sur
Pierre Laval, chef du gouvernement de Vichy, le 27 août 1941. Anouilh reprend donc un mythe (récit
à l’origine oral puis devenu écrit qui cherche à expliquer l’origine d’un phénomène ou d’une pratique
sociale) antique et l’adapte à un contexte contemporain de la vie de l’auteur.

Conclusion

Après Anouilh, la pièce sera reprise par Brecht en 47 puis par le Living Theatre qui se réapproprie le
mythe pour exprimer le conflit des générations et le rejet de tout système. Aujourd’hui Antigone,
que ce soit celle de Sophocle, de Brecht ou d’Anouilh sont régulièrement jouées et témoignent de
l’intérêt persistant pour le personnage : sainte ou égoïste, soumise ou révoltée, de gauche ou de
droite ? Loi naturelle ou loi de la cité ? Collaborer ou résister ? Qu’est-‐ce que gouverner, qu’est-‐ce
que résister ? Grandir, est-‐ce forcément faire des concessions ? Autant de questions que soulève la
pièce d’Anouilh, réussissant ainsi à actualiser le mythe antique puisque chacun est libre de
l’interpréter encore et toujours…

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