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Programme d’Appui Stratégique à la Recherche Scientifique (PASRES)


VARIABILITÉ CLIMATIQUE ET GESTION DES SEMENCES AGRICOLES DANS
LA COMMUNE RURALE DE SOURGOU.

CLIMATIC VARIABILITY AND MANAGEMENT OF AGRICULTURAL SEEDS IN


THE RURAL COMMUNE OF SOURGOU.

BOUDA Tiraogo Prince Florian * (7) ; OUEDRAOGO Arnaud ** (1) ;

SOME Yélézouomin Stéphane Corentin ***(1)


(1) Laboratoire de Recherche en Sciences humaines (LABOSH), Université Norbert ZONGO (UNZ)
Koudougou – Burkina Faso
*princebouda88@gmail.com

Résumé
La variabilité climatique est un problème majeur dans les pays de l’Afrique de l’Ouest. Pour parer aux adversités
du climat, les populations adoptent des stratégies résilientes contre ses effets. L’une des stratégies résilientes est
l’adoption des semences améliorées. Ces semences résolvent les problèmes liés au raccourcissement des pluies,
aux mauvais tris, la présence d’anomalie génétique des pousses. Parallèlement à ce contexte théorique, les normes
de dotation des semences qui devrait suivre une linéarité, sont incrustés dans une panoplie de procédures rendant
difficile l’accès des semences et intrants agricoles. Dans la commune de Sourgou, les populations subissent les
effets de ces aléas climatiques. De ce fait, elles adoptent des stratégies atténuantes. L’une des solutions pour sortir
de cette crise climatique est la dotation des semences améliorées en impliquant des personnes-ressources locales.
Les résultats montrent que cette gestion connait plusieurs failles. Sur l’ensemble de la population enquêtée, 88,5
% déclarent que les saisons sont de plus en plus courtes, 7,2 % que la saison est normale et 4,3% que la saison est
plus longue. En ce qui concerne la durée des poches de sécheresses, 11,8 % des enquêtés stipulent que les poches
de sécheresses ont une durée inférieure à 7 jours, 31,2% qu’elles sont comprises entre 7 à 10 jours et 57% qu’elles
excèdent 10 jours. Aussi, 100% s’adaptent en pratiquant soit des stratégies pour préserver leurs cultures. Nous
nous attellerons à faire ressortir les visions de la gestion des semences dans la commune de Sourgou.

Mots clefs : semences améliorées ; variabilité climatique ; jeu d’acteur, Sourgou, Burkina Faso.

Abstract
Climate variability is a major problem in West African countries. To deal with the adversities of the climate,
populations adopt resilient strategies against its effects. One of the resilient strategies is the adoption of improved
seeds. These seeds solve the problems related to the shortening of the rains, to the bad sorting, the presence of
genetic anomaly of the shoots. Alongside this theoretical context, the standards for seed endowment, which should
follow a linearity, are embedded in a panoply of procedures making it difficult to access seeds and agricultural
inputs. In the municipality of Sourgou, the populations suffer the effects of these climatic hazards. As a result,
they adopt mitigating strategies. One of the solutions to get out of this climate crisis is the allocation of improved
seeds by involving local resource people. The results show that this management has several flaws. Of the entire
population surveyed, 88.5% declare that the seasons are getting shorter, 7.2% that the season is normal and 4.3%
that the season is longer. With regard to the duration of pockets of drought, 11.8% of respondents state that pockets
of drought last less than 7 days, 31.2% that they are between 7 to 10 days and 57% that they exceed 10 days. Also,
100% adapt by practicing either strategies to preserve their cultures. We will strive to bring out the visions of seed
management in the commune of Sourgou.
Keywords: improved seeds; climate variability; acting, Sourgou, Burkina Faso.

* Doctorant, département de Géographie, Université Norbert ZONGO, princebouda88@gmail.com, Koudougou, Burkina Faso
** Maitre-Assistant, département de Géographie, Université Norbert ZONGO, arnaudobf@gmail.com, Koudougou, Burkina Faso
*** Professeur Titulaire, département de Géographie, Université Norbert ZONGO, some_y@yahoo.com, Koudougou, Burkina Faso

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Introduction

L’Afrique est l’une des régions les plus vulnérables face au changement climatique, avec un
stress hydrique, la réduction des rendements agricoles, une aggravation de l’insécurité
alimentaire et de la malnutrition ; le tout conjugué à une pression démographique croissante sur
les ressources naturelles ( D. Ahouangan et al., 2014, p. 2). En Afrique, les grands changements
s’opèrent sur le secteur rural. En effet, elle est le plus affecté par la variabilité climatique surtout
pour les pays de l’Afrique de l’Ouest. Pourtant cette agriculture procure 7% de croissance
économique des pays en mutation et 32% de la croissance des pays d'Afrique subsaharienne
(Y. D Bationon, 2009). Dans ces régions, l’agriculture vivrière pluviale occupe une place
capitale dans les économies nationales et représente près de 93% des terres cultivées (B. Zongo,
2016, p. 43).

Le Burkina Faso, pays sahélien, est l’un des plus pauvres de la planète subissant avec sévérité
ces différents stress. Dans ce pays, les principales cultures sont tributaires du climat. En effet,
la brièveté de la saison pluvieuse est témoin de l’agriculture en difficulté, qui est à plus de 90%
pluviale (A. Ouédraogo, 2012, p. 57). Voler au secours de l’agriculture est l’un des objectifs
que se sont fixé les plans de développement locaux. De l’avis de B. Zongo (2016, p. 49), la
pluviométrie est la variable climatique la plus importante qui affecte la production agricole. Il
est donc important de trouver des solutions idoines. Le principal problème étant dû à la
pluviométrie, des propositions ont donc étés formulées allant dans ce sens. L’adoption des
variétés à cycle court par les producteurs a été une des solutions du monde scientifique. C’est
dans la dynamique de lutter contre l’inadaptation des semences classiques aux nouvelles réalités
pluviométriques, que la CEDEAO en 2006 à promu une loi commune sur la gestion des
semences, qui sera dans la même année adoptée par la loi burkinabè avec plusieurs
insuffisances. Les réalités souvent encastrées dans des visions politiques, l’engrainage ethnique,
et les mésententes font que l’unique solution jusque-là présenté comme un moyen de sortie de
crise connait toujours une gestion mitigée au sein de la commune rurale de Sourgou. L’objectif
est de dépeindre la crise climatique vécu par les producteurs à travers le mode d’octroie des
semences.

Comment s’effectue la redistribution des semences aux producteurs de Sourgou dans un


contexte de crise climatique ?
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L’étude permet d’identifier le mode de gestion, les acteurs, le système de distribution des
semences dans la commune rurale de Sourgou.
1. Présentation de la zone d’étude
La commune de Sourgou est une commune rurale de 266,03 km2. La population est estimée à
13 709 d’habitants (INSD, 2006, p.44.). Sourgou est l’une des 14 communes rurales de la
province du Boulkiemdé. Elle est située à 15 km du chef-lieu de la province Koudougou et à
10 km de la commune de Sabou sur la route nationale n°13 Koudougou-Léo, entre la longitude
12°30’ W, et la latitude 2°09’ N. Elle est limitée au nord par la commune de Koudougou et
celle de Ramongo, au sud par la commune de Sabou, et à l’est par la commune de Poa (Figure
1). Le choix du site réside dans son caractère rural, dont la population est essentiellement
agricole avec un contraste dans les villages. En effet dans les villages de Guirgo, de Kougsin,
de La, les populations utilisent les plans d’eaux comme stratégies comparativement à celui de
Ouoro ou l’absence de plan d’eau freine certaines activités des populations. Aussi la gestion
des semences est différente dans le village de Ouoro car elle n’implique pas une confrontation
d’acteurs comparativement aux autres villages.

Figure 1 : Localisation des villages d’étude.

La région du Centre-Ouest est située dans le domaine soudano-sahélien avec une moyenne
pluviométrique annuelle de 817 mm d’eau. La commune de Sourgou a un relief relativement
plat, et dominé par plusieurs types de sols, cependant, les lithosols sur cuirasse et les sols
ferrugineux sont les plus dominants. Les sols hydromorphes peu humifères à pseudogley de
surface sont localisés dans les bas-fonds et le long des plans d’eau. La végétation est de type

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savane arborée clairsemée d’arbustes. Cette savane est dominée par les espèces telles Vitellaria
paradoxa, Bombax costatum, Tamarindus indica, Parkia biglobosa, Saba senegalensis,
Anogeissus leiocarpa, Acacia albida, Khaya seneglensis, Lannea microcarpa,Guiera
senegalensis, Annona senegalensis. La strate herbacée est constituée d’Andropogon gayanus,
de Loudetia togoensis, de Pennissetum pedicellatum. On y trouve aussi des arbres exotiques
tels Azadirachta indica, Mangifera indica et Eucalyptus camaldulensis qui sont des plantations
artificielles. La commune de Sourgou compte quatre plans d’eau dont trois se situent
respectivement dans les villages de Sourgou, de La, et de Rogho. La commune se situe dans le
bassin international de la Volta, et au niveau national dans le bassin versant du Mouhoun. Le
réseau hydrographique permet difficilement la pratique de certaines activités comme la culture
de contre-saison. L’agriculture constitue l’essentielle des activités de la population de Sourgou.

2. MATERIELS ET METHODES
La méthodologie d’étude se base sur la recherche documentaire et sur la collecte des données
primaires à travers les enquêtes terrain et les entretiens.

2.1.La recherche documentaire


Afin de mieux peaufiner notre thème, une recherche documentaire a été nécessaire. Cette
documentation s’est faite dans différentes bibliothèques : elle a consisté à rechercher tout ce qui
est document ou ouvrage sur la zone d’étude, mais aussi en rapport avec la variabilité
climatique, les changements climatiques et tout ce qui est connexe aux systèmes de production,
notamment au sein des bibliothèque physiques de l’Université Norbert ZONGO, de
l’Université Joseph KI ZERBO dans la bibliothèque de la section SH (Sciences Humaines), à
la bibliothèque du centre de documentation et d’information de l’Institut International
d’Ingénierie de l’Eau et de l’Environnement (2iE) sis à l’université Joseph Ki ZERBO ou nous
avons effectué notre stage pratique qui a consisté à constituer une revue de littérature en rapport
avec notre thème et connexe. Elle a porté sur la variabilité climatique et les changements
climatiques. Nous nous sommes attelés à cibler des thèmes connexes à la variabilité climatique
comme les ressources en eaux, les sols, la végétation, les cultures notamment celles pluviales,
et de contre-saison.
2.2.Collecte et analyse des données
D’abord, Le questionnaire individuel a été l’outil utilisé pour comprendre le fonctionnement de
la filière de distribution des semences améliorées. Les procédures de dotation des semences, les
acteurs impliqués, la quantité, le cycle de sélection des bénéficiaires étaient les principaux
objectifs du questionnaire. La population cible a concerné les producteurs chefs de ménages qui
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ont au moins 40 ans. Le choix de cette tranche d’âge réside dans le fait que l’âge est corrélé à
l’expérience, surtout dans la perception du climat et de la production agricole. Au total,
l’enquête a concerné 422 chefs de ménages choisis aléatoirement dans les villages. Le
dépouillement a été réalisé manuellement et les données ont été intégrées dans le logiciel
sphinx. Les graphiques ont été réalisés par sphinx, mais pour une question de lisibilité, ils ont
été repris dans le tableur Excel.
Ensuite, pour comprendre la démarche utilisée pour la sélection des bénéficiaires, le mode de
distribution des semences, les quantités octroyées, des guides d’entretien ont été utilisés pour
la collecte de ces données dites qualitatives. Des agents des services techniques déconcentrés
de l’État ont été interviewés : environnement, agriculture, élevage, mairie et ses structures
détachées. Au total, 10 entretiens ont été réalisés.
Enfin, pour le traitement des données climatiques de l’Agence Nationale de Météorologie
(ANAM), le tableur Excel a permis la réalisation des graphiques de la pluviométrie.

3. RESULTATS
Les résultats obtenus se déclinent en quatre parties : d’abord le mode de gestion des semences,
ensuite la subsistance d’erreurs dans le choix des bénéficiaires, en outre le nouveau système de
dotation des bénéficiaires comportant en elle-même les germes de son échec et enfin la vision
politisée de la gestion des semences par les acteurs locaux.

3.1.La gestion des semences : jeu d’acteurs et vision controversée entre les agents
départementaux et les producteurs de la commune.

3.1.1. Comment fonctionne la filière de distribution : une mutation inutile ou


appréciable ?
L’apparition des semences améliorées comme action atténuante légale contre la variabilité
climatique de façon officielle est récente. En effet, elle remonte à l’année 2006 avec la prise en
compte des semences comme stratégie d’adaptation incluse dans la loi portant règlementation
des semences végétales au Burkina Faso8, ainsi que l’adoption commune dans la sous-région
du Règlement c/reg.4/05/2008 portant Harmonisation des Règles régissant le contrôle et

1.1 8Loi n° 010-2006/AN du 31 mars 2006

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Qualité, la Certification et la Commercialisation des Semences végétales et Plants dans


l’espace CEDEAO. Selon P. Djamen et S. Ouattara (2017, p. 7), au Burkina Faso, comme dans
la majorité des pays d’Afrique Subsaharienne, les semences constituent l’un des principaux
déterminants des rendements agricoles. Ces semences de nouvelles générations sont nécessaires
pour relever les défis alimentaires, nutritionnels et économiques au Burkina Faso. Deux
catégories de semences existent au Burkina Faso: les semences formelles greffées aux
structures de recherches comme l’INERA9 et les universités qui font des recherches, publient
et offrent les résultats aux producteurs et celle relevant du système traditionnel ou de base axée
sur un tri local. Dans les villages enquêtés, chaque ménage a au moins une semence ancienne
au sein du ménage conservé soit dans « le grenier, soit dans un pot de terre » (enquêtes terrain).
Certains ménages préfèrent utiliser des produits chimiques pour protéger leurs semences contre
certains insectes, qui ne sont pas sans conséquence sur la santé humaine. Les semences
améliorées visent à doter les producteurs de nouvelles variétés capables de résister aux
nouveaux changements du climat en termes d’adaptation. Le titre I du chapitre I sur la loi
portant règlementation des semences végétales au Burkina Faso va dans le même sens en ce
qui concerne la finalité des semences.
Dans la commune de Sourgou notamment dans les quatre sites enquêtés, la vision de la
distribution des semences aux bénéficiaires diffère selon les articles de loi. La destination de
ces semences est aussi perçue différemment en fonction de la vision des producteurs. Plusieurs
personnes interviennent dans cette gestion selon l’ancien système de distribution des semences
et selon le nouveau protocole réalisé pour pallier les insuffisances de l’ancien système. Au
niveau départemental, cette gestion relève des agents de la Chambre Régionale d’Agriculture
(CRA10). Ils sont élus préalablement au sein des villages, puis au niveau départemental,
provincial et régional. Ils sont aidés par les responsables villageois comme les Conseils
Villageois de Développement (CVD) ainsi que les différents agents communaux de
l’agriculture et de l’élevage.

3.1.2. Une ancienne méthode redréssable


La gestion des semences et en particulier leur distribution aux bénéficiaires est passée par
plusieurs phases. Elle a un système propre aux personnes impliquées dans la prise en charge de
cette gestion. Ces personnes sont des agents des CVD, de la CRA ou des agents issus des deux

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Institut de l’Environnement et de Recherches Agricoles
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Décret N°2001-770 bis/PRES/PM/AGRI portant création, attributions, organisation et fonctionnement des
chambres régionales d’agriculture au Burkina Faso (C.R.A).
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corps (CVD et CRA) appuyés par un délégué de la population locale. Ce mode de gestion était
« arbitraire » ; il appartenait aux personnes désignées de sensibiliser, et d’identifier les
personnes bénéficiaires en contrepartie d’une somme forfaitaire subventionnée par l’État. Il
transparait donc un mode de gestion propre à la cellule de gestion, d’où peut découler toute
sorte de méthodes, car le choix se faisait par ces agents qui implique forcement « une entente
entre l’agent distributeur et le bénéficiaire ». Ce système impliquait aussi les différents chefs
de zones (la direction départementale de l’agriculture) dans le processus de gestion du partage
des bénéficiaires, car les chefs de zones étaient chargés de collecter les recettes auprès des
agents distributeurs de la semence aux populations.

La dotation aux différents bénéficiaires se faisait en présence de toute la population lors des
jours de marché, et s’accompagnait du recensement et du suivi des bénéficiaires ayant reçu les
dotations.

Cette démarche locale, avait certes des insuffisances, mais, la distribution des semences et
engrais était faite selon un canevas précis, et ce, de façon disproportionnée repartie sur toute la
commune. Cette distribution était effectuée en fonction de la taille de l’exploitation, du nombre
de personnes par ménage, du sexe, de la vulnérabilité des personnes, de la force de travail, et
du résultat du travail de l’année précédente. Tout un lot de critères était retenu avant la dotation.
Selon un membre du CVD de Sourgou Z.K. « Parfois le CVD remettait la semence ou des
engrais aux producteurs qui utilisent la même spéculation pour qu’ils le répartissent entre eux,
et comme chaque producteur connait la superficie de l’autre, et se connaissent eux-mêmes la
répartition est facile et sans aucune tension ».
Une autre forme était proposée par le paiement physique par les bénéficiaires identifiés dans
chaque village. Ils recevaient une fiche de cession délivrée par la commission départementale.
Muni de cette fiche de cession, le bénéficiaire paiera à la perception (lieu de paie) le montant
correspondant à la valeur de son kit. Au cas où la commune ne disposerait pas de perception,
les bénéficiaires s’organiseront pour procéder aux paiements dans la perception la plus proche.
Une fois le paiement effectué, le bénéficiaire se rend au magasin de stockage des intrants et
équipements muni de la quittance délivrée par la perception et de sa fiche de cession pour se
faire servir.

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3.1.3. Vers une nouvelle méthode de distribution révélatrice d’énormes


insuffisances
De l’ancienne méthode de dotation des semences et engrais, une nouvelle méthode de
distribution des semences a vu le jour ces deux dernières années (2018-2019). Pour résoudre
les problèmes et améliorer la traçabilité dans la chaine de distribution, le Gouvernement, à
travers le ministère en charge de l’Agriculture, a entrepris une réforme du programme de
subvention, avec l’appui de la Banque Mondiale notamment à travers le Projet d’Amélioration
de la Productivité agricole et de la Sécurité Alimentaire (PAPSA) pour élaborer un mécanisme
pilote électronique de distribution des engrais appelé «E-Voucher ».
Le programme E-voucher est basé sur le secteur privé (importation, production et distribution
des intrants). Quant au gouvernement, il se focalise sur ses rôles régaliens (planification et
gestion de la subvention, contrôle de qualité, etc.). L’objectif est d’assurer un meilleur suivi et
une gestion transparente et traçable des ressources affectées aux producteurs agricoles,
notamment les intrants et les équipements (semences, engrais, matériels et équipements
agricoles/pêche, animaux, aliments bétails, motopompes etc.) en permettant de surmonter les
problèmes inhérents à la distribution classique d’intrants et équipements agro-sylvo-pastoraux
et halieutiques à l’endroit des producteurs. Cette méthode implique de plus en plus une tentative
d’inclusion du rural dans l’urbain, en ce sens que la dotation qui se voulait « localement faite »
s’est vue incrustée dans une panoplie de procédures d’octrois. Cette méthode relève de plusieurs
niveaux, et dépend d’un unique fournisseur qui dessert tout le territoire national. À Sourgou le
fournisseur d’intrant agricole est AGRODIA,11 en ce qui concerne les semences et les engrais.
Mais les parties prenantes initiatrices de ce nouveau système ont sans doute omis l’unité
centrale qui est à la fois moteur et pont vers la sécurité alimentaire : « le paysan ». Il est tout
simplement mis à l’écart. Il ne reçoit pas assez de formation, ni dans le domaine de son activité
principale ni dans d’autres activités connexes de façon conséquente. « Le système
électronique » est devenu la nouvelle donne, proposé aux paysans pour bénéficier des
semences. Dans les villages enquêtés, 76,8% des paysans n’avaient aucun niveau d’instruction,
9,2% ont un niveau CM2 (Cours Moyen deuxième année), 8,5% ont un niveau secondaire, 5,5%
ont fait l’école coranique et Franco-arabe et Mooré. Le nouveau système qualifié de « système
électronique » vise à limiter les « laisser-faire » de l’ancien système et à redynamiser le
système d’octroi des semences aux producteurs. Pourtant ce nouveau système est mal compris

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Association des grossistes et détaillants d’intrants agricoles du Burkina Faso
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et complexe pour les producteurs que « l’ancien système » ou « le système arbitraire ».L’agent
ZAT de Sourgou se prononce en ces termes :

« Il y a eu plusieurs mécanismes, voilà, il y a eu des années ou l’opération était confiée


essentiellement aux agents de l’agriculture, mais au cours des trois années passées
(2017,2018,2019) le mécanisme a changé et a pris plusieurs formes, voilà ils ont impliqué
l’administration, je veux dire les préfets, les CVD également qui constituent un comité, et c’est
ce comité qui se charge de la distribution des semences, des équipements agricoles, et des
engrais. À ce niveau les bénéficiaires étaient désignés par les CVD. Comme la subvention ne
venait pas en grande quantité et y a une organisation interne au niveau de chaque commune,
par rapport au nombre de villages, je prends le cas de Sourgou, nous avons 6 villages
administratifs, donc si la dotation vient nous pouvons décider de dire que cette année nous
allons donner aux producteurs de 03 villages et ainsi de suite.

Cette organisation interne vise à diviser les villages en 2 et on donnait la dotation aux 03
villages et l’année suivante on donne aux 03 autres villages, ainsi de suite. Les bénéficiaires
étaient désignés par les CVD, mais à l’époque quand la distribution était donnée aux agents de
l’agriculture, c’est avec l’appui des CVD, ensemble qu’ils choisissaient ces producteurs, mais
les 03 années passées les agents de l’agriculture ce sont retiré du mécanisme, beaucoup
n’étaient pas impliqués donc, voici cette année (2020) ils sont en train d’expérimenter d’autres
mécanismes avec des insuffisances (…) »

Entretien avec l’agent ZAT de Sourgou, BOUDA 2020

Ces propos attestés par les agents détachés de l’agriculture démontrent les insuffisances du
nouveau système décrié par tous les acteurs de la filière.

3.2.Des erreurs dans le système d’épurement des listes des bénéficiaires


Le système fonctionne sous trois canaux principaux :
1. La base de données des producteurs issue du (Recensement Général de la Population et
de l’Habitat) - RGPH ;
2. Les fournisseurs d’intrants dans notre cas AGRODIA;
3. La plateforme électronique qui permet la mise en relation des bénéficiaires des
subventions (téléphonie mobile).

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Listes
Agricul (RGPH)1
teurs

AGRODIA4 Gouvernement
MAAH2
(regalien)

Commune3

Figure 5 : système simplifié de l’attribution des intrants

Source : Enquêtes terrain, BOUDA 2020


Le système étant partagé entre les structures, la liste des bénéficiaires est présélectionnée au
niveau du Ministère de l’Agriculture et des Aménagements Hydro-agricoles (MAAH), à partir
de la liste issue du Recensement Général de la Population et de l’Habitat (RGPH), pour notre
cas, celui de 2006. Dans les villages enquêtés la majorité des personnes, même celles ayant une
activité principale autre que l’agriculture, ou étant dans la fonction publique, ou privée, pratique
l’agriculture. Certains enquêtés ont soulevé le fait que ces « fonctionnaire ait accès aux
subventions de l’État et eux agriculteur soit oubliés ». Ainsi la liste présélectionnée prend en
compte toutes ces personnes. Cette liste est transmise au niveau communal où sont choisis les
bénéficiaires. La même liste est ensuite envoyée au MAAH pour être à nouveau validée (Figure
5). Selon les populations, « des erreurs subsistent et cette situation occasionne un
dysfonctionnement dudit nouveau système et des tensions entre eux »

3.3.Semences améliorées : à quelles fins


La panoplie de procédure pour l’octroi des semences occasionne d’énormes retards quant à la
distribution des intrants et des semences aux populations (planche 1).
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A B

D
C

Planche 1 : semences améliorée (A,B,C) et semences locales de riz (D), Source : BOUDA,
2020

Les bénéficiaires, reçoivent les semences améliorées après avoir utilisé les semences locales
pour les semis. Par conséquent, n’ayant plus d’importance pour la campagne en cours, certains
les «vendent » ou en « consomme ». Propos confirmés par le chef de zone de la commune de
Sourgou lors de la rencontre entre le MAAH, les agents départementaux de l’agriculture et les
producteurs de la commune de Sourgou :

« La liste qu’ils nous apportent est truffée de fautes, des fonctionnaires bénéficient des kits,
parce qu’on n’a pas pu travailler sur la liste des semences et des engrais. Si on gagnait cette
liste en avance pour traiter, ça pourrait correspondre. Comme insuffisance aussi c’est le
partenaire AGRODIA, la campagne généralement commence au plus tard 15 juin et les
producteurs commencent à semer. Souvent à la date du 15 juin on constate qu’ils n’ont pas
encore les semences. Les semences comme les engrais, vous constatez qu’on n’a pas encore
livré. Donc le retard au niveau des semences et des engrais cause problème, bien vrai les
bénéficiaires prennent, mais beaucoup les revendent, parce qu’ils ont déjà semé. À un moment
donné j’ai été appelé par un agent d’AGRODIA, pour sensibiliser les producteurs, car d’autres
producteurs font la cuisine avec ces semences. Par rapport aux engrais, ceux qui n’ont pas les
moyens et qui sont bénéficiaires on essaie de voir comment la personne peut entrer en

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possession de son engrais. On collabore ensemble (agents d’AGRODIA) pour résoudre les
petits problèmes »

Entretien entre les agents du MAAH, l’agent ZAT et les producteurs de Sourgou,
BOUDA 2020

Toutes ces pratiques ne sont pas conformes à la loi ratifiée en 2006 sur les semences. En effet,
les articles 25-2612 (au chapitre II du titre III) font état d’interdiction de consommer et aussi de
tenir les registres de transaction en ce qui concerne l’octroi aux bénéficiaires pour le suivi de la
qualité et de la quantité, mais aussi de la traçabilité des semences. Ce nouveau système mal
structuré met à mal l’activité des producteurs. Pourtant ce système est sensé les aider vu la
mauvaise répartition des pluies, des poches de sécheresses, l’arrêt précoce des pluies (Figure 2
et 3).
Les semences locales n’arrivant plus à s’adapter, les producteurs sont obligés de passer par des
stratégies empiriques (Figure 4), n’impliquant plus la prise en compte des semences améliorées,
qui pourtant ont une durée réduite par rapport aux anciennes semences locales.

3.4.Le système d’information par le Short Message System (SMS) : lettrés ou des
illettrés ?
Le système électronique par SMS est un système inclus dans le nouveau système d’octroi des
semences améliorées. Ce système électronique suit un schéma depuis les ministères en charge
des épurations des listes dans les villes jusqu’aux paysans dans les villages. Les bénéficiaires
reçoivent des messages courts les désignant comme étant les bénéficiaires de l’année en cours.
Les paysans « doivent conserver » ces messages qu’ils présentent aux agents chargés de la
distribution des semences pour retirer lesdites semences. Mais un problème se pose, car du
moment où l’agent AGRODIA ne connait pas les superficies emblavées par le producteur,
celui-ci peut revendre le surplus des intrants. Ces derniers (AGRODIA) prétendent ne pas
donner plus de deux (02) sacs d’engrais par producteurs, mais la réalité sur le terrain est tout
autre. Les paysans sont dans la majorité des analphabètes. La plupart des paysans qui reçoivent
les notifications (SMS) ne savent ni lire ni écrire. D’autres conservent les messages, mais
d’autres les suppriment dès réception parce qu’ils ne connaissent pas l’importance des SMS.

12
Article 25 : La distribution, aux fins de consommation humaine ou animale, de semences traitées aux substances
toxiques est interdite.
Article 26 : Il est fait obligation à tout distributeur de semence de tenir un registre des transactions permettant
d’une part de vérifier la quantité et la qualité des semences et d’autre part d’assurer la traçabilité de la semence
destinée à la distribution
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L’enquêté B.Z, décrit sa situation par rapport audit nouveau système en ces termes : « nous
avons l’habitude de recevoir des appels de nos enfants qui nous ont donné ce portable au cas
où, nous ne savons pas ce que montré le message veut dire (les SMS), nous ne connaissons pas
lire ».Ces propos démontrent la non-prise en compte les paysans dans les structures de décision
d’octroi des semences censées pourtant être un système au service du producteur.

3.5.La lecture fortement politisée de la distribution par les acteurs.


 Une perception politisée du nouveau système électronique
Comme défini dans la section précédente le système d’information électronique est un système
de sélection et d’information des bénéficiaires par SMS, lequel SMS sera utilisé comme
récépissé ou preuve pour entrer en possession des intrants auprès de l’agent distributeur. La
possession des intrants se fait en contrepartie d’une somme, subventionnée en partie par l’État,
ces prix étant nettement inférieur à ceux sur le marché local, pour permettre leur accessibilité.
Pour le riz, le mil, le maïs, le sorgho, le sésame et le niébé (demandé par un homme) le prix est
fixé à 1000 selon le critère de dotation de 8 ou de 15 kg (Tableau 1).
Riz Mil Mais Sorgh Niébé Sésa (NPK/Uré
o me e)
Kit de Kit de Kit de Kit de
15 Kg 15 Kg Kit de Kit Sac de
8 Kg 15 Kg 8 Kg de 3 50Kg
Kg

Prix 1000 1000 1000 1000 (Femmes) 1000 12000


subventionn FCFA FCFA FCFA gratuit FCFA FCFA
FCFA
és
Hommes
1000
FCFA

Source : Enquêtes terrain, BOUDA 2020

Tableau 1 : prix des intrants subventionnés (Sourgou)

Ce système a été mis en place pour résoudre le problème de l’ancien système sujet à
contestation de par son caractère subjectif. Deux critères sont évoqués par les producteurs pour
dénoncer le caractère politique de la distribution des semences dans la commune de Sourgou.
Les deux critères de dénomination de cette lecture politisée résident dans le choix des agents
pour la distribution des intrants et l’implication ou non des personnes-ressources dans la
commune. Particulièrement dans la commune de Sourgou, l’existence de la commission

118
119 BOUDA Tiraogo Prince Florian, OUEDRAOGO Arnaud, SOME Yélézouomin Stéphane… P.106-124

chargée des questions relatives à l’agriculture communément appelée « CRA » par les
producteurs n’est pas connue de tous. Lors du focus group avec les agents du MAAH, des agents
de l’agriculture et des producteurs, des incompréhensions ont surgi. Elles ont révélé la
méconnaissance de certaines personnes-ressources qui n’ont pas été impliquées dans les prises
de décisions. Pourtant l’implication de ces personnes est nécessaire pour un bon aboutissement
des différents projets, car elles sont issues du village.

 Un seul fournisseur, une seule équipe : l’exclusion des personnes-ressources.


La configuration du nouveau système confie la gestion à une seule association de grossiste qui
délivre les semences et les engrais. Mais ce mode de gestion est une limite du processus du
nouveau système électronique. Dans la région du Boulkiemdé, le marché a été confié à une
seule association de grossiste ; avec une insuffisance dans la collaboration et les échanges avec
les bénéficiaires. La sélection du personnel en charge de la distribution des semences et engrais
selon les populations et le président CVD de la commune de Sourgou, n’a pas suivi une voie
normale. Aussi les différents CVD des villages composant la commune et les membres de la
CRA desdits villages n’ont pas été impliqués si bien que les populations dénoncent un abus de
pouvoir de la part de l’équipe d’AGRODIA.

4. De l’atténuation par L’adoption des stratégies résiliente


Dans la commune de Sourgou et particulièrement dans les 04 villages enquêtés, les populations
ont une bonne perception de leur environnement naturel, lequel environnement est perturbé par
les aléas climatiques. Au-delà des semences améliorées fournies, elles pratiquent des stratégies
d’atténuation contre les effets de la variabilité climatique. (Figure 4). Ces stratégies sont entre
autre : les cordons pierreux (alignement de pierre suivant les courbes de niveaux pour la
rétention de l’eau dans la parcelle cultivée), du zaï (trou de quelques cm avec à l’intérieur du
compost et/ou des engrais ou sont placés les semis), le paillage (procédé qui consiste à laisser
les résidus de branchage, de paille de ou des années précédentes sur la parcelle pour former du
compost).
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75,83%

61,10%

27,30%
21,60%

23%
LES CORDONS LA CULTURE LE ZAÏ LE LE PAILLAGE
PIERREUX IRRIGUÉE AMÉLIORÉ COMPOSTAGE OU MULCH

Figure 4 : Stratégies des producteurs de Sourgou


Source : Enquêtes terrain, BOUDA, 2020

De ce fait, elles s’adaptent en pratiquant soit des stratégies à priori ou à fortiori pour préserver
leurs cultures et leurs cheptels des adversités du climat. Mais ces stratégies d’adaptation sont
souvent fonction du niveau de vie des paysans, et du capital humain. Selon Boureima et al
(2012, p. 14), l’adaptation aux changements climatiques ou aux dérèglements climatiques
désigne les stratégies, initiatives et mesures individuelles ou collectives visant, par des mesures
adaptées, à réduire la vulnérabilité des systèmes naturels et humains contre les effets réels ou
attendus des changements climatiques. Nous nous attellerons à faire ressortir les différentes
stratégies développées par les populations locales en réponse aux mauvaises conditions
climatiques pour une meilleure atténuation.

Discussion
La variabilité climatique perçue par les producteurs appuyés par les données scientifiques
montre que le problème est bien présent. Des études sur l’adaptation développée par l’État, les
projets et ONG confirment la pertinence du problème. Le plus souvent les personnes-ressources
sont impuissantes face à certains aspects comme le déficit pluviométrique (Ouédraogo et al.,
2010, p. 3). Les diverses techniques développées par les producteurs comme la technique du
zaï et des cordons pierreux, sont autant de stratégies pour faire face à la variabilité
pluviométrique. L’utilisation de la fumure organique, l’application de la technique du zaï et des
cordons pierreux, la confection de haies vives constituent aussi des formes de stratégies
(Attingli et al., 2016, p. 41; Loko et al., 2013, p. 8; Ouédraogo et al., 2017, p. 5; Ouoba, 2013,
p. 150). L’analyse de la figure 2 montre une variation des précipitations interannuelles. Les
années les plus pluvieuses sont de façon successive les années 2014 ; 2016 ; 1999 ; 2010 et

120
121 BOUDA Tiraogo Prince Florian, OUEDRAOGO Arnaud, SOME Yélézouomin Stéphane… P.106-124

celle de 1991 qui enregistre un total minimum de 900 mm d’eau de pluie. Le pic le plus pluvieux
est l’année 1994 avec 1152,8 mm d’eau pluviale, et celui des mois les moins pluvieux est 620
mm enregistrés en 1990. De façon globale la tendance pluviométrique oscille en fonction des
années et est à la baisse. L’équation de la droite de tendance y=-0,4498x+823,96, avec une
pente négative (a=-0,4498) illustre cette baisse. Ce résultat est corroboré par les travaux de

1200

1100
Pluviométrie annuelle Linéaire (Pluviométrie annuelle)
Précipitatiion (mm)

1000
y = -0,4498x + 823,96
900 R² = 0,0011
800

700

600
1989
1990
1991
1992
1993
1994
1995
1996
1997
1998
1999
2000
2001
2002
2003
2004
2005
2006
2007
2008
2009
2010
2011
2012
2013
2014
2015
2016
2017
2018
Années

Figure 2 : Évolution des totaux pluviométriques de la station de Saria de 1989 à 2018.


Source : Direction de la Météorologie Nationale (Burkina Faso), 2020

La figure 3 présente l’évolution des écarts à la moyenne des précipitations de 1989 à 2018 de
l’Indice pluviométrique standardisé (IPS) ou Indice standardisé des Précipitations (ISP ou SPI).
L’analyse générale du digramme d’évolution des écarts pluviométriques par rapport à la
moyenne permet de faire ressortir une tendance tri-modale caractérisée par des années à
pluviométrie excédentaire, moyenne et déficitaire. Cette caractéristique a aussi été souligné par
(Ilboudo et al., 2020, p. 342). L’ensemble de la série à travers la droite de tendance montre une
pluviométrie de plus en plus à la baisse. Ces écarts montrent l’importance de s’adapter à la
variabilité climatique en adoptant de nouvelles stratégies. Les semences améliorées sont l’une
des réponses trouvées par les États et en particulier celle burkinabè pour résoudre cette question.
Mais cette stratégie adaptative à de nombreuses difficultés dans son application, car il y a une
inadaptation entre la volonté politique de l’État à faire adopter les semences aux producteurs et
la perception même de ces derniers.
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3
SPI 2 Moy. mobile sur pér. (SPI)
2,5

1,5

1
SPI

0,5

-0,5

-1
Période Période Période
-1,5 humide sèche humide
-2
1989
1990
1991
1992
1993
1994
1995
1996
1997
1998
1999
2000
2001
2002
2003
2004
2005
2006
2007
2008
2009
2010
2011
2012
2013
2014
2015
2016
2017
2018
Figure 3 : Évolution des écarts à la moyenne des précipitations de 1989 à 2018.
Source : Direction de la Météorologie Nationale (Burkina Faso), 2020

Des agriculteurs avisés et ayant les moyens choisissent plutôt l’utilisation de variétés précoces
qui ont un temps réduit de maturité par rapport aux semences traditionnelles. C’est le cas de
seulement 8,3% des agriculteurs qui utilisent les variétés améliorées, cela leur permet en cas de
poche de sécheresse de pouvoir récolter. Le reste des agriculteurs développent d’autres
stratégies (voir 4.). pourtant selon Polycarpe (2018, p. 1‑10) les semences améliorées devraient
dans ce contexte de changement climatique permettre aux producteurs de mieux s’adapter car
c’est le cas du Bénin ou les producteur utilisent à la fois des semences locales améliorées
résilientes et aussi des semences résilientes dotés par les structures étatiques.

Conclusion

Les stratégies d’adaptations paysannes vont des stratégies ancestrales aux nouvelles stratégies
d’adaptations telles que les techniques de conservation des eaux du sol (CES) à la dotation de
semences adaptées aux réalités actuelles. Pour ce qui est, des semences améliorées, nous avons
mis en exergue la nouvelle méthode de distribution des semences aux producteurs, orientés vers
une logique de suppression de la distribution « arbitraire des semences », et les insuffisances
qu’elle comporte. Les analyses montrent que les agriculteurs font une mixité des stratégies pour
une amélioration de la production agricole.

Cet article met aussi en évidence l’inadaptation des décisions prises pour le niveau local d’une
part et d’autre part la non-congruence des objectifs fixés par le ministère pour faciliter l’octroi
122
123 BOUDA Tiraogo Prince Florian, OUEDRAOGO Arnaud, SOME Yélézouomin Stéphane… P.106-124

des semences aux bénéficiaires. Tous ces aspects contribuent à soutenir les assertions de M.
Chaumet (2017) qui part du constat qu’au Burkina Faso, le système agricole reste toujours
extensif et dépendant des importations des produits agricoles puisqu’il n’en produit pas.

La centralisation des données pour la prise de décision est une approche qui emmaillote les
décisions rurales, car elle ne prend pas en compte des réalités sur le terrain et nous ramène à
une logique d’une tentative de « remplacement » des anciennes valeurs par de nouvelles à l’aide
de la technologie.

La réflexion sur les formes de figure de gestion des semences n’est qu’un bout de l’iceberg. Du
coup, des inquiétudes subsistent après ces analyses. Ainsi comment impliquer les personnes-
ressources locales et pérenniser cette forme de gestion avec les immenses erreurs qui transparait
dans ce nouveau système ?

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