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Avant-propos 1
Introduction ............................................. 5
Conclusion . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 247
Avant-propos
Dans la pratique, les entreprises ont en fait vis-à-vis de la gestion une at-
titude particulièrement ambiguë qui varie avec la nature des problèmes ren-
contrés. En marche normale, elles tendent à la considérer comme un outil
visant à remplir des obligations administratives ou réglementaires et l'opé-
rationnel domine alors le sujet. En temps de crise, certaines activités de-
viennent stratégiques et l'on passe souvent de l'opérationnel (pilotage) au
1. On suggérera au lecteur intéressé par ces problèmes la lecture d'un entretien avec C. Midler. proposé
par L "Expansion Management Review (mars 1995). Concluant sur son rôle joué dans le projet Twingo.
au titre de chercheur, Midler précise, avec un certain optimisme, que "la crise a rendu modeste le
monde managérial. Elle a montré qu'un regard extérieur, même éloigné, est une ressource et que la
théorisation peut être utile dès lors que /' on veut changer ».
2 L'audit stratégique
mystique: c'est le temps des « gourous» dont on attend des miracles qui
ne se produisent hélas qu'avec une regrettable parcimonie 2 •
2. Le gourou appartient à une espèce fragile, dont la pérennIté est de moins en moins garantie. À titre
d'exemple bien connu. il est aujourd'hui de bon ton ue critiquer sévèrement Peters et Waterman après
que l'on ait vanté pendant une décennie leur contribution managériale inscrite dans le thème de l'ex-
cellence. Le sort ue Hammer ct Champy relève ue la même « ingratitude ».
Avant-propos 3
3. Il n'est qu'à voir à quel point, dès à présent, la notion de Qualité Totale est elle-même un cadre
général accueillant l'essentiel de la démarche « toyotiste », la lean production, le benchmarking ou encore
le reengineering. On se gardera donc des mots pour s'intéresser spécifiquement aux méthodes. D'un
point de vue plus global, la révision en cours des normes ISO 9000 va tout à fait dans le sens d'une
pérennité du référentiel Qualité Totale. On lira notamment sur ce point \' ouvrage de \' Afnor: Les ré-
férentiels qualité. La voie de l'excellence, 1997. À l'inverse, et sans que cela affecte nos conclusions,
les Américains réduisent régulièrement la référence à la qualité dans la grille des critères du référentiel
Malcolm Baldrige. Le terme a même totalement disparu en 1997, au profit de « performance », ce qui
indique certainement une volonté de généraliser ce modèle.
4 L'audit stratégique
L'audit stratégique
Si la littérature sur les différents aspects de l'audit est aujourd'hui particu-
lièrement riche, à l'image de celle portant sur la stratégie, l'association des
deux thèmes est encore suffisamment rare pour que l'on ressente le besoin
d'en justifier le choix. Cette rareté repose probablement sur une incertitude
quant à la possibilité d'une synthèse des deux démarches.
A-t-on, en effet, le droit de parler d'audit stratégique?
- Peut-on appliquer à ce qui constitue la décision fondamentale de l'entre-
prise, une méthodologie mise au point à l'origine pour garantir la con-
formité d'écritures comptables par rapport à des normes précises?
- Peut-on imaginer qu'un dirigeant d'entreprise mette en place une procé-
dure en charge de conduire à un jugement sur ce qui relève souvent, en
dernier ressort, de sa seule autorité?
Sur quels critères établir un tel jugement alors que le sujet reste faiblement
normalisé: qu'est-ce qu'une bonne décision ou une bonne pratique stra-
tégique?
- Ne faut-il pas craindre, en définitive, que l'audit se limite à la mise en
œuvre et laisse de côté l'analyse de la conception de la stratégie?
On aura déjà compris que le sujet abordé est complexe et qu'il ne saurait
être développé pour le seul plaisir d'ajouter une rubrique supplémentaire à
la liste des activités et des fonctions faisant l'objet des démarches d'audit.
6 L'audit stratégique
Parmi toutes les raisons évoquées pour justifier cette association de l'audit
et de la stratégie, il faut surtout mettre en avant le souci d'aborder la dé-
marche stratégique sous un angle novateur. Traditionnellement, l'approche
de la stratégie reste profondément théorique ou, si l'on préfère, concep-
tuelle : la lecture des principaux ouvrages disponibles est enrichissante par
les idées qui y sont proposées mais c'est au moment de la mise en œuvre
que les problèmes apparaissent. La plupart des concepts sont généralement
livrés sans mode d'emploi autre qu'un renvoi à la société de conseil qui en
assure la diffusion, jusqu'au jour de leur remise en cause par une nouvelle
démarche, ou de leur abandon sous les critiques d'auteurs qui pour autant
ne les ont pas nécessairement expérimentés.
En effet, dans une large mesure, la Qualité Totale n'aborde pas, au moins
directement, des questions comme le choix des domaines d'activité de la
firme ou encore la prise en compte des rapports de forces qui s'expriment
à l'occasion de la décision stratégique. Elle s'attache peu à l'analyse externe,
en dehors des clients et dans une moindre mesure de la concurrence, alors
que celle-ci constitue pourtant l'un des deux grands référents du modèle de
décision. Elle n'éclaire pratiquement pas des choix de stratégie pourtant
classiques comme, par exemple, la spécialisation, la diversification, la con-
centration, ou l'intégration t. En revanche, la Qualité Totale apporte des élé-
ments de réponse essentiels et modernes, à des questions comme la formu-
lation des stratégies, leur contenu et leur contrôle. À ce titre, elle occupe
une place privilégiée dans l'arsenal des outils des dirigeants.
Nous pensons ainsi que cette démarche, développée dans les pays occiden-
taux depuis la fin des années 1970, est beaucoup plus qu'une nouvelle mode
au service de l'entreprise. Elle semble plutôt s'inscrire dans une continuité
de l'évolution des réflexions stratégiques soumises à l'épreuve des faits. Les
modèles objectifs des années 60 se sont en effet avérés peu efficaces face
aux incertitudes des années qui ont suivi la période de croissance d'après-
guerre. Par la suite, le management stratégique a souffert de son manque
de formalisation, notamment dans \' expression séduisante qu'en donnaient
les adeptes de l'excellence. La Qualité Totale est ainsi apparue comme un
schéma général d'autant plus intéressant qu'il était réputé avoir fait ses preu-
ves dans \' industrie japonaise, et c'est dans cette continuité que la norma-
lisation internationale a élaboré un référentiel reconnu à partir des normes
ISO. Dans le même temps, de nombreuses associations d'experts et d'in-
dustriels développaient des modèles plus évolutifs décrivant les éléments du
TQM (Total Quality Management) ou du CWQC (Company Wide Quality
Control). L'Europe, à son tour, s'engageait dans cette voie avec la création,
en 1988, de l'European Foundation for Quality Management (EFQM) qui
allait développer le référentiel d'autoévaluation servant, pour partie, de
trame à ce travail.
On pourrait objecter que de nouveaux concepts, apparus au cours de ces
dernières années, tendent à confirmer l'hypothèse de modes soumises au
bon vouloir de certains chercheurs et, plus encore, de conseils habiles à
promouvoir des approches innovantes. Une observation attentive de ces dé-
marches, comme le henchmarking ou le reengÎneerÎng, montre qu'elles se
1. Ces questions ne seront donc pas abordées au cours de l'exposé qui va suivre. On peut d'ailleurs se
demander si elles peuvent faire l'objet d'une procédure d'audit. Dans la plupart des cas, le manque de
référentiel et de normes est tcl que les recommandations évoluent avec le temps de façon éventuellement
contradictoire. Auditer de telles situations n'aurait pas de sens.
8 L'audit stratégique
Personnel et Personnel et
Processus Performances
1 compétences 1 compétences
Leadership orientés de
Ressources cliients l'organisation
1 1 Société
Partenariats Partenaires
1 1
~ Innovation et apprentissage
2. Le modèle EFQM reproduit ici dans le cadre inférieur de la figure 1.1 est un projet de révision en
date des 29 et 30 avril 1998, présenté à l'occasion des journées « Leaming Edge Conference 1998}) à
Rome. Notre objectif n'étant pas de décrire avec précision ce modèle particulier, on se contentera de
signaler les modifications majeures associées à cette nouvelle présentation. On notera d'abord qu'elle
comporte désormais deux rubriques nouvelles que l'on peut traduire par : «partenariats» et « partenai-
res ». L'accent a été ainsi mis sur les partenariats divers dont on sait l'importance qu'ils ont en Qualité
Totale où on les associe notamment à l'idée de processus inter-entreprises. La rubrique personnel, au-
trefois présente à gauche du modèle sous l'intitulé « gestion des ressources humaines» et à droite sous
celui de « satisfaction du personnel », s'est vue associée à l'idée de «compétences» dont l'acquisition
est à la fois garante de l'efficacité de l'organisation et de la satisfaction de ces ressources humaines.
Introduction 9
Causes indirectes
de la satisfaction des clients
(Qualité des facteurs mis en
oeuvre = modèle EFQM)
Dans une seconde situation, on sera confronté aux cas dans lesquels le mo-
dèle peut être considéré comme incomplet sur certains points. On peut ainsi
lui reprocher de ne pas faire une place suffisante à l'organisation et aux
structures, alors même que l'on sait le rôle joué par ces composantes dans
les politiques de Qualité Totale et, plus généralement, dans la conduite d'une
stratégie. Ces facteurs seront abordés à l'occasion du chapitre 8 (L'audit des
facteurs clés).
Les fondements
de l'audit stratégique
L'état de la stratégie
« Ce ne sont pas les produits et les marchés qui servent de clé de voûte
dans la construction d'une stratégie mais les processus de fonctionnement
dans l'entreprise.
Le succès d'une entreprise dépend de la transformatioll réussie des pro-
cessus clé d'une entreprise en compétences stratégiques, fournissant de
manière permanente et cohérente Ulle valeur supérieur!' au client. »
G. Stalk, P. Evans, L. Shulrnan,
Les /louvelles règles de la 5tratégie,
Harvard-L'Expansion, 1992.
Il n'est pas certain que les professionnels se retrouvent dans ces énoncés à
usage académique dont l'interprétation se prête à des débats sans fin. Dans
une perspective pratique, il nous a semblé plus simple d'exposer les grands
traits de l'évolution du sujet avant de mettre l'accent sur une tendance nou-
velle qui intègre les processus dans la problématique de la stratégie.
Analyse externe
Opportunités -
Menaces Politiques
fonctionnelles
Choix
~ stratégiques -. Production
Analyse interne Finance
Marketing
1-- R& D ...
Forces
Faiblesses
5. Op. cil.
6. F. Carrance. Splendeurs el misères des IIIlIlrices slraléKiques. Annales des Mines. mars 1988.
16 L'audit stratégique
~ Diagnostics
.. Buts
o Choix
Processus de
décision
stratégique
.........
Figure }-2 Stratégie et jeu des influences sociopolitiques (d'après A. Ch. Martinet).
férence des acteurs externes), étant entendu que ces résultats influeront à
leur tour sur la définition de la stratégie future .
Si la démarche stratégique est désormais placée sous influence, interne ou
externe, elle reste néanmoins intentionnelle. Le «noyau stratégique»
s'adapte à des pressions diverses mais décide finalement. Au-delà de cette
situation, la stratégie peut-elle aussi échapper, pour partie, à ceux qui en ont
la responsabilité?
Stratégie
intentionnelle
Stratégie
Stra~é~ie.
reallsee
non Il réalisée
Origine : tous
niveaux, y
compris
opérationnels
ZONE D'APPRENTISSAGE
contenu à l'épreuve des faits (stratégie non réalisée), mais conserve - heu-
reusement - une part de ses intentions (stratégie délibérée).
La stratégie émergente est celle qui résulte de comportements non néces-
sairement initiés par la hiérarchie, pouvant être provoqués par des acteurs
au sens où l'entend A. Ch. Martinet, et dont la généralisation peut infléchir
ou compléter la stratégie délibérée: les forces de vente peuvent ainsi, de
facto, modifier une cible de clients, les chercheurs peuvent privilégier des
pistes inattendues... À partir d'un certain stade de généralisation, les
«initiatives locales» sont en mesure de constituer un élément fort de la
stratégie de l'organisation.
lît . ~~l!uggt$fi()ns,
qlli V9.Il, nQ~~tlt tflfuVé<Î' Ieptpllilêl;i4atl$ la
Diagnostic
Diagnostic
ressources
dirigeants
humaines
Client Client
Diagnostic
marketing
Diagnostic
production
observé
..
satisfait
10. Le lecteur aura remarqué que le système comptable, source d'information de base, reste essentiel-
lement calqué sur la structure ct qu'il favorise de ce fait une approche fonctionnelle, limitant ainsi les
possibilités de généralisation immédiate d'une analyse des processus.
Il. G. Stalk, Jr et T. M. Hout. Competing against lime, The Free Press, 1990.
Stratégie et
structures. Qualité et continuité de la stratégie. transversalité des p~océdures.
1 1 1
Gestion
ressources FOfrilation!1IJP<>r&lf\l"\El!? Niveau.. dJ'l p~rtjcipf'JiQ':' 161 d((mplicâtion.
o;y!!lèrre d'iotér<1$.èmènt. pyr~midedel; figes. . :
humaines
sArgies/
Synergies rriZO~
verticales
Chaînes de valeur
Firmes aval
Synergies internes
Domaine Contenu
Qualité du produit « La qualité d'un produit (bien ou service) est son aptitude
à satisfaire les besoins de ses utilisateurs. »
Qualité «La qualité d'une production réside dans son aptitude à produire
de la production au moindre coût des produits satisfaisant les besoins de leurs
utilisateurs. »
Qualité sociétale « ... la qualité d'une entreprise (qui est liée à la qualité de sa
de l'entreprise politique ou de son projet), tient essentiellement à sa capacité
d'innover, de créer de la valeur ajoutée (sur le plan matériel,
comme sur celui des connaissances, des valeurs, ... ), et à la
partager au mieux entre les parties prenantes (clients,
fournisseurs, employés et actionnaires, et la société,
communauté sociale) en respectant ou protégeant
l'environnement physique (écologie).
Cette dernière acception du terme reconnaît à la qualité une
dimension éthique et morale. »
• Le contrôle de la qualité
Pendant la première moitié du xx e siècle, la qualité est essentiellement fon-
dée sur des procédures de contrôle qui apparaissent au cours des diverses
étapes d'un processus, soit de façon exhaustive, soit sur la base d'échantil-
lons. Les développements de la statistique probabiliste dans les pays anglo-
saxons permettent d'ailleurs d'affiner ces procédures et d'en réduire le coût.
Cette première étape de l'analyse de la qualité conserve encore une impor-
tance considérable, qu'elle provienne de procédures systématiques mises en
œuvre par les services qualité de l'entreprise ou encore de situations plus
ponctuelles, liées à l'activité de groupes de progrès ou de cercles de qualité.
• L'assurance qualité
Vers le milieu du siècle, des produits plus complexes et parfois porteurs de
risques élevés (énergie, transport, armement, ... ) vont condamner progressi-
vement une démarche fondée sur la seule observation du produit intermé-
diaire ou du produit fini. La prise en compte des coûts de la non-qualité
plaidera dans un même sens, justifiant désormais d'une approche plus pré-
ventive et toujours largement fondée sur les statistiques. Le temps est arrivé
pour ce que l'on appellera l'assurance qualité, que l'on définira comme
« la mise en œuvre d'un ensemhle approprié de dispositions préétablies et
systématiques, destinées à donner confiance en ['obtention régulière de la
qualité requise ».
Système qualité
Une réflexion plus générale sur le thème de la qualité conduit les industriels
à développer un concept, la Qualité Totale, et des démarches voisines des
prescriptions de la normalisation. Le rapprochement entre ces différentes
conceptions est inscrit dans le projet de révision devant se traduire par une
future famille de normes ISO 9000 allégée.
étant présente à tous les niveaux de la démarche puis à toutes les étapes de
sa mise en œuvre.
• La Qualité Totale
La notion de Qualité Totale connaît ses premiers développements majeurs
à la fin des années 60. C'est en 1969 que s'instaure le débat classique entre
l'approche américaine (Total Quality Control) et celle japonaise (Company
Wide Quality Control), réputée plus globale.
La Qualité Totale est souvent présentée à travers les modèles dits des « prix
qualité» qui en proposent une description synthétique. On a reproduit ici le
modèle européen dans sa formulation d'origine, qui devrait encore s' appli-
quer en 1999 (cf figure 2-3)3.
1 Gestion du personnel
9%
~
-1
Satisfaction
du personnel
9%
~
rr
1 1
RÉSULTATS
~ ~
l
Satisfaction
LEADERSHIP Politique & Stratégie PROCESSUS OPÉRATIONNELS
8 0/ 0 des clients
10% 14 % 15%
20%
1
Ressources
1-
H 1
Intégration dans la
H 9% vie de la collectivité
6%
4. Il s'agit là d'une préoccupation désormais classique que l'on trouve dans de nombreux ouvrages ct
articles; on citera, par exemple, J. Hoffecker et C. Goldenberg. Pour s·améliorer. il faut d'abord savoir
s 'évaluer, L'Expansion Management Review. 1994.
L'état de la Qualité Totale 31
5. Bradley T. Gale. Managing eus/omer Value, The Free Press. 1994, mais aussi: Robert D. Buzzell
& B. T. Gale. The P1MS Princip/es. The Free Press, 1978 et 1987.
32 L'audit stratégique
~
des concurrents) que - acquérir des actifs
nos concurrents
• Aligner toute notre'
• Comparer nos organisation (personnes
performances et celles et processus) sur l'évolu
des concurrents tion des besoIns de notre
• Conformité • Être proche du client marché-cible
• Bien du premier coup • Comprendre pourquOI on
• Comprendre ses gagne ou on perd
• Diminution des défauts besoins et attentes
• Être dirigé par le marché
/
• Être dirigé par le
clIent
.
Étape 1 Étape 2 Étape 3 Étape 4
Qualité-con1ormité Satisfaction du Perception de la qualité La qualité base du
consommateur par le marché et valeur management par la valeur
relative par rapport aux client
concurrents
6. Tito Conti, Improving the model, European Quality Award Special Report. 1995.
L'état de la Qualité Totale 33
Domaine
des prix qualité
Concepts Bases
Domaine
en maturité préconcurrentielles
des normes
PERSONNEL
RESSOURCES
FACTEURS MISSIONS
7. On rappellera à nouveau que la révision prévue des normes (2000) confirme cette évolution.
34 L'audit stratégique
Référence Objet
ISO 9000 Concepts et terminologie (fusion des actuelles ISO 8402 et ISO 9000-1)
ISO 9001 Modèle d'assurance de la qualité, centré sur la maîtrise des processus, dont
l'objectif principal sera d'apporter la confiance sur la conformité du produit!
service par rapport aux exigences préétablies
ISO 9004 Lignes directrices sur le management de la qualité visant une approche de
la qualité, économiquement efficace, pour l'ensemble des parties prenantes
et la satisfaction durable du client
ISO 10011 Lignes directrices pour l'audit des systèmes de management de la qualité
Carte routière
TR XXXX
1 1
ISO 9000
Prix qualité
"Q"
Concepts &
terminologie
(QA)
~
...- (QM)
- (TQM)
Figure 2-9 «Carte routière » de la future famille des normes ISO 9000
(Source: Afnor, Les référentiels qualité. La voie de l'excellence, 1997).
Méthodologie d'audit
et audit stratégique
3.1 Définitions l
La notion d'audit recouvre des contenus nombreux: ce peut-être une fonc-
tion si l'on considère par exemple l'audit interne, un ensemble de méthodes
exploitables indépendamment de la fonction (dans l'hypothèse d'une auto-
évaluation par exemple) ou encore, au sens le plus général, un mode d'ap-
proche d'un problème. C'est aussi un mot qui a séduit les professionnels
au point que son utilisation est souvent confuse.
Historiquement, l'audit trouve son origine dans les procédures de vérifica-
tion des écritures comptables. Son développement sera accéléré dans les
années 20, aux États-Unis, avec la croissance rapide des opérations bour-
sières puis comme conséquence de la crise de 1929. Dans cette perspective,
il est d'abord un outil de contrôle (audit de conformité).
1. Pour une présentation générale on pourra se reporter au fascicule des Cahiers Français. Audit et
Management. N" 248. Octobre-décembre 1990.
38 L'audit stratégique
2. H. Bouquin. " Conlrôle » et " Audit» in Encyclopédie de Re.l"tion. Tome 1. Economica. 1989.
3. H. Bouquin. op. cit.
Méthodologie d'audit et audit stratégique 39
conséquences
Problème(s) ..... CoOts
..... Risques
Indica.urs
Normes
Référentiels 1
Recommandations
LA FIRME
Les moyens mis Les opérations clés A-t-on fait A-t-on les moyens Les résultats obtenus sont-ils
en œuvre sonHls sont-elles les bons choix? de suivre la réalisation conformes aux objectifs
adaptés? maîtrisées? Pertinence de la de la stratégie? ou aux performances
démarche stratégique caractéristiques
poursuivie? de la branche?
• Les référentiels
On conviendra avec H. Bouquin de définir une référence comme l'associa-
tion d'un critère et d'une norme 7 . Ainsi, par exemple, dans l'activité de
contrôle d'un processus industriel, le critère pourrait être «le nombre de
personnes
employées au contrôle par rapport au nombre de personnes employées dans
le processus» et la norme pourrait être « maximum 2 % de l'emploi total ».
• Les dysfonctionnements
Leur observation va résulter de l'analyse des informations (résultats) et, en
général, des mesures retenues (indicateurs). Encore faut-il répéter qu'un in-
dicateur n'aura de sens que par rapport à une norme, à un référentiel. De
plus, il est clair que ce dysfonctionnement n'aura pas la même signification
suivant qu'il relèvera de facteurs internes (présumés sous contrôle) ou de
facteurs externes.
Parmi les exemples de dysfonctionnements classiques, on peut évoquer l'hy-
pothèse dans laquelle un objectif stratégique n'est pas atteint et observer les
modalités de la démarche de l' auditeur.
Un objectif stratégique était, par exemple, l'obtention d'une marge brute
supérieure à 40 %. Pendant deux années cette perfonnance est réalisée. La
troisième année le résultat tombe à 37 %. Peut-on parler à priori de dys-
fonctionnement? La réponse doit être nuancée et conduit à soulever toute
Méthodologie d'audit et audit stratégique 47
s. Ainsi. ces événerncnh ont pu se produire (observation historique) ou hien sont prévisibles (risque lié
à des obsCfvations de résultats actuels).
48 L'audit stratégique
• Les risques
Une liste de dysfonctionnements vérifiés n'a aucun sens si elle n'est pas
exprimée en termes de risques. Sinon, la globalité du problème serait telle
que l'auditeur ne pourrait proposer aucune recommandation et l'entreprise
ne pourrait prendre aucune mesure corrective sérieuse.
Cela implique de hiérarchiser les risques associés aux dysfonctionnements
soit de façon qualitative (risque de détérioration d'image par exemple), soit
de façon quantitative (coûts). On rappellera que notre première préoccupa-
tion est l'audit stratégique et qu'il s'adresse donc plus particulièrement aux
dirigeants avec toute la difficulté qu'il Y a à identifier des dysfonctionne-
ments dont ils peuvent être les principaux responsables. La présentation des
risques doit donc être probante, non sujette à caution. Le chiffrage sous
l'angle des coûts est alors essentiel (langage de l'argent au sens où l'entend
J.-M. Juran).
Cette difficulté est l'occasion de rappeler des caractéristiques nécessaires à
de bons indicateurs dans une perspective d'audit:
lafiabilité: capacité d'un indicateur à mesurer avec le minimum d'erreurs
le phénomène étudié (précision, stabilité, sensibilité, objectivité ... ) ;
la validité: capacité de l'indicateur à mesurer ce qu'il est censé mesurer.
À ce stade, on a donc des dysfonctionnements (écart entre un indicateur et
la norme retenue dans l'entreprise ou admise dans la branche) dont on a
apprécié l'impact sous l'angle des risques éventuellement qualitatifs mais
surtout chiffrés (coûts). La hiérarchie des risques permet de déterminer les
préoccupations dominantes de l'auditeur dans la suite de sa démarche. Seuls
les dysfonctionnements à risques lourds vont faire l'objet d'une analyse de
causes, au moins dans un premier temps .
• Les causes
C'est une phase qui ne présente pas d'originalité particulière. Elle emprunte
d'ailleurs ses outils à de nombreux domaines de gestion. Fréquemment, l'au-
diteur sera conduit à provoquer de nouveaux entretiens avec des membres
de la société pour les identifier. Il est aussi possible que des indicateurs
Méthodologie d'audit et audit stratégique 49
Baisse sensible de
la rotation des
actifs
,
(1 ) (3) (4)
Stocks 1 Immobilisations
(2) 1 Crédit Trésorerie
1
excessifs
y
1
excessives 1
,
client
1 1
,
excessive
1
(42)
(11 ) (12) (13) (31) (32) (41)
Réserves
Erreurs Erreurs Séries Absence de Défaillance Absence de pour
commandes livraisons longues procédure produit gestion
risques
~ (21)
Erreurs
équipements
(22)
Actifs
gélés • • • •
Ir
(111 )
Stocks mal
identifiés
(112)
Pas de suivi
commandes
• •
Figure 3-7 Exemple de tracé d'un arbre des causes.
52 L'audit stratégique
~
0IIII
[@J [@ù
~ \.-~
[@] ~~ 0IIII [122],--_---,
/Q2ill Baisse
sensible
de la
rotation
[@] ...
V
des actifs
2)
ŒIJ "'(
j (12)
@2]~
~~
(22)
! Milieu!
miflW~~ .P$é(\W
l'Qü.~ iq~~tîp~ l()·1)'.~~.Ue Çlm~~~ ~~il~
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35
30
Cf)
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0 25
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co
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co
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10
c
co
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0-
5
'co
ù: 0
A B C D E F G Divers
Causes
Au total, l'outil que nous venons de décrire tient probablement son succès
de ses facultés de visualisation d'un problème. La littérature relative à la
qualité décrit bien d'autres approches, telles que le diagramme des relations
ou le diagramme matriciel, auxquelles le lecteur pourra se reporter.
9. Alfred D. Chandler Jr, Slm/éRies e/ s//'lIc/ures de l'ell/reprise. Éditions d'Organisation. Paris. 1972.
Méthodologie d'audit et audit stratégique 55
RÉSULTATS
RISQUES
"------ . . .-CAUSES
~ RECOMMANDATIONS
~ Gestion du personnel
9%
t- -1
Satisfaction du
personnel 9 %
~
1 J
LEADERSHIP l Politique & stratégie
S%
t- PROCESSUS
-1
Satisfaction des
clients 20 %
~ RÉSULTATS
OPÉRATIONNELS
1 1
10%
~
Ressources
9%
t- 14%
-1 Intégration dans la vie
de la collectivité 6 1%
~
15%
... FACTEURS
. ... RÉSULTATS
..
Figure 11-1 Le modèle européen de la qualité totale.
58 L'audit stratégique
/
"
CAUSES MANAGÉRIALES DYSFONCTIONNEMENTS
STRATÉGIQUES
Le prédiagnostic :
les dysfonctionnements
stratégiques généraux
LEADERSHIP PROCESSUS
.. FACTEURS
..
MODÈLE EUROPÉEN DE LA QUALITE TOTALE
RÉSULTATS
« j'ai eu, aufil des ans, des centaines d'entretiens avec des responsables
de la production et je peux affirmer que leur degré d 'intérêt pour la
qualité est directement proportionnel à la chute de leur marge bénéfi-
ciaire telle qu 'elle apparaît au moment où je leur parle. »
Ph. B. Crosby'
~=
stratégiques
~
• Buts
D
Existence • Objectifs y
-OUI",,-
d'une stratégie S
• Niveau global
formalisée Objectifs
F
• Par activité 0
généraux
N RISQUES
1 Chapitre 4 C
l
NON T
1
0 Analyse
Identification
des résultats
sur des
,.
Idem
N
N
E
M
Hiérarchiser
----
des
causes
indicateurs r-- E
standard N
~
+
T
~ S
• • Perspective
historique
Pourquoi
une absence
de formalisation
Recommandations
• Perspective
de la stratégie?
comparative
Rotation des actifs: Résultat inférieur de x % 1. Stocks moyens de produits finis en hausse
Chiffre d'affaires par rapport à l'objectif 2. Stocks moyens de produits en cours
Total actif .. conjoncturel en hausse
.. RISQUES 3. Stocks moyens matières en hausse
.. structurel 4. Contentieux clients en hausse (retours
de marchandises)
5. Baisse des ventes du produit Y etc.
3. L'élévation des stocks matières relève à peu près des mêmes causes.
4. Les contentieux avec la clientèle peuvent conduire à différer des livrai-
sons, à reprendre des productions, à des annulations de commandes (qua-
lité du produit).
Pour aussi simple qu'il soit, l'exemple illustre quelques causes dominantes
envisageables:
1. Au sommet, une remise en cause du management (définition et/ou con-
duite de la stratégie).
2. Un processus (une séquence d'opération) qui se détériore.
3. Une relation avec la filière (amont et/ou aval) non satisfaisante (processus
interentreprises).
4. Une remise en question du produit ou du service (qualité intrinsèque).
5. En arrière-plan de toutes ces causes, on trouvera souvent une incidence
relevant des ressources humaines.
Il n'est pas impossible que d'autres facteurs expliquent un dysfonctionne-
ment dans la mesure où l'entreprise est ici en cause, dans sa globalité.
Toutefois, il semble bien que les thèmes évoqués ci-dessus recouvrent l'es-
sentiel des grandes sources de dysfonctionnement stratégique.
restaurer des marges sur la base d'une meilleure définition des serVIces
rendus,
affirmer l'identité de l'entreprise à partir d'une plus grande cohésion in-
terne et d'une meilleure communication,
concentrer les efforts sur la qualité pour faire évoluer un positionnement
dans un contexte concurrentiel plus difficile.
Un but stratégique apparaît donc comme un référentiel qualitatif pour la
définition du futur plan stratégique. On admet que, sous une forme plus ou
moins détaillée, ces buts doivent être explicites, ce qui aura pour effet d'as-
surer la cohérence du comportement de l'encadrement et du personnel mais
aussi, dans la mesure du possible, leur adhésion et leur mobilisation autour
de ces principes directeurs. On notera surtout que ces différents buts n'ont
pas la même signification. La qualité apparaît comme un but plus global,
autorisant la réalisation des autres buts cités.
NB. Ces points font l'objet d'estimation sous forme de taux ou de ratios car, sous cette forme brute, ils
ne seraient pas significatifs
(*) Ces durées de cycle correspondent très clairement à des processus et seront analysées au chapitre
7 ce qui n'exclut pas pour autant que l'entreprise leur accorde une dimension d'objectif stratégique.
On peut dire que ce n'est pas l'un des moindres mérites de l'approche
Qualité Totale que d'avoir remis l'accent, de façon très ferme, sur ces ob-
jectifs non financiers qui relèvent du «langage des choses ». Deux types
d'objectifs non financiers vont illustrer cette hypothèse.
CA et
coûts
CA généré par le
client X
Coût de prospection
et de gestion du
client X
Temps
4. F. Reichheld, E, Sasser, Les clients d'hierfont les protïts de demain, Harvard·L'Expansion, 1990-91.
Le prédiagnostic: les dysfonctionnements stratégiques généraux 69
les résultats d'audits plus spécifiques, ne peut-être obtenue qu'à partir d'en-
tretiens organisés autour de deux questions:
Comment définissez-vous votre métier?
Quels sont, dans cette perspective, vos facteurs clés de succès?
La première question devra permettre d'identifier la perception globale du
métier. On peut illustrer cette situation dans l'hypothèse d'un concession-
naire automobile (cf figure 4-6). Dans cet exemple, volontairement très
élémentaire, une réponse du type « Vente de voitures» laisserait anticiper
une vision réductrice du métier et par conséquent un contexte pauvre pour
le développement stratégique.
Disponibilité au
service du client Mise à disposition
SERVICES de produits adaptés
à des besoins spécifiques
de clientèles
Orientation
du métier Vente et entretien
de voitures RENAULT
Vente de voitures
PRODUITS ~tedevo~ de qualité
Cette définition du métier sera ensuite complétée par l'énoncé des facteurs
clés de réussite. Là encore il s'agit de perceptions, qui seront révélatrices à
la fois dans leur densité et dans leur cohérence avec la définition du métier.
Ces facteurs feront ou non l'objet de confirmations dans la suite de l'audit
mais une énumération de facteurs « pauvres» laisserait planer à nouveau un
doute sur l'aptitude de l'entreprise à conduire une stratégie efficace.
Les indicateurs vont enfin provenir de l'analyse des buts. Leur caractère
qualitatif limitera les possibilités de l'auditeur. Il lui faudra essentiellement
s'assurer de leur existence, de leur caractère plus ou moins explicite, des
niveaux où ils sont publiés, de leur cohérence et de leur degré de réalisation.
Le point de départ de cette analyse est illustré dans la figure 4-7.
Le prédiagnostic.' les dysfonctionnements stratégiques généraux 71
Une situation fréquente résidera dans l'absence de buts explicites sans ex-
clure pour autant l'existence d'objectifs. L'auditeur devrait alors tenter
d'identifier les buts effectifs (implicites) poursuivis par les dirigeants afin
de vérifier ultérieurement leur cohérence avec les objectifs (s'il Y en a) et
avec les politiques mises en œuvre.
L'existence d'un projet d'entreprise constituerait un élément très utile, ga-
rantissant à la fois un minimum de participation à la réflexion sur les buts
et leur probable vulgarisation. La cohérence interne dans l'appréciation des
buts devra aussi retenir l'attention de l'auditeur.
Toutefois, dans la mesure où nous nous plaçons ici dans une perspective
globale, ce sont les objectifs stratégiques qui feront l'objet de l'étude la plus
approfondie .
Un bon exemple est fourni par de nombreuses sociétés de vente par cor-
respondance d'ordinateurs dont les médiocres délais de livraison conduisent
à livrer le client à des prix qui ne sont plus ceux du marché au moment de
la mise à disposition effective du produit.
Augmentation relative Effets d'une baisse d'activité sur les Comptabilité analytique
de certaines charges coûts fixes ou semi-fixes Entretiens
D'une façon générale, l'auditeur ne devrait pas être amené à entrer dans le
détail des facteurs que nous venons d'énumérer sauf pour les facteurs de
dysfonctionnement majeurs.
74 L'audit stratégique
Causes immédiates
Indicateurs Sources
de non-réalisation
de leur définition, ils devraient présenter une forte stabilité au moins sur
l'horizon du plan. De ce fait, leur remise en question constituera presque
toujours un indicateur précieux, bien qu'il soit possible que cette transfor-
mation ne traduise pas un dysfonctionnement mais, par exemple, le résultat
d'un changement de pouvoir à l'occasion d'une prise de contrôle. A priori,
une modification des buts devra entraîner une analyse approfondie de ses
causes. Il est probable que celles-ci, en première approche, seront présentées
comme une volonté de réorientation de l'entreprise mais il est aussi vrai-
semblable qu'à l'arrière-plan de ce choix, on trouve un échec pouvant lui-
même résulter de dysfonctionnements que l'on n'aura pas voulu ou pu éli-
miner. Des entretiens avec la direction et l'encadrement supérieur pourront
alors préciser les causes réelles.
Cette situation semble résulter de facteurs évidents, dont les effets se cu-
mulent pour constituer la tendance cyclique. La réussite de l'organisation
étant définie par son adéquation à l'environnement, ces facteurs vont l'at-
ténuer progressivement, laissant ainsi la place à des concurrents mieux en
phase avec les contraintes et les opportunités du moment. Les facteurs de
désadéquation peuvent ainsi être internes ou externes.
CA Marge brute
Ratios
monnaie en % du CA
constante
Postes de charges
en % du CA
Marge nette
Temps Temps
Ceci devrait conduire l'auditeur à préconiser une mise en place de ces in-
dicateurs, opération dont l'importance dépendra en pratique de la structure
de la clientèle. Il est probable que, dans la majorité des cas, celle-ci se
répartira suivant une distribution de Pareto et, en première approche, l' ana-
lyse pourra être conduite sur la base des 20 ou 30 % de clientèle assurant
une part dominante du chiffre d'affaires .
• Qu'ils soient disponibles ou qu'ils résultent d'une étude demandée par
l'auditeur, ces indicateurs pourront au moins être de deux types.
La figure 4-12 indique les lignes directrices d'une recherche des causes
associées à une évolution négative de ces indicateurs.
Indicateurs et Causes
dysfonctionnement
F2: Perte NB: Nécessité de distinguer entre la disparition d'un client arrêt
de clientèle d'activité et le passage d'un client à la concurrence
Accumulation de causes repérées avec F1
Pouvait-on conserver ce client?
Si oui: qualité globale en cause: Implications:
Quelles sont les procédures spécifiques de suivi et de traitement
des clients anciens?
Quelles sont les modalités d'analyse des clients perdus?
G: Insuffisance A. Le marché
du renouvellement Situation de maturité ou de déclin
B. La concurrence
Dégradation de la position concurrentielle
C. La politique commerciale
Observation des composantes du marketing-mix et plus
particulièrement: absence d'incitations à la prospection,
non-qualité de la force de vente, non-qualité
des argumentaires, etc.
A. Première hypothèse
L'auditeur a pu constater que l'entreprise étudiée fonctionnait dans un con-
texte stratégique, que des buts et dcs objectifs avaient été définis et atteints
dans des métiers dont la perception était cohérente et dense. L'approfon-
dissement de l'audit des objectifs au niveau des indicateurs n'a pas permis
de découvrir des défaillances évidentes. Le noyau stratégique est donc con-
firmé dans ses choix, surtout si un objectif strictement financier (rentabilité)
a pu être réalisé en même temps qu'un objectif commercial (part de marché
ou croissance relative).
Si l'environnement ne présente pas de menaces particulières, on sera placé
dans une perspective typique d'amélioration dont les audits complémentaires
permettront d'apprécier le contenu.
B. Seconde hypothèse
Le contexte stratégique existe, mais les objectifs, bien qu'à priori réalistes,
ne sont pas atteints. Rien n'indique encore que les causes soient essentiel-
lement internes. Ce qui est cependant certain et essentiel c'est que l'auditeur,
du fait de l'existence d'une stratégie, pourra anticiper une implication pro-
bable du noyau stratégique et de \' encadrement à l'égard de ce dysfonc-
tionnement.
On peut alors avancer deux critiques, qui pourraient être formulées à \' égard
de la démarche suivie:
82 L'audit stratégique
Enjeux et risques
Le degré de réalisation des objectifs stratégiques était le point de départ
logique d'un audit de la stratégie quelles que soient les conditions de son
élaboration. Dès l'instant où l'on se place dans l'hypothèse de la Qualité
Totale, cette approche doit être affinée à travers une analyse des dysfonc-
tionnements propres aux objectifs affichés de cette stratégie. Au centre de
ceux-ci se trouve la recherche de la satisfaction du client dont la Qualité
Totale a longtemps fait une finalité privilégiée (cf chapitre 5) avant de la
compléter par la satisfaction du personnel et par le niveau d'intégration de
l'entreprise dans la vie de la collectivité (cf chapitre 6).
Un bref rappel historique n'est probablement pas inutile. Vers la fin des
années 70, il s'agissait principalement de l'emporter dans une concurrence
entre pays situés à des stades de développement voisins. C'est dans ce con-
texte que se situait, par exemple, l'affrontement des industries automobiles
du Japon et des pays occidentaux. Par la suite, la qualité fut présentée
comme un moyen de surmonter le handicap des bas salaires des nouveaux
pays industriels tout en espérant qu'avec le temps un rattrapage salarial
s'opérerait qui réduirait progressivement cet écart.
84 L'audit stratégique
1. La Chine à l'affût des pell/s dra;;ons. Courrier International. N" 216,22 décembre 1994-4 janvier J 995.
2. À t'Esi. Iii révolution qualité défie l'occident, L'Expansion. n" 491 décembre 1994 - Janvier 1995. À
titre indicatif, au mois de décembre 1995, la Hongrie était pas,ée de 58 à 309 certificats. 127 390 cer-
tificats avaient alors été délivrés à travers le monde. En Asie, en trente-six mois. ce nombre était passé
de 683 à 9240 (Qualitique, n" 82. octobre 1996).
Les dysfonctionnements et objectifs de la Qualité Totale 85
Qualité (2.1) Ensemble des caractéristiques Dans une situation contractuelle, ou dans
d'une entité qui lui confèrent un environnement réglementé ... , les
l'aptitude à satisfaire besoins sont spécifiés, tandis que dans
des besoins exprimés d'autres, il convient d'identifier et
et implicites. de définir les besoins implicites.
Dans de nombreux cas, les besoins
peuvent évoluer avec le temps, ceci
implique la revue périodique des
exigences pour la qualité.
Les besoins sont habituellement traduits
en caractéristiques avec des critères
spécifiés. Les besoins peuvent inclure, par
exemple, des aspects de performance, de
facilité d'emploi, de sûreté de
fonctionnement (disponibilité, fiabilité,
maintenabilité), de sécurité, des aspects
relatifs à l'environnement, des aspects
économiques et esthétiques.
Entité (1.1) Ce qui peut être décrit Une entité peut être, par exemple: une
et considéré individuellement. activité ou un processus, un produit,
un organisme, un système ou
une personne, ou une combinaison
de l'ensemble ci·dessus.
Exigences pour Expression des besoins ou leur Le terme «exigences" couvre aussi bien
la qualité (2.3) traduction en un ensemble les exigences du marché, celles
d'exigences exprimées en du contrat, que celles qui sont internes
termes quantitatifs ou qualitatifs à un organisme.
pour les caractéristiques d'une
entité afin de permettre sa
réalisation et son examen.
86 L'audit stratégique
Figure III-l Qualité, satisfaction des besoins, selon la norme ISO 8402
(Source: Afnor).
3. On remarquera d'ailleurs que la notion d'amélioration de la qualité ne fait son apparition dans la
norme ISO 9004-1 qu'avec la révision éditée en 1994 (rubrique 5.6 Amélioration de la qualité). Dans
les commentaires d'accompagnement on peut lire: « La volonté d'utiliser l'ISO 9004-1 pour présellter
l'amélioration de la qualité comme le moteur inévitahle d'ull IIwnaRement de la qualité à lonR terme
a conduit, pour III phllse 1 de la révision, à incorporer un chapitre spécial sur le sujet, Ce n'est sans
doute 'lu 'ulle étape dans l'intégratiull de l'amélioratiun de la qualité à l'ISO 9004-1 N. AFNOR, Gérer
et assurer la qualité, Tome 2. 1994. De même, la norme ISO 9004-4, 1993, fournit-clic un ensemble
de précisions ct des descriptions d'outils dans le sens de l'amélioration. AFNOR, Gérer et assurer la
qualité, Tome 1, 1994.
Les dysfonctionnements et objectifs de la Qualité Totale 87
Produits/services/technologies
Actuels Nouveaux
Développement
Actuels de produits
Clients
Développement
Nouveaux Diversification
de marchés
Pour Ansoff, ce sont les produits et les marchés qui caractérisent les grandes
options de l'entreprise telles qu'elles apparaissent dans une présentation ma-
tricielle désormais célèbre. Quatre stratégies en résultent: la pénétration des
marchés, le développement de produit, l'extension de marchés et la diver-
sification stratégique. L'introduction des notions de synergie et de flexibilité
donnera un contenu opérationnel puissant à cette matrice que l'on peut au-
jourd'hui encore considérer comme un support de réflexion fondamental.
Par la suite, des auteurs comme D. Abell suggéreront d'autres composantes,
comme les fonctions assumées par les différents produits, les technologies
utilisées ou encore les besoins exprimés par les clients. On reprochera ce-
pendant au vecteur de croissance de ne pas faire suffisamment place à l' en-
vironnement et c'est à cette critique que répondent ce que l'on pourrait
appeler les vecteurs concurrentiels.
Les figures III-3 et III-4 proposent deux formulations de ce nouveau type
de vecteur stratégique, empruntées à M. Porter4 et K. Ohmae 5 .
Objectif Facteurs
stratégique Qualité du service apporté aux orientés
vers la
clients: produit global
différenciation
Niveau .. x"
de rotation Qualité de l'entreprise
des actifs
On notera la flèche allant des différents types de processus vers les facteurs
de qualité (différenciation). Elle indique que les processus, tout en pouvant
créer directement de la valeur pour le client, ont aussi un rôle primordial à
jouer dans J'amélioration de la qualité et qu ' ils apparaissent ainsi comme
des causes de premier rang dans cette création.
C. La démarche de l'auditeur
Cette figure fait apparaître J'ordre des opérations conduites dans le cadre de
l'audit. La distinction entre les facteurs orientés vers la différenciation et
les facteurs orientés vers les coûts a incontestablement un certain aspect
arbitraire mais elle va permettre de hiérarchiser la démarche de l'auditeur
en distinguant les résultats attendus (création de valeur et différenciation)
et les moyens de les atteindre (facteurs orientés vers les coûts).
5
L'audit de la satisfaction
des clients
.:s , -
ü ' dlen1s "
RESULTATS
OPERATIONNELS
-1
1
Ressources
~
H tntégration dans la
vie de la collectivité
~
FACTEURS RÉSULTATS
04 • 04
MODÈLE EUROPÉEN LA QUALITÉ TOTALE
•
Causes Dysfonctionnements
éventuels
5.1 Le référentiel
Peu après la fin de la Seconde Guerre mondiale, les Américains préconi-
saient de relier étroitement la conception d'un produit nouveau aux besoins
de la clientèle ciblée. L'analyse de la valeur représentera ainsi l'une des
premières manifestations du souci de la satisfaction de cette clientèle.
Dès ses origines, le marketing adoptait la même position considérant que le
profit de l'entreprise était dépendant de cette satisfaction.
La satisfaction de la clientèle est enfin considérée comme l'objectif majeur
d'une politique de Qualité Totale, ceci dans le prolongement de la qualité
du produit dont la conformité au cahier des charges était déjà l'une des bases
de la qualité instrumentale classique.
Il faut bien reconnaître que, dans la pratique, la qualité s'inscrit souvent
comme un objectif prioritaire dont on suppose qu'il procure la satisfaction
du client sans aller pour autant jusqu'à s'en assurer. Tout se passe comme
si les moyens (la conformité, par exemple, dans le domaine de la qualité)
étaient censés garantir la fin. On a d'ailleurs eu l'occasion de rappeler, au
cours du chapitre 4, comment la satisfaction des clients avait longtemps fait
figure de but (qualitatif) plutôt que d'objectif (chiffré). Ce n'est que de façon
94 L'audit stratégique
récente, et sous l'influence des réflexions liées à la Qualité Totale, que des
indicateurs ont été proposés.
1. Ce paragraphe est repris de: Le management stratégique, Michel Weill, A. Colin. 1992.
2. NF EN 1325-1, Novembre 1996: Analyse de la valeur, analyse ./imctionne//e, vocabulaire;
NF X 50-151 : Analyse de la valeur, analyse flmctionne//e, expression fimctionnelle du besoin et cahier
des charges fiJ/lctionnel, Décembre 1991 ; NF X 50-152 : Analyse de la valeur, caractéristiques ./imJa-
mentales, Août 1990; FD X 50-153 : Analyse de la valeur, recommandation pour sa mise en œuvre,
Mai 1985, Ces normes sont reprises dans De l'analyse de la valeur au management par la valeur, Afnor.
1998
3. Cf: R. Tassinari, L'analyse./ànctionne//e, Afnor, 1995, série Mémentos. ainsi que le recueil de normes:
De l'analyse de la valeur au management par la valeur. Afnor. 1998.
L'audit de la satisfaction des clients 95
On peut citer, à titre d'exemple, le cas des fonctions attendues d'un stylo:
assurer une écriture élégante,
assurer une écriture indélébile,
assurer une transportabilité sans risque de fuite,
procurer à son détenteur une image de réussite sociale,
procurer à celui qui l'offre une référence de cadeau de qualité,
offrir une capacité de fonctionnement sans recharge supérieure à 4 heures
de travail...
Composants
Fonctions Coûts
du produit
f, f, f, f. f, f" f, fo
Coût total 0,20 0,30 0,45 0,55 1,20 0,05 0,60 0,10 3,45
% Cout total 5,79 8,70 13,04 15,94 34,78 1,45 17,39 2,90 100,00
• Le référentiel marketing
Le marketing devrait logiquement apporter une contribution majeure à la
problématique de la satisfaction des utilisateurs. C'est en effet à cette dé-
marche que revient historiquement l'initiative d'avoir fait reposer la réussite
de l'entreprise sur la satisfaction du client. Comme nous l'avons déjà men-
tionné, la réalité est singulièrement différente. Tout se passe comme si les
outils pouvant générer la satisfaction des utilisateurs avaient été privilégiés
au détriment de l'analyse préalable des facteurs de cette satisfaction. Le
marketing s'est alors concentré sur les activités dites du « mix » en perdant
de vue combien était illusoire la quête d'une satisfaction dont les compo-
santes étaient méconnues!
Certains travaux, d'ailleurs liés à des problématiques de Qualité Totale. met-
tent à nouveau en avant un souci de mesure de la satisfaction dans ses
composantes.
• Une pondération est réalisée dans les mêmes conditions. Une méthode
simple consiste à attribuer 100 points à chaque interviewé et à lui deman-
der de les répartir entre les différents attributs .
.. On demande alors aux utilisateurs de donner une note sur 10 à l'entreprise
étudiée et une note similaire à la concurrence que l'on pourra considérer
dans son ensemble (notes globales moyennes) ou par entreprises ou encore
pour nos seuls concurrents principaux.
La figure 5-3 reprend un exemple cité par B.T. Gale, illustrant une situation
concurrentielle entre divers élevages de poulets. On suppose, dans ce cas,
l'introduction de méthodes marketing dans l'entreprise dénommée X, ce qui
explique les différences de notes pour chaque attribut. Le client de X affiche
un score de satisfaction pondérée de 8,8 contre 7,1 à la concurrence. X a
produit une qualité perçue par le marché de 26 % supérieure à celle de la
concurrence.
Performances (scores)
100
prix des pièces détachées ... Cette perception détaillée du prix peut déjà aider
l'entreprise à conduire sa politique autrement que par une simple diminution
de tarif.
Prix d'achat 60 9
Valeur de reprise 20 6
Prix de revente 10 9
Taux financiers 10 7
100
(*) Si les consommateurs vous classent mieux en score de satisfaction prix, ils vous classent plus
bas en prix relatif
1,2
Mauvaises
valeurs
Elevé
Marque X
Ratio de prix
relatif
Ligne de Faible
Bonnes
référence valeurs
0,8
Faible Elevée
0,8 1,2
Ratio de qualité relative
B.T. Gale évoque encore d'autres indicateurs qui nous rapprochent d'une
vision Qualité Totale et dont certains ont été listés dans la figure 5-6. Dans
un cas général, ce type de mesures est plus vraisemblable.
Que les objectifs, essentiellement financiers, qui ont fait l'objet du prédia-
gnostic aient été ou non réalisés (cf chapitre 4), il s'agit désormais pour
l'auditeur de s'assurer que la satisfaction du client est bien la finalité stra-
tégique de cette entreprise et que celle-ci dispose des moyens nécessaires
pour vérifier que ce but est atteint.
L'audit de la satisfaction des clients 101
Une base minimale mais nécessaire résiderait dans une information sur la
perception de la qualité et une autre sur la perception du prix, chacune étant
rapportée aux performances des concurrents principaux telles qu'elles ont
été présentées plus haut6 .
• Les dysfonctionnements
Les dysfonctionnements étudiés ici sont d'ordre global.
Un guide d'évaluation du degré d'excellence de l'entreprise, sous forme de
questionnaire, est proposé par l'EFQM 7 , Il comporte neuf questions résu-
mées dans la figure 5-9, dont le lecteur pourra s'inspirer pour repérer les
dysfonctionnements majeurs de son organisation.
7. Évaluez le deRré d'excellence de voile entreprise, EFQM. Gower Publishing Limited, 1995.
L'audit de la satisfaction des clients 103
Un cas plus général est représenté par les entreprises qui ne ressentent pas
comme fondamental de disposer d'une information complète et actualisée
sur leurs clientèles 8 •
~. L'étude de marché traditionnelle, si elle peut être un moindre mal, ne saurait se substituer à des
indicateurs permanents du degré de satisfaction de la clientèle. On a besoin ici de données simples, mais
actualisées de façon régulière. Elles permettront ainsi de porter un jugement sur l'évolution de la sa-
tisfaction.
104 L'audit stratégique
Le marketing nous enseigne que cette satisfaction, qui relève des sentiments
du consommateur suite à un achat, dépend d'une comparaison, plus au moins
objective, entre une performance perçue à l'occasion de l'expérimentation
du produit (ou du service) et l'attente de ce même consommateur.
A. La conformité
SPÉCIFICATION
Besoin
d'innovation
BESOIN RÉALISATION
10. Michel Périgord, Réussir la Qualité Totale, Les Éditions d'Organisation, 1987.
106 L'audit stratégique
11. On pourra lire notamment: A. Bernillon, O. Cérutti, Implanter et gérer la Qualité Totale, Éditions
d'Organisation, 1988. C. Doucet, La maîtrise de la qualité, EME, 1986, M. Litaudon, L'analyse de
valeur, Éditions d'Organisation, 1981.
L'audit de la satisfaction des clients 107
B. La qualité
La qualité peut s'entendre à deux niveaux:
la qualité intrinsèque du produit qui correspond globalement au concept
largement vulgarisé de « zéro défaut» ;
- une composante que l'on peut qualifier de managériale, qui recouvre les
notions de « zéro stock» et de « zéro délai », pour ce qui dépend de la
responsabilité de la fonction de production.
On remarquera que ces différents aspects sont clairement exprimés dans le
schéma de M. Périgord (cf figure 5-10).
C. La fiabilité
La fiabilité peut être définie comme le « zéro panne », c'est-à-dire comme
une extension de la qualité sur la durée d'usage du bien ou sur une période
contractuelle. Lorsque les études préliminaires ont été correctement réali-
sées, on peut estimer que les défauts non aléatoires de conception et de
fabrication ont été largement éliminés. De même, l'analyse fonctionnelle a
permis d'intégrer les conditions d'usage du produit dans les spécifications.
Un processus de production correct ne devrait laisser subsister que des dé-
fauts aléatoires qui, comme tels, peuvent faire l'objet d'une estimation sta-
tistique sous la forme de probabilités. Nous entrons ainsi dans le domaine
de la fiabilité.
Celle-ci peut faire l'objet de mesures. C'est le cas du MTBF (Mean Time
Between Failures), temps moyen de bon fonctionnement, qui est l'espérance
mathématique de vie du produit sans défaillancc. Un autre indicateur pré-
cieux est le taux de défaillances qui mesure le rapport entre les défaillances
survenant à \' instant « t » par rapport à l'ensemble des produits encore bons
à cet instant. Une forme classique de sa représentation graphique est illustrée
sur la figure 5-11.
Taux de pannes
\~ ~')
Phase de -
'""'00
vieillesse
jeunesse Vie utite
Temps
B. Les dysfonctionnements
Les dysfonctionnements révélateurs d'une non-qualité industrielle sont gé-
néralement simples et la figure 5-13 en donne quelques exemples. Lorsque
la satisfaction du consommateur est attachée à des facteurs explicites précis,
le dysfonctionnement est aussi bien repérable en interne, par des mesures
de non-qualité, qu' en externe, par des études de satisfaction. Lorsque la
satisfaction du consommateur est moins précise, les études de satisfaction
L'audit de la satisfaction des clients 109
deviennent nécessaires. Dans tous les cas, elles seront utiles, permettant
notamment de réintroduire l'offre comparée de la concurrence.
• Capacité de répondre
aux spécifications
·· Maintenabilité
Durabilité
• Traitement
des réclamations
··
Réactivité et flexibilité
Fiabilité des produits
· Performance en matière
de livraison · Disponibilité des pièces
détachées
et services
• Cohérence, reproductibilité · Développement
des produits
NB. La caractéristique commune à ces diverses composantes est de porter sur les processus
liés à la production: conception, production, logistiques internes et externes.
· Performances logistiques
(délais, taux de réponse,
(MTBF)
• Taux de réclamation
fréquence)
1. Pressions administratives
• Existence de normes spécifiques à la branche, position de l'entreprise par rap-
port à ces normes.
• Existence de procédures de certification, position de l'entreprise par rapport à la
concu rrence.
2. Pressions clientèles
• Structure générale de la clientèle et évolution (civile, militaire ... ).
• Types de demandes émanant de la clientèle (formelles ou non, audits provoqués,
certifications ... ) .
3. Pressions du milieu concurrentiel.
• Typologie de la concurrence: tailles relatives, degré d'internationalisation de la
branche, engagements des concurrents principaux dans des politiques de Qua-
lité Totale.
Les mesures. II n'y a pas de politique qualité qui soit concevable sans me-
sures. Suivant une proposition classique, celles-ci permettent de transformer
des opinions ou des hypothèses en faits.
-
% de l'ensemble
c::::J Zone A Exemple d'application à la fabrication de montres
0
lb-, 2. Défaillances de la zone B.
• Taux moyen de défaillance du module quartz.
~
A B C D E F
Types de défauts
Connaissance de mesures
au niveau des différentes
J
2 directions (sauf
production et qualité)
,
1 1
NON OUI
~
Connaissance de mesures
au niveau des directions
3 de laproduction et/ou
de la qualité
1 1
NON OUI
!
COQ
Effet qualité
Coût
de la non-conformité
Coût
de la conformité
c+d
Temps
Figure 5-17 Évolution théorique du COQ dans le temps.
L'audit de la satisfaction des clients 115
Dans bien des cas, le COQ est considéré comme un véritable indicateur
stratégique. Il fait alors l'objet d'un calcul global pour l'entreprise - ou pour
une division - à partir d'éléments empruntés à la comptabilité générale et
à la comptabilité analytique. L'hypothèse de COQ par fonctions, et notam-
ment pour les fonctions recherche, développement et production qui nous
intéressent ici, n'est pas beaucoup plus satisfaisante.
Au total, c'est l'hypothèse d'un COQ par ligne de produits qui devrait être
la plus riche d'enseignements I6 . Deux types d'indications vont alors être
particulièrement utiles à la fois en tant qu'observations individuelles et dans
une perspective de comparaisons sur plusieurs périodes .
• L'information de base, la plus simple à établir, réside dans le chiffrage
des coûts de la non-conformité. Deux facteurs justifient son intérêt.
D'un premier point de vue, elle va préciser la hiérarchie des dysfonction-
nements enregistrés en termes de rebuts, déclassements, etc. Les respon-
sables de l'entreprise peuvent être obnubilés par la fréquence élevée de
certains d'entre eux alors qu'ils n'ont qu'un impact financier limité. A
l'inverse, des défaillances plus rares peuvent occasionner des conséquen-
ces particulièrement lourdes dans leurs coûts. L'auditeur devra bien en-
tendu attirer l'attention sur ce type de risques.
Plus globalement, ces différents coûts vont servir de révélateurs de la
masse des gisements de qualité. Mesurés en pourcentage du chiffre d'af-
faires réalisé dans l'activité, ils se passent souvent de commentaires. Dans
la perspective classique d'une sensibilisation des dirigeants et d'une mo-
bilisation de l'entreprise, c'est une fonction essentielle .
• La disponibilité de calculs de COQ rend possible ensuite la confrontation
des coûts de la conformité (CC) et de la non-conformité (CNC). Le re-
pérage d'un écart (CNC - CC) positif indique l'existence d'une marge de
manœuvre en faveur de l'amélioration, sans risque sérieux d'une pression
sur les coûts. De façon complémentaire, l'auditeur aura intérêt à observer
l'évolution de la structure des coûts de la conformité. En théorie, les coûts
de la prévention et ceux du contrôle devraient évoluer en sens contraire
mais il n'est pas certain qu'il en soit ainsi. Une stagnation ou même une
augmentation des coûts de contrôle devrait être analysée avec les respon-
sables de la production et de la qualité afin d'identifier les causes de cette
tendance: s'agit-il d'un décalage normal ou d'une inefficacité de la pré-
vention?
16. Techniquement, il pourra être utile de procéder à des calculs de COQ par processus, pour ce qui est
des processus jugés stratégiques dans l'entreprise (chapitre 7).
L'audit de la satisfaction des clients 117
C. Les causes
Elles peuvent essentiellement tenir à :
- la qualité de l'ingénierie mise en œuvre, c'est-à-dire de la conception;
- la qualité du processus de production;
- la qualité du contrôle.
S'agissant, par exemple, du problème de la fiabilité, il est certain que celle-ci
dépend de l'ensemble du processus de conception (ingénierie), de la qualité
118 L'audit stratégique
Il s'agit de simples règles de bon sens dont le rappel n'est cependant pas
inutile si l'on considère leurs implications. Elles montrent d'abord l'inter-
dépendance des fonctions dans cette phase. L'adaptation aux usages prévus
suppose ainsi généralement une coopération étroite avec le département
commercial, pour s'en tenir à un exemple élémentaire. Elles rappellent en-
suite que la performance technique et la performance qualité ne cohabitent
pas nécessairement, ce qui risque de ne pas correspondre à la culture tra-
ditionnelle de l'ingénieur.
17. J. t"l. Juran. Juratl 1111 plannin); .filr Ijuality, The Frcc Prcss. New York. 1988
L'audit de la satisfaction des clients 119
tifier les signaux de valeurs retenus par le décideur (bouche à oreille, pu-
blicité ... ).
Une autre approche signalée, par M. Porter, consisterait à analyser plus
précisément les points de contact significatifs entre la firme et sa clientèle,
ceux-ci étant les vecteurs privilégiés du transfert de signaux (interfaces). On
s'apercevra une fois de plus que ces contacts sont loin d'être strictement
commerciaux: un service comptable, un département technique peuvent y
jouer un rôle essentiel.
Les critères de signalisation sont alors classés en fonction du niveau d'im-
portance attribué par la clientèle et du niveau de coût supporté par l'entre-
prise. C'est à partir de l'ensemble de ce référentiel que l'auditeur va déve-
lopper des indicateurs de qualité du produit global.
OUI ......
__- - - - - - -____
~.. NON .... Risque de non-qualité par
non- différenciation
Communication
3. Émission des
des caractéristiques
signaux de valeur
du produit global
A. Les dysfonctionnements
On remarquera que les dysfonctionnements peuvent être difficiles à identi-
fier à la fois parce qu'ils peuvent être très nombreux mais aussi mal formulés
par la clientèle. Autant une défaillance du produit matériel est immédiate-
ment identifiée, autant l'absence d'un service peut être plus difficilement
décelable, ne serait-ce que dans la mesure où il n'est pas toujours envisagé
à priori par le client.
Il est difficile d'anticiper des mesures de la qualité du produit global. L'approche, au moins dans
un premier temps, sera de type qualitatif d'autant plus qu'il n'est pas certain que le client soit
capable d'exprimer une insatisfaction précise, sauf par référence aux prestations de concurrents.
1. Politiques de prix
2. Politiques de produit
Dans tous les cas, la fréquence des études ou des observations conduisant
à ces informations devra être observée. Des évolutions de comportement ou
d'attitude des consommateurs peuvent en effet modifier une hiérarchie des
attentes et transformer l'analyse de la qualité du produit global.
Quel que soit le degré de sensibilité du consommateur aux facteurs que nous
venons de décrire, il est dans tous les cas influencé par des signaux de
valeur plus ou moins contrôlés par le vendeur. L'audit devra alors vérifier
l'existence d'une analyse de ces facteurs de signalisation (cf. figure 5-23).
Les sources d'information seront les mêmes que celles énumérées à propos
des attentes et une procédure de hiérarchisation de ces facteurs devra aussi
être conduite à travers une échelle de valeurs. De la même manière, l'au-
diteur devra apprécier les actions conduites par l'entreprise pour maîtriser
ces signaux de valeur et leur cohérence avec la hiérarchie observée.
L'audit de la satisfaction des clients 131
·· Prospection commerciale
Points de contact sur le site: personnel d'accueil, personnel du standard téléphonique,
assistance commerciale téléphonique, personnel de vente terrain ou entrepôt, personnel
du service après·vente ...
···
Bouche à oreille
Groupes de référence (styles de vie, classes sociales ... )
Existence de leaders d'opinion, de prescripteurs
·· Présence du produit dans des contextes de référence (lieux privilégiés de consommation)
Présence du produit dans des surfaces de vente de référence
L'auditeur devra donc s'assurer que ces informations sont, au moins par-
tiellement, disponibles et formalisées dans une présentation opérationnelle.
Dans hien des cas, l'entreprise se sera limitée à la formulation d'hypothèses
non vérifiées sur le terrain ou seulement étayées par des informations ex-
ternes (des monographies publiées par la presse professionnelle, par exem-
ple). Chacun des facteurs détaillés dans les figures 5-22 ou 5-23 devra alors
faire l'objet d'une pondération en fonction des sources de l'information.
Plusieurs niveaux peuvent être envisagés.
Niveau 1. Facteur cité par l'entreprise comme plausible maIs non vérifié.
À ce stade, \' auditeur doit être en mesure d'évaluer les bases de la qualité
du produit global de l'entreprise. Il n'est pas exclu qu'il soit aussi conduit
à suggérer des approfondissements sous la forme d'études spécifiques qui
permettraient de fournir un meilleur éclairage. Dans l'hypothèse d'un man-
que d'information particulièrement évident, des études portant sur les clien-
tèles intermédiaires pourraient, dans la plupart des cas, constituer un préa-
132 L'audit stratégique
S'agissant de la perception interne, elle peut être analysée dans une double
perspective: celle de l'avantage concurrentiel «produit global» actuel et
celle de sa définition pour l'avenir. Ces deux dimensions peuvent être
appréciées à travers des questions du type:
- Quels sont, selon vous, les principaux facteurs générateurs d'un avantage
concurrentiel pour votre produit X sur le marché ?
- Quels sont, selon vous, les principaux facteurs sur lesquels vous allez agir
dans les x prochaines années pour conforter ou transformer votre avantage
concurrentiel sur ce marché?
Notation
Notation des concurrents clés
Facteurs de qualité totale de la firme
audltée
A B C
1. Politiques de prix
• Appréciation du prix pratiqué ++ MOY +
· Délai de paiement
• etc.
MOY + ++ +
2. Politiques de produit
3. Politiques d'aide à la vente
4. Politiques de localisation, logistique
Dans cet exemple, chaque entreprise, y compris \' entreprise auditée, se voit
attribuer une note propre à chacun des facteurs de différenciation possibles.
Dans ce cas, cinq notes sont envisageables depuis \' hypothèse (- -) traduisant
la faiblesse maximale de la firme sur un facteur, jusqu'à l' hypothèse (++)
traduisant la position de force maximale. Si une hiérarchisation des facteurs
a été réalisée, il est possible de l'introduire dans cette matrice sous la forme
d'un coefficient de pondération, ce qui conduira, sous une forme résumée,
à une matrice de satisfaction (cf figure 5-27).
À ce stade, l'auditeur pourrait vraisemblablement anticiper certaines recom-
mandations. Ainsi, une action de renforcement du facteur 1 sera probable-
ment nécessaire s'il se confirme que \es acheteurs lui attribuent un poids
élevé, mais elle n'aura que peu d'effets au regard du produit global puisque,
à l'exception de « D », \es concurrents occupent déjà le terrain. En revanche,
un renforcement du facteur n, favorablement pondéré, aurait un effet de
différenciation important dans la mesure où la concurrence n 'y est perçue
que de façon négative ou moyenne.
Concurrents principaux
Firme
Poids
auditée
A B C D
1 ++ - + moy ++
Facteurs
2 + + ++ ++ ++ +
de
3 moy + + - --
différenciation
4 - moy + moy +
n ++ + -- moy
Entreprise auditée
Évaluation des consommateurs
(autoévaluation)
1 ++ + ++ +
moy
2 + + + + +
Facteurs 3 moy + + moy
de différenciation -+ 4 moy + +
n ++ +
Notes de
Pondération du facteur
«France-Rénovation»
de A à E.l l l
pour ces facteurs (sur 10)
Facteurs de différenciation
Maîtres Cadres de Maîtres Cadres de
d'ouvrages F-R d'ouvrages F·R
B. Présentation de cet
argumentaire par la
·· Culture
Pas de contrôle de la force de vente
de la force de vente
idem +
DRH
force de vente
·à Pas de sensibilisation de la force de vente
la Qualité Totale
• Pas de formation de la force de vente
C. Présentation de cet
argumentaire par le
·• Action
idem supra
non prévue dans les définitions de tâches
DRH,
D. services
personnel de contact • Pas de valorisation pécuniaire ou autre concernés.
Indicateur Indicateurs
Risques
général particuliers
··
Détérioration de l'image
Baisse de productivité et
Perte de part
· Perte de clients significatifs
(clientèle finale ou intermédiaire) :
démotivation de la force de vente
On lira notamment sur ce sujet: H. Séricyx. Le ~ér{)·lIlé[7ri.l'. InterÉditions. 1989. ou encore: P. Bloch.
211.
R. Hahahou ct D. Xardcl. Service colll!,ris. L'Expansion Hachette. 1996.
142 L'audit stratégique
clientèles ont fait l'objet de segmentation, si les valeurs retenues pour dis-
tinguer l'entreprise sont opportunes ou encore si l'analyse de la concurrence
a été correctement conduite. Il faut seulement, si cela est possible, parer au
plus pressé. Avant d'arriver à des préconisations, l'auditeur devra mettre
l'accent sur les risques d'une situation en sachant que, devant un tel dénue-
ment dans le domaine de la qualité, seule une sensibilisation très forte des
dirigeants permettra de créer un environnement de base favorable. Cette
sensibilisation devra s'étendre à l'encadrement sans qui le message d'une
direction resterait lettre morte.
Dans cette seconde hypothèse, ]' entreprise dispose d'un système de valeurs,
c'est -à-dire de facteurs caractéristiques d'un produit global. Il s'agit en pra-
tique de déterminer la pertinence du système de valeur retenu à travers les
L'audit de la satisfaction des clients 143
Origine des
Risques Recommandations
dysfonctionnements
1, Absence de référence à
un système de valeur
Impossibilité d'une politique
cohérente de produit global
· Développer un plan d'action pour la
qualité si une sensibilisation
est possible
···
3. Produit global fondé sur • Inefficacité et non-rentabilité Réviser la définition du produit global
des valeurs inopérantes de la politique Réviser la communication
de produit global Informer / former la clientèle
· Absence certaine
de positionnement produit
5. Produit global fondé sur Faible efficacité de la • Rechercher des valeurs plus
des valeurs faibles politique de produit global opérationnelles
ou temporaires Positionnement menacé Observer les systèmes de valeur des
concurrents et des secteurs voisins
Si l'on fait abstraction des deux premières hypothèses, qui renvoient à une
étude préalable, un premier cas fréquent reposera sur une définition du pro-
duit global fondée sur des valeurs inopérantes, Elles peuvent entrer dans
cette catégorie pour deux types de raisons: soit il s'agira de valeurs jugées
« normales» par la clientèle et par conséquent non distinctives, soit on aura
des valeurs réelles mais non perçues comme telles,
Dans le premier cas, il faudra s'interroger sur le caractère impératif ou non
du maintien de ces valeurs, Il n'est pas impossible que certaines d'entre
elles se soient dévalorisées avec le temps et qu'elles puissent être au moins
partiellement supprimées, On peut prendre l'exemple d'une activité long-
temps stable et qui se trouve soumise à un facteur de mode: il est très
144 L'audit stratégique
possible que les fournisseurs aient largement exploité dans le passé un sys-
tème fondé sur le dépôt-vente, leurs produits n'étant pas soumis à dépré-
ciation. L'introduction de la mode rend cette démarche coûteuse et surtout
inopérante pour une clientèle en attente de nouveautés. Dans ce cas, une
valeur traditionnelle peut être progressivement abandonnée bien que l'on
observe qu'en pratique elle le sera très lentement, n'optimisant pas ainsi la
relation « Firme-Client ».
La seconde hypothèse est fréquente. Elle illustre une réelle création de va-
leurs qui, n'étant pas perçue par la clientèle, n'est pas source de différen-
ciation. Cette situation peut résulter d'un problème de communication, mais
elle peut aussi dépendre d'autres causes qu'il faudra identifier. On trouvera
dans cc cas les situations que l'on pourrait qualifier de « perfectionnisme
fonctionnel », en entendant par là la volonté d'une fonction d'affirmer ses
compétences au delà des attentes immédiates de la clientèle. Des décideurs
issus des fonctions de production ou de la recherche peuvent jouer fréquem-
ment ce rôle. On notera qu'on est ici à la limite d'une véritable création de
valeur dès l'instant où celle-ci se réalise en dehors de toute référence à une
attente réelle (surqualité). Il se peut enfin que les valeurs créées répondent
à la définition que nous en avons donnée (réduction de coûts ou amélioration
des performances) mais ne soient pas perçues comme telles. Dans ce cas,
il faudra s'interroger sur la possibilité de les faire reconnaître ou, dans le
cas contraire, de les supprimer de façon plus ou moins complète. Supposons
le cas d'une entreprise qui augmente la fréquence de ses visites chez ses
clients et qui leur permet ainsi de réduire leur stock moyen au prix d'une
légère augmentation de ses prix relatifs. L'impact de la rotation n'étant pas
pris en compte par le client, il est tout à fait possible que seule l'augmen-
tation des prix soit retenue et qu'il en résulte un effet négatif alors que la
performance objective était favorable. Dans un tel cas, on sort du cadre de
l'information (émission de signaux de valeur) pour entrer dans celui de la
formation de ce client.
L'hypothèse d'un système de valeurs non distinctes par rapport à la con-
currence est, elle aussi, fréquente. Elle est en soi la négation du produit
global puisqu'elle exclut l'idée d'un avantage concurrentiel. Elle amènerait
l'auditeur à préconiser une révision de la définition du produit global et il
en serait probablement de même si ces valeurs s'avéraient faibles, tempo-
raires ou encore facilement reproductibles.
L'hypothèse d'un produit global fondé sur des valeurs à coût excessif relève
plus précisément d'une analyse de valeur classique. On se rappellera en effet
que la Qualité Totale apparaît comme la recherche d'un optimum entre les
attentes de la clientèle et les coûts supportés par l'entreprise. Il faut ajouter
L'audit de la satisfaction des clients 145
que l'on devra conduire cette analyse dans une perspective de durée, la
notion de produit global impliquant une continuité dans l'action de déve-
loppement des valeurs. Il y a ainsi de fortes chances pour que l'analyse de
l'auditeur l'amène à identifier bon nombre de valeurs dont le coût de mise
en œuvre s'avère non satisfaisant par rapport à la qualité globale. On peut
par conséquent déboucher sur une remise en cause des définitions antérieu-
res de la qualité et des ressources qui leur sont attribuées afin de procéder
à leur redistribution. Cette étape est elle aussi importante parce qu'elle peut
être une source d'économies non négligeables et ensuite parce qu'elle fa-
cilitera le recentrage de la qualité perçue par les clients sur leurs véritables
attentes.
Une recommandation essentielle portera sur la nécessité d'intégrer, au cours
de cette démarche, une recherche systématique de valeurs susceptibles de
générer des réductions de coûts ou une amélioration des performances de
l'entreprise elle-même et non plus seulement celles de ses clients. Il se peut
en effet que certains coûts soient appelés à diminuer en fonction des choix
qu'elle va opérer, notamment pour ce qui est des créations de valeurs ob-
jectives. Cela devrait être le cas lorsqu'il s'agit d'actions sur la Qualité
Totale pouvant déboucher, par exemple, sur une réduction des rebuts ou des
pièces destinées à un service après-vente. De la même manière, une stan-
dardisation d'un composant entrant dans la fabrication d' un produit peut
simplifier la gestion et le coût des stocks d'un utilisateur mais aussi celle
du producteur chez qui elle peut se doubler d'économies d'échelle.
Origine
Risques Recommandations
des dysfonctionnements
valeur peuvent aussi être relativement faibles s'ils exploitent pour la pre-
mière fois une valeur déjà créée. La situation peut notamment se produire
lorsqu'il s'agit de valeurs anciennes pour l' entreprise et qu' ellcs tendent
alors à devenir évidentes au point de ne plus mériter d'être défendues. Ce
serait se priver, dans de nombreux cas, de facteurs économiques, puisque
acquis, et de signaux efficaces puisque généralement précédés d'une forte
reconnaissance chez la clientèle.
Ainsi, au début des années 1950, la société Lévitan gérait deux magasins à
Paris qui disposaient d'une notoriété accumulée tout à fait exceptionnelle
résultant de son activité passée. Pour les jeunes ménages provinciaux, la
visite de ces magasins était une étape traditionnelle de leur installation. L'ap-
parition des premières grandes surfaces périphériques dans cette activité al-
lait détourner une large part de cette clientèle alors que la notoriété de
l'entreprise restait intacte. Le développement d'un système de franchise de-
venait un moyen d'exploiter ce signal de valeur dans le nouveau contexte
avec un coût dérisoire par rapport à son incidence pour le distributeur fran-
chisé et pour la société Lévitan.
L'auditeur devra s'attacher au contenu de la communication externe et no-
tamment au risque qu'elle ne soit pas réellement représentative du produit
global. Une entreprise à forte culture industrielle pourrait ainsi négliger la
communication sur des éléments de service existants mais jugés secondaires
dans le contexte de la culture dominante.
Il reste enfin le problème de la communication interne des signaux de va-
leurs. Ce serait en effet une grave erreur que de s'en tenir à une commu-
nication strictement orientée vers les clients. Cette question sera plus lon-
guement abordée dans le cadre du chapitre 6, mais \' on peut déjà observer
que \' ensemble du personnel de l'entreprise a un rôle à jouer comme trans-
L'audit de la satisfaction des clients 147
21. Notons que l'auditeur disposera. dans cette perspective, de nombreux indicateurs visant à situer la
connaissance interne de la définition du produit global. Il pourrait procéder à une série d'interviews
auprès des personnels en contact avec la clientèle - standard téléphonique, service après - vente, per-
sonnel d'accueil ... et identifier ainsi leur rôle et les moyens dont ils disposent pour transmettre des
signaux de valeur.
6
L'audit relationnel
de l'entreprise
RÉSULTATS
LEADERSHIP PROCESSUS
OPÉRATIONNELS
FACTEURS RÉSULTATS
~~--------------------------------~.~ ~~--------------------~.~
MODÈLE EUROPÉEN DE LA QUALITÉ TOTALE
• Typologies
La notion d'image peut être abordée sous plusieurs angles.
On remarquera que cet avantage concurrentiel peut être une bonne base pour
une image de qualité destinée à la clientèle mais qu'il risque d'être peu
attrayant dès lors qu'on se préoccupe du développement d'une image in-
terne. Ainsi, la lutte pour l'obtention d'une diminution du coût unitaire de
la valeur ajoutée à travers le mécanisme de l'expérience n'est probablement
pas de nature à déclencher une mobilisation générale dans l'entreprise.
Les études conduites sur des questions telles que la culture ou les projets
d'entreprise montrent qu'une perception d'image est beaucoup plus riche et
plus complexe que la seule mémorisation d'avantages concurrentiels objec-
tifs que les publics de l'entreprise compléteront de toute façon par d'autres
composantes.
154 L'audit stratégique
• Le diagnostic interne
Diagnostic interne
Les valeurs de l'entreprise
• Les avantages
----.. concurrentiels objectifs Modes de gestion
du
• Les composants
~
Les buts
stratégiques .1 Diagnostics
de la culture
Cohérence
H Définition du
« mix-images »
" mix-images »
+ +
t
retenus
Diagnostic externe Modes de
~ 1. Les valeurs reconnues communication
par les parties prenantes: du .. mi x-images »
• Identifications des
~ publics
• Identification des valeurs
, Cohérence
t
Cohérence
2. Les valeurs reconnues
chez les principaux
concurrents
..
l/c: "1",..
"- Images
Cohérence
quels peuvent être ces composants. G. Marions suggère sept catégories d'élé-
ments que nous reproduisons (cf figure 6-3).
L'analyse de la culture de l'entreprise doit ainsi permettre, au terme d'une
préenquête, de définir des valeurs clés qui restent cependant essentiellement
qualitatives. On ne peut pas, en effet, à partir de ce travail, hiérarchiser ou
comparer les valeurs retenues et encore moins les étudier par rapport à la
concurrence. Il est donc nécessaire de passer à une approche plus opéra-
tionnelle.
Nous avons introduit volontairement une distinction entre les deux catégo-
ries de valeurs, les valeurs humaines et les valeurs d'activité, dans la mesure
où leur poids relatif est différent suivant que l'on procède à une analyse
interne ou externe des valeurs perçues, ce qui confirme l'intérêt de la double
approche de la qualité de l'entreprise (qualité interne et qualité externe)
devant déboucher sur des « mix-images » aménagés en fonction des cibles.
5.G. Marion, Les images de l'entreprise, Éditions d'Organisation, 1989. Voir aussi: M. Thévenet, Audit
de la culture d'enlreprise, Éditions d'Organisation, 1986.
L'audit relationnel de l'entreprise 157
-3 -2 -1 o 2 3
Qualité
Service
Notoriété
Sécurité
Adaptabilité
Innovation
-3 -2
Qualité
Service
Notoriété
Sécurité
Adaptabilité
Innovation
6. W. A. Mindak, Fitting the semantic ditterential to the marketing problem, Journal of marketing, Avril
1961.
7. C. Camerer, A. Vepsalainen, The economic efticiency 01' COlpO rate culture, Strategie Management
journal, Vol. 9, 1988.
158 L'audit stratégique
-3 -2 -1 o 2 3
Firme A Firme B
Qualité
Service
Notoriété
Sécurité
Adaptabilité
Innovation
En dehors de la clientèle, qui ferait l'objet d'un traitement par une méthode
du type différenciation sémantique, on pourra généralement se contenter
d'une analyse qualitative conduite, par exemple, sous la forme d'entretiens.
On doit toutefois insister sur le rôle, éventuellement déterminant, de certains
groupes de prescripteurs qui peuvent ne pas être consommateurs, ou l'être
de façon non significative. Ainsi, lorsqu'une entreprise du secteur informa-
tique décide d'entretenir des relations privilégiées avec le milieu universi-
taire, le potentiel d'achats de ce milieu peut être faible, mais sa valeur
d'exemple risque en revanche d'être essentielle.
Il reste enfin qu'une entreprise qui consacre un budget important à sa com-
munication institutionnelle vers des publics non commerciaux ne peut le
faire sans une connaissance approfondie des opinions de ces cibles. Cela
suppose qu'il y ait un minimum de corrélation entre les connaissances que
l'on aura des cibles, l'ampleur des actions que l'on veut engager vis-à-vis
d'elles, et les budgets que l'on va leur attribuer. Ceci pose la question du
« mix-images » de l'entreprise.
• Le mix-images
Au terme des diagnostics internes et externes, on entend par cette expres-
sion:
~ le choix des cibles auxquelles s'adressera la communication de l'entre-
pnse;
~ l'identification des valeurs reconnues à priori par chaque cible;
~ le choix des valeurs à mettre en avant pour chacune d'elles;
~ l'intensité de la communication affectée à chaque cible (budget) ;
~ la détermination des supports de cette communication.
Le point 5 de cette liste relève plus particulièrement des outils (cf § 6.1.3).
On abordera ici les questions relatives aux cibles et aux valeurs diffusées
(composantes du mi x-images), et à la répartition des moyens entre ces cibles
(choix d'un mix réducteur ou d'un mix élargi). Le problème est résumé dans
la figure 6-8.
L'image voulue
Les désirs du '--
noyau stratégique
1 Mix- 1
1 images
L'image déposée
Les valeurs reconnues -
par les parties prenantes
Le point le plus important, sur lequel la littérature est d'une extrême dis-
crétion, réside dans la reconnaissance d'une pluralité de cibles auxquelles
correspondent des moyens eux-mêmes spécifiques. Il n'est donc pas possible
de parler d'un « mix-images » homogène. L'analyse des parties prenantes
conduit en effet à identifier, au moins, trois catégories particulières parmi
ces cibles, ce qu'illustre la figure 6-9.
• Service
.Aptltude à • Efficacité du
s'Impliquer portefeuille de
dans les produits/services
• Honnêteté problèmes
• Responsabilité du client
• SOUCI des hommes art ' • Respect des relations
• Sécurité de l ' / m P I O i: s~v. o'ir~faire
contractuelles
• Avantage • Aptitude au
concurrentiel partenariat
objectif
\
• Sensibilité aux mythes fondateurs • Confié.tnce
• Compétence générale
• Bonheur, humanisme
• Respect environnement
• Éthique
• Esthétique
Image diffusée
environnement élargi
Le choix des cibles doit être inscrit dans une perspective économique. Les
moyens à mettre en œuvre ont des implications financières importantes et
un arbitrage dans leur affectation aux trois sphères de diffusion sera toujours
nécessaire en vue d'optimiser les budgets. Une entreprise de taille moyenne
pourrait avoir intérêt à négliger son action sur l'environnement élargi pour
concentrer ses moyens sur l'interne et l'environnement commercial. Dans
tous les cas, les valeurs caractéristiques des zones d'intersection des sphères
seront logiquement privilégiées en raison de leur effet cumulatif.
L'audit relationnel de l'entreprise 161
Communication Publicité
interne et vécu relationnel
Référentiels
Identification
des images
voulues.
Identification
des images
déposées.
----. Indicateurs
- - . . Défaillances
--. Risques
Identification
des images
diffusées.
-.. ...
Causes
Recommandations
···
Plan stratégique, projet d'entreprise, charte pour la qualité, charte des cercles de qualité
Bilan social
~nalyses de perception (interne, externe) de l'entreprise
···
Etudes d'image, de notoriété spontanée et assistée
Schéma directeur de l'image, livre des normes
Archives de la publicité, des documents de relations publiques
·
··
Dossiers de présentation des produits, services
Journaux d'entreprise, publications des cercles de qualité
Dossiers du service consommateurs, dossiers réclamations clients, contentieux
3. Les sources formelles externes
· Presse générale, professionnelle
9. Une partie de ces sources est inspirée des" signes et symboles» décrits par M. Thévenet dans son
ouvrage Audit de la cUltUIE d'elltre{>rise. Éditions d'Organisation. O{>. cit.
168 L'audit stratégique
Absentéisme et maladie
Dans les trois modes de diffusion d'images que nous venons d'évoquer, il
s'agit tout autant de repérer des supports de l'information que d'apprécier
le degré de construction volontaire ou non qui leur est associé. Le traitement
ultérieur des dysfonctionnements ne pourra pas être envisagé dans la même
perspective suivant que ces messages sont voulus ou seulement émis natu-
rellement par la firme.
C. L'image élargie
Dans tous les cas, \' auditeur essaiera d'identifier le contenu essentiel des
messages adressés à l'environnement, leur fréquence, leur volume et leur
coût.
176 L'audit stratégique
RÉSULTATS
LEADERSHIP
OPÉRATIONNELS
FACTEURS RÉSULTATS
~.C-----------------------~.------.~~ ~.'---.----------------~~
MODELE EUROPEEN DE LA QUALITE TOTALE
1. Une large part de ce chapitre reprend des éléments d'une communication présentée à l'occasion de
la 4' Conférence internationale de management stratégique organisée à Paris du 2 au 4 mai 1995, sous
l'intitulé: ÉvaluatiolJ de la stratégie et Qualité Totale.
184 L'audit stratégique
7.1 Le référentiel
La prise en compte des processus dans l'analyse stratégique correspond à
une évolution récente au niveau des diagnostics qui a conduit à minimiser
la traditionnelle approche fonctionnelle au profit d'une analyse de type trans-
versal, et à constater qu'il y avait là un terrain d'amélioration considérable.
On décrira successivement la notion de processus et les problèmes soulevés
par l'identification des processus stratégiques.
• Définitions et typologies
On peut évoquer plusieurs définitions d'un processus.
La norme internationale ISO 8402 décrit le processus ou le procédé comme
un « ensemble de moyens ef d'activités liés qui transforment des éléments
entrants en éléments sortants» et le texte ajoute que « ces moyens peuvent
inclure le persollllel, les installations, les équipements, les techniques et les
méthodes2 ».
Selon P. Candau et C. Mayeur1 : «un processus est non seulement une
chaÎne de traitement d'activités, avec des intefjaces entre postes et dépar-
tements pouvant être mesurées, mais également une chaÎne de responsabi-
lités impliquant des actellrs et des compétences divers .. il a une jïnalité
client, des objectifs à atteindre ef des fonctions à assurer ». Cette définition
met l'accent sur l'aspect organisationnel du processus (chaîne de responsa-
bilité) et par conséquent sur des incidences structurelles. Par ailleurs, en
faisant référence à une possibilité de mesures, la définition illustre le prin-
cipe de contrôle du processus et accessoirement d'amélioration.
La figure 7-1 complète utilement cette définition en présentant le contenu
informationnel du processus et les voies d'amélioration qui en sont l'acces-
soire naturel.
• Enjeux et finalités
L'approche de l'évaluation stratégique par les processus s'inscrit incontes-
tablement dans la continuité des travaux de M. Porter et dans l'évolution
actuelle des démarches de la Qualité Totale. Du point de vue de la stratégie,
les enjeux sont tout à fait considérables.
Bien que cela ne corresponde pas au but poursuivi ici, il est clair que l'ana-
lyse des processus critiques peut constituer une base de renouveau du dia-
gnostic stratégique, en fournissant une trame systématique à des démarches
qui ont été longtemps empiriques. À cet égard, le « toyotisme », c'est-à-dire
une production sans stock, à flux continu tiré par le client, traduit un exem-
ple remarquable de processus stratégique transfonctionnel et donne en même
temps une idée de ce que peut apporter une généralisation de la démarche.
L'exemple du toyotisme invite à ne pas considérer les processus stratégiques
sous le seul angle de l'analyse interne de l'entreprise. Dans de très nombreux
cas, ces processus naissent en amont chez les différents fournisseurs et se
poursuivent en aval chez des intermédiaires ou même chez le client final.
L'isolement d'une partie de ces processus inter-entreprises priverait alors
6.Ph. Lorino. Le /louveau (,o/ltrûle de Rcstio/l par les processus. Qualité en mouvement. n" 3. octobre-
novembre 1991.
L'audit des processus stratégiques 187
L'évaluation d'une stratégie devient possible autrement que par une analyse
des moyens fonctionnels mis en œuvre (diagnostic interne classique). C'est
une remise en question radicale des modèles de diagnostic utilisés jusqu'à
présent qui entraînera, dans la majorité des cas, une révision profonde des
indicateurs de performance. Le client est replacé au premier rang des préoc-
cupations de l'entreprise et, surtout, l'ensemble des processus qui participent
à sa satisfaction est identifié, rendant possible leur amélioration et l' élimi-
nation des activités qui ne créent pas de valeur véritable 7 • Enfin, l'évaluation
de la stratégie est amenée à prendre en compte des processus jusque-là jugés
opérationnels et, par conséquent, délaissés dans l'analyse, ce qui va enrichir
considérablement son référentiels. La stratégie n'est plus seulement destinée
à conduire à des choix classiques comme la diversification, la différencia-
tion, ou le développement international, pour ne citer que quelques exem-
ples, mais aussi à proposer des axes de reformulation des processus à la fois
internes et externes de l'entreprise.
7. On notera que cette approche par les processus permet de réfuter un argument souvent employé.
suivant lequel ces démarches fondées sur la valeur privilégieraient les activités strictement productives
au détriment de fonctions que l'on pourrait qualifier de « service ». Mes excellents collègues. contrôleurs
de gestion, par exemple. trouveront ainsi leur vraie place dans la création de valeur et pourront se
réconcilier avec M. Porter. La transfonctionnalité permet au contraire de montrer comment une activité,
administrative. par exemple, concourt à la création de valeur dans le cadre d'un processus réaliste.
8. Les facteurs de «stratégie émergente» (Mintzberg) sont ainsi intégrés dans l'évaluation alors qu'ils
avaient toutes chances d'être ignorés dans une démarche fonctionnelle classique.
188 L'audit stratégique
Nous sommes ainsi placés dans les conditions les plus favorables pour la
réussite d'une opération de reengineering 9 •
Ce qui précède conduit naturellement à identifier les risques d'une absence
de prise en compte des processus dans l'évaluation des stratégies. L'éva-
luation strictement fonctionnelle ne permet effectivement pas de repérer les
dysfonctionnements transversaux et condamne à une « myopie stratégique»
grave. Surtout, elle ne permet pas de saisir toutes les causes d'une non-
réalisation des objectifs et tend à concentrer les efforts de correction sur les
fonctions el1es-mêmes, alors que, bien souvent, e11es ne peuvent pas apporter
de solutions adaptées. Au-delà du contrôle, c'est toute la réflexion stratégi-
que qui est pénalisée par la prise en compte d'un référentiel non satisfaisant
n'autorisant pas une appréciation correcte des forces et faiblesses. Enfin, la
vision fonctionnel1e conduit au maintien de structures elles-mêmes inadap-
tées qui amplifieront à leur tour les dysfonctionnements stratégiques.
9.G. Hall, J. Rosenthal, J. Wade, How (0 Irlilke reenl?ineerinl? relllly work, Harvard Business Review,
novembre-décembre 1993.
L'audit des processus stratégiques 189
Si, dans une optique d'audit, une sélection doit s'opérer par référence à des
dysfonctionnements enregistrés, il est utile, dans un premier temps, de
hiérarchiser l'importance des processus. Pour cela, on dispose de nombreux
critères parmi lesquels la présence d'interfaces «processus-client» consti-
tuera souvent un bon indicateur de criticité (cf figure 7-3).
NB: les exemples notés (*j sont présents dans l'énumération des processus critiques proposée par
l'EFQM.
3. Hiérarchisation Entretiens
Il est par ailleurs souhaitable de ne pas s'en tenir à la réalisation des seuls
objectifs et d'intégrer la description des buts stratégiques dans cette recher-
che des processus significatifs. Si l'entreprise dispose d'une base stratégique
détaillée, la réflexion pourra s'appuyer utilement sur la définition des buts
stratégiques exprimés - que Ph. Lorino appelle des facteurs clés de succès
(FCS). Ainsi, dans une stratégie orientée vers la Qualité Totale (but straté-
gique), des sous-objectifs (facteurs clés de succès) pourraient concerner les
délais de livraison, la qualité du service après-vente, l'assistance technique.
Le groupe en charge de la détermination des processus critiques aurait alors
intérêt à recenser les activités correspondant à ces objectifs et par consé-
quent, les processus pertinents. Parmi toutes ces activités, certaines sont sans
194 L'audit stratégique
effet sur l'objectif poursuivi, elles seront laissées de côté pour ne retenir
que les activités « effectives », c'est-à-dire agissantes. Ces dernières seraient
à leur tour hiérarchisées pour identifier les seules activités « critiques ».
Le modèle peut être affiné et il peut être souhaitable de renforcer la mise
en évidence de ce qui a trait à la fois au client et à l'implication de la
direction. C'est ce que font trois enseignants de la Harvard Business School,
en proposant une application particulièrement intéressante de la démarche
à l'évaluation d'un processus tertiaire: le cycle de gestion des commandes
CGC ((f figure 7_5)12.
Activités
Client Direction Étape du CGC Ventes Marke- Service Ingé- Achats Finance Opéra- Logis·
ting client nierie tlon5 tique
Le CGC (Cycle de Gestion de la Commande) concerne toutes les activités mais le chevauchement des
responsabilités et l'absence d'implication de la direction aboutissent à une confusion, à des retards et à
des réclamations de la part du client.
P : Rôle primordial; s : Rôle de soutien
12, B, Shapiro, v. Kastun Rangan et J. Sviokla, Trale: le parcours d'une cOllllllallde, Harvard-
L'Expansion, 1992.
L'audit des processus stratégiques 195
OUI Les processus critiques de l'organisation sont identifiés Maximum se donner les
NON -+ moyens d'une stratégie
.j.
orientée processus
Ces processus sont systématiquement gérés Moyen: mise en place d'un
OUI
.j. ... NON -+ tableau de bord « processus»
OUI les processus sont effectivement modifiés et évalués Minimum l'entreprise a les
.j. moyens d"une efficacité
NON -+
stratégique
Boucle d'amélioration
Les processus critiques sont définis Les processus critiques ne sont pas définis
Suivant quelle méthode ou démarche et, Mais leur impact sur la stratégie est reconnu
notamment, comment l'accent est-il mis sur la
Leur prise en compte semble pouvoir être
transfonctionnalité?
facilement acceptée
Les interfaces sont-elles identifiées et leur
Dans tous les cas, des preuves de leur
rôle est-il mis en évidence?
importance devront être apportées
Les processus font-ils l'objet d'une désignation pour convaincre les décideurs
de responsables de l'amélioration (propriétaires
de processus) ?
Des méthodes d'amélioration (continues ou Mais l'impact de ces mesures est accepté
ponctuelles) sont prévues et justifiées et elles peuvent donc être rapidement mises en
Tout un système d'information converge vers œuvre
des objectifs d'amélioration Dans tous les cas, des preuves de leur
importance devront être apportées pour
convaincre les décideurs
Des formes collectives (éventuellement Des modèles voisins existent dans l'organisation
inspirées des méthodes de la qualité) ont été et pourraient être utilisés
mises en œuvre: cercles, groupes de réflexion L'impact d'une telle dynamique est reconnu et
Les structures ont été adaptées à ces nouveaux une décision favorable de mise en place peut
besoins étre raisonnablement envisagée
Les changements sont-ils organisés de façon structurée (cl figure 7-10) ')
Les changements sont mis en œuvre Les changements sont mis en œuvre
de façon structurée de façon" aléatoire»
Une attitude globale à l'égard des processus a été identifiée, des dysfonc-
tionnements sont apparus et l'on peut maintenant en rechercher les causes,
Cette recherche des causes constitue un élément essentiel de la démarche,
l'auditeur devant par ai lieurs se souvenir qu'il existe toujours un risque de
s'en tenir aux causes apparentes sans remonter jusqu'aux causes réelles.
198 L'audit stratégique
7.2.4 Application
La méthodologie décrite ici a fait notamment l'objet d'une expérimentation
dans le cas d'une société de gros opérant dans le domaine de biens de
consommation non alimentaires, avec un réseau de représentants ayant le
statut de VRP. La description proposée ne sera pas exhaustive, elle mettra
essentiellement l'accent sur la chronologie de la démarche, sur les problèmes
rencontrés et sur les implications pratiques.
Une approche préliminaire conduite avec les dirigeants a permis d'identifier
les objectifs stratégiques fixés. Pour cette entreprise en crise, l'intensité con-
currentielle de la branche n'autorisait pas un objectif d'amélioration de la
marge sur l'ensemble de la collection proposée et l'on avait choisi de pri-
vilégier deux axes complémentaires. Globalement, la rotation des actifs et
donc principalement, dans cette activité, celle des stocks, constituait l'ob-
jectif central. Accessoirement, le développement de produits sous marque
de distributeur (private label) autorisait une politique de relèvement de
marge sur une partie des collections.
L'analyse des résultats conduisait à considérer que cette dernière activité
remplissait la mission assignée mais qu'aucune réduction sensible des stocks
de produits traditionnels n'apparaissait. Cette évolution fut considérée par
l'ensemble des cadres de direction comme le dysfonctionnement majeur du
programme stratégique.
Un groupe de projet fut mis en place pour analyser l'ensemble des processus
ayant une influence sur le niveau de stockage. Sa gestion fut confiée au
responsable de l'entrepôt de stockage qui devait rendre compte directement
au noyau stratégique. Le choix de cet animateur tenait à son rôle jugé pré-
pondérant dans les processus impliqués, ainsi qu'à sa personnalité et à la
qualité de ses relations avec l'ensemble du personnel.
La gestion des commandes auprès des fabricants européens et asiatiques fit
l'objet d'une analyse détaillée, de même que les achats à des super-grossistes
européens. Dans les deux cas, il n'a pas semblé possible d'améliorer sen-
siblement les performances pour des raisons essentiellement externes. La
crise qui affecte le marché depuis plusieurs années conduit en effet les fa-
bricants et les intermédiaires à réduire leurs stocks de façon importante et
à renouveler en permanence leurs collections pour multiplier les mises en
place. Dans ce contexte, l'entreprise ne peut pratiquement qu'envisager un
alignement.
L'analyse des réclamations de la clientèle et des observations de la force
de vente va alors permettre l'identification de dysfonctionnements internes,
L'audit des processus stratégiques 201
Des entretiens avec les VRP permettent d'isoler deux griefs majeurs à
l'égard de la société:
- de nombreux produits disponibles au siège ne sont pas dans leur collec-
tion;
- les changements de prix leur parviennent avec retard et provoquent des
différences de prix facturé dont les clients se plaignent.
Facteurs clés
de succès
Activités basiques Sous-actlvités Nature des défaillances W~~:.:...+--~~~::!~--+~~~
Client Client
externe interne
=
Notes: L'identification des fonctions concernées est simplifiée. On utilisera les abréviations suivantes: (OF) =
finance dont Ad C. administration
comptable; (DC) = commercial, dont Ad. V. = administration des ventes, FV = force de vente, et stock = gestion des stocks et de l'entrepôt;
(SAY) = service après-vente.
On a noté P les activités principales et s, les activités de soutien
services après-vente (cf figure 7-12). C'est sur ce tableau que seront posi-
tionnées les sources de dysfonctionnement. S'il y a lieu, des sous-processus
pourront être identifiés et décrits.
La figure 7-12 appelle immédiatement plusieurs observations importantes.
On observera tout d'abord que l'essentiel des activités qui jalonnent ce pro-
cessus et participent ainsi à la réalisation d'un objectif stratégique est assuré
par un personnel d'exécution ou, tout au plus, de niveau maîtrise. C'est le
cas des activités placées sous \' autorité du responsable du SAV, du respon-
sable d'entrepôt ou de l'administration des ventes. On a ici une illustration
de la responsabilité des opérationnels dans un processus critique pour l'or-
ganisation, dont on devra s'assurer qu'il est correctement maîtrisé par la
hiérarchie, notamment par le biais d'un système de mesure d'efficacité.
L'observation du processus et de ses points critiques permettra déjà d'im-
pliquer plus complètement la direction commerciale, ne serait-ce qu'au ni-
veau du suivi.
La figure 7-12 devrait être complétée par une description du système d'in-
formation qui accompagne les activités. Il est déjà frappant de constater
qu'au regard des insatisfactions de la cl ientèle, aucun système d'information
sur les ruptures de stock prévisibles - ou effectives - n'est mis en place,
afin que les produits concernés soient retirés de la vente à temps. D'une
façon générale, il semble qu'il y ait peu d'éléments d'information en dehors
des bons de livraison qui accompagnent l'échantillonnage.
L'observation détaillée des dysfonctionnements montrera un certain nombre
d'activités critiques au regard de la défaillance stratégique «rotation des
stocks ».
L'activité « adresser le bon de commande» est généralement différée en
fin de semaine par le représentant qui expédie les bons en une seule fois,
le samedi ou le lundi suivant. Au moment de la réception au siège, ces
bons ont ainsi, en moyenne, cinq à sept jours d'ancienneté.
- Le traitement du courrier demande en moyenne une journée, la direction
commerciale souhaitant parcourir toutes les commandes pour s'informer
de l'état du marché.
Le traitement du bon de commande commence ainsi au huitième jour et
donne lieu à établissement d'un bon de livraison et d'un état des reliquats.
Une copie de ce bon est adressée à la direction commerciale qui peut
décider de différer une livraison si celle-ci est trop incomplète.
Dans la meilleure des hypothèses, la livraison est autorisée au neuvième
jour et le bon est transféré à l'administration comptable pour facturation.
On constate alors que, compte tenu des congés hebdomadaires, la factu-
204 L'audit stratégique
~ -1 ~
Gestion du Gestion du
H personnel personnel
1 1
1 1
---1,vieIntégration
~
dans la, ~
ri Ressources
de la collectivité
... FACTEURS
...
MODÈLE EUROPÉEN DE LA QUALITÉ TOTALE
RÉSULTATS
1. On exclura notamment des questions telles que l'audit du syst~me d'information relatif aux ressources
humaines. de b conformité légale. des effectifs. des frais de personne!. des compétences. de la formation.
etc. (ct. Candau. Al/dil d/'s associaliofls. Éditions d·Organisation. l'NO).
2. EFQM. Le l'IIX t'l/WI'Ùfl de la qualité. Brochure d'information. 1')97.
L'audit des facteurs clés 209
• Conduite de l'audit
Les révélateurs de dysfonctionnement sont présumés s'être manifestés au
cours de l'observation de la qualité de l'entreprise. On se propose désormais
d'évaluer la composante leadership dans cette performance. On admettra
que l'auditeur puisse concentrer son attention sur cinq types d'interrogations
caractéristiques du phénomène (A) tout en reconnaissant que la satisfaction
du personnel en est une mesure incontournable (B).
210 L'audit stratégique
Critères Indicateurs
1. Leadership et comportement visible de l'équipe dirigeante
Place de cet aspect du management dans les messages Fréquence des contacts directs
officiels de l'équipe dirigeante de la direction et
Présence de l'équipe dirigeante sur les sites de l'entreprise de l'encadrement avec
Présence de l'équipe dirigeante, participation à le personnel, les clients, les
des manifestations périodiques du type convention qualité fournisseurs
Taux de participation à
des manifestations
caractéristiques des valeurs
clés
2. Leadership et comportement perçu de l'équipe dirigeante
Entretiens avec les personnels concernés. Mise en évidence des Crédit accordé par le personnel
évolutions de comportement aux déclarations et écrits
relatifs aux thèmes clés
de la stratégie
3. Leadership et communication
Présence dans un projet d'entreprise, affirmation dans le plan Mesures d'impact des supports
stratégique, dans une charte Qualité Totale de communication
Existence de journaux d'entreprise orientés leadership, mis en œuvre.
supports des cercles de qualité ou de progrès
Critères Indicateurs
1. Actions en faveur de l'amélioration
Présence de programmes et systèmes favorisant l'amélioration Évolution quantitative des
sur une base individuelle (suggestions) ou collective (cercles, groupes, des projets traités,
groupes de progrès, etc.) des propositions retenues ...
2. Formation
Présence et traitement privilégié des valeurs clés dans Pourcentage des heures
les programmes de formation (niveaux concernés, pourcentage de formation liées aux valeurs
du personnel concerné ... ) clés
Critères 1 Indicateurs
1. Intéressement pécuniaire
Place des valeurs clés dans la rémunération et dans ses critères 1 Pourcentage des primes lié aux
d'évolution (fiche de notation, par exemple) valeurs clés
2. Intéressement non pécuniaire
Existence et degré de généralisation d'un système de distinction 1 Pourcentage d'employés "re-
connus )
Critères Indicateurs
Leadership et relations amont & aval
Place des rencontres verticales (clients & fournisseurs) Fréquence et nature
et horizontales (partenaires) dans les stratégies des rencontres fournisseurs
Type de relations (partenariat équilibré ou non) et perception de et/ou clients
la relation par le fournisseur Nombre d'actions collectives
Existence d'actions communes en relation avec les valeurs clés (évolution)
Critères Indicateurs
1. Implication dans des organisations professionnelles
Adhésion à des organisations correspondant à la culture Nombre d'adhésions
privilégiée par l'entreprise (Qualité Totale par exemple) Fréquence et nature
de la participation
aux manifestations (passive
ou active)
2. Implication dans la société
Assistance à la collectivité (domaines de l'hygiène, de la sécurité, Niveaux de performance face
de la protection de l'environnement), implication de l'entreprise aux exigences réglementaires,
dans les actions de conversion liées aux problèmes d'emploi, légales et éthiques.
participation à des vies associatives Temps alloué à des employés
pour participer
Sommes allouées
à des fondations diverses
Plus généralement, s'agissant de son rôle, il est certain que celui-ci est for-
tement variable d'une entreprise à l'autre sous l'influence de nombreux fac-
teurs d'environnement tant internes (niveau de formation des personnels,
qualifications exigées par les tâches, technologies mises en œuvre, style de
management, etc.) qu'externes (environnement social, économique, techno-
logique, concurrence, modèles de gestion dominants, etc.). Il est ainsi tentant
de considérer que toute entreprise oscille entre deux modèles de manage-
ment (cf figure 8-6).
Trois hypothèses peuvent alors être retenues. Dans un premier cas, la pro-
blématique du leadership peut être considérée comme hors de question (A).
Dans un second cas, le choix d'un modèle ne s'impose pas à priori (B).
Dans une troisième hypothèse, l'entreprise gère une activité qui implique
un minimum de leadership (C).
A. Le leadership exclu
Dans une entreprise relevant de la première catégorie (type bureaucratique),
une référence sérieuse à la notion de leadership est à priori exclue. Elle
serait totalement incomprise par les personnels, génératrice de désordre et
probablement de refus de tous risques. Cette situation n'est pas nécessaire-
ment négative: tout va dépendre en pratique du type d'activité de l'orga-
nisation et des méthodes de la concurrence.
214 L'audit stratégique
• Le référentiel
Il est évident que toute une fraction de l'analyse stratégique moderne s' ap-
puie sur l'implication des individus. De même, un courant essentiel de la
démarche qualité repose sur cette hypothèse d'un rôle décisif des ressources
humaines .
• La conduite de l'audit
Le référentiel du prix européen de la qualité conduit à privilégier cinq cri-
tères relatifs à la gestion des ressources humaines:
planification et amélioration des ressources humaines;
- gestion des compétences par le recrutement, la formation et l'avance-
ment;
évaluation du personnel et des performances;
participation à \' amélioration permanente;
- modalités du système de communication.
1. Construire Repérer et conforter les facteurs clés de succès Absence totale de vision. Mauvaise évaluation
une (( vision» des facteurs clés de succès
Identifier les valeurs de référence de l'entreprise Sous-estimation de leur rôle notamment
en interne. Absence de consensus sur ces
valeurs de référence
Communiquer la vision en interne et en externe Absence de communication interne et/ou externe
(sur ce thème)
2. Fixer des buts Préciser qualitativement l'avenir souhaité Absence totale de référence aux buts
9. Évaluer les Élaborer un tableau de bord stratégique efficace Indicateurs essentiellement fonctionnels
résultats .. Déployer le tableau de bord aux différents Absence d'analyse aux différents niveaux en vue
niveaux (hiérarchiques et transversaux) d'une action corrective globale
C'est ce processus particulier qui va être abordé ici et l'accent sera donc
mis sur son mode de gestion, plutôt que sur la pertinence des décisions
stratégiques, lesquelles ont fait l'objet du chapitre 4.
• Conduite de l'audit
5. Le processus stratégique auquel il est fait référence ici ne doit pas être confondu avec les processus
stratégiques (dans leur contenu et leurs effets) qui ont fait l'objet du chapitre 7. On s'interroge ici sur
le processus d'élaboration, de mise en œuvre et d'évaluation de la stratégie.
6. StrateRiIl', 2' édition, InterÉditions.
L'audit des facteurs clés 221
stratégie, puis celles de son déploiement. Les figures 8-10 et 8-11 reprennent
quelques axes de cette analyse.
• Mise en œuvre effective des buts et objectifs Observation de ces différents points au cours
• Cohérence entre les segments et dans le ternps de la mise en œuvre de la stratégie. Entretiens
• Cohérence avec les facteurs clés de succès
• Objectifs des employés rattachés à la réalisation
stratégique
2. Communication des principales orientations
Degré de généralisation dans la communication Modalités de la communication et niveaux
aux employés hiérarchiques concernés. Entretiens
3. Communication périodique des résultats
Fréquence et contenu de la communication Modalités de la communication et niveaux
stratégique hiérarchiques concernés. Entretiens
tion stratégique. Dans une telle hypothèse, la stratégie devient le reflet hy-
pertrophié d'une fonction dominante, ce qui est en contradiction avec ses
caractéristiques normalement admises. La fonction « recherche et dévelop-
pement» bénéficie souvent de ce statut dans les entreprises placées à la
pointe de la technologie, mais ce peut aussi être, par exemple, le marketing
ou la production, pour ne citer que ces hypothèses.
Peu importe d'ailleurs la fonction bénéficiaire: dès lors que l'on admet la
transversalité de la stratégie, la situation est naturellement préjudiciable. Elle
est enfin extrêmement fréquente dans la pratique, y compris dans les grandes
entreprises. Elle tend ainsi à pérenniser des dominantes culturelles qui fi-
niront immanquablement par générer une dangereuse «myopie» dont
P. Drucker s'est fait l'écho en d'autres temps.
Plus que toute autre activité, la stratégie repose sur l'information, celle-ci
permettant d'établir les diagnostics internes et externes. C'est même l'un des
reproches que lui font les responsables de PME, en affirmant que la gestion
de cette information représente un coût qu'elles ne peuvent pas supporter.
Il faut alors préciser quelles sont les composantes structurelles qui vont faire
l'objet de cet audit. Celles qui nous intéressent ici sont caractérisées par
leur contribution à la stratégie et principalement à travers trois orientations:
il s'agit de s'assurer successivement de l'adéquation des structures à la
stratégie (A) ;
- de vérifier, s'il y a lieu, l'existence d'une structure compatible avec la
gestion de processus transfonctionnels (B) ;
de mesurer \' aptitude de la structure à favoriser une nécessaire implication
des hommes dans une stratégie participative, intégrant par exemple la
notion de Qualité Totale (C).
Très globalement, la situation peut être en partie illustrée par la figure 8-12.
Système
hiérarchique
d'information
et de
contrôle
Une structure croisée. Les structures matricielles ' semblent apporter une ré-
ponse lorsque les processus en cause sont du type projets (cas de l'industrie
automobile par exemple). La pratique peut cependant être profondément
différente dans le cas d'entreprises où des processus stratégiques essentiels
sont indépendants du produit ou du service proposé tout en étant répétitifs.
La pratique conduira à élaborer des structures souples s'inspirant du mode
matriciel. Elle sera grandement facilitée par l'existence d'un mode de rai-
sonnement qui privilégie les processus, celui-ci conduisant naturellement à
une approche transversale du management et de la stratégie.
Une structure équilibrée. Dans tous les cas, la situation que nous venons
de décrire et, de ce fait, l'existence d'une double hiérarchie plus ou moins
affirmée, pose un problème d'équilibre difficile à résoudre. C'est ainsi qu'il
a fallu de nombreuses années chez Renault pour affirmer la position des
responsables de projets face aux responsables fonctionnels 9 .
9.J-C Moi sdon . 13. Weil. Grill/l'es IIw/S\'erSill/X et morditllltion techniql/e dans la concel'tion d'un
nouveau \·éhicl/le. Revue française de gestion Indu strielle . N" 2. 1992.
228 L'audit stratégique
Les moyens pour y parvenir sont divers: on peut assurer leur nomination
au niveau de la direction générale, leur donner une autorité budgétaire, les
associer dans la notation annuelle des personnels, leur conférer une autorité
de pilotage et de contrôle notamment au niveau des interfaces fonctionnelles
et la liste n'est bien entendu pas exhaustive.
....
La stratégie
//
Enca drement intermédiaire
....
//
Maîtrise
Opérateurs ....
// Le progrès
// Permanent
Cette illustration attribue aux opérateurs à la fois un rôle décisif dans une
contribution au progrès permanent et un apport réel au domaine de la stra-
tégie. Seul un aménagement de l'organisation (gestion des processus) et de
la structure permettra d'atteindre ce résultat.
L'auditeur aura ainsi à apprécier les éléments de l'organisation et des struc-
tures dans la perspective d'une contribution au progrès en général et à la
stratégie.
• Conduite de l'audit
Critères Défaillances
Sources
d'efficacité associées Prédiagnostic des causes
d'information
de la structure et indicateurs
Implication Implication
dans un cadre hiérarchique hors hiérarchie
On peut discuter ce choix qui, dans tous les cas, devra être adapté aux
situations particulières de chaque entreprise. II faut enfin préciser que la
gestion de ces ressources doit être entendue sous l'angle de son aptitude à
soutenir la stratégie de \' organisation.
• Conduite de l'audit
On est ici dans un domaine classique qui peut être articulé autour de quatre
axes:
la maîtrise des stratégies et pratiques financières,
- la maîtrise des paramètres financiers (et amélioration),
- la maîtrise des décisions d'investissement,
- la maîtrise des coûts.
L'audit des facteurs clés 235
Aucune stratégie n'est concevable sans une maîtrise des coûts. L'analyse
de la qualité du produit puis celle des processus clés ont nécessairement
introduit cette référence. Ce sera ici l'occasion de vérifier l'efficacité du
recours à des outils comme le coût d'obtention de la qualité. Ce dernier
permettra en particulier de planifier des démarches d'amélioration dans un
meilleur contexte d'anticipation des performances.
236 L'audit stratégique
• Conduite de l'audit
La description, même succincte, du rdérentiel montre à quel point cet aspect
de l'audit stratégique peut être vaste. On se bornera à en évoquer quelques
aspects particulièrement significatifs ((f figure 8-16).
On vérifiera tout d'abord l'existence même d'une politique de l'information
au sein de l'organisation et ]' on constatera fréquemment que le système
d'information disponible n'est rien d'autre que l'addition des systèmes pro-
pres à chaque fonction avec les effets d'incohérence que l'on imagine. L'au-
diteur devra alors apprécier les risques réels de cette situation tout en sachant
que préconiser une reconstruction du système d'information pourrait dépas-
ser le cadre de sa mission (ampleur, délai, coût et risques).
238 L'audit stratégique
À plus long terme, une remise en question plus globale pourrait être envi-
sageable. Il faut toutefois en signaler la di fficulté : l'efficacité des techno-
logies de l'information suppose que, dans un premier temps, les processus
auxquels elles vont s'appliquer aient été révisés en fonction des capacités
spécifiques de ces méthodes. En d'autres termes, il ne saurait être question
de greffer le système d'information sur une organisation inchangée au risque
de voir l'efficacité globale du système se dégrader ll . De ce point de vue,
les technologies de l' information entrent bien dans un contexte stratégique
avec les précautions qui en résultent naturellement.
Les ressources matérielles recouvrent l'ensemble des facteurs dont l' entre-
prise peut disposer, étant entendu que dans une perspective d'audit straté-
gique, seuls ceux générateurs d'avantage compétitif seront pris en compte.
De même, des composantes relationnelles associées à ces ressources pour-
ront aussi être retenues sous cette rubrique (relation client/fournisseur).
Il. On lira notamll1ent ,ur cc point: T. H. Davenport. Process Illl/or(}l/o/l Ret'I/gil/eeril/g lI'ork Ihrol/gh
intiml/lIlioll lee/m%gv. Harvard Business School Press. 1yen.
240 L'audit stratégique
• Le référentiel
Dans l'analyse qu'en propose l'EFQM, ces ressources matérielles recouvrent
les flux de matières associés au processus de production de l'entreprise et
les moyens techniques mis en œuvre pour assurer ce processus y compris
les relations qui s'établissent avec les fournisseurs en interne et qui carac-
térisent la stratégie poursuivie (gestion des flux, par exemple). On notera
qu'il y a de fortes chances pour que ces points aient été abordés à l'occasion
du traitement des processus clés.
• Conduite de l'audit
Une grande partie des informations recherchées par l'auditeur tourne autour
des fonctions achat, production, stocks et investissement. L'audit pourra re-
prendre le schéma adopté pour la présentation du référentiel et ses grandes
lignes seront résumées sous la forme de tableaux.
Il s'agit de recueillir les informations systématiques sur l'outil (cf figure 8-19).
On s'est volontairement tenu ici aux thèmes abordés dans le cadre du prix
européen. Ces observations sont évidemment adaptables aux activités de
services .
• Le référentiel
Trois questions seront donc plus particulièrement développées.
12. Boston Consullmg Group. Expérience et stratégie. Th~ Boston Consulting Group. Ine. 1971.
244 L'audit stratégique
• Conduite de l'audit
L'audit portera donc sur les trois points que nous venons de décrire.
L'audit des facteurs clés 245
Objet Indicateurs
Existence d'un processus Nombre de brevets déposés, nombre de publications dans des
de suivi de ces technologies revues spécialisées, nombre de projets de produits nouveaux
et de leur évolution. étudiés, nombre de projets de produits nouveaux soumis à
l'autorité compétente
Existence d'une revue Existence d'un" comité technologie" en charge de faire un bilan
périodique des projets périodique de la recherche
technologiques au niveau
de la direction
Existence d'un processus de Prise en compte de l'innovation technologique dans les carrières
suivi de formation à la veille (avantages pécuniaires ou non, promotions).
technologique et aux nouvelles Indicateurs de mesures d'investissement en formation continue
technologies technologique
Indicateurs de mesure des participations à des rencontres
à contenu technologique
Perception de cette gestion des compétences par les personnels
intéressés (entretiens)
Rare dans les années 70, la littérature relative à la stratégie d'entreprise est
aujourd'hui particulièrement abondante à un moment où, de façon para-
doxale, certains n'hésitent pas à parler de crise à son propos. Il en va bien
différemment dans les domaines du contrôle et de l'audit de cette stratégie
qui sont pourtant inséparables de celui de la formulation. Là, c'est la rareté
qui aujourd'hui encore l'emporte, même si cette situation est peut-être en
train de se modifier.
Il est vrai que la notion d'audit reste floue pour beaucoup de gestionnaires
dès lors que l'on s'éloigne des domaines traditionnels d'application de cette
méthodologie. Beaucoup de responsables ont le plus grand mal à distinguer
entre une action de conseil classique, une démarche de contrôle de gestion
ou une mission d'audit.
Notre objectif était déjà de clarifier une fois de plus ces différentes appro-
ches avant de se consacrer plus spécifiquement à celle de l'auditeur. Méfions
nous malgré tout du dogmatisme: l'auditeur est là pour résoudre un objectif
qui est de s'assurer, dans le cas présent, que la stratégie d'une organisation
est sous contrôle et c'est cette finalité qui doit nous guider tout en carac-
térisant l'importance de la mission.
On admettra sans peine que notre démarche était ambitieuse et donc néces-
sairement critiquable: la multiplicité des approches de la stratégie condam-
nait naturellement à une vision partielle de la méthodologie d'audit pouvant
248 L'audit stratégique