Le manioc, plante d'origine américaine, possède naturellement le plus grand nombre de
déprédateurs sur ce continent. Dans l'ancien monde, ils sont relativement peu nombreux, quelques-uns polyphages, et n'entraînent pas de dommages économiques nécessitant des interventions chimiques. Le manioc, plante rustique, est capable de limiter les dégâts des insectes, car il peut régénérer rapidement tiges et feuilles et ses tubercules sont peu appétants pour la plupart des ravageurs. Foreurs de tiges C'est en Amérique qu'on recense ces espèces: Diptères du genre Anastrepha qui, à l'état larvaire creusent des galeries à l'intérieur de la tige. Les dommages sont accentués par l'introduction d'une bactérie pathogène du genre Erwinia qui peut causer la mort de la tige; quelques coléoptères de la famille des curculionides ( Cœlosternus) et de cérambycides ( Lagochirus) creusent également des galeries dans les tiges et peuvent en provoquer la cassure. Défoliateurs Sur le continent américain, un lépidoptère sphingide Erinnys ello paraît être le plus dommageable par ses chenilles défoliatrices. dans le monde tropical, les espèces cosmopolites des genres Spodoptera, Agrostis, Prodenia sont relativement peu à craindre. Signalons enfin que des fourmis coupe-feuilles localement appelées fourmis-manioc peuvent aux Antilles et sur le continent américain faire des dégâts significatifs dans les cultures. Piqueurs et suceurs C'est finalement dans ce groupe d'insectes qu'il faut rechercher les ravageurs les plus dommageables, non par leurs dégâts directs mais par leur transmission de maladies à virus. Bemisia manihotis communément appelée mouche blanche du manioc est un petit aleurode de 2 mm de longueur, les ailes des adultes sont recouvertes d'une cire blanche responsable de l'aspect de ces minuscules insectes. Leur reconnaissance par les agriculteurs ne soulève donc aucun problème. Les larves par contre sont pourvues d'une carapace rigide, cireuse, brune et sont fixées à la face inférieure des feuilles. Elles sécrètent un miellat source de possibles fumagines. Cependant, l'intérêt qu'on porte à ces mouches blanches provient de la transmission de la mosaïque, maladie virale bien reconnaissable, elle aussi, par la présence de taches jaunâtres, bariolées sur les feuilles. A un stade plus avancé, le feuillage est rabougri, présente des crispations et des enroulements du limbe et pour finir des nécroses de tissus. Le pourcentage des pertes est difficile à chiffrer d'autant que les plantes réagissent différemment. Depuis longtemps, les paysans connaissent des cultivars tolérants ou peu sensibles à la mosaïque. Les travaux des stations de recherches ont permis l'élargissement de la gamme des variétés résistantes et l'utilisation de boutures saines est une parade très efficace contre cette virose. 2.8.1 - Phenacoccus manihoti Cette cochenille, d'introduction assez récente en Afrique a provoqué une certaine émotion au vu des dégâts spectaculaires qu'elle pouvait entraîner en saison sèche. C'est une cochenille farineuse, peu ou pas mobile, grégaire, de multiplication très rapide et strictement inféodée au manioc, elle envahit les feuilles à leur face inférieure et les extrémités tendres et séveuses; les tiges attaquées se dessèchent et les nouvelles pousses émises par la plante sont à leur tour colonisées, elles se rabougrissent, noircissent et le manioc s'épuise rapidement dans cette course de vitesse. Il semble cependant que dans les années récentes une certaine adaptation ou un équilibre tende à s'établir soit par l'entrée en action de parasitoïdes locaux, soit par développement d'une tolérance. Quoi qu'il en soit, ces deux voies sont étudiées par les stations de recherches: évaluation d'une gamme de sensibilité, introduction d'espèces entomophages permettent de contrôler la prolifération de la cochenille.