Vous êtes sur la page 1sur 9

Chapitre 3

Le mouvement brownien

On introduit l’objet fondamental du cours, à savoir le mouvement brownien, et étudie ses


propriétés élémentaires.

1. Historique

L’expression “mouvement brownien” provient de l’observation d’un mouvement irrégulier


des grains de pollen à la surface d’eau, par le botaniste écossais Robert Brown en 1828.
Bachelier (1900) et Einstein (1905) ont quantitativement étudié ce mouvement irrégulier, et
c’est Wiener qui a établi en 1923 la modélisation mathématique du mouvement brownien.
Paul Lévy (1939, 1948) a effectué des études approfondies du mouvement brownien.

2. Le mouvement brownien
On se met dans un espace de probabilité (Ω, F , P).

Définition 2.1. Une famille B = (Bt , t ≥ 0) de variables aléatoires réelles est un mouve-
ment brownien si:
(i) Presque sûrement, la fonction t "→ Bt (ω) est continue sur R+ .
(ii) Pour tout n ≥ 2, et tous 0 =: t0 ≤ t1 ≤ t2 ≤ · · · ≤ tn , les variables aléatoires
Bt1 − Bt0 , Bt2 − Bt1 , · · · , Btn − Btn−1 sont indépendantes.
(iii) Pour tous t ≥ s ≥ 0, Bt − Bs suit la loi gaussienne N (0, σ 2(t − s)).

Remarque. (a) Un mouvement brownien est dit standard si

B0 = 0 p.s., σ = 1.

17
18 Chapitre 3. Le mouvement brownien

Durant tout le cours, lorsque l’on parle du mouvement brownien sans autre précision, il
s’agira du mouvement brownien standard.
(b) Pour tout réel T > 0, on appelle un mouvement brownien sur [0, T ] toute famille de
variables aléatoires vérifiant les conditions de la Définition 2.1 pour les indices dans [0, T ].
(c) On dira que le mouvement brownien est à accroissements indépendants (propriété
(ii)) et stationnaires (propriété (iii)). !

Théorème 2.2. Soit B un mouvement brownien. Pour tout n ≥ 2, et tous 0 =: t0 ≤ t1 ≤


t2 ≤ · · · ≤ tn , (Bt1 , Bt2 , · · · , Btn ) est un vecteur aléatoire gaussien, c’est-à-dire que, pour
!n
tout (a1 , a2 , · · · , an ) ∈ Rn , k=1 ak Btk est une variable gaussienne. [On dira qu’il s’agit
d’un processus gaussien.]

Preuve. Par définition, Bt1 , Bt2 − Bt1 , · · · , Btn − Btn−1 sont des variables gaussiennes
!
indépendantes. Donc pour tout (b1 , b2 , · · · , bn ) ∈ Rn , nk=1 bk (Btk − Btk−1 ) (avec t0 := 0) est
! !
une variable gaussienne. Il suffit alors de remarquer que nk=1 ak Btk = nk=1 bk (Btk − Btk−1 )
!
si l’on prend bk := nj=k aj , 1 ≤ k ≤ n. !

Théorème 2.3. Soit B un mouvement brownien. Les processus suivants sont aussi des
mouvements browniens.
(i) Xt = −Bt . (symétrie)
1
(ii) a > 0 fixé, Xt = a1/2 Bat . (scaling)
(iii) T > 0 fixé, Xt = BT − BT −t , t ∈ [0, T ]. (retournement du temps)
(iv) Xt := t B1/t , t > 0, X0 := 0. (inversion du temps)

Preuve. Exercice aux TD. !

Exemple. Soit X = (Xt , t ≥ 0) un processus tel que p.s., la fonction t "→ Xt (ω) est
continue, et que pour tout n et tous 0 ≤ t1 < · · · < tn , les vecteurs aléatoires (Xt1 , · · · , Xtn )
et (Bt1 , · · · , Btn ) ont la même loi. Alors X est un mouvement brownien.
En particulier, si X est un processus gaussien centré de trajectoires1 p.s. continues et de
covariance E(Xt Xs ) = s ∧ t, alors X est un mouvement brownien. (Exercice à domicile.) !

Exemple (Pont brownien). Soit B un mouvement brownien, et soit bt = Bt − tB1 ,


t ∈ [0, 1]. Il s’agit d’un processus gaussien centré de covariance (s ∧ t) − st. On appelle b un
pont brownien (standard).
1
Trajectoires = fonctions aléatoires t "→ Xt .
§3 Propriété de Markov 19

Le processus (bt , t ∈ [0, 1]) est indépendant de la variable aléatoire B1 .


Si b est un pont brownien, alors (b1−t , t ∈ [0, 1]) est aussi un pont brownien.
Si b est un pont brownien, alors Bt = (1 + t)bt/(1+t) , t ≥ 0, est un mouvement brownien.
Notons que bt = (1 − t)Bt/(1−t) . !

On termine ce paragraphe avec un résultat général, dû à Kolmogorov, sur les trajectoires
des processus aléatoires.

Théorème 2.4. (Critère de Kolmogorov). Soit (Xt , t ≥ 0) un processus aléatoire à


valeurs dans R. Supposons qu’il existe des réels strictement positifs p, ε et C tels que

E(|Xs − Xt |p ) ≤ C |t − s|1+ε , ∀ s, t ≥ 0.

Alors p.s. les trajectoires sont localement höldériennes d’exposant α, pour tout α ∈ ]0, pε [ :
c’est-à-dire que pour tout T > 0 et tout α ∈ ]0, pε [ , il existe Cα (T, ω) tel que

|Xs (ω) − Xt (ω)| ≤ Cα (T, ω) |t − s|α , ∀ s, t ∈ [0, T ] .

[Strictement parlant, pour que le résultat du théorème soit valable, il faut éventuellement
“modifier” le processus, c’est-à-dire que pour chaque t ≥ 0, remplacer Xt par une variable
aléatoire qui est p.s. identique à Xt .]

Théorème 2.5. Soit B = (Bt , t ≥ 0) un mouvement brownien. Les trajectoires de B sont


localement höldériennes d’exposant 12 − ε, pour tout ε ∈ ]0, 21 [ .

Preuve. Fixons ε ∈ ]0, 21 [ . Soient t, s ≥ 0. La variable aléatoire Bt − Bs suit la loi gaussienne


N (0, |t−s|). Donc pour tout p > 0, E[ |Bt −Bs |p ] = Cp (t−s)p/2 , où Cp = E[ |N (0, 1)|p ] < ∞.
Il suffit alors de prendre p suffisamment grand tel que 12 − ε < (p/2)−1 p
pour voir que les
1
trajectoires de B sont p.s. localement höldériennes d’exposant 2
− ε. !

3. Propriété de Markov
Soit (Ω, F , P) un espace de probabilité. Durant toute la section, on suppose que Ft :=
σ(Bs , s ≤ t).

"t := Bt+s −
Théorème 3.1. (Propriété de Markov simple) Soit s > 0. Le processus (B
Bs , t ≥ 0) est un mouvement brownien, indépendant de Fs .
20 Chapitre 3. Le mouvement brownien

" est un mouvement brownien.


Preuve. On peut facilement vérifier, par définition, que B
Pour démontrer l’indépendance, il s’agit de montrer que pour 0 ≤ t1 < · · · < tn et
"t1 , · · · , B
0 < s1 < · · · < sm ≤ s, les vecteurs (B "tn ) et (Bs1 , · · · , Bsm ) sont indépendants. Or,
Cov(B"t , Bs ) = E[(Bs+t − Bs )Bs ] = 0 (car s ≥ sj ) ; comme (B "t , · · · , B
"tn , Bs , · · · , Bsm )
i j i j 1 1

"t1 , · · · , B
est un vecteur gaussien, on a l’indépendance entre (B "tn ) et (Bs1 , · · · , Bsm ). !

On peut énoncer la propriété de Markov du mouvement brownien sous une autre forme.
Par exemple, on peut dire que: conditionnellement à Fs , (Bt′ := Bt+s , t ≥ 0) est un mouve-
ment brownien issu de x = Bs . En effet, B ′ = B "t + Bs , et pour 0 ≤ t1 < t2 < · · · < tn et
t
n
F : R → R continue et bornée,

"t1 + x, · · · , B
E[ F (Bt′1 , · · · , Bt′n ) | Fs ] = E[ F (B "tn + x) | Fs ]

= E[ F (Bt1 + x, · · · , Btn + x) ]
= Ex [ F (Bt1 , · · · , Btn ) ],

avec x := Bs .
Avec un peu de travail, on peut prouver que la propriété de Markov du mouvement
brownien implique le résultat suivant :

Théorème 3.2. (Loi 0–1 de Blumenthal) Soit


#
F0+ := Fu .
u>0

La tribu F0+ est triviale, au sens que ∀A ∈ F0+ , P(A) = 0 ou 1.

$
Preuve. Montrons d’abord le résultat suivant : Fixons s ≥ 0, et soit Fs+ := u>s Fu ; alors
"t := Bt+s − Bs , t ≥ 0) est indépendant de Fs+ .
le processus (B
Il suffit de vérifier (par un argument de classe monotone) que, pour A ∈ Fs+ , 0 ≤ t1 <
t2 < · · · < tn et F : Rn → R continue et bornée,
% & % &
(∗) " "
E 1A F (Bt1 , · · · , Btn ) = P(A) E F (Bt1 , · · · , Btn ) .

Soit ε > 0. D’après le théorème précédent, le processus t "→ Bt+s+ε −Bs+ε est indépendant
de Fs+ε , et a fortiori de Fs+ . Donc
% & % &
E 1A F (Bt1 +s+ε − Bs+ε , · · · , Btn +s+ε − Bs+ε ) = P(A) E F (Bt1 , · · · , Btn ) .
§3 Propriété de Markov 21

En faisant ε → 0, et à l’aide de la continuité des trajectoires et du théorème de convergence


dominée, on obtient (∗).
$
En particulier, F0+ est indépendante de la tribu σ(Bt , t ≥ 0). Comme F0+ = u>0 Fu ⊂
σ(Bt , t ≥ 0), on déduit que F0+ est indépendante d’elle-même. !

Exemple 3.3. Soit τ := inf{t ≥ 0 : Bt > 0}. Alors, τ = 0, p.s.


En effet,
#
{τ = 0} = { sup Bu > 0} ∈ F0+ .
0≤u≤s
s>0, s∈Q

Pour tout t > 0, P(τ ≤ t) ≥ P(Bt > 0) = 1/2. Donc P(τ = 0) = limt→0+ P(τ ≤ t) ≥ 1/2.
Par la loi 0–1 de Blumenthal, P(τ = 0) = 1.
Comme −B est un mouvement brownien, on voit que inf{t ≥ 0 : Bt < 0} = 0, p.s.
Donc le mouvement brownien visite R∗+ et R∗− dans chaque voisinage de 0. Par conséquent,
il existe une suite (tn = tn (ω))n≥0 strictement décroissante vers 0 telle que Btn (ω) = 0, ∀ n.
En particulier, inf{t > 0 : Bt = 0} = 0, p.s.
D’autre part, on a vu que P(∀ t > 0, sup0≤s≤t Bs > 0) = 1. Soit x > 0. On a
' ( ' x (
P sup Bs > x = P sup Bs > √ .
0≤s≤t 0≤s≤1 t
En faisant t → +∞, le terme à droite tend vers 1. Donc P(sups≥0 Bs > x) = 1, ∀ x > 0.
Autrement dit, sups≥0 Bs = +∞, p.s. Par symétrie, inf s≥0 Bs = −∞, p.s. En particulier,
cela implique que {t > 0 : Bt = 0} est p.s. non bornée.
Donc, si Ta := inf{t > 0 : Bt = a}, a ∈ R (convention: inf ∅ := ∞), alors P(Ta <
∞, ∀ a ∈ R) = 1. !

La propriété de Markov nous dit que pour tout s, (Bt+s − Bs , t ≥ 0) est un mouvement
brownien, indépendant de Fs . On peut étendre cette propriété pour les temps d’arrêt s. La
preuve consiste à discrétiser le temps d’arrêt et d’utiliser la propriété de Markov simple.

Théorème 3.4. (Propriété de Markov forte) Soit T un temps d’arrêt fini. Le processus
" := (BT +t − BT , t ≥ 0) est un mouvement brownien indépendant de FT .
B

Preuve. Montrons que pour A ∈ FT , 0 ≤ t1 < · · · < tn et F : Rn → R+ continue et bornée,


% & % &
"t1 , · · · , B
E 1A F ( B "tn ) = P(A) E F (Bt1 , · · · , Btn ) .

" est un mouvement brownien (en prenant A = Ω) et qu’il


Cela suffira pour montrer que B
est indépendant de FT .
22 Chapitre 3. Le mouvement brownien

On observe d’abord que



)
1{ k−1
m <T ≤
k
} F (B k
+t1 −B k ,··· ,B k
+tn −B k )
2 2m 2m 2m 2m 2m
k=0

converge p.s. (quand m → ∞) vers F (B "t1 , · · · , B


"tn ). Par convergence dominée,
% &
" "
E 1A F (Bt1 , · · · , Btn )

) % &
= lim E 1A 1{ k−1
m <T ≤
k
} F (B k
+t1 −B k ,··· ,B k
+tn −B k ) .
m→∞ 2 2m 2m 2m 2m 2m
k=0

Pour chaque k, A ∩ { k−1


2m
<T ≤ k
2m
} ∈F k . Par la propriété de Markov,
2m

% & ∞
) % & % &
"t1 , · · · , B
E 1A F ( B "tn ) = lim E 1A 1{ k−1 k E F (Bt1 , · · · , Btn )
m→∞ m <T ≤ 2 2m
}
k=0
% &
= P(A) E F (Bt1 , · · · , Btn ) ,

d’où l’identité cherchée. !

Exemple 3.5. Soit g := sup{t ≤ 1 : Bt = 0} ; alors g n’est pas un temps d’arrêt car le
mouvement brownien B ne s’annule pas dans un voisinage de droite de g. !

Exemple 3.6. Soit Ta := inf{t > 0 : Bt = a}. Par la propriété de Markov forte, le processus
(Ta , a ≥ 0) est à accroissements indépendants et stationnaires, et à trajectoires croissantes.
De plus, pour tout c > 0, les processus ( c12 Tca , a ≥ 0) et (Ta , a ≥ 0) ont les mêmes lois
fini-dimensionnelles. !

Théorème 3.7. (Principe de réflexion) Soit St = sup0≤s≤t Bs , t > 0. Alors

P(St ≥ a, Bt ≤ b) = P(Bt ≥ 2a − b), a ≥ 0, b ≤ a.

En particulier, pour tout t > 0 fixé, St a la même loi que |Bt |.

Remarque. L’identité en loi entre St et |Bt | n’est que pour t > 0 fixé. Les processus
(St , t ≥ 0) et (|Bt |, t ≥ 0) ont des comportements tout à fait différents (par exemple, le
premier est monotone, ce qui n’est pas le cas pour le second). Un résultat de P. Lévy dit
néanmoins que (St − Bt , t ≥ 0) et (|Bt |, t ≥ 0) ont la même loi. !

Preuve du Théorème 3.7. Rappelons que Ta < ∞, p.s. On a

"t−Ta ≤ b − a),
P(St ≥ a, Bt ≤ b) = P(Ta ≤ t, Bt ≤ b) = P(Ta ≤ t, B
§4 Quelques discussions 23

"s := Bs+Ta − BTa = Bs+Ta − a. Par la propriété de Markov forte, B


où B " est un mouvement
brownien indépendant de FTa . Comme Ta est FTa -mesurable, B " est indépendant de Ta .
À ce stade, il convient de mentionner que l’on voit le mouvement brownien B comme
étant une variable aléatoire à valeurs dans l’espace C(R+ , r) des fonctions continues sur R+
muni de la topologie de convergence uniforme sur les compacts et de la tribu borélienne.
Ainsi, on peut écrire P(Ta ≤ t, B "t−Ta ≤ b − a) = P{(Ta , B)
" ∈ At }, où
* +
At := (s, x) ∈ R+ × C(R+ , r) : s ≤ t, x(t − s) ≤ b − a .

D’autre part, −B " est aussi un mouvement brownien indépendant de FTa (a fortiori, indé-
" a la même loi que (Ta , B),
pendant de Ta , on voit que (Ta , −B) " et donc P{(Ta , B)
" ∈ At } =
" ∈ At }. Autrement dit,
P{(Ta , −B)
"t−Ta ≤ b − a) = P(Ta ≤ t, Bt ≥ 2a − b),
P(St ≥ a, Bt ≤ b) = P(Ta ≤ t, −B

ce qui prouve la première équation dans le théorème, car {Bt ≥ 2a − b} ⊂ {Ta ≤ t}.
Pour compléter la preuve du théorème, il suffit de noter que

P(St ≥ a) = P(St ≥ a, Bt ≥ a) + P(St ≥ a, Bt ≤ a) = 2P(Bt ≥ a) = P(|Bt | ≥ a),

ce qui donne l’énoncé du théorème. !

Exemple 3.8. On s’intéresse à la loi de Ta . D’après le Théorème 3.7, pour tout t > 0,
√ ' a2 (
P(Ta ≤ t) = P(St ≥ a) = P(|Bt | ≥ a) = P( t |B1 | ≥ a) = P 2 ≤ t .
B1
Donc Ta a la même loi que a2 /B12 , ∀a ∈ R. D’où, pour a ̸= 0,
|a| ' a2 (
fTa (t) = √ exp − 1{t>0} .
2πt3 2t
En particulier, E(Ta ) = ∞ si a ̸= 0. !

4. Quelques discussions
Soit (Ω, F , (Ft ), P) un espace filtré. On dit que (Bt , t ≥ 0) un (Ft )-mouvement brownien
si
(i) (Bt ) est (Ft )-adapté;
(ii) pour tout s ≥ 0, t "→ Bt+s − Bs est un mouvement brownien indépendant de Fs .
Par exemple, un mouvement brownien standard est un mouvement brownien par rapport à
sa propre filtration Ft := σ(Bs , 0 ≤ s ≤ t).
24 Chapitre 3. Le mouvement brownien

Exemple 4.1. (Identités de Wald). Soit (Bt , t ≥ 0) un (Ft )-mouvement brownien, et


soit T un temps d’arrêt tel que E(T ) < ∞. Alors E(BT ) = 0 et E(BT2 ) = E(T ).
Voir TD. !
2 t/2
Exemple 4.2. Soit Ta := inf{t ≥ 0 : Bt = a}. Soit θ > 0. On sait que (eθBt −θ , t ≥ 0)
2 θBt∧Ta −θ 2 (t∧Ta )/2
est une martingale. Si a > 0, alors θBt∧Ta − θ (t ∧ Ta )/2 ≤ θa, donc (e , t ≥ 0)
est une martingale continue bornée. On a, par le théorème d’arrêt,
' θ2
(
1 = E eθa− 2 Ta .
2 T /2
Autrement dit, E[e−θ a
] = e−θa . (En particulier, P(Ta < ∞) = 1.)
2 T /2
En général, pour tout a ∈ R, la transformée de Laplace de Ta est donnée par E[e−θ a
]=
e−θ|a| , θ ≥ 0, ou de façon équivalente :

E(e−λTa ) = e−|a| 2λ
, λ ≥ 0.

On vérifie facilement que ceci est en accord avec la densité de Ta dans l’Exemple 3.8. !

Exemple 4.3. Soient a > 0 et b > 0, et soit Ta,b := inf{t ≥ 0 : Bt = −a ou Bt = b} =


T−a ∧ Tb . On s’intéresse à la loi de Ta,b .
Il y a plusieurs façons pour déterminer cette loi, par exemple à l’aide de l’exemple
précédent et de la propriété de Markov forte. Ici, on déduit cette loi à l’aide de l’exemple
précédent et du théorème d’arrêt.
Soit θ ∈ R, et considérons la martingale continue suivante:
' θ2 (
Mt := sh(θ(Bt + a)) exp − t .
2
Comme (Mt∧Ta,b , t ≥ 0) (que l’on écrit de temps en temps M Ta,b ) est une martingale continue
et bornée, le théorème d’arrêt nous dit que
% ' θ2 (&
sh(θa) = E sh(θ(BTa,b + a)) exp − Ta,b
2
% ' θ2 ( &
= sh(θ(a + b))E exp − Tb 1{Tb <T−a } .
2
Donc
% ' θ2 ( & sh(θa)
(4.1) E exp − Tb 1{Tb <T−a } = .
2 sh(θ(a + b))
En échangeant les rôles de a et de b (il suffit de remplacer B par −B), on a également
% ' θ2 ( & sh(θb)
(4.2) E exp − T−a 1{Tb >T−a } = .
2 sh(θ(a + b))
§4 Quelques discussions 25

Donc
% 2 & % ' θ2 ( & % ' θ2 ( &
E e−θ Ta,b /2 = E exp − Tb 1{Tb <T−a } + E exp − T−a 1{Tb >T−a }
2 2
sh(θa) + sh(θb)
=
sh(θ(a + b))
ch( θ(a−b)
2
)
= ,
ch( θ(a+b)
2
)

alors
% & ch( a−b √2λ )
−λTa,b 2
E e = a+b
√ , λ ≥ 0.
ch( 2 2λ )
On peut aussi faire θ → 0 dans (4.1) et (4.2) pour voir que

a b
P(Tb < T−a ) = , P(Tb > T−a ) = .
a+b a+b
Ceci nous donne par exemple la loi de sup0≤t≤T−1 Bt : pour tout x > 0,
' ( 1
P sup Bt ≥ x = P(Tx < T−1 ) = .
0≤t≤T−1 1+x
1−U
(Autrement dit, sup0≤t≤T−1 Bt a la même loi que U
, où U est uniformément distribuée sur
]0, 1[ .)
Un cas spécial est a = b. Soit Ta∗ := inf{t ≥ 0 : |Bt | = a}. Alors
% 2 ∗ & 1
E e−θ Ta /2 = . ⊓
0
ch(θa)

On termine le chapitre avec un lien entre le (semi-groupe du) mouvement brownien et


l’équation de la chaleur. Soit f : R → R une fonction continue et bornée, et soit u(t, x) :=
E[f (x + Bt )], t ≥ 0, x ∈ R. Alors u(0, x) = f (x) et

∂u 1 ∂2u
= .
∂t 2 ∂x2
[Preuve : Voir TD.]

Vous aimerez peut-être aussi