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CONSTRUIRE
EN TERRE
Dans une démarche globale,
ce matériau prouve toute
sa pertinence
HUBERT GUILLAUD, leur preuve et de jouer de façon créative sur sur la composition de la terre. Nous savons
architecte DPLG, l’hybridation des matériaux et des désormais que sa texture varie en fonction
directeur scientifique techniques. de ses états : minéral ou solide, gazeux (avec
du laboratoire CRAterre. la présence d’air dans le sol) et liquide ou
Depuis plus de 30 ans, aqueux. Jouer sur ces trois facteurs élargit la
il œuvre en équipe pour ÉTAT DES LIEUX plage d’utilisation de la matière. Par
favoriser l’accès à Quel est le patrimoine ? exemple, en écrêtant les plus gros cailloux
l’habitat pour le plus En France, l’architecture en terre est pré- d’une terre traditionnellement utilisée pour
grand nombre, grâce aux ressources sente depuis la protohistoire. Ce patrimoine le pisé, il sera possible de réaliser des
locales des territoires, en particulier grâce se décline en fonction des régions et repré- briques de terre crue. De même, en fonction
à la terre et à ses potentialités. CRAterre sente environ 15 % des édifices. Ainsi, les de la quantité d’eau qui est ajoutée à la terre,
contribue aussi à la conservation du techniques comme le pisé ou la brique crue les états obtenus seront plus ou moins plas-
patrimoine mondial de l’Unesco.
sont plutôt d’origine méditerranéenne, tan- tiques. Plus liquide, elle peut être utilisée
dis que le colombage, qui vient des régions comme enduit.
U
tilisée dans la construction de nordiques, se retrouve beaucoup en Alsace,
bâtiment, la terre crue est un en Picardie, en Normandie, en Champagne
matériau beaucoup plus actuel ou dans les Landes. Cette répartition géogra- TECHNIQUES
qu’il n’y paraît de prime abord. En phique s’explique en partie par la qualité de Comment construire avec la terre ?
effet, en fonction de sa plasticité, elle peut la terre elle-même. Pour être utilisé en La terre utilisée est toujours celle issue de la
être utilisée en structure ou comme enduit. construction, ce matériau doit être constitué sous-couche du sol. Traditionnellement, on
Elle peut être associée aux produits les plus d’argile, de silts, de sables fins, de gros distingue d’abord le pisé, une terre à la tex-
contemporains, tels que l’acier, le verre, le sables, de graviers et de cailloux. C’est la ture étalée, qui contient toutes les fractions
béton, la pierre ou la terre cuite. Réaliser un répartition entre ces éléments qui définit la de grains (argiles, silts, sables fins, gros
immeuble de plusieurs étages ou une plage d’utilisation d’une technique ou d’une sables et graviers). Une fois les très gros
construction parasismique est possible, à autre. Outre l’approche empirique des cailloux extraits, la terre est utilisée dans
condition de remettre au goût du jour des anciens bâtisseurs, nous disposons son état d’humidité naturel, puis triturée.
cultures constructives anciennes qui ont fait aujourd’hui d’études scientifiques précises Elle est alors déversée par couches de 20 cm
46 N° 295 MARS 2010 • LES CAHIERS TECHNIQUES DU BÂTIMENT
1
TECHNIQUES
Comment utiliser la terre
en construction . . . . . . . . . . . P. 46
2
THERMIQUE
La terre crue améliore le
confort hygrothermique . . P. 54
3
ENDUITS
Étanchéifier sans mettre
en péril . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . P. 58
4
PROSPECTIVE
Accroître la résistance en
diversifiant les applications P. 60
5
Si la terre utilisée pour ZOOM SUR…
l’enduit est très Une maison en pisé dans
argileuse, elle va réagir
avec la chaux pour les Hautes-Pyrénées . . . . . . P. 64
provoquer une réaction
pouzzolanique, grâce
à laquelle l’enduit gagne
en dureté. (Doc. Anger/
Produits . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . P. 66
Fontaine CRAterre-ENSAG.)
d’épaisseur dans un coffrage. Le compactage déchets minéraux (éclats de pierres ou de isolant dépend de sa masse volumique. Il
se fait ainsi par couche successives, qui briques), et de l’eau à cette terre pour obte- n’est donc pas très important comparé aux
constituent ensuite une banchée, prête à être nir un état relativement plastique et réaliser isolants contemporains. En revanche, il peut
décoffrée immédiatement. Cette technique a des paquets qui seront empilés pour exécu- être amélioré de façon importante par l’ajout
été modernisée pour réaliser des murs tru- ter des levées de terre. Avant que la levée ne de paille ou de fibres végétales. Ainsi, le
meaux avec des coffrages intégraux ou soit totalement sèche, la paroi est taillée et mélange terre-paille ou terre-chanvre, terre-
grimpants. Le pisé s’associe parfaitement à lissée avec un outil tranchant. copeaux bois fonctionne réellement en
des ossatures en pierres ou en briques Enfin, réellement apparue dans les années isolation. L’autre intérêt du matériau réside
cuites. Autre procédé, la brique crue (ou 1950, la technique de la brique de terre com- dans son inertie. Grâce à elle, une paroi en
adobe) nécessite de supprimer les plus gros primée utilise une terre humide et terre accumule la chaleur du soleil dans la
cailloux de la terre. Cette terre est ensuite pulvérulente comprimée dans un moule. journée et restitue ces calories pendant la
mélangée à de l’eau et à des fibres végétales Contrairement aux briques de terre crue, nuit. De même, la terre joue un rôle dans le
(pailles), afin d’éviter les fissurations par celles-ci peuvent être stockées directement confort climatique des occupants en régu-
retrait lors du séchage. Ces fissurations peu- sans séchage. La technique s’est développée lant l’hygrométrie intérieure. En effet, une
vent être provoquées par l’argile, qui pour donner naissance à des presses sophis- paroi en terre contient toujours un peu
compose entre 15 à 20 % du mélange. La tiquées et se distingue par le mode de d’eau. Cette eau réalise des ponts capillaires
terre est placée dans un moule puis démou- stabilisation de la terre, qui utilise 3 à 6 % de de quelques nanomètres d’épaisseur entre
lée pour sécher à l’air libre. Autre utilisation, ciment. Plus ce taux est réduit et plus nous les plaquettes d’argile. Lorsque la tempéra-
le torchis se compose de terre argileuse et de restons dans une logique environnementale. ture extérieure augmente, une partie de cette
nombreuses fibres végétales utilisées en eau s’évapore et participe ainsi au rafraîchis-
forme de torches. Ce mélange sert de rem- sement de l’espace. À l’inverse, lorsque la
plissage dans les ossatures en bois, connues THERMIQUE température extérieure diminue, l’eau se
sous le terme de colombage. Pour réaliser Quels sont les atouts du matériau condense dans une réaction exothermique.
une paroi en bauge, la terre doit contenir terre ? Ce changement de phase à température
une quantité importante d’argile, afin de lier Souvent utilisée dans les constructions bio- ambiante régule activement l’hygrométrie
les graviers et les petits cailloux. La prépara- climatiques, la terre présente de nombreux interne et garantit le confort des occupants.
tion consiste à ajouter des fibres ou des atouts pour le bâtiment. Certes son pouvoir Ces avantages se conjuguent avec le (•••)
N° 295 MARS 2010 • LES CAHIERS TECHNIQUES DU BÂTIMENT 47
Pour réaliser une paroi en bauge, la terre est
mélangée à des fibres et/ou à des déchets
minéraux et à de l’eau pour obtenir un état
relativement plastique. Les paquets de terre sont
empilés pour exécuter des levées de terre, qui
sont ensuite taillées et lissées avec un outil
tranchant. (Doc. T. Joffroy/CRAterre-ENSAG.)
(•••) faible coût du matériau brut propre- faitement compatibles avec une paroi en mètres à maîtriser restent nombreux et
ment dit. En effet, sur une valeur modèle de terre. Pour l’extérieur, les enduits étaient tra- complexes. Des expérimentations ont déjà
100 euros/m2 de mur, la terre représente ditionnellement des petits badigeons à base commencé sur les propriétés de viscosité, de
0,2 % du budget, contre 30 % pour le béton. de chaux ou de sable/chaux. Si la terre utili- rhéologie, de séchage du matériau terre dans
Bien entendu, cette différence est ensuite sée est très argileuse, elle va réagir avec la son épaisseur et sur le contrôle des risques
compensée par le coût de mise en œuvre : chaux pour provoquer une réaction pouzzo- de fissuration. En même temps, nous avons
environ 50 % du budget pour la terre, contre lanique, grâce à laquelle les enduits vont vu que la terre se comporte comme un béton
6 % pour le béton. Dans ce modèle, le trans- gagner en dureté. Pour l’intérieur, les naturel, une sorte de béton d’argile, dont la
port de la terre compte pour 5 à 15 % contre enduits à la terre naturelle permettent de composition des grains rappelle celle du
40 % pour le béton. Il faut aussi comptabili- bénéficier de la large palette d’oxydation du béton de ciment. Il sera sans doute possible
ser les énergies grises de production (terre matériau pour varier les teintes. Afin de à terme de maîtriser les paramètres d’empi-
« crue » contre matériaux « cuits »). développer des compétences spécifiques lement des grains, comme l’ont fait les
dans ce domaine, nous avons contribué au cimentiers jusqu’à présent. Ce point consti-
développement d’un plan de formation qui tue le principal défi à résoudre dans un
ENDUITS s’inscrit dans le cadre du programme euro- avenir proche : comment maîtriser l’empile-
Comment les utiliser ? péen Leonardo. L’objectif est de multiplier ment afin que les grains les plus fins
Le choix d’un enduit, qu’il soit intérieur ou les professionnels capables de le mettre en viennent boucher les vides et augmenter
extérieur, implique de respecter la perméa- œuvre dans des conditions adéquates. ainsi la résistance de l’ensemble. Les
bilité du mur et l’échange hydrique qu’il recherches sont en cours dans divers labora-
crée avec l’extérieur. Le non respect des toires à travers le monde. Nous sommes sur
caractéristiques de la terre peut provoquer PROSPECTIVE la bonne voie pour améliorer et moderniser
des pathologies importantes, voire même Quels sont les axes de recherche ? la plage d’utilisation de la terre crue. Les
dans certains cas, l’effondrement d’un mur. Des recherches fondamentales ont été acteurs se fédèrent de plus en plus à travers
Les enduits à base de ciment ou de résine, menées sur la cohésion de la matière en le monde pour faire évoluer ce matériau et
qui vont provoquer des poches d’humidité, grains. Grâce à ces premiers résultats, nous promouvoir son utilisation.
sont donc à proscrire. D’autant plus qu’il y a pouvons aujourd’hui envisager de futurs
de plus en plus de nouveaux matériaux par- bétons coulés en terre. Certes, les para- Propos recueillis par Julie Nicolas.
en construction
La terre crue se met en œuvre aujourd’hui dans des conditions très semblables aux modes de construction
plus courants. Principal impératif : la protection vis-à-vis de l’eau.
D
ouze méthodes différentes de deur, la terre à bâtir est issue de la aptitude se vérifie par une série de tests
construction avec la terre sont dégradation de la roche mère selon diffé- empiriques portant sur l’aspect, l’odeur, la
inventoriées dans le Traité de rents processus physiques, chimiques et consistance, la sédimentation… qui visent
construction en terre (1) : terre biologiques. Elle est constituée à la fois à apprécier la proportion de sable, de silt
creusée, recouvrante, remplissante ; décou- d’éléments gazeux (air), liquides (eau, (limons) et d’argile. Autre critère, celui de
pée, comprimée, façonnée ; empilée, matières organiques en décomposition…) la teneur en eau de la terre. Ainsi, alors que
moulée, extrudée ; coulée, garnissante, et de solides d’origine minérale. Sa qualité l’adobe, la brique de terre comprimée
terre-paille… Leur géographie reflète en constructive se détermine en fonction de (BTC), la bauge ou le torchis nécessitent
partie, parmi d’autres éléments, les caracté- quatre propriétés fondamentales. La granu- une terre mi-ferme, mi-molle ou molle
ristiques locales du sol. Ainsi, le pisé larité (ou texture) est la proportion des (teneur en eau de 15 à 35 %), la terre à pisé
s’est-il imposé dans les régions où la terre grains minéraux de différentes tailles qui la doit-elle contenir une faible quantité d’eau
est graveleuse, l’adobe là où la proportion composent : cailloux (plus de 2 cm), gra- (de 4 à 10 %) car, étant par nature incom-
d’argile dans la terre est abondante et la viers (de 2 cm à 2 mm), sables (de 2 mm à pressible, elle empêcherait le compactage.
bauge là où la terre prend une consistance 60 μm), silts (de 60 μm à 2 μ et argiles Sa teneur doit être suffisante pour servir de
plastique. (moins de 2 μ). La plasticité est sa capacité lubrifiant aux grains lors de la compression
Parmi ces techniques, la bauge (terre empi- à subir des déformations sans réaction élas- afin de leur permettre de se réarranger
lée), que l’on trouve surtout dans le tique notoire. entre eux pour occuper un volume mini-
nord-ouest de la France (Basse-Normandie, mal. L’état hydrique du pisé à sa mise en
Ille-et-Vilaine…) et le torchis (terre garnis- Bonne cohésion : aptitude œuvre est dit « humide » : la sensation est
sante – Normandie, Picardie, Pas-de-Calais à la construction humide au toucher, mais on peut tout
et Centre) ont été peu modernisés : le tor- La compressibilité définit la possibilité de juste en faire une boule qui, si on la jette
chis, qui présente de maigres performances réduire les vides qu’elle contient, d’aug- par terre d’une hauteur de 1 m, doit se
thermiques, devrait ainsi rester limité à la menter sa densité et donc d’améliorer sa casser en trois ou quatre morceaux. Le
restauration. Deux autres techniques en résistance mécanique. Enfin, la cohésion meilleur moment pour réaliser le pisé est
revanche – l’adobe (terre moulée implantée détermine la résistance à la traction et la le printemps ou l’automne, quand le sol
dans le Midi Pyrénéen, en Champagne ou propriété des particules à rester associées contient naturellement la bonne quantité
en Auvergne) et le pisé (Rhône-Alpes, entre elles : elle découle de la quantité et de d’eau.
Savoie, Midi-Pyrénées et Bretagne Nord) la qualité des argiles, de leur propension à La mise en œuvre du pisé consiste à
ont évolué ces dernières décennies et leur retenir l’eau, grâce à leur structure particu- déverser la terre à l’intérieur d’un ban-
mise en œuvre se révèle aujourd’hui tout à lière en feuillets reliés entre eux par des chage, en couches successives de 10 à
fait comparable aux habitudes générales du films d’eau. 20 cm. Le compactage, à l’aide d’un fou-
bâtiment. Extraite sous la couche de terre En général, toute terre offrant une bonne loir pneumatique, réduit cette couche à
organique, à partir de 20-40 cm de profon- cohésion est apte à la construction. Cette environ la moitié de cette épaisseur. Une
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fois le haut du coffrage atteint, celui-ci est
retiré et replacé plus loin, laissant appa-
raître une nouvelle portion du mur
monolithique. La terre à piser est la seule
terre à bâtir qui contienne des graviers et
des cailloux : avec les vibrations crées lors
du compactage, les grains plus petits
(sables, silts et argiles) viennent combler
les vides entre les plus gros (cailloux, gra-
viers). La proportion entre les différents
composants doit être équilibrée car la
quantité d’argile doit suffire pour créer
la cohésion et les grains assez nombreux
pour que le matériau obtenu soit rigide et
ne fissure pas.
B E
A Sur ce mur de bauge en Ile-et-Vilaine, Marcom (Scop Inventerre), maçon spécia- Inventées au milieu du XXe siècle, les BTC
le maçon termine de façonner le flanc du mur lisé dans la terre crue. Les BTC sont une peuvent être fabriquées dans des briquete-
avec son paroir. Les limites des levées successives sorte de petit pisé en briques, comprimé ries grâce à des presses industrielles
sont bien visibles. (Doc. V. Guernion/totem-terre-couleurs.fr.) par une presse dans un moule. Celui-ci est capables de produire jusqu’à 50 000 briques
rempli d’une terre aux proportions équili- par jour. Mais il est parfois plus pratique de
B Le pisé peut être préfabriqué. Dans ce cas,
brées d’argile, limon et sable. Un bras de louer une presse légère, au rendement de
il doit être placé par grue selon un calepinage
levier exerce une forte pression sur la l’ordre de 300 briques/jour. La BTC est uti-
déterminé à l’avance. Ici, un chantier de Nicolas
Meunier, qui pratique cette technique depuis 1986. brique puis celle-ci est éjectée. lisée essentiellement en murs intérieurs,
(Doc. DR.) Contrairement à l’adobe, la BTC n’a pas doubles murs isolés par l’extérieur, rem-
besoin de sécher et elle est immédiatement plissage d’ossature bois ou montages de
C Lors de la fabrication de briques de terre utilisable après moulage. Les BTC se mon- cloisons, de masse thermique, pour réguler
comprimée (BTC) sur le site du Chênelet (62), tent comme des briques classiques, avec du les températures intérieures et les échanges
la terre préparée et calibrée est versée dans un
mortier de terre seule, de chaux seule, de de vapeur d’eau. « La brique crue connaît
moule avant d’être pressée, puis éjectée et placée
sur chant. (Doc. DR.) terre et chaux ou de terre et ciment. Parfois une forte croissance, grâce à la demande
stabilisées à la chaux ou au ciment et des particuliers. Il y a cinq ans, une seule
D E Pour le chantier du mur-enseigne de nécessitant alors une cure humide, elles briqueterie dans la région fabriquait des
la société Wolfberger à Colmar, la terre a été resteront empilées sur une zone de stoc- briques crues, aujourd’hui, il en existe
compactée à l’intérieur d’un coffrage grimpant au kage pour favoriser un séchage lent. douze. Avec d’un côté une forte demande,
fur et à mesure des levées. Au pied du mur de pisé
de 5 m de haut, le godet malaxeur a facilité
des carrières, des machines et hangars dis-
l’apport de terre, en particulier lorsque le mur Forte croissance de la BTC ponibles, et de l’autre la hausse du prix du
a atteint une certaine hauteur. (Doc. Akterre.) « La stabilisation n’apporte pas grand-chose baril de pétrole et la baisse d’activité de
à la résistance mécanique de la brique crue. 2009, l’intérêt pour ce produit s’est accru. »
Nous n’utilisons des briques stabilisées que assure Alain Marcom E. L.
lorsque le chantier est découvert et qu’il y a 1– Traité de construction en terre, Hubert Guillaud et Hugo
risque de pluie », confirme Alain Marcom. Houben, éditions Parenthèses, 1989.
le confort hygrothermique
La terre crue n’isole pas, mais ses propriétés thermophysiques en font une régulatrice de la température et de
l’hygrométrie qui lui permettent de contribuer de façon non négligeable au confort thermique d’un bâtiment.
«
L
a terre ne possède nullement les
propriétés thermiques dont on a
bien voulu la doter. Le matériau
n’est pas très isolant », affirment
Hubert Guillaud et Hugo Houben dans l’ou-
vrage de référence Traité de construction en
terre (1). Leur objectif : balayer l’idée persis-
tante que la terre isole thermiquement. Les
chiffres qu’ils indiquent sont patents : pour
une masse volumique de 1 500 kg/m3 (terre
sèche), la conductivité thermique est de
0,75 W/m.K . Elle atteint 1,1 W/m.K pour
une masse volumique de 2 000 kg/m3 (pisé
en climat humide). Pour améliorer la résis-
tance thermique de la terre crue, son
pouvoir isolant peut être renforcé par l’ajout
de fibres végétales : paille, chanvre, copeaux
de bois, lin, roseau broyé… Le mélange
terre-paille permet de moduler la masse
volumique des murs de 300 à 1 300 kg/m3
pour répondre aux besoins en termes de
résistance, d’isolation thermique et/ou pho-
nique, d’inertie thermique en fonction de la A
zone climatique, de l’orientation du mur ou
de nuisances sonores. Il permet d’atteindre
un coefficient de conductivité thermique
d’environ 0,10 W/m.K : ainsi un mur de Des murs 1
30 cm obtient une résistance thermique de
3 à 3,6 m².K/W. Un mélange terre-paille ou
hypocaustes
terre-copeaux peut aussi être utilisé en rem-
plissage d’une ossature bois, en sous-couche
fonctionnent 2 3
Les parois
chauffantes utilisent
la conductivité
thermique
Le principe de surface radiante est repris dans
les murs chauffants en terre. Panneaux,
briques de terre crue intégrant des tubes
alimentés en eau ou simples tubes raccordés et producteur de produits en terre crue.
au chauffage à recouvrir d’enduit, ils forment Différents systèmes existent : Wem (distribué
des grandes surfaces de chauffe ou de par Akterre) propose les panneaux d’argile-
rafraîchissement rayonnant qui utilisent à leur radiateur qui se montent à sec (plafond
avantage la conductivité thermique de la terre rayonnant possible), des tuyaux préformés à
crue. Le système est efficace à basse recouvrir d’enduit ou des tuyaux climatiques
température et donc économe en énergie. à monter soi-même avant la pose d’un enduit
Le rendement de parois chauffantes serait de terre. Helioterre est une brique en terre
F
supérieur à celui d’un plancher chauffant, « car crue de 10 x 10 x 33 cm dotée d’une rainure qui
G placé sur le mur le plus froid (mur extérieur), sert de support à la canalisation, permettant
elles suppriment son rayonnement, réduisant de monter des cloisons chauffantes conçue
de fait la demande en chauffage », explique par Joseph Colzani, architecte spécialiste de
Andreas Krewet, gérant d’Akterre, distributeur la terre crue.
(•••) si celle-ci est moins élevée que celle les calories) est élevée, ce qui contribue à sa
du béton plein à volume égal (590 W/m3 °C capacité de régulation de température
pour le béton ; 510 W/m3 °C pour le pisé et (21,6 W. h0,5/m².°C, alors que celle d’un
380 W/m3 °C pour l’adobe) –, diffusivité ther- bois résineux est de 6 W.h0,5/m².°C).
mique, effusivité thermique. Là encore, pour que l’inertie thermique fonc-
La capacité thermique exprime l’aptitude tionne, la surface des murs intérieurs et des
d’un matériau à emmagasiner de la chaleur sols prévus pour agir comme masse doivent
par rapport à son volume. Plus elle est rester au maximum en contact avec l’air
importante, plus la quantité de chaleur à lui intérieur. L’isolation doit être placée à l’exté-
apporter pour augmenter sa température est rieur ou intégrée au mur et les
élevée, ce qui permet de réduire l’amplitude doubles-plafonds, moquettes, revêtements
D E Le pisé est une technique sophistiquée des températures. étanches doivent être évités.
car son coffrage est très complexe. (Docs. SCOP Caracol Grâce à sa faible diffusivité thermique Des masses thermiques peuvent aussi être
et L. Menegoz/CRAterre-ENSAG.)
(vitesse de transmission de la chaleur, expri- placées ailleurs où elles serviront de régula-
F Au musée Micropolis de Saint-Léon (12), mant par conséquent le temps de déphasage teur thermique et compenseront (dans le cas
la maçonnerie d’adobe et les enduits en terre thermique à travers la paroi : plus elle est d’une construction bois) le manque d’inertie
assurent une gestion différenciée de l’hygrométrie faible, plus la chaleur met du temps à tra- inhérent à ce système : cloisons en pisé ou
et évitent la condensation. Ainsi, les insectes verser l’épaisseur du matériau), de l’ordre de en BTC, murs accumulateurs, en pisé ou en
tropicaux sont maintenus dans une ambiance à 2,53.10-3 m²/h (5,92.10-3 m²/h pour la briques, situés en fond de serre bioclima-
90 % d’humidité, tandis que de l’autre côté de la brique cuite), la terre offre l’avantage d’un tique pour stocker les apports solaires ou
paroi, pour le public, il reste à 50 %. (Docs. Agence Collart.)
amortissement et d’un déphasage important formant une masse derrière ou autour d’un
G Outre ses capacités hygrothermiques, des variations et des apports thermiques poêle. E. L.
l’inertie est l’autre propriété thermique clé de externes. Enfin, son effusivité thermique 1- Traité de construction en terre, Hubert Guillaud et Hugo
la terre crue. (Doc. Antoine Predock Architect.) (rapidité avec laquelle un matériau absorbe Houben, éditions Parenthèses, 1989.
en péril
Lors de la conception et de la rénovation d’une construction en terre, le caractère « respirant » du matériau
doit être sérieusement considéré, en particulier en proscrivant les enduits imperméables.
L
es ouvrages en terre crue – matériau
friable et sensible à l’érosion – doi-
vent être protégés par de larges
débords de toiture et des murs de
soubassement, avec un drainage soigné.
Les murs enterrés sont en effet difficiles à
protéger. Misant sur une bonne protection
aux intempéries, les ouvrages contempo-
rains n’hésitent pas à privilégier le pisé
apparent, sans enduit. En revanche, les
façades érodées des bâtiments anciens
demandent un ragréage et la pose d’un
enduit adapté, voire d’un bardage.
« Un bon mur en pisé n’a pas besoin d’en-
duits. Ainsi, dans certaines fermes de la
région du Bas-Dauphiné, l’habitation a été
enduite (raisons culturelles et visuelles) A
alors que la grange a été laissée en pisé B
apparent. Les deux ont très bien résisté »,
précise l’architecte Pascal Scarato, de
l’agence Abiterre. Outre la protection, la
composition du matériau est primordiale
pour une bonne tenue dans le temps. Les
terres sablonneuses ou limoneuses, avec peu
d’argile, sont plus fragiles. L’amélioration
des propriétés mécaniques de la tenue à
l’eau d’une terre médiocre passe parfois par
une stabilisation avec un liant bien dosé, de
chaux ou de ciment. Ainsi, François Xavier
Bartoli, de l’atelier Studie à Ajaccio, confie :
« Nous réalisons de plus en plus d’extérieurs
sans enduit, mais la protection des murs est
assurée contre le ruissellement par un bat-
tage avec 5 % de chaux dans la terre, ce qui
la rend résistante en surface. » Le professeur
et chercheur Ali Mesbah de l’Ecole nationale
des travaux publics d’état (ENTPE) à Lyon
confirme : « En 1994, pour la construction du
foyer sacerdotal de l’église d’Ars, le matériau
disponible sur place se compactait mal, C
nous en avons trouvé un qui se compactait A Cette maison bioclimatique récente est en bois et en pisé partiellement apparent. À l’intérieur,
mieux et avons fait ajouter de 4 à 5 % de la salle de bains et la cuisine sont en terre apparente, avec blindage des gaines électriques. La construction
ciment blanc de Lafarge. » Avec la stabilisa- a été réalisée par l’agence Abiterre, avec l’architecte Pascal Scarato.
tion, le matériau se densifie et gagne en
résistance mécanique, mais isole moins B Malgré le toit en débord, et le soubassement de pierre pour éviter les remontées capillaires du sol,
thermiquement. En outre, l’amoindrisse- le beau pisé sans enduit de cette vieille bâtisse (Auvergne) a perdu son enduit à la chaux, devenu friable
ment de sa capacité à réguler l’hygrométrie avec les années. (Docs. Pascal Scarato.)
fait perdre en confort. Aussi, les avis diver- C Les pièces d’eau nécessitent des protections locales vis-à-vis des éclaboussures ou des
gent. L’artisan autrichien Martin Rauch a, ruissellements. Pour la salle de bain du gîte rural de Lumio en Corse, réalisé par l’atelier Studie en terre
pour sa part, renoncé à l’ajout de ciment, et crue, un beau revêtement en tadelakt a été choisi. (Doc Atelier Studie.)
4 Accroître la résistance en
PROSPECTIVE
A B
E
n France, plusieurs chercheurs du CRAterre. Il a pris part aux recherches A Un prototype d’habitat léger pour SDF
mènent des études dans le domaine sur le sujet et aux expérimentations qui en a été réalisé par l’ENSAG, à partir d’une double
de la construction en terre. Mais, découlaient. cloison formée de tasseaux de bois empilés
le CRAterre, fondé en 1979, reste le La première étude se réfère à la technologie et non fixés, dans laquelle est versée de la terre
seul qui travaille de manière approfondie du béton et à sa transcription à la terre. à l’état granulaire. (Doc. CRAterre.)
sur cette thématique, en collaboration avec Ainsi, le béton se compose de granulats et B Cette maison contemporaine La Aldea,
une équipe d’enseignants de l’École natio- de sables agglomérés par un liant, en géné- bâtie à Medellin, en Colombie (2008),
nale supérieure d’architecture de Grenoble ral du ciment. se compose de murs en pisé formés de terre
(Ensag). Un certain nombre d’expériences locale mélangée à des adjuvants naturels, tels que
ont été réalisées, assorties d’applications Des expériences grandeur la caséine, qui augmente son pouvoir isolant.
concrètes. Ces études se fondent sur celles nature (Doc. M.Patino A/phot.-J.Forero et J.A. Moreno C/arch.)
A
B
C
D
important des argiles. Pour cela, il suffit logie est développée par des chercheurs de tion. La seconde recherche concerne la
d’ajouter à la terre des granulats ou des l’université de Mopko en Corée du Sud. construction en terre, au sein d’ossatures
fibres, pour obtenir une sorte de mortier ou Grâce à une bétonnière munie d’un tuyau, en bois. L’expérience consiste à monter des
d’enduit. Une autre technique moins cou- la terre liquide est coulée au sol dans un murs formés d’une double cloison de tas-
rante et très performante consiste à coffrage, puis étalée à l’aide d’un balai pour seaux empilés, non fixés, posés les uns sur
adjoindre des additifs, dispersants de type former une dalle. Mise en œuvre comme les autres. Dans ce coffrage perdu, de la
plastifiants, ou réducteurs d’eau du ciment. un béton classique, cette terre améliorée terre à l’état granulaire sec est versée avec
Ils ont le pouvoir de liquéfier la terre, sans offre de nouvelles applications possibles un bulldozer. Habituellement, la poussée
apport d’eau. S’apparentant à un béton de pour les murs, sols extérieurs, etc. due à ce type de remplissage réalisé dans
ciment, ce béton d’argile est autonivelant et L’outillage nécessaire est le même que pour un coffrage traditionnel aurait été si forte,
s’utilise de la même manière. Cette techno- le béton de ciment, ce qui facilite sa réalisa- qu’elle l’aurait éventré. Mais ici, les (•••)
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DOSSIER
CONSTRUIRE EN TERRE
(•••) effets de voûte liés aux grains s’ap- feuilles, écorces, algues, huiles, latex, etc.
puyant sur chaque anneau de bois Il en est de même pour les produits d’ori-
répartissent uniformément la poussée. gine animale (sang, lait, os, œufs, cornes,
poils, bouses, etc.).
Des champs d’application Avoir recours à ces ressources naturelles
élargis implique une connaissance et un savoir-
Le poids induit comprime l’ensemble et le faire ancestraux. Ces mélanges devenus
stabilise. Ce principe de physique, souvent gluants augmentent la cohésion de la terre
employé dans les ouvrages de génie civil, et sont employés comme colles et enduits
a amené CRAterre à concevoir un projet de façade. Résultat : les architectes euro-
d’habitat pour les SDF. Un prototype de péens s’intéressent de nouveau à l’habitat C
maison en murs de terre bâti avec ce sys- en terre. Cette technique rend, en effet, la D
tème de coffrage a été réalisé. Monté terre plus solide et moins sensible à l’eau.
rapidement, il ne réclame ni colle, ni vis, Des propriétés qui élargissent les potentiels
ni clous. du matériau et ouvrent d’autres perspec-
Le remplissage peut être de gravier ou de tives pour les architectes, en matière de
sable, soit des matériaux qui ne se solidi- murs, fondations et enduits.
fient pas. Les murs sont ensuite isolés par Érigée à Berlin en 2000, la chapelle de la
l’extérieur avec des plaques de plâtre. Réconciliation en est un bon exemple, avec
D’un coût réduit, ce système mixte bois- ses murs montés en pisé. C. M.
terre est un gage de rapidité d’exécution,
à tout moment démontable.
Enfin, le troisième axe d’étude porte sur E
C D Après séchage et décoffrage, le mur en
la création de nouveaux matériaux, inspirés
béton d’argile coulé présente les mêmes qualités
des nano composites argiles-polymères. de résistance et de non fissuration qu’un voile en
Ils sont obtenus par l’ajout à la terre de béton fluide, grâce à un dosage spécifique des
matières organiques permettant de la ren- agrégats. (Doc. CRAterre.)
forcer et d’augmenter sa durabilité.
E En Corée du sud, le département
Dans la construction traditionnelle, l’argile
d’architecture de l’université Mopko procède à
est depuis longtemps mélangée avec des des essais de coulage de chapes en béton d’argile
matières organiques d’origine végétale. autonivelant, de consistance liquide. Facile à
Ces produits, qui varient selon le lieu et mettre en œuvre, il est résistant et durable.
le pays, sont les suivants : foin, riz, graines, (Docs. Heeyong Choi-Doa MNU.)
BIBLIOGRAPHIE
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E
ntrepreneur de maçonnerie dans les
Hautes-Pyrénées (65), Christian Baur
réhabilite, avec une maison en pisé,
«béton
Le pisé est un
de terre crue
une tradition constructive locale : « Il
existe un important patrimoine bâti en pisé et intéressant
en adobe, dans les pays d’Astarac et écologiquement.
Magnoac, au nord des Hautes-Pyrénées. Cette
présence atteste de la fiabilité de ces tech- Ni transformation
niques dans cette région. D’ailleurs, la DDE industrielle de
locale encourage fortement ce matériau. » matières premières,
Avec la construction de cette maison de
ni transport : la terre Bioclimatique
169 m2, l’entrepreneur souhaite, certes relan-
cer ce mode constructif, mais aussi faire est prise sur place. «estOutre le mode constructif en pisé, le bâtiment
conçu selon des principes bioclimatiques : à
évoluer les modes de mise en œuvre : « Pour Grâce à cette l’ouest, la maison est en L de façon à protéger la
réactualiser la maçonnerie en terre crue, qui
technique, j’assure la façade des intempéries. Au sud, de grandes baies
offre d’excellentes performances environne-
mentales, je réalise un mariage de ces
traditions constructives avec des moyens
garantie décennale.
CHRISTIAN BAUR,
» vitrées protégées par des "chapeaux", confort
d’été oblige, permettent des apports solaires en
hiver et en demi-saison. La façade nord est, elle,
modernes de mise en œuvre ». Outre l’utilisa-
tion d’engins telles que les pelles mécaniques
Ent. Christian Baur. complètement aveugle. »
pour triturer la terre ou pour remplir les
banches, Christian Baur emploie, pour tasser
et compacter la terre, un fouloir pneumatique Protection contre
et non pas de l’antique pisoir, pizon ou pisou.
l’humidité
Des méthodes de travail qui lui permettent,
tout en diminuant la pénibilité, de réduire la
«constructions
Comme toutes les
en pisé, celle-ci
durée du chantier et donc les coûts : est réalisée sur des murs de
« J’obtiens ainsi un coût fourniture et pose de soubassement en pierre
l’ordre de 150 et 200 euros hors taxes le m2 hourdie à la chaux, de manière
dans une configuration simple, à comparer à protéger le mur des
avec un Monumur facturé à 130 euros le m2. remontées d’humidité. Cette
Résultat : bien que ce type de construction étape achevée, les murs sont
soit très différent d’une construction maçon- ceinturés avec 5 cm de béton
née classique, les délais de production sont réalisés avec un ciment
similaires ». hydrofugé, ce qui renforce
Construire en pisé implique de disposer sur encore la protection à
place, si l’on veut supprimer l’impact envi- l’humidité et permet de passer les chaînages horizontaux. Je n’utilise pas de film étanche car il y a
ronnemental du transport, d’une terre de un risque de déchirure. Les murs, quant à eux, sont construits sur un hérisson classique avec un
qualité. C’est le cas ici avec une terre argilo- drain. Hérisson sur lequel je dépose un lit de 30 cm de terre compactée, elle-même recouverte
graveleuse qui contient de 15 à 25 % d’argile ensuite d’une dalle béton de 8 cm. »
à laquelle on ajoute du sable. Elle se trouve
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sous la couche de terre végétale du terrain, il
convient de contrôler son taux d’humidité de
manière à pouvoir la triturer (frasser) et l’ag-
glomérer. La terre doit être sèche au toucher
sans être molle ou collante. Ainsi préparée,
elle est alors mise en place et damée dans des
coffrages modulaires en banches sur une lon-
gueur de 2 à 3 m et une hauteur de 60 cm
environ. Ces banches, à l’instar de celles ser-
vant à couler le béton, sont maintenues
écartées par des entretoises. Jusque-là, il s’agit
d’une méthode traditionnelle et la logique
voudrait qu’entre chaque lit de terre com-
pacté ou tarrède, l’entrepreneur mette en
place un lit de mortier de chaux pour liaison-
ner. Ce qu’il a choisi ici de ne pas faire, pour
deux raisons : « La qualité de la terre est suffi-
samment bonne pour tenir sans renfort. En
outre, la chaux résulte d’un process industriel
qui consomme beaucoup d’énergie grise.
C’est pourquoi je préfère m’en dispenser
Compactage quand c’est possible. » Seul le mur nord et les
« Après avoir été triturée et mélangée, la terre est versée au godet dans les banches en couches
successives sur une épaisseur de 15 à 20 cm. Elle est ensuite compactée de manière homogène à
combles perdus sont isolés. Le mur à l’exté-
rieur l’est à l’aide de panneaux de liège dans
l’aide d’un fouloir pneumatique. Le damage de la terre réduit l’épaisseur moyenne à un tiers. Puis, sa partie basse et de panneaux de roseaux
nous passons au lit suivant. Les banches que nous utilisons ont une longueur de 2 m, toutefois recouverts d’un enduit dans la partie haute.
celle-ci peut varier en fonction des contraintes architecturales. » Les combles perdus le sont avec une couche
de 20 cm de copeaux de bois recouverte de
carton de récupération. « Il s’agit d’une alter-
native à la ouate de cellulose. Cette solution
Chaînages ne répond pas aux exigences des normes
« À l’étage, les chaînages, validés par le bureau d’étude, sont réalisés de manière spécifique.
Il s’agit d’un chaînage en bois ancré dans le mur à l’aide de tiges filetées mises en place au
incendie en revanche. À l’intérieur, selon les
espaces, les murs sont laissés à l’état brut ou
préalable dans les banches. Le chaînage, bétonné à plat pour le mettre en pression, est recouverts d’un enduit. Pour le chauffage,
également utilisé comme semelle de répartition pour les fermes de la charpente. L’ensemble c’est l’inertie du mur qui assurera la totalité
ainsi solidarisé est monobloc. Les angles, eux, sont traités avec un mortier de chaux. » des besoins. En ce qui concerne les équipe-
ments techniques, des capteurs solaires
thermiques alimentent des murs chauffants
en brique de terre crue à forte inertie, un
poêle à bois assurera le complément en cas
de besoin. Mais c’est aussi la construction
dans son ensemble, grâce à l’inertie et aux
capacités de stockage de la chaleur de la
terre, qui apportera une partie des apports en
hiver. Les murs de terre sont utilisés comme
moyens de stockage. La chaleur commence à
être captée au mois d’août, pour être douce-
ment restituée avec un déphasage de deux à
trois mois. « Mais je ne suis pas thermicien,
j’attends donc la fin du premier hiver pour
valider cet aspect ». St. M.
œuvre pour les protéger. Le soubassement de la façade nord de 150 et 200 e HT/m2
COÛT FOURNITURE ET POSE
a, quant à lui, été isolé par l’extérieur avec des panneaux de de mur banché dans une configuration
liège. » simple.