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XV° EURO-ASIA RESEARCH CONFERENCES: Pau, 10-11 septembre 2009

 LA BEAUTE ASIATIQUE : un exemple de gestion interculturelle


« global/local », du marketing des produits de soins du visage.

François Bobrie, Cerege, IAE de Poitiers

MdC, Directeur du CEPE, Centre Européen du Packaging, Angoulême

Résumé :
Cette communication résume les résultats de plusieurs études des stratégies marketing-
communication d’un échantillon de firmes majeures de cosmétiques, internationales et nationales,
dans le domaine des produits de soins du visage, « fairness » et « whitening », en Asie, de l’Inde
au Japon, entre 2006 et 2009.

A partir d’un corpus important de plusieurs centaines de packaging-produits, de spots


publicitaires, d’annonces presses et de pages de sites web, ces études, conduites selon une
méthodologie socio-sémiotique, dégagent les valeurs de consommation et les représentations
culturelles misent en récits de communication, (storytelling), par les grandes marques « globales »,
de même que par leurs principales concurrentes « locales ».

L’objectif est d’observer empiriquement, sur des marchés culturellement très différents de leurs
marchés d’origine, les compétences et procédures mobilisées par les entreprises multinationales
pour transformer des politiques de développement « globales » en actions marketing « locales ».
L’enjeu de cette démarche est de vérifier l’étendue, de décrire la nature pratique et théorique et
d’évaluer l’intérêt managérial des concepts du marketing interculturel mis en œuvre pour ces
stratégies. Au-delà, il s’agit de s’interroger sur l’apport de ces approches à l’épistémologie de la
Théorie des Cultures de Consommation (CCT), et, en retour, d’évaluer les apports potentiels de
celle-ci à une meilleure connaissance des processus marketing à dimensions interculturelles.

Enfin, s’appuyant sur les concepts et pratiques étudiés, est esquissée en conclusion la possibilité
d’un modèle d’aide à la décision dans le domaine du marketing stratégique interculturel qui
reposerait, d’un point de vue théorique, sur une « Théorie des Cultures de consommation »,
(CCT), et d’un point de vue méthodologique sur le recueil de l’information selon les procédures et
les protocoles définis par la socio-sémiotique et l’ethnomarketing.

Mots clés : Cosmétiques, Cultures de Consommation, ethnomarketing, marketing interculturel,


sémiotique, valeurs de consommation, fairness, skincare, whitening,

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François Bobrie: XV°EURO-ASIA RESEARCH CONFERENCES-PAU, 10-11 septembre 2009.
ASIAN BEAUTY: an example of « global/local » cross-cultural
management of the marketing of facial skincare products

Abstract:
This paper summarizes the results of several studies of the marketing communication
strategies of a number of major national and international cosmetics companies in the
facial treatment products field, « fairness » and « whitening », in Asia, India and Japan
between 2006 and 2009.
From a large selection of hundreds of product packs, commercials, press
advertisements and web pages, these studies, which were carried out according to a
socio-semiotic methodology, identify the consumption values and cultural
representations communicated (storytelling) by the large “global” brands as well as by
their main “local” competitors.
The objective is to observe empirically the skills and procedures used by multi-
national companies in markets that are culturally very different from their original
markets, in order to transform “global” development policies into “local” marketing
activities. The object of this analysis is to ascertain the scope, describe the practical
and theoretical nature and assess the managerial interest of the cross-cultural
marketing concepts put in place for these strategies. Moreover, we also question the
contribution of these approaches to the epistemology of the Consumer Culture Theory
(CCT), and in return assess their potential contribution to a clearer understanding of
the marketing processes in cross-cultural dimensions.
Finally, as a conclusion, by using as a guide the concepts and practices analysed, we
outline the possibility of a model of decision-making aids in the field of cross-cultural
strategic marketing, that relies, from an theoretical point of view, on one of the
Consumer Culture Theories (CCT), and from a methodological point of view, on the
collection of information according to the procedures and protocols defined by socio-
semiotics and ethno-marketing.

Key words: Cosmetics, Consumer Culture, ethno-marketing, cross-cultural marketing,


semiotics, consumption values, fairness, skincare, whitening.

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François Bobrie: XV°EURO-ASIA RESEARCH CONFERENCES-PAU, 10-11 septembre 2009.
INTRODUCTION
Le développement accéléré d’un marché mondial des biens de grande consommation a
conduit depuis une trentaine d’années les praticiens et les chercheurs à s’interroger sur les
facteurs clés de succès des produits et des gammes de la firme sur des marchés appartenant à
différentes zones économiques, culturelles et linguistiques. Les problèmes des définitions,
des variations et des adaptations des différentes caractéristiques d’une offre, matérielles
ou/et immatérielles, en fonctions des différentes zones visées par les actions de mises en
marché font l’objet d’une abondante littérature, de même que celui posé par les
transpositions des systèmes de marques et de communication, nécessaires à une dynamique
commerciale locale efficace. (Levitt, 1983), (Kaynak,et Cavusgil, 1983), (Usunier, 1985,
1992,1998,), (Hassan et Kaynak, 1994), (Douglas, Craig, et Nijssen, 2001), (Zhang et Smit,
2001), (Hsieh, 2002), (Usunier et Shaner, 2002),( (Fornerino,Zhang,Jolibert, 2006),
(Croué,2006), (Mayrhofer, 2007), (Usunier et Lee,2009).

Si les différentes stratégies marketing, « global », « local » et finalement « glocal »


peuvent s’appuyer sur de nombreuses études théoriques et empiriques, en revanche il
a été beaucoup moins observé et discuté comment le marketing international
interculturel apporte, par ses concepts originaux et sa mise en œuvre même, une
contribution à l’étude de la consommation comme un acte culturel emboité dans un
ensemble complexe de pratiques sociales qui l’englobent,( Polanyi,1957), l’orientent
et la déterminent selon des objectifs de formes de vie plus généraux et complexes, tant
au niveau de l’individu que de celui de son groupe d’appartenance.(Bataille, 1967),
(Baudrillard, 1968,1970), (De Certeau,1974), (Douglas et Isherwood, 1979),
(Appadurai, 1986), (McCraken, 1986,1988), (Mick, 1986), (Holbrook, 1987),
(Lury,1996), (Desjeux,1997), (Arnould et Thompson,2005), (Heilbrunn,2005),
(Featherstone, 2007), (Bauman,2007), (Badot, Carrier, Cova, Desjeux, Filser, 2009).

Dans cette perspective, l’ambition théorique de cette communication est de réexaminer


les outils du marketing international interculturel pour en évaluer leur pertinence et
leur possible apport à l’épistémologie de la Théorie des Cultures de Consommation
(CCT). La problématique choisie à titre de champ d’expérience est celle des stratégies
de produits , de marques et de communication, adoptées en Asie par de grandes
firmes internationales de cosmétiques, sur des marchés culturellement et
économiquement très différents de leurs marchés d’origine, pour développer des
gammes de skincare.  Il s’agit de vérifier empiriquement non seulement leur capacité
à transformer des stratégies marketing « globales » en actions « locales » ou
« glocales », mais surtout  d’étudier comment ces actions et les positionnements
défendus témoignent d’une réflexion sur les dimensions anthropologiques et
ethnosociologiques de la consommation des produits proposés. Les objectifs sont
d’observer et d’identifier une prise en compte, par ces acteurs majeurs, d’une
différentiation du sens à donner à des offres similaires, selon des aires culturelles
considérées comme spécifiques par la façon dont les utilisatrices se représentent la
beauté en général, et celle du visage en particulier.

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Ce choix comme terrain d’observation des produits de skincare pour le visage a été
motivé par une altérité totale par rapport à ceux utilisés dans le monde occidental, qui
plaçait d’emblée les entreprises étudiées dans la nécessité de concevoir des produits
aux caractéristiques différentes de ceux de leurs offres originelles, en Europe ou en
Amériques. L’intérêt de cette recherche est ainsi immédiatement posé par
l’observation de stratégies marketing-communication qui ne peuvent pas être des
reproductions ou de simples adaptation d’actions antérieures, les fonctionnalités des
produits et la nature des gestes de beauté étant radicalement autres en Asie et dans le
monde occidental.

La démarche suivie dans une série d’études, réalisées entre 2007 et 2009, visait à
dégager les valeurs de consommation et les dimensions culturelles exprimées dans leur
communication par un échantillon de grandes marques internationales et nationales
de skincare, présentes en Asie, du monde indien au Japon. A partir de l’analyse d’un
corpus de plus de 1000 packaging-produits, de 300 spots publicitaires, de 150
annonces presses et de pages de 200 sites web, conduite selon une méthodologie
socio-sémiotique, (Floch,1988,1990,1995), (Bobrie 2008), ont été classées,
hiérarchisées et déconstruites les représentations misent en récits ,(storytelling), par
les acteurs « globaux » ainsi que par leurs principaux concurrents « locaux ».

Ces recherches ont consisté à mettre en évidence les structures narratives, les
thématiques et les figures discursives utilisées par des grandes firmes de cosmétiques
pour raconter de façon particulière la valeur de beauté du visage et les logiques avec
lesquelles elles conçoivent les produits cosmétiques susceptibles d’en optimiser la
perfection, pour des utilisatrices asiatiques réparties dans différents pays1. Les résultats
obtenus par l’analyse sémiotique permettent de comprendre différents concepts de
cultures de consommation mobilisés et d’expliquer la pertinence de ces choix pour les
stratégies de communication suivies.

Dans une première partie sont exposés les principaux résultats de ces recherches ethno-
sémiotiques, complétées le plus souvent par ceux d’enquêtes qualitatives ethnographiques
auprès des utilisatrices2. Ils montrent ce qu’il y a de commun et ce qu’il y a de différent
dans les présentations de produits de soins du visage dénommés « fairness » dans le
monde indien et « whitening » dans le monde de l’Asie du Sud-Est, de la Chine et du
Japon et comment les mêmes marques internationales mettent en scène des concepts
marketing différenciés dans leur communication packaging et publicitaire, selon les pays
où elles sont présentes.

Dans une seconde partie, ces stratégies marketing-communication sont comparées avec
certaines spécificités de celles des marques locales. Cette analyse éclaire comment la
confrontation de ces divers positionnements reflètent, selon des mises en œuvre variables, des
stratégies de type « think global, act local » pour les marques internationales. Mais aussi, à
l’inverse, est observé comment les marques locales proposent aussi des concepts nouveaux,
1
Inde, Pakistan, Bangladesh, Indonésie, Thaïlande, Philippines, Chine, Japon.
2
Réunions de groupes de consommatrices et observations et interviews individuelles
ethnographiques à domicile

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créant dès lors une dynamique concurrentielle inédite fertilisant les stratégies de tous les
acteurs, tant locaux que globaux.

En conclusion sont esquissées les conditions de possibilité d’un modèle inductif d’aide à
la décision dans le domaine du marketing stratégique interculturel qui reposerait, d’un
point de vue théorique, sur la prise en compte d’une reformulation de la « Théorie des
Cultures de consommation », (CCT), et d’un point de vue méthodologique sur le recueil
de l’information selon les procédures et les protocoles définis par la socio-sémiotique et
l’ethnomarketing.

I.L’expression de la beauté du visage en Asie, de l’Inde au Japon, dans


la communication des marques internationales de skincare.

En Asie du Sud, du Sud-est et en Extrême-Orient, pour toutes les marques de


cosmétiques, internationales et locales, un bénéfice central détermine l’effectivité du
résultat promis de la beauté du visage féminin : l’éclat lumineux de la peau. Cette
qualité est reconnue et recherchée par toutes les populations, de la vallée de l’Indus au
nord du Japon, quelle que soit la diversité ethnique et le niveau de développement
économique des sociétés des différents pays de cette zone. Alors que l’Occident
accorde une importance majeure à la préservation d’une peau lisse et à la fermeté des
traits du visage, ce qui détermine l’importance économique et marketing
prédominante des produits antirides et anti-âge dans l’offre des produits de soins de la
peau, l’Orient s’attache avant tout à la clarté rayonnante du teint.

En conséquence, l’offre des soins de la peau minore, voire oblitère les problèmes de
défauts physiques, des rides et autres signes mécaniques du vieillissement des
populations européennes et s’organise autour des problèmes de taches et de perte d’un
teint uniforme et clair, qui sont les signes perçus du vieillissement, ou simplement
d’imperfection, des visages asiatiques. Si ces mises en avant différentes des
fonctionnalités correctrices des gammes de produits de soins correspondent bien
évidemment à des problèmes de peaux ethniquement (génétiquement) différentes, il
en résulte pour les marques en compétition la nécessité de concevoir non seulement
des produits spécifiques, totalement originaux par rapport à leurs offres habituelles en
Europe, en Amériques et dans le monde méditerranéen et moyen-oriental, mais aussi
d’élaborer de nouvelles argumentations et stratégies de communication pour mettre en
valeur les positionnements correspondants.

Les responsables marketing sont donc confrontés à des attentes et à des représentations
de soi des consommatrices inédites par rapport aux expériences et aux connaissances
acquises par leurs entreprises, lorsqu’elles sont d’origine occidentale. La réussite de
leurs produits doit alors absolument passer par une compréhension approfondie d’un
problème génétique qui est celui de la production excédentaire de la mélanine
(mélanogenèse de l’eumélanine et de la pheomélanine par les mélanocytes), à l’origine
de l’assombrissement et de la ternissure du teint. Sa résolution conditionne une R&D

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différente afin d’introduire des concepts innovants dans la construction de leurs
gammes. Mais, plus important encore, les avantages concurrentiels exprimés par les
positionnements reposeront sur une compétence à synthétiser les dimensions
culturelles associées aux variations de teint du visage qui sont au cœur des
préoccupations des consommatrices visées, aujourd’hui bien appréhendées par les
études d’usages et d’attitudes.

C’est la raison pour laquelle le développement des offres des produits de soins de la
peau des grandes multinationales de l’industrie des cosmétique en Asie constitue un
« laboratoire » incomparable pour observer la mise en place de solutions pratiques et
de réflexions théoriques qui éclairent tout le champ du marketing interculturel, car il
s’agit bien ici de reprendre dans de nouvelles cultures toute une démarche stratégique
issue d’une autre culture, et non plus de considérer des variations éventuelles d’une
offre universelle, « à travers » son adaptation à différents champs culturels.

Et parce que cette démarche suppose d’étudier en profondeur les déterminations


sociologiques, ethnologiques et psychologiques particulières qui modélisent des
représentations aussi centrales que celles de la beauté, et au-delà, de la féminité et du
rapport entre les genres, elle offre des opportunités sans doute inégalable
d’investigation et de mise à l’épreuve des concepts élaborés par les différentes
recherches concernant les « cultures des consommateurs ». (Arnould et Thompson,
2005, Belk et Sherry, 2007). Peu d’autres « terrains » ou autres cas concrets, dans le
domaine des biens de grande consommation, semblent posséder à ce degré une valeur
heuristique équivalente pour passer au « banc d’essai » un grand nombre d’hypothèses
théoriques, à propos de l’observation du cadre culturel de la consommation asiatique.

A partir du corpus des packagings, des annonces de presse, des spots télévisuels et des
sites internet des marques retenues de skincare, du monde indien au Japon, l’analyse
socio-sémiotique des communications conduit à distinguer trois niveaux dans le
discours des marques « énonciatrices » (Floch,1990,1995) : (i) celui des valeurs de
consommation exprimées, comme en miroir des représentations des attentes des
segments de consommatrices identifiées et visées , (ii) celui des logiques narratives
par lesquelles ces valeurs sont exposées comme des avantages concurrentiels de
l’émetteur-énonciateur et (iii) celui des éléments figuratifs, tant textuels que visuels,
par lesquels ces récits se différencient et illustrent leur démonstration, en faisant appel
à divers éléments culturels dont la référence est supposée partagée avec les
destinataires de la communication.

En suivant les étapes de cette analyse, apparaissent les réponses données par les
marques à des problématiques : (i) de définition des produits et des gammes : qu’est-ce
que la beauté du visage et en quoi l’offre de l’entreprise est-elle pertinente pour « en
prendre soin », (ii) de positionnement : en quoi réside l’avantage concurrentiel de ces
offres, exposé par la communication, (iii) de segmentation : comment le récit raconté
est-il en résonnance avec les références culturelles des destinataires visées plus
particulièrement sur un marché national délimité.

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Valeur de beauté du visage et définition des produits et des gammes.
Si toutes les marques internationales et locales s’accordent pour communiquer sur
l’éclat du teint, critère fondamental qui détermine la beauté du visage, leurs discours
vont relativement diverger sur la nature de ce bénéfice durable, en fonction des zones
géographiques d’une part et selon l’explication de leurs propres solutions d’autre part.

Toutes partent du principe, justifié sur le plan scientifique et technique, que cette
luminosité recherchée de la peau nécessite son éclaircissement et l’élimination de ce
qui la rend plus sombre, tels les taches, les défauts comme les points noirs, les boutons
et cicatrices, etc. De la même façon, elles vont mettre l’accent sur la protection du soleil
et des autres facteurs d’agression de la peau qui favorisent la (sur)production de mélanine et
par suite le brunissement irrégulier (chloasma ou mélasma) du visage.

Ainsi les marques internationales de « soins » vont-elles mettre en avant cet effet correcteur
pour dénommer leurs produits, et leur déclinaison en gammes, par les termes anglais de
« fairness » (en Inde, Pakistan, Népal, Bangladesh, Sri-Lanka, Malaisie et partiellement en
Thaïlande) et de « whitening » (à partir de la Thaïlande et de l’Indonésie et jusqu’au Japon et à
la Mongolie).

L’analyse sémantique de ces deux mots permet déjà d’appréhender : (a) en quoi cette
différentiation résulte d’une prise en compte d’un cadre socioculturel différent pour
ces deux zones, et donc d’une conceptualisation de culture de consommation
différente pour un même type de produit de soins (b) en quoi ces anglicismes
s‘efforcent de restituer des concepts locaux antérieurs à l’introduction de ces produits
sur les marchés concernés, remontant, au moins pour la Chine et l’Inde, à la plus haute
antiquité.

(a) « Fairness » et « Whitening » ont en commun de signifier en anglais


l’éclaircissement recherché de la peau. Mais « Fairness » est un substantif, qui indique
un état, et « whitening » un présent progressif qui indique une action. Autrement dit le
marketing du « fairness » suppose un résultat stable à obtenir, avec un « avant » et un
« après » usage du produit, alors que le « whitening » se décrit comme une routine,
comme un geste quotidien, à l’instar des pratiques d’hygiène et d’entretien de la
personne. Le « fairness » est une réalité tangible, une dotation (endowment) qui
change l’apparence de l’utilisatrice vis-à-vis des autres, sans qu’elle change elle-
même, à la manière du résultat d’un maquillage, le « whitening » est une
transformation intentionnelle de la personne qui exprime un effort et un respect de soi,
et, comme la propreté, un processus ressenti par son achévement/inachévement..

« Fairness », comme substantif signifie principalement en anglais « équité » ou


« honnêteté » ou même « beauté », autant que « blancheur ». Son marketing jouera sur
ce triple sens pour donner une dimension morale à la beauté de l’utilisatrice au « teint
clair », donc « honnête »

« Whitening », l’action de se blanchir, plus triviale en apparence, sera néanmoins mise


en scène symboliquement comme propreté morale, comme pureté des sentiments, qui
se manifeste par la pureté de la blancheur du visage, souvent comparée dans la

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communication à de la porcelaine, dont l’éclat translucide dépend de la purification et
de la finesse du travail de la céramique.

Ainsi à partir de la quête d’une même valeur de beauté associée à une peau plus claire,
ou plus exactement moins sombre, se communiquent des valeurs de consommation
culturelles proches mais néanmoins différenciées par des dénominations de produits
particulières. Celles-ci témoignent que les multinationales Unilever et P&G, qui
créèrent ces marchés, et imposèrent ces dénominations, à partir des années vingt et
trente du XX° siècle, avaient pris consciente de l’importance, pour leur réussite
commerciale, d’intégrer dans leurs propositions les effets des représentations
culturelles des deux grandes cultures asiatiques, celle du monde indien, qui influence
le monde malais, et celle du monde chinois, auquel se rattachent les cultures
japonaises (et coréennes et vietnamiennes, non étudiées ici)

« Fairness » correspond à une civilisation hiérarchisée par le système des castes,


« varna », qui signifie littéralement en sanskrit « couleur », et dont le blanc symbolise
la plus haute dans l’échelle de la respectabilité sociale et religieuse hindoue, celle des
brahmanes. Dans ce contexte de représentations, le « fairness » n’est pas seulement un
soin, mais l’expression symbolique d’un don mérité qui installe l’utilisatrice dans une
position sociale favorable, « honnête ». Sa beauté « éclatante » n’est que la
consécration de la place qu’elle « doit » occuper dans la société en général et dans sa
communauté en particulier, elle est la matérialisation, qu’elle porte sur son visage, de
son « dharma », c'est-à-dire de la loi morale qui la guide et qu’elle respecte pour se
construire une identité hiérarchiquement supérieure, donc meilleure. La
communication du « fairness » amplifie ainsi tous les bénéfices sociaux que l’on peut
tirer d’une telle situation de clarté du visage, telles que la reconnaissance
professionnelle, les nouvelles opportunités de progression dans l’échelle sociale et
bien sûr, ce qui est au cœur du destin de la femme indienne, encore aujourd’hui, la
réussite d’un beau mariage.

« Whitening » correspond à une civilisation de la transformation permanente des


choses et des êtres, le Tao, où nulle frontière immuable ne sépare le corps et l’esprit, ni
l’humain de la nature. Le « whitening », plus qu’un soin est un geste qui permet de
passer d’un état à un autre, un processus qui révèle la beauté qui était déjà là, à
l’intérieur de soi, et qui s’exprime désormais à l’extérieur sur le visage, aux yeux de
tous. La communication du « whitening » amplifie toutes les dynamiques de
transformation esthétiques et mentales de l’utilisatrice, son assurance nouvelle à
affronter non seulement les éléments physiques qui gênent l’expression de son
« éclat », comme le soleil et la pollution, mais aussi son assurance dans la vie sociale
et intime qui lui permettent de « dominer les situations ».

(b) Sans préjuger de la pertinence des intuitions et du niveau des connaissances des
cultures asiatiques des responsables marketing des grandes firmes occidentales dans la
seconde moitié du XX° siècle, lorsqu’ils imposèrent sur ces nouveaux marchés les
dénominations de « fairness » et « whitening », il est probable que celles-ci, plus

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directement et plus simplement, se veulent des « traductions » plus ou moins fiables,
des expressions locales utilisées pour désigner un même type de bénéfices pour les
consommatrices. L’étude de celles-ci, dans les communications actuelles (2007-2009),
permet de mettre en évidence les écarts qui subsistent entre ces mots anglais proposés
et les véritables contenus sémantiques communiqués dans leur langue nationale aux
destinataires potentielles3, pour décrire les caractéristiques des produits. A titre
d’exemples les plus significatifs on soulignera les concepts tels qu’ils sont présentés
en Inde, Thaïlande, Chine et Japon.

Inde : par simplification, seul l’hindi est ici mis en perspective par rapport à
« fairness », sachant que les autres grandes langues du continent indien donneraient
lieu aux mêmes constructions syntaxiques et lexicales.

« fairness » est en fait la traduction en hindi de « Gorepan ki kreem », « une crème


pour obtenir un teint clair », ou encore plus exactement, un effet « pan » de clartés
« gore ». On notera ici que « gore » est le pluriel de « gora », la clarté : en effet la
crème est supposée apportée des effets ou des mouvements de variations lumineuses
plus claires, « gore » sur le visage et non pas « la clarté » en tant que telle. Cette
signification est renforcée par le sens implicite de jeu de lumière et d’ombre associé au
mot « pan ». « Gorepan » s’oppose à « sanwlapan » le teint sombre, (l’effet de sombre
ou d’ombre sur la peau), qu’il s’agit d éliminer ou/et de corriger. Il faut remarquer à ce
stade d’expression que la notion de « clarté » est différente de la couleur blanche,
« safedi » et de son opposé la couleur noire «  kaala » et que la recherche de clarté et
de correction de la ternissure n’est en rien une recherche d’assimilation à une
« blancheur » occidentale, contrairement à ce qui a pu être affirmé dans des études
culturelles superficielles et polémiques ces dernières années, notamment aux Etats-
Unis.4 Sur un plan marketing, comme on le verra plus loin, l’enjeu sera donc
d’argumenter comment et pourquoi on joue entre l’ombre et la lumière et aucunement
de transformer le visage des indiennes en masque d’américaines ou d’anglo-saxonnes
« blanches », ce qui n’est d’ailleurs jamais le cas dans le corpus étudié. (Et, à notre
connaissance, n’a jamais été un thème de communication)

Thaïlande : Selon les offres, « fairness » et « whitening » se veulent les traductions du


thaï « bamroong pew kao », dont la signification est : faire revivre, « bamroong », la
peau, « pew », blanche « kao ».A nouveau ce contenu sémantique met l’accent sur une
action qui modifie la clarté du teint plutôt que sur une indication de couleur. De
nombreuses expressions permettent de préciser, par des allégations sur les faces
principales des packagings la nature fonctionnelle des produits. Ainsi il s’agit
d’obtenir, par cette action « revitalisante », une peau brillante/éclatante, « pleng-pra-
kai » et rosie « om-chom-poo », ou encore de disperser « kra-jai » la lumière,
3
Afin de simplifier la lecture, tous les mots cités sont transcris en caractères latins, dont le pinyin pour
les caractères chinois, et selon les transcriptions officiellement utilisées, pour les mots d’origine
étrangères
4
Cette confusion entre clarté du teint et « blanchitude » a pu être induite par l’expression « gore » qui
désignait les anglais dans l’Inde coloniale, mais dont la traduction fidèle serait plutôt « les (visages)
pales » que « les blancs ».

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« saeng », sur tout le visage. Par rapport au monde indien les bénéfices de clarté vont
être ici plutôt associés à une vitalité de la personne, à sa bonne santé et par suite à une
capacité à se protéger de la pollution ou des agressions naturelles du soleil et du
climat. Le produit éclaircissant est ainsi toujours un produit qui établit une relation
étroite entre le « soin » et le « sain », et qui par extension renvoie à une naturalité
existentielle primordiale que la vie urbaine moderne altère.

Chine (et monde sinophone) : Le mot « whitening » se veut la traduction du chinois


« mei bai », qui signifie la beauté « mei », par le blanc, « bai », ou plus exactement
selon la syntaxe chinoise, « le blanc pour la beauté » . On constate immédiatement la
faiblesse de la solution sémantique de l’anglais qui fait l’impasse sur le résultat
d’embellissement recherché et qui se focalise sur l’action du « blanchiment ». Mais,
plus insuffisant encore sur le plan des bénéfices promis à l’utilisatrice, « whitening »,
terme purement technique, ne permet pas de saisir la richesse des expressions
chinoises développées sur les packagings et les communications pour décrire les
fonctionnalités des produits, telles que « tou bai », le blanc de la transparence,
(Shiseido, Clarins, Vichy), « Liang bai », le blanc lumineux, (Estée Lauder,), « Huan
bai », le blanc radieux, (Estée Lauder, P&G SKII, Dior), « Jing bai », le blanc de la
pureté, (Unilever Pond’s, Garnier), etc. Toutes ces dénominations de produits font
référence finalement à un geste ancestral de la culture chinoise concernant la beauté du
visage, qui se trouve déjà résumé dans une citation de la littérature antique, classique,
devenu aujourd’hui une phrase proverbiale connue de tous et de toutes, selon laquelle,
« l’éclaircissement permet de cacher tous les défauts » : « yi bai », « du blanc »,
« zhe », « couvre » (à la façon dont les nuages couvrent le soleil en laissant passer sa
lumière de façon diffuse et en l’uniformisant), « bai chou », « cent défauts ». Cette
maxime, comme il le sera étudié infra, s’ouvre également sémantiquement sur des
thèmes de communication de la beauté comme rayonnement intérieur qui, en quelque
sorte, absorbe les défauts et les ternissures de la surface du visage pour un observateur
extérieur

Japon : Comme très souvent lorsqu’il s’agit de décrire des actes de la vie quotidienne,
surtout lorsqu’ils s’insèrent dans des formes de vie traditionnelles, parfois millénaires,
la langue japonaise reprend les structures lexicales du chinois, qui ont fécondé son
développement écrit. Ainsi « whitening » est maintenant la traduction de « bi haku »,
où l’on retrouve la beauté, « bi », par le blanc « haku », ou comme en chinois, « le
blanc pour la beauté ». A nouveau le mot anglais est donc incapable de rendre compte
de la véritable complexité du mix-produit, et comme en chinois, les marques doivent
élaborer des compléments de dénominations ou des allégations packaging
supplémentaires pour rendre manifestes des bénéfices offerts à l’utilisatrice. Les plus
fréquents, non seulement utilisés par les grandes marques japonaises, mais également
par la majorité des grandes marques occidentales présentes au Japon sont les
dénominations qualifiantes de « Tô mei kan » et de « Sun da ». La première peut se
traduire par « le sentiment, «kan », de l’expression translucide, « Tô », d’une
luminosité, « mei », du visage » : encore plus que les expressions chinoises, le
japonais met ici l’accent sur une sensation, et donc un processus perceptible, autant
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François Bobrie: XV°EURO-ASIA RESEARCH CONFERENCES-PAU, 10-11 septembre 2009.
que sur l’état lui-même de la peau, pour décrire le véritable bénéfice obtenu par le
produit. La seconde expression est formée à partir du verbe « sumu » qui signifie
« obtenir une transparence et/ou une limpidité d’une surface par sa purification ou par
dispersion des particules et impuretés susceptibles de la troubler ». « Sunda » rend ici
l’idée d’une peau qui s’éclaire grâce à la pureté de sa surface sans aucun défaut, qui
comme une eau limpide qui étincelle sous le soleil, réverbère ses rayons qui semblent,
de ce fait, surgir de sa profondeur même, translucide. Comme en Chine, on constate à
nouveau que cette qualité de limpidité-translucidité s’ouvre sur une sémantique
d’association de la luminosité du teint au rayonnement d’une beauté intérieure.

En synthèse, l’étude détaillée des mots et expressions utilisés par les marques pour
expliquer et communiquer leurs concepts produits et les valeurs ou bénéfices de
consommation qu’ils prétendent apporter aux utilisatrices asiatiques montre une
connaissance, pratique et empirique, sinon théorique, des déterminations culturelles de la
beauté dans les pays où elles se développent. Toutes les grandes marques internationales,
peut-être aussi par benchmark de leurs expériences respectives, ont finalement reconstitué
un cadre de valeur de consommation du  « fairness »/ « whitening » qui répond à
l’axiologie sémiotique (Greimas, 1983), (Floch,1988,1990) suivantes :

- une opposition entre le « Clair » et le « sombre »,

- une contradiction à résoudre entre le « devenir claire » et « l’impur » (Chine, Japon,


Inde), ou le « malsain » (Thaïlande), une contradiction symétrique à résoudre entre le
sombre et « le lumineux, le radieux » (au sens plutôt physique, puis symbolique en Chine
et au Japon et au sens plutôt symbolique en Inde).

Soit le carré sémiotique partagé par toutes les expressions des concepts produits des
différentes marques :

Devenir plus claire, plus Avoir une peau moins


pure sombre

Avoir une peau plus Eliminer l’impureté, le


lumineuse malsain

Cependant, une étude plus approfondie, qui ne peut être développée dans le cadre de
cette communication, montre que de nombreuses marques internationales témoignent
parfois d’ insuffisances dans la déclinaison de discours cohérents sur l’ensemble d’un
mix-communication, soit entre les différents média utilisés dans un même pays, soit
dans la prise en compte des variations à introduire dans les différentes zones

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François Bobrie: XV°EURO-ASIA RESEARCH CONFERENCES-PAU, 10-11 septembre 2009.
culturelles, à propos de l’importance à accorder à l’expression respective des quatre
pôles de la valeur de l’éclat du teint. Cela laisse supposer une insuffisance de réflexion
théorique adéquate et suffisamment approfondie, pour bien comprendre la pertinence
des choix effectués dans ce cadre d’application axiologique. Il en résulte que la mise
en récit (storytelling) de ces valeurs de consommation, bien qu’en résonnance avec les
schèmes culturels des utilisatrices, recueillis et validés lors des études qualitatives,
s’avère toujours une route semée d’obstacles, et qu’elle doit faire l’objet d’une
attention constante et rigoureuse comme on va l’observer maintenant à travers
quelques exemples significatifs.

Récits de l’éclat de la beauté du visage et construction des positionnements.


La communication des effets de lumière et de l’éclat du teint qui génèrent la beauté du
visage met les responsables marketing des grandes marques internationales devant
nombres de difficultés narratives pour construire leur positionnement: doivent-ils
mettre l’accent sur l’aspect réaliste, physique, d’une transformation, d’un passage du
sombre au clair, ou simplement s’attacher au résultat final de radiance? Comment
montrer que le « blanc » n’est qu’un moyen d’obtention de l’éclat, une étape et non le
bénéfice lui-même? Faut-il ou non relier le bénéfice physique, de l’apparence, et le
bénéfice psychologique et sociale, existentiel, de l’éclat et selon quelle modalité ?
Toutes ces questions et bien d’autres du même type portent sur ce que la sémiotique
du récit (Greimas, 1983), identifie comme l’Objet de valeur(s) que le produit Sujet est
supposé permettre d’acquérir par les consommatrices destinataires.
Une autre série de questions portera sur le statut et la mise en scène de l’énonciation
de la marque elle-même, c'est-à-dire sur ce que la sémiotique narrative et discursive
circonscrit comme le problème de l’énonciateur et du destinateur. Doit-on faire
apparaître l’origine étrangère de l’énonciateur, au risque de faire naître le doute sur ses
compétences à résoudre un problème ethno-culturel qui ne lui est pas a priori
familier ? Doit-on créer des marques spécifiques par pays ? Doit-on mettre en avant
dans les récits publicitaires, spots et annonces, les compétences de l’énonciateur-
destinateur, ou la représentation des satisfactions supposées des consommatrices,
destinataires-énonciataires?
L’étude empirique des stratégies montre que les marques apportent des réponses
différentes à toutes ces questions, en se fondant, à nouveau, sur leurs connaissances
des cultures de consommation locales, obtenues tant par des études qualitatives ad-hoc
que par des benchmarks et, sans doute aussi, par essais et erreurs. Les principales
options observées sont résumées dans le tableau ci-dessous qui croise leurs positions
prises dans différents pays, concernant les « actants » de leurs récits publicitaires :
énonciateur, destinateur, sujet, objet, destinataires, énonciataires.

Nb : sans entrer trop profondément dans la technique de la sémiotique discursive, on


posera ici, par simplification, que l’énonciateur correspond à la firme, le destinateur à
la marque dite « ombrelle » des gammes considérées de la firme, les destinataires aux
cibles de communication telles que figurées dans les récits publicitaires et les
énonciataires aux cibles effectives de consommation.

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François Bobrie: XV°EURO-ASIA RESEARCH CONFERENCES-PAU, 10-11 septembre 2009.
Tableau N°1 : options de traitement des actants des récits de communication par
les grandes marques internationales de skincare (visage), par pays.

Pays
INDE THAÏLANDE INDONESIE CHINE JAPON
Actants
Le leader Unilever, Valorisation de
ENONCIATEUR plus de 55% de part l’origine étrangère idem idem Valorisation de
de marché, se comme caution de l’origine
présente comme savoir faire étrangère
indien : Hindustan technologique : comme signe
Lever (HUL) Unilever, P&G, de qualité
D’autres grandes Shiseido, Kao, premium : Dior,
firmes mettent aussi L’Oréal, Garnier, Chanel,
en valeur leur Beiersdorf, Lancôme, SKII
implantation locale : Amway,etc. (P&G), Estee
Nivea India, Amway Lauder,
India, Avon India, Clinique
L’Oreal India
Marques spécifiques Marques globales
DESTINATEUR pour l’Inde pour avec qualifiants Idem Idem, mais avec Marques
Unilever-HUL : Fair réservés à la zone souvent un premium
&Lovely, Lakmé, asiatique : Pond’s enrichissement globales avec
Vaseline Intensive. White Beauty sémantique par la qualifiants :
marques globales (Unilever), Olay transcription en Estee Lauder
pour Nivea : Nivea White Radiance caractères chinois CyberWhite,
Visage, Nivea Crème (P&G), Eucerin Clinique
et pour Amway : White Solution Dermawhite,
Artistry (Beiersdorf), Dior Snow,
L’Oreal Paris Lancôme Blanc
White Perfect Expert, etc..
(L’Oreal)
Biore Reflex white
(Kao),etc..
Produits Produits spécialisés Produits Produits Produit
SUJET multifonctions, complémentaires, multifonctio spécialisés spécialisés
gammes courtes gammes courtes ns, gammes complémentaires, autour d’un
courtes gammes longues produit central,
gammes longues
L’éclat avec l’accent L’éclat avec L‘éclat avec L’éclat avec L’éclat avec
OBJET mis sur l’élimination l’accent mis sur le l’accent mis l’accent mis sur l’accent mis sur
du sombre associé à résultat final de sur sa le résultat final de le résultat final
l’impur signe de bonne corrélation radiance, associé de radiance,
santé-vitalité avec la à la beauté associé à la
propreté intérieure beauté intérieure
et à la maîtrise
de soi

La jeune fiancée qui La jeune fille La jeune La jeune femme La femme jeune
DESTINATAIRES prépare son mariage urbaine qui fille qui qui affirme par sa et moins jeune

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François Bobrie: XV°EURO-ASIA RESEARCH CONFERENCES-PAU, 10-11 septembre 2009.
construit sa prépare son beauté son qui affirme sa
séduction mariage autonomie sociale féminité et sa
personnalité
Les jeunes femmes idem idem Les femmes Toutes les
ENONCIATAIRES urbaines femmes

Dans le cadre restreint de cette communication, on laissera de côté l’examen des statuts de
l’Enonciateur, qui relève, pour l’Inde, de l’histoire économique coloniale et post-coloniale5 et
pour les autres pays de problématiques de perception des origines, aujourd’hui bien étudiées
( Usunier, Cestre, 2007).

L’étude des choix de marques, les Destinateurs des récits de communication, montre en
revanche une réflexion culturelle approfondie, la plupart des marques ombrelles globales ayant
été requalifiées avec des ajouts qui précisent les valeurs de consommation décrites supra, ce
qui permet leur adaptation locale, soit à l’ensemble de la zone : exemples, « Pond’s white
Beauty », « Dior Snow », « Olay White Radiance », « Shiseido, white Lucent »,etc, soit à un
pays ou groupe de pays : exemples, « Eucerin white solution » ou « Bioré Clarity
Radiance »en Thaïlande et Indonésie. Enfin, en Chine, comme pour la définition précise des
concepts de produits, la transcription en chinois permet de mieux préciser le sens à donner
localement à l’ombrelle globale : exemples, « Shiseido white lucent » devient « tou bai meiji
hufu xilie » (la gamme pour la beauté de la peau grâce à une transparence translucide),
« Pond’s white beauty » devient « liang cai jing bai » (lumière, éclat, pureté, clarté), « SKII
whitening source », (P&G), devient « wei jing huan bai », (l’éclat incomparable d’un pur
cristal), « Estée Lauder Cyberwhite » devient « jing zhi huan bai » (l’intelligence de l’éclat
brillant du cristal), « L’Oréal white Perfect » devient « xue yan mei bai » (le blanc pour la
beauté du visage qui lui donne la blancheur de la neige),etc..

Les rôles des produits et des gammes, Sujets de la communication, sont à la fois définis par
leurs caractéristiques, exprimées par rapport aux valeurs de consommation à mettre en
évidence, mais aussi par le développement économique du pays. Ainsi, en Inde, Indonésie, et
dans une certaine mesure en Thaïlande, les produits sont présentés comme pouvant remplir
toutes les fonctions nécessaires à l’obtention de l’éclat (nettoyage de la peau, hydratation,
éclaircissement proprement dit), afin de pouvoir donner accès au bénéfice final avec un
minimum de gestes et d’achats de produits correspondants. En Chine, les gammes longues
sont privilégiées, avec souvent plus de dix produits différents, chacun apportant sa
contribution au résultat ultime de la « radiance ». Au Japon, les gammes sont à la fois longues,
par démultiplication des produits spécialisés dans chaque fonction complémentaire, mais aussi
construites à partir d’un produit central, à caractère quasi médical, qualifié de « Yaku Yô »
(médicamenteux), qui crédibilise toute la complexité de la construction de l’offre en
l’installant sur une base technico-scientifique solide, la régulation de la mélanogenèse.

L’expression narrative de l’Objet de valeur, l’éclat du teint, varie selon les pays. En
Inde l’accent est mis sur le passage de « l’impur », au sens physique et symbolique, à
la clarté radieuse présentée comme une valorisation sociale et psychologique comme
5
Unilever est présent en Inde depuis 1888 et la filiale à l’origine d’Hindustan Lever Limited fut créé en
1933. HLL dans sa forme actuelle remonte à 1956

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François Bobrie: XV°EURO-ASIA RESEARCH CONFERENCES-PAU, 10-11 septembre 2009.
l’exprime très explicitement les marques ombrelles « Fair & Lovely » (HUL), ou
même « Lakmé » (HUL), fille d’un brahmane, héroïne mythique indoue de la
résistance à la colonisation anglaise. En Indonésie, l’éclat est directement lié à la
propreté, ce qui est en résonnance avec les rites d’ablution musulmans, mais aussi
avec la naturalité d’une peau fraiche et jeune, que le produit permet de retrouver. En
Thaïlande, l’accent sera mis sur cette naturalité présentée comme une force vitale qui
se manifestera par un nouvel éclat et qui sera au cœur de la séduction. En Chine, et
encore plus au Japon, l’éclat sera la révélation d’une beauté intérieure qui émane
désormais sur le visage de l’utilisatrice.

Les Destinataires, cibles de communication représentées dans les spots et les annonces
sont des jeunes filles qui se préoccupent de leur mariage, en Inde et en Indonésie, et
dans une moindre mesure en Thaïlande et en Chine, où l’affirmation de soi dans la
société est un thème plus développé. Au Japon, cette confiance en soi est pérennisée,
de la jeunesse à l’âge mur, à la façon dont l’Occident raconte aujourd’hui les produits
antivieillissement.

Les Enonciataires, ou consommatrices réelles, sont évoquées par les textes


publicitaires et ceux des packagings : il s’agit en Inde, en Indonésie et Thaïlande
essentiellement des jeunes femmes, proches en fait des cibles de communication, en
Chine et au Japon, de toutes les femmes pour lesquelles le souci de soi et de son
apparence fait partie de sa forme de vie.

En synthèse, les stratégies de communication des marques permettent d’établir des


positionnements spécifiques, à la fois par la façon dont elles vont mettre l’accent sur
tel ou tel pôle des valeurs axiologiques dans la structure de leurs récits publicitaires et
packaging, et dont elles vont le décliner pays par pays. Cette différentiation va pouvoir
être ensuite accentuée et optimisée par le niveau figuratif, ou illustratif, de ces récits
comme il va l’être montré avec quelques exemples

Thèmes et figures des récits et segmentation des marchés.


Par simplification dans une perspective de synthèse de résultats de plusieurs études
conduites sur plusieurs années, on se limitera dans ce paragraphe aux exemples les
plus significatifs des thèmes et figures des spots télévisés et on n’abordera pas ceux
des annonces presse, des sites internet et des packagings, qui pourraient, pour chacun
de ces domaines de communication, faire l’objet de publications particulières. Le
Tableau N°2 ci-dessous résume par pays les principaux thèmes de communication
ainsi que les situations et les personnages qui sont les supports des récits des
marques.

Tableau N°2 : Thèmes et figures des récits de communication TV des grandes


marques internationales de skincare (visage), par pays et classées par fréquence
d’occurrences

Thèmes & Thèmes généraux Situations Personnages


figures

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François Bobrie: XV°EURO-ASIA RESEARCH CONFERENCES-PAU, 10-11 septembre 2009.
Pays
INDE 1- réussites sociales 1-scènes de la vie quotidienne, 1- Jeunes filles 18-25 ans,
et professionnelles bureau, université, tourisme, célibataires actives,
2- réussite sentimentale rencontres avec des amies étudiantes, jeunes
et du mariage 2- scènes intimes en famille professionnelles, avocates,
3- Argumentation technique 3- scènes d’utilisation- hôtesses de l’air, journalistes,
produit application des produits actrices
4- scènes de laboratoires et 2- jeunes femmes mariées
théâtralisation technique
THAÏLANDE 1-séduction et réussite 1-scènes de séduction 1-jeunes filles urbaines,
sentimentale 2- scènes intime d’application actives, classe moyenne
2- Argumentation technique 3- théâtralisation techniques, 2-personnages
et démonstration produit laboratoires identificatoires, actrices,
présentatrices, etc.
INDONESIE 1- Argumentation technique 1-scènes d’initiation 1-jeunes filles urbaines,
et démonstration produit apprentissage d’utilisation. actives, classe moyenne
2-séduction 2-scènes de séduction supérieure.
PHILIPPINES 1-Séduction et réussite 1-scènes d’initiation Jeunes femmes actives,
Sentimentale apprentissage d’utilisation. jeunes filles classe moyenne
2-Argumentation produit 2-scènes de séduction supérieure
CHINE 1-affirmation de soi, 1- théâtralisation techniques, 1-jeunes filles urbaines
construction d’une Laboratoires professionnelles
personnalité 2- scène de la vie d’une femme 2- jeunes femmes
2-séduction et réussite moderne, active, maîtrisant son
sentimentale destin
3 -Argumentation technique 3-scènes de séduction
et démonstration produit
JAPON 1-affirmation de soi, 1-scène de la vie d’une femme 1- Jeunes femmes actives
construction d’une moderne, active, maîtrisant son 2- femmes matures
personnalité destin 3-jeunes filles
2 -Argumentation technique 2- Théâtralisation scientifique
et démonstration produit et technique.

Les thèmes et figures narratives confirment un double mouvement de


valorisation différenciée de la beauté du visage, d’Ouest en Est, de l’Inde au Japon :
- (i)comme construction d’une identité féminine forte et indépendante, thème quasi
exclusif au Japon et toujours absent, du moins de façon explicite, en Inde , s’opposant
à celle d’une insertion matrimoniale, communautaire et sociale, thème quasi exclusif
en Inde et toujours absent au Japon.

- (ii)comme bénéfice promis à des cibles de communication, et par suite de


consommation, de plus en plus larges, des jeunes filles, et des « fiancées »,en Asie du
Sud-est et en Inde, à toutes les générations de femmes, en Chine et surtout au Japon.

En revanche, en cohérence avec une présomption d’excellence technique et qualitative


associée à la grande firme internationale, on note, avec toutefois des intensités variées
selon les marques, une présence permanente d’argumentations techniques et de
démonstration de l’efficacité des produits. Celles-ci se doublent dans les pays

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François Bobrie: XV°EURO-ASIA RESEARCH CONFERENCES-PAU, 10-11 septembre 2009.
émergents d’une pédagogie initiatique du geste de beauté, ce qui correspond
également aux segments visés des jeunes filles qui constituent souvent la première
génération ayant accès à une économie de consommation marchande.

A l’issue de ce tour d’horizon synthétique des stratégies de marketing-


communication, il se dégage de façon très nette que les grandes firmes internationales
de skincare ont su mettre en place des outils de compréhension des problèmes posés à
la beauté du visage dans les différentes cultures asiatiques qui concernent leurs
activités, mais bien au-delà, qu’elles ont su analyser les différentes formes
d’instrumentalisation de cette beauté dans la vie sociale des femmes d’une part et les
différentes formes de construction de soi que cette transformation, autant mentale que
physique, potentialise d’autre part. Cette capacité à ne pas séparer les consommatrices
de leur environnement culturel est bien évidemment le fruit de nombreuses études de
marché à dimension ethnologique et sociologique, et pour les plus anciennement
implantées, comme Unilever, P&G, Shiseido, Kao, une capitalisation sur des
décennies d’expériences dans les différents pays de la zone. On pourrait dire que leur
démarche est résolument locale, même lorsque certaines de leurs marques ombrelles
témoignent d’une politique globale, comme Pond’s (Unilever), Olay (P&G), Garnier
(L’Oréal), Estée Lauder, Nivea (Beiersdorf), et un certain nombre de marques du
Groupe Shiseido, telles Auprès, White Lucent, Pure&Mild, etc. Cependant, des
différences de positionnement et de conception des offres sont encore identifiables
lorsqu’on les compare avec les grandes marques locales nationales avec lesquelles
elles sont en concurrence. L’étude de quelques uns de ces écarts va permettre de
comprendre les enjeux anciens ou nouveaux qui constituent aujourd’hui les nouveaux
fronts de leur dynamique de développement local.

II. La communication des marques locales de skincare et la


dynamique toujours inachevée des stratégies « glocal ».

Les grandes marques nationales ne diffèrent évidemment pas des marques


internationales sur le cadre axiologique de la valeur d’éclat du teint et de radiance
lumineuse du visage. A contrario, directement ou indirectement, elles ont souvent
servi, volens nolens, de guide à leurs concurrentes étrangères pour le comprendre et
l’adopter. Sur un plan historique, il faudrait étudier le rôle essentiel joué par Shiseido
fondé en 1872, puis par tous les grands groupes japonais tels Kao et Kanebo, tous

17
François Bobrie: XV°EURO-ASIA RESEARCH CONFERENCES-PAU, 10-11 septembre 2009.
créés à l’ère Meiji (1868-1912), pour initier tout au long du XX° siècle les firmes de
cosmétiques occidentales aux finesses du « whitening » (et comme il a été vu supra,
l’adoption de cet anglicisme boiteux pour « bihaku » témoigne des difficultés des
élèves à retenir la leçon des maîtres). On considère généralement que le premier bi-
haku moderne, conçu selon une formule chimique de synthèse, est celui créé par
Shiseido en 1917. Du côté indien, Hindustan Unilever Limited (HUL), depuis sa
création en 1956, a toujours eu des associés nationaux et sa marque Lakmé est à
l’origine une marque rachetée au groupe Tata.

Les différences entre les marques nationales et internationales sont plutôt à identifier
(i) dans les moyens proposés pour obtenir l’efficacité du « fairness »/ »whitening »,
ainsi que (ii) dans la conception de la beauté qui résulte d’un visage éclatant et
radieux.

L’efficacité des concepts produits, entre chimie de synthèse et naturalité des


formules
Les marques nationales, dans tous les pays de la zone, se caractérisent par
l’importance donnée dans le récit de l’efficacité du produit aux principes actifs
naturels dérivant d’ingrédients végétaux ou minéraux (comme par exemple le sel de
l’Himalaya et la nacre). Dans le monde indien, et par extension indo-malais et thaï, la
référence est la culture ayurvédique et dans le monde sinisé et par extension au Japon,
(sous l’appellation Kampo), la référence est la connaissance de la médecine chinoise
traditionnelle qui concerne autant la cosmétique et la diététique que la médecine
thérapeutique proprement dite. On notera que l’Ayurvéda, qui signifie
« connaissance » (véda) « de la vie » (ayur), ne diffère pas fondamentalement dans ses
principes cognitifs de ceux de la médecine chinoise qui est fondée sur une
classification des plantes dans le « Ben cao gang mu » qui signifie « les classifications
(mu) essentielles (gang) des fondamentaux des plantes (ben cao) »6.

De façon originale toutes ces connaissances traditionnelles sont mobilisées dans la


communication comme étant actuelles ou réactualisées et reflétant une R&D vivante,
innovante, dans un rapport non contradictoire avec la science et la technologie
modernes, et absolument pas comme un « retour aux sources » comme cela est
souvent le cas en Occident.

Le Tableau n°3 résume par pays les principales utilisations thématiques et figuratives
de ces traitements traditionnels dans l’offre actuelle des produits de
« fairness »/ »whitening » des grandes marques nationales.

Tableau n°3 : les thèmes narratifs et figures des méthodes traditionnelles dans les
communications des grandes marques locales de « fairness » / « whitening »

6
Cette ouvrage dont la première version fut rédigée par le médecin Li Shizhen en 1578, sous la
dynastie Ming, collecte et organise les savoir empiriques sur les plantes contenus dans 800 écrits
antérieurs dont les premiers remontent à -1100 BC

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François Bobrie: XV°EURO-ASIA RESEARCH CONFERENCES-PAU, 10-11 septembre 2009.
Thèmes & Marques nationales Principes actifs figurés Thèmes communiqués
figures
Pays
INDE Aroma magic Divers Extraits végétaux. A- Thèmes fonctionnels :
Aromaz Aloe Vera et divers, lait, miel - Protection anti UV naturelle,
Ayur Herbals Divers fruits et plantes naturalité des recettes sans
Boroplus-Emami-Himani Divers plantes ayurvédiques danger pour la peau, douceur de
Dabur-Vatika Divers fleurs et plantes la peau, recettes bien adaptées aux
Everyouth Divers fruits et fleurs différents défauts « sombres »,
Fairever-Cavin care Fruits, fleurs, lait longue durée du fairness
Fairone-Shahnaz Hussein fruits et fleurs ayurvédiques
Himalaya Herbals Recettes ayurvédiques B- Thèmes des savoir-faire : 
Joy Fruits Reprise des recettes ayurvédiques
Kama Ayurvéda Recettes ayurvédiques ou naturelles grâce à la
Lotus Herbals Plantes et argile technologie moderne qui
Nomarks Recettes ayurvédiques permet de les adapter et de les
VLCC Divers plantes améliorer et d’obtenir les mêmes
résultats que la chimie de synthèse,
sans les risques pour la peau
THAÏLANDE GPO Curmin Concombre Alliance des technologies et des
recettes traditionnelles, utilisation
Smooth.E Divers extraits naturels des nanotechnologies pour
recomposer les formules « 100%
naturelles »
INDONESIE Mustika Ratu Benkoang ou Jicama Efficacité et pas d’effet « huileux »
Sariayu-Martha Tilaar Langsat, Plus d’éclat
PHILIPPINES Belo Extraits de fruits et plantes Effets plus rapides
CHINE Arché-JiaXue Poudre de perles, huile de Recettes multifonctions
théier,Aloe vera.
Bai Cao Ji (le recueil des multifonctions grâce aux
100 plantes) Medicine chinoise technologies modernes
Bio-Essence Thanakha Formule ancienne et technologie
Dabao Ginseng Effet médicament
Doctor Li Ginko, Ginseng, divers Effet médicament multifonctions
Keye Herbals Extraits divers, protéines de Rapidité d’action, hydratation
soie, Ye Du (fruit)
Meisasa framboisier, mûrier et divers Multifonctions grâce aux formules
modernes
Natural Beauty médecine chinoise multifonctions grâce aux
technologies modernes
Soffto Papaye action en profondeur
Tjoy Acerola, Ginseng et divers multifonctions

JAPON Albion Arbousier Les ingrédients naturels viennent


Amore Pacific Panax Ginseng enrichir des produits très
Ipsa Plante médicinales technologiques, apporter une

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François Bobrie: XV°EURO-ASIA RESEARCH CONFERENCES-PAU, 10-11 septembre 2009.
Kanebo Magnolia et divers extraits dimension naturelle à des formules
Kose Prunes et divers de synthèse afin d’en donner des
images plus concrètes et plus
émotionnelles, faisant référence à
des connaissances traditionnelles
partagées par les consommatrices

Les grandes marques locales, surtout en Inde et en Chine ont su faire la synthèse entre
une conception millénaire des cosmétiques qui ne pouvaient qu’être naturels et la
technologie moderne. Celle-ci est mobilisée dans leurs discours pour accroître
l’efficacité des produits naturels et non pour s’y opposer : elle est montrée dans les
récits packagings, sur le net et dans la communication comme une nouvelle
compétence pour extraire plus finement les actifs, les tester, les recomposer dans des
formules originales et nouvelles, en assurer la sécurité et en ajuster l’efficacité à un
grand nombre de problèmes. Ainsi les marques nationales s’emparent de plus en plus
de ce qui était à l’origine l’avantage concurrentiel principal des firmes globales,
occidentales et japonaises, le savoir scientifique et technique de la chimie de synthèse,
pour l’appliquer dans un domaine de traditions qui constituent toujours l’horizon de
référence des consommatrices, l’Ayurvéda et la médécine du Ben Cao, et leurs
dérivés. Cette recomposition narrative s’inscrit en
cohérence parfaite avec les conceptions du monde holistes des cultures indoues,
bouddhistes et chinoises classiques, dans lesquelles les oppositions doivent être des
dynamiques (des « voies », tao,dao,etc) d’harmonisation des choses et des êtres plutôt
que des sources de conflits conduisant à la suppression de l’un des termes de la
contradiction.(Fang,2003)

Au Japon, où les grands groupes sont en avance sur la conception de produits de


synthèse capable d’agir en profondeur sur la mélanogenèse, on prend de plus en plus
soin, par un mouvement inverse, d’y inclure des ingrédients naturels, voir certifiés
« bio », (Kosé), pour signifier que l’harmonie de l’utilisatrice avec le monde ne sera
pas rompue mais renforcée, et d’une façon plus immédiate et pratique, qu’une
application répétée ne crée pas de danger.

Les marques internationales tirent les leçons de cette meilleure compréhension des
marques locales de l’expression d’un rapport de synergie entre la naturalité et la
chimie industrielle. Cela les pousse à franchir désormais une nouvelle étape d’un
développement « glocal ». Ainsi dans le domaine du luxe Dior Snow met en avant les
lys et les lotus des neiges, Guerlain et Chanel les orchidées, Helena Rubinstein les
gentianes, Estée Lauder le gingembre, Clinique la prune japonaise, etc.. Sur le
segment grand public Garnier propose son ombrelle « Skin naturals » avec des extraits
de pur citron et de plantes, SKII(P&G) met en avant la phytothérapie, et en Inde
Fair&Lovely (HUL), crée une nouvelle gamme ayurvédique (Ayurvedic face pack), à
partir d’une recette de feuilles, de fruits et de fleurs.

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François Bobrie: XV°EURO-ASIA RESEARCH CONFERENCES-PAU, 10-11 septembre 2009.
De l’éclat du visage à la beauté comme harmonie de vie.
Si la plupart des marques internationales ont finalement compris avec quelques années
d’expériences des marchés et les apports des différentes études ethnologiques d’usages
et d’attitudes que l’éclaircissement n’était que le moyen, et non le bénéfice en lui-
même de l’éclat de la beauté du visage, il subsiste encore souvent un écart avec les
grandes marques nationales dans l’expression narrative de ce bénéfice ultime. Si les
unes et les autres, comme il a été vu précédemment, n’hésitent pas à montrer
l’instrumentalisation de la beauté dans la vie sociale et intime de l’utilisatrice, elles
différent sur la représentation de ce que cela signifie pour celle-ci. Une chose est de
montrer ce que peut obtenir et faire une femme belle, (embellie grâce à l’usage du
produit), une autre est d’expliquer en quoi consiste cette beauté corrigée par le geste
cosmétique et comment cette transformation positive de son image peut être imaginée
et ressentie par l’utilisatrice.

Les grandes marques nationales en Inde, en Chine et au Japon7 ne racontent pas la


beauté comme une identification à un modèle au physique parfait, comme le
rapprochement permis par l’usage du produit vers un « canon de beauté », tel que
figuré en général en Occident par un « top model » ou une actrice emblématique, dite
« aspirationnelle » dans le jargon des publicitaires, et dont les agences « globales »
imposent souvent la répétition du « look » normalisé de beauté européenne, anglo-
saxonne ou latine, d’un bout à l’autre de la planète

Prenant une autre voie, les marques nationales s’attachent plutôt à raconter comment
se construit la beauté en gestation dans l’acte de l’éclaircissement et comment,
subjectivement, l’utilisatrice va vivre en elle-même cette transformation progressive.
De ce fait les modèles des spots sont plutôt des femmes connues pour la qualité de leur
vie et de leur réalisation plutôt que pour une apparence exceptionnelle. Il s’agit de
s’identifier à un modèle féminin exemplaire pour le contrôle de sa beauté et non à une
image posée à l’extérieur de soi à laquelle il faudrait ressembler le plus exactement
possible. Cette conception du récit de la beauté dépend des cadres culturels évoqués
précédemment, tant pour l’Inde où elle est le dévoilement visible d’un dharma, que
pour la Chine et le Japon où elle manifeste une harmonie intérieure qui devient visible
à l’extérieur. (Yang, 2007), (Zhang, 2005). D’une certaine façon cette conception de la
beauté comme processus d’harmonisation permanent d’énergie est aussi le moyen
asiatique de lutter contre le vieillissement. De fait, les modèles des spots et des
annonces des marques japonaises dépassent souvent la quarantaine voire la
cinquantaine, ce qui reste inconcevable pour les marques occidentales. De l’Inde au
Japon la beauté n’est pas principalement une question d’âge mais de confiance en soi,
ce qui ont l’a vu supra, est l’un des thèmes récurrents des communications.

Comme pour le thème de la naturalité, les marques internationales relèvent le défi « de
la beauté qui vient de l’intérieur » développé par les marques nationales. Ce thème qui

7
Nous laisserons de côté la Thaïlande, les Philippines et L’Indonésie où les marques locales n’ont pas
un niveau suffisant de communication télévisuelle pour étayer une analyse comparative équilibrée
avec la communication des marques internationales

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François Bobrie: XV°EURO-ASIA RESEARCH CONFERENCES-PAU, 10-11 septembre 2009.
peut rencontrer par ailleurs celui, quasi mondial et réellement transculturel, de la
valorisation des femmes et de leur autonomie sociale, facilite l’évolution vers des
discours plus « glocaux » sur ce point. Ainsi Dior Snow (LVMH) évoque dans ses
spots télévisuels en Chine le pouvoir de « diffuser de l’intérieur vers l’extérieur tout
l’attrait de splendeurs qui constituent le charme » (cong nei zi wai san fa chu mi ren
guang cai), ou encore Olay (P&G) donne pour accroche à l’une de ses annonces en
Chine  «devenir belle, c’est surtout avoir confiance en soi », thème maintenant repris
de façon explicite ou implicite par la quasi-totalité des marques internationales de la
zone.

En résumé, tant sur le plan du rapport de la chimie à la nature que sur celui de la
détermination des fondements de la beauté féminine, les firmes internationales ont su
analyser et comprendre, au moins en partie, les stratégies de communication des
marques nationales qui étaient plus en phase avec les cadres culturels locaux. Elles
sont en train d’en tirer les conséquences pour optimiser leurs stratégies « glocal » et
préserver ainsi leurs avantages concurrentiels.

Au terme de cette analyse des stratégies et contenus des actions de communication sur
les marchés du « fairness » et du « whitening » on constate que les firmes
internationales de cosmétiques qui s’y sont engagées ont acquis progressivement des
connaissances et des compétences sur les déterminants ethnologiques et sociologiques
de la consommation de ces produits qui n’avaient pas d’équivalents sur leurs marchés
d’origine, à l’exception de quelques grandes entreprises japonaises. Leurs démarches
montrent que bien en amont du paradigme standard du « comportement du
consommateur » supposé être à la recherche « d’attributs » d’un produit, elles ont du
conceptualiser le sens que l’on pouvait donner à leur offre dans les pays visés. Ce n’est
qu’ensuite seulement qu’elles ont pu se poser la question des attributs matériels et
immatériels qui pouvaient être des porteurs et des signes de ce sens préalablement
défini. En somme la pratique d’un marketing interculturel les a conduit à résoudre
localement le « pourquoi de la consommation » (Ratneshwar, Mick, et Huffman,
2000) avant celui du « comment vendre plus », à privilégier les relations entre
l’identité culturelle des utilisatrices et les bénéfices potentiels des produits proposés
(Belk, 1988), avant de s’interroger sur la psychologie cognitive et le choix rationnel
des consommatrices visées. Comme Monsieur Jourdain la prose, le marketing
interculturel semble ainsi « naturellement » pratiquer les théories des cultures de
consommation en étudiant ce qui est sous-jacent aux expériences de consommation et
ce qui enclenche et infléchit l’intérêt d’un sujet socialisé dans une culture particulière
pour un objet marchand, au point de faire du premier un « consommateur » et du
second un « produit » (généralement porteur d’une « marque ») (Garabuau-Moussaoui
et Desjeux,2000),(Allen,2002). Enfin le marketing interculturel comme pratique
introduit également une problématique nouvelle, que la Théorie des Cultures de
Consommation (CCT) a encore peu explorée, qui concerne la mise en récit et en
discours de l’offre définie dans toutes ses déterminations linguistiques et sémiotiques,
(Usunier, 1992, 1998), (Usunier et Lee, 2009)

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Pour conclure, à partir de cet exemple du développement des marques internationales
de skincare en Asie il semble possible d’identifier et de formaliser un certain nombre
d’emprunts, mais aussi d’apports, du marketing interculturel à la CCT. Il s’agit ainsi
de contribuer à la poursuite d’une « fertilisation croisée » entre deux domaines de
recherches marketing qui parlent fréquemment l’un de l’autre mais se parlent encore
peu entre eux, malgré un partage fréquent de théories inductives sur les cadres de la
consommation.

CONCLUSION
L’apport premier du marketing interculturel, tel qu’il apparaît dans ses mises en œuvre
par les entreprises de l’échantillon de cette étude, tant internationales que nationales,
est de faire la démonstration de l’efficacité managériale du recours aux théories des
cultures de consommation, quelquefois considérées comme problématiques,
notamment aux Etats-Unis, (Arnould et Thompson,2005), par certains chercheurs
encore enfermés dans le paradigme atomistique et individualiste de la psychologie
cognitive appliquée à la microéconomie, et par extension au comportement du
consommateur considéré comme un agent plutôt qu’un acteur.

Pour concevoir leurs produits, construire leurs gammes, les expliquer aux utilisatrices
potentielles à travers la construction d’avantages concurrentiels défendables, en
communiquer des bénéfices hiérarchisés et cohérents par rapport à un vaste champ
d’attentes des consommatrices des segments visés dans différents pays, les entreprises
ont mobilisé des connaissances qui, sous l’étiquette générique de « marketing
interculturel » relèvent : (i) de l’anthropologie physique ; les mécanismes de la
mélanogénèse, (ii) de l’anthropologie sociale ; le contenu de sens de la valeur de
beauté (iii) de l’ethnologie ; les invariants et les variantes de la recherche d’éclat de la
peau du visage dans différentes cultures relevant des civilisations indienne, indo-
malaise, chinoise et japonaise (iv) de la sociologie ; la forme d’expression et les
significations sociales de ces variations culturelles de l’éclat du teint dans les sociétés
modernes marchandes de l’Inde, de l’Asie du Sud-est, de la Chine et du Japon (v) de la
psychologie du sujet ; l’importance de la beauté du visage dans la construction
identitaire de la consommatrice. Si les méthodes suivies de recueil de l’information
relèvent largement de l’observation ethnographique, et sociologique, telles qu’elles
sont maintenant bien connues (Mariampolski, 2006), les méthodologies construites
font bien écho à ce que Dominique Desjeux a dénommé « le découpage de la réalité en
échelles d’observation », macro-sociale, méso-sociale, micro-sociale, micro-
individuelle,(Desjeux, 1997, 2004) auxquelles il faudrait rajouter ici une échelle
« méta-sociale » pour l’aspect physiologique de la peau.

En revanche, tant dans la démarche du marketing interculturel opérationnel décrit


dans cette étude que dans les paradigmes de la Théorie des Cultures de
Consommation (CCT), tels qu’ils sont actuellement en train de s’élaborer des deux
côtés de l’atlantique, (Belk et Sherry, 2007), (Cova et Cova, 2007), (Badot et alii,
2009), on ne considère pas à sa juste importance la dimension langagière, linguistique
et sémiotique, de la mise en récit et des énonciations consécutives des solutions

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d’offres imaginées et finalement mises en marché. Pourtant, comme il a été montré
avec des exemples aussi simples que le choix des mots « fairness » et « whitening »,
avec toutes les « forces et faiblesses » que ces choix sémantiques génèrent pour les
acteurs, la réflexion devrait se déplacer du « pourquoi de la consommation » au
« comment dire le pourquoi de l’offre », car le marketing, pas plus que
l’anthropologie, n’échappe à la contrainte de la « médiation par les signes », par
laquelle, souligne Paul Ricœur, « est affirmée la condition originairement langagière
de toute expérience humaine »8.

Dans cette perspective épistémologique, cette communication peut se lire comme un


appel à la construction d’un cadre théorique plus complet pour « comprendre et
expliquer » la consommation marchande, quel que soit le lieu géographique des
transactions, certes comme un langage symbolique par lequel des membres d’une
société partageant une même culture peuvent exprimer une forme de vie
(Wittgenstein,1953 ), (Fontanille, 2008), mais aussi comme le résultat d’un dialogisme
engagé par les acteurs de l’offre, au sein d’une même sémiosphère, celle du Langage
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