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En août 1994, un peso mexicain valait 30 cents. Une année après, il ne valait
plus que 16 cents. Qu'est-ce qui explique cette chute massive de la valeur de la
monnaie mexicaine? Dans une large mesure, il s'agit du risque-pays.
Au début de l'année 1994, le Mexique avait le vent en poupe. La création
récente de l'Accord de libre échange Nord-Américain (ALENA), qui réduisait
les barrières commerciales entre les États-Unis, le Canada et le Mexique,
déclencha une vague généralisée de confiance dans l'avenir de l'économie
mexicaine. Des investisseurs du monde entier se pressaient pour prêter aux
pouvoirs publics et aux entreprises mexicains.
Certains événements politiques vinrent rapidement ébranler cet optimisme.
La contestation politique dans la région du Chiapas fit apparaître c o m m e
précaire la situation politique du Mexique. Peu après, Luis Donaldo Colosio,
candidat le mieux placé à l'élection à la présidence du Mexique, fut assassiné.
L'incertitude politique s'en trouva accrue, incitant de nombreux investisseurs à
demander une prime de risque plus élevée sur leurs actifs mexicains.
Au début, cette hausse de la prime de risque n'affecta pas la valeur d u peso,
car le Mexique avait un régime de taux de change fixes. Dans ce cadre, la banque
centrale accepte d'échanger la monnaie nationale (le peso) contre les monnaies
étrangères à un taux préétabli. Quand une hausse de la prime de risque pousse
à la baisse la valeur d e la monnaie nationale, la banque centrale continue à
acheter des pesos et à vendre les monnaies étrangères au taux préétabli. Celle
intervention automatique sur le marché des changes réduit l'offre de monnaie
(déplaçant vers la gauche LM*), chaque fois qu'il y a menace dé dépréciation de
cette monnaie.
En l'occurrence, les réserves en devises étrangères de la banque centrale du
Mexique se sont avérées trop réduites pour maintenir le taux de change fixe.
Lorsqu'elles se sont épuisées, à la fin de l'année 1994, le gouvernement mexicain
a annoncé une dévaluation d u peso, alors qu'il avait toujours affirmé qu'il
refuserait celle-ci. Cette annonce ébranla davantage encore la confiance des
investisseurs dans les responsables politiques mexicains, et ils se mirent à
craindre de nouvelles dévaluations.
En conséquence, ils cessèrent d'acheter des actifs mexicains. Ceci provoqua
une nouvelle hausse de la prime de risque, laquelle s'ajouta à la pression à la
hausse sur les taux d'intérêt et à la baisse sur le peso. Le marché des valeurs
mexicain s'effondra. Quand le gouvernement mexicain eut besoin de renouveler
la partie de sa dette qui venait à échéance, les investisseurs refusèrent de souscrire
au nouvel emprunt. L'État mexicain se retrouva en défaut de paiement. En
quelques mois seulement, le Mexique était passé du statut d'économie émergente
pleine de promesses, à celui d'économie à risque au bord de la banqueroute.
C'est alors q u e les É t a t s - U n i s e n t r è r e n t en scène. P o u r ce faire, le
gouvernement des États-Unis avait trois raisons : aider son voisin du Sud,
empêcher l'immigration illégale massive qu'aurait pu entraîner la banqueroute
mexicaine et empêcher la vague de pessimisme frappant les investisseurs en ce
qui concerne le Mexique de s'étendre à d'autres pays en voie de développement.
Le gouvernement américain prit la tête d ' u n effort international conjoint de
cautionnement de l'État mexicain. Il se porta notamment garant du rembour-
sement de la dette mexicaine, ce qui permit au gouvernement du Mexique de
refinancer sa dette venue à échéance. Ceci contribua à restaurer la confiance
dans l'économie mexicaine, et donc à atténuer la prime de risque qui frappait
ce pays.
Même si, dans le cas du Mexique, le pire a ainsi pu être évité, l'effondrement
financier du pays en 1 9 9 4 - 1995 n'en a pas rfioins constitué pour les Mexicains
une douloureuse expérience : n o n seulement le pesofe perdu beaucoup de sa
valeur, mais l'économie est durablement entrée en récession profonde. Heureu-
sement, à la fin des années 1990, le revenu agrégé a recommencé à croître,
permettant d'espérer une sortie de crise.
Il convient cependant de tirer de cet épisode une leçon claire, qui devrait être
r e t e n u e p o u r l'avenir : les m o d i f i c a t i o n s du risque-pays perçu, souvent
attribuables à l'instabilité politique, constituent un puissant déterminant des
taux d'intérêt et des taux de change dans les petites économies ouvertes.