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KHATIBI ABDELKEBIR - La Mémoire Tatouée.

Première partie : Crise identitaire

L'écriture de Khatibi mêle originalité du style et singularité du propos. Il s'agit d'une forme
d'écriture qui, à travers sa complexité, dévoile une vie qui a sombré dans des labyrinthes
identitaires sans bornes. « Qui suis-je ? » Cette question existentielle est d'une importance
majeure pour n'importe quel individu. Le projet Khatibien de son œuvre La mémoire tatouée est
une sorte de réponse à cette question. Dire qu'il est facile de répondre est un leurre car à
plusieurs reprises Khatibi montre via ses mots et son style d'écriture que la complexité de la
réponse frôle l'ubac et l'adret d'un sommet infranchissable. De la naissance, en passant par
l'enfance puis l'adolescence et enfin la jeunesse, Khatibi parcourt des chemins multiples pour se
construire, parfois le chemin devient impasse, surtout quand il traite l'incapacité de prendre une
position ferme vis-à-vis de son passé et à l'encontre de l'Occident. L'ironie est donc subterfuge
pour critiquer toute composante susceptible d'être partie intégrante de son identité.

Né le jour de l'Aïd El Kébir, Khatibi tire profit de cette naissance un peu particulière puisqu'elle a
impacté sa nomination dans un premier temps, et l'a influencé pour mener ce voyage sémiotique
dans les dédales et par le biais de l'écriture.

De plus, quand on parle de « déchirure nominale » on est essentiellement face à ce dilemme


khatibien qui fut à la base de son double. Ajoutons à cela le poids religieux de cette cérémonie
liée généralement à toutes les religions monothéistes, mais aussi le fléchissement devant ce rite
en débit de lui, en dépit de tout ce qui adviendrait après et qui a promis une partie dialogique vers
la fin qui s'intitule "Double contre double" Ce dialogue entre soi et soi est une réflexion sur cette
identité amalgamée, ambigüe, indéfinie. Le retour sur soi, le souvenir basé sur la culture mère
sont les deux facettes de la même pièce "tatouée" Cet écrit autobiographique romancé par une
réflexion sur l'identité se démarque des récits confessionnels et les classiques écritures de
mémoire par un « je » double. Les identités meurtrières d'Amine Maalouf trouvent leur
homologue dans l'identité double de Khatibi, sauf que chez l'écrivain de la mémoire tatouée, il ne
s'agit pas de meurtre identitaire à proprement parler mais d'une difficulté d'être une seule chose.
« Double contre double » tel est la conception autobiographique de Khatibi.

La religion islamique prend une part dans la formation de Khatibi. Fréquenter l'école coranique
en bas âge est un rituel chez les marocains, c'est là où l'on apprend la lecture, l'écriture et la
religion. On fait la connaissance de Dieu dès cet âge car l'identité de ce pays est ainsi construite.
Le Coran, la parole divine, inspire Khatibi à un point de parodier certains versets. « L'écrit explicite
» se réitère moult fois au cours du récit comme si l'auteur voulait rendre de ce qu'il écrit un texte
sacré. Cette parodie est une sorte d'ironie qui touche au creux des fondements de la religion, en
d'autres termes, rendre le texte sacré n'est pas l'objectif, mais plutôt tourner en dérision toute la
religion qui l'a quittée d'ailleurs en côtoyant l'alizé occidental.

L'Occident, lui aussi, n'a pas échappé à l'ironie mordante de Khatibi. Sans oublier que cet
Occident même a participé largement dans le forgement de son double. L'inconscience dégradée
vit ses prémices à l'école franco-marocaine. Critique implicite de l'autre qui a participé à
l'invention de ce double, à la déchirure nominale voire la déchirure culturelle.

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